LX'ENSENHAMEN DANS LA LITTERATURE MGDEVALE EN LANGUE D'OC

Le FEW enregistre ensenhamen sous Pétymon insignare qni rem- place en latin vulgaire la forme classique insignire. Raynouard traduit ensegnamen, ensenhamen, enseignamen, essegna- men, essenhamen par "enseiguement, instruction, éducation, politesse" l. Levy signale, quant A lui, cinq sens différents:

1) Unterwelsung, Lehre. Inshiction, enseignement. 2) Unterwehug (als Bezeichnung e. didakt. Gedichtes). Instniction (en relation avec un pobe didactique). 3) Wohlerxogenheit, (gute) Lebemart. (Bonne) maniere de vivre. 4) Weisheit. Samse. 5) Beweisstiicke. Preuve, piece justificative (dans le langage judiciaire) a. Walter von Wartburg reprend sans autre forme de prochs les con- clusions de Levy:

précepte moral; bonne éducation; bonnes manieres; sagesse; espece de poesie 3.

Le glissement sémantique est obvie: du sens premier d'"instmction", on assiste A Pévolution vers "un pohme d'instruction" qui expose le plus souvent "un art de vivre" pour aboutir A une certaine "sagesse". En ce qui nous conceme, Pensenhamen désigne un pohme didac- tique qui expose une maniere d'etre ou de vivre. Si le mot est bien attesté dans ce sens4, il faut reconnaltre que les Arts poétiques en langue dóc, généralement si diserts, ne font aucune part A i'ensenhamen ' comme genre littéraire 6. Ni les Leys d'amor, ni la Doctíina de com-

1. LR, t. 5, p. 229, rous 23. 2. SW, t. 3, pp. 32-33. 3. FEW, t. 4, p. 712. 4. Mais A une dpoque tardive, voir A ce sujet fnfra. 5. Gatien-Amoult. Marmmenta de En littkroture rornane, Tonlouse, 1841; P. Meyei, in Rmn., t. 6, 1877, p. 343. 20 FRANGOIS PIROT. -RECHERMEC SUR L!S CONNAXSSANCES LI'XTÉRAIRES pondre dictatz, ni les autres codifications tardives des regles poétiques n'envisagent Pensenhamen. Les vidas sont également muettes A ce

Avant d'envisager les poemes eux-memes, il convient de rassembler les divers travaw consacrés au problbme. . Pour la bibliograpliie antérieure A 1904, il suffit de se reporter a la bonne th&e de Wilhehn Bohs qui résume avec précision et clarté les quelques rares remarques concemant le sujet formulées par les éru- dits du xnre siecle. Dans la plupart des cas, il s'agit de tentatives de définition -trbs fugitives- dans des traités cl'ensemble sur la poésie en langue d'oc. Pour ne pas gonfler abusivement ces pages, nous croyous pouvoir entreprendre notre enquete partir de celle de Wilbelm Bohs - qui, le premier A notre connaissance, s'est- penclié sur l'ensenhamen en tant que te17. Cette monographie a suscité aussitut une breve mais substantielle mis'e au point d'un autre érudit allemaud, J. Bathe8, qui préparait un petit travail critique consacré aux ensenhanaens moraux. Ce début de sibcle est marqué par une intense activité consacrée A la littérature didactico-courtoise. Ramiro Ortiz étudia les rapports éntrele Reggimento de F. da Barberino et la littérature des ensenlia- mens lo. Ce travail est maintenant totalement dépassé par les travaw contemporains sur le poete italien et, surtout, par I'édition de G. E. San- sone que nous signalerons plus loin. Ensuite, on doit a Alice A. Ilentsch, une Suissesse formée A Cam-

6. J. Boutiere et A. H. Schutz, Biographies des troubadouvs, Paris, 1.964, p. 609. En francais, on vena Godefroy, t. 3, p. 231: "connaissa~ice,preuvc, avis, conseil, insti- gation; charte, acte, titre, piece authentique; passeport, assignation; insigne; sagesse"; et t. 9, pp. 477-4613; Tobler, t. 3*, p. 515: "Untenueisung, Ausweizung, Lehre; ate Sitte, Bildung"; Du Cange, t. 3, 52: "Ratio, argumentum, probatio in litigiis"; Gamills&gz, p. 374. Le mor dans le sens pravencsl est bien connu des poCtcs de I'dcole sicilienne (on "erra, $ ce sujet, B. Panvini, Le rime della smo7a siciliano, Florence, 1962, au glossaire, t. 2). 7. W. Bohs, Abril issi'e mogs intraua, úi RF, t. 15, 1904, pp. 204-215. 11 s'apit de l'introduction $ l'édition de Pensenhamen au jongleur da ReUnon Vida1 de Besalú. 8. J. Bathe< Del Begriff des "provenlia2is:isched' Ensenhamen, in ASNSL, t. 113, 1904, p. 394. Ajoutons toutefois que le mot ensenhomen-insagtiarnento avait déjA été introduit avant Diez par Galvani, Ossamazioni sulln poesia dei trovatori, Modhiie, 1829, p. 257. Ce dernier emploie tontefois ooocurremment le terme de conte. 9. J. Bathe, Die moralkiachen Ensenhomns ini Altprovenzazischen. Ein Beitrae zur Ersiehungs uid Siftengeschichte Südfrankre

11. A. A. Hentsch, De la 1ittérottii.e didocfique dti moyen Bge s'adressont spdoia- lement auz femmes, Cahors, 1903 (thbse de Halle sur Snale), 279 pages. On veme kgals ment le cornpte rendu, Zune sév4rité un peu injustifike, dO h P. Meyer in Rom., t. 33, 1904, PP. 313-314. 12. A. Parducci, Costmi oroti. Studi sugli insegnnmenti di cartigiana medieoali, Bologne, 1928; voir le cornpte rendu d'A. Jeanroy, dans Roni., t. 54, 1928, pp. 550-551: "On regrette ties vivement que M. P. n'y ait point joint les textes, dhent amendks et comment4s. 01,ne possede en effet de trois Centre-eux que des éditions mediocres et an re&e fort rares," 13. C. Brunel, Les easeigi~emeirts de c~i

S didactique contemporaine du Doctrinal Sauvage qu'il éditait. Ces quel- ,, ques notes peuvent servir de base A une étude du courant didactique .. . ., en général19.

- 3. RECENSION,ANALYSE m COMMENTAI~DES P~~~~m~~~~~" EN WGUE D'OC (LISTE DE BRUNEL-FRANK).

Comme nous i'avons souligné plus haut, la notion d'ensenhamen a 6té comprise de diverses manieres par la critique, car les traités de poétique n'en donnent pas de définition. 11 nous a paru bon de re- prendre la liste la plus complete, en leccurrence ceííe proposée par _ Clovis Brunel et István Frank, quitte A rejeter un certain nombre de ces pot3mes 20. AU départ de eette liste, nous avons entrepris une analyse détaiiíée 21 pour déterminer certains traits caractéristiques du genre lit-

1958, PP. 30-32; C. Battisti, Ossetvozioni e corredoioni ad uno recente edizionc del 'Rsg- gimento e costumi di donna", Modhne, 1959; L. Caretti, iii Litteroture Moderne, t. 9, 1958, PP. 93-99. 16. M. Boni, Sordeilo. Le poesie, Bologne, 1954, pp. cutvi-c~xxvret 198-273. 17. J. Salvat, Dictiannaire des tenres frangoises, Paris, 1964, pp. 258-260, qui renvoie J. Anglade, Le troubadour Giraut Riquiei, Peiis-Toulouse, 1905, pp. 132136; du mhme, Les troubadours de Toulouse, Taulouse-Pnris, 1928, pp, 188.192: du mhe, Hlstoire sommaDre de la Zinérature méridionole ou mayen Age, Paris, 1921, pp. 177-184; A. Jeanroy, Histoiís sommoire de la poésis occitone, Paris, 1945, pp. 81-85. 18. C. Segre, Le foms a le tradizconi didatfiche, in GRLMA, Heidelberg, 1968, t. 6, premiere partie, pp. 90-96. 19. A. Sakari, Le Doctrinal Sauoage, Jp%skylii, 1967, introduction. 20. C. Brunel, Bibliogrnpkie des nlonvscrits IittÉv~ives en ancien provencol, Paris, 1935, P. 120, et f. Frank, Répertoire métriqus de h podsie des troubadoitrs, Pwis, 1957, t. 2, pp. 209-210. 21. 1. AMmu DE SESCARS(P.-C., 21 a) e~tun traubadoui cstslan (voir 1. Cluzel, Amo- nieu de Sescars, troubo&ut catakwz?, in RFE, t. 42, 1958-1959, pp. 270-278, DES TROUBADOURS OCCITANS ET CATALANS DES XIIe El' XIII? s~cLFS 23 téraire. Nous avons donc envisagé, pour chaque pohme, certains points qui nous paraissent importants: l'origine du troubadour, la date, la ru- brique, le destinataire, la forme, la désignation de son oeuvre par le poete lui-mame, le contenu. Nous verrons donc, an terme de Panalyse, si certaines constantes se

