Les inégalités territoriales dans le canton de Genève
Politique de cohésion sociale en milieu urbain
Rapport 2011
Centre d’Analyse Territoriale des Inégalités à Genève (CATI-GE)
Université de Genève
Novembre 2011 Avant propos
Le Centre d’Analyse Territoriale des Inégalités (CATI-GE) a été créé en septembre 2009 et a pour mission d’analyser de manière large et systématique les inégalités dans le canton de Genève ainsi que leur évolution. Cette plus grande transparence devra permettre de mieux coordonner les politiques destinées à réduire les inégalités et faciliter le choix de stratégies d’action adaptées au contexte socio-économique particulier du canton. Il regroupe différentes instances publiques qui collaborent pour la production et la fourniture des données, les enquêtes de terrain ainsi que la publication de rapports à échéances régulières.
Le CATI-GE, piloté à partir de l'Université de Genève, se compose des instances suivantes :
• Le comité de pilotage regroupe des représentants du Conseil d’État, de l’Université, de l’OCSTAT, du SRED et du DCTI. Il définit les objectifs stratégiques et le budget du centre;
• Le groupe opérationnel inclut des représentants du Laboratoire d’Economie Appliquée, de l’OCSTAT, du SRED, du département de la sécurité, de la police et de l'environnement (DSPE), de la Haute école de Gestion, des HUG de l’office du logement et de la HETS. Sa tâche consiste à rassembler l’information existante, analyser des statistiques et réaliser les études sur les domaines proposés;
• Le groupe d’accompagnement inclut des membres de différentes collectivités publiques (administrations, communes, personnes du terrain). Il a une fonction essentiellement consultative, de regard critique et d’aide à la réflexion.
Les données proviennent des différents partenaires impliqués dans l'analyse des inégalités territoriales. La rédaction du rapport à été réalisée par l'OUE (P. Kempeneers et G. Ferro-Luzzi) et a fait l’objet d’une relecture attentive de Mme O. Le Roy-Zen Ruffinen (SRED), M. R. Rietschin (OCSTAT) et M. D. Froidevaux (DSPE). Le CATI-GE reste seul entièrement responsable d’éventuelles erreurs ou omissions du présent document.
Le CATI-GE tient à remercier Messieurs José Juan et Hervé Montfort à l’OCSTAT, M. Bruno Beurret au DCTI, le Docteur Bernard Ciucchi de la Clinique dentaire de la jeunesse et André Faggioni au DSPE.
Giovanni Ferro-Luzzi Chef de Projet du CATI-GE et Directeur de l’Observatoire Universitaire de l’Emploi
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 2 sur 79 Executive Summary
Les communes de Vernier, Onex, Chêne-Bourg, Carouge, Meyrin, Versoix, Lancy ou encore Thônex sont les communes les plus précarisées du canton dans la mesure où elles cumulent des facteurs de précarité sur l’ensemble des six indicateurs de base retenus. La ville de Genève, très légèrement en retrait, cumule les inégalités sur 5 indicateurs et le Grand-Saconnex sur 4 indicateurs.
Ces communes, qui constituent essentiellement le centre-ville et sa couronne suburbaine, sont caractérisées par un revenu annuel brut médian particulièrement faible, un taux d'effectifs scolarisés d’origine modeste important, une concentration de bas revenus et de chômeurs élevée et un pourcentage important de bénéficiaires de subsides sociaux et d’allocations de logement.
C’est donc prioritairement dans ces communes, où la population résidente est, à l’exception de Chêne-Bourg, la plus importante et la plus dense, que la politique de cohésion sociale en milieu urbain devrait déployer prioritairement ses actions.
L’analyse également menée à l’échelle des 475 sous-secteurs statistiques du canton de Genève permet de cerner avec plus de précision les périmètres d'intervention ou s’expriment les inégalités territoriales et d’orienter plus finement les actions et les mesures de la politique de cohésion sociale en milieu urbain telles qu’elles sont précisées dans le Projet de Loi (PL) qui l’officialise.
