infos 271 janvier-fév. 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Un changement de cap dangereux Transferts sur autocar

En 2017, Emmanuel Macron avait pris des engagements précis : une réduction des émis- des services ferroviaires : sions de CO2 du secteur des transports ; un ali- gnement du prix du diesel sur celui de l’essence ; le retour des voyageurs à la voiture une réorientation de l’investissement vers les transports de la vie quotidienne ; enfin une perspective d’évolution de la taxe carbone sur la durée du quinquennat permettant de finan- cer l’ensemble des infrastructures. La FNAUT avait approuvé ces nouvelles orientations. Les Assises de la mobilité n’ont permis de clarifier ni les normes de pollution routière, ni les responsabilités des constructeurs. Elles

Anjoubus en gare de Châteaubriant (MD) ont privilégié les encouragements à la voiture dite propre plutôt qu’à la mobilité propre : les crédits nécessaires pour dévelop- per le report sur les modes respectueux de Une expertise commandée par la FNAUT et réalisée par le cabinet Trans- l’environnement ont été sous-estimés. Missions confirme, à partir de l’analyse de 12 cas particuliers, un phéno- Les avancées partielles mais indiscutables mène souvent observé dans le passé : en cas de transfert d’un service fer- du Pacte ferroviaire et les promesses d’une roviaire sur autocar, de nombreux usagers reprennent leur voiture, ou ne se Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), à dé- déplacent plus. Les effets du passage du mode ferroviaire au mode routier et battre et enrichir, sont effacées par l’annula- des variations de la fréquence des services et de la durée des trajets ont été tion des mesures fiscales sur les carburants (alors même que le prix du pétrole vient de dissociés. La perte de clientèle du transport public liée au seul changement baisser de 35%) et par l’accroissement de la de mode a alors été quantifiée : le « malus car » moyen est de 37 %. Le cas dépendance automobile : les engagements inverse des réouvertures de lignes ferroviaires a également été étudié : le de la lors de la COP 21 sont oubliés. « bonus train » moyen est de 65 %. Les efforts récents pour contenir la hausse des péages autoroutiers - un signal fort don- né aux automobilistes, dans la continuité des Carton rouge gouvernements précédents - confirment la priorité donnée à la voiture au détriment des Dans le numéro 20 (novembre 2018) de Il cite le soutien que lui apporte un labora- transports publics. Au total c’est un recul de Mobilités Magazine, Patrice Vergriete, maire toire de l’université de , mais se garde 15 ou 20 ans dans la gestion collective de la DivG de Dunkerque, s’en prend violemment bien d’évoquer les deux rapports d’experts re- mobilité, construite pas à pas depuis la LOTI à la position de la FNAUT sur la gratuité mis récemment à Mmes Pécresse et Hidalgo, de 1982, qui laisse le transport urbain et fer- des transports urbains (FNAUT Infos 268) : très critiques du principe de la gratuité... roviaire, métropolitain et régional, sans pers- « préjugés idiots, arguments débiles, totalement Selon lui, « la gratuité va profondément pectives partagées et sous la menace d’une stupides, discours dogmatiques, âneries racontées tranformer les modes de vie et révolutionner les double récession : physique faute de finan- par une vieille génération ne connaissant rien à transports publics à Dunkerque ». cements, et sociétale faute de mise en œuvre la gestion d’une collectivité ». Mais peut-on parler de révolution alors que de la politique annoncée. Tout élu devrait au contraire favoriser le la fréquentation du réseau, très faible aupara- Bruno Gazeau, président de la FNAUT z dialogue et enrichir le débat avec les associa- vant, n’a augmenté (selon la municipalité) que tions, et au moins lire leurs arguments. Le de 50 % les jours ouvrables, qu’une partie de Sommaire maire affirme pourtant souhaiter «un débat cette augmentation est due à l’amélioration adulte et raisonnable, fondé sur des argument de l’offre qui a accompagné l’introduction de Transferts sur autocar non fallacieux »... mais il oublie de montrer la gratuité, et qu’elle pouvait à l’évidence être des services ferroviaires 2-5 l’exemple. Les militants de la FNAUT em- obtenue sans la gratuité ? Le GCO, l’A45, la gare d’Allan 6 ploient, eux, un vocabulaire plus respectueux Une vraie révolution aurait consisté à La chronique du -Turin 7 de leurs interlocuteurs. adopter le tramway, comme l’ont fait des Le TGV 8 Ces invectives méprisantes et préten- agglomérations (Le Mans, Besançon) moins L’attractivité du transport ferroviaire 9 tieuses prouvent surtout que M. Vergriete peuplées que Dunkerque, ou d’introduire le La mobilité des zones périphériques 10 est gêné par la position de la FNAUT, à péage urbain, pour réduire vraiment le vo- La concertation sur les services TER 11 laquelle il ne répond par aucun argument lume du trafic automobile. La médiation dans les transports 12 rationnel. Jean Sivardière z

FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 x 1 Dossier Les études précédentes

Les études sur les réactions de la clientèle lors des transferts sur route Pourquoi une expertise sont peu nombreuses. sur les transferts sur route ? Dans une étude réalisée en 1996 pour l’Observatoire régional des trans- ports de la Région Pays de la Loire, Alain Gaudefroy a montré que près d’un tiers Ligne TER en gare de Rosporden (MD) (30 %) de la clientèle retourne à l’auto- mobile du seul fait du passage du train Douze cas de transferts sur route de services TER ou, inversement, de réouvertures au car. Il a chiffré l’influence de la durée de lignes, ont été examinés pour analyser les réactions des voyageurs. du trajet (en général allongée lors du passage du train au car) et de la fré- La FNAUT considère que les services La plupart des études disponibles met- quence : qu’il s’agisse de l’autorail ou de TER sur les lignes secondaires à faible tant en évidence une fuite de la clientèle l’autocar, une durée du trajet augmen- trafic doivent être préservés : vers la voiture mais datant d’une ving- tée de 10 % entraîne une baisse de 20 % - ces services restent pertinents en taine d’années (encadré), il était néces- de la fréquentation et une fréquence termes de service public, d’aménage- saire d’en actualiser les résultats, d’autant augmentée de 10 % une hausse de 7 % ment du territoire, d’économie d’énergie que l’avenir des « petites lignes » est en de la fréquentation. et de réduction des émissions de gaz à cours de discussion (FNAUT Infos 264). Dans leur ouvrage « des omnibus au effet de serre ; Depuis 20 ans, le réseau routier s’est TER » (La Vie du Rail, 2002), Pierre-Henri - il est possible de les pérenniser en amélioré, la voiture est devenue plus Emangard, Bernard Collardey et Pierre réduisant leur coût financier pour la fiable, son coût d’usage a diminué Zembri citent des pertes de clientèle du collectivité et en améliorant leur qua- (FNAUT Infos 260), le taux de motori- transport public de 37 % (en moyenne lité (ponctualité, vitesse, fréquence, sation des ménages a augmenté, l’autocar sur 20 lignes) lors des transferts des an- horaires, correspondances), donc les régional a été modernisé, le covoiturage nées 1970. recettes commerciales. s’est développé alors que l’attractivité du Dans son ouvrage « Rail et aména- Depuis son congrès de Tours (1992), service ferroviaire s’est au contraire dé- gement du territoire » (Edisud, 1995), la FNAUT préconise leur exploita- gradée, qu’il s’agisse de l’infrastructure Jean-François Troin confirme cette ten- tion en délégation de service public (ralentissements) ou de l’exploitation. dance mais signale le cas, très particu- (FNAUT Infos 264). Une étude des Ces évolutions variées ont-elles modi- lier semble-t-il, de la ligne Bort-les-Or- cabinets Beauvais Consultants, KCW et fié les réactions de la clientèle en cas de gues - Neussargues, dont la fermeture Rail Concept a montré que l’ouverture transfert sur route ? en 1990 a entraîné un doublement de du TER à la concurrence pouvait per- la clientèle, certes marginale avant la mettre, à budget public constant, d’éviter Une nouvelle expertise fermeture, la desserte des bourgs étant les transferts sur route et de développer mieux assurée par des arrêts dans les l’offre TER (FNAUT Infos 208 et 213). La FNAUT a demandé aux cabinets centres que dans les gares situées à Ses conclusions ont été confirmées par Trans-Missions (Béatrice Jarrige, Ma- l’écart des agglomérations sur une une étude plus récente du CEREMA thias Cureau, Marc Barrau, Thibault ligne sinueuse aux performances par (FNAUT Infos 257). Rapenne) et Beauvais Consultants de ailleurs très limitées. La FNAUT dénonce donc les affirma- déterminer dans quelle mesure les voya- En 2007, le rapport Gratadour tions de la Cour des Comptes (rapport de geurs sont sensibles au mode de transport (FNAUT Infos 257) a chiffré à 30 % la 2009 sur le TER), du rapport Spinetta, proposé, train ou car : perte de clientèle du transport public du ministère de l’Economie, de bien - les résultats des études précédentes qui suit un transfert sur route. des élus régionaux et de la SNCF elle- sont-ils encore valables ? Le taux d’éva- En 2009, la Direction Générale du même : elle constate qu’un transfert sur sion de la clientèle vers la voiture, en cas Trésor et de la Politique Economique route, sauf cas très particulier, entraîne de transfert sur route, s’est-il accentué a analysé les politiques de 4 Régions une dégradation du service public. ou réduit ? (Midi-Pyrénées, Auvergne, Basse-Nor- La FNAUT ne s’oppose pas dogma- - retrouve-t-on, ou non, à l’échelle mandie, Lorraine). Elle a chiffré la baisse tiquement à ces transferts, mais elle es- régionale, la préférence marquée du pu- de clientèle à environ 30 %. La DGTPE time qu’il faut auparavant bien connaître blic pour le mode ferroviaire observée suggère que la fréquence du car ou taxi leur impact, positif ou négatif, social et en milieu urbain ? L’introduction d’un de substitution soit portée à 20 ser- environnemental. BHNS augmente la clientèle du trans- vices par jour pour compenser la perte port public de 30 à 50 %, celle d’un tram- de confort et maintenir le niveau de la Un paramètre à actualiser way de 100 % et souvent bien davantage clientèle. Une baisse des tarifs et une (FNAUT Infos 265). hausse du nombre des points d’arrêt En 2012, la FNAUT a demandé à L’objectif de l’expertise n’était pas de ont été envisagées. Jean-Marie Beauvais, Pierre-Henri Em- justifier ou de dénoncer le principe des Enfin, dans le cadre d’un bilan socio- angard et Gérard Guyon, trois experts re- transferts sur route mais d’analyser les économique des politiques publiques connus, de préciser la plage de pertinence réactions des voyageurs. relatives aux trains TET et aux liaisons énergétique des transferts sur route en Douze cas de transferts sur route de aériennes d’aménagement du terri- fonction du remplissage des trains TER services TER ou, inversement, de réou- toire (janvier 2014), la Commission des (FNAUT Infos 212). Les conclusions de vertures de lignes, ont donc été examinés. Comptes Transport de la Nation estime ce travail confirmaient le point de vue Les situations sont variées : il peut s’agir qu’en cas de remplacement du train de la FNAUT, mais étaient sensibles à d’évènements récents ou anciens, limités par l’autocar, 36 % des voyageurs se un paramètre crucial et mal connu : les ou non aux heures creuses, temporaires reportent sur la voiture, 25 % sur le TER, réactions de la clientèle du train à la suite ou définitifs, intervenus dans des zones 11 % sur le TGV, 5 % sur l’avion, et 23 % d’un transfert sur route. rurales ou urbanisées. ne se déplacent plus.

2 x FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 Dossier La méthodologie de l’expertise

L’objectif de l’expertise étant jugé trop élevé : 6,2 (ramené à 3,9 part, 2 min de marge pour ne pas rater le après le transfert sur route). Elle a été train ou le car, 5 min entre la gare d’arrivée Lors du transfert sur route d’un ser- rouverte le 4 janvier 1982 sur décision du et le lieu d’activité) ; vice ferroviaire, une partie de la clientèle ministre Charles Fiterman, suite aux pres- - et un équivalent de la pénibilité liée à se reporte sur le car, une autre partie se sions (usagers, élus et FNAUT). la rupture de charge, évalué à 10 minutes reporte sur la voiture en solo ou sur le Les statistiques de fréquentation (en plus du temps d’attente à Ballan, covoiturage, voire renonce à se déplacer. portent sur 1979, année intégralement déjà compris dans la durée du trajet de L’objectif était de mesurer la variation « ferroviaire », 1980 et 1981, année inté- bout-en-bout). de la fréquentation du transport public gralement « routière ». Lors du transfert sur route, la durée après fermeture de la ligne et d’isoler l’ef- Les données relatives à la section Ballan- généralisée D est finalement passée de fet « modal », imputable au seul passage de Tours (9 km) ont été éliminées car l’exploi- 80 min à 112, soit une hausse de 40 %. l’autorail à l’autocar, en excluant l’impact tation ferroviaire a subsisté pour permettre des autres modifications de l’offre (fré- aux voyageurs d’éviter les embouteillages à L’évaluation de l’effet modal quence, itinéraire, arrêts desservis, temps l’entrée de l’agglomération tourangelle. de parcours, voire tarification). Il faut rai- La fréquentation F de l’autorail Chinon- Selon le ministère des Transports , l’élas- sonner toutes choses égales par ailleurs, Ballan en 1979 a été de 3,08 millions de ticité de la fréquentation F à l’offre O est de c’est la difficulté majeure de l’expertise. voyageurs.km (MVK), et celle du car en a = + 0,9 : si on augmente la fréquence de Il s’agit donc d’une recherche originale, 1981, sur la même section, de 2,35 MVK, 10 %, la clientèle augmente de 9 %. la plupart des travaux réalisés en France soit une baisse de 29 %. L’élasticité de F à la durée généralisée D portant sur le report modal de la voiture Il s’agit alors d’estimer la baisse de fré- a été supposée égale à b = - 0,9 : si la durée individuelle directement sur le transport quentation si l’offre n’avait pas été modifiée généralisée augmente de 10 %, la fréquen- collectif. au moment de la fermeture. tation baisse de 9 %. Entre l’hiver 1979 et l’hiver 1981, L’élasticité au prix est égale à c = - 0,9 : Les difficultés méthodologiques l’offre O a augmenté en moyenne de 67 %, si le prix augmente de 10 %, la fréquenta- passant de 3 allers-retours (AR) à 2 AR tion baisse de 9 %. Dans le cas présent, la La collecte d’informations, difficile, a express (ne desservant qu’Azay-le-Rideau) tarification n’a pas varié. porté sur l’offre de transport ferroviaire et 3 AR omnibus desservant toutes les La variation relative de fréquentation et routier (fréquence, durée du parcours, communes traversées les jours ouvrables. due à la variation de l’offre est donc : dF/F finesse de la desserte, tarification), et sur Inversement le temps de parcours = + 0,9 x 67 % = + 60 %, la variation rela- la fréquentation. moyen de gare à gare est passé de 66 min tive due à la variation de la durée générali- Des recherches ont été effectuées dans en train à 88 min en autocar, soit une aug- sée est : dF/F = - 0,9 x 40 % = - 36 %. L’ef- les archives des collectivités et de la mentation de 33 %. Mais ce qui compte fet modal X, différence entre la variation SNCF ; des entretiens avec des acteurs pour le voyageur est en fait la durée porte- brute de la fréquentation et sa variation concernés ont été menés, en particulier à-porte généralisée du déplacement. Cette corrigée, est donné par la formule : avec des associations d’usagers. durée généralisée D est la somme de trois 1 + dF/F = (1 + a dO/O) (1 + b dD/D) + X 1 - Certaines fiches horaires ne sont plus composantes : d’où : X = - 31 %. disponibles aujourd’hui. - la durée du trajet gare-à-gare (+ 33 %), Si la fréquentation a baissé de 29 % grâce 2 - Les données relatives à la fréquen- donnée par les fiches horaires ; elle com- à l’augmentation de la fréquence, l’effet pu- tation sont difficiles à obtenir des opéra- prend le temps d’attente à Ballan (10 min rement modal est un peu supérieur : le seul teurs et/ou de l’autorité organisatrice. Les lorsqu’on passe du car au train, 5 min passage de l’autorail au car, à fréquence et données obtenues concernent générale- quand on passe du train au car) ; temps de parcours identiques, aurait mené ment toute la ligne, même si elle n’a été - la durée totale des parcours termi- à une perte de clientèle de 31 %. Ici la diffé- fermée que sur un tronçon. Il arrive que les naux, inchangée lors du transfert (14 min : rence est faible mais, dans d’autres cas, elle données annuelles recouvrent une période 7 min entre le domicile et la gare de dé- est bien plus importante. avec autorail et une période avec autocar. 3 - Lors d’une réouverture de ligne, certains services peuvent être assurés par train, d’autres par car. 4 - Train et car peuvent avoir un itiné- raire et des arrêts différents. 5 - L’offre de transport n’est pas restée inchangée lors du transfert sur route. Le car peut être plus fréquent que l’autorail. Inversement, il est en général plus lent que le train, surtout s’il dessert à la fois les centres des bourgs et les gares, souvent excentrées. 6 - D’autres paramètres ont pu varier : prix des carburants, habitat et activités au voisinage des gares, consistance des infras- tructures routières. Un exemple : Tours-Chinon

La ligne a été fermée le 28 septembre 1980 sur la seule section Chinon-Bal- lan (40 km), le rapport dépenses/recettes

FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 x 3 Dossier Les résultats de l’expertise

Fermetures et réouvertures donc compris, en gros, entre 25 et 50 %, il faible que la moyenne si la fermeture est est de 37 % en moyenne sur les 5 situations temporaire : l’uager semble « prendre son Les variations de fréquentation du TER examinées et exploitables. mal en patience » et revient vite au train à suite à un transfert rail/route ou route/rail et A noter qu’un léger gain de clientèle, + 7 %, la réouverture. l’évolution de l’offre de transport ont été étu- a été observé lors de la fermeture d’Autun- Dans certains cas, les experts ont pu vérifier diées dans 12 situations très variées : Avallon, mais les experts ont considéré que que la clientèle scolaire, captive du transport - 5 fermetures définitives (avec remplace- ce cas n’était pas significatif car l’offre tant collectif, lui reste fidèle. Si cette clientèle sco- ment pérenne des services ferroviaires par des ferroviaire (avant la fermeture) que routière laire est exclue, ils ont observé que le bonus services routiers) : Avallon-Autun, Digne-les- (après) était très faible. train est plus élevé que la moyenne pour les Bains - Saint-Auban, Clermont-Ferrand - Li- clientèles domicile-travail et occasionnelle. moges, Vittel-Contrexeville, Alès-Bessèges ; Le bonus train En Allemagne (encadré ci-dessous), le - 4 fermetures temporaires pour travaux bonus train observé lors des premières réou- (il s’agit de fermetures d’une durée suffisante Dans le cas inverse d’une réouverture de vertures de lignes était faible, mais les réouver- pour que les voyageurs adaptent leur com- ligne ferroviaire, la clientèle du transport tures suivantes ont eu un succès considérable, portement de manière rationnelle à l’offre de public augmente de 27 à 83 % toutes choses y compris dans des zones rurales. substitution proposée) : Cannes-Grasse, Aix- égales par ailleurs sur l’échantillon consi- La préférence des voyageurs réguliers ou en-Provence - Marseille, Nantes-Pornic, Nantes déré ; le bonus train est donc, en gros, com- occasionnels pour le train s’explique aisément : - Saint-Gilles-Croix-de-Vie ; pris entre 30 et 80 %, il est de de 65 % en - le car est certes plus souple que le train, - 3 fermetures suivies de réouvertures : moyenne sur les 6 réouvertures considérées. son itinéraire pouvant se rapprocher des Tours-Chinon, -Carpentras, Mulhouse- zones urbanisées ; Chalempé-(Freiburg). Commentaires - mais le train offre plus de confort (acces- sibilité, roulement, bruit intérieur, espace Recherche de l’effet modal La variation de la fréquentation à la réou- disponible à bord, transport des bagages, toi- verture d’une ligne est plus forte qu’à sa fer- lettes), il est plus rapide, plus sûr, plus fiable Le travail d’analyse des experts a été déli- meture. Cette particularité s’explique en partie du fait qu’il dispose d’une infrastructure dé- cat et, dans plusieurs cas, aucun chiffrage du mathématiquement. Lorsqu’on on passe de diée et dessert le centre des villes terminales. malus car ou du bonus train n’a pu être obtenu 200 voyageurs à 100, la baisse de fréquenta- car les données fournies par la collectivité or- tion est de 50 %, mais lorsqu’on passe de 100 En Allemagne ganisatrice ou l’exploitant des services étaient voyageurs à 200, la hausse est de 100 %. Ce incomplètes ou manquaient de fiabilité. doublement du pourcentage s’applique à une Le rapport Berschin, publié en 1998, a Comme cela a été observé sur le cas d’Avi- fréquentation réduite de moitié, il ne traduit évalué à 30 % le bonus-train en cas de gnon-Carpentras, la montée en charge de la en fait qu’une récupération de la clientèle de réouverture de ligne, le rapport Zöllner clientèle du train en cas de réouverture de départ, sans plus. (2002) à 35-45 %. ligne peut être lente (+ 64 % en deux ans). Le modèle ne tient compte ni de l’évolution Les réouvertures de lignes en zones Compte tenu de ces difficultés, les valeurs de la population desservie, ni de l’apparition urbanisées ont été des succès specta- obtenues pour l’effet modal doivent être de nouveaux modes de transport (covoitu- culaires, la fréquentation du transport prises avec prudence, mais leur ordre de rage, création de nouvelles voiries), ni des prix public a explosé. grandeur est significatif. relatifs des modes en concurrence (variation Taunusbahn (1993) : de 1 500 à 11 000 Le modèle décrit page 3 a été utilisé pour du prix des carburants automobiles). Il tient voyageurs/jour (+ 633 %) ; évaluer l’effet modal (malus autocar ou bonus compte seulement de la fréquence des ser- Schönbuchbahn (1996) : de 2 000 à train), c’est-à-dire la réaction des usagers, en vices, de la durée généralisée des trajets et 10 000 voyageurs/jour (+ 400 %) ; cas de fermeture ou de réouverture de ligne, d’une éventuelle variation de la tarification du Regiobahn (1998) : de 512 à 23 100 face au changement de véhicule. transport collectif. voyageurs/jour (+ 4 412 %) ; Lors de la réouverture de Tours-Chinon, la Heidekrautbahn (2005) : de 1 884 à Le malus autocar hausse de la fréquentation a été très inférieure 4 417 voyageurs/jour (+ 134 %). à la moyenne ; cela peut s’expliquer par l’ab- La même observation a été fait lors de En cas de transfert définitif ou temporaire sence d’amélioration de la voie, donc des per- la réouverture de lignes rurales. sur route d’un service ferroviaire (tableau formances et de l’attractivité du train, contrai- Usedomer Bäderbahn (1995) : de 700 à ci-dessous), entre 25 et 51 % de la clientèle rement aux cas de fermeture temporaire pour 8 770 voyageurs/jour (+ 1 150 %). ferroviaire retourne à la voiture toutes choses travaux de modernisation de la ligne. Tschopautalbahn (2004) : de 660 à égales par ailleurs (fréquence, durée du trajet, L’impact des fermetures sur le compor- 1 310 voyageurs/jour (+ 99 %). itinéraire et temps d’accès, tarification). Sur tement de la clientèle semble se renforcer Extrait d’une recherche l’échantillon considéré, le malus autocar est au cours des années. Il est cependant plus de Mathias Cureau et Andreas Wettig z

4 x FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 Actualité Les conclusions de la FNAUT

Contrairement à ce qu’affirment la Cour des comptes, le ministère de l’Economie, Il faut en tenir compte quand on compare Jean-Cyril Spinetta ou la direction de la SNCF, il est souhaitable de jouer plus systémati- les bilans financiers d’une desserte ferroviaire et quement la carte du train et non de chercher à se débarrasser des « petites lignes » sous d’une desserte routière sur un même itinéraire. prétexte que le train est d’exploitation plus coûteuse que le car. Il faut aussi s’interroger sur la faible capacité de l’autocar, qui oblige à de coûteux doublages lors Les résultats du cabinet Trans-Missions Quant à la hausse de fréquentation en cas de des pointes quotidiennes ou hebdomadaires. confirment la très nette préférence du public réouverture, elle serait certainement plus élevée pour le mode ferroviaire : une préférence du si la réouverture s’accompagnait d’une moder- Conclusion même ordre de grandeur a déjà observée en nisation de la voie autorisant des vitesses plus France pour la desserte urbaine (le bonus élevées, ce qui n’a pas été fait en 1982 sur la Chercher à se débarrasser des « petites moyen du tramway est d’environ 131 %, le ligne Tours-Chinon. lignes », sous prétexte que le train est d’exploita- bonus moyen du BHNS n’est que de 34 %) tion plus coûteuse que le car, est une démarche (FNAUT Infos 265). En Suisse, en Allemagne, Coûts externes très contestable. Il faut au contraire jouer plus en Italie du Nord, en Ecosse, la desserte ferro- systématiquement la carte du train comme on viaire des petites villes et même des zones rurales Les résultats de Trans-Missions confir- sait le faire en Allemagne, en Suisse ou en Italie connaît un grand succès (FNAUT Infos 270). ment par ailleurs que le bilan énergétique du nord : et environnemental, par voyageur.km, d’un - le trafic ferroviaire actuel n’est pas représen- Le train reste pertinent transfert sur route est généralement négatif tatif du trafic potentiel tant l’offre sur les petites dès que le train est rempli d’une douzaine lignes est médiocre et souvent squelettique ; Les résultats de Trans-Missions justifient de voyageurs (FNAUT Infos 212), contrai- - la clientèle répond favorablement à une aussi l’intérêt que la FNAUT porte au train : si rement à une idée reçue : le car consomme augmentation de l’offre (entre 2002 et 2016, un territoire est irrigué par une voie ferrée, une moins de carburant et émet moins de CO2 la fréquentation des TER a augmenté de 44 desserte ferroviaire doit être privilégiée car elle que le train diesel, mais il suffit qu’un petit % pour une offre de transport augmentée de peut capter une clientèle plus large qu’une des- nombre de voyageurs reprennent la voiture 26% ; le nombre moyen de voyageurs par train serte routière. Le maintien des services ferro- pour que le bilan énergétique de l’opération est passé de 67 à 78 contre 80 en Allemagne) ; viaires et les réouvertures de lignes périurbaines soit négatif. - les coûts fixes du rail sont élevés, mais le et interrégionales sélectionnées par la FNAUT Plus généralement, il serait utile de faire un coût marginal de renforcement de l’offre est sont donc rationnels. Bien entendu, si le ter- bilan des coûts externes lors d’un transfert sur faible puisque les installations fixes, le matériel ritoire est dépourvu de voie ferrée, c’est une route : augmentation de l’insécurité routière, roulant et le personnel sont déjà mobilisés ; desserte routière attractive qui doit être déve- de la congestion des voiries, du temps perdu - les coûts d’exploitation par la SNCF sont loppée, seule sur le modèle du Bregenzerwald dans les embouteillages aux entrées de villes... excessifs (23,5 c par train.km en 2016 contre (FNAUT Infos 270) ou, pour les trafics plus (souvent des lignes sont fermées alors que la 15 c en Allemagne) ; ils sont deux fois plus modestes et les trajets plus courts, en complé- voirie parallèle est encombrée de voitures et élevés qu’en 2002 (ils sont passés de 2 Mdc ment du train. de camions). à 4 Mdc), la contribution publique actuelle est de 75 % ; Remarque sur le malus autocar Comment transférer sur route ? - l’exploitation prochaine des petites lignes en délégation de service public (DSP) par des opé- Le malus autocar serait sans doute plus éle- La FNAUT n’est pas dogmatique, elle rateurs autres que la SNCF pourra faciliter leur vé que déterminé lors de l’expertise de Trans- n’exclut pas que des transferts sur route soient pérennisation en réduisant les coûts d’exploita- Missions : économiquement justifiés dans des cas excep- tion et en attirant une clientèle nouvelle par des - si on étudiait des lignes de grande lon- tionnels (mais pas avant d’avoir joué à fond la innovations commerciales ; gueur, le train étant d’autant plus regretté que carte du train pour tester sa pertinence). - le train a un rôle structurant plus fort que le parcours est long ; Il faut tenir compte, dans l’évaluation du celui du car, de même qu’en ville le tramway a - si on étudiait des fermetures de lignes coût d’une desserte ferroviaire, de la possibi- un rôle structurant plus fort que celui du bus ; exploitées dans de bonnes conditions (horaires lité d’augmenter les recettes voyageurs (par - il facilite la fixation de la population dans les adaptés aux besoins, fréquence élevée...) ; exemple en modifiant la position des arrêts villes moyennes et petites, et même dans les zones - si on mesurait la clientèle du car longtemps pour les rapprocher des zones urbanisées) et de rurales autour des gares, ce qui compense les ef- après le transfert sur route, la désaffection des la compléter par une desserte fret. fets d’une métropolisation devenue excessive. voyageurs pouvant même s’accentuer au cours En gros, pour annuler la perte de clientèle Le réseau ferré français est encore bien mail- du temps et entraîner la marginalisation, puis lors d’un transfert sur route, il faut augmenter lé, il est donc pertinent d’utiliser au maximum la disparition, du car de substitution (à l’in- la fréquence d’environ 50 % (et même davan- cette infrastructure existante dont la remise à verse, les réouvertures de lignes effectuées dans tage car il faut aussi compenser l’augmentation niveau est possible à un coût très acceptable de bonnes conditions sont irréversibles). de la durée du trajet). pour la collectivité.

D’autres transferts sur route La FNAUT a étudié sommairement d’autres fermetures de lignes ferroviaires. Lors du transfert sur route définitif de la ligne Châlons-en-Champagne - Verdun en 2013, 4 trains dans chaque sens ont été remplacés par 5 cars, le temps de parcours est passé de 1h20 à 1h50 de gare à gare, la fréquentation a diminué de moitié, d’où un effet modal voisin de 50 %. Pour la ligne Epinal - Saint-Dié qui vient de fermer, la durée du trajet de bout en bout passe de 1h05 à 1h35 (+ 46 %)... Sans compter les aléas de la circulation. Pour la ligne Montluçon-Us- sel, fermée en 2008, l’effet modal est d’environ 65 %. Sur la ligne Saint-Etienne - Clermont, l’autocar de substitution est très lent et pratiquement vide. (MD)

FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 x 5 Actualité LE GCO de Strasbourg Gare d’Allan : l’alternative

Malgré les nombreux avis négatifs émis sur le dossier du projet de Grand Contournement Suite à l’abandon par l’Etat de la Autoroutier (GCO) de Strasbourg et la forte mobilisation citoyenne du 8 septembre 2018 à gare TGV d’Allan (FNAUT Infos 270), l’occasion de la marche pour le climat et contre le GCO, l’Etat veut toujours imposer ce projet l’Association pour l’Harmonisation absurde et contraire aux objectifs officiels de démocratie et de transition écologique. des Transports en Moyenne Vallée du Rhône (AHTMVR) a relancé ses propo- Une absurdité technique sitions alternatives pour une meilleure et environnementale desserte TGV des villes de la vallée du Rhône par la ligne classique. Le projet de GCO, qui date des années 70, est irrationnel : il provoquera inévita- Un alignement de la desserte TGV blement une augmentation du trafic dans d’Orange sur celle de Montélimar (deux l’agglomération de Strasbourg et non sa agglomérations de même importance) a résorption. Les rapports officiels eux- été effectué en 2015 à la suggestion de mêmes font état de 14 000 véhicules sup- l’AHTMVR et la SNCF a reconnu qu’une plémentaires par jour entre Wasselonne vingtaine de voyageurs par jour et par et Strasbourg. sens avaient ainsi été gagnés. Quant à l’Alsace, elle n’a évidemment L’association propose aujourd’hui : Un déni de démocratie rien à gagner - bien au contraire - à la créa- - l’expérimentation de quelques ar- tion d’un corridor pour les poids lourds qui rêts TGV à Pierrelatte ; ce site industriel Le gouvernement fait fi des 7 avis néga- transitent entre le Nord et le Sud de l’Eu- du Tricastin (EDF, CEA...) est un très im- tifs émis successivement par le Comité Na- rope. Pourquoi les élus favorables GCO ne portant pôle d’emploi et les échanges tional de Protection de la Nature et l’Auto- proposent-ils pas la mise en place de l’éco- sont fréquents avec la région pari- rité environnementale, et lors des Enquêtes taxe poids lourds désormais en vigueur sur sienne ; Pierrelatte et les villes proches publiques diligentées par l’Etat lui-même. toutes les routes allemandes ? de Saint-Paul-Trois-Châteaux à l’Est et Ce passage en force est d’autant plus La maîtrise des émissions de gaz à de Bourg- Saint- Andéol à l’Ouest re- inadmissible que des recours juridiques ont effet de serre et du risque climatique groupent une population équivalente été engagés contre le GCO et que deux passe par celle du trafic routier, automo- à celle de Montélimar ; audiences devaient avoir lieu au tribunal biles et poids lourds, et par un transfert - le prolongement jusqu’à Valence-TGV administratif les 14 et 19 septembre pro- de ce trafic sur les modes respectueux de des 6 allers-retours TER Avignon-centre chains. Et pourquoi cette précipitation ? l’environnement. - Valence-ville. Deux solutions sont envi- sageables : ou bien la création d’un point de rebroussement peu coûteux juste à A45 : un projet absurde l’est de Valence TGV sur la ligne classique (1,5 à 2 Mc selon une information fournie heureusement éliminé en 2012 par RFF) ; ou bien le prolonge- ment de ces TER jusqu’à Romans (c’est déjà L’abandon du projet A 45 de deuxième autoroute Saint-Etienne - Lyon, comme l’avait re- le cas des TER Briançon-Valence), ce qui commandé le Comité d’orientation des infrastructures (COI) a suscité des réactions variées. impliquerait des coûts d’exploitation plus élevés à la charge de la Région mais per- une cinquantaine de kilomètres de bitume mettrait d’intensifier utilement la desserte constituait une vision étriquée et passéiste entre Livron, Valence-ville et Romans. Dans de notre territoire ». les deux cas, la gare de Valence-TGV serait, A l’inverse, le collectif pour l’A 45 est fu- comme celle d’Avignon-TGV qui dispose rieux. Sa protestation est un morceau d’an- depuis 2015 d’une liaison ferrée avec Avi- thologie : « cette infrastructure aurait pu être gnon-centre (la « virgule »), mieux reliée à le tremplin d’une nouvelle dynamique au la ligne classique de la Vallée du Rhône. service des habitants et du développement A la gare de Montélimar, les voitures économique de l’aire métropolitaine Lyon - en stationnement immatriculées 07 sont Saint-Etienne ; son abandon sonne comme aussi nombreuses que celles immatri- un véritable désastre pour les habitants, les culées 26. Tous ces Ardèchois, qui ont entreprises et l’ensemble des acteurs éco- actuellement, à Montélimar, un accès di- nomiques rassemblés au sein du Collectif, rect au TGV, auraient été, autant que les Les opposants au projet sont satisfaits porte-parole des 120 000 entreprises de ce montiliens, pénalisés par l’obligation de du résultat d’une lutte acharnée. Les par- bassin économique, qui a été trahi. L’Etat se rendre à Allan… lementaires PS de la Loire, le député Régis ne respecte pas les engagements pris par Espérons que le bon sens l’emportera Juanico et le sénateur Jean-Claude Tissot, trois Présidents de la République. Ce projet enfin en faveur des solutions alternatives approuvent la décision du gouvernement : a été reconnu d’Utilité Publique en 2008 ; à cette gare exurbanisée, qui mériteraient « il s’agit d’une décision de bon sens qui dé- il s’inscrit parfaitement dans le Grenelle de d’être enfin sérieusement étudiées. Quant coule logiquement de la prise de conscience l’Environnement ; son montage financier à la réactivation du centre-ville de Mon- collective des enjeux environnementaux et était intégralement bouclé. Cette décision télimar, ce n’est évidemment pas la gare climatiques et de la crédibilité grandissante est profondément méprisante pour les habi- d’Allan qui l’aurait apportée… ! des travaux sur les solutions alternatives. tants qui subissent au quotidien sur l’A47 Les projets qui ne parviennent pas à voir le insécurité, embouteillages, accidents, pol- Bien dit jour pendant plus de 30 ans sont par défi- lution... Cette décision est également scan- nition de mauvais projets. Considérer que daleuse pour les entreprises, dont la com- La députée LREM Alice Thourot : « la la solution d’avenir pour le développement pétitivité est pénalisée par des centaines de multiplication des gares TGV implantées et la facilitation des mobilités entre Saint- milliers d’heures de travail perdues sur une hors des centres-villes ne s’inscrit plus Etienne et Lyon ne pouvait que passer par A 47 paralysée ». dans le sens de l’histoire ».

6 x FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 Actualité Une situation confuse La chronique du Lyon-Turin Le ministre italien des Transports, Danilo Toninelli, membre du mou- vement 5 étoiles hostile au Lyon-Tu- Ligne ferroviaire transalpine (MD) rin, a lancé une 8ème étude « coûts- La capacité du tunnel de Modane ne permet qu’une croissance très marginale du trafic bénéfices » du projet. Il a confié la de fret entre la France et Italie. Or le trafic des camions dans les tunnels du Mont-Blanc et du conduite de l’étude à Marco Ponti, Fréjus a crû de 12% depuis 2014, et de 7% depuis un an... professeur d’économie à l’Ecole polytechnique de Milan, très neutre Un tunnel déjà presque saturé propose une rallonge potentielle de 860 Mc puisqu’il a déclaré récemment : pour financer le tunnel de base du Lyon-Tu- « l’avenir est au transport routier, le Une note récente de SNCF Réseau, publiée rin : le cofinancement des projets interfronta- rail c’est du passé » !!! par le Dauphiné Libéré, démolit un argument liers par l’Union européenne passerait de 40 à clé des opposants au Lyon-Turin (FNAUT In- 50 %, la France économiserait alors 370 Mc Le 29 octobre 2018, le conseil munici- fos 263). Selon ces derniers, la nouvelle liaison et l’Italie 500 Mc. pal de Turin (à majorité 5 Etoiles), dont est un « grand projet inutile » : la ligne actuelle Mais la Commission les menace aussi : si la maire Chiara Appendino, a voté une de Maurienne offre une capacité suffisante le projet reste dans l’impasse, le rembourse- motion contre le Lyon-Turin. (120 trains par jour) pour reporter « immédia- ment des subventions déjà versées sera exi- Le 10 novembre, à Turin, une manifes- tement » (mais comment ?) sur le rail une part gé (l’UE a déjà versé 370 millions d’euros tation a rassemblé 40 000 partisans de significative du trafic routier franco-italien. entre 2007 et 2013, puis 814 millions pour la liaison. Une manifestation d’ampleur En réalité la capacité du tunnel interfronta- la période 2014-2020). comparable a rassemblé les opposants lier existant de Modane (Mont-Cenis) est très Alors que la Ligue du Nord veut poursuivre début décembre. inférieure à ce qu’affirme les opposants : le tun- le chantier, le Mouvement 5 étoiles prône un Auparavant, le Forum pour le déve- nel est déjà pratiquement saturé. abandon, ou au minimum une remise à plat loppement des régions européennes Si on tient compte de la contrainte de non intégrale. Le gouvernement français a indi- (FODERE) - qui regroupe des entreprises croisement des trains imposée par les nou- qué qu’il « honorera ses engagements euro- romandes, françaises, catalanes, pié- velles règles de sécurité, la capacité du tunnel péens », mais sans grand enthousiasme. montaises et allemandes - avait souli- n’est que de 62 trains par jour (trains de fret, de gné le caractère urgent et stratégique voyageurs et circulations techniques). Exemple à suivre de la liaison. Si les trains de fret et de voyageurs ne sont Le 17 novembre, un sondage Ipsos ré- pas autorisés à circuler en même temps dans La Suisse a introduit, dès 2001, une taxe alisé pour le Corriere della Sera a révélé le tunnel, la capacité tombe à 54 trains. Enfin kilométrique sur les camions (la RPLP) dont que 60% des Italiens sont favorables à la la capacité passerait à 42 trains si une mesure le produit (1,6 MdFS ou 1,4 Md€ en 2017) réalisation de la liaison (dont 40 % des d’interdiction absolue de croisement et de est affecté pour l’essentiel aux travaux ferro- électeurs du mouvement 5 étoiles) et « poursuite » (plusieurs trains dans le tunnel) viaires. Le taux de la RPLP varie de 2,3 à 3,1 que seuls 19% y sont opposés. était prise : les règles italiennes sont plus dures centime de franc suisse/tonne.km suivant le Le 3 décembre, 2 000 représentants que les règles françaises, or l’exploitation du type de camion (seuls les véhicules de plus de des acteurs économiques italiens - fé- tunnel est sous la responsabilité de l’Italie. 3,5 tonnes paient la RPLP, les cars sont sou- dérations patronales et syndicats - réu- Le 17 janvier 2018, journée la plus chargée mis à une redevance forfaitaire). nis à Turin se sont prononcés pour le de 2018, 45 trains ont circulé : 39 de fret et 6 de L’objectif officiel - réduire de moitié le Lyon-Turin. voyageurs (3 AR TGV -Milan). Chaque nombre des camions (1 300 000) transitant Le 10 décembre, les 186 maires de la week-end, 10 trains supplémentaires de voya- à travers le pays entre l’Allemagne et l‘Italie - métropole de Turin se sont exprimés geurs (trains régionaux Turin-Modane) cir- est déjà en partie atteint ! Les tunnels de base sur la liaison Lyon-Turin : 169 d’entre culent dans le tunnel, et les élus (français et du Lötschberg et du Gothard sont en service, eux ont demandé sa réalisation dans les italiens) réclament l’extension de ce service celui du Ceneri le sera en 2020, et le nombre délais prévus, 8 se sont abstenus, un seul aux jours de semaine. Enfin 8 à 10 navettes de des camions en transit est aujourd’hui infé- a voté contre. Les maires élus sous l’éti- l’autoroute ferroviaire alpine Aiton-Orbassano rieur à 1 million. La part modale du rail sur quette 5 étoiles, dont la présidente de la empruntent aussi le tunnel de Modane. l’axe nord-sud atteint aujourd’hui 71 % ! métropole Chiara Appendino, n’ont pas Il n’est donc possible de faire passer dans ce A la suite de la Suisse, 8 pays européens pris part au vote. tunnel que 16 à 28 trains supplémentaires, sans ont établi une écotaxe : Belgique, Allemagne, Le 12 décembre, les eurodéputés parler des périodes de maintenance. En outre, Autriche, Slovaquie, République tchèque, 5 étoiles ont cherché à faire exclure le compte tenu des rampes, le tonnage des trains Pologne, Portugal. Lyon-Turin des financements de l’UE. est limité ; les trains de voyageurs sont priori- Les eurodéputés de la Ligue du Nord taires ; les trains de fret doivent passer le goulet Accès au tunnel ont fait échouer cette initiative. d’étranglement Chambéry-Montmélian, qua- Une remise en cause du Lyon-Turin, siment saturé (tout le trafic voyageurs du sillon Jacques Gounon, président de la Tran- décidé par un accord international, exi- alpin l’emprunte) : le 15 mars 2018, 155 trains salpine et PDG d’Eurotunnel : « L’erreur gerait un vote du Parlement italien, au ont circulé sur cette section : 9 TGV, 109 TER, des Britanniques a été de mettre 13 ans sein duquel 5 étoiles est minoritaire. et 37 trains de fret seulement. à réaliser les voies d’accès de Londres au Elisabeth Borne, ministre française des En conclusion, la capacité du tunnel de Mo- tunnel sous la Manche. Alors seulement Transports, a réaffirmé que « le Lyon-Tu- dane ne permet qu’une croissance faible du tra- l’infrastructure a véritablement optimisé rin est un maillon essentiel du réseau fic de fret entre la France et Italie. Or le trafic ses performances ». ferré transeuropéen ». Le projet de loi des camions dans les tunnels du Mont-Blanc La même erreur a été commise avec la LOM souligne son utilité écologique et du Fréjus a crû de 12% depuis 2014, et de liaison Perpignan-Barcelone, elle a mené le et économique. Craignant un arrêt du 7% depuis un an... concessionnaire à la faillite (FNAUT Infos chantier du tunnel interfrontalier, la mi- 251). Le sera-t-elle une 3ème fois avec les ac- nistre a réclamé une décision rapide du Bruxelles intervient cès au tunnel de base du Lyon-Turin, comme gouvernement italien. Mais elle est hos- le propose le Comité d’Orientation des tile à la réalisation des accès à ce tunnel Agacée par les atermoiements de la France Infrastructures présidé par Philippe Duron depuis Lyon : comprenne qui pourra... et de l’Italie, la Commission européenne leur (FNAUT Infos 263 ) ?

FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 x 7 Actualité Le TGV Ouigo : succès et effets pervers

Le succès des TGV Ouigo montre que le train peut reprendre de la clientèle à l’avion et Simultanément, la SNCF, au détriment à la route (covoiturage, cars Macron), grâce à des prix très attractifs et une vitesse com- de l’aménagement du territoire, accélère les merciale hors de portée de la route. Mais, sur les lignes radiales, le report doit se faire réductions de fréquences, voire veut supprimer sans déstructurer l’offre TGV classique, qui reste indispensable. des relations province-province. Ces dégrada- tions concernent même des relations impor- en gares parisiennes (Est, tantes avec, par exemple, le passage de 4 à Lyon...), plus attractifs. 3 allers retours Lyon-Toulouse en 2018 ou de 4 à 2,5 allers retours Strasbourg-Marseille ou Une concentration Lyon-Nice en 2019. sur les radiales Pas de contrôle du gouvernement Comme en aérien, la sur l’aménagement du territoire baisse des coûts est en partie obtenue en aug- Toutes ces dégradations se font sans contrôle mentant la productivité du gouvernement, pourtant devenu autorité du parc, mais la SNCF organisatrice des services d’intérêt national (loi mise sur des rames de du 27 juin 2018), et sans présentation préalable très grande capacité, au Parlement du schéma national des services exploitables seulement de transport (loi du 4 août 2014). à faibles fréquences sur Ce fonctionnement à la fois libre et sans quelques grands axes, concurrence de SNCF Mobilités est inad- alors que le bas coût aé- missible, d’autant que l’Etat et SNCF Réseau rien mise sur des avions travaillent sur un nouveau modèle de péages de faible capacité, des visant à faciliter le financement par péréqua- fréquences élevées et des tion des TGV déficitaires d’aménagement du destinations multiples. territoire. La clause de sauvegarde de dessertes L’offre Ouigo se directes sans correspondances, prévue par la loi Redynamiser l’offre ferroviaire concentre dangereusement. En 2013 on du 27 juin 2018, doit être appliquée. comptait les relations radiales Paris-Lyon- Selon l’ARAFER, la part modale du Marseille/. A partir de 2016 sont Des offres à coordonner rail - 9,2% en 2016 - recule depuis 2011 en apparues des relations Tourcoing ()- Les offres horaires low cost et classique France, alors qu’elle augmente à l’étranger Rennes/Nantes. En 2017 les relations Inter- doivent être coordonnées car la clientèle des (FNAUT Infos 261). Cette part reste supé- secteurs continuaient leur développement TGV classiques, qui n’est pas seulement pro- rieure à celle de nos voisins grâce au TGV, avec Lille-Bordeaux et Lille-Marseille et fessionnelle, a des besoins spécifiques (fré- mais elle diminue après une hausse de 1995 à Strasbourg-Bordeaux. quence, confort, bar, 1ère classe, Internet, 2011 (de 7,5% à 10%). Simultanément, le tra- Mais en 2018, la SNCF n’axe sa publicité possibilité d’échanges ou de remboursements). fic aérien connaît un développement rapide que sur les nouvelles relations entre Paris et De nombreux déplacements effectués au tarif (FNAUT Infos 266), particulièrement sur les les grandes métropoles régionales : Stras- Loisir sont en fait des déplacements à caractère relations province-province. bourg, Rennes, Nantes, Bordeaux, Montpel- privé obligatoire qui doivent être possibles en Le « low cost » est depuis des années le lier et Marseille. Rien n’est dit sur les relations matinée, en soirée et aussi en pleine journée. moteur de la croissance du trafic aérien. La province-province : seuls subsistent les axes De plus, Ouigo s’adresse surtout aux voya- SNCF se devait donc de réagir. Ses trains à Tourcoing-Bordeaux/Marseille. L’offre est geurs pouvant prévoir leur voyage et accepter bas coût sont apparus en 2013 (FNAUT In- largement limitée à la desserte de Paris par les des contraintes (horaires en particulier), ce fos 207, 213, 234). La FNAUT a approuvé seules LGV, et la desserte des Alpes du nord n’est souvent pas le cas des familles : Ouigo n’est cette initiative. n’est pas envisagée. pas adapté à ceux qui en ont le plus besoin. En raison de ces contraintes et du faible Une offre à bas coût inédite Ouigo ne doit pas casser les progrès nombre de lignes desservies, l’offre Ouigo ne attendus des TGV classiques peut pas constituer une tarification « famille » Les Ouigo roulent 3 h de plus par jour que satisfaisante. les TGV classiques, la vente en ligne obliga- Les usagers attendent des TGV classiques toire réduit les coûts de distribution, la capa- une maîtrise du rapport qualité-prix, des Ouigo montre que le train peut reprendre cité des rames est augmentée de 25 % (ni 1ère services adaptés à toutes les catégories de de la clientèle à l’avion et à la route (covoitu- classe, ni bar) : le coût à la place baisse de plus clientèles et des dessertes sur l’ensemble des rage, cars Macron), grâce à des prix très attrac- de 40 %. Les prestations sont limitées (taille territoires. tifs et une vitesse commerciale hors de portée des bagages) ou payantes (prise de courant, En segmentant fortement l’offre, mais de la route. Mais, sur les lignes radiales, le re- bagage supplémentaire…) mais la moindre sans augmenter les fréquences (un TGV port doit se faire sans déstructurer l’offre clas- qualité de l’offre reste acceptable car les prix Ouigo remplace très généralement un TGV sique, indispensable. C’est cette offre qui assure proposés sont très bas (à partir de 10 c pour classique), la SNCF verrouille le marché vis- une fréquentation élevée dans les pays voisins. adultes, prix unique 5 c pour enfants). à-vis de l’ouverture à la concurrence sur les Malheureusement, Ouigo ne fait qu’amé- La réussite est évidente : le taux d’occupa- principaux axes accessibles à d’autres opéra- liorer la desserte des lignes bien desservies et tion des Ouigo est de 88 % contre 67 % pour teurs, lourdement handicapés par ailleurs par dégrader celle des lignes qui le sont moins : les TGV classiques. L’objectif est d’assurer l’obligation de financer leur matériel roulant. c’est le contraire des attentes des usagers et 25 % des déplacements par TGV en Ouigo. Les innovations que pourraient apporter ces d’un aménagement rationnel du territoire. Les péages représentent 38 % des recettes. nouveaux opérateurs deviennent impos- C’est aussi la conclusion de l’ARAFER : le Les Ouigo n’utilisaient que des gares TGV sibles. Cet « effet anticipé » de la concur- modèle SNCF est à revoir, il traduit « une excentrées (Roissy, Massy, Lyon-Saint Exu- rence a donc un effet très pervers, accepté vision malthusienne du rail ». péry...). Mais la SNCF revient à des départs par le gouvernement. Jean Lenoir z

8 x FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 Actualité

Comment renforcer l’attractivité du transport ferroviaire

Dans le contexte d’un système ferroviaire fortement dégradé et d’une concurrence très agressive des autres modes de transport, la FNAUT a analysé pour la DGITM les bonnes pratiques susceptibles d’améliorer l’attractivité du transport ferroviaire. L’étude a été pilotée par Marc Debrincat, avec la collaboration d’Anne-Sophie Trcera, Jean Lenoir et Jean Sivardière.

Les modes concurrents du train imposent La desserte du territoire L’information des contraintes à leurs usagers : les aéro- ports sont souvent éloignés des centre-villes, La voiture est aisément utilisable sur Il est facile de se procurer des plans pré- l’avion low cost n’assure en général que des l’ensemble du territoire et permet le porte- cis et clairs du réseau routier. Mais l’infor- relations de point à point, sans desservir les à-porte. Le réseau routier est dense, conti- mation ferroviaire sur les itinéraires, les villes intermédiaires, et l’usage de l’avion im- nu et en bon état ; il autorise des vitesses horaires et les tarifs est médiocre : ainsi, le plique des formalités souvent pénibles liées à élevées ; les voitures modernes ne tombent voyageur ne peut pas sélectionner les trajets la sécurité ; le car est nettement plus lent et plus en panne ; la sécurité routière s’est possibles selon les critères qui l’intéressent moins confortable que le train ; la voiture est nettement améliorée depuis 2002. Pour (prix et durée du trajet, type de train). soumise aux embouteillages. Mais l’avion à concurrencer efficacement la voiture, la Les fiches horaires des Intercités et TGV, bas coût, l’autocar, la voiture et le covoitu- SNCF doit donc disposer d’un réseau supprimées, doivent être remises en ligne et rage (qui ne paient pas leurs coûts externes) bien maillé de lignes (ce sujet sera pro- indiquer tous les arrêts. ont sur le train un avantage déterminant : le chainement traité dans FNAUT Infos) et Un guide tarifaire clair et synthétique faible prix du voyage. offrir des services radiaux et transversaux, doit être rétabli en lieu et place d’informa- TGV et Intercités, couvrant l’ensemble du tions éparpillées, uniquement disponibles Le prix du voyage territoire et assurant la desserte des villes en ligne. Un encadrement du système de moyennes et des petites villes. tarification du TGV (yield management) Certes l’usage de la voiture est coûteux si On assiste au contraire à un inquiétant devrait améliorer l’information du voya- on considère son coût complet (34 centimes/ démaillage du réseau, puisque même des geur sur l’existence et l’amplitude de la km), mais l’automobiliste ne perçoit le plus lignes interrégionales (Clermont-Bordeaux) variation des prix. souvent que son coût marginal (carburant et ne sont plus exploitées, et à la suppression de Autre difficulté : les offres tarifaires péages autoroutiers), égal au tiers environ du services TER, Intercités et même TGV : des deviennent peu lisibles du fait de la juxta- coût complet (FNAUT Infos 211, 261) ; il TGV intersecteurs ont été supprimés, et des position d’offres TER et Intercités sans ré- bénéficie par ailleurs du prix du pétrole, qui arrêts sont supprimés alors que la clientèle a servation obligatoire dont les prix relèvent se maintient à un niveau très bas. besoin de trains caboteurs. maintenant en partie du yield management. Pour résister à cette concurrence, la SNCF a développé des offres Grandes Lignes à bas Des contraintes multiples La distribution coût (Ouigo, TGVpop, Intercités Eco) et a multiplié les prix réduits, souvent compéti- La voiture est disponible à tout moment Les points de vente des titres de trans- tifs, à grand renfort de publicité. dès lors que le plein de carburant a été port hors des gares se sont raréfiés, l’am- Mais ces « petits prix » ne sont pas pro- fait ; le transport des bagages est facile ; plitude horaire d’ouverture des guichets a posés à tous les publics ou sur tous les iti- enfin la voiture garantit l’intimité de ses été réduite. néraires, les cartes commerciales sont coû- occupants, elle est vécue comme un pro- Les initiatives de SNCF Mobilités ou teuses, et le train reste trop cher pour les longement de l’habitat. des autorités organisatrices segmentent déplacements familiaux, en particulier sur les Pendant ce temps, l’usage du train se l’offre et ses canaux de distribution. La dé- trains à réservation obligatoire et pendant les heurte à une accumulation de contraintes matérialisation des billets doit être étendue périodes de pointe (la carte Enfant Famille a (horaires, tarifs, compostage, portiques), la sans être opposée au support papier. Les so- été stupidement supprimée en 2014 malgré SNCF estimant que le client doit être à son lutions de distribution physique et numé- nos interventions vigoureuses). service et concevant son offre non à partir rique doivent assurer la fonction de guichet La FNAUT a souvent proposé à la SNCF des demandes des voyageurs, mais à par- unique et garantir l’intermodalité tarifaire. d’étudier les effets d’une baisse systématique tir de ses contraintes d’exploitation alors La mise en vente parfois très tardive des des prix du TGV sur sa fréquentation et sur qu’elle devrait au contraire introduire de trains de nuit est inacceptable et encou- son équilibre économique. La décision de la simplicité et de la souplesse : aujourd’hui, rage un report sur d’autres trajets ferro- baisser les prix, afin d’attirer de nouveaux il est quasiment impossible d’improviser un viaires moins pratiques, voire sur d’autres clients, est un pari qu’a osé la RENFE (so- voyage en train. modes de transport. ciété nationale d’exploitation des chemins Les horaires des trains utilisés lors des de fer espagnols) en 2013. Le succès a été tel déplacements domicile-travail sont sou- Une offre rénovée et diversifiée que dès 2014, la fréquentation de l’AVE (le vent mal adaptés aux horaires de travail. TGV espagnol) a dépassé celle de l’avion sur Les fréquences sont notoirement insuffi- Le voyageur doit être valorisé par un ac- certaines lignes, notamment la principale : santes, le cadencement des circulations est cueil de meilleure qualité. Le confort doit Madrid-Barcelone (FNAUT Infos 241). très imparfait. être revu (matériel accessible, correspon- Et si elle veut réduire durablement le prix La politique actuelle de réservation est dances quai à quai...). Et, quoi qu’on dise, du train, la SNCF doit traiter les causes contraire aux attentes des voyageurs : la la vitesse reste un élément d’attractivité des surcoûts de production de ses services, réservation facultative doit être la règle sur du train : les horaires sont trop détendus c’est-à-dire mettre en œuvre les principes tous les trains Intercités. (FNAUT Infos 258). d’exploitation du low cost aérien : utiliser Les conditions d’échanges et de rembour- Enfin l’offre doit être diversifiée : le plus intensément son parc de matériel rou- sements doivent être simplifiées pour deve- voyageur a besoin de TER, de trains In- lant, qui est dimensionné pour couvrir les nir compréhensibles. tercités, de TGV. Les trains de nuit natio- heures de pointe (le maintenir en circulation Les cartes de réduction SNCF ne sont naux et internationaux sont un excellent en heures creuses, en début de matinée, en pas valables sur la partie française des trajets mode de transport low cost par leur capa- fin de soirée, voire de nuit) et développer la internationaux tels que Marseille-Bruxelles cité à incorporer des voitures de niveaux polyvalence de son personnel. ou Paris-Milan. de services différents.

FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 x 9 Actualité Une autre approche de la mobilité des habitants des zones périphériques (Pixabay)

La FNAUT a su faire des propositions pour répondre aux problèmes de mobilité des habitants des zones périurbaines et rurales. Elle s’est en par- ticulier insurgée contre l’idée que la dépendance automobile est une fata- lité dans ces zones « périphériques » et défendu la thèse qu’il est possible d’y développer des transports collectifs efficaces à un coût acceptable (FNAUT Infos 270).

Il nous a semblé utile d’élargir le débat et de juxtaposer deux points de vue différents : celui du géographe Christophe Guilly (encadré page suivante), et celui de l’expert lillois Mathieu Chassignet (www.alternatives-economiques. fr/carburants-perdants/00086957). Selon Mathieu Chassignet, qui a exploité les données de l’INSEE, « on brandit des généralités sans vérifier, mais si on regarde les chiffres, on s’aperçoit que c’est faux ».

La distance domicile-travail On dit souvent que ce sont les moins riches qui se retrouvent contraints d’ha- biter le plus loin de leur lieu de travail. En réalité, contrairement à une idée reçue, au-delà de certains cas particuliers, l’éloignement est proportionnel aux revenus du ménage, il varie de 8 à 17 km : ce sont les plus riches qui habitent le plus loin de leur travail. Et la tendance s’accentue : les enquêtes ENTD 1994 et 2008 montrent que l’éloignement a peu augmenté pour les moins aisés et beaucoup augmenté pour les plus aisés (diagramme 1). Les enquêtes de l’INSEE montrent d’autre part que l’éloignement n’est pas le fait des familles qui iraient loin d’une grande ville pour chercher un logement plus spacieux.

Les déplacements domicile-travail Les moins riches utilisent bien moins la voiture que les plus aisés : 38 % se rendent au travail en voiture contre 70 % pour les plus riches. Inversement, les moins favorisés recourent plus à la marche, au vélo et aux transports col- lectifs (diagramme 2).

Les autres déplacements Il n’y a pas que les déplacements domicile-travail qui comptent. Si on regarde l’ensemble des déplacements (domicile-travail, études, achats, ser- vices...) sur une semaine, on retrouve la même corrélation entre distance parcourue et niveau de revenus.

Le taux de motorisation Plus ses revenus sont élevés, plus un ménage possède de voitures. Le 10e décile (les 10 % les plus riches) possède plus de 2 fois plus de voitures que le 1er décile (les 10 % les moins riches). De même, les voitures possédées par les ménages les plus aisés par- courent sur une année plus de kilomètres que les voitures possédées par les ménages les moins aisés. Au total, les ménages les plus aisés parcourent près de 3 fois plus de kilomètres en voiture chaque année que les ménages les moins aisés (diagramme 3).

Les budgets voiture et chauffage Les ménages les moins aisés possèdent des voitures plus anciennes et donc plus consommatrices de carburant. Mais la consommation plus importante de ces voitures anciennes est très loin de compenser le fait qu’elles roulent beaucoup moins. Le budget carburant des ménages est donc lui aussi proportionnel aux revenus.

Le poids budgétaire des carburants et du chauffage Le poids des carburants (dépenses divisées par les dépenses totales du ménage) n’est pas plus important en moyenne pour les ménages les moins aisés que pour les plus riches. Cependant 40 % des ménages du 1er décile ne sont pas motori- sés contre moins de 10 % des ménages du 10e décile. Si on ne regarde que les ménages motorisés, le poids du carburant sur le budget des ménages modestes ressort plus nettement (diagramme 4 ). Le budget chauffage semble en revanche plus pénaliser les ménages modestes par rapport aux ménages aisés (6 % du budget contre 4 %) (diagramme 5). Le chèque énergie semble donc plus justifié qu’un chèque carburant (d’autant plus que, concernant le chauffage, il n’y a que peu de risque d’effet rebond).

10 x FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 Actualité Point de vue d’un géographe sur les Gilets jaunes Une vraie concertation sur les services TER ?

Christophe Guilluy est l’auteur de « La Une concertation sérieuse entre la Région, Autorité Organisatrice des Transports, fin de la classe moyenne occidentale » et l’opérateur du TER (actuellement SNCF Mobilités), SNCF Réseau et les associations re- de « La France périphérique ». Il a été in- présentant les usagers est indispensable. La FNAUT Auvergne-Rhône-Alpes a énoncé 7 terrogé par Le Parisien, nous résumons principes d’organisation de la concertation. ses réponses à titre d’information. 1. Les pratiques de mobilité évoluent aspects des services TER (horaires des mais le transport ferroviaire, seul trans- trains, tarification, billettique, qualité de « La contestation des Gilets jaunes va port de masse efficace, reste le coeur service, intermodalité), et que des solu- bien au-delà de la simple question du prix du dispositif autour duquel peuvent et tions répondant aux préoccupations des des carburants, c’est un ras-le-bol général doivent s’articuler les autres modes : usagers peuvent être étudiées. qui s’exprime. autocar, covoiturage, vélo, transport ur- 4. Les modalités pratiques de ces réu- bain... Le bon fonctionnement des trains nions préparatoires doivent être déci- Le phénomène est-il homogène ? TER doit donc recevoir la priorité. dées au préalable avec les associations Oui, la grogne vient de territoires moins 2. Auvergne-Rhône-Alpes est une concernées pour que leurs représentants productifs économiquement, où le chô- région étendue et contrastée. Un même puissent y participer. mage est très implanté. Ce sont des ter- modèle de concertation ne peut être 5. En cas de travaux sur les voies ou de ritoires ruraux, des petites et moyennes adapté à toutes les situations. Certaines modification d’un service, une réunion de villes souvent éloignées des grandes mé- associations regroupent les usagers d’une concertation spécifique doit être organi- tropoles : ce que j’appelle la « France péri- seule ligne ; d’autres travaillent sur une sée suffisamment à l’avance pour que les phérique ». Ce sont des lieux où vivent les étoile ferroviaire ; d’autres encore sont demandes des usagers puissent être prises classes moyennes, les ouvriers, les petits implantées sur un bassin de vie et traitent en compte. salariés, les indépendants, les retraités. de toutes les mobilités. 6. Les réunions associant tous les opé- Cette majorité de la population subit Ce sont les associations locales d’usa- rateurs de mobilité d’un bassin de vie depuis 20 à 30 ans une recomposition éco- gers qui sont le mieux à même de préciser peuvent être efficaces à condition que les nomique qui l’a desservie. Elle n’est plus le mode de fonctionnement souhaitable sujets à traiter soient précis et en nombre intégrée politiquement et économique- de la concertation. raisonnable. ment. Elle a subi la fermeture progressive 3. Les réunions techniques prépara- 7. La présence d’un élu régional et des des usines (et le retour à l’emploi est très toires aux réunions de concertation avec élus locaux aux réunions de concertation compliqué), la désertification médicale, le les associations sont indispensables. C’est est nécessaire. Si d’autres Autorités orga- départ des services publics et des com- grâce à elles que les associations peuvent nisatrices des transports sont impliquées, merces. Tout cela s’est cristallisé autour de faire connaître les demandes, réclama- il faut aussi qu’un de leurs élus participe la question centrale du pouvoir d’achat. Le tions et propositions concernant tous les aux réunions. mouvement des Gilets jaunes est la consé- quence de tous ces éléments. Tout pour la voiture S’agit-il d’une énième contestation populaire, comme celle des Bonnets Le 18 novembre dernier, juste après le bouclage du FNAUT Infos 270, le Premier rouges, ou d’un mouvement durable ? ministre a annoncé l’annulation de diverses mesures décidées mi-novembre pour Difficile à dire. Le ressentiment est gigan- répondre aux exigences des gilets jaunes : la hausse et l’extension du chèque énergie tesque. Les problèmes sont désormais sur à 2 millions de ménages, le relèvement du barème fiscal kilométrique pour les pro- la table. Si la contestation des Gilets jaunes priétaires de petites cylindrées et le doublement de la prime à la conversion pour les ne perdure pas, un autre mouvement « gros rouleurs » (actifs non imposables qui roulent plus de 60 km par jour pour aller émergera de ces territoires plus tard, car travailler et rentrer chez eux). rien n’aura été réglé. Le Premier ministre estimait en effet que ces mesures n’étaient plus justifiées, les hausses des taxes sur les carburants (6,9 centimes sur le gazole et 2,9 sur le SP 95) ayant Le dialogue entre ces populations et la été annulées pour 2019 et des mesures favorables au pouvoir d’achat ayant été prises. classe politique semble coupé… Il aurait pu ajouter que le prix du baril de pétrole brut avait baissé de 22 dollars entre Oui. Le monde d’en haut ne parle plus le 1er octobre et le 1er décembre (- 27 %), ce qui a entraîné, selon le calcul de l’écono- au monde d’en bas. Et le monde d’en bas miste Jean-Marie Beauvais, une baisse de 12 % du prix du litre de gazole HT et 7 % TTC, n’écoute plus le monde d’en haut. Les élites soit 10 centimes à la pompe. Une baisse très supérieure à la hausse des taxes qui avait sont rassemblées dans des métropoles où été décidée puis annulée : c’est bien ce qui est observé à la pompe, où le prix du litre il y a du travail et de l’argent. Elles conti- de gazole est devenu voisin de 1,40 c. nuent de s’adresser à une classe moyenne Quelques heures plus tard, les mesures annulées étaient rétablies à la demande de et à une réalité sociale qui n’existent plus. l’Elysée et sous la pression de nombreux parlementaires LREM. Selon Amélie de Mont- chalin, députée de l’Essonne, il s’agit d’une « victoire de la vie quotidienne ». Certes le Les mesures d’accompagnement à la chèque énergie est un dispositif d’aide au paiement des dépenses de chauffage ou conversion d’un véhicule propre n’ont d’isolation des logements par les ménages modestes, son extension semble justifiée pas atténué la colère des Gilets jaunes. (voir bas page 8). Mais il n’en est pas de même des mesures d’aide directe aux automo- Les réponses du gouvernement sont à bilistes (dont l’abandon aurait permis de financer la rénovation d’une « petite ligne » côté de la plaque. Les gens ne demandent ferroviaire : 40 Mc sont nécessaires pour Tours-Loches). pas des solutions pour financer un nou- Il est regrettable qu’un député de la majorité, Matthieu Orphelin, membre de la veau véhicule. Ils attendent des réponses commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, ne l’ait de fond où on leur explique quelle place ils pas compris et ait plaidé pour le retour du relèvement du barème fiscal kilométrique ont dans ce pays. Bien des élus locaux ont (ce dispositif qui permet aux salariés et indépendants de déduire les frais de transport des projets pour relancer leur territoire, mais domicile-travail des revenus imposables) et de la super-prime à la conversion des vé- pas d’argent pour les mettre en place. Il faut hicules (4 000 c) pour les gros rouleurs - un retour qu’il a salué comme « une excellente développer ces régions, partir du peuple nouvelle ». Pas pour l’environnement : comme encouragement à l’usage de la voiture plutôt que des premiers de cordée. et à l’allongement de la distance domicile-travail, on ne fait pas mieux...

FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 x 11 Actualité La généralisation de la médiation Brèves dans le secteur des transports Mauvais conseil

(MD) Raymond Soubie, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy : « le gouvernement pourrait Dans le contexte d’une généralisation de la médiation à l’ensemble des secteurs de la ajuster l’évolution des taxes sur les carbu- consommation, Imane El Bouanani, Marc Debrincat, Jovanah Murugan et Anne-Sophie rants à celle du prix du pétrole, afin de limi- Trcera, du service juridique de la FNAUT, ont analysé la situation du secteur des trans- ter les hausses de prix à la pompe. Ce serait ports et proposé des améliorations. protéger les consommateurs sans renoncer à la fiscalité écologique ». Protéger vraiment le Le principe de la médiation Par ailleurs, la médiation ne doit pas être consommateur, c’est au contraire l’habituer confondue avec le système de guichet unique à une énergie chère et l’inciter à réduire sa La médiation est un des modes de règle- des organismes de règlement extrajudiciaire dépendance à la voiture... ment des litiges. Elle permet au consomma- des litiges mis en place par l’Union euro- teur de résoudre un litige lorsque le dialogue péenne. Ce système ne s’impose pas au pro- Fumer sur les quais ? avec le professionnel n’a pas permis d’aboutir, fessionnel, qui est libre de l’accepter ou non. en s’adressant à un tiers, le médiateur. Il est aujourd’hui interdit de fumer dans La médiation est relativement rapide, de Le contexte juridique les bâtiments des gares, mais pas sur les l’ordre de quelques semaines ou mois, et gra- quais extérieurs, sauf à Paris (où l’interdic- tuite. Le consommateur conserve son droit à L’Union européenne a généralisé la média- tion, décrétée par le Préfet de Police, n’est agir en justice si la médiation ne lui apporte tion à tous les secteurs de la consommation. pas respectée). Suite aux plaintes des voya- pas satisfaction ; il n’est pas lié par la proposi- Selon le droit européen, les professionnels geurs, l’association Les Droits des Non-Fu- tion du médiateur, qui ne reste qu’un avis sur peuvent choisir entre une médiation de sec- meurs (dnf.asso.fr) demande que l’interdic- le dossier ; enfin la prescription concernant teur et des médiations d’entreprise. Un mé- tion soit étendue aux quais de toutes les le litige est suspendue le temps de l’étude du diateur sectoriel est compétent pour tous les gares, comme en Scandinavie. dossier par le médiateur. médiateurs d’un même secteur d’activités, Toutefois, il est nécessaire que le consom- tandis qu’un médiateur d’entreprise n’est com- Vocabulaire à la mode mateur ait déjà essayé de résoudre le litige pétent que pour l’entreprise considérée. Deux directement auprès du professionnel, obligations sont imposées aux professionnels : Afin de pérenniser une mobilité autonome, qu’une solution satisfaisante ne lui ait pas garantir au consommateur le recours effectif inclusive et sans couture du quotidien, et été proposée, et qu’il n’ait pas saisi la justice à un dispositif de médiation de la consom- compte tenu de la multiplicité et de la com- de ce désaccord. mation ; faire connaître au consommateur le plexité des enjeux, il convient d’articuler une La médiation a un impact positif pour l’en- médiateur compétent et le moyen de le saisir. concertation assumée et une problématique semble des consommateurs, car le médiateur En cas de manquement à ces obliga- innovante du changement d’échelle des ini- peut émettre des recommandations visant à tions, des sanctions sont prononcées par la tiatives avec la mobilisation, le basculement améliorer le traitement des litiges dans son Direction Générale de la Concurrence, de stratégique et la mise en réseau de la société ensemble et à prévenir leur apparition. la Consommation et de la Répression des civile et du tissu associatif territorial vers un Fraudes (DGCCRF). nouveau paradigme démocratique et envi- Les autres possibilités ronnemental dans le cadre d’un nouvel outil de réglement des litiges L’obligation de la médiation contractuel de la transition énergétique, soli- dans les transports : état des lieux daire, écologique et durable grâce au signal La possibilité offerte récemment à un pro- d’une ingénierie d’appui et à un manage- fessionnel de recourir à l’arbitrage, qui fait Malgré l’obligation pour les professionnels ment citoyen de la gouvernance (d’après un intervenir un tiers indépendant, ne relève pas de mettre à la disposition des consomma- texte du CESE). de la médiation. teurs des systèmes de médiation, des champs En cas d’arbitrage, le consommateur perd restent encore non-couverts. Ainsi, dans le Le train aboiera trois fois son droit à agir en justice : il ne peut qu’accep- secteur des transports et malgré l’existence ter la décision de l’arbitre, sans recours pos- d’opérateurs importants, il n’existe pas, à Le Japon connaît une hécatombe de cerfs sible. Le litige sort alors des juridictions, sans ce jour, de médiateurs notamment pour les aux abords des voies ferrées : les animaux sont certitude sur le respect du droit des consom- nouvelles mobilités (VTC, location de deux- attirés par les rails car ceux-ci contiennent du mateurs, sans visibilité sur les décisions prises roues en free floating, covoiturage, voitures en fer, un élément nécessaire à leur alimentation. puisqu’elles ne sont pas publiques, sans possi- libre-service et autopartage). Des trains ont été équipés de haut-parleurs bilité d’établir une jurisprudence. Le code de la consommation rend obli- qui diffusent des brames de cerfs pour alerter gatoire l’information précontractuelle sur les animaux, puis des aboiements de chiens e Les actes du 21 congrès la possibilité de recourir à un médiateur. De pour les faire fuir. Résultat : les intrusions sur de la FNAUT plus, l’information du consommateur sur le les voies ferrées ont été réduites de 45 %. médiateur doit se faire sur son site internet, Les actes comprennent un résumé du ses conditions générales de vente (CGV), FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information Directeur de publication : Jean Sivardière rapport de conjoncture, la motion du ses bons de commande, ou par tous moyens Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT congrès, les principales déclarations des appropriés en l’absence de tels supports. CPPAP n° 0920 G 88319 - Dépôt légal n°271 ISSN 0983-172 X - Tirage : 1200 ex. élus invités au débat du samedi matin, Nous avons analysé le respect de ces obliga- Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative un résumé de l’exposé de Patrick Jean- tions par les entreprises issues de quinze sec- Av de la Plage - 86240 Ligugé tet, les Tickets Verts et Rouges, Coups de teurs différents du transport public et constaté Abonnement 10 numéros : Individuels : 19 b chapeau et Amendes, un compte-rendu l’absence de mise en place de la médiation dans Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b Prix au numéro : 2 b des travaux des ateliers et les exposés le secteur des VTC et des taxis. Nous avons Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT présentés à la fin du congrès. Le docu- donc demandé à certaines entreprises de VTC de votre région, contacter notre permanence : ment peut être demandé au siège de la (Uber France, LeCab, Chauffeur Privé) et de 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06­ FNAUT (chèque de 5 euros, port compris, taxis (G7 Booking, Alpha taxis) de désigner un e-mail : [email protected] à l’ordre de la FNAUT). médiateur et d’en informer le consommateur. Internet : https://www.fnaut.fr

12 x FNAUT infos n°271 - janvier-février 2019 infos 272 mars 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Décentralisation... et démocratie ? Les dépenses publiques dues aux

L’Association des Maires de France, l’As- sociation des Départements de France, et services de cars librement organisés l’association Régions de France ont lancé à Marseille, le 26 septembre 2018, un « appel pour les libertés locales ». Les élus territoriaux dénoncent une recentralisation de plus en plus flagrante : « notre pays meurt de son ul- tra-centralisation ; nous ne pouvons plus ac- cepter la prise de pouvoir et le mépris d’une technocratie, enfermée dans ses certitudes et coupée de nos territoires et de nos vies ». La FNAUT ne peut qu’approuver cet appel solennel pour une relance de la décentrali- sation, suivant l’exemple de beaucoup de nos voisins européens : plus les décideurs sont proches du terrain et des électeurs, plus les décisions ont des chances de répondre Les services de cars « Macron », appelés dorénavant Services Librement Or- aux besoins de la population et de relayer ganisés (SLO), se sont considérablement développés depuis leur légalisation Autocar Flixbus (flixbus.fr) ses aspirations économiques, sociales et par la loi Macron du 6 août 2015. Comme l’a montré une expertise suggérée environnementales. par la FNAUT et réalisée par Bruno Cordier (cabinet ADETEC), ces services ont La gestion des lycées par les Régions et bénéficié en 2016 d’une aide publique d’environ 24 M€ (57 % fournis par l’Etat, celle des trains TER, qui ont connu un renou- 43 % par les Régions) : 66 % de cette dépense correspond à l’usage des infras- veau remarquable depuis vingt ans, le dé- montre de manière évidente. tructures routières et 23 % aux pertes de recettes du TER, compensées par les Ceci étant, encore faut-il que les besoins Régions ; la perte de clientèle TGV et Intercités a coûté 54 M€ à SNCF Mobilités. et les aspirations de la populations puissent En 2017, le dépense publique a été d’environ 26 M€ (+ 11 %), la perte finan- s’exprimer aisément. Selon leurs associations, cière de SNCF Mobilités a atteint 67 M€ (+ 24 %). « les élus locaux sont vaguement consultés mais jamais écoutés ». Mais ne peut-on en dire autant des associations d’intérêt géné- Une erreur d’analyse ral (défenseurs de l’environnement, usagers des services publics...), trop souvent igno- Selon la ministre des Transports, la Loi Qui a lancé la construction de tant d’auto- rées, voire étouffées financièrement, par ces d’Orientation des Mobilités (LOM) veut sor- routes qui n’ont fait que générer des trafics mêmes élus locaux ? La gestion coupée du tir de la logique du tout TGV « qui a poussé nouveaux sans venir à bout de la congestion, terrain est-elle seulement le fait de l’Etat ? au tout-voiture beaucoup de nos concitoyens, et oublié l’entretien du réseau ferré classique ? L’appel des élus pour les libertés locales ne laissés sans autre solution pour se déplacer ». Qui a laissé se développer l’étalement urbain, s’accompagne malheureusement d’aucun Il est certain que les habitants des zones pé- les lotissements, les grandes surfaces commer- engagement à approfondir la démocratie lo- riurbaines et rurales sont aujourd’hui privés ciales, les hôpitaux et autres services publics, cale, qui aurait pourtant tout à gagner d’une de transport collectif performant, ferroviaire sans se préoccuper de leur desserte collective ? participation vraie et systématique de la po- ou routier. Mais faut-il - c’est la mode - en Faire porter au TGV, utilisé chaque année pulation aux décisions qui la concernent. rendre le TGV responsable ? par 140 millions de voyageurs (trafic domes- Bruno Gazeau, président de la FNAUT z Qui, sinon les gouvernements précédents, tique 110 et international 30), la responsabilité mais aussi l’actuel, a laissé la SNCF décider de la dépendance automobile est trop facile : Sommaire de la politique d’aménagement du territoire on trouve en France 3 000 km de LGV contre et supprimer des centaines de km de voies 12 000 km d’autoroutes... et le TGV concur- Les aides publiques aux services ferrées et des relations TGV, ou les exploiter rence efficacement la voiture et l’avion. d’autocars librement organisés 2-5 de manière à décourager la clientèle et à la La LOM accorde des crédits considé- La régression de l’offre TGV 6 rejeter vers la voiture ? rables au rail, mais le retard à combler est Le train à hydrogène 7 Qui, sinon l’Etat, a longtemps investi exa- immense et les voyageurs ont besoin de Les trains de nuit 8 gérément sur les routes au nom du « désen- toutes les composantes du transport ferro- Le trolleybus 9 clavement » et poussé les Régions à faire de viaire : TER, Intercités, TGV. La chronique du Lyon-Turin 10 même au détriment des lignes régionales Le développement simultané de ces offres Oslo, ville sans voitures 11 dans le cadre des Contrats de Plan Etat-Ré- exige des choix encore plus nets entre la route La voiture et l’espace public 12 gions (FNAUT Infos 240) ? et le transport collectif.