et M. de Riquer, HLC, t. 1, pp. 186-193) qui composa entre 1278 et 1295. 11 est l'auteur de deux ensenhomens: 1 a. El temps de nodolor, composé avant 1291. -rubrique: Alsso es l'ense$&amen del escudier que fe aqsiel meteis dieu d'amors. - destinataire: un escudier (VV. 304 et 320) mais aussi un donzel. -manuscrit: R (147). -forme: 472 vers de 6 syllabes Q rimes plates. -le mot enssnhameia figure au v. 35 mair ne parait pas dksigner le ge& littéraire. - contenu: conseils d'un pokte i un escudier paur que ce dernier puisse btre digne d'amour. Les coiiseils sont multiples ot d'ordre divers. - éditions completes: K. Bartsch, Denkdler der prousnzolischen Litteratur, Stuttgart, 1856, pp. 101-104; M. Milá, De los t?ovodo?es en España, Baice- lone, 3' éd., 1966, pp. 379385; traduction italienne dans A. Parduoci, Cos- tumi mrtati, pp. 273-283. - Bibliographie antérieure: Bobs, p. 208; Parducci, PP. 27-34; Snnsone, pp. 47- 50; maintenant GRLMA, t. 6 (21, no 2720. 1 b. Ea aquel mes de mai, composé entre 1291 et 1295. -rubrique: Aisso es Pessenhaman de lo doníelo CEti Amanieu de Seseas. - destinatairei une donzelo. - manuscrit: R (146). -forme: 686 vers de 6 syllahes $ rimes plates. -le mot snscnhameit figure également au v. 103, mais "le teme indique le con- tenu de cet ensenhamen, non pas le genre", affirme avec raison Segre (dans GRLMH, t. 6 (2). no 2716). - contenu: conseils demandé3 au poete par une jeme fiile pour connaEtre la manikre de bien vivre. Les conseils prodigues par le poete sant multiples: le vetement, les soins du eorps ... - éditions compl&tes: K. Bartsdi, P~ovcnsnlisches Lesebuch. Elberfeld, 1855, pp. 140 et sv.; M. Mil& Da los trooodares, Barcelone, 3' éd., 1966, pp. 388-397; tiaduction italienne par A. Parducci, op. cit., pp. 233-250. - Bibliographie: Bohs, p. 212; Parducci, p. 24; Hentsch, PP. 94-97; Sansane. pp. 43-47; GRLMA, t. 6 (2), no 2716. 2. AXNA~TGUILLEM DE MARSAF,houbadour pascon attesté vers 1170 (vok R. Le- jeune, Lo dote de I'e~eerúloiiiend"Amntlt Guillen de Morsan, in SM, t. -12, 1939, pp. 160.111). Cenare Seere se fonde encore sur une datatian ancienne (6x1 srre-début siiic) qui ne doit plus &re retenue. Qui comte ool apendre. -rubrique: Eiisenharnen d%n Air~out Guillem de Mnrsan. - destinataire: un cauayei. - manuscrit: R (133). -forme: 629 vers de 6 ñyllabes rimes plates et un hiac (amen). -le mot ensenhomen figure aii dernier vers et le mot conte au memier. - contenu: conseils du pdte A un ieuno chevalier pour gagner I'arnour d'une dame: a~onun aspect entérieur a~réable,&re généreur,. soimer. son ésui- pcment.. . - éditions completes: K. Bartsch, Prouenzalisches Lcseliuch, Elbe~feld, 1855, PP. 138 et sv.; trnduction italienne d'A. Parducci, Coslrirni ontati, pp. 251-273. -Bibliagrnphie: Bolis, pp. 206-207; Parducci, pp. 24-26; Sansone, pp. 3439; GRLMA, t. 6 (Z), n.O 2728. 3. An~nm»E Mniinurr. (P.-C., 30), troubadour pkrigourdin de la fin du xne sikcle, 22 FBANWlS PiñOT. - RECHERCHES SUR LES CONNAISSANCFS LI~~ÉBAI~IES

-, 021 seront rassemblés de maniere e& accesible les divers ensenhamens de courtoisie en langue d'oc. En 1954, Marco Boni, dans son excellente édition des poemes de ' Sordello, a, en une dizaine de pages, précisé la place de l'epenhamen -8oonor du troubadour italien dans l'ensemble des.productions poétiques du meme type le. En 1964, le chanoine Joseph Salvat consacrait dans le Dictionnaire .des lettres francaises du cardinal Grente une courte notice descriptive - ' qui s'inspire elle-mhe de notices succintes dues a Joseph Anglade et Alfred Jeanroy lT. Cesare Segre a consacré une excellente étude aux ensenhamm dans la monographie traitant des formes et traditions didactiques dans le nouveau Grundriss der romanischen Literaturen des Mittelalters la. cl . . Tout récemment, Aimo Sakari a consacré quelques pages la poésie a didactique contemporaine du Doctrinal Sauvage qu'il éditait. Ces quel- qnes notes peuvent servir de base a une étude du courant didactique

~ ., en général l9.

Comme nous l'avons souligné plus haut, la notion d'ensenhamen a 6th compnse de diverses manieres par la critique, car les traités de poétique n'en donnent pas de définition. 11 nons a paru bon de re- prendre la liste la plus complete, en l'occurrence celle proposée par Clovis Bnuiel et István Frank, quitte rejeter un certaiu nombre de ces poemes 20. AU départ de cette liste, nous avons entrepris une analyse détaiüée 21 pour détermiuer certains traits caractéristiques du genre lit-

1958, pp. 30-32; C. Battisti, Osservazioni e corredoni ad una recente ediziorie del "Reg- elmento e contumi di damld', Modhne, 1959; L. Caretti, in Litterotuíe Moderne, t. 9, 1958, PP. 93-99. 16. M. Boni, Sordello. Le poesie, Bolome, 1954, pp. cr.xur-c~xxvr et 198-273. 17. J. Salvat, Dictionnoire des lettrea fran~oises, Paris, 1964, pp. 258-260, qui renvoie B J. Apglade, Le troubadour Giraut Riquier, Paris-Tonlouse, 1905, pp. 132136; du meme, Les troubodours de Toulouse, Toulouse-Paris, 1928, pp. 188-192; du meme, Histoire sommoi?e dde In littératu~eméridionole au mogen &e, Paris, 1921, pp. 177-184; A. Ieanroy, Histoife sotizmaire de la poésie occitane, Paris, 1945, pp. 81-85. 18. C. Sene.-. Le fonne e le tradizioni didoniche. in GRLMA. Heidelbera.-. 1968. t. 6, premibre partie, pp. 90-96. 19. A. Sakari, Le Doct,inol Sauooge, Jyvaskyla, 1967, introduction. 20. C. Brunel, Bibliogmphie des matiuscd%s littéraires en nncielr prooe~i~al,Paris, 1935, p. 120, et 1. Frank, Rdpertoire mktripue de la poésie des trnubadaurs, P&s, 1957, t. 2, pp. 209-210. 21. 1. AM~VDE S~scnns (P.-C., 21 a) est un troubndour catalan (voir 1. Cluzel, Amo- nieu de Sescors, trouba@ur cotolan?, in RFE, t. 42, 1958-1959, pp. 270-278, téraire. Nous avous donc envisagé, pour chaque poeme, certains points qui nous paraissent importants: brigine du troubadour, la date, la ni- bnque, le destinataire, la forme, la désignatiou de son oeuvre par le po&te lui-meme, le contenu. Nous verrons donc, au terme de I'analyse, si certaines constantes se