Au total, 71 sous-secteurs sont directement concernés par la politique de cohésion sociale en milieu urbain. Sur ces 71 sous-secteurs, 25 (35%) cumulent six facteurs de précarité, 32 (45%) en cumulent cinq et 14 (20%) en cumulent quatre.
Les 25 sous-secteurs qui cumulent les six facteurs de précarité sont Cité-Nouvelle (6'913 hab.) à Onex, Les Avanchets (6'042 hab.), Le Lignon (5'837 hab.), Libellules (2'427 hab.), Rte de Peney- Crotte-au-Loup (1'800 hab.), Châtelaine-SIMONET (1'097 hab.) et Champs-Prévost (592 hab.) à Vernier, Deux-Communes (2'639 hab.) à Thônex, Crève-Cœur (1'528 hab.) et Versoix-Bourg (1'332 hab.) à Versoix, Petit-Bel-Air (1'129 hab.) à Chêne-Bourg, La Praille-BAYLON (629 hab.) et Fontenette- stade (455 hab.) à Carouge, La Dôle (4'177 hab.), Parc des Acacias (4'176 hab.), Saint-François (3'620 hab.), Les Savoises (2'599 hab.), Village-Suisse (2'259 hab.), Valais (2'155 hab.), DANCET (2'044 hab.), Concorde (1'865 hab.), Mont-Blanc (1'681 hab.), La Roseraie (1'289 hab.), Quai du Rhône (875 hab.) et Les Vernets (504 hab.) en ville de Genève.
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 3 sur 79 Sommaire
Avant propos ...... 2 Executive Summary ...... 3 Sommaire ...... 4 Introduction ...... 5 1. Perspectives d’analyse et productions ...... 8 2. Thématiques analysées et indicateurs retenus ...... 9 3. Concept général des inégalités territoriales ...... 10 4. Contexte institutionnel ...... 10 5. Structure et contenu des indicateurs ...... 11 6. Règle de sélection des communes éligibles à la politique de cohésion sociale ...... 12 7. Inégalités territoriales et contexte genevois ...... 14 7.1. Les indicateurs de base comme critères de sélection ...... 14 7.2. Communes éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain ...... 34 7.3. Sous-secteurs concernés par la politique de cohésion sociale en milieu urbain ...... 41 7.4. Indicateurs complémentaires ...... 47 8. Orientations futures ...... 57 8.1. Enrichissement des indicateurs ...... 57 8.2. Prise en compte de la dimension temporelle ...... 57 8.3. Prise en compte de la dimension causale ...... 57 8.4. Ancrage dans la réalité du terrain ...... 57 Conclusions ...... 59 ANNEXE 1 ...... 64 ANNEXE 2 ...... 68 ANNEXE 3 ...... 70 ANNEXE 4 ...... 74 Liste des cartes ...... 78 Liste des graphiques ...... 78 Liste des tableaux ...... 79
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 4 sur 79 Introduction
Sous l’impulsion des Conseillers d’État Charles Beer et David Hiler, un Centre d’Analyse Territoriale des Inégalités à Genève (ci-après CATI-GE) a été mis sur pied en septembre 2009. Le CATI-GE a pour mission d’informer le Conseil d’État et les institutions concernées par la problématique des inégalités dans le canton de Genève. Cette plus grande transparence devra permettre de mieux coordonner les politiques destinées à réduire les inégalités et faciliter le choix de stratégies d’action adaptées au contexte socio-économique particulier du canton. Dans cette perspective, le CATI-GE doit être considéré comme un véritable outil d’aide à la décision.
La capacité des autorités politiques genevoises à réduire les inégalités socio-économiques qui existent dans le canton dépend crucialement de sa compréhension et des évolutions qui s’y profilent. Cette compréhension passe par le travail sur le terrain, mais aussi par un meilleur croisement des statistiques produites dans le canton de Genève.
C’est la raison pour laquelle le CATI-GE a pour mission de rassembler, produire, rendre transparente et diffuser de manière systématique la connaissance concernant les inégalités dans le canton de Genève. En particulier, le CATI-GE devra élaborer une carte sociale du canton, avec des indicateurs qui permettront de cerner au mieux l’ampleur des inégalités et d’identifier les poches d’exclusion du canton.
