La Restructuration Du Secteur Automobile En Europe Centrale : Le Role Des Investissements Directs Etrangers Et La Formation De Reseaux De Production
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Actes du GERPISA n° 29 57 LA RESTRUCTURATION DU SECTEUR AUTOMOBILE EN EUROPE CENTRALE : LE ROLE DES INVESTISSEMENTS DIRECTS ETRANGERS ET LA FORMATION DE RESEAUX DE PRODUCTION Frédéric Bourassa L'industrie automobile fut dans le processus de ont eu des effets d'entraînement en amont, sur les transition systémique des pays d'Europe centrale et entreprises issues du démantèlement des combinats orientale (PECO) un des actifs les plus convoité par socialistes. les firmes multinationales (FMN) de la triade, La situation des entreprises du secteur notamment pour ses capacités industrielles, pour automobile au début du processus de privatisation, les avantages de coûts de production ou pour les peut se résumer par la présence d'une importante potentialités des marchés locaux1. Les pays étudiés quantité de petites entreprises orphelines du dans cet article, la République tchèque, la Pologne combinat auquel elles appartenaient. Ces combinats et la Russie, produisaient 83 % des véhicules industriels étaient de gigantesques unités de automobiles des pays du CAEM2 en 1988. production très intégrées verticalement, leur niveau Maintenant que la transition a presque 10 ans de production était déterminé par l'État-Parti par le d'histoire et que les pays d'Europe centrale sont très biais du plan. Sans avoir de contrainte budgétaire à avancés dans leurs réformes économiques, on peut respecter, les comptes étaient tenus en monnaie se demander si les investissements directs étrangers scripturale, qui n'était qu'une unité de compte des effectués par les firmes multinationales flux physiques. Les liens entre la production et la automobiles en République tchèque et en Pologne consommation étaient également non-monétarisés, ce qui rendait les entreprises peu flexibles aux 1 D'autres travaux ont été fait à ce sujet au sein du variations de la demande (von Hirschhausen, GERISA: Ruigrok et van Tulder (1999) à propos des stratégies 1996). Ces entreprises ne pouvaient donc être d'investissement des firmes multinationales en Europe considérées comme des entreprises capitalistes à centrale. Vermaire et Krifa (1999) à propos des avantages comparatifs de PECO. part entière, puisque dépourvues de bureaux 2 Production de la Pologne, République tchèque et de d'études, de direction marketing, de réseaux de l'URSS en 1988 sur l'ensemble de la production des pays du CAEM excluant la Yougoslavie. Source: CCFA, 1989. vente et de section de gestion financière. De plus, 58 Actes du GERPISA n° 29 comme l'automobile n'avait jamais été considérée détermineront en grande parti ce cadre comme un bien prioritaire dans la planification institutionnel. Ces méthodes de privatisation furent socialiste, peu d'effort d'innovation avaient été fait déterminantes sur la structure des entreprises, sur la dans ces entreprises. Ces entreprises se corporate governance (Andreff, 1998). retrouvèrent donc avec un appareil industriel Nos hypothèses de travail sont les suivantes: vétuste. La spécificité du secteur automobile, de par son Richet (1995) identifie trois dimensions de la organisation hiérarchisée, verticalement segmentée restructuration industrielle: et globalisée, implique que la restructuration de ce La restructuration organisationnelle, où l'on vise secteur ne pourra se faire que par l'insertion des à adapter la dimension des firmes en les rendant entreprises locales dans les réseaux internationaux compatibles avec la structure de marché de la de production; branche. Les entreprises locales ont besoin d'un La restructuration légale, qui transforme le environnement économique leur donnant, entre statut légal des entreprises d'État, en entreprises autre, une corporate governance efficace et d'économie de marché (corporatization). flexible. La restructuration financière, concerne la Dans cet article nous tenterons d'évaluer le manière dont les firmes assurent leur niveau de restructuration des secteurs automobiles désendettement et leur recapitalisation. de trois pays d'Europe centrale et orientale, soit la Ces trois dimensions démontrent bien République tchèque, la Pologne et la Russie. Le l'importance du cadre institutionnel dans lequel la Tableau 1 illustre la position enviable des restructuration devra avoir lieu. Les gouvernements différentes entreprises automobile d’Europe nationaux dans leur choix des méthodes de centrale par rapport à l’ensemble des entreprises de privatisation et de politiques industrielles, cette région. Tableau 1. - Central Europe's Top 100 Only automotive firms were selected (Ranked by 1997 sales) Rank Rank Enterprise Country Sales Groth Profit Staff Private Foreign 1997 1996 ($ M) rate % ($ M) investor 