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Diabelli – Samedi 19 novembre 2016 Orchestres en fête : Ludwig van (2) Le mythe Beethoven commença d’être élaboré dès avant sa mort. Un enterrement en grande pompe plus tard, les générations à venir pouvaient continuer de bâtir une légende où chacun allait puiser. Ce parcours où s’entrecroisent la musique, la vie et la postérité de Beethoven est au cœur de l’exposition Ludwig van. Le mythe Beethoven, et il trouve son prolon- gement dans deux cycles de concerts. Après un premier cycle « tout Beethoven » (ou presque), le week-end « Orchestres en fête » est l’occasion de proposer aux auditeurs une nouvelle expérience Beethoven. Cette fois, l’accent est mis sur la descendance musi- cale du compositeur, en une démarche d’aller-retour entre œuvres originales et échos artistiques. On y entend ainsi des symphonies (la Neuvième par l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg, la Septième par l’Orchestre de Picardie), des concertos (le Triple Concerto par Tugan Sokhiev et l’Orchestre du Capitole de Toulouse, le Concerto pour piano n° 5 par Enrique Mazzola, Louis Lortie et l’Orchestre National d’Île-de-France – un spectacle avec vidéo destiné aux familles – ou par Paul Daniel, Nicholas Angelich et l’Orchestre National Bordeaux-Aquitaine, le Concerto pour piano n° 0 par Alexandre Bloch, Alexei Lubimov et l’Orchestre du Conservatoire de Paris) ou des pièces orchestrales diverses. Contemporains ou successeurs de Beethoven y prennent leur place, tel Brahms dont le XIXe siècle finissant voulut absolument faire l’héritier du compositeur en matière symphonique (Symphonie n° 4 par l’Orchestre du Capitole et Tugan Sokhiev). Mais ce week-end qui réunit la fine fleur des orchestres français est aussi l’occasion de montrer comment Beethoven nourrit les expériences de la modernité. Le monument des Variations Diabelli continue d’inspirer les musiciens du XXIe siècle : Jean-François Heisser le montre en interprétant les Veränderungen de Philippe Manoury et les 33 Variations sur 33 variations de Hans Zender. Dutilleux, lui, rebondit – après Milan Kundera – sur la fameuse question « Muss es sein? » posée par le Quatuor n° 16 pour une courte pièce orchestrale, tandis que la Symphonie « Eroica », qui « incarne une nouvelle époque de l’esprit du monde » selon Hugues Dufourt, se reflète dans l’Ur-Geräusch du compositeur spectral. Bernard Cavanna, Takashi Niigaki ou Brett Dean complètent le panorama, sans oublier bien sûr Mauricio Kagel et sa « promenade dans la tête de Beethoven » de 1969, Ludwig van. 3 SAMEDI 19 NOVEMBRE 2016 – 14H30 AMPHITHÉÂTRE – CITÉ DE LA MUSIQUE Diabelli Ludwig van Beethoven Variations Diabelli Philippe Manoury Veränderungen Jean-François Heisser, piano Ce concert s'inscrit dans le cadre d’Orchestres en fête, une initiative de l’Association Française des Orchestres. ASSOCIATION FRANÇAISE DES ORCHESTRES AFO FIN DU CONCERT VERS 16H. 5 6 Ludwig van Beethoven (1770-1827) Trente-trois variations sur un thème de valse d’Anton Diabelli en ut majeur op. 120 Thème. Vivace Var. 1. Alla Marcia maestoso Var. 2. Poco allegro Var. 3. L’istesso tempo Var. 4. Un poco più vivace Var. 5. Allegro vivace Var. 6. Allegro, ma non troppo e serioso Var. 7. Un poco più allegro Var. 8. Poco vivace Var. 9. Allegro pesante e risoluto Var. 10. Presto Var. 11. Allegretto Var. 12. Un poco più moto Var. 13. Vivace Var. 14. Grave e maestoso Var. 15. Presto scherzando Var. 16. Allegro Var. 17. L’istesso tempo Var. 18. Poco moderato Var. 19. Presto Var. 20. Andante Var. 21. Allegro con brio – Meno allegro Var. 22. Allegro molto alla « Notte e giorno faticar » di Mozart Var. 23. Allegro assai Var. 24. Fughetta. Andante Var. 25. Allegro Var. 26. Allegretto Var. 27. Vivace Var. 28. Allegro Var. 29. Adagio ma non troppo Var. 30. Andante sempre cantabile Var. 31. Largo, molto espressivo Var. 32. Fuga. Allegro Var. 33. Tempo di Menuetto, moderato (ma non tirar si dietro) 7 Composition : commencée en 1819 (23 variations) ; achevée fin 1822-début 1823, après une interruption de trois ans. Dédicace : Antonie Brentano. Création : pas de création publique connue du vivant du compositeur. Première publication : 1823, sous le titre Veränderungen über einen Walzer für das Pianoforte. Durée : environ 60 minutes. Commencé en 1819 pour être terminé en 1823, le cycle des Variations Diabelli fut – avec les Bagatelles op. 126 – la dernière œuvre de Beethoven consacrée au piano. Les proportions monumentales de ce cycle étaient imprévisibles puisque, quand l’éditeur Anton Diabelli proposa à plusieurs compositeurs un thème de valse à varier, Beethoven refusa tout d’abord cette idée, pour ensuite se laisser aller à griffonner quelques esquisses, puis de véritables variations. Les deux tiers de celles-ci furent esquissées dès 1819, mais l’auteur s’interrompit brutalement, en 1821, pour terminer la Missa Solemnis, ses trois dernières sonates pour piano et l’ouverture La Consécration de la maison. Il revient à son cycle de variations au cours de l’hiver 1822-1823. Les Trente-trois variations effraient tout d’abord Diabelli, mais celui-ci perçoit vite l’importance de l’œuvre qu’il compare aux Variations Goldberg de Bach. Il se décide alors à les publier en 1823 en même temps que les variations rendues par les autres compositeurs. Dans son édition, une partie rassemble les variations de compositeurs comme Schubert, Czerny, Liszt, Hummel, Kalkbrenner, Moschelès, Mozart fils, tandis que l’autre demeure entièrement consacrée à celles de Beethoven... Ces dernières se présentent sous forme de cycle, mais ressemblent davantage à une succession de facettes contrastées dont la logique ne répond pas à l’amplification habituelle d’un thème initial. L’aspect constructif de la variation (ajouts, ornementation) laisse plutôt la priorité à la déconstruction. La première variation en est un parfait exemple puisqu’elle lamine littéralement le thème de Diabelli au lieu de l’orner ou de le paraphraser. Après le coup d’éponge jeté sur ce qui n’était en fait qu’un prétexte, la logique des enchaînements tient de l’opposition (des styles, du tempo ou des tonalités) plus que de l’unité. Les variations 2 à 10 forment une première phase où les recherches rythmiques alternent avec l’isolement de figures librement développées. Les variations 11 à 23 enchaînent ensuite des séquences lyriques (var. 11-12) à d’autres, qui morcellent le discours par une déstabilisation des harmonies du thème (var. 18). Le thème voit même son contour mélodique entrer en concurrence avec un nouveau thème, celui du premier air de Leporello dans 8 le Don Giovanni de Mozart, cité dans la variation 22 de manière reconnais- sable et franchement parodique. Les variations 24 à 28 sont, quant à elles, d’une écriture légère et virtuose, en contraste avec le dernier groupe de variations (29 à 33) qui introduit le mode mineur, le contrepoint savant (double fugue de la variation 32) et même un ultime hommage au classicisme de Mozart et Haydn (variation 33). Le cycle se termine en laissant l’impression d’un immense kaléidoscope d’états contrastés, mêlés quelques fois contre leur gré, et dégageant des frottements une tension typiquement beethovénienne qui s’ingénie à détourner le prévisible et à se distancer des modèles. Mais fallait-il s’en étonner alors que le titre portait déjà la mention de Veränderungen, c’est-à-dire d’« altération », autant dans le sens de « note altérée » que celui de « thème altéré » ? La variation prend donc, dans ce cycle, une dimension particulière qui tend à souligner les liens qui unissent chez Beethoven l’acte de création et l’acte de destruction. Comme si créer devait forcément passer par une lutte contre un élément donné, lutte dont l’auditeur pourrait sentir toute la distance prise pour s’en éloigner et tirer de cette tension une émotion. Emmanuel Hondré 9 Philippe Manoury (1952-) Veränderungen Commande : Musée du Louvre. Composition : 2006. Dédicace : à Christian Labrande. Création : le 7 mars 2007 à l’Auditorium du Musée du Louvre par Jean-François Heisser. Editeur : Durand. Durée : environ 20 minutes. Veränderungen est une commande du Musée du Louvre, écrite pour une série de manifestations consacrées aux Variations Diabelli de Beethoven. Le titre se réfère directement à celui que Beethoven inscrivit en tête de sa partition lors de sa première édition. Car si ce monumental cycle pour piano est connu sous le nom de Variations Diabelli, Beethoven lui donna celui de Drei-und-dressig Veränderungen über ein Walz von Anton Diabelli opus 120. Sans doute conscient du pas gigantesque qu’il venait de franchir dans cette forme de composition, fidèle aussi à sa volonté d’exprimer ses indications musicales dans sa propre langue et non plus dans l’italien de convention, et peut-être aussi voulant se démarquer nettement des petites piécettes qui devaient être composées sur ce même thème, Beethoven décida de ne pas les appeler « variations », mais « Veränderungen » qui signifie « transfor- mations » ou « modifications ». Mais le commun des mortels, toujours prompt à la classification et aux rangements d’étagères, en faisant la sourde oreille à cette nuance, a continué (et continue toujours) à lui donner une magistrale leçon de surdité ! En me confrontant aux « Diabelli » de Beethoven, mon intention n’était bien sûr pas de reprendre ce qui fait la géniale singularité de cette œuvre, quand bien même on pourrait la définir. Certes, à l’analyse, on peut suivre l’incroyable pensée déductive qui l’a amenée à imaginer tant de formes d’expressions, de caractères, de complexité structurelle, de richesses harmoniques et polyphoniques à partir d’une simple petite valse. Beethoven annonce tout à la fois Chopin, Schumann, Brahms, Liszt, Wagner, et même Schönberg et Webern dans ses « Diabelli ». Toutes ces catégories sont cependant chargées d’un poids historique tel qu’elles ne sont d’aucune utilité pour la création, à moins de tomber dans une posture post-moderne, 10 ce que je me suis toujours refusé à adopter.