La première thématique qui a été développée dans le cadre du CATI-GE et qui a fait l’objet d’un rapport final en mars 2010 1 était axée sur l’analyse et la mise en évidence des inégalités cantonales qui existent dans le secteur de l’immobilier et du logement. En effet, de par son importance dans les dépenses des ménages, le rôle crucial que jouent les autorités du Canton et des communes dans ce domaine, et la crise chronique sur ce marché dans le canton, il s’avérait essentiel d’établir un état des lieux permettant de se faire une vision claire des inégalités qui s’y manifestent et des possibilités d’y remédier.
Cette première thématique étant vaste, un premier volet s’est attaché tout d’abord à décrire et à caractériser les inégalités qui subsistent au niveau de la répartition sur le territoire genevois des habitations destinées, d’une part, aux ménages à revenus très modestes et qui sont sous le contrôle permanent de l’Etat (HBM - habitations bon marché) et, d’autre part, aux ménages à revenus modestes ou l’aide y est accordée pour 20, voire 24 ans (HLM – habitations à loyer modéré). Cette première description a permis d’identifier les endroits où la concentration particulièrement importante de ce type de logements constituait, à notre sens, un facteur de risque important de développement de poches d’exclusion dans le canton de Genève. Les principaux résultats du rapport final de mars 2010 sont brièvement rappelés ci-dessous :
• Dans le canton de Genève, ce sont les communes de la couronne suburbaine de la ville de Genève (le Grand-Saconnex, Vernier, Onex, Lancy, Carouge et, un peu plus loin, Plan-les- Ouates) et quelques communes situées à la frontière du canton (Thônex au sud-est, Dardagny à l’extrême ouest et Versoix au nord) qui, en valeur absolue et en pourcentage, concentrent le plus de logements situés dans des HBM et/ou des HLM ; • Dans ces communes, huit sous-secteurs se distinguent particulièrement par un nombre élevé de logements situés dans des HBM et des HLM mais également par une sur-
1 Les inégalités territoriales en matière de logement à Genève, CATI-GE, rapport final, mars 2010
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 5 sur 79 représentation de leur nombre dans le parc immobilier du sous-secteur par rapport à la moyenne cantonale ; • Avec 3’906 logements, ces huit sous-secteurs (Les Charmilles, Crève-Cœur, Libellules, Les Mouilles – Collège De-Saussure, Thônex-Église, Le Pommier, Fontenette-GEVRIL et Cité- Nouvelle) concentrent près de 25% de l’ensemble des logements situés dans des HBM et HLM du canton de Genève. Dans ces sous-secteurs, la part des logements HBM et HLM est de cinq à pratiquement dix fois plus élevée que la moyenne cantonale ; • Dans les huit sous-secteurs identifiés, la concentration de logements de type HBM/HLM coïncide généralement avec une situation de plus grande précarité relative des individus qui composent le sous-secteur.
Bien que complémentaire, le rapport final 2011 proposé ci-dessous va beaucoup plus loin dans l’analyse des inégalités que celui de 2010 dans la mesure où il dépasse largement le cadre strict de la thématique des logements et envisage les inégalités territoriales dans une perspective beaucoup plus large liée au revenu, à l’emploi, à l’éducation, à la protection sociale, à la santé, à l’environnement mais également au logement.
Par ailleurs, le rapport 2011 propose également une règle simple de détection/sélection des zones géographiques potentiellement éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain permettant d’identifier avec précision les communes et les sous-secteurs dans lesquels la politique de cohésion sociale en milieu urbain devrait se développer prioritairement.
