Transferts Sur Autocar Des Services Ferroviaires
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
infos 271 janvier-fév. 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports Un changement de cap dangereux Transferts sur autocar En 2017, Emmanuel Macron avait pris des engagements précis : une réduction des émis- des services ferroviaires : sions de CO2 du secteur des transports ; un ali- gnement du prix du diesel sur celui de l’essence ; le retour des voyageurs à la voiture une réorientation de l’investissement vers les transports de la vie quotidienne ; enfin une perspective d’évolution de la taxe carbone sur la durée du quinquennat permettant de finan- cer l’ensemble des infrastructures. La FNAUT avait approuvé ces nouvelles orientations. Les Assises de la mobilité n’ont permis de clarifier ni les normes de pollution routière, ni les responsabilités des constructeurs. Elles Anjoubus en gare de Châteaubriant (MD) de Châteaubriant en gare Anjoubus ont privilégié les encouragements à la voiture dite propre plutôt qu’à la mobilité propre : les crédits nécessaires pour dévelop- per le report sur les modes respectueux de Une expertise commandée par la FNAUT et réalisée par le cabinet Trans- l’environnement ont été sous-estimés. Missions confirme, à partir de l’analyse de 12 cas particuliers, un phéno- Les avancées partielles mais indiscutables mène souvent observé dans le passé : en cas de transfert d’un service fer- du Pacte ferroviaire et les promesses d’une roviaire sur autocar, de nombreux usagers reprennent leur voiture, ou ne se Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), à dé- déplacent plus. Les effets du passage du mode ferroviaire au mode routier et battre et enrichir, sont effacées par l’annula- des variations de la fréquence des services et de la durée des trajets ont été tion des mesures fiscales sur les carburants (alors même que le prix du pétrole vient de dissociés. La perte de clientèle du transport public liée au seul changement baisser de 35%) et par l’accroissement de la de mode a alors été quantifiée : le « malus car » moyen est de 37 %. Le cas dépendance automobile : les engagements inverse des réouvertures de lignes ferroviaires a également été étudié : le de la France lors de la COP 21 sont oubliés. « bonus train » moyen est de 65 %. Les efforts récents pour contenir la hausse des péages autoroutiers - un signal fort don- né aux automobilistes, dans la continuité des Carton rouge gouvernements précédents - confirment la priorité donnée à la voiture au détriment des Dans le numéro 20 (novembre 2018) de Il cite le soutien que lui apporte un labora- transports publics. Au total c’est un recul de Mobilités Magazine, Patrice Vergriete, maire toire de l’université de Perpignan, mais se garde 15 ou 20 ans dans la gestion collective de la DivG de Dunkerque, s’en prend violemment bien d’évoquer les deux rapports d’experts re- mobilité, construite pas à pas depuis la LOTI à la position de la FNAUT sur la gratuité mis récemment à Mmes Pécresse et Hidalgo, de 1982, qui laisse le transport urbain et fer- des transports urbains (FNAUT Infos 268) : très critiques du principe de la gratuité... roviaire, métropolitain et régional, sans pers- « préjugés idiots, arguments débiles, totalement Selon lui, « la gratuité va profondément pectives partagées et sous la menace d’une stupides, discours dogmatiques, âneries racontées tranformer les modes de vie et révolutionner les double récession : physique faute de finan- par une vieille génération ne connaissant rien à transports publics à Dunkerque ». cements, et sociétale faute de mise en œuvre la gestion d’une collectivité ». Mais peut-on parler de révolution alors que de la politique annoncée. Tout élu devrait au contraire favoriser le la fréquentation du réseau, très faible aupara- Bruno Gazeau, président de la FNAUT z dialogue et enrichir le débat avec les associa- vant, n’a augmenté (selon la municipalité) que tions, et au moins lire leurs arguments. Le de 50 % les jours ouvrables, qu’une partie de Sommaire maire affirme pourtant souhaiter «un débat cette augmentation est due à l’amélioration adulte et raisonnable, fondé sur des argument de l’offre qui a accompagné l’introduction de Transferts sur autocar non fallacieux »... mais il oublie de montrer la gratuité, et qu’elle pouvait à l’évidence être des services ferroviaires 2-5 l’exemple. Les militants de la FNAUT em- obtenue sans la gratuité ? Le GCO, l’A45, la gare d’Allan 6 ploient, eux, un vocabulaire plus respectueux Une vraie révolution aurait consisté à La chronique du Lyon-Turin 7 de leurs interlocuteurs. adopter le tramway, comme l’ont fait des Le TGV Ouigo 8 Ces invectives méprisantes et préten- agglomérations (Le Mans, Besançon) moins L’attractivité du transport ferroviaire 9 tieuses prouvent surtout que M. Vergriete peuplées que Dunkerque, ou d’introduire le La mobilité des zones périphériques 10 est gêné par la position de la FNAUT, à péage urbain, pour réduire vraiment le vo- La concertation sur les services TER 11 laquelle il ne répond par aucun argument lume du trafic automobile. La médiation dans les transports 12 rationnel. Jean Sivardière z FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 x 1 Dossier Les études précédentes Les études sur les réactions de la clientèle lors des transferts sur route Pourquoi une expertise sont peu nombreuses. sur les transferts sur route ? Dans une étude réalisée en 1996 pour l’Observatoire régional des trans- ports de la Région Pays de la Loire, Alain Gaudefroy a montré que près d’un tiers Ligne TER en gare de Rosporden (MD) (30 %) de la clientèle retourne à l’auto- mobile du seul fait du passage du train Douze cas de transferts sur route de services TER ou, inversement, de réouvertures au car. Il a chiffré l’influence de la durée de lignes, ont été examinés pour analyser les réactions des voyageurs. du trajet (en général allongée lors du passage du train au car) et de la fré- La FNAUT considère que les services La plupart des études disponibles met- quence : qu’il s’agisse de l’autorail ou de TER sur les lignes secondaires à faible tant en évidence une fuite de la clientèle l’autocar, une durée du trajet augmen- trafic doivent être préservés : vers la voiture mais datant d’une ving- tée de 10 % entraîne une baisse de 20 % - ces services restent pertinents en taine d’années (encadré), il était néces- de la fréquentation et une fréquence termes de service public, d’aménage- saire d’en actualiser les résultats, d’autant augmentée de 10 % une hausse de 7 % ment du territoire, d’économie d’énergie que l’avenir des « petites lignes » est en de la fréquentation. et de réduction des émissions de gaz à cours de discussion (FNAUT Infos 264). Dans leur ouvrage « des omnibus au effet de serre ; Depuis 20 ans, le réseau routier s’est TER » (La Vie du Rail, 2002), Pierre-Henri - il est possible de les pérenniser en amélioré, la voiture est devenue plus Emangard, Bernard Collardey et Pierre réduisant leur coût financier pour la fiable, son coût d’usage a diminué Zembri citent des pertes de clientèle du collectivité et en améliorant leur qua- (FNAUT Infos 260), le taux de motori- transport public de 37 % (en moyenne lité (ponctualité, vitesse, fréquence, sation des ménages a augmenté, l’autocar sur 20 lignes) lors des transferts des an- horaires, correspondances), donc les régional a été modernisé, le covoiturage nées 1970. recettes commerciales. s’est développé alors que l’attractivité du Dans son ouvrage « Rail et aména- Depuis son congrès de Tours (1992), service ferroviaire s’est au contraire dé- gement du territoire » (Edisud, 1995), la FNAUT préconise leur exploita- gradée, qu’il s’agisse de l’infrastructure Jean-François Troin confirme cette ten- tion en délégation de service public (ralentissements) ou de l’exploitation. dance mais signale le cas, très particu- (FNAUT Infos 264). Une étude des Ces évolutions variées ont-elles modi- lier semble-t-il, de la ligne Bort-les-Or- cabinets Beauvais Consultants, KCW et fié les réactions de la clientèle en cas de gues - Neussargues, dont la fermeture Rail Concept a montré que l’ouverture transfert sur route ? en 1990 a entraîné un doublement de du TER à la concurrence pouvait per- la clientèle, certes marginale avant la mettre, à budget public constant, d’éviter Une nouvelle expertise fermeture, la desserte des bourgs étant les transferts sur route et de développer mieux assurée par des arrêts dans les l’offre TER (FNAUT Infos 208 et 213). La FNAUT a demandé aux cabinets centres que dans les gares situées à Ses conclusions ont été confirmées par Trans-Missions (Béatrice Jarrige, Ma- l’écart des agglomérations sur une une étude plus récente du CEREMA thias Cureau, Marc Barrau, Thibault ligne sinueuse aux performances par (FNAUT Infos 257). Rapenne) et Beauvais Consultants de ailleurs très limitées. La FNAUT dénonce donc les affirma- déterminer dans quelle mesure les voya- En 2007, le rapport Gratadour tions de la Cour des Comptes (rapport de geurs sont sensibles au mode de transport (FNAUT Infos 257) a chiffré à 30 % la 2009 sur le TER), du rapport Spinetta, proposé, train ou car : perte de clientèle du transport public du ministère de l’Economie, de bien - les résultats des études précédentes qui suit un transfert sur route. des élus régionaux et de la SNCF elle- sont-ils encore valables ? Le taux d’éva- En 2009, la Direction Générale du même : elle constate qu’un transfert sur sion de la clientèle vers la voiture, en cas Trésor et de la Politique Economique route, sauf cas très particulier, entraîne de transfert sur route, s’est-il accentué a analysé les politiques de 4 Régions une dégradation du service public.