François Gautier président Brigitte Marger directeur général sommaire clefs d’écoute conférence - jeudi 3 décembre à 15h page 4 hommage à colloque - vendredi 4 décembre à 9h30 et 14h page 4

Des canyons aux étoiles, le monde d’Olivier Messiaen film - vendredi 4 décembre à 20h page 4 récital de piano samedi 5 décembre à 20h page 5 concert à deux orchestres jeudi 10 décembre à 20h page 14

Messiaen et l’esprit « haïku » texte de Hans Zender page 19

biographie d’Olivier Messiaen page 30 biographies des artistes page 31 hommage à Olivier Messiaen

Le 10 décembre 1998, Olivier Messiaen aurait fêté ses 90 ans. C’est pourquoi la cité de la musique, l’Ensemble Intercontemporain et le Conservatoire de Paris ont choisi cette date pour lui rendre hommage. Autour de ce concert se sont greffés plusieurs manifestations destinées à donner une idée plus large des différents aspects de son activité artistique : un colloque organisé par le Conservatoire de Paris (autour de sa musique pour claviers), la pro- jection du documentaire d’Olivier Mille (Des Canyons aux étoiles) et un récital de piano (l’intégrale des Vingt Regards de L’Enfant Jésus par Pierre-Laurent Aimard). La cité de la musique a souhaité aussi proposer, en première édition française, la traduction de l’article de Hans Zender qui analyse les Sept Haïkaï et qui com- mente également les principes fondateurs du style d’Olivier Messiaen en en mon- trant toute la modernité. jeudi clefs d’écoute 3 décembre - 15h Autour des Sept Haïkaï salle des colloques par Alain Poirier en introduction à l’œuvre d’Olivier conférence Messiaen donnée en concert le jeudi 10 décembre vendredi hommage à Olivier Messiaen 4 décembre - 9h30 et 14h amphithéâtre du musée Les claviers dans la musique d’Olivier Messiaen - spécificités de l’écriture pour clavier colloque Claude Samuel, président de séance

avec la participation de : Alain Louvier, Alain Mabit, Valérie Hartmann- Claverie, Pierre-Albert Castanet, Olivier Latry, professeurs au Conservatoire de Paris Michelle Biget-Mainfroy, professeur à l’Université de Tours Véronique Pélissero, piano vendredi Des canyons aux étoiles, 4 décembre - 20h le monde d’Olivier Messiaen amphithéâtre du musée cinéma au musée série documentaire en trois parties d’Olivier Mille France, 1997, 156 mn, coul. ; production Artline Films, Imalyre, INA Entreprise, CNSMDP, CNC, Procirep, C9 Télévision, Muzzik.

1er épisode : la foi 2e épisode : la nature et les oiseaux 3e épisode : les rythmes, les couleurs, l’enseignement

Ce film restitue, en trois épisodes, l’univers d’Olivier Messiaen. De très nombreuses archives, filmées entre 1964 et 1987, privilégient sa propre parole, comme si ces trois films constituaient un vaste autoportrait. De larges extraits de ses œuvres illustrent ses propos. Enfin, de nombreux musiciens viennent témoigner de son influence et donner un éclairage critique sur sa place dans la création musicale du XXe siècle. samedi récital de piano 5 décembre - 20h salle des concerts Olivier Messiaen concert Vingt Regards sur l’Enfant Jésus I - Regard du Père II - Regard de l’étoile III - L’échange IV - Regard de la Vierge V - Regard du Fils sur le Fils VI - Par Lui tout a été fait VII - Regard de la Croix VIII - Regard des hauteurs IX - Regard du Temps X - Regard de l’Esprit de joie

entracte

XI - Première communion de la Vierge XII - La parole toute puissante XIII - Noël XIV - Regard des Anges XV - Le baiser de l’Enfant-Jésus XVI - Regard des prophètes, des bergers et des Mages XVII - Regard du silence XVIII - Regard de l’Onction terrible XIX - Je dors, mais mon cœur veille XX - Regard de l’Eglise d’amour

Pierre-Laurent Aimard, piano

durée du concert : 2 heures hommage à Olivier Messiaen

I - Regard du Père Phrase complète sur le Thème de Dieu. Et Dieu dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui j’ai pris toutes mes complaisances... »

II - Regard de l’étoile Thème de l’Etoile et de la Croix. Choc de la grâce... l’étoile luit naïvement, surmontée d’une croix...

III - L’échange Descente en gerbe, montée en spirale ; terrible com- merce humano-divin ; Dieu se fait homme pour nous rendre dieux... Dieu, c’est le trait en tierces alternées : ce qui ne bouge pas, ce qui est tout petit. L’homme, ce sont les autres fragments qui grandissent, grandissent et deviennent énormes, selon un procédé de dévelop- pement que j’appelle : « agrandissement asymé- trique ».

IV - Regard de la Vierge Innocence et tendresse... la femme de la Pureté, la femme du Magnificat, la Vierge regarde son Enfant... J’ai voulu exprimer la pureté en musique : il y fallait une certaine force - et surtout beaucoup de naïveté, de tendresse puérile.

V - Regard du Fils Mystère, rais de lumière dans la nuit - réfraction de sur le Fils la joie, les oiseaux du silence - la personne du Verbe dans une nature humaine - mariage des natures humaine et divine en Jésus-Christ... Il s’agit évidemment du Fils-Verbe regardant le Fils- enfant-Jésus. Trois sonorités, trois modes, trois rythmes, trois musiques superposées. « Thème de Dieu » et canon rythmique par ajout du point. La joie est symbolisée par des chants d’oiseaux.

VI - Par Lui tout a été fait Foisonnement des espaces et durées ; galaxies, pho- tons, spirales contraires, foudres inverses ; par « lui » (le Verbe) tout a été fait... à un moment, la création nous ouvre l’ombre lumineuse de sa Voix... C’est une fugue. Le sujet n’y est jamais présenté de la même façon : dès la seconde entrée il est changé

6| cité de la musique hommage à Olivier Messiaen

de rythme et de registres. Remarquez le divertisse- ment où la voix supérieure traite le sujet en rythme non rétrogradable éliminé à droite et à gauche, où la basse fortissimo répète un fragment du sujet en agran- dissement asymétrique. Milieu sur des valeurs très brèves et très longues (l’infiniment petit, l’infiniment grand). Reprise de la fugue rétrogradée, à l’écrevisse. Strette mystérieuse. Thème de Dieu fortissimo : pré- sence victorieuse, la face de Dieu derrière la flamme et le bouillonnement. La création reprend et chante le thème de Dieu en canon d’accords.

VII - Regard de la Croix Thème de l’étoile et de la Croix. La Croix lui dit : tu seras prêtre dans mes bras...

VIII - Regard des hauteurs Gloire dans les hauteurs... les hauteurs descendent sur la crèche comme un chant d’alouette... Chants d’oiseaux : rossignol, merle, fauvette, pinson, chardonneret, bouscarle, cini, et surtout l’alouette.

IX - Regard du Temps Mystère de la plénitude des temps ; le Temps voit naître en lui Celui qui est éternel... Thème court, froid, étrange, comme les têtes en œuf de Chirico ; canon rythmique.

X - Regard de l’Esprit Danse véhémente, ton ivre des cors, transport du de joie Saint-Esprit... la joie d’amour du Dieu bienheureux dans l’âme de Jésus-Christ... J’ai toujours été très frappé par ce fait que Dieu est heureux - et que cette joie ineffable et continue habi- tait l’âme du Christ. Joie qui est pour moi un transport, une ivresse, dans le sens le plus fou du terme. Forme : Danse orientale dans l’extrême-grave, en neumes inégaux, comme du plain-chant. 1er déve- loppement sur « thème de joie ». Agrandissement asy- métrique. Sorte d’air de chasse en 3 variations. 2e développement sur « thème de joie » et « thème de Dieu ». Reprise de la danse orientale, extrême-aigu et extrême-grave ensemble. Coda sur « thème de joie ».

notes de programme | 7 hommage à Olivier Messiaen

XI - Première communion Un tableau où la Vierge est représentée à genoux, de la Vierge repliée sur elle-même dans la nuit - une auréole lumi- neuse surplombe ses entrailles. Les yeux fermés, elle adore le fruit caché en elle. Ceci se passe entre l’Annonciation et la Nativité : c’est la première et la plus grande de toutes les communions. Thème de Dieu, volutes douces, en stalactites, en embrassement intérieur. Rappel du thème de « la Vierge et l’Enfant » de ma « Nativité ». Magnificat plus enthousiaste. Accords spéciaux et valeurs de 2 en 2 dont les pulsations graves représentent les batte- ments du cœur de l’Enfant dans le sein de sa mère. Evanouissement du thème de Dieu. Après l’Annonciation, Marie adore Jésus en elle... mon Dieu, mon fils, mon Magnificat ! - mon amour sans bruit de paroles...

XII - La parole toute Monodie avec percussion grave. puissante Cet enfant est le Verbe qui soutient toutes choses par la puissance de sa parole...

XIII - Noël Carillon - les cloches de Noël disent avec nous les doux noms de Jésus, Marie, Joseph...

XIV - Regard des Anges Scintillements, percussions ; souffle puissant dans d’immenses trombones ; tes serviteurs sont des flammes de feu... - puis le chant des oiseaux qui avale du bleu, - et la stupeur des anges s’agrandit : - car ce n’est pas à eux mais à la race humaine que Dieu s’est uni... Dans les trois premières strophes : flamboiement, canon rythmique et fractionnement du thème d’ac- cords. 4e strophe : chants d’oiseaux. 5e strophe : la stupeur des anges s’agrandit.

XV - Le baiser A chaque communion, l’Enfant-Jésus dort avec nous de l’Enfant-Jésus près de la porte ; puis il l’ouvre sur le jardin et se pré- cipite à toute lumière pour nous embrasser... Thème de Dieu en berceuse. Le sommeil - le jardin - les bras tendus vers l’amour - le baiser - l’ombre du

8| cité de la musique hommage à Olivier Messiaen

baiser. Une gravure m’a inspiré, qui représente l’Enfant-Jésus quittant les bras de sa Mère pour embrasser la petite sœur Thérèse. Tout ceci est sym- bole de la communion, de l’amour divin. Il faut aimer pour aimer ce sujet et cette musique qui voudraient être tendres comme le cœur du ciel, et il n’y a rien d’autre.

XVI - Regard des Musique exotique - tam-tams et hautbois, concert prophètes, des bergers énorme et nasillard... et des Mages

XVII - Regard du silence Silence dans la main, arc-en-ciel renversé... chaque silence de la crèche révèle musiques et couleurs qui sont les mystères de Jésus-Christ... Polymodalité, canon rythmique par ajout du point, accords spéciaux, « thème d’accords ». Tout le mor- ceau est très ouvragé comme écriture de piano. FIn : accords alternés, musique multicolore et impalpable, en confettis, en pierreries légères, en reflets entre- choqués.

XVIII - Regard de l’Onction Le Verbe assume une certaine nature humaine ; choix terrible de la chair de Jésus par la Majesté épouvantable... Une vieille tapisserie représente le Verbe de Dieu en lutte sous les traits du Christ à cheval : on ne voit que ses deux mains sur la garde de l’épée qu’il brandit au milieu des éclairs. Cette image m’a influencé. - Dans l’Introduction et la Coda, valeurs progressive- ment ralenties superposées aux valeurs progressive- ment accélérées et inversement.

XIX - Je dors, mais mon Poème d’amour, dialogue d’amour mystique. Les cœur veille silences y jouent un grand rôle. Ce n’est pas d’un ange l’archet qui sourit, - c’est Jésus dormant qui nous aime dans son Dimanche et nous donne l’oubli...

XX - Regard de l’Eglise La grâce nous fait aimer Dieu comme Dieu s’aime ; d’amour après les gerbes de nuit, les spirales d’angoisse, voici

notes de programme | 9 hommage à Olivier Messiaen

les cloches, la gloire et le baiser d’amour... toute la passion de nos bras autour de l’Invisible... Forme (le développement y précède l’exposition) : Développement : 1er thème en rythme non rétrogra- dable, amplifié à droite et à gauche ; il est coupé par des traits de piano en gerbes contraires. Trois appels du « thème de Dieu » séparés par des agrandisse- ments asymétriques. Développement du 3e thème mélodique. 1er thème avec gerbes, nouvel agrandis- sement asymétrique. Sonnerie de cloches formant pédale de dominante et rappelant les accords des pièces précédentes. Exposition : Phrase complète sur le « thème de Dieu », en fanfare, en gloire. Longue coda sur le « thème de Dieu » - triomphe d’amour et de joie, larmes de joie.

Olivier Messiaen

10 | cité de la musique hommage à Olivier Messiaen

Olivier Messiaen effectif : piano solo ; composition : à Paris entre le 23 mars Vingt Regards sur et le 8 septembre 1944 ; création : le 26 mars 1945 par l’Enfant Jésus Yvonne Loriod à la salle Gaveau ; éditeur : Durand ; l’œuvre est dédiée à Yvonne Loriod.

«Vous savez que j'ai beaucoup écrit pour le piano, et pas seulement pour le piano seul (...). Mais il y a évi- demment une distance énorme entre les Préludes de 1929 et les Vingt Regards sur l'Enfant Jésus qui sont de 1944 » (O. Messiaen dans Musique et couleur, nouveaux entretiens avec C. Samuel). Cette distance dont parle Messiaen et qui sépare sa première œuvre importante, composée à l'âge de vingt ans, du grand cycle pianistique de la maturité, est la conséquence logique de quinze années d'évolution, mais aussi le fruit d'une rencontre : celle avec Yvonne Loriod. Pianiste aux qualités exceptionnelles, Yvonne Loriod allait ouvrir au compositeur tout un champ de possi- bilités instrumentales et musicales nouvelles. Outre l'emploi des accords en grappes inspirés des mixtures d'orgues qui figurent déjà dans les Préludes, les Vingt Regards recèlent de nom- breuses innovations pianistiques : « des traits en mouvement contraire, les deux mains arpégeant violemment l'une contre l'autre avec de petits croi- sements », la technique « en retournement » qui « consiste à mettre la main à plat en attaquant les quatre doigts supérieurs avec le pouce couché comme pivot », ou encore la combinaison de « l'ac- celerando avec le rallentando ». (op. cit.) Mais « le piano, qui semble a priori un instrument dénué de timbres, est, précisément par son manque de personnalité, un instrument propice à la recherche des timbres, car le timbre ne vient pas de l'instrument mais de l'exécutant » (op. cit.). C'est ainsi que la par- tition des Vingt Regards fourmille d'indications instru- mentales faisant référence aux percussions (cloches, carillons, tam-tam, xylophone, tambours), mais aussi aux vents (hautbois, trombones). Quant au chatoiement sonore propre à la musique de Messiaen, il tient surtout au langage harmonique

notes de programme | 11 hommage à Olivier Messiaen

du compositeur fondé sur sa théorie du « son-cou- leur ». Cette théorie consiste à associer chaque complexe de sons à une couleur bien définie selon le principe de la synesthésie [association spontanée par correspondance de sensations appartenant à des domaines différents]. Tout comme la lumière colorée des vitraux, l'enchaînement de ces com- plexes de sons doit engendrer l'éblouissement et donner ainsi accès au sacré, ouvrir « une percée vers l'au-delà, vers l'invisible et vers l'indicible » (O. Messiaen, Conférence de Notre-Dame).

« mettre en lumière les Tels vingt vitraux, les Vingt Regards illustrent la vérités de la foi « contemplation de l'Enfant-Dieu de la crèche » et les catholique » « Regards qui se posent sur lui : depuis le Regard indicible de Dieu le Père jusqu'au Regard multiple de l'Eglise d'amour, en passant par le Regard inouï de l'Esprit de joie, par le Regard si tendre de la Vierge, puis des Anges, des Mages et des créatures imma- térielles ou symboliques (le Temps, les Hauteurs, le Silence, l'Etoile, la Croix) ». Les sources d'inspiration de Messiaen sont autant les textes religieux comme ceux de Saint Thomas d'Aquin, Dom Columbia Marmion (Le Christ dans ses Mystères) ou Maurice Toesca (Les Douze Regards), que les chants d'oiseaux, les stalactites, les galaxies, les photons... « En dehors des thèmes particuliers à chacune des vingt pièces, quatre thèmes cycliques circulent à travers l'œuvre ». Le « thème de Dieu » se trouve essentiellement dans les trois pièces dédiées aux trois personnes de la Sainte Trinité (I, V, X) et le «thème de l'amour mystique » dans les Regards VI, XIX et XX. « L'Etoile et la Croix ont le même thème parce que l'une ouvre et l'autre ferme la période ter- restre de Jésus ». Quant au « thème d'accords », il circule d'une pièce à l'autre, fractionné ou concen- tré, et perpétuellement varié. « Le cycle est ordonné selon les contrastes de tempo, d'intensité, de couleur, et aussi par des rai-

12 | cité de la musique hommage à Olivier Messiaen sons symboliques ». Ainsi sont distribués de cinq en cinq les Regards qui traitent de la Divinité. Les deux pièces qui parlent de la Création portent les numé- ros VI et XII - multiple de six, chiffre de la Création quand sept est le chiffre parfait pour la Croix « réta- blissant l'ordre troublé par le péché », et neuf celui de la maternité pour « le Temps qui a vu naître en lui celui qui est Eternel ». Par son rythme, notamment les formules non rétro- gradables et le charme qu'elles dégagent - celui des impossibilités si cher au compositeur - la musique de Messiaen nous envoûte et nous fait pénétrer dans un imaginaire riche et puissant, dans un uni- vers aussi merveilleux que poétique. « J'ai cherché ici un langage d'amour mystique, à la fois varié, puissant, et tendre, parfois brutal, aux ordonnances multicolores » écrivait-il à la fin de la préface des Vingt Regards.

David d'Hermy

notes de programme | 13 jeudi 10 décembre - 20h Olivier Messiaen salle des concerts Hymne (*) concert durée : 12 minutes

Sept Haïkaï, esquisses japonaises (**) Introduction, Le parc de Nara et les lanternes de pierre, Yamanaka-cadenza, Gagaku, Miyajima et le torii dans la mer, Les oiseaux de Karuizawa, Coda durée : 19 minutes

entracte

Et exspecto resurrectionem mortuorum (**) 1. Des profondeurs de l'abîme, je crie vers toi, Seigneur : Seigneur, Ecoute ma voix ! (Psaume 130, v. 1 et 2) 2. Le Christ, ressuscité des morts, ne meurt plus ; la mort n'a plus sur lui d'empire (Saint Paul, Epître aux Romains, chap. 6, v. 9) 3. L'heure vient où les morts entendront la voix du Fils de Dieu (Evangile selon Saint Jean, chap. 5, v. 25) 4. Ils ressusciteront, glorieux, avec un nom nouveau - dans le concert joyeux des Etoiles et les acclamations des fils du ciel (Saint Paul, 1ère Epître aux Corinthiens, chap. 15, v. 43 - Apocalypse de Saint Jean, chap. 2, v. 17 - Livre de Job, chap. 38, v. 7) 5. Et j'entendis la voix d'une foule immense... (Apocalypse de Saint Jean, chap. 19, v. 6) durée : 33 minutes

Hans Zender, direction Dimitri Vassilakis, piano Orchestre du Conservatoire de Paris (*) Ensemble Intercontemporain (**)

coproduction cité de la musique, Ensemble Intercontemporain et Conservatoire de Paris répétition publique des Sept Haïkaï le mardi 8 décembre à 15h30 hommage à Olivier Messiaen

Olivier Messsiaen composition : à Paris en 1932 (avec le titre Hymne au Saint Hymne Sacrement), avant d’être reconstituée vers 1947 (avec le titre Hymne); création : le 13 mars 1933 à Paris au Théâtre des Champs-Elysées sous la direction de Walther Straram ; effec- tif : 3 flûtes, 2 hautbois, 1 cor anglais, 2 clarinettes en si b, 1 clarinette basse en si b, 3 bassons ; 4 cors en fa, 3 trom- pettes en ut, 3 trombones ; timbales ; percussions (triangle, cymbale suspendue, grosse caisse) ; violons 1, violons 2, altos, violoncelles, contrebasses ; éditeur : Broude Brothers. Composé en 1932 à Paris, Hymne au Saint Sacrement fut créé dès l'année suivante au Théâtre des Champs-Elysées sous la direction de Walther Straram. Mais, Messiaen, qui n'était pas entièrement satisfait de sa partition, n'en autorisa pas l'édition immédiate, et, le manuscrit ayant disparu pendant la guerre, le compositeur dut le reconstituer de mémoire. La seconde version, simplement rebaptisée Hymne, fit ainsi l'objet d'une nouvelle création en 1947 à New York sous la direction de Léopold Stokowski, puis en 1958 à Paris avec Igor Markévitch. La structure formelle d'Hymne, qui oscille entre plu- sieurs tempi, est assez complexe, mais on peut l'ap- préhender comme un grand mouvement symphonique conçu selon l'alternance de deux idées exposées, développées, puis réexposées, et finis- sant sur une coda éclatante. Au premier thème introduit par tout l'orchestre - selon l'expression du compositeur - « en coup de vent », vertical, homorythmique et fortissimo, s'oppose, presque lente et aux seules cordes en sourdine, une ample mélodie « expressive et poétique » soutenue par des trémolos. Si Messiaen a écrit pour la plupart de ses œuvres de longues préfaces explicatives, il n'a laissé que quelques lignes, néanmoins significatives, concernant l'esthétique d'Hymne : « Comme mes Préludes pour piano écrits en 1929, cette œuvre se caractérise surtout par ses effets de couleur. [...] La musique y mélange l'or et le brun à l'orange rayé de rouge, puis l'orange et le blanc laiteux au vert et à l'or. Un grand crescendo part sur des bleus violets et verts, et s'élève jusqu'au rouge et or de la fanfare

notes de programme | 15 hommage à Olivier Messiaen

terminale des trompettes, qui magnifie l'élément lyrique. » (in Hommage à Olivier Messiaen, Claude Samuel, La recherche artistique).

Sept Haïkaï, esquisses composition : 1962 ; création : le 30 octobre 1963 à Paris au japonaises Théâtre de l’Odéon à l’occasion d’un concert du Domaine musical (piano solo : Yvonne Loriod ; direction : Pierre Boulez) ; effectif : piano solo ; 1 petite flûte, 1 flûte, 2 hautbois, 1 cor anglais, 1 petite clarinette en mi b, 2 clarinettes en si bémol, 1 clarinette basse en si bémol, 2 bassons ; 1 trompette en ut, 1 trombone ténor ; xylophone, marimba ; percussions ; 8 violons ; éditeur : Alphonse Leduc ; l’œuvre est dédiée « à Yvonne Loriod, à Pierre Boulez, à Madame Fumi Yamaguchi, à Seiji Ozawa, à Yoritsuné Matsudaïra, à Sadao Bekku et Mitsuaki Hayama, à l'ornithologue Hoshino, aux paysages, aux musiques, et à tous les oiseaux du Japon ».

Comme les sept épisodes de Chronochromie (1959- 60), les Sept Haïkaï composent un cycle indissoluble de petites pièces brèves. Le titre - le Haïkaï est un court poème japonais de trois vers - fait davantage allusion à leur brièveté qu'une quelconque référence poétique précise. Ainsi, pour Messiaen, « les Sept Haïkaï résultent du coup de foudre [qu'il a] ressenti pour le Japon quand [il y a] accompli une tournée de concerts avec Yvonne Loriod ». L'effectif instrumental, qui n'est pas sans rappeler ceux de Chronochromie ou des Couleurs de la Cité céleste (1963), met plus particulièrement l'accent sur la combinaison piano-vents-percussions, le piano solo jouant un rôle véritablement concertant dans les numéros 3 et 6. L'orchestre entier intervient dans les pièces 1, 5 et 7, et les violons sont absents dans les numéros 3 et 6. Encadré d'une introduction et d'une coda, le cycle s'articule autour du mouvement lent central, Gagaku. Les autres pièces sont regroupées par paires (1 et 7; 2 et 5 ; 3 et 6) dans un souci de symétrie rigou- reuse concernant à la fois le tempo, la métrique, le nombre de mesures, ou encore l'écriture, comme dans la Coda qui est l'exact rétrograde de l'Introduction.

16 | cité de la musique hommage à Olivier Messiaen

Une impression poétique s'ajoute à ces données musicales abstraites pour compléter leur association. Ainsi, Le parc de Nara et les lanternes de pierre (n°2) et Miyajima et le torii dans la mer (n°5) évoquent, dans des superpositions de couleurs harmoniques indi- quées précisément sur la partition, les paysages bigar- rés du Japon. « Les oiseaux qui chantent dans Yamanaka-cadenza (n°3) ont été entendus en forêt, près du lac Yamanaka, au pied du mont Fuji. Ce sont à peu près les mêmes oiseaux que dans la sixième pièce, Les oiseaux de Karuizawa ». Messiaen donne d’ailleurs en préface une liste des vingt-cinq oiseaux du Japon dont il a retranscrit les chants dans ces deux pièces. Celles-ci sont construites selon une alternance de tutti d'or- chestre et de cadences pour piano solo, exactement comme dans les Oiseaux exotiques pour piano solo et petit orchestre composés en 1955. Le quatrième mouvement, Gagaku, « hiératique, sta- tique, à la fois religieux et nostalgique ; mouvement lent, implacable » est une interprétation de la musique noble du Japon du VIIe siècle, qui se pratique encore à la cour impériale. Planant au-dessus du hichiriki - sorte de hautbois japonais remplacé ici par un alliage trompette-hautbois-cor anglais, les huit violons, jouant près du chevalet sans vibrato, imitent la sonorité aigre et acide des harmonies du shô (orgue à bouche).

Et exspecto resurrectio- composition : à Petichet en 1964 (commande d’André nem mortuorum Malraux, ministre de la Culture) ; création : le 7 mai 1965 à la Sainte-Chapelle de Paris par le Domaine Musical sous la direction de Serge Baudo et en présence d’André Malraux ; seconde exécution le 20 juin 1965 en la Cathédrale Notre- Dame de Chartres sous la direction de Serge Baudo et en présence du Général De Gaulle, Président de la République ; troisième exécution le 12 janvier 1996 à l’Odéon-Théâtre de France dans les concerts du Domaine musical, avec l’Orchestre du Domaine musical et les Percussions de Strasbourg sous la direction de Pierre Boulez ; effectif : 2 petites flûtes, 3 flûtes, 3 hautbois, 1 cor anglais, 1 petite clarinette en mi b, 3 clarinettes en si b, 1 clarinette basse en si b, 3 bassons, 1 contrebasson ; 1 petite trompette en

notes de programme | 17 hommage à Olivier Messiaen

ré, 3 trompettes en ut, 6 cors en fa, 3 trombones, 1 trom- bone basse, 1 tuba en ut, 1 saxhorn basse en si b; per- cussions (3 jeux de cencerros, 1 jeu de cloches, 6 gongs, 3 tam-tams) ; éditeur : Alphonse Leduc ; Et j'attends la résur- rection des morts est dédié à la mémoire des victimes des deux guerres mondiales ; chacune des cinq parties de l'œuvre s'appuie sur des citations extraites de l'Ecriture Sainte, relatives à la résurrection des morts, du Christ et à la vie des Corps glorieux qui suivra la résurrection.

A l'origine œuvre de circonstance, donnée en privé lors des deux premières auditions, Et exspecto resur- rectionem mortuorum est devenu rapidement après sa création publique, en 1966, l'une des composi- tions les plus importantes du catalogue de Messiaen. Comme Hector Berlioz pour son Te Deum et son Requiem, Messiaen a choisi l'instrumentation de son œuvre en fonction de sa vocation à la fois religieuse et spectaculaire : « Sa composition instrumentale la des- tine à de vastes espaces : églises, cathédrales, et même le plein-air et la haute montagne... ». Constitué de trois ensembles de bois, de cuivres et de percus- sions métalliques, l'orchestre favorise les effets de résonance et renforce l'idée d'un rituel sacré dans certains alliages de timbres, qui ne sont pas sans rappeler les mixtures d'orgues qu'affectionnait le titu- laire des orgues de la Trinité. C'est dans un même esprit de persuasion et de grandeur que Messiaen a conçu sa partition comme une fresque monumen- tale, hiératique, aux formes évidentes et dans un lan- gage extrêmement dépouillé (thèmes souvent en unisson d'orchestre, homorythmiques, répétitifs, oscil- lant sur des intervalles caractéristiques, etc.). De la première partie qui commence dans l'extrême grave de l'orchestre au choral final lumineux et majestueux, Et exspecto resurrectionem mortuorum se veut le symbole de l'espérance et de la foi en la vie éternelle.

Eurydice Jousse

18 | cité de la musique hommage à Olivier Messiaen par Hans Zender Messiaen et l’esprit « haïku » pour Yvonne Loriod Depuis que je connais les Sept Haïkaï - c’est, de toutes les œuvres de Messiaen, celle que je préfère - je me suis demandé en quoi consistait, pour le com- positeur, leur analogie formelle avec cette forme de poésie japonaise. Superficiellement, bien sûr, cette série de petites pièces de caractères - dont l’unité est créée par la répétition finale de la première phrase - correspond formelle- ment au cas de ces poèmes japonais enchaînés que l’on appelait, dans des temps anciens, haïkaï ou renga, suites lâches de brefs poèmes pleins d’esprit et par- fois d’humour. Le premier poème de la série, nommé hokku, avait une place à part ; c’est lui qui donnait au cycle son atmosphère, qui définissait ses images poé- tiques. Il avait toujours dix-sept syllabes, réparties en trois lignes de cinq, sept et cinq syllabes. Plus tard, ce concentré poétique devint autonome, et on le nomma haïku. Il devint et resta la forme poétique la plus populaire et la plus prisée au Japon. Au cours de sa longue histoire, le haïku s’imprégna de plus en plus de l’influence du zen. Le zen éduque l’esprit à se concentrer sur le présent du vécu immédiat ; la forme instantanée du haïku - qui correspond au temps d’une expiration - se prêtait merveilleusement à réaliser, dans l’art poétique, l’essence même du zen. Trouvons-nous, chez Messiaen, une quelconque ana- logie formelle avec cette répartition en cinq-sept- cinq ? Non. Avec la structure syntaxique ou sémantique, par exemple à travers une hiérarchisation analogue des événements sonores ? Non. L’analogie serait-elle cachée dans un domaine bien plus fonda- mental de la pensée de Messiaen ? Et que pourrait être alors ce domaine, si ce n’est celui de la struc- ture du temps ? Je lis dans La Théorie du Beau au Japon, ce livre extraordinaire d’Izutsu, les remarques suivantes : «L’auteur de waka (le waka est un précurseur du hokku devenu haïku) semble aller à l’encontre de la nature

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profonde de la parole ; car il essaie, à l’aide de mots, de créer un champ synchrone, une extension spa- tiale. Au lieu d’une succession temporelle de mots, au sein de laquelle chaque mot progresse en effaçant pour ainsi dire ce qui le précède, le waka veut créer une vision globale, panoramique, où les mots utilisés sont à considérer tous simultanément. » Un trait typique de la structuration du temps chez Messiaen - et cela est vrai de ses premières œuvres jusqu’aux dernières - est dans la continuité et l’autonomie de chacune des entités temporelles émergeant au sein d’une forme. Contrairement à ce qui se passe dans la tradition bee- thovénienne, ces entités ne se fondent pas les unes dans les autres, ne s’influencent pas mutuellement, ne proviennent pas de la même racine, mais semblent se côtoyer sans former d’unité. Et pourtant, on aurait du mal à trouver d’autres musiques capables de don- ner - qui plus est sur des laps de temps souvent très longs - une telle impression d’unité. l’électronique Dans les années soixante-dix, j’avais demandé un jour à Messiaen quelle était selon lui, pour un jeune com- positeur d’aujourd’hui, la source d’expérience la plus importante. A mon étonnement, il répondit : «L’électronique ». « C’est vous qui dites cela, vous qui n’avez jamais publié une seule œuvre de ce genre ? » répliquai-je. « Je ne parle pas de la produc- tion de musique électronique, mais de deux procé- dés fondamentaux pour la composition et que l’on peut apprendre de l’électronique : le montage et la superposition - c’est-à-dire une nouvelle conception du temps musical. » La superposition d’entités complexes est le principe structurel des Sept Haïkaï. Nous y trou- vons jusqu'à sept strates autonomes et simultanées. Par « autonome », j’entends « qui existe indépen- damment », que ce soit sur le plan de l’instrumentation, de l’harmonie (qui, et c’est un point essentiel, est modale), et des cellules rythmiques, et ce en l’absence de toute superstructure qui permettrait - en tant que préstabilisation harmonique, comme dans les œuvres

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classiques de Boulez et de Stockhausen - de mettre ces strates en relation les unes avec les autres. Avec ce genre de superposition, me demandais-je en ouvrant pour la première fois la partition, quelle iden- tité formelle peut-on encore percevoir ? L’étonnant est que l’œuvre est superbe à l’audition, et qu’elle se livre à l’auditeur comme un déroulement ordonné. Cela tient-il du hasard ? Ou faut-il l’attribuer, sans ana- lyse possible, au « génie » de Messiaen ? l’identité formelle Il est bien impossible, c’est un fait, de comprendre le noyau de ce phénomène selon les stratégies formelles classiques de la logique musicale européenne, même dans son expression la plus pertinente, la pensée de Pierre Boulez. En 1973, celui-ci décrivait la musique de son professeur de la façon suivante : « Si on le compare à un autre « enseignant » d’une importance capitale, Schönberg, on s’aperçoit vite que les points de vue de Messiaen bien qu’insistant sur certains aspects de la réflexion musicale sont loin de présen- ter la cohérence, l’homogénéité qu’on pourrait attendre. Sa position théorique, si tant est qu’elle existe, n’est pas le résultat d’une réflexion détermi- nante sur l’évolution historique du langage musical et sur les conséquences qu’on peut en tirer. Elle est plutôt le fruit d’un éclectisme sévère. » [texte d’une émission de Barry Gavin diffusée à la B.B.C. le 13 mai 1973, cité dans Pierre Boulez, Points de repère, Paris : Christian Bourgois, 1981, p.324] Boulez a montré ailleurs plus de compréhension en décrivant les rapports étroits entre sa propre pensée et celle de Messiaen au cours des années cinquante : la fascination du nombre, de la perfection d’une ratio- nalité se pilotant elle-même (les jeunes compositeurs d’aujourd’hui éprouvent la même fascination pour la complexité et la rapidité croissantes de l’ordinateur). A cette époque, Messiaen, plus rapide que quiconque dans l’extension et la radicalisation des procédés de la musique sérielle, était déjà parvenu à une pensée « en réseau » qui définissait chaque point indépen-

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damment de son contexte linéaire. Mais il lui était impossible, arrivé à ce point de son évolution, de rejoindre le sillage de l’avant-garde de l’époque, dont le but (tout à fait dans la ligne de l’école de Vienne) ne pouvait être que la mise en place d’une systématique musicale cohérente et close. Messiaen, au contraire, cherchait justement une voie qui évitât ces consé- quences ; cette voie, il la découvrit, et c’est ce qui fait aujourd’hui son actualité. chants d’oiseaux Au bout de quelques années d’expérimentation, la pensée « close » que nous venons de décrire semble être apparue à Messiaen comme une prison. Il a raconté comment - c’était quelque part au milieu de sa vie - le chant des oiseaux s’était révélé à lui comme une source possible d’inspiration ; cette découverte fut pour lui une délivrance inouïe. Essayons de com- prendre un peu plus en profondeur cet instant dans l’évolution d’un grand homme et jetons tout d’abord un coup d’œil sur la première grande œuvre écrite par Messiaen après sa rupture - implicite - avec l’Ecole de Darmstadt : le Catalogue d’oiseaux. Lorsqu’on regarde sans a priori le Catalogue, on est d’abord extrêmement surpris de constater que chacune des entités, parfaitement distinctes musicalement, qui composent cette œuvre gigantesque (elle dure presque trois heures), porte un nom. Messiaen avait étudié et transcrit pour le piano, noté sur deux à dix voix, le chant de nombreuses espèces d’oiseaux ; chacune de ces espèces donne son nom à la partie qui lui est consacrée ; d’autres séquences ont pour titre le milieu naturel de ces oiseaux, son « habitat » : désert, mon- tagne, falaises, la mer, la rivière ou encore tout sim- plement « la nuit ». Ce qui semble témoigner, à première vue, d’une puérilité étonnante ou tout au moins d’un maniérisme étrange de la part de l’auteur, se révèle pourtant, si l’on considère de plus près les dif- férences de style et d’écriture, un coup de génie : cette conception permet à Messiaen de confronter, comme par « co-incidence », deux formes musicales

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construites sur des normes esthétiques totalement différentes. Le reflet des saules et des peupliers sur l’eau, les Alpes du Dauphiné, les falaises des Dolomites et leurs découpes fantastiques, la nuit : tout cela prend forme dans un langage musical qui relève complète- ment de l’univers structurel et abstrait des débuts de la musique sérielle ; les chants d’oiseaux, au contraire, avec leur conception harmonique irisante et parfois «tonalisante », avec leur temporalité répétitive, font preuve d’une facture absolument différente ; vouloir la décrire au moyen de critères formels traditionnels mènerait à une impasse, et serait même, à moins de penser de façon très superficielle, impossible. Ce que Messiaen fait ici va infiniment plus loin que l’utilisation, dans une sorte de forme rondo libre, des principes de la répétition et de la variation. Messiaen confère à cha- cune de ses musiques d’oiseaux un principe évolutif différent ; certains oiseaux répètent leurs chants avec une parfaite exactitude, d’autres les amplifient ou les abrègent selon des règles qui peuvent différer énor- mément, d’autres encore y ajoutent des mélodies ana- logues ou nouvelles... Ces principes constitutifs d’ordre individuel sont si précis qu’on n’aurait aucun mal à les entrer comme programmes dans un ordinateur. Ils présentent les formes - dans leurs diverses phases de développement et leurs divers degrés de com- plexité - comme porteuses d’un potentiel de crois- sance quasi organique : comme des formes qui « poussent ». Les structures de type falaise ou mer, ponctuelles, leur font face comme « anorganiques ». une « mosaïque chaotique » Mais ce serait encore trop peu que de constater que Messiaen, dans le Catalogue d’oiseaux, trouve les moyens musicaux adéquats pour figurer des êtres organiques dans le paysage, au sein de leur milieu naturel. Il faut prendre les choses dans l’autre sens et dire que Messiaen donne sa réponse personnelle de compositeur à la situation de son époque en iden- tifiant l’Ecole de Darmstadt comme voie « anorga- nique » de la musique actuelle et en lui opposant sa

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conception nouvelle d’une musique « organique », pour donner de ces deux extrêmes une synthèse for- melle tout à fait innovatrice. Afin de réaliser cette conception le plus plastiquement possible, il a recours, en poète de la musique, à des chants d’oiseaux et à des paysages. Mais cette conception formelle est également complètement novatrice sur un autre plan : Messiaen est le premier, ici, à mettre en place des concepts formels d’ensemble qui ne sont ni basés sur une symétrie comme la forme sonate, les formes du baroque etc, ni ouvertes et asymétriques, sans entités répétées, comme c’est le cas de la musique sérielle. On aimerait parler de mosaïque chaotique ; le nombre de répétitions, pour chaque entité, varie d’une ou deux fois à un nombre très élevé, ce qui donne l’impression globale d’une extrême diversité. Il faut ajouter qu’émergent quelquefois, vers la fin d’un mor- ceau, de nouveaux éléments formels qui évitent à la forme de se refermer sur elle-même dans une symé- trie : on est ainsi parvenu à définir une position médiane entre forme « ouverte » et forme « fermée ». la double temporalité Messiaen ressentait manifestement les chants d’oi- seaux comme l’intrusion spontanée de la nature vivante dans la sphère de l’esprit constructif, parfai- tement conscient de lui-même. J’ai eu l’occasion de lui demander un jour quel grand compositeur euro- péen était le plus important pour lui. Je fus une fois de plus surpris par sa réponse : « Wagner - à cause de ses Leitmotive, qui sont si proches de la nature ». La nature - cela signifie pour Messiaen non seulement le plaisir sensuel de l’écoute, mais aussi le plaisir du chaos. Désormais, dans sa musique, les zones de chaos que représentent les chants d’oiseaux vont constamment se confronter avec des parties com- posées de façon clairement systématique ; le Catalogue d’oiseaux n’est que le début de cette évo- lution. On a l’impression que Messiaen, comme le fera plus tard un scientifique comme Ilya Prigogine, commence à penser au sein de deux temporalités

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différentes : l’une clairement cernable et répondant aux systèmes simples de la physique classique, l’autre non-linéaire et liée avec la situation « interne » des structures temporelles : il devient possible de recon- naître l’âge d’un système et de percevoir ensemble des systèmes d’âges différents ; autrement dit : on observe des systèmes dans leur croissance. Pour le musicien, cette forme de pensée ne signifie pas seu- lement utiliser divers degrés de complexité structu- relle à l’intérieur d’une forme, mais aussi relier des structures d’âges historiques différents. Dans le monde où nous nous trouvons chez Messiaen à par- tir de 1955 environ, qui n’est effectivement plus un monde homogène, nous trouvons comme éléments de son langage musical une foule de « musiques » qui n’ont pas de dénominateur commun esthétique - à commencer par les chants d’oiseaux imités de la nature, mais aussi les rythmes de l’Inde et de la Grèce antique, le choral grégorien, les réminiscences de Debussy et de Liszt, les techniques rythmiques très complexes héritées de Stravinsky et jusqu’aux constructions sérielles des années cinquante. la théorie du chaos Seule la théorie du chaos, qui vit le jour bien après les œuvres majeures de Messiaen, offre une pensée suffisamment complexe pour livrer des modèles ana- lytiques capables de décrire à peu près ce qui se passe dans ces nouvelles configurations formelles. Jetons encore un coup d’œil sur les Sept Haïkaï, et considérons tout particulièrement les passages dans lesquels se superposent quelquefois jusqu'à sept structures musicales autonomes et indépendantes les unes des autres. Comment décrire ce qui se vit dans la perception de l’auditeur ? La recherche sur le chaos n’analyse pas seulement comment les systèmes, à partir de leurs phases linéaires, évoluent vers des états chaotiques tout en produisant des formes toujours nouvelles d’ordre, mais aussi comment diverses sortes de systèmes clos se meuvent « les uns à travers les autres » sans se

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blesser mutuellement. Les « turbulences » de Messiaen sont tout aussi éloignées de l’ordre univoque des stra- tégies classiques que des hasards d’une conception naïve de l’aléatoire. Elles représentent une hyper- structuration, c’est-à-dire qu’elles proposent à l’au- diteur un excès d’ordre. Le résultat en est une pluridimensionalité de la conscience auditive. (On voit ici le lien avec la pensée de Bernd Alois Zimmermann qui, dans ses collages, prolonge l’idée de la simulta- néité du divers, la menant de la « pensée en strates autonomes » (Messiaen) à la « citation de divers styles historiques » - souvent, là aussi, dans la simultanéité.) la stratégie du « montage » La « superposition » est l’une des deux nouvelles stra- tégies de la pensée de Messiaen. Pour étudier la deuxième de ces stratégies - le « montage » - il suffit de se pencher sur les Couleurs de la Cité Céleste, composées à peu près en même temps que les Sept Haïkaï. On trouve ici, sous forme de mosaïque, envi- ron soixante montages faits sur environ vingt entités musicales différentes - remarquons que la fréquence d’apparition d’une entité donnée ne tourne pas, comme on devrait s’y attendre, autour d’une moyenne de trois, mais entre une et douze : une structure « dis- sipative » donc (pour reprendre le vocabulaire de la recherche sur le chaos), bien éloignée de l’équilibre entropique. Messiaen a toujours beaucoup dérangé la « vieille » avant-garde, celle des partisans de la pensée en sys- tèmes clos. Je me souviens d’un concert donné dans le cadre de l’Académie de Darmstadt, au début des années cinquante ; Yvonne Loriod y jouait les Vingt Regards devant un public de « spécialistes » aujour- d’hui chargés d’ans et d’honneurs qui se tenaient les côtes à chaque nouvel accord de fa dièse majeur. On crut voir dans les structures hétéronomes de Messiaen autant de signes de versatilité, de naïveté, d’éclec- tisme, sans du tout remarquer que la réalisation de sa structuration du temps, fondamentalement nou- velle, n’était possible qu’à ce prix. C’est seulement

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lorsque l’on commence par concevoir le noyau struc- turel lui-même comme une pluralité indivisible - et non comme unité rationnelle comme le font la pensée tonale et la pensée sérielle classique - qu’il devient possible de faire sauter la « logique monovalente » de la tradition occidentale. Et c’est justement ce qu’avait fait Messiaen, en quoi on peut le comparer à Cage. la constellation du haïku Nous voici revenus au cœur de l’idée du haïku. Les entités musicales constituent chez Messiaen non pas une unité qui serait le fruit d’un travail dialectique mais une constellation - tout comme les paroles, dans le haïku, représentent un champ synchrone : « On peut dire que dans un champ constitué de cette manière, le temps s’arrête, ou même est aboli, au sens où les significations de tous les mots sont présentes simul- tanément dans une seule et même sphère. » (Izutsu) En cette fin de XXe siècle, Messiaen apparaît comme le musicien qui non seulement a rompu la « domina- tion de la musique allemande » (c’est-à-dire du prin- cipe dialectique, hegelien, de structuration) annoncée par Schönberg, mais a ouvert la pensée musicale européenne, menacée de perfection et de pétrification, à une prise de conscience multiculturelle. Les champs chaotiques auxquels donnent lieu, présents dans presque toutes les dernières œuvres de Messiaen, les chants d’oiseaux, viennent frapper, dans la spon- tanéité du hic et nunc, dans leur pluralité complexe et non-analysable de phénomènes, contre les surfaces longues de ses structures de progression linéaire qui s’ordonnent en merveilleux phénomènes sonores : tout l’ensemble de son œuvre, dans la deuxième moi- tié de sa vie, tient du haïku. Dans les dernières œuvres de Messiaen, la constel- lation formée par les différentes entités structuratrices devient de plus en plus polarité entre la sphère des chants d’oiseaux et celle de surfaces sonores d’une lenteur extrême, toujours plus étirées. Il est intéressant de constater combien ces deux formes se construi- sent différemment : les chants d’oiseaux à partir de

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petites cellules musicales, qui s’agrandissent et se transforment constamment et développent progres- sivement, par l’introduction d’autre types de cellules, un répertoire de signes toujours plus vaste ; les « sur- faces longues » à travers la présentation d’un maté- riau sonore restant identique à lui-même, presque sans addition d’« information », qui par la répétition fré- quente du même, par exemple dans une sphère modifiée au niveau des timbres, amène progressive- ment l’auditeur à cerner, à percevoir comme unités, comme « phrases », des séquences de plus en plus longues. Ces séquences de structure et de progres- sion linéaires perdent de plus en plus, dans le der- nier Messiaen, leur caractère « anorganique » d’origine, sans cependant devenir une image de croissance biologique au même titre que les chants d’oiseaux. C’est d’un état contemplatif qu’il faut parler ici, de la représentation musicale d’une « vision » spirituelle. « Nous sommes conçus de telle manière que nous sommes capables de goûter intensément les contrastes, mais peu les états » : ces mots de Sigmund Freud sont intéressants pour les musiciens. Après avoir entendu Messiaen, on a envie de corriger Freud et de dire qu’il nous faut apprendre à goûter les « états », mais que, lorsque cela nous est acquis, nous goûtons encore plus intensément les contrastes. Ainsi, dans les dernières œuvres, les deux piliers de la musique de Messiaen semblent se construire et s’équi- librer l’un l’autre. « Le poète, maintenant son esprit à une altitude contemplative, se tourne vers la réalité profane de l’expérience. » C’est la définition que donne Basho, éminent auteur de haïkaï, du travail poétique. A peu près un an avant sa mort, je parlais à Messiaen du contraste entre l’hyperrapidité des pulsations de sa musique d’oiseaux et les indications de tempo extrê- mement lentes de ses « surfaces infinies », tout aussi dif- ficiles à réaliser pour l’interprète. « Oui, je sais, les gens se plaignent de ce que je dépasse les mesures humaines, mais peut-être que je ne compose pas du tout pour les hommes, mais pour les anges. »

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Si les chants d’oiseaux symbolisent la nature et les « surfaces longues » l’esprit, ce que suggère Messiaen à travers la dualité immédiate de leur représentation est l’identité entre nature et esprit, vécue musicalement dans le « temps aboli » qui naît de cette représentation.

Hans Zender

(« Messiaen und das Haiku-Denken », Wir steigen niemals in denselben Fluß, Verlag Herder, Freiburg im Breisgau, 1998, p.23- 33 ; traduction Hélène Chen-Ménissier © cité de la musique)

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Olivier Messiaen démarche à la fois religieuse, ornitho- est né en 1908 à Avignon. Après ses logique et ethnologique. Eclairs sur études au Conservatoire de Paris l’Au-Delà est l’avant-dernière œuvre (1919-30) dans les classes de Paul du compositeur qui laisse à sa mort Dukas, de Maurice Emmanuel et de le 27 avril 1992 une œuvre Marcel Dupré, il est nommé titulaire inachevée : le Concert à Quatre, dont du grand orgue de la Trinité à Paris l’orchestration fut terminée par les en 1931. Il enseigne à partir de 1936 soins d’Yvonne Loriod et qui a été à l’Ecole normale de musique et à la créé deux ans et demi après la mort Schola cantorum. De cette période de Messiaen à l’Opéra Bastille. datent les Offrandes oubliées pour orchestre (1930), la Nativité du Seigneur pour orgue (1936), Poème pour Mi pour soprano et piano (1936), etc. En 1940, il est fait prison- nier et compose durant sa captivité en Allemagne le Quatuor pour la fin du temps pour piano, violon, violon- celle et clarinette (1941). Libéré en 1942, il est nommé professeur au Conservatoire de Paris. Parmi les œuvres majeures des années qua- rante figurent Visions de l’Amem pour deux pianos (1943), Vingt Regards sur l’Enfant Jésus pour piano solo (1944), Turangalïla-Symphonie (1946- 48), et Cinq Rechants pour chœur (1949). Plain-chant, rythmes grecs et hindous, chants d’oiseaux, modalité et permutations nourrissent son lan- gage si personnel et lui inspirent des œuvres aussi diverses que Réveil des Oiseaux, Oiseaux exotiques, Catalogue d’oiseaux, Chronochromie, Sept Haï-Kaï, Couleurs de la Cité céleste, Et exs- pecto resurrectionem morturorum, Des canyons aux étoiles. Son opéra Saint François d’Assise (1983) est une sorte de synthèse de sa

30 | cité de la musique hommage à Olivier Messiaen biographies Pierre-Laurent Aimard, Intercontemporain. Au né à Lyon en 1957, il fait sein de cet ensemble, ses études musicales au dont il sera membre pen- Conservatoire de Paris où dant 18 ans, ou il reçoit quatre premiers indépendamment, Pierre- prix. Elève d’Yvonne Laurent Aimard effectuera Loriod, il vit dès l’âge de de nombreuses créations douze ans dans l’entou- et jouera un rôle impor- rage d’Olivier Messiaen tant dans l’interprétation dont il deviendra l’un des des musiques nouvelles ? éminents spécialistes. Il Boulez, dont il est proche complète sa formation et qu’il joue fréquemment, musicale à Londres Stockhausen, Kurtág, auprès de l’élève de mais aussi les jeunes Schnabel : Maria Curcio, George Benjamin et puis à Budapest où il ira Marco Stroppa font partie rechercher les précieux des nombreux composi- conseils de György teurs avec lesquels il a Kurtág. Puis il suivra pen- entretenu une relation pri- dant quatre ans les vilégiée et dont il créera séminaires d’analyse des œuvres. Depuis le musicale sur la musique milieu des années 1980, de Pierre Boulez à l’Ircam. une chance exception- Le premier prix du nelle lui a permis de concours Olivier Messiaen devenir très proche de marque, en 1973, le György Ligeti, au point de début de sa carrière inter- le jouer de façon quasi nationale. Il se produira permanente, de créer et dès lors sur tous les de se voir dédicacer plu- continents, sous la sieurs de ses études pour baguette de chefs tels piano. Parallèlement à que P. Boulez, S. Ozawa, ces activités, il se produit Z. Mehta, S. Celibidache, comme soliste ou cham- C. von Dohnanyi, D. briste dans un répertoire Barenboim, Ch. Dutoit, P. traditionnel très varié ; il a Eötvös, H. Zender, etc. été invité par les Sur l’invitation de Pierre orchestres de Chicago, Boulez, il devient à l’âge Cleveland, Boston, San de 19 ans pianiste-soliste Francisco, Londres de l’Ensemble (Philharmonia)

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Amsterdam l’auditeur. Ainsi, au cours une année d’étude à la (Concertgebouw), Saint- de la saison 1994-1995, il VIlla Massimo de Rome Petersbourg, Berlin, a présenté à Lyon et à avec Bernd Aloïs Dresde, Hambourg Paris un panorama du Zimmermann et devient (NDR), Paris, et accueilli piano du XXe siècle ensuite chef d’orchestre à par les festivals de incluant 24 œuvres de l’Opéra de Bonn. De Salzbourg, Berlin (Berliner styles différents en huit 1969 à 1972, il est direc- Festwochen), Triennale de concerts-lectures. Il a teur musical à . De Cologne, Lucerne, récemment donné une 1971 à 1983, il est pre- Tanglewood, Festival série de six concerts- mier chef d’orchestre de d’Automne à Paris. conférences au Havre, l’Orchestre Symphonique Pierre-Laurent Aimard Lyon (Opéra) et Paris de la Radio de la Sarre considère comme indis- (Radio-France) sur le avec lequel il fait des tour- pensable de mener thème : « Le piano en nées dans le monde parallèlement aux activités relations », présentant entier. En 1984, il est de concertiste celles de des œuvres de J. S. Bach nommé directeur musical pédagogue : outre un à Marco Stroppa, du duo de l’opéra de Hambourg, enseignement régulier au piano-violon au concerto fonction qu’il occupera Conservatoire de Paris, il pour piano avec jusqu’en 1987. Depuis a été invité à donner des orchestre. Il continue en 1988, il est professeur de Meisterkurse par des ins- outre d’enregistrer pour la composition à la titutions comme la chaîne de télévision ARTE Musikhochschule de Hochschule de Cologne, une série d’exécutions Francfort. Hans Zender a le Conservatoire Royal de commentées filmées dirigé régulièrement l’or- La Haye, le Conservatoire consacrées à de grands chestre Philharmonique national supérieur de compositeurs contempo- de Berlin et collaboré aux Lyon, l’Académie de rains - le premier numéro Festivals de Bayreuth, Budapest, etc. En outre, de cette série, consacré à Salzbourg, Berlin et une présence active dans Boulez, ayant été accueilli Vienne. Parmi ses nom- les cours d’été l’a amené avec grand succès. breuses compositions à enseigner à Avignon notons, Litanei, pour trois (Centre Acanthes), Kyoto, Hans Zender violoncelles ; Hölderlin Como et Szombathély. est né en 1936 à lesen I-III, pour quatuor à Soucieux de la formation . Après des cordes ; Zeitströme, pour du public, il réalise des études de composition, grand orchestre, Dialog séries de concerts com- de direction d’orchestre mit Haydn, pour deux pia- mentés où il présente et de piano à Francfort et nos et trois groupes lui-même des œuvres du Fribourg, il devient chef d’orchestres, Canto I-VIII, XXe siècle afin de rendre d’orchestre du Théâtre de Muji No Kyo, pour voix et ces styles plus familiers à Fribourg. En 1963, il suit instruments, Loshu I-VII,

32 | cité de la musique hommage à Olivier Messiaen pour ensemble et de Salzbourg, Mai Robertson. Chargé d’as- , opéra en Florentin), Afrique du surer la diffusion de la trois actes, Don Quijote Nord, Extrême-Orient, musique de notre temps, « 31 aventures du Amérique. Il entre à l’Ensemble donne environ théâtre », Shir-Hashirim, l'Ensemble soixante-dix concerts par en quatre parties, pour Intercontemporain en saison en France et à solistes, chœur, orchestre 1992. Son répertoire l’étranger. En dehors des et électronique. Hans comprend entre autres, le concerts dirigés, les musi- Zender est membre de Concerto pour piano de ciens ont eux-mêmes pris l’Akademie der Künste de György Ligeti, Oiseaux l’initiative de créer plu- Berlin et de la Bayerische exotiques et Un vitrail et sieurs formations de Akademie de Munich. Il des oiseaux d’Olivier musique de chambre reçoit en 1977 le Messiaen, Répons de dont ils assurent la pro- Musikpreis de la ville de Pierre Boulez, La Partition grammation. Riche de Francfort et le du ciel et de l’enfer de plus de 1600 titres, son Goethepreis. Il est égale- Philippe Manoury, répertoire reflète une poli- ment l’auteur de Happy Klavierstück IX de tique active de création et New Ears et Wir steigen . Il comprend également des niemals in denselben crée Incises de Pierre classiques de la première Fluß. A partir de 1999, il Boulez en 1995 et parti- moitié du XXe siècle ainsi sera nommé co-directeur cipe à la création de sur que les œuvres mar- et chef invité permanent Incises pour trois pianos, quantes écrites depuis de l’Orchestre trois percussions et trois 1950. Il est également Symphonique de la SWF. harpes de Pierre Boulez actif dans le domaine de en août 1998 à la création faisant appel Dimitri Vassilakis Edimbourg. aux sons de synthèse Né en 1967, il commence grâce à ses relations privi- ses études musicales à Ensemble légiées avec l’Institut de l'âge de 7 ans à Athènes, Intercontemporain Recherche et sa ville natale, et les pour- Résident permanent à la Coordination Acoustique suit au Conservatoire de cité de la musique. Fondé Musique (Ircam). Depuis Paris, auprès de Gérard en 1976 par Pierre son installation à la cité Frémy. Il obtient un pre- Boulez, l’Ensemble de la musique, en 1995, mier prix de piano à Intercontemporain est l’Ensemble a développé l'unanimité, ainsi que des conçu pour être un instru- son action de sensibilisa- prix de musique de ment original au service tion de tous les publics à chambre et d’accompa- de la musique du XXe la création musicale en gnement. Dimitri siècle. Formé de trente et proposant des ateliers, Vassilakis se produit en un solistes, il a pour direc- des conférences et des soliste en Europe (Festival teur musical David répétitions ouvertes au

notes de programme | 33 hommage à Olivier Messiaen public. En liaison avec le Jean-Jacques Gaudon musiciens supplémentaires Conservatoire de Paris, la cité de la musique ou trombones flûtes dans le cadre d’acadé- Jérôme Naulais Stéphane Leclerc mies d’été, l’Ensemble Benny Sluchin Pascale Guidot met en place des ses- Agnès Weislinger sions de formation de tuba jeunes professionnels, Gérard Buquet hautbois instrumentistes ou com- Corine Jobard positeurs, désireux percussions Christophe Grindel d’approfondir leur Vincent Bauer Jean-Pierre Arnaud connaissance des lan- Michel Cerutti gages musicaux Daniel Ciampolini clarinettes contemporains. Isabelle Duthoit pianos/claviers Yannick Herpin flûtes Florent Boffard Sophie Cherrier Hidéki Nagano bassons Emmanuelle Ophèle Dimitri Vassilakis Marc Trenel Lionel Bord hautbois harpe László Hadady Frédérique Cambreling cors Didier Pateau Stéphane Peter violon Cyrille Grenot clarinettes Jeanne-Marie Conquer Jérôme Rouillard Alain Damiens Hae Sun Kang David Harnois André Trouttet Maryvonne Le Dizès trompettes clarinette basse altos Bruno Tomba Alain Billard Christophe Desjardins Dominique Collin Odile Duhamel bassons trombones Pascal Gallois violoncelles Christophe Gervais Paul Riveaux Jean-Guihen Queyras Jean-Pierre Moutot Pierre Strauch cors tuba Jens McManama contrebasse Sébastien Rouillard Jean-Christophe Vervoitte Frédéric Stochl percussions trompettes Stéphane David Antoine Curé Gianny Pizzolato

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Yannick Paget principes de programma- Scarpa architetto de tion des orchestres du Nono, Mémoire vive de violons Conservatoire sont Hurel et Du lieu même qui Jacques Ghestem simples : faire aborder aux n’est qu’un rêve de Hélène Houzel étudiants des chefs- Durieux. Florence Berdat d'œuvre de périodes et de styles variés, avec les flûtes Orchestre du meilleurs spécialistes Catherine Goodman Conservatoire de Paris actuels : pour la saison Ute Koch La participation des étu- 1998/1999, Pascal Marie Leyval diants du Conservatoire à Rophé, Olivier Reboul, diverses manifestations Jens McManama, Jan hautbois publiques fait partie inté- Talich, Jean Mouillère, Nicolas Bens grante de la scolarité. Il Johannes Leertouwer, Alexandre Gattet est en effet nécessaire Jos van Veldhoven, Denis Simonnet qu'un instrumentiste Renato Rivolta, Hans puisse au cours de ses Zender, Leon Fleisher, clarinettes années d'apprentissage Shlomo Mintz, David Elodie Chaillou pratiquer la musique Robertson et Janos Fürst. Gilad Harel d'ensemble sous toutes Les étudiants auront ainsi ses formes - de la abordé des œuvres aussi clarinette basse musique de chambre à diverses et essentielles Jean-Sébastien Court l'orchestre symphonique que La Passion selon en grande formation - et Saint Matthieu de Bach, bassons acquérir l'expérience de la la symphonie Jupiter de Julien Hardy scène. Les orchestres du Mozart, Pelléas et Arnaud Lommis Conservatoire sont Mélisande et La Mer de Yannick Mariller constitués à partir d'un Debussy, La Nuit transfi- « pool » de plus de 500 gurée et Erwartung de cors instrumentistes, qui se Schoenberg, la Pierre-Yves Bens réunissent en des forma- Symphonie n°2 Cédric Berger tions variables, par ses- « Résurrection » de David Defiez sion, selon le programme Mahler, Hymne et Les Reynald Parent et la démarche pédago- Offrandes oubliées de gique retenus. Les ses- Messiaen, Un Américain à trompettes sions se déroulent sur des Paris de Gershwin, Jean-François Dewerdt périodes de deux à trois Odhecaton de Maderna, Marc Geujon semaines, en fonction de les Variations canoniques Vincent Mitterrand la difficulté et de la lon- sur un thème de gueur du programme. Les Schoenberg, A Carlo

notes de programme | 35 hommage à Olivier Messiaen trombones altos Alexandre Chapelet Fumiko Aoki Nicolas Lapierre Cyril Bouffies Cécile Brossard trombone basse Jean-Christophe Garzia Laurent Père Elodie Guillot Stéphanie Lalizet percussions Dorothée Leclair Renaud Muzzolini Lucia Peralta technique Yannick Paget Hélène Platone Blandine Quincarlet cité de la musique violons salle des concerts Roland Arnassalon violoncelles Christophe Gualde Marina Chiche Stéphane Binet régie générale Amaury Coeytaux Pablo De Naveran Jean-Marc Letang Sandrine Devot Renaud Guieu régie plateau Delphine Douillet Maarten Jansen Roland Picault Virginie Dupont Camilo Peralta régie lumières Benjamin Fabre Aurélien Sabouret amphithéâtre du musée Eliad Florea Isabelle Saint-Yves Olivier Fioravanti Marie-Laure Goudenhooft Sébastien Van Kuijk régie générale Jean-Christophe Grall Pierre Mondon Karine Hayot contrebasses régie plateau Harold Hirtz Jean-Olivier Bacquet Jean-Laurent Parisot Lyodoh Kaneko Thomas Garoche régie lumières Marc Lemaire Frédéric Jaffre Jérôme Merlet Nicolas Lehembre Ensemble Claire Michelet Jean-Baptiste Sagnier Intercontemporain David Naulin Xavier Serri Jean Radel Marie Nonon régie générale Axel Schacher Damien Rochette Karine Schaeffer Philippe Jacquin Naaman Sluchin régie plateau Julien Sol Romuald Toigo Conservatoire Diego Tosi de Paris Vanessa Ugarte Didier Belkacem Caroline Vernay régie générale Tony Scheveiler régie plateau

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