Le rapport 2011 présenté ci-dessous est structuré de la manière suivante. Après une brève description des perspectives d’analyse et productions du CATI-GE (chapitre 1), des thématiques analysées et indicateurs retenus (chapitre 2), du concept général des inégalités territoriales (chapitre 3) et du contexte institutionnel (Chapitre 4) dans lequel se déploie l’action du CATI-GE;
• Le chapitre 5 présente la structure et contenu des indicateurs de base (IB) et complémentaires (IC) qui sont actuellement utilisés pour la mesure des inégalités et la sélection des communes ou sous-secteurs éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain ;
• S’appuyant sur les indicateurs de base développés dans le chapitre 5, le chapitre 6 propose une règle de sélection des communes éligibles aux actions de la politique de cohésion sociale en milieu urbain ;
• Le chapitre 7 présente, en regard de chacun des indicateurs retenus et sous forme de cartes et statistiques, un état des lieux commenté des inégalités territoriales qui s’exercent au niveau des communes et des sous-secteurs du canton de Genève ;
o La section 7.2 identifie plus spécifiquement les communes éligibles aux actions de la politique de cohésion sociale, en regard des indicateurs de base retenus et de la règle de sélection choisie ;
o La section 7.3. met en évidence les sous-secteurs qui sont directement concernés par la politique de cohésion sociale en milieu urbain et identifie les périmètres de précarité dans le canton de Genève;
o La section 7.4 analyse l'ampleur des corrélations croisées qui existent entre les 6 indicateurs de base retenus pour l'éligibilité des communes ;
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 6 sur 79 o La section 7.5 complète l’analyse à travers la mise en évidence des inégalités communales ou sous-sectorielles captées à partir de huit indicateurs complémentaires.
• Dans le chapitre 8 enfin, nous précisons les travaux qui sont en cours de réalisation et les nouvelles options d’analyse qui sont ou seront testées à l’avenir mais qui ne sont pas encore développés dans ce rapport final car devant être validés ou vérifiés auprès des fournisseurs de données et des principaux partenaires du CATI-GE. A cet égard, le rapport final 2011 doit être considéré comme une étape dans l’analyse des inégalités territoriales qui sera au cours du temps complétée par d’autres analyses et confrontées aux réalités du terrain.
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 7 sur 79 1. Perspectives d’analyse et productions
Les démarches entreprises par le CATI-GE pour identifier les inégalités territoriales dans le canton de Genève sont articulées autour de trois approches illustrées dans le Graphique 1.
• L’approche statique a pour objectif d’identifier, à un moment donné, les inégalités qui existent entre les différentes entités géographiques retenues (la commune, le secteur ou le sous-secteur) en s’appuyant sur un certain nombre d’indicateurs spécifiques que nous décrivons dans le cinquième chapitre ;
• L’approche dynamique permettra d’identifier l’évolution des inégalités qui existent entre les différentes entités géographiques retenues (la commune, le secteur ou le sous-secteur) au niveau de chacun des indicateurs spécifiques retenus ;
• L’approche causale, plus technique, consistera à mettre en relation les différents indicateurs spécifiques retenus afin de dégager des tendances sur l’origine des inégalités.
Une cartographie ainsi qu'un tableau de bord des inégalités à l’échelon communal et sous- sectoriel seront proposés dans le cadre des activités du CATI-GE et mis régulièrement à jour au fur et à mesure de l’avancement des travaux.
Graphique 1 – Perspectives d’analyse et de production
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 8 sur 79 2. Thématiques analysées et indicateurs retenus
La cartographie et le tableau de bord des inégalités territoriales dans le canton de Genève qui sont réalisés par le CATI-GE incorporent un grand nombre de thématiques qui décrivent le plus largement possible les conditions sociales, économiques, sanitaires et environnementales des populations qui résident dans le canton de Genève. Le Graphique 2 précise les thématiques qui sont abordées dans le cadre des inégalités territoriales.
Pour chacune des thématiques retenues, un certain nombre d’indicateurs spécifiques ont été construits pour mesurer le degré d’inégalité qui prévaut entre les régions analysées (communes ou sous-secteurs). Les premiers indicateurs construits – de base - sont assez standards et représentent des problématiques qui sont largement relayées par le politique et les médias et qui sont généralement considérées comme préoccupantes par la population (baromètre des préoccupations du Crédit Suisse).
Ces indicateurs ne constituent cependant qu’une première étape dans l’analyse des inégalités dans la mesure où ils sont susceptibles d’être complétés par d’autres indicateurs couvrant de nouvelles thématiques ou mieux à même de caractériser les inégalités qui se manifestent dans le canton de Genève.