et M. de Riquer, HLG, t. 1, pp. 186-193) qui composa entre 1278 et 1295. 11 est l'auteur de deux ensenhnmens: 1 e. El temps de nadalor, composé avant 1291. -rubrique: Aisso es Pensenhomen del escudier que fe aquel mete46 dieu d'amora. - dcstinataire: un escudier (VV. 304 et 320) mais aussi un donzel. - manuscrit: R (147). -forme: 472 vers de 6 syllabes a rhes plates. -le mot snsenlurmen figure au v. 35 mais ne parait pas designer le genre littéraire. - contenn; conseils d'un pobte a un escudier pour que ce dernier puisse 4tre digne d'amouz. Les coiiseils sont multiples et d'ordre divers. - éditions camplbtes: K. Bartsch, Denkdler der provenralische~a Litteratur, Stuttgart, 1856, pp. 101.104; M. Milá, De los tvoondores en España, Barce lone, 3' éd., 1966, pp. 379-385; traduction italienne dans A. Parducci, Cos- tumi onioti, pp. 273-283. -Bihliog;raphie antérieure: Bohs, p. 208; Parducci, pp. 27-34; Sansone, PP 47- 50; maintenaut CALMA, t. 6 (2), no 2720. 1 b. En aquel mes de nini, eomposé entro 1291 et 1295. -rubrique: Aisso es l$ssenhames de 16 doozsla d'En Amanisu ds Sescas. - destinatairei une donsela. - manuscrit: R (146). -forme: 686 vers do 6 syilabes A rimes plates. -le mot ensenhonze,i figure égalernent au v. 103, mnis "le terme indique le con- tenu de cet ensenliomen, non pas le genre", affirme ax7ec raison Segre (dans GRLMA, t. 6 (21, no 2716). -conteti": conseils dernandés nu poete par une jeune fille pour connaitre la manibre de bien vivre. Les conseils prodigues par le pohte sont multiples: le vdtement, les soins du caws... -6ditioas complktes: K. Bartsoh, Provenzalisisches Lesebuch, Elherfeld, 1855, pp. 140 et sv.; M. Milá, De los trovado~es,Barcelone, 3' &d., 1966, pp. 388-397; traduction italienue par A. Parducci, op. cit., ipp; 233-2$0. - Bibliographie: Bohs, p. 212; Parducci, p. 24; Hentsch, pp. 94-97; Sansone, PP. 43-47; GRLAIA, t. 6 (2), no 2716. 2. ARNAVTGm~~zni np hilrnsaiv, troiiúadaur gascon attesté vers 1170 (voir R. Le jeune, La dote de I'ensenhorneri d'Amotit Gilleni de Morsan, in SM, t. 12, 1939, pp. 160.171). Cesare Sepre se fonde encoie sur une datation ancieiine (fin XII*-début rni0 qui ne doit plus 4tre retenue. Qtzi comte vol apendre. -rubrique: Ensenhomen d%n Aniaiit Guillmi de Mmsan. - destinataire: un couoyev. - manusorit: R (133). -forme: 629 vcrs de 6 syllebes rhes plntes et un bioc (amen). -le mnt ensenhnrnen figure au dernier vers et le rnot conte au piemier, -contenu: conseils du pdte a un ieune chevalier pour gagner i'amour d'une dame: avak un asuect extérieur apréable, Btre pénéreux, soigner son équi- pement.. . -6ditions completes: K. Bartsch, Provenzalisches Leseúuch, Elberfeld, 1855, pp. 132 et sv.; traduction itaiienne d'A. Parducci, Costumi ornnti, pp. 251-273. - Bibliographie: Bohs, pp. 206-207; Parducci, pp. 24-26; Sansone, pp. 34-39; GRLMA, t. 6 (2), n.O 2728. 3. A~NAUTDE Xlnitnvu (P.-C., 30), trouhadour périgolirdin de la fin du xu' sibcle, dégagent de ces oeuvres considérées comme des ensenhamens et si le groupement proposé par les deux grands provencalistes se justifie. Nous avons douc renoncé A entreprendre notre enquete en suivant Pordre chronologique des contributions critiques consacrées au sujet. Ce procédé d'exposition aurait en effet présenté deux graves défauts. Le premier efit été Pexistence de nombreuses redites, car certains auteurs n'ont pas tenu compte d'observations émises antérieurement. Le second,

, . client des eous d'Aragon et de Montpellier. Pokme vraisemblablement dédié i Alphonse 11 d'Aragon. .. . - Rozo es e mzum. -rubrique: ensanhamen dnns les seuls mrs. IK et d.

. ~ . , -pas de destinstaire pour Sensemble du pokme. -manuscrits: G, 1, K, Q, R, c, d; N ananyme; cntraits dans Dc, $, P, u. -forme: 346 vers de 6 syllabes A rimes plates, trks nombrenses nmes féminines. -le mot ensenhamen ne figure pas dans le texte de ce poeme. , .. - contenu: la manidre poiir certaines catégories sociales (les chevaliers, les dames, les bourgeois, les clercs) d'acquérir des lounnges dans le monde. -6ditions complktes: Raynauard, Choir, t. 4, pp. 405-418; Mahn, Werke, t. 1, PP. 176-184. Nous ne savons ce qu'il est advenu de i'édition annoncé par ! , ,. . , Mlle Pareschi de Bologne (citée par P. Bec, Les saluts d'omour du troubodour Arnaut de Mnfet~il,Toulouse, 1961, p. 9); M. Eusebi, L'ensenhamen di Arnaut de Mareuil, in Ron., t. 90, 1969, pp. 1430, avec traduction italienne. - Bibliographie: Sansone, pp. 63-65; GRLMA, t. 6 (2), no 2724. -. 4. AT DE MONS, troubadour (P.-C., 309) taulousain de In seconde rnoitié du xm' sidcle, client des mis d'Aragon et de Castille. ... . 4 a. A2 bo rei de Costela. . I - sans rubrique. - destinataire: Alphonse X de Castille. -manusuit: R (126).

.. , . -forme: 2059 vers de 6 syilabes A rimes plates. -1s mot enrenhomen n'apparait pas mais bien celui de sunplicotio (v. 1269). -contenu: At de Mons expose des principes élémentaires d'astrolazie au mi- lieu d'innombrables digressions sur la natuie de I'arns et sur son imrnorta- lité, sur Dieu, sur la prédestination ... - édition comp1Ate: W. Bernhardt, Die We9ke des Trobodors N'At de MOIIS, Heilbronn, 1887, pp. 1-55 (AUfranzb'sische Bibliothek, t. 11). 4 b. Si N'At &Mons agues. - - sans rubrique. - sans destinataire. -manuscrit: R (130). -forme: 602 vars de 6 syllabes A rimes plates. -le mot ensinhamen ne figure pas dans ce poeme. - contenu: il s'sgit d"úne sorte de dissertation scolastique sur Samour". - édition compldte: W. Bernhardt, op. cit., pp. 111.127, - Bibiiographie: GRLMA, t. 6 (2), no 3152. 4 e, Si tot non es enppistz. - sans rubrique. -destinataire: un jongleur (v. 24). - manuscrit: R (128). -forme: 1539 vers de 6 syllabes A *es plates. - -le mot ensenhamen ne figue pas dans ce poeme. , -contenu: le pokte donne des conseils de maintien et de bonne tenue A un jeune iongleur qui était venu les lui demander. Lesdits conseils sont fort généraux. ii cblebre avec force la "connaissanoe" et la "religian". -6dition oompldte: W. Bemhardt, w.cit., pp. 55-96. 4 plus grave encore, eiit consisté gloser au départ dúne critique dont les apports sont de qualité tres variable. 11 nous a paru préférable d'interroger directement les textes.

Les grands traités méridionaux n'apportent aucune précision quant au genre de i'ensenhamn, mais il est certain que le teme a désigné un

- Bibliogrnphie: GRLMA, t. 6 (2), no 2732. 5. FOLQUETDE LUNES(P.-C., 154), troubadou~né dans le Languedoo en 1244, client des comtes de Rodez. E nom del pnire glorios. -rubrique: Romons de mondano vida. - pns de destinataire. - manusorit: R (139). -forme: 539 vers de S syllabes. -le mot ensenhnme~ane figure pas dan9 le paeme. L'auteur intitule lui-m&me son oeuvie "oar yau Folquet de mondann / vid'ay fag romans qu'es abratz ..." (VV. 531-532). - contenu: critiqüe de la société de san temps qu'il demande A Dieu de rendre .. .------. - édition complete: F. Eichelkraut, Der T~oribadourFolquet de Lunel, Berün, 1872 (thise de Guttingen), PP. 26-42. 6. GAnm LE B~UN(P.-C., 1631, troubadour vellave moa avant 1156 (voir C. Rru- nel, Docrimettts lingrristigues du Geuaudati, in BEC, t. 77, 1916, p. 6, note). Cessre Scgre reprei~d la date traditiannelle (1180) qui ne doit plus, $ notxe sens, &re retenue. El tevmiiii d'estiu, compos6 avant 1156.- - pns de rubrique. - dcstinataire: une doznnn. -manuscrita: G et N et extriiits dans le Breuinri d'omor. Le texte est auonyme dans les deux rnanuscrits, mnis le Bleuiari rittribue les extraits sélectionnés par MatfrA Ermengaud A Gariii le Brun. -forme: 650 vers de 6 syllabes A rimes plates et un bioc (Domna). -le mot ensenlrn~iienfigure au u. 115. "Le terme ensenhomen n'a pas encare de valeur tcchnique: seuls les VV. 102-104 se réferent au genre de la cam- positioii: non 2ais que non cornrnenz / n d

éditian complete: M. de Riquer, Les chansons de geste francaises, Paris, 1957 . . . . - (traduction d'I. M. Cluzel), PP. 331-351. 8. Gunuur DE CALANSON,troubadour de la fin du xn' sikcle et du début du xnP sidcle (P.-C., 243, 7 a). Fodet Joglor. -pas de rubrique. - destinataire: un ioelor personnalisé nommé Fndet. -manuscrits: Da (203) et R (136). , . -forme: 243 vers de meme structure m6trique que le Cabra Juglar, sans que I'on puisse discerner avec reditude tine structure strophique. -le mot ens~nhamenne figure pas dens le poeme. Le pohte intitule lui-m8ma son poenie un siwentes (v. 5). -contenu identique celui du pokme de Guerau de Cabrera. , . - Bdition campl8te: W. Keller, Das Sdruentes 'Tadet Joglaf' des Gui~aaut von Calenaon, Erlangen, 1905 (thkse de Zurich), également in m, t. 44, 1905, 255-406. . . PP. 9. PEIRE CARDENAL,tioubadour vellave du xme siecle (P.-C., 335, 14). Se1 que fes tot cant es, camposé ivant 1254. - pas de rubrique. - pas de destinstaire. - manuscrit: R (136). -forme: 114 vers organisés en qnatrains de 6 syllabes. SystAme. straphique compliqué (voir ce suiet: éd. Lavaud, p. 468). . . -le mot ensenhnmen ne figure pas dans le pokme; il s'agit sans doute ici d'un mal dig (v. 44) ou d'un critz (v. 34). -contenu: le poeme exnose les qualités d'un onguent qui guérit de nom- breuses maladies. -édition complAte: R. Lavsud, Les soéstes du troubodour Peire Cardenal, Toulouse, 1957, pp. 468-477. 10. PE~ELUNEL. dit Cavalier. troubadour orininaire de Montecli,~. ores de Montau- ban. Paete mheur (P.C., 289) du xiv' sih. L'autrier, mntre ques ieu m'estaon, composé en 1326. -rubrique: L'essenhamen del guarso, foch I'an de nostre setihe M.CCC SS e VI. 10 col fec Cavalie, Lunel, de Monta, c1el.c. - destinataire: un gvarso (w. 11, 115, 192). -manuscrit: R (142). -forme: 382 ver5 organirés sujvnnt le systeme de 12Arlobecco. -le mot ensenhomn figure au v. 64. - contenn: conseils du poete E un gwiso: soigner le cheval du seigncur, &re fidele & ac ddernier.. . -édition compl&te: K. Bartsch, Denkmale,, pp. 114-124; E. Farestié, P. de Lunel dit Cavalier Lunel de Montech, troubodour du SIV" siecle, iu Recueil 2' sé*, % de l'Académie des sciences, bellea-bttres et arta du Torn-et-Garonne, t. 7, 1891; cene derni8re éditioli étant pratiquement introuvable, on aura re. cours pour les 103 premias vers A K. Bartsch, Chrestomthie prouencale, , . col. 389, puis cnsuite E R. Lavaud et R. Nelli, Les troubadours. L'oeuure vohtique, Bmges, 1966, t. 2. pp. 734-751. - Biblioaraphie: Bohh pp. 208-209; Parducci, pp. 34-36; Sansone, pp. 53-60. 11. RAXMONDE CO~NET,troubadour rouergat originaire de Saint-Antonin, client de divers seigncurs du Sud-Ouest, vivant dans la premiere moitié du rrv' sieole. 11 a. Veo te libret de b- ensenhamens. - pas de rubrique. +

, DES TROUBADOURS OCCITANS IST CATALANS DES XIP ET XW S~ES27 devoir servir de témoins privilégiés pour déterminer les caractéristiques de l'ensenhamn. Comparons donc les analyses de ces podmes:

Les destinataires. - 1 a, un escudier; 1 b, une donzela; 2, un ca- oayer; 10, un guarso. On remarque que les podmes étudiés désignent

- destinataire: aucun. -manuscrit: P, sigle de Jeanroy (f. 31). -forme: 452 vers décasyllabiques i limes plates. -le mct ensenhanten figure au premie2 vas, mais ce mot ne désigne pas le gennre littéraire. - contenu: canseils d'oidre moral et religieur, d'ouzir, de uezer, de manjar, de parlar, d'omnssor, de despendve, d'anar, de vedir... - Bdition complete: J. B. Noulet et C. Chabanenu, Deux manuscrits du XN' siecle, Montpellier-Psris, 1888, pp. 114-129.' 11 b. Lo mieus cars fih, .l. noble gardacors. -rubrique: Gurdocovs de mal. -destinatake: f8h (w. 1, 9). - manuscrit: ts (25) sigle de Jeanroy. -forme: 100 vers de décasyllabes organisés suivant une structure strophique répertoride par Frank, RMPT, t. 1, no 612, note. -le mot ensenhometi ne fipure pas dan6 le texte. - contenu: conseils d'ordre moral et religieux pour préserver le croyant du mal. -éditian compl&te: J. B. Noulet et C. Chabaneau, op. cit, pp. 109-114. 11 c. A& trobayres vuelh far. -pas de rubrique. -destinata&: a& hoboyrcs (v. 1). -manuscrit: .tl 17) sigle de Jeanroy. -forme: 85 vers de 6 syllabes B rimes plates. -le mat ensenliamen ne figure pas dans le texte. -cantenu: conseils greminaticaux, principalement appliqués i la métrique, donnBs i un troubadaur. - édition complete: J. B. Noulet et C. Chabaneau, op. cit., PP. 1214. 12. R~IMONVDAL DE BEsALÚ, troubadour (P.-C., p. m) catalan (voir Mas56 Tor- rcntr, Hepertori, t. 1 (sed par"), no 16, et M. de Riquer, HLC, t. 1, PP. 111-123) de la fin du ar' si&cle et du début du xme siecle. Abrih issié mnys intr~uo,composé nuaiit 1213. - PBS de rubrique. - destinataire: joglnrs (v. 35). - munuscrit: R (137). -forme: 1773 vers de 8 syllabes B riines plates. -le mot ensenlznmen Gpure dans le poeme au v. 1662. - contenu: le pa&te, déploraut le déclin de la chevalerie et de la poésie, danne au joglnr un enseignement sur le comporternent dens le monde. -6dition complhte: W. Bohs, Abrils issi'e mov intraoa, in RF, t. 15, 1904, PP. 204-316. -Bibliographie: GHLMA, t. 6 (2), no 2768. 13. CEnvEnr nE G1noi.i~. troubadour catalsn do lo seoonde moitié du nn* rihcle - (voir M. de Riquer, HLC, t. 1, pp. 125-161, et Mnss6 Torrents, Repertori, 1w. 234 et sv.). Ascout qu9 vol ousi~,rédigé le 10 mars 1271 -pas de rubrique. - pas de destinataire. -matiuscrits: CUrg et Ven (voir édition de Riquer). -forme: 694 vers de 6 syllabes i rimes plates. -le mot ensenhninen ne figure pas dans le pohme. 28 FRANPIS PIROT. - RECKEUCHES SUR LES CONNAISSANCES L~BAIRES clairement les destinataires qui représentent une classe sociale particu- líere dans la hi6rarchie féodale.

Les mnuscrits. - l a: R; 1 b: R; 2: R; 10: R. On doit conclure que les seules mbriques proviennent du ms. R, manuscrit qui contieiit d'ail- leurs la plupart des textes conservés tendance didactique. Cette fin du

-contenu: le poho comprend deux parties: le Muldit, qui consiste en une satire des femmes, et le Bendit, qui est un éloge de l'amour. - édition complete: M. de Riquer, Obrm iornplafos del trovador Cerueri de Girono, Barcelone, 1947, pp. 323-341; partir du v. 127, on peut con- sulte? H. Suchier, Denkmoler, Halle, 1883, PP. 256-271, qui reproduit inté- gralement le fragment de Venise. Son~~r,koubadour italien (P.-C., 437) originaire de Mentoue, fréquente de nombreuses cours de 1'Europe méridionale durant le xnre si&cle. Aissi c0.Z tesours es pevdutz, campos& avant 1257. -rubrique: Documentum honor&, trnduetion en latin du provenqal eneerihnnlen d'onor due sane donte au copiste. - pas de destinataire meis dédi8 i N'A6rdiYa. -manusorit: G (131-140). -forme: 1327 vers d'octosyllabes rimer plates. -!e mot ensenhonen figure aux VV. 1283 et 1297. - cantenu: il s'agit de regle3 de baute morale: "il faut craindre non la moxt du eorps, mais la mort de I'honneur; il faut vivre pour Ilionneur, non pour les honneurs ...". - éditions complhtes: P. 6. Palazzi, Le poesie inedite di Sordello, in Atti de Venise, t. 5 de la 6( série, 1886.1887, pp. 1471 et sv.; C. De Lallis, Vitu e - possie di Sovde2io di Gioto, Halle, 1894 pp. 206 et sv.; H. G. Chaytor, The troubadours of Donte, Oxford, 1902, pp. 77 et sv.; M. Boni, Sordello. Le poesie, Bologne, 1954, pp. 198-273 (avec traduction) et pp. c~xw-mxxn. -Bihliographie: Hentsch, PP. 6668; Sansone, PP. 65-67; GRLMA, t. 6 (2), no 2784. AN0~íwe. Quan tu a la toda seras. - pas de rubrique. ,-pas de destinataire. -manuscrit: t7 (16-17) sigle de Jeanroy.

' -forme: 118 ver8 octosyllabiques. -le mot ensenhamen ne figure pas dans le padme. - contenu: contenances de table. - éditions compl8tes: 2~ part l'introuvahle L. Biadene, Coitesi@ do tavoln ia - latino e in prooeníalr, Pise, 1893; V. Chhaev, Contennnces de tobie en oers prouencauz, in RLR, t. 48, 1905, pp. 289-295. -Bihliographie: GRLMA, t. 6 (2), no 2648. . ces pubmes recensés par István Fr'rank, on doit joindre deux autres podmes réper- également comme des emenhamens par certains érudits. RAIMONDE M~AVAL,kaubadour lsnguedacien (P.-C., 406) des xiio-%niesi&cles. Famisrs, per mor enseignamens. - pas de rubrique. -desünataire: un jongleur nommé Fomier. -manuscrits: A (206) et D-(137). -forme: 62 vers arganisés suivant une structure strophique et métrique (voir Frank, RMPT, no 566, 3). . -le mat ensenharnen figure au premier vers du po&me mais ne désigne pnr le genre Iittéraire. -contenu: le po&ts fait comprendre A un iangleur les dtff6l~erences euistentielles entre 1s métier de sirven et celui de loglnr. Le pohte donne ensuite des , ms. R se caractérise d'ailleurs par Semploi de rubriques, wmme nous le verrons plus loin.

La forme. - 1 a: 472 vers de 6 syllabes A rimes plates; I b: 686 vers de 6 syllabes A rimes plates; 2: 629 vers de 6 sylIabes rimes plates; 10: 382 vers organisés suivant le systeme de SArlabecca.

conseils pour que le nouveau iogloi puisse se oomporter dignement dans sa nouvelle conditian. - éditian complkte: F. Witthoeft, Siruentes iogzaresc, Marburg, 1891, pp. 50-52 (AA, no SS), et L. T. Twsfield, Édition, Paris, 1971, PP. 325-329. 17. BEHT~ANDDE PAR~SEN RUUERGUE,troubadour 10nergat (P.-c., 85) de la fin du m' sikcle, comme nous le démontrerons plus loin. Govdotz, e.us fatí un sol dmentes l'atl. -rubrique: sans intéret pour notre sujet (nom du troubadour). - destinataire: un jongleur nommé Gordo. - manuscrit: R. -forme: 88 vers organisés suivant une stiucture strophique et métiique (voir Frank, RMPT, no 382, 9, et 577, 15). -le mar ensenhnmen ne figure pas dsns le pohme mais bien le terme sinientes. -antena: reproches A un jongleur ignarant. -éditions compl4tes: F. Witthoeft, fogluresc, Marburg, 1891, pp. 66- 68 (AA, no 88); F. M. Chambers, The snsenhnme-iroentas of Bertron de Paris, in Mélnnges Istvún Frank, Sarrebnick, 1957, PP 129-140. 18. Rniwo~D'ANJOU serait l'auteur d'une série d'enssnhamens dont on nt. eonnait sue auelclues emraits mpportés par Francesco de Barberino dms ses DacÚmenti anma-re. es oeuvres étant perdues dans leur presque totalité et les rubriques ~eprisespar l'auteur italien étant rédisées en latin, les poemes de Raimon d'Anjou ne sont gu4re utilisables dans notre démonstration. 11 est certain que les 6 rubriques connues (De societnte ftatema, De conversa- tione humana, De dominobus honorondis, De sotlicitirdine me iuvenibua es6 indicto, De valentia rnilitum, De mensa) désianent des pohmes didactiques. Le De menso indique clairement une Contenance de table. Le De valentia militum fait peiiser B un pohe du type de l'Ordre de Cheualerie francaise. Le De sollici- tudine que iuuenibus est indicta parait &re, d'aprhs les entraits conservés, un anssnhamen B i'écuyer (voir A. Parducci, op. cit., p. 39). Le De dominobus hono- ~nndisfait penser B l'Onor es domes de Robcrt de Blois commeau Dit de Dwit rtu Clerc de Vaudoi (voir Ch. V. Langlois, La uie ... d'oprds les moralktes d« temps, p. 187, note 1). Abondante bibliopaphie: voi surtout A. Thomas, Francesco da Barbevino et la littkrature prooencole en Itolie ou moyen ase, Paris, 1883, pp. 130 et sv.; A. Parducci, op. cit., pp. 36-41; E. Muller, Die altprou. Verswvelle, p. 129; G. E. Sansone, op. cit., pp. 60-63. 19. A~oiru~is.La cout diimour. Seinor vos qri~002ez la flw, iédigA 3~ =U' siBc1e. - pas de rubrique. - pas de destinataire. - manurcrit: N. -forme: 1730 vers d'ootosyllsbes rimes deux $ deux. -le mot ensanhamen ne fipure pas dani le teme. -contenu: sorte d'Art d'oimer dnns un cadre sllégorisant: Amor instruit ses suivantes Fin'Anior, Solotx, Ardimen. Résumé dans Parducci, op. cit., p. 41, et Hentsch, op. cit., pp. 55-57. -édition: L. Constanr, Les monuscrits provencoux de Cheltenhom. 111. Ln cour d'Amour, in RLR, t. 19-20, 1881, pp. 157.179, 209-220 et 261-876. -B. ibhographie:. A. Parducci, op. cit., pp. 41-43; Hentscb, pp. 55-57; Sansone, pp. 73 et sv., et GRLMA, t. 6 (2), no 4648. - 11. s'agit donc de pobmes comptant plusieurs centaines de vers A nmes plates, avec une prédilection pour le vers de 6 syllabes. . Ce qu'avait fort bien vu Amos Parducci:

- . Relativamente alla forma metrica, il Bohs, riferendosi a iutti gli insegnamenti presi in esame, ha gii rilevato la prevalenza di versi rimati a due a due. 1 nosixi intanto son tutti composti di senan, se si toglie il tardo donzello (cest-i-dire Peire Lunel de Montech), a cui i'autore, per allontanarsi delibe- 22. . ,. ratamente, penso, dai suoi modelli, voUe dar la forma di nrlubecca Le pobme de Peire Lunel, s'il se distingue des trois autres par l'aspect formel, n'en est pas moins un ensenhamen puisque le pobte considere explicitement son oeuvre comme telle.

Le mot "ensenhamen". - 1 a: au v. 35; 1 b: au v. 103; 2: au v. 1; 10: au v. 04. Contenu. - Conseils de bonne conduite "murtoise" donnés A des catégories sociales déterminées du monde féodal.

Que peut-on conclurc de ces quelques remarques? On peut affinner, en premier lieu, que la pratique de la rubrique est particuliere au ms. R. On ne s'étonnera donc pas de posséder d'authentiques ensenhamens qui ne soient pas précédés de rubriques dans des manuscrits antres que R. On notera ensuite que les quatre poemes désignés commc des ensen- hamens par les rubriques ont également le mot ensenhamen dans le texte. Toutefois, le mot ensmhamen, dans les poAmes d'Amanieu de Sescars (1a et 1 b) et d'Arnaut Guiilem de Marsau (2), ne designe pas le genre mais le contenu. L'emploi d'ensenhamen par Peire Lunel de Montech (10) parait, par contre, désigner le genre littéraire. On

, , 20. MATFRÉERWENGAUD in~lut dans son Breuiari diirno, un petit traité intitul.4 Pe- rilhos troctd d'anwr de donas, qui forment les VV. 30220.31080 et 31083-31933 dudit Breoiari, rédigé peu aprks 1278. -rubrique: Aqui cornenssn le perllhos troctnt d'amor de donas segmb / que han hactd 1i antic trobador en lors cansos. . . - pas de destinataire. -manuscrits du Bmoiori d'omor. -forme: octasyllabes. . . -le mot ensenhamatl ne figure pas dans te pokme. , -cantepu: analyse du passage consacre $ la femme dans Hentsch, op. cit., pp. 90-94. Conseils 5 donner pour mener une vie courtoise inspúhe par les yciens troubadours (Garin le Brun, Raiman de -Miraval...). -edition: G. Azais, Le Bréuiaire d'amor de M+$ Ewengou, suiui de la lett~ea sa soeur, Béziers, 1862.1681. -Bibliographie: Hentsch, pp. 90-93; A. Parduooi, Su1 "Perilhos tractat d'amor

~ '. de donas" di Matfd Ennengau di Beziers, in Rom., t. 51, 1925, pp. 1-31; Sansona, pp. 67-68. 22. A. Parducci, op. cs., p. 76.

. . en conclura que Sutilisation du teme ensenhamen pour désigner le genre littéraire est un phénomene tardii et, meme, tres tardif puisque postérieur aux poemes d'Amanieu de Sescars. En conclusion, les traits communs A ces quatre textes permettent de proposer la définition suivante de i'ensenhanwn:

long podme didactique, composé en vers A rimes plates, formulant des cnn- seils de bonne conduite courtoise a une catégorie sociale déterminée.

Cette définition rencontre celle proposée jadis par un érudit itaiien trop oublié, Alberto Restori:

Al genere didattico puro appartieue un wppo abbastanza numeroso di opere intitolate insegnamentiperch infatti I'autore si propone di insegnare a ciascuna classe di persone quali sieno i suoi obbligbi e doveri23.

On pourrait continuer A rassembler des définitions générales, mais il parait plus utile de confronter notre définition "minimale" avec la série de textes considérés comme des ensenhamens par la critique ".

23. A. Restori, Litterotura provenzale, Milan, 1891, p. 145. La définition de Bartsch est fort semblable: "In speziellem Sinne vcrstehen wir darunter Belehrungen für einen bestimmten Stand, worin die demselben zukommenden PBlchten nufgezahit werden, aber nicht in atlgemein rnaralisierender Weise, sondern in individuellen aus dem Lehen gegriffenen Zügen" (K. Bartsch, Gnreidriss Z4I Geschichte dar prove~izallschenLiteratur, Elberfeld, 1872, p. 44). Stimming, B son tour, présente une définition qui offie toutefois la particularité d'ebe la premiBre i inciure l'aspect formel: "es gibt aher aueh solche, die in Bezug auf das Bussere Benehmen Belehrung gaw&renwollen und die oft für einzelme Gesellschaftsklassen, niweilon sogar iür bestimmte Personen, mannliche oder weibliche, berechnet sind. Dia charakteristische metrische Form dieser Gedichte sind Reimparre von Secssilhnern" (Gvundriss de Grijher, t. 2, 2' partie, p. 44). La dkfinition adoptée par W. Bohs est plus lnrge; "Ensenhamens sind in der provenzalischen Litte- ratur solche Lebrgedichte, weiche teils für einzelne Personen, die hestimmta Stünde vedreten, teils für mehrere StXnde verbeten, teils für mebrere Stnnde im aflgemeine Unterweisung ertoilen betreffend rechtes Benehmen, bos capteneneni (rguten Ton»), in der feinen, gesitteten WeIt" (W. Bohs, op. cif., p. 206). 24. Ja poursuis Penqudte en suivant l'ordre numérique des pohmes adoptés plus baut et en omettant, kvidemment, les textes oui nous ont permis de déterminer les éléments constitutifs de l'snsenhomen: 3. Le poBme Bazo es e meíurn d2A.naut de Maieuil est intitulé ensenhnmen par trois manuscrits sur une dizaine, mais le tkmoipnage des mss. 1, X, d est uaique puisque 1 et K sont des manuscrits dits jumeaux et d une simple copie de K (sur cette question, vok l'éd. Eusebi, p. 14, note 1, ct p. 15, note 1). Bohs reprend le poBme dan* sa liste des ensenhamens (op. cit., p. 212). Comme J. Bathe et C. Segre lap. cit., pp. 90-91), nous estimons quil existe des diffé- rences entre le podme d'hnaut de Meremil et les enicnhamem vus plus haut. En effet, outre les différences de forme, on dait noter que ee texte propose a plu- sieurs catégories sociales des conseils moraux tres généraux. 4 a. 11 s'agit dtine supplic~tjo comme I'affime le poBte lui-mhe, At de Mons (V. 1269). Llabsence de destinntaire, les idées exprimées ne permettent en aucun cas de rapporter ce podme nu penre de l'ensenhoman. Si l'on met ti part Brunel et Frank, aucun érudit ne range catte pidce pami cc type de podmes. Cette piBce doit kvidemment 8be li6e A eelle, dediée su mdme souverain, de Guiraut Riquier qui se révhle dtre Bgslement une rupplique. Sur tous ces prohl&mes -sur- . , Au teme de l'analyse, on peut estimer que: A) Ne peuvent &re considérés comme ensenltamens au sens strict - que les poemes suivants:

1 a. L'ensenhamen de 2ésnidier d'hanieu de Sescars. 1 b. L'emhamen de la donzela d'Amanieu de Sescars. 2. L'ensenhamen au caoayer d'Amaut Guiiiem de Marsan. 4 c. L'maJuimn ou iongleut d'At de Mons. 6. L'ensenliamen a la domna de Garin le Brun. 10. L'ensenhamen un guarso de Peire Lunel de Montech. 11 c. L'ensenhamen au t~oubadourde Raimon de Cornet. e, 12. L'@nsenhamen au jongleur de Raimon Vida1 de Besalú.

B) Participent du genre de l'emenhamen, meme si i'un des él&-, ments constitutifs fait défaut (l'ensenh,amen ne vise pas une classe so- ,, . ciale déterminée), les compositions poétiques suivantes:

L'msenhamen d'Amaut de Mareuil. L'e~lsenhama de Raimon de Comet L'ensenhamen d'onor de Sordel.

tout sur le genre de la supplique en rapport avec le salut d'amour et 1s tradition épistolographique médiévale, on veria l'introduction 3. l'excellente édition de Valeria Bertoluucci Pizzorusso, La supplico di Guiraut Riquier e la risposta di Alfonsq X di Costiglin, in SMV, t. 14, 1966, pp. 9-135, et la note tres cucons- tanciée #E. P. Vuolo, Per il testo dello Suppllca du Guiraut Riquier od AL fonso X, in SM, sene terza, t. 9, 1968, PP. 729-6061. A part la forme, rien n'autorise 3. considérer ce poeme d'At de Mons comuie un ensenhamen. Ce pokme d'At de Mons peut, par contre, etre coosidéié comme un entenhameia, car il en possede les caractéristiquer de forme et de contenu. Le destinatnire est un jongleur. La date tardive de création de oe pohe n'est pas sans quelques oonséquences. En cette fin du xiv* sikcle, les conseils particuliexs B la condition de jongleur cedent le pas B des comidérations tres générales convenant 3. n'im- porte que1 état. Nous sommss done d'accord avec toute la critique de Bobs B Segrepour ranger ce poeme parmi les ensenhamens. Le pokme de Folquet de Lunel étant désigné par le troubadour lui-meme comme un vqmnn, genre tittkraue repris également en rubrique, on ne voit pns les rai- sons qui ont poussé Bmnel et Frank d ranger ce po&me parnii les ensenhamens, d'autant plus que le cantenu n'a pas de rapport évident avec le genre didac- tique. Le poeme de Garin le Brun est indmbitnblement un etisenh~merr puisque toutes les conditions sont ici réunies. L'abscnce de rubrique n'est pas étonnante puisque nous avois constaté que cet usage eat particulier au ms. R (qui ne transmet pas oette pieoe). 7 et 8. Guerau de Cabreni et Guiraut de Calanson. il ne s'agit évidemmeut pas d'ensenhamns au sens strict du terme puisquil s'a- git de poemes dotés d'une structure skophique plus au moins perceptible. 11 s'agit de critiques (et non de conseils) B un jongleur détermind (et non B la classe jongleresque dans son ensemble) coulbes en forme de siruentes, comme i'affirme lui-m&me GuYaut de Calanson. 9. Le poeme-nariatif de Peire Cardenal sur les mkrites d'un onguent "miraculeux" da sucun rapport avec le genre de i'emenhumen: ni mbrisue, ni destinataire, ni vers de 6 syliabes, ni i'emploi du mat snsenhamen, ni le contenu. Il a. ii ne s'agit pas fin ensenhamen puisque i part le mot emenhomen, pris d'aillours . . . , ,

+ 8 ~ C) Participent A des sous-genres de la tradition didactique géné- rale:

4 a. La Suppllcatio d'At de Mons. 5. Le Romans de mundana vida de Folquet de Lunel. 9. Le Cri de Peire Cardenal. 11 b. Le Gardacors de mal de Raimon de Cornet. 13. Le Maldit beendit de Cerveri de Girona. 15. Les Contenances de table anonymes. D) Les textes suivants qui participent a la fois du genre littéraire du sigventes et du genre didactique forment un groupe particdier:

7. Le Cabm Juglar de Cuerau de Cabrera. 8. Le Fadet Joglar de Guiraut de Calansou. 17. Le Gordo de Bertrand de Paris en Rouergue. Nous avons dit plus haut que nous renocicons a rappeler les travaux parus avant 1904, car ils relhvent surtout d'une forme de paléocritique.

ici dans le sens général, ce poeme de Raimon de Cornet ne présente aucun des traits caract6ristiques du genre. A rejeter puisqu'on ne découvre dans ce podme aucun trait distinctif du genre iittéraire étudié. Ce pohe de Raimon de Cornet, tres vraisembiabloment inoomplet, peut passer pour un etisefiliamen grnmmatical pour un troubadour. 11 iie peut s'agir en tout cas d'uii enseirhatnen "sensu stricto" puisque le cantenu est beauccup trop parti- culier. L'oeuvre de Rnimon Vidal est incontestablement un ensenhamen au jongleur tres proche, par le contenu, de ceua de ccurtoisie. 11 est a remarquer l'emploi de I'octosyllabe. Le poeme do Cerveri n'a aucun rapport avec l'ensenltomen. il s'agit d'un Mal dg étudi6 par A. Paga+ Auzios Mn~clb,Paris, 1912, p. 136. Le poeme de Sordel, intitulé dans la rubrique doiumentum honovk, est rap proiher du poeme d'Arnaut de Mareuil comme I'a fort bien démontré M. Boni (kd. cit., pp. c~xm-crxxrv).En effet, si i'intention didactique est éuidente, le cantcnu et i'nbsence de destinataire ne permettent pas de cansiderer ce poeme comme un ensenhamen au seiis strict. 11 s'agit d'uo poeme didactique particulier qui peut Etre rangB parmiles Conte- nonces de tnble dont on cannait de multiiiles autres exemples dans la littéraniie européenns (voir ai ce sujet C. Segre, GRLMA, t. 6 (f), pp. 86-87). Ces Conte- nances sont généialement des vrilgiirisations du eéikbre Quisquk es in mensa. Le poeme de Rnimon de Miraval est iin simentes destiné un jonglnir, puisqu'ii posskde une structure strophique et métrique particuliere. Comme pour les sir- "entes de Guerau de Cabrera, Guiraut de Calsnson et Bertrand de Paris, le destiiiataire est personnalisé. Toutefois, il est évident que le contenu rapproche ce poeme des ensenhamens mais de manikie indirecte. Le pokme de Bertrsnd de Paris est désigné par le pohte lui-meme come un slrventes. 11 en posskde toutes les caractéristiques: i'aspect satirique, la struchire strophique et métrique. 11 est évideinment ai rapprocher des poemes similaires de Guerau de Cabrera et de Guiraut de Calensan. La question ne se pose pas nu sujet de Raimon d'Anjou puisque les textes n'e- xistent plus. La Gour d'Antour anonyme ooeupe une place partieulikre. Son earactdre allégo- rique et I'abseuce de destinetaire encluent le poime de la liste des menhomms. Tout éloicne le PeriZhos tractd de i'ensenhamen. Pour W. Bohs, un poeme est considéré comme un ensenhamen lors- qu'il expose le bon comportement, "bos captenemens", dans le beau monde

i des personnes représentant des professions déterminées d'une part, A plu- sienrs professions en général d'autre part 26.

On constate donc que Bohs élargit la notion d'etlsenlzamen par rap- port a celle que nous avons déterminée sur la base des pohmes dé- signés comme tels dans les rubriques des manuscrits. 11 inclut donc, outre les poemes que nous considérons effectivement comme ressortis- sant au genre étudié ici (1 a, 1 b, 2, 4 c, 6, 10, 12) 26 des pobmes simi- Iaires ou totalement hétéroghnes. En ce qui concerne les pohmes similaires, Bohs inclut -du fait meme de la définition retenue par lui- les poemes d'Arnaut de Ma- reuil (3) et de Sordel (14) puisque ces derniers sont destiués a plusieurs classes sociales 2T. D'autres poemes repris également par Bohs -Le Maldit bendit de Cerveri de Girona (13) et les Contenances de table (15) anonymes-, s'ils relevent du genre didactique en général, appartiennent des sous- groupes de ce vaste genre mais ne peuvent pas, en aucun cas, &tre con- sidérés comme des ensenhamens. Le po&me de Raimon de Miraval (16) est totalcment hétérogeiie: il s'agit en fait d'un siroentes qui est étranger au genre de l'ensenhamen. Joseph Bathe critique la méthode suivie par W. Bohs, car il n'existe selon lui aucune "notion unitaue" pour les divers poemes rassemblés par son prédécesseur. 11 élimine donc les poemes de Rairnon de Miraval (16) le Maldit bendit de Cerveri de Girona (13) et les Contenances de table; il ne re- tient en définitive que des poemes considérés par nous comme des en- senhamcins. 11 souügne aussi la place particulikre que l'ou doit assigner aux poemes d;enaut de Mareuil et de Sordel. On notera donc que la contribution de J. Bathe aboiitissait, des 1904, A des wnclusions tres positives mbme si i'érudit allemand n'envisage pas

25. Voir texte allernand citb plus haut, p. 31, note 23. 26. Bohs ne considere pas comme ensenhamen i'ensenltameli gramrnatical au trau- badaur de Raiman de Cornet. 27. Bohs n'envisage. Das. dans cette estéporie I'ensenhatnel> (11 a) de Raimoii de Cornet. 28. Bathe souligne d'abord que le mot enseigriamen n'est pas pris dans un sens technique, mais dans son seas le plus gbnbral. De plus, le contenu ne rappelle pas celui des ensenharnew puisque Fornier ne repoit des conseils qu'A la suite d'un chsngement sxiatentiel (passant de I'6tst de nwen A celui de iogZar).En dernier lieu, oe podme n'wst pas constrnit suivant la forme caractéristique de i'ensenhamen, mais suivant un schérna . , rtrophique et mhique. -comme son prédécesseur- les poemes de Rairnon de Comet (vrai- semblablement en raison de la date tardive de leur composition). Cesare Segre fait lui aussi un sort particulier aux poitmes de Sordel et d'Arnaut de Mareuil, car ces derniers (qui ne sont pas composés en vers de 6 syllabes) s'écartent sensiblement des conseils pratiques de vie courtoise. En effet, les deux poemes paraissent liés par des liens tex- tuels qui autorisent A penser que Sordel connaissait le pobme d'haut de Mareuil. Segre, reprenant -4irectement ou non- une observation fugitive de J. Bathe, développée ensuite par Parducci 20, insiste sur le fait que les ensenhamens "sensu stricto" (c'est-A-dire, ceux du premier groupe) sont introduits par une natuureingang qui crée le cadre dans lequel le maitre -en l'occurrence le poete- et le disciple se rencontreront. On pcut donc considérer cette entrée en matibre, issue en droite ligne de la tradition lydque, comme un trait constitutif de Yetisenhamen. Segre souligne ensuite les liens unissant les divers ensenhamens "sensu stricto". L'ensenlzamen de Pescudier d'Amanieu de Sescars est nettement inspiré de celui d'Arnaut Guiilem de Marsan. L'ensenhamela d la domna de Garin le Brun a servi de modhle au poeme d'Amanieu de Sescars consacré A la donzela 3'3. Le pohme de Raimon Vidal de Besalú possede de nombreux points communs avec ceux du meme Arnaut Guiiiem et de Garin le Brun. A ces imitations relevées par Segre, on peut ajouter celle d'hanieu de Sescars par Peire Lunel de Montech et celle d'Amaut de Mareuil par Raimon Vidal.

Le fait que les Arts poétiques en langue d'oc, malgré leur évidente volonté d'exhaustivité, ne traitent pas de I'ensenhamen n'est gubre sur- prenant. A notre sens, il n'existe pas de genre littéraire, constitué wmme \el, de l'ensenhamen dans la littérature &c. Comme pour la cann, et pour le sirventes qui ne sont, on le sait, que des termes qui ont désigné a posterior4 des emplois particuliers de Pancien vers, l'ensenhamen n'a été considéré comme un genre littéraire que bien aprits la création du premier poeme désigné sous ce nom. Les mbricateurs de manuscrits -et tout particulierement celui du ms. R- étant en présence d'un cer- tain nombre de poitmes manifestement irnités les uns des autres, ont désigné ces poemes comme des ensenhamens en se fondant A la fois sur

29. A. Parducci, op. cit., pp. 68-69. 30. Sur ce point précis, voir A. Parducci, ag. cii., pp. 31-32. le contenu des oeuwes et Pemploi du mot ensenhameíx par les poktes eux-memes. 11 n'existe en fait qu'une poésie didactique qui se subdivise en un certain nombre de groupes de compositions correspondant des impé- - - . - B ratifs particuliers. En ce qui conceme les textes étudiés ici, o11 a pu céder B Pillusion d'un genre littéraire constitué B cause du nombre et de la relative cohésion interne desdites oeuwes. A notre avis, il n'en est rien; il s'agit en fait d'une succession de contrafacta d'un pohme déterminé qui B cause de certaines caractéristiques, était prédisposé B l'imitation. Nous croyons done qu'B la suite dún pohte d'oc ayant eu l'idée d'exposer des conseils de conduite courtoise B une classe sociale déter- minée, ses contemporains ou ses successeurs ont estimé qu'on pouvait utiliser Pidée de base en Pappliquant aux autres catégories de la so- ciété féodale. On voit done bien qu'il est impossible de parler de genre littéraire proprement dit puisque I'idée fondamentale limitait elle-meme le nombre des pokmes analogues (la Este des classes sociales n'étant évidemment pas extensible B l'inñni). On remarquera d'ailleurs que tous les pobmes conservés sont destinés A des classes sociales différentes, car le renouvel- lement est pratiquement impossible pour un meme type social. On notera que le premier en date, celui de Gariu le Brun, est logi- quement destiné au personnage qui, dans la structure courtoise, est au centre du monde fermé de la cour, la donzna31. Arnaut Guillem de Marsan, dans les années qui suivirent, eui l'idée bien naturelle de con- sacrer une composition du mbme type i Pautre protagoniste de la vie courtoise, le cauaym. Et ainsi de suite, les épigones envisagent successi- vement toutes les catégories sociales, y compris les plus modestes. Dans la meme tranche chronologique, Arnaut de Mareuil compose u11 pobme qui, quant au fond et ?I la forme, Secarte sensiblement des pobmes précités. Ce pohme représente également un rameau indépen- dant du geme didactique qui n'aura pas la meine fortune, car il ne suscitera qu'une imitation, celle de Sordel. Toujours dans les memes années, Gucrau de Cabrera aura l'idée d'exprimer un contenu didactique sous mode négatif en recourant B res- pnt d'autres genres littéraires (comme nous le verrons dans le chapitre suivant). Cette voie particuliere sera poursuivie, comme on le sait, par un imitateur direct comme Guiraut de Calanson ou indirect comme Ber- trand de Paris en Rouergue. Parmi ces trois types de composition, les deux derniers ne pouvaient

31. On peut également avancer que lo domna échappant A taut ensetgnement sco- lastique de type normatif et aux regle8 lssues de la conoeption chevaleresque de I'exis tence, était toute désignée pour etre mise en soene dsns un ensenhamen. DES TROUBADOURS OCCITANS ET CATALANS DES XUe ET XXIUe S&CLES 37 gukre fournir de nombreuses imitations, a moins de sombrer dans la plus profonde monotonie. 11 ne s'agit donc pas de croire i Pexistence d'un genre littéraire de Pensenlzamen mais A la fortune plus ou moins grande de divers rameaux du genre didactique, 3. la suite d'un nombre variable d'imitations. 11 nous parait donc nécessaire de ne pas isoler les ellsenhamens des autres rameaux de la poésie didactique, tout en soulignant avec précision les caractéristiques desdits rameaux. En bout d'analyse, il existe un eertain nombre de pokmes a tendance didactique qui peuvent 6tre rangés par affinités en un certain nombre de groupes parfois fort peu fournis. On peut donc distinguer trois groupes essentiels pami les pokmes qui relkvent de Sensenhamen. On peut considérer les pohmes de Garin le Brun, Amaut Guülem de Marsan, Raimon Vida1 de Besalú, Peire Lunel de Montech et At de Mons comme des ensenlaamens de cou&oisie en utilisant Sintitulé adé- quat consacré par la tradition. 11 s'agit en fait des textes que nous avons déterminés comme étant des ensenhamens "sensu stricto". L'ensenhamen de courtoisie étant, par définition, destiné A une classe sociale déter- minée, il se révele inutile de préciser plus avant lesdits textes en y joignant la qualité du destinataire. En effet, les groupements fondés sur la condition des destinataires ne sont pas satisfaisants. On peut établir une distiuctiou entre les pokmes précédents et ceux d'haut de Mareuil et de Sordel que Pon peut désigner, étant donné leur contenu, comme des ensenhamens moraux. Les pokmes de Guerau de Cabrera, Gniraut de Calanson et Ber- trand de Paris forment un groupe particulier que nous étudierons plus loin. Les autres pohmes rangés sous I'étiquette d'ensenhamen par Bmnei et Frank représentent autant de variétés de la tradition didactique. 11 est important de les considérer et de les étudier de manikre indépen- dante si Son veut échapper a des groupements arbitraires et des contre- sens insurmontables. Certains esprits -qui ne croient pas A Ia terminologie littéraire médiévale- pourront estimer super%us les multiples distingues aux- quels nous aboutissons. Telle était d'ailleurs jadis notre position. Nous croyons aujourd'bui qu'il est utile de préciser les caractéristiques des pokmes didactiques pour déterminer des groupements. 11 importe, en tout cas, de se méfier des multiplcs dénominations médiévales (conte, enseignement, dit, doctrinal) et d'admettre la polygenese sans tomber dans un doute systématique qui conduit inévitablement Péclatement de toutes les classifications et A I'impossibilité d'établ'i des constantes évidentes inherentes A un certain nombre d'oeuvres 82.

32. Cette posdion est clairement exprimCe par Ch. V. Langlois, La vie en France as moyen &e d'aprds les moratistes du temps, Paris, 1926, pp. vi-vn: 'Zes historiens- ,

, , 38 FR~PN~ISPIROT. - RECHERMES SUR LES CONNAISSANCES L&- C'est ti ce prix que pourra &re réalisée une étude approfondie des différentes traditions didactiques de la littérature médiévale en langue doc. . -

. , CHAPITRE 11

LES "SIRVENTES-ENSENHAMENS"

. ~ -, Nous venons de déterminer que les pohmes de Guerau de Cabrera,

,. ,, Guiraut de Calanson et Bertrand de Paris formeut un groupe particuiier. .Nous avons vu que le contenu et la forme de ces textes les distinguent des a~senhamensde courtoisie et des ensenhamens moraux. 11 nous a semblé utile d'étudier minutieusement ces trois pohmes . . pour détenniner leurs liens éveutuels avec d'autres oeuvres ou genres littéraires.

. . S . . 6 1. POSLTIONDE LA CRITIQUE. En 1904, Bohs ' &irme qu'

il faut mentionner ici trois potlmes qui sont considérés par Bartsch, Restori et Stimming comme étant des ensenhamens, mais qui ne méritent pas cette désignation si 1011se tieut aux déhitions données plus hant. En réalité, eux- memes ne se considkrent pas comme ensenhamens et n'eu portent pas le nom. Les poktes de 2 et 3 désignent leur oeuvre comme sirventes des I'introductiou. ii est A remarquer que db le début, ils preunent une attitude moqueuse envers le joglar quémandenr de chansons, ce qui ne se produit pas dans les ensenhamens véritables. Ce sont les potlmes: 1. Cabra luglar de Guerau de Cabrera. 2. Fadet Joglar de Guiraut de Calanson. 3. Ouordo, ieu de Bertrand de Paris en Rouergue.

nomenolateurs de la iittérature de la Fzance au mrryen $m,tant en iatin qu'en langue vulgaire (oii et ao), se sant dooné beaucoup de peine sans grand succhs jusqu'ici, pour repartir méthodiquement sous des en-tetes les innambrebles écrits, relatifs B la .morale,, qu'ils se proposaient de olasser: en prose au en vers. d'inspiration religieuse ou d'inspi- ration profane, traités théoriques, reoueils de rbflenions détachées, exhortations paréné- tiques, .chastoiementsi et ~ehseignements., remes plus ou moin~satiriques ou descrip tions des ~étatsdu monde. (c'est-B-dire des conditians sociales), etc. iis ant btk souvent ernbarrassés, parce que quantité d'oeuvres ont un caracthre mMe et participent simui- tanément, A divers. degrés, de la philosophie, de la prédication, de la pédsgogie et de la saüre, véhémente ou amuiée." 1. W. Bohs, AbrUs lssi'e mvs intraua, in RF, t. 15, 1904, p. 210.