8 7 Skoda auto Czech Rep. 2604 20 90.7 22 205 Yes Yes 12 11 Fiat Auto Poland Poland 1890 7 28.5 11 953 Yes Yes 21 53 Daewoo-FSO Poland 1304 100 16.5 13 893 Yes Yes 40 n.a. Audi Hungaria Hungary 928 172 85.1 1647 Yes Yes 41 27 Revoz Slovenia 928 -7 n.a. 2561 Yes Yes 54 45 Opel Hungary Hungary 697 -2 172.6 1647 Yes Yes 61 55 VW-Bratislava Slovakia 622 7 10.2 2745 Yes Yes 65 n.a. VW-Poznan Poland 564 94 15.1 1950 Yes Yes 91 88 Daewoo Motor Polska Poland 411 6 16.5 6.502 Yes Yes Source: Business Central Europe, Annual Survey 1998/1999 Actes du GERPISA n° 29 59 RÉPUBLIQUE TCHEQUE mais l'investissement fut révisé à hauteur de 3.7 millions de DM. Le point de départ de la restructuration du Skoda avtomobila a.s. compte plus de 20.000 secteur automobile en République employés répartis dans trois sites de production tchèque : la privatisation de Skoda dont le principal se situe à Mlada Boleslav et Quelques années avant la Révolution de velours, le comprend 18.000 employés. C'est dans cette ville gouvernement tchèque avait commencé à aménager que fut bâtie ex nihilo en 1996, la très moderne le combinat de production de moyen de transport usine de montage de la Skoda-Octavia. L'usine de KAP, au moyen d'une désintégration horizontale en montage de la Skoda-Felicia, fut dotée quant à elle plus de 6 entreprises distinctes, parmi lesquelles: de 75 à 80% de nouveaux équipements. Tatra (automobile et camion) , Liaz (camion), Avia L'emploi global n'a que peu varié en termes (camion), Jawa (moto), Karosa (bus) et l'AZNP quantitatifs depuis la privatisation, mais il a (automobile) qui deviendra Skoda. Ce beaucoup varié en terme qualitatif. Le licenciement réarrangement permit un début de restructuration d'ouvriers non-qualifiés ainsi que de nombreux interne chez Skoda. commis de bureaux a entraîné un important En 1991, suite à la volonté du nouveau régime renouvellement de la main d'œuvre. Au lieu de ces d'orienter l'économie tchèque vers l'économie de employés jugés improductifs, furent engagés des marché, une entreprise mixte fut créée entre le ouvriers qualifiés et des personnes spécialisés dans Groupe Volkswagen et Skoda dont l'Agence les secteurs presque inexistants auparavant du tchèque de privatisation était la propriétaire. Suite à marketing et du design. cette vente directe, VW détient 70% des parts de Skoda est le seul producteur d'automobile de masse l'entreprise mixte tandis que l'Agence tchèque de de la République tchèque, avec 56% des ventes privatisation détient 30% des parts. Il est à spécifier (Voir Tableau 2), ce qui est un cas unique dans un que VW n'a racheté que les installations pays industrialisé. De plus, les deux tiers de sa industrielles assemblant et produisant les organes production (Voir Tableau 3) sont exportés dans stratégiques de l'automobile, se débarrassant d'un plus de 60 pays. L'augmentation de ses bon nombre de fournisseurs qui étaient intégrés à exportations est en partie due à l'augmentation de Skoda et qui étaient issus de la désintégration du la qualité de la production. Les performances de KAP. La nouvelle entreprise mixte a néanmoins Skoda sont exemplaires: il est le premier gardé des liens commerciaux avec ces fournisseurs. producteur industriel de République tchèque, le Le projet d'investissement initial fut de 9.5 millions premier exportateur et affiche le plus important de DM, avec une capacité de 390.000 unités par an, chiffre d'affaire. Tableau 2. - Vente de véhicules automobile en République tchèque 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2008 Skoda 67.598 82.734 96.680 94.733 101.068 116.500 125.083 126.366 131.212 117.000 %market share 60.3% 53.4% 55.8% 52.3% 52.3% 54.2% 53.1% 53.5% 53.5% 42.7% Tatra 50 69 23 10 10 10 10 10 10 10 Other 46 21 10 10 10 10 10 10 10 10 Total 67.694 82.824 96.713 94.753 101.088 116.520 125.103 126.386 131.232 117.020 %share New regs 29.6% 28.4% 31.3% 37.8% 41.6% 46.6% 49.5% 50.9% 51.4% 42.4% %chg. 15.1% 22.4% 16.8% -2.0% 6.7% 15.3% 7.4% 1.0% 3.8% Source : Standard &Poor's DRI/PlanEcon, April 1998 60 Actes du GERPISA n° 29 Tableau 3 : Production d'automobile en République tchèque par modèles 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2008 Favorit/Form 3.805 0 0 0 0 0 0 0 0 0 an Felicia 189.333 238.958 296.715 290.000 260.000 0 0 0 0 0 Felicia B 0 0 0 0 45.000 320.000 320.000 330.000 320.000 330.000 Octavia 0 1.168 60.690 110.000 125.000 130.000 120.000 110.000 130.000 160.000 Model W8 0 0 0 0 0 10000 60000 60000 50000 60000 Total Skoda 193.138 240.126 357.405 400.000 430.000 460.000 500.000 500.000 500.000 550.000 %Chg 26.8% 24.3% 48.8% 11.9% 7.5% 7.0% 8.7% 0.0% 0.0% 4.8% Tatra 48 70 23 10 10 10 10 10 10 10 Total 193.186 240.196 357.428 400.010 430.010 460.010 500.010 500.010 500.010 550.010 %Chg 26.8% 24.3% 48.8% 11.9% 7.5% 7.0% 8.7% 0.0% 0.0% Source : Standard&Poor's DRI/PlanEcon, April 1998.