Graphique 2 - Thématiques analysées
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 9 sur 79 3. Concept général des inégalités territoriales
La notion d’inégalités territoriales fait référence à la situation relative d’une entité géographique, que ce soit un sous-secteur statistique, un secteur ou encore une commune, par rapport à la situation qui prévaut dans une autre entité géographique de même nature et ce, dans des thématiques aussi différentes que l’éducation, le logement, l’emploi ou le chômage, les revenus, la protection sociale, la santé, la sécurité et la petite ou moyenne criminalité, la mobilité ou encore l’environnement et la qualité de vie.
Pour un indicateur particulier, par exemple le taux de chômage, on parlera d’absence d’inégalités territoriales si la valeur de cet indicateur est identique pour tous les sous-secteurs statistiques ou pour toutes les communes. Une absence d’inégalités territoriales suppose donc une homogénéité des situations sur l’ensemble du territoire, quel que soit le découpage géographique retenu. Dans notre exemple, une telle situation impliquerait un taux de chômage identique dans les 475 sous-secteurs statistiques, les 45 communes du canton et égal à celui du canton de Genève établi à 6.8% en octobre 2010 2.
A contrario , on parlera d’inégalités territoriales pour un indicateur particulier si la valeur prise par l’indicateur est différente entre les sous-secteurs ou les communes du canton de Genève. La présence d’inégalités territoriales suppose donc au départ une certaine hétérogénéité des situations sur l’ensemble du territoire par rapport à un indicateur spécifique.
4. Contexte institutionnel
« La politique de cohésion sociale en milieu urbain a pour but de promouvoir la cohésion sociale en garantissant à la population un cadre de vie social, économique et environnemental de qualité sur l'ensemble du territoire cantonal »3.
Le contenu de l’Article 1 du projet de Loi sur la politique de cohésion sociale en milieu urbain présenté ci-dessus suppose de répondre implicitement à deux questions complémentaires:
1. Où doit se déployer la politique de cohésion sociale en milieu urbain ? Pour répondre à cette première question, nous nous appuierons successivement sur :
° La sélection limitée d’ « indicateurs de base » servant de critères à l’éligibilité des communes aux actions de la politique de cohésion sociale en milieu urbain;
° La définition d’une « règle de sélection » qui, s’appuyant sur les indicateurs de base, permette d’identifier les communes qui sont, en raison des inégalités qui les caractérisent, éligibles aux actions de la politique de cohésion sociale en milieu urbain. Cette règle de sélection est également utilisée pour identifier les sous- secteurs qui, au sein des communes éligibles, sont directement concernés par la politique de cohésion sociale.
2 La situation sur le marché du travail en octobre 2010, Département fédéral de l’économie DFE, Secrétariat d’Etat à l’économie SECO. 3 Source : - Art.1 du projet de Loi sur la politique de cohésion sociale en milieu urbain.
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 10 sur 79 2. Comment doit se déployer la politique de cohésion sociale en milieu urbain et quelles sont les actions à entreprendre pour réduire les inégalités ? Pour répondre à cette deuxième question, nous nous appuierons sur :
° La construction d’« indicateurs complémentaires » pour mettre en évidence, de la manière la plus exhaustive possible, l’ampleur mais surtout la nature des inégalités territoriales;
° L’utilisation de ces indicateurs pour orienter la politique de cohésion sociale en milieu urbain et définir les actions à entreprendre (choix des axes d’intervention, entités géographiques concernées, …)
La structure des indicateurs et la règle de sélection présentées dans les sections 5 et 6 s’appuient sur cette distinction.
5. Structure et contenu des indicateurs
La mesure des inégalités territoriales et la hiérarchisation des entités géographiques dans le canton de Genève est réalisée pour un ensemble d’indicateurs particuliers ayant traits aux thématiques liées à la population, au logement, au revenu, à l’emploi et au chômage, à la protection sociale, à la sécurité, à la santé, à la mobilité et au cadre de vie.