FNAUT infos n°272 - mars 2019 x 1 Dossier Les SLO en chiffres

l Les opérateurs Les services SLO sont exploités par 3 opé- Les services d’autocars SLO rateurs principaux : Flixbus (société privée), Ouibus (filiale de SNCF Mobilités, vendue récemment à Blablacar) et Isilines-Eurolines (groupe Transdev). (flixbus.fr) l L’offre Certains responsables politiques dénoncent avec complaisance les subventions En moyenne annuelle, le nombre des « trop élevées » accordées aux transports collectifs. Mais les transports collectifs ne communes desservies augmente réguliè- sont pas les seuls à bénéficier de l’aide du contribuable. rement ; il a été de 183 en 2016 et de 237 en 2017. Certaines communes ne sont desser- Nous présentons ici une expertise de Bruno La part de marché des services SLO vies que l’hiver, ou que l’été. Cordier, directeur du cabinet ADETEC, réali- Le nombre des liaisons assurées entre sée à la suggestion de la FNAUT, qui a concer- En 2016, les services de cars SLO ont re- deux communes augmente lui aussi ; il a été né les aides publiques aux services d’autocars présenté, en kilométrage parcouru, 0,02 % de 913 en 2016 et de 1199 en 2017. Le kilomé- SLO, couramment appelés cars Macron. du trafic routier total, 0,4 % du trafic total trage parcouru par les autocars a diminué de Cette expertise constitue la suite logique de des véhicules lourds et 5 % du trafic total 14 % entre 2016 et 2017 mais l’offre, chiffrée celle déjà réalisée par Bruno Cordier sur les des autocars. en sièges.km, n’a pas diminué, la suppression aides publiques au covoiturage (FNAUT Infos Exprimés en voyageurs.km, ces services de certaines relations peu fréquentées ayant 261). Dans notre prochain numéro, nous pré- assurent 0,2 % des déplacements de per- été compensée par l’augmentation de la ca- senterons les résultats d’une troisième expertise sonnes toutes distances confondues, 0,6 % pacité moyenne des cars. sur les aides publiques au transport aérien. des déplacements de personnes à longue Les chiffres figurant dans cette étude se distance (plus de 80 km), 1,1 % des déplace- l La fréquentation rapportent à l’année 2016 ; une actualisation ments effectués en transport collectif et 3 % La fréquentation a été de 6,2 millions de pour 2017, particulièrement instructive, est des déplacements effectués en car ou bus. voyageurs en 2016 et a atteint 7,1 millions donnée page 5. en 2017 (+ 15 %). Le développement des Les déplacements à longue distance offres ferroviaires à bas coût et la hausse La création des services SLO des tarifs SLO l’ont freinée, mais sa hausse Le trafic des cars SLO est donc marginal est repartie, en particulier avec la création Avant 2011, seuls les services routiers régu- dans le marché global des transports. Mais récente de dessertes d’aéroports. Par suite, liers conventionnés par l’autorité organisatrice si on sélectionne le marché des déplace- le nombre de voyageurs.km a augmenté de transport d’une collectivité locale, départe- ments à longue distance (plus de 80 km), de 6 % en 2017, la longueur moyenne du mentale ou régionale étaient autorisés. on constate (graphique ci-dessous) que trajet passant de 339 km en 2016 à 315 La loi ORTF ou loi Bussereau du 8 dé- ce trafic n’est pas négligeable (les trafics km. Fin 2017 et début 2018, les lignes les cembre 2009 a autorisé, à partir de 2011, le collectifs urbain, TER et routier régional, plus fréquentées sont Lille-Paris, Lyon Aé- cabotage sur le territoire national des services qui sont principalement des transports de roport - , Lyon-Paris, Paris-Rouen internationaux réguliers (routiers et ferro- proximité, ne sont pas considérés ici ; les et Lyon-Grenoble. viaires) de voyageurs. trafics SLO, Intercités et TGV effectués Le taux moyen d’occupation des auto- Puis la loi Macron du 6 août 2015 a entière- sur moins de 80 km sont négligeables). En cars, qui était encore d’environ 30 % en ment libéralisé le marché intérieur du transport gros, un voyage à longue distance sur 150 à 2015, est en forte progression : il est passé routier, c’est-à-dire autorisé la création de ser- 200 est effectué en car SLO. de 40 % en 2016 à 51 % en 2017 (+ 26 %) vices réguliers non conventionnés par une au- En 2016, les déplacements en cars SLO, suite à la hausse de la fréquentation et à la torité organisatrice de transport (FNAUT In- chiffrés en voyageurs.km, ont représenté suppression de relations peu fréquentées. fos 252). Les liaisons comportant des arrêts 1,1 % des déplacements effectués en voiture distants de moins de 100 km et susceptibles de (hors covoiturage), 35 % des déplacements l La tarification menacer l’équilibre économique d’un service effectués en covoiturage longue distance, conventionné (train ou car) peuvent cependant 3,5 % des déplacements effectués en train Après une période de prix d’appel (3,2 c être interdites ou limitées par l’ARAFER suite (TGV et Intercités) et 14 % des déplace- pour 100 km) pour attirer les voyageurs, la à la saisine d’une autorité organisatrice. ments intérieurs effectués en avion. politique tarifaire des autocaristes est deve- nue un peu plus réaliste : le tarif moyen est passé de 4 c pour 100 km en 2016 à 4,7 c en 2017 (+ 17 %). Le tarif moyen des des- sertes d’aéroports est plus élevé (7,3 c pour 100 km au 4ème trimestre 2017) que celui des autres liaisons (4,6 c).

l Les recettes Les recettes commerciales HT aug- mentent : 83 Mc en 2016, 105 Mc en 2017 (+ 26 %). La recette kilométrique moyenne est en forte hausse, de 0,76 c en 2016 à 1,08 c en 2017 (+ 42 %) sous l’effet des hausses des tarifs et du taux d’occupation des véhicules. Mais le déficit global des exploitants reste no- table : environ 80 Mc en 2016, 50 Mc en 2017 (la recette kilométrique devrait atteindre environ 1,90 c pour l’annuler).

2 x FNAUT infos n°272 - mars 2019 Dossier Les dépenses publiques dues aux cars SLO

Les dépenses directes Le manque à gagner de SNCF Mobilités (1,5 fois plus au TGV, 2 fois plus aux Inter- et les externalités (accidents, émissions de cités et 9 fois plus au TER et aux trains et Les dépenses publiques en faveur des CO2...) ne sont pas pris en compte dans RER franciliens). services SLO ont été de 23,7 Mc, soit en- l’évaluation des dépenses publiques directes En 2016, le covoiturage longue distance viron 24 Mc, en 2016 (premier graphique pour les cars SLO. a donc davantage concurrencé le train que ci-dessous) : les cars SLO. - 66 % (15,6 Mc) correspondent à Les reports modaux l’usage des infrastructures routières Le manque à gagner (11,7 Mc à la charge de l’Etat et 3,9 Mc à En 2016, l’ARAFER a montré que, si les de SNCF Mobilités la charge des Départements) ; services SLO n’existaient pas, 17 % de leurs - 23 % (5,5 Mc) correspondent aux usagers actuels ne se seraient pas déplacés, Le prix moyen du TGV est de pertes de recettes des transports ferro- 37 % auraient pris le train, 19 % une voiture 10,4 centimes/km, mais l’usager des cars viaires conventionnés (TER) et sont pris personnelle ou de location et 2% l’avion, SLO est en général un jeune qui béné- en charge par les Régions ; enfin 25 % auraient fait du covoiturage ficie de tarifs SNCF réduits, d’où une - 8 % (2 Mc) sont liés à des emplois (deuxième graphique ci-dessous). perte de recette estimée à 8,3 centimes/ publics (90 % à la charge de l’Etat, 10 % à Selon la même enquête, pour les tra- km (- 20 % par rapport au tarif normal), la charge des Régions) ; jets de moins de 250 km (2,7 M de trajets et un manque à gagner de 50 Mc/an avec - 3 % (0,6 Mc) sont liés à l’usage des SLO en 2016, distance moyenne 175 km), TVA, 45 Mc HT. gares routières gérées par des collecti- le report se serait fait sur la voiture (26 % Un calcul analogue montre que le manque vités locales et des sociétés d’économie des usagers), le covoiturage (23%), le TER à gagner des trains Intercités est de 9 Mc et mixte (SEM) ; (7 %), l’Intercités (9 %) et le TGV (20 %. celui des TER de 5,5 Mc HT (dans le cas - les recettes, liées notamment aux Pour les trajets de plus de 250 km (3,5 M des TER, aucune minoration du tarif n’est amendes, sont déduites. de trajets en 2016, distance moyenne 470 appliquée car les abonnés, majoritaires, Au total, 57 % des dépenses publiques km), le report se serait fait sur la voiture sont peu attirés par les cars SLO). sont à la charge de l’Etat (13,5 Mc) et (12 % des usagers), le covoiturage (26 %), Au total, le manque à gagner de 43 % à la charge des collectivités territo- le TER (2 %), l’Intercités (7 %), le TGV SNCF Mobilités a donc été de 59,5 Mc. riales (10,2 Mc). (29 %) et l’avion (4 %). en 2016. La perte TER a été compensée On constate que les coûts d’usage des in- De ces données, Bruno Cordier a pu cal- par les Régions. Les pertes de recettes à frastructures routières sont prépondérants. culer qu’en 2016 : la charge de SNCF Mobilités, dues à la Ces coûts ont été déterminés à partir des - les cars SLO ont pris au train 792 M de concurrence faite aux TGV et Intercités, se données suivantes, fournies par le Conseil voyageurs.km (dont 7 % au TER, 18 % aux montent donc à 54 Mc/an. général du développement durable : Intercités, 75 % au TGV) ; - les dépenses de l’Etat et celles des col- - le rail (tous trains confondus, y compris Une expertise difficile lectivités territoriales pour les routes et la les trains et RER franciliens) a perdu 0,85% sécurité routière ; de sa clientèle voyageurs ; Les statistiques disponibles sur les - la répartition des coûts d’usage des - les trains et RER franciliens ne sont pas déplacements sont données en voya- routes entre voitures, véhicules utilitaires concurrencés par les cars SLO ; geurs.km. Le nombre de voyages et la légers et véhicules lourds ; - les trains Intercités ont perdu 2 % de longueur moyenne d’un trajet n’est - la part des autocars SLO, en véhicules. leur clientèle, le TGV 1,1 % et les trains connue que pour certains modes (no- km, dans la circulation routière (l’usure TER 0,3 % seulement (ce qui est logique tamment les cars SLO). des routes est à peu près la même pour les puisque les services SLO comportant des Pour les modes dits interurbains et les bus, les cars et les camions) ; arrêts distants de moins de 100 km peuvent transports occasionnels (manifestations, - enfin une estimation de la répartition être interdits). tourisme), le nombre de voyages n’est du trafic SLO sur les différents types de Le covoiturage (toutes distances confon- pas connu et aucune distinction n’est voiries (autoroutes 60 %, réseau national dues) a pris en 2015 2,1 fois plus de voya- faite entre les déplacements à courte et 30 %, réseau local 10 %). geurs.km au train que les cars SLO en 2016 longue distance.

FNAUT infos n°272 - mars 2019 x 3 Dossier Les coûts externes des cars SLO

Le coût des principales externalités des cars SLO a pu être calculé.

L’existence de l’offre de cars SLO pro- voque une induction importante de déplace- ments et une forte concurrence faite au train. En 2016, elle a entraîné une consomma- tion supplémentaire de 4 800 tonnes eq pé- trole en 2016 et des émissions supplémen- taires de 21 000 tonnes de CO2 ; à raison de 45 c/tonne de CO2 (selon l’évaluation du rapport Quinet), le coût de ces émis- sions pour la collectivité a été de 0,9 Mc. Le coût des accidents corporels impli- quant un car SLO a été de 10,4 Mc en 2016 (coût direct des accidents évalué selon la méthode économique classique, voir page 3). Mais si on compare les situations avec et sans services SLO (c’est la méthode différentielle), on constate au contraire une économie de 18,7 Mc sur le coût des accidents du fait des reports de la voiture sur l’autocar. Quant au coût d’usage des infrastruc- tures routières, il a été, en 2016, de 15,6 Mc (coût direct évalué selon la méthode économique classique) et de 11 Mc seu- lement selon la méthode différentielle en raison des reports de la voiture sur le car. Comparaison avec les autres modes de transport

Bruno Cordier a calculé le montant des dépenses publiques dues aux différents modes de déplacement en les rapportant au voyageur.km (graphique 1, aides 2016, et 2015 pour le covoiturage). On constate que les dépenses publiques effectuées pour les services à longue dis- tance (autocar, train et covoiturage - en rouge sur le graphique) sont du même ordre de grandeur, alors que le train devrait bénéficier d’un financement public plus important puisqu’il est le mode le plus res- pectueux de l’environnement. Les modes figurant en bleu sur le gra- phique 1 incluent une part importante de déplacements à courte distance (la totalité pour le vélo), ce qui explique la valeur éle- vée de la dépense publique correspondante par voyageur.km. Enfin Bruno Cordier a calculé le nombre de grammes de CO2 évité par chaque mode (graphique 2). Pour chacun d’eux, on suppose qu’il n’existe plus et que ses usagers ne se dé- placent plus ou se répartissent sur les autres modes disponibles. tercités n’existaient pas, 70 % prendraient au détriment du train) est contre-produc- Cette répartition est connue pour l’auto- la voiture, 10 % l’avion, 3 % le car et 7 % tive puisque l’existence de ces deux modes car et le covoiturage, mais elle a dû faire covoitureraient. augmente la consommation d’énergie fos- l’objet d’hypothèses pour le train et le vélo. Bruno Cordier a enfin calculé, pour sile et présente donc un bilan CO2 négatif. Par exemple, si le TER n’existait pas, 10 % chaque mode, la dépense publique par kg Inversement, la dépense publique pour des usagers ne se déplaceraient plus, 80 % de CO2 évité (graphique 3). le transport collectif urbain et ferroviaire, prendraient la voiture, 3 % un car et 7 % La dépense pour les cars SLO et le covoi- le vélo et, globalement, le covoiturage, est covoitureraient. Si le TGV et le train In- turage longue distance (qui se développent écologiquement vertueuse.

4 x FNAUT infos n°272 - mars 2019 Actualité Brèves Conclusion Une révolution ? L’évolution 2017/2016 Le point de vue de la FNAUT Lors du récent congrès des Régions de France, Elisabeth Borne a présenté un ex- Les informations données par Bruno La création des services SLO présente posé sur le thème : « Pacte ferroviaire, nou- Cordier concernant l’évolution des services trois aspects positifs : velles mobilités : la révolution des trans- SLO en 2017 par rapport à 2016 sont par- - elle a permis de combler des lacunes ports ». Pour la FNAUT, le pacte ferroviaire ticulièrement importantes car cette évolu- dans le système de transport collectif, di- est une réforme très positive mais avec la tion est inquiétante. verses villes n’étant reliées entre elles par LOM, on est quand même bien loin d’une En 2017, non seulement la fréquen- aucun service public ; révolution de la politique des transports... tation de cars SLO a augmenté de 15 % - elle a facilité la mobilité de la partie du à moins de considérer qu’encourager le (page 2) suite à la suppression de relations public (ménages modestes, jeunes, certains covoiturage est une « révolution ». peu fréquentées et à la création de dessertes seniors) qui accepte une perte de confort et d’aéroports, mais surtout, selon la dernière de temps par rapport au train en échange Offre premium enquête de l’ARAFER : d’un prix plus abordable (cependant les - les services SLO ont davantage petits prix SNCF restent concurrentiels des Les Chefs de Bord vont remplacer les concurrencé le train ; 12 % des usagers du prix du car) ; contrôleurs à bord des TGV Inoui. Le contrôle car SLO viennent du train Intercités et - le transfert modal depuis la voiture et le des billets sera réalisé à quai grâce aux por- 8 % du TER, au lieu de 8 % et 5 % res- covoiturage (44 % en 2016, 36 % en 2017) tiques installés dans les grandes gares TGV. pectivement en 2016 (le report depuis le est environnementalement positif. Le contrôleur a désormais pour mission de TGV n’a pas évolué en pourcentage) ; Les inconvénients de l’apparition des dorloter les voyageurs. Selon la SNCF, il lui - les services SLO ont nettement moins services SLO sont notables eux aussi : est demandé d’être « attentif, bienveillant, concurrencé la voiture (le report a été de - ils fragilisent l’équilibre financier du positif, attentionné et proactif ». 13 % des usagers au lieu de 19 %) et un rail, en concurrençant directement le train, Il s’agit notamment de personnaliser peu moins le covoiturage (le report a été de surtout les TGV et les trains Intercités, et l’accueil, d’aider le voyageur à se connec- 23 % au lieu de 25 %). en obligeant SNCF Mobilités à proposer ter au wi-fi, de valoriser les applications L’évolution a eu trois conséquences : des petits prix pour résister à la concurrence de la SNCF ou d’indiquer qu’il est possible - en 2017, la dépense publique pour les (car et covoiturage) ; de commander son repas à la voiture-bar services SLO a été de 26,3 Mc (+ 11 %) ; - ils attirent des automobilistes et covoi- grâce à son smartphone. les charges d’infrastructure ont diminué tureurs mais aussi une part importante des de 2,2 Mc car le kilométrage parcouru a usagers du rail, si bien que leurs bilans éner- BIEN DIT baissé, mais la perte financière des Régions gie et carbone sont globalement négatifs. pour le TER a au contraire augmenté de Aurélien Barrau, astrophysicien : « Les 4,5 Mc, passant de 5,5 à 10 Mc (+ 80 %) ; Peut-on rendre plus vertueuse l’exis- autres combats n’ont aucun sens si celui - le manque à gagner global de SNCF tence des cars SLO ? contre le réchauffement climatique est perdu. Mobilités a augmenté de 29 %, passant de Il faut tout d’abord que le car SLO paie Bientôt, des canicules empêcheront les gens 59,5 à 77 Mc (ce chiffre est cohérent avec ses coûts d’infrastructure (usure des routes de sortir de chez eux : le corps ne peut pas celui de l’ARAFER, qui fait état d’un total et usage des gares routières) à travers une rester longtemps à 55 °C. Le réchauffement compris entre 50 et 100 Mc), celui restant à écotaxe indexée sur le kilométrage parcouru nous privera de la liberté de nous déplacer ! la charge de SNCF Mobilités passant de 54 (hors autoroutes concédées) et le nombre Il faut s’imposer de petites restrictions pour à 67 Mc (51,5 Mc pour le TGV, 15,5 Mc de touchers de quais. Cette perspective est éviter une catastrophe bien plus liberticide ». pour les Intercités) (+ 24 %) ; justifiée économiquement : les cars SLO, - enfin le surcroît de consommation dont le déficit se résorbe peu à peu mais de pétrole dû aux cars SLO est passé lentement, constituent une offre purement de 4 800 tonnes à 8 000 tonnes et ce- commerciale ; le train paie des péages pour lui des émissions de CO2 est passé de circuler sur les voies ferrées et utiliser les 21 000 tonnes à 35 000 tonnes (d’où un gares. Les transporteurs routiers de fret et coût pour la collectivité de 1,7 Mc). les automobilistes devraient, eux aussi, être assujettis à une redevance routière. Les enjeux La disparition de l’aide publique aux cars SLO impliquerait, à déficit constant, une Bruno Cordier a conclu son expertise en hausse des tarifs de plus de 20 % et rendrait soulignant les atouts potentiels d’une évo- le train plus compétitif. (pixabay) lution de la clientèle des cars SLO : dimi- Quant à SNCF Mobilités, elle peut ré- nution des reports de clientèle du train vers sister plus efficacement à la concurrence Bêtisier spécial le car SLO et hausse des reports depuis la des cars SLO en desservant mieux l’en- voiture, le covoiturage longue distance et semble du territoire au lieu de concen- Ghislain Delabie, Ouishare, « accéléra- l’avion. Cette évolution entraînerait : trer son offre, y compris à bas coût, sur teur d’idées et de projets systémiques dédié - une baisse de la dépense publique (Etat les grands axes radiaux au détriment des à l’émergence de la société collaborative » : et Régions) et des pertes de recettes de relations transversales. « La gratuité des transports urbains n’est pas SNCF Mobilités ; SNCF Mobilités aurait par ailleurs stupide. Mais c’est un tabou chez tous les - une baisse de la consommation d’éner- intérêt, tout en poursuivant sa politique clercs : FNAUT, GART, Yves Crozet. Leur trahi- gie fossile, des émissions de CO2, des nui- d’offre à bas coût, à suivre l’exemple spec- son prend la forme d’une résignation au pa- sances routières et aériennes et de leur coût taculaire mais méconnnu de la RENFE, radigme hérité du siècle dernier : l’affectation pour la collectivité. son homologue espagnole, consistant en de l’espace public à la voiture et l’assignation La FNAUT s’est interrogée sur la pos- une réduction générale du prix du billet du transport en commun au transport des sibilité de provoquer cette évolution sans de l’ordre de 11 %, le gain de clientèle masses populaires ». Un jargon prétentieux pour autant remettre en cause l’existence compensant la perte de recette unitaire qui n’a rien à voir avec la réalité... des cars SLO. (FNAUT Infos 241).

FNAUT infos n°272 - mars 2019 x 5 Actualité La suppression du TGV Une nouvelle régression de l’offre TGV Annecy-Marseille : un gâchis La SNCF a enterré discrètement, fin 2018, la desserte TGV Annecy-Mar- (MD) seille. Comme pour la suppression de 2 des 7 allers-retours TGV Anne- Le 9 décembre 2018, la SNCF a imposé de nouvelles baisses de fréquences et des suppres- cy-Paris, ce sont les associations de sions de relations TGV, en particulier entre l’Est et le Sud-Est de la France. la FNAUT (Annecy, Chambéry-Aix et Grenoble) qui l’ont annoncé, élus et l SNCF Mobilités accélère la concentra- l L’Etat doit respecter ses engagements SNCF se gardant bien de s’exprimer tion de l’offre TGV au détriment de la des- en matière de desserte des territoires par sur cet abandon affligeant. serte des territoires. les TGV. A grand renfort de communication, la La FNAUT attache une grande impor- Le TGV Annecy-Marseille, toujours SNCF fait régulièrement état de sa volon- tance à la réussite de la réforme ferroviaire bien rempli, desservait Aix-les-Bains, té de gagner des parts de marché grâce au qui présente des enjeux forts économiques, Chambéry, Grenoble, Valence TGV, Avi- TGV. En réalité, les améliorations appor- sociaux, environnementaux, de qualité de gnon TGV et Aix-en-Provence TGV. Dé- tées se limitent, sauf exception, aux LGV ra- service et d’aménagement du territoire. sormais les voyageurs doivent se rendre diales, et les TGV Ouigo à bas coût ne font Elle a donc demandé au gouvernement à Valence TGV ou Lyon - Part-Dieu en que remplacer des TGV classiques. C’est le de respecter ses engagements en matière TER pour emprunter des TGV Lyon-Mar- contraire de l’aménagement du territoire. de dessertes nationales des territoires, seille ou Valence TGV-Marseille... dont Plusieurs relations TGV se dégradent au c’est-à-dire : les fréquences elles aussi ont réduites service 2019 : - d’imposer immédiatement à SNCF au service 2019. - la fréquence des dessertes de certaines Mobilités le maintien de la relation TGV Lancée en février 2014 grâce à l’élec- villes moyennes est fortement abaissée, y Strasbourg-Marseille par le Revermont trification de la ligne du sillon alpin compris sur des axes radiaux (Paris-Gre- (ce train ne dessert pas Lyon en heure de sud entre Valence TGV et Montmélian noble/Chambéry/Annecy) ; pointe, ce qui facilite son maintien mal- et à la construction d’un raccordement - des liaisons TGV province-province gré les travaux à Lyon - Part-Dieu), et une à la LGV à Valence TGV, la desserte TGV sont réduites ou disparaissent, en particu- meilleure répartition des circulations dans Annecy-Marseille (en 3h32) comportait lier Lorraine (Metz/Nancy) – Méditerra- la journée ; 3 allers-retours hebdomadaires lors des née (Nice/Montpellier-Toulouse) et Stras- - de retravailler les propositions faites périodes de fort trafics (généralement bourg-Lyon-Marseille par le Revermont pour maintenir des dessertes TGV de qua- les vendredis soirs, samedis matins et (Lons-le-Saunier). lité entre la Lorraine et la Méditerranée, dimanches soirs). En 2016, SNCF avait Après la suppression des trains de nuit et suite aux demandes légitimes de la Région réduit la desserte à 2 allers-retours heb- la dégradation observée sur les lignes TER, Grand Est ; domadaires en période de forts trafics. on fait tout pour « tuer » le trafic TGV : le - enfin de définir au plus tôt les dessertes Désormais le raccordement à Va- premier TGV Strasbourg – Lyon arrive do- dites d’aménagement du territoire dans le lence TGV entre la LGV Méditerranée rénavant à Lyon à 12h56 au lieu de 10h02 ! cadre du schéma national des services de et la ligne classique Valence-Grenoble transport, et de publier deux ans à l’avance est inutilisé (sauf détournements ex- l La réforme ferroviaire ouvre pour- les modifications horaires envisagées. ceptionnels des TGV Paris-Grenoble). tant des perspectives de développement Ce raccordement a coûté près de 40 intéressantes. l La SNCF a réagi à notre intervention Mc (26 Mc fournis par SNCF Réseau, S’il manque 1 Mdc par an pour mo- auprès du gouvernement. et 14 Mc réunis par l’État, la Région, derniser le réseau ferré et notamment les Elle affirme veiller « à ne priver aucun les Départements de la Drôme et de lignes régionales, la réforme ferroviaire territoire de la grande vitesse grâce à la l’Isère et la Métropole de Grenoble). La présente des points forts : réorganisation bonne articulation des offres de trans- Région a versé par ailleurs 24,24 Mc à de la SNCF, reprise partielle de la dette port ». En clair, les TGV déficitaires sup- SNCF Réseau suite à sa décision de ne ferroviaire par l’Etat, industrialisation de primés doivent être remplacés par des pas faire circuler les TER-GV prévus dès SNCF Réseau, réforme des péages facili- TER, ce qui revient à transférer la charge 2008. Ce gaspillage d’argent public est tant le financement de certaines dessertes financière aux Régions. déplorable. par péréquation. C’est profondément anormal car, La suppression du TGV Annecy-Mar- Comme en Europe, l’ouverture à la comme en transport aérien, les dessertes seille s’ajoute à la longue liste de trains concurrence ouvre des perspectives pour nationales d’aménagement du territoire Alpes-Provence supprimés depuis 25 exploiter économiquement les trains TER, doivent être financées par un fonds spéci- ans : Saint-Gervais - Nice via Grenoble, sans céder au malthusianisme de la SNCF fique national. Genève-Nice via le sillon alpin et via qui promeut trop facilement la route. Quant Par ailleurs, la SNCF déclare que le Digne (« Alpazur ») et les TER quoti- aux Intercités nationaux, l’Etat et la mission modèle d’exploitation du TGV a dérivé, diens entre Grenoble et Avignon. En Philizot travaillent à l’amélioration des ser- celui-ci circulant trop longtemps sur les l’absence d’une desserte ferroviaire vices et des infrastructures. lignes historiques, et qu’il faut donc rem- quotidienne Alpes-Méditerranée, les La loi du 4 août 2014 a institué le prin- placer certains TGV par des TER. voyageurs sont poussés à utiliser le cipe d’un schéma national des services de C’est doublement faux. Dès l’origine, réseau autoroutier. transport à soumettre au Parlement (mais le TGV a été conçu pour irriguer le ter- Les associations demandent aux élus ce schéma n’a jamais été rédigé). La loi du ritoire sans rupture de charge et, lors de du sillon alpin de (re)créer de telles 27 juin 2018 (« pacte ferroviaire ») prévoit leur création, les TGV n’ont jamais rem- dessertes interrégionales : la conclusion de contrats de service public, placé des TER mais des trains Corail, - TGV conventionnés ou TER-GV y compris pour des relations TGV « afin c’est-à-dire des Intercités. Ces contre- Saint-Gervais/Tarentaise/Turin-Gre- de préserver des dessertes directes sans vérités sont tenues de longue date par la noble-Marseille ; correspondance ». Enfin le gouvernement SNCF, jusqu’à la Cour des comptes et à - TER quotidiens Grenoble-Avignon ; s’est engagé au « maintien de la desserte la mission Spinetta. - TER « Alpazur » Grenoble-Marseille des 230 gares TGV ». Jean Lenoir z par la ligne des Alpes.

6 x FNAUT infos n°272 - mars 2019 Actualité Le rapport Simian Le train à hydrogène : une urgence ? Les usagers oubliés une solution miracle pour les « petites lignes » ? Plus de 50 personnes et 30 organismes ont été consultés lors de l’élaboration du La présentation récente de l’autorail à hydrogène Alstom a immédiatement suscité l’inté- rapport Simian : industriels, élus régio- rêt des responsables nationaux et régionaux des transports. naux, hauts fonctionnaires, SNCF, experts... mais pas un seul usager. L’usager est le puissance faible, il faut leur ajouter des grand absent du rapport, à aucun mo- batteries coûteuses et dont la fabrication ment la qualité du service qui lui est ren- est très polluante. Batteries et piles in- du n’est évoquée. tègrent des métaux rares et coûteux, leur durée de vie est faible. Un jargon techno-franglais l Comment maintenir les « petites lignes » si leurs coûts d’exploitation Selon le rapport, il s’agit de « répondre par la SNCF, déjà prohibitifs, risquent aux défis de la sortie du diesel et de se d’augmenter avec l’introduction de la tenir à la pointe de l’innovation technolo- traction à l’hydrogène ? gique pour assurer la neutralité carbone L’hydrogène est produit aujourd’hui à en 2050 » ; « l’hydrogène est un vecteur 96 % à partir d’énergie fossile polluante. incontournable pour décarboner nos solu- Demain peut-être, il le sera par électro- tions de mobilité ». lyse, mais ce procédé est bien plus éner- L’ADEME veut « lancer un appel à projets givore et bien plus coûteux. pour soutenir des écosystèmes de mobi- lité hydrogène ». Selon un représentant de Une priorité ? Hype, « nous sommes entrés dans l’ère du zero emission ». Le député LREM de la Gironde Be- Le rail est responsable de moins de 1 % A noter cette pensée profonde d’un noît Simian a remis, en novembre der- des émissions de gaz à effet de serre du sec- représentant du CEA-LITEN : « le train à nier, son rapport sur le « verdissement des teur des transports, et 20 % seulement du hydrogène, c’est le train au service du ter- matériels ferroviaires » commandé par le trafic ferroviaire (chiffré en trains.km) est ritoire et le territoire au service du train »... gouvernement. à traction diesel (75 % TER, 25 % fret). Traduction : dans certains points du Elisabeth Borne, ministre des Transports, Quant à la pollution de l’air, le rail n’est territoire, l’industrie chimique produit est enthousiaste : « le Gouvernement envi- responsable que de 2,7 % des émissions de de l’hydrogène « fatal », inutilisé mais sage le remplacement des locomotives, trains particules fines du secteur des transports, et récupérable. automoteurs, engins de manœuvre ou de 25 % seulement des circulations TER diesel La SNCF se préoccupe du « Business chantier... les plus polluants dans les meilleurs s’effectuent en milieu urbain. Model d’un développement de l’hydrogène délais afin d’atteindre l’objectif d’une neutra- Si les émissions de CO2 et la pollution de à grande échelle ». lité carbone en 2050 ; il porte la conviction l’air par les TER doivent être traitées avec Benoît Simian conclut : « malgré les in- que l’énergie hydrogène sera un vecteur in- sérieux bien qu’elles soient marginales, c’est certitudes, il faut poursuivre en mode projet, contournable pour réussir cette transition. Le la lutte contre la pollution routière par report du avec une feuille de route, des livrables et un rapport Simian représente une contribution trafic sur le rail qui est urgente. pilote, car la voie du zero emission doit être majeure sur cette voie ». approfondie ». La FNAUT est moins enthousiaste Un faux problème (FNAUT Infos 267). En province aussi, on jargonne L’enjeu des « petites lignes » n’est pas Un manque évident de rigueur le matériel roulant (les performances de Les Régions veulent « faire entrer le rail l’automoteur X 73500 sont très satisfai- dans l’ère du zero emission, créer des syner- Selon ses promoteurs, le train à hydrogène santes), mais d’abord la dégradation des gies avec les territoires et faire du train à disposerait de trois atouts : infrastructures et leur abandon par SNCF hydrogène un outil de renforcement des - ses performances et ses coûts de fonc- Réseau, et la permanence de la politique mobilités périurbaines » et « un vecteur tionnement seraient comparables à ceux malthusienne de SNCF Mobilités, qui énergétique territorial ». d’un autorail diesel ; bloquent la croissance de la clientèle (ra- La Région AURA, dans le cadre de son - il serait « 100 % écologique » puisqu’il lentissements, offre squelettique). projet « Zero Emission Valley », veut « boos- n’émettrait « que de la vapeur d’eau » (ni par- ter la mobilité hydrogène » et en faire « une ticules, ni CO2) ; Une précipitation injustifiée filière d’excellence ». La Région Grand Est - son utilisation permettrait d’évi- veut établir un « écosystème hydrogène ». La ter l’électrification coûteuse des « petites La FNAUT s’inquiète de l’engouement Région Hauts de France donne la priorité au lignes » ferroviaires. prématuré des politiques pour une technique train à hydrogène dans son plan Rev3 de En réalité, il présente de sérieux handicaps encore mal maîtrisée (la carte ci-dessous « troisième révolution industrielle ». La Région qui ne peuvent être ignorés. indique les lignes retenues par 11 Régions Occitanie doit devenir « le terrain privilégié l La traction à l’hydrogène est-elle pour expérimenter le TER à hydrogène). de l’expérimentation du train à hydrogène ». vraiment écologiquement performante ? Cet engouement risque de retarder l’adop- La Région PACA veut utiliser « l’hydrogène Elle n’est « verte » que si l’électricité uti- tion de solutions éprouvées, de même que fatal » produit à Fos-sur-Mer. Quant à la lisée est elle-même « verte », c’est-à-dire l’expérimentation tramway sur pneus a retardé Région Pays de la Loire, « elle se mobilise en d’origine renouvelable. l’adoption du tramway classique. Il a déjà pro- faveur de l’hydrogène, objectif majeur de la l Le train à hydrogène a-t-il la puissance voqué l’abandon de l’électrification de la ligne feuille de route régionale », elle « confirme son nécessaire pour franchir les fortes rampes Auxerre - Laroche-Migennes qui permet- intérêt stratégique pour l’utilisation de l’hy- des « petites lignes » non électrifiées, situées tait de créer rapidement des relations directes drogène local issu des parcs éoliens offshore et le plus souvent dans des régions monta- Auxerre-Paris et était programmée au Contrat inland ligériens ». gneuses ? Les piles à combustibles ont une de Plan Etat-Région 2015-2020.

FNAUT infos n°272 - mars 2019 x 7 Actualité Le train à hydrogène : Trains de nuit beaucoup d’incertitudes En France La convention Etat-SNCF sera prolongée Le rapport Simian affirme qu’il faut pro- Forum au-delà de 2020, les liaisons Paris-Briançon fiter « de la maturité de la technologie hy- et Paris - Rodez/Latour-de-Carol, subven- drogène », « prouvée » par la mise en service Le « verdissement du parc ferroviaire », tionnées à 50 % par l’Etat (20 Mc par an) de deux trains Alstom à hydrogène en Alle- voilà un nouveau sujet bidon : le meilleur seront donc pérennisées et le matériel rou- magne : « c’est une solution prometteuse, verdissement possible, c’est le report modal lant rénové (l’Etat dépensera plus de 30 Mc). techniquement éprouvée, économiquement des trafics voyageurs et fret de la route sur L’État avait supprimé le train de nuit Paris- à confirmer, industriellement à bâtir ». le fer et le fluvial. Cerbère en décembre 2015. Sous la pression Il recommande donc une expérimenta- Bernard Gobitz, AUT Ile-de-France z des usagers et de la Région Occitanie qui tion « suffisamment massive » du train à s’était fortement mobilisée, il avait accepté hydrogène. Et pour le financement, aucun En France, l’hydrogène consommé par de le rétablir à l’été 2017 pour une durée problème : « on peut reconvertir une partie l’autorail Alstom sera produit par vapo- expérimentale de 2 ans. Il vient de confir- des crédits des CPER prévus pour des élec- reformage du méthane. En Allemagne, mer la prolongation de cet accord jusqu’à trifications de lignes ». l’industrie chimique produit de grandes fin 2020, échéance de la convention Trains quantités d’hydrogène et il arrive qu’elle ait d’Équilibre du Territoire (TET) - État-SNCF, Le modèle économique des surplus, qu’elle stocke et peut revendre ainsi que la prolongation jusqu’à fin 2019 à vil prix. du maintien du train Aubrac (Clermont- Le rapport admet cependant que le vo- La SNCF ne s’intéresse qu’aux autorails Ferrand - Béziers). lume du trafic concerné, le profil des lignes, hybrides ou à hydrogène et ignore la tech- le modèle économique et l’enjeu écologique nologie du GNV, pourtant vivement préco- Une idée stupide « doivent maintenant faire l’objet de chif- nisée par les autocaristes de la FNTV. Cette frages » (qui n’ont donc pas été effectués à technologie est mature et peu coûteuse, les Une ligne aérienne Gap-Paris va être lan- ce jour). L’hydrogène produit par électro- puissances fournies sont comparables à cée, promue par la députée LREM Pascale lyse « reste encore trop cher ; le vrai sujet, celles du diesel, le gain environnemental est Boyer et les présidents de l’Union Pour c’est le coût de l’hydrogène ». très net, enfin le ravitaillement est rapide et les Entreprises et de la CCI des Hautes- Le rapport reconnaît que « l’hydrogène l’autonomie élevée (deux paramètres cités Alpes. Les tarifs seront « exceptionnelle- gris (produit à partir d’hydrocarbures) comme des avantages essentiels de l’hydro- ment préférentiels » (à quel coût pour le coûte 10 fois moins cher que l’hydrogène gène). Benoît Simian admet lui-même que Département ?). L’objectif est « d’évaluer vert (issu des énergies renouvelables). le rail ne contribue que marginalement aux la pertinence du marché de l’aérien afin Son utilisation dans un premier temps émissions de CO2 : le développement de la d’envisager sa pérennité. C’est la solution pourrait permettre de boucler l’équation filière hydrogène risque de coûter très cher pour faciliter la mobilité des Hauts-Alpins, économique ». pour un maigre résultat. le désenclavement du territoire et le déve- Mais alors pourquoi cette précipitation Claude Jullien, FNAUT PACA z loppement économique ». Mieux vaudrait (ce « consensus pour aller vite ») et l’aban- fiabiliser le train de nuit... don d’un projet programmé et qui permet- Il faut se méfier des apparences en tait d’améliorer rapidement la qualité du écologie. Tout le monde est « tombé » En Grande-Bretagne et en Espagne service proposé aux voyageurs (l’électrifi- sur la RATP en mars 2019 quand elle cation de la ligne Auxerre-Laroche) ? a annoncé que, pour faire face au déve- Le réseau Caledonian Sleeper assure les Selon Michel Neugnot, vice-président loppement nécessaire de l’offre bus, elle liaisons de nuit entre Londres et 5 gares de la Région Bourgogne - Franche-Com- devrait ressortir des bus qualifiés de terminus en Écosse : Édimbourg, Glasgow, té chargé des transports, « il faut préparer « vieux » et « polluants ». Aberdeen, Inverness, Fort William. De nom- l’avenir, mais l’argent est rare, il faut l’uti- De même, on s’inquiète volontiers de la breuses gares intermédiaires sont desservies. liser plus intelligemment qu’avant ». « Pour pollution de l’air due aux autorails diesel. Les trains empruntent l’itinéraire occidental éviter la fermeture des petites lignes, la so- Or tout le réseau francilien est électrifié (à de la West Coast Main Line. Chaque rame est lution c’est l’hydrogène ». Une affirmation l’exception de Meaux - La-Ferté-Milon) et constituée de voitures-lits (cabines à un lit en qui relève de la croyance... car le rapport plus de la moitié des lignes TER le sont. première classe et à deux lits superposés en Simian souligne bien les très nombreux Moins de 20 % des km.trains TER sont deuxième classe), de voitures avec places as- problèmes techniques, économiques et fi- assurés en diesel, la pollution de l’air qui sises et d’une voiture-salon-bar confortable. nanciers qui restent à résoudre. en résulte n’est évidemment pas à négliger, En Espagne, le Parlement a voté la relance mais c’est un phénomène secondaire. du train-hôtel Barcelone-Grenade. La fin des électrifications ? Marc Debrincat, FNAUT z Trains de nuit internationaux D’après le ministère des transports La SNCF consomme 800 000 tonnes (DGITM), 54 % des voies ferrées sont équivalent pétrole par an, mais la plus Les chemins de fer autrichiens (ÖBB) se électrifiées (15 700 km sur 29 300, les grande part de cette énergie est de l’élec- disent prêts à rouvrir les lignes Paris-Berlin voies non électrifiées sont pour la plupart tricité décarbonée. L’avion consomme aussi et Paris-Vienne, si on leur assurent des condi- à voie unique) ; 25 % du matériel roulant 800 000 TEP par an, uniquement sous tions plus favorables pour circuler en France... est à traction diesel. forme de kérosène non taxé, et il transporte Ils ne sont plus seuls à vouloir développer les Le rapport Duron (FNAUT Infos 264) beaucoup moins de passagers ou de fret trains de nuit internationaux (FNAUT Infos en déduisait un peu vite que l’électrifica- que le rail. Quand au transport routier, il 267) : les chemins de fer néerlandais (NS) tion du réseau ferré était quasiment ter- consomme 43 millions de TEP par an. Il suivent leur exemple. Le train de nuit Nightjet minée (en Suisse, le réseau ferré est inté- est donc plus urgent de verdir le transport va être prolongé de Dusseldorf à Amster- gralement électrifié). Quoi qu’il en soit, routier grâce au report modal sur le rail que dam. L’objectif est double : concurrencer le financement du train à hydrogène ne d’introduire le train à hydrogène. l’avion pour limiter son impact écologique, et justifie pas l’abandon des quelques élec- Anne-Marie Ghémard, présidente désaturer l’aéroport d’Amsterdam-Schiphol, trifications prévues. de la FNAUT Auvergne-Rhône-Alpes z de plus en plus engorgé.

8 x FNAUT infos n°272 - mars 2019 Actualité

Le SYTRAL Le trolleybus , bus électrique du futur Le Syndicat mixte des Transports pour le Rhône et l’Agglomération Lyonnaise, (wikipedia) couvre le département du Rhône, la Métropole lyonnaise, le réseau urbain Lyon, capitale du trolleybus Les atouts du trolleybus étaient bien connus : de Villefranche-sur-Saône et 14 autres - la technologie de base est mature et stan- communes. dardisée ; plus de 12 000 trolleybus circulent Outre 4 lignes de métro (une 5ème est dans les villes européennes ; à l’étude), 4 lignes de tramway, 5 funi- - son image est très favorable chez les usa- culaires ou « ficelles » (Fourvière, Croix- gers et les riverains (confort, silence, absence Rousse...) et Rhônexpress, liaison (très de pollution de l’air) ; coûteuse pour le voyageur...) par tramway - il peut gravir de fortes pentes ; rapide entre Lyon - Part-Dieu et l’aéroport - il possède une grande longévité ; de Saint-Exupéry, le SYTRAL dispose, sur la - la Ligne Aérienne de Contact double Métropole lyonnaise, de 9 lignes de trol- (LAC) signale l’itinéraire du trolleybus, de leybus (121 km de lignes et 131 véhicules, même que la LAC simple et les rails signalent soit 14 % du parc bus qui comprend par (wikipedia) celui du tramway. ailleurs 44 % de bus Euro 6, 36 % de bus La nouvelle technologie IMC (In Motion Euro 5 et 6 % de bus Euro 3). Lyon est la seule ville en France, avec Charging) permet au trolleybus de recharger ses Saint-Etienne et Limoges, à avoir mainte- batteries sur les tronçons de la ligne situés sous Le renouveau nu son réseau de trolleybus. Elle est consi- LAC puis de parcourir sans difficultés les tron- du trolleybus en Suisse dérée depuis toujours comme la « capitale çons dépourvus de LAC ; sur une ligne, jusqu’à du trolleybus français ». 40 % du trajet peut être parcouru sans LAC. Les réseaux urbains helvétiques ont Après une expérimentation sans lendemain, A Lyon, une étude en cours vise à rempla- pris une position très sage. Dans l’at- en 1905, de « l’électrobus à perches », une cer plus du quart des bus thermiques ; des tente d’y voir plus clair pour le rempla- première ligne de trolleybus a été inaugurée à trolleybus IMC seront introduits sur 6 lignes cement des bus diesel, ils maintiennent Lyon en 1935 ; entre 1957 et 1959, 370 véhi- du réseau lyonnais entre 2021 et 2025. Une et développent leur réseau de trolley- cules y circulaient et transportaient 72 % des comparaison poussée entre le trolleybus nou- bus, jugeant prématuré d’investir à usagers du réseau lyonnais (photo 1 ci-dessus : velle génération et les autres techniques de bus grande échelle dans des bus hybrides un trolleybus Berliet vers 1980). Actuelle- électriques a été effectuée. ou électriques encore peu fiables (leur ment, 131 véhicules circulent sur 9 lignes ; les Le trolleybus nouvelle génération IMC taux d’immobilisation est très élevé) et premiers trolleybus Cristalis, simples et articu- permet d’éliminer deux inconvénients du très coûteux à l’entretien. lés (photo 2 ci-dessous), ont été introduits en trolleybus traditionnel : la présence d’un Le choix d’amortir de nouvelles séries 2002. Le SYTRAL (encadré) est chef de file moteur diesel auxiliaire ; et celle de LAC de trolleybus a été conforté par le fait de la mise au point des nouveaux trolleybus. dans les longues zones architecturales à pro- que le trolleybus dispose d’une alimen- A Limoges, des trolleybus circulent depuis téger (les tramways de Bordeaux et Nice, tation 100% électrique, avec des batte- 1943 sur 5 lignes (32 km). équipés respectivement d’une alimentation ries suffisamment performantes tant en A Saint-Etienne, le trolleybus a été intro- par le sol et de batteries spéciales, peuvent puissance qu’en autonomie (10 à 30 km duit en 1940, 7 lignes ont fonctionné mais il eux aussi éviter de telles zones). selon le type de batterie choisie) rechar- n’en reste qu’une seule. Quant au bus à batteries, sa faible auto- geables en ligne lorsque le véhicule cir- A Grenoble, les trolleybus ont succédé aux nomie de roulage est rédhibitoire sur le plan cule sous ligne aérienne. tramways à la fin des années 1940. Après un économique. Après les 17 trolleybus articulés et important développement entre 1974 et 1984 Saint-Etienne vient de commander 22 trol- les 7 trolleybus doublement articulés sur un réseau de 6 lignes bien fréquentées, les leybus IMC, qui seront mis en service sur 3 Swisstrolley en cours de livraison (de derniers ont été supprimés en 1999. lignes à l’été 2019. Une extension du réseau 2017 à 2019) à Berne et les 10 trolleybus est prévue. articulés en cours de livraison à Bienne, Le trolleybus nouvelle génération les Transports de Lausanne (TL) ont Et à Grenoble ? lancé un appel d’offre pour 12 (+ 15 en option) trolleybus articulés et 12 (+ 15 L’exemple lyonnais montre toute la perti- en option) mégatrolleybus (articulés nence du trolleybus pour équiper les lignes doubles à 3 caisses). importantes du réseau dont le profil ou la Le nouveau trolleybus articulé n°156 géométrie ne permettront jamais d’implanter de Zurich a déjà circulé dans certaines un tramway, du moins en l’absence de très villes suisses et va bientôt être testé gros travaux. à Lucerne, Saint-Gall, Schaffhouse et L’ADTC-Grenoble demande donc que Winterthour. la réintroduction du trolleybus soit étudiée La ville de Zürich vient de remplacer sérieusement. Trois lignes semblent par- tous les moteurs diesel d’autonomie de (wikipedia) ticulièrement adaptées au trolleybus : les ses anciens trolleybus par les batteries lignes C3/C4, C5 et 12. Ce sont les lignes équipant les nouveaux trolleybus, preuve Suite au lancement par le SYTRAL d’une de bus les plus fréquentées depuis long- que le système est fiable. étude de marché à l’échelle européenne temps, mais leur transformation en lignes Par contre, la compagnie du Vevey- pour décider si le trolleybus était une solu- de tramway serait difficile et peu justifiée Montreux-Chillon-Villeneuve (VMCV) tion de transport pérenne, la réponse a été économiquement. Seules les lignes C1 reste fidèle au constructeur VanHool en catégoriquement positive ! La solution trol- (Grenoble-Montbonnot) à court terme et commandant 16 trolleybus articulés (+ 5 leybus est la seule solution électrique stan- 11-future C7 (Campus-Poisat-Eybens- en option) de type Exquicity (proches de dardisée, offrant une autonomie de roulage Echirolles) à plus long terme ont vocation à ceux de Genève). compatible avec l’exploitation d’un réseau devenir des lignes de tramway. William Lachenal, ADTC-Grenoble z de transport urbain. d’après un article de l’ADTC-Grenoble z

FNAUT infos n°272 - mars 2019 x 9 Actualité

La chronique du Lyon-Turin Ligne ferroviaire transalpine (MD)

Manifestations D’autres rapports « En 2017, 1,4 million de camions seule- ment (!) ont emprunté les tunnels routiers du Après la manifestation du 10 novembre Rédigé par des juristes du ministère italien Mont-Blanc et du Fréjus ». Les « experts » du 2018 (FNAUT Infos 271), plus de 30 000 per- des Transports, un rapport, dont le contenu a CADE ne savent pas qu’un trafic équivalent sonnes - maires, entrepreneurs, syndicalistes - été révélé par le quotidien Il Sole 24 Ore, re- passe par Vintimille, et que le trafic total aug- se sont réunies à nouveau le 12 janvier 2019 cense les conséquences financières pour l’Italie mente : depuis 2013, + 18,6 % au tunnel du sur la Place Castello de Turin pour soutenir la d’un éventuel arrêt du chantier en cours du tun- Fréjus et + 13,3 % au tunnel du Mont-Blanc, nouvelle liaison Lyon-Turin face aux menaces nel transfrontalier du Lyon-Turin. soit environ 200 000 camions supplémen- de blocage par le Mouvement 5 étoiles, dont La facture oscillerait entre 2,8 et 4 Mdc taires par an à travers les Alpes du nord. l’isolement sur ce dossier est croissant. Une répartis ainsi : études et travaux de remise en Une progression qui transforme les val- pétition sur change.org en faveur du projet a état des sites du chantier (de 200 à 500 Mc) ; lées alpines en véritables « couloirs à ca- vite dépassé les 100 000 signatures. rendu des fonds communautaires accordés sur mions » : un report du trafic routier sur le Un référendum, souvent évoqué pour dé- la tranche 2015-2019 (600 Mc) ; dédomma- rail est de plus en plus urgent, l’opposition nouer la situation, n’aurait cependant qu’une gement des entreprises sous contrat et éven- des environnementalistes et des écologistes valeur consultative, le Lyon-Turin faisant l’objet tuelles pénalités demandées par la France et à la liaison Lyon-Turin est décidément in- de traités internationaux dont une éventuelle l’UE (de 500 Mc à 1 Mdc) ; coûts de la néces- compréhensible. rupture exigerait un vote du Parlement. saire mise en sécurité du tunnel historique qui Le CADE soutient l’écrivain italien Erri n’est plus aux normes internationales (de 1,5 à de Luca, condamné à 8 ans de prison pour Un vrai homme d’Etat 1,7 Mdc). La contribution de l’Italie au tunnel incitation au sabotage du chantier (et finale- de base étant d’environ 3 Mdc, arrêter le chan- ment relaxé en 2015). Danilo Toninelli, ministre italien des tier couterait au moins autant à l’Italie que de Transports et membre du mouvement terminer l’ouvrage. Vallées alpines, couloirs à camions 5 étoiles opposé au projet, a émis une pen- D’après Matteo Salvini, président de la sée d’homme d’Etat : « qu’est-ce qu’on en a à Ligue du Nord favorable au Lyon-Turin, à Les habitants de la région Auvergne- faire d’aller à Lyon ». plus long terme, la perte en retombées éco- Rhône-Alpes sont les plus nombreux, en pro- nomiques et environnementales serait de portion, à considérer que leur vie quotidienne Une analyse « impartiale » 20 Mdc (il dénonce le « maudit rapport » de est impactée par le changement climatique, Danilo Toninelli et a demandé une contre- sans doute en raison de la fréquence et de L’analyse « impartiale » coûts-bénéfices analyse à l’université de Milan). l’intensité croissantes des épisodes de canicule qu’il a commandée, transmise au gouverne- et de pollution dans les vallées alpines, et des ment français et à Bruxelles, suscite de sérieux Impatience effets visibles du changement climatique sur doutes sur son élaboration : elle a été confiée à l’environnement des Alpes. un « comité d’experts » (dont 6 sur 7 sont des L’Union Européenne et la France s’impa- Grand émetteur de CO2, le secteur des opposants connus au projet), présidé par le très tientent. Le ministre François de Rugy a dé- transports contribue fortement à ces phé- sérieux professeur Marco Ponti selon lequel : claré au Sénat : « nous faisons tout pour que le nomènes, la région étant un carrefour stra- « l’avenir est au transport routier, le rail appar- Lyon-Turin soit réalisé et qu’ensuite il y ait le tégique des flux de circulation. En visant un tient au passé ; si on transfère du trafic routier maximum de report modal, tant pour les pas- report massif du trafic routier sur le rail, la liai- sur le rail, l’Etat italien perdra des taxes sur les sagers que pour le fret ». De son côté, Benja- son Lyon-Turin est particulièrement adaptée carburants et des péages autoroutiers ». min Griveaux, porte-parole du gouvernement, à la situation, mais les environnementalistes Sans surprise, l’analyse conclut que le coût a déclaré à propos du Lyon-Turin que, dans le écologistes persistent à s’y opposer... du Lyon-Turin serait supérieur de 7 Mdc à ses contexte d’entrée en récession de l’Italie, « on bénéfices d’ici à 2059. ne peut qu’encourager les projets qui vont per- Une comparaison pertinente mettre à nos voisins et amis italiens de se déve- Le tunnelier avance lopper économiquement ». Le Lyon-Turin est très comparable au tun- Quant à Elisabeth Borne, qui s’opposait fer- nel sous la Manche ouvert en 1994. Ce tun- Pendant ce temps, le tunnelier Fede- mement à l’engagement des accès au tunnel de nel a été utilisé en 2014 par 2 900 trains de rica avance en moyenne de 18 m par jour. Le base depuis Lyon, elle a visité le site des travaux fret internationaux, des TGV (10,4 millions 15 janvier, la galerie de reconnaissance de Saint- en cours et semble évoluer : « dès lors qu’on de passagers) et des navettes qui transportent Martin-la-Porte, située dans l’axe du futur tun- s’engage à réaliser le tunnel de base, il va de soi des camions (1,4 million) et des voitures et nel de base du Mont-Cenis, atteignait 68 % que l’on devra accompagner l’aménagement autocars (2,6 millions). Il facilite les échanges de sa longueur prévue (9 km), 400 personnes du réseau et les nouveaux accès pour répondre - économiques et culturels - entre la Grande- y travaillent. Après la traversée d’une zone géo- dans les temps aux besoins ». Bretagne et l’Europe continentale. Son bilan logique difficile, 15,5 % (25,5 km sur 162 km) environnemental est largement positif : un des galeries de la section transfrontalière ont Les « experts » du CADE ferry Calais-Douvres émet 8 fois plus de déjà été percés. Les travaux du pôle d’échanges CO2 par tonne transportée que le rail, il émet de Saint-Jean-de-Maurienne ont démarré. Selon le CADE (Collectif des Associations aussi des oxydes d’azote et de soufre. Entre 2021-2027, l’Union européenne dé- de Défense de l’Environnement du Pays- bloquera 33,5 Mdc pour les grands réseaux de Basque et du sud des Landes), qui s’oppose au Le fret ferroviaire progresse transport européens RTE-T, dont le Lyon-Tu- projet de LGV Bordeaux-Toulouse/Dax, « le rin et le tunnel du Brenner. Le Parlement euro- Lyon-Turin est un concentré d’aberrations, un Selon le dernier rapport Eurostat, pour la péen a approuvé le projet de loi avec 433 votes projet inutile à l’impact environnemental désas- 5ème année consécutive, le fret ferroviaire a pour, 134 contre et 37 abstentions. Il a rejeté, treux, doublant une ligne ferroviaire déjà exis- progressé en 2017 dans les deux tiers environ avec 587 contre et 124 pour, un amendement tante et impliquant - côté italien - des entre- des pays de l’Union (dont la France) : les pays du Mouvement 5 Etoiles qui proposait de sor- prises liées à la mafia, enfin un gouffre financier irrigués par les corridors du réseau transeuro- tir le Lyon-Turin du Corridor Méditerranéen. qui va avaler 8,6 Mc ». péen obtiennent les meilleures performances.

10 x FNAUT infos n°272 - mars 2019 Actualité « Innovations » Oslo : la voiture chassée du centre-ville Une innovation stupide

(quadinthecity.com)

Le site quadinthecity.com propose de visiter Paris au volant d’un quad le jour ou la nuit : « Vous souhaitez cumuler une balade insolite au volant d’un quad et une visite des sites et monuments les plus extraordinaires de la capitale ? Quadinthecity est fait pour vous ! Votre guide vous fera découvrir l’Arc (visitoslo.com) de Triomphe, la place Vendôme... Au cours de cette activité ludique et sensationnelle, Selon l’AFP, Oslo, capitale de la Norvège (600 000 habitants, 2 millions dans l’ag- vous découvrirez les sensations incroyables glomération), chasse l’automobile de son centre-ville lentement mais sûrement, que procure cet engin sportif. Les quads se comme Paris, Madrid, Athenes, Bruxelles, Helsinki, Londres, Dublin, Barcelone ou conduisent sans permis, casques et gants encore Mexico, malgré les réactions de ceux qui y voient une « guerre à la voiture » sont fournis. Des pauses sont ménagées pour et une mesure soi-disant « liberticide ». prendre clichés et selfies ». En 2015, une coalition de partis pro- « Une guerre tragique » Une vraie innovation gressistes a été élue à la mairie d’Oslo sur un programme de remise en cause de Tout le monde n’est pas d’accord, les Le maire de Boullare, village de l’Oise la place de la voiture dans le centre. milieux économiques et une partie des habi- comptant 230 habitants, vient d’interdire, Pour Hanna Marcussen, conseillère tants protestent : « ce qu’il y a de plus tra- pour une durée illimitée, la circulation sur municipale écologiste chargée de l’urba- gique dans cette guerre à la voiture, c’est que une petite route reliant le château d’eau nisme : « il faut rendre la ville aux ha- les responsables politiques s’en prennent à la à la ferme de Saint-Ouen : « je n’ai pas bitants, il faut que les enfants puissent liberté des personnes et à leur portefeuille », d’argent à mettre dans ce chantier ». La jouer en sécurité, que les personnes âgées proteste Jarle Aabø, l’animateur de la lettre route, empruntée par une centaine de vé- aient des bancs où s’asseoir et, pour cela, d’information « Oui à la voiture à Oslo », hicules par jour seulement, était bordée de il faut supprimer la voiture qui prend qui regroupe près de 23 000 membres sur nids de poule, la circulation y était devenue une place disproportionnée ». Facebook : « ce que les gens redoutent, c’est dangereuse. Sa remise en état aurait exigé L’interdiction totale de circuler dans que le centre d’Oslo meure et devienne un 550 000 euros. Le maire d’Eve, un village le centre d’ici 2019 initialement envisa- endroit très triste. Je ne crois pas que des voisin, a fermé lui aussi un chemin rural gée, et préventivement dénoncée par une cyclistes béats vont venir faire du théâtre de faute d’argent pour le réparer. élue comme « un mur de Berlin contre rue et des danses en janvier avec de la neige Le réseau routier français est si dense les automobilistes », a été écartée. Oslo jusqu’aux genoux ». qu’on pourrait fermer bien d’autres routes a cependant pris une série de mesures Mais, si on supprime totalement la voiture, locales peu utilisées... et économiser de moins spectaculaires mais tout aussi dis- encore faut-il améliorer l’offre de transport l’argent public. suasives : suppression de 700 places de collectif. À près de 6 c le ticket, le transport stationnement, zonage rendant impos- public reste cher et les usagers s’agacent des Bétisier sible la traversée du centre en voiture, retards et dysfonctionnements, surtout quand piétonnisation de rues, renchérissement il faut patienter dans un froid glacial. Philippe Saurel, président de Montpel- des péages urbains… Certains commerçants font la grimace lier Méditerranée Métropole : « beaucoup Résultat : le trafic, y compris les très (mais ils n’envisagent pas la livraison à de gens utilisent le tramway, mais faire des populaires voitures électriques, est ré- domicile) : « On vend des marchandises infrastructures pour les vélos pour qu’elles duit à sa portion congrue dans une zone encombrantes, nos clients sont donc tribu- soient utilisées par deux personnes, ce de 1,9 km2 de l’hypercentre, où environ taires d’une voiture et vont désormais faire n’est pas l’idéal ». 5 500 personnes vivent et 120 000 tra- leurs achats en périphérie. Les restaurants vaillent. « En 2020, on aura supprimé et les bars sont gagnants mais pas les ma- Un bus à hydrogène ? l’essentiel des voitures particulières du gasins spécialisés ». Hanna Marcussen est centre-ville. Hors celles des personnes cependant confiante : « s’il y a un endroit Selon le maire de Grand-Bourgthéroulde handicapées, il n’y en aura plus », affirme où le commerce continuera de prospérer, (Eure), village où a eu lieu un débat entre Hanna Marcussen. c’est dans les centres-villes, où on peut Emmanuel Macron et 600 maires, « nous À la place des voitures apparaissent combiner shopping et sorties au cinéma sommes isolés, il n’y a pas de transport collec- des terrasses de café, du mobilier urbain ou au restaurant ». tif pour aller à Rouen, distante de 35 km, où et des pistes cyclables. Elue « capitale Selon Hanna Marcussen, « il y a deux travaillent la plupart des habitants ». Réponse verte de l’Europe » en 2019, Oslo veut décennies, il était normal de fumer dans les du chef de l’Etat : « une solution existe, le bus purifier son air, développer ses activités lieux fermés ; un jour, nous nous demande- à hydrogène, ça va marcher, je ne blague culturelles et réduire ses émissions de rons comment nous avons pu accepter qu’il pas, j’en inaugure un à Pau la semaine pro- CO2 de 95% d’ici 2030. La vente de vé- y ait autant de voitures dans les centres- chaine ». Les maires ont été peu convaincus. hicules thermiques sera interdite à partir villes ». Elle veut faire d’Oslo un modèle A quand des cars Macron à hydrogène ? de 2025. pour les grandes villes sans voitures.

FNAUT infos n°272 - mars 2019 x 11 Actualité Brèves Une conséquence méconnue

L’effondrement du viaduc de Gênes La voiture et l’espace public (FNAUT Infos 267) a entrainé la fer- meture de trois lignes ferroviaires qui passaient au-dessous : les deux lignes Gênes-Milan passant par le col des Gio- vi, et la ligne se dirigeant vers Ovada et Turin par le col du Turchino. (MD) Frédéric Laugier

Bien dit Regiorail (groupe Eurorail), un opéra- Le monstre des mers teur ferroviaire de proximité ; la réfec- Christophe Keseljevic, président de tion de la voie ferrée a coûté environ 2,5 l’Association des Amis des Chemins de Mc ; 13 500 conteneurs seront transpor- Fer, à propos de l’accident survenu sur le tés par rail chaque année. 27 000 trajets passage à niveau de Millas (FNAUT In- de camions seront ainsi évités, soit un fos 267) : « On parle à tort d’accident rejet de 2 500 tonnes de CO2. L’entre- DE passage à niveau ; si une voiture prise a justifié son choix par des considé- tombe d’un pont ou rate un virage, on rations environnementales... mais aussi ne parle pas d’accident de pont ou de vi- financières : selon le PDG de Nestlé, le rage. C’est la route qui provoque l’acci- flux logistique est énorme et, faute de dent, c’est le rail qui paye la note ». chauffeurs, le transport routier n’est pas (wikipedia) capable de répondre à la demande. Langage correct Le porte-conteneurs géant Saint-Exu- La voiture et l’espace public péry vient d’être inauguré au port du Ne dites plus « péage urbain », c’est Havre. Ce navire bat tous les records. ringard et trop punitif. Dites « tarif de Les nouvelles mobilités - voiture élec- Long de 400 m et large de 59 m, il pour- congestion » : cela vous évitera d’affo- trique, voiture autonome, voiture en ra transporter 20 954 conteneurs empi- ler les automobilistes (français). Ne libre service... - sont un prétexte facile lés sur 23 étages : placées bout à bout, dites plus « transport » mais « solution pour négliger le report modal et reporter ces « boîtes » formeraient une chaîne de de mobilité ». Si vous êtes élu, ne dites à après-demain les décisions indispen- 123 km. La salle des machines est aussi plus « petites lignes », c’est passéiste et sables pour s’attaquer à la congestion, à grande que Notre-Dame-de-Paris et le ferrovipathe, mais « dessertes fines des la pollution de l’air et au réchauffement moteur diesel de 21 m de long est aussi territoires », cela vous évitera d’avoir à climatique. haut qu’un immeuble de cinq étages, il préciser à vos électeurs s’il s’agit de des- Les photos ci-dessous illustrent le développe 80 000 chevaux. Ce navire sertes ferroviaires ou routières. problème posé par la voiture : l’es- doit transporter des tonnes de mar- pace qu’elle occupe et l’énergie qu’elle chandises alimentaires, mais aussi des Le bon choix consomme par voyageur transporté. bateaux et des métros jusqu’en Asie. Sources : un tweet de Mohamed Mez- Le Saint-Exupéry carbure au fuel lourd Après avoir privilégié la route pendant ghani (le bus contient autant de passa- et on dit qu’il émettra autant de CO2 dix ans, le groupe suisse Nestlé Waters gers que toutes les voitures visibles sur la que 55 millions de voitures. Une contri- a relancé le fret ferroviaire entre l’usine photo), et un tweet de Ludo Campbell- bution à l’effet de serre dénoncée par Perrier de Vergèze (Gard, entre Nîmes et Reid, urbaniste australien (le type de Nicolas Hulot : « cette superbe perfor- Montpellier) et le port de Fos-sur-Mer, motorisation, de conduite ou de gestion mance technologique est-elle bonne distant de 100 km à raison d’un train par d’une voiture ne change rien à l’espace pour la planète ? La réponse est non ». jour ouvrable. Les wagons sont loués à qu’elle occupe sur la voirie). Le transport maritime est une source majeure de pollution des océans et les émissions dioxyde de soufre posent un problème de santé publique dans les villes portuaires. Et est-ce une réalisation d’actualité au moment où les Chinois cherchent à développer la « route de la soie ferroviaire » (qui apportera du trafic à la liaison Lyon-Turin) ?

FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information Directeur de publication : Jean Sivardière Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT CPPAP n° 0920 G 88319 - Dépôt légal n°272 ISSN 0983-172 X - Tirage : 1200 ex. Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative Av de la Plage - 86240 Ligugé Abonnement 10 numéros : Individuels : 19 b Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b Prix au numéro : 2 b Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT de votre région, contacter notre permanence : 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06 e-mail : [email protected] Internet : https://www.fnaut.fr

12 R FNAUT infos n°272 - mars 2019 infos 273 avril 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Sabotage du service public ferroviaire Les aides publiques Face à la dégradation de plus en plus évi- dente de l’offre ferroviaire, la FNAUT a été au transport aérien amenée à dénoncer publiquement la straté- gie suicidaire de SNCF Mobilités, qui ignore les besoins des voyageurs, les dissuade d’utiliser le train et met en péril la pérennité du rail et de l’intermodalité. Il est de plus en plus difficile d’acheter un billet car les points de vente dis- paraîssent, les fiches horaires se raréfient... et le sabotage des petites lignes, sous-exploitées, renforce la dépendance automobile. La stratégie de SNCF Mobilités - une re- cherche systématique d’économies à court terme alors qu’une réduction de ses coûts d’exploitation devrait être prioritaire - n’est plus viable. A la demande de la FNAUT, Jacques Pavaux, ancien directeur général de l’Ins- Les voyageurs ne supportent plus les pratiques irrationnelles de SNCF Mobilités titut du Transport Aérien, a recensé avec précision et chiffré les aides, directes et la dégradation des services ferroviaires. ou indirectes, accordées par l’Etat et les collectivités territoriales au transport Ils sont rarement consultés. Quasi systéma- aérien commercial - aéroports (en 2012, seulement 14 aéroports sur 86 ont tiquement placés devant le fait accompli, été structurellement bénéficiaires) et compagnies aériennes. Le montant total ils sont exaspérés et en ont assez des pro- annuel de ces aides, contre-productives pour l’environnement, a été proche messes sans lendemain. de 600 millions d’euros sur la période 2016/2017.

(pixabay) La FNAUT attend de l’exploitant un chan- Cette expertise amène la FNAUT à réclamer une taxation du kérosène ou des gement de cap conforme aux orientations billets d’avion sur les vols intérieurs en concurrence frontale avec le train (TGV et du gouvernement : croissance du trafic ferro- Intercités), la fermeture des petits aéroports régionaux non rentables et le déve- viaire et aménagement du territoire. Elle est loppement des alternatives ferroviaires à l’avion (FNAUT Infos 266, 267). ouverte à toute concertation avec lui. Quant au gouvernement, il a de lourdes res- ponsabilités. Sa passivité face à la dégradation L’innovation, oui mais avec raison ! des services ferroviaires est devenu irrespon- sable. Pourquoi les lois ferroviaires de 2014 et Que les « ingénieux ingénieurs » innovent, trop ringard. Exemple typique, Hyper- 2018 ne sont-elles pas respectées ? On attend c’est leur rôle : on n’en est plus, heureuse- loop (FNAUT Infos 259, 267). D’autres depuis 4 ans que le schéma national des ser- ment, à l’époque des locomotives à vapeur. rêveurs veulent ressusciter l’aérotrain vices ferroviaires soit soumis au Parlement. Le problème est que les décideurs politiques, (FNAUT Infos 267). La FNAUT demande donc au gouver- toujours désireux de faire moderne pour se La nouvelle innovation à la mode, c’est nement de s’opposer énergiquement à la valoriser auprès de leurs électeurs, se laissent le train à hydrogène, dont beaucoup d’élus politique destructrice de SNCF Mobilités, séduire, et souvent berner, par les groupes régionaux se sont immédiatement entichés contraire à ses propres objectifs, et de lui industriels qui cherchent à commercialiser (FNAUT Infos 267, 272). Sans oublier le imposer rapidement un changement dras- leurs « innovations ». Taxirail, système autonome inventé par une tique de stratégie : l’avenir du rail en France Dans les années 1970, on a vu fleurir start-up bretonne pour compenser la fer- est aujourd’hui gravement compromis. de multiples inventions sans lendemain : meture des petites lignes et « réconcilier la Bruno Gazeau, président de la FNAUT z Aramis, Poma 2000, Télérail, aérotrain. population rurale avec le mode ferroviaire », Puis sont apparus ultérieurement le TVR et le Supraways, un engin présenté par un Sommaire (un échec retentissant à Nancy et Caen), le journaliste comme « une sorte de tramway tramway sur pneus de Clermont-Ferrand suspendu, un mélange de téléphérique et Les aides publiques aux aéroports (plus fiable que le TVR mais sans avenir), le d’aérotrain » qui, bien sûr, coûtera « 3 fois et compagnies aériennes 2-5 bus à guidage magnétique de Douai (autre moins cher que le tramway ». Mailler les tramways ? 6-7 fiasco, lui aussi prévu par la FNAUT), le La FNAUT est évidemment favorable Des gares TGV nouvelles de Nîmes vrai BHNS (utile si on ne l’implante pas à l’innovation, mais à condition qu’elle ne à Perpignan ? 8-9 à la place du tramway) et surtout le faux retarde pas le développement ou l’adoption Trains Intercités 10 BHNS (qui n’a de BHNS que le nom). des techniques appréciées des usagers et à La chronique du Lyon-Turin 11 Et l’innovation continue, car le tramway l’efficacité garantie. La sécurité routière 12 sur rails, le TER et le TGV, c’est vraiment Jean Sivardière z

FNAUT infos n°273 - avril 2019 x 1 Dossier

Les aides publiques aux aéroports

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L’objectif de l’expertise de Jacques Pavaux était d’identifier toutes les aides de tion, frais financiers, dotations aux amortis- l’Etat et des collectivités territoriales au transport aérien en France métropolitaine, sements et aux provisions, remboursement et de les quantifier en volume puis en les rapportant au passager transporté. des emprunts). Selon diverses études antérieures, peu d’aé- Ces aides concernent : Le trafic des aéroports roports commerciaux français (moins d’une - les aéroports (couverture des déficits d’ex- quinzaine) ont un trafic suffisant - au moins ploitation, exonération partielle d’impôts fon- Le nombre de passagers commerciaux 1 million de passagers par an - pour atteindre ciers, aides à l‘investissement, contrôle aérien, sur les 86 aéroports de métropole a été de le grand équilibre, qui garantit seul leur auto- douanes, police)... ; 159,1 millions en 2017, dont 25,6 sur les nomie financière. - le démarrage et l’exploitation des lignes lignes intérieures. Sur ces 86 aéroports com- Tous les autres (une soixantaine) sont struc- par les compagnies aériennes (exonération de merciaux, 76 ont eu un trafic inférieur à 2 mil- turellement déficitaires et ne peuvent pour- taxes sur les carburants, subventions comblant lions de passagers, 17 seulement un trafic suivre leur activité qu’en étant subventionnés le déficit de certaines lignes intérieures). supérieur à 1 million de passagers. (ils assurent moins de 10 % du trafic total des L’UAF a recensé également 43 aéroports aéroports métropolitains). Les aéroports dont le trafic a été inférieur à 100 000 passa- gers (33, dont Rouen et Nancy, ont déclaré un Les aéroports déficitaires Une évaluation précise du nombre des aéro- trafic inférieur à 10 000 passagers soit moins ports en activité est délicate : de 30 par jour, le trafic de certains est même Afin d’identifier de manière précise les - on compte 460 aérodromes (DGAC) ou inférieur à 1 000 passagers soit moins de 3 par aéroports déficitaires et le coût de leurs dé- 486 ( JO du 20-02-2015) ; les plateformes jour, 5 ont déclaré un trafic nul ; 3 seulement ficits pour la collectivité, le consultant a uti- sont très diverses par leur taille et leur usage ont eu un trafic supérieur à 50 000 passagers). lisé les enquêtes 2011 et 2012 de la DGAC, (transport public ou privé, aviation d’affaires Ces 43 aéroports ont accueilli environ 500 000 auxquelles une cinquantaine d’aéroports ou de tourisme, formation aéronautique, dé- passagers, soit 0,3 % du trafic total des 81 aé- avaient répondu, mais pas exactement les fense nationale, sécurité civile, hélicoptères...) ; roports ayant déclaré un trafic non nul. mêmes les deux années. Ces enquêtes ont - seules 329 plateformes, en métropole, Le trafic aérien commercial est donc hyper- été abandonnées en 2013. sont « ouvertes à la circulation aérienne concentré : les 17 aéroports de trafic supérieur A partir d’une modélisation, le consul- publique » (CAP) ; à 1 million de passagers annuels concentrent tant a pu estimer les résultats d’exploitation - selon le « rapport sur le maillage aéropor- plus de 95 % du trafic total, et les 10 premiers, des aéroports régionaux, qu’ils aient ou non tuaire français » de la Direction Générale de de trafic supérieur à 3 millions de passagers, répondu aux enquêtes de la DGAC, après l’Aviation Civile (DGAC, 2017), 120 aéro- 90 %. Roissy (69 millions) et Orly (36 mil- avoir exclu ceux de Lorient (en partie aéro- ports ont eu une activité commerciale de pas- lions) traitent 56 % du trafic total. port militaire), Châteauroux (fret prépon- sagers au cours des 20 dernières années ; dérant), Bastia et Ajaccio (déficit important Parmi ces derniers, 86 aéroports (selon La rentabilité des aéroports malgré un trafic supérieur à 1 million de l’Union des Aéroports Français, UAF) ayant passagers). L’échantillon utilisé comprenait aujourd’hui une activité de transport aérien Jacques Pavaux a déterminé le seuil de trafic finalement 34 aéroports régionaux pour commercial ont été considérés. Ils sont classés passagers permettant à un aéroport de couvrir 2011 et 41 pour 2012. en 3 catégories principales : ses charges d’équipement et de fonctionne- Ce travail a confirmé que le résultat d’ex- - A (11 gros aéroports, essentiellement de ment, qui augmentent rapidement quand on ploitation - hors subventions, frais financiers plus de 5 millions de passagers pour la plu- passe de la catégorie C à la catégorie A. et remboursement des emprunts - est struc- part, offrant des vols long-courriers de plus de Deux types d’équilibre financier d’un aéro- turellement déficitaire si le trafic annuel est 3 000 km) : port peuvent être considérés : inférieur à 1 million de passagers. Le résultat - B (19 aéroports intermédiaires) ; - le petit équilibre (les recettes couvrent les devient vite positif et croissant quand le trafic - C (45 petits aéroports, essentiellement de seules charges d’exploitation) ; dépasse ce seuil. moins de 100 000 passagers, offrant des vols - le grand équilibre (les recettes couvrent Sur les 34 aéroports de l’échantillon 2011, court-courriers de moins de 1 000 km). la totalité des charges : dépenses d’exploita- 31 étaient déficitaires, y compris un dont le trafic annuel atteignait le million de passagers. Certains déficits étaient compris entre 3 et 5 Mc sur un total de 47,5 Mc. En réintégrant les aéroports atypiques de Châteauroux, Ajaccio et Bastia, le déficit total des 34 aéroports déficitaires était de 55,3 Mc. L’analyse des résultats 2012 a confirmé ces résultats : en 2012, 40 aéroports étaient déficitaires et le montant total des déficits atteignait 68 Mc. Si le trafic d’un aéroport est très faible, les recettes, les dépenses et le déficit diminuent. Il en est de même si le trafic annuel est supérieur à 200 000 passagers : le déficit diminue jusqu’à s’annuler quand ce trafic atteint 1 million de passagers. Le déficit est donc maximum (de l’ordre de plusieurs Mc) dans la tranche des 100 000 à 400 000 passagers annuels.

2 x FNAUT infos n°273 - avril 2019 Dossier

Les très petits aéroports

Jacques Pavaux a étudié plus particu- lièrement un échantillon de 22 aéroports régionaux ayant un trafic annuel infé- rieur à 50 000 passagers, soit environ la moitié des aéroports de ce type. Tous ces aéroports étaient déficitaires, n’atteignant même pas le petit équilibre ; le déficit total était de 23,4 Mc par an (27 Mc en ajoutant celui de Châteauroux) et le dé- ficit moyen par passager était de 88 c. Dans 16 cas sur 22, ce déficit par passager dépas- sait 100 c ; dans 10 cas, il dépassait même 200 c (700 c à Vannes, largement plus de 1 000 c à Angoulême). Par ailleurs, en 2011 et 2012, la prin- cipale liaison aérienne (une radiale vers Paris, souvent la seule ligne régulière) de 6 de ces 22 aéroports a bénéficié d’une subvention pour couvrir son déficit : Agen, Aurillac, Brive, Castres, Le Puy- en-Velay et Périgueux. Cette subvention, de l’ordre de 50 à 60 c par passager, ac- cordée dans le cadre d’un contrat d’obli- gation de service public dit « OSP » (voir page 4) s’ajoutait aux autres subventions. Pour les 6 aéroports cités, le cumul des aides directes par passager transporté aura donc atteint, en 2011/2012, entre 60 et 230 c. La situation financière de ces très petits aéroports s’est plutôt dégradée, depuis 2012. Le trafic de 13 d’entre eux est resté stable de 2012 à 2017, le trafic de 7 autres a diminué, celui de Dijon s’est écroulé dès 2013. Agen est Le déficit global des aéroports défici- passé de 35 000 passagers en 2011 à 40 taires hors subventions a été de 97 Md L’aide publique totale 000 en 2016 mais, le total de subven- en 2011 et 103 Me en 2012. Le déficit aux aéroports tions s’élevant à 3 millions d’euros (hors moyen par passager a été voisin de 10 c. financement de l’OSP), les subventions La part des très petits aéroports (moins sont passées de 54 à 75 c par passager. de 50 000 passagers par an) dans le défi- Seul Dole a connu une forte croissance cit total était de 34 % en 2011 et 37 % en (de 33 000 passagers à environ 100 000), 2012, pour 3,3 % du trafic. mais est resté déficitaire. Si on considère uniquement les aéro- ports ayant répondu aux enquêtes de Les subventions d’équilibre la DGAC, les 35 aéroports déficitaires aux aéroports ont eu un chiffre d’affaires (CA) global hors subventions de 158 Mc et un défi- Jacques Pavaux a construit un modèle cit global de 55,5 Mc soit 35 % du CA. (pixabay) simple reliant le résultat d’exploitation En 2012, le trafic a augmenté de 6 % : le par passager d’un aéroport à son tra- CA global des 41 aéroports déficitaires Aux subventions d’équilibre desti- fic annuel. Il a ainsi obtenu le résultat a été de 232 Mc et le déficit de 69 Mc nées à combler les déficits d’exploi- d’exploitation de 65 aéroports de France soit 30 % du CA. Pour les aéroports de tation, il faut ajouter les subventions métropolitaine de trafic annuel inférieur moins de 50 000 passagers annuels en d’équipement (environ 15 Mc/an), à 1,2 million de passagers, y compris 2011 ou 2012, les recettes n’ont même les réductions de taxes foncières, la certains qui n’avaient pas répondu aux pas couvert la moitié des dépenses ! mise à disposition de personnel, le enquêtes de la DGAC. Pour les aéroports de moins de 50 000 financement de missions régaliennes En définitive, sur 76 aéroports dont passagers, les subventions couvrent la par l’Etat sur les petits aéroports le trafic a été inférieur à 2 millions de totalité de déficits. Pour les aéroports (contrôle aérien, douane, sécurité... : passagers en 2011, 73 ont été défici- plus importants, la couverture est quasi- 48 c par passager en 2018 à Agen). Ce taires : seuls ceux de Lille, Montpellier complète : les collectivités territoriales dernier poste (au moins 130 Mc/an) et Strasbourg ont été bénéficiaires (celui et les CCI complètent les subventions n’est pas considéré comme une aide de Biarritz l’est devenu en 2012). En directes par des garanties d’emprunts, d’Etat par Bruxelles mais n’en est pas prenant en compte les 10 aéroports de ou des avances remboursables et prêts. moins partiellement à la charge du plus de 2 millions de passagers (de Rois- La soixantaine d’aéroports déficitaires contribuable pour un montant estimé sy à Beauvais), seulement 13 aéroports a donc coûté au contribuable environ à 80 Mc/an. sur 86 ont eu un trafic suffisant pour 100 Mc par an au début des années Finalement, l’aide totale aux aéro- leur permettre d’être bénéficiaires en 2010. Jacques Pavaux a vérifié qu’il en ports (hors liaisons OSP - voir page 4) 2011 (14 en 2012). est encore de même aujourd’hui. atteint 245 Mc/an.

FNAUT infos n°273 - avril 2019 x 3 Dossier

Les aides publiques aux compagnies aériennes

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La fiscalité du kérosène L’article 24 de la Convention ne se pro- La règlementation européenne a auto- nonce pas sur la taxation du carburant au risé de telles aides dans des textes dits Selon les directives européennes de 2003 moment de l’approvisionnement de l’avion « lignes directrices » de 2005 et 2014 qui et 2006 relatives à la fiscalité de l’énergie, les à son point de départ. Il semble qu’il ait été en fixent les conditions à respecter : amé- produits énergétiques ne sont taxables que interprété à tort par les compagnies aériennes lioration de la mobilité des citoyens de s’ils sont utilisés comme combustible ou car- et les Etats dont elles dépendent pour justi- l’Union, développement de régions excen- burant, la base de taxation étant le volume fier la non-taxation du kérosène. trées, aide limitée à 3 ans... ou le poids. Ils sont donc taxés comme les En réalité, l’article 24 dit que le carbu- D’autre part, les Etats membres peuvent, alcools ou le tabac, en fonction des quanti- rant se trouvant dans les soutes d’un avion selon un règlement du 24-09-2008, imposer tés consommées et non (au contraire de la atterrissant dans un Etat contractant de la des Obligations de Service Public (OSP) sur TVA) de leurs prix. Convention (ou transitant par lui) ne peut des liaisons considérées comme indispen- Une directive européenne de 2003 prévoit être taxé par cet Etat (il en est de même des sables au développement de régions encla- cependant que les Etats membres peuvent alcools se trouvant à bord). Il s’agissait seule- vées et mal desservies par les autres modes. exonérer « les produits énergétiques utilisés ment de faciliter le transport aérien en sim- Cette possibilité va au-delà des règles défi- comme carburant pour la navigation aérienne pliant la fiscalité, et non d’accorder un avan- nies dans les « lignes directrices » puisqu’un hors aviation de tourisme privé ». tage fiscal au transport aérien. Etat peut alors imposer, suite à un appel La directive précise que les Etats peuvent Cet article 24 ne justifie donc en rien la d’offres, une qualité d’offre minimale (fré- limiter les exonérations aux transports non-taxation du kérosène consommé en par- quences des vols, type d’appareil, tarifs...) internationaux et intracommunautaires. ticulier lors des vols intérieurs : ce kérosène qu’un transporteur ne pourrait proposer dans De plus, en cas d’accord bilatéral entre deux est d’ailleurs taxé dans divers pays : Alle- un cadre purement commercial. Etats membres, l’exonération peut être sus- magne, Pays-bas, Suisse, Suède, Etats-Unis, L’OSP est signée par l’Etat, la compagnie pendue, et la taxation peut être inférieure Brésil, Japon. aérienne et l’aéroport, généralement pour 4 au minimum fixé alors par la directive, soit ans, et financée par l’Etat et les collectivités 33 c/hectolitre, comme pour le gazole. Le coût de la détaxation du kérosène locales concernées. La directive de 2006 précise que « jusqu’à En 2016, il y avait 11 liaisons OSP (hors adoption de dispositions communautaires Selon un rapport publié en juin 2011 par Corse et Ouessant) contre une vingtaine en relatives à l’avitaillement des bateaux et aéro- le Comité d’évaluation des dépenses fiscales 2000 : 9 radiales (entre Paris et Agen, Auril- nefs, un Etat peut maintenir ses dispositions et des niches sociales, le coût de l’exonéra- lac, Brive, Castres, Le Puy, Limoges, Péri- nationales concernant les exonérations ». tion de taxation du kérosène (50,26 c/hl) se gueux, Rodez, Tarbes) et 2 transversales (La Elle reconnaît qu’aucune solution commune montait à 3,5 Mdc pour l’ensemble des vols, Rochelle-Poitiers-Lyon et Lorient-Lyon). satisfaisante n’a encore été trouvée. intérieurs et internationaux. La suppression A noter que des appels d’offres viennent En France, l’ancienne TIPP a été rem- de l‘exonération aurait doublé le prix du ké- d’être lancés pour des lignes OSP Limoges- placée en 2011 par l’actuelle TICPE qui rosène, et augmenté le prix du billet d’avion Orly et Limoges-Lyon. En 2018, l’Etat a s’applique aussi aux produits énergétiques de 12 % en moyenne sur les vols intérieurs versé 5 Mc aux OSP ; à partir de 2019, il d’origine non pétrolière (biocarburants (le poids de l’énergie dans le coût de produc- versera 20 Mc. par exemple). tion est plus élevé en transport aérien, envi- La subvention annuelle à une OSP (Etat + La TICPE s’applique uniquement aux ron 25 % pour les compagnies classiques et collectivité locale) peut atteindre 3 Mc soit, carburants et combustibles, à des taux dif- 35-40 % pour les low cost, que dans les autres pour un trafic moyen inférieur à 50 000 pas- férents (mais le gaz naturel et le charbon modes : moins de 10 % pour le TGV). sagers par an, un coût moyen de 100 c par sont soumis à des taxes spécifiques). Elle Dans une étude du CGDD de janvier passager (165 c sur Paris-Aurillac en 2009, est soumise à la TVA, comme le prix de 2017, le coût de la détaxation du kérosène pour 20 000 passagers) et même 120 c si base du carburant. est estimé à 2,7 Mdc en 2015, dont 310 Mc on intègre la subvention à l’aéroport. D’où Une composante carbone de la TICPE pour les vols intérieurs (un rapport de la un coût global annuel des lignes sous OSP a été introduite par la loi de finances 2014. DGAC cite un coût de 600 Mc pour les vols proche de 30 Mc hors Corse, qui s‘ajoute aux Début 2018, la TICPE du gazole s’élevait à intérieurs, y compris les vols de continuité aides énumérées précédemment. 59,4 c/hectolitre et le kérosène était toujours territoriale vers l’outremer). Le consultant détaxé (article 265 bis du Code des douanes). estime à environ 320 Mc/an le coût de l’exo- L’aide publique totale au Une circulaire du 20-04-2017 du ministère nération de TICPE pour une TICPE de transport aérien intérieur de l’économie et des finances confirme cette même niveau que celle à laquelle est soumis détaxation et rappelle que la TVA ne s’ap- actuellement le transport aérien privé. En définitive, le montant des subven- plique pas à la TICPE du kérosène (contrai- tions directes apportées aux aéroports rement au cas du gazole), donc aux achats de Les aides au démarrage déficitaires (subventions de fonction- kérosène par les compagnies aériennes. Cette de nouvelles lignes aériennes nement 100 Mc + coût des OSP 30 Mc) exonération de TVA ne concerne pas la TVA est proche de 130 Mc par an. Ce mon- sur le prix des billets d’avion. L’ouverture de nouvelles lignes peut faire tant atteint 275 Mc si on y intègre le l’objet de nombreuses aides directes ou coût des fonctions régaliennes assu- La convention de Chicago indirectes, dont certaines transitent par- rées par l’Etat et des autres aides (sub- fois par le propriétaire ou gestionnaire de ventions d’équipement...). Il est considéré généralement que la non- l’aéroport concerné. Si on ajoute à cette somme le coût de taxation du kérosène découle de l’article 24 Des aides aux compagnies aériennes la détaxation du kérosène (320 Mc) sur de la Convention de Chicago (1944) qui peuvent bénéficier indirectement aux aé- les vols intérieurs, on voit que l’aide pu- voulait faciliter l’essor de l’aviation civile roports (recettes nouvelles des boutiques, blique globale au transport aérien inté- internationale. parkings...) et réciproquement. rieur approche les 600 Mc par an.

4 x FNAUT infos n°273 - avril 2019 Dossier La FNAUT et le transport aérien : la politique souhaitable de l’Etat et des collectivités

La FNAUT demande une profonde révision de la politique de transport aérien : le Le TGV international de jour transport aérien ne doit pas être développé mais au contraire maîtrisé afin de limiter Le trafic aérien s’est considérablement son impact environnemental et financier. développé depuis une vingtaine d’années en Europe. En 2017, les principales destinations Nuisances aériennes Les infrastructures ferroviaires depuis la France ont été l’Allemagne (8,9 M On peut étendre le réseau des LGV vers pax), l’Espagne (13,6), la Grande-Bretagne Il faut renforcer les réglements sur les ho- Toulouse, Nice et Perpignan, moderniser la (13,5), l’Italie (11,4), les Pays-Bas (4,2), le raires des vols et les procédures de navigation ligne classique Massy-Valenton (pour faciliter Portugal (6,8), la Suisse (3,3). (couvre-feu, descente continue...) comme le la circulation des TGV intersecteurs) et les Quand le réseau des LGV aura été réclament les associations de riverains des lignes Intercités concurrencées par l’avion (par complété, les villes de Madrid, Barce- grands aéroports, afin de réduire le bruit. exemple Nantes-Bordeaux-Toulouse). lone, Rome, Berlin, Hambourg, Munich, Mais il faut aussi réduire à la source le Le réseau des LGV a déjà atteint son opti- Vienne, Glasgow, Edimbourg... seront bruit, la pollution de l’air et la consomma- mum vers la Belgique et les Pays-Bas, mais aisément accessibles depuis Paris en em- tion de carburant. On parle de motorisation beaucoup reste à faire vers l’Italie, l’Espagne et pruntant des TGV de jour en des temps électrique, mais il y a loin d’un prototype à l’Europe de l’est... compris entre 5 et 6 heures. un engin fiable, adapté aux longs parcours aériens et d’un prix accessible. Certes les L’intermodalité Les trains de nuit internationaux progrès technologiques futurs ne doivent pas Les aéroports importants peuvent être Ceci étant, des temps de parcours de l’ordre être sous-estimés, mais ils ne suffisent pas et mieux desservis par train ou tramway (Roissy, de 5-6 heures ne permettent pas au TGV de ne suffiront pas à compenser la hausse du Nantes, Bordeaux, Bâle-Mulhouse). capter massivement le trafic aérien, une offre trafic aérien (un doublement est prévu d’ici La FNAUT refuse les gares TGV excen- complémentaire de nuit est indispensable. 2050) et limiter ses nuisances ou son impact trées (Montpellier Sud de France). Les er- Les trains classiques de nuit ont joué un climatique. reurs doivent être corrigées (construction de rôle important entre Paris et Madrid ou la gare de Vandières et du raccordement de Barcelone (trains-hôtels Elipsos), Rome (le Petits aéroports Saint-Brès, de Nîmes vers Montpellier). Palatino), Vienne... Leur relance n’a rien d’utopique, comme La pléthore d’aéroports sur notre territoire Le service TGV-air le démontre le succès commercial et éco- coûte cher au contribuable. Ce service offre des pré et post-achemine- nomique des trains de nuit internationaux M. Spinetta a préconisé de fermer massi- ments par TGV dans 19 gares de province et Nightjet exploités par les Chemins de fer au- vement les « petites lignes ferroviaires » non Bruxelles. Les avantages pour le passager sont trichiens (ÖBB) pour remplacer ceux qui ont rentables : mieux vaudrait fermer les nombreux nombreux mais les bagages ne sont pas pris en été abandonnés par la Deutsche Bahn. En aéroports régionaux non rentables. Le dyna- charge dès la gare de départ. général, le départ se fait avant le dîner pour misme économique d’une région tient bien une arrivée en milieu de matinée. plus à son environnement technique et scien- Mieux exploiter le TGV de jour Ces trains connaissent un succès supé- tifique ou à son attrait touristique, qu’à l’exis- L’étude réalisée en 2003 par Gérard Ma- rieur aux prévisions en Autriche, en Alle- tence d’un petit aéroport. thieu et Jacques Pavaux pour la FNAUT a magne, en Suisse et en Italie du nord. montré que le TGV pouvait concurrencer Malgré la concurrence de l’avion à bas coût Aides publiques vigoureusement l’avion, ce que l’expérience et du car, ils sont complets en périodes de a confirmé : « le TGV, c’est le 3ème aéroport pointe. La preuve est faite que le train de L’Etat et les collectivités territoriales doivent parisien ». La FNAUT dénonce le « mythe des nuit n’a rien d’obsolète. arrêter de subventionner les compagnies aé- 3h » (FNAUT Infos 244). Les 16 relations ÖBB (1,5 million de riennes et les aéroports (sauf pour les liaisons Or la SNCF « rationalise » son offre : fré- voyageurs en 2017) ont évité environ 12 000 OSP d’aménagement du territoire). quences faibles, TGV de grande capacité, axes vols. Et les chemins de fer néerlandais Comme en Suède, l’Etat doit imposer radiaux privilégiés. Elle doit imiter les compa- (NS) suivent leur exemple. Le train de nuit une taxation du billet d’avion si l’avion est en gnies à bas coût (avions de faible capacité, fré- Nightjet va être prolongé de Dusseldorf à concurrence directe avec un service ferroviaire, quences élevées, dessertes transversales). Amsterdam. L’objectif est double : concur- ou une taxation du kérosène, afin de limiter rencer l’avion pour limiter son impact écolo- les émissions de gaz à effet de serre et d’établir Relancer le train de nuit intérieur gique, et désaturer l’aéroport d’Amsterdam- des conditions de concurrence train-avion plus La SNCF s’est débarrassé de presque tous Schiphol, de plus en plus engorgé. équitables. Une taxation du transport aérien ses trains de nuit alors qu’ils étaient généra- Très récemment, c’est un train de nuit serait mieux admise qu’une taxation des dépla- lement bien remplis, la Deutsche Bahn a fait Berlin-Kiev qui a été créé. cements quotidiens. Elle permettrait de finan- de même. Le gouvernement se contente de cer l’AFITF. bricolage sans volonté de relance. Les liaisons Des TGV de nuit à grande vitesse Paris-Briançon et Paris - Rodez/Latour-de- Le réseau français des LGV s’étant éten- Report du trafic sur le rail Carol sont pérennisées, mais l’avenir du Paris- du depuis 20 ans, des « TGV couchettes » Cerbère est incertain. peuvent être envisagés aujourd’hui car ils per- Mais il faut aller au-delà des mesures régle- Pourtant le train de nuit reste pertinent, mettraient de couvrir des distances bien plus mentaires, techniques, fiscales... et envisager malgré l’extension du réseau des LGV, pour importantes que les trains classiques (jusqu’à une réduction du volume du trafic aérien, en les trajets intérieurs et internationaux de plus 2 000 km) ou les mêmes distances avec des particulier court-courrier, le plus émetteur de de 500 km. Grâce à lui, le voyageur gagne du départs plus tardifs et des arrivées plus mati- gaz à effet de serre. Le train peut souvent se temps en journée (il peut arriver tôt le matin à nales. Par exemple Londres-Milan-Rome, substituer à l’avion si on renforce les liaisons destination, et repartir tard en soirée) et fait des Bruxelles-Paris-Madrid... ferroviaires entre grandes villes sur les terri- économies (billet TGV, nuit d’hôtel). L’offre de Le TGV de nuit n’est pas une utopie. Il toires français et européen (voir FNAUT Infos nuit, complémentaire de l’offre de jour, élargit existe déjà en Chine des TGV couchettes 266 et 267). utilement l’éventail des solutions de mobilité. à deux étages.

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Comment mailler les réseaux de tramway ?

(MD)

Dans tout réseau de transport, il est souhaitable de minimiser le nombre des correspon- dances nécessaires pour aller d’un arrêt à un autre. Nous discutons ici le cas particulier des La stratégie de développement du réseau réseaux de tramways. Le problème est technique mais concerne directement la qualité du portée par l’Eurométropole et l’exploitant service rendu. (CTS) combine à la fois le tramway et le BHNS, et vise à poursuivre le maillage La notion de maillage peut revêtir En France, les réseaux de Grenoble, du réseau pour réduire la contrainte sur le deux significations : soit l’infrastructure Strasbourg et Montpellier maillent l’espace nœud de l’Homme de Fer. Le BHNS G, maille le territoire, soit les lignes sont urbain, mais chacun présente des particula- intégré au réseau structurant, sera prolon- « entremêlées », une même rame pouvant rités d’organisation et d’exploitation. gé en 2021 entre la gare centrale et Etoile passer d’une ligne à une autre grâce à des Bourse pour assurer un maillage ouest. raccordements. A Strasbourg, la structure radiale du En revanche, lors de l’arrivée du tramway Le principe du maillage des lignes est réseau (5 des 6 lignes se croisent à la sta- en surface à la gare centrale en 2010, le prin- souvent mis en œuvre dans les réseaux alle- tion Homme de Fer en hypercentre) est cipe d’une ligne dédoublée (un terminus, mands qui possèdent un nombre de lignes complétée par la ligne de rocade E qui deux destinations possibles) n’a pas été rete- important. Cette organisation permet de contourne le centre à l’Est. Elle permet de nu. Une restructuration du réseau tramway a renforcer très nettement la fréquence de construire un réseau maillé où chacun des été préférée car plus efficace pour desservir passage sur les troncs communs situés dans 9 troncs communs du réseau est parcouru l’université et plus simple à exploiter. la zone dense de la ville, d’offrir à leurs par 2 ou 3 lignes différentes (mais seules riverains de nombreuses relations directes la A et la D ont des débits voisins et sont A Grenoble, le réseau est lui aussi bien et de supprimer des correspondances entre synchronisées sur un long tronc commun maillé (plan page 7) : les lignes A et B tra- lignes pour faciliter les relations entre de 11 stations). versent l’hypercentre sur un tronc commun quartiers, tout en conservant des dessertes On réduit ainsi le nombre des cor- mais sans synchronisation de leurs horaires directes, mais à fréquence réduite, des sec- respondances et on soulage le nœud de (le fonctionnement de la B est lié aux fluc- teurs périphériques. l’Homme de Fer (80 000 montées et tuations des activités du campus universi- Plusieurs lignes (jusqu’à 5 à Dresde) descentes/jour) tout en assurant des liai- taire et impossible à coordonner avec celui peuvent emprunter une même section sons directes inter-quartiers. Les usagers de la A), deux autres lignes (C et E) tan- de ligne, ce qui génére d’importantes ont bien intégré le maillage des lignes, gentent l’hypercentre et traversent le tronc contraintes d’exploitation. La régulation des comme le constate l’ASTUS, association commun des lignes A et B. réseaux maillés est délicate dans les centres- locale membre de la FNAUT. La ligne Comme dans le métro parisien, chaque villes, car les arrêts y sont très fréquentés et de rocade E voit ainsi son trafic augmen- ligne possède sa propre organisation (ma- les risques de perturbations élevés : par suite, ter régulièrement. Mais le maillage des tériel roulant, fréquence, régulation). Il ré- de nombreux tramways allemands traversent lignes a fait baisser la vitesse commerciale sulte de la structure du réseau, et d’une fré- les centres en souterrain. moyenne du tramway. quence élevée sur chaque ligne en pointe, que l’attractivité du tramway grenoblois est très bonne : il est assez facile de se déplacer sur le territoire desservi au prix d’une cor- respondance au maximum. La Métropole prévoit cependant, dans le cadre du nouveau PDU, de mailler les lignes elles-mêmes : 8 itinéraires seraient exploités sans création de nouvelle infras- tructure. Il y aurait moins de correspon- dances obligées, mais le réseau serait bien moins lisible. L’ADTC-Grenoble, membre de la FNAUT, est hostile au projet, certes séduisant mais qu’elle considère en fait comme une « fausse bonne idée » : - les avantages escomptés ne sont pas déterminants pour les usagers ; un maillage des lignes présente au contraire un risque majeur de dégradation de l’exploitation (saturation du tronc commun des lignes A et B, déjà en limite de capacité, décaden- cement de certaines lignes, gestion difficile de certains carrefours, perte de régularité, difficulté à maintenir une fréquence accep- table en bouts de ligne) ; - les investissements nécessaires au mail- lage sont importants. Or la priorité doit être donnée à l’achat de matériel roulant et à l’extension du réseau (ligne E vers Pont-de- Claix au sud et ligne A vers Sassenage au Réseau de tramway de Strasbourg (CTS) nord-ouest, création d’une ligne vers Mey-

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(TAM) Réseau de tramway de Genève (TPG) lan au nord-est au lieu du BHNS prévu), Grenoble : un PDU sans ambition plus efficace en termes de report modal. L FIL Palluel

A Montpellier, le maillage du réseau SaintMartinLeinoux (plan ci-dessus) est assuré par une ligne tel de ille B GBL circulaire qui enserre le centre-ville en Presquele

La ronce pital réutilisant partiellement des tronçons des ambridge asamaures Grand Sablon Micallon 3 lignes diamétrales. illage le erte FI La Poya splanade ubert ité Internationale otreDame Dubedout Musée Gabriel Fauré arles Micels Maison du D Bibliotèque Gares Saintelaire B A Genève, le réseau comptait 7 lignes, ourisme SIMID’S Universitaires Palais de ustice Gare Les alles GIS Fontaine teldeille Les aillés Universités Plaine des erdun Flandrin ector Berlio Sports ictor Préfecture Universités il a été simplifié en 2011 et n’en compte Louis Maisonnat almy Gabriel Péri Berriat lsace ugo Les Fontainades SaintBruno Lorraine Le Magasin Grenoble Péri plus que 4. Le maillage des lignes de Brossolette SIMID’S ondorcet avant teldeille ondillac Universités Maison Mayencin Gustave ivet ommunale Gières Gare amps oman Universités tramway a été expérimenté sans succès et SeyssinetPariset allier lbert er de Belgique teldeille allieratane Libération FocFerrié Mounier douard aillant abandonné au profit de l’exploitation de allier Dr almette lignes indépendantes. Fauconnière Parc o Blancon lliés M Maison de la ulture Grand Pré D On le voit, les logiques de maillage sont Malerbe SIMID’S tienne Grappe Mas des les multiples, et chacune présente des avan- La Bruyère GBL Louise Micel tages et des inconvénients qu’il convient de SSSIS rlequin Le Prisme bien mesurer. C’est donc sans dogmatisme ILLS qu’il faut chercher à améliorer l’attractivité Denis Papin Réseau de tramway de Grenoble (wikipedia) commerciale d’un réseau de tramway, en tenant compte de la configuration urbaine, Le projet de PDU élaboré par Grenoble Métropole traite très bien la marche et le vélo mais de la structure du réseau et du rôle dévolu oublie le tramway. C’est pourtant grâce au tramway que l’agglomération a pu réduire la part à chaque ligne. modale de la voiture, contenir la pollution, supprimer le caractère autoroutier des grands Exploiter de nouveaux itinéraires sur boulevards et du cours Jean Jaurès. un réseau existant peut être une solu- Depuis 1987, le réseau s’est étendu (ligne A en 1987, ligne B en 1990, ligne A à Echirolles tion mais il convient de bien en mesurer 1997, ligne B à Gières 2006, ligne C en 2006, ligne D en 2007, ligne E 2014 et 2015) dopant la tous les effets en termes de performance fréquentation du réseau à tel point que certaines lignes sont saturées. Si Grenoble est bien d’ensemble, de fonctionnement en situa- placée en matière de fréquentation des transports publics ou de part modale de la voiture tion dégradée, de bénéfice client en jour- en réduction, ce n’est pas par hasard ! née mais également en période creuse Mais le PDU proposé pour les années 2018-2030 interrompt cette dynamique avec des (nuit, dimanches, périodes de vacances). projets tramway très limités : un prolongement d’une station de la ligne E jusqu’au stade Les- D’autres solutions comme la restructura- diguières ; un tramway vers Pont de Claix ou un tram-train vers Vizille mais avec un objectif tion des lignes (Strasbourg), la création de réalisation en ... 2030 ! Pendant ce temps, à Strasbourg, on continue à développer le réseau de lignes de rocade (Montpellier) ou de (Kehl, Robertsau, Koenigshoffen). lignes partielles sont possibles. Enfin les Les autres possibilités, pourtant essentielles, d’extension du réseau de tramway greno- nœuds des réseaux maillés sont à étudier blois sont reportées au-delà de 2030 : desserte de Meylan-Montbonnot et de Sassenage, avec soin car ce sont des zones de conflit ligne D prolongée en rocade. Ces projets pourraient être amorcés dès maintenant par une potentiel où les tramways se gênent redistribution des priorités financières : le Métrocâble n’est pas urgent, une exploitation du mutuellement, et la vitesse commerciale réseau tramway en maillant les lignes risque d’en perturber le fonctionnement (création de d’ensemble peut en être affectée. fourches et de terminus partiels), et le BHNS Grenoble-Meylan est à convertir en tramway. Jean Sivardière et Jean Terrier z ADTC-Grenoble z

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Béziers : encore une gare TGV en périphérie urbaine ?

(MD)

Le projet de gare TGV exurbanisée de Béziers-Bayssan est une ineptie : la desserte de Bé- celle de l’agglomération, et dynamiser les ziers peut être assurée efficacement par la gare centrale grâce à des raccordements à la ligne projets de territoire ». Mais il ne fait plus nouvelle Montpellier-Perpignan. d’une gare TGV une priorité. l Kléber Mesquida, président du Après les critiques adressées à celles de gnon, l’erreur commise initialement a dû être Conseil départemental de l’Hérault, voit Montpellier Sud de France et Nîmes-Man- corrigée par un raccordement entre la gare plus loin que son collègue : « nous, on pré- duel, on pouvait croire que la gare TGV envi- TGV excentrée et la gare centrale. voit l’avenir », explique-t-il fièrement dans sagée en périphérie de Béziers était enterrée. Le coût environnemental de ces gares est un français approximatif. Mais la voilà qui réapparaît dans le cadre du très élevé, des surfaces agricoles ou natu- projet d’intérêt général (PIG) de la ligne nou- relles importantes sont artificialisées et La gare Sud de France velle défendu par SNCF Réseau, et elle est à imperméabilisées. nouveau réclamée par Kléber Mesquida, pré- sident du Conseil départemental de l’Hérault Une erreur persistante (elle était initialement prévue à Villeneuve- lès-Béziers, au croisement de l’A9 et de l’A75). On a pu vérifier depuis longtemps que La nouvelle gare serait située sur le site de les gares TGV implantées loin des centres Bayssan, où existe un projet de parc à thème : urbains, parfois en pleine nature - en Picar- 2,3 millions de visiteurs annuels sont espérés die (TGV Haute Picardie), en Lorraine mais ils satureraient la gare centrale de Béziers. (Meuse-TGV, Louvigny), en Bourgogne (Le « Si ce parc sort de terre, ce sera un pou- Creusot, Mâcon-Loché) - ne conviennent mon d’oxygène économique pour toute la pas aux voyageurs. (mimram.com) région » argumente M. Mesquida. Autre ar- Mais de telles gares sont encore réclamées gument classique chez ceux qui fantasment par des élus locaux, contre tout bon sens, sur La nouvelle gare TGV de Montpellier - sur les gares TGV exurbanisées : cette gare, les LGV de la transversale sud, à Béziers, Nar- Sud de France (FNAUT Infos 231) est im- proche de l’autoroute A9 et de la rocade bonne, Montauban, Agen ; celle de Nîmes- plantée loin de la gare Saint-Roch. Ouest, serait « intermodale ». Manduel sera bientôt mise en service. Livrée fin 201, elle a été réalisée dans le M. Mesquida a-t-il examiné les mé- La FNAUT demande donc l’élimination cadre d’un Partenariat Public-Privé (PPP) diocres résultats de la gare du Futuroscope des projets de gares TGV non desservies portant sur la conception, la construction, la de Poitiers, elle aussi entièrement dédiée à par les TER et les transports publics de maintenance et le financement de la gare. un parc de loisirs ? proximité. Les agglomérations doivent être Icade est le co-contractant privé, SNCF Ré- desservies par TGV de manière rationnelle seau est le co-contractant public. La durée Des gares conçues sans penser par leur gare centrale, grâce à des raccor- du contrat de partenariat est de 15 ans. aux besoins des voyageurs dements entre LGV et ligne classique, ce La gare est composée d’un bâtiment qui maximise les possibilités de correspon- voyageurs de 10 000 m2, d’un parvis, de De nombreux voyageurs débutent ou pro- dances et facilite l’accès au TGV par les commerces, d’espaces d’intermodalité longent un trajet en TGV par un déplacement modes doux, marche et vélo, depuis le cœur TGV - tramway - bus - gare routière - sta- régional ou local en transport collectif. des agglomérations. tionnement, de quais et de l’ensemble Il est donc essentiel que les gares TGV Jean-François Troin z des éléments techniques qui en font un soient desservies directement par les Pôle d’échange multimodal (PEM). transports collectifs de proximité - TER, l Robert Ménard, maire de Béziers : « créer C’est une réalisation de l’architecte autocars périurbains et transports urbains - de toutes pièces une gare à l’extérieur de la Marc Mimram, pour qui explique docte- comme c’est systématiquement le cas en ville n’a pas de sens, il suffit de voir la nou- ment que « la nouvelle gare s’adresse aux Allemagne, en Belgique ou en Italie : on velle gare de Montpellier pour s’en persuader. plaisirs du lieu, aux plaisirs des voyageurs, l’oublie trop souvent, une gare TGV est Il faut profiter de l’arrivée du TGV pour faire à la continuité urbaine qui se développe d’abord un équipement ferroviaire. de la gare centrale un outil qui nous permette ici, avec l’infrastructure qui la fonde à Les gares TGV isolées en périphérie des de revivifier la ville ». l’échelle locale et territoriale ». agglomérations, près d’échangeurs autorou- l Carole Delga, présidente de la Région L’architecte, manifestement très fier de tiers, ne sont accessibles qu’en voiture : elles Occitanie : « il faut réaliser la liaison Montpel- son ouvrage, a voulu faire de cette gare sont inadaptées aux besoins des voyageurs. La lier-Béziers en priorité, avec un pôle multimo- « un exemple d’urbanité, une gare jardin, gare Sud de France à Montpellier en fournit dal situé à Béziers même, on économisera plus une gare des sens, dont le caractère médi- un exemple affligeant. de 50 Mc par rapport à une gare excentrée. terranéen serait immédiatement perçu La Région soutiendra à l’avenir les projets dans le jeu des lumières et des ombres, Des gares inutiles et coûteuses utiles à la population, interconnectés quai à dans l’attention au climat, aux saisons, et qui pénalisent l’environnement quai avec le réseau classique et desservis par le au dialogue avec la nature dans laquelle réseau urbain ». elle prend place ». Les gares TGV excentrées sont inu- l Pour Frédéric Lacas, président de « Le voyage est une parenthèse du temps tiles. Envisagées sur la LGV Tours-Bordeaux, l’Agglo Béziers Méditerranée, la future que ponctuent la rencontre, l’attente et le elles ont été judicieusement écartées. Les gares gare TGV A9-A75 devait « faciliter l’accès départ dont la gare façonne la mémoire. de Valence TGV et de Belfort-Montbéliard à la grande vitesse à un plus grand nombre Entre ici et ailleurs, entre local et global, entre TGV ont été positionnées au croisement d’Héraultais, permettre de développer la ville et territoire, la gare est ce lieu d’émo- d’une LGV et d’une ligne régionale. En Avi- complémentarité entre la gare centrale et tions auxquelles nous voulons répondre ».

8 x FNAUT infos n°273 - avril 2019 Actualité Un voyage difficile Gares TGV de Béziers et Narbonne : Comme bien d’autres voyageurs, j’observe une dégradation de la qua- arrêtons de délirer ! lité des services SNCF. Record battu lors d’un voyage de Bordeaux, où se Le Projet d’Intérêt Général (PIG) de de vie, d’activité, de vacances et de loisirs et tenait le 21ème congrès de la FNAUT, ligne nouvelle Montpellier-Perpignan aux espaces culturels ? Et si gare nouvelle il à Grenoble, où j’habite. J’ai utilisé présenté par l’Etat inclut toujours la gare doit y avoir, où est le meilleur emplacement un Intercités Bordeaux-Montpellier- nouvelle excentrée à l’est de Béziers près de pour conserver la cohérence du système (Marseille), un TGV Montpellier-Valence l’A75 (alors que la Région n’en veut pas). ferroviaire, condition de son efficacité et de TGV-(Paris), enfin un TER Valence TGV- Il ne prévoit pas la mixité de la ligne son attractivité ? Grenoble-(Annecy). Départ à 14h34, nouvelle au-delà de Béziers et il inclut Le projet de gare nouvelle de Narbonne arrivée à 23h30. Prix : 52,30 c en 1ère une gare nouvelle à Narbonne ouest. Par pose problème lui aussi : il s’agirait d’une (carte Senior + et billet Prems). contre la gare TGV envisagée à Rivesaltes gare-pont, sous lequel passerait la ligne Rien à signaler dans l’Intercités, juste est abandonnée. classique, mais qui ne permettrait pas la la routine : vitres très sales, paysage à Avant d’être un faire-valoir de projet mixité, et son positionnement, trop au sud peine visible, pas d’eau dans les toilettes. urbain ou culturel, une gare TGV est par rapport à l’axe Béziers-Toulouse, serait Mais un contrôleur aimable. Arrivé à d’abord un équipement ferroviaire, qui tel que les trains Montpellier-Toulouse de- Montpellier-Sud de France, il m’a fallu doit s’intégrer à une logique ferroviaire. vraient, pour desservir la gare, effectuer une exactement 1h quai à quai (j’ai chrono- Qui oserait proposer pour la route ce manœuvre de rebroussement. métré) pour passer de la gare nouvelle à qu’on ose pour le rail : une gare routière Notre association a toujours dénoncé la gare centrale Saint-Roch. sur un grand axe non raccordée au reste cette aberration, mais SNCF Réseau a va- Dans la gare TGV, aucune indication du réseau et qui nécessiterait l’utilisa- lidé la demande des élus en balayant d’un du point de départ du bus rejoignant le tion d’un autre mode de transport pour revers de main l’objection de la difficulté tramway donnant accès Saint-Roch. Ce rejoindre le reste du réseau routier ? d’exploitation et des pertes de temps. La bus étant complet quand je suis arrivé, Il serait urgent de remettre les questions question d’une gare nouvelle à Narbonne j’ai dû attendre le suivant : l’embarque- dans le bon ordre : où sont les nœuds ferro- est à revoir, la présidente de la Région le ment est très lent ; le matériel, de trop viaires importants ? Comment en faire des demande également. faible capacité, ne convient pas aux pôles intermodaux et comment relier effi- Louis Grandjacquet, président de TGV voyageurs munis de valises, il faudrait cacement ces pôles intermodaux aux lieux Sud Territoires-Environnement z un bus de type aéroport ; le tracé du tramway est très tortueux et inadapté à une liaison rapide entre les deux gares ; La gare TGV de Nîmes-Manduel la signalétique de la gare Saint-Roch est confuse : pas facile de trouver la voie bile », la rupture de A quand on est au 1er étage… Encore charge allongeant le tra- 25 min d’attente du TGV une fois arrivé jet d’une demi-heure et sur le quai, 45 min d’attente du TER à renchérissant son coût. Valence TGV. Je suis arrivé à 0h30 chez Un BHNS est ouest moi, ayant encore attendu le tramway desservira Feuchères, pendant 25 min. alors que la gare TGV Enfin je n’ai pas compris pourquoi l’In- ne sera desservie par tercités Bordeaux-Marseille (mal rempli, aucune navette ferrée, mais à réservation obligatoire) dessert la mais seulement par une gare Sud de France au lieu d’emprunter avenue et des parkings. la ligne classique entre Montpellier et Le report de TGV sur Nîmes, où il pourrait marquer un arrêt et Manduel, à partir de attirer des voyageurs. La perte de temps 2020, est destiné à mul- subie par les voyageurs se rendant à tiplier les dessertes de Marseille ne serait pas catastrophique et Sud de France, néces- serait compensée par le gain de temps saires au financement de ceux qui descendent à Montpellier. de son PPP... Jean Sivardière z Le contournement ferroviaire de Nîmes- Espérer des gares exurbanisées qu’elles Montpellier (CNM) jouera pleinement son suscitent un développement du territoire « Explications » reçues de la SNCF rôle sous condition impérative qu’il reçoive n’est qu’une illusion. l’intégralité du fret et fluidifie la ligne clas- Evitons les gaspillages et consacrons « Le contournement Nîmes-Montpel- sique, aujourd’hui bloquée au moindre plutôt les moyens existants au maillage lier est la première LGV mixte. Il permet incident, au profit des trains du quotidien, efficace d’un réseau ferré dont la région d’une part de désaturer la ligne clas- seul trafic en croissance. Les TGV, au trafic Occitanie a le plus grand besoin et dont la sique, au bénéfice du trafic TER, d’autre stable, ne seront rentables pendant long- refonte du Cévenol Clermont-Nîmes est part d’offrir aux voyageurs un gain de temps que s’ils utilisent les gares centrales un des bons exemples. temps intéressant (près de 30 min entre (Feuchères à Nîmes, Saint-Roch à Mont- L’ASPIC, Association pour les Initia- la France et l’Espagne). pellier), non saturées, où la SNCF trouve tives Collectives de Nîmes Métropole, L’offre Intercités a été adaptée pour l’essentiel de ses clients, où l’intermodalité a déposé, comme FNE qui dénonce la permettre aux voyageurs de bénéficier prend tout son sens et où les accès ne sont construction de la gare en partie sur une de ce temps de parcours amélioré tout pas seulement automobiles. zone Natura 2000, un recours auprès du en desservant la nouvelle gare de Mont- Comme à Montpellier, où des TGV sont tribunal administratif de Nîmes contre le pellier Sud de France : 4 Intercités, sur reportés de Saint-Roch sur Sud de France, projet de gare de Nîmes-Manduel : au- les 12 circulant quotidiennement entre des TGV quitteront Feuchères uniquement dience le 12 février. Bordeaux et Marseille, s’y arrêtent ». pour rentabiliser une gare « tout automo- André Bruston, président de l’ASPIC z

FNAUT infos n°273 - avril 2019 x 9 Actualité 40 M€ pour rouler plus vite : Trains Intercités : une fois de plus, un usage inacceptable la Cour des comptes se trompe d’objectifs de l’argent public en Isère Le Département de l’Isère vient de lancer une concertation sur les aména- gements de sécurité envisagés sur la RD 1075 entre le Col du Fau et Lus-la- Croix-Haute, au sud de Grenoble.

Certains aménagements, comme la reprise de carrefours pour améliorer la visibilité ne sont pas contestables : coût (MD) raisonnable, effet direct sur la sécurité. Mais la sécurité routière a bon dos. Le La FNAUT a souvent critiqué les analyses de la Cour des comptes, qu’elles parti-pris systématique de favoriser la concernent le TER ou le TGV (FNAUT Infos 237) et ses positions qui, le plus souvent, vitesse est par contre inacceptable, car reprennent fidèlement celles de la SNCF. contre-productif : tout le monde sait - ou devrait savoir - que la vitesse est un Dans son rapport annuel 2019, la Cour des des retards (15 % des trains des trains Intercités facteur déclenchant ou aggravant de la comptes a demandé à l’Etat de se désengager sont concernés) ; mortalité routière. de la gestion des 8 lignes Intercités qu’il a prévu - les coûts de production de la SNCF sont Il est bien moins cher et souvent plus de conserver après 2020, dans le cadre d’une prohibitifs et continuent à augmenter bien plus payant en termes de sécurité de res- convention de service public fixant la consis- vite que l’inflation ; treindre la vitesse de façon calculée, tance de l’offre et le financement du déficit - ses méthodes d’exploitation sont gravement notamment à proximité de hameaux d’exploitation. déficientes (horaires inadaptés, fréquences trop ou d’intersections, comme le font les La Cour recommande un déconventionne- faibles sur Nantes-Lyon et Nantes-Bordeaux chicanes sur la RD 1091, autre axe « stra- ment, c’est-à-dire une exploitation purement par rapport aux recommandations de la com- tégique » et « touristique », entre Roche- commerciale, non subventionnée (comme les mission Duron, correspondances difficiles, taillée et Bourg d’Oisans. lignes TGV), des 3 lignes de jour dites struc- tarifs trop élevés) ; le trafic observé reste très Dans les aménagements proposés, les turantes Paris-Toulouse/Clermont, Bordeaux- inférieur au trafic potentiel. créneaux de dépassement se taillent la Marseille (qui assurent 75 % du trafic) et des part du lion : parmi toutes les opérations, 2 lignes de nuit Paris-Briançon, Paris-Rodez/ La politique malthusienne celles qui comportent des créneaux de Latour-de-Carol/Cerbère, et un transfert aux de SNCF Mobilités dépassement totalisent 41,6 Mc sur les Régions des autres lignes de jour Nantes- 57,9 Mc du projet. Les 11 créneaux de Lyon, Nantes-Bordeaux, Toulouse-Hendaye. La FNAUT constate que, lorsque la SNCF dépassement représentent l’essentiel exploite librement, en « open access » comme de cette somme et constituent un inves- Une segmentation dangereuse c’est le cas pour le TGV, elle recherche des éco- tissement disproportionné pour une nomies à court terme et supprime de manière route qui n’accueille que 5000 à 7000 Les voyageurs ont besoin d’un réseau maillé accélérée les services les moins fréquentés pour véhicules par jour en moyenne suivant et pérenne de lignes Intercités radiales et trans- concentrer son offre sur les lignes principales, les sections. Le gain de temps supposé versales, de jour et de nuit, complémentaires sans tenir compte des besoins des voyageurs et ne peut qu’induire un trafic et une pol- des lignes TGV et permettant des déplace- des territoires. lution supplémentaires, au détriment de ments moins coûteux, et non d’un ensemble A l’inverse de cette politique malthusienne la fluidité recherchée. très réduit de lignes indépendantes. L’Etat qui est à rejeter, l’expérience montre qu’on peut Pendant ce temps, la voie ferrée pa- doit donner une vision d’ensemble des services augmenter les fréquences sans augmenter le rallèle Grenoble-Veynes se dégrade nationaux, comme le prévoient les lois ferro- déficit, comme cela a été fait en 2018 sur Paris- au point que les ralentissements à 40 viaires de 2014 et 2017. Mulhouse grâce à la Région Grand Est. km/h se multiplient et que la menace Le développement des relations TGV d’une fermeture fin 2020 « pour raison n’invalide pas la pertinence des trains de nuit. L’aménagement du territoire de sécurité » se profile : les collectivités Le succès des trains de nuit exploités par les sans cesse oublié par la Cour territoriales (Départements, Régions chemins de fer autrichiens (et du train de Auvergne-Rhône-Alpes et PACA) et l’État nuit Paris-Toulouse-Cerbère, bien fréquenté) La loi a judicieusement confié à l’Etat la res- tergiversent pour financer les travaux prouve que ces trains peuvent être rentabilisés ponsabilité des liaisons Intercités : les Régions nécessaires au maintien de la ligne ! Or (FNAUT Infos 267). ne sont manifestement pas l’échelon pertinent les 40 Mc envisagés pour les créneaux de pour aménager le territoire national. dépassement sur la RD 1075 constituent Une analyse purement financière L’Etat doit donc impérativement conserver une part importante de la somme à réu- la maîtrise des trains Intercités pour assurer nir pour sauver la ligne. La Cour des comptes présente une analyse une équité entre les Régions, et développer Le Département doit maintenant pri- purement financière des services Intercités, leur exploitation dans le cadre de délégations vilégier, avec ses partenaires, le retour sans prendre en compte les attentes du public. de service public mixant des services rentables aux vitesses d’origine. Cette ligne ré- Elle reconnaît les efforts d’investissement de et non rentables. pond aux objectifs mentionnés à pro- l’Etat (voies, matériel roulant) mais admet En conclusion, la FNAUT demande que pos de la RD 1075, elle a un vrai poten- comme une fatalité la faiblesse des moyens que le gouvernement, qui a opportunément rejeté tiel inexploité, qui surpasse nettement l’Etat consacre aux Intercités et évacue les res- les recommandations de la Cour concernant la route en matière de sécurité, surtout ponsabilités de la SNCF : les trains Intercités, fasse de l’aménagement en période hivernale. - les infrastructures sont encore dans un état du territoire une véritable priorité, accélère la Le slogan « l’Isère se mobilise face à l’ur- médiocre, et même très mauvais dans le cas rénovation du réseau classique et développe gence climatique » (Isère Magazine) doit de la ligne Nantes-Bordeaux, ce qui explique l’exploitation des trains Intercités en déléga- être suivi d’effets. en partie la lenteur des trains et l’importance tion de service public. d’après un article de l’ADTC-Grenoble z

10 x FNAUT infos n°273 - avril 2019 Actualité

Chronique du Lyon-Turin : une situation rocambolesque Ligne ferroviaire transalpine (MD)

Une analyse sans intérêt Confusion ration Nationale des Transporteurs Routiers de fret (FNTR), qui redoute la réalisation L’analyse coûts-bénéfices, commandée Selon Etienne Blanc, vice-président du du Lyon-Turin, ont appelé ensemble le gou- par Danilo Toninelli, ministre italien des Conseil régional AURA, Bruxelles pourrait vernement à mettre en place une offre de Transports et membre du M5* hostile au financer les voies d’accès au tunnel inter- transport combiné, alternative à l’autoroute projet, a conclu sans surprise à un « défi- national à 40 % (comme le tunnel), voire ferroviaire pour les camions qui transitent à cit abyssal » : nommée par le ministre, la même 50 %. L’information étant dans l’air travers les Alpes. commission était composée pour l’essen- mais non confirmée, le ministère français Ignorant tout des réalités ferroviaires, tiel d’opposants au Lyon-Turin, le seul des Transports l’a démentie et a dénoncé la l’ONG et les transporteurs routiers de fret membre indépendant a refusé de signer « confusion » introduite par la Région. assurent qu’il suffit de mieux utiliser la ligne le rapport. classique existante de Modane, compétitive Selon l’étude, pour que le projet Lyon- Pantomimes par rapport à la route. C’est oublier que cette Turin soit rentable, le trafic voyageurs de- ligne classique est une ligne de montagne vrait être multiplié par 25, avec 4,6 millions Sergio Champarino, président de la dont les coûts d’exploitation sont prohibi- de voyageurs en 2059. Les 2,7 millions de Région Piémont, a demandé au gouverne- tifs, et que sa capacité limitée ne permettra tonnes de fret devraient passer à 51,8 mil- ment italien de prendre une décision ra- jamais de transférer un million de camions lions, une croissance jugée irréaliste. pide sur l’avenir du Lyon-Turin et « d’ar- par an sur le rail (FNAUT Infos 271). Son coût serait finalement supérieur de rêter la pantomime ». 7 Mdc à ses bénéfices d’ici à 2059 (8 Mdc La Chambre des députés italiens a adopté, N’importe quoi... pour terminer la liaison, à peine 1 Mdc de par 261 voix contre 136, une motion com- bénéfices) et la commission recommande mune des groupes de la Ligue du nord, Pour le ministre Danilo Toninelli, « le de l’abandonner : plus le tunnel serait favorable au Lyon-Turin, et du mouvement Lyon-Turin n’est qu’un trou inutile dans une utilisé, moins il serait rentable, car l’Etat 5 Etoiles, hostile au projet, qui demande « un montagne ». Et il ajoute sans rire : « l’analyse italien perdrait des recettes (3 Mdc de réexamen complet du projet ». Il pourrait coûts-bénéfices (dans sa version initiale) est péages autoroutiers et 1,6 Mdc de taxes s’agir d’un vote symbolique destiné à rappro- un élément précieux d’information ». sur les carburants routiers). Cette perte de cher les deux partenaires du gouvernement Quant à Manilo di Stefano, secrétaire recettes étant assimilée à un coût public avant les prochaines élections européennes. d’Etat membre du M5*, il estime que « les alors que la pollution et les émissions de Pendant ce temps, TELT, le maître d’ou- Italiens n’ont pas besoin d’envoyer de la CO2 diminueraient, ce raisonnement vrage franco-italien du projet, rappelle que, mozzarella en France en gagnant 20 min d’une rare absurdité condamne tout inves- si on bloque les appels d’offres préparés pour mais d’avoir le TGV en Sicile ». tissement écologique ! la poursuite du tunnel de base (2,3 Mdc) et C’est comme si la rentabilité d’un inves- déjà gelés depuis 6 mois, Bruxelles affectera Unité européenne tissement sur le réseau ferré était calculée à d’autres chantiers européens sa contribu- en tenant compte des pertes de recettes de tion prévue de 300 Mc. Lors du deuxième forum économique l’Etat sur la TICPE suite au report d’une France-Italie organisé à Versailles, le ME- part du trafic routier sur le rail. Le rapport Les élus français interviennent DEF et son homologue italien la Confin- n’en a pas moins été approuvé par les envi- dustria ont insisté sur la nécessité de jouer ronnementalistes italiens et français... Selon Michel Bouvard, vice-président du la carte de l’unité européenne dans le dé- Comme le dit La Transalpine, « moins Conseil départemental de Savoie, si la ligne bat sur le Lyon-Turin (la France et l’Italie il y aura de camions et de voitures dans nouvelle d’accès au tunnel de base depuis échangent plus de 80 Mdc de biens et de les Alpes, plus le déficit du Lyon-Turin Lyon n’était pas financée par la France, l’Ita- services par an) : « les querelles d’ego entre augmentera : le raisonnement vaut son lie pourrait exiger de la France une partici- politiques ne nous intéressent pas, nous de- pesant de CO2 ». pation plus élevée que prévu au financement vons nous unir pour rivaliser avec nos vrais du tunnel (elle avait accepté de le financer concurrents, qui ne sont pas en Europe Coup de théâtre ! plus que la France, les accès étant bien plus mais en Chine et aux USA ». longs côté français que côté italien). Selon le président du MEDEF, mieux ins- Qualifiée « d’arnaque » par plusieurs uni- Gérard Collomb, maire de Lyon, et piré que lorsqu’il critique le versement trans- versitaires italiens, l’étude souffrait à l’évi- Beppe Sala, maire de Milan, se sont ren- port des entreprises indispensable au fonc- dence de graves défauts méthodologiques : contrés. Ils ont souligné tous deux qu’« il tionement des transports urbains : « grâce la commission n’a eu aucune vision inter- s’agit de l’avenir économique et culturel au tunnel sous la Manche, les échanges nationale ; les bénéfices économiques de la de l’Europe » et ont rappelé la dimension économiques et culturels entre la France liaison ont été ignorés, et les bénéfices envi- écologique du projet. et la Grande-Bretagne ont été démulti- ronnementaux fortement minimisés. Les élus de Chambéry, favorables au pliés, 25% des marchandises importées de Finalement, 15 jours après sa remise, Lyon-Turin, ont demandé à l’Etat, qui ne Grande-Bretagne passent par le tunnel. Si le gouvernement italien a demandé à la veut pas financer la ligne nouvelle d’accès les préoccupations concernent les dépenses commission de revoir son travail et - mi- depuis Lyon au tunnel transfrontalier, de publiques, je pense que nous devrions éco- racle - le déficit « abyssal » de 7 Mdc a relancer le contournement autoroutier de nomiser sur les coûts de fonctionnement des été ramené à 2,5 Mdc, toujours princi- Chambéry, un vieux projet concurrent du Etats, mais pas sur l’investissement dans les palement en raison du manque à gagner Lyon-Turin... infrastructures qui sont indispensables ». de l’Etat italien sur les taxes de carburant Une telle distinction de bon sens entre et les péages autoroutiers. Et la commis- Une alliance contre nature la dette saine, contractée pour financer des sion a admis que l’abandon de la liaison investissements utiles, et la dette malsaine coûterait 4 Mdc à l’Italie, si bien que le Les Amis de la Terre, une ONG soi-di- servant à financer de déficits de fonction- bilan financier de la poursuite du projet est sant écologiste mais opposée au Lyon-Turin nement, était déjà énoncée dans le rapport devenu positif !!! et à toute taxation des camions, et la Fédé- Pébereau de 2005 sur la dette publique.

FNAUT infos n°273 - avril 2019 x 11 Actualité Brèves Sécurité routière Incompréhensible La Loi d’Orientation des Mobilités liste les projets d’infrastructures retenus par (pixabay) l’Etat. France Nature Environnement (FNE) considère certains d’entre eux comme Pourquoi il faut maintenir La sécurité routière, de « grands projets inutiles » : mais peut- la vitesse limite de 80 km/h une science exacte on mettre dans le même sac le Lyon-Tu- rin qui pourrait absorber un million de Une expérimentation du 80 km/h sur les Nous reproduisons ci-dessous un article camions par an, et le GCO de Strasbourg routes secondaires est en cours depuis juil- remarquable de l’éditorialiste Jean-Francis (FNAUT Infos 271) ? let 2018. Elle doit être poursuivie afin que Pécresse paru dans Les Echos. des conclusions incontestables puissent en « Le Premier ministre n’a pas tort de faire Actes du 21e congrès de la FNAUT être tirées. remarquer que ce seraient probablement L’adoption courageuse du 80 km/h a déjà 200 morts qui auraient été évités si la moitié Le document peut être demandé au siège contribué à sauver 116 vies humaines sur les des radars n’avaient pas été dégradés par la de la FNAUT (chèque de 5 euros, port com- routes concernées (la mortalité sur les autres faute de criminels en puissance. Les études pris, à l’ordre de la FNAUT). routes a au contraire un peu augmenté) et à préalables à la décision d’abaisser la limitation éviter de nombreuses blessures graves. Les de vitesse tablaient sur 300 à 400 vies sauvées Dernière minute : enfin prévisions des experts du Conseil National de par an. Et, n’en déplaise aux propagateurs de des initiatives sérieuses la Sécurité Routière sont confortées. théories fumeuses, c’est ce qui se produit. Car La destruction criminelle de 60 % des ra- la sécurité routière est, hélas ou heureusement, l Le gouvernement étudie la possibi- dars automatiques provoque une hausse de la une science assez exacte, une science qui lité de limiter la vitesse automobile en vitesse moyenne et pourrait fausser les résul- contredit l’intuition et l’expérience. marche arrière à 80 km/h. tats de l’expérimentation : sans elle, 60 vies Jusqu’au sommet de l’Etat, certains - Em- l Afin d’améliorer la sécurité routière, la supplémentaires auraient pu être épargnées manuel Macron lui-même, dit-on - trouve- chasse sera prochainement interdite sur fin 2018 selon l’ONISR. raient judicieux de laisser aux départements le l’ensemble du territoire à moins de 500 m Or, lors d’un débat récent avec 600 maires, pouvoir de remonter la limitation à 90 km/h des routes carrossables du 23 septembre Emmanuel Macron a laissé entendre que la sur ces 10 % de routes où chacun pense qu’il au 28 février : récemment, un chasseur, décision du Premier ministre pourrait être peut rouler vite. Eh bien, justement, c’est sur croyant voir un dangereux sanglier, a tiré revue sur les routes les mieux aménagées, en ces routes, où l’on se sent en sécurité, que se sur une voiture dans laquelle se trouvaient l’adaptant « aux réalités des territoires ». produisent 36 % des accidents mortels. Mieux une famille avec trois jeunes enfants. Le chef de l’Etat a ainsi contredit Em- vaut se fier à la réalité qu’à son imaginaire. l Suite à la suppression des contrôleurs, manuel Barbe, délégué interministériel à la C’est toute la difficulté du discours sur la né- la SNCF va embaucher d’anciennes hô- sécurité routière, et tous les experts qui ont cessité de renforcer la sécurité collective sur les tesses de l’air pour accueillir les voyageurs démontré sur des bases scientifiques l’intérêt routes, au détriment de la liberté individuelle. du TGV. Elle espère ainsi mieux attirer la du 80 km/h. Notre expérience n’est pas la réalité. La plu- clientèle aérienne. Une « application différenciée » de la part d’entre nous conduisent prudemment, l Elle va par ailleurs rebaptiser les vitesse maximale serait une grave erreur : et pensent que la vitesse n’est pas « le » pro- grandes gares parisiennes : la en Angleterre, les routes sont étroites et blème principal, que « le » problème est dans deviendra la gare Jacques Brel, suivant la sinueuses, et la sécurité est nettement l’alcoolémie ou l’inattention. Mais les chiffres remarquable suggestion de Christophe Gi- meilleure qu’en France ; selon Emmanuel montrent que, hors agglomération, la vitesse rard, adjoint de la maire de Paris chargé de Barbe, « c’est sur les plus belles routes qu’on est bien le facteur principal de plus d’un acci- la culture ; la gare de l’Est s’appellera gare se tue le plus ». Une étude menée en 2018 dent sur trois ». Maréchal Joffre ; la gare de Lyon, gare Mé- par l’Observatoire de la sécurité routière l’a diterranée-Charles Trénet ; la gare de Bercy, confirmé : dans le Massif central, 63 % des Un député irresponsable gare Henri Vincenot ; la gare d’Austerlitz, tués sont relevés sur 9 % des routes. gare des volcans éteints ; la gare Montpar- Ramener la vitesse maximale autorisée à 90 Le député LR de l’Oise Olivier Dassault nasse, gare Jacques Tati ou Nicolas Hulot ; la km/h au cas par cas serait désastreux : 55 % des a déposé une proposition de loi, cosignée par gare Saint-Lazare, gare Guy de Maupassant accidents mortels se produisent sur les routes 16 de ses collègues, visant à expérimenter la ou Eugène Boudin. secondaires, et 36 % sur les routes secondaires vitesse de 150 km/h sur les tronçons d’auto- l Enfin la SNCF va vendre plusieurs petites rectilignes, les plus fréquentées. Or c’est évi- routes d’au moins 3 voies, et à annuler le lignes afin de dégager les capitaux qui lui demment sur ces dernières que la vitesse limite retrait de points de permis en cas de dépasse- permettront d’acheter, sans augmenter son serait évidemment relevée en priorité. ment inférieur à 20 km/h sur les autres. endettement, une centaine de rames TGV Confier aux élus départementaux la res- Il ose affirmer : « un assouplissement des li- nouvelle génération à hydrogène décarboné. ponsabilité des limitations de vitesse n’est mitations aurait pour effet de diminuer l’acci- pas acceptable : la sécurité routière exige une dentalité ; à 150 km/h, on est plus vigilant, les FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information Directeur de publication : Jean Sivardière expertise qu’ils ne possèdent pas. L’arbitrage risques de somnolence s’amenuisent ». Selon Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT d’experts nationaux est indispensable. cet inconditionnel de la voiture, hostile aux CPPAP n° 0920 G 88319 - Dépôt légal n°273 ISSN 0983-172 X - Tirage : 1200 ex. Le réseau principal concentre l’essen- hausses des taxes et au 80 km/h, « les automo- Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative tiel du trafic et l’impression de sécurité bilistes sont écœurés de cette chasse constante Av de la Plage - 86240 Ligugé incite les automobilistes à rouler vite. Le à la contravention, de cette manière d’être pris Abonnement 10 numéros : Individuels : 19 b 80 km/h doit donc être imposé sur l’en- pour des tiroirs-caisses, de cette réglementa- Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b Prix au numéro : 2 b semble du réseau secondaire : seules les tion moralisatrice qui les déresponsabilise ». Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT mesures uniformes sont lisibles. Quand, en 1974, la vitesse sur autoroute a de votre région, contacter notre permanence : Quant aux « pertes de temps », elles sont été relevée de 120 à 130 km/h sur les auto- 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06­ marginales : quelques minutes à peine sur les routes à la demande du président Pompidou, e-mail : [email protected] trajets de proximité. l’accidentalité s’est immédiatement aggravée. Internet : https://www.fnaut.fr

12 x FNAUT infos n°273 - avril 2019 infos 274 mai 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Un service essentiel La contribution de la FNAUT Le transport public conventionné de proximité - urbain, routier et ferroviaire - est un service de première nécessité. au Grand Débat National En France, trois taux principaux de TVA sont applicables à l’achat de biens et de services : 5,5 %, 10 %, et 20 %. Le taux de 5,5 % s’ap- plique en principe aux produits de première nécessité (alimentation, gaz, électricité). Mais le transport public est taxé à 10 %. Pourquoi le taux réduit de 5,5 % ne lui est-il pas appli- Gare de Mézidon-CanonGare (Marc Debrincat) en Normandie qué alors qu’il l’est aux économies d’énergie (isolation thermique) et aux spectacles ? Une baisse du taux de TVA permettrait aux autorités organisatrices de dégager des ressources pour développer l’offre de trans- port public en maintenant le tarif actuel pour la majorité des usagers. Son coût pour l’État Lors d’une conférence de presse donnée le 8 mars 2019, la FNAUT a pré- serait supportable : environ 300 Mc/an. Elle encouragerait l’utilisation des trans- senté sa contribution au Grand Débat National sur les questions liées à la ports publics de la vie quotidienne et ré- mobilité. Tout en reconnaissant les bonnes intentions officielles concernant pondrait aux demandes des victimes de la l’environnement et les avancées du « Pacte ferroviaire », elle s’est inquiétée dépendance automobile. de l’ampleur des investissements routiers décidés par le gouvernement et, Par ailleurs, les transports publics sont jugés plus généralement, du renforcement dangereux de la dépendance automo- trop coûteux par les usagers captifs (en par- bile. Le projet de Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), en cours de discus- ticulier pour les déplacements occasionnels sion au Parlement, n’apporte pas de correctif à l’inéquité des conditions de par TER). Une baisse du taux de TVA donnerait concurrence entre les différents modes de transport, à l’insuffisance des in- aussi aux autorités organisatrices des moyens vestissements dans les transports urbains et ferroviaires, et à la dégradation supplémentaires pour généraliser la tarification inacceptable des services ferroviaires. solidaire (et l’homogénéiser entre collectivités locales et Régions), et améliorer ainsi le pouvoir d’achat des ménages les plus démunis. Saupoudrages Le taux de TVA sur le transport public varie de 3 % à moins de 10 % dans dix pays Ancien ministre des Transports et an- Que ce saupoudrage soit coûteux et inef- européens : Allemagne, Belgique, Pays-Bas, Po- cien maire de Dunkerque, où il a laissé les ficace, que les projets recommandés ne logne, Portugal, Suède… Il est même de 0 % transports collectifs dans un état lamen- relèvent d’aucune vision écologique cohé- au Danemark, en Irlande et au Royaume-Uni. table, Michel Delebarre a été chargé par rente, peu importe : l’important est de ne Une diminution du taux de TVA sur les pro- le gouvernement Valls d’une mission de pas choisir, de ne fâcher personne. duits de première nécessité a été envisagée réflexion sur le « désenclavement » du On retrouve la même philosophie dans le récemment par plusieurs membres du gou- Limousin suite à l’abandon du projet de rapport commandé par l’actuel gouverne- vernement : la FNAUT demande que cette LGV Poitiers-Limoges. ment à Francis Rol-Tanguy, ancien directeur possibilité s’applique en priorité au transport Son rapport a proposé une modernisation de cabinet de Jean-Claude Gayssot, suite à public pour limiter la dépendance automo- ambitieuse de la ligne classique Poitiers-Li- l’abandon de l’aéroport de Notre-Dame-des- bile et faciliter les déplacements de tous. moges pour y faire circuler des TER et des Landes. Objectif : définir « un projet straté- Bruno Gazeau, président de la FNAUT z TGV Paris-Poitiers, celle de la ligne classique gique pour les mobilités du Grand Ouest ». Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT) et Encore une accumulation de projets contra- Sommaire la renaissance du TGV Brive-Lille « pour ou- dictoires : créer une 3ème ligne Massy-Valen- vrir une porte sur l’Europe du nord ». Mais le ton et une gare TGV à Orly, moderniser la gare Les contributions de la FNAUT rapport avance aussi des propositions concur- d’Angers et la signalisation sur Redon-Savenay, au Grand Débat National 2-5 rentes du rail : le renforcement des liaisons mais aussi rendre plus attractifs les aéroports et autres innovations 6 aériennes (très déficitaires) Paris-Limoges et de Rennes et de Bretagne, passer la RN 162 Forum 7 Paris-Brive, et l’accélération de la moderni- Angers-Mayenne à 2x2 voies, aménager le Tarif des billets à bord des trains 8 sation de la RN 147 Poitiers-Limoges « en boulevard périphérique de Nantes. Surtout ne Droit du transport ferroviaire 9 complément de l’optimisation de la desserte pas choisir : des projets routiers inutiles pour Expertise sur les cars Macron 10 ferrée » et « dans l’attente de la mise en œuvre demain, et des projets ferrés pour plus tard. La chronique du Lyon-Turin 11 des investissements ferrés ». Jean Sivardière z

FNAUT infos n°274 - mai 2019 x 1 Dossier

Un renforcement dangereux de la dépendance automobile (pixabay)

En 2017, dans la continuité des orientations de la France décidées lors de la COP 21, La dépendance automobile Emmanuel Macron avait pris des engagements précis concernant la réduction des émis- sions de gaz à effet de serre du secteur des transports : un alignement du prix du carburant Paradoxalement, alors que le mouvement diesel sur celui de l’essence ; une réorientation de l’investissement vers les transports de des gilets jaunes a été déclenché par la la vie quotidienne ; enfin une perspective d’évolution de la taxe carbone sur la durée du dépendance automobile, cette dépendance quinquennat permettant de financer l’ensemble des infrastructures nécessaires. a été accentuée par les réponses apportées à ce mouvement par le gouvernement et Tout en déplorant un manque d’ambition Au total, malgré la volonté d’organiser par la fermeture progressive des petites en matière d’investissement hors région sa gouvernance sur tous les territoires, on lignes ferroviaires, qui provoque le retour parisienne, la FNAUT avait approuvé ces constate un recul important dans la ges- d’environ 40 % des voyageurs à la voiture nouvelles orientations. tion collective de la mobilité, construite (FNAUT Infos 271). Où en est-on deux ans plus tard ? La pas à pas depuis la LOTI de 1982, qui Pourtant cette dépendance n’est pas une FNAUT a fait le point lors de sa confé- laisse le transport urbain et ferroviaire, fatalité : contrairement à une idée très ré- rence de presse du 8 mars dernier. métropolitain et régional, sans perspec- pandue (FNE, Shift project, la Fabrique tives et sous la menace d’une récession écologique, la ministre des Transports), il Les assises de la mobilité faute de financements : le report modal serait tout à fait possible de mettre en place, est oublié. On attend encore le 4e appel à un coût acceptable par la collectivité, des Lors de ces assises, organisées au der- à projets de TCSP et de RER métropo- transports publics efficaces, y compris dans nier trimestre 2017, les thèmes relatifs à litains (à l’image des réseaux allemands les zones périurbaines et rurales comme la mobilité ont été segmentés par modes de S-Bahn, FNAUT Infos 262) pour les nous l’avons montré à partir d’exemples ob- (FNAUT Infos 262) : ce saucissonnage villes de province. Bien d’autres décisions servés en Allemagne, en Suisse, en Italie du n’a pas permis de déboucher sur une vision (à l’exception du plan vélo) ont favorisé nord et en Autriche (FNAUT Infos 270). politique d’ensemble. Les assises n’ont per- les modes de transport les plus agressifs Cette dépendance est dangereuse, elle fra- mis de clarifier ni les normes de pollution pour l’environnement : gilise notre système de mobilité. Les automo- routière, ni les responsabilités des construc- - renforcement des crédits routiers ; bilistes ont reçu de l’Etat un message trom- teurs automobiles. Elles se sont focalisées - abandon de la redevance poids lourds, peur. Si le prix du pétrole repart à la hausse, ce sur les « nouvelles mobilités » et les nou- même sous la forme édulcorée d’une vi- que beaucoup d’experts estiment inéluctable velles technologies, elles ont privilégié les gnette forfaitaire ; en raison de l’épuisement progressif des gise- encouragements à la voiture dite propre - désenclavement des villes moyennes en ments accessibles à un coût modéré, les auto- plutôt qu’à la mobilité propre. commençant par l’avion et la route ; aides mobilistes seront doublement piégés : l’Etat Les crédits nécessaires pour favoriser un financières aux aéroports ; refus catégorique ne pourra, sauf à se ruiner, abaisser les taxes report des trafics sur les modes respectueux de toute taxation du kérosène. sur les carburants ; et aucune alternative à la de l’environnement ont été manifestement voiture n’aura été mise en place. sous-estimés. Une évolution climatique inquiétante La fiscalité écologique Les concessions aux gilets jaunes Pendant ce temps, le danger du réchauf- Bien que l’opinion y soit défavorable, Fin 2018, le gouvernement a cédé aux fement climatique se précise et n’atteint à l’exception des ONG environnemen- pressions des gilets jaunes sur de nom- pas que les îles lointaines du Pacifique : la talistes, la FNAUT continue donc à dé- breux aspects de la politique des transports, France est impliquée. fendre la fiscalité écologique, à la fois pour et pris une série de décisions très favo- Selon le ministère de la Transition éco- donner un bon signal aux usagers de la rables à l’usage de la voiture, en particu- logique et solidaire, la hausse du niveau route et les inciter à modifier leurs com- lier pour les déplacements domicile-travail de la mer pourrait atteindre 1 mètre d’ici portements, et pour financer les investis- (FNAUT Infos 270) : 2100 : la moitié de la Camargue serait sements de transport collectif, l’extension - annulation de la hausse prévue des taxes alors submergée ; 19 800 km de routes et des aménagements cyclables et la réduc- sur les carburants automobiles (au moment 2 000 km de voies ferrées seraient réguliè- tion de 10 % à 5,5 % du taux de la TVA même où le prix du pétrole brut baissait rement inondés. sur les transports collectifs. fortement...) ; Le littoral aquitain serait concerné lui aus- Contrairement aux idées reçues, ce sont - report de la réforme du contrôle tech- si : une étude récente conclut à « un retrait les fluctuations du prix du pétrole et non les nique des voitures ; de la côte de 2,5 mètres par an, alors qu’en taxes qui sont la cause majeure (à 75 %) des - renforcement des avantages du barème 2011, on évoquait de 1 à 3 mètres. Soit une variations récentes du prix des carburants fiscal kilométrique ; érosion de 20 et 50 mètres respectivement automobiles (FNAUT Infos 270). Et leur - retrait de l’article du projet de LOM aux horizons 2025 et 2050, sans même évo- prix réel est aujourd’hui moins élevé qu’en relatif au péage urbain, un outil pourtant quer de nouvelles tempêtes dévastatrices ». 1970 : si l’on tient compte de la diminution essentiel de maîtrise de la circulation auto- Malgré ces perspectives inquiétantes, les de la consommation des véhicules et sur- mobile urbaine (voir page 5). émissions françaises de gaz à effet de serre tout des réévaluations du SMIC, la même Les efforts récents pour contenir la augmentent régulièrement. durée de travail permet aujourd’hui de par- hausse des péages autoroutiers – un si- En Allemagne, le fret ferroviaire repré- courir une distance accrue de 57 % en diesel gnal fort donné aux automobilistes, dans sente plus de 23 % des transports de mar- et de 171 % avec de l’essence. la continuité des orientations des gouver- chandises, en Finlande, c’est plus de 27 %, L’enjeu fondamental n’est donc pas nements précédents – confirment la prio- 38 % en Suède, 40 % en Suisse, 42 % en la hausse des taxes sur les carburants, rité donnée à la voiture au détriment des Autriche et même jusqu’à 60 % en Letto- mais bien le prix du pétrole, et par suite transports publics. nie. En France, 10 % seulement... la dépendance automobile.

2 x FNAUT infos n°274 - mai 2019 Dossier Les inéquités des conditions de la concurrence intermodale Dégradation des services ferroviaires :

Les expertises réalisées récemment l’Etat doit prendre ses responsabilités à la demande de la FNAUT (Bruno Cor- dier, Jacques Pavaux) confirment l’exis- La FNAUT s’est insurgée récemment contre la stratégie de la SNCF (voir l’édito de tence de telles inéquités. FNAUT Infos 273). Lors de son assemblée générale du 6 avril 2019, elle a approfon- di son analyse des responsabilités du gouvernement dans les menaces graves qui SNCF Mobilités doit verser des péages pèsent sur l’avenir du secteur ferroviaire en France. à SNCF Réseau pour pouvoir faire circu- ler ses trains de voyageurs et de fret. Mais Une dégradation qui s’accentue Selon tous les experts, le déficit de financement ni les transporteurs routiers de fret, ni les est d’un milliard d’euros par an. autocaristes exploitant les cars Macron La politique commerciale de SNCF Mobi- Quant aux grands projets ferroviaires (LGV (FNAUT Infos 272), ni même les automo- lités est catastrophique : pour les voyageurs, CFAL et accès au tunnel bilistes ne doivent payer la maintenance - économies à court terme par suppression de base de la liaison Lyon-Turin pour le fret), des routes non concédées. Les automo- d’arrêts ou de points de vente avant mise en ils ne sont toujours pas programmés : ils ont été bilistes bénéficient de pénétrantes et de place de solutions alternatives ; il est de plus renforcés par le Sénat (page 4), mais ce sont les rocades urbaines gratuites. La sécurité en plus difficile de se procurer un billet de députés qui auront le dernier mot. routière est financée par l’Etat, la sécurité train (page 8) ; ferroviaire par la SNCF. - réduction de l’offre sur les LGV comme 2 - Une fiscalité spécifique anormale La dépense publique pour les cars Ma- sur les « petites » lignes ; les trains de nuit et Le gouvernement dit vouloir favoriser le cron ayant été d’environ 24 Mc en 2016 les services auto/train ont quasiment disparu transport public, mais pourquoi la TVA qui pour un trafic de 6,2 M de voyageurs et ce sont maintenant des services TER, Inter- lui est appliquée est-elle au taux de 10 % et (FNAUT Infos 272), la dépense moyenne cités et TGV qui sont supprimés autoritaire- non 5,5 %, comme c’est le cas pour d’autres par voyageur était d’environ 3,9 c (le ment par SNCF Mobilités ou transférés sur produits et services de première nécessité prix moyen du billet était de 13,5 c), route, sous prétexte de rentabilité insuffisante (page 1) ? alors que le bilan environnemental de (FNAUT Infos 272) ; ces services librement organisés (SLO) - tarifs compliqués et excessifs. 3 - Les conditions de concurrence entre est négatif car ils concurrencent le train Pourquoi les modifications horaires envi- modes de transport (voir encadré) plus que la voiture. sagées ne sont-elles pas rendues publiques Les conditions de concurrence entre le rail et Les transactions effectuées sur le site de deux ans à l’avance, comme c’est le cas dans les autres modes de transport sont inéquitables, covoiturage Blablacar ne sont pas taxées d’autres pays ? elles pénalisent le rail et entravent son déve- alors qu’il s’agit de transactions com- Cette politique dégrade profondément le loppement : par suite, le trafic observé actuelle- merciales. Plus généralement (FNAUT In- service public ferroviaire, accentue la dépen- ment est très inférieur au trafic potentiel. fos 261), le covoiturage longue distance dance automobile et compromet l’avenir du L’Etat subventionne, directement ou indi- a bénéficié d’environ 49 Mc de dépenses rail, ossature naturelle du système de transport rectement, les modes les plus nocifs pour l’en- publiques en 2015 pour 14 M de passa- à moyenne et longue distance. vironnement - route et avion - et pénalise les gers, soit une dépense de 3,5 c par pas- Les erreurs stratégiques de SNCF Mobilités modes les plus vertueux. sager, alors que ce type de covoiturage ne doivent cependant pas occulter les respon- présente un bilan environnemental néga- sabilités de l’Etat. 4 - Le silence du gouvernement tif (le covoiturage local a bénéficié d’une Face à la dégradation de la commerciali- dépense publique de 154 Mc, mais son Le pacte ferroviaire sation des services ferroviaires, à la régres- bilan environnemental est positif). sion de l’offre et à la politique malthusienne De même (FNAUT Infos 273), le trans- La FNAUT ne critique pas systématique- de SNCF Mobilités, le gouvernement ne port aérien intérieur bénéficie d’aides ment la politique ferroviaire du gouverne- réagit pas. publiques annuelles d’environ 600 Mc ment. Elle a ainsi approuvé la loi du 27 juin Pourquoi laisse-t-il SNCF Mobilités, (aides aux très nombreux aéroports 2018 dite « pacte ferroviaire », qui a été l’occa- véritable Etat dans l’Etat, mettre en œuvre déficitaires et aides directes aux compa- sion d’avancées incontestables, en particulier une stratégie suicidaire, contraire aux inté- gnies aériennes, dont la non-taxation du (FNAUT Infos 266) : rêts des voyageurs et aux objectifs officiels - kérosène). Le trafic intérieur ayant été de - la réforme de la structuration interne de la développement du trafic ferroviaire et amé- 25,6M de passagers en 2017 (FNAUT In- SNCF ; nagement rationnel du territoire - au lieu fos 266), ces aides représentent une - la reprise partielle de la dette par l’Etat à d’exiger que l’entreprise réduise en priorité subvention moyenne d’environ 23 c par partir de 2020 (35 Mdc sur 50) ; ses coûts de production ? passager (sur les grandes lignes radiales, - l’introduction prochaine de la concurrence Pourquoi les lois ferroviaires de 2014 et 2018 cette subvention n’est due qu’à la non régulée dans le secteur ferroviaire, c’est-à-dire ne sont-elles pas respectées ? taxation du kérosène, elle n’est que de la possibilité d’exploiter les services TER et Pourquoi l’État ne respecte-t-il pas ses enga- 12 c environ). TET en délégation de service public. gements en matière de desserte des territoires Pour chaque mode, la transparence par les TGV, en particulier sur l’axe Grand sur les subventions et les défiscalisa- Les responsabilités de l’Etat Est-Méditerranée ? tions dont ils bénéficient doit être faite Pourquoi le schéma national des services en procédant à une analyse compara- Les critiques émises par la FNAUT portent ferroviaires, annoncé depuis 4 ans, n’a-t-il tou- tive dont les résultats doivent être ren- principalement sur 4 points. jours pas été élaboré et soumis au Parlement ? dus publics. Il est urgent que le gouvernement renforce le Il n’est pas acceptable que seules les 1 - Le sous-investissement dans les infras- financement des infrastructures ferroviaires, cor- subventions accordées aux transports tructures ferroviaires rige les conditions de concurrence entre modes publics soient parfaitement documen- Les financements prévus pour moderniser de transport, et impose à SNCF Mobilités un tées, alors que d’importantes aides le réseau ferré classique ne sont pas à la hau- changement drastique de stratégie, conforme fiscales sous forme de dégrèvement teur des enjeux : ce réseau continue à vieilllir, aux besoins des voyageurs et des territoires : c’est de taxes ou de subventions sont accor- les ralentissements (sur plus de 5 000 km de l’avenir du transport ferroviaire qui est en jeu. dées aux modes concurrents. lignes) et fermetures de lignes se multiplient. Jean Lenoir z

FNAUT infos n°274 - mai 2019 x 3 Dossier Climat et action publique La LOM , du Sénat Face aux dangers du réchauffe- à l’Assemblée Nationale ment climatique, on peut s’interro- ger sur la stratégie de l’Etat. (Wikipedia) (pixabay) Le jargon franglais pédant des hauts Un pas en avant au Sénat communs aux métropoles et aux Régions fonctionnaires et des « experts » (il (étoiles ferroviaires, métros, tramways, n’est question que d’écosystèmes de Le Sénat a rétabli les contrats opération- BHNS) ; mobilité connectée, de French mobi- nels de mobilité qui permettent de mieux - pour couvrir le Mdc qui manque au lity, de Mobility as a Service et de Zero coordonner les politiques des Autorités Or- contrat de SNCF Réseau ; emission), une accumulation d’ins- ganisatrices de Mobilité (AOM) et les ser- - pour exiger que les deux Assemblées tances aux sigles énigmatiques et des vices de mobilité. Ceci répond à la demande votent le schéma des lignes d’aménagement procédures compliquées masquent de la FNAUT de coordination entre les du territoire (Intercités et TGV sans corres- mal le flou des objectifs poursuivis et Régions, entre l’État - Autorité Organisa- pondances) ; l’absence de décisions efficaces. trice et les AOM régionales. Ceci doit per- - pour encadrer davantage le free floa- Fin 2018, le ministère de la Transi- mettre aussi la coordination des modes sous ting en maintenant la compétence au ni- tion écologique et solidaire (MTES) et l’autorité de la Région, et en particulier des veau de l’AO et non de la commune et en l’Observatoire national sur les effets nouvelles mobilités. introduisant une contrainte d’inscription du réchauffement climatique (ONERC) Le Sénat s’est montré plus ambitieux sur dans les schémas de mobilité et d’obli- ont lancé le deuxième Plan national les projets d’infrastructure et leur finance- gation de service public (desserte tardive, d’adaptation au changement clima- ment. Il a voté l’affectation intégrale chaque bouts de ligne…). tique (PNACC2), basé sur deux piliers : année à l’AFITF du produit de la hausse de - pour rééquilibrer le texte au profit du - l’adaptation au changement cli- la TICPE à hauteur de 1,2 Mdc , soulignant report modal vers les transports publics. matique (il s’agit de limiter les dégâts que cela ne suffit pas à atteindre le niveau La loi comporte beaucoup de dispositions humains et économiques) ; fixé par la loi. Il a réintroduit dans les prio- et de financements favorables à la voiture - et son atténuation, basée sur la rités l’achèvement de la LGV Rhin-Rhône (dispositions pour les bornes électriques, nouvelle Stratégie nationale bas-car- et la réalisation des voies d’accès au tunnel pour le covoiturage, desserte routière des bone (SNBC) et la nouvelle Program- Lyon-Turin. Il a rétabli le COI (comité villes moyennes, possibilités de circulation mation pluriannuelle de l’énergie d’orientation des infrastructures). dans les couloirs réservés...). (PPE) révisée selon la loi de transition Le Sénat a adopté la possibilité pour une Si ces dispositions ne sont pas illégitimes, énergétique pour la croissance verte collectivité d’instaurer un VT (versement elles méritent d’être rééquilibrées par au- (LTECV) après avis du Conseil supérieur transport) en zone rurale au taux de 0,3 % tant de dispositions favorables au dévelop- de l’énergie (CSE), du Conseil national (contre l’avis du gouvernement), même en pement des transports publics (Intercités, de la transition écologique (CNTE), du l’absence de services réguliers, permettant de trains de nuit, taxation de la route…). Comité d’experts pour la transition développer des offres de mobilité. La FNAUT attend des députés qu’ils ré- énergétique (CETE) et de l’Autorité en- Il a introduit la possibilité pour les Ré- tablissent une véritable équité entre les diffé- vironnementale (AE). gions de reprendre la gestion de certaines rents modes de déplacement, en comparant Mais le Conseil Economique, Social et petites lignes ferroviaires. leurs coûts réels pour la collectivité et leur Environnemental (CESE) critique le blo- Il a encouragé le développement de la impact sur l’environnement. Une fiscalité cage de la la contribution climat énergie politique du vélo (parkings obligatoires sé- environnementale tenant compte des vrais (CCE). Il réclame le Plan de Programma- curisés, marquage, emport par les autocars, coûts de l’accidentologie, des nuisances, de tion de l’Emploi et des Compétences formation, schéma d’infrastructures vélos). la congestion, et respectant les engagements (PPEC) prévu par la LTECV et un débat de Il a facilité l’ouverture des données, de la France dans le cadre de la COP 21 doit la CNDP sur les projets de PPE et de SNBC. laissant aux AOM la possibilité d’obliger être instituée. Celle-ci devrait égaliser les Le PNACC2 a, paraît-il, mobilisé pendant l’utilisateur à s’acquitter d’une compensa- taxes énergétiques (kérosène) et imposer une deux ans 300 représentants de la société tion financière. redevance d’usage des routes non concédées. civile, experts, hauts fonctionnaires et Il a favorisé le cumul entre la prime de La FNAUT propose de ramener le taux élus. Le secteur des transports est l’un transport employeur et le forfait mobilité de TVA de 10 % à 5,5 % pour améliorer le des plus gros émetteurs de gaz à effet de durable, permettant une vraie complé- pouvoir d’achat des usagers et encourager le serre, mais la FNAUT n’a jamais été invitée mentarité entre transport public et nou- report modal. à participer à cette « large concertation ». velles mobilités pour les déplacements Elle réclame qu’à l’instar des comités de Manifestement, le risque climatique domicile-travail. lignes TER prévus dans le pacte ferroviaire, n’est pas pris au sérieux. La Loi d’Orien- Il a tiré les leçons du conflit SNCF de 2018 les droits des voyageurs soient étendus aux tation des Mobilités, malgré certaines sur le non-respect de la loi (un délai de 24h Intercités et aux TGV. dispositions intéressantes, en fournit pour la publication du plan de transport) et Elle souhaite que les moyens financiers un exemple révélateur : c’est une accu- porté de 48 à 72h le délai de déclaration des permettant aux associations agréées d’usa- mulation de mesures techniques, mais grévistes. La FNAUT souhaite que le délai gers d’élaborer leurs argumentaires, de l’essentiel - le report modal - est ignoré. de déclaration de fin de grève soit identique maintenir leurs compétences et d’assurer L’Europe pourrait pourtant connaître pour fiabiliser les plans de transport. leur présence aux comités de lignes et comi- à moyen terme la même situation que tés des partenaires, leur soient alloués par la l’Australie. En mars 2019, un pic de cha- Deux pas de plus loi, soit 1/10 000e de la masse salariale des leur impressionnant y a été enregistré à l’Assemblée Nationale ? délégations de service public, comme prévu pour le 4e mois consécutif (la tempéra- dans le texte initial de la loi. ture moyenne a été supérieure de 2,13° à La FNAUT appelle les députés à faire Enfin la FNAUT est défavorable à un sa valeur habituelle). En janvier, le mois le deux pas de plus en avant : relèvement de la vitesse maximale autorisée plus chaud jamais répertorié en Austra- - pour financer le scénario 3 du COI ; sur les routes où elle est limitée actuellement lie, la température moyenne a été supé- - pour faire émerger, par un 4ème appel à 80 km/h. rieure à 30°. à projets de TCSP de 750 Mc, les projets Bruno Gazeau, président de la FNAUT z Jean Sivardière z

4 x FNAUT infos n°274 - mai 2019 Dossier

Péage urbain : pourquoi attendre ?

Périphérique parisien (MD)

L’article 22 ter de la LOM concernant le péage urbain a finalement été retiré sous la 7. Le péage ne crée pas de coupure entre pression des gilets jaunes (FNAUT Infos 270). La FNAUT réaffirme cependant que le la ville et sa périphérie. péage urbain reste un outil indispensable (voir aussi FNAUT Infos 256 et 268). S’il habite en zone périurbaine, l’auto- mobiliste peut se rabattre en voiture, en 1. L’introduction du péage urbain est, 3. Or une réduction très rapide du trafic car, en vélo… sur une gare ou sur une aujourd’hui, la solution la plus efficace. routier urbain est urgente. station terminale de transport collectif C’est quasiment la seule démarche suscep- La congestion et pollution de l’air s’ag- munie d’un parking-relais, selon une pra- tible de provoquer une forte diminution du gravent, le réchauffement climatique prend tique déjà très répandue, et ainsi n’utiliser trafic routier en milieu urbain par report sur des proportions inquiétantes. Et il faut vite sa voiture que sur une courte distance, les modes respectueux de l’environnement. dégager une ressource nouvelle pour aug- donc faire des économies de carburant. D’autres techniques apparues récemment menter la capacité des transports collectifs, Par ailleurs, l’espace périurbain peut sont utiles mais ne peuvent avoir qu’un im- souvent saturés, car si le prix du pétrole aug- bénéficier de la relance des transports pact limité et très progressif. mente fortement, ce qui est plausible, il y collectifs, en particulier de la réactivation - L’impact potentiel du covoiturage est aura un afflux de clientèle qu’il sera, sinon, des étoiles ferroviaires (FNAUT Infos faible : domaine de pertinence limité (au impossible d’absorber. 183 et pages 8-9). L’accessibilité à la ville mieux 7 à 8 % des déplacements domicile- est améliorée. travail), capacité limitée, pas d’obligation de 4. Le péage urbain doit être précédé d’un service public. effort notable de pédagogie. 8. Le péage urbain n’est pas une sélec- - Il en est de même du télétravail, qui ne Faute d’une information objective sur ses tion par l’argent, il permet au contraire peut concerner qu’une minorité de travail- avantages, le péage urbain est impopulaire de réduire les inégalités sociales. leurs, et de l’écrétage des heures de pointe, qui comme toutes les mesures efficaces permet- Le péage urbain est socialement équi- ne joue que sur la congestion (voirie, trans- tant de maîtriser l’automobile : gadget ineffi- table. La réduction de la circulation et port collectif) aux heures de pointe (on peut cace, retour à l’octroi, atteinte à la liberté indi- l’affectation du produit du péage au ainsi éviter des investissements de capacité). viduelle… Si le péage urbain suscite tant de transport collectif et au vélo bénéficient Les fausses bonnes idées abondent, il n’y a réticences en France, c’est d’abord parce qu’il en priorité aux ménages les plus mo- pas que la gratuité des transports. est mal connu. C’était aussi le cas du tramway destes, non motorisés et qui doivent se - Une offre de voiture en libre service dans les années 1970… contenter de logements bruyants situés (Autolib) n’incite pas les citadins à se dé- Le péage urbain se heurte à plusieurs le long des grandes artères urbaines. Ce motoriser, elle les pousse au contraire à se objections : il interdit l’accès à la ville, c’est sont ces ménages qui souffrent le plus de déplacer en voiture. un racket, il crée une fracture entre la ville la pénurie de transport collectif et des - La voiture électrique, en l’état actuel de et la zone périurbaine, il est inéquitable nuisances de la circulation routière. la technologie, ne fait que déplacer la pollu- socialement. tion ; son bilan carbone est controversé. Elle 9. Le péage urbain n’est qu’une exten- encombre autant que la voiture thermique, sa 5. Le péage urbain n’interdit pas l’entrée en sion du stationnement payant. généralisation ne réduirait pas la congestion. ville. C’est la circulation des voitures qui Enfin lutter contre l’étalement urbain est L’accès libre à la ville reste possible aux pié- est alors tarifée, car elle contribue à la nécessaire mais très difficile et ne peut avoir tons, aux cyclistes, aux usagers des transports congestion des voiries et à la pollution de que des effets à long terme. collectifs. Le péage a seulement pour but de l’air, et émet des gaz à effet de serre. décourager l’automobiliste de pénétrer en Tout le monde admet aujourd’hui le 2. Le péage urbain a fait la preuve de son ville au volant de son véhicule dans la journée bien-fondé du stationnement payant, efficacité très rapide. les jours ouvrables. sans lequel il serait strictement impos- A Londres et à Stockholm, les bouchons sible d’accéder à la ville en voiture à cause et les nuisances ont immédiatement dimi- 6. Le péage urbain n’est pas un racket mais des voitures ventouses. nué de 15 à 20 % dans la zone soumise à l’application des principes utilisateur- Pourtant, son introduction progressive péage et sur ses itinéraires d’accès ; l’usage payeur et pollueur-payeur. dans les villes françaises à partir de 1970 des transports collectifs et du vélo a aug- Selon une note du Conseil Général du a provoqué un tollé. Un des arguments menté. Les résultats sont encore plus nets Développement Durable (FNAUT In- des opposants était alors... la sélection à Rome : en 10 ans, le trafic quotidien fos 188), l’usage de la voiture en milieu par l’argent. a diminué de 40 000 véhicules, soit une urbain est « massivement subventionné » L’introduction du péage urbain exige baisse de 35 %, et la pollution de l’air a par la collectivité, qui prend en charge 88 de la part des élus du courage politique. reculé de 30 %. % de ses coûts économiques, écologiques Mais, un jour prochain, le péage urbain Le péage urbain vient d’être adopté à New- et sociaux (27 % seulement dans le cas des semblera aussi naturel que le stationne- York, c’est une première aux USA. déplacements interurbains). ment payant aujourd’hui.

FNAUT infos n°274 - mai 2019 x 5 Actualité Le train plus rapide que l’avion Hyperloop et autres innovations Retour au bon sens. Le comparateur berlinois de voyages GoEuro a listé une dizaine de liaisons européennes très fré- quentées sur lesquelles le train est plus rapide que l’avion, les gains de temps variant de 1 h à 3 h 30. (MD) L’ Londres-Paris fait gagner 3h24 par rapport à l’avion selon GoEuro, Selon Le Parisien, « un jour, peut-être, nous pourrons monter dans une capsule à Paris qui prend en compte le temps de trajet, et prendre le soleil à Nice 40 min plus tard. Ou être propulsés à Amsterdam en 30 min ». mais aussi les pertes de temps aux abords Cet espoir est porté par le train supersonique Hyperloop (FNAUT Infos 259 et 267). des agglomérations et le temps passé aux différents contrôles de sécurité : un atout « C’est en Limousin qu’un prototype On n’arrête pas le progrès des gares ferroviaires est d’être situées va être testé par la start-up canadienne dans les centres. Transpod présidée par Vincent Léonie, Le constructeur automobile chinois Outre le trajet Londres-Paris, de nom- adjoint au maire de Limoges. Quatre fois Geely veut concurrencer Elon Musk breuses autres liaisons européennes plus rapide qu’un TGV, mais deux fois et son projet Hyperloop pour relier font gagner du temps en train : 2h39 moins cher et plus fiable, Hyperloop fonc- les villes d’un grand pays (et même les sur Bruxelles-Paris, 1h28 sur Paris-Lyon tionne à l’énergie solaire et sans personnel continents). Il a l’intention de faire ou Madrid-Valence, 1h26 sur Marseille- ou presque. Un rêve de savant fou déjà sur circuler des trains à 1 000 km/h, puis Lyon et Bologne-Rome. les rails ». jusqu’à 4 000 km/h « dans un futur un GoEuro rappelle également que le train Châteauroux Métropole soutient le pro- peu moins proche ». Le marché chinois émet nettement moins de gaz à effet de jet Hyperloop Paris-Toulouse qui mettrait serait le premier concerné. serre que l’avion. Châteauroux à 20 min de Paris. Sur certaines liaisons, l’avion se fait Avion-taxi même dépasser par le bus. Amsterdam- Lyon - Saint-Etienne Bruxelles (210 km), trois quarts d’heure ou Marseille-Marignane ? Boeing a réussi le 22 janvier dernier gagnés ; Amsterdam-Dusseldorf, 20 mi- le premier essai en vol de son prototype nutes gagnées ; ou encore Bruxelles-Paris, D’après Transpod, le coût de la ligne en- d’avion-taxi autonome. Équipé d’un sys- 3h45 en bus, contre en tout 4h en prenant visagée entre Lyon et Saint-Etienne pour- tème de propulsion électrique, le taxi l’avion, selon GoEuro. rait être compris entre 20 et 40 millions de volant est conçu pour voler de façon tota- dollars du kilomètre, contre 20 M$ pour la lement autonome du décollage à l’atterris- La technique avant l’usager ? LGV Le Mans-Rennes. Comme Le Pro- sage, avec une autonomie pouvant dépas- grès croit utile de le préciser, une option ser 80 kilomètres. En trois décennies d’ingénierie dans souterraine est possible, mais nettement les transports publics, j’ai participé à plus chère. Tramway autonome deux premières mondiales - le premier Le journal La Provence a présenté un grand métro sans agent d’accompa- nouveau projet de Transpod : « Ce n’est pas Produit par le géant chinois CRRC, gnement ni portes palières (ligne D de le 1er avril mais le 22 janvier que TransPod l’ART (Autonomous Rail Rapid Tran- Lyon) et le premier tramway à plancher a dévoilé son projet fou de commercialiser, sit) est un tramway sur pneus à guidage entièrement bas de Strasbourg. J’ai à l’horizon 2030, un nouveau système de optique, autonome, à traction hybride. aussi participé à de nombreuses exper- transport capable de circuler à la vitesse Ce qui, selon CRRC, permet de créer tises sur les « nouveautés » présentées phénoménale de 1 000 km/h. Et comme un réseau de transport urbain à des prix comme des panacées : aérotrain de Ber- une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, défiant toute concurrence. Ce nouveau tin, navettes sur coussin d’air de Bar- TransPod a fait savoir que l’une des liai- véhicule « intelligent » est en phase de thalon, monorails urbains, télécabines, sons sur lesquelles son véhicule pourrait test à Harbin (nord-est de la Chine), où , système SK, tramway sur pneus donner la pleine mesure de ses capacités, il affronte des températures de - 20 °C. de Bombardier, Satorail de Matra, Phi- est la distance de 20 km qui sépare la cité leas d’Eindhoven... phocéenne (gare Saint-Charles) de son Infinitrain Le rapport qualité globale/coût est aéroport international. Selon nos calculs, souvent « oublié », on préfère s’extasier le trajet serait effectué en 72 secondes. Imaginé par des étudiants en 5e année devant l’innovation ! À peine le temps de s’asseoir sur son siège à HEI Lille et aux Arts et Métiers Pa- Qu’on poursuive plutôt les recherches et de boucler sa ceinture, qu’il faudra déjà risTech, voici l’infinitrain. Demain, nos pour accroître le report modal sur les se relever… ». Renaud Muselier, président métros seront « circulaires », ils ne mar- procédés existants les plus vertueux LR de la Région PACA, s’est dit intéressé queront jamais d’arrêt. Comme il fonc- plutôt que pour se donner le « plaisir » par le projet. tionnera en permanence, à la vitesse de de l’innovation. L’autorail à hydrogène A quand une ligne Hyperloop pour faire 20 km/h, une solution innovante a été n’a aucun caractère prioritaire ! mieux que le CDG Express ? inventée pour permettre les montées et Autre exemple récent : je participe descentes : quatre tapis roulants seront actuellement à la promotion d’un Des critiques cinglantes installés dans les stations, leur vitesse tram-train Annecy/Faverges/Albertville passant de 5 km/h, vitesse de marche, à pour contrer le projet de tunnel sous le Pour l’universitaire Yves Crozet, « Hy- 10 km/h, puis 15 km/h et enfin 20 km/h, Semnoz couplé à un pseudo BHNS en perloop est au mieux une chimère, au pire vitesse du train. rive ouest du lac d’Annecy, mais cette une escroquerie ». Les étudiants ont obtenu le Grand Prix démarche se heurte à un véritable « Pour François Lacôte, vice-président de l’ingénierie du futur consacrée aux concours Lépine » d’alternatives : téléca- d’Alstom, l’un des pères du TGV à la mobilités de demain. Le jury a sans doute bines, navettes lacustres, Personal Rapid SNCF : « Hyperloop est une formidable oublié que le tapis roulant accéléré de la Transit routier ou ferré... escroquerie technico-industrielle ». gare Montparnasse a été un fiasco. Edmond Luca, Lyon Métro Transport public z

6 x FNAUT infos n°274 - mai 2019 Actualité Forum

Plusieurs points d’arrêts des trains dans grande vitesse : les trains circulant à 140 les seniors, les scolaires et étudiants ont les zones rurales ne sont plus desservis et 160 km/h ont quasiment disparu. Le été ignorés. Quant au fret ferroviaire, il a par la SNCF en Normandie, et d’autres format de base, notamment en direction disparu au profit du tout-camion. suppressions sont annoncées. Cette poli- du sud-est, étant le train à 120 km/h. Le Il est donc urgent de rétablir ces voies tique, systématique depuis 2010, pénalise projet européen Eurocarex, qui visait à ferrées en dix ans, notamment dans le de nombreux usagers intermodaux en les transporter du fret aérien, semble égale- sud-ouest de la France qui est aujourd’hui obligeant à allonger de 20 ou 40 km leur ment ne plus être d’actualité. Les TGV pénalisé par sa dimension géographique parcours initial ou terminal en voiture. postaux ont également disparu. et sa très faible densité de population, et La SNCF ne crée jamais de nouveaux Luc Humbertjean, 75 Paris z qui a subi le démantèlement de son ré- arrêts. Pourtant la surface urbanisée seau ferré plus que toute autre région. et donc les besoins de mobilité vers les Sur les transports collectifs en milieu Des emprises ferroviaires sont restées grandes villes ne cessent d’augmenter. rural, je ne doute pas que les exemples dans le domaine public et peuvent per- Véronique Wiesinger, autrichien, allemand et suisse soient mettre au rail de reprendre du trafic à FNAUT Normandie z très intéressants, mais c’est alors tout la route : les investissements nécessaires l’aménagement du territoire qui doit seraient plus rentables que les multiples Pour prouver que la ligne classique de être revu : les Allemands n’ont pas cédé ronds-points routiers, il faut profiter de la Maurienne peut transporter davantage aux sirènes des hypermarchés et, même faiblesse des taux d’emprunts à long terme. de fret, les opposants écologistes au dans la campagne, l’habitat en petit col- Michel Hontang, 40 Poyanne z projet Lyon-Turin ont inventé un argu- lectif est nettement plus présent que nos ment « imparable » : on automatise bien fameux pavillons « avec les quatre faces Un réseau maillé de transport collectif le métro parisien, pourquoi ne moder- visibles » en France... et des liaisons fréquentes permettraient niserait-on pas la ligne historique de En milieu rural aussi, l’attachement à de satisfaire une partie des habitants Maurienne et le tunnel de Modane qui la voiture est irrationnel : de nombreuses des zones où s’est développé l’étalement datent eux aussi du 19ème siècle ? Ils personnes âgées (et des conducteurs qui urbain. Mais il sera toujours difficile et oublient quelques détails : ont perdu tous leurs points de permis) coûteux de répondre à cette demande, - la ligne 1 du métro a été doublée par achètent des voiturettes « sans permis » qui nécessite aussi, pour être écolo-éco- le RER A, qui permet à un plus grand au prix d’une voiture normale. nomique, de faciliter la marche et le vélo nombre de voyageurs de traverser Paris Thomas Lesay, 12100 Millau z pour les trajets d’approche. beaucoup rapidement ; Il y a complémentarité à lutter contre la - le tunnel de Modane a déjà été mo- J’ai observé les effets de la gratuité des dispersion de l’habitat (par des mesures dernisé, ce qui a perturbé le trafic pen- transports à Aubagne: les véhicules sont législatives, foncières, réglementaires...) dant plusieurs années ; remplis non pas d’anciens automobi- et à renforcer les liaisons de transport - une nouvelle modernisation de la listes, mais d’anciens piétons ou cyclistes. collectif, et le rail d’abord, mieux à même ligne historique pour augmenter sa capa- Les élèves du lycée sont à un arrêt de la de desservir les pôles urbains et les cité et satisfaire aux nouvelles normes de gare : ils attendent tous le tramway pen- bourgs. La FNAUT a intérêt à réclamer sécurité nécessiterait de la fermer long- dant 10 min et y voyagent serrés comme l’un et l’autre, tout en se concentrant sur temps à tout trafic, ne modifierait pas des sardines plutôt que de marcher 400 son objectif social, le développement du son profil et ne réduirait donc pas ses m à pied, ce qui ne leur vient pas à l’idée, transport collectif. coûts d’exploitation rédhibitoires. Quant puisque c’est gratuit. L’étalement urbain est une des grandes au coût de l’opération, les écologistes Jean-Michel Pascal, FNAUT PACA z causes de l’émergence de la contestation n’en disent mot. actuelle. Les Pays-Bas, qui certes dis- Jérôme Rebourg, ACAC Chambéry z Il y a quelques années, Jacques Chirac posent de bien beaucoup moins d’espace, avait affirmé que tout le réseau ferré gèrent beaucoup mieux leur urbanisation En introduisant la gratuité des trans- français devait être électrifié. Pourquoi ? et protègent mieux leurs zones rurales. ports urbains sur les petits réseaux et A quel coût ? On ne l’a jamais su. La Dominique Romann, en n’assurant qu’un service médiocre, pérennité des réseaux TER est menacée FNAUT Pays de la Loire z on renforce la fracture territoriale entre et on transfère massivement des services ces petites villes et les métropoles où les ferroviaires sur autocar, 40 % des usa- Lors du « grand débat national », en habitants peuvent disposer d’un niveau gers reprennent alors la voiture, ce qui réponse à un élu qui préconisait une élevé de service et où les réseaux arrivent est évidemment contre-productif sur taxation du kérosène, le président de la à grignoter peu à peu la part de marché les plans énergétique et environnemen- République a indiqué que, s’agissant du de la voiture. En définitive, la gratuité tal. Mais l’idée à la mode, c’est toujours trafic aérien domestique, ce n’était pas est une démagogie qui cache le souci de l’électrification - par caténaires ou train envisageable : « si je taxe le kérosène, je ne rien faire qui puisse nuire au trafic à hydrogène ! tue les vols intérieurs car ils ne sont pas automobile en ville. En transport urbain, la mode est ana- rentables ». Il a cité le cas de la ligne sub- Michel Quidort, président de la FEV z logue : c’est le bus électrique. Alain ventionnée Paris-Brive. Morcheoine, alors directeur des trans- Par contre le Président n’a pas men- Alors qu’il commence à se dévelop- ports à l’ADEME, disait pourtant avec tionné que les lignes radiales à fort trafic per en Italie, le fret ferroviaire à grande bon sens : « je préfère un bus qui fume à joignant Paris à des métropoles telles que vitesse n’est plus à l’ordre du jour en 50 voitures bien réglées ». Marseille, Nice, Toulouse ou Bordeaux, France. Des trains de fret reliant Paris Jean Sivardière, FNAUT z en concurrence directe avec le TGV, sont au sud-est ont roulé à 200 km/h, ils em- rentables et que de telles lignes pour- pruntaient en partie les LGV mais ont Depuis 1970, environ 15 000 km de raient parfaitement supporter une telle été supprimés pour des raisons obscures voies ferrées ont été abandonnés, essen- taxation, dans le cadre de la lutte contre (coût trop élevé, tonnage limité, plages tiellement en milieu rural où la dépen- la pollution et les émissions de CO2 en- d’entretien des LGV...). La SNCF dance automobile est devenue totale. gendrées par le trafic aérien. ne semble plus intéressée par le fret à Les personnes sans permis de conduire, Luc Humbertjean, 75 Paris z

FNAUT infos n°274 - mai 2019 x 7 Actualité Les voyageurs veulent acheter FORUM (suite) un billet de train au tarif normal Hors région parisienne, les titres de (MD) transport combinant train et trans- port urbain sont peu développés. Or La SNCF multiplie les fermetures de gui- tributeur - ces arrêts sont nombreux - nous il est rare que le voyageur se rende chet ou réduit leurs horaires d’ouverture pouvons acheter notre billet au contrôleur au seulement dans le voisinage de la gare Dans certains départements ruraux, il ne même tarif qu’au guichet. Or la SNCF veut d’arrivée. Ainsi le cumul des tarifs SNCF reste plus qu’une ou deux gares ouvertes avec nous imposer un tarif de bord ou un tarif + transport urbain ou périurbain peut un guichet, et même parfois aucune à 50 km exceptionnel beaucoup plus cher. C’est inad- atteindre le triple du seul tarif SNCF, à la ronde. Même dans les grandes villes, les missible. Nous voulons acheter un billet au d’où abandon du train au profit de la guichets se font rares. Il est de plus en plus dif- tarif normal, sans surtaxe. Nous demandons à voiture ! C’est le cas du trajet entre ficile de trouver un interlocuteur en gare. toutes les Régions de s’opposer à la politique Charbonnières-les-Bains et le centre Nous comprenons le souci de la SNCF de de la SNCF, comme certaines qui le font déjà. de Lyon, malgré l’existence d’un tram- diminuer ses coûts, mais Internet ne peut être train fort pratique mais trop cher pour l’unique réponse. Un voyageur qui n’a pas pu acheter son billet le voyageur occasionnel. n’est pas un fraudeur Edmond Luca, Les voyageurs ont besoin d’une présence hu- La FNAUT n’a jamais soutenu les fraudeurs Lyon Métro Transport public z maine, et pas seulement pour les contrôler qui pénalisent l’ensemble des usagers, mais elle Les distributeurs automatiques n’acceptent exige que la présomption d’innocence soit ap- Le kérosène est le gazole des pas l’argent liquide et tombent en panne. In- pliquée. Sous prétexte de lutte contre la fraude, riches : le taxer comme le demande la ternet est encore loin de couvrir tout le terri- la suspicion généralisée de la SNCF pénalise FNAUT, le RAC et d’autres ONG réduirait toire. Tout le monde n’a pas un ordinateur, un les usagers de bonne volonté et donne une très les inégalités sociales. smartphone ou une carte bancaire (mineurs, mauvaise image de la France aux touristes qui Un lecteur de FNAUT Infos z personnes en difficulté). Et il y aura toujours visitent notre pays en train. des situations complexes, des trajets avec plus Alors que le transport Auto-Train a de deux correspondances, des blocages infor- La FNAUT demande donc : fait ses preuves depuis plus de 60 ans, matiques. La SNCF nous répond d’utiliser le • à la SNCF d’abroger son projet de chan- SNCF Mobilités veut supprimer fin 2019 téléphone. Mais son numéro 3635 est surtaxé gement des tarifs à bord des trains et d’instal- les rares liaisons qui subsistent : le Sud- à 0,40 c par minute ! ler des distributeurs de billets dans les trains ; Ouest n’est déjà plus desservi et, mal- • aux collectivités territoriales et à la SNCF gré son succès à l’été 2018, la liaison La tarification surtaxée dans les trains est de mettre en place des points d’accueil et de Paris-Perpignan ne sera pas reconduite. inadmissible vente multimodaux avant toute fermeture de Il semble que pour SNCF Mobilités, Actuellement, quand nous montons dans guichet SNCF. évolution doit rimer avec récession un train à un arrêt qui n’a ni guichet, ni dis- Anne-Marie Ghémard z et progrès avec suppression. La mi- nistre des transports s’est engagée à maintenir certains trains de nuit, l’AU- Nouvelles cartes de réductions SNCF TAUT lui demande de maintenir aussi les dessertes Auto-Train. Si on jume- Par un communiqué du 22 mars, la SNCF Les TGV Inoui se raréfient, et certains sont lait à nouveau l’Auto-Train et les trains a annoncé le lancement de ses nouvelles cartes remplacés par des TGV Ouigo à tarification de nuit en leur accrochant des porte- de réductions commerciales : de nombreuses spécifique. autos, on pourrait desservir Lyon et innovations sont introduites. Mais le commu- • D’autre part, les conditions d’échange et Briançon d’une part, Brive et Toulouse niqué se limite aux modifications favorables au de remboursement sont fortement dégradées d’autre part. A noter, c’est peu connu, voyageur et passe les autres (les échanges et les car elles passent : que le véhicule peut voyager sans obli- remboursements) sous silence. Une méthode - à 15 c dès l’avant-veille du voyage au lieu de la gation d’acheter un billet voyageur, et de communication inacceptable ! veille pour les voyageurs sans carte de réduction ; que la gare Auto-Train de Paris-Bercy - et, pour les voyageurs munis d’une carte, est équipée d’une borne de recharge De nombreux points favorables de 5 c au lieu de la gratuité à partir de J-30 rapide des véhicules électriques. Les nouvelles cartes comportent des points et 15 c au lieu de 5 c et dès J-2 au lieu de la Marie-Rose Bernazzani, Association très positifs : meilleure lisibilité, baisse des veille du départ. des Usagers du Transport Auto-Train z prix d’achat, réductions accordées portées de Il est indispensable d’alléger fortement ces 25 % à 30 % dans tous les cas. L’effort est par- conditions, surtout pour les échanges, les voya- Il est temps d’évaluer le redécou- ticulièrement net pour les familles qui, avec la geurs étant déjà pénalisés par l’augmentation page des Régions. La réunification de tarification actuelle, ne pouvaient quasiment des prix des billets lors de ces échanges. la Normandie a un sens, mais la créa- jamais prendre le train. tion des très grandes Régions (Grand L’amélioration de l’offre Pro est également La tarification s’inscrit dans une politique Est, Nouvelle , Occitanie) très sensible (baisse des prix, conditions dangereuse de desserte éloigne trop les habitants des centres d’utilisation plus intéressantes). La SNCF s’inspire de plus en plus des de décision. méthodes de commercialisation de l’avion, ce Dominique Romann, Mais des points nettement moins favo- que la FNAUT dénonce. FNAUT Pays de la Loire z rables au client Basée sur une politique de contrôle au sol • Si les prix baissent, le nombre de trains lourde, contraignante, source de perte de La girouette d’un autobus doit indi- pour lesquels les réductions sont valables temps et associée à des échanges et rembour- quer exclusivement la destination de baisse lui aussi. sements de plus en plus rigides et coûteux, la l’autobus. Or fin 2018, au moment des C’est le cas des nombreux Intercités qui ont nouvelle commercialisation du train handicape fêtes, les bus grenoblois allaient à « été transférés aux Régions (où ils sont d’ail- les relations à moyenne et courte distance, et Joyeux Noël » puis, une semaine plus leurs commercialisés de façon pratique : tari- accentue donc la priorité donnée par la SNCF tard, à « Bonne Année ». A quand des fication simple, contrôle à bord, réservation aux grandes relations radiales avec Paris. bus allant à « Buvez Coca Cola » ? facultative). Jean Lenoir z Jean-Yves Guéraud, ADTC-Grenoble z

8 x FNAUT infos n°274 - mai 2019 Actualité Les règles applicables aux contrats de transport ferroviaire de voyageurs

L’ouverture du marché national du transport ferroviaire de voyageurs va provoquer En cas de situation perturbée, le décret l’intervention de nouveaux opérateurs. L’objet de l’étude élaborée par le service juri- n° 2016-327 prévoit que les usagers direc- dique de la FNAUT (Marc Debrincat, Asiyé Oruncak, Anne-Sophie Trcera) pour la DGITM tement touchés doivent être informés dans en 2018 était de dresser un état des lieux des textes juridiques applicables au transport les meilleurs délais et conseillés pour la ferroviaire de voyageurs. poursuite de leur voyage. Par ailleurs, le règlement n° 1371/2007, qui n’est pas ap- L’information horaire La tarification plicable aux TER, prévoit des dispositions assez limitées d’assistance des voyageurs en Le code de la consommation impose à Le code des transports prévoit la liberté cas de suppression ou retard de train. toutes les entreprises ferroviaires et distribu- tarifaire des régions pour fixer les tarifs des En cas de pluralité d’entreprises ferro- teurs de diffuser une information loyale, claire TER, ainsi que le fait que les tarifs sociaux viaires, leurs dispositifs d’information en cas et transparente. nationaux s’appliquent au TER. Les fonde- de situation perturbée doivent être interopé- Le règlement n° 2017/1926 sur l’informa- ments juridiques actuels des tarifs sociaux rables afin de garantir une information du tion multimodale les contraint à fournir des sont anciens, de faible valeur juridique et voyageur de bout en bout. données pour le réseau ferroviaire jusqu’en devraient être étendus à toutes les entre- 2021. Concernant les données dynamiques, prises ferroviaires. Les droits des voyageurs le projet de Loi d’Orientation des Mobilités Le système tarifaire des services natio- (LOM) prévoit une ouverture de ces données. naux de SNCF Mobilités est prévu par le Les entreprises ferroviaires et les distri- Pour la FNAUT, l’information horaire décret n° 2016-327 : tarif de base général buteurs sont concernés par le règlement multimodale doit inclure les offres de services (seconde classe), tarification de marché en- 2016/679 relatif à la protection des don- de toutes les entreprises ferroviaires. cadrée, et tarifs sociaux. Il existe un proces- nées personnelles des personnes physiques En cas de situation perturbée prévisible sus d’homologation de ces tarifs par l’État. (RGPD). (travaux), le code des transports prévoit des La FNAUT considère que les tarifs des Le traitement de données sensibles telles dispositions applicables dans les services pu- différentes entreprises ferroviaires doivent que celles liées aux infractions pénales blics de transport terrestre. être interopérables et permettre la déli- s’effectue sous le contrôle de l’autorité Le décret n° 2016-327 prévoit une mise à vrance d’un billet unique. publique : toutes les entreprises ferroviaires disposition de toutes les données utiles sur les peuvent être concernées. horaires des trains, mais il n’est applicable qu’à La distribution Le code de la consommation oblige les SNCF Mobilités. professionnels à mettre en place un système L’arrêté du 10 avril 2017 sur l’information Pour les contrats conclus pour une durée de médiation, qui doit obéir à différentes du consommateur, qui prévoit une obligation déterminée avec une clause de reconduc- règles visant à garantir l’impartialité et l’indé- de publication des horaires théoriques des ser- tion tacite, les professionnels doivent infor- pendance du médiateur, l’effectivité de la mé- vices librement organisés sous la forme d’un mer leurs clients de la possibilité de ne pas diation et sa gratuité pour le consommateur. document unique, est applicable à toutes les reconduire le contrat. Le règlement n°1371/2007 est une source entreprises ferroviaires. Selon l’arrêté du 15 juillet 2010, les pro- de droits en cas de suppression de train, de fessionnels doivent remettre aux consom- retard de plus de soixante minutes ou de L’information tarifaire mateurs une note comportant une série litiges relatifs aux bagages. La jurisprudence de mentions obligatoires : cette obligation et le droit français complètent ce texte. Le code de la consommation encadre l’in- pose question pour les achats sans contact formation qui doit être délivrée par les profes- de type Near Field Communication (NFC). La gouvernance sionnels ; il détermine les pratiques commer- Une série de dispositions concernant la ciales trompeuses et les clauses abusives ; il distribution des billets de train existe dans L’article L. 2121-9-1 prévoit que des co- interdit certaines pratiques (telles que la vente le règlement n° 1371/2007, mais elles sont mités de suivi des dessertes doivent être ins- forcée ou les cases précochées). peu contraignantes. titués auprès des Régions, comprenant des Une partie du code de la consommation Le décret n° 2016-237 impose à SNCF représentants des usagers, des représentants n’est pas applicable aux services de transport Mobilités de délivrer un titre de transport des personnes handicapées ainsi que des élus de passagers, comme le texte qui prévoit le unique ou de permettre l’achat simultané des collectivités territoriales. Ils doivent être délai de rétractation. des titres nécessaires. consultés sur les dessertes, les correspon- Par ailleurs, l’arrêté du 3 décembre 1987 Les systèmes de billettiques et de distri- dances ferroviaires, les tarifs, l’information, prévoit l’affichage des prix des prestations de butions des différentes entreprises doivent l’intermodalité, la qualité de service, la per- services et sa communication à distance. La être interopérables entre eux et permettre formance énergétique et écologique et les FNAUT estime cependant que ce texte n’est un billet unique. caractéristiques des matériels roulants. pas adapté au yield management. La gestion des grandes gares doit être sui- Le décret n° 2016-327 prévoit l’information La qualité de service vie par un comité de concertation. sur les tarifs et les conditions générales d’exploi- tation des services. Le code de la consommation prévoit Conclusion Il prévoit également la publication, d’une que les services doivent répondre aux obli- manière accessible, du tarif le moins élevé et du gations relatives à la sécurité et à la santé L’étude devait recenser les textes juri- tarif le plus élevé des billets de seconde classe des personnes, à la loyauté des transac- diques, européens et nationaux, de protec- pour chaque relation. tions commerciales et à la protection des tion des voyageurs applicables aux contrats Ce texte n’est applicable qu’à SNCF Mo- consommateurs. de transport ferroviaire. Elle permettra bilités : l’exigence sur l’information tarifaire Le règlement n° 1371/2007 prévoit le d’évaluer leur respect par SNCF Mobilités devrait être applicable à toutes les entreprises traitement des réclamations, notamment la et les nouveaux opérateurs, et de demander ferroviaires. Par ailleurs, le tarif le moins élevé publication d’un baromètre des plaintes dans des modifications de ces règlementations. n’est pas communiqué par SNCF Mobilités. un rapport annuel sur la qualité de service. Anne-Sophie Trcera z

FNAUT infos n°274 - mai 2019 x 9 Actualité Sécurité routière : L’expertise sur les cars Macron : à confier aux élus ? réaction de la FNTV, réponse de la FNAUT et précisions de Bruno Cordier Le journal La Croix a publié, le 11 (MD) février dernier, la carte des 500 km de routes départementales du Loir-et-Cher Nous avons présenté, dans FNAUT Infos 272, l’expertise de Bruno Cordier sur les sur lesquelles la vitesse est limitée à dépenses publiques liées aux services d’autocars SLO dits cars Macron. La FNTV 80 km/h et que le Conseil départemen- (Fédération Nationale des Transports de Voyageurs, organisation professionnelle tal envisage de repasser à 90 km/h. Selon des autocaristes) a alors réagi publiquement de manière virulente, estimant que Nicolas Perruchot, président du Conseil cette expertise, « orientée et à charge », manquait de rigueur scientifique. départemental : « ces routes sont sûres, elles n’ont pas d’accidentologie très dé- La FNTV contestait notamment le bilan La FNAUT n’a jamais contesté l’existence veloppée ». On peut en douter. environnemental négatif des cars SLO éta- des services SLO (en Grande-Bretagne, les En réponse à cette information (cour- bli par le consultant sur la base des enquêtes clientèles du car et du train se développent rier des lecteurs du 15 mars), j’ai eu la approfondies de l’ARAFER et des données simultanément), bien qu’ils ne soient soumis curiosité de rechercher la carte publiée, les plus récentes de l’ADEME (le bilan à aucune obligation de service public (les liai- en juin dernier, par le Journal du Di- avait été estimé positif par l’ADEME en sons sont de plus en plus saisonnières) et que manche. Etablie à partir des données 2016, mais sur des bases anciennes). leur impact sur l’aménagement du territoire officielles de l’ONISR par le profes- La FNTV contestait aussi les proposi- soit marginal : les exploitants se positionnent seur Claude Got pour la Ligue contre tions de la FNAUT (création d’une rede- en priorité sur les axes autoroutiers (les villes la violence routière, cette carte met en vance routière kilométrique). moyennes sont donc peu desservies), les axes évidence les 15 routes les plus acci- La réaction de la FNTV et la réponse de déjà bien desservis par le train, Intercités ou dentogènes du département, hors ag- Bruno Cordier sont consultables sur le site TGV, et la desserte des aéroports (hors Saint- glomération et sans séparateur médian : www.fnaut.fr. Exupéry - Grenoble, les lignes les plus fré- ces routes concentrent plus de la moitié Quant à la FNAUT, elle confirme son quentées sont Lille-Paris, Lyon-Paris, Paris- des tués depuis 10 ans. La comparaison point de vue. Rouen et Lyon-Grenoble). des deux cartes est édifiante. l Elle estime que l’expertise est objec- tive ; sa méthodologie, déjà utilisée dans Précisions un travail sur les aides publiques au covoi- turage (FNAUT Infos 261), est scienti- Bruno Cordier a apporté plusieurs préci- fique ; l’indépendance du consultant est sions à son expertise. largement reconnue. Un car use bien la route autant qu’un ca- Faute de données fiables, certaines hypo- mion en moyenne. Les camions sont certes thèses ont été faites par le consultant, mais plus lourds, mais ils ont davantage d’essieux, elles ont été explicitées et ne portent que or le paramètre qui compte pour l’usure des sur des points mineurs. routes est la charge à l’essieu. Pour les cars l Les Régions assument les pertes de comme pour les camions, la charge maxi- recettes TER liées à la concurrence exercée male à l’essieu oscille entre 8 et 9,5 tonnes/ par les cars SLO : Bruno Cordier a bien essieu. Le consultant a donc considéré que précisé que les pertes de recettes Intercités l’usure des routes était la même pour les deux A l’exception de la nationale 10, sur la- et TGV subies directement par SNCF Mo- types de véhicules. Par ailleurs il n’a pas tenu quelle le Conseil départemental ne peut bilités ne doivent pas être assimilées à des compte des trajets à vide des cars, faute de modifier la limitation de vitesse, et de dépenses publiques. données disponibles, ce qui aurait dégradé le quelques tronçons des RD 951 au nord de l Les exploitants des cars SLO ne per- bilan économique des cars Macron. Blois et RD 922 au nord de Romorantin, les çoivent pas de subventions directes, mais Le coût d’usure des routes qui a été calculé 12 autres routes les plus accidentogènes ils bénéficient de l’entretien des voiries non n’est pas le coût marginal. Les routes sont du Loir-et-Cher repasseraient à 90 km/h. concédées qu’ils utilisent gratuitement, ce certes déjà construites, mais il faut les entre- S’ils persistent dans leurs « solutions qui justifie la redevance routière réclamée tenir (entretien courant et entretien lourd) intelligentes », les élus auront besoin de par la FNAUT. et, chaque année, de nouvelles routes sont beaucoup de courage lorsqu’ils iront l Le bilan environnemental des cars construites, élargies ou déviées… Le budget parler aux parents et proches des futures SLO, négatif, est peu surprenant : les cars routier pris en compte correspond aux dé- victimes. La sécurité routière mérite une attirent les automobilistes et covoitureurs - penses publiques effectuées en 2016, dont une approche objective, pas une approche le bilan de ce report modal est positif - mais part d’entretien et une part de construction démagogique. plus encore des usagers du train, si bien que de nouvelles routes. Les dépenses antérieures Hervé Harduin, Gironde z le bilan global est défavorable. de construction des routes, qui n’apparaissent pas dans les Comptes des Transports de la L’analyse ci-dessus confirme que confier Les cars Macron en 2018 Nation 2016, ne sont donc pas considérées. aux élus une modulation de la vitesse Enfin le coût de la tonne de CO2 utilisé maximale sur les routes serait irrespon- D’après l’ARAFER, la fréquentation des dans l’expertise est celui indiqué par le rapport sable. Ce serait admettre que ces élus cars Macron a encore progressé récem- Quinet, 45 c/tonne. Ce coût est une valeur sont compétents en sécurité routière, or ment : 8,9 millions de voyageurs en 2018 tutélaire utilisée pour apprécier la pertinence la plupart d’entre eux veulent repasser à (+ 26 % par rapport à 2017). Le taux des investissements en infrastructures, il est 90 km/h les routes les mieux aménagées d’occupation des véhicules est passé de sensiblement supérieur à la valeur de marché et les plus rectilignes, qui sont en réalité 51 % à 54 %. Comme cela était prévisible, du CO2. Mais cette valeur de marché est très les plus dangereuses (FNAUT Infos 266, après une période de prix d’appel pour fluctuante, elle ne correspond ni à une réalité 273). Ces routes sont en effet les plus fré- attirer les voyageurs (3,2 c/100 km), le scientifique, ni à la valeur que dicterait l’inté- quentées et elles donnent aux automobi- prix moyen du billet augmente réguliè- rêt général. Il semble donc plus juste d’utiliser listes un sentiment trompeur de sécurité rement : 4 c/100 km en 2016, 4,7 c en la valeur du rapport Quinet, plus en lien avec qui les incite à foncer. 2017 et 5 c en 2018. les coûts externes des émissions de CO2. Jean Sivardière z

10 x FNAUT infos n°274 - mai 2019 Actualité Super-bêtisier Chronique du Lyon-Turin Les élus de Toulon opposés au tram- way : « construire un tramway à Toulon serait aussi pertinent que de développer un réseau de bateaux-bus à Clermont- Ferrand ». Affligeant... Hubert Falco, maire LR de Toulon : « les trois ans de travaux du tramway, très lourds et contraignants, menaceraient (MD) toute l’activité économique, culturelle et sociale de l’agglomération ; l’efficacité du La bataille entre le mouvement 5* et la traverse les Alpes par le rail, et la capacité fer- BHNS a été reconnue dans 30 des 40 plus Ligue du Nord se poursuit. roviaire n’est pas épuisée.. grandes villes de France ». Manifestement, Le gouvernement italien cherche à renégo- La situation est bien différente à la frontière M. Falco n’a pas beaucoup voyagé. cier le financement du tunnel de base (40 % Autriche-Italie : plus de deux millions de ca- Bruxelles, 35 % italie, 25 % France). Cepen- mions passent par le Brenner chaque année. La réponse du ministre dant il a autorisé Tunnel Euralpin Lyon-Tu- L’Initiative des Alpes demande depuis des rin (TELT) à lancer les appels à candidatures années au Conseil fédéral d’augmenter la Participant à un débat public à Toulon, pour les travaux du tunnel de base le 11 mars, redevance poids lourds liée aux prestations François de Rugy a déclaré : « le tramway date limite pour qu’il puisse bénéficier de (RPLP, voir FNAUT Infos 107, 136, 217) est un grand succès à Nantes depuis sa 300 Mc de financements européens, mais la afin de rendre le rail plus compétitif. Selon relance en 1985 ; la fréquentation aug- procédure pourra être interrompue... elle, le transport routier génère 1,5 MdFS de mente au fil des années, nous en sommes coûts externes par an : la RPLP devrait aussi à 120 000 voyageurs par jour sur la ligne 1. Des déclarations variées prendre en compte les émissions de CO2 Nous avons aussi créé une ligne de BHNS par les camions. (le Busway) qui a bien fonctionné, mais Karima Delli, euro-députée EELV : « la nous nous sommes rapidement heurtés à commission transport du Parlement euro- Une bourse de transit ? un problème de capacité ». péen (qu’elle préside) peut servir à débattre d’un moratoire sur le Lyon-Turin. Les scien- L’Association suisse des transporteurs rou- tifiques alertent sur la disparition de la biodi- tiers (ASTAG) s’y oppose : « cela ne ferait versité… ; le fret ferroviaire peut passer par la qu’augmenter le coût du trafic routier qui, ligne existante du Mont-Cenis, avec un coût au final, serait répercuté sur les consomma- inférieur. Mettons tout le monde autour de la teurs ». D’autre part, selon l’ASTAG, les table, et envisageons les alternatives crédibles capacités ferroviaires sont insuffisantes en à ce grand projet inutile et destructeur de l’en- Allemagne et en Italie. vironnement ». Mais à quoi bon débattre si le L’ASTAG rejette le principe d’une bourse de projet est a priori inutile et nocif ? transit alpin réclamé par l’Initiative des Alpes, Giuseppe Conte, président du Conseil qui apporterait un financement supplémentaire italien (M5*), veut « rediscuter intégrale- au rail : un Etat accorderait un nombre limité (FM) ment » le projet Lyon-Turin et exprime « ses de droits de transit, ces droits seraient négociés doutes et sa perplexité quant à l’opportunité en ligne. Plus la demande serait forte, plus leur de cet ouvrage ». prix serait élevé. Emploi et mobilité : Jean-Christophe Lagarde, député UDI : des statistiques intéressantes « le chantier LyonTurin, ce n’est pas de l’argent Le tunnel de base Lyon-Turin : public gaspillé, c’est un cadeau pour le climat, une vieille histoire... En France, les déplacements domicile- pour l’environnement et pour les savoyards ». travail sont d’une durée quotidienne Elisabeth Borne : « la France est convain- Le tunnel ferroviaire du Mont-Cenis (ou moyenne de 25 minutes, soit 50 minutes cue de la pertinence de ce projet majeur pour du Fréjus), qui relie la vallée de la Maurienne aller-retour. les échanges entre nos deux pays et pour (Modane) au Val de Suse (Bardonnèche), a En Ile-de-France, cette durée moyenne l’Europe ». été ouvert en 1871, à une altitude moyenne de quotidienne atteint 41 minutes, soit plus 1 123 m. C’était alors le plus long du monde : d’1h20 aller-retour. L’exemple suisse 12 km (ce record fut battu en 1882 par le tunnel Ces longs déplacements engendrent ferroviaire du Gothard : 15 km). des problémes d’accès à l’emploi et de Le 12 mai 1990, 109 433 signatures étaient Dès 1907, un groupe de pression - le Pro recrutement. acheminées à Berne ; 4 ans plus tard, le 20 Cenisio - fut créé par des ingénieurs et des dé- Côté salariés : février 1994, le peuple suisse acceptait, à une fenseurs de l’environnement pour promouvoir - en France, 50% des personnes en in- courte majorité (51,9 %), l’Initiative des Alpes une meilleure qualité des services, l’électrifica- sertion ont déjà refusé un emploi ou une qui exigeait que le transport du fret à travers tion de la ligne (réalisée en 1915), son double- formation pour des raisons de mobilité les Alpes suisses soit reporté sur le rail ! Le ment côté italien et le percement d’un tunnel (source CGET 2016) ; bilan est positif mais Jon Pult, président de de base. En 1910-11, Domenico Regis, pro- - 84% des Franciliens sont prêts à pos- l’association pour l’Initiative des Alpes, es- fesseur à l’école des ingénieurs et architectes de tuler pour un emploi plus éloigné de leur time que beaucoup reste à faire. Turin, affirma que la ligne Culoz-Chambéry- domicile s’ils peuvent télétravailler régu- Deux ans après l’ouverture du Gothard, donc Modane-Turin était inapte techniquement et lièrement (75% pour la France entière) à partir de 2018, seuls 650 000 camions de- économiquement au transport du fret. Il pré- (enquête Régions Job). vaient traverser les Alpes Suisses chaque année. senta alors un projet précis de tunnel de base Côté employeurs : L’objectif n’est pas atteint, mais si le nombre entre Modane et Exilles, localité du val de Suse - en France, 41% des employeurs ont des camions a crû régulièrement jusqu’à 1,4 située à mi-chemin entre Oulx et Suse. Le des difficultés à pourvoir un poste pour million par an entre 1980 et 2001, il est au- projet fut soutenu par le monde économique, des raisons de mobilité (source Labora- jourd’hui inférieur à un million et ne cesse la ville de Turin et l’opinion publique, mais il toire de la mobilité inclusive). de diminuer ; plus de 70% du fret en transit n’a pas abouti à l’époque.

FNAUT infos n°274 - mai 2019 x 11 Actualité Brèves Brèves (suite) (MD) Le volant ou l’hospice ?

BIEN DIT quentes : chevreuils, blaireaux, sangliers. Dans La Croix du 16 février 2019, Gene- Récemment, un TER E est entré en collision viève Jurgensen, ancienne porte-parole Lewis Mumford : « ajouter des voies de cir- avec un dromadaire échappé d’un cirque, une de la Ligue Contre la Violence Routière culation pour faire face à la congestion du trafic chèvre s’est introduite dans un tunnel du mé- (LCVR), affirme qu’une visite médicale automobile, c’est comme desserrer sa ceinture tro parisien, et un cygne s’est invité à un arrêt des conducteurs âgés interdirait le volant pour soigner l’obésité ». du tramway de Strasbourg. à beaucoup d’entre eux et « précipiterait Michel Quidort, vice-président de la nos vieux parents dans la solitude et la FNAUT, lors d’un colloque sur le succès com- Les commerces de Madrid dépendance ». Déjà, en 2002, Mme Jur- mercial de la LGV Tours-Bordeaux : « un TGV gensen craignait de voir les personnes à un étage toutes les heures vaut mieux qu’un A Madrid, suite à la mise en place des limi- âgées « condamnées à abandonner le TGV à deux étages toutes les deux heures ». tations de la circulation automobile, les achats volant » et transformées en « piétons » Guillaume Pitron, journaliste auteur du ont augmenté de 8,6% alors que les commer- (FNAUT Infos 131). C’est admettre à tort livre La guerre des métaux rares, à propos de la çants annonçaient une baisse de 15%. Mieux - comme la ministre des Transports - que voiture électrique : « si on regarde en amont, vaut donc ne pas croire les commerçants quand le transport collectif ne peut jouer qu’un très loin de chez soi, il y a un coût écologique, ils affirment que la maîtrise de la voiture dans rôle marginal, en particulier dans les que personne ne veut voir ». les centres y tue le commerce. zones de faible densité démographique Claude Got, professeur agrégé de méde- (FNAUT Infos 270). cine : « L’instauration du 80 km/h a été décrite Les autoroutes allemandes comme une décision méprisant les intérêts Une expérience à suivre des habitants des « territoires » qui allaient Mandatée par le ministère des Transports perdre du temps sur les routes. Le contresens allemand, une commission d’experts recom- La société ILSA, filiale de la compagnie est évident : c’est à l’approche des grandes mande de limiter la vitesse sur tout le réseau aérienne privée Air Nostrum, pourrait agglomérations que les usagers perdent quoti- autoroutier à 130 km/h. Les sections sur les- exploiter, en open access, une liaison fer- diennement du temps et non dans les départe- quelles la vitesse n’est pas limitée aujourd’hui roviaire à grande vitesse entre Madrid et ments de faible densité où les voies sont libres disparaîtraient. L’objectif prioritaire n’est pas Montpellier. Des arrêts seraient marqués à et tuent le plus ». d’améliorer la sécurité routière mais de réduire Saragosse, Tarragone, Barcelone, Gerone, la consommation de pétrole, donc les émissions Figueras, Perpignan et Narbonne. La liai- Un conducteur réactif de CO2. La commission recommande égale- son pourrait ouvrir en 2020. Cette liaison ment d’augmenter les taxes sur les carburants et internationale est exploitée actuellement Alors qu’une importante coulée de neige les taxes à l’achat des grosses voitures. par la RENFE, l’opérateur historique espa- se déclenchait devant son train, le conducteur gnol, qui perdrait ainsi son monopole. d’un train de la Matterhorn-Gotthard Bahn Adaptation (Valais) a arrêté le train et annoncé d’une voix Des hackathons ? calme aux voyageurs : « je vois une avalanche Selon le 2ème plan national d’adaptation au en train de descendre, je vais lui laisser la prio- changement climatique (PNACC2), lancé fin Selon l’ancien ministre écologiste Pas- rité ». Les voies n’ayant pas été ensevelies, le 2018, la hausse du niveau des mers est de 25 cal Canfin : « il faut innover dans la produc- train a pu repartir quelques minutes plus tard. cm en moyenne depuis 1900 et elle s’accélère. Si tion des politiques publiques, et organiser les émissions de gaz à effet de serre continuent des « hackathons » (contraction de hack et Démission ? leur progression actuelle, elle pourrait atteindre marathon, processus créatif répandu dans 1 m, voire plus, en moyenne globale en 2100, le domaine de l’innovation numérique, Pierre Chasseray, délégué général de l’asso- mettant en danger les écosystèmes et les popu- qui consiste à réunir des développeurs ciation 40 millions d’automobilistes et adver- lations : à 1 m au-dessus du niveau actuel, la dans une démarche collaborative) autour saire bien connu du 80 km/h, avait promis moitié de la Camargue va être inondée. L’adap- de questions précises. Exemple : comment de démissionner de son poste si, en 2018, le tation au changement climatique consiste à développer les alternatives à la voiture in- nombre de tués sur les routes françaises était limiter les dégâts humains et économiques (ca- dividuelle fossile en zone périurbaine ? Il inférieur à celui de 2013, année où il a été le nicules, incendies, inondations, sécheresses...), s’agit de réunir tous les acteurs concernés plus faible depuis 1970 : « si ce n’est pas le cas, elle concerne en particulier les infrastructures de - start-ups, constructeurs automobiles, on revient à 90 et on arrête d’emmerder les transport : 19 800 km de routes et 2 000 km de régies de transport, élus locaux, Régions, Français ». 2018 : 3259 tués, 2013 : 3268 tués. voies ferrées seraient régulièrement inondés. Caisse des dépôts, banques... - pour trou- On attend toujours la démission annoncée. ver une solution ». Et les usagers, oubliés ? Pelliculage des TER La FNAUT suggère une formule plus Evaporation simple : organiser un voyage en Suisse ou En 2017, la Cour des comptes a dénoncé le en Allemagne, et observer sur le terrain. Selon le Seattle Times, un viaduc autoroutier pelliculage des trains TER de la Région Hauts- sur lequel transitaient 90 000 voitures par jour de-France : « 30 000 c par train, 10 Mc au to- FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information a été fermé à la circulation. Les observateurs tal ». Le président de la Région, Xavier Bertrand, Directeur de publication : Jean Sivardière Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT s’attendaient à une hausse de la congestion sur s’est alors inquiété de cette publicité gênante. Le CPPAP 0920 G 88319 - Dépôt légal n°274 - ISSN : 0983-172 X les autres autoroutes urbaines de l’agglomé- vice-président aux transports, Franck Dhersin, a Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative ration, mais cette hausse ne s’est pas produite, défendu l’idée que tous les trains soient à l’effigie Avenue de la Plage - 86240 Ligugé Abonnement papier 1 an (10 numéros) : Individuels : 19 b les 90 000 voitures se sont « évaporées » (voir des Hauts-de-France : « c’est important que les Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b d’autres exemples dans FNAUT Infos 261). gens sachent où va leur argent et que c’est la Ré- Prix au numéro : 2 b - Diffusion numérique libre gion qui a la charge des TER ». Xavier Bertrand Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT Biodiversité s’est opposé à une nouvelle dépense : « j’ai mieux de votre région, contacter notre permanence : 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris à faire avec l’argent de la Région ». Mais l’idée tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06­ Les collisions entre un véhicule de trans- n’est pas abandonnée : « nous renégocierons le e-mail : [email protected] port collectif et un animal sauvage sont fré- coût avec la SNCF ». Internet : https://www.fnaut.fr

12 x FNAUT infos n°274 - mai 2019 infos 275 juin 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Les voyageurs veulent pouvoir acheter facilement leurs billets Politique européenne des transports : L’année 2018 a été marquée, à la SNCF, droits des voyageurs et externalités par une longue grève perlée, d’avril à juin, suivie d’incidents à répétition dans les grandes gares parisiennes. Selon l’Autori- té de la Qualité de Service dans les Trans- ports (AQST), les annulations des TGV ont augmenté de 6,8 % au cours de cette année noire, un train sur 6 n’est pas arrivé à l’heure. Tous les trains sont concernés : TER, Intercités, TGV. C’est dans ce contexte calamiteux que la SNCF, dénuée de tout bon sens, a choisi Siège de la Commission Européeenne (Pixabay) d’imposer aux voyageurs une mesure idéale pour les dégoûter de prendre le train : les empêcher d’acheter leurs billets en fermant guichets et points de vente en l’absence de solution alternative, puis Michel Quidort, président de la Fédération Européenne des Voyageurs (Eu- surtaxer les billets à bord des trains (selon un barème difficilement compréhensible) ropean Passengers’ Federation : FEV-EPF) et membre du Bureau de la FNAUT, comme si tout voyageur, même de bonne présente une vue d’ensemble de la politique européenne des transports. La foi, était un fraudeur. La SNCF a ainsi dé- Charte des voyageurs signée par l’Union internationale des transports publics clenché un tollé parmi les usagers du TER. (UITP) et la Fédération européenne des voyageurs (FEV-EPF) est une traduc- Elle a ensuite cherché à imposer sa tion concrète d’une prise en compte effective du passager. Quant à la Commis- volonté aux Régions, pourtant pilotes de sion Européenne, elle a plusieurs chantiers législatifs en cours, en particulier la tarification du TER en tant qu’autorités l’élaboration d’une charte des droits des voyageurs multimodaux, utilisant organisatrices. Mais plusieurs Régions successivement plusieurs moyens de transport, et une réflexion sur l’internali- (Normandie, Grand Est, Hauts-de-France, sation des coûts externes des différents modes de transport. Centre Val-de-Loire, AuRA, Nouvelle-Aqui- taine) n’ont heureusement pas accepté ce point de vue et ont refusé toute surtaxe L’avion, l’environnement et les finances publiques dès lors que le voyageur ne peut ache- ter un billet dans sa gare de départ (cas La ministre des Transports a présen- Enfin « de nouvelles connexions aériennes d’une gare non gérée, d’un guichet fermé té, début mars, la Stratégie nationale du seront créées, le transport aérien est un outil ou, situation fréquente, d’un distributeur transport aérien (SNAT) : il s’agit « d’as- de mobilité pour les populations, l’avion reste de billets en panne) et qu’il se présente surer un développement durable du trans- pertinent pour les liaisons transversales » spontanément au contrôleur (ce qui lui port aérien français performant au niveau (surtout si elles ne sont plus assurées par le est parfois impossible...). mondial et un outil de connectivité pour train...), « la connectivité aérienne est straté- Il est grand temps que la SNCF propose nos territoires ». gique pour le désenclavement des territoires » : des alternatives, les teste, et comprenne Alors que le transport aérien est déjà lar- les lignes d’aménagement du territoire (LAT) que l’usager, qui veut prendre le train et la gement subventionné (FNAUT Infos 273), recevront une subvention supplémentaire de fait vivre, doit être respecté. le gouvernement renforce les avantages que 15 Mc. par an. Ces LAT ont leur utilité, Bruno Gazeau, président de la FNAUT z la collectivité lui accorde malgré les graves mais elles doivent s’inscrire dans un schéma dangers que l’explosion du trafic (+ 5 % par d’aménagement du territoire à définir, éviter Sommaire an) présente pour l’environnement, nui- tout doublon avec des dessertes ferroviaires et sances autour des aéroports et réchauffe- n’entraîner qu’un déficit par passager inférieur La charte européenne des voyageurs 2 ment climatique. Même soutenue par l’Etat à celui de ces dessertes. Les coûts externes des transports 3 (à hauteur de 135 Mc par an sur 5 ans), La SNAT n’envisage ni une suppression Une réouverture ratée 4 l’innovation technologique ne fera pas dis- des petits aéroports les plus lourdement défi- Les besoins des usagers et paraître ces dangers du jour au lendemain. citaires, ni une taxation du kérosène réclamée l’innovation technologique 5-7 La loi de finances 2019 prévoit par ail- par les gilets jaunes comme par la FNAUT La tarification des transports collectifs leurs que la taxe d’aéroport (TAP) dimi- et les ONG environnementalistes, autorisée urbains et régionaux 8-9 nuera de 118 Mc au profit des compagnies par la Convention de Chicago et déjà mise en Le prochain colloque de la FNAUT 11 aériennes ; leurs clients bénéficieront de œuvre dans plusieurs pays européens. La fin de l’Auto-Train 12 cette baisse de charges. Jean Sivardière z

FNAUT infos n°275 - juin 2019 x 1 Dossier Les droits des voyageurs La charte européenne des voyageurs UITP-FEV : multimodaux une charte pour une exploitation centrée sur le client Apparu en 1990, le projet de réseau transeuropéen de transport (TEN-T) S-Bahn (MD) a pour objectif la réalisation(pixabay) d’un réseau complet de routes, de lignes L’objectif de cette charte est de renforcer le dialogue entre exploitants, autorités de ferroviaires, de voies navigables et transport et clients pour améliorer la qualité de service. Elle traduit l’engagement volon- maritimes. taire des opérateurs à suivre les recommandations de la FEV : « le souci prioritaire du client est essentiel dans le développement d’un transport public de haute qualité ». Tous les modes sont concernés : le ré- La charte a vocation à être reprise et déclinée localement par des accords entre les opé- seau comprend les aéroports, les gares rateurs, les autorités de transport et les associations d’usagers. et les terminaux d’autobus et autocars correspondants. La charte rappelle dans son introduction Les arrêts et véhicules doivent être régu- En parallèle, la promotion des droits que la sécurité et la sûreté des voyageurs et lièrement nettoyés. Les installations fixes des voyageurs dans l’ensemble de des employés des entreprises doit être la hors service (ascenseurs, escaliers méca- l’Union européenne doit promouvoir première priorité. Ces derniers s’engagent niques) doivent être rapidement réparées. le développement de la mobilité des à coopérer avec les autorités concernées et Des inspections régulières doivent être citoyens européens. A cet effet, cinq à privilégier la prévention des accidents et effectuées pour vérifier le bon fonctionne- règlements modaux sur les droits des incidents. ment de la ventilation, du chauffage et de voyageurs ont à ce jour été publiés : un La charte souligne le devoir d’informer le l’éclairage des véhicules. pour chacun des quatre modes de dé- voyageur avant et pendant son trajet, en in- La charte se préoccupe de l’accessibilité placement (aérien, ferroviaire, maritime sistant sur l’information en temps réel, sur- du système de transport et de l’information et routier) et un cinquième insistant tout en cas de dysfonctionnements (pannes, la concernant. Elle reprend les obligations sur les droits des personnes à mobilité retards, causes externes), qui constitue une à remplir par les opérateurs et les autorités réduite. très forte exigence des voyageurs. organisatrices pour le déplacement des per- Après la Commission en 2011, le Par- Un soin particulier doit être apporté aux sonnes à mobilité réduite (PMR) en y in- lement européen a émis à son tour une personnes souffrant de déficiences motrices, cluant la concertation avec leurs associations résolution en faveur d’une couverture auditives ou visuelles. et l’obligation, pour les entreprises, de former des droits des voyageurs multimodaux, L’attente des voyageurs en matière le personnel en contact avec les PMR (ces ceux qui utilisent successivement diffé- d’information concerne en particulier les obligations figurent aussi dans le projet de rents modes de transport. points de vente des billets, les horaires, les refonte du règlement sur les droits des voya- La démarche a été complétée en correspondances, les tarifs et les interrup- geurs ferroviaires en discussion à Bruxelles). 2017 par une consultation publique tions de services. menée par la Commission auprès de la Cette attente peut en partie être satisfaite Des usagers respectés population pour connaitre son degré par les nouvelles technologies, mais elle ne de connaissance de ses droits et ses dispense pas les sociétés de transport de La charte retient le principe de la consul- attentes. conserver d’autres sources éprouvées (télé- tation des usagers en amont de modifica- L’idée est de sortir les droits des voya- phone, imprimés, panneaux électroniques tions de service importantes. geurs des quatre approches modales, dans les gares et points d’arrêt, personnel La gestion des réclamations et des sug- jugées réductrices, dans la mesure où disponible dans les gares et à bord des véhi- gestions émises par les clients figure dans les déplacements incluent très souvent cules) : en Europe, 30 % de la population la charte. Il s’agit en effet d’un indicateur plusieurs modes. n’a pas accès à Internet. essentiel pour connaitre au jour le jour les A noter que 98,5% des déplacements La charte réaffirme l’impératif de four- défaillances de la qualité de service afin d’y multimodaux visés par l’étude com- nir un service fiable et ponctuel, ainsi remédier. En Scandinavie, en Grande-Bre- prennent un trajet aérien. C’est pour- qu’une assistance aux voyageurs en cas de tagne, en Allemagne, la gestion des réclama- quoi l’une des toutes premières et pru- perturbations, y compris celles dues à des tions figure parmi les critères contractualisés dentes recommandations du Parlement causes externes. d’évaluation de la qualité de service. est de revoir le règlement 261/2004 sur La conclusion de la charte retient un les droits des voyageurs aériens en y in- L’UITP-Europe rassemble plus de principe de réciprocité : cluant des composantes multimodales. 400 opérateurs de transports publics - elle liste les obligations qui incombent aux L’approche politique de ce sujet com- urbains, suburbains et régionaux ainsi clients utilisant les transports publics (être en plexe reste très ouverte, en particulier que les autorités organisatrices de tous possession d’un billet valide, ne pas fumer à à cause de l’évolution rapide des tech- les Etats membres de l’UE. Elle exprime bord des véhicules, respecter le personnel...) ; nologies de l’information, avec notam- le point de vue des transporteurs de - elle reconnaît l’utilité d’assurer la repré- ment l’arrivée de plateformes digitales personnes à courte distance de tous les sentation des voyageurs dans les instances vendant des produits multimodaux. modes : bus, train suburbain et régional, responsables des transports (c’est aussi l’une L’étude conclut donc prudemment métro, tramway, navette fluviale. des revendications de la FNAUT : ce prin- qu’il est nécessaire d’observer de près La FEV rassemble des associations cipe doit figurer dans la future LOM, en l’évolution du marché au cours des pro- d’usagers et de promotion de la mobili- complément des dispositions déjà adoptées chaines années avant d’entrer dans le té durable. Elle prône l’amélioration des dans le pacte ferroviaire de juin 2018). processus législatif. transports publics urbains et régionaux Il est néanmoins clair que ces nou- ainsi que des services ferroviaires inter- Conclusion de la FEV : le transfert modal veaux droits des passagers multimo- nationaux à longue distance. Par des vers le rail, mode puissant et écologique, daux seront circonscrits aux domaines enquêtes, des rapports, des conférences suppose que les voyageurs aient intérêt de l’information et de la billetterie inté- et un travail constructif auprès des opé- à l’emprunter et ne restent pas la variable grées et dépendront de l’ouverture et rateurs et des autorités organisatrices, d’ajustement d’une législation aujourd’hui de la disponibilité des données, ainsi elle milite pour l’amélioration des droits majoritairement axée sur les intérêts des que de la coopération des diverses par- des voyageurs en Europe. opérateurs et des constructeurs. ties prenantes.

2 x FNAUT infos n°275 - juin 2019 Dossier L’internalisation des coûts externes des transports (route, rail, avion, fluvial, maritime)

Il s’agit là d’une toute première démarche préliminaire de la Commission Euro- Les coûts de la route péenne destinée à examiner dans quelle mesure et à quelle échéance – on parle de 10 à 15 ans – la législation européenne pourrait statuer sur cette question Pour le transport par route, les coûts des politiquement sensible. accidents (25 000 morts et 170 000 blessés graves sont relevés chaque année sur les routes Présente dans un premier texte de la Com- d’euros par an (soit 6,6 % du produit intérieur de l'Union Européenne) et de la congestion mission datant de 2011, l’idée de faire payer à brut de l’Union Européenne) et correspondent sont du même ordre de grandeur. chaque mode de transport, par une tarification principalement au coût des accidents (29 %), appropriée, la totalité des coûts qu’il occasionne des atteintes à l’environnement et à la santé Des coûts financés principalement a progressé depuis lors (voir l’Eurovignette). publique (35 %), et de la congestion de la circu- par la collectivité La Commission souhaite aujourd’hui aller lation routière (27 %, soit 270 milliards d’euros plus loin et dresser un état des lieux pour chiffrer à elle seule). La comparaison entre les coûts externes les effets externes de chaque mode de transport, Les coûts well-to-tank (du puits au réser- (1 000 milliards d’euros par an) et les coûts afin de définir ensuite les mesures d’internalisa- voir) (5 %) correspondent à l’impact du cycle d’infrastructure (267 milliards d’euros en tion envisageables sur la base des principes de d'extraction, de transport, de transformation 2016) d’une part, les charges et taxes payées « l’utilisateur-payeur » et du « pollueur-payeur ». et de livraison en station-service du carburant par les utilisateurs (385 milliards d’euros en C’est l’objet d’une expertise confiée par la jusqu'au réservoir du véhicule : faire le plein a 2016) d’autre part, montre que l’utilisateur, Commission à l’Université de Delft, « Multi- un coût environnemental en sus du prix payé comme le pollueur, ne paie pas la totalité des modal Sustainable Transport : which role for pour le seul carburant. Les coûts habitat da- coûts qu’il occasionne : le rapport conclut the internalisation of external costs ? ». mage (4 %) décrivent les dommages occasion- que c’est surtout le principe de la « collecti- Les résultats des études menées au cours nées aux bâtiments. Voir le graphique 1 ci-dessous. vité payeuse » qui s’applique. de la prochaine législature contribueront aux Pour le moment, seuls les utilisateurs futurs débats sur la politique des transports de Les coûts par modes du rail - voyageurs et chargeurs - payent l’Union européenne, dont l’échéance législative (presque) la totalité du coût marginal dont est de toute façon lointaine, compte tenu de la Coûts de congestion et coûts des infrastruc- ils sont responsables. complexité et de la sensibilité politique du sujet. tures non compris, la route est responsable de Les utilisateurs de la route en sont loin : Les études préciseront les coûts externes 76 % des coûts externes des transports, le trans- 100% du réseau ferré européen est soumis à imputables à chaque mode afin de pouvoir port maritime de 14 %, le transport aérien de péage, contre 1% du réseau routier seulement. établir des comparaisons et de proposer une 7 %, le rail de 3 %. Le transport fluvial a un La route ne couvre que 40 % de ses coûts ex- législation européenne qui établisse l'équité coût marginal. ternes à travers les taxes payées par ses utilisa- entre les modes. Voir le graphique 2 ci-dessous. Légende : teurs, automobilistes et transporteurs routiers. Car = voiture individuelle Des externalités ruineuses Bus/coach = bus ou autocar Les prochaines étapes MC= moto Les premières conclusions de l’étude sur la LDV (light delivery vehicle) = camionnette Les prochaines étapes des travaux comman- tarification de l’infrastructure et l’internalisa- (livraisons) dés par la Commission devraient permettre tion des externalités des transports ont été pré- HGV (heavy good vehicle) = camion d’affiner les données collectées auparavant et sentées lors d’une conférence organisée par la IWT= transport fluvial de répondre aux questions suivantes : Commission Européenne en décembre 2018. HSL (high speed lines) = LGV • dans quelle mesure les recettes des L’étude s’est attachée dans un premier Par voyageur.km, les coûts externes sont charges d’infrastructure couvrent-elles les temps à comparer les coûts externes et les d’environ 8 centimes (voiture hors conges- dépenses liées aux coûts externes ? coûts d’infrastructure des différents modes de tion), 3 (bus ou car), 24 (moto), 3 (train) et • qui supporte réellement ces coûts ? transport (routier, ferroviaire, fluvial, aérien, 3,5 (avion). • quelles sont les possibilités de recou- maritime) avec les charges et taxes payées Par tonne.km, les coûts sont d’environ vrement des coûts externes non couverts par les divers utilisateurs dans les 28 pays de 3,5 centimes (camion), 1,3 (train), 2,0 (fluvial) actuellement ? l’Union Européenne en 2016. et 0,6 (maritime). Si on compte les coûts de la • enfin quels sont les instruments d’inter- Les chiffres sont impressionnants. Les exter- congestion routière, la route est responsable de nalisation utilisés dans les pays qui s’efforcent nalités négatives sont évaluées à 1 000 milliards 83 % des coûts externes des transports. de mettre en place une mobilité durable ?

FNAUT infos n°275 - juin 2019 x 3 Dossier Belfort-Delle-Bienne : une réouverture ratée, un gâchis

- des navettes Belfort-gare TGV (7 dans un sens, 10 dans l’autre) sont supprimées pendant les vacances scolaires ; - les délais de correspondance TER-TGV sont souvent dissuasifs ; - détail révélateur : la gare TGV s’appelle Belfort-Montbéliard TGV sur la LGV et Meroux sur la ligne TER... Une interdiction aberrante

Principal défaut de la desserte : une corres- pondance est imposée, à la gare de Meroux, entre un TER français et un train suisse, mal- gré les protestations répétées des travailleurs frontaliers, des usagers du TGV et des élus locaux français (Belfort) et suisses (Bienne). Aucun train suisse n’est actuellement au- torisé par la Région Bourgogne-Franche- Comté à circuler, sur 7,4 km, entre la gare TGV et Belfort ! (jura.ch) Or les Suisses veulent aller à Belfort facile- ment, pour y faire des achats, s’y distraire ou y La FNAUT et ses associations ont longtemps réclamé la réouverture de la ligne trans- prendre un train français. frontalière à voie unique Belfort-Delle-Bienne, fermée au trafic voyageurs en 1992 sur son La desserte a été conçue pour limiter les parcours français (FNAUT Infos 231) et rouverte à l’initiative des Francs-Comtois et surtout coûts d’exploitation (on en est loin...), au des Suisses, intéressés par un accès au TGV Rhin-Rhône depuis Belfort et le canton du Jura. détriment des recettes. En définitive, la situation de la ligne est Un coût très exagéré Un échec commercial ubuesque, mais elle perdure. Alors que la réouverture de Belfort-Delle La réouverture devait intervenir initiale- On pouvait donc espérer que la ligne atti- pourrait être un bon exemple national, veut- ment en 2011, dès la mise en service de la rerait de nombreux voyageurs (entre 3 000 et on démontrer que les réouvertures de lignes LGV Rhin-Rhône, mais elle n’a été effec- 7 000 par jour selon des estimations effectuées sont vouées à l’échec, et donner raison au rap- tive que fin 2018 car le bouclage financier a en 2007). Mais elle est « quasi-déserte » (se- port Spinetta selon lequel le train n’est plus été complexe et laborieux. lon l’Est Républicain), la fréquentation n’est pertinent sur les petites lignes, même si elles Les 110 Mc nécessaires (un coût très que d’environ 200 voyageurs par jour (trafic donnent accès au TGV ? exagéré pour la rénovation et l’électri- français) et 200 de la Suisse vers le TGV. Le risque de régression est évident : on fini- fication en 25 kV de seulement 22 km Cet échec commercial cinglant s’explique ra par supprimer, pour faire des économies de d’infrastructure à voie unique) ont été pris aisément par une accumulation affligeante bouts de chandelles, quelques services parmi en charge principalement par la Région d’erreurs de conception et d’exploitation de les plus mal fréquentés, et on accroîtra ainsi le Bourgogne-Franche-Comté (40 %), l’Etat la ligne : manque d’attractivité de la ligne. français (21 %) et la Confédération suisse - la vitesse moyenne est faible, la durée (22,5 %), le reste l’étant par SNCF Ré- du trajet Belfort-Delle (22 km) varie de 26 Un parcours du combattant seau, Bruxelles, la République et canton à 36 min ; du Jura, le Territoire de Belfort, le Grand - les localités de Grandvillars et Delle, éti- La SNCF a supprimé les TGV directs de Belfort et la communauté de communes rées le long de la ligne, ne sont desservies que Nancy vers le sud. Or il n’existe que 4 AR Epi- du Sud Territoire... par un seul arrêt, de même que Belfort, des- nal/Belfort par jour, et aucun de ces TER n’a servie uniquement par sa gare située au sud ; été prolongé jusqu’à Meroux. Pour prendre Des objectifs multiples - les horaires sont inadaptés aux besoins le TGV pour Montpellier à 10h22, il faut partir des usagers (travailleurs frontaliers, scolaires, à 6h27 d’Épinal (50 min d’attente à Belfort, La ligne rétablit une liaison entre la voyageurs TGV) ; un creux de 4h est observé puis 1h25 à Meroux). Pour prendre le TGV France et la Suisse. Connectée, côté Suisse, le matin et un autre de 1h20 en fin d’après- pour Marseille à 15h19, il faut partir à 9h59 à un réseau de transport public remarqua- midi ; les tarifs sont prohibitifs pour les trajets (35 min d’attente à Belfort, puis 3h à Meroux) : blement maillé, elle facilite les échanges transfrontaliers ; si on prend le train suivant, il n’y a que 4 min entre les deux pays. Elle offre une desserte - l’information des voyageurs est déficiente de correspondance à Belfort pour Meroux, moderne à plusieurs localités du sud-est du (fiches horaires, dépliants) ; on ne peut donc espérer attraper le TGV de territoire de Belfort. - l’organisation des transports scolaires est 17h34 pour Marseille, il faut alors attendre 1h Elle relie surtout, et c’est ce qui mo- à repenser, le train pouvant assurer une plus la navette pour Meroux puis 2h le TGV pour tivé sa réouverture, de manière intelli- grande part de leurs trajets ; Lyon, ou Marseille les vendredis et samedis... gente et facile pour le voyageur, Belfort et - rien n’a été fait pour favoriser les rabat- Au retour, le TGV venant de Montpellier fait les villes suisses de Delémont et Bienne tements en vélo sur les gares (FNAUT Infos arriver à 11h11 à Belfort après emprunt de (50 000 habitants) à la gare TGV située 254) afin d’élargir leur zone de chalandise par la navette depuis Meroux, mais le TER pour sur la LGV. Un exemple à suivre en Lor- des garages sécurisés (à Lunéville, la munici- Epinal est parti à 11h05, le TER suivant est à raine, où la construction de la gare TGV- palité offre même des vélos aux scolaires qui 17h05. Les voyageurs venant de Marseille TER de Vandières se fait attendre de ma- résident à moins de 3 km d’une gare). arrivent à Belfort à 13h29 et 15h11, eux aussi nière incompréhensible (FNAUT Infos L’accès au TGV a reçu la priorité sur les doivent attendre longtemps. 234, 238, 241). relations Belfort-Suisse. Et pourtant : Béatrix Létoffé, ADELE-S Epinal z

4 x FNAUT infos n°275 - juin 2019 Dossier L’innovation technologique et les besoins des usagers et de la collectivité

(edgylabs.com)

Nous présentons un panorama des réflexions de la FNAUT sur l’innovation tech- ville, s’est dit favorable à l’expérimentation de nologique dans le secteur des transports. Il faut penser aux besoins non satisfaits cette voiture volante entre l’héliport d’Issy- des usagers et de la collectivité (environnement, aménagement du territoire) avant les-Moulineaux et Paris-CDG. La maire de d’envisager des « innovations ». Paris s’était enthousiasmée auparavant pour l’hydroptère (Bubble). Les besoins des usagers l Elles ne sont pas compatibles avec le sys- Le motoriste Rolls-Royce expérimente un tème actuel de transport. avion à décollage vertical, EVTOL, et une va- Malgré les progrès réalisés ces dernières an- l Les « start-ups innovantes » affirment que riante urbaine électrique (FNAUT Infos 267). nées, les usagers des transports se heurtent à de les nouveautés seraient moins coûteuses que les Citons encore Link&Fly, train-avion nombreuses difficultés, ignorées des décideurs. techniques existantes, mais les coûts annoncés imaginé par le cabinet français Akka : sa - les transports collectifs sont saturés dans sont irréalistes. carlingue se détacherait à l’atterrissage et les zones denses et défaillants dans les zones l Elles tendent à disqualifier, à ringardiser poursuvrait son voyage sur rail ou sur route, périurbaines et rurales ; les techniques existantes, qui, bien que sou- supprimant ainsi une rupture de charge - l’intermodalité est déficiente (information, vent inventées il y a plus d’un siècle, restent (FNAUT Infos 267). billettique, correspondances) ; d’actualité. Revenons aux transports terrestres. L’infini- - les tarifs sont trop élevés pour une par- Que les ingénieurs cherchent à innover, c’est train (FNAUT Infos 274) est un métro « cir- tie des usagers (ménages précaires, jeunes, leur rôle : on n’en est plus, heureusement, à culaire » imaginé par des étudiants de Paris- chômeurs, familles) ; l’époque des locomotives à vapeur. Mais les po- Tech, qui fonctionnerait en permanence sur - la vitesse reste un élément d’attractivité ; litiques, toujours désireux de « faire moderne » une boucle. Une solution innovante combinant mais l’exigence des voyageurs porte surtout pour se valoriser auprès de leurs électeurs, se 4 tapis roulants a été inventée pour permettre sur la fréquence des services. Les compagnies laissent fasciner et berner par les industriels à la les montées et descentes. Les étudiants ont aériennes à bas coûts l’ont bien compris (avions recherche de fonds publics. obtenu le Grand Prix de l’ingénierie du futur : de faible capacité, fréquences élevées). Nous distinguerons les innovations qui le jury avait oublié que le tapis roulant accéléré ne répondent à aucun besoin réel, à aucune de la gare Montparnasse a été un fiasco. La FNAUT et les innovations demande des voyageurs, des techniciens ou Le tramway sur pneus a été lui aussi un des défenseurs de l’environnement, et les fiasco technique retentissant (FNAUT Infos Pour la FNAUT, l’innovation doit viser la innovations qui ont un créneau de perti- 265). Son créneau de pertinence est quasi- qualité de service et la protection de l’environ- nence mais sont souvent utilisées en dehors inexistant (implantation dans un centre an- nement donc le report modal. Avec ce critère, de ce créneau. cien avec des rues étroites et nécessitant des elle a soutenu les innovations « incrémen- courbes de très faible rayon) et n’a jamais été tales » consistant à optimiser l’existant (tram- L’innovation pour le plaisir, exploité : suscitant des polémiques stériles, le way moderne et à plancher bas, aménagements le concours Lépine tramway sur pneus n’a servi qu’à retarder le piétons et cyclables, couloirs bus, TGV, vélo et retour du tramway classique. trottinette à assistance électrique, autopartage Exemple typique d’innovation inutile et Le bus à guidage magnétique (Phileas ex- en boucle, tram-train, transport combiné, au- aventureuse : Hyperloop, qui ne fait que périmenté sans succès à Eindhoven et retenu toroute ferroviaire, alimentation du tramway reprendre l’idée du Swissmetro, et dont l’uti- imprudemment à Douai) a été un autre fiasco par le sol, métro automatique). lité n’est pas plus démontrée que celle du qui a coûté cher au contribuable. Finalement, Elle s’est, par contre, toujours méfiée des Concorde ou du Maglev (FNAUT Infos 259, c’est un bus ordinaire qui est utilisé à Douai. innovations plus radicales, non par conserva- 262, 267, 274). Parmi les liaisons envisagées, Les navettes aériennes envisagées pour tisme mais parce qu’elles servaient surtout à Marseille-Marignane : un trajet en 72 se- desservir l’aéroport de Lille-Lesquin consti- détourner l’attention des problèmes de fond condes, le président LR de la Région PACA, tuent une autre diversion. Une fois de plus, un (en particulier la place de la voiture en ville) Renaud Muselier, s’y intéresse. système « révolutionnaire » est mis en avant et à retarder la mise en œuvre des techniques D’autres rêveurs veulent ressusci- et risque de retarder la mise en place d’une traditionnelles, aux coûts bien connus, à la ter l’aérotrain sous le nom de Spacetrain solution éprouvée. fiabilité assurée et pouvant provoquer des (FNAUT Infos 267) pour concurrencer le Le Supraways (FNAUT Infos 273) a été reports modaux significatifs. TGV sur les distances moyennes. L’Aéro- présenté par un journaliste comme « une sorte train a pourtant été éliminé autrefois au profit de tramway suspendu, un mélange de téléphé- Les mirages technologiques du TGV : trop forte consommation d’énergie, rique et d’aérotrain » qui coûtera, selon son pro- incompatibilité avec le réseau ferré, inaptitude moteur, « 3 fois moins cher que le tramway » et Les innovations présentent de nombreuses à pénétrer dans le cœur des villes, complexité « résoudrait le problème du dernier km ». On se caractéristiques communes. des aiguillages, faible capacité (il s’agissait en demande comment... l Souvent, elles reprennent des idées an- fait d’un aéro-autorail). Sky Train (FNAUT Infos 262) est un train ciennes sous un nom anglicisé. Le constructeur américain Boom veut suspendu électrique proposé par la compagnie l Elles sont présentées comme des solutions- refaire le Concorde (FNAUT Infos 267), en chinoise Zhongtang pour réduire les embou- miracles pour les usagers et la collectivité (pol- mieux. Son avion XB-1, « premier avion de teillages (mais elle oublie que cet engin aérien lution, énergie, environnement) alors qu’elles ligne supersonique économiquement viable au laisse la voirie libre aux voitures). sont conçues sans référence à leurs besoins. monde », pourra transporter 50 passagers à la Produit par le géant chinois CRRC, l Leur mise en œuvre est toujours annon- vitesse de Mach 2.2 (2 700 km/h). l’ARRT (Autonomous Rail Rapid Transit) cée à court terme ; mais les délais annoncés Pendant ce temps, Boeing étudie un avion- est un tramway sur pneus à guidage optique, sont fantaisistes, un prototype ne devient pas taxi (FNAUT Infos 274). Jean-Louis Mis- autonome, à traction hybride. Ce qui permet, en un jour un engin fiable, sûr et commercia- sika, adjoint à la maire de Paris, qui combat paraît-il, de créer un réseau de transport urbain lisable à un coût acceptable. l’omniprésence de la voiture au sol dans la à un prix dérisoire (FNAUT Infos 274).

FNAUT infos n°275 - juin 2019 x 5 Actualité L’innovation mal utilisée, Brèves Un exemple suisse hors de son créneau de pertinence d’innovation politique

Certaines innovations peuvent présenter un intérêt dans des créneaux particuliers, Le Parlement genevois a décidé, début mais ne sont pas utilisées uniquement dans ces créneaux. avril, de ne pas attribuer 122 M FS à la réalisation de deux nouvelles routes can- La FNAUT et ses associations locales sans justification sérieuse. La FNAUT tonales (L1 et L2) et d’un échangeur auto- ont souvent dû s’opposer aux innovations critique, non son principe, mais son utili- routier (Lancy-sud). (FNAUT Infos 273) poussées par des élus sation prématurée : Une coalition associative a salué cette pour retarder la réintroduction du tram- - l’enjeu des « petites lignes » n’est pas décision : « la préservation de la nature way, alors estimée impossible. le matériel roulant mais d’abord la dégra- et de la qualité de vie l’a emporté sur une Le retour du tramway à Grenoble a été dation des infrastructures et leur abandon vision passéiste de la mobilité ». La coali- retardé par le Poma 2000 : la municipa- par SNCF Réseau (ralentissements), et la tion souhaite une relance des transports lité, séduite par son « modernisme », cher- politique décliniste de SNCF Mobilités publics, notamment la réalisation du bar- chait dans les années 1970 à l’imposer sans (offre squelettique) ; reau sud ferroviaire qui relierait Genève à même connaître ses coûts. Ce système, aé- - le train à hydrogène est présenté Saint-Julien-en-Genevois. rien comme beaucoup d’autres inventions, comme alternative à l’électrification des ne remettait pas en cause la place de la voi- lignes TER, mais une telle électrification Déplacements en zone rurale ture en ville. Une fois mis au point, dix ans est-elle prioritaire ? Le rail n’est respon- plus tard, il a été introduit en 1989 à Laon, sable que de 2,7 % des émissions de parti- Les difficultés de déplacements s’accu- une ville à deux niveaux où ce « funicu- cules fines par les transports ; c’est la lutte mulent dans les zones rurales : les trains laire » était par contre bien adapté, et où contre la pollution routière par report mo- TER et Intercités sont ralentis à 60 km/h il a été supprimé à tort en 2016 : le Poma dal qui est urgente ; voire moins, les lignes ferroviaires comme 2000 avait un créneau, contrairement au - on ne peut affirmer que « le train à hy- Angoulême-Limoges se dégradent et fi- tramway sur pneus. drogène n’émet que de la vapeur d’eau » : nissent par disparaître, les cars Macron ne La mise au point du minimétro VAL tout dépend du mode de fabrication de desservent pas les petites villes, la quasi- a permis l’automatisation ultérieure de l’hydrogène utilisé ; disparition du fret ferroviaire renforce le la ligne D du métro de Lyon puis, deux - le train à hydrogène doit être équipé de trafic de camions. Seuls des cars très lents, ans plus tard, de la ligne 14 du métro de puissantes batteries, dont la fabrication est le covoiturage et de nouvelles routes sont Paris : la FNAUT ne s’est jamais opposée très polluante, pour pouvoir circuler sur les proposés par les élus - qui n’utilisent que à l’automatisation des TCSP. Cependant petites lignes françaises de montagne ; très rarement les transports publics - pour le VAL a été adopté à Lille, Toulouse et - le train à hydrogène a éliminé l‘élec- remplacer le train. Rennes sans comparaison entre l’impact trification de la ligne Auxerre – Laroche- Mais la population rurale, peu motori- d’une ligne de VAL et celui de 3 ou 4 Migennes (20 km). sée, a besoin de service public pour lutter lignes de tramway de même coût. Son ex- La mode est aussi au bus électrique. contre la désertification de son territoire périmentation in situ a fortement pénalisé deux fois plus coûteux qu’un bus stan- et redonner vie aux centres des bourgs les usagers lillois en raison de nombreuses dard. Sa généralisation réduira le finan- et petites villes. Elle réclame un transport pannes : ces systèmes nouveaux doivent cement de l’offre et limitera le report collectif de proximité de bonne qualité, être expérimentés sur des sites fermés modal. Mais aucun bilan écologique de sans vernis de modernisme, fiable, acces- (parcs d’expositions). D’autre part, le VAL l’opération n’a été fait. sible à tous, y compris aux personnes han- circule en tunnel comme un métro, sans Le bus à hydrogène est une autre illu- dicapées, et abordable financièrement. prendre de l’espace public à la voiture. sion. Selon le maire de Grand-Bourg- Henriette Trimoulinard, FNAUT P.-Charentes z Le BHNS est très utile dès lors qu’on théroulde (Eure), où Emmanuel Macron ne cherche pas à l’implanter à la place a rencontré 600 maires, « nous sommes Appel à projets innovants du tramway (FNAUT Infos 265) : il est isolés, il n’y a pas de transport collectif adapté aux axes de trafic potentiel modéré. pour aller à Rouen où travaillent la plu- L’ADEME vient de lancer un appel à Mais son site propre est souvent impar- part des habitants ». Réponse du chef de projets intitulé pompeusement « accé- fait : souvent les élus appellent BHNS un l’Etat : « une solution existe, c’est le bus lération du développement des écosys- bus un peu amélioré mais peu performant. à hydrogène ». Aujourd’hui on ne peut tèmes d’innovation performants dans le D’autre part, le vrai BHNS est aussi coû- rien faire faute de technologie disponible, cadre des investissements d’avenir ». teux, à long terme, que le tramway, il attire mais demain ce sera possible grâce au Les projets doivent « relever de la mo- bien moins les automobilistes que le tram- nouveau bus... bilité durable, concourir aux objectifs de way, et sa capacité est souvent insuffisante. La voiture électrique convient aux la future Loi d’Orientation des Mobilités Le téléphérique urbain (FNAUT Infos flottes urbaines mais déplace la pollu- (LOM) et permettre d’améliorer les mobili- 251 a un créneau de pertinence bien précis tion vers la production des batteries et de tés du quotidien pour tous les citoyens et dans lequel il est indispensable : la desserte l’électricité et est aussi encombrante que sur tous les territoires grâce à de solutions des villes à deux niveaux (en concurrence la voiture thermique. Les primes accor- de transports plus propres, plus efficaces avec le funiculaire et le train à crémaillère) dées par l’Etat aux acheteurs sont rui- et plus accessibles ». et le franchissement d’obstacles linéaires, neuses, les collectivités doivent payer les Suggestion de la FNAUT : créer, dans un naturels ou artificiels. La FNAUT s’op- bornes de recharge. département rural, un réseau d’autocars pose par contre à ceux qui veulent l’im- Le véhicule autonome (FNAUT Infos sur le modèle du Bregenzerwald (FNAUT planter à la place du tramway ou pour ren- 256) a lui aussi un créneau, comme com- Infos 270). Succès assuré si l’offre est bien forcer une image de ville moderne alors plément du transport collectif, mais non adaptée aux besoins ! En clair : on peut que l’extension du réseau de tramway est comme véhicule individuel ou, c’est l’objec- oublier « les véhicules automatisés et plus urgente (Grenoble). tif du Taxirail, comme remplaçant du TER connectés, la mobilité intelligente, l’amé- Les élus se sont entichés du train à hy- sur les petites lignes après transformation lioration de la fiabilité des transports par drogène dès sa mise en service en Alle- de leur emprise en voies routières : la popu- câble et l’écoconception des infrastruc- magne (FNAUT Infos 267, 272), mais lation rurale réclame de vrais trains… tures routières ».

6 x FNAUT infos n°275 - juin 2019 Actualité La vraie innovation

libre service favorise au contraire l’usage du véhicule individuel (FNAUT Infos 219) ; - la réduction de la vitesse autori- sée sur les voiries (120-100-80 km/h, comme en Suisse où ces vitesses maxi- males sont approuvées par l’Automobile- Club) pour améliorer la sécurité routière et réduire la consommation d’énergie et la pollution de l’air (FNAUT Infos 262, 266, 273, 274) ; - la fermeture de petites routes com- munales ou départementales très peu Téléphérique de Brest (wikipedia) utilisées (dans deux villages de l’Oise, le maire a fermé une petite route, emprun- Pour la FNAUT, l’innovation au service des usagers et l’innovation politique tée par une centaine de véhicules par jour facilitant l’usage des modes respectueux de l’environnement doivent être mais d’entretien trop coûteux pour la développées prioritairement. commune, FNAUT Infos 272) ; - la baisse de 10 % à 5,5 % du taux La FNAUT est évidemment favorable - la réduction des coûts ferroviaires de la TVA appliquée au transport pu- à l’innovation technologique, mais à la (rénovation, entretien et exploitation blic de proximité (ce taux varie de 3 % condition : économiques des petites lignes) ; à moins de 10 % dans dix pays euro- - qu’elle parte des besoins à satisfaire - l’accélération des trains par des péens : Allemagne, Belgique, Pays-Bas, et non de la technique (la FNAUT s’est mesures d’exploitation (réduction des Pologne, Portugal, Suède ; il est même opposée au projet d’appel à projets de té- marges et autres mesures proposées par de 0 % au Danemark, en Irlande et au léphériques urbains avancé sans suite par Gérard Mathieu, FNAUT Infos 258) ; Royaume-Uni) ; Ségolène Royal après l’ouverture du télé- - la coordination entre train et autres - l’instauration de la redevance rou- phérique de Brest - voir photo ci-dessus, modes (rabattement systématique des tière kilométrique (ou « écotaxe », aban- FNAUT Infos 251) ; voyageurs sur les gares ferroviaires par donnée en France mais mise en œuvre - qu’elle ne retarde pas ou ne bloque autocar, minicar, vélo et VAE, marche, dans de nombreux pays européens pour pas l’adoption ou le développement des trottinettes, navettes autonomes) les camions : Suisse, Allemagne, Au- techniques à l’efficacité garantie ; (FNAUT Infos 254). triche, Belgique, Pays-Bas, Grande-Bre- - et qu’elle ne soit utilisée qu’une fois Enfin il est nécessaire de développer tagne, République tchèque, Slovaquie, bien au point, et seulement dans son cré- l’innovation politique et fiscale favo- Pologne, Danemark, Suède, Portugal… neau de pertinence technique. risant l’attractivité du transport public à imposer aussi aux autocaristes et aux La FNAUT s’inquiète de la recru- terrestre et la protection de l’environ- automobilistes) ; la redevance routière descence actuelle des innovations tech- nement, par exemple : dite RPLP a été introduite en Suisse en niques, dont la mode détourne l’attention - la multiplication des couloirs de 2000 et depuis cette date, le nombre de des vrais enjeux en suscitant des polé- circulation réservés aux bus et des camions transitant à travers la Suisse a miques stériles. priorités aux carrefours dès que les bus diminué de 33 % ; Elle considère que les techniques dis- sont ralentis par la congestion routière - le péage urbain (comme à Londres, ponibles, en particulier la technique fer- (toutes les lignes de bus ont vocation à Stockholm, Milan et dans plusieurs villes roviaire (sûre, rapide, de grande capacité, devenir des BHNS) ; de Norvège) ; les modalités possibles peu énergivore), sont satisfaisantes même - l’aide à l’achat de vélos VAE (le VAE du péage urbain doivent faire l’objet de si des progrès sont encore nécessaires en double la distance de rabattement sur les comparaisons approfondies et être rapi- ce qui concerne le bruit, la pollution de gares, il est adapté par son faible coût à dement expérimentées (mais l’article l’air, la consommation d’énergie et les un large public) ; correspondant de la LOM a été retiré, émissions de gaz à effet de serre, la qua- - la tarification solidaire des trans- FNAUT Infos 274) ; lité de service. ports de proximité (la gratuité pour - la taxation du transport aérien inté- La simplification de l’usage du trans- tous, inutile et très coûteuse, conduit à rieur (taxe sur le billet d’avion ou ins- port collectif doit progresser : la paupérisation du transport collectif, tauration de la TICPE sur le kérosène, - la billetique intermodale numérique FNAUT Infos 268) ; le critère du quo- comme en Suède, en Allemagne, aux (mais une alternative doit rester offerte tient familial est-il le mieux adapté à la Pays-bas, en Suisse, et même aux Etats- aux voyageurs dépourvus de smartphone tarification solidaire ? Unis, au Brésil et au Japon) dès que ou de carte bancaire) ; - l’expérimentation d’une baisse des l’avion est en concurrence frontale avec le - l’intégration tarifaire de tous les tarifs du train suivant l’exemple de la train, afin de limiter les émissions de gaz modes (transport urbain, TER, vélo...) ; RENFE, la « SNCF espagnole » : une ré- à effet de serre et d’établir des conditions - l’information des usagers et voyageurs duction générale du prix du billet de 10 % de concurrence train-avion plus équi- en situation perturbée. a été compensée par le gain de clientèle tables (FNAUT Infos 266, 273). L’innovation doit porter aussi sur l’op- (FNAUT Infos 241) ; timisation des performances et la ré- - la commercialisation du train (son Le retard français dans le domaine duction des coûts du transport collectif, concurrent est d’abord la voiture) ; de l’innovation politique et fiscale est ossature du système de mobilité : - le développement massif de l’auto- particulièrement criant : l’innovation - les Services d’Aide à l’Exploitation partage traditionnel, en boucle : l’auto- ne doit pas viser le sensationnel, elle (SAE) des transports urbains ; partage en boucle incite les citadins à se peut être « modeste » et consister à - la robustesse des circulations ferro- démotoriser, donc à libérer de l’espace copier ce qui fonctionne bien chez nos viaires (FNAUT Infos 259) ; public de stationnement ; la voiture en voisins européens...

FNAUT infos n°275 - juin 2019 x 7 Actualité

La gratuité des transports : études et débats

Bus gratuit de Dunkerque (wikipedia)

En Ile-de-France La promesse écologiste n’a pu être tenue. A Poitiers (191 000 habitants) Cependant le Conseil municipal de Gre- Un comité de sept membres dont Marc noble vient de demander au SMTC de Le groupe Osons Poitiers (EELV, PG) a Pélissier, président de la Fnaut Ile-de-France, « poursuivre les études pour une gratuité solennellement demandé qu’une « étude de a été chargé par la Région d’évaluer la proposi- partielle » et le SMTC a commandé une faisabilité et une consultation de la popula- tion d’Anne Hidalgo, maire de Paris : instaurer étude pour déterminer la faisabilité de la tion » soient diligentées. la gratuité des transports. gratuité et les publics cibles. Mais le projet Cependant l’exécutif dirigé par Alain Le comité a jugé la gratuité totale « non de PDU du SMTC ne cite pas la gratuité Claeys (PS) s’oppose à la gratuité. souhaitable » : le budget annuel des trans- (le versement transport est au taux maxi- Selon Anne Gérard, vice-présidente aux ports franciliens est proche de 10 Mdc et mum). Le SMTC, en janvier 2014, a créé Transports de la Communauté urbaine : « les 28 %, soit environ 3 Mc, proviennent des une zone tarifaire unique suite à l’extension situations de Poitiers et Dunkerque sont dif- recettes voyageurs. du périmètre de la Métropole. Selon le co- férentes. Dunkerque a le double de notre bud- Le comité constate au contraire qu’une mité local pro-gratuité, « il faut soustraire get et la part de la billettique dans les recettes hausse importante des recettes sera nécessaire le transport de la sphère marchande pour représentait moins de 10%. Ici, c’est 5,5 Mc d’ici 2025, y compris en provenance des usa- en faire un service public ; il est légitime de sur un budget de 25 Mc. La gratuité ne nous gers. Il suggère un « rezonage » des prix de la faire payer les entreprises ». ferait économiser que 350 000 c. La gratuité carte Navigo, voire l’instauration d’une tarifi- reviendrait à augmenter les impôts sur les cation « à l’usage » (les usagers paieraient en A Dunkerque contribuables et les entreprises. Tout l’inverse fonction des distances parcourues et/ou du de ce que veulent les Gilets jaunes ! Mieux moment du voyage dans la journée). Avant la gratuité, la part modale du bus vaut la tarification solidaire, qui permet à Un autre rapport, commandé par la maire de était de 4,7 %, celle de la voiture de 66 %, chacun de payer à la hauteur de ses moyens. Paris, conclut dans le même sens : la gratuité le taux de couverture des dépenses de fonc- Le coût du transport public n’est pas le frein n’est pas viable à Paris. tionnement par les recettes de 10 %. principal au report modal. L’exigence princi- La gratuité n’a entraîné aucune hausse pale des clients porte sur la qualité de service : À Amiens des incivilités, les actes de délinquance sont simplicité d’usage, fréquence. Et pour déve- moins nombreux. Selon le maire, « des lopper un réseau, il faut des moyens ». La maire UDI Brigitte Fouré avait promis seniors font des tours en bus, c’est for- la gratuité partielle ou totale pendant sa cam- midable », et la gratuité ne va coûter que Au Luxembourg (600 000 habitants) pagne en 2014 mais n’en parle plus. Amiens 4,5 Mc/an, le montant de la contribution Métropole estime que le manque à gagner se- des usagers auparavant. Les transports publics sont déjà gratuits rait de 6 à 8 Mc par an et qu’il faut au contraire Cette évaluation est contestable : le vrai pour les jeunes de moins de 20 ans, les étu- augmenter les tarifs (l’agglomération électri- coût de la gratuité est le montant des recettes diants de moins de 25 ans, les personnes à fie son réseau de bus à grands frais et refuse qui auraient été enregistrées si l’amélioration faible revenu ou invalides. d’augmenter les impôts). La gratuité pour les de l’offre intervenue en même temps que En 2016, plus de 100 millions de voyageurs seniors a été supprimée au profit de réductions l’instauration de la gratuité était intervenue ont emprunté les transports publics dans ce indexées sur le quotient familial. seule, et si les 4,5 Mc avaient été consacrés à petit pays prospère. Pour Thomas Hutin, conseiller munici- une amélioration plus forte de l’offre. Le Luxembourg absorbe quotidienne- pal écologiste, les 6 Mc de recettes annuelles L’amélioration de l’offre est notable : ment 190 000 travailleurs des pays voisins, sont « une goutte d’eau par rapport au budget achat de 40 bus, modification du tracé de dont la moitié en provenance de France. Le d’investissement de 50 Mc de la Métropole ». certaines lignes, mise en site propre par- problème de la circulation est un défi majeur Il propose de tester la gratuité les mercredis et tielle de 5 lignes. pour le pays. samedis pour relancer l’activité commerciale Selon le maire, « le seul problème posé Le gouvernement de coalition du Premier du centre-ville. par la gratuité est son coût » : le seul non, ministre libéral Xavier Bettel a donc annoncé mais il est fondamental, car le risque de que les transports publics seront gratuits sur A Clermont-Ferrand paupérisation du transport public est sé- le territoire du Grand-Duché, les frontaliers rieux. Le maire reconnaît que la gratuité bénéficieront de tarifs réduits. Selon le mi- La métropole a lancé une étude de la gratui- n’est pas adaptée à toutes les villes, « le coût nistère de la mobilité et des travaux publics, té. Les usagers contribuent à 10 % du coût total pouvant être largement supérieur aux béné- l’écologiste François Bausch, le coût d’exploi- des transports, soit 15 Mc sur un budget glo- fices attendus ». tation des transports publics est de 491 Mc bal de 142 Mc en 2017. Selon Cyril Cineux, par an, la vente des billets et abonnements ne adjoint PCF aux transports de Clermont : « on A Calais (100 000 habitants) rapportant que 40 Mc (8 %). La gratuité sera peut financer la moitié du coût de la gratuité financée en partie par une réforme, moins en passant le taux du versement-transport de En réponse à la hausse des carburants, la avantageuse pour les automobilistes, des 1,8 % à 2 % ». François Rage, vice-président maire LR Natacha Bouchart veut établir la frais kilométriques déductibles des impôts. (PS) chargé des mobilités, réplique : « la tari- gratuité. La perte de billetterie serait com- Selon le principal syndicat des transports, « la fication solidaire est déjà à moins de 4 c par pensée par le versement transport. Selon le gratuité ne pourra compenser le manque de mois pour les plus faibles revenus ». site Carfree, favorable à la gratuité, « certains trains, les retards et les surcharges ». travaux du futur transport en site propre A Grenoble seraient reportés ». Valérie Lacroute, députée LR de Seine-et-Marne, a déposé un amen- Les élus écologistes avaient promis, avant Plusieurs autres agglomérations fran- dement à la loi LOM destiné à « sanc- leur élection, la gratuité pour les 18-25 ans çaises envisagent d’instaurer la gratuité tuariser le versement transport des et les usagers les plus précaires, pour un coût de leurs transports urbains : c’est le cas de entreprises, non pour introduire la gra- évalué à 3,6 Mc (un conseiller municipal LR Dinan (99 000 habitants) et Saint-Brieuc tuité mais pour développer les offres proposait, lui, la gratuité... au centre-ville). (116 000 habitants). de transport collectif ».

8 x FNAUT infos n°275 - juin 2019 Actualité Accès au transport collectif et tarification : un état des lieux

Si la majorité des automobilistes privilégie la voiture pour sa facilité d’usage et son Les trajets à longue distance confort malgré son coût élevé, de nombreux ménages modestes n’ont pas de voiture ou en restreignent l’usage, et accèdent difficilement au transport public. Pour les trajets à longue distance, les tarifications sociales existantes ne sont Le mouvement des gilets jaunes a mis en fois ciblées vers des quartiers populaires (ate- plus adaptées aux besoins. Le billet congé relief le coût des déplacements dans les zones liers d’insertion vélo, apprentissage du vélo). payé ne concerne que les salariés et date périurbaines et rurales. La marche et l’usage de l’époque où l’on partait une fois par an du vélo restent très peu utilisés malgré l’émer- Les tarifs régionaux « aux grandes vacances ». gence rapide du vélo à assistance électrique La carte famille nombreuse ne touche (VAE). Le covoiturage et l’autopartage ne Les tarifs TER favorisent les abonnés régu- que les familles nombreuses, qui se raré- répondent qu’à une part minoritaire des be- liers (travailleurs, scolaires), dont par ailleurs fient, et est fournie sans distinction de re- soins. La forte dépendance à la voiture, même les employeurs prennent en charge la moitié venu. Pôle Emploi délivre cependant une pour les trajets courts, est liée à la dispersion du coût de l’abonnement. Les usagers qui ont aide pour des cas spécifiques : concours, de l’habitat, au zonage de l’espace (habitat, des horaires irréguliers et les travailleurs indé- entretien d’embauche… commerces, activités), à la dévitalisation des pendants sont pénalisés. De nouvelles offres à bas coût sont ap- centres des villes secondaires, à la pénurie de Pour les voyages occasionnels, des cartes parues dans l’aérien et les transports ter- transport public. donnent droit à des réductions. Des offres restres. Mais les TGV Ouigo ne desservent bon marché sont souvent proposées en que les métropoles. Les cars « Macron » Des besoins insatisfaits week-end ou pour des évènements, et de évitent les villes moyennes ou petites. Et plus en plus conditionnés à un achat sur les tarifs peuvent être élevés en période L’implantation des ménages modestes dans internet. Ces offres d’opportunité visent de pointe. Il reste donc de nombreux cas les couronnes urbaines non desservies par les des publics spécifiques plus que les ménages où les déplacements longue distance sont réseaux urbains se renforce. Même en ban- à faibles revenus, nombreux à mal maî- difficiles pour les usagers à faibles reve- lieue parisienne, des communes à forte pro- triser internet. Les Régions se mobilisent nus. Ceci a plusieurs effets : réduction des portion d’habitat social sont mal desservies. aussi pour le covoiturage, mais les résultats déplacements au détriment des familles et Quant aux besoins de déplacement à risquent d’être limités, en particulier dans les de l’économie, fraude dans les transports longue distance, ils concernent aussi la popu- zones peu denses. collectifs, report sur des modes les plus lation à faibles revenus (FNAUT Infos 232), polluants. Une partie importante de la qu’il s’agisse de maintenir des liens familiaux Des pratiques hétérogènes population se sent marginalisée. dans les familles éclatées, de rendre visite à des parents peu mobiles, de rechercher un Les Régions ayant créé des tarifications Les trajets internationaux emploi, ou de voyager (40 % des ménages ne TER solidaires proposent soit des tarifs for- partent pas en vacances). tement réduits, soit des trajets gratuits en Les déplacements pendulaires de proxi- Des autorités organisatrices de transports nombre limité. mité ne concernent que quelques liai- publics ont donc mis en oeuvre des tarifica- L’Ile-de-France, la Bretagne, AURA... sons, utilisées massivement par les travail- tions solidaires, en sélectionnant les bénéfi- proposent 75% de réduction à un large panel leurs frontaliers : Genève - Haute-Savoie, ciaires de deux manières : d’usagers à faibles revenus. Luxembourg-Lorraine…. - les titulaires d’aides sociales (les aides au L’Occitanie offre aux bénéficiaires de RSA Sur les trajets internationaux, les pré-car- déplacement ne concernent pas toujours tous et demandeurs d’emploi 20 trajets gratuits rés des opérateurs nationaux compliquent les les membres du ménage) ; tous les six mois. L’Aquitaine offre aussi des trajets à bon marché : pour un trajet Lille- - les ménages identifiés par leur quotient trajets gratuits. Bruxelles, il faut soit accepter les tarifs du familial, avec parfois plusieurs niveaux d’aide L’ex-Région Poitou-Charentes, le Centre , soit changer à Tournai et utiliser deux en fonction du quotient. Val de Loire et les Pays-de-la-Loire res- trains omnibus. treignent leurs aides aux usagers à la recherche L’offre ferroviaire à bas coût reste réduite Les tarifs urbains d’un emploi. (Izy sur Paris Bruxelles, lancé pour contrer La liberté tarifaire des Régions ne va pas Blablacar et les cars) et n’intègre pas les cor- Des agglomérations proposent des tarifica- réduire ces disparités. Le TER peut donc être respondances. tions solidaires. Des petits et moyens réseaux très coûteux pour une famille à faible reve- Les systèmes Interrail ou Eurail sont orien- s’orientent même vers la gratuité, qui répond nu. Ainsi en Région Centre, un aller/retour tés tourisme et permettent des trajets mul- aux besoins immédiats des usagers à faibles Bourges-Chinon (moins de 200 km) revient tiples pendant une durée limitée, plutôt que revenus mais pénalise à terme l’investisse- à 162 c pour un ménage de 3 personnes sans plusieurs déplacements répartis dans l’année. ment (FNAUT Infos 268). cartes de réduction, ce qui est la règle pour Tout ceci conforte le développement des Les réseaux urbains des grandes villes les usagers occasionnels). Les comparateurs compagnies aériennes low-cost, des compa- misent au contraire sur une participation routiers donnent un tarif AR (péage et car- gnies de car et du covoiturage. active des usagers au financement du réseau, burant) de 60 c, moins si l’on n’emprunte pas Conclusion : les besoins de déplacement l’objectif étant un taux de couverture des les autoroutes. de proximité des ménages à faibles revenus coûts d’exploitation de 30 à 50 % nécessaire Les régions, qui ont une compétence géné- ne sont pris en charge que par une partie des pour pouvoir développer l’offre. Une tarifica- rale « mobilité », mais n’en ont pas spécifique- agglomérations et des Régions. Les besoins tion solidaire, qui remplace peu à peu la tari- ment sur la voirie, ont encore peu d’actions sociaux de déplacement à moyenne et longue fication par âge, est alors indispensable pour en faveur des modes actifs, à part la mise en distance sont mal assurés, sauf entre les rendre le service accessible à tous. place d’abris vélos dans les pôles d’échange. grandes villes, là où les offres se sont diversi- Des municipalités aident également les Plus rares encore sont celles qui cofinancent fiées. Les usagers à faibles revenus doivent se mobilités actives : aménagements de voirie, réellement d’autres actions favorisant la mul- contenter des modes les plus lents, de services abris, vélos en libre service ou en location, timodalité : accès aux pôles transport, cofi- peu fréquents et à des horaires décalés. aides à l’achat de VAE. Des actions sont par- nancement du VAE… Dominique Romann z

FNAUT infos n°275 - juin 2019 x 9 Actualité Brèves Chroniques du Lyon-Turin

l Au cours de son examen du projet Un homme de bon sens Gratuité de loi LOM, le Sénat, à l’initiative de Michel Savin, sénateur LR de l’Isère, a Dans son rapport publié le 14 janvier La gratuité des transports peut revêtir des réintroduit dans les priorités d’investis- 2019, « Dématérialisation et inégalités formes variées. A Alençon, Arcachon et Ar- sements la réalisation des voies d’accès d’accès aux services publics », le défenseur ras, des navettes sont gratuites dans le centre, depuis Lyon au tunnel interfrontalier des droits Jacques Toubon tire le signal le reste du réseau est payant. A Quimper, la de la liaison Lyon-Turin : le projet com- d’alarme sur la dématérialisation à marche gratuité n’a été instaurée que les samedis et bine « transition énergétique, mobilité forcée des services publics qui laisse sur le dimanches. A Compiègne, le réseau est gra- du quotidien et développement du fret bord de chemin un grand nombre d’usa- tuit sauf le dimanche et les jours fériés. A ferroviaire ». gers : 20 % des Français n’ont pas accès à Carhaix et Libourne, la gratuité n’a été intro- l A l’occasion d’une nouvelle mani- internet, et 33 % qui y ont accès éprouvent duite que sur une partie du territoire urbain. festation de soutien au Lyon-Turin, de grandes difficultés à l’utiliser. A Béziers et Rodez, les élus ont préféré une menacé par le mouvement italien 5*, Il condamne le tout ou rien en matière de tarification très basse. A Manosque et Bar-le- 20 000 personnes ont défilé le 6 avril numérique obligé. Son analyse rejoint celle Duc, la gratuité a été abandonnée. dans les rues de Turin. Leur slogan : le de la FNAUT dans le secteur des trans- Lyon-Turin fait rimer cohésion euro- ports collectifs. Gratuité ? péenne, développement économique « La dématérialisation peut améliorer et lutte contre le réchauffement clima- l’accès de chacun à ses droits. Mais elle ne Un réseau saturé à Paris, c’est ce qui se pro- tique. doit pas se résumer à pallier la disparition duirait, selon un rapport commandé par la l Les appels d’offres pour la pour- des services publics sur certains territoires région Île-de-France à un comité d’experts. suite du tunnel de base ont été lancés et à privilégier une approche budgétaire et « La gratuité, idée évidemment attractive, avec l’accord de la France et de l’Italie, comptable. Il faut tenir compte des difficul- n’est pas en mesure de répondre aux défis qui mais il faudra attendre encore six mois tés bien réelles d’une partie de la popula- se posent dans les transports publics, elle est pour qu’une décision définitive soit tion et des besoins spécifiques de certaines même de nature à les aggraver. prise par les deux gouvernements. catégories d’usagers. La fréquentation des transports publics l Jean-Claude Juncker, président de L’évolution actuelle aboutit à une déres- augmenterait de 6 à 10%, au détriment de la la Commission Européenne, a rappelé ponsabilisation des pouvoirs publics, elle marche et du vélo, ce qui n’est évidemment que la part modale du rail dans le trans- renvoie notamment à la sphère associative pas le but recherché », explique Jacques port du fert entre la France et l’Italie la prise en charge de l’accompagnement Rapoport, le président du comité. Quant à était inférieure à 9 % alors qu’elle pour- des usagers, ou mise sur le secteur privé l’impact écologique de la gratuité, il serait rait passer à 40 % une fois la nouvelle pour compenser les défaillances du service très limité : la circulation parisienne ne bais- liaison mise en place. public ». serait que de 2%, avec un effet minime sur la l Eurostat, direction de la Commis- Le Défenseur des droits fait des préconi- qualité de l’air. sion européenne chargée de l’informa- sations, notamment : tion statistique à l’échelle communau- - conserver toujours plusieurs modalités Trottinettes et autres EDP taire, prévoit une hausse de 182 % du d’accès aux services publics, donc inscrire volume du fret transporté en Europe : dans la loi qu’aucune démarche ne puisse La multiplication en ville des EDP (en- il est donc essentiel que cette hausse être accessible « uniquement » par voie dé- gins de déplacement personnels : skate, patin puisse être absorbée par le rail. matérialisée ; à roulettes, overboard, gyropode, segway...) l Le Lyon-Turin pourrait capter à la - mieux former les agents publics à la dé- finit par poser un vrai problème de sécurité fois des flux nord-sud et est-ouest. Il tection des publics en difficulté. aux nombreux autres usagers de l’espace pu- pourrait donc bénéficier du dévelop- blic urbain : piétons jeunes ou âgés, cyclistes, pement progressif de la « nouvelle Une dose de convivialité ? personnes mal-voyantes, non-voyantes ou à route de la soie » lancée en 2013 par mobilité réduite. la Chine (le transport terrestre du fret On se souvient qu’à la demande d’élus Pour nos associations (FNAUT, FUB, 60 dure 15 jours au lieu de 45 par la mer). bourguignons et rhônalpins très attentifs Millions de Piétons, Rue de l’Avenir), il est l La Commission nationale du dé- aux difficultés rencontrées par les voyageurs, urgent que la place de tous ces engins soit bat public (CNDP) vient d’organiser la gare de Paris-Bercy a été rebaptisée, en clarifiée : un débat sur les aménagements sou- 2016, gare de Bercy-Bourgogne-Pays d’Au- - le trottoir doit être sanctuarisé, c’est le haitables du nœud ferroviaire lyon- vergne. Les voyageurs, eux, auraient préféré domaine réservé aux piétons et aux per- nais, de plus en plus saturé. Les liaisons qu’on se préoccupe des retards des trains, ou sonnes handicapées se déplaçant en fauteuil voyageurs entre Lyon et les aggloméra- qu’on accélère la modernisation des lignes roulant ; il doit être désencombré (terrasses tions du sillon alpin (Grenoble, Cham- Clermont-Béziers/Nîmes. de commerces, poteaux de signalisation béry, Aix, Annecy) et le transport du fret Autre décision de la plus haute importance automobile...) ; entre la France et l’Italie sont directe- pour les usagers du TER : Jean Rottner, pré- - les pistes cyclables sont faites pour les ment concernés. sident de la Région Grand-Est, a obtenu de cyclistes ; pour que d’autres engins y soient l La ministre des Transports s’est à la SNCF que des annonces en dialecte alsa- autorisés, il faut que des conditions strictes nouveau engagée en faveur du Lyon- cien soient diffusées par les contrôleurs dans soient remplies (vitesse maximale comprise Turin conçu comme un tout cohérent : les TER afin d’encourager le bilinguisme inférieures à 25 km/h, de bons freins, un bon elle a confirmé clairement la nécessité « tout en injectant une dose de convivialité ». éclairage) ; tous les autres engins personnels d’aménager des voies d’accès perfor- Que les fiches horaires des TER de la val- doivent être totalement proscrits ; mantes au tunnel de base (le Comité lée de la Marne aient été diffusées en temps - les engins personnels en location (trot- d’Orientation des Infrastructures prési- utile aurait sans doute apporté davantage de tinettes, gyropodes...) doivent être dépo- dé par Philippe Duron préconisait stu- convivialité aux usagers... sés dans des endroits précis, définis par la pidement de ne s’en préoccuper qu’à A quand des annonces en franco-pro- ville et ne gênant pas le passage des pié- partir de 2038...). Un comité de pilotage vençal dans les TER rhôdaniens pour faire tons ; la dépose en free floating ne doit pas est mis en place sous l’autorité du pré- oublier les retards ? être possible. fet de la Région AuRA.

10 x FNAUT infos n°275 - juin 2019 Actualité

Colloque : les déplacements dans les villes moyennes

Colloque organisé par la FNAUT avec le soutien de l’association Villes de France le jeudi 10 octobre 2019 - Salle Victor Hugo, 101 rue de l’Université, Paris 7e.

Quel est le rôle souhaitable de chaque mode de transport dans les villes moyennes ? Quel est l’impact de la politique d’urbanisme sur les déplacements ? Alors que l’organisation des déplacements s’est améliorée ces dernières années dans les grandes villes françaises, la circulation automobile s’est renforcée dans les villes moyennes. Au cours de ce colloque, les raisons de ces évolutions contrastées seront analysées, le matin par des experts, l’après-midi lors de deux tables-rondes réunissant des élus, des journalistes et des représentants de la FNAUT.

Programme

9h30 Ouverture du colloque Benoît Simian, député de la Gironde, président d’Avenir-Transport Bruno Gazeau, président de la FNAUT Caroline Cayeux, présidente de l’association Villes de France

10h La géographie des villes moyennes Exposé de Francis Beaucire, géographe

10h20 Panorama de la mobilité dans les villes moyennes Exposé de Stéphane Chanut, chef du département Déplacements durables, CEREMA

10h 50 Parts des différents modes de déplacement dans les villes moyennes Présentation des bonnes pratiques Exposé de Bruno Cordier, directeur du cabinet ADETEC

11h20 Débat avec la salle

12h Déjeuner libre

14h Table ronde n°1 : Les déplacements dans les villes moyennes Animé par Benoît Lasserre, journaliste Participants : Jean-François Debat, maire de Bourg-en-Bresse* Jean-Pierre Farandou, président de Keolis Olivier Gacquerre, maire de Béthune* Anne-Marie Ghémard, vice-présidente de la FNAUT Olivier Razemon, journaliste

15h15 Table ronde n°2 : L’accès aux villes moyennes par train et autocar Animé par Pierre Zembri, professeur à l’université Paris-Est Marne-la-Vallée Participants : Jean-Sébastien Barrault, président de la FNTV François Commeinhes, maire de Sète* Frank Lacroix, directeur général TER, SNCF Mobilités Christiane Dupart, vice-présidente de la FNAUT David Valence, vice-président de la Région Grand-Est, maire de Saint-Dié*

16h30 Clôture du colloque Elisabeth Borne, ministre des Transports

* sous réserve de confirmation

Ouverture des inscriptions le 1er août sur le site : http : colloque.fnaut.fr

Inscription gratuite dans la limite des places disponibles Pour tout renseignement, adressez un mail à [email protected]

FNAUT infos n°275 - juin 2019 x 11 Actualité Les perles du volant

(MD) Karine Vidonne, Didier Angheben et Franck Perriard, moniteurs d’auto- écoles, viennent de publier « Les pe- tites âneries du permis de conduire » Auto-Train : régression et fin aux éditions François Bourin. En voici un échantillon.

- En marche arrière, quand on tourne le volant, ce sont bien les roues arrière qui tournent, non ? - pour se garer, on est obligé de choisir (MD) une place où il n’y a personne ? - face à un mur, je mets la marche avant Créés en 1957, les Trains Auto-Cou- de la sécurité routière, propose désormais ou la marche arrière ? chettes (TAC) transportaient les voitures différents services de transport d’auto- - est-ce qu’on peut dépasser lorsqu’on comme des bagages accompagnés sur des mobiles par la route, soit par conduite est à l’arrêt ? wagons porte-autos accrochés aux trains du véhicule par un chauffeur amateur - le moniteur : pourquoi tu roules à 40 ? ; de nuit : le client prenait le même train ou professionnel, soit par camion, à des l’élève : c’est limité à 30 ; que sa voiture. coûts astronomiques et avec des délais - pour freiner, je suis obligé d’arrêter Depuis 2001, le service Auto-train déraisonnables allant de plusieurs jours à d’accélérer ? consiste à transporter des voitures et des plusieurs semaines... - le moniteur : dans quelles conditions motos par convois de fret spécifiques Finalement, clap de fin pour le service doit-on contrôler la pression des pneus ? vers des terminaux que les propriétaires auto/train : la SNCF vient de décider de l’élève : à l’arrêt ; des véhicules rejoignent par train ou tout supprimer totalement ce service à partir - le moniteur : pourquoi mets-tu la cin- autre moyen. de décembre 2019. quième ? L’élève : il y a marqué « 90 » der- Très apprécié des retraités (plus de Bernard Courtois, rière le camion qui est devant ; 60 % des usagers), ce service réduit la président d’honneur de l’AUTAUT z - l’élève au moniteur : j’ai oublié mes lu- pollution et l’usure du véhicule, épargne nettes, mais ne vous inquiétez pas, je viens la fatigue des passagers, évite des frais Bien dit de boire un café ; d’hôtel (les retraités coupent souvent un - le moniteur demande à un nouvel voyage en voiture par une étape), désen- Jean Lenoir, vice-président de la élève s’il sait démarrer une voiture ; l’élève gorge les routes et supprime tout risque FNAUT : « La SNCF va supprimer un a besoin d’une précision importante : avec d’accident de la route. service qui apportait du confort et de la ou sans la clé ? Le service a connu son apogée au mi- sécurité à ses clients. Encore une fois, - une élève, pour démarrer, engage la lieu des années 1980 avec 350 000 véhi- elle prend le problème à l’envers : au deuxième à la place de la première ; le cules transportés puis a été concurrencé lieu d’améliorer sa rentabilité globale, moniteur s’en étonne ; l’élève : c’est pour par les autoroutes. En 1981, on comp- elle supprime ce qui n’est pas rentable, gagner du temps ! tait 32 terminaux répartis dans toute la comme elle l’a déjà fait en supprimant les - le frein, ça fonctionne aussi en marche France avec 52 liaisons en France et 31 trains de nuit ou les lignes transversales. arrière ? destinations vers l’étranger. En 2000, il Elle veut maintenant supprimer la ligne - c’est fou, si je me retourne complè- ne restait que 23 terminaux. Les destina- de fret Perpignan-Rungis. Demain, que tement, je vois la même chose que dans tions vers l’étranger ont été progressive- supprimera-t-elle ? Tous les Intercités ? mon rétroviseur, c’est bien pensé quand ment supprimées. Une partie des TGV ? ». même ! En 2003, pour stopper la dégradation Fabien Villedieu, porte-parole du - le moniteur rappelle à l’élève qu’il doit et intervenir auprès de la SNCF qui, syndicat SUD-Rail: « tout a été fait pour laisser traverser les piétons ; l’élève : je dois dans une attitude malthusienne, fer- tuer l’Auto-Train ; en plein débat sur la m’arrêter à chaque fois ? mait l’une après l’autre les destinations transition écologique, la suppression de - lors d’une conduite de nuit, le moni- « déficitaires », l’Association des Usagers ce service est un non-sens ». teur se fâche : mais enfin, regarde dans ton du Transport Auto-Train (AUTAUT) a rétro ! l’élève : pour quoi faire ? on n’y voit été créée. Mais la chute du service s’est Langage moderne rien de toute façon ! poursuivie : suppression des liaisons - l’élève : je veux bien me retourner pour province/province en 2011 puis des liai- Ne dites plus « gare SNCF » mais, regarder derrière quand je recule mais je sons internationales restantes en 2015, comme Gares et Connexions, gestion- vois plus ce qui se passe devant. Faudrait réduction des fréquences des dessertes naire des gares, « City Booster ». OK ? un rétroviseur à l’arrière pour voir devant et des plages horaires pour la dépose Ne dites plus BHNS, bus à haut niveau quand on recule ! et la reprise des véhicules et, fin 2017, de service, ou BRT, bus rapid transit, fermeture des dessertes du Sud-ouest mais BGV, bus à grande vitesse. FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information (Bordeaux, Biarritz, Brive et Toulouse), Directeur de publication : Jean Sivardière Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT de Briançon, Lyon et Narbonne. Nouveau nom CPPAP 0920 G 88319 - Dépôt légal n°275 - ISSN : 0983-172 X En 2018, le nombre de véhicules trans- Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative portés a été inférieur à 40 000 ; le déficit, La Métropole Européenne de Lille a Avenue de la Plage - 86240 Ligugé c c Abonnement papier 1 an (10 numéros) : Individuels : 19 b égal au chiffre d’affaires, a été de 6 M décidé de faire 17 M d’économies par Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b pour un taux de remplissage de 68 %. Ne an en réduisant l’offre de son réseau Prix au numéro : 2 b - Diffusion numérique libre subsistent en été 2019 que 5 relations (- 8 %)... Mais que l’usager ne s’inquiète Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT sur 12, entre Paris-Bercy et Avignon, pas, l’exploitant change de nom : Trans- de votre région, contacter notre permanence : 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris Marseille, Toulon, Fréjus et Nice. pole devient Ilévia pour « provoquer une tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06­ De surcroit, la SNCF, au mépris total rupture de comportement, et incarner e-mail : [email protected] de la préservation de l’environnement et une nouvelle ère de mobilité ». Internet : https://www.fnaut.fr

12 x FNAUT infos n°275 - juin 2019 infos 276 juillet-août 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Un maillage fragilisé Pourquoi et comment Dès 2004 (FNAUT Infos 125), la FNAUT a dénoncé la dégradation déjà bien visible des remailler le réseau ferré français infrastructures ferroviaires (des ralentisse- ments de trains étaient déjà nécessaires sur 1 000 km de lignes pour garantir la sécurité des circulations) et la réduction des crédits, déjà notoirement insuffisants, consacrés à leur régénération : « dégradation des perfor- mances, désaffection de la clientèle, utilité sociale moindre pour un coût plus élevé : un processus de contraction du réseau ferré se TER Mende-la Bastide sur le viaduc de Mirandol (MD) sur le viaduc de Mirandol Bastide TER Mende-la met insidieuement en place ». La FNAUT avait vu juste. Aujourd’hui, des ralentissements sont observés sur plus de 5 000 km de lignes, et de nombreuses lignes régionales et même inter-régionales, mal exploitées, ont disparu ou sont menacées... Les responsables politiques étaient pourtant avertis depuis longtemps. Loïk Le Un réseau ferré mieux maillé est indispensable si l’on veut fiabiliser les ser- Floch-Prigent, éphémère mais vigoureux vices ferroviaires, éviter aux voyageurs de longs détours, stimuler le trafic de président de la SNCF de décembre 1995 à fret et mettre en œuvre un aménagement du territoire rationnel et équitable. juillet 1996, déclarait en effet : « le train est Dans une étude réalisée pour SNCF Réseau, la FNAUT a montré comment ren- un outil essentiel et nous avons la chance forcer le maillage du réseau ferré classique, celui du réseau à grande vitesse d’avoir conservé un réseau très maillé. Il va et les connexions entre les deux réseaux. Nos propositions visent à redonner falloir apprendre, non à vouloir « fermer » les lignes, mais à les valoriser en multipliant de la souplesse et de l’attrait au rail. Elles sont ambitieuses et éloignées des les cadences et en diminuant les prix pour orientations malthusiennes actuelles, mais la fiscalité environnementale per- les clients, c’est cela le monde moderne mettrait de les financer : c’est d’abord une question de volonté politique. vers lequel nous allons, celui du dévelop- pement durable. Dans l’avenir, c’est le train qui globalement sera le mode de transport Une vision archaïque du rail le moins coûteux pour la collectivité, en- core faut-il que celle-ci accepte d’investir Bien connu pour sa phobie du rail, l’uni- M. Prud’homme sait-il que, si le rail se comme l’ont fait nos voisins ». versitaire Rémy Prud’homme affirme (Les porte mal en France (et la SNCF en partage Cette excellente leçon de politique fer- Echos du 29 mars 2018) : « ça n’est pas la la responsabilité avec un Etat qui n’a jamais roviaire est malheureusement toujours SNCF le problème, c’est le rail. La stratégie eu de stratégie dans le secteur des transports), incomprise ou refusée. Il suffit de lire les engagée consiste à investir davantage sur le il se porte au contraire fort bien chez nos voi- rapports Duron et Spinetta pour le consta- réseau : on est là en pleine absurdité. Cette sins européens ? Sait-il que le fret ferroviaire ter. Mais il est encore temps de réagir et de stratégie repose sur l’idée que le rail est un s’est développé en Allemagne alors qu’il péri- suivre l’exemple de nos voisins européens secteur d’avenir et que la SNCF est une clitait en France ? Que les « petites lignes » (FNAUT Infos 267). entreprise du passé : c’est le contraire qui est sont très fréquentées en Suisse, en Alle- Bruno Gazeau, président de la FNAUT z vrai. La SNCF est un bouc émissaire com- magne, en Italie ? Que la clientèle du train a mode, le rail n’est plus - et ne redeviendra pas doublé en Grande-Bretagne depuis 20 ans ? Sommaire - le mode transport dominant et le facteur Que les trains de nuit abandonnés par la DB de progrès qu’il a été. Le problème consiste à sont exploités avec succès par les ÖBB ? Dossier : maillage du réseau ferré français gérer son déclin, pas à essayer de l’empêcher. Service public, desserte des territoires, en- L’évolution du réseau 2 Restent au rail quelques domaines de perti- vironnement : ces mots ne veulent rien dire Pourquoi et comment remailler nence importants mais limités ». pour M. Prud’homme. Comme M. Spinet- le réseau ferré 3 M. Prud’homme termine sa tribune par ta, il considère que le train est un mode de Maillage du réseau ferré classique 4 sa diatribe rituelle contre la liaison Lyon- transport du passé. Qu’il voyage un peu en Maillage du réseau des LGV 5 Turin, un projet « inutile qui coûtera près Europe... ou en France : il apprendrait que le Maillage des LGV et du réseau classique 6 de 30 milliards » (ce seul chiffre montre volume de la clientèle du TGV Paris-Tou- La FNAUT trop ferroviaire ? 7 qu’il ne connaît pas le dossier - voir louse a doublé depuis l’ouverture de la LGV Petites lignes 9-10 FNAUT Infos 263 - et qu’il ignore tout Tours-Bordeaux en juillet 2017. Actualités 11-12 des réalités ferroviaires). Jean Sivardière z

FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 x 1 Dossier Conséquences de la contraction L’évolution du réseau ferré français (MD) du réseau classique

Un réseau ferré très dense s’est développé rapidement au cours du 19e siècle et au Les conséquences sont très néfastes début du 20e pour atteindre son extension maximale entre 1910 et 1930. pour l’aménagement du territoire. (pixabay) l’autocar (les premières lignes d’autocar ont l Plus de 50 agglomérations de plus été lancées par les compagnies ferroviaires…) de 10 000 habitants (situées hors péri- et du camion. Puis l’élagage se poursuit. De phérie d’une métropole) ne sont plus 43 000 km de lignes en 1938 (création de la reliées au réseau ferré, certaines d’entre SNCF), le réseau passe à 34 600 km en 1982. elles regroupant plus de 30 000 habi- L’élagage s’est ensuite ralenti : de 1982 à 2010, tants (Draguignan). 2000 km de lignes environ ont été fermés au l Des gares auparavant au centre trafic voyageurs, mais le rythme des fermetures d’étoiles ferroviaires étoffées (Troyes, s’est à nouveau accéléré récemment. Arles) sont devenues de simples gares de passage ; Montluçon, centre d’une L’hypothèse d’un réseau noyau aire urbaine de 80 000 habitants, est même devenu un quasi - cul-de-sac. En mai 1970, le ministère des Transports l Des relations directes entre grandes publie une « étude d’un réseau ferroviaire sim- villes voisines sont devenues impos- plifié » basé sur l’hypothèse d’une concentration sibles (Nantes - Poitiers, Rennes - Saint- de l’activité ferroviaire sur un réseau noyau voya- Nazaire, Nantes - Niort, Le Mans - Orléans, Le réseau ferré comptait 3 000 km en 1852, geurs. Conclusion : « le réseau optimum ren- Orléans - Chartres, Lorient - Saint-Brieuc, 17 440 km en 1870, 42 600 km en 1932 table pour le trafic rapide et express pourrait être Chartres - Rouen, Châlons - Troyes, (55 000 km avec les lignes d’intérêt local). compris entre 15 000 et 18 000 km ». Cette idée Troyes - Auxerre, Auxerre - Nevers, Tours Le Blanc et La Châtre (Indre), petites villes d’un réseau noyau se retrouve dans le rapport - Châteauroux, Poitiers - Châteauroux, de 5 à 7 000 habitants à l’époque, étaient alors Guillaumat (1978). Carte ci-dessous. Châteauroux - Montluçon, Périgueux - au centre d’étoiles ferroviaires à 5 branches ! Angoulême…). l De grandes relations transversales La loi Legrand (1842) ont disparu : Toulouse-Lyon qui desser- vait 5 préfectures (Albi, Rodez, Mende, Première loi ferroviaire française, la loi Le- Le Puy, Saint-Etienne), Grenoble-Nice grand du 11 juin 1842 définissait un réseau par Veynes et Digne, Aurillac-Bordeaux, radial (l’étoile de Legrand à 7 branches) mais Calais-Bâle, … D’autres relations interré- aussi deux transversales (Bordeaux-Marseille gionales (Montluçon-Ussel, Clermont-Li- et Strasbourg-Lyon). Jusque vers 1860, le moges/Ussel, Clermont - Saint-Etienne) réseau est étoilé. Les villes voisines de Brest ont disparu récemment. et Quimper sont reliées à Paris bien avant de l Alors que la création de l’Union eu- l’être entre elles. ropéenne devait faciliter les échanges Mais les premières lignes transversales avec nos voisins, bien des relations apparaissent vite : Caen-Tours, Clermont- transfrontalières ont disparu avec la Bel- Lyon, Lille-Thionville et la transversale sud gique, l’Allemagne, la Suisse (ligne du Bordeaux-Marseille. Dès 1870, l’étoile de sud Léman) et l’Espagne (Pau-Canfranc). Legrand n’est plus visible sur le plan du réseau. La réouverture de la ligne Belfort-Delle Réouvertures et raccordements est une exception, mais c’est un ratage Le plan Freycinet (1879-1880) (FNAUT Infos 275)... Inversement, depuis 1981, environ 2800 km l Des « déserts ferroviaires » sont Puis le plan Freycinet a constitué un pro- de LGV ont été construits. apparus : la Bretagne intérieure, la Nor- gramme d’aménagement ferroviaire du terri- De nombreuses grandes lignes (Alpes, Bre- mandie, le Sud-Ouest, les Alpes du sud. toire (1879 : lignes principales et régionales ; tagne...) ont été électrifiées, en particulier pour En 1973, l’Ardèche est devenue le seul 1880 : lignes locales). permettre une extension de l’effet TGV. département français privé de train Ce plan a été critiqué par la suite pour son Diverses lignes classiques ont été rouvertes (l’année du premier choc pétrolier ...). surdimensionnement, mais il répondait aux au trafic voyageurs, à l’initiative de l’Etat Depuis 2008, le vaste territoire compris besoins d’une époque où le monde rural était (Nice-Coni, 4 lignes régionales en 1982), de entre le Rhône, la ligne Paris-Toulouse, très peuplé et les activités industrielles très dis- Régions (Bréauté-Fécamp), d’associations Clermont-Ferrand et la transversale sud persées sur le territoire (mines, métallurgie), et (Cannes-Grasse, Nantes-Pornic/Saint-Gilles- n’est relié à Paris que par un seul train où ni l’automobile, ni l’autocar ni le camion Croix-de-Vie), de la Suisse (La Cluse-Belle- direct (Paris-Rodez de nuit). n’existaient. garde, Belfort-Delle) ou de chargeurs (Ser- l A ces évolutions, il faut ajouter le Le rail était alors le seul mode de transport queux-Gisors). démaillage lié à l’apparition d’un réseau offrant à la fois la vitesse, le confort, la sécurité Des shunts de gares secondaires ont de LGV très mal connecté au réseau clas- et une forte capacité. également été créés à Jussy, Culoz (1979), sique, avec la création de gares implan- Commequiers (1982), Saint-Germain-des- tées en périphéries urbaines ou même Une contraction rapide Fossés (2006), Perrigny (2011), Mulhouse en rase campagne. (2012), Courbessac (2013)... pour éviter des l La contraction du réseau a entraîné Les lignes les plus déficitaires ont rapidement rebroussements. un report sur la route du transport du disparu dès 1920, à la suite de l’exode rural, des Signalons aussi des raccordements entre fret, y compris pondéreux et matières déficiences des exploitants (politique commer- LGV et lignes classiques (Avignon, 2013 ; dangereuses. Des centrales nucléaires ciale peu agressive, coûts d’exploitation élevés) Valence TGV, 2014) et même entre LGV et La Hague ne sont pas reliées au ré- et de la concurrence vigoureuse, soutenue par (la virgule de Sablé, une idée originale de la seau ferré bien qu’elles aient à évacuer l’Etat et les collectivités, de l’automobile, de FNAUT Pays de la Loire). des déchets radioactifs.

2 x FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 Dossier Comment remailler ? Pourquoi remailler le réseau ferré Le maillage du réseau peut être for- tement amélioré par des mesures d’ex- ploitation (remaillage « temporel »). Mais des investissements resteront né- cessaires (remaillage « spatial »).

L’exploitation du réseau

La gestion des correspondances, parfois aberrante (FNAUT Infos 249, 254), est le point clé. On peut réduire les temps d’attente en augmentant la fréquence des trains. Les Ré- Gare du Tréport (MD) gions peuvent supprimer les coupures appa- rues entre réseaux régionaux voisins, un effet Un réseau surdimensionné ? l’exploitation ferroviaire, compte-tenu de la pervers de la régionalisation du TER. vétusté et de l’utilisation intensive du réseau On peut aussi créer de nouvelles corres- Sur environ 31 000 km de lignes au- principal. Les voyageurs en subissent les pondances en « croisant » des relations, jourd’hui (16 000 km sont électrifiés), le ré- conséquences : report peu apprécié sur l’auto- par exemple Troyes-Belfort et Reims-Di- seau compte 22 000 km de lignes voyageurs car ou suppression du service. Les chargeurs jon à Chaumont, afin d’améliorer la fré- (dont 2 800 km de LGV en 2017, 15 000 km sont pénalisés eux aussi. quentation des « bouts de lignes » les de lignes classiques principales et 4 000 km moins fréquentés. de lignes dédiées au TER), et 9 000 km de Faciliter l’usage du train On peut enfin supprimer des correspon- lignes dédiées au fret. dances en créant des liaisons directes à long Selon une idée à la mode, dont la Cour Le voyageur veut disposer d’itinéraires ra- parcours (voir le Thello Marseille-Milan), en des comptes a fait un leitmotiv, le réseau diaux et transversaux assez directs entre gare mettant bout à bout deux relations exis- actuel serait trop dense : 5,5 km de lignes de départ et gare de destination afin de mi- tantes sans surcoût d’exploitation ou en fai- pour 100 km2 de territoire en moyenne, ou nimiser les temps de parcours et la dépense, sant circuler des trains multitranches. 460 km par million d’habitants. Mais en réduire le nombre des ruptures de charge et Allemagne, ces ratios sont respectivement de les pertes de temps qu’elles impliquent, voire L’investissement 12 km et 512 km et, en Suisse, de 12 km et pouvoir choisir entre des itinéraires différents. 625 km : ces deux pays entretiennent-ils par Or la disparition d’itinéraires directs entre Il ne s’agit pas, bien sûr, de revenir plaisir des réseaux surdimensionnés, ou ont- grandes villes voisines le contraint à accep- au réseau Freycinet, adapté à un passé ils adapté ces réseaux aux besoins de la col- ter des détours longs (parfois de plusieurs révolu, mais d’adapter le réseau actuel lectivité ? Une comparaison plus fine devrait dizaines de km) et coûteux, et des correspon- aux évolutions de la démographie et aux d’ailleurs exclure l’Ile-de-France, sans équiva- dances toujours pénibles. Le train classique nouvelles exigences des utilisateurs du lent à l’étranger sauf la région londonienne. doit au contraire relier deux grandes villes par rail, et de contribuer à un réaménage- plusieurs itinéraires afin d’assurer une bonne ment du territoire. Remailler face à la route desserte des villes intermédiaires. Deux types d’opérations susceptibles Quant aux chargeurs, demandeurs de vi- de corriger la contraction du réseau ferré Le réseau routier est bidimensionnel et den- tesse et surtout de fiabilité car les usines et les doivent être étudiés : sément maillé. L’automobiliste et le camion- commerces doivent être alimentés en continu, - rétablir des dessertes régionales, es- neur passent aisément d’une route communale et toujours prêts à se tourner vers le camion, sentiellement en milieu périurbain, et des à une départementale ou nationale, ou à une ils sont pénalisés par le maillage insuffisant lignes capillaires fret en antenne afin de autoroute. A l’inverse, le rail est handicapé par du réseau actuel qui le rend plus vulnérable mieux couvrir le territoire ; son caractère unidimensionnel, son réseau bien aux perturbations : manque de robustesse des - établir ou rétablir des continuités sur moins étoffé, la nécessité de massifier le trafic horaires, conflits entre trains de fret et trains des itinéraires ferroviaires à plus longue et l’absence de vision d’ensemble (TER, TET, de voyageurs, détours imposés et encombre- distance, il s’agit alors d’un véritable re- TGV) de la SNCF. Il ne possède pas la sou- ment de lignes ou nœuds déjà très chargés maillage du réseau. plesse nécessaire pour rivaliser efficacement avec et soumis à des péages élevés, lacunes dans La première action à lancer, afin d’éviter la route, qui est son principal concurrent. Un l’électrification ou le gabarit du réseau, aug- une fuite de la clientèle, consiste à faire meilleur maillage du réseau peut lui redonner mentation des coûts. disparaître les multiples zones de ralen- de la compétitivité. Il répond à trois objectifs, tissement des trains en régénérant et en technique, commercial et politique : fiabiliser Aménager le territoire en créant modernisant les voies, les ouvrages d’art, l’exploitation, faciliter le transport des voyageurs de nouveaux itinéraires la signalisation. et du fret (créer des lignes dédiées au fret suivant Il faut sauvegarder les lignes menacées le plan Borloo), réaménager le territoire. L’implantation de gares sur les LGV sans de disparition, même s’il s’agit de lignes connexion avec les transports de proximité, la dites « secondaires ». Mais des opéra- Fiabiliser l’exploitation fragmentation de grands itinéraires transver- tions de plus grande envergure peuvent saux, la disparition de lignes transfrontalières être nécessaires : En cas de difficultés graves (incidents tech- et la formation de vastes déserts ferroviaires - l’électrification de certaines lignes, en niques, actes de malveillance, suicides) exi- ont créé des discontinuités dans les itinéraires particulier pour le trafic de fret ; geant une longue immobilisation des trains, souhaités par les voyageurs et chargeurs. - la construction de raccordements per- ou en cas de travaux importants nécessitant Or les voyageurs souhaitent pouvoir se mettant de fiabiliser l’exploitation, d’éviter la fermeture provisoire de certaines lignes, les déplacer librement, donc utiliser un véri- des rebroussements, ou de créer des cor- perturbations du trafic sont trop lentement table réseau, intermodal et bien maillé, respondances TGV-TER ; résorbées, la SNCF ne dispose plus des iti- et non un ensemble de lignes mal reliées - la réouverture de lignes (et d’abord la néraires alternatifs qui existaient autrefois. Or entre elles. Un remaillage du réseau per- préservation de leurs emprises) ; les travaux de maintenance et les incidents mettrait en particulier de créer de nou- - la construction de lignes nouvelles. feront sans doute de plus en plus partie de veaux itinéraires ferroviaires.

FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 x 3 Dossier Le maillage du réseau classique Deux opérations modèles La petite ceinture parisienne Nous supposons que le réseau classique a été remis en bon état - c’est la priorité évi- dente - et nous présentons diverses possibilités de maillage - électrifications, raccorde- ments et shunts, réouvertures et création de lignes.

Electrifications Réouvertures et nouveaux itinéraires

Les électrifications sont surtout utiles au tra- Le réseau ferré classique est encore fic de fret. L’électrification de la ligne 4 entre structuré en « étoile de Legrand », car les Paris et Troyes ne créera aucun maillage nou- lignes radiales sont les mieux équipées et veau, mais celle de la grande rocade parisienne donc les plus circulées. Un point essentiel à Amiens-Reims-Châlons offrirait au port du un réaménagement du territoire est donc la (ASPCRF) Havre un débouché vers l’est et le sud-est qui relance des relations transversales. élargirait son hinterland et éviterait un passage Des réouvertures de courtes sections La réouverture de la petite ceinture du fret par Paris. permettent de rétablir de grands itinéraires parisienne (au moins certaines sections) interrégionaux disparus récemment. Ainsi n’aurait rien de passéiste car elle offrirait Suppression de rebroussements la réouverture de la section Volvic-Ussel un maillage très utile avec le réseau ur- rétablirait la liaison transversale sud Cler- bain et régional. Complémentaire, sur sa AVANT AP mont-Ferrand - Brive-Bordeaux/Limoges. section sud, du tramway T3 qui assure une La réouverture de la ligne Digne - desserte fine mais est aujourd’hui saturé, Saint-Auban (22 km) rétablirait une et des projets du Grand Paris Express plus liaison ferrée Alpazur entre Grenoble et éloignés de Paris, la petite ceinture pour- Nice par correspondance entre des trains rait être mise en correspondance avec les Grenoble-Digne à créer et CP à Saint- RER B à E, diverses lignes de métro et les Auban, sans passage Valence. trains Transiliens (FNAUT Infos 213). Il est intéressant d’imaginer de nou- Des rocades ferroviaires comparables veaux itinéraires ferroviaires, de même que ont été récemment remises en service à Si, au-delà d’une gare peu importante, une les opérateurs routiers ont su imaginer de Londres, Berlin, Bucarest et Moscou. ligne présente une bifurcation, un raccorde- nouvelles liaisons par autocar. ment en triangle entre les deux branches de La réouverture de la ligne Rives - Saint- La VFCEA cette bifurcation permet à un train Intercités Rambert d’Albon permettrait de créer utilisant successivement ces deux branches des relations directes Grenoble-Vienne - d’éviter un rebroussement et peut apporter un Saint-Etienne évitant Lyon. gain de temps notable. Des réouvertures-reconstructions plus De nombreuses suppressions de rebrous- ambitieuses peuvent recréer de grands sements sont encore possibles : à Annemasse itinéraires tels que Nantes-Poitiers (pour pour accélérer les TGV Paris - Saint-Gervais éviter un long détour par Tours) ou une (shunt d’Etrembières) et les TER Genève- grande ceinture du bassin parisien passant Annecy (shunt d’Ambilly) ; à La Roche-sur- par Rouen, Chartres, Orléans, Auxerre, (CNDP) Foron sur l’itinéraire Annecy - Saint-Gervais ; Troyes, Châlons, Reims, Amiens qui per- à Gannat et Saint-Sulpice-Laurière sur Lyon- mettrait de décharger la grande ceinture Le projet multifonctions de Voie Ferrée Bordeaux ; ou encore à Savenay sur Rennes - de Paris et de faciliter le passage de l’auto- Centre Europe Atlantique a été initié par Saint-Nazaire. route ferroviaire atlantique. la FNAUT Pays de la Loire puis considéra- La réouverture de la ligne Evian - Saint- blement enrichi par la Région Bourgogne. Shunts longs Gingolph au trafic voyageurs offrirait la Il consiste à moderniser et électrifier la possibilité d’une liaison nouvelle entre ligne Nevers-Chagny et à la connecter à On peut aussi envisager des shunts plus Genève et le Valais suisse par la rive sud la LGV Paris-Lyon en gare exurbanisée du longs destinés à éviter des détours de lignes si- du lac Léman. Creusot TGV. De nombreuses possibilités nueuses. Il a été imaginé, par exemple, de sup- Les réouvertures d’autres liaisons inter- sont offertes : primer le détour par Voiron de la ligne Gre- nationales ont leur pertinence : Valen- - faciliter les relations voyageurs régio- noble-Lyon grâce à un shunt entre Moirans ciennes-Mons, Givet-Dinant, Pau-Can- nales (Dijon-Nevers) et interrégionales et Rives afin d’accélérer les relations directes franc-(Saragosse) (seuls les 35 km entre (Dijon-Tours) ; Grenoble-Lyon et Grenoble-Paris. Bedous et Canfranc sont fermés). - relier de manière performante la fa- çade atlantique, le sillon Saône-Rhône et le Lyon-Turin pour élargir l’hinterland des ports atlantiques grâce à une ligne est- ouest entièrement électrifiée évitant la grande ceinture parisienne ; - permettre l’utilisation de la LGV au sud du Creusot par des TGV Strasbourg-Lyon pour les accélérer, et par des TGV Lyon- Nantes pour éviter un long détour par l’Ile-de-France ; - créer une gare TER au Creusot-TGV. La FNAUT estime que l’électrification intégrale de la ligne Nevers-Chagny doit être réalisée en priorité (FNAUT Infos 101, (TTK) 153, 179).

4 x FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 Dossier Le maillage des LGV Le réseau des LGV : Les lignes ou barreaux suivants doivent être étudiés afin d’assurer un réseau de base et maillage maillage du réseau de base des LGV. Le réseau des LGV Une interconnection francilienne sud proposé par la FNAUT Lille assurant la desserte d’Orly restera sans doute nécessaire si les travaux engagés sur la grande ceinture Massy-Valenton sont Paris insuffisants à terme pour garantir la fluidité de la circulation des TGV diamétraux. Strasbourg Courtalain La désaturation de la LGV Paris-Lyon Rennes Le Mans Mulhouse par le POCL permettra de remplacer les Orléans Tours Dijon branches ouest et sud du projet Rhin- Nantes Rhône par un barreau Saulieu-Dijon Bourges Saulieu de 60 km proposé par la FNAUT, une Poitiers solution bien moins coûteuse mais qui Limoges en combinerait les fonctions radiale et Lyon transversale sans en dégrader notable- Angoulême Clermont-Ferrand ment les performances. Bordeaux Une transversale intégralement à grande vitesse passant par Orléans peut Captieux être créée à moindre coût à partir du Nîmes Montpellier POCL, comme l’a aussi suggéré la FNAUT, Dax Toulouse Narbonne Nice grâce à un barreau Orléans-Courta- lain (60 km) reliant la LGV Atlantique Marseille Toulon et ses prolongements vers l’Ouest et le Perpignan Sud-Ouest au POCL, c’est-à-dire Nantes, Lignes en service Rennes et Le Mans à Lyon et au sud-est Lignes à retenir Barreaux de liaison proposés par la FNAUT de la France. Un trajet Lyon-Rennes serait Lignes à réaliser ultérieurement Document J.-F. Troin, FNAUT, mai 2017 possible en 3h. Quel que soit le tracé retenu pour le POCL, médian ou ouest, la fréquence Le réseau de base - le prolongement de la LGV Rhin- des TGV Paris - sud-est desservant le Rhône de Belfort (Petit Croix) à Mulhouse Centre sera faible. Le barreau Orléans- L’achèvement de l’actuel réseau des LGV (Lutterbach) sur 35 km pour accélérer les Courtalain placerait Orléans sur l’axe est justifié pour : TGV Lyon-Strasbourg ; Lyon-Rennes/Nantes et justifierait une - rapprocher de Paris les métropoles du sud - la LGV POCL (doublement de la LGV desserte plus étoffée d’Orléans tout en (Toulouse, Toulon, Nice) ; Paris-Lyon par le centre de la France, si sa créant des relations directes d’Orléans à - désencombrer des axes surchargés et fra- saturation est confirmée, suivant le tracé Rennes et Nantes. giles (les lignes littorales Narbonne-Montpel- médian, le plus pertinent économiquement ; Un échangeur complet à Courtalain lier et Marseille-Nice, les LGV Paris-Lyon et - enfin la ligne nouvelle Lyon - Saint-Jean- permettrait de créer des relations Rennes/ Paris-Courtalain) ; de-Maurienne d’accès au tunnel de base du Bordeaux-Paris par Orléans et de pal- - désencombrer les gares parisiennes (Paris- Lyon-Turin. lier ainsi la saturation sans doute proche Lyon, Montparnasse) ; du tronc commun Paris-Courtalain de la - capter davantage de passagers aériens et Les projets éliminés LGV Atlantique. d’automobilistes pour économiser l’énergie, et Une LGV Toulouse-Narbonne devra limiter les nuisances et le réchauffement cli- Le réseau de base proposé ici écarte di- être envisagée à long terme, achevant matique ; vers projets envisagés lors du Grenelle de ainsi une transversale sud à grande vi- - renforcer les relations transversales sur le l’environnement : tesse qui renforcerait les performances territoire français ; - le doublement de la LGV nord, qui est des relations Bordeaux-Nice et Lyon-Tou- - établir la continuité de la grande vitesse loin de la saturation, par une LGV Paris- louse-Bordeaux. sur les grands axes européens. Amiens-Calais ; La FNAUT considère que le réseau de base - la LGV Paris-Rouen-Le Havre (la sec- Le maillage international des LGV doit comprendre les lignes suivantes tion Paris-Mantes est saturée mais l’itinéraire (FNAUT Infos 214) : concerné ne relève pas de la très grande vitesse) ; Déjà en service vers la Grande-Bretagne, - la LGV Bordeaux-Toulouse pour relier - les branches ouest et sud du projet Rhin- la Belgique et les Pays-Bas, l’Allemagne et Paris à la 4ème agglomération de France et Rhône, dont les trafics potentiels sont appa- l’Espagne par Barcelone, le maillage inter- absorber l’intense trafic aérien Paris-Toulouse, rus insuffisants (la branche sud n’aurait pas national doit être complété : la liaison Captieux-Dax venant dans une deu- desservi Dijon entre Lyon et Strasbourg) ; - vers le réseau des LGV italiennes, xième phase ; - la LGV Poitiers-Limoges (mieux vaut Chambéry et Annecy par la ligne nouvelle - la ligne nouvelle mixte Montpellier-Nar- assurer la relation Paris-Limoges en moder- Lyon-Turin (mixte voyageurs-fret) com- bonne-Perpignan, pour libérer la ligne litto- nisant la ligne POLT ou, éventuellement, prenant le tunnel international, la ligne rale au bénéfice des TER ; en utilisant le POCL jusqu’à Orléans, ou d’accès Lyon - Saint-Jean-de-Maurienne - la ligne nouvelle Marseille-Toulon- Bourges et Issoudun, point d’aboutissement passant éventuellement par Chambéry Nice en commençant, comme prévu, par la du barreau de Bourges sur la ligne POLT) ; (FNAUT Infos 263) ; traversée de Marseille et la section ouest de - la LGV « Transline » proposée par l’as- - vers le Pays basque espagnol par une Nice, pour faciliter la circulation des TER, sociation ALTRO, évoquée sous le nom de ligne nouvelle mixte Dax-Irun prolon- créer des TERGV et mettre Nice à moins « liaison est-ouest » et rebaptisée pompeuse- geant la LGV Bordeaux-Dax. de 4h de Paris ; ment « Via Atlantica ».

FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 x 5 Dossier Le maillage des LGV et des lignes classiques

L’interopérabilité du TGV en direction de Lyon. Il (amiens-picardie-roissy.fr) est donc nécessaire de Vers 1970, le TGV a été judicieuse- compléter l’échangeur de ment préféré à l’aérotrain pour une raison Saint-Florentin, d’amé- fondamentale : sa capacité à circuler aussi nager un échangeur au bien sur des LGV que sur des lignes clas- Creusot-TGV, ce qui est siques, françaises ou étrangères. La mise envisagé dans le cadre du en service du TGV a provoqué l’électrifi- projet de VFCEA (voir cation et la revitalisation de nombreuses page 4), et de renfor- lignes classiques. cer celui de Mâcon afin Cette interopérabilité a beaucoup d’offrir au TGV un accès contribué au succès commercial du TGV direct à la gare de Lyon face à l’avion et à la voiture. Entre 1991 Perrache. et 2007, le trafic aérien intérieur n’a aug- Un raccordement com- menté que de 12 %, contre près de 80 % plet entre la LGV-Médi- en Allemagne bien que la géographie de terranée et la ligne PLM la France soit plus favorable à l’avion que est possible à La Palud, celle de l’Allemagne. au nord d’Avignon. Il Malgré le faible kilométrage des LGV permettrait aux TGV (moins de 10 % du réseau voyageurs), le venant de Paris d’accé- TGV a pu en effet irriguer l’ensemble du der directement à la gare territoire, desservir les gares centrales et d’Avignon-Centre. permettre des correspondances aisées avec les autres trains et les transports publics Les gares TGV exurbanisées Rabattements sur des LGV de proximité. En 1938, 50 % du territoire étaient accessibles depuis Paris en moins de Les gares implantées au croisement l Des raccordements plus nombreux entre 5 heures ; en 1980, 75 % ; aujourd’hui envi- d’une LGV et d’une ligne classique, telles une LGV et une ligne classique parallèle ron 90 %. En ce sens, la notion de « réseau que Valence TGV, sont un moindre mal. permettraient, comme c’est le cas en Alle- à deux vitesses » est inappropriée. Quatre solutions se présentent pour les magne, en Italie et même en France sur les gares isolées sur une LGV : LGV Bretagne et Sud-Ouest, de desservir Nouveaux raccordements - la suppression, peut-être la meilleure des gares centrales intermédiaires par TGV. solution pour la gare Meuse TGV, accom- l Une autre possibilité consiste à raccor- Ceci étant, l’interopérabilité du TGV pagnée d’un renforcement de la desserte der des villes proches d’une LGV afin de a été insuffisamment exploitée. De nou- de Bar-le-Duc et d’un rabattement de créer de nouvelles dessertes performantes veaux raccordements entre LGV et réseau Verdun sur Reims TGV par TER grâce empruntant la LGV sur la plus grande partie classique sont nécessaires : au raccordement de Saint-Hilaire-au- de leurs parcours. - pour réduire la vulnérabilité des cir- Temple ; Le TGV Melun-Marseille a ainsi circulé culations TGV aux perturbations de - le déplacement sur la LGV ; il s’im- de 1999 à 2011 en desservant Fontainebleau, longue durée ; pose sur le site de Vandières pour Lor- Sens et Laroche-Migennes sur la ligne PLM - pour connecter les gares TGV « exur- raine TGV, gare implantée à Louvigny à jusqu’à Saint-Florentin. banisées » au réseau classique ; quelques kilomètres à l’est de la ligne Nan- Les futurs TGV Amiens-sud de la France - pour donner une plus grande souplesse cy-Metz, perpendiculaire à la LGV Est ; utiliseront le barreau Roissy-Picardie. Une dans le choix des dessertes, par exemple toutes les villes de Lorraine peuvent être liaison TGV Troyes-Lyon par l’ancienne pour desservir par TGV de grandes villes reliées à la gare de Vandières par TER ; ligne Troyes - Saint-Florentin a été étudiée. du bassin parisien et des villes, grandes ou - la connexion avec une ligne clas- Le raccordement sud de Mâcon entre la moyennes, de province. sique perpendiculaire légèrement déviée LGV Paris-Lyon et la ligne PLM Dijon- L’exemple à suivre est celui de l’Ita- (Le Creusot à la ligne Chagny-Ne- Lyon pourrait être utilisé pour desservir Vil- lie : 10 raccordements ont été aménagés vers, Haute Picardie à la ligne Amiens lefranche-sur-Saône. entre la Directissime Rome-Florence et - Saint-Quentin, Aix-en-Provence à la l Le rabattement sur des LGV de TGV la ligne classique parallèle. Les LGV Pa- ligne Aix-Rognac) ; en provenance de villes très éloignées de ris-Bretagne et Paris - Sud-Ouest ont été - la non-construction. La mise à ces LGV est également possible pour conçues intelligemment : nombreux rac- double voie (avec saut-de-mouton) du accélérer des relations transversales ou en cordements aux lignes classiques, pas de raccordement entre la LGV nord et la créer de nouvelles. gares TGV exurbanisées. ligne classique Lille-Paris au nord d’Ar- Le raccordement à Valence TGV de la ras permettrait d’accroître le nombre des LGV Méditerranée à la ligne classique Robustesse du TGV TGV intersecteurs desservant Arras dans du sillon alpin permet ainsi d’établir des le sens nord-sud, et d’éviter la construc- relations directes Annecy-Grenoble-Mar- Aujourd’hui, lorsqu’un TGV est blo- tion de la gare exurbanisée réclamée par seille. Le projet de VFCEA permettra à qué inopinément sur une LGV à la suite certains élus. des TGV Nantes-Lyon et Strasbourg- d’un incident technique, d’une chute de Le raccordement de Saint-Brès entre Lyon d’utiliser la LGV Paris-Lyon au neige importante ou d’un suicide, les le contournement de Nîmes-Montpel- sud du Creusot TGV. L’électrification de possibilités de détournement du trafic lier et la ligne classique aurait pu per- la ligne classique (Nancy)-Epinal-Lure sont très limitées. mettre de desservir la gare centrale de et la création d’un raccordement à la Ainsi, venant de Paris, un TGV ne peut Montpellier par les TGV ne marquant LGV Rhin-Rhône permettrait une des- entrer sur la LGV Paris-Lyon qu’à Saint- pas l’arrêt de Nîmes, et du même coup serte TGV Luxembourg-Metz-Nancy- Florentin et à Mâcon, et en sortir à Pa- d’éviter de construire la gare excentrée Lyon évitant un passage par Strasbourg ou silly, en direction de Dijon, et à Mâcon, de La Mogère. un rebroussement à Nancy.

6 x FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 Dossier

La FNAUT est-elle « trop ferroviaire » ?

(MD)

On reproche parfois à la FNAUT de trop se préoccuper du transport ferro- Elle retient du plan Freycinet sa volonté viaire, et de le privilégier à tout prix par rapport au transport routier. Des remarquable d’aménagement du territoire : le critiques justifiées ? rail contribue en effet efficacement au main- tien de l’activité économique et de la popu- Un mode privilégié par les usagers son réseau à la demande prévue (+ 51 % en lation dans les villes moyennes et petites. Et voyageurs, + 45 % en fret). La Grande-Bre- elle constate que le coût pour la collectivité L’intérêt que la FNAUT porte au rail ne re- tagne vient d’annoncer un investissement de des lignes à faible trafic pourrait être réduit lève pas d’un choix idéologique ou d’un attrait 54 milliards d’euros hors LGV ! L’Allemagne fortement si elles étaient exploitées « à la sentimental. Il est basé d’abord sur un constat : et l’Italie étendent elles aussi leur réseau de suisse » (FNAUT Infos 257) et dans le cadre le voyageur préfère le train au car et le tramway LGV. La Suisse perce un troisième tunnel de de délégations de service public. au bus, pour des raisons d’accessibilité, d’espace base pour le transport du fret, l’Autriche et Inversement, elle estime que le car doit disponible à bord, de confort. l’Italie ont trois tunnels en chantier. être soumis, comme les poids lourds, à une Tout transfert sur route, temporaire ou redevance routière : si c’était le cas, le car définitif, d’un service ferroviaire suscite de Une technique d’actualité n’apparaîtrait pas aussi peu coûteux pour vives protestations et entraîne une nette le consommateur. diminution de la clientèle du transport col- Bien qu’inventé au 19ème siècle, le train, lectif (FNAUT Infos 271). A l’inverse, les comme le vélo, reste d’actualité (mais l’idée Une vision intermodale rares réouvertures de lignes connaissent un qu’il est démodé se répand peu à peu) : ses remarquable succès. Et si, en ville, le rempla- qualités en font un outil précieux face à la Eloignée de tout sectarisme, la FNAUT cement d’un bus en site banalisé par un (vrai) congestion et aux nuisances routières, à la s’est toujours prononcée en faveur d’une com- BHNS permet d’augmenter la clientèle de dépendance pétrolière, au réchauffement cli- plémentarité intelligente des modes : si elle 30 % en moyenne, le choix d’un tramway matique... : sécurité, forte capacité, rapidité, est favorable à la concurrence, régulée, entre provoque au moins un doublement de clien- confort, économie d’énergie et d’émissions de opérateurs d’un même mode, elle est hostile tèle (FNAUT Infos 265). gaz à effet de serre, en particulier si la traction à la concurrence entre modes. L’intermoda- est électrique. Le rail est adapté comme ossa- lité, en particulier dans les gares, est pour elle Un mode en danger ture structurante du système de transport. un enjeu essentiel (FNAUT Infos 254). Le La mobilité va augmenter. Or seule le rail car est un complément du train, seul capable La FNAUT ne néglige pas les déplace- - métro, tramway, train - permet d’absorber d’assurer une desserte fine des territoires pé- ments urbains : nos associations locales inter- des flux importants et de faire basculer mas- riurbains et ruraux peu denses, le bus et le vélo viennent dans les métropoles comme dans les sivement les automobilistes et les passagers des compléments indispensables du métro ou villes moyennes. Mais il est normal qu’une aériens vers le transport collectif terrestre, du tramway. fédération nationale intervienne plus spécia- limitant ainsi les coûts externes de la route lement dans le secteur ferroviaire : contraire- et de l’avion (FNAUT Infos 170 et 235). Un créneau sous-estimé ment au cas du transport urbain, les décisions Les rares agglomérations (Lyon, Strasbourg, se prennent pour l’essentiel à l’échelle natio- Grenoble) où la part modale de la voiture est L’intérêt que la FNAUT porte au mode nale, de manière très centralisée. Le rail est devenue inférieure à 50 %, et les axes équipés ferré n’a donc rien à voir avec le passéisme en effet géré par un monopole, lui-même très de LGV le démontrent. ou le dogmatisme, il est basé sur des considé- dépendant de la politique de l’Etat. rations rationnelles et sur le constat que son Le transport urbain connait des difficul- Des propositions réalistes créneau de pertinence est très souvent sous- tés financières, et la polarisation sur les nou- estimé (FNAUT Infos 257) : velles mobilités fait oublier son rôle majeur. La FNAUT ne veut pas « mettre des - contrairement à la croyance de bien des Mais c’est le transport ferroviaire qui est TGV et des tramways partout », en ou- élus, le coût du tramway par voyageur cal- aujourd’hui le plus menacé - et dans toutes bliant les réalités géographique, démogra- culé sur 30 ans est inférieur à celui du BHNS ses composantes voyageurs et fret - par les phique et économique. (FNAUT Infos 265) ; modes concurrents mais surtout par la SNCF Le bus est pour elle un outil indispensable - les petites lignes exploitées par la SNCF elle-même, et le plus pénalisé par la politique du transport collectif urbain. sont bien loin de capter toute la clientèle inéquitable de l’Etat. Que la FNAUT soit Elle n’envisage pas un retour au réseau potentielle et leurs coûts peuvent être réduits fortement mobilisée par sa défense n’a donc Freycinet car la démographie française a fon- par d’autres opérateurs ; toutes les relations rien d’étonnant. damentalement changé depuis 1880. Elle TGV existantes pourraient devenir rentables s’est opposée à la LGV Poitiers-Limoges. In- si l’Etat révisait sa politique fiscale. Une technique moderne versement, si elle souhaite que la transversale Si le rail est bien exploité après avoir fait sud soit équipée d’une LGV, c’est parce que l’objet d’investissements suffisants, son succès La FNAUT n’est pas passéiste, elle suit le sud de la France, déjà très peuplé, est en commercial est assuré. l’évolution de la technique ferroviaire. Qui croissance démographique. En définitive, ceux qui reprochent à la oserait dire que le TGV, le métro automa- Elle soutient prioritairement des réouver- FNAUT d’être « trop ferroviaire » n’ont tique, le tramway ne sont pas modernes ? Les tures de lignes régionales en milieu dense qu’une vision financière à court terme, s’ac- « inventions » à la mode ne sont pas à la veille mais n’a jamais réclamé celle de Tournemire commodent de la place excessive de la voiture de détrôner le TGV (FNAUT Infos 267). - Le Vigan. Et si le tramway est apparu dans et du camion, et craignent que le rail - urbain Dans les pays voisins de la France, le tra- des agglomérations de moins de 200 000 ha- et interurbain - concurrence vigoureusement fic ferroviaire se développe et on y investit bitants (Besançon), elle estime que seul le bus la route et l’avion s’il est traité de manière lourdement. En Suisse, le Conseil fédéral va est adapté à la desserte des petites villes et des équitable par rapport aux autres modes. investir 10 milliards € d’ici 2035 pour adapter villes moyennes. Jean Sivardière z

FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 x 7 Dossier

Une vision ambitieuse de l’avenir une baisse de la part modale de la voiture dans L’analyse de Pierre Zembri du rail est nécessaire le transport intérieur total et une augmentation de celle du transport collectif, passée de 18,7 % Selon Pierre Zembri, professeur à à 20,5 % depuis 1990. l’université Paris-Est : « Le réseau fran- Cette tendance est confirmée par l’Office çais se démaille au gré de micro-dé- fédéral suisse du développement territorial. cisions prises indépendamment les D’après ses prévisions, le trafic ferroviaire de unes des autres, sans vision globale de voyageurs (surtout touristique) et de fret aug- ce que devrait être le réseau et de ce mentera d’environ 50% entre 2010 et 2040. qu’il devrait permettre. Une redoutable Jean Sivardière z question de politique publique est posée : la SNCF a capturé sa tutelle et UIC 7 à 9 interdit toute réflexion stratégique. N’en déplaise aux auteurs du rapport La classification internationale UIC Spinetta, il ne suffit pas de considérer concerne la maintenance du réseau ferré. Elle que le démaillage est un fait acquis et tient compte uniquement du tonnage supporté qu’il faut se recentrer sur la fraction du par chaque ligne : une ligne parcourue par de réseau encore utilisable. C’est une solu- nombreux TER supporte une faible charge (de tion de facilité et un renoncement. Les (MD) 11 à 15 tonnes par essieu) alors qu’elle peut britanniques nous ont donné l’exemple transporter plusieurs milliers de voyageurs par du redressement d’un réseau qui n’a L’évolution vraisemblable de la mobilité exi- jour, et se retrouve classée UIC 7 à 9. À l’op- laissé de côté aucune ligne et qui a gera un rôle accru du transport collectif et en posé, une ligne supportant un seul train lourd conduit à une augmentation spectacu- particulier du transport ferroviaire. Une vision de céréales par jour venant s’approvisionner laire de la part de marché du rail ». ambitieuse de l’avenir du rail s’impose donc, auprès d’un grand silo situé au milieu d’une Pierre Zembri note « l’absence de ro- qu’il s’agisse de la capacité et des performances plaine céréalière sort de la catégorie UIC 7 à 9. bustesse globale du réseau qui n’offre du réseau, de la couverture du territoire ou de Malheureusement, on déduit de manière pas un niveau de maillage suffisant la qualité de l‘offre. erronée de cette classification que les lignes pour permettre des alternatives en Il faut sortir de la vision défaitiste et malthu- 7 à 9 sont forcément des « petites lignes » à cas d’obstruction inopinée, de travaux sienne qui s’est imposée à la SNCF, chez les faible trafic. C’est souvent vrai, mais égale- programmés, ou éviter des risques de économistes et chez les politiques (y compris ment souvent faux. congestion des nœuds principaux ». certains écologistes). Dans leur vision consis- Autre gros problème qui défavorise considé- « Dès la constitution du réseau, les tant à gérer intelligemment la pénurie, le rail rablement les petites lignes : la SNCF applique compagnies ferroviaires ont privilégié devrait, à quelques exceptions près (de rares des normes de maintenance et de qualité de ni- les grands axes nationaux au départ liaisons Intercités dites structurantes, quelques veau national. On peut le comprendre parfois de l’Ile-de-France, au détriment de la autoroutes ferroviaires), se limiter aux liaisons pour des questions de sécurité lorsque la ligne plupart des lignes transversales et du TGV sur les LGV existantes et aux dessertes est parcourue par un important trafic voya- maillage du réseau par les lignes lo- de banlieue en région parisienne et dans les geurs, mais pour la plupart des petites lignes cales. Les axes privilégiés ont un tracé métropoles de province. fret (les petits ruisseaux qui font les grandes moins curviligne et comportent des Comme celui du tramway, le créneau du rail rivières), on pourrait baisser les exigences de rampes plus douces, en contrepartie est sous-évalué. Compte-tenu de l’évolution maintenance pour des trains qui souvent ne d’ouvrages d’art plus fréquents. Leur prévue de la population et de sa répartition, du dépasseront pas le 30 km/h sur les dessertes du capacité a été régulièrement renforcée contexte sociétal et culturel, de la fragilité des « dernier kilomètre ». (double voie, signalisation moderne). transports face à la dépendance pétrolière et Autre problème, le plus grave sans doute : on La SNCF, succédant aux anciennes des défis environnementaux, il faut envisager ne considère que rarement la faiblesse du trafic compagnies en 1938, a perfectionné un véritable « réaménagement du territoire » des petites lignes au regard de la qualité déplo- cette politique d’investissement sé- structuré par le rail. rable du service SNCF : retards, trains sup- lectif en concentrant ses efforts sur un primés, grèves ... Toutes choses qui ramènent nombre limité d’itinéraires qui ont été Confirmations immanquablement les voyageurs et les char- modernisés (notamment par l’électri- geurs vers leurs voitures ou leurs camions. Et fication qui permettait l’augmenta- De nombreuses études confirment qu’il ne nos décideurs politiques en déduisent que les tion des tonnages remorqués et des faut pas sous-estimer la demande future de Français se désintéressent des petites lignes ! vitesses), souvent au détriment d’iti- transport ferroviaire. Par exemple, en Région PACA, la ligne de la néraires concurrents ou complémen- En 2006, le Conseil Général des Ponts et Côte Bleue figure dans les lignes à faible trafic. taires qui étaient largement équiva- Chaussées a publié sa Démarche Prospective Or son trafic actuel ne correspond pas du tout à lents en termes de performance dans Transports 2050. Quatre scénarios d’évolution son véritable potentiel : seul le train parcourt le les conditions antérieures. de la société ont été étudiés, chacun implique littoral, alors que par la route, il faut remonter Ainsi, l’itinéraire Paris-Nantes par Le que la mobilité, de proximité et interurbaine, sur le plateau par des itinéraires perpendicu- Mans est privilégié par rapport à celui augmente fortement (+ 50 % en 2050). C’était laires au bord de mer, sans compter les embou- via Tours et Saumur. Paris-Bordeaux avant la crise économique. teillages à l’entrée de Marseille. En temps de via Tours et Poitiers est préféré à l’iti- Mais dans son rapport sur le nœud ferro- parcours effectifs, le train est imbattable, et de néraire via Saumur et Thouars. L’élec- viaire lyonnais, Marie-Line Meaux, membre très loin à certaines heures, et nettement moins trification de Paris-Lyon privilégie du Commissariat général du développement cher que la voiture. l’itinéraire par Dijon alors qu’il existait durable (CGDD), écrit en 2011 : « le report Toutes les lignes du Massif central et de auparavant trois possibilités équiva- modal ne pourra que progresser sous l’effet de l’Étoile de Veynes sont classées UIC 7 à 9. lentes en distance et en temps de par- l’évolution du prix de l’énergie et des compor- Si on leur applique rigoureusement des cri- cours du temps de la vapeur. Ce choix tements sociaux ». tères comptables, tout le centre de la France provoque malgré des investissements En 2016, le CGDD a publié des projections et toutes les Alpes du Sud seront dépourvues très importants (une partie importante de la demande de transport : la part modale du de desserte ferroviaire à brève échéance : belle de Paris-Dijon est à 4 voies) un gou- rail pourrait passer de 20,5% en 2012 à 22,4% opération de « massacre du territoire » ! let d’étranglement qui justifiera par la en 2030 et 25,7% en 2050 ; on observe déjà Claude Jullien, FNAUT PACA z suite la création d’une LGV ».

8 x FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 Dossier Voie verte ou réouverture ? Petites lignes ferroviaires

(MD)

Montréjeau-Luchon : un retour du train Désenclaver Digne par le train en 2020, 2023, 2026, aux calendes grecques ? Le nombre de pendulaires effectuant (Pixabay) chaque jour les trajets Digne-Manosque et Longue de 35 km et d’un profil assez Digne-Sisteron est surprenant : nombre de En janvier 2016, la FNAUT a passé facile, la ligne Montréjeau-Luchon à voie Dignois travaillent à Manosque ou Sisteron, avec les élus de Vitré et Fougères une unique, ouverte en 1873 et électrifiée en nombre de Sistéronais et Manosquins tra- convention selon laquelle l’aménage- 1925, a été fermée fin 2014. Il fallait 32 min vaillent à Digne. Et leurs déplacements quo- ment d’une voie verte sur l’emprise en 1975 pour la parcourir et 53 en 2014 : tidiens sont difficiles. de la ligne Vitré-Fougères, fermée en depuis 1953 aucun renouvellement global de L’accès routier à Digne est très embou- 1972, serait réversible pour permettre la voie n’a été réalisé et la SNCF a imposé de teillé (il le resterait quels que soient les à moyen terme le retour du train ; la nombreux ralentissements. aménagements routiers qui seraient effec- mise à disposition de l’emprise par Cet arrêt de mort programmé a conduit tués). Beaucoup de Dignois se découragent SNCF Réseau aurait une durée de à une réduction du nombre des trains Tou- et la population de Digne diminue, car 10 ans ; une étude indépendante se- louse-Luchon puis Montréjeau-Luchon, Digne est enclavé et son accès en transport rait réalisée pour évaluer le potentiel jusqu’à l’abandon du train de nuit Paris-Lu- collectif déficient et peu fiable malgré plus de trafic de la ligne. chon et à la fermeture de la ligne. Immédia- de 20 lignes routières : les cars se succèdent tement après la suppression du train de nuit, lentement sur l’unique RN 85 ; certains sont L’agglomération de Fougères doit-elle une baisse de la fréquentation de l’établisse- vides, d’autres sont complets et laissent des rester la seule agglomération bretonne ment thermal et un recul de l’activité hôte- usagers aux arrêts. de plus de 20 000 habitants sans des- lière et de l’activité économique globale du Forte de ces observations, la FNAUT serte ferroviaire ? Luchonnais ont été observés. PACA et ses associations d’usagers proposent Selon une étude sommaire de RFF ef- Alors que l’Occitanie a signé une nouvelle d’apporter une solution originale, efficace, fectuée en 2013, le train pourrait capter convention TER en mars 2018, son engage- et économique à cette situation : un service au moins 650 voyageurs/jour sur la seule ment à rouvrir la ligne en 2020 est aujourd’hui ferroviaire léger de type tramway à haute fré- relation Fougères-Vitré-Rennes, chiffre subitement remis en cause par SNCF Ré- quence entre Digne et Manosque d’une part, qualifié de « significatif » (il est supérieur seau qui, après deux ans d’études, s’est rendu Digne et Sisteron d’autre part. à la fréquentation de bien des lignes TER compte que d’autres travaux étaient néces- Un service original car le site propre inté- actuellement en service). Sans compter saires : la facture est passée de 36 puis à 60 et gral l’affranchirait de tout embouteillage, il avec les relations vers Paris depuis Rennes, enfin à 80 Mc, et la réouverture est repoussée pourrait être exploité par une régie régionale Laval ou le Mans. au mieux à 2023 ! ou en délégation de service public grâce à la La ligne d’autocar Fougères-Rennes Devant le désintérêt de l’Etat et de la SNCF libéralisation prochaine des services ferro- transporte d’ailleurs plus de 1 000 voya- pour les petites lignes, plusieurs questions se viaires régionaux, enfin il serait compatible geurs/jour : son transfert sur rail condui- posent : s’agit-il de condamner définitivement avec des relations à plus longue distance, de rait rapidement à un doublement de la le retour du train à Luchon ? D’accentuer et Digne vers Aix-en-Provence, Avignon TGV fréquentation. d’abandonner le Comminges à son isolement ? et Grenoble. A titre de comparaison, la ligne Avi- Plus globalement est-ce la fin de la compé- Un service efficace qui mettrait Siste- gnon-Carpentras transporte 1 100 voya- tence Transport des Régions ? ron ou Manosque à 25 minutes de Digne, geurs/jour un an après sa réouverture, la Le train, en complément avec la route, est ce qui encouragerait à travailler ou à vivre à ligne Pau-Oloron récemment modernisée pour le Luchonnais un outil de développe- Digne. Toutes les lignes de bus ou cars pour- 500 voyageurs/jour. ment économique et social dans une période raient être rabattues sur ce service. Se rendre Autre comparaison instructive : le coût de forte préoccupation environnementale. La de Digne à Manosque ou Sisteron et en reve- de la repose de la voie Fougères-Vitré a réouverture de la ligne pourrait être un labo- nir deviendrait facile et fiable même en pleine été évalué par SNCF Réseau à 57 Mc, à ratoire pour les lignes secondaires que l’Etat journée, avec la certitude de trouver de la peine plus de la moitié du coût de la dé- et la SNCF veulent abandonner. Laboratoire place, contrairement au car souvent complet. viation de Rostrenen (15 km en 2x2 voies sur le plan environnemental avec l’introduc- Les voyageurs arrivant de Nice pourraient sur la RN164), 118 Mc avec la création tion de trains « verts » ; et sur le plan éco- poursuivre leur voyage et ainsi retrouver une d’un shunt à Vitré permettant d’éviter un nomique en associant le transport du fret liaison vers le val de Durance. rebroussement à Vitré. à un trafic diversifié de voyageurs (l’usine Un service économique enfin, car aucune Le temps du trajet Fougères-Vitré- d’embouteillage d’eau minérale de Luchon, infrastructure ne serait à construire, la voie Rennes en train serait attractif : 1h, et environ 50 millions de bouteilles en 2017, est ferrée Manosque - Saint-Auban - Sisteron même 45 min avec le shunt de Vitré, située au bord de la ligne) ; enfin sur le plan étant sous-exploitée, et la voie ferrée Saint- contre 1h10 actuellement en car. social en recréant des haltes et des lieux de vie Auban - Digne, dont l’exploitation est actuel- On peut faire coexister en parallèle, autour des gares de la vallée. lement suspendue, pouvant être remise en comme sur Caen-Flers ou souvent en Alle- La réouverture est demandée par les milieux exploitation, dans les mêmes conditions que magne, voie ferrée et voie verte. économiques, les associations, les élus locaux... lors de l’arrêt de l’exploitation, après des tra- Le retour du train à Fougères n’est pas et fortement soutenue par la Présidente de la vaux estimés à 30 Mc... un rêve : peu coûteux et utile économi- Région. Elle doit se faire dès 2020, suivant le Un tel service améliorerait fortement les quement et socialement, il contribuerait calendrier arrêté avec la SNCF. C’est la survie conditions de mobilité dans un territoire ru- surtout à la lutte contre le réchauffe- d’un territoire qui est en jeu ! ral. Cette proposition de la FNAUT PACA a ment climatique. Jean-Pierre Wolff, professeur été présentée lors du Grand Débat National. Xavier Braud z à l’université de Toulouse z Jean-Michel Pascal z

FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 x 9 Dossier Une réouverture fragile

Rouvrir une ligne ferroviaire pour satisfaire les voyageurs ne suffit pas, encore faut-il l’exploiter intelligemment (voir Belfort-Delle, FNAUT Infos 275).

Depuis la fin 2018, on peut à nouveau emprunter les 2 liaisons transfrontalières Maubeuge-Mons et Maubeuge-Charleroi- Namur. Elles sont assurées par la Société Nationale des Chemins de fer Belges à raison de 2 AR quotidiens, le tarif est très (MD) attractif. Elles sont en correspondance avec des trains belges vers Bruxelles et Liège, et Concentration du trafic Une relation directe Colmar-Freiburg, ef- des TER Hauts-de-France qui desservent ou maillage du réseau ? fectuée en 45 minutes, serait assurément très Saint-Quentin, Compiègne et Paris. Mais attractive. Le projet nécessite la construction elles font face à trois problèmes. Lyria, société détenue par la SNCF et les de ponts sur le Rhin et la rénovation des La communication est insuffisante côté CFF qui exploite les liaisons franco-suisses 22 km de la voie ferrée entre Colmar et Brei- belge, et indigente côté français. Ainsi, par TGV, envisage de supprimer des liai- sach. Au total, il s’agit d’un investissement durant 4 mois, aucune information n’était sons TGV Lausanne-Vallorbe-Dijon-Pa- de l’ordre de 50 à 70 millions d’euros. Trans- affichée en gare de Saint-Quentin. Il a fallu ris au profit d’un passage via Genève. Elle RhinRail, association franco-allemande insister beaucoup pour que soit finalement pourrait ainsi mieux remplir ses TGV et membre de la FNAUT, milite depuis 2012 accrochée une simple affiche au format A4. améliorer sa rentabilité, mais cette hypo- pour ce rétablissement. Souvent les correspondances ne sont thèse ignore le fait que la ligne Lausanne- L’étude de faisabilité présentée début pas assurées, notamment à cause des re- Genève est déjà la ligne la plus fréquen- mars 2019 est favorable, envisageant de tards récurrents des TER au départ de Paris. tée de Suisse, complètement saturée avec 3 500 à 5 900 voyageurs par jour. Il reste De nombreux travaux, en France comme 670 trains/jour, voyageurs (60 000 par jour à analyser le rapport coûts-bénéfices, à en Belgique, perturbent leur bon fonction- aujourd’hui, 100 000 prévus en 2030) et répondre à la question du financement, à nement en 2019. fret. Or cette ligne ne présente aucun itiné- recueillir l’avis du public… Résultat : la fréquentation de ces lignes raire de détournement possible. est encore très inférieure à leur potentiel Si des TGV Paris-Lausanne étaient Nice-Turin réel. SNCF et SNCB doivent donc s’effor- détournés par Genève, ce serait inévitable- cer de les faire connaître davantage et de ment au détriment de sillons actuellement La ligne est toujours en danger. Malgré les pérenniser. dédiés au trafic intérieur suisse. D’autre 29 Mc de travaux financés par les italiens, Michel Magniez, AUTAN (ass. des usagers des part, le temps de parcours serait allongé, ce la vitesse des trains reste bloquée à 40 km/h. transports Aisne Nord, Oise, Somme) z qui renforcerait la concurrence aérienne et Quant à la tranche française des travaux pénaliserait l’environnement. (15 Mc) prévue au Contrat de Plan Etat Les lignes du Morvan A noter qu’une forte augmentation de la Région, l’Etat et la Région ne les débloquent capacité de la ligne Genève-Lausanne (voire toujours pas, bien que la Communauté L’association Rail Vaux d’Yonne (RVY), la construction d’une nouvelle ligne) est d’Agglomération de la Riviera Française et membre de la FNAUT, basée à Corbigny et envisagée, ce qui laisse prévoir une longue le Département des Alpes-Maritimes aient présidée par Michel Belin, défend depuis période de perturbation par les travaux. prévus de participer chacun pour 2 Mc. ll 24 ans les lignes du Morvan. Elle s’insurge faudrait disposer de 80 Mc pour pouvoir contre la stratégie suicidaire de SNCF Mo- Colmar-Breisach-(Freiburg) : remettre la ligne à niveau, soit moins de 1 % bilités, qui provoque une érosion notable une réouverture justifiée du coût du Lyon-Turin, pour pérenniser une de la fréquentation du train : guichets liaison régionale essentielle. fermés, informations peu fiables voire La ligne ferroviaire Colmar-Breisach- Des deux côtés de la frontière, les élus inexistantes, tarifs compliqués, temps de Freiburg a fonctionné côté français jusqu’à s’organisent en associations. Ils ont dé- parcours dissuasifs... la destruction du pont sur le Rhin en mars cidé de fêter en septembre les 40 ans de La voie Clamecy-Corbigny, au sud 1945. Sa réouverture aurait une portée la réouverture de la ligne Nice-Turin : à d’Auxerre, n’a pas été régénérée depuis symbolique très forte : la ligne emprunte- l’époque, des centaines de millions de 1980. La sécurité des circulations de trains rait le seul pont sur le Rhin (entre Neuf- francs ont été dépensées pour reconstruire exigera bientôt une mise à niveau, la me- Brisach et Breisach) n’ayant pas été recons- la voie ferrée, mais aujourd’hui français et nace de fermeture est sérieuse. Quant à la truit après la seconde guerre mondiaale. italiens n’arrivent pas se mettre d’accord réhabilitation de la voie Clamecy-Nevers Côté allemand, la ligne Breisach-Frei- sur une juste répartition des dépenses de par Varzy, elle est éternellement à l’étude. burg voit sa fréquentation augmenter très fonctionnement. fortement (3 000 voyageurs par jour en Un premier train historique italien a Casse organisée 1999, près de 14 000 en 2016) avec des ser- circulé le 22 avril. La mise en vente des vices cadencés à la demi-heure. Fin 2019, billets a débuté le 20 avril à 20h et, une Jean-Claude Rocher, vice-président de cette ligne aura été modernisée, électrifiée heure après en pleine nuit, toutes les l’association Rail Vaux d’Yonne : « C’est et prolongée vers la Forêt-Noire. places ont été vendues ce qui montre bien une casse organisée ! La SNCF est deve- La liaison actuelle en autocar depuis Col- l’intérêt que la population porte à cette nue une machine à refouler les voyageurs, mar dure 1h30 jusqu’à Freiburg, située à... ligne et l’importance de son potentiel qui sont méprisés ». 40 km. Elle est donc dissuasive pour la plu- touristique. Une autre animation histo- Robert Cuchet, président de l’associa- part des usagers potentiels. Les nombreux rique et touristique est programmée le tion Grenoble-Veynes (AGV) : « nous ne travailleurs transfrontaliers alsaciens sont dimanche 22 septembre. se battons pas pour sauver une diligence, donc contraints de laisser leur voiture au Michel Braun, secrétaire de Via Europe, mais pour qu’on investisse dans un sys- parking de la gare de Breisach. association regroupant les élus concernés z tème d’avenir ».

10 x FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 Actualité La chronique du Lyon-Turin Actualités des transports Grands travaux Ligne capillaire La gratuité des transports Les grands travaux ferroviaires (LGV, et emploi industriel rural Lyon-Turin, CFAL, VFCEA, autoroutes fer- Le GART a confié au cabinet ITER roviaires) – qu’il est aujourd’hui de bon La verrerie américaine Owens Illinois une étude visant à objectiver le débat sur ton de dénigrer (ils seraient ruineux et Manifacturing de Gironcourt-sur-Vraine la gratuité totale des transports publics inutiles) - sont l’équivalent des autoroutes (Vosges, 1 000 habitants) a été créée en en France. pour le réseau routier ordinaire et des mé- 1903 pour fabriquer des bouteilles d’eau Le conseil scientifique du GART, où je tros et tramways pour les réseaux d’auto- minérale, en lien avec l’essor du therma- représente la FNAUT, a pris connaissance bus urbains : ils peuvent seuls provoquer lisme local (Vittel, Contrexeville), qui des premières conclusions de l’étude ; la des basculements vraiment massifs de souhaitait un approvisionnement local sûr restitution finale aura lieu à l’occasion des trafics sur le rail. et économique. Mais elle travaille, depuis Rencontres nationales du transport public, Sans autoroutes (que le lobby routier 50 ans, exclusivement pour le marché de la organisées du 1er au 3 octobre à Nantes. n’oppose pas aux petites routes), la cir- bière : 450 personnes y fabriquent 4 mil- Voici une partie de la conclusion de la culation des voitures et camions n’aurait lions de bouteilles par jour. synthèse de l’étude : pas explosé comme elle l’a fait, hélas, Elle peut aujourd’hui continuer à expor- « Si l’ambition d’un territoire pour son depuis 50 ans. ter l’essentiel de sa production de bou- réseau de transport public est d’en faire une Sans métros et tramways, la part mo- teilles par train suite à la rénovation de la réelle alternative modale à l’usage de la voi- dale de la voiture à Lyon, Strasbourg et ligne capillaire Gironcourt-Neufchâteau ture, la mise en place de la gratuité totale ne Grenoble ne serait pas devenue inférieure (29 km) pour un coût de 5 Mc financé par peut être la première réponse à cet enjeu. à 50 %, et des fortunes auraient été dé- l’entreprise, SNCF Réseau, l’Etat et les Le développement d’un réseau perfor- pensées dans ces villes pour augmenter la collectivités locales : 9 000 traverses ont mant, attractif et à haut niveau de service capacité des voiries et des parkings. Sans été remplacées, 8 trains complets par se- associé à une gestion de l’espace public la LGV Paris-Lyon, on aurait encore un maine sont expédiés à destination d’Ober- qui lui est favorable doit être la première pont aérien entre Paris et Lyon, et l’auto- nai (Alsace), capitale régionale de la bière, priorité. S’il est démontré que la gratuité route A6 serait intégralement à 2 x 3 voies. pour le brasseur Kronenbourg. « booste » dans un premier temps la fré- Et, sans tunnels de base, la part modale du La verrerie a mis en service un troisième quentation, liée en partie à une « sur-mo- fret ferroviaire serait-elle aujourd’hui de four, 60 emplois industriels ont ainsi été bilité » d’anciens usagers, on observe sur 70 % sur l’axe nord-sud en Suisse ? créés en milieu rural. Sans le rail, l’avenir le moyen/long terme un ralentissement de L’opposition au projet Lyon-Turin est de la verrerie était sérieusement menacé. l’usage si l’offre n’est pas soutenue ». décidément incompréhensible... Alain Richner, pilote du réseau BIEN DIT Déplacements urbains de la FNAUT z Le Lyon-Turin et l’Europe Selon Jacques Chauvineau, ancien di- L’aveuglement Les déclarations de l’écrivain italien Erri recteur de l’action régionale à la SNCF, il d’un haut fonctionnaire De Luca en faveur de l’unité européenne faut « sortir de l’alternative fermeture/im- (La Croix du 23 avril : « L’Europe est indis- mobilisme en faisant des lignes capillaires Gérard Belorgey, dans « Le gouverne- cutable ») sont très respectables. Mais ce un champ d’innovation : statut territorial ; ment et l’administration de la France », que n’a pas dit M. De Luca, c’est qu’il est utilisation de certaines d’entre elles à la fois 1967, page 421 : « L’urbanisme doit épou- un opposant acharné au projet de nou- pour des dessertes fret et voyageurs (tou- ser l’automobile parce que tous les citoyens velle liaison ferroviaire Lyon-Turin. risme) ; simplification des modalités de ont épousé l’automobile ou vont l’épou- Or cette liaison, tout à fait compa- rénovation, d’entretien et d’exploitation ; ser. Foin des malthusiens aux yeux aveugles rable au tunnel sous la Manche, contri- prospection commerciale. Il faut abandon- qui rejettent l’automobile ». buera, outre son impact environnemen- ner l’idée fausse que ces lignes sont défini- Une vision affligeante : le président Pom- tal décisif, à la cohésion européenne en tivement ringardes, appartiennent au passé pidou n’était pas seul à préconiser l’adapta- favorisant les échanges économiques et et relèvent de la nostalgie ». tion de la ville à l’automobile... culturels entre la France et l’Italie. Plus Une vision totalement absente du rap- généralement, elle constituera un outil port Spinetta (FNAUT Infos 264), qui a Un député très mécontent structurant d’aménagement du terri- écarté toutes les idées nouvelles permet- toire européen en permettant un réé- tant de sauvegarder la pertinence écono- Joel Giraud, député des Hautes-Alpes quilibrage économique entre Europe du mique des lignes capillaires et de les main- et défenseur très actif du rail, a écrit à la Nord et Europe latine. tenir en activité. SNCF début janvier 2019 (il utilise régu- Jean-Luc Chapron est l’ancien ex- lièrement le train) : « les gares de L’Argen- Autoroutes ferroviaires ploitant de la ligne capillaire Wassy - tière, Montdauphin et Embrun (dont la Saint-Dizier (Haute-Marne) qui des- modernisation récente a été financée par Trois mois après avoir lancé une auto- servait des fonderies et acheminait plus l’Etat, la Région et les collectivités locales) route ferroviaire entre Calais et Turin-Or- de 50 000 tonnes de fret par an jusqu’à sont fréquemment fermées lors du passage bassano, Lorry Rail, la filiale commune de Saint-Dizier. Il remarque que « le déficit des trains et en particulier du train de nuit la SNCF, des CFL et de Lohr Industries, a cumulé du réseau d’autocars Ouibus créé Paris-Briançon. Il faut donc attendre le inauguré une nouvelle liaison entre le en 2012 et développé par SNCF Mobi- train à l’extérieur, par des températures très terminal intermodal de Barcelone et celui lités (FNAUT Infos 259) aurait suffi à négatives sans abri possible voire même, de Bettembourg (Luxembourg). Grâce à remettre en état l’ensemble du réseau par deux fois récemment, en pleine tempête cette nouvelle autoroute ferroviaire de capillaire fret ». de neige. En absence d’information sur la 1219 km, 23 000 tonnes de CO2 seront Il propose de réintégrer dans le réseau composition du train de nuit, il faut courir, économisées chaque année : le service, ferré national toutes les lignes le raccor- pour trouver sa voiture, sur des quais non ouvert aux remorques et aux containers dant à au moins une agglomération ur- déneigés (et même, à L’Argentière, plongés permet d’économiser environ 1 tonne de baine ou un site important générateur de dans l’obscurité depuis une panne que la CO2 par remorque et par voyage. trafic de fret. SNCF tarde à réparer) ».

FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 x 11 Actualité

Les dangers de la vitesse morcellement des services ferroviaires, souvent Brèves mal coordonnés entre régions limitrophes, assurés par des matériels bariolés de manières Déplacements domicile-travail disparates du nom de la Région (l’usager doit savoir que le TER est géré par le Conseil régio- Trois Français sur quatre prennent leur nal alors que son principal souci est que le train voiture pour aller travailler : par confort arrive à l’heure). (33 %) ou par obligation (51 %). Seule- Jacques Ottaviani, FNAUT Aquitaine z ment 51 % des salariés vivant et travail- lant dans la même commune utilisent la Le transport par câble : voiture. Mais 89 % des salariés travaillant un créneau spécifique dans une autre commune que celle où ils habitent l’utilisent : en Ile-de-France, ils ne Le transport par câble, ou téléphérique ur- sont que 47 %. bain, est l’objet d’une mode (FNAUT Infos Dans le Cantal, le Gers et la Creuse, seule- 251, 275), comme autrefois le « tramway sur ment 2 % des salariés choisissent le train ou pneus » (FNAUT Infos 275). le car ; dans Paris intra-muros, la proportion Le Câble A-Téléval est un projet (approuvé est de 68 %. L’explication est un étalement (Pixabay) par l’AUT Ile-de-France) qui reliera le termi- urbain de plus en plus prononcé et des nus de la ligne 8 du métro parisien (Créteil) transports en commun inexistants ou lar- La vitesse sur la route est-elle dangereuse ? à Villeneuve-Saint-Georges vers 2021-2022, gement défaillants. Un salarié privé de voi- Quels sont les dangers spécifiques liés à la vi- via Limeil-Brévannes et Valenton. Un télé- ture voit le nombre des emplois qui lui sont tesse ? Est-ce souvent une cause déclenchante phérique « pour survoler les embouteillages », accessibles en moins d’une heure de trajet ou aggravante d’accident ? Conduisons-nous selon un journal local. diminuer de moitié : le besoin de transport avec un maximum de sécurité aux vitesses au- L’enquête publique en cours fournit des élé- collectif est criant (Source : Les Echos). torisées ? Quelles sont les erreurs de conduite ments utiles d’appréciation : observées aux vitesses légales ou illégales ? - le coût estimé est de 132 Mc€ pour 4,5 km, Appel à projets innovants « Les dangers de la vitesse» : ce livre est le soit environ 30 Mc/km ; point de vue d’un professionnel, Cuidado - la durée du trajet sera de 17 min soit une L’ADEME vient de lancer un appel à pro- Velocidad, formateur à la conduite automobile vitesse proche de 16 km/h ; jets intitulé « accélération du développe- (formation initiale en auto-école, puis forma- - les 60 cabines de 10 places défileront ment des écosystèmes d’innovation per- tion continue et « post-permis » auprès des toutes les 30 secondes, d’où un débit possible formants dans le cadre des investissements entreprises et des administrations) qui exerce de 1 200 voyageurs/h/sens ou 10 000 par jour. d’avenir ». Les projets doivent « relever de depuis plus de 20 ans et conduit depuis 30 ans. Le Téléval desservira plus de 20 000 habi- la mobilité durable, concourir aux objectifs L’auteur a souhaité donner son point de vue tants et 6 000 emplois. Il franchira la vaste de la future LOM et permettre d’améliorer car, souvent, il est affirmé que les accidents gare de triage de Villeneuve-Saint-Georges les mobilités du quotidien pour tous les ci- seraient principalement dûs à des lacunes de la et reliera des communes jusqu’ici séparées par toyens et sur tous les territoires grâce à de formation en auto-école, au mauvais état des d’imposantes coupures urbaines (voies ferrées, solutions de transports plus propres, plus réseaux routiers, au manque de vigilance des autoroute, lignes à haute tension, LGV...) qui efficaces et plus accessibles ». conducteurs, à l’alcool au volant, et non à une limitent la faisabilité technique et financière Suggestion de la FNAUT : créer, dans un vitesse inadaptée. d’autres modes de transports. département rural, un réseau d’autocars sur Editeur : Books on Demand. Le livre peut Quelques observations peuvent aider les as- le modèle du Bregenzerwald (FNAUT Infos être acheté en ligne (frais d’envoi à prévoir) sociations de la FNAUT à débattre des projets 270). Succès assuré si l’offre est bien adap- sur le site de l’éditeur (https://www.bod.fr/ de téléphérique : tée aux besoins ! En clair : on peut oublier librairie/les-dangers-de-la-vitesse-cuidado- - la distance à desservir ne doit pas être trop « les véhicules automatisés et connectés, velocidad-9782322127306), ou commandé en longue car la vitesse est relativement lente ; la mobilité intelligente, l’amélioration de la librairie. 48 pages, 4,99 c TTC. - les cabines doivent dès le départ être di- fiabilité des transports par câble et l’écocon- mensionnées pour accueillir le flux prévisible, ception des infrastructures routières ». Adieu TER... qui n’est pas celui d’un transport de masse ; - l’entretien régulier du câble, comme pour Sujet de bac (session de rattrapage, Ne dites plus TER mais ZOU ! en Région les funiculaires, nécessite chaque année l’arrêt toutes sections) PACA. Selon Renaud Muselier, président de complet du service ; la Région, « la marque ZOU ! concrétise la - les effets de l’ordonnance du 18 juin 2015 Discuter cette affirmation du sociologue promesse d’un changement, unifie et harmo- sur le survol possible des propriétés privées Eric Hamelin, auteur de l’ouvrage « La ten- nise un réseau plus cohérent et équilibré basé restent à évaluer. tation du bitume, où s’arrêtera l’étalement sur l’accessibilité et l’intermodalité ». A Grenoble, le téléphérique, mis en service urbain » (2012) : « il faut ramener de la cam- TER est devenu Breizhgo en Bretagne, en 1934, modernisé en 1951 et en 1976, per- pagne en ville, et non plus de la ville à la Fluo en Grand Est (« un nom choisi pour met de franchir une rivière, l’Isère, et d’accéder campagne ». son côté jeune, facile et fluide »), Mobigo en au fort de la Bastille en profitant d’un beau Bourgogne-Franche-Comté, Rémi (REseau point de vue sur la ville. A Brest, le téléphé- FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information de Mobilité Interurbain) en Centre-Val-de- rique mis en service en 2016, permet de fran- Directeur de publication : Jean Sivardière Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT Loire, ALEOP en Pays de la Loire et LIO chir un fleuve, la Penfeld, et d’admirer le port CPPAP 0920 G 88319 - Dépôt légal n°276 - ISSN : 0983-172 X (Lignes Intermodales) en Occitanie. militaire et la rade. Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative En Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle En résumé, le transport par câble est bien Avenue de la Plage - 86240 Ligugé Abonnement papier 1 an (10 numéros) : Individuels : 19 b Aquitaine, Hauts de France et Norman- adapté pour gravir des pentes, franchir des obs- Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b die, le TER s’appelle encore TER : frus- tacles naturels ou mettre fin à l’effet de coupure Prix au numéro : 2 b - Diffusion numérique libre trés, les usagers attendent avec impatience de certaines infrastructures en milieu urbain. Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT un nouveau nom. L’intérêt touristique est un élément important de votre région, contacter notre permanence : 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris Tous ces nouveaux nom régionaux préten- à prendre en compte. tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06­ tieux pour désigner un service TER bien connu Alain Richner, pilote du réseau e-mail : [email protected] de tous ne font qu’accentuer l’impression de Déplacements urbains de la FNAUT z Internet : https://www.fnaut.fr

12 x FNAUT infos n°276 - juillet-août 2019 infos 277 septembre 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Une ligne fragile L’avenir du rail Le 2 juillet 2019, le trafic ferroviaire a été totalement interrompu sur la ligne clas- sique de Maurienne, entre Saint-Jean-de- Maurienne et Modane, suite à un nouveau Grands projets glissement de terrain (le précédent datait Gare de dépôt Gare TGV de Charetnon-le-Pont (MD) de janvier 2019). Les voies ont été recou- et méthodes d’exploitation du train vertes d’une couche de boue (de 1 à 2 m d’épaisseur) sur 60 mètres. Tous les trafics ont été bloqués ou dé- tournés : TER Chambéry-Modane, trains de voyageurs France-Italie (TGV SNCF Pa- ris-Turin-Milan et la plupart des trains de nuit Thello Paris-Venise), trains classiques de fret et autoroute ferroviaire alpine. Ce grave incident met en évidence la fragilité de la ligne classique de Mau- rienne, et la nécessité de disposer d’une infrastructure fiable pour garantir un re- port décisif du trafic routier sur le rail. Une autoroute, bien protégée des aléas natu- rels, a déjà remplacé la route nationale : le rail doit combler rapidement un retard Les besoins de déplacements des voyageurs à longue distance font de plus évident. L’interruption du trafic ferroviaire en plus partie de la vie quotidienne (voir page 10). Pour les satisfaire autrement souligne le caractère indispensable de la liaison Lyon-Turin (tunnel interfrontalier que par l’avion, une adaptation des infrastructures ferroviaires est nécessaire : les et lignes d’accès depuis Lyon et Turin) et grands projets de lignes nouvelles ne doivent pas être reportés indéfiniment. renforce l’urgence de sa réalisation. Mais il faut aussi mettre en place une offre (fréquences élevées suivant En aucun cas, contrairement à ce qu’af- l’exemple des compagnies aériennes à bas coût), une tarification et une firment sans cesse les opposants au Lyon- commercialisation adaptées aux voyageurs. Turin qui ont à nouveau démontré leur to- Alors que les initiatives tarifaires récentes de la SNCF présentent à la fois tale incompétence et leur irresponsabilité, des aspects positifs et négatifs pour les voyageurs, l’exemple de la réforme la ligne classique de Maurienne ne peut tarifaire lancée en 2013 par la RENFE (la « SNCF » espagnole a fortement ré- constituer une alternative à cette liaison duit ses tarifs) mérite d’être étudié très sérieusement. et absorber un report massif de trafic Quant au transport de fret, il est urgent d’en reporter une part importante routier, en raison de son profil difficile, de sur le rail, actuellement handicapé par les petits gabarits de certains ouvrages sa capacité insuffisante, de son manque de compétitivité face à la route et - on le d’art, la vétusté de ses infrastructures et leur manque de capacité. vérifie aujourd’hui - de sa sensibilité aux éboulements qui risquent de devenir plus Sommaire fréquents suite au réchauffement clima- Les projets de lignes ferroviaires nouvelles 2 tique qui déstabilise les parois rocheuses. RER B, CDG Express et ligne 17 en Ile-de-France 3 Jean Sivardière z La liaison Lyon-Turin est bien partie 4 Le choix BHNS-tramway : un résumé 5 Colloque de la FNAUT Le canal Seine-Nord. Des guichets nécessaires 6 Le prochain colloque de la FNAUT La nouvelle grille tarifaire SNCF 7 sera consacré aux déplacements dans Le choix audacieux de la RENFE 8 les villes moyennes, avec le soutien de Le 80 km/h : un abandon irresponsable. Les bouchons routiers 9 l’association Villes de France. Il aura lieu La canicule et le climat. Les déplacements à longue distance 10 jeudi 10 octobre 2019 à Paris. Les nouvelles taxes sur l’avion et le camion 11 Programme et inscription sur le site de Forum des lecteurs 12 la FNAUT : colloque.fnaut.fr

FNAUT infos n°277 - septembre 2019 x 1 Dossier

Les projets de lignes ferroviaires nouvelles

MD

La priorité doit être évidemment accordée aujourd’hui à la régénération du réseau D’autres projets à accélérer ferroviaire classique, après des années de sous-investissement, afin de relancer les transports collectifs de la vie quotidienne et limiter ainsi la dépendance automobile. Il s’agit d’abord de la ligne nouvelle Marseille-Toulon (dont la nouvelle gare Pour autant, la FNAUT estime que les du nœud ferroviaire lyonnais (NFL), indispen- souterraine de Marseille). projets de lignes nouvelles ne doivent pas sables à l’écoulement du fret nord-sud ; Le prolongement de la LGV Rhin-Rhône être reportés indéfiniment, surtout lorsqu’ils - la ligne (intégralement mixte fret/voya- de Belfort à Lutterbach (35 km), réclamé concernent le transport du fret et les liaisons geurs et sans gares TGV excentrées) Mont- par le Sénat et acté par la ministre, apparaît internationales (FNAUT Infos 260, 263, 267 : pellier-Perpignan, donnant accès au réseau des également comme un complément fort utile, voir en particulier le rapport de la Cour des LGV espagnoles et au port de Barcelone. qui valorisera la LGV Rhin-Rhône actuelle, comptes européenne). La FNAUT préconise aussi la modernisa- trop courte, sur l’axe radial comme sur l’axe tion (électrification et mise au gabarit) de la transversal. Une gare TGV-TER à Vandières Les priorités ligne Nevers-Chagny (VFCEA), susceptible valoriserait de même la LGV Est. d’alimenter le Lyon-Turin depuis les ports Le quasi-monopole routier pour le transport atlantiques (FNAUT Infos 276). Renforcer les atouts du rail du fret fragilise notre économie en la liant au prix fluctuant du pétrole. Or le rail transporte à Un équilibre entre régions Le TGV ne peut fonctionner correctement peine 10% du fret en France mais plus de 23% et renforcer ses atouts que si le réseau des en Allemagne, 38 % en Suède, 40 % en Suisse, La FNAUT défend également d’autres LGV est complété. 42 % en Autriche. projets restés en suspens et qui doivent abso- Rappelons par ailleurs que, si les projets Cette exception a un lourd impact sur la lument être reprogrammés à des dates plus de lignes nouvelles concernent les dépla- sécurité routière, la vie des riverains des grands proches que celles suggérées par le Comité cements de personnes à longue distance et axes routiers, la balance commerciale et le cli- d’Orientation des Infrastructures, dans un but internationaux (Paris-Italie, France-Es- mat. Elle est due en particulier à la vétusté du d’équilibre des investissements entre régions : pagne), ils facilitent aussi les déplacements réseau ferré, à son inadaptation à un trafic mas- - le tronçon Paris-Mantes, première phase quotidiens en désengorgeant des lignes clas- sif de fret, à la saturation des grands axes par les de la ligne nouvelle Paris-Normandie ; siques : Marseille-Nice, Bordeaux-Toulouse, trains de voyageurs, au manque de sillons fret - le très court barreau Roissy-Creil, projet Nîmes-Narbonne, Paris-Mantes. La ligne compétitifs face à la route. dit Roissy-Picardie (FNAUT Infos 276), qui d’accès au tunnel du Lyon-Turin depuis La FNAUT préconise donc que la priorité permettra de rattacher Amiens au réseau des Lyon sera utilisable par les TER reliant les soit donnée au transport du fret sur longue dis- LGV mais concerne aussi la vie quotidienne villes du sillon alpin à Lyon. tance, donc au dispositif comprenant : des employés de Roissy ; - la liaison Lyon-Turin, essentielle pour les - les aménagements de la ligne classique La concrétisation simultanée des liaisons échanges fret et voyageurs à travers les Alpes Bordeaux-Toulouse au sud de Bordeaux et au internationales vers l’Italie et l’Espagne (le tunnel de base et ses accès depuis Lyon et nord de Toulouse puis la section Agen-Tou- et de projets nationaux plus modestes Turin forment un ensemble indissociable) ; louse comme première phase de la LGV Bor- permettrait à la fois d’obtenir enfin des - le contournement ferroviaire est de l’agglo- deaux-Toulouse, la section classique étant la connexions ferroviaires à haut débit avec mération lyonnaise (CFAL) et l’aménagement plus sinueuse. l’ensemble de nos voisins européens et d’avoir une répartition plus équilibrée des lignes nouvelles sur le territoire français.

Le financement

Un effort exceptionnel de financement est indispensable pour mener à bien tous ces projets dans des délais raisonnables. Est-ce utopique ? l Par tête d’habitant, la France investit 38 c dans les travaux ferroviaires ; l’Allemagne 69 c et la Suisse 362 c (source La Vie du Rail). l On a bien réussi à financer le Grand Paris Express (y compris des lignes inutiles ou luxueuses), le canal Seine-Nord et de nombreux projets autoroutiers totalement contradictoires avec les objectifs environne- mentaux (biodiversité, climat) du gouverne- ment. Or l’ensemble des projets évoqués ci- dessus est moins coûteux (environ 28 Mdc) que le seul Grand Paris Express (dont le coût est passé de 25 à 35 Mdc en 2017)... Jean-François Troin, animateur Source : J-F Troin du réseau LGV-TGV de la FNAUT z

2 x FNAUT infos n°277 - septembre 2019 Dossier Le terminal 4 de CdG Ile-de-France : RER B, CdG Express et ligne 17

Aéroport de Rossy-CdG (Wikipedia)

Chaque jour 14000 Picards se rendent à Roissy. L’Oise est le second département Gare RER B de Roissy-CdG 2 (MD) pourvoyeur d’emplois directs de Roissy (14,6%) et 90 % de ces déplacements se Le RER B assure seul la desserte ferrée, l L’AUT souhaite qu’un arrêt intermé- font en voiture. L’exploitation du termi- hors grandes lignes, de l’aéroport de Roissy, diaire soit prévu à Stade de France pour nal 4 entraînera donc une hausse de ces cumulant les fonctions de desserte omnibus permettre une correspondance aisée entre migrations quotidiennes. de la banlieue nord et de liaison « rapide » le CdG Express et la ligne 15 du Grand Le dossier du maître d’ouvrage insiste ville-aéroport. Il en résulte un service très Paris Express. Cette interconnexion procu- sur l’accessibilité routière alors que le médiocre, aucune des deux fonctions n’étant rerait aussi un deuxième accès à La Défense recours à la voiture est trop souvent obli- correctement remplies. sans passer par Paris. gatoire et que la solution la plus pratique Les investissements en cours (moderni- l L’AUT rappelle la nécessité de réaliser pour les salariés et passagers et la plus sation de l’infrastructure, terminus intermé- avant le CdG Express la liaison piétonne écologique est le développement des diaires, signalisation Nexteo, matériel roulant souterraine entre la gare de l’Est, Magenta transports collectifs. à deux niveaux à partir de 2024…) devraient et la Gare du Nord qui mettra les voyageurs La FNAUT Hauts de France soutient la améliorer le service rendu aux voyageurs quo- du CdG Express en relation avec trois construction du barreau ferroviaire Rois- tidiens. Mais les trains de grande capacité à lignes de RER (E à Magenta avec accès di- sy-Picardie (LNRP) qui montre là toute deux niveaux, indispensable pour la desserte rect à La Défense, B et D à Gare du Nord) sa pertinence. Cette liaison correspond banlieue, seront difficilement accessibles aux en plus des trois lignes de métro (4, 5 et 7) à une demande des usagers picards qui voyageurs munis de bagages et la liaison ville- qui desservent la gare de l’Est, et du réseau sont, en raison de la disparition des bas- aéroport se dégradera. des autobus parisiens. sins d’emploi traditionnels, amenés à ef- C’est pourquoi, lors de l’Enquête Publique fectuer des migrations quotidiennes vers sur le CdG Express en juillet 2016, l’AUT/ Un doublon ruineux d’autres régions. FNAUT Ile-de-France a pris position en fa- En complément du barreau LNRP, qui veur de cette liaison moderne destinée à relier Dans le même avis de 2016, l’AUT doit être soutenu par ADP et réalisé avant l’aéroport de Roissy et le centre de Paris. Le déplorait l’existence du projet ligne 17 l’installation du nouveau terminal, il faut CdG Express devra être doté d’un matériel du Grand Paris Express, concurrent du mettre en place des transports de rabat- roulant adapté aux voyageurs aériens. CdG Express. tement et des pôles d’échanges dans les L’AUT avait cependant émis de nom- Il serait souhaitable que l’Etat fasse un agglomérations telles que Crépy-en-Va- breuses réserves : choix, au profit du CdG Express, entre ces lois, Senlis, Chantilly, Creil, Pont-Sainte- l SNCF Réseau étant l’un des maîtres deux projets portés par des Établissements Maxence et Compiègne. d’ouvrage de ce projet, il est à craindre qu’une Publics placés sous la tutelle de l’Etat (et FNAUT Hauts de France z part de ses ressources financières et humaines par ADP dont l’Etat détient plus de 50 % ne soit consacrée à la construction du CdG du capital) et mette fin à ce doublon rui- Pour l’AUT, Roissy constitue déjà l’un Express au détriment de la modernisation du neux (un triplon avec le RER B). des principaux générateurs de mobi- réseau francilien. Les arbitrages de février 2018 ont placé lité d’Ile-de-France. Or les projets de l L’AUT demande que des modalités le tronçon Le Bourget RER - Le Bourget développement indiqués dans le dossier d’abonnement préférentiel à CdG Express Aéroport de la ligne 17 parmi les priorités d’enquête renforceront les besoins de soient proposées aux employés de l’aéroport olympiques et les travaux débutent. Pour le mobilité des passagers aériens et ceux et que les entreprises du site soient sollicitées reste de la ligne, l’AUT estime que la liai- des employés. pour compenser le manque à gagner résultant son ville-aéroport sera déjà assurée par le L’AUT est particulièrement attentive à la de ces tarifs préférentiels. CdG Express même si son ouverture est nécessité d’orienter les déplacements ac- l La création du CdG Express devra abou- retardée, et ne justifie pas la poursuite de tuels et futurs vers les transports publics tir à la suppression des trains directs Gare du cette ligne jusqu’à CdG. La desserte épiso- (sans oublier les modes doux pour les dé- Nord - Roissy du RER B pour les remettre à dique de manifestations et expositions ne placements sur les petites distances). la disposition des usagers quotidiens. justifie pas non plus ce projet, sachant que Le maître d’ouvrage affirme avoir l Le CdG Express ne peut être accepté que Le Bourget sera desservi par le tronçon déjà pour objectif de faire passer la part des s’il n’a pas d’effet négatif sur le fonctionne- lancé de la ligne 17 et que le Parc des Expo- transports publics de 30 % à 50 % pour ment du RER B. Sur ce point, l’AUT rejoint sitions de Villepinte est déjà desservi par le les voyageurs et de 10% à 50 % pour les l’analyse d’Ile-de-France Mobilités et, sans RER B qui sera doté de rames plus capa- employés. remettre en cause la pertinence de ce projet, citaires à partir de 2024. Seule une urba- Par conséquent, les investissements à souhaite que la priorité soit donnée à l’amé- nisation massive du secteur du triangle de venir devront porter essentiellement sur lioration du RER B et des lignes du nord Gonesse et au-delà pourrait justifier un tel les transports publics et non sur l’infras- francilien, en abandonnant l’objectif de mise investissement. Mais le projet Europa City tructure routière qui ne doit constituer en service pour les JO de 2024. La récente verra-t-il le jour ? Les autres projets géné- qu’un complément aux précédents. décision gouvernementale va dans ce sens et reront-ils un trafic justifiant une infrastruc- AUT/FNAUT Ile-de-France z l’AUT s’en félicite. ture aussi lourde et aussi onéreuse ?

FNAUT infos n°277 - septembre 2019 x 3 Dossier

Le Lyon-Turin est bien parti

Ligne ferroviaire transalpine (MD)

On voit mal aujourd’hui comment le Lyon-Turin pourrait ne pas voir le jour. Tous Aujourd’hui, l’ensemble de la liaison les signaux sont au vert. est estimé à 18 Mdc : 7,7 Mdc pour les accès français ; 8,6 Mdc pour le tunnel ; Les députés ont conforté le projet, qui fait Les travaux se poursuivent. Plus de 28 km 1,7 Mdc pour les accès italiens. Soit, pour aujourd’hui l’objet d’un consensus. Véronique de galeries, dont 9 km du tunnel définitif, la France, 7,7 Mdc (accès) et environ 2 Riotton, députée LREM, a fait adopter un ont déjà été creusés. Mdc (tunnel). Un rephasage des accès amendement selon lequel les études relatives à Iveta Radicova, coordinatrice des investis- français est engagé afin de réduire leur la ligne française d’accès au tunnel internatio- sements ferroviaires sur le corridor méditer- coût de moitié, ce qui ramènerait à 5 Mdc nal de base devront être achevées avant 2023. ranéen, a confirmé que l’Union Européenne la charge financière de la France (un tel Les idées de la France Insoumise et des cofinancerait le tunnel à hauteur de 55 % (et travail a déjà été effectué en Italie). députés Delphine Batho et François-Michel non 40% comme prévu initialement), et à L’éboulement intervenu le 2 juillet entre Lambert ont été balayées. Il est bien difficile hauteur de 50 % les accès au tunnel, « aussi Saint-Jean-de-Maurienne et Modane (ce de réclamer une décroissance du trafic aérien importants que le tunnel lui-même », à condi- n’est pas le premier) a interrompu tout le et une croissance du fret ferroviaire tout en tion qu’ils soient dimensionnés correctement trafic France-Italie sur la ligne classique dénonçant le Lyon-Turin grâce auquel on (aucun financement n’était prévu). considérée comme fiable par les opposants, pourra concurrencer l’avion, reporter un Cet engagement réduit fortement la parti- aujourd’hui marginalisés : leur dernière million de camions par an sur le rail et sou- cipation de la France (- 3 Mdc) et de l’Italie manifestation a rassemblé 120 personnes, lager les riverains des axes routiers. (- 1,6 Mdc). dont 60 italiens... Côté italien, un échec électoral cinglant a Il contredit radicalement les préconi- affaibli le mouvement M5*, farouchement sations absurdes du Conseil d’Orienta- Bien dit opposé au Lyon-Turin. Face à son associée tion des Infrastructures (COI) présidé au sein du gouvernement italien, la Ligue du par l’ancien député PS Philippe Duron Iveta Radicova, coordinatrice des pro- nord, M5* a perdu la moitié de ses voix lors (FNAUT Infos 263). jets ferroviaires sur le corridor méditer- des élections européennes, passant de 34 % Selon le COI, il aurait suffi de moderniser ranéen : « Nous avons détruit le climat. à 17 %. Dans le Piémont, les listes de droite la ligne historique Dijon-Ambérieu-Mo- Il est de notre responsabilité d’investir et de gauche favorables au Lyon-Turin ont dane, ce qui n’aurait permis ni d’améliorer massivement pour léguer aux généra- obtenu plus de 85 % des suffrages. les relations TER entre Lyon et les villes du tions futures des infrastructures comme Les deux Etats ont lancé la procédure des sillon alpin, ni de reporter sur le rail le trafic le Lyon-Turin qui permettront de lutter appels d’offres pour le creusement du tunnel routier entre l’Espagne et l’Europe centrale durablement contre le réchauffement cli- interfrontalier. (la moitié du trafic total). matique et la pollution ».

Les arguments de la FNAUT

Suite aux élections européennes, la FNAUT s’est adressée aux eurodéputés et aux parlementaires français et leur a rappelé que, bien loin d’être une aberration technique, écologique et économique comme l’affirment les opposants, le Lyon-Turin est fondamental pour la protection de l’environnement et l’aménagement du territoire européen. l Le tunnel transfrontalier et une ligne nouvelle depuis Lyon et Turin sont indispensables. La capacité de la ligne actuelle et de son tunnel monotube ne permet pas d’y reporter massivement le trafic routier. Elle est limitée par les nouvelles règles de sécurité et par la croissance du trafic voyageurs, comme l’ont montré SNCF Réseau et RFI. l Le profil de cette ligne de montagne implique d’autre part des coûts d’exploitation qui rendent le rail non compétitif face à la route. Un itinéraire ferroviaire de profil plus plat et de plus grande capacité est donc indispensable : il réduira de plus d’un tiers les coûts d’exploitation du rail. l Le trafic potentiel de la nouvelle liaison est énorme. Depuis 5 ans, le trafic des camions à travers les Alpes françaises (flux nord-sud et est-ouest) a augmenté de plus de 12 % pour atteindre aujourd’hui 3 millions de véhicules par an et sa croissance s’accentue. Il n’existe donc aucune raison de sous-estimer le trafic potentiel du Lyon-Turin. l La Suisse, soucieuse de protéger son environnement, a financé seule deux tunnels de base (le Lötschberg et le Gothard) sur l’axe nord-sud (un troisième, le Ceneri, est en construction) pour absorber un trafic annuel de 1,2 million de camions seulement : le trafic routier annuel est devenu inférieur à 1 million de camions, et la part modale du rail supérieure à 70 % sur l’axe nord-sud (contre 10 % seulement entre la France et l’Italie). l Le coût de l’infrastructure annoncé par les opposants est fantaisiste. Le vrai coût de l’ouvrage est très inférieur aux 26 milliards d’euros évoqués avec complaisance par les opposants (et même la Cour des comptes), voir plus haut. l Le projet est utile aussi pour les voyageurs. Les usagers quotidiens des TER reliant Lyon aux villes du sillon alpin (Grenoble, Chambéry, Aix, Annecy) et les voyageurs utilisant les TGV Paris-Lyon-Turin-Milan en bénéficieront. Les déplacements entre la France et l’Italie du Nord s’effectuent aujourd’hui essentiellement par avion (3 millions de passagers par an, autant qu’entre Paris et Toulouse) et par route : une partie de ces trafics se reportera sur le rail, ce qui entraînera une réduc- tion des nuisances aériennes et routières. En conclusion, le Lyon-Turin est un projet rationnel qui, accompagné d’une taxation kilométrique des camions analogue à la RPLP suisse, permettra seul de transférer sur le rail une part significative du trafic routier transitant à travers les Alpes françaises, et de libérer les vallées alpines et le littoral méditerranéen des insupportables nuisances routières que leurs habitants subissent actuellement. La nouvelle liaison, comparable au tunnel sous la Manche, permettra par ailleurs de rééquilibrer l’espace économique européen au bénéfice de l’arc méditerranéen.

4 x FNAUT infos n°277 - septembre 2019 Dossier L’opinion évolue

La métropole européenne de Lille (MEL) Le choix BHNS-tramway : envisage la création de 5 nouvelles lignes de tramway, certaines prolongeant l’ac- un résumé tuel Mongy. Une pétition de la municipa- lité de Seclin a déjà reçu d’innombrables commentaires favorables, qui confirment le point de vue de la FNAUT. Quelle évolution par rapport à ce que Tramway de Nice (MD) nous entendions voilà quelques années à l’encontre du tramway ! Le travail patient Le point de vue de l’usager (25 000 voyageurs/jour, bus de 18 m), ce mené par la FNAUT au fil du temps a fini qui est généralement le cas dans les agglo- par payer : Hubert Falco, maire de Toulon, Accessibilité - Les performances sont mérations de moins de 150 000 habitants. est bien le seul à n’avoir rien compris ... voisines dès lors que le matériel roulant est Dans les grandes agglomérations, le Mais on mesure ici aussi le décalage entre à plancher bas et que les gares et les quais BHNS risque la saturation. Il ne possède élus et citoyens : les 5 lignes de tramway sont correctement aménagés. pas (ou peu) de réserve de capacité sur les ne sont qu’un projet, anoncé pour ... 2035 Confort - Le confort de roulement du axes lourds. Il faut en effet tenir compte de (les élus de Nantes annoncent 3 lignes BHNS est plus limité que celui du tramway la croissance naturelle du trafic, de l’urbani- nouvelles pour 2026 ; la MEL avait déjà (roulis, freinage). D’autre part le tramway sation future de l’axe du TCSP et de l’effet annoncé en 2000 un tram-train pour 2010 : offre plus d’espace à bord (vélos, poussettes, TCSP, souvent sous-estimé. on l’attend toujours). Envisager le tramway fauteuils roulants). Il risque moins la satu- Dépense immédiate et à long terme - est très bien, mais les moyens financiers ne ration que le BHNS (si la clientèle croît, La dépense de la collectivité est deux fois sont pas suffisants pour résorber le retard on peut allonger les rames ou en accoupler). moins élevée pour le BHNS. Mais il faut pris depuis 20 ans. Ce n’est pas 2 Mdc qu’il Vitesse, régularité, fréquence - Les tenir compte de la nécessité de renouveler faudrait d’ici 2035 mais 10. performances sont voisines si on a un vrai les bus, des dépenses d’entretien et de la dif- Gilles Laurent et Didier Grimault, BHNS (site propre intégral, priorités aux férence de recettes (le tramway attire davan- Union des Voyageurs du Nord z carrefours, portes banalisées, pas de vente tage de clientèle). A long terme, la différence à bord) comme le Busway de Nantes s’estompe si la fréquentation est élevée, la Toulon : des bus électriques, (FNAUT Infos 265). En pratique, cepen- dépense par voyage est même plus faible mais pas de tramway dant, les compromis avec la circulation auto- d’environ 10 % dans le cas du tramway. mobile sont plus faciles, donc plus fréquents, avec le BHNS, ce qui en réduit la vitesse Le point de vue du citoyen commerciale, la régularité et la fréquence maximale. Souvent le site propre du BHNS Ambition environnementale - Le choix est discontinu (voir le projet de Toulon), du tramway est plus ambitieux car le tram- c’est plus rare dans le cas du tramway. way attire bien davantage l’automobiliste que ne peut le faire le BHNS : si le tram- Le point de vue du technicien : way remplace une ligne de bus en site banal, l’insertion urbaine la clientèle, en moyenne, double au mini- Bus toulonnais en site propre (Wikipedia) mum ; si le BHNS est choisi, la clientèle Le bruit est comparable si les bus sont n’augmente que de 30 à 40 % en moyenne, Toulon va investir 61 Mc dans l’achat électriques. En certains points durs, le le report modal est plus faible. de 136 autobus propres (électriques, hy- tramway peut cependant être bruyant. Bilan carbone - Alstom et Carbone 4 brides et au gaz), soit 43 % des véhicules L’emprise nécessaire pour le tramway ont comparé les deux modes sur leur cycle circulant sur le réseau local. Selon le maire est plus étroite (5,85 m contre 6,50 sur la de vie (construction et exploitation) : le bi- Hubert Falco, « grâce aux bus hybrides base des exemples lyonnais), l’insertion du lan du tramway est bien plus favorable. achetés depuis 2011, les émissions de par- tramway est donc plus facile. Il semble que le BHNS à batterie soit ticules fines ont régressé de 30 % ; mieux Le choix du tramway exige des travaux moins écologique que sa version « trolley- respirer à Toulon, c’est notre priorité. En préalables plus importants et plus longs, bus », ce qui modifie alors à son désavantage écologie, il y a ceux qui en parlent et ceux mais les travaux ultérieurs sont moins le bilan du BHNS. qui agissent ». fréquents (pas d’orniérage). Structuration de la ville - Spontanément, M. Falco oublie que Toulon reste la L’engazonnement de la plateforme du la ville se densifie le long d’un axe de tramway, seule métropole française à ne pas être tramway est possible sur toute sa longueur d’où un trafic supplémentaire que le tramway équipée d’une ou plusieurs lignes de sauf aux stations et aux carrefours, l’effet sur peut encaisser grâce à sa forte capacité. L’effet tramway. Le Collectif Tramway dénonce l’esthétique de la ville peut être spectaculaire. structurant du BHNS est plus faible. « le refus coupable d’introduire un outil efficace, non polluant, rapide, ponctuel, Le point de vue Conclusion confortable donc attractif ; les jeunes du décideur politique en subiront les conséquences. Quant au Par son attractivité sur l’automobiliste et BHNS, il manquera de capacité sur l’axe Le site propre - Si l’élu choisit le tram- sa capacité évolutive, le tramway est, sur les lourd La Seyne - La Garde comme l’ont way, les compromis avec la circulation axes lourds, la réponse la plus pertinente aux démontré les experts, et il ne disposera automobile sont plus difficiles, la vitesse besoins futurs (pétrole, pollution, climat). d’aucun site propre à La Seyne, Saint- commerciale est plus élevée, le tracé est Le créneau de pertinence du tramway est Jean-du Var et La Coupiane, quartiers définitif. Le choix du tramway exige plus généralement sous-estimé, celui du BHNS denses et encombrés. Faute de capacité, de courage politique. est surestimé (capacité, coût, attractivité) les bus, même propres, ne changeront Trafic potentiel - Le tramway est à l’évi- Le développement des réseaux de tram- rien à un schéma de l’ancien temps ». dence le choix pertinent sur les axes lourds, way rencontre l’adhésion des citadins, qui Jean-François Guyetand, président à fort trafic potentiel. Le BHNS n’est y voient aussi un élément d’attractivité du Collectif Tramway de Toulon z adapté que si le trafic potentiel est modéré pour leur ville.

FNAUT infos n°277 - septembre 2019 x 5 Dossier Un canal inutile et ruineux SNCF Mobilités à guichets fermés

MD

MD Elisabeth Borne a salué l’adoption par la Commission européenne du Voici la lettre ouverte adressée par l’ADTC de Grenoble à Elisabeth Borne et Laurent canal Seine-Nord dont l’utilité reste à Wauquiez au sujet des fermetures de guichets dans les gares SNCF. démontrer. Les travaux seront financés à 40 % au moins par l’UE. Les fermetures de guichets SNCF se - elle propose sans avertissement des multiplient non seulement dans les petites gares différentes de celles demandées Selon la ministre, le canal favorisera gares, mais à présent dans celles des villes (Montpellier Sud-de-France au lieu de le report modal des trafics de fret de la moyennes. A Chambéry, un nœud ferro- Saint-Roch) ; route vers la voie d’eau. Elle désavoue viaire important, les guichets n’ouvrent - elle rend nettement plus compliqué le ainsi l’administration. qu’à 11h45 ! fait de changer son billet (alors que dans le Comme l’a démontré en 2013 le rap- Mais, depuis mars 2019, la SNCF pé- même temps, l’usager qui n’a pas le billet port Massoni-Lidsky (CGDD et IGF) après nalise lourdement les usagers sans billet, pour le bon train est pénalisé davantage) ; bien d’autres études, le canal concur- même s’ils se présentent spontanément au - elle rend bien plus compliqué le fait de rencera le rail, ce qui ne présente aucun contrôleur. La possibilité d’acheter un bil- bénéficier de réductions ; intérêt économique ou environnemen- let dans le train au tarif normal disparaît, y - elle enlève la possibilité de bénéficier tal, d’autant que le réseau ferré est loin compris lorsque la gare de montée est fer- de la dégressivité kilométrique en obligeant d’être saturé depuis la mise en service mée, le distributeur automatique de billets l’acheteur à fractionner son trajet (ce qui de la LGV Nord : 63 % du trafic du canal absent ou en panne. Réponse invariable : nécessite une habileté et une connaissance proviendraient de la route et 37 % du « vous n’avez qu’à prendre le billet à l’avance du réseau qu’ont peu d’usagers) ; rail (soit 13,3 % du fret ferroviaire actuel et par internet ». Une réponse inadmissible - elle accentue l’exclusion des popula- sur cet axe). pour une entreprise de service public : tions les moins mobiles, peu à l’aise avec les Le fret routier sur l’autoroute A1 dimi- - elle ignore les contraintes amenant outils numériques, peu cultivées, ou vivant nuerait de 3,8 % seulement (à titre de l’usager à improviser son déplacement ou dans des régions mal couvertes par internet comparaison, la réalisation complète du à modifier son trajet ; ou sans dessertes directes en train. projet Lyon-Turin permettra de transfé- - elle ignore les difficultés pour finaliser Les seuls usagers qui ne pâtissent pas trop rer sur le rail au moins un tiers du trafic l’achat d’un titre de transport sur un télé- de cette politique sont les abonnés et ceux routier franco-italien). Et, selon l’ADEME, phone ou sur une borne récalcitrante, et les qui effectuent des trajets très simples, avec si une tonne-kilomètre de fret passe de limites géographiques des bornes ; au plus une correspondance. Cette dégra- la route à la voie d’eau, 50 grammes de - elle ignore les usagers qui n’ont pas de dation sans précédent, qui met encore plus CO2 sont économisés ; si elle passe du téléphone connecté ou qui ne savent pas à mal l’unité du réseau ferré et du territoire, rail à la voie d’eau, 32 grammes supplé- s’en servir ; est suicidaire pour le rail et désastreuse pour mentaires sont émis. - elle ignore les difficultés à acheter un les autres acteurs. Ce n’est pas l’hinterland des ports du billet, celles dues à un problème informa- Les pétitions pour le maintien des gui- Havre et de Rouen, où d’importants in- tique, comme celles dues à un défaut de chets ont beau se multiplier, la FNAUT vestissements ont été réalisés, qui sera conception, par exemple l’impossibilité protester, le défenseur des droits alerter sur élargi à l’Europe du Nord, mais celui d’acheter un billet pour un parcours avec le non-respect des droits causé par la frac- d’Anvers et de Rotterdam qui sera ren- plus de deux correspondances ; ture numérique, rien n’y fait. forcé en Ile-de-France au détriment des - elle enlève à l’usager le choix du mode À l’heure où de nombreuses Autorités deux ports français. Cet effet pervers a d’achat, du mode de paiement, de l’itinéraire Organisatrices des Mobilités cherchent été bien perçu, et dénoncé vigoureu- et même des horaires (le site oui. ne pro- à unifier leur tarification et leurs réseaux, sement par... Edouard Philippe quand il pose qu’une partie de l’offre disponible en l’éclatement du réseau ferré national en était maire du Havre (« un gâchis écono- privilégiant systématiquement les parcours entités gérées sans coordination entre elles mique et environnemental »). en TGV et n’affichant pas les TER) ; est un très mauvais signal. Il fallait en priorité renforcer l’in- Il est grand temps que le pouvoir poli- fluence des ports du Havre et de Rouen Je me rends en voiture à la gare de Tra- tique impose à la SNCF et aux futurs opé- en rendant leur desserte ferroviaire vers cy-Sancerre où je constate l’absence de rateurs privés des obligations de service l’est et le sud plus performante : la part guichet, de distributeur et de compos- public et d’interopérabilité qui permettent de nos importations transitant par nos teur. Une grande affiche indique que à l’usager d’acheter facilement un titre de ports est déjà très faible... tout voyageur doit être muni d’un billet transport en gare, et y compris si son trajet La décision du gouvernement est avant de monter dans le train. Les mon- est composé de plusieurs tronçons exploi- prématurée : le financement des infras- tants des amendes et les tarifs de bord tés par des opérateurs différents. Comme tructures de transport a été renvoyé à la prohibitifs sont affichés. Il est même en Suisse. loi de finances 2020. Il y avait d’autres précisé que si le billet n’est pas com- Les conventions entre les Régions et la priorités que ce canal ruineux pour posté, le voyageur doit payer 20 c ! La SNCF doivent être revues pour maintenir l’Etat et les collectivités concernées. Cu- SNCF ne précisant pas où acheter son des services physiques et humains de dis- rieusement, à de rares exceptions près billet, je renonce au train et je remonte tribution, comme certaines Régions l’ont (FNAUT Infos 217), les écologistes, qui dans ma voiture… déjà fait. ont attaqué avec virulence le Lyon-Tu- Jacques Vaisson, TARSLY z Nathalie Teppe, présidente, ADTC z rin, ont gardé le silence sur le canal.

6 x FNAUT infos n°277 - septembre 2019 Dossier Les nouveautés

Le 9 mai dernier, Rachel Picard, direc- La nouvelle grille tarifaire trice générale de Voyages SNCF, a pré- senté les nouvelles dispositions tarifaires de la SNCF : de la SNCF : « plus simple et moins cher ». Désormais, il n’existe plus que trois de la publicité à la réalité tarifs : seconde, première et business pre- mière dans les TGV (hors Ouigo) et les trains Intercités. Ces tarifs remplacent notamment les actuels tarifs Prem’s, Loisir et Pro. FM Le nom Prem’s restera utilisé pour les tarifs les moins chers. Tous les billets seront La SNCF a annoncé le lancement de nouvelles cartes de réduction à prix désormais échangeables ou remboursables réduits, des pourcentages de réductions augmentés, une utilisation du train (y compris les billets Prem’s), gratuitement assouplie et l’objectif de proposer un voyage sur deux à tarif réduit (encadré). jusqu’à trente jours avant le départ, puis La FNAUT a reçu de nombreuses réactions dont le bilan est nettement moins pour 5 euros jusqu’à 3 jours et 15 euros favorable que celui annoncé par la SNCF, voire opposé. jusqu’au départ du train. Nous avons rappelé (FNAUT Infos 274) 3. Si certains prix baissent, le nombre les points positifs des nouvelles cartes : de trains pour lesquels les réductions meilleure lisibilité, baisse des prix d’achat, sont valables diminue. réductions accordées portées de 25 % à 30 % dans tous les cas. L’effort est par- C’est le cas des nombreux Intercités qui ticulièrement net pour les familles qui, ont été transférés aux Régions (où ils sont avec la tarification actuelle, ne pouvaient d’ailleurs commercialisés de façon pra- quasiment jamais prendre le train. L’amé- tique : tarification simple, contrôle à bord, lioration de l’offre Pro est également très réservation facultative). sensible (baisse des prix, conditions d’utili- Les TGV traditionnels Inoui se raré- sation). Mais la SNCF a gardé le silence sur fient, certains sont remplacés par des les aspects négatifs. TGV Ouigo dont la tarification est spé- cifique et qui desservent essentiellement 1. L’information sur les prix doit être les grandes relations radiales. Nouvelles cartes Avantage (SNCF) impérativement améliorée. 4. Certaines réductions sont accentuées De nouvelles cartes de réduction se- L’information sur les prix maximum mais de nombreux prix augmentent ront toutes vendues à 49 c pour un an. Elles Business 1ère (référence pour les 1ère et 2e fortement. garantissent toutes une réduction sur tous classes) doit être améliorée rapidement les billets : de 30% pour les adultes, et éven- pour l’ensemble des relations. C’est une « Les prix n'augmenteront pas », avait tuellement de 60% pour les enfants (de 4 obligation réglementaire pour les prix affirmé Rachel Picard. à 11 ans) jusqu’à trois enfants. fixés par le yield management. Si, dans la nouvelle gamme Avantage, La carte Avantage Jeune remplace la Des informations synthétiques doivent les prix du train restent raisonnables ou carte Jeune SNCF (actuellement vendue mentionner les réductions accordées par régressent légèrement, les possesseurs des 50 c) pour les 12-27 ans. La carte Avantage les Régions aux possesseurs de cartes natio- cartes Liberté (ex Fréquence) expriment de Senior remplace la carte Senior+ (actuel- nales pour les trajets nationaux, interrégio- nombreux et forts mécontentements. lement vendue 60 c) pour les plus de naux et régionaux. Dans le cas des trajets Les prix augmentent de 10 % en 60 ans. La carte Avantage Week-end pour avec correspondance, il faut rétablir le prix 1ère classe (comme annoncé) mais souvent les 27-60 ans remplace la carte Week-end payé pour chaque parcours. aussi en 2e classe, de l’ordre de 18 % avec (actuellement vendue 75 c). La carte Avan- des fourchettes comprises entre 7 % et tage Famille remplace l’actuelle carte En- 2. A l’inverse des annonces de la SNCF et 27 % (ce n’était pas annoncé et n’a été dé- fant+ (vendue 75 c) qui permet à un adulte des attentes des clients, la souplesse d’uti- couvert qu’après publication des prix). Les et un éventuel accompagnant d’emmener lisation du train se dégrade sensiblement. cartes ne sont maintenant payables qu’en jusqu’à 3 enfants. Ces deux dernières cartes une seule fois. sont valables sur un aller-retour incluant un Tous les billets sont dorénavant échan- Les nouvelles tarifications régionales jour de week-end. geables et remboursables, mais les condi- conduisent, dans certains cas, à des aug- Les détenteurs d’une carte Avantage tions d’échange et de remboursement sont mentations supplémentaires importantes. bénéficient aussi de réductions sur certains fortement dégradées : Le yield management (variation des prix services : 15% de réduction sur les menus du - 15 c dès l’avant-veille du voyage au lieu en fonction de la date d’achat) est poussé bar, sur Ma location Avis, service de location de la veille pour les voyageurs sans carte de à son extrême, avec une baisse de quelques de voitures, ou encore sur Mes bagages ser- réduction ; prix faibles mais une forte hausse des prix vices, service d’acheminement des bagages - de 5 c au lieu de la gratuité à partir de les plus élevés. Officiellement, le prix du domicile à la destination J-30 et 15 c au lieu de 5 c, et dès J-2 au moyen baisse. Mais cette baisse est d’abord Les cartes Avantages sont applicables ou lieu de la veille du départ pour les voyageurs due au TGV Ouigo. non selon les Régions dans des conditions munis d’une carte. La FNAUT estime indispensable de très variables, mais pas sur les Ouigo. Les nouvelles formalités sont donc plus revoir à la baisse les tarifs Liberté, par- Enfin, une nouvelle carte Liberté à 399 c coûteuses et plus contraignantes qu’avant, y ticulièrement en 2e classe, dont les der- par an remplace les actuels abonnements compris pour les déplacements profession- nières hausses sont abusives et portent Fréquence qui donnaient de fortes réduc- nels ou fréquents (Liberté) : la tolérance manifestement atteinte au pouvoir tions sur les TGV classiques et Intercités « train avant - train après » sans change- d’achat. dans toute la France. ment de billet est supprimée. Jean Lenoir z

FNAUT infos n°277 - septembre 2019 x 7 Dossier Le choix audacieux de la RENFE Wikipedia

Une baisse des prix pour attirer de nouveaux clients est le pari qu’a osé faire gers au cours des neuf premiers mois de 2017 la RENFE, la SNCF espagnole, en 2013 (FNAUT Infos 241). (4,1 % de plus qu’en 2016). Le succès a été tel que dès 2014, l’AVE a L’Espagne possède le premier réseau de Ainsi, les tarifs AVE des classes Tourist dépassé l’avion sur certaines lignes, notam- LGV d’Europe, le deuxième derrière la Chine, et Tourist + (elles offrent un bon niveau de ment Madrid-Barcelone. Ce résultat est avec 3 240 km de lignes début 2017 (la carte confort) ont baissé de 11 %. Des nouveaux confirmé par les données d'AENA, asso- représente le réseau actuel). Un ambitieux plan prix Promo et Promo + ont été proposés pour ciation des aéroports espagnols, sur le pont de construction de LGV vise à mettre toutes voyager sur les grands axes dans n’importe aérien entre les deux principales villes espa- les capitales régionales à moins de 3h de Ma- quelle classe, à n’importe quelle date ou heure gnoles : le trafic a chuté de 54 % depuis que drid et 5h30 de Barcelone. en bénéficiant de réduction de 30 à 70 %. Ces l'AVE les a connectées en 2008. Entre février billets étaient soumis à des limitations des et novembre 2013, 438 000 voyageurs ont Un succès médiocre possibilités d’annulation et de modification abandonné l’avion pour l’AVE. C’est la pre- mais il était possible de rendre ces conditions mière fois que l’AVE l’a emporté sur l’avion : En 2014, la fréquentation de l’AVE (le plus flexibles et de choisir un siège pour un en janvier 2014, il a transporté 1,9 million de TGV espagnol) stagnait : 11 000 passagers par peu plus cher (Promo +). L'anticipation de voyageurs contre 1,8 million pour l’avion, en km de LGV, contre 27 000 en Italie et 61 000 l'achat multipliait la possibilité d'obtenir de retrait de 7,3 % sur Madrid-Barcelone. en France. Un résultat qui s’expliquait par la meilleurs rabais. Avec les prix Promo, il était faible densité démographique du pays, un ni- désormais possible de voyager de Madrid à Un impact favorable et durable veau de vie inférieur au nôtre et une crise éco- Barcelone à partir de 32 euros, de Séville à sur la RENFE nomique très sévère après 2008. Début 2013, Valence pour 27,8 euros. Une carte de réduc- le taux d’occupation des AVE, nettement plus tion pour les jeunes offre 30 % de réduction L'opérateur de l’AVE a terminé l’année 2015 faible que celui des TGV, n’était que de 60 %. sur tous les billets pour un montant annuel avec un bénéfice de 37,3 Mc pour la première Alors que la LGV Paris-Marseille transportait de 20 c seulement. De nombreuses autres ré- fois de son histoire. Ces bénéfices de l’entre- 32 millions de voyageurs par an en desservant ductions ont vu le jour, pour les professionnels prise ont été consolidés par la suite. La REN- trois agglomérations totalisant 14 millions voyageant souvent, pour les seniors... FE a clôturé l'année 2016 avec un bénéfice d'habitants, la LGV Madrid-Saragosse-Bar- De ce fait, l’AVE, qui n’était accessible brut d'exploitation (EBITDA) de 450 Mc, celone, qui dessert 9 millions d’habitants, n’en qu’à la classe aisée, est devenu accessible aux une amélioration de 12,5% par rapport à l'an- transportait que 6 millions. classes moyennes. née précédente. Au troisième trimestre 2017, RENFE avait déjà enregistré un EBITDA de Une réforme tarifaire Un résultat spectaculaire 376 Mc, en hausse de 16,6 % par rapport à l'année dernière à cette même période. Il est Une des raisons de l’incapacité de l’AVE (le Le résultat de cette nouvelle politique a prévu qu’en fin d'année, la société présentera TGV espagnol) à plaire était le prix élevé des quasiment été immédiat. un EBITDA de 473 Mc. billets. Selon un rapport publié en 2014 par Elle a permis à RENFE Viajeros, la fi- En 2014, le chiffre d'affaires total de l’Université de Barcelone, le passager moyen liale de transport de voyageurs de RENFE RENFE a augmenté de 5,7 % et s'est élevé était de classe moyenne supérieure. créée fin 2013, de dégager un bénéfice de à 2 966,5 Mc, tandis que les dépenses ont En février 2013, afin d’enrayer la baisse du 57 Mc dès 2013. De février 2013 à février augmenté de 7 % à 2 751 Mc. Les résul- trafic constatée en 2012, une politique com- 2014, la hausse du trafic voyageurs a été de tats de l'opérateur public ont également été merciale audacieuse a été lancée. Le tarif géné- 23 % et le taux de fréquentation des AVE affectés par l'augmentation de 22,2 % des ral de la RENFE a été abaissé de 11 % et des est passé à 73 %. redevances versées à ADIF (gestionnaire offres promotionnelles ont permis de réduire le Au premier semestre de 2014, le nombre du réseau ferré espagnol) pour l'utilisation prix de certains billets de 20 % à 70 % : le prix de voyageurs est passé à 8,7 millions (+ 20 %). des voies, gares et autres infrastructures fer- moyen du billet a diminué de 27 %. L'AVE a enregistré 15,84 millions de passa- roviaires, à 607,4 Mc. Un exemple à étudier

Dans le contexte espagnol, cette baisse du prix des billets a donc eu des effets positifs sur la fréquentation et l’équilibre économique de l’AVE et de la RENFE. Il faut toutefois relever qu’avec un réseau de LGV compa- rable, 25 M de voyageurs utilisent l’AVE en Espagne par an alors qu’il y a environ 110 M de voyageurs TGV par an en France et 30 M de voyageurs internationaux. Il serait opportun d’étudier les effets d’une baisse systématique des prix du TGV sur sa fréquentation et son équilibre éco- nomique. Une telle baisse pourrait être accompagnée de l’élimination des petits prix réservés aux habitants des métropoles et d’une véritable simplification des tarifs, compréhensible de tous. Marc Debrincat, Jovanah Murugan LGV espagnoles (Wikipedia) et Jean Sivardière z

8 x FNAUT infos n°277 - septembre 2019 Dossier Bouchons routiers Le 80 km/h :

un abandon irresponsable

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Tous les records ont été battus lors Pixabay des départs pour le pont de l’Ascension : 1 340 km de bouchons, dont 485 km en La FNAUT s’est engagée avec fermeté en faveur du 80 km/h sur les routes Ile-de-France, selon Bison Futé, contre secondaires (FNAUT Infos 262, 266, 273, 274). Pourquoi ? 1 068 km « seulement » lors du même pont en 2018, soit + 25 %. Temps perdu et Tous les experts considèrent que la vi- eux-mêmes la vitesse limite, alors qu’un fatigue pour les vacanciers, risques d’acci- tesse excessive est la cause première, ini- bilan de la mesure devait être effectué en dents, coûts élevés de surveillance de la tiale ou aggravante, de l’insécurité routière juillet 2020. Il a manifestement oublié qu’il circulation, pollution de l’air, gaspillages et ont préconisé l’adoption du 80 km/h s’agissait de vies humaines, non d’un quel- de carburant, émissions de CO2... (bien d’autres mesures sont nécessaires, conque problème local. Augmenter la capacité des autoroutes mais seul le 80 km/h permet d’obtenir des Cet « assouplissement » du 80 km/h a été serait une fuite en avant : elle ne pourrait résultats rapides). Ils ont invoqué la loi entériné par la majorité des députés : Phi- que pérenniser les difficultés, toute infras- empirique de Nilsson-Elvik : une réduc- lipe Grosvalet, président PS de la Loire- tructure nouvelle induisant plus de trafic tion de 1 % de la vitesse réduit de 4 % le Atlantique, a dénoncé « leur attitude déma- qu’elle ne peut en écouler. Or, comme en nombre des tués par accident. Emmanuel gogique et pas très courageuse sous prétexte ville, une faible diminution du trafic Barbe, délégué interministériel à la sécuri- de ruralité ». routier (- 5 %) suffirait à réduire l’am- té routière, estime que le 80 km/h a sauvé Confier aux élus départementaux la res- pleur des bouchons. 116 vies en 2019, et en aurait sans doute ponsabilité du choix entre 80 et 90 km/h Les déplacements saisonniers s’effec- sauvé 200 si des irresponsables n’avaient est totalement irresponsable alors que tuent principalement en voiture. La pas détruit la moitié des radars. la mortalité routière est repartie à la souplesse de la voiture ne suffit pas à Rouler à 80 km/h au lieu de 90 ne fait hausse. Ces élus ont la compétence néces- l’expliquer : perdre qu’un temps marginal, d’autant que, saire pour gérer les lycées et les TER, mais - la SNCF dissuade bien des automobi- sur les routes concernées, souvent étroites ils n’ont aucune expertise en matière de listes pourtant prêts à utiliser le train (sa- et sinueuses, il est difficile de rouler à 90. sécurité routière. Celle-ci est un domaine botage des « petites » lignes, retards des Il est donc exagéré d’affirmer, comme qui relève d’une véritable analyse scienti- trains, fréquences insuffisantes, coût trop l’ont fait les gilets jaunes et les sénateurs, fique, donc d’une décision de l’Etat et non élevé pour les jeunes et les familles…) ; que le 80 km/h renforce l’enclavement des de l’opinion d’élus qui, inévitablement, - quant à la rénovation du réseau ferré, petites villes et des zones rurales. La vraie songent à plaire à leurs électeurs. La meil- globalement sous-utilisé mais présentant origine de cet isolement, c’est la dépen- leure preuve est la volonté annoncée de de nombreux nœuds et axes saturés, l’Etat dance automobile, la pénurie de transport nombreux présidents de conseils dépar- ne lui attribue que de maigres moyens collectif : en Allemagne, en Suisse, en Au- tementaux de rétablir le 90 km/h sur les financiers. triche, en Italie du nord, même les zones « belles routes », c’est-à-dire les routes La FNAUT préconise donc un ensemble rurales sont bien desservies par train ou car les mieux aménagées, bien tracées, appa- de mesures facilitant l’usage du train lors (FNAUT Infos 270). remment les plus sûres mais, en pratique, des grandes migrations saisonnières : Les automobilistes ne sont pas seuls celles qui donnent à l’automobiliste un - le remaillage du réseau ferré, qui doit concernés. En 2018, selon l’Office Natio- sentiment trompeur de sécurité, qui sont couvrir l’ensemble du territoire ; nal Interministériel de la Sécurité Routière, les plus fréquentées … et sur lesquelles se - le renforcement des dessertes de jour, 471 piétons, 175 cyclistes, 133 cyclomoto- produisent le plus d’accidents mortels. sur les lignes transversales comme sur les ristes, 627 motocyclistes et 44 camionneurs La FNAUT réaffirme donc sa demande lignes radiales ; le retour des trains de nuit ont été tués sur les routes françaises, soit d’un maintien du 80 km /h jusqu’à ce qu’un et du service auto-train ; 41,6 % des 3488 victimes. bilan objectif de la mesure soit effectué et, - une restauration, un transport des plus généralement, d’une réduction des bagages et des vélos, des consignes en Un revirement décevant vitesses autorisées sur l’ensemble du réseau gares… à prix abordable ; routier : 120 km/h (autoroutes), 100 km/h - une baisse générale des tarifs, sui- L’attitude sidérante du Premier ministre (voies express), 80 km/h (autres routes hors vant l’exemple de la RENFE (la « SNCF ne peut s’expliquer que par celle du chef de agglomération), 30 km/h en milieu urbain espagnole ») : la perte de recettes par l’Etat, hostile au 80 km/h. Avec un courage (50 km/h sur les axes de transit). Une telle voyage a été plus que compensée par le évident, Edouard Philippe avait défendu réglementation, uniforme donc compré- gain de clientèle (FNAUT Infos 241, voir en 2018 sa décision de limiter la vitesse à hensible, est en vigueur en Suisse, où elle aussi page 8). 80 km/h sur les routes secondaires : « si, fait l’objet d’un large consensus (même Mais relancer le rail ne suffit pas, il pour sauver des vies, il faut être impopu- l’Automobile-club suisse l’a approuvée). faut aussi faciliter l’accès aux gares par laire, j’accepte de l’être ; que valent trois mi- Elle permet de réduire le nombre et la gra- tous les modes ; faciliter les correspon- nutes de plus sur un trajet de 40 km quand vité des accidents, leur coût pour la collec- dances entre train et car ; renforcer, il s’agit de sauver une vie par jour ? ». tivité, la consommation de pétrole (donc dans les zones touristiques, les services Mais, en mai dernier, il a affirmé qu’il ne le déficit de la balance commerciale) et les de cars, de taxis et la location de voi- voyait « aucun inconvénient » à laisser les émissions de gaz polluants et de CO2. tures et de vélos. présidents de conseils départementaux fixer Jean Sivardière z

FNAUT infos n°277 - septembre 2019 x 9 Dossier Le train pour une croissance Transport et environnement durable en Europe

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La canicule et le climat Tous les projets ferroviaires Dans une tribune publiée par Les sont justifiés Echos, Alexander Doll (Deutsche Bahn) Le dérèglement climatique ne peut plus et Alain Picard (SNCF) plaident pour être considéré comme un phénomène Il ne faut pas opposer entre eux les projets que l’Europe stimule le transport ferro- marginal ne concernant que les pôles ou ferroviaires : rénovation du réseau classique viaire du fret. Nous résumons leur inter- les pays tropicaux... et création de lignes nouvelles. A-t-on vention, qui confirme la pertinence des l Lors de la canicule de la fin juin 2019, déjà vu les partisans de la route opposer les orientations de la FNAUT en matière de la température a atteint le record absolu routes départementales et les autoroutes ? grandes infrastructures de transport. de 45,9 °C à Gallargues-le-Montueux, Les automobilistes veulent pouvoir utili- dans le Gard, soit deux degrés de plus que ser un réseau routier cohérent. Il en est de L’Europe ne serait sans doute pas ce l’ancien record. Dans le massif des Ecrins, même des usagers du train : ils ont besoin qu’elle est sans le rail, qui a joué un rôle le Glacier Blanc disparaît. Toute l’Europe de TER et de Transilien pour les déplace- déterminant dans la constitution de la a été touchée. ments de la vie quotidienne, de trains In- société et de l’économie européennes. Il Le lien entre les canicules et le dérè- tercités de jour et de nuit, et de TGV pour a rapproché les peuples et rendu l’Europe glement climatique est clairement souli- les déplacements à plus longue distance. Et palpable et concrète au quotidien. Un gné par de nombreux climatologues, en tous ces trains doivent pouvoir circuler sur premier pas a été franchi il y a près de 50 particulier Jean Jouzel, un expert incon- le réseau rapidement et à des fréquences ans avec la création du Pass Interrail, qui a testable, selon lequel les canicules vont élevées. Quant aux chargeurs, ils ont besoin permis à des millions de jeunes de voya- devenir « plus précoces, plus intenses et de trains classiques, de transport combiné, ger au-delà de leurs frontières. plus fréquentes ». d’autoroutes ferroviaires, de lignes capil- La vitesse a aujourd’hui réduit les dis- l Les 7 glaciers de l’Equateur ont perdu laires et... de sillons fiables. tances. Les lancements d’Eurostar en 1994 54 % de leur surface en 40 ans et auront Le véritable adversaire du réseau clas- et de Thalys en 1996 illustrent la capacité disparu en 2100. Un scientifique danois a sique, ce n’est pas le TGV mais la route : du train à rapprocher les grandes métro- montré que le glacier Fjord (Groenland), c’est lors de la négociation des Contrats poles européennes. En 2018, 11 millions envahi d’énormes quantités d’eau, est vic- de Plan Etat-Régions que se fait l’arbi- de voyageurs ont utilisé Eurostar, et plus time d’un dégel de plus en plus impor- trage entre modernisation des infras- de 7,5 millions ont voyagé en Thalys entre tant et précoce. Le 17 juin, le Groenland tructures classiques et travaux routiers l’Allemagne, la Belgique, la France ou les a perdu 3,7 milliards de tonnes de glace, (FNAUT Infos 240). Pays-Bas. L’Allemagne est connectée di- d’après des estimations de l’Institut da- rectement à grande vitesse à plus de 150 nois de météorologie. D’ici 2100, la seule Les déplacements à longue distance villes européennes. fonte du Groenland pourrait provoquer L’Europe réussira d’autant mieux la une montée des océans comprise entre L’intérêt que la FNAUT porte aux transition énergétique et la diminution 5 et 33 cm. grands projets ferroviaires est justifié : les des émissions de carbone qu’elle s’ap- On pourrait multiplier les exemples. déplacements à longue distance (familiaux, puiera sur le rail, qui a tous les atouts Dans ce contexte, on ne peut que regret- professionnels ou pour recherche d’emploi, pour s’imposer comme un moyen de ter que 93 parlementaires de tous bords touristiques) se multiplient ; ils doivent transport du futur. politiques aient pris, fin juin, la défense pouvoir s’effectuer en respectant l’environ- Ce qui a été fait pour les voyageurs doit des vols domestiques en France (dont le nement donc par train et non préférentiel- servir d’exemple pour le fret. Entre 2000 nombre a augmenté de 3,4 % en 2017). lement par avion. et 2018, la valeur des échanges intra-eu- Selon eux, « certains territoires, vic- Les enfants effectuent souvent leurs ropéens de biens a doublé. Selon l’OCDE, times d’un enclavement qui handicape études supérieures loin du domicile familial cette croissance en volume devrait at- leur développement, ont un besoin vital de puis recherchent un emploi et s’établissent teindre 30 % à l’horizon 2030. En l’absence l’avion. Les lignes aériennes sont souvent loin de ce domicile ; de nombreux couples de choix forts pour orienter ces échanges le seul moyen de leur éviter un isolement vivent séparés, les conjoints ne travaillant vers le rail, c’est inévitablement le mode mortifère, faute de dessertes routières et pas dans la même ville ; la multiplication routier qui en bénéficiera, soit un million ferroviaires adaptées à notre époque ». des divorces avec garde alternée des enfants de camions supplémentaires sur nos En décalage avec l’opinion et totale- implique des déplacements fréquents entre routes par an. D’où une impasse environ- ment irresponsables, les 93 parlemen- les domiciles des parents séparés ; la dimi- nementale et sociétale sans précédent : taires (dont l’argument sur l’isolement nution de la taille des ménages, les condi- croissance des émissions de CO2, satura- mortifère fait sourire et n’a de sens que tions de vie difficiles dans les métropoles, le tion et coût des axes routiers, multiplica- pour un nombre marginal de localités) fractionnement des vacances encouragent tion des accidents. n’ont songé à réclamer ni un freinage des les déplacements touristiques ; la vie éco- Grâce à son faible impact environne- travaux routiers qui ne font qu’induire un nomique s’internationalise. mental, à sa pertinence sur les longues trafic générateur d’un tiers de nos émis- En définitive, les déplacements à longue distances et à la faiblesse de ses coûts sions de carbone, ni à proposer une accé- distance font de plus en plus partie de la vie externes, le rail peut accélérer la construc- lération de l’« adaptation des infrastruc- quotidienne. tion d’une économie et d’une société eu- tures ferroviaires à notre époque ». Jean Sivardière z ropéennes unifiées.

10 x FNAUT infos n°277 - septembre 2019 Actualité Taxes Taxes sur l’avion et le camion : Déceptions une décision courageuse, un premier pas prometteur La FNAUT a approuvé la création des nouvelles taxes sur le transport aérien Le gouvernement a décidé d’instaurer L’utilisation du produit des taxes et le transport routier de fret. Les ONG une taxe (baptisée « éco-contribution ») sur environnementalistes ont cependant les billets d’avion et de réduire l’exonération L’affectation intégrale du produit des deux souligné la timidité des décisions du de TICPE sur le gazole dont bénéficient opérations, soit 322 Mc par an, est perti- gouvernement et leur manque de pers- les transporteurs routiers de marchandises. nente, elle permettra de combler en partie le pective à long terme. Ainsi, pour Trans- La FNAUT a salué cette double décision, déficit annoncé de l’AFITF (570 Mc). Le port et Environnement, « cette nouvelle inattendue et pertinente, prise malgré l’op- rail en sera le premier bénéficiaire. éco-contribution est dérisoire par rap- position des transporteurs concernés. port aux taxes imposées dans les pays Après avoir longtemps affirmé que de Des taxes légitimes voisins, comme l’Allemagne (où la taxe nouvelles taxes pollueur-payeur sur les rapporte 1 Mdc par an) ou le Royaume- transports aérien et routier étaient incom- Contrairement aux affirmations des Uni (3 Mdc par an) ». patibles avec les intérêts des entreprises groupes de pression aériens (voir enca- françaises et ne pouvaient être instaurées dré) et routiers (FNTR), les nouvelles Protestations qu’à l’échelle européenne, le gouvernement taxes sont légitimes et leur affectation est a franchi un pas prometteur. rationnelle : elles freineront des activités Selon Alain Battisti, président de la fortement émettrices de gaz à effet de Fédération nationale de l’aviation mar- Une taxe sur les billets d’avion serre, faciliteront le développement de l’al- chande (FNAM) : « c’est un mauvais ternative ferroviaire (le train est fortement coup porté aux compagnies aériennes La taxe sera de 1,5 c en classe économique concurrencé par l’avion, voir FNAUT In- françaises ». Air France, dont le réseau et 9 c en classe affaires pour les vols inté- fos 266 et 273), auront un impact margi- intérieur a été déficitaire, en 2018, de rieurs et vers l’Union Européenne ; de 3 c en nal sur le budget des consommateurs et 180 Mc, estime que la nouvelle taxe lui classe économique et 18 c en classe affaires répondent aux aspirations d’une large part fera perdre 60 Mc supplémentaires. Pour pour les vols hors Union européenne. Toutes de la population. le président de l’Union des aéroports les compagnies seront concernées, mais seuls Si ces décisions légitimes sont encore français (UAF), Thomas Juin, « cette nou- les vols au départ de la France seront taxés ; loin d’établir une réelle équité entre les velle taxe est un non-sens économique les vols vers la Corse et les DOM-TOM, les modes de transport, elles représentent un et environnemental ». vols en correspondance et les lignes d’amé- pas important dans la bonne direction. La Pour le sénateur centriste Vincent nagement du territoire seront exonérés. La FNAUT souhaite qu’elles soient accen- Capo-Canellas, « la taxe participe d’une taxe devrait rapporter 182 Mc par an à tuées progressivement et étendues à l’en- logique contestable qui veut que l’aé- l’Etat. Le prix moyen du billet d’avion aug- semble des modes. rien peut payer pour financer le rail et la mentera de 3 à 10 % sauf si les compagnies Rappelons que le transport aérien est route, alors qu’il est déjà très taxé ». aériennes prennent la taxe en charge (c’est le taxé (taxe sur le kérosène ou sur les bil- Pour le PDG de Voyageurs du Monde, cas d’Air France). lets) en Suède, en Allemagne, aux Pays- Jean-François Rial, « la taxe est inco- La non-taxation du kérosène coûte à Bas, en Suisse, aux USA, au Brésil et hérente, le gouvernement a cédé à la l’Etat 3,7 Mdc par an, plus de 300 Mc en au Japon : la France n’est donc plus une démagogie d’un mouvement de haine seul trafic intérieur. exception. Le tableau ci-contre (source : de l’avion ». Transport et Environnement) donne le Le syndicat des pilotes de lignes Une détaxation réduite du gazole montant des taxes et redevances par billet SNPL, dont les exigences salariales ont acquitées par les compagnies aériennes failli déstabiliser Air France, a dénoncé L’exonération actuelle a un coût pour dans divers pays européens : on note la l’accumulation des charges visant le l’Etat de 1,2 Mdc. Sa réduction, de 17 cen- faiblesse de ces contributions en France secteur aérien et un risque pour les times/litre à 15 en 2020, rapportera 140 Mc (bleu clair : avion court-courrier ; bleu compagnies françaises : « c’est une par an à l’Etat. foncé : avion long-courrier). vague fiscale mortifère pour les entre- prises françaises ». Pour l’Association internationale du transport aérien (IATA), « cette taxe por- tera préjudice aux 100 milliards d’euros que l’aviation génère pour l’économie française, et 500 000 nouveaux emplois sont menacés ».

Loi de finances 2020

Bien entendu, l’instauration des nou- velles taxes devra être confirmée par la loi de finances 2020.

La taxe Chirac

Mise en place en 2006 afin de financer la lutte contre les grandes pandémies (sida...) dans les pays pauvres, la « taxe Chirac » - de 1 à 45 euros par billet - rap- porte chaque année plus de 210 Mc.

FNAUT infos n°277 - septembre 2019 x 11 Actualité Confirmation

François Poutot, habitant de Charmes (88), a lancé une pétition pour le main- tien des lignes TER et la construction de la gare de Vandières (www.mesopi- Forum nions.com/petition/politique/lorrains- relations-chemins-fer-monde/40034). Les commentaires des 1 700 signataires confirment les affirmations de longue date de la FNAUT, qu’il s’agisse des dé- fauts de l’exploitation SNCF, du position- Pixabay nement des gares TGV ou de l’aménage- ment du territoire. La gare de Vandières Pourtant l’avion conserve sa suprématie, « J’en ai assez d’emmener ma fille à même sur des distances courtes. Deux raisons l’école à Nancy parce que son train est A la différence de l’Alsace et de Cham- peuvent être avancées pour la comprendre : toujours en retard ou annulé à l’arrêt de pagne-Ardenne, la Lorraine ne dispose - d’une part la commercialisation du train Pompey. Il me faut 7h pour aller de Virton pas d’une interconnexion de ses lignes est trop compliquée (il est facile de réserver à Bar-le-Duc en train, c’est ça le progrès ? TER avec la LGV Est, alors qu’à quelques un trajet aérien entre Amsterdam et un petit Sommes-nous des citoyens au rabais ? kilomètres de Louvigny, halte provisoire aéroport d’Amérique Latine impliquant des L’incompétence de la SNCF est effarante : actuelle du TGV, la ligne du Sillon lorrain changements d’avions et de compagnies, mieux géré, le rail serait rentable. La sup- Nancy-Metz-Thionville, qui dessert près mais il faut être un spécialiste pour se pro- pression des lignes TER est d’autant plus d’un million d’habitants, voit passer plus curer un billet de train bon marché sur un difficile à comprendre que, sur certaines, de 100 TER quotidiens. itinéraire international) ; les trains faisaient le plein de voyageurs. La gare « betteraves » actuelle de Lou- - d’autre part le passager aérien est mieux Il faut des trains pour pouvoir aller bosser vigny, construite à moindre frais, n’était protégé que le voyageur ferroviaire en cas de quand les bus ne circulent plus pendant qu’une réponse provisoire dans l’attente dysfonctionnement (si un vol est annulé, la les vacances scolaires. Plus le train sera de la construction de la gare de Vandières, compagnie responsable essaie de trouver un accessible, plus le trafic augmentera ». actée dans un protocole signé par le Gou- vol de remplacement, mais si un train Benelux « Les lignes TER doivent être connec- vernement, la SNCF et les collectivités Bruxelles-Amsterdam est supprimé, le voya- tées aux LGV, c’est essentiel pour les territoriales. C’est ce qui avait conduit geur ne peut se reporter sur un train Thalys. deux réseaux, c’est du simple bon sens. l’État à réaliser, par anticipation, d’impor- Michel Quidort, président de la FEV On en a marre de devoir réquisition- tants travaux sur le site de Vandières pour d’après Arriën Kruyt z ner un chauffeur et de risquer de rater 23,6 Mc (FNAUT Infos 234, 238, 241). le TGV en cas de bouchon sur l’A31. Le Loin de concurrencer la rénovation du Rail et communes rurales nouveau président de la région Grand réseau TER, la construction de cette gare Est compte-t-il cautionner l’incompé- contribuerait à le relancer en lui apportant Lors d’une récente réunion de l’AQST tence et l’irresponsabilité lamentable du trafic. Elle doit être décidée rapide- (Agence pour la Qualité de Service dans les de son prédécesseur ? La réalisation de ment, elle dispose d’un financement spéci- Transports) où je représentais la FNAUT, un la gare de Vandieres est impérative pour fique et la ministre des Transports, lors de comparatif des dessertes ferroviaires en France, pouvoir relier l’ensemble de la région la discussion de la LOM, s’y est déclarée en Allemagne et en Espagne a été présenté. à la moitié ouest du pays ainsi qu’aux favorable. Les trajets ont été segmentés suivant leur aéroports parisiens ». Louis Blaise, président, AUT Lorraine z longueur : moins de 50 km, de 50 à 100, de « La pollution de l’air et les catas- 100 à 400 et plus de 400. Les communes trophes climatiques doivent faire réagir Trains internationaux considérées ont été choisies au hasard, ce sont les pouvoirs publics. Nous demander de donc essentiellement des communes rurales ne plus être obligés d’utiliser la voiture L’idée se répand en Europe que le qui ont été considérées. pour éviter les accidents de la route et train est susceptible de remplacer l’avion Les informations ont été recueillies la saturation des centres-villes, et sup- pour les déplacements à longue distance, sur le site web, qui semble assez fiable : primer les moyens alternatifs est un non au moins sur les distances inférieures à www.rome2rio.com. Dix trajets par tranche de sens. Nos bourgs doivent vivre sinon 500 km. longueur ont été retenus pour chaque pays. nos enfants et nos retraités, trop isolés, Comme l’a montré une association Résultat : la durée des trajets et les temps quitteront les petites villes et les villages néerlandaise de consommateurs, la durée perdus en correspondances sont très longs pour rejoindre les villes mieux desser- globale des trajets aérien et ferroviaire et en France (3h en moyenne pour un trajet de vies. Il n’est pas normal de devoir passer les tarifs sont souvent comparables mal- 50 km), bien plus courts en Allemagne, sur- par Paris ou Strasbourg pour aller à Dijon gré l’absence de taxation du kérosène ; à tout pour les trajets de faible longueur ; les fré- ou Lyon ». certaines heures, le train est même moins quences (notes respectives sur 20 : 2,6 ; 10,1 ; cher que l’avion (et l’autocar). 12,7) et l’amplitude horaire (4,7 ; 12,7 ; 13,4) FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information sont mauvaises en France, bonnes en Espagne, Directeur de publication : Jean Sivardière Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT Rectificatif très bonnes en Allemagne. CPPAP 0920 G 88319 - Dépôt légal n°277 - ISSN : 0983-172 X L’offre est bien meilleure en Allemagne : Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative Contrairement à ce qui est indiqué 60 % des trajets de moins de 50 km sont fai- Avenue de la Plage - 86240 Ligugé Abonnement papier 1 an (10 numéros) : Individuels : 19 b par erreur dans l’éditorial du numéro sables en train, contre 20 % en France et 10 % Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b 275 de FNAUT Infos, la Région Grand en Espagne. Les écarts se réduisent pour les Prix au numéro : 2 b - Diffusion numérique libre Est ne s’est pas opposée au nouveau trajets longs mais restent en défaveur de la Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT dispositif de régularisation des billets France (fréquences trop faibles et des corres- de votre région, contacter notre permanence : 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris à bord des trains imposé par la SNCF, pondances mal conçues). tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06­ et a accepté la surtaxe inadmissible Gilles Laurent, président e-mail : [email protected] dénoncée par la FNAUT. de l’Union des Voyageurs du Nord z Internet : https://www.fnaut.fr

12 x FNAUT infos n°277 - septembre 2019 infos 278 octobre 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

La croisée des chemins Transport aérien L’adaptation des mobilités aux exi- gences du 21e siècle est une longue course d’obstacles. Malgré l’élan donné par les Assises de la Mobilité, le gouverne- ment a hésité, et finalement calé lors de la commission mixte paritaire du 10 juillet. Nul doute que la loi LOM sera votée cet automne, allégée du caractère « pro- Perspectives d’avenir grammatique » initialement prévu et des dispositions financières renvoyées à la loi de Finances 2020. Mais c’est aujourd’hui comme ministre de la transition écologique et solidaire qu’Elisabeth Borne défendra son projet et devra convaincre que le gouverne- ment veut changer de rythme pour ré- pondre au défi climatique. Pixabay Le gouvernement ne peut plus ignorer l’impérieuse nécessité d’un aménage- ment du territoire équilibré et socialement juste, ni celle d’une maîtrise du rôle de la voiture, du camion et de l’avion. Réduire la Dès sa création, la FNAUT a dénoncé les effets néfastes du transport aérien et dépendance automobile, accroître la part souhaité un report du trafic aérien sur le train Intercités, de jour et de nuit, et sur du ferroviaire (la hausse exceptionnelle le TGV. Dans la conclusion de son expertise sur les aides publiques apportées au de la fréquentation des TER et des TGV cet transport aérien intérieur (FNAUT infos 273), qui confirme largement les thèses été montre que la société française est en de la FNAUT, et dont nous rappelons les principaux résultats, Jacques Pavaux avance sur le gouvernement) et inciter au a précisé sa vision sur l’avenir de l’avion : une taxation du kérosène, autorisée report modal n’est plus une alternative, par la Convention de Chicago, n’est envisageable aujourd’hui qu’à l’échelle de c’est devenu une « ardente obligation » à l’Union Européenne et ne sera efficace qu’à l’échelle mondiale. Mais elle est in- laquelle ni le gouvernement ni la majorité ne peuvent se soustraire. dispensable, faute de quoi l’utilisation de l’avion continuera à croître au rythme L’acquisition inattendue de 12 TGV an- de 4 à 5 % par an, et sa contribution au réchauffement climatique deviendra nonce-t-elle la fin du malthusianisme de inacceptable. Le TGV est l’outil le plus efficace pour absorber du trafic aérien. la SNCF ? Le rapport Philizot va-t-il inver- Comme le rappelle Jean-Marie Beauvais dans une étude consacrée aux écono- ser la tendance sur les petites lignes ? Le mies possibles d’énergie fossile dans les transports, une réduction de l’usage de Lyon-Turin enfin confirmé ouvrira-t-il une l’avion est également nécessaire pour limiter les gaspillages d’énergie. nouvelle politique de transport du fret ? Bruno Gazeau z Sommaire Une décision de bon sens Loi d’Orientation des Mobilités, Pacte ferroviaire : où en est-on ? 2-3 Le gouvernement italien a donné son Les économies d’énergie dans les transports 4 accord à la réalisation de la liaison Lyon- Dossier - Transport aérien : perspectives d’avenir 5 Turin, défendue de longue date par la Le TGV, outil le plus efficace pour absorber le trafic aérien 6 FNAUT. L’Union Européenne a joué un rôle Les initiatives associatives et parlementaires contre l’avion 7-8 déterminant. La liaison permettra d’absor- La disparition des trains directs en France 9-10 ber massivement les trafics routiers, et de Articles divers et brèves 11 rééquilibrer l’économie européenne au Forum des lecteurs 12 bénéfice de l’arc méditerranéen.

FNAUT infos n°278 - octobre 2019 x 1 A la Une

La Loi d’Orientation des Mobilités

Un long processus inachevé

Wikipedia

Le projet de loi LOM s’inscrit dans un long processus de réflexion et de concer- rationnels de mobilité entre les AO. Ces tation avec tous les acteurs de de la mobilité. Lors les Assises de la Mobilité, puis dispositifs seront précieux pour débattre lors des votes au Sénat et à l’Assemblée Nationale, beaucoup se sont investis pour des plans de transport, des tarifications, moderniser la LOTI de 1982, intégrer les évolutions récentes, faciliter et encadrer les des intermodalités et des questions stra- innovations et les expérimentations. tégiques. La FNAUT sera attentive à ce que des sous-comités réunis régulièrement La mobilisation de tous les acteurs a été à 2020 prend en compte l’obligation de puissent traiter de la ponctualité, de la qua- un succès et un atout, mais ce long pro- réduire la pollution de l’air. Les élus sont lité de service, des situations perturbées. cessus a perdu de son souffle avec les épi- incités à se saisir du dispositif et à donner l Mesure phare, le forfait mobilité sodes « gilets jaunes » et les reports succes- l’élan espéré. L’absence de garanties pour durable reste optionnel, il est renvoyé aux sifs dans l’ordre du jour du Parlement. La l’efficacité des plans d’action est en par- négociations d’entreprise. La FNAUT partie financière, sans laquelle la loi n’est tie compensée par la prise de conscience souhaitait qu’il soit obligatoire, elle sera qu’une boîte à outils, est reportée à la loi de des populations de l’urgence d’agir, et par vigilante sur la période d’expérimentation finances 2020. les mesures d’accompagnement (bonus- retenue et la possibilité de rendre le forfait Les Français ont pris conscience des malus...). La loi renforce aussi le lien entre obligatoire à son terme. enjeux de la mobilité et se déclarent satis- plan climat et plan de mobilité. l La limitation de la vitesse à 80 km/h fait à 72 % du projet de loi. Si l’irruption sur les routes secondaires, que la FNAUT des trottinettes et la limitation de vitesse à l Un plan vélo est acté a soutenue publiquement, fait l’objet de 80 km/h ont détourné l’attention des choix Le plan est doté d’un fonds national possibilités d’assouplissement à l’initiative écologiques et climatiques, les Assises puis qui facilitera les mesures d’accompagne- des élus départementaux. La FNAUT le le projet de LOM ont mis l’accent sur le ment pour l’apprentissage du vélo, la pro- regrette et suivra attentivement la mise en transport quotidien des particuliers après tection des vélos, leur stationnement... œuvre de l’assouplissement. des décennies d’une politique continue Ce plan vélo, s’il n’a pas l’ampleur espérée l Des atteintes sont possibles à la qualité d’encouragement à l’utilisation de la voiture au départ, est une véritable évolution et du service public de transport. et du transport routier de marchandises qui un encouragement donné aux élus locaux L’attention portée aux nouvelles mobi- a écrasé les autres modes dont le fret ferro- pour répondre à la demande des citoyens lités, covoiturage, autopartage, et à la né- viaire. L’émergence des gilets jaunes et les d’un plan de mobilités douces. cessaire procédure d’expérimentation du épisodes « pollution-canicule » sont venus véhicule autonome ne doit pas se faire au réorienter partiellement le projet de loi et l Le projet de loi pose un cadre pour détriment de la vitesse commerciale des en souligner les insuffisances. l’open data, les applications Maas autobus et autocars. Or le risque est réel et la voiture autonome d’un partage des couloirs réservés voire Des avancées incontestables La loi fixe les conditions de partage d’une remise en cause du partage de la des données et permet aux systèmes de voirie et d’un renvoi du bus dans la circu- l La fin des zones blanches de la billettique et d’information voyageurs en lation générale. mobilité est programmée temps réel d’être intégrés à différentes C’est un des points essentiels de la loi : plateformes multimodales. Un cahier des Les lacunes du projet de loi faire en sorte que pour chaque parcelle de charges réglementaire s’appliquera à tous territoire, pour chaque citoyen, une auto- les acteurs, quel que soit le modèle des ser- l La loi encadre le déploiement des rité organisatrice existe et porte la compé- vices numériques multimodaux. services de vélos et de trottinettes en tence mobilité. En effet, 70 % du territoire La loi s’efforce d’équilibrer et de concilier flotte libre (free floating) avec un régime et 30 % de nos concitoyens ne relèvent à les activités et les relations entre les chauf- d’autorisation préalable et la possibilité présent d’aucune AO (Autorité Organisa- feurs VTC, les livreurs et les plateformes, de soumettre ces services à une redevance trice). Le sujet a fait l’objet de débats ap- en particulier sur les rémunérations des d’occupation domaniale. profondis entre élus sur un retour progressif prestations, les compétences profession- Mais elle n’impose pas d’obligations de de la compétence à la Région. La prise en nelles, les conditions de travail et les garan- service public, par exemple en exigeant compte affirmée de l’étalement urbain, l’in- ties de protection sociale. une mise à disposition minimale des véhi- citation au télétravail ne peuvent cependant cules en bout de ligne de transport collec- se substituer à la perception d’un versement Des points de vigilance tif pour faciliter le dernier kilomètre le soir mobilité interstitiel à 0,3 % pouvant finan- ou en heure creuse. cer les actions en faveur des mobilités dans l La loi institue des comités de parte- l Le texte n’est pas à la hauteur des enjeux les zones plus rurales. naires créés à l’initiative de chaque AO et sanitaires et climatiques, et des exigences en fixe la composition. Les usagers y sont de l’accord de Paris. En renvoyant à la loi l Le dispositif des zones à faibles émis- mentionnés. La loi fixe aussi une liste des de finances les dispositions financières, il sions est lancé thèmes assez complète sur lesquels les ne tranche pas sur la question de l’équité Le déploiement des zones à faibles émis- partenaires pourront donner leur avis. Le entre les modes. Certes, les contributions sions dans les grandes agglomérations d’ici Sénat a en outre rétabli les contrats opé- - modestes - de l’avion et de la route au

2 x FNAUT infos n°278 - octobre 2019 A la Une financement des infrastructures sont posi- Pacte ferroviaire : où en est-on ? tives et courageuses : elles traduisent une rupture, mais ne peuvent constituer qu’un point de départ. Elles pourraient être ver- sées à l’AFITF mais elles ne corrigent pas les avantages fiscaux dont bénéficient les transports aérien et routier. l Le texte est facultatif pour de nom- breuses mesures et ne fixe qu’à 2040 la fin de vente des véhicules essence et diesel. Or la seule date compatible avec l’objectif de neutralité carbone en 2050 recommandé par le GIEC serait 2030. l Enfin une dizaine deprojets d’infras- © MD tructures autoroutières et de contour- nement urbain (Rouen, Strasbourg...) est l La réforme ferroviaire entérinée par le vote du Pacte ferroviaire le 18 juin 2018 a maintenue, il en résultera une hausse du acté plusieurs décisions très positives pour l’avenir du rail : trafic routier. - la reprise d’une grande partie de la dette ferroviaire en deux étapes ; - l’ouverture du rail à la concurrence après des années de tergiversations, et les ga- Les Français satisfaits ranties d’équité pour les nouveaux entrants (sécurite ferroviaire, droits sociaux inscrits dans une nouvelle convention collective de branche) ; Les Français, selon Odoxa, approuvent - la réforme de la gouvernance de la SNCF (transformation des trois EPIC et du fret l’encadrement des services de vélos et en sociétés anonymes, rattachement de Gares et Connexions à SNCF Réseau) ; trottinettes qui encombrent abusivement - les garanties d’indépendance de SNCF Réseau ; l’espace public, la possibilité donnée aux - le renforcement des pouvoirs de l’ARAFER. Régions de gérer les petites lignes (mais l La deuxième phase, celle des décrets et ordonnances, pourrait tempérer la pre- avec quels financements ?), le forfait mière quant au rythme et au caractère réel de la rupture. En réalité tout commencera mobilité durable de 400 c défiscalisé et en 2020. La composition des conseils d’administration n’est pas connue et les interro- la contribution du transport aérien au fi- gations vont bon train sur le choix du nouveau président de la SNCF. nancement du développement des autres La SNCF se prépare à l’ouverture à la concurrence et cherche à réduire ses coûts modes. Mais ils récusent toute atteinte à (réduction du nombre de guichets, accélération du recours au tout digital...), à l’automobile : vitesse ou rapprochement à accroître sa productivité (utilisation du matériel, concentration des fréquences 2030 de l’interdiction de vente des véhi- sur les grands axes, réduction des dessertes de villes moyennes même grandes : cules essence et diesel. Annecy, Chambéry, Grenoble...). Les conditions d’ouverture à la concurrence restent imprécises. Les Régions et les Le renvoi à la loi de finances 2020 opérateurs privés s’inquiètent de l’obtention rapide et exhaustive des données indis- pensables pour répondre aux futurs appels d’offres (données relatives à la mainte- La LOM, qui devait être une loi de nance des matériels, à la fréquentation et aux coûts d’exploitation par ligne...). programmation préparée par le rapport Plusieurs experts témoignent de leur inquiétude sur l’indépendance réelle de Duron et ses trois scénarii, reste une SNCF Réseau, sur les dispositions des décrets et ordonnances qui ne suppriment pas boîte à outil sans programmation des in- ou risquent de recréer des barrières à l’arrivée de nouveaux opérateurs. Le rythme de frastructures. Les grands arbitrages sont négociation de la convention collective de branche est assez lent. renvoyés à la loi de finances. Or ces choix La séparation des rôles de l’Etat, tuteur de l’entreprise publique et autorité organi- sont décisifs, qu’il s’agisse : satrice de transport, à ce titre responsable du cahier des charges des appels d’offres - du scénario de la priorité donnée au pour les lignes mises en concurrence (Nantes-Lyon et Nantes-Bordeaux) reste ambi- ferroviaire et du calendrier qui en dé- guë alors que ce même État, garant d’une ouverture transparente à la concurrence et coule pour les investissements ferroviaires tuteur de l’exploitant de ces lignes, sollicite l’avis de l’ARAFER sur la possible accession (contournement de Lyon, voies d’accès du de ces mêmes lignes à l’équilibre économique. Lyon-Turin, désengorgement des nœuds L’Etat a refusé la concurrence sur les LGV selon le système, proposé par la FNAUT, de Bordeaux, Toulouse et de l’axe médi- des franchises de lignes regroupées par lot au profit d’un système de modulation des terranéen...) ; péages des sillons pour que la concurrence conserve son attrait pour les nouveaux en- - du 4e appel à projets exigeant un accord trants. On constate un attrait de la SNCF mais aussi des opérateurs privés pour les LGV entre les AO métropolitaines et régionales les plus fréquentées et un désintérêt de la SNCF pour les lignes transversales et les des- pour la régénération des étoiles ferroviaires sertes TGV jugées peu rentables, organisant les correspondances TER pour les réduire et permettant le maillage des grands aires (voir les exemples de Chambéry et Annecy). L’horaire 2021 sera donc crucial, et le débat urbaines et la desserte des première et deu- sur le couple concurrence/aménagement du territoire relancé dès la fin 2019. Ce dossier, xième couronnes ; couplé à celui du financement des contrats de plan État-Régions et des « petites lignes » - du financement du Grand Paris. est complexe. En atteste le retard dans la publication du rapport du préfet Philizot. l La nomination d’Elisabeth Borne au ministère de la transition écologique et soli- La FNAUT suivra particulièrement les daire, peut modifier les équilibres et les arbitrages. textes relatifs aux sociétés de projet et La FNAUT a toujours été favorable à un ministère des transports et de la mobilité le rapport sur les perspectives de re- de plein exercice. Cette indépendance a permis la tenue des Assises de la Mobilité lance des trains de nuit. Enfin, elle at- et le vote prochain de la LOM. Elle n’a cependant pas permis que cette loi soit une loi tend la publication du rapport Philizot de programmation financière telle que prévue initialement, sanctuarisant le finance- sur les « petites lignes », les modalités ment des infrastructures. Elle n’a pas non plus permis que la mobilité devienne une de financement allouées aux Régions solution aux défis et nécessaires transformations liées au changement climatique et via les Contrats de Plan Etat-Régions à la transition énergétique. La FNAUT réitère sa demande d’être membre du Comité et les dispositions liées aux possibili- d’orientation des infrastructures (COI), après le vote de la loi le pérennisant, et membre tés d’expérimentation annoncées par du CNTE, aux côtés des ONG dont l’approche est d’abord climatique et énergétique, les collectivités régionales. celle de la FNAUT étant centrée sur la mobilité.

FNAUT infos n°278 - octobre 2019 x 3 A la Une

Comment économiser l’énergie dans le secteur des transports

© MD

Nous résumons ci-dessous une conférence récente donnée par le consultant La localisation des logements Jean-Marie Beauvais dans le cadre d’une formation sur le thème « changements et des activités climatiques et modes de vie », publiée dans la revue Transport, Infrastructure et Mobilité en janvier 2019. Le déplacement le moins énergivore est celui... qui n’est pas effectué. D’où l’inté- L’évolution inquiétante En transport de marchandises, toute rêt des mesures organisationnelles telles des émissions de CO2 l’augmentation vient du transport rou- que le télétravail ou l’offre de bureaux de tier. Or, le mode routier est plus consom- proximité. D’où l’intérêt, aussi, pour ré- En France, le transport est le secteur le mateur d’énergie par unité de trafic que duire les distances à parcourir en voiture : plus émetteur de CO2 : 41 % des émissions le transport ferroviaire ou fluvial. - à l’échelle d’une aire urbaine, d’une totales en 2016. Depuis 1990 (tableau), il urbanisation assez dense autour de pôles est le seul secteur à présenter une hausse ...et de l’efficacité énergétique bien desservis en transport collectif, et de (+ 7 %) alors que tous les autres ont connu centres commerciaux qui ne soient pas une baisse de leurs émissions (- 15 % tous L’évolution de l’efficacité énergétique seulement accessibles en voiture ; secteurs confondus). est liée à celle de la voiture particulière - à l’échelle d’un département, de créer Cette hausse est due à celle de la consom- et du camion, qui assurent plus de 80 % des emplois dans les petites villes et de mation d’énergie, qui est passée de 38,5 à des parcours. ne pas les vider de leurs services publics 43,8 MTep (+ 14 %) malgré l’introduction La consommation moyenne des voi- (tribunal, hôpital...) ; d’énergies moins émettrices de CO2. tures est certes passée, entre 1990 et - et, à une échelle territoriale inter- A noter que les produits pétroliers raffi- 2016, de 8,68 à 7,27 litres aux 100 km médiaire, d’aménagements centrés au- nés représentent 91 % de la consommation pour les motorisations essence et de 6,73 tour des gares de façon à ce que ceux totale du secteur des transports (électricité à 6,06 litres aux 100 km pour les moto- qui ne trouvent pas de travail sur place 2 %, agro-carburants 7 %), la dépendance risations diesel. puissent gagner la gare en vélo ou à au pétrole importé est donc très forte... Mais la baisse de consommation pied. Il faut encadrer la délivrance des En transport de voyageurs, l’essentiel globale n’a été que de 0,5 % par an en permis de construire pour que les loge- de la hausse provient des véhicules par- moyenne car les efforts des construc- ments soient accessibles depuis une ticuliers. En effet, le trafic total est passé, teurs ont été quasiment annihilés par gare ou à défaut depuis un simple point entre 1990 et 2016, de 732 à 932 mil- l’augmentation du poids des véhicules, d’arrêt de transport collectif. liards de voyageurs-km, soit + 200 mil- de la vitesse de pointe, de la surcons- La difficulté des politiques d’aménage- liards de voyageurs-km dont 156 pour les ommation imputable à la climatisation ment du territoire tient à ce que les élus véhicules particuliers. (et de la percée des véhicules SUV de- sont souvent « court-termistes ». Certes, La principale cause d’augmentation de puis 10 ans). leur mandat ne dure quelques années, la consommation d’énergie est donc l’aug- D’ailleurs, la puissance moyenne ins- mais ce n’est pas une raison suffisante mentation de la mobilité des personnes tallée sur les véhicules a augmenté à un pour écarter les mesures qui n’auront (+ 27 % en 26 ans). rythme soutenu : de 55 kW en 1990 à d’effet bénéfique qu’à moyen terme, voire Depuis 2008, date de la dernière en- 86 kW en 2016, soit + 56% ! même à long terme, mais qu’il faut mettre quête nationale Transports-Déplacements en place dès aujourd’hui. (ENTD), la population française a aug- Les besoins de mobilité menté de 6 % et le nombre moyen de km La répartition modale parcourus par habitant (14 700) de 10 %. La société de consommation repose 41 % des km concernent aujourd’hui sur l’imitation sans fin des classes supé- Un des objectifs de la politique des des déplacements à longue distance (plus rieures, d’où la responsabilité de ces der- transports est de réduire les consomma- de 80 km), ils augmentent plus vite que les nières car il est aujourd’hui admis qu’il tions d’énergie et les émissions de CO2, déplacements courts en raison de la pro- y a un hiatus entre une croissance sans il apparait donc naturel d’orienter la de- gression du pouvoir d’achat et de l’offre limites et des ressources finies. mande vers les modes les plus économes aérienne à bas coût (la distance moyenne Ce consumérisme obsessif est stimulé en énergie. domicile-activités quotidiennes est pour- par les fortes inégalités de revenus. Seul Sur la base de l’éco-comparateur de tant passée de 12 à 14,7 km). un changement dans les styles de vie l’ADEME, il faut que l’on puisse pro- pourrait exercer une pression saine sur gressivement passer de la voiture et de Emissions de CO2 en France les détenteurs du pouvoir politique, éco- l’avion aux transports collectifs mais aus- nomique et social (médias). si des modes motorisés aux modes actifs, Secteur Part Evolution C’est déjà le cas quand certaines asso- marche et vélo. Energie 15 % - 16 % ciations obtiennent qu’on n’achète plus Tant à courte distance qu’à longue dis- Industrie 17 % - 31 % certains produits et deviennent ainsi ef- tance, il faut donc réduire la place de la voi- Résidentiel 23 % - 14 % ficaces pour modifier le comportement ture, du camion et l’avion et, parallèlement, Agriculture 4 % - 0,3 % des entreprises, en les forçant à considé- offrir aux personnes et aux entreprises des Transports 41 % + 7 % rer leur impact environnemental. solutions de rechange crédibles.

4 x FNAUT infos n°278 - octobre 2019 Dossier

Transport aérien

Perspectives d’avenir

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Jacques Pavaux, ancien directeur de l’Institut du Transport Aérien, a précisé son péens. En 2018, les compagnies françaises expertise sur les aides publiques accordées au transport aérien commercial intérieur n’ont dépensé que 10 Mc pour acheter à la France métropolitaine (FNAUT Infos 273). Nous résumons ici sa conclusion. des quotas, elles sont donc peu incitées à réduire leurs émissions. L’expertise a porté sur 86 aéroports mé- consommé par les avions n’est pas taxé. Selon Une taxation du kérosène ne serait effi- tropolitains : 76 aéroports régionaux ont la Cour des comptes, l’exonération, effective cace qu’à l’échelle mondiale, sa mise en un trafic inférieur à 2 millions de passagers sur tous les aéroports, doit être assimilée à une place est donc peu probable. annuels ; le seuil de rentabilité étant d’en- aide publique. Elle est à l’évidence défavorable viron 1 million de passagers (pax) par an, à l’environnement (surtout sur les liaisons court- Un enjeu mondial 70 d’entre eux sont structurellement défici- courriers) car elle défavorise le train en abaissant taires, ils n’assurent que 4,5 % du trafic total le coût d’un trajet en avion de 10 à 12 c. Les compagnies aériennes estiment que (parmi eux, 43 ont moins de 100 000 pax par Contrairement à une idée répandue, l’avion est responsable de 2 % seulement an et assurent à peine 0,3 % du trafic total). l’exonération ne doit pas être attribuée à des émissions mondiales de CO2, un la convention de Chicago de 1944 adoptée chiffre qui date des années 2000. Si on Les aides publiques à l’avion lors de l’émergence de l’aviation commer- tient compte du trafic de fret (avions car- ciale. Mais elle est inscrite dans les milliers go) et si on ignore les gaz à effet de serre Les aides publiques aux aéroports ont d’accords bilatéraux signés entre Etats et (GES) autres que le CO2, notamment les peu évolué depuis dix ans. compagnies aériennes depuis le premier 6 mentionnés dans le protocole de Kyoto, l La couverture des déficits par l’Etat, les accord des Bermudes (1946). A l’époque, on arrive déjà à 3 % en 2018. collectivités territoriales et les chambres de personne n’avait conscience des effets envi- Avec la croissance prévue du trafic (4 à commerce a coûté 94 Mc par an en moyenne ronnementaux de la combustion des éner- 5 % par an) et un gain de 1 % par an en sur 2016 et 2017, soit 8,3 c par pax. Mais sur gies fossiles, mais une réaction est devenue efficacité énergétique, les émissions mon- les plus petits aéroports, ce coût par passager difficile aujourd’hui. diales de CO2 dues à l’avion devraient peut dépasser plusieurs centaines d’euros. Appliquer la TICPE au kérosène augmenter de 70 % dans les 15 ans à l L’aide globale à l’investissement est d’au consommé sur les seules lignes intérieures venir et atteindre 5 % des émissions des moins 20 Mc. serait possible - la réglementation euro- autres secteurs si celles-ci se stabilisaient. l L’exonération partielle de taxes foncières péenne ne s’y oppose pas - mais imprati- Mais, en haute altitude, les avions sur tous les aéroports, dont les aéroports cable car rien n’empêcherait une compagnie émettent aussi de la vapeur d’eau, des parisiens, coûte 55 Mc. européenne étrangère de faire le plein hors oxydes d’azote, des aérosols, et pro- l A ce total d’environ 170 Mc, il faut de nos frontières avec du kérosène détaxé, voquent la formation de traînées de ajouter le financement total ou partiel de un avantage concurrentiel qui pénaliserait condensation et de cirrus. En définitive, certaines missions régaliennes par l’Etat les compagnies françaises et s’ajouterait on peut estimer la contribution de l’avion (contrôle aérien, douanes...). Le coût total à celui de charges sociales généralement au réchauffement climatique est d’envi- de ces missions n’a pas été évalué faute de moins élevées à l’étranger. ron le double du seul effet dû au CO2, données (il est de 2,3 Mc à Agen). C’est la raison pour laquelle le gouverne- soit environ 6 % des contributions mon- ment libéral de Norvège a choisi de taxer diales d’origine anthropique aujourd’hui, Les aides publiques aux compagnies les billets d’avion plutôt que le kérosène. 4 % seulement si on ne considère que les aériennes portent sur : Seul le Japon, très isolé géographiquement GES retenus par le protocole de Kyoto, l l’exemption de taxation du kérosène et réglementairement, a taxé le kérosène car 6,5 % dans 15 ans et même 8 % si les consommé dans les vols intérieurs (300 Mc son marché aérien intérieur est protégé par autres secteurs parviennent à réduire de dans l’hypothèse d’une taxation au même cet isolement. 25 % leurs émissions. taux que celui de l’aviation privée) ; Une taxation du kérosène à l’échelle intra- Les Etats membres de l’OACI ont l et l’aide aux lignes sous obligation de européenne est autorisée par le droit euro- adopté, fin 2016, un programme de service public (22 Mc). péen mais devrait être décidée à l’unanimité compensation et de réduction des émis- des Etats membres. Une taxation est pos- sions de CO2, CORSIA. Mais la mise Les aides publiques au transport aérien sible aussi dans le cadre d’accords bilatéraux, en œuvre de ce programme commencera intérieur se montent donc à environ 500 Mc mais cette possibilité n’a pas été exploitée. par une période de participation volon- par an (18,5 c/pax). L’Union européenne a cependant mis taire des Etats... et seule une moitié des en place un système d’échanges de quotas Etats s’est portée volontaire. L’objectif Taxer le kérosène ? d’émissions de gaz à effet de serre (SE- est de stabiliser les émissions de CO2 à QE-UE) qui, depuis 2012, couvre l’avia- leur niveau futur de 2020. Mais si le trafic Contrairement aux carburants consom- tion commerciale. Mais ce système, peu continue à croître de 4 à 5 % par an, cet més par les transports terrestres, le kérosène efficace, ne couvre que les vols intra-euro- objectif ne sera pas atteint.

FNAUT infos n°278 - octobre 2019 x 5 Dossier

La recherche technologique visant à ré- Le TGV en France et chez nos voisins duire l’impact environnemental de l’avion doit être accélérée (motorisation hybride, en Occitanie..., extension du réseau des nouveaux carburants...) et financée par la LGV). Il ne faut pas confondre le TGV tel fiscalité sur l’avion : des progrès specta- qu’il est et le TGV tel qu’il pourrait être culaires ont été accomplis depuis 50 ans, (FNAUT Infos 199). mais la durée de vie d’un avion moderne est supérieure à 30 ans. Sans mesures Le TGV chez nos voisins fortes telles que la taxation du kérosène, l’influence du transport aérien sur le cli- Sur des distances de 600 à 800 km, la mat sera refusée par une part croissante part de marché (train + avion) du train de l’opinion. est bien plus élevée en Espagne, France et Italie, pays bien équipés en LGV (Ma- L’efficacité du TGV © MD drid-Barcelone 80 %, Paris-Marseille 70 %, Milan-Rome 67 %) qu’en Alle- Jacques Pavaux plaide alors vigoureuse- Sans négliger les transports de la magne (Hambourg-Munich 15 %) ou en ment en faveur du TGV. Il rappelle que le vie quotidienne, la FNAUT défend les Angleterre (Londres-Glasgow 12 %). TGV émet plus de 30 fois moins d’équi- projets d’achèvement du réseau des Il en est de même sur des distances de valent CO2 qu’un avion court-courrier. LGV (FNAUT Infos 277) car les dépla- 400 à 600 km : Paris-Lyon 90 %, Madrid- Et si le report de l’avion sur le TGV est cements à longue distance se déve- Séville 80 %, Paris-Bordeaux 70 %, mais supérieur à environ 700 000 voyageurs/an, loppent rapidement. Berlin-Cologne 30 %. les émissions de GES lors de la construc- Ces chiffres datent de 2013 et ont évo- tion d’une LGV sont amorties en moins Depuis 2003, une complémentarité, lué en faveur du TGV depuis cette date de 10 ans. qui confirme les conclusions de l’étude (FNAUT Infos 214). Chaque ouverture d’une LGV s’est tra- Mathieu-Pavaux de 2003, s’est installée Selon les adversaires du rail, le TGV ne duite par un fort report de trafic aérien sur entre avion et TGV : le trafic aérien se concurrence l’avion que si le trajet fer- le rail. Des liaisons aériennes ont même concentre de plus en plus sur les trajets roviaire dure moins de 3h : il s’agit d’un été contraintes à la fermeture : Orly-Lille, où le TGV est quasi-absent (transver- mythe cher à la Cour des comptes et Orly-Rennes, Orly/Roissy-Strasbourg. sales) ou sur lesquels le train est peu dénoncé par Gérard Mathieu (FNAUT In- Depuis l’ouverture récente de la performant (certaines radiales). Depuis fos 244). La nouvelle LGV Berlin-Munich LGV Tours-Bordeaux en 2017, qui a ré- 2007, le trafic aérien transversal a aug- concurrence l’avion alors même que la duit d’une heure la durée du trajet ferro- menté de 56 %, alors que le trafic aérien vitesse moyenne de l’ICE y est faible : viaire, le trafic de la navette aérienne Orly- radial a baissé de 4,8 %. Les relations 157 km/h seulement contre 231 km/h Bordeaux a diminué de 25 %, soit 450 000 aériennes radiales conservent un poids sur Paris-Marseille (FNAUT Infos 267). pax. Le trafic aérien sur l’axe Paris-Tou- prépondérant, mais la tendance s’est Depuis la baisse de tarifs de l’AVE intro- louse a diminué de 200 000 pax (sans pro- renforcée récemment : en mars 2018, duite par la RENFE en 2013 (FNAUT Infos longement de la LGV, le trafic aurait été le trafic intérieur transversal a crû de 277), l’AVE a dépassé l’avion sur l’axe Ma- de 3,4 millions de pax). 21,4 % tandis que le trafic radial a dimi- drid-Barcelone (le trafic a chuté de 54% Entre 1990 et 2002, le trafic sur les 33 nué de 4,9 % à de rares exceptions près depuis que l’AVE a connecté ces deux liaisons intérieures et intra-européennes (Paris-Nice + 3,5 %). métropoles en 2008 selon l’AENA, asso- court-courriers au départ des aéroports Notons aussi que le TGV, contraire- ciation des aéroports espagnols). parisiens et soumises progressivement à la ment à une idée répandue, concurrence L’Italie a autorisé en 2003 la concur- concurrence du TGV a été stabilisé, alors la voiture et pas seulement l’avion (voir rence en open access sur les grandes que sur 44 liaisons non concurrencées par l’évolution du trafic sur l’autoroute A6 lignes classiques et le réseau à grande le TGV, le trafic a doublé, passant de 8,9 à lors de l’ouverture de la LGV Paris-Lyon, vitesse. La compagnie NTV a été créée 17,7 millions de pax. FNAUT Infos 237). Cette contribution à la en 2012. Avec une part de marché de Selon l’étude de Gérard Mathieu et lutte contre le réchauffement climatique 25% sur les LGV et des prix de 25 à 30% Jacques Pavaux réalisée en 2003 pour la est trop souvent ignorée. inférieurs à ceux de Trenitalia, NTV s’est FNAUT, le TGV pourrait, à l’horizon Rappelons enfin que le succès du TGV rapidement installé dans le paysage 2030, capter 36 millions de pax par an, reste inférieur à ce qu’il pourrait être ferroviaire italien. Stimulé par la concur- soit la capacité d’Orly (« le TGV, c’est le si SNCF Mobilités l’exploitait comme rence directe et la baisse des péages, le troisième aéroport parisien ») si le sché- le souhaite la FNAUT : baisse et simpli- marché de la grande vitesse a, depuis ma directeur des LGV de 1992 était réa- fication des tarifs (FNAUT Infos 277), cette date, crû de 20% par an, essentiel- lisé. Une actualisation de l’étude montre commercialisation efficace, desserte de lement au détriment du transport aé- que le report modal atteint déjà 20 mil- certaines villes moyennes... et si l’Etat rien, en particulier sur l’axe Milan-Rome, lions de pax et l’économie d’émissions jouait son rôle en investissant (des- où la part de marché de l’avion est pas- de CO2 représente la consommation de serte TER des gares TGV implantées à sée de 51 % à 26 % (FNAUT Infos 263). 350 000 Français. la campagne en Picardie, en Lorraine, Jean Sivardière z Ainsi le report d’une partie du trafic aé- rien s’est fait naturellement à chaque mise en service d’une LGV. Il est donc inutile MAL DIT de réglementer l’offre en imposant la fer- meture de certaines lignes aériennes, il L’eurodéputé écologiste Yannick Jadot a qualifié le projet Lyon-Turin de faut au contraire préserver la concurrence « gigantesque gabegie de 26 milliards d’euros » (un chiffre farfelu). Il a plaidé pour intermodale pour éviter les abus de posi- « les transports du quotidien plutôt que de grands projets extrêmement coûteux, tion dominante, mais la concurrence entre servant davantage les industries du BTP que les Français ». L’eurodéputé critique modes et entre opérateurs de chaque mode aussi les projets de LGV. Il oublie que les déplacements à longue distance font de ne suffit pas : chaque mode doit payer ses plus en plus partie de la vie quotidienne et que le TGV transporte environ 140 mil- coûts environnementaux, et en particulier lions de voyageurs par an, 130 en trafic intérieur, 30 en trafic international : le TGV sa contribution climatique. est-il vraiment inutile aux Français ?

6 x FNAUT infos n°278 - octobre 2019 Dossier

Le train de nuit comme alternative à l’avion ?

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citanie, et se dit hostile à la concurrence De nombreux articles mettant en avant les atouts des trains de nuit ont été publiés entre opérateurs ferroviaires : « le train de dans FNAUT Infos (95, 96, 108, 184, 234, 266, 267, 272, 273). D’autres associations nuit est un service public qui n’a pas vo- défendent aussi les trains de nuit : nous analysons leurs propositions. cation à être rentable ; éliminer les ICN, c’est faire cadeau des infrastructures aux Oui au train de nuit (OATN) est un marché de niche, pas de masse » entreprises privées de fret ». (les ÖBB transportent 34 millions de voya- C’est oublier que les initiatives des ÖBB, Ce collectif rassemble des usagers du geurs par an dont 1,4 million par train de pourtant vantées par OATN, se développent train, des associations environnementa- nuit, ce qui évite en gros 12 000 vols). sur des bases purement commerciales. listes et des syndicats de cheminots (Sud Dans sa conception actuelle, l’ICN est OATN ne recherche pas un modèle éco- Rail, CGT, FO). Il a contribué à sensi- d’abord un service rendu aux voyageurs et nomique pérenne alors que seules certaines biliser les responsables politiques au rôle un outil d’aménagement du territoire avant lignes de nuit ont un potentiel de trafic leur possible des trains de nuit. Ses arguments d’être une alternative à l’avion (nécessaire permettant d’atteindre la rentabilité. en faveur des trains de nuit sont ceux de la en tant que complément du TGV). OATN critique à juste titre le sabotage FNAUT (https://ouiautraindenuit.wor- Mais la FNAUT estime que le train de de trains de nuit par la SNCF mais s’abs- dpress.com). De nombreux points d’ac- nuit peut être repensé, comme cela a été fait tient de toute critique sur ses coûts excessifs cord avec la FNAUT portent aussi sur la lors du passage du train Corail au TGV, et d’exploitation. politique générale des transports mais des évoluer (deux étages, grande vitesse, réuti- divergences apparaissent sur trois points lisation de jour...) pour être plus productif Objectif Train de Nuit (OTN) (http://tinyurl.com/y6pbuf77). et devenir un vrai transport de masse.

l OATN note que le train de nuit peut l Alors que le TGV est aujourd’hui revoir le jour à grande échelle, en France le principal concurrent de l’avion (voir et en Europe, comme le vélo et le tram- page 4), OATN utilise sans esprit cri- way dans les villes françaises. Mais, alors tique les écrits de la Cour des comptes et que la FNAUT s’intéresse à l’ensemble du Comité d’Orientation des Infrastruc- de l’offre ferroviaire, OATN envisage un tures pour dénoncer le TGV et les projets report du trafic aérien exclusivement sur de LGV. Certes ces projets sont plus coû- l’Intercités de nuit (ICN). Un report sur teux que la remise en service des trains l’Intercités de jour, ou le TGV de jour ou de nuit qui utilisent les voies classiques, de nuit, n’est pas envisagé. mais l’efficacité de l’ICN n’est pas celle L’association propose de créer 15 lignes du TGV pour capter du trafic aérien. nationales et 15 lignes internationales de Selon OATN, l'ICN serait idéal pour nuit et en attend un report de 15 millions des distances de 500 à 1500 km, le TGV de passagers en 2030, soit une économie de n’étant adapté qu’aux distances allant de 150 000 vols et 1,5 million de tonnes de 250 à 700 km. C’est précisément le mythe © lunatrain.eu CO2 (en admettant que le type d'appareil du seuil des trajets en moins de 3h dénoncé et la longueur du trajet ont peu d'influence par Gérard Mathieu (FNAUT Infos 244). Cette association, créée en juin 2019 sur les émissions de CO2 d’un vol court- De même, selon OATN, l’impact éco- à l’initiative de France Nature Environ- courrier, ce qui semble vraisemblable). logique du TGV est défavorable car la nement (www.lunatrain.eu), propose une L’avion a assuré, en 2018, 26,8 mil- construction des LGV entraîne des émis- offre renouvelée de trains de nuit (Lunajet) lions de trajets intérieurs, Corse comprise sions considérables de gaz à effet de serre. associant voitures à places couchées (30 %) (3,6 millions) mais hors Outremer, dont Or, compte tenu de la faible consomma- et wagons de fret (70 %), d’abord sur l’axe 26,6 sur les 149 liaisons attirant plus de tion des TGV et du fort report modal qu’il Barcelone-Francfort (un marché voyageurs 5 000 passagers par an, et le trafic entre suscite (depuis l’avion mais aussi la voi- pourtant très saisonnier). la France et les pays proches a été de 60 ture), les émissions à la construction des L’idée est séduisante mais a peu de chances millions de pax. La réduction du trafic LGV sont amorties en moins de 10 ans d’aboutir. Selon les CFF, les marchés de nuit intérieur serait donc de 28 % et celle du (FNAUT Infos 214, voir aussi page 6). et fret étant totalement indépendants voire trafic intra-européen proche de 9 %, soit OATN analyse l’échec du TGV entre la incompatibles, mener une double démarche une réduction de 17 % du trafic français France et Barcelone sans tenir compte de ses commerciale serait délicat, les besoins des total : il semble qu’OATN surestime l’im- conditions d’exploitation (FNAUT Infos clients et les contraintes de deux types de pact possible des ICN (dans un train de 251). Il veut « revenir sur terre pour estimer les trafic n’étant pas les mêmes. nuit, on ne trouve pas que des voyageurs potentiels du TGV et des trains de nuit ». De plus la mixité entraînerait des surcoûts susceptibles d’avoir pris l’avion). importants dues aux manœuvres compliquées Selon les chemins de fer autrichiens l OATN veut relancer les ICN en ser- au départ, au cours du trajet et à l’arrivée, et (ÖBB), qui développent un réseau euro- vice public, sur le modèle du Paris - Port- de l’inconfort pour les voyageurs lors de ces péen de trains de nuit, « le train de nuit Bou financé en partie par la Région Oc- manœuvres (https://tinyurl.com/yxcovkug).

FNAUT infos n°278 - octobre 2019 x 7 Dossier

Le Réseau Action Climat solutions technologiques (agrocarbu- Interdire l’avion ? rants...), l’usage abusif de l’avion. Le RAC, dont la FNAUT est membre Le réseau préconise aussi de limiter depuis plusieurs années, dénonce lui aussi l’usage abusif de l’avion, en imposant la croissance très rapide du trafic aérien, des impôts aux passagers fréquents et en son coût rendu artificiellement bas par ses interdisant la publicité pour les voyages privilèges fiscaux, la sous-estimation de aériens et la fidélisation des grands voya- l’impact environnemental de l’avion par geurs (https://zad.nadir.org/IMG/pdf/ les compagnies aériennes et le mécanisme declarationfraout2018.pdf). de compensation CORSIA (https://re- Il milite pour un report du trafic sur seauactionclimat.org/tribune-transport- le rail si le trajet par train de jour dure aerien-et-climat-il-est-temps-datterrir/). moins de 4 h : « le TGV n’est pas la seule Le RAC réclame une taxation du kéro- alternative à l’avion ; les services de jour sène, un taux de TVA à 20 % sur les vols et de nuit doivent être attractifs, abor- Pixabay intérieurs (le taux est de 10 % pour le dables financièrement et alimentés par train, le passage au taux de 20 % rappor- des énergies renouvelables ». La proposition de la députée Delphine terait quelques centaines de Mc par an à Concernant le projet d’extension du Batho (Génération écologie) consiste à in- l’Etat) et un report du trafic sur les trains terminal 1 de l’aéroport de Marseille- terdire les trajets aériens vers des destina- de jour et de nuit. Provence, Staygrounded s’appuie sur un tions accessibles en moins de 5 h de train. Le RAC a dénoncé 6 mythes sur avis de l’Autorité environnementale (AE, La proposition du député François Ruffin le transport aérien et le climat (voir 24-07-2019). (France Insoumise) consiste à interdire FNAUT Infos 266). Il signale des L’AE s’étonne que « le dossier juge iné- 72 liaisons que le train permet de faire en démarches concluantes. En Suède, le luctable l’augmentation future du trafic 2h30 de plus au maximum (http://www. nombre de passagers a diminué de près de aérien et n’envisage pas d’alternative à assemblee-nationale.fr/15/pdf/proposi- 4,4 % sur un an (et même de 5,6 % sur les ce modèle de croissance » ; elle demande tions/pion2005.pdf). Cette marge intègre vols intérieurs), depuis la mise en place au maître d’ouvrage de revoir son étude notamment l’allongement du temps de d’une taxe climat sur les billets d’avion et d’impact, « ni celui-ci ni l’Etat n’ayant transport aérien par les contrôles divers la relance des trains (de nuit notamment). démontré la compatibilité du projet avec et les accès aux aéroports. Selon une étude réalisée en 2018 pour l’engagement de la France d’atteindre la Selon le blog de Patrick Cahez (https:// la Commission européenne, une taxation neutralité carbone en 2050 ». blogs.mediapart.fr/patrick-cahez/ du kérosène à hauteur de 33 centimes Selon Eric Lombard, représentant de blog/090619/les-trajets-interieurs-en- par litre permettrait de réduire de 9% les Staygrounded, « malgré le TGV qui met avion-pouvant-etre-remplaces-par-le- émissions de GES du secteur, équivalant Paris à 3h de Marseille, l’aéroport offre train), 13,8 millions de trajets intérieurs au retrait de 850 000 véhicules sur les encore 17 allers-retours quotidiens vers (52 %) seraient transférés sur le train dans routes de France, de 7 % le nombre de la capitale ; bien d’autres destinations la proposition Batho ; 6,6 millions seule- personnes exposées à de fortes nuisances françaises et européennes sont accessibles ment (25 %) dans la proposition Ruffin. sonores, et aurait des « impacts négli- par TGV dans des temps raisonnables ou Selon Patrick Cahez, le TGV s’impose geables » en termes d’emplois. pourraient l’être si la desserte ferroviaire comme une alternative crédible à la quasi- redevenait une priorité et si de nouvelles totalité des trajets aériens passant par Pa- Staygrounded lignes de trains de nuit étaient ouvertes. ris – ce qui correspond au réseau des LGV. L’Etat français demande à Bruxelles la A l’inverse, les transversales ferroviaires « Restons sur terre » : ce réseau inter- mise en place d’une taxation européenne sont peu pratiques (Bordeaux-Lyon exige national dénonce l’impact dangereux du du kérosène mais curieusement ne prend plus de 5 h, en passant par Paris, pour une transport aérien sur le climat, la non taxa- pas son impact en compte dans les pré- distance d’à peine plus de 500 km à vol tion du kérosène, les 1 200 projets de créa- visions de trafic justifiant l’extension du d’oiseau). Plus de 2,4 millions de trajets tion de nouveaux aéroports ou d’extensions terminal 1 de Marseille ou du terminal 4 aériens ne pourraient être remplacés par d’aéroports existants, le mécanisme de de Roissy. Or la Commission européenne des trajets de moins de 7 h en train. compensation CORSIA, le greenwashing a démontré que cette taxation permet de François de Rugy a estimé bizarrement de l’industrie aéronautique, l’illusion des réduire le trafic ». que la proposition Batho interdirait tous les trajets aériens. En réalité, 108 relations principales sur 149 resteraient autorisées. L’avion est manifestement utilisé de manière excessive : 51 000 pax sur la seule liaison Lyon-Marseille en 2018 ; 2,5 millions au total entre Paris et Bor- deaux, Nantes, Rennes et Lyon alors que le trajet en TGV dure moins de 2 h. Un développement important des pré- et post-acheminements par TGV à Roissy est encore possible. Selon Jacques Pavaux, la fermeture autoritaire de lignes aériennes est une fausse bonne idée (page 6) : cette poli- tique dirigiste ne permettrait pas d’éviter les éventuels abus de position dominante de la SNCF. Et, selon Nicolas Bouzou (Le Figaro du 8-07-2019), si on interdisait les vols Marseille-Roissy, des milliers de pas- sagers iraient chercher des correspon- © stay-grounded.org dances à Francfort par des vols autorisés.

8 x FNAUT infos n°278 - octobre 2019 Actualité La disparition des trains directs

Le cas de Grenoble

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Les trains directs au départ ou à destination de Grenoble, très développés Digne a été desservie par un train direct pour quasiment disparaître depuis une quinzaine d’années, fournit une bonne Genève-Digne avec correspondance à Digne illustration de la raréfaction de l’offre ferroviaire. pour Nice via la ligne Digne-Nice de la fin des années 30 aux années 70, avec une réap- La situation aujourd’hui (train diurne via Clermont et Périgueux), parition estivale à la fin des années 1980 Nantes (trains diurnes via Bourges, train de (train Alpazur). Elle est proche de celle de la fin du 19ème nuit, puis TGV via Le Mans), Quimper et Il n’a jamais existé de liaison directe avec siècle... Seules les villes suivantes sont acces- Brest (train de nuit). Turin et Milan malgré l’utilisation possible sibles par train direct de jour : Valence, Lyon, L’Alsace (train de nuit via Dijon ou Lons) du raccordement de Montmélian, l’attracti- Annecy, Genève et Gap (par TER ou Interci- et la Lorraine (train diurne via Dijon) ont été vité du marché de Turin (desservi directe- tés) et Paris par TGV (http://trains-directs.fr/ accessibles pendant quelques années. ment par un autocariste local) et l’existence Grenoble). L’Intercités Grenoble-Paris Bercy Quant à la côte méditerranéenne, le Cata- d’une forte population grenobloise d’origine ne fonctionne que le dimanche... Les circula- lan , qui avait le label TEE (Trans Europe italienne. tions très épisodiques (sports d’hiver) ont été Express), a permis une relation directe, très fré- Le TGV a permis de relier Grenoble à laissées de côté. quentée, avec le Languedoc-Roussillon (Nîmes, l’aéroport de Roissy et Lille dans les années La politique de la SNCF ne serait accep- Montpellier, Narbonne, Perpignan, Port Bou et 1990-2000. Des TGV pour Bruxelles ont table que si les correspondances imposées Barcelone) dans les années 1960-1980. même existé au début des années 2000. étaient considérablement améliorées : le taux Les villes de Marseille, Nice et Vintimille Le raccordement de Valence-TGV (entre actuel de retard est tel qu’une correspondance ont été reliées par de nombreux trains diurnes la LGV Méditerranée et la ligne TER Gre- avec un délai inférieur à 15 mn n’est pas fiable ; et un train de nuit jusqu’à la mise en service de noble-Valence), financé par la Région AuRA si le délai est supérieur, la correspondance reste la LGV Méditerranée (le train Nice - Saint- et ouvert en 2014, n’est plus utilisé en service assez risquée ou se fait au prix d’un allonge- Gervais passait par Grenoble). régulier depuis la suppression, fin 2018, de ment sensible du temps de parcours. On ne peut plus aller directement au-delà de l’éphémère TGV Annecy-Marseille de week- Valence-Ville vers la vallée du Rhône et Avi- end, alors que la ligne du sillon alpin est élec- L’évolution récente gnon-Centre (sauf le vendredi). trifiée (FNAUT Infos 272). Sur la ligne des Alpes, il n’existe plus de Des relations ont existé vers la côte atlan- relation directe au-delà de Gap vers Embrun Des temps de parcours allongés tique : Hendaye et Irun (train estival diurne et Briançon, ou au-delà de Veynes vers Aix- via Toulouse et train de nuit), Bordeaux en-Provence et Marseille. Ces temps se sont systématiquement allongés : hausse des marges de régularité, multiplication des arrêts, suppression des trains sans arrêt, ralentissements. Deux liaisons sont particulièrement affligeantes puisqu’on est ramené aux valeurs des années 1950/1960 : Grenoble- Valence 84 km/h malgré l’électrification de la ligne (92 km/h en 1963, 105 km/h en 1988), et Grenoble- Veynes (50 km/h comme en 1950, contre 65 km/h en 2014). Même la liaison TGV Grenoble-Paris (186 km/h) a vu sa vitesse diminuer (193 km/h à l’ouverture complète de la LGV Paris-Lyon). Grenoble-Chambéry : 99 km/h soit une très forte diminution par rapport à 1988 (110 km/h) malgré l’électrification de la ligne Gières-Montmélian (le tracé n’a pas été rectifié alors qu’un gain de vitesse d’au moins 20 km/h était possible)... Grenoble-Genève : 83 km/h soit une dimi- nution par rapport à 2003 (86 km/h) malgré l’électrification de Gières-Montmélian. Grenoble-Lille : 170 km/h avec correspon- dance à Lyon - Part-Dieu, contre 179 km/h en 2003 par train direct. Grenoble-Lyon : 98 km/h soit une très forte diminution par rapport à 1988 (118 km/h). Grenoble-Marseille : 120 km/h, avec cor- respondance à Valence-TGV, contre 149 km/h en 2014. © R. Cornu-Emieux Renaud Cornu-Emieux z

FNAUT infos n°278 - octobre 2019 x 9 Dossier La gratuité des transports

Wikipedia

Le SYTRAL de Lyon a commandé au LAET (Laboratoire Aménagement Economie Transports) une étude qui confirme, après d’autres, le bien-fondé des thèses de la FNAUT.

A Lyon comme ailleurs, les nouveaux usagers seraient majoritairement d’an- ciens piétons ou cyclistes ; la gratuité au- rait un impact réduit sur l’usage de la voi- ture et freinerait les investissements, donc renforcerait à terme le trafic automobile ; © R. Cornu-Emieux les collectivités devraient augmenter for- tement leur contribution financière, au détriment d’interventions dans d’autres domaines (aide sociale...).

l La plupart des villes qui ont instauré la gratuité ont moins de 100 000 habitants, avec un réseau initial faible (moins de 30 voyages par habitant par an contre envi- ron 330 à Lyon) et un centre qui décline. Les déplacements engendrés par la gratuité sont essentiellement courts et concernent les centres-villes, plu- tôt que des trajets longs effectués en périphérie, où la gratuité n’a qu’un impact marginal comparativement au niveau de l’offre. La contribution financière des collecti- vités a déjà doublé pour maintenir l’offre à un niveau acceptable. © R. Cornu-Emieux l A Lyon, l’offre s’améliore et l’usage de la voiture est pénalisé, la fréquentation et les recettes augmentent. Le SYTRAL a retrouvé une capacité d’autofinancement et continue à investir. Avec la gratuité, ce cercle vertueux pourrait se briser. La fréquentation pourrait augmenter de 15 % et le réseau serait saturé. Le défi- cit annuel serait triplé, passant de 160 Mc à 490. Il faudrait augmenter le Versement Transport jusqu’à son taux maximal de 2 %. Mais la mesure ne rapporterait que 30 Mc. Il faudrait aussi ré-endetter le Sytral. Le risque est grand d’une remise en cause de la stratégie de développement de l’offre.

l Selon Bruno Faivre d’Arcier, « le trans- port public n’est pas un bien de consom- mation comme les autres. Si on diminue le prix par deux, on ne se déplace pas deux fois plus souvent. Les gens sont surtout sensibles à la qualité de l’offre. Si pour le même déplacement on doit choisir entre un bus qui fait le trajet en une heure, ou la voiture qui le fait en 20 minutes, on prend © R. Cornu-Emieux la voiture, même avec un réseau gratuit ».

10 x FNAUT infos n°278 - octobre 2019 Actualité Brèves Une ligne nouvelle utile : Genève-Annecy

l Pour la première fois, la SNCF et ses partenaires industriels ont testé un train l’intérêt socio-économique de la liaison piloté à distance. Ce « train-drone » a par- Lyon-Turin-Milan-Venise. couru une distance de 4 km entre Ville- Elle serait particulièrement utile, sans neuve-Saint-Georges (94) et Juvisy (91). doute davantage que le CEVA, pour L’objectif du test était de démontrer la assurer les déplacements quotidiens des faisabilité technique de la téléconduite. Le habitants d’Annecy travaillant à Genève. groupe ferroviaire souhaite faire circuler On peut même imaginer qu’elle soit des prototypes d’ici 5 ans. construite à voie unique et que la Suisse l Coussins d’air, moteurs linéaires à participe à son financement. induction, piles à hydrogène : Space- Ce projet serait plus ambitieux que le train propose d’équiper les axes Lyon - © MD shunt d’Ambilly permettant de raccour- Saint-Etienne et Orléans-Paris. La Région cir la relation entre Genève et Annecy AuRA et la métropole de Lyon se seraient L’échec récent du TGV Annecy-Mar- (FNAUT Infos 276). Mais, paradoxa- montrées intéressées par cette navette seille montre que le potentiel de voya- lement, on constate souvent que plus à grande vitesse (trajet en 15 min) bien geurs est insuffisant, malgré l’apport l’ouvrage est ambitieux, plus les finance- moins coûteuse que le rail (selon son des correspondances possibles à ments sont disponibles... promoteur) mais en concurrence avec un Chambéry et Grenoble, pour rendre Je regrette vivement que la SNCF n’ait projet Hyperloop. viable cette relation si elle n’est pas pas accompagné l’électrification de la l La Chine produira en série des TGV alimentée également par la clientèle ligne du Grésivaudan Gières-Montmé- circulant à 400 km/h d’ici fin 2019. Il suisse (Genève, Lausanne)... lian, très bien tracée, d’une augmentation s’agit du premier TGV sans conducteur C’est regrettable, car du point de vue de la vitesse maximale à 200 km/heure au monde à dépasser la vitesse maximale de l’aménagement du territoire, il est (qui augmenterait encore la pertinence de 350 km/h. plus pertinent de passer par Chambéry du passage des TGV Genève-Méditerra- l Prague-Košice est la première ligne et Grenoble que par Lyon. née par la ligne du sillon alpin). d’Europe, voire du monde, où s’exerce Une ligne nouvelle performante Ge- Si le TER marche en Alsace globale- une concurrence entre trois trains de nuit, nève-Annecy (et aussi Annecy - Aix- ment mieux qu’ailleurs, un des ingré- exploités respectivement par les privés les-Bains) rendrait à nouveau compétitif dients de cette réussite est le fait que tchèques Regiojet, Leo Express et l’exploi- l’itinéraire de l’ex Catalan-Talgo Ge- l’offre TER200 Strasbourg-Bâle est par- tant étatique Ceske Drahy. nève-Barcelone passant par Chambéry ticulièrement performante. Avec le cas l Selon la Région Nouvelle-Aquitaine, et Grenoble. de la ligne Angers-Tours et la ligne des les travaux de réouverture de la ligne in- Elle rendrait également plus utile Landes, la ligne du Grésivaudan fait par- ternationale Pau-Canfranc pourraient être techniquement et commercialement une tie des lignes qui justifieraient un relève- lancés d’ici deux ou trois ans. liaison entre Genève et l’Italie du nord ment de vitesse à 200 km/h en priorité. l En Italie, des trains de fret vont cir- passant par Chambéry : elle renforcerait Jean-Marie Tisseuil z culer sur une LGV. Ils seront gérés par l’opérateur privé Interporto Servizi Cargo et relieront Vérone et Pomezia. Ils circu- Une réponse inattendue et encourageante leront de nuit à une vitesse de 120 km/h. Ils bénéficieront du gabarit P400, adapté Le réseau transeuropéen de transport des niveaux de service ou de qualité à au transport des semi-remorques et des (RTE-T) est un programme de dévelop- satisfaire ». conteneurs high cube. Les pentes de la pement des infrastructures de l'Union Il signale en particulier les goulets LGV n’excèdent pas les 15 ‰. Européenne (UE). La réponse des auto- d’étranglement que constituent les l Fin juillet 2019, Caen a inauguré son rités françaises à la consultation récente nœuds ferroviaires de Paris, Lyon, Mar- tramway sur rail, qui remplace le désas- lancée par l’UE sur l’avenir du RTE-T seille, Toulouse et Bordeaux. Il sou- treux TVR, un tramway sur pneu adopté a surpris : contrairement aux pratiques haite une bonne desserte des aéroports en 2002 malgré les avertissements de habituelles, court-termistes et malthu- (Bâle-Mulhouse). La ligne Nantes-Bor- la FNAUT. siennes, généralement dictées par Bercy, deaux est également citée, ainsi que les cette réponse sort d’une logique pure- liaisons transfrontalières Colmar-Fri- Bêtisier ment conjoncturelle et révèle un certain bourg, Karlsruhe-Rastatt, Haguenau- effort de prospective. Saarbrücken, Metz-Trèves, Givet-Di- Certes, sans craindre le jargon, le do- nant et Nice-Turin. cument fait état des priorités figurant au Le document se préoccupe particuliè- cœur du projet de LOM : décarbona- rement des ports : les échanges maritimes tion, numérisation, multimodalité, sécu- tendant à se massifier, un report modal rité, mobilité du quotidien et, bien sûr, vers le rail ou le fluvial est souhaité. Une innovation « qui ouvre des perspectives intégration de la ligne La Rochelle - majeures » (l’inévitable train à hydro- Poitiers dans le réseau central est propo- gène est cité deux fois). Il propose « une sée. Les ports du littoral Manche (Brest, Pixabay vision moins normative au bénéfice Saint-Malo, Roscoff ou Cherbourg, d’une logique services et solutions dans Caen-Ouistreham et Dieppe) sont cités. l Selon l’historien des transports Ma- une approche écosystème plus adaptée Curieusement, alors que le canal thieu Flonneau, la culture automobile, loin aux besoins de nouvelles mobilités ou de Seine-Nord est lancé, le document sou- de se résumer à l’individualisme, est un mobilité propre ». ligne que « les critères actuels de défi- facteur d’inclusion sociale et de cohésion Mais le document insiste clairement nition du réseau fluvial posent des dif- territoriale : « L’automobile reste un lieu sur les exigences « qui devraient moins ficultés dans la mesure où les données de mémoire heureux dans l’imaginaire porter sur des critères de définition tech- nécessaires ne sont pas forcément dispo- des Français ». nique des infrastructures et davantage sur nibles ni valides ».

FNAUT infos n°278 - octobre 2019 x 11 Actualité

Forum Trains régionaux en Suisse © FM Plus la distance à parcourir est courte, Le transport ferroviaire vingt minutes de retard ; le 2ème TER ne plus la fréquence doit être élevée pour des matières dangereuses (MD) l'ayant pas attendu, j'ai dû patienter près que l’offre soit attractive et réponde de 2 heures à Bellegarde en attendant le aux besoins quotidiens ; elle doit être Le chlore produit à Pont-de-Claix, au TER suivant pour Evian. maintenue pendant les week-ends et sud de Grenoble, pour les usines suisses Le contrôleur du premier TER, qui était les vacances. du Valais est d’abord envoyé à Sibelin bien sûr invisible, n'a fait que le « mini- Un autre paramètre est le niveau des puis repart vers le nord et traverse la gare mum syndical » en termes d'annonces, en redevances d’infrastructure. Celles-ci de Lyon-Part-Dieu : il en sera ainsi tant nous priant de ne pas descendre lors des doivent rester modérées (elles pèsent que le contournement ferroviaire est de arrêts en pleine voie. Il n'a pas annoncé les pour un tiers des coûts d’exploitation en Lyon (CFAL) ne sera pas construit. Ar- gares successives, ni le retard probable, et France, soit le double du niveau suisse rivés en Suisse, les trains de chlore tra- ne s’est pas préoccupé des voyageurs ayant qui correspond au coût marginal). Sinon versent les gares de Genève et Lausanne. des correspondances. elles conduisent à limiter la fréquence Par mesure de sécurité, le rebroussement Je comprends mieux, après cette expé- des trains, ce qui implique ensuite une à Genève-La Praille pour un changement rience, le mécontentement des autorités offre peu attractive pour la clientèle et de locomotive a été supprimé et la vitesse régionales à l'égard de la SNCF, ainsi que le une productivité insuffisante (mauvaise a été limitée à 40 km/h. désir d'un nombre croissant d'usagers que utilisation du matériel roulant et du per- Le transport des MD par le train est celle-ci soit mise en concurrence. sonnel). Dans ce cercle vicieux, tout le beaucoup plus sécuritaire que par la route, La SNCF s'est-elle rendu compte qu'il monde est alors perdant : les entreprises mais l'accumulation de nombreux wagons existe un itinéraire cyclable entre Genève ferroviaires, le gestionnaire d’infrastruc- dans les triages présente des risques qui et la Méditerranée (Via Rhôna) qui génère ture, les autorités organisatrices et la sont traités par des règles d’urbanisme et générera des besoins supplémentaires de clientèle. contraignantes pour les riverains. transport de voyageurs avec des vélos ? Enfin la performance économique de François Lemaire, ADTC-Grenoble z Michel Bénard, Paris z l’exploitant est déterminante. Pour le canton du Jura (838 km2, 73 000 habi- Régression du TGV Gratuité des transports tants, 87 hab/km2, un territoire mixte plaine-montagne), le coût kilométrique Le TGV l’a emporté face aux innovations Dunkerque a décidé à la fois la gratuité complet des offres que nous comman- irréfléchies : Aérotrain, Maglev... En desser- des bus et une amélioration sensible de dons aux CFF sur notre territoire est de vant les gares existantes, il peut faire bénéfi- l'offre. On ne peut donc pas, comme le 16,9 FS (15,2 c), et de 13 FS (12 c) pour cier l’ensemble des territoires, sans rupture fait le maire, attribuer le transfert mo- la Compagnie des chemins de fer du Jura de charge, des gains de temps apportés par dal observé à la seule gratuité. Et ce qui (CJ). Les recettes représentent entre 29% la grande vitesse, même pratiquée sur une compte, ce n'est pas le pourcentage des et 37% des coûts. partie seulement de trajets. Mais la SNCF, nouveaux usagers auparavant automobi- Le coût complet comprend la produc- en se concentrant sur les seuls TGV inter- listes, mais leur nombre. tion de l’offre, l’amortissement du maté- métropoles (elle supprime les TGV Stras- On peut très bien créer un électrochoc et riel roulant (les collectivités suisses ne bourg-Marseille par Lons et ne veut plus obtenir un transfert modal important sans sont pas propriétaires du matériel rou- desservir Paris-Lausanne par le Jura), tourne la gratuité, on l'a vu dans les villes qui ont lant qui doit être acheté par les entre- aujourd’hui le dos à ce progrès qui n’est plus adopté le tramway. A Lyon, les transports prises ferroviaires) et les redevances d’in- partagé par tous. Et elle est la seule compa- publics sont très chers pour l’usager, mais frastructure. En Suisse, ces redevances gnie européenne à ignorer l’importance cru- l'offre est excellente et c'est la ville de pro- sont indexées à la fois sur le nombre de ciale de l’offre en fréquence. vince où le nombre de voyages par habitant trains et leurs poids, et sur un pourcen- François Mennerat, est le plus élevé. C'est l'une des rares villes, tage des recettes. Cela incite à offrir des FNAUT Bourgogne Franche-Comté z avec Strasbourg et Grenoble, où la part fréquences élevées (30 min) et une très modale de la voiture est inférieure à 50 %. large amplitude horaire. Un voyage inoubliable Jean Sivardière z David Asseo, délégué aux transports, République et Canton du Jura z Désireux de me rendre de Lyon Part- La fréquentation des transports publics Dieu à Evian, j'ai eu la mauvaise idée de augmente régulièrement (Strasbourg + FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information vouloir emprunter le TER 96512 jusqu'à 4,2 % soit 255 voyages par an et par ha- Directeur de publication : Jean Sivardière Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT Bellegarde en espérant prendre ensuite bitant, Marseille + 3%) du fait du prix CPPAP 0920 G 88319 - Dépôt légal n°277 - ISSN : 0983-172 X à Bellegarde le TER 884525, le délai élevé des carburants routiers. La mobilité, Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative de correspondance étant assez large en urbaine et interurbaine, se développe indé- Avenue de la Plage - 86240 Ligugé Abonnement papier 1 an (10 numéros) : Individuels : 19 b théorie (11 min). pendamment de la tarification. Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b Le premier TER était très vétuste, peu La FNAUT n’est pas hostile à la gratuité Prix au numéro : 2 b - Diffusion numérique libre ou pas climatisé et, le nombre de voi- du transport collectif urbain, elle est même Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT tures étant fort insuffisant, j'ai dû voyager favorable à la gratuité pour ceux qui en ont de votre région, contacter notre permanence : 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris debout sur tout le parcours. De plus, le besoin. Mais elle privilégie la qualité de tél. : 01 43 35 02 83 fax : 01 43 35 14 06­ train s'est arrêté à deux reprises en pleine l’offre pour accroître le report modal. e-mail : [email protected] voie, de sorte qu'il est arrivé à Evian avec Bruno Gazeau, président, FNAUT z Internet : https://www.fnaut.fr

12 x FNAUT infos n°278 - octobre 2019 infos 279 nov.-déc. 2019 édition nationale Bulletin de la Fédé­ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports

Ouverture du TER à la concurrence L’ouverture à la concurrence se dessine Que peuvent attendre les usagers ? Déjà décidée et mise en œuvre pour les liaisons internationales et le fret, l’ouverture à la concurrence prend forme pour les liaisons natio- nales et régionales. La FNAUT est favorable à la concur- rence entre opérateurs sur les liai- sons libre accès (open access) obéis- sant à la loi du marché. Elle en attend plus de circulations et de fréquences y compris sur les lignes que le malthusianisme de la SNCF a réduit ou supprimé. Sur les liaisons régionales ou natio- nales subventionnées, la FNAUT s’est © MD déclarée favorable à une concur- rence régulée des opérateurs et à une complémentarité organisée des modes. La question est d’actualité puisque, avant la fin de cette année 2019, les Elle en attend une meilleure qua- Régions françaises auront le choix, pour ce qui concerne l’exploitation des lité de service, une meilleure infor- TER, soit de continuer à contracter avec la SNCF, soit de lancer des appels mation voyageurs, l’émergence de d’offres auprès d’autres opérateurs. nouveaux services en gare et à bord. Dans cette dernière hypothèse, les voyageurs peuvent-ils espérer des Elle attend parallèlement de l’au- réouvertures de lignes et une qualité de service améliorée (réduction du torité organisatrice une organisa- nombre des annulations de trains et des retards) ? tion de la complémentarité entre les modes, une organisation des corres- Sommaire pondances, l’élaboration d’un sys- Dossier - Ouverture du TER à la concurrence 2-3 tème d’information multimodal de Une étude suisse sur la ligne des horlogers 4 même qu’un système billettique et Actualité - Bollwiler-Guebwiller : une réouverture qui prend du retard 5 une tarification adaptée. Train des primeurs : un avenir compromis 6 Ainsi la concurrence pourra-t-telle Sécurité routière et passages à niveau 7 être mise au service de l’usager dès Europe - Extension du rôle de l’ERA 7 lors qu’elle s’intègre à la politique La Deutsche Bahn s’engage pour le climat 8 régionale de la mobilité clairement En région - Débat sur le nœud ferroviaire lyonnais 9 orientée vers la prise en compte et la Service annuel 2020 10 satisfaction des usagers. Forum - Le livre noir de la SNCF 11-12 Bruno Gazeau, président de la FNAUT z

FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 x 1 Dossier

Ouverture des TER à la concurrence

Que peuvent attendre les usagers ?

© MD

Sur la base de l’exemple allemand, les Régions françaises peuvent Quant à la productivité, le chan- attendre de la concurrence entre exploitants une baisse de leur charge gement est possible mais peut-on y financière : avec le même budget, elles pourraient financer une hausse arriver sans recourir à l’ouverture du de 50 % de l’offre TER si la productivité augmentait. Quant aux usagers, TER à la concurrence ? La comparai- outre une forte hausse de l’offre (réouverture de lignes, renforcement des son avec l’Allemagne, où l’ouverture fréquences), ils peuvent espérer une amélioration sensible de la qualité du transport régional à la concurrence de service. est en vigueur depuis 1995, est, à ce sujet, très éclairante. La situation en France tuent 2 400 km par an en transport public alors que les Français n’en L’exemple allemand Faut-il rappeler la situation française font que 1 400, ou encore que la actuelle ? part de marché du transport public La productivité des opérateurs La tendance est toujours à la fer- dépasse 22 % en Suisse alors qu’en (tableau 1) est à peu près deux meture de lignes : en 2018, ce fut le France elle n’est que de 16 % (toutes fois plus forte en Allemagne qu’en tour de Limoux-Quillan, Abbeville- distances confondues). France tant pour le matériel roulant Le Tréport, Kalhausen-Sarre Union Quelles sont les raisons de ce succès ? que pour le personnel. et Morlaix-Roscoff. Il tient à la conjonction de plusieurs Quant aux cadres, ils pourraient L’offre reste squelettique et la qua- facteurs, et notamment : être beaucoup moins nombreux mais lité de service ne s’améliore pas : - une densité démographique élevée en France, en situation de monopole 2,1 % des trains ont été supprimés (200 habitants par km² contre 118 en ferroviaire, on ne s’en rend pas forcé- en 2018 contre 1,9 % en 2017 ; 9,6 % France) ; ment compte. des trains ont été en retard en 2018 - une participation active des ci- Ceci n’est pas sans conséquences contre 9,1 % en 2017. Rappelons toyens à la définition de la politique tant sur les charges variables que sur que si un train est supprimé la veille des transports, souvent décidée au les charges fixes (tableau 2) : avant avant 16 heures, il n’est pas considéré niveau des cantons ; prise en compte des péages pour comme annulé... - un soutien du Parlement (en 2013, l’utilisation de l’infrastructure, les celui-ci a doublé les moyens dédiés charges par train x km sont de 18,4 c Le succès suisse aux infrastructures ferroviaires, qui en France et de 9,1 c en Allemagne. ont atteint 5,8 milliards d’euros) ; Une variation du simple au double ! Ceci dit l’ouverture n’est pas un but - un travail entre le transporteur et Les péages sont un peu supérieurs en soi ! Les Suisses bénéficient d’un les autorités organisatrices mené en en Allemagne et les recettes sont sen- réseau de transport public qui fait ré- toute transparence ; siblement les mêmes. férence alors que les mises en concur- - une productivité qui augmente Ainsi la contribution des autorités rence ne sont pas pratiquées. (entre 1990 et 2013, le nombre de organisatrices (tableau 3) est de 17 c C’est la loi qui prévoit que tout lieu voyageurs.km par agent a été multi- en France et de 9 c en Allemagne, avec au moins 100 habitants perma- plié par 2,55). soit un écart de 8 c qui pourrait être nents doit être desservi par transport La situation suisse est-elle transpo- utilisé par les Régions pour comman- public. A partir de 500 voyages par sable en France ? On ne peut chan- der plus de trains x km. jour, la cadence horaire est la norme. ger rapidement ni la géographie, ni le Si on compare ce qui s’est passé en Il en résulte que les Suisses effec- système politique. France depuis que les Régions ont la

2 x FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 Dossier compétence en transport régional et Des progrès indéniables Ainsi un opérateur historique est ce qui s’est passé en Allemagne de- pour les voyageurs capable d’offrir une bonne qualité de puis l’ouverture à la concurrence, on service s’il est stimulé par la concur- est amené à pointer l’explosion de la Qu’est-ce que les usagers ont obtenu rence, et donc rien n’est perdu pour contribution des Régions en France : après l’ouverture à la concurrence ? Des la SNCF lorsqu’elle sera soumise à la + 4,3% par an alors qu’en Allemagne, réouvertures de lignes tout d’abord ! En concurrence. les autorités organisatrices (les Län- Allemagne ce sont 500 km de lignes der) ont pu rester à l’abri de cette régionales et 300 gares qui ont été rou- Une conclusion évidente : dérive. vertes. Le cas du Schönbuchbahn, ligne la concurrence est nécessaire La faible productivité du trans- située dans la région de Stuttgart, est porteur historique français (deux parlant : en 1996, à la veille de la mise En conclusion, la situation actuelle fois moins de trains x km par agent en service, le car transportait 2 000 en France ne peut durer ni pour les qu’en Allemagne ou qu’en Suisse) voyageurs par jour : en 2017 la fréquen- voyageurs (lignes fermées, trains sup- a des conséquences sur ses charges, tation était passée, après réouverture de primés ou en retard, offre squelet- sur les finances de la Région qui la voie ferrée, à 10 000 voyageurs par tique), ni pour les Régions (dont la subventionne le transporteur, et jour. En 2021, la ligne sera électrifiée contribution financière explose). donc finalement sur le volume et la cadence passera au quart d’heure. L’exemple de la Suisse montre d’offre ferroviaire car la Région Et la qualité de service ? L’enquête de qu’une bonne qualité de service ne peut difficilement ne pas raisonner satisfaction menée par la Communauté passe pas forcément par l’ouverture à budget constant. de transport Rhin-Ruhr qui porte sur à la concurrence. Mais les conditions Pratiquement déjà, aujourd’hui, la ponctualité, la propreté, le personnel, qui prévalent dans ce pays ne se re- lorsque la SNCF présente une facture les annonces en cas de situation pertur- trouvent pas en France. en hausse, la Région lui demande de bée…montre que : Le cas de la France ressemble plus à revoir sa copie. Et alors, la SNCF ne • les lignes exploitées par les nou- celui de l’Allemagne d’avant l’ouver- réduit pas ses prix unitaires mais le veaux entrants et, d’autre part, les ture à la concurrence. volume d’offre. Elle propose moins lignes exploitées par la Deutsche Bahn Avec cette ouverture, le pouvoir des de trains x km avec, pour partie, des et obtenues à la suite d’un appel d’offres autorités organisatrices allemandes transferts sur autocars. reçoivent une note meilleure que la s’est accru par rapport à la situation Avec le même budget, les Régions moyenne ; de monopole, ce qui a permis d’évi- françaises pourraient financer 50% • les lignes exploitées par la DB et ter l’augmentation des contributions d’offre ferroviaire en plus si la pro- obtenues par attribution directe comme financières versées aux transporteurs, ductivité augmentait, c’est-à-dire si dans le passé reçoivent une note moins de rouvrir des lignes et d’améliorer la les coûts unitaires étaient réduits. bonne que la moyenne. qualité de service. Jean-Marie Beauvais, France Allemagne Année 2015 économiste des transports z TER Concurrence * Matériel roulant : 90 000 km 175 000 km Sources : Parcours annuels Bilan 2018 de la qualité de service Agents de conduite : des transports de voyageurs en France, 400 heures 1 000 heures Conduite annuelle AQST (Ministère de la transition écolo- Taux d'encadrement : gique et solidaire), 2019 1 pour 5 1 pour 18 Cadres / agents roulants Le marché français du transport * uniquements contrats attribués après mise en concurrence ferroviaire de voyageurs en 2017, ARAFER, 2018 Année 2015 France Allemagne Transports publics suisses : un exemple € par train x km TER Régional à suivre ? Christoph Schaaffkamp, Charges hors péages 18,41 9,08 Andreas Wettig et Christian Desmaris, Ville, Rail et Transports, février 2016 Péages 4,50 6,06 Expertises du cabinet Trans-Mis- Charges péages compris 22,91 15,14 sions, Tours et Berlin Recettes 5,96 6,05 Pour le Schönebuchbahn : les pe- Contributions des AO 16,95 9,09 tites lignes ferroviaires en Allemagne, Michel Quidort, Transports Urbains Contributions des AO France Allemagne (GETUM), septembre 2018 € par train x km TER Régional Pour l’enquête de satisfaction de 1995 8,98 la Communauté de transport Rhin- 2002 10,20 Ruhr : Qualitätsbericht SPNV 2015, 2015 16,95 9,09 page 26, Verkehrsverbund Rhein-Ruhr, Rythme annuel 4,3 % 0,1 % février 2016. © Trans-Missions FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 x 3 Dossier

Une étude suisse sur la ligne des horlogers

© MD

L’étude de Marcus Rieder, réalisée en 2016 à l’initiative de la municipalité de la Chaux-de-Fonds, a porté sur la section terminale Morteau - Le Locle de Petites lignes la ligne Besançon - Le Locle, dite ligne des Horlogers. L’exploitation des petites lignes a été souvent discutée dans Les données actuelles sont les sui- développée une industrie mécanique FNAUT Infos (257, 264, 270, 271). vantes : 13 000 véhicules/jour sur la de précision. Le problème de fond est le niveau route parallèle qui emprunte le col La section de ligne Morteau - Le excessif des coûts d’exploitation des Roches, 3 allers-retours/jour sur Locle serait cédée par SNCF Réseau de la SNCF, qui amène à limiter la ligne côté français, 1/heure côté à la Région dans le cadre d’un Grou- l’offre. suisse, soit 18/jour, entre Le Locle et pement Européen de Coopération Le km.train étant 7 à 8 fois plus la Chaux-de-Fonds. La part modale Transfrontalière (ce qu’autorise la ré- cher que le km.autocar, les Régions du train est d’environ 3 %. glementation française dans le cas des sont tentées par les transferts sur Les autorails français, non équi- lignes transfrontalières), son exploi- route. Or remplacer les trains en pés de la signalisation ERTMS, ne tation et sa maintenance serait alors heures creuses par des autocars pouvant accéder au Locle à partir de confiée par le canton de Neuchâtel n’abaisse que marginalement les 2021, l’étude propose une solution à l’opérateur régional neuchâtelois, coûts de production puisqu’ils simple : prolonger la circulation des beaucoup moins coûteux que la SNCF. restent déterminés par les besoins trains suisses jusqu’à Morteau, ce qui La circulation des trains français serait en heures de pointe, comme l’a permettrait au train de capter une part limitée au trajet Besançon-Morteau, montré le CEREMA. De plus, SNCF significative de la clientèle domicile- avec correspondance quai à quai vers Mobilités facture chaque circu- travail transfrontalière vers la Chaux- Le Locle. La section transfrontalière lation au coût complet et non au de-Fonds (40 000 habitants), où s’est serait électrifiée. coût marginal.

Le train est-il cher en Suisse ?

On entend souvent dire que le train Mais il faut tenir compte de la dif- est cher en Suisse. Est-ce exact ? férence de revenu : le revenu moyen Les recettes hors taxes payées par les par habitant est de 20 605 c en France voyageurs sont de 1,094 Mdc en France et et 47 006 FS soit 40 191 c en Suisse 3,316 MdFS en Suisse. Le taux de TVA (+ 95 %). Un Français consacrant inté- est de 10 % en France, 7,7 % en Suisse. Par gralement son revenu annuel à utiliser suite, la participation des voyageurs taxes le réseau ferroviaire peut donc parcourir comprises est de 1,203 Mdc en France et 234 147 km, un Suisse peut parcourir 3,571 MdFS en Suisse (chiffres 2017). 249 633 km (+ 7 %). Le trafic étant de 13,693 Md voya- Les transports ferroviaires en Suisse geurs.km en France et 18,975 en Suisse, sont de bien meilleure qualité qu’en le prix moyen du billet par voyageur.km France et pourtant les tarifs sont un peu est donc de 0,088 c en France et 0,188 FS moins élevés. © MD soit 0,161 c en Suisse (+ 83 %). Jean-Marie Beauvais z

4 x FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 Actualité Lyon-Turin : le débat est clos

La formation d’un nouveau gou- vernement italien associant le mou- Bollwiller - Guebwiller vement « anti-système » M5* et le parti démocrate (PD) ne devrait pas avoir d’influence significative sur la Une réouverture qui prend du retard réalisation du Lyon-Turin.

L’ancien - et nouveau - Premier mi- nistre Giuseppe Conti avait déclaré fin juillet : « le Lyon-Turin est une ques- Gare de Guebwiller © Wikipedia tion d’intérêt national ». Quant au PD, il considère que le dossier n’est pas La vallée du Florival compte 35 000 ha- refusé, estimant que sa participation négociable. La maire 5* de Turin Chiara bitants, 3 collèges et 3 lycées importants. n’était pas de son ressort. Appenedino a même déclaré : « le dé- Son chef-lieu Guebwiller (11 000 habi- La dernière étude géotechnique, déci- bat sur le Lyon-Turin est clos ». Un nou- tants) subit un effritement continu de son dée en décembre 2018 pour estimer le veau sondage a confirmé que 7 italiens économie et affichait un taux de chômage coût de l’ouvrage et la dépollution du sol sur 10 sont favorables au projet. de 18,2% en 2016. L’association Flori- au passage de la RD 83, n’a pas été rendu Le percement des 9 premiers kilo- Rail réclame depuis 1991 la réouverture publique le 26 juin dernier comme prévu. mètres du tunnel interfrontalier s’est de la ligne Bollwiller (localité située au Raison invoquée : le départ du techni- achevé le 23 septembre. Il devrait nord de Mulhouse sur l’axe Nord-Sud de cien en charge du suivi du projet à la Ré- être terminé en 2030. Mais le tunnel l’Alsace)-Soultz-Guebwiller. gion Grand Est. L’association FloriRail du Brenner, engagé plus tardivement, Le tronçon à rouvrir dans un premier est en colère car les études de faisabilité sera terminé avant... temps compte 7 km pour une totalité à successives prennent systématiquement Selon un sondage BVA-DOXA, 93 % terme de 9 km. La moitié du parcours du retard. La Région oserait-elle infliger des Français sont favorables à la liai- est très urbanisée dans les traversées de autant de retard aux autres projets plus son voyageurs - fret Lyon-Turin ; 82 % Soultz et de Guebwiller et comporte 6 récents en cours ? Pas de réponse. Nous pensent qu’elle permettra de lutter passages à niveau. La possibilité d’utili- déplorons, par ailleurs, l’incohérence contre le réchauffement climatique ser les rames de tram-train, non soumis à entre les déclarations de l’ensemble de la et 87 % qu’elle favorisera l’unité euro- la « circulaire Bussereau » et disponibles classe politique qui soutient le projet et péenne. Selon Jacques Gounon, pré- à Mulhouse, a relancé le projet en 2012. l’avancement réel de celui-ci. sident de la Transalpine, « face à l’urgence Jugé pertinent par l’ancienne Ré- Ces retards sont-ils imputables à la climatique, le train est le mode de trans- gion Alsace et par les collectivités situation géographique de la vallée ? A port le plus efficace pour le transport locales, le projet de réouverture a été son manque d’intérêt électoral pour les de voyageurs et de marchandises. C’est inscrit au Contrat de Plan Etat-Ré- pouvoirs politiques régionaux et départe- encore plus vrai pour le Lyon-Turin qui gion 2015-2020 à hauteur de 20 Mc. mentaux ? Florirail dénonce ces lenteurs est un maillon manquant au carrefour Les 10 Mc manquants étaient pré- inacceptables et réclame la poursuite im- d’axes européens stratégiques ». vus dans le prochain CPER, le reli- médiate du processus de réouverture. quat (1 à 3 Mc) était demandé à la Mathieu Tacquard, Un élément déterminant de l’ascen- communauté de communes qui avait président de Florirail z sion de Matteo Salvini en Italie doit être noté : la phobie de son ex-allié, le mouve- La ligne Paris-Clermont ment 5*, pour les grands travaux. Déjà 5* s’était opposé à une reconstruction du Cette ligne connaît des dysfonctionnements réguliers (retards, suppressions pont Morandi (alors qu’il fallait dénon- de trains, ralentissements, inconfort sur certaines sections entre Nevers et Pa- cer le trafic pléthorique de poids lourds, ris malgré la rénovation du matériel roulant). Récemment, 300 voyageurs ont principal responsable de la catastrophe dû passer une nuit entière dans un train Intercités. - FNAUT Infos 267). Ce pont s’est finale- Pour l’Association des Usagers des Transports d’Auvergne (AUTA), les ré- ment effondré à Gênes le 14 août 2018. ponses apportées sont loin d’être satisfaisantes : l’État va injecter 800 Mc sur Puis, malgré la désapprobation de la ligne (infrastructure et matériel neuf) mais la construction des nouvelles plus de 80 % des électeurs du Piémont, rames n’a pas commencé et leur livraison a été repoussée à 2025. il s’est opposé, avec l’appui des écolo- La possibilité de circuler à 200 km/h sur certaines sections entre Nevers et gistes français, au projet Lyon-Turin alors Saint-Germain-des-Fossés n'a pas été exploitée pour diminuer de quelques que cette liaison pourra absorber la moi- min le temps de parcours (3 h) : sur les sections aptes à 200 km/h, cette vitesse tié du trafic routier de fret franco-italien n'est atteinte qu'en cas de retard pris ailleurs. et rééquilibrera l’économie européenne Le gouvernement avait pourtant promis de donner priorité aux trains du au bénéfice de l’arc méditerranéen . quotidien et d’aménagement du territoire, TER et Intercités. Jean Sivardière z Jean-Louis Thévenon, président, AUTA z

FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 x 5 Actualité Train des primeurs Bref historique Un avenir compromis - La présidente PS du Conseil régio- nal d’Occitanie, Carole Delga, a exigé L’affaire du train transportant chaque nuit 1200 tonnes de fruits et lé- que la SNCF « arrête de faire semblant » gumes de Perpignan (pour la plupart en provenance d’Espagne et du Maroc) et relance sérieusement le train des au marché d’intérêt national de Rungis, en région parisienne, est un exemple primeurs. « Alors que d’un côté le gou- très révélateur de la gestion chaotique du rail par la SNCF et par l’Etat, sans la vernement a annoncé une reprise de la moindre vision stratégique à long terme. liaison en novembre, de l’autre la SNCF, dont l’État est l’unique actionnaire, Vers 1975, Perpignan expédiait 93 % de ni la SNCF ne recherchent une solution n’apporte aucune réponse fiable aux ses fruits et 70 % de ses légumes par trains pérenne. Seule une solution transitoire transporteurs malgré une expression complets. Aujourd’hui, 138 000 tonnes semble envisagée. claire des besoins de la part des acteurs par an seulement le sont par rail sur un Une reprise rapide du train conven- de la filière fruits et légumes ». total de 1,76 million de tonnes. tionnel pour une saison jusqu’en juillet Le vice-président PC de la Région Incapable d’anticipation, la branche Fret 2020, comme l’Etat s’y est engagé, est délégué aux transports, Jean-Luc Gibe- de la SNCF s’est aperçue subitement que donc improbable. lin, évoque de son côté « l’incurie de la les wagons frigorifiques, âgés d’une qua- Comme la CGT et le Parti Commu- SNCF dans ce dossier ». rantaine d’années, tagués et rouillés, de ce niste, la présidente de la Région Occita- - Le recul de la SNCF sur le transport « train des primeurs » (le seul train de fret nie dénonce « un non-sens économique de fruits et légumes (il y a 30 ans, il exis- français à transporter des produits péris- et écologique », celle de la Région Ile- tait 4 trains de primeurs entre Perpignn sables) étaient dans un état déplorable exi- de-France « une décision absurde et un et Rungis) est d’autant plus regrettable geant leur remplacement, et qu’elle n’avait contresens écologique ». qu’elle a joué un rôle de pionnier. pas les moyens financiers nécessaires (20 Deux options sont actuellement envisa- La SNCF a introduit ses premiers wa- à 30 Mc) pour en acheter d’autres et ren- gées. La première : un train de transport gons frigorifiques en 1909. Dès 1960, elle tabiliser cet investissement. En 2018, la combiné. Des caisses mobiles acheminées a introduit un train rapide, le « Provence SNCF avait pourtant exigé une augmen- par camion seraient chargées sur un train Express », qui reliait Orange et Paris-Ber- tation tarifaire de 30 %. reliant Perpignan à Valenton, plate-forme cy. Puis, en 1988, pour résister à la concur- Suite à une intervention de la ministre située à 12 km à l’est de Rungis. rence des camions, elle a lancé le service des transports, devenue ministre de la Mais ce train, qui n’est rentable que s’il ChronoFroid entre Avignon et Valenton, transition écologique et solidaire alors que est long (750 m avec 40 caisses mobiles), étendu ensuite à Toulouse, Perpignan, le train effectuait son dernier voyage, il a roulerait moins vite que l’ancien train des Lyon, Lille et Nancy. Ce train prioritaire été décidé que la circulation du train serait primeurs (350 m et 24 wagons), qui rou- roulait à 140 km/h et transportait aussi prolongée… jusqu’à l’hiver. lait à 140 km/h. Il n’arriverait à Valenton des yaourts, de la viande et du surgelé. Un arrêt brutal du service aurait évi- qu’à 3 h 30, avant un transbordement sup- - 90 % environ des marchandises demment fait mauvais effet alors que les plémentaire par camion, c’est-à-dire bien sont transportées, en France, par la économies d’énergie fossile, la pollution de trop tard pour les grossistes franciliens. route. Selon la CGT Cheminots, c’est l’air, la sécurité routière et la lutte contre le Jusqu’à présent, le train des primeurs l’arrivée de la concurrence en 2006 qui réchauffement climatique sont des thèmes partait chaque jour à 16 h 45 de Perpi- est responsable de ce déséquilibre. En de discours officiels quotidiens. gnan, pour arriver via Bordeaux à Rungis réalité, la perte de parts de marché face Un comité de pilotage est mis en place à 2 h 45, ce qui permettait de le décharger aux camions est bien antérieure, alors mais… on s’aperçoit alors que le train avant l’ouverture du pavillon des fruits et que les volumes à transporter ont sans roule à vide car les chargeurs, découragés légumes de Rungis, à 3 h 30. cesse augmenté. par la médiocrité du service et les grèves, La seconde option serait un train mixte - La SNCF a envoyé aux parlemen- ont évidemment réagi et transféré très composé des wagons conventionnels sta- taires - en plein débat sur l’arrêt du Per- rapidement leur trafic sur la route, soit une tionnés à Nîmes et de caisses mobiles pignan-Rungis - un Livre blanc cosigné flotte de 75 semi-remorques supplémen- classiques gérées par un opérateur privé, la par Rail Freight Forward, une coalition taires effectuant chacun environ 2 000 ki- traction étant assurée par la SNCF. d’exploitants ferroviaires européens, lomètres par jour (plus de 25 000 trajets Autre difficulté : trouver des clients au proposant de porter d’ici à 2030 la part par an), qui émettent 9 fois plus de CO2 retour, de Rungis à Perpignan. Le train modale du fret ferroviaire en Europe de et consomment 6 fois plus d’énergie que le des primeurs a autrefois transporté des 18 à 30 %, soit un doublement dans le train malgré la pénurie de chauffeurs et la marchandises à contresens : des jour- cas français alors que sa part a été divi- hausse des péages autoroutiers. Du coup, naux vers Toulouse, puis des articles sée par deux depuis 25 ans... la circulation du train des primeurs est pour la grande distribution, grâce à un - Malgré une dernière recapitalisation interrompue jusqu’au 1er novembre, et ses contrat avec Geodis. Mais Geodis a de 1,4 Mdc par l’Etat en 2005, et des sup- 82 wagons stationnent en gare de Nîmes finalement préféré la route, et le train pressions massives d’effectifs, de gares de depuis juillet. rentrait chaque jour à vide… triage et de wagons, la branche fret de la Son avenir reste incertain malgré 7 réu- D’après divers articles du Monde, SNCF est toujours endettée de plus de nions du comité de pilotage car ni l’Etat des Echos, du Parisien et de Sud-Ouest z 5 Mdc et devrait être filialisée en 2020.

6 x FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 Actualité Sécurité routière et passages à niveau

© Wikipedia Le rapport Claude Jullien, secrétaire de la FNAUT-PACA, s’est intéressé depuis long- de Laurence Gayte temps aux accidents, dus pour la plupart (98 %) à un non-respect du Code de la route par les usagers de la route, qui surviennent aux passages à niveau. Le 12 avril, la députée LREM des Pyré- Sachant qu’on ne peut supprimer les La solution proposée est facile à nées-Orientales Laurence Gayte a remis 15 405 PN, nous présentons ici une de mettre en œuvre et peu coûteuse. Elle au gouvernement son rapport sur la ses suggestions susceptibles d’éviter un consiste simplement à éloigner de sécurité aux PN. grand nombre des accidents dont les quelques mètres les barrières de la voie L’origine routière des accidents de automobilistes et leurs passagers sont ferrée afin d’allonger la distance de frei- PN est très clairement soulignée : inat- victimes. Cette suggestion, applicable nage avant que la voiture pénètre sur la tention par habitude, vitesse excessive, à tous les passages à niveau, concerne voie ferrée. mauvaise visibilité de la voie ferrée, les voitures : le cas des camions et des Une mesure complémentaire, elle impossibilité de dégager un véhicule autocars exige un traitement différent, aussi facile à mettre en œuvre et peu bloqué sur la voie ferrée, infractions à la fois technique et réglementaire. coûteuse, consiste à installer des ralen- (passage en chicane...). Il arrive qu’un automobiliste roulant tisseurs en amont de chaque barrière, Le rapport propose la « sensibilisation à vive allure soit surpris par la fermeture par exemple des bandes perpendicu- du grand public » et une accumulation d’un passage à niveau malgré l’allumage laires au sens de circulation, analogues de petites mesures techniques. Sur la du feu rouge clignotant, freine bruta- à celles qui sont installées en amont des base de ce rapport, la ministre des trans- lement, brise la barrière et se retrouve péages autoroutiers. ports a annoncé dix mesures concrètes sur la voie ferrée, peut-être moteur calé, peu originales : aucune n’est susceptible alors qu’il pouvait foncer, sortir de la Quelques faits de provoquer un « choc psychologique » zone dangereuse en enfonçant les deux Le nombre des collisions aux PN a chez les usagers de la route. barrières et éviter ainsi une issue tra- baissé de 20 % entre 2017 et 2018, Détail révélateur : aucune allusion gique (les barrières sont conçues pour passant de 122 à 96, et le nombre de n’est faite aux risques auxquels les usa- pouvoir être facilement enfoncées). tués de 60 %, passant de 42 à 16. gers du train sont exposés en cas d’ac- Le premier schéma ci-dessous montre Les PN les plus « préoccupants » cident sur un PN, ni au délai d’insdispo- un passage à niveau aménagé normale- ont été supprimés ; d’autre part, nibilité du matériel ferroviaire... ment, le deuxième un passage à niveau 38 radars de vitesse et 80 radars de modifié de telle sorte que, même si le franchissement ont été mis en place Claude JULLIEN conducteur est surpris par la fermeture (72 000 infractions ont étéFichier consta : PN non modifié - Un feu rouge fixe ? Échelle 1 / 100 et freine trop tardivement, la voiture ne tées dans le premier cas, 27Indice 500 A - 09-07-2017 in- Claude Jullien propose, comme se retrouve pas sur la voie ferrée. fractions dans le second). d’autres experts (Etienne Got, Mauvais réflexe du conducteur la voiture s’arrête systématiquement sur la voie Jacques Robin), que le feu rouge cli- Schéma n°1 : Mauvais réflexe du conducteur. La voiture s’arrête systématiquement sur la voie. gnotant qui s’allume lors du passage d’un train, soit remplacé par un feu Marseille - Hyères Début rouge fixe. Argument : le feu rouge freinage fixe est déjà bien compris des auto- mobilistes comme une interdiction Vitesse initiale de passage, alors que le feu rouge clignotant est plutôt perçu comme Barrière brisée Platelage PN ClaudeChaussée JULLIEN une autorisation de passage « avec Fichier : PN modifié Échelle 1 / 100 prudence », comme l’est trop sou- Indice A - 09-07-2017 Arrêt systématique Avec le même mauvais réflexe du conducteur vent un feu orange. Ce remplace- sur la voie la voiture s’arrête avant la voie © Claude Jullien ment a été préconisé par l’Assem- Schéma n°2 : Avec le même mauvais réflexe, la voiture s’arrête avant la voie. blée Nationale en 2011 mais il n’a Intervalle de sécurité jamais été mis en œuvre.

Un « expert » a aussi proposé de Début Axe de l’ancienne freinage réduire légèrement (de 20 %) la barrière vitesse des trains à l’approche de tous les PN (on en trouve un tous les Vitesse initiale 2 km...) : une mesure qui ne modifie- rait que marginalement la violence Barrière brisée d’un choc avec un véhicule routier, Platelage PN Chaussée et idéale pour renforcer le trafic rou- Recul de la barrière tier et le nombre des accidents ! environ 5 m © Claude Jullien

FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 x 7 Europe Regards sur l’Europe

La politique européenne des transports influe directement sur la vie des usagers : organisation des réseaux, droits des voyageurs... FNAUT Infos consacrera chaque mois une rubrique aux actualités de l’UE et des Etats membres. Extension du rôle de l’ERA

L’ERA, Agence de l’Union européenne En application du volet technique du jusque-là très importants, qui consti- pour les chemins de fer, créée en 2004 4e Paquet ferroviaire, l’ERA est, depuis le tuaient souvent autant de barrières à et installée à Valenciennes, est char- 16 juillet 2019, l’autorité de référence pour l’entrée dans les réseaux nationaux. Un gée d’assister les Etats-membres de la délivrance des agréments techniques et seul référent sera affecté à chaque dossier l’Union Européenne et la Commission des certificats de sécurité dont tout maté- émanant des compagnies. européenne dans la mise en place de riel doit disposer sur les réseaux ferroviaires C’est une bonne nouvelle pour le che- l’Espace ferroviaire européen unique. de l’Union européenne. min de fer et pour les voyageurs, qui ver- Ainsi, les compagnies exploitant des ront les nouveaux matériels et les nouvelles Ses tâches comprennent la réalisation services n’auront désormais besoin que liaisons mises en place plus rapidement de l’interopérabilité et l’harmonisation des de la seule certification de l’ERA pour qu’auparavant. Ce renforcement de l’har- règles techniques, une approche commune leur matériel roulant assurant des liaisons monisation technique entre les différents de la sécurité, le soutien aux applications internationales, et non plus de l’approba- systèmes ferroviaires ne peut qu’augmen- télématiques et à l’introduction du sys- tion séparée de l’établissement de sécurité ter la compétitivité du chemin de fer au tème européen de signalisation ERTMS. ferroviaire de chacun des Etats-membres sein de l’Union européenne. La mise en place du Marché Unique dans traversés par ces services. Huit Etats-membres, dont la France, l’Union Européenne suppose en effet la Cette procédure de « guichet unique » ont adopté cette procédure en juin dernier. disparition des barrières techniques à l’en- mise en place au sein de l’ERA va réduire Les autres, auxquels se joindra la Suisse, trée des réseaux ferroviaires. les délais et les coûts d’homologation, l’auront mise en place d’ici juin 2020. La Deutsche Bahn s’engage pour le climat

progresser de 30 % : modernisation, in- novation et digitalisation, accroissement des capacités. 7. Le programme de digitalisation améliorera la capacité, la qualité, la fiabilité et l’efficacité de l’ensemble du système ferroviaire. 8. Toutes les gares de la DB vont devenir des points d’échange multimo- daux et le doublement de leur capacité leur permettra d’accueillir 40 millions de voyageurs/jour. 9. 100 000 embauches au cours des pro- “Epargnez-vous un vol avec le ticket d’été.” chaines années seront nécessaires pour La DB incite à voyager en train près de chez soi pour préserver le budget des usagers et le climat. atteindre les objectifs. C’est un plan très ambitieux que 3. Le nombre des voyageurs grandes 10. Un doublement de la capacité en la Deutsche Bahn a présenté en lignes doit doubler, il dépassera 260 mil- places offertes dans les trains nécessitera juin 2019 pour remplir les objectifs lions par an. Les 30 plus grandes agglomé- de porter à 600 rames la flotte de rames politiques de protection du climat rations seront reliées par deux trains/heure. grandes lignes et grande vitesse. fixés par le gouvernement allemand. 4. Un milliard de voyageurs régionaux et Richard Lutz, Président-directeur géné- locaux supplémentaires s’y ajouteront par ral de la Deutsche Bahn : « Un système 1. Les objectifs climatiques ne pourront une offre renforcée, et de nouvelles mobili- ferroviaire puissant doit être relié aux être atteints qu’avec un transport ferroviaire tés, y compris dans les régions rurales. autres modes de déplacement et se placer puissant et mu par une énergie renouvelable 5. DB Cargo vise 70% d’augmentation dans une perspective internationale, car à 100 % dès 2038 (et non plus en 2050). de son trafic de fret qui feront passer la les attentes de nos voyageurs et des clients 2. La DB se concentrera sur son cœur de part de marché ferroviaire actuelle de du fret ne s’arrêtent pas à la frontière et ne métier. Elle se séparera de sa filiale inter- 18 % à 25 %. peuvent pas être satisfaites uniquement nationale Arriva, dont l’activité est jugée 6. La capacité des infrastructures de- par le rail ». « marginale ». vrait, avec le soutien du gouvernement, Michel Quidort z

8 x FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 En régions Débat sur le Nœud Ferroviaire Lyonnais

ne débouchent pas sur des réalisations. L’attitude de la Région sur ce débat a d’ail- leurs été très étonnante voire inquiétante car elle s’est peu exprimée sauf par un cahier d’acteurs rédigé dans les derniers jours du débat (mais ce cahier reprenait quelques idées de la FNAUT comme le financement ou les délais de réalisation) La Région est pourtant en première ligne pour tout ce qui concerne les TER ! - la réaction de SNCF Voyage sur le risques de perte d’attractivité et donc de trafic avec un report de liaisons TGV sur la Située sur l’axe Paris-Méditerranée à grande vitesse, au carrefour de deux corri- gare de St Exupéry. dors européens de fret et au coeur des dessertes régionales, la ville de Lyon voit converger 12 lignes ferroviaires, qui y forment le « nœud ferroviaire » le plus com- Interventions de la FNAUT AURA plexe et le plus emprunté de France ». Chaque jour, 1200 trains de tous types le parcourent. Ce nœud complètement saturé engendre des perturbations sur toute La FNAUT AURA et plusieurs asso- la région Auvergne-Rhône-Alpes et bloque le développement du trafic ferroviaire. ciations ont pris un part active aux débats Organisé par la Commision National études hydrologiques ou acoustiques ou avec de nombreuses interventions et du Débat Public (CNDP), le débat sur le d’insertion avec tous les plans de détails. prises de parole. Nœud Ferroviaire Lyonnais (NFL) s’est On se demande alors pourquoi, ces Parmi les interventions de la FNAUT, on déroulé du 11 avril au 11 juillet 2019. études étant terminées depuis 2015, on a peut retenir : Alors que le Conseil d’Orientation des attendu 2019 pour lancer un débat… Que - l’urgence à décider et à créer un équiva- Infrastructures (COI) dans son rapport de de temps perdu ! lent RER sur l’agglomération Lyonnaise ; janvier 2018 avait préconisé un débat public Pendant le débat, la ministre a deman- - le choix de la solution surface, compte- d’orientation multimodale, la ministre a dé d’examiner deux scénarios de phasage, tenu du surcout de 1,5 milliards pour la choisi de limiter le débat à des aspects uni- soit le scénario de base 4 voies Saint-Fons solution souterraine ; quement ferroviaires comportant le passage - Grenay et traversée de la Part Dieu et -la nécessité de traiter aussi le problème à 4 voies de la section Saint-Fons - Grenay, un scénario alternatif avec toujours les du fret avec la réalisation au moins dans à l’entrée de Lyon et la désaturation de la 4 voies Saint-Fons - Grenay mais avec une première phase du CFAL Nord (et gare de la Part-Dieu avec la création de une réalisation partiel du Contourne- emprunt ensuite de la section mise à 4 voies nouvelles voies en proposant deux options : ment Ferroviaire de l’Agglomération Saint-Fons - Grenay) ; en surface ou en souterrain. Lyonnaise (CFAL, contournement nord - la proposition de trouver des finance- Il faut bien préciser que ces projets repré- de Lyon déclaré d’utilité publique en ments innovants, comme les sociétés de pro- sentent un ensemble d’aménagement allant 2012) avec plusieurs options de dévelop- jets qui vont être possibles avec la nouvelle au-delà des travaux en cours, travaux qui pement de la gare de St Exupéry. Loi d’Orientation des Mobilités (LOM), à ont surtout pour objectifs d’améliorer le l’exemple de la Société du Grand Paris. Il fonctionnement de cette gare, en particulier Quelques conclusions vaut mieux créer une société de projet pour la régularité, sans donner de vraies possibili- créer un réseau de RER à Lyon plutôt que tés de développement de nouvelles liaisons. Comme dans tout débat public, de nom- de construire l’Anneau des Sciences ! Fort heureusement, et encouragé par breux avis ont été formulés, certains contra- - la nécessité de travailler sur les délais, la commission, le débat a été élargi à l’en- dictoires, et brassant de nombreux sujets 2040 est bien trop éloigné. En Ile-de- semble des problèmes ferroviaires de la Ré- allant jusqu’aux choix d’urbanisme. France, on a su raccourcir les délais avec une gion, et des réunions ont même été organi- On peut cependant identifier quelques mise en service de la partie centrale de la sées à Grenoble ou Clermont-Ferrand. conclusions : ligne RER E en 2022, soit 12 années seule- - l’urgence à réaliser des aménagements ment après le débat public… Des études présentées tardivement tant les besoins sont importants et sans SNCF Réseau doit se prononcer d’ici doute trouver des solutions d’attente car les mi-décembre sur la suite donnée à ce débat. On peut remarquer que les études pré- projets présentés ont une échéance de réali- Mais Lyon est déjà bien en retard lorsqu’on sentées dans le dossier de référence de sation lointaine (le dossier indiquait 2040 !). observe que l’enquête publique pour la gare SNCF Réseau étaient déjà très avancées, - la nécessité pour les responsables poli- souterraine de Marseille est déjà program- ce qui est très inhabituel lorsqu’on en est au tiques de s’emparer du projet et de décider. mée mi 2021 avec une déclaration d’utilité niveau du débat public. Sur ces documents, C’est la présidente de la CNDP qui a mis publique fin 2002-début 2023… on pouvait ainsi trouver de nombreuses ce point en avant en rappelant les nom- François Lemaire, études techniques comme par exemple des breux débats déjà menés et les projets qui vice-président de la FNAUT AURA z

FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 x 9 En région

Service Annuel 2020

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Sur certains territoires, par exemple le versant nord des Hauts de France, ou est fortement réduite, parfois nulle, la Normandie, de nouveaux horaires TER vont être mis en place en décembre à croire que personne n’a besoin du 2020. Les bouleversements annoncés seront aussi profonds que ceux du TER ces jours là dans « les terri- « cadencement » (bien mal nommé) mis en place en 2012... Les autres terri- toires ». Aucun salarié ? Aucun tou- toires subiront le même traitement dans les années à venir. riste ? Aucun étudiant ? Moins de trains tard le soir aussi. Certaines La nouvelle trame horaire résulte gouttes, quasi confidentielle et très gares jadis bien desservies se retrou- d’une volonté de la branche TER de la tardive, ce qui empêchera de modifier veront uniquement dans la desserte SNCF annoncée il y a plusieurs mois les horaires déjà réservés en sillons : PROXI ce qui obligera souvent une par Franck Lacroix : rationaliser les Trois mois avant la mise en service, correspondance pour rejoindre les missions des différents trains autour la Région Hauts de France n’a encore grandes villes. Encore faudrait-il de trois types de TER : CITI (sorte de mis aucun nouvel horaire en ligne et que les correspondances soient bien RER autour des grandes villes, maté- refuse toute information sur les futurs conçues... y compris en articulation riel capacitaire), KRONO (liaisons horaires des TERGV. Ne consultons avec les TGV, ce qui est loin d’être rapides entre grandes villes, où l’on surtout pas les usagers, ils risqueraient le cas ! Nombre d’usagers verront leur trouvera de fait les anciens Intercités) d’avoir des idées ! temps de trajet allongé, et certaines et PROXI (pour la desserte des plus On constate effectivement une amé- lignes (Douai Valenciennes) auront petites gares, on ressuscite les « omni- lioration des services pour les gares des- deux fois moins de trains ! bus »). Le but est une meilleure lisibi- servies par les CITI et les KRONO : Les améliorations risquent donc lité des services, une meilleure fiabili- meilleure fréquence, dessertes plus d’être noyées sous les désagréments. té. Voire une augmentation globale du tardives, les trains capacitaires sont La plupart des usagers vont décou- nombre de trains et de places offertes. concentrés sur les zones chargées. vrir leur misère quelques jours avant De prime abord ce tableau idyllique Par contre les dessertes sont net- le nouveau service faute d’une infor- ne peut que remplir d’enthousiasme tement moins bonnes sur les petites mation préalable suffisante. Il est bien les usagers du train. gares desservies par les PROXI, cer- dommage que des principes généraux Qu’en est-il réellement ? Tout taines n’ont plus qu’un aller-retour séduisants soient pénalisés par un d’abord la conception de ces nouveaux par jour comme pour cautionner la manque de concertation. horaires s’est entourée souvent d’une volonté politique « de n’en fermer Gilles Laurent, vice président grande opacité : diffusion au compte- aucune ». La desserte le week-end de la FNAUT Hauts-de-France z

Le coin du cycliste : Baromètre des villes cyclables 2019

La FUB, Fédération française des usagers de la bicyclette, lance la seconde édition de l’enquête nationale « Baromètre Parlons vélo des villes cyclables 2019 ». Alors que l’édition 2017 avait largement contri- bué au lancement du plan vélo gouvernemental, la FUB propose de changer de braquet et de pas- ser d’un plan national « cadre » à son déploiement opérationnel en 1001 plans vélos locaux ! Avis à tous les cyclistes : Que vous soyez novice, expert, occasionnel, quotidien… donnez votre avis sur les aménagements cyclables de votre ville avant le 30 novembre. La FUB fournira des analyses comparatives fines sur l’évolution des différents indicateurs entre 2017 et 2019 au sein de votre ville.

Le baromètre Parlons vélo des villes cyclables 2019 est disponible en ligne sur www.parlons-velo.fr du 9 septembre jusqu’au 30 novembre 2019.

10 x FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 Forum

Le Livre noir de la SNCF

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Le « Livre Noir » de la SNCF recense les dysfonctionnements et les événe- A nous de vous faire ments incongrus ou révélateurs de l’inattention apportée au client voyageur. préférer le car Ces exemples, transmis par des membres de la FNAUT, illustrent la dérive actuelle du service ferroviaire, toujours du point de vue du voyageur. La SNCF investit 3,8 millions d’euros pour moderniser la ligne Tout voyageur de bonne foi viaire important, les guichets n’ouvrent Tours-Loches. Prix du billet de train est un fraudeur qui s’ignore qu’à 11h45. Il n’y a plus aucune bou- sur le site Internet SNCF : 9 c, quel tique SNCF de vente à Versailles que soit l’horaire choisi. Sauf que Lorsqu’il n’y a pas de guichet dispo- (90 000 habitants, sept millions de visi- le même trajet en autocar, le bil- nible, que la gare est fermée ou qu’il teurs par an), ni même dans le départe- let, SNCF lui aussi, s’affiche à 3 c, n’existe pas de distributeur de ticket, ment des Yvelines. et quel que soit l’horaire. Trois fois la seule solution est d’acheter son bil- l En voiture ! « Le 26 juin, je me moins cher que le train, avec en sus let à bord du train. Sauf que dans ce rends en voiture à la gare de Tracy- un temps de trajet moindre. cas, l’achat auprès de l’agent d’accom- Sancerre (ligne Paris-Nevers), où je pagnement du train s’accompagne de constate l’absence de guichet, de distri- La SNCF la moins chère ? l’obligation de payer un supplément. buteur et de composteur. En revanche, Tout voyageur dans ce cas est considéré une grande affiche indique que tout Pour un Lille-Berlin au tarif normal comme fraudeur, quand bien même la voyageur doit être muni d’un billet en train demandé pour le 22 août : 89 c SNCF n’a pas mis à sa disposition les avant de monter dans le train, sinon, il sur le site de Trainline, mais 329 c au- équipements permettant d’acheter son est en infraction. L’affiche mentionne près de OUI.sncf. titre de transport avant le voyage. le montant des amendes et des tarifs de bord prohibitifs. Elle précise même La Belgique aussi ! Exemples : que si le billet n’est pas composté, on l Poursuites judiciaires : « Le 23 doit payer 20 c ! La SNCF ne préci- Relevé dans les tweets du 9 juillet : janvier 2019, je n’ai pas pu acheter mon sant pas où on peut acheter son bil- « Bjr SNCB : est-il normal de devoir billet en gare de Vorey car l’automate let, je renonce à prendre le train et prendre un ticket pour accéder à l’auto- ne fonctionnait pas. » Réponse de la remonte dans ma voiture. » mate de vente ? ». De quoi donner des SNCF : « L’infraction à la police des idées à la SNCF ? chemins de fer étant constituée, notre Une billetterie SNCF qui ignore agent de contrôle était tenu de proposer le Transilien « Le train, c’est comme l’avion » une régularisation par le versement de l’indemnité prévue (…). Je vous invite De nombreuses gares d’Ile de France Alors que la fraude à bord du TGV à régler la somme de 100 c avant le 21 n’existent pas dans le logiciel de billet- ne représente que 1 à 2 % de voyageurs, mars 2019 (…) A défaut de paiement terie de la SNCF : Pontoise, Trappes, les portiques installés à l’entrée des dans les délais (…), SNCF Mobilités Tournan, Les Mureaux, Corbeil, … quais des grandes gares contraignent sera tenue d’engager des poursuites Pour une demande Pontoise-Amiens la totalité des passagers. Dans les gares judiciaires. L’amende recouvrée par le ou Fontainebleau-Creil, le système surchargées où lors de périodes de Trésor Public s’élève à 180 c ou 375 c répond que la relation n’existe pas, pointe, le nombre de portiques forcé- par procès-verbal.» et l’on ne peut donc pas acheter de ment limité créé d’interminables files l Cerbère est une gare internatio- billet. Pour Rouen-Roissy, le logiciel d’attente, et empêche parfois les voya- nale. Les guichets ferment entre midi propose un trajet via Amiens-TGV geurs de rejoindre à temps leur place et 14h00, et il n’y a pas de point d’infor- Haute Picardie par autocar, un autre dans le train. Un chef d’embarquement mation ou d’automate à disposition des via Lille-Flandres, … et un autre par de Paris-Est : « Maintenant, le train, voyageurs. A Chambéry, nœud ferro- Mézidon et Le Mans ! c’est comme l’avion. »

FNAUT infos n°279 - novembre-décembre 2019 x 11 Forum Forum : Aéroports de province

J’ai déjà effectué, sans contrainte ho- raire et avec satisfaction, le trajet Paris- Aurillac par train, via Brive ou via Cler- mont-Ferrand. Le trajet dure 6 à 7 h et nécessite 1 ou 2 correspondances. Mais le train est totalement impraticable pour un déplacement professionnel. Paris-Aurillac fait partie des liai- sons aériennes indispensables à la survie des régions enclavées. Il en © FM est de même pour Rodez et les villes de même taille mal desservies par le Kafka à la voiture-bar Quelques jours plus tard, c’est Char- train. Par contre, les liaisons aériennes lotte qui a subi une mésaventure im- au départ de villes aussi proches de Entre la Bretagne et Paris, que l’on pliquant la SNCF. Elle raconte : « En Paris que Dole constituent un indé- voyage en 1ère ou seconde classe, « il changeant un billet Biarritz-Paris pour niable gaspillage d’argent public. est interdit de manger sa propre nour- le décaler l’après-midi, je ne fais pas at- Bernard Gobitz, AUT Ile-de-France z riture dans la voiture-bar » (écriteau tention et c’est le nom de mon mari qui sur les tables, confirmé de – très vive apparait sur le ticket. Dans le train, le L’aéroport de Dole-Tavaux est plu- – voix par le « barista ».) Précision contrôleur exige que j’achète un nouveau tôt bien placé, à mi-chemin entre apportée un peu plus tard par l’agent billet. Hors de question, j’ai déjà payé et Dijon et Besançon. Mais la clientèle d’accompagnement : « Les passagers cela m’a coûté 15 c de faire le change- reste limitée, d’autant plus qu’une peuvent manger leur propre repas aux ment. Ayant refusé de donner ma carte bonne partie de la Région est de fait tables hautes, mais les tables basses, d’identité au contrôleur, je suis, à mon desservie, par Orly et Roissy, Mul- où l’on peut s’asseoir, sont réservées arrivée gare Montparnasse, arrêtée par house-Bâle et Lyon, qui offrent des aux clients du bar ». cinq vigiles de la SNCF et embarquée au fréquences et des prix intéressants. poste de police voisin. Là, on va contrô- L’aéroport de Dôle-Tavaux ne peut Deux mais pas trois ! ler mon identité, fouiller mes valises et survivre qu’à coup de subventions. Il me donner un avis d’infraction de 250 c, est tout à fait justifié de jouer plutôt Le site OUI.sncf ne propose à la vente presque le double du prix de mon billet. la carte ferroviaire. que les trajets incluant deux correspon- Le comble, c’est que cet avis stipule que Dominique Romann z dances. Pour les voyages qui nécessitent je n’ai pas de titre de transport, ce qui est trois changements, il faut utiliser le site absolument faux. » Nouveau comité de rédaction de la DB ou celui des CFF. Pas de vélos dans les TGV Jean Sivardière, qui a présidé jusqu’à C’est « Le Monde » qui le dit avant 2030 ? présent aux destinées de FNAUT infos (édition du 8 juillet). a souhaité se retirer peu à peu. Qu’il soit La loi d’orientation des mobilités sti- remercié pour l’excellence de l’œuvre Le vendredi 5 juillet après-midi, pre- pule que les trains neufs ou rénovés accomplie au fil des années qui a fait de mier jour des grands départs de l’été, devront disposer d’emplacements pour FNAUT infos un outil de référence. Françoise (prénom modifié) tombe en accueillir les vélos non démontés. Cette Il a heureusement accepté de conti- arrêt devant le panonceau placé devant obligation s’imposera à partir du 1er juil- nuer à épauler le nouveau comité de la boutique SNCF de la gare Saint-La- let 2020. En 2018 et 2019, la SNCF a rédaction et à mettre ses compétences, zare : « Les personnes sans rendez-vous commandé 112 rames de TGV. Compte sa culture et ses talents d’écriture au ont actuellement un temps d’attente tenu de la longévité du matériel ferro- service de notre publication !

de cent vingt minutes. » Françoise est viaire, les premières rénovations n’auront FNAUT infos - Bulletin mensuel d’information venue à Paris changer son billet plein pas lieu avant 2030… et ces 112 rames Directrice de publication : Christiane Dupart tarif contre un billet à prix réduit assorti vont rester sans emplacement réservé aux Crédits photo : Marc Debrincat et Fabrice Michel pour la FNAUT CPPAP 0920 G 88319 - Dépôt légal n°277 - ISSN : 0983-172 X de l’achat d’une carte senior, parce que, bicyclettes. On ne voit pas à quelle néces- Impression : TERRITOIRES - Consortium Coopérative dans sa gare de banlieue, il n’y a plus sité industrielle correspond cette dispo- Avenue de la Plage - 86240 Ligugé Abonnement papier 1 an (10 numéros) : Individuels : 19 b de guichet. « Voilà maintenant qu’il sition : créer ces emplacements n’affecte Administrations, sociétés, organismes, Étranger : 50 b faut prendre rendez-vous pour des bil- pas la structure du matériel, et constitue Prix au numéro : 2 b - Diffusion numérique libre Pour adhérer à la FNAUT ou à une association FNAUT lets de train s’indigne-t-elle, je ne peux un simple aménagement intérieur. Que de votre région, contacter notre permanence : pas attendre deux heures et le prochain reproche donc la SNCF aux cyclistes ? 32 rue Raymond Losserand 75014 Paris tél. : 01 43 35 02 83­ rendez-vous est le 13 juillet ! Où est le (d’après le communiqué Cyclo-Trans- e-mail : [email protected] service public ? » Europe du 3 septembre 2019.) Internet : https://www.fnaut.fr

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