Les indicateurs actuellement construits au niveau des 45 communes et des 475 sous-secteurs statistiques du canton de Genève pour analyser les inégalités territoriales qui prévalent dans le canton de Genève sont rangés en deux catégories distinctes, à savoir :
• Les indicateurs de base (IB): En nombre limité, ces indicateurs sont construits pour :
o Caractériser les inégalités territoriales dans le canton de Genève selon un nombre restreint de thématiques, mais surtout pour;
o Identifier et sélectionner, selon une règle précise4, les communes qui sont éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain ;
• Les indicateurs complémentaires (IC): En plus grand nombre, ces indicateurs d’inégalité sont destinés :
o À compléter le plus largement possible les indicateurs de base (IB) dans les domaines non couverts par ceux-ci afin d’élargir au maximum le champ d’analyse des inégalités. Ils n’interviennent en revanche pas comme critères dans l’identification et la sélection des communes et sous-secteurs potentiellement éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain.
Les indicateurs de base (IB) actuellement retenus sont au nombre de six et couvrent des thématiques liées au revenu, à l’éducation, au chômage, à l’aide sociale et au logement. La nature et le contenu de ces six indicateurs de base sont décrits ci-dessous :
4 La règle de sélection des communes et/ou sous-secteurs éligibles à la politique urbaine de cohésion sociale est décrite au point 6.
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 11 sur 79 • IB1 : Le revenu annuel brut médian des contribuables imposés au barème ordinaire - 2006 (Revenu) ; • IB2 : Le pourcentage d’effectifs scolarisés d’origine modeste par rapport aux effectifs scolarisés totaux - 2009 (Education) ; • IB3 : La part des contribuables à bas revenu – 2006 (Revenu) ; • IB4 : Le pourcentage de chômeurs inscrits en proportion de la population des 15/64 ans – 2008 (Emploi/Chômage) ; • IB5 : Le pourcentage de bénéficiaires de subsides sociaux en proportion de la population résidente – 2007 (Protection sociale) ; • IB6 : Nombre de bénéficiaires d’allocations de logement – 2008 (Logement)
Les indicateurs complémentaires (IC) sont pour l’instant au nombre de huit et couvrent des thématiques liées à la structure de la population, le logement, la sécurité ou encore la santé. La nature et le contenu de ces sept indicateurs complémentaires sont décrits ci-dessous :
• IC1 : La densité de la population résidente à l’hectare – 2010 (Population) • IC2 : Le rapport de dépendance des jeunes – 2010 (Population) • IC3 : Le rapport de dépendance des personnes âgées – 2010 (Population) • IC4 : Le nombre de logements HBM – 2010 (Logement) • IC5 : Le quotient de localisation des logements HBM – 2010 (Logement) • IC6 : Le nombre total de réquisitions de police à l’hectare, 2009 (Sécurité) • IC7 : Surcharge pondérale ou obésité (Santé) • IC8 : Prévalence de la carie à Genève, par écoles primaires (Santé)
D’autres indicateurs liés aux thématiques couvertes ci-dessus mais également liés à la mobilité et à la qualité de la vie seront ajoutés au fur et à mesure de la disponibilité des données.
6. Règle de sélection des communes éligibles à la politique de cohésion sociale
Comme nous l’avons mentionné ci-avant, les indicateurs de base (IB), au-delà des inégalités qu’ils caractérisent, contribuent à l’identification et à la sélection des communes qui sont éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain. Ils contribuent également à l'identification, au sein des communes éligibles, des sous-secteurs directement concernés par la politique de cohésion sociale.
‹ Une commune est éligible aux actions de la politique de cohésion sociale en milieu urbain si et seulement si, pour au moins 4 indicateurs de base sur les 6 retenus, la commune se situe dans le premier quartile (P25) de la distribution des communes.
‹ Un sous-secteur est directement concerné par la politique de cohésion sociale en milieu urbain si et seulement si, il appartient à une commune éligible et, pour au moins 4 indicateurs de base sur les 6 retenus, il se situe dans le premier quartile (P25) de la distribution des sous-secteurs.
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 12 sur 79 D’un point de vue opérationnel, cette approche revient à identifier, pour chaque indicateur de base, le quart des communes les plus précarisées du canton de Genève et de ne retenir comme potentiellement éligibles, les communes qui cumulent ces inégalités sur au moins 4 des 6 indicateurs de base (IB). Cette démarche est illustrée dans la partie 7 à travers l’analyse des inégalités territoriales.
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 13 sur 79 7. Inégalités territoriales et contexte genevois
Dans la section 7.1 sont présentés les 6 indicateurs de base (IB) retenus au niveau des 45 communes et des 475 sous-secteurs du canton de Genève. Dans la section 7.2., nous mettons en évidence les communes qui, selon la règle de sélection définie au chapitre 6, sont éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain. Dans la section 7.3., nous présentons la liste des sous- secteurs qui sont directement concernés par la politique de cohésion sociale et finalement, dans la section 7.4., nous présentons les différents indicateurs complémentaires construits au niveau des communes et sous-secteurs.
7.1. Les indicateurs de base comme critères de sélection
Pour chacun des indicateurs de base retenus, une première carte décrit le positionnement relatif des 45 communes du canton de Genève. Une deuxième carte, à l’échelle des sous-secteurs, permet d’appréhender plus finement les inégalités. Enfin, deux tableaux chiffrés complètent la cartographie en reprenant les 20 communes et sous-secteurs les plus précarisées du canton d’un point de vue de l’indicateur retenu.
Dans les cartographies réalisées, la couleur associée à chaque commune (respectivement sous- secteur) désigne la classe d’appartenance de la commune (respectivement sous-secteur) dont la détermination est basée sur la méthode des quantiles.
Encart technique 1 : Construction des classes d’appartenance selon la méthode des quantiles :
1. On ordonne l’ensemble des communes (respectivement des sous sous-secteurs) en ordre croissant/décroissant 5 de la valeur prise par l’indicateur retenu ; 2. On scinde la population des communes (respectivement des sous-secteurs) en quatre classes de tailles identiques (4 classes de 11 communes ou de 120 sous-secteurs); 3. On identifie les trois valeurs critiques P25, P50 et P75 prisent par l’indicateur retenu qui correspondent à la scission réalisée; 4. Le P25 ou premier quartile est la valeur prise par l’indicateur retenu qui sépare le quart des communes/sous-secteurs les plus précarisées des communes/sous-secteurs restants.
5 Pour que la règle de sélection du premier quartile définie au point 6 puisse s'appliquer, les communes (sous-secteurs) sont ici ordonnées en ordre croissant des valeurs prises par l'indicateur IB1 mais en ordre décroissant des valeurs prises par les indicateurs IB2 à IB6.
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 14 sur 79 7.1.1. IB1 : Revenu annuel brut médian des contribuables imposés au barème ordinaire
Sur les Cartes 1 6 et 2 est reproduit, pour l’année 2006, le revenu annuel brut médian des contribuables imposés au barème ordinaire (IBO) 7 par commune (carte 1) et par sous-secteur statistique (carte 2).
Sur la carte 1 sont identifiées, en jaune, les 12 communes dans lesquelles les revenus annuels bruts médians, compris entre 60'582 CHF et 74'268 CHF (1 er quartile de la distribution), sont, en 2006, les plus faibles du canton. Cette catégorie reprend donc les communes qui, d’un point de vue du revenu annuel brut médian, sont relativement les plus défavorisées du canton. Dans cette catégorie, on retrouve la Ville de Genève, les communes suburbaines du Grand-Saconnex, de Meyrin, de Vernier, d’Onex, de Lancy, de Carouge et de Chêne-Bougerie ainsi que les communes périphériques de Versoix, Chêne-Bourg et Thônex. La situation de la commune de Presinge constitue un cas à part dans la mesure où la faiblesse observée du revenu annuel brut médian est surtout le résultat, comme le montre le Tableau 1, de la présence simultanée d’un EMS et d’une population résidente particulièrement faible (675 hab.).
A l’autre bout de la distribution sont identifiées, en brun foncé, les 11 communes dans lesquelles les revenus annuels bruts médians, compris entre 91'636 CHF (4 ième quartile de la distribution) et 111'605 CHF, sont, en 2006, les plus élevés du canton. Dans cette catégorie, on retrouve des communes telles que Cologny, Vandoeuvres, Collonge-Bellerive, Corsier, Anières ou encore Avusy, Laconnex, Cartigny, Aire-la-Ville ou encore Collex-Bossy. Les autres communes se situent entre ces deux situations extrêmes.
La carte 2, qui présente également le revenu annuel brut médian des contribuables IBO mais au niveau des 475 sous-secteurs statistiques du canton de Genève, appelle trois commentaires :
1. La variance des revenus annuels médians bruts observée au niveau des sous-secteurs est plus grande que celle observée au niveau des communes et traduit une situation ou les disparités de revenu sont encore plus importantes lorsqu’elles sont mesurées à un niveau géographique plus fin. En ce sens, l’analyse réalisée au niveau des sous-secteurs apporte un complément d’informations par rapport à celle réalisée au niveau des communes et permet de cibler avec plus de précision les sous-secteurs les plus précarisés ;
2. Les sous-secteurs identifiés comme ayant les revenus annuels médians bruts les plus faibles (1 er quartile de la distribution) sont en grande majorité situés dans des communes du 1 er quartile de la distribution ;
3. Toutes les communes identifiées comme ayant les revenus annuels médians bruts les plus faibles (1 er quartile de la distribution) ne sont pas exclusivement composées de sous- secteurs situés dans le 1 er quartile de la distribution.
6 Le nombre mentionné en regard de la source de chacune des cartes est un code organisationnel interne au CATI-GE mais n'a aucune signification économique. 7 Source : Les données par commune et par sous-secteur proviennent respectivement des fichiers T_20_02_3_21.xls et C20_02_03.xls de l’OCSTAT. La notion de contribuables IBO utilisée pour la mesure du revenu annuel brut médian est celle utilisée par l'OCSTAT et précisée à l'adresse: http://www.ge.ch/statistique/domaines/20/20_02/methodologie.asp#1 .
Les inégalités territoriales dans le canton de Genève – Octobre 2011 -CATI-GE Page 15 sur 79 Ces trois commentaires, que nous ne mentionnerons plus dans la suite du rapport, ne sont pas spécifiques à l'indicateur présenté ci-dessus mais s'appliquent plus largement à l'ensemble des indicateurs présentés dans ce rapport 8.
Dans les Tableaux 1 et 2, nous avons reproduit, en ordre croissant, le revenu annuel médian brut des 20 communes et sous-secteurs qui, en 2006, étaient situés dans le bas de la distribution et qui, d'un point de vue de cet indicateur, peuvent être considérés comme les plus précarisés du canton.
Des nuances doivent cependant être apportées à ce classement pour qu'il soit réellement représentatif d'une précarité à l'échelon communal et/ou du sous-secteur. Ainsi, le faible revenu annuel brut médian de la commune de Presinge ne reflète pas une forme de précarisation particulière mais est essentiellement lié à la présence d’un EMS sur son territoire combinée à une population résidente (675 hab.) particulièrement faible. C'est donc la configuration spécifique de la commune qui la fait apparaître dans ce classement. De la même manière, le faible revenu annuel brut médian du sous-secteur d’ Ecogia dans la commune de Versoix est essentiellement lié à la présence d'un foyer pour handicapés sur son territoire combinés à une population résidente (64 hab.) très faible et celui de Chèvres dans la commune de Bernex est essentiellement lié à la présence d'une institution active dans l’intégration sociale et économique de personnes présentant une déficience intellectuelle .
La mise en perspective des données avec les réalités du terrain est donc une étape essentielle à la détection des entités géographiques qui, d'un point de vue des différents indicateurs retenus, sont réellement précarisées et donc éligibles à la politique de cohésion sociale en milieu urbain. Cette mise en perspective ne peut être réalisée qu'avec le concours des différentes instances communales et locales en mesure d'interpréter certaines données à la lumière des spécificités locales. Il est donc souhaitable que ces informations de terrain soient relayées le plus rapidement possible vers le CATI- GE.
Encart technique 2: Calcul de l’indicateur cantonal pondéré (ICP)
En dessous des Cartes 1 et 2 est mentionné un indicateur cantonal "pondéré" (ICP). Cet indicateur est calculé selon la formule: