Lapurdum Euskal ikerketen aldizkaria | Revue d'études basques | Revista de estudios vascos | Basque studies review

6 | 2001 Numéro VI

Aurélie Arcocha-Scarcia (dir.)

Édition électronique URL : http://journals.openedition.org/lapurdum/1127 DOI : 10.4000/lapurdum.1127 ISSN : 1965-0655

Éditeur IKER

Édition imprimée Date de publication : 1 octobre 2001 ISBN : 2-84127-156-0 ISSN : 1273-3830

Référence électronique Aurélie Arcocha-Scarcia (dir.), Lapurdum, 6 | 2001, « Numéro VI » [Linean], Sarean emana----an 01 juin 2009, kontsultatu 01 mars 2020. URL : http://journals.openedition.org/lapurdum/1127 ; DOI:10.4000/ lapurdum.1127

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Propriété intellectuelle IKER UMR 5478 1

Articles - Idazlanak

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Pour une critique contextuelle des « petites littératures » Bernardo Atxaga : l'invention de l'écrivain basque

Ur Apalategi

1 S'arrachant peu à peu à « l'emprise originelle des instances politiques et nationales qu'elle a contribué à instituer et à légitimer »1, la littérature, considérée comme champ sociologique transnational, tente continuellement de faire oublier cette paternité encombrante (la nation est une création littéraire) qui la leste et la diminue autant, sinon davantage, qu'elle la glorifie. Pourtant, le processus d'autonomisation de la littérature se réalise paradoxalement nation par nation. « La conquête de la liberté de l'ensemble de l'espace littéraire mondial s'accomplit donc à travers l'autonomisation de chaque champ littéraire national : les luttes et leurs enjeux se délivrent des impositions politiques pour ne plus obéir qu'à la seule loi spécifique de la littérature »2. Autrement dit, la dénationalisation (l'universalisation) de la littérature a partie liée avec la constitution d'un espace national. Ceci explique sans doute l'horreur de l'extra- littéraire, a fortiori dans les littératures des nations fragiles ou sans Etat, encore ombilicalement rattachées à leur raison d'être première, la raison nationale.

2 La littérature basque fait partie de ces éternels aspirants à l'autonomie vis-à-vis du champ politique national. De ce fait, elle partage avec les autres aspirants une même angoisse existentielle. Sans doute pourrait-on thematiser cette « angoisse » de la façon suivante : la pratique de la littérature littéraire repose matériellement sur la pérennité de la langue nationale ; or, la survie de la langue dépend de celle de la nation (et, plus concrètement, de la mise en place d'institutions étatiques telles que le système éducatif, producteur du lectorat) ; par conséquent, les écrivains aspirant à l'autonomie de leur art doivent d'abord se battre pour la survie de la nation, ce qui est, on s'en doute, en totale contradiction avec leur souhait initial d'autonomisation littéraire. C'est dire la difficulté d'une critique littéraire contextuelle appliquée à ces petites traditions littéraires extrêmement soucieuses d'assurer leur faible autonomie acquise à dures

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peines et sans cesse remise en question. En effet, toute entreprise critique de ce type risque à tout moment de dévoiler la vérité à peine cachée de l'hétéronomie plus ou moins grande dans laquelle vit l'institution littéraire. Les représentations de la littérature que les écrivains des nations du « tiers-monde littéraire » essaient de propager dans la société – et par l'entremise desquelles ils font un travail d'autosuggestion destiné avant-tout à eux-mêmes – résistent mal au regard contextuel. Mais c'est précisément la fragilité de telles institutions sociales, l'issue incertaine du combat qu'elles livrent qui en rend l'étude précieuse.

Un acteur de la vie littéraire basque

3 Bernardo Atxaga (de son vrai nom, Joseba Irazu Garmendia) est né en 1951 à Asteasu, petit village de moyenne montagne de la province de Guipuzcoa, au Pays Basque d'Espagne. A l'époque où il commence à publier ses premiers écrits en euskara (1972), le régime franquiste en place interdit toute manifestation culturelle en langue basque. La prudence impose à beaucoup d'écrivains espagnols (non seulement basques) le choix d'un pseudonyme pour pouvoir publier leurs œuvres. Au milieu de l'effervescence idéologique qui s'étend à tous les secteurs de l'opposition au régime, la « littérature sociale » ou « engagée » vit ses heures de gloire. Mais, déjà, de nouvelles générations d'auteurs ayant eu accès à la « bibliothèque universelle » et s'en étant nourris viennent frapper à la porte. Des courants et des groupes littéraires se forment qui entendent délivrer la littérature de son asservissement militariste. Parmi ces derniers on trouve, au Pays Basque, le groupe Pott dont Atxaga est précisément l'un des fondateurs. Atxaga fait volontairement dérailler le train de la littérature basque de la voie toute tracée du réalisme ou de l'allégorie politique en y introduisant le surréalisme, l'oulipisme et autres courants avant-gardistes. Puis, délaissant la stratégie élitiste mise en œuvre jusque-là (à coup de manifestes et d'œuvres hermétiques), Atxaga se tourne au cours des années 80 vers la littérature pour enfants (seul véritable marché littéraire bascophone grâce à l'introduction de la langue basque dans le système éducatif de la Communauté Autonome Basque), genre moins prestigieux mais lui permettant de se professionnaliser. Atxaga conçoit la professionnalisation comme le meilleur moyen d'affirmer l'autonomie de l'activité littéraire face à l'omniprésence du discours politique (toutes tendances confondues) qui se constitue autour de ce que l'on nomme déjà « le problème basque ». Le destin littéraire d'Atxaga se voit bouleversé par l'attribution du Prix National de Littérature d'Espagne (1989) à son œuvre Obabakoak (rédigée en langue basque et traduite pour l'occasion) et la consécration internationale qui s'ensuit (l'œuvre sera traduite dans plus de vingt langues). La littérature basque tient en lui son premier auteur universel et en voit sa légitimité renforcée au sein de l'espace social basque. Les années qui suivent ce changement de statut spectaculaire verront la reconfiguration totale de la problématique littéraire de l'auteur, reconfiguration s'accompagnant d'une réorientation stylistico-thématique parallèle.

4 On se propose ici de travailler à une interprétation de la problématique existentielle du personnage-type du corpus atxaguien (postérieur à cette date charnière) qui tienne compte de la modification contextuelle de la situation d'énonciation dans laquelle de trouve l'auteur. A cet effet, la production littéraire de l'auteur sera considérée comme l'objet d'un discours polyphonique (celui de l'auteur, celui des divers récepteurs – journalistes, critiques –, le nôtre) dont l'enjeu est bien d'en fixer le sens.

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Problématique de l'auteur dénationalisé

5 Le personnage atxaguien récurrent du corpus des années 90, développant une philosophie personnelle imprégnée d'individualisme, a préféré la solitude (idéologique et relationnelle) à l'embrigadement3. Il se situe dans un entre-deux spatial (d'un côté Barcelone, ou d'autres endroits de la géographie espagnole pouvant symboliser le marché littéraire espagnol et/ou international, et de l'autre la littérature basque, tour à tour et métonymiquement symbolisée par Bilbao, Irurzun, Asteasu ou le village imaginaire d'Obaba). Les rapports qui unissent le personnage à chacune des deux parcelles de cet espace sont d'ordres divers mais ont pour trait commun leur caractère ambigu, ambivalent et insuffisant. En effet, le personnage finit toujours par refuser sa fidélité à quelque parcelle de l'espace que ce soit. L'affirmation de son individualité souveraine mais douloureuse l'emporte sur une fidélité spatiale liée à un sens collectif et à une protection communautaire. Souffrance et stratégie s'associent dans la tentative permanente du personnage d'échapper à l'obligation de choisir entre les deux camps sans en pâtir les graves conséquences (l'ostracisme et la mort) qui lui sont promises.

6 Il s'agit maintenant de mettre en relation cette problématique avec la situation positionnelle dans laquelle Atxaga évolue. La spécificité absolue de la position de l'écrivain résulte de sa double inscription simultanée dans des champs sociologiques concurrents. Il aurait pu laisser le soin à un traducteur professionnel de traduire son œuvre en espagnol, ce qui aurait fait de lui un auteur s'inscrivant exclusivement dans le champ littéraire basque et bénéficiant d'une traduction à titre d'auteur « étranger ». Au lieu de cela, il a préféré prendre en charge la traduction de sa propre œuvre, ce qui fait de lui un auteur de plein droit du champ littéraire espagnol4. La double inscription sociologique d'Atxaga n'est pas sans conséquences sur le travail d'interprétation de ses œuvres. On peut considérer qu'à partir du roman L'Homme seul l'auteur semble avoir pris définitivement conscience qu'il s'adresse simultanément à deux publics aux caractéristiques opposées. L'assurance qu'il a acquise de voir dorénavant chacune de ses créations traduites et publiée par les maisons d'édition espagnoles modifie radicalement sa proprioception positionnelle antérieure de simple auteur basque. Le découpage symbolique dichotomique de l'espace (Barcelone/Pays Basque) et la situation topologique intermédiaire et ambiguë du personnage central, caractéristiques de la problématique bi-culturelle qui est celle de l'auteur s'inscrivant dans deux champs littéraires concurrents, contraste nettement avec l'unicité de l'espace et la situation dominante du personnage central dans une œuvre telle que Mémoires d'une vache, écrite à une époque ( 1990) où l'auteur se perçoit encore comme appartenant exclusivement au domaine littéraire basque. La suppression de l'adjectif « basque » (le titre de la version originelle basque de l'œuvre est « Mémoires d'une vache basque ») lors de la traduction tend à prouver que le livre fut conçu pour un destinataire basque et que l'écrivain a jugé préférable, devant la perspective de le publier en espagnol (puis en français et en d'autres langues5), d'éviter des lectures réductrices de l'œuvre et de favoriser le processus d'identification du lecteur espagnol, puis international, au personnage principal. 7 A partir de la prise de conscience par l'écrivain de sa double inscription sociologique, on peut considérer que les conditions de l'énonciation littéraire ont changé. La

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modification de la nature de l'un des trois termes formant le triangle énonciatif mis en lumière par la pragmatique (destinateur/œuvre/destinataire) provoque une altération sensible de l'essence même de la communication littéraire. Chacun des motifs d'une œuvre s'adresse consciemment à deux lectorats aux caractéristiques opposées. L'auteur sait que chacune des lignes qu'il rédige sera ensuite « traduite » par lui-même et parviendra à un second lectorat6 ayant des caractéristiques opposées à celles du premier et « recevant » le texte avec un « horizon d'attente » formé par un héritage intertextuel radicalement différent. Il est loisible de penser que chaque motif inséré par l'auteur dans la trame de son œuvre est chargé non pas d'une intentionnalité unique (comme dans le cas des œuvres écrites pour un seul lectorat homogène) mais d'une intentionnalité double ou multiple découlant de la prise en compte au moment créateur de la présence d'un destinataire double ou multiple. C'est ce que nous nommons la pluri-intentionnalité du motif littéraire. Cela entraîne une interprétation double et réversible qui peut s'appliquer au passage de la nouvelle Reflexiones un tanto francesas dans lequel le narrateur-écrivain dénonce la conception nationalitaire de la littérature qui prédomine dans la plupart des pays : [...] dans la plupart des pays du monde le Ministère de l'Éducation conçoit la littérature comme littérature « nationale », et oblige des millions d'écoliers à étudier une histoire de la littérature qui est toujours celle de l'Espagne et seulement celle de l'Espagne, ou celle de la France et seulement celle de la France, en réduisant au silence les cours où l'on enseignait l'Histoire de la Littérature Universelle.7 8 Si la remarque s'applique au monde littéraire espagnol ou au marché international – dans lesquels le produit Atxaga a été vendu sous l'étiquette « nouvelle Espagne, exotisme rural basque » – ne doutons pas qu'elle s'applique également (dans l'esprit et l'intention de l'auteur) au monde littéraire basque auquel l'auteur reproche le même travers. Les acteurs de la vie littéraire basque commencent à comprendre, au moment de la publication du texte, que celui par qui le reclassement est arrivé mène en quelque sorte une double vie et risque par cette attitude de réduire à néant le gain symbolique collectif que sa consécration individuelle a supposé pour eux-mêmes. Le ressentiment et la jalousie s'installent au cœur de la relation qui unit Atxaga à son domaine littéraire originel. L'auteur déclare à plusieurs reprises, et dans divers médias, qu'il refuse de devenir un « écrivain national »8, qu'il ne se sent pas disposé à sacrifier son parcours individuel au profit d'une littérature basque ayant grandement besoin du capital symbolique que représente désormais l'écrivain internationalement consacré qu'il est devenu. Cette réticence d'Atxaga n'est pas sans rappeler celle du militant à la retraite Carlos – « homme seul » – qui prend le soin de spécifier, au cours d'un entretien avec Jone – le membre féminin du couple d'activistes qu'il héberge dans la cave de sa boulangerie –, que sa décision est ponctuelle et qu'elle ne signifie en aucune façon qu'il continue à se sentir membre de l'organisation clandestine : « Actuellement, je vous cache, d'accord, parce que, quand on me l'a demandé, il m'a semblé que je devais le faire. Mais ce n'est pas une décision qui vaut pour l'éternité. Il se peut que la prochaine fois je refuse. Il faut que vous vous mettiez ça dans la tête. Moi, je ne fais pas partie de l'organisation »9 9 Atxaga refuse de se sentir lié de manière exclusive au domaine littéraire basque en vertu d'un supposé contrat moral tacite et on lui en tient rigueur. Il devine que la relation que l'organisation – la littérature basque – entend soudainement approfondir avec lui est intéressée. Le monde littéraire basque compte profiter de la position acquise par lui sur le marché espagnol afin d'assurer et de consolider son propre reclassement à l'intérieur de l'espace social basque. Carlos impute à l'activiste Jone un

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raisonnement qui rend bien compte de la nature intéressée de la sollicitude dont il fait l'objet de la part de l'organisation : « Il s'en faut de très peu pour que cet homme ne revienne dans l'organisation, et c'est pourquoi il a accepté de nous cacher, Jon et moi. Et ce serait pour nous une aubaine s'il arrivait à faire le pas, parce qu'il dispose de la meilleure cachette du monde, un hôtel situé à quelques kilomètres de Barcelone dans un endroit pratiquement désert. Un succès magnifique qui résoudrait beaucoup de problèmes d'infrastructure ».10

Entre engagement et compromission

10 L'auteur s'interroge, tout au long de la décennie, sur la nature du lien qui l'unit malgré tout à la littérature basque. Carlos perçoit la mission d'hébergement qu'il doit mener à bien comme une épreuve libératrice après laquelle sa conscience ne lui posera plus de problèmes et il pourra s'intégrer pleinement à une vie barcelonaise nouvelle (il projette d'apprendre le catalan et de se défaire de sa personnalité actuelle, conditionnée par son appartenance passée à l'organisation). Autrement dit, Atxaga nourrit le secret espoir que s'il arrive à régler une fois pour toutes le problème de sa prétendue dette envers la littérature basque, il pourra s'intégrer pleinement à la vie littéraire espagnole ou internationale (symbolisée par Barcelone)11.

11 L'intrusion inespérée d'un tiers élément dans le rapport sadomasochiste qui unissait l'auteur autonomisant à une petite tradition littéraire dominée par une conception engagée de la littérature provoque inévitablement la jalousie collective à l'égard d'un auteur désormais accusé par certains de ses confrères de s'être laissé séduire par l'« autre ». Dans le quotidien Egunkaria, la journaliste Ines Intxausti commentant une intervention récente de l'auteur à la télévision basque destinée aux hispanophones12 souligne l'aisance de l'auteur conscient de s'adresser à l'ensemble de la population du Pays Basque (bascophones et non-basccophones confondus), et compare cette aisance à la tension qui se lit sur son visage chaque fois qu'il s'adresse à la seule communauté bascophone : [...] il ne semblait pas qu'il fût aussi mal à l'aise que le jour où il répondit aux questions de J. Garzia et de H. Etxeberria [sur le canal bascophone]. Et le problème ne résidait nullement [...] dans l'identité des ces deux présentateurs, mais dans la présence de cette audience basque qu'une relation d'amour – désir – haine unit à B. Atxaga. [...] Enfin, il allait être écouté [sur le canal hispanophone] par ceux auxquels il désirait s'adresser. Et non par les jaloux de toujours qui ne pouvaient s'empêcher d'éprouver du ressentiment [...].13 12 Des propos plus récents de l'écrivain Pako Aristi traduisent le désenchantement d'une littérature basque qui se voit progressivement délaissée par l'artisan majeur de son reclassement sociologique. L'article commente la parution du recueil Horas extras (Madrid, Alianza, 1997) qui n'a été écrit que dans sa version castillane. Aristi s'y déclare surpris par la manière dont Atxaga décrit le Pays Basque, manière qu'il qualifie de froide et plus propre de quelqu'un qui est de passage que de quelqu'un qui y habite et qui sent les choses qui s'y déroulent. Constatant que le livre a été conçu pour le lectorat espagnol dans son ensemble, il déplore le fait qu'Atxaga ne fasse pas grand cas de la présence au Pays Basque (où le livre sera lu par les deux communautés qui coexistent difficilement) d'une communauté bascophone qui est porteuse d'une vision différente de la réalité et qui souffre habituellement d'un lourd silence médiatique dans les médias hispanophones. Selon Aristi, les hispanophones du Pays Basque ne montrent

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aucun intérêt pour ce qui est produit en langue basque, mis à part pour ce qui touche à B. Atxaga. La déception n'en est que plus grande :

13 Je pense qu'il est actuellement le seul pont interculturel au Pays Basque, et c'est pourquoi son conformisme m'est douloureux : au lieu d'aider les hispanophones à découvrir une autre réalité, il les confirme dans leurs opinions antérieures [...]. Je ne sais si cela en est la cause, mais il me semble que les écrits, idées ou propositions de B. Atxaga ne sont plus tellement commentées au sein de la communauté bascophone, ces derniers temps14 14 Il n'est pas difficile d'établir une chronologie sommaire mais éclairante de ce processus d'éloignement : Obabakoak (1989) fut rédigée en langue basque, puis expressément traduite par l'auteur, assisté dans cette tâche par d'autres écrivains-traducteurs, à seule fin de la présenter au Prix National de Littérature d'Espagne ; Mémoires d'une vache (1991), fut écrite d'abord pour un destinataire bascophone, ce que les plaintes postérieures de l'auteur concernant l'accueil frileux réservé à l'œuvre par le lectorat basque prouvent sans peine ; en 1993, Atxaga publie le roman L'Homme seul dont il écrit simultanément les deux versions ; en 1996, pour l'œuvre Un Homme nommé Sara, fait jusque-là inédit, la publication de la version en castillan précède la publication de la version en langue basque ; enfin, en 1997, Atxaga publie le recueil de nouvelles Horas extras qui est manifestement destiné, comme Aristi le souligne (voir supra), au lectorat hispanophone du Pays Basque ou du reste de l'Espagne. En réalité, Atxaga est à la recherche d'une motivation réelle pour continuer à écrire en langue basque : Ce serait formidable de trouver un filon, c'est-à-dire de trouver une raison solidement fondée qui justifierait que l'on continue à écrire en basque.15 15 Comment apprécier, après avoir connu la douceur du « statut d'écrivain hispanique traduit dans le monde entier », l'étroitesse et l'inconfort d'une littérature basque incomplètement structurée et dont l'autonomie sera toujours fragile tant que l'assise sociolinguistique de la langue basque ne sera pas stabilisée ?

16 Toutefois, il faut se garder de conclure que l'écrivain trouve dans la position qu'il lui échoit d'occuper au sein du paysage littéraire espagnol ce à quoi il aspirait réellement. Dans la nouvelle Reflexiones un tanto francesas, l'auteur poursuit son auto-analyse par l'entremise d'une fable16. À la question « quel est l'animal le plus cruel ? », les insectes (animaux les plus faibles, symbolisant l'écrivain) répondent sans hésiter qu'il s'agit des moutons (dont les insectes sont la pâture) et à la question « quel est l'animal qui se caractérise par sa bonté ? » ces mêmes insectes répondent sans hésiter que cet animal- là est le tigre (qui venge les insectes en pourchassant le mouton). Cet apologue sert à exprimer le paradoxe de la position atxaguienne dans l'espace social : du point de vue purement subjectif et relatif qui est le sien, l'auteur ne peut s'empêcher de penser que le marché littéraire espagnol (le tigre) lui a rendu un grand service en court-circuitant l'emprise que la littérature basque (le mouton) soumise à l'influence du champ politique avait sur lui (insecte fatigué par tant d'années passées à défendre l'autonomie de la littérature). Nonobstant, Atxaga ne se fait guère d'illusions ni sur la manière dont il s'est laissé séduire par la littérature espagnole ni même sur le rôle que celle-ci lui réserve. Les réflexions que le personnage d'écrivain de la nouvelle développe montrent la façon dont l'auteur s'identifie avec clairvoyance aux écrivains du tiers-monde auxquels on assigne un rôle précis dans le système littéraire international : [...] « exotique ». C'est ce que, littérairement parlant, le Premier Monde exige du Second ou du Tiers-monde : qu'il soit exotique.17

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17 N'oublions tout de même pas qu'Atxaga a été récompensé pour une œuvre, Obabakoak, qui se présentait, entre autres – et bien que cet aspect de l'œuvre soit d'un intérêt secondaire –, comme une exploration du passé ethnographique du Pays Basque, comme une approche littéraire de l'inconscient collectif de la communauté bascophone. L'auteur, lui, ne semble pas avoir oublié que c'est Obabakoak (œuvre néo-ruraliste) qui a reçu le Prix National et non L'Homme seul. Ses textes-essais de 1997 (recueillis dans Horas extras) démontrent, si besoin était, qu'il en a tiré des leçons. L'euphorie consécutive à l'attribution du Prix et à l'adaptation à sa nouvelle vie d'écrivain internationalement reconnu étant passée, il entreprend une analyse sereine et désenchantée du rôle qui lui échoit. Esquissant une théorie de la structure du marché littéraire mondialisé, Atxaga brosse le portrait sans concessions de l'écrivain-type d'un pays littérairement (et souvent littéralement) pauvre. Celui-ci se doit d'être le fier représentant des spécificités locales dont il ferait la matière première de ses œuvres. Mais les exigences du premier monde littéraire ne s'arrêtent pas là, puisque l'auteur « périphérique » se voit interdire l'accès à certains genres, chasses gardées des écrivains du « centre » : Il serait encore plus surprenant que le marché éditorial européen, ou bien le public lui-même, acceptent qu'un de ces écrivains fasse les mêmes choix que les écrivains de la métropole. « Nous avons déjà des romans intellectuels, des romans sophistiqués, des romans avant-gardistes », dirait la métropole, « ce dont nous avons besoin c'est d'une littérature de la mémoire, de nouvelles de la marge. Un peu d'exotisme, s'il vous plaît, ou à défaut, de la littérature revendicative, l'histoire de la grande souffrance qui vous est infligée par votre dictateur ».18 18 Admirable tentative d'objectivation que celle à laquelle se livre Atxaga. L'auteur, dont le Cycle d'Obaba va à l'encontre de l'idée même d'exotisme – Obabakoak doit être lue comme une violente diatribe contre l'idéologie culturaliste et non comme une exaltation nostalgique de quelque essence identitaire collective, inconsciente ou archaïque (selon les goûts) – comprend, avec dépit, que son œuvre n'a pas nécessairement été récompensée pour les bonnes raisons et que « la reconnaissance des capitales littéraires se fait au prix d'une extraordinaire annexion de l'œuvre excentrée aux intérêts centraux »19. Il en résulte qu'Atxaga ne semble destiné à occuper, au sein de la vie littéraire espagnole, qu'une position dominée et périphérique de représentant patenté de la parcelle basque de l'identité plurielle de l'Espagne contemporaine. Lui qui s'est battu deux décennies durant, au sein de la littérature basque, contre une conception nationalitaire de la littérature en tant que vecteur de l'identité collective se retrouve de nouveau enfermé dans une catégorie nationale. D'un côté, le monde littéraire basque prétend faire de lui le héros et le héraut du reclassement collectif de l'institution, de l'autre le monde littéraire espagnol entend le confiner à ce rôle d'écrivain « national » qu'il abhorre : Longtemps l'on a soutenu que celui qui est basque est nationaliste, partant que l'écrivain basque est forcément nationaliste. Cet amalgame a été recherché, de façon intéressée, des deux côtés de la tranchée. Eh bien, je n'y souscris pas.20

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BIBLIOGRAPHIE

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NOTES

1. Pascale Casanova. La République mondiale des lettres, Paris, Seuil, 1999, p.60. 2. Ibid., p.61. 3. Le roman paradigmatique de la production atxaguienne des années 90 porte un titre éclairant – L'Homme seul (Paris. Christian Bourgois. 1995) – et narre le devenir incertain d'un ancien militant de l'ETA, reconverti dans l'hôtellerie à Barcelone et qui met sa situation en danger lorsqu'il décide, sans avertir ses associés – également activistes à la retraite –, d'héberger des militants en fuite dans la cave de la boulangerie de l'hôtel. 4. Tel n'est pas le cas. par exemple. d'A. Lertxundi – finaliste du Prix National de Littérature d'Espagne 1994 – qui explique qu'il préfère recourir à un traducteur afin de pouvoir consacrer entièrement son temps à la création (en langue basque). 5. Il est utile de souligner que les traductions dans les langues autres que l'espagnol (français, anglais, etc.) se font à partir de la version castillane des œuvres effectuée par l'auteur, faute de traducteurs qualifiés pouvant le faire à partir du texte originel en langue basque (et. sans doute également. en raison de l'inexistence d'un rayon « littérature basque » dans les librairies, ce qui pousse les éditeurs à préférer l'étiquette, plus commerciale, de « domaine hispanique »). 6. Il serait préférable d'employer l'expression d'“écriture répétée” ou le terme de réécriture (bien que son emploi soit ici équivoque) afin de bien rendre compte du fait que chacun des deux destinataires lira un texte qui lui est destiné, qui a été créé en fonction de sa présence, et non un texte s'adressant primitivement à un autre lectorat et qui par la suite a été traduit.

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7. B. Atxaga, “Reflexiones un tanto francesas”. in Horas extra, Madrid. Alianza. 1997. p.85 (nous traduisons). 8. “Yo no soy el escritor nacional de Euskadi”. La Revista, 21-7-1996. Madrid, p. 16-23. 9. B. Atxaga, L'Homme seul, op. cit., p.44-45 éd. française (nous soulignons). 10. Ibid., p.43. 11. Barcelone présente l'avantage – face à sa concurrente Madrid – d'être en même temps la capitale littéraire espagnole (en raison de sa concentration éditoriale) ainsi qu'une capitale littéraire dénationalisée (en raison de son passé artistique cosmopolite). Elle est. pourtant, le lieu pouvant le mieux symboliser la place d'Atxaga sur l'échiquier littéraire mondial. 12. La Télévision basque (Euskal Telebista. ETB) possède deux chaînes généralistes : l'une diffuse en basque, l'autre en espagnol. 13. I. Intxausti, “Bernardo Atxaga Forumean”, Egunkaria 9 septembre 1997. Andoain, p.33. 14. P. Aristi, “Ordu estrak”. Egunkaria 5 septembre 1997. Andoain. p.2 (nous traduisons). 15. Ibid.. p.30 (nous traduisons toujours). 16. B. Atxaga. “Reflexiones un tanto francesas”, in Horas extras, op. cit., p.77-78. 17. B. Atxaga. “Reflexiones un tanto francesas”. in Horas extras, op. cit., p.93 (nous traduisons). 18. B. Atxaga. “Horas extras”. in Horas extras, op. cit., p.43. 19. P. Casanova, La République mondiale des Lettres, op. cit., p.226. 20. In entrevue “Yo no soy el escritor nacional...”. op.cit.. p. 23 (nous soulignons)

INDEX

Thèmes : littérature Mots-clés : écrivain contemporain, Atxaga Bernardo (1951-), littérature basque, biographie d’écrivain, critique littéraire Index chronologique : 20e siècle

AUTEUR

UR APALATEGI

Maître de Conférences (Etudes basques) à l'Université de Pau et des Pays de l'Adour [email protected]

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Joannes Etxeberriren Eliçara erabiltceco liburua-z

Isaac Atutxa

0. Atarikoak

1 Jarraiko lerroetan Joannes Etxeberri Ziburukoak idatzi eta gurera heldu den liburuetako baten aurkezpena egin nahi izan dugu. Liburu hau Eliçara erabiltceco liburua da eta idazle honek idatzi eta argitaratu direnetan hiru-garrena dugu.1

2 Mendeetan zehar, hiru lekukotasun desberdin eman ahal izanagatik, guk bi baizik ezin izan ditugu aztertu, 1665.ekoa eta hurrengo urtekoa, 1666.ekoa. 3 Lantxo hau hiru atal nagusitan banatu dugu. Lehenean, lekukotasun desberdinen araketa sakona egiten da. Nahaste haundia izan da itxura guztien arabera hiru argitarapen desberdin behintzat izan baitirelako. Guk aurkitu ditugun lekukotasun hauen ale desberdin guztiak aztertu eta lortutako emai-tzak eskaintzen ditugu.2 Bigarren atalean, eskuartean ditugun bi lekukotasu-nen erkaketari ekin diogu lekukotasun desberdinon filiazioa lortu nahiean. Hirugarren atalean, azkenik, eta liburuaren lekukotasun desberdinak inpri-matu ziren garaiak aintzat harturik, liburuak argia ikus zezanerako jarraitu behar zuen ibilbidea gogoan izaki, zenbait bitxikeria bibliografikoz aritu gara, liburuaren beraren egituraketari buruzkoa esaterako.

1. Eliçara-ren lekukotasun desberdinak

1.1. Zuzeneko tradizioa

4 Hau da gugana heldu den Etxeberri Ziburukoaren hirugarren eta azken liburua3.

5 Jusef Egiategi eta Aita Larramendik ez dute beren lanetan aipatzen (ezagutzen ez omen zutelako ?). Badute, haatik, J. C. Adelung eta J. S. Vater-ek aipamenik. Izan ere, honela diote Mithridates liburuan (1809 : 23) : « Elicaria (sic) Erabiltceco Liburia (Biscayea). Pau in Bearn, 1666, 24 ».4

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6 Behin, L.L. Bonaparteren Eskuizkribuak-Argitarapenak liburua (1989) arakatzen geundela, hurrengo bi aipamenok irakurtzeko aukera izan genuen : 352. UN PATRIOTE. Recueil des quelques Eclaircissemens Relatifs au paiss et peuple Basque. Par... Dedié a son Altesse Le Price Napoleon. Bayonne le 24 Février 1866. Cuaderno, 41 hoj., 23,5 cm. MICROFILM 2 C 27 Proc. : ADN m/s B-95 352bis. (NOTA bibliográfica sobre Joanes Etcheberry). 2 hoj., 27 cm. Proc. : ADN m/s B-105.MICROFILM 2 C 27 7 Euskaltzaindiako Azkue Bibliotekako Bonaparte Printzearen eskuizkribuen mikrofilmetan bilatu eta han aurkitu genuen, UN PATRIOTE honen 41 orrien ondoren, Joannes Etxeberri Ziburukoaren Noelac eta Eliçara erabiltceco liburuaren aipamen bibliografikoz osatutako bi orri. Lehen orriak Noelacen hiru argitarapen desberdinen berri daukagu. Bigarrenean, Eliçara ren lekukotasun bati buruzko xehetasun hauek ditugu : Eliçara erabiltceco liburua, Ioannes Etcheberri Dotor theologoac eguiña. Eta Iaun Noble Bertrand de Etchaus Toursco archipizpicu Digneari dedicatua. Bigarren aldian imprimatua. Paven Ioannes Desbaratz Erregueren imprimatçaillea baithan 1666. pag., titre non compris 1 à 506 et avec la table 517. au revers de la page du la tablefin se trouve : Iesusen Compagniaco aita batec D'etcheverry doctor cenaren adisquideac marinelen favoretan arrats guztiez eguin behar examena. : Aita harc berac Iesus Christori gurutcearen aitcinean contricionezco orationea. - ces deux morceaux, en vers, ne sons point paginés ; ils occupent 11 pages en sorte que le total, sans le frontispice et le revers du frontispice est de 1 a 528. L'approbation, en latin, est donnée à Sare de 22 mai 1635 et signée P. de Atchular curé de Sare, P de Guillentena curé D'Itsatsu. Ce quiune distance de 31 ans entre la 1re et la 2e édition, et l'auteur était mort en 1666. 174 mana — 202 JEcen — 226 Haren — 266 Ecen — 304 Içatu — 326 Guinenean — 348 ikhisteco — 376 arren. 8 Pertsona honen ustez, lehen argitarapenetik bigarrenera 31 urte igaro dira, bitartean Etxeberri bera ere hil egin zaigularik. Ez da, haatik, ohartu 1665.eko argitarapenaz, ezezaguna zaiolako ziurren. Honek Joanes Desbaratz inprimatzaileari ere ez ote zitzaion gauza bera gertatu pentsarazi digu.

1.1.1. 1636. urteko lekukotasuna

9 Vinsonen sailkapenaren arabera hiru argitarapen desberdin ezagutu izan ditu liburu honek mendeetan zehar. Hona hemen balizko lehen argitara-penaren aipamen bibliografikoa (1891 -8 : 76) : « 17a.- Eliçara erabilceco liburua Ioannes Etcheberri Dotor Theologoac eguiña eta iaun Noble Bertrano de Etchaus Tursco Aphezpicu digneari dedicatua. Bordelen, Guillen Millanges Erregueren imprimatçaillea baithan 1636. » 10 Vinsonek dioenez, aipamen hau M. Pierquin de Gembloux-ek egiten du bere Histoire littéraire liburuan, baina berak zalantzatan jartzen du Pierquin honen lana « insuffisant, désordonné et inexact » delako.

11 Hau da, izan ere, Pierquin de Gembloux jaunaren aipamena :

12 « Etcheberri Joannes, Eliçara erabillceco liburna, etc, in-18, Bordelen Guillen Milanges Erzegueren, imprimatcaillea baith an 1636, p. 542 ». (1958a : 264). Gehigarrietan ere

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aipamen berbera dugu. Eta bai, baliteke Pierquin-en lana « insuffisant, desordonne et inexact » izatea ; baina, dirudienez, begibistan izan du argitarapen hau. Bere neurria (in-18) eta bere orrialde kopurua (542) ere ematen dizkigu. Eta ezagutzen diren beste bi argitarapenak ez datoz bat bi datu hauekin. Baliteke, bestalde, Pierquin de Gembloux berak ere beste non-baiten jaso izana datuok. 13 Urkixo jauna ere ezagun diren bi argitarapenez landako beste hiru-garren baten aldeko zen. Berak Joanes Etxeberri Sarakoaren eskuizkribuak aurkitu Zarautzen frantziskotarren komentuan eta argitara eman zituen 1907.ean. Denak ditugu Las obras bascongadas del doctor labortano Joanes Etcheberri izenburua duen liburuan bilduak. Hona hemen Urkixoren ustea (1907 : 149-150) : El autor de Hatsapenac cita constantemente a Etch., abreviatura evidente de Etcheberri, sin darnos ningún detalle que nos indique el libro o libros a que se refiere. He podido sin embargo comprobar que todas las formas verbales que el Doctor de Sara atribuye a su homό-nimo de Ziburu, se encuentran en la siguiente obra, que me ha sido confiada por el entusiasta vascόfilo M. Hiriart, Bibliotecario de la villa de Bayona : ELICARA | erabiltceco | Libvrva. | IOANNES ETCHEBERRI | Dotor Theologoac | eguiña. | Eta iaun Noble Bertrano | de Etchavs Turfce,| Archiphizpicu dignea-| ri dedicatua. | (floron) | BORDELEN, | I. Mongiron Milanges, | Erregueren Imprimat- | çaillea baithan. 1665. | Este libro se imprimiό por primera vez en 1636 y se reimprimiό en 1665 y en 1666 : M. Julien Vinson declara no haber visto mas que la segunda y tercera de estas ediciones ; y reproduce, sous toute réser-ve, las indicaciones de M. Pierquin de Gembloux (Histoire littéraire), acerca de la de 1636. Los Rudimentos nos prueban no obstante, que además de las dos ediciones conocidas, existiό otra tercera, de la que tomό sus citas Joannes de Etcheberri ; por lo que no parece aventurado asegurar que la afirmaciόn de M. Pierquin de Gembloux es exacta. En efecto : el Doctor labortano no se sirviό de la ediciόn de 1665, que tengo a la vista ; ni de la de 1666, según puede verse por la carta que transcribo a continuaciόn, de la que se deduce que la paginaciόn dada por el manuscrito no corresponde a la del ejemplar del Eliçara, que se conserva en el British Museum : es pues evidente que existiό, por lo menos, una ediciόn de este libro que no ha llegado hasta nosotros.

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14 Ukaezina da, bada, orrialde batetako desoreka edo aldea dagoela Hatsapenac- eko eta 1666.eko edizioaren arteko aipamen hauetan. 15 Pentsa zitekeen, haatik, alde hau Joanes Etxeberri Sarakoak 1666.eko edizioan falta diren 3-4 orrialde zenbakiak kontuan izan eta horren ondorena izatea (baina orduan aldea 2 orrialdetakoa dateke, ez batekoa), argi erakusten baitzaigu lau adibideotan edizio batetik besterako aldea orri bakarrekoa dela. 16 Izan dugu Eliçara erabiltceco liburua- ren bi edizio ezagunak (1665 eta 1666.ekoak) eta Escuarazco hatsapenac latin ikhasteco liburuan Joanes Etxeberri Sarakoak ezarri dituen Eliçara- tik hartutako aipamenak aztertzeko aukera eta argi ikusi dugu Sarako midikuaren aipamenok zuzenak badira (eta ez dugu bestetara pentsatzeko arrazoirik) zilegi dirudiela, Eliçara erabiltceco liburua- ren bi ezagunez gain, 1636.eko (Pierquin de Gemblouxek defendatzen zuenez) edo beste urte batetako argitarapena ere izan dela aitortzea. 17 Jarraian konparaketa horren emaitzak eskainiko dizkigu, bost zutabetan bananduak. Lehenean, Etxeberri Sarakoak Eliçara- tik hartu duen adibidea dugu ; bigarrenean, hirugarrenean eta laugarrenean 1665, 1666 eta Etxeberri Sarakoaren beraren liburuan adibide hori agertzen den orrialde zenbakia ; bos-garrenean, azkenik, J. Urkixok Etxeberri Sarakoaren lanak bildu dituen Las obras bascongadas liburuaren orrialde zenbakia. Hona hemen datuok5 :

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18 Argi erakusten zaigu bost zutabeotan zehar, liburuan aurrera egin ahala, orri bateko diferentzia areagotu (hiru-lau orrialdetako aldera helduz) edo laburtu egiten dela eta orrialde zenbakien arteko desberdintasuna ez dagokiola, beraz, Eliçara- ko 3-4 orrialde zenbakien faltaren eraginari. Badirudi, bada, Etxeberri Sarakoak gurera heldu ez den Eliçara erabiltceco liburua- ren argitarapen desberdin bat erabiltzeko aukera izan zuela. Are, pentsa liteke, 1666kotik gertuen izaki, urte honetakotan oinarri zitekeela berankorragoren bat.

1.1.2. 1665. urteko lekukotasuna

19 Irakurri ahal izan dugun bibliografiak, lagundu beharrean, kasu honetan, nahastu egin gaituela esan behar dugu. Beti bezala, J. Vinson hartu dut abiapuntu eta bere Essai... -n irakurria da jarraian azaldu nahi duguna. Hau da Eliçara erabiltceco liburua- ren bigarren argitarapen honen lehen aipamena (1891-8 : 77) : « 17b.- ELICARA | ERABILTCECO | libvrva. | ioannes ETCHEBERRI | Dotor Theologoac | eguiña. | Eta iaun Noble BEKTRANO I deEtchavs Turfce, |Archiphizpicu dignea- |ri dedicatua. | (fleu-ron) | BORDELEN, | I. Mongiron Milanges, | Erregueren Imprimat-| çaillebaithan. 1665. Pet. in-8 — (lxvj)-435 p. ; signatures : aux fts préliminaires de un a six pieds de loup ; pus A p. l, B p. 16 < 17>, C p. 25, D p. 41, E p. 49, etc. — Le texte mesure 86 mm de hauteur sur 42 de justification. Je connais trois exemplaires de cette édition, dont un complet. Un des deux autres est à la Bibliothèque municipale de Bayonne (n° 3822). Coll. : p. (i-ij) titre, (iij-vj) dédicace, (vij) approbations de MM. Guillentenea et Axular (Sare, 16 mai 166 (sic), (viij-ix)) vers latins a l'éloge de l'auteur signé d'Iharce, (x-xiv) vers français, signes Casabielhe, (xv) vers basques signés J. Claverie, (xvj) vers : harc berac berari, (xvij-xviij) vers de Tristand de Aphezte, (xix) vers : harc berac berari, (xx) division du livre, (xxij-xl) calendarioaz eta demboren contuaz « du calendrier et du compte du temps », (xlj-xlv) tableaux de l'épacte, de la lettre dominicale et des fêtes mobiles de 1665 à 1683, (xlvj-lxvj) calendrier ; — p. l-82<4>, première partie (devoirs du chrétien), premier traité (prières quoti-diennes, en vers) ; p. 82<5>-134, deuxième traité (doctrine chrétien-ne, en vers) ; p. 135-166, troisième traité (de la confession, en prose) ; p. 167-423, deuxième partie (heures, en vers ; les psaumes de la péni-tence sont aux p. 316 et suiv. ; aux p. 368 a 423 est la dévotion à Marie) ; p. 425-435, table. » 20 <> artean jarri ditugu J. Vinsonen beraren zuzenketa eta gehiketak, hain zuzen ere bere Essai... -ren bigarren alean jarri dituenak (aip. lan. : 544). Zuzenketa eta gehiketon artean, honako aipamen berri hau jarri du :

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« 17 b, c — Eliçara, etc. Edition conforme à la précédente, sauf ce qui suit : Pet. in-12 — (lxvij) - 435 p. P. (vij) approbations de P. de Archular. P. de Guillantena (22 de mai 166 (sic), (viij-ix) vers latins signes « I. Ihartius in Curia Baionenfi caufarum Patrunus », (x-xiv) vers français, signés : I. D. Casabielhe, s r de Chabatenea, de Saint-Jean-de-Luz ; (xv) vers basques signés : lean Claveria, Apezac ;...(xvij-xviij) vers de Tristan de Aphezte, Apphesac ;... (xx-xxi) division du livre ; (xxij-xxxix) Calendarioaz, etc. ; (xl) blanc ; (xli- xliii) tableaux de 1665 à 1683 ; (xliv-lxvij) calendrier ; (lxviij) blanc ; — 1-82 première partie, pre-mier traité, 83-135 deuxième traité ; 135-166 troisième traité ; 167-423 deuxième partie (ps. de la pénitence aux p. 316-344, la dévotion a Marie aux p. 368-423) ; 425-435 table. Le texte a une justification de 42mm sur 98 de hauteur (chiffres et signatures compris). Erreurs de pagination : 117 pour 107, 30 pour 130, 178 pour 187, 303 pour 203, 149 pour 249, 369 pour 359, 374 pour 363. Commencement.des p. 81 Duçun othoi, 192 7. Hargatic, 273 Eta Ifraelen, 346 Bartholome, 403 3. Laurguitu. Signatures : préliminaires : un à six pieds de loup aux p. i. xvij. xxv, xlj ;— A p. 5, B p. 21, C p. 29, D p. 45, etc, jusqu'à Mm (demi-feuille contenant les quatre derniers feuillets de la table). Sur quatre exempl. de cet ouvrage et de cette édition que j'ai eus entre les mains, deux avaient à la p. 220 la réclame harran en petit texte ; les deux autres avaient hartan en texte ordinaire. A part cela, les quatre volumes étaient identiques. » 21 Bibliografia irakurri eta eman genuen hurrengo pausua iturrietarakoa izan zen. Baionako Museoan, urte honetako ale bat izan zitekeelakoan, hara jo eta argitarapen honen ale baten fotokopiak lortu ahal izan genituen. Handik lasterrera, Baionako lankide dugun Txarles Bidegain etorri zitzaigun han liburuarekin batera dagoen eskuizkribu baten berri emanez. Eskuizkribuak honela dio :

22 Comparaciόn de las dos ediciones de 1665 de « Eliçara erabiltceco liburua » de Joanes Etcheberri :

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23 Eskuizkribu honetan eta J. Vinsonen Essai... -n agertzen diren datuak (aipatu berri ditugunak) konparatzen baditugu, argi ikusten da eskuizkribu hori J. Vinsonen bi tomo desberdinen kopia bat dela ; are, erakutsi ditugun 1665. argitarapeneko datuak (77. orrialdekoak) eskuizkribuaren ezkerraldeko zutabean agertzen dira. Essai... -ren bigarren alean (gehiketa eta zuzenkete-na) 17bc izenburu pean agertzen dena da eskuizkribuan eskuma aldeko zuta-bean duguna. 24 Eskuizkribu hau edo Vinsonen datuen aurrean, bestalde, zera komen-tatu behar dugu : 1. T. I. (Vinsonen bibliografiako lehen alea), p. 77, n° 17a jartzen du ezkerraldean ; T. II (bigarrena, « Additions et corrections »), p. 544, n° 17bc, eskumaldean. 25 2. « Petit in-8° »z mintzo da ezkerraldean eta « petit in-12 » bestean. Neurriak ere desberdin dira (86 mm x 46 mm ezkerraldean eta 98 mm x 42 mm eskuman ; kasu honetan, ordea, orrialde zenbaki eta zeinadurak barne). 26 3. Ezkerraldean « je connais 3 exemplaires de cette édition » dio ; eskumaldean « sur 4 exemplaires de cet ouvrage... » 27 4. Eskuizkribuan agertzen ez den arren, liburuan, zuzenketa eta gehi-keten alean, « Edition conforme à la précédente, sauf ce qui suit : » jarri zuela ikusi dugu. 28 Zenbat ale desberdin izan ditu Vinsonek eskuartean 1665.eko edizio-koak ? Zergatik jartzen du 17.b (eskuizkribuan 17a jartzen da) eta 17b, c bestean ? Zergatik mintzo da « Edition conforme à la précédente » denak 1665.ekoak badira ? Ez ote da izango, eskuizkribua eta Essai...-ko datuen arabera, 1665. urtean Eliçara erabiltceco liburua- ren bi argitarapen desber-din izan zirela, eskuizkribuaren izenburuak berak dioenez ? Lehen argitara-pena 17b izendatu zuen Vinsonek eta honen datuak jarri zituen Essai... -ren lehen alean. Bigarren alean (gehiketa eta zuzenketenean), aldiz, 17b, c izendatzen du aurkitzen duen edizio berri hori, berori ere 1665. urtekoa. Ezin du 17c izendatu 1666. urteko izendatua baitu horrela. 29 Baionako Museoan lortu genuen alera itzuliz, zera aipatu : lehen 16 orrialdeak faltu ditu (lehen plegua, beraz). Liburua aztertu eta bertan aurkitu ditugun datuak J.

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Vinsonek eskuizkribuan eta Essai... -ko bigarren aleak (17bc aipamena) jarri dituenekin bat datoz erabat. 30 Desberdina izan zitekeen 1665.eko argitarapenik bilatzen jarraitu eta Donostiako Koldo Mitxelena Kulturgunera abiatu ginen, hemen baitago orain garai batean Gipuzkoako Foru Aldundiko Julio Urkixo liburutegia. Hemen ere, 1665.eko ale bat dago eta beronek lagundu zigun Baionakoak ez zuena osotzen. Alearen azala J. Vinsonek egin zion Julio Urkixori eskuz, azken honek aitortzen duenez.6 Ale honetako datuak ere Vinsonen 17bc argitarape-narekin datoz bat. 31 Eskuizkribuan irakurri ahal izan dugunez, Vinsonek 17b argitarape-neko ale bat Baionako Udal Liburutegian zegoela (3.822 zenbakiduna) adie-razten zuen. Berriro ere, bada, Baionarantz abiatu ginen Udal Liburutegian izan zitekeen alea aztertzen. Ez genuen, ordea, 3.822 zenbakidun ale hori aurkitu. Lehenik Txarles Bidegain eta beranduago niri neuri adierazi digutenez, lapurrek behin baino maizago egin dute bisita liburutegi honetara eta baliteke, besteren artean, ale hau ere eramana. 32 Dena den, Pierres Lafitte zenaren funtsak hemen daude orain, eta funtsotan, 64. zenbakiaz, Eliçara erabiltceco liburua- ren 1665.eko ale bat dago. Hau da aztertu ahal izan dugun hirugarrena. Honek ez du azalik falta ; bai, ordea, P. Axular eta P. Guillentenaren « Approbatio theologorum » -i dago-kion orrialdea, J. Iharcius-en « Epigrammata in lauden autoris » -i dagozkion biak eta I. D. Casabielheren « A Monsieur de Etcheverry docteur en Theologie » bertsoen lehen orrialdea ; lau orrialde, guztira. Amaieran ere, 435-436. orrialdeak falta ditu ; 435.a aurkigarriaren azken orrialdeari dagokiona eta 436.a zuriz dagoena. Dena den, liburuaren amaieran 24 orrialde (hamabi-reneko plegu bat, beraz) gehitu zaizkio liburuari geroago, berriro koadernatu aurretik. Orrialde hauetako lehenetan, eskuz idatzi dira hasieran falta diren 4 horiek (P. Axular eta P. de Guillentenaren baieztapenaren ondoren, parentesi artean eta zirriborratuta, « tire de l'edition de 1666, laquelle est copié et corrigée... » dakar. Azken bi hitzak ez dira-ondo ikusten eta 1666.eko data zuzendua dago azken 6aren gainean 5 bat jarri dutelarik). Liburu hau Pierres Lafitteren funtsetan dagoela kontuan izanik, baliteke eskuz idatziriko gehike-ta guztiak berak egin izana. 33 Beste ohar bat ere egin beharrean aurkitzen gara. 1665. urte honeta-ko hiru aleetako 25. orrialdeko azken bertsoa eta 26.eko lehen biak hauek dira : Arren bada çuc kegaira Itfas gaitcean guerthatu Ohi direnetaric. 34 Pierres Lafittek (berau izan baldin bada zuzenketa eta prestaketak egin dituena) kegaira zirriborratu eta honako hau idatzi du : Arren bada çuc beguira gaitçaçu gaitzetaric 35 lau bertsook, beraz, honela uzten dituelarik : Arren bada çuc beguira gauitçaçu gaitzetaric Itfas gaitcean guerthatu Ohi direnetaric. 36 1666. urteko argitarapenean, ordea, hiruzpalau bertso hauen tokian honako zortzi hauek ditugu : Arren bada çuc gaitçatçu Beira etfaietaric

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Eta halaber gaitçatçu Itfaffo gaitzetaric ; Gal efteçagun vntcia Etfaien efcuetan ; Eta gal gure arimac, Ifernu gorrietan. 37 Eskuz idatziriko Axular eta Guillentenaren baieztapena ere « Nos infra scripti jussu Illustrisimi ac Reuerendissimi Domini Domini nostri Episcopi Bayonensis alteriti legimus librum hunc Cantabrico Neru ( ?)… » hasten den bitartean, 1665 eta 1666.eko argitarapenetakoa « Approbatio Theologorum. Perlegimus hunc librum ad ecclesiam geftatorum... » -ez hasten zaigu.

38 Ikus dezakegunez, bada, zenbait desberdintasunen aurrean aurkitzen gara. Pierres Lafittek berak nahita eginikoak ala aurrean izan duen ezezagun zaigun argitarapen baten ondorioz eginikoak ? 39 Funtsezko arazoak, haatik, bere hartan jarraitzen zuen : 1665.ean bi argitarapen desberdin izan direnentz erabakitzea. Uste genuen (eta uste horretan jarraitzen dugu) Julien Vinsonen liburutegia aurkitzea garrantzitsua izan zitekeela, norbaitek izatekotan, berak izan baitzitzakeen 1665.eko bi argitarapen desberdinen aleak (baldin eta bi izan badira). Liburutegi honen aztarnak jarraitzen hasi ginen eta Henri Lacomberen artikulu batean (1927 : 63) « Julien Vinson laisse plusieurs travaux inédits : nous espérons qu'ils seront publiés par M. Paul Vinson, qui s'intéresse aux études basques et garde la riche bibliothèque de son père. » irakurri ahal izan genuen. Hemen eta han galdetzen hasi eta J. Vinsonen liburutegia ez baina H. Lacomberen liburute- giaren berri eskaini ziguten. Hau Donibane Lohitzunen zegoen, M. Josefa Lanuza Telesforo Monzon izan zenaren alarguntsarenean, azken hauek H. Lacomberen arrebari erosia 1948.eko otsailean.7 40 Liburutegi honetan izugarrizko altxorra dago eta bertan Eliçara- ren 1665.eko lau ale desberdin aurkitu ditugu. Eskuizkribuen artean, Vinsonenak, Dodgson eta Lacomberenak ditugu eta azken honenak aztertuz, agian, libu-rutegiaren jatorriaren berri izan genezake. 41 Eliçara-ren lau aleetara itzuliz, hona labur-labur bakoitzaren egoera : 1. Azala ondo gorde du baina hurrengo 19 orrialdeak, nonbait galduak zituela, eskuz berridatziak dira. 407. orrialdetik aurrera ere, eskuz berridatzi dira falta direnak. 42 2. Bigarren ale honek lehen 16 orriak (plegu bat) falta ditu eta 17. orrialdean hasten da (qq zeinadura daraman orrialdea). 412. orrialdetik — aurrera era falta dira eta ez dira, kasu honetan, eskuz berridatzi. 43 3. Honek lehen 6 orrialdeak falta ditu (« Approbatio Theologorum » -ez hasten da) eta falta dituenak eskuz berridatzi dira, amaierako aurkigarria bezala. 44 4. Hau da osorik dagoen ale bakarra. Kontrazalean, eskuz idatziriko « J. P. Arbelbide ptre... ou Hasparren, Basses-Pyrénées » dakar. 45 Dena den, laurak ere, J.Vinsonek 17bc atalean jarri duenari dagozkio. Izan dugu, azkenik, Eliçara erabiltceco liburua- ren 1665.eko zortzi-garren ale baten berri. 8Hau Chicagoko The Newberry Library-n dago, Luis Luziano Bonaparte Printzearen funtsetan. Hona zer dioen Samantha Kahn Herrick-ek idatzi zigun gutunak : I have examined Bonaparte Collection number 1181 (Etcheberri : Eliçara erabiltceco liburua. 1665) and have compared it with Vinson's description of the 17a and 17bc editions wich you included in your letter.

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Bonaparte 1181 corresponds in almost every respect with Vinson's description of the 17bc edition... 46 1665. urteko zortzi ale desberdinek, bada, ez dute alde nabarmenegi-rik erakusten eta denak datoz bat J. Vinsonek 17bc atalean eman dizkigun datuekin. Jarri duen « edition conforme à la précédente » hori jarri ez balu, hiru ale aztertu, 17b atala idatzi eta geroago, laugarren bat aurkitu zuenean, berriro 17bc atala idatzi zuela pentsatuko genuen, baina ezarri ditugun 17b eta 17bc atalak eta eskuizkribua ikusita ez genuke, aho betez, 1665. urtean edizio bakarra izan dela baieztatuko.

1.1.3. 1666.eko lekukotasuna

47 Hona, orain, hirugarren argitarapenaren Vinsonen aipamena : « 17 c- ELIÇARA | Erabiltçeco | libvrua. | ioannes etcheberry | Dotor Theologoac | eguiña. | Eta laun Noble BERTRAND |DE ETCHAVS Turfco, |Archiphizpicu digneari | dedicatua. | Bigarren aldian Imprimatua. | (fleuron) | PAVEN, | Ioannes Desbaratz, | Erregueren Imprimatçaillea | Baithan. 1666. » 48 Hau ere in-8 txikia erakoa da, (ij)-64-517-(xj) orrialdetakoa. Zeinadurak : aurretikoetan a p. (i), a ii p. 1, e p. 17, i p. 33, 6 p. 49 ; testuan A p. 1, B p. 17, C p. 33, D p. 49, e.a. Neurriak : 50 mm 5 x 96 mm.

49 British Museum-ean lortu genituen argitarapen honen ale oso baten fotokopiak. Beste ale batenak Urkixo liburutegian, baina azken 100 orrial-deak falta ditu. Chicagoko Newberry Library-tik ere bidali digute argitarapen honen ale baten fotokopia bat, baina oso zaharkitua dago eta orrialde mordoa falta du, dituenak ere oso egoera txarrean daudelarik. Ez gara ezertarako baliatu azken ale honetaz. Sancho El Sabio Fundazioak ere urte honetako ale baten kopia bat du. 50 Eliçara erabiltceco liburua- ko 1666.eko argitarapenak, bestalde, 1665.ekoak ez dakartzan bertso batzuk ditu. Azken pleguko (513. orrialdean hasten dena) taula 517. orrialderaino besterik ez da heltzen. Honek zera esan nahi du, plegu erdi bat erabil zitekeela, baina osoa zein erdia erabili (16 edo 8 orrialde) amaieran zenbait orrialdek zuriz geratu behar zuen. Orri zurioz baliatu zen edizio honen prestatzailea bertso berri batzu sartzeko ; Etxebe-rrirenak ez diren bertsoak. Bertso hauen egilea (edizioaren prestatzailea ere ote ? Guk baietz uste dugu) nor izan zitekeen pentsatzen hasi eta zera ikusten genuen hasieran : « IESVSEN COMPAGNIACO Aita Batec D'etcheuerry Doctor cenaren Adifquideac » 51 Argi genuen, bada, Jesusen Konpaniakoa eta Etxeberriren adiskide zena. Bi datuok eta Paben argitaratua delakoa kontuan izanik izen bat etorri zitzaigun burura : Bernardo Gazteluzar. Bera ere, Lafitte jaunak dioskunez (Lafitte, 1974a : 9), ziburutarra zen eta Jesusen Konpanian sartua. Konpaniak Paben zuen ikastetxean bizi eta hil zen.

52 Gazteluzar 1619.ean jaio zen eta 1701.eko apirilaren 15ean hil, Paben. Litekeena da, beraz, Etxeberrik eta Gazteluzarrek elkarren berri iza-tea ezezik adiskide izatea ere. 53 Vinson ere, bere garaian, Gasteluzar izan zitekeen ustekoa zen (Vinson, 1908 : 671). Ez digu, baina, Vinson jaunak uste horren arrazoirik ematen. 54 Guk, ordea, uste horiek areagotu eta baieztapen bihur ditzaketen zergatiak ditugu : 1. Eliçam erabiltceco liburua- n agertzen diren Etxeberrirenak ez diren bertsoak IESVSEN

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COMPAGNIACO Aita Batec sinatzen ditu. Eguia catolicac liburua, BERNARD GASTELUÇAR JESUS-en COMPAIGÑIACO AITAC. Antz handia dute, bada, bi testuak. 55 2. Gazteluzarrek darabiltzan bertso-neurriak aztertzean, itzulitako bertsoez landa, bospasei neurri erabiltzen dituela erakusten digu Lino Akesolok (1983 : 17), launako bertsotan, puntukide bigarrena eta laugarrena dituelarik : 9/8, 9/8 ; 8/8, 8/8... 56 3. Pierres Lafittek, bestalde, Gazteluzarren bertsogintzaz ari dela (1974b : 170 hh), neurtitzak aztertzean zera diosku, nahiz eta bi lerrotan jartzen dituen 17 silabako bertsoak (9 eta 8 silaba) neurtitz bakartzat dugula bi zatitako esangune hori, lehen zatiak ez baitu rimarik. 57 Hamasei neurtitz forma aurkitzen ditu Gazteluzarren Eguia catolicac liburuan eta hamalaugarrena, 17 silabatakoa, 9 x 8 formakoa, maizenik erabilia dela dio, neurtitz forma hau delarik, hain zuzen ere, gure bertsootan agertzen dena. 58 4. Badakigu, gainera, Etxeberri Ziburukoarekin batera, Ziburukoa,itsasaldeko semea beraz, izanik bertso asko eta asko duela marinelei eskainia.Guk aztergai ditugun bertso hauek ere « Marinelen favoretan » eginak dira.Gazteluzarrek berak Eguia catolicac libumaren « Abisua » atalean honela dio(Akesolo, aip. lan. : 31) : Denbora hautan, hañitzek hañitz liburu eder argira eman tuste ; ezta, bada, hau bertzeak baño ederragoa ; bañan nola berze gauzetan bezala, debozionean gustu diferenteak baitire, iduritu zait hañitz deboten artean, batzuek huntan gustu hartuko dutela, gustiz mariñel debotek ; eta hek prinzipalki konsideraturik, deliberatu dut liburu hunen egitera. 59 5. Gure bertsook eta Gazteluzarren Eguia catolicac liburuko III.partekoak konparatzen baditugu, antz-antzekoak direla ikusiko dugu. Are,zenbait pasarte berdin berdinak dira : Eliçara : « Ceren triftetu baitçaitut » (32. bertsoa) Eguia catolicac : « Ceren zu tristetu zaitudan » (106. or.) Eliçara : « Helas Iauna ! helas Iaincoa ! » (41. bertsoa) Eguia catolicac : « Helas, Jauna ! Helas Jainkoa ! » (107. or.) 60 6. Lino Akesolok, Gazteluzarrek darabilen euskara aztertzen duelarik(Akesolo, 1983 : 18 hh.), puntu hauek azpimarratzen ditu, besteak beste : • Gazteluzarrek ez daki ‘ukhan’ erabiltzen, ‘izan’ edo ‘izatu’ beti. • Bitik gorako zenbakiekin ez du inoiz aditza singularrera bialtzen. • Futuroko adizkietan, -nen bukatu beharrean -ren ere egiten du. Bertsoaren puntuak eskatzen zuelako egin du hori, noski. • ‘Gusti’ esekin darabil, ez ‘guzti’. • Jainkoa bi eratara du : ‘Jainko’ eta ‘Jongoiko’.

61 Bost puntu hauen adibide ugari aurkitu ditugu Eliçara- ko bertsoetan eta, aipatu ditugun arrazoi guzti hauek kontuan izanik, zilegi iruditzen zaigu bertsoon egilea Aita Bernardo Gazteluzar dela baieztatzea.

1.2. Zeharkako tradizioa

1.2.1. « Egan » aldizkaria

62 Joanes Etxeberriren hirugarren liburu hau da ezezagunena jendea-rentzat. Izan ere, bilatzen saiatu bagara ere, ez dugu bertso sorta bat besterik aurkitu liburu eta

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aldizkarietan. Berau, A. Irigarai jaunak Egan aldizkarian argitaratu zuena da (1958 : 27-30).

63 Eliçara liburutik jasotako bi bertso sorta desberdin dira. Lehena « Calendarioaz edo demboren contuaz tratatua » izenburua daramana. Honetatik, II, III eta IV. buruak bildu ditu. Bigarren bertso sorta lehen parte-ko III. tratatutik (« Hirur garren tratatua. Cofessatceco antcea laburqui ») hartua dugu. Bere izenburua « Manamenduen arauez cofeffatceco antcea » da. 64 A. Irigarai berak « oraiko graphian emanak, itzez itz » direla dioen arren, ez da hau erabateko egia, zenbait hitzetako grafia aldatu —zuzendu esango nuke— egin baitu (‘onetz’, ‘aftietan’, ‘finhezte’, ‘haritu’...-ren ordez, ‘onets’, ‘aztie-tan’, ‘sineste’, ‘arritu’, e.a.). 65 Argi dago, bestalde, bi bertso sorta hauek 1666.eko argitarapenetik direla jasoak eta ez 1665.ekotik. Irigarai jaunak ezarri duen lehen bertso sortako IV, burua honela hasten da : « IV. BURUA. I Exemplua, Epacta-k eta illabeteak hogoi eta hamarretara ardiasten eztutenekoa. Iakin nai dut 1673-ko urtearen buruillean zenbat garren egunean izanen den illargi berria. Konda zazu bein Epacta eta da amabi, gero konda zazu illabetea martxotik asten... » 66 Joanes Etxeberriren Eliçara erabiltceco liburua- ren 1665.eko argitarapenera jotzen baldin badugu, bertan (1665 : xxviij) « Iaquin nahi dut 1635. go vrthearen burullean, cembat garren egunean içanen den illhargui berria » aurkituko dugu, 1666.ekoan, aldiz (1666 : 26), « Iaquin nahi dut 1673co. vrthearen burullean, cembat garren egunean içanen den illhargui berria ». Argi erakusten du pasarte honek, bada, A. Irigarairen testuak azken argitarapen honetatik jasoa izan behar duela eta ez 1665.ekotik.

2. 1665.eko eta 1666.eko lekukotasunen arteko erkaketa

2.1. Hutsa Eliçara erabiltceco liburuan9

67 Hauek dira transmisio prozesuan gertatutako hutsen artean esangu-ratsuenak.10

68 a. duplografia arrunt bezala har genitzakeenak

69 Hitz osoa soberan dagoen adibideak :

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70 • 213 orrialdea1995L lerro zenbakia

Iefus Chrifto gure iaun eta/aita feme, airequin eta iain- B ø feme, çurequin eta Iain C co fpiritu fainduarequin ba-/tean, mende gzutietaco mendetan bici eta aguintcen due-/coren merecietara.

71 • 348 orrialdea

b. Iauna çaren gure aldera, vr- c. Iauna çaren gure aldea, vrrical- rricalmendutfu, mendutfu. Eta barkha dieçaguçu. Eta barkha dieçaguçu. Iauna çaren gure aldera vr- Iauna çaren gure aldera vrrical- ricalmendutfu, mendutfu. Eta barkha dieçaguçu. Eta entçun gaitçatçu. Iauna çaren gure aldera vr- ricalmendutfu, Eta entçun gaitçatçu. 379 2498L pag.

72 • 420 orrialdea 8320 bertso zenbakia

5. Ohore duçu handia/Oraño andre garbia, Ceren Archangeluena/Çaren andre guehiena, Ikhus açu ene pena/O andre bihotz berena ama. B O andre bihotz berena ø C

73 b. Haplografiatzat har genitzakeenak

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74 c. Ordenaren aldaketaz gertatzen direnak

75 • 179 orrialdea 3200 bertso zenbakia

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1. Ceri elkhar gana çaizco/Ene etfaiac billtcen, Ceri errabiaturic ene/Contra alt chatcen B / Ene contra altchatcen C 2. Erraten dutela ecen/Guztiz vtci nauçula, Eta çure baithan ceren/Fidatu eztudala.

76 • 185 orrialdea IZ1 bertso zenbakia

b. 3. Benedictionea c. 3. Abfolutionea Mana çaçu iauna bedinca Mana çaçu iauna bedinca gaiten. gaiten. 3. Abfolutionea 3. Benedictionea Spiritu fainduaren gratiac Spiritu fainduaren gratiac argui detçala gure beguiac argui detçala gure beguiac eta bihotçac. eta bihotçac.

77 • 372 orrialdea IZ3 bertso zenbakia

b. Pfal. 18 c. Coeli enarrant. Pfal. 18 Coeli enarrant 1. Ceruec dute iaunaren 1. Ceruec dute iaunaren Declaratcen gloria, Declaratcen gloria, Eta içargorec haren Eta içargorec haren Efcuaren aldia. Efcuaren aldia.

78 • 376 orrialdea IZ3 bertso zenbakia

b. Pfal. 23 c. Domini eft terra, Pfal. 23 Domini eft terra, 1. Munduco bafter guztiac 1. Munduco bafter guztiac Dire iaun onarenac, *Dire iaun onarenac, Han bici diren guztiac Han bici diren guztiac Ere orobat harenac. Ere orobat harenac.

79 d. Ordezkapenez gertatzen direnak, jarriko ditugun gehienak edo lectio facilior edo huts paleografiko bezala hartuak izan ditzakegularik.

80 lectio facilior

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81 Huts paleografikoak

82 Jarraian, eta huts komun eta huts banatzaileei ekin aurretik, bi kontu bitxi aipatu nahi ditugu, lekukotasun desberdinek jarraitu duten lehen pista emango digutenak. 83 • « Iainco bat denari bere perfectioneen gañean, orenac Aftelehenecotz » bertso sortan, 9 bertso ahapaldi ditugu ; lau bertso ahapaldi-ko, pareak hoskide direlarik. Hona bigarrena : Duçu ceure içatea, Nihoren gañic içatu Gabe lehen haftea 84 6887. bertsoa falta da bi edizioetan. Zorionez, bertso hori zein den azaltzeko gai gara, Noelacen ere errepikatua agertzen baita. Are, atal luze bat errepikatzen da bi liburuetan. Izan ere, E 352-362 orrialdeetan « ASTECO EGUN guzitetaco orenac. Iaincoari orenac gutçaz arduraren gañean Igandecotz » ditugun 64 ahapaldi (256 bertso) errepikatuak ditugu N 178-191 orrialdeetan, liburu honen hirugarren partearen hasieran.

85 Hona bertsoak :

Noelac Eliçara erabiltceco liburua Iongoico bakhotcha Iongoico bakhotcha, çure Cantatcen tut çure orenac Cantatcen tut orenac, Arren entçun tçatçu ceure Arren entçun tçatçu ceure Laudorio çucenac. Laudorio çucenac. O Iaun handia, ceurenez Duçu ceure içatea, Duçu ceure içatea, Nihoren ganic içatu Nihoren gańic içatu Gabe lehen haftea. Gabe lehen haftea.

86 • Ama Virginari eskainitako « Myfterio goçoffoac » bertso sortan, 7 bertso ahapaldi ditugu ; sei bertso ahapaldiko, pareak hoskide direlarik. Laugarren bertso sortan (3 zenbakiz hasten dena) honela dugu : 3.Bañan are guehiago Placer hartu cinduen, Ceure feme ederraz noiz

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7880 Ere erdi bai tcinen, Eguiteco obra onen. 87 Hemen ere bertso bat falta da, 7881 .a hain zuzen.

88 8.400 bat bertsoz osotutako liburua dugu Eliçara erabiltceco liburua eta eskuartean darabiltzagun bi edizioetan 6887 eta 7881. bertsoak falta dira. Dena da posible, eta hemen berdinen arteko jauzi edo homoioteleutonez ger-tatutako jauzi baten aurrean izan gaitezke ; eskuzko tradizioan oso arrunta izan zitekeena.

89 Hau honela izaki, jarraiko bideak posibleak dira :

90 Hau da, lekukotasun batek bestea irakurri duela edo biak goragoko bat irakurri dutela. Baina gaitzes daitekeena bakoitzak bere aldetik goragoko lekukotasun independienteak irakurri dituztela, oso zaila baita bi edizio desberdinek erakutsi ditugun bezalako adibi- deetako jauziak bi toki jakin hauetan egitea. 91 Jarraiko adibideaz mintzatuak gara dagoeneko. Izan ere, lehen parteko II. Araldeko I. buruan, 7. atala « Arrantçaileen othoitçac » izenburua duena dugu. 1665.eko edizioak honela dio : Arren bada çuc kegaira Itfas gaitcetan guerthatu Ohi direnetaric. 92 1666.ekoan, aldiz, honako zortzi bertsook ditugu : Arren bada çuc gaitçatçu Beira etfaietaric Eta halaber gaitçatçu Itfaffo gaitzetaric ; Gal efteçagun vntcia Etfaien efcuetan ; Eta gal gure arimac Ifernu gorrietan. 93 Pierres Lafittek honela zuzendu du 1665.eko edizioa : Arren bada çuc beguira gaitçaçu gaitzetaric Itfas gaitcean gerthatu Ohi direnetaric. 94 Manual devotionezcoa n, bigarren liburuan, 142. orrialdeak « Guardiaco othoitcez » izenburupeko « Bigarren guardiacoac » ahapaldiak honela dio : O Iongoico uholdetic Noe beguiratua, Ceren bakharric munduan aurkhitucen iuftua. Eta ez berriz punitceco hain garrazqui mundua, Holtz adarra lekhucotçat emanic aguindua. Arren bada çuc beguira gaitçatçu caltetaric, Itfaffoan prefentatu ohi tuenetaric.

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95 Baliteke, bide desberdinok ikusita, adibide honetan ere aurreko bietan gertatu dena gertatu izana ; hots, iturri den lekukotasunean bertso bat falta izan eta, ondorioz, aieruz, zuzendu nahi izana. Argi dago 1665.eko leku-kotasunean ez dela bertso hori osatzeko edo birjartzeko ahaleginik egin. Pierres Lafittek « gaitçaçu gaitzetaric » gehitu du. Manualeko adibideari jarraiki, aditzean bete betean joko luke, gero « gaitzetaric » jarri badu ere. Ez dirudi egokiena denik Manuala eta jarraiko bertsoko « Itsas gaitcean » kontuan baditugu. 1666.eko lekukotasuna da gehien aldentzen dena ; gure ustez urru- negi joan dira aieruan (hona beste aldaketa kontziente bat), jatorrizko testuan ez leudekeen elementu berriak sartuz (etsai, arima, ifernu...).

96 Are, aztertu ditugu Etxeberriren hiru liburuak eta ez dugu behin ere aurkitu (adibide honezaz aparte) ‘ifernu’ hitza ‘gorri’ izenondoaz lagundua. Aurkitu dugu ‘beltz’ izenondoaz, ez, ordea, ‘gorri’ az. Eta ‘gorri’ izenondoa bera ere ‘billus’ edo ‘zeru’ lagunduz baizik ez da ageri. Aldaketa kontziente baten aurrean geundekeen froga berri bat : 1666.eko lekukotasunan, amaie-ran gehitu diren bertso berrien artean, « Aita harc berac Iesus Christori Gurutcearen aitcinean Contricionezco Orationea » bertso sortaren barnean (23 ahapaldi dira, lau bertsotakoak, pareak hoskide direlarik) zazpigarren bertso ahapaldiak honela dio : Iauna ; ezbacindu ceruric cure adifquideentçat, Eta ez iffernu gorriric çure etfai gaixtoentçat. 97 Ikus ditzagun orain jarraiko bi adibideok :

98 • 153 orrialdea 1474L lerro zenbakia

b. Erraçu ala marchandifa c. Erraçu ala marchandifa faltcean ala contratu falfoiragatean faltcean ala contratu falfo iragatean. iragatean. Communaren ontaffunac Hamarren primitiac ezti- artificioz neure eguin tut. tut vngui pagatu. Hamarren primitiac ezti- tut vngui pagatu.

99 • 161 orrialdea 1654L lerro zenbakia

b) Gauça contrarioac anoco c) Gauça contrarioac ahoco placera gatic ian içatu tut placera gatic ian içatu tut, eta gaizqui aurkhitu naiz. eta gaizqui aurkhitu naiz. Soberacintcurrari emana Hargatic gauaz liçundu içatu naiz icatu naiz eta amets defonheftac Hargatic gauaz liçundu eguin tut. içatu naiz, eta amets defon- heftac eguin tut.

100 Oso esanguratsuak dira, bietan berdinen arteko jauzi bat izan eta 1666.eko edizioan ez baitira 1665.ekoan agertzen diren lau lerro agertzen. Edizio honetaz aipatu ditugunak aipu, 1665.ekoan agertuz, zera adierazi beharko lukete, lekukotasun honek ez duela

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1666.ekoa irakurri (inprimatze datak berak ere argi uzten du hori, nahiz eta inprenta oinok, maiz, fidagarrie-giak ez izan), honetan hartan ez dauden bertsoak baititugu. Honela, jarraiko bidea ezaba liteke :

101 Jarraian huts banatzailetzat har genitzakeen adibideak azalduko ditugu. Ez gaude ziur, 1666.eko lekukotasunan agertzen diren eskuhartze kontzienteak, ikusi dugunez, askotxo baitira ; beraz, baliteke jarraiko zenbait adibide aldaketa kontziente eta ez huts izatea. Eman ditzagun, haatik, adibideok : 102 • v orrialdea xliij lerro zenbakia

Afcoc ohoratu çaitu/Ceure orientean B Cenec C Nic aldiz eguiten çaitut/orain occidentean

103 • xxxv orrialdea IZ2 lerro zen

III. Hirugarren exemplua/Epamac Illhabeteac, eta B Epactac C Illhabetheco egunec, hogoi eta hamarren contua chitcen dutenecoa.

104 • xxxviij orrialdea 476L lerro zenbakia

Efteiac concilioaz deuecatuac dire, abendoaren lehen igandetic B Afte hec C Trufaniarańo edo erregueen beftaraño

105 17 lerro lehenago dugun « Aste hec dire Pentecoste ondoco... » horren ondorioz egindako hutsa, zalantzarik gabe.

106 • 5 orrialdea 61 bertso zenbakia

b. Egun oro behar gare c. Egun oroz behar dugun Iguçu mantenua Iguçu mantenna Eta guc berceri leguez Eta guc berceri leguez Hutfen barkhamendua. Hutfen barkhamendua.

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107 ‘Gure Aita’ da eta 56. orrialdean errepikatua dugu. Kasu honetan, bi lekukotasunetan irakur daiteke « Egun oro behar gare,/ Iguçu mantenua ». Beraz, argi dago irakurketa zuzena Brena dela.

108 • 9 orrialdea 143 bertso zenbakia

b. Milla efquer darozquiçut c. Milla efquer daroz Hartaracotz gratiez, Hartaracotz gratiez Lehenecotz gratiez, Lehenecoez berriro iffuriez. Berriro iffuriez.

109 Argi dago Bren irakurketaren hutsa perikopa bereko ‘gratiez’ horren erakarpenez gertatutako ordezkatzea dugula.

110 • 14 orrialdea 249 bertso zenbakia

b. O Spiritu gratia. c. O Spiritu Saindua, Sainduen ithurria, Sainduen ithurria, Nauçun othoi vrricari, Nauçun othoi vrricari. Guztiez billucia. Guztien billucia.

111 Hutsa, bada, hiru bertso goragoko ‘gratia’ horren erakarpenpez gertatutakoa dateke. 1665.ekoa aldaketa kontzientea bada, agian, jarraian ‘Sainduen’ izan eta ez duelako ‘Saindua/Sainduen’ jarri nahi izan.

112 • 57 orrialdea 1144 bertso zenbakia

b. Hirur çathi eguiten du c. Hirur çathi eguiten du Guero faindu hoftia, Guero faindu hoftia, Hirur cathi iaunac eguin Hirur çathi iaunac eguin. Emaufen oguia : Içar çuen, oguia : Limofnari içateco Limofnari içateco Eguidaçu gratia. Eguidaçu gratia.

113 • 60 orrialdea 1213 bertso zenbakia

b. Iefus mintçatuco çure c. Iefus mintçatuco çaie Gaichtoei afferreric ? Gaichtoei afferreric ; Guarda naçaqueçu othoi, Guarda naçaçu othoi. Hequin fententiaric. Hequin fententiatic.

114 • 69 orrialdea 1388 bertso zenbakia

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Guertha eztaquidan neure Arimaren caltean, Bañan aitcitic probetchu Eta ontaffun handitan B Handi aberatfean C

115 • 76 orrialdea 1546 bertso zenbakia

Cuec guida naçaçue/Har chidor meharrean B Bide chigor C Efquer dieçuçuedan/Itçul ceru gañean.

116 • 157 orrialdea 1566L lerro zenbakia

Errachquiago çuagogea hartceagatic eta ez... B çuc gogoan C gauça bera bietan aiphatceagatic ceren biac batetara billtcen baitire

117 • 179 orrialdea 3200 bertso zenbakia

b. Ceri elkhar gana çaizco c. Ceri elkhar gana çaizco Ene etfaiac billtcen, Ene etfaiac billtcen, Ceri errabiaturic ene, Ceri errabiaturic. Contra alt chatcen. Ene contra altchatcen.

118 • 179 orrialdea 3205 bertso zenbakia

Erraten dutela ecen/Guztiz vtci nauçula, Eta cure baithan ceren/Fidatu e tudala B ez naicela. C

119 • 214 orrialdea 2027L lerro zenbakia

Iauna beguira dieceçu ceure çerbitçariei, eta ceure obrei, eta guida etçatçu hequin femeac B hequiñ C Jarraian datorren « hequiñ » horren ondorioz.

120 • 312 orrialdea 2274L lerro zenbakia

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Mintçatuco naiz içare arimaren behaçunean, B ene C eta erranen dut eznaçaçula condemna.

121 • 317 orrialdea 6110 bertso zenbakia

Aäpaldion dacufaçun/Leguez dut laceria, Nauçun beraz vrricari/O iongoico eftia B Handia C

122 • 318 orrialdea 6148 bertso zenbakia

Aparta çaquizquidate/Beraz etfai azpreac B goffeac C Ecen iaun onac entçuntic/Ene auhen trifteac.

123 • 319 orrialdea 6164 bertso zenbakia

Gloria duela iaunac/Bai halaber femeac B aitac C Nola oraño fpiritu/Amudioz betheac.

124 • 353 orrialdea 6872 bertso zenbakia

Ordanez darozquigutçu/Içar cheheac bitzten B arraitfuac C Gau belceco illhunbetan/Hetçaz guida gaitecen.

125 • 370 orrialdea IZ2 bertso zenbakia

Domine Deus nofter B Domine Dominus nofter C

126 • 393 orrialdea 2585L lerro zenbakia

Maria faindua Gutçaz othoitz eguiçu Iaincoaren ama faindua Gutçaz othoitz eguicu. Eta halaberce guztietan B Eta hala ondoco guztietan C

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127 • 403 orrialdea 7931 bertso zenbakia

b. Ea cein cen ecin c. Ea ceiñ cen norc deraque Guineraque damua, Gaineraquo damua, Ikhuffi cinduenean, Ikhuffi cińduenean. Habean itçatua Habean Ardiats dieçadaçu Ardiats dieçadaçu Bekhatuen dolua. Bekhatuen dolua.

3. Eliçarari buruzko zenbait kontu bibliografiko

128 Ez dugu uste Eliçara erabiltceco liburuan zuzenketak egiteko auke-rarik izango zuenik Joanes Etxeberrik.11Ez da 1636.eko agiango edizio horren alerik ezagutzen eta 1665.ean (ezagutzen den lehen edizioaren argita-rapen data) hila da. Urte honetako edizioa ez da bat ere jagona eta, dirudie-nez, zuzentzailea ez zen zuhurregi ibili.

129 Liburuaren eskaintzak direla eta, Eliçara erabiltceco liburua Bertrand Etxauz Turs-ko apezpikuari eskainia da. Eta liburu honetan, Manuale an ez bezala, azalean ere agertzen da. Honela dio 1 zenbakidun orrialdean : DEDICATIONEA IAVN NOBLE, BERTRAND DE ETCHAVS, SORBONACO DOCTOR Iaquintfun, Turfco Archiphizpicu digne, erregueren predicari famatu, & Confeiller cuhurrari. 130 64 bertso dira eta beraietan zehar ikusiko dugu Etxeberri Ziburukoak dion begirunea Bertran Etxauzi. Benetan ederrak dira bertsook.

3.1. Inposaketa modua : plegu eta zeinadurez12

131 1665.eko edizioa in-8 txikia formatokoa da ; plegu mota aldetik13zera esan behar da, hau zortzireneko plegu oso (21, 336 orrialde betez) eta erdiak (beste 21, 168 orrialdez) tartekatuz eratua dela ; guztira, 504 orrialde.

132 Liburu bera hasi aurretiko orrialde guztiek zeinadura mota desberdi-na zeramaten. Kasu honetan 6 otso hanka, Vinsonen terminologia erabiliz (1891-8 : 544). 133 Aipatu ditugun aurretiko orrialdeetako lau azkenak (qqqqqq zeina-dura duenaz hasi eta zuriz dagoena kontatuz) liburuaren 4 lehen orrialdeekin batera plegu erdi bat osotzen dute. Horrexegatik hasten da A zeinadura 5 zenbakia daraman orrialdean eta ez 1-arenean. 134 Zortzireneko pleguak lau zeinadura eraman behar ditu plegu erdirai-no ; bi laurenekoen kasuan. Eliçara- ren edizio honetan ez da hau betetzen. Bestalde, 164, 284 eta 292 orrialdeetako deiak ere ez dira agertzen. 135 1666.eko edizioaren zeinadura sistema oso erregularra da eta zeina-dura guztiak agertzen dira. Zortzireneko pleguetan dago eratua (lau zeinadu-ra izan beharko lukete pleguko eta ez hiru, beraz) ; aurretiko orrialde guztiek lau plegu osotzen dute (64

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orrialde) eta liburuak berak 33 plegu zortzireneko (528 orrialde). Guztira, bada, 592 orrialde dira. 136 Azken pleguko (513. orrialdean hasten dena) taula 517. orrialderaino baino ez da heltzen. Honek zera suposatzen du, plegu erdi bat erabil zitekeela, baina osoa zein erdia erabili (16 edo 8 orrialde) amaieran zenbait orrialdek zuriz geratu behar zuen. Orri zurioz baliatu da edizio honen presta-tzailea bertso berri batzu sartzeko ; Etxeberrirenak bereak ez diren bertsoak. 137 Komentatu nahi genukeen zertxobait dago, bestalde. Mende honen hasieran nolabaiteko eztabaida gogorra izan zen euskararen munduan ihardun ziren bi hizkuntzalariren artean, Vinson eta Dodgsonen artean hain zuzen. Kasua da Vinsonek bere Essai... -n Londreseko British Library-n Joanes Etxeberriren Eliçara erabiltceco liburua- ren 1666.-eko edizio oso bat zegoela zioela. Dodgsonek hori ezeztatu egiten du edizio horrek 3 eta 4 orrialdeak falta dituela esanez (1907 : 486).14 Gogor erantzun zion Vinsonek (1908 : 671) liburua bere osotasunean gordetzen zela erakutsiz. Honetarako, besteak beste, zeinaduren arrazonamendua jarriz. Hona Vinsonek zioena : Le volume est complet, et très complet, [1666.ekoaz mintzo da] et je le prouve : 1. par le nombre des pages. Il comprend 2 p. r. ch. pour le titre dont le ve est blanc, deux p. chiffrées 1-2, soixante p. chiffrées 5 a 64, 517 p. chiffrées 1 à 517 et onze p. non chiffrées, ce qui fait en tout 64+ 528. Or 64 et 528 divisés par 16 donnent exactement 4+33 ; le volume donc contenir exactement quatre et trente-trois feuilles ; la signature a doit être à la p. I des préliminaires, e à la page 17, i à la page 33, o à la page 49 ; A doit être à la page 1, B à la page 17 ; C à la page 49, et la dernière KK à la page 513, ce qui est exact. Donc le volume est com-plet, la feuille préliminaire a ayant ses huit feuillets. 2. par les signatures. Dans cette édition, les feuilles sont signées par les trois premiers feuillets a, aij, aiij, etc, B, Bij, Biij, etc. Or le titre n'ayant pas de signature conformément à l'usage, aij est au feuillet paginé 1-2 ; aiij au feuillet 5-6 ; Donc, 5-6 suit exactement l-2 et il n'y a aucune lacune entre ces deux feuillets. 138 Geroagoko gutun batean Dogsonek Vinsonek arrazoi zuela onartu zuen (1908 : 793-794). Argi dago, bada, zein garrantzitsu den plegu eta zeinaduren sistema liburu baten eraketan, urte askotako liburuetan batez ere, urteak joan urteak etorri orrialdeak galdu eta bestelakoak pasatuak direnetan.

3.2. Edizioez

139 Ez dugu 1636.eko edizio posible horren alerik ezagutzen ; are, l666.eko edizioan « Bigarren aldian Inprimatua » dakar. Guk uste dugu datu hau aintzat hartzekoa dela, bere aipamenik inork egiten ez badu ere.

140 Argi dago 1666. urtean (30 urte besterik ez dira igaro 1636.az geroz-tik) jakin egin behar zuela Ioanes Desbaratz jaunak argitaratzear zuen liburuaren aurreko argitarapen eta berrargitarapenen berri. Are, edizio honen prestatzailea Aita Gazteluzar izan bazen, honek ere jakin egin behar izan zuen 1665.ekoa lehena hala bigarrena izan zen. 141 Itxuren arabera, bada, 1636.eko argitarapenaren kasuan, edizio fan-tasma baten aurrean izan gintezke. Hau da, obra eta edizio desberdinen aleak ditugu, baina ondorioztatu diren data eta tokia ez datoz bat ezagun ditugun edizioekin. Baldin eta edizio fantasma bat izan ez bada, Gilen Milangesek inprimatua da. Inprimatzailea ezezik, editorea ere izango zen, baina, Manual- aren lehen edizioan aipatu bezala,

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Etxeberrik berak ere egingo zituen bere ahaleginak edizio horretarako diru-laguntzak biltzen. 142 Kontuan hartzekoa da, gainera, Aita Lino Akesolok dioenez (1989 : 219),15 Bertrand Etxauz bai Enrike bai hurrengo errege Luis XIH.ak aholku-lari eta erresumako erremusinari nagusi izendatu zutela, eta argi dago, gure ustez, bai Joanes Etxeberrik bai bere garaikideek Bertrandengana jo beharko zutela diru bila beren liburuak argia ikusi ahal zezaten. 143 1665.eko edizioa I. Mongiron-Milangesenean dago inprimatua. Hau ere, gure ustez, inprimatzailearen beraren kargu. 144 1666.eko edizioa Paben, Joanes Desbaratzen moldiztegian dago inpri-matua. Joanes Desbaratz, Pierreren semea da eta 1655-1687 urte bitartean ihardun zuen inprimaketa lanetan. Edizio honen prestatzailea ez zen, haatik, bera izan ; edo ez bera bakarrik, bederen. 145 Aipatua dugu edizio honen azken hamaika orrialdeetan datozen bertsoak Bernardo Gazteluzarrenak direla. Guk uste dugu Gazteluzar bertsoon egilea ezezik, edizioaren prestatzailea ere izan dela. Are, editorea ere izan zitekeelakoan gaude. Ez bera, baina bai berak ikasi zuen Pabeko jesuiten ikastetxea. 146 Etxeberri Ziburukoa bera ere bertan ikasia zen eta, egilearen izen ona eta liburuak izango zukeen arrakasta kontuan izanik, ez dugu uste ikastetxe honek liburu honen edizio berri bat argitaratzeko aukera galduko zuenik, Gazteluzar aurretik dela, jakina. 147 Edizioa, bestalde, oso jagona da eta aldaketa ugari ditu aurrekoarekin konparatuz, 1665.ekoarekin. Aldaketok « Calendarioaz edo demboren contuaz tratatua » atalean dira nabarmenen. Hona hemen 1665 eta 1666.ekoa-ren arteko desberdintasunik nabarmenenak :

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1665.eko edizioazioa 1666.eko edizioa 1 .- « Mundua eguin cenac du 6833 » « Mundua eguin cenac du 6863 » 2.- « Vholde haundiac 3428 » « Vholde haundiac 3458 » 3.- « lefus Chrifto fortu cenac 1645 » « lefus Chrifto fortu cenac 1666 » 4.- « laquin nahi dut 1635. go vrthearen « laquin nahi dut 1673co vrthearen burullean, burullean, cembat garren egunean içanen den cembat garren egunean içanen den illhargui illhargui berria. » berria. » 5.- « Nahi baducu bada iaquin, 1642. co. vrtheco « Nahi baducu bada iaquin, 1680co. vrtheco marchoan noiz içanen den illhargui berria,... » marchoan noiz içanen den illhargui berria,... » 6.- « Iaquin mahi duçu 1639. garren vrthean, « Iaquin nahi duçu 1677 garren vrthean, Abendoan cembat garren egunean, içanen den Abendoan cembat garren egunean, içanen den illgargui berria » illhargui berria » 7.- « laquin eçagun bada aurthen, 1635.garren « laquin eçagun bada aurthen, 1673 garren vr-thean Aprillaren çortcian cembat daitequen vrthean Aprillaren çortcian cembat daitequen illharguia çahar. » illharguia çahar. » 8.- « Nahi baduçu iaquin 1635.garren vrthean, « Nahi baduçu iaquin 1673. garren vrthean, aphirillaren hamaffeian, illharguia, cein cenz Aphirillaren hamaffeiean, illharguia, cein içanen cahar edo cembat egun cituen [...] Aphirillaren den çahar edo cembat egun icanen tu, [...] beraz hamaffei garreneam. illharguiac cituen Aphirillahren beraz hamaffei garrenean, haffi cela. hogoi eta hamar egun, eta egun illharguiac içanen tu, hogoi eta hamar egun, eta berrean illhargui berria haffi cen. » egun berean illhargui berria haffi coda. » 9.- « lkhas cagun vrtheberean 1636. « Ikhas agun vrtheberean 1673 Aphirillaren Aphirillaren, çortci garrenean cembat eguin çortci garrenean cbat eg ditusqueen illharguiac citu en illharguiac, [...] hamabi egun cituen [...] hamabi egun ditusque Aphirillaren çortcian Aphirilloren çortcian illharguiac çahar cela. » illharguiac çahar içanen dela. »

148 Ikus dezakegunez, bada, 1665.eko edizioan taulak baizik aldatu ez diren bitartean, 1666.ekoan taulak ezezik aurreko data mordoa ere aldatu egin da. Al-datu egin du edizioaren prestatzaileak, edizio urtea aldatze honek sortzen zituen aldaketak konponduz. Honexegatik diot edizio jagon baten aurrean gaudela.

149 1665.ekoan, tamalez, zentzurik ez duen zenbait kontu dago eta eskuizkri-bua edo 1636.eko agiango edizio hori bilatu artean ezin izango dugu jakin zer den Etxeberri Ziburukoak idatzia eta zer moldiztegietan gehitua edo aldatua. 150 Jarri dugun 8. adibidean « 1635.garren vrthean, Aphirillaren hamaffeian, illharguia, cein cenz » dakar. Baina datuok ez datoz bat 7. adibideko « aurthen, 1635.garren vrthean Aprillaren çortcian cembat daitequeen illharguia çahar » hauekin. Are, 9. adibidean « vrtheberean, 1636. Aphirillaren, çortci garrenean cembat egun citu en illharguiac » agertzen da eta azkenean ez dakigu zein den aurtengo urte hori, 1635.a ala 1636.a. Badakigu, jakin, onespen datak 1635.ekoak direla eta 1635.a dela onartu beharko dugu. 151 Zer gertatzen da, bada ? 1665.eko edizioaren prestatzailea ere aldaketak egiten saiatu eta dena nahastu duela ? Jatorrizko testuan, eskuizkribuan, ere horrela zegoela eta Etxeberri bera nahastu zela ? 152 Bi edizioei dagokien datu kronologikoak direla eta,16 zibilizazio ezberdinek hala noa. egipziarrek. txinarrek. indioek. arabeek eta idazle zenbait. nola Diogene Laerziok. eta Diodoro Siziliarrak munduaren adi-nari buruz dituzten usteak agertzen dizkigu. Ororen

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ustetan lehen aintzinate honek 6100 bat urte inguru ukan zituen. Giristinoek. aldiz. bstela kontatzen zuten. esate baterako. Leizarragak bere Kalendrera- n (1571) hau izkribatzen du : Munduaren hastetik hunedrano 5539 urthe » izan dugu Euskaltzaindiak 1990. urtean argitaratu zuen Joanes Leizarragaren Testamentu Berria- ren argitarapena eskuartean erabiltzeko aukera, eta Kalendrera- ri dagokion atalean, 1.378. orrialdean honako datuok ditugu :

153 Datuok, haatik, ez datoz bat arestian J. Etxeberrik erakutsi dizkigunekin.

154 Desadostasun honek eraginda, jatorria zein izan zitekeen bilatzen hasi ginen. Horretarako, Bilboko Elizbarrutiko Gotzaintzak 1976.ean argitaratu zuen Euskal-Biblia hartu eta « Asiera » liburuan datozen datu kronologiko guztiak ordenatu eta zenbatu ondoren zera ediren genuen : Jangoikoak mun-dua sortu zuenetik Uholdera 1656 urte igaro zirela, J. Leizarragaren Kalendrera- n dugun urte kopuru bera. J. Etxeberrik erabilitako iturria zein izan zitekeen galdetu genion geure buruari eta zenbait adiskide jarri genituen erantzunaren bidean. Hauetariko batek eman zigun erantzuna, irakurri zuen liburu batean aurkitu datu kronologikoak eskainiz. (Derragun, aurrera egin aurretik, eguneango Bibliak, oro har, latinez idatziriko Vulgata jarraitzen dutela eta honek jatorrizko hebraierazko Biblia. K. a.-ko II mende inguruan, ordea, LXXtarrek grekora itzuli zuten Biblia, berau Alejandriako Biblia ize-nez ezagutu izan delarik. Mendeetan zehar, bi ereduak erabili izan dira.) 155 Liburu hau Wernerius Rolewinck-en Fasciculus temporum da. Gizon hau alemaniar monje kartuxaria izan zen, Wesfalian 1425.ean jaio eta Colonian 1502.ean hil zena. Liburua Colonian bertan inprimatu zuen Arnold Therhoernen-ek 1474.ean. Lortu ditugun fotokopiak 1993.ean Leongo Unibertsitateko Argitarapen Idazkaritzak eta Leongo Errege Kolegiatako San Isidoro Katedraren berrargitarapenekoak dira. 156 Hona zer dioen Rolewinck-ek 5. orrialdean : Por otra parte, la postura de Orosio y de Beda se basa en los 3.184 años que, según los Setenta, discurrieron desde la creaciόn del mundo hasta el nacimiento de Abraham. Sin embargo, los hebreos tienen 1236 años menos, ya que, de acuerdo con las Biblias corregidas según la doctrina hebrea, sόlo 1948 años pasaron desde Adán hasta el nacimiento de Abraham. Los setenta intérpretes coinciden bastante con los hebreos, [f.1v] hasta la destrucciόn del templo, que recibe generalmente el nombre de destierro de Babilonia. Los años siguientes no se conocen a partir de Escritura canόnica, sino a partir de otras historias tanto de los judίos como de los gentiles. Y de nuevo en este punto hay diferencias, pero no muy grandes. Asί pues, haciendo el cόm-puto, de acuerdo con Beda, desde la creaciόn del mundo hasta el nacimiento de Cristo transcurren 5199 años, y esta es la postura universal de la Iglesia. Sόlo falta uno para los cinco mil doscientos años. 157 5.199 urte hauei 1635 (Eliçara erabiltceco liburua- ren baimen eta onespenen urte datak) gehiturik, 6834 urte genituzke, eta Joanes Etxeberrik « Mundua eguin cenac du 6833 » dio.17

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4. Hondar hitzak

158 Derragun, bukatu aurretik, eta Eliçara erabiltceco liburuaren lekuko-tasun desberdinei gagozkiola, zilegi dirudiela hiru lekukotasun desberdin behintzat izan direla aitortzea, tamalez, bi baizik ezin izan baditugu geurega-natu ere. Izan ere, erakutsi denez, argi dago 1665. eta 1666.ekoak izan direla eskuartean erabili baititugu. Eta hirugarren bat ere hor legoke, hala erakusten baitute Pierquin de Gemblouxen aipamen bibliografikoak eta Julio Urkixok argitaratutako Joanes Etxeberri Sarakoaren eskuizkribuetan aipatutakoek, besteak beste.

159 1665.ean bi lekukotasun desberdin izan zitekeenekoaz, aldiz, aitortu dugu J. Vinsonek « edition conforme à la précédente... » jarri izan ez balu, bat bakarra izan dela uste izango genukeela, baina baieztapen horrek berorrek utzi gaitu zalantzatan. 160 Eskuartean erabili ahal izan ditugun bi lekukotasunen arteko erkaketa eta aldakien azterketak, bestalde, zera erakutsi digute, ezaba daitekeela batak bestea irakurri izanaren posibilitatea. Baita bakoitzak bere aldetik goragoko lekukotasun independienteak irakurri izana. Gure ustea, bada, biak goragoko bere irakurri dutenekoa da, hemen ere hirugarren lekukotasun horren aldeko froga berria dugularik. 161 Hirugarren ataleko bitxikeriei dagokienez, azkenik, zeinaduren kontuak argi erakutsi digu 1666.eko lekukotasuna bere osotasunean heldu zaigula.

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NOTES

1. Joannes Etxeberri Ziburukoaren hiru liburu inprimatu eman zaizkigu : Noelac bigarrena eta gaur mintzagai dugun hau hirugarrena. Hiru liburuon xehetasun gehiago nahi duenak jo beza, esaterako. Vinsonen Essai... ra (1891-8). Patxi Altunaren Manual devotionezcoaren edizio kritikora (1981) edo I. Atutxaren Noelac- i buruz-ko artikulura (1999) edo doktorego tesira.

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2. Edozein testukritika liburutakoari jarraiki (guk J. Lakarraren « Testukritikaz : I. Stemmarantz » (1988) eta A. Blecuaren Manual de crίtica textual (1988) lanak ditugu lagungarri), recensioaren fon-tes criticae fasean geundeke. Izan ere. fase honetan « argitaratzaileak iturri guztiak behar ditu eza-gutu eta erabili bere lanean... Iturriez kanpo, argitaratzaileak ezin izango ditu ahaztu delako obra horren aurreko edizioak (baldin badira) edota hari buruzko ikerketak. bereziki testuari buruzkoak izaki » (Lakarra. aip. lan. : 119). 3. Joseba Lakarrak dioenez (1988 : 120) « testua gureganaino irits dakiguke a) zuzenean edo zeharka.b) eskuizkribuz edo inprimaturik eta c) lekukotasun bakarrean edo gehiagotan ». 4. Badu F. Michelek ere liburu honen aipamenik bere Proverbes basques- en. Hona dioen : « XVI.L'annee suivante (1666.a), parut a Pau un volume in-24. sous le titre d'Eliçan erabilceco liburia(Livre qu'on doit porter dans l'église) : nous ne le connaissons que par la citation fautive qu'en faitle Mithridates. » 5. Julio Urkixok 87 jarri duen arren (1907 :169), zenbaki zuzena 97 de Oraingoan ere, gaizki jarri du J. Urkixok zenbakia : 75 jarri beharrean 71 dager. Berriro, 83 jarri du 91 jarri beharrean. Bedago, bestalde, desberdintasun bat Urkoxoko jaunak aldarazi zituen bertsoak eta Elicara erabiltceco liburua-n datozenen artean. Ahapaldiko bigarren bertsoan, ‘Bide chogor meharrean’ agertzen den bitartean, Julio Urkixok ‘Har chogor meharrean’ ezarri du. 6. J. Vinsonen Essai... -ren hiru edizio desberdin erabili ahal izan ditugu eskuartean. 1984.ena Gipuzkoako Foru Aldundiko Seminario de Filologίa Vasca Julio de Urquijok argitaratu zuena da J. Urkixoren oharrez osotua dagoena eta 17.b liburuari dagokion oharretan agertzen da Eliçara erabiltceco liburua- ren argitarapen honen azalaren kontua. 7. Lacomberen artxiboari buruzko datu zehatzak nahi dituenak jo beza J. A. Arana Martijaren « Georges Lacomberen artxiboa » artikulura (1997 : 49-77). Aranak dioenez. Lacomberen liburutegia Bergarako Olaso Dorrera ekarri da eta gela berezi batean ordenatuta kokatu. bitartean liburu eta dokumentu guztiak katalogatzen ari direlarik. 8. Ikus V. Collins-en Attempt... (1894). 9. Hutsaren (eoria erabiltzearen zergatiez ikus I. Atutxa (1999 : 274-275). 10. Derragun huts guztien zerrenda osoa I. Atutxaren doktorego tesiko eranskinetan aurki daitekeela. Bestalde. aipatu jarriko ditugun adibide guztietan agertzen den lehen zenbakia orrialdeari dagokio-la, bigarrena bertso zenbakiari. ondoren 1665.eko adibidea (B) eta azkenik 1666.ekoa (C). 11. Ezagun dugun Noelacen 1645eko lehen lekukotasunean. esaterako, espreski mintzo zaigu Etxeberri kontu honetaz. Hona zer dioen liburuaren azken lerroetan : « Iracurtçaillea. excufatuco nauçu baldin impreffionean cembait falta edireten baduçu, ecen eznintcen neroni lekhuaren gañean ». 12. Bi lekukotasunen zeinadura guztien zerrenda-erkaketa ikusi nahi duenak jo beza I. Atutxaren doktorego tesira. 13. Inprentako konposaketa moduei buruzko xehetasun gehiagotarako ikus Moll, 1984. 14. Artikulu honetan Leizarragaren aditz sistemaz mintzo den arren. amaieran leku egiten die Eliçara erabiltceco liburua- ri buruzko hitzoi. 15. Artikulu honen izenburua « Beltran de Etxauz-en L584ko gutuna » da eta jatorria honako hau : Karmel. 1988-1.5-7. 16. Agusti Chaho. esaterako. oso kezkati azaltzen zen kronologia kontu hauen aurrean. Hona zer dioen P. Urkizuk (1991 : 358) : « Chahori kronologia arazoak beti kezka handia eman zion eta. adi- bidez, Paroles d'un voyant liburuan (« Les chroniques egyptiennes donnent 6128 ans. les chroniques chinoises 6100 ou 6157 ans. la chronologie indienne 6204 ans. Diogène Laίerce compte 6138 ans et Diodore le Sicilien 6081 ans. La chronologie arabe donne pour l'Age primitive ou pour l'Age ancienne 6174 ans. (J. A. Chaho. Paroles d'un voyant. 2. arg.. Paris. J. Laisné. 1839. 276-277) ») zibilizazio ezberdinek hala noa, egipziarrek, txinarrek, indioek, arabeek eta idazle

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zenbait, nola Diogene Laerziok, eta Diodoro Siziliarrak munduaren adinari buruz ditutzen usteak agertzen dizkigu. Ororen ustetan lehen aintzinate honek 6100 bat urte inguru ukan zituen. Giristinoek, aldiz, bestela kontatzen zuten, esate baterako, Leizarragak bere Kalendrera-n (1571) hau izkribatzen du : Munduaren hastetik hunedrano 5539 urthe » 17. Baimen eta onespen datak 1635.eko maiatzekoak dira. Beraz. argi dago Etxeberri 1634 urte ingu-ruan hasiko zela liburu hau idazten. eta honela 6.833 urte hauek genituzke.

INDEX

Thèmes : littérature, philologie Index chronologique : 18e siècle Mots-clés : Etcheberri de Ciboure Ioannes, littérature basque, écrivain classique

AUTEUR

ISAAC ATUTXA

Deustuko Unibertsitatean dotoregaia [email protected]

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« Joseba Sarrionandia : isiltasuna, irekitasuna eta irakurlea »

Aitzpea Azkorbebeitia Aldaiturriaga

« Idazten dudalarik, idatzi egiten naiz. Irakurtzen duzularik irakurri egiten zara » Joseba Sarrionandia, Hitzen ondoeza

I. Joseba Sarrionandiaren lanaz eta bere garrantziaz hitz bi : harreraren nondik norakoak

1 Joseba Sarrionandia « gure artean den poeta handiena » dela irakurri nuen behin Pako Aristiren eleberri baten1. Bada, baieztapen kategoriko samarra izan arren, nik neuk ere beste horrenbeste esango nuke eta poeta han-dia ez ezik, narratzaile handia ere badela gaineratuko nuke. Izan ere, Sarrionandiaren poesia-bildumen ondoan bere narrazio- bildumak ere ahanztezinak dira, eta berdin testu laburrez osatutako miszelanea-lanak ere. Horrekin guztiarekin batera entsegutzat har daitezkeen lanak ere aipatu beharra dago, bai eta, azkenik, hainbat eta hainbat idazleren itzulpenak ere2.

2 Begibistakoa denez, literatur genero ezberdinak3 landu dituen idazle honen lana benetan zabala da, benetan itzela euskal letren munduari eginda-ko ekarpena. Horrela, ez da harritzekoa makina bat idazlek haren oinorde-kotzat aitortzea euren burua. Beraren hizkera eredugarri gerta zitzaion askori eta beraren testuak literaturaren unibertsoan barneratzeko makulu4. Harago joanda, Sarrionandiak bere lehen poesia- bilduman agertutako literatur plan-teamendua (Izuen gordelekuetan barrena-ko lehen poeman kasu, « Bitakora kaiera » hartan) manifestutzat jo izan zuten hainbat idazlek, G. Markuletak aitortu legez (1990b : 3). 3 Era berean, Iurretako idazleak literatur trasmisore legez jokatutako paper funtsezkoa hainbat egilek onartua izan da, J. R. Madariagak besteak beste : « Sarriri esker, literaturaren palazio handiaren zenbait gela eder desku-britu nuela aitortu behar dut » (1995 : 40).

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4 Esan liteke, hortaz, erreferente bihurtu zela belaunaldi oso batentzat eta, are gehiago esanda, oraindik ere halaxe dela : Sarrionandia maisutzat daukate hainbat poeta gaztek, zeintzuek zintzotasunez aitortzen duten bera dela « gehien irakurri, errezitatu eta kopiatu dugun idazlea » (Harkaitz Canoren esanetan, 2000 : 16) eta berari esker maitemindu zirela literaturaz (ikus Gari Berasaluzek idatzitakoa, 2000 : 56). Era berean, zinez esangura-tsua da abeslari gazteek ere Igorretako idazlearen testuetara jotzea euren abestiak musikatzeko orduan (Hau da ene ondasun guzia diska-liburuan jaso- takoak horren froga dira, eta ez bakarrak gainera). 5 Ezbairik gabe, Euskal Literaturara abanguardien haize berritua ekarri zuen Pott Bandaren partaide hau bizi-bizirik dago gure artean ; bestela esanda, hemen dago gartzelatik ihes egin zuenez geroztik han - nonbait -badago ere5. 6 Sarrionandiaren bizitza-peripezia aipatu berri dut eta, hona heldurik, beronek idazlearen inguruan zabaldutako misterio-kutsua ere aipatu beharra dago. Izan ere, gartzelan jaio eta klandestinitateko urte luzeetan haziz joan den mitoak irakurle asko eta asko gatibatu ditu. Horixe da, hain zuzen, idaz-le honen garrantzia agerian uzten duen beste alderdi bat : alegia, idazleen artean bezala irakurleen artean ere daukan harrera benetan zabala. 7 Harrera horren erakusle da, hasteko, bere lanek izandako salmenta arrakastatsua. Azken lanari bagagozkio, adibidez, gogoratzekoa da Hau da ene ondasun guzia diska- liburuak 1999ko Durangoko Diska eta Liburu Azokan izan zuen salmenta itzelaren ondorioz Sarrionandia « azokako errege » izendatua izan zela (ik. Errasti, 1999). Edo gogoratu, bestela, bi urte lehena-goko Azokan Hitzen ondoeza salgai atera eta bi asteren buruan agortu zela. 8 Hasierako lanetara jauzi bat eginez pareko harreraz hitz egin genezake. Horixe dute erakusten, esaterako, Narrazioak bildumak izandako berrargita-rapen ugariek. 9 Salmenta-datuekin batera kontuan hartzekoak dira, halaber, M.J. Olaziregik (ik. 1993, 1996, 1997) gazteen irakurketa-zaletasunen inguruan egindako inkesten emaitzak. Ikerketa horretan agerian geratu denez, gazteek oso gogoko dute Sarrionandia eta irakurri ere, gogoko dutelako irakurtzen dute (eta ez irakasleek behartuta edota haien gomendioei jarraikiz). Eskola zirkuitoetatik kanpo kokatzen den irakurketa eta zaletasuna da beraz. Harrera zabal horren zioez galdezka hasiz gero, neurri handi baten testutik kanpoko faktoreek — faktore estratestualek — bultzatu dutela pentsa genezake ; alegia, harrera hori arrazoi soziologikoetan, sikologikoetan nahiz ideologikoetan oinarritzen dela. Honela, gartzelarekin batera jaiotako idazle militantearen figurak badirudi miresmena ernarazi zuela — duela — hainbat eta hainbat irakurlerengan, bere harrera bultzatuz (ik. Epaltza, 1994 : 22). 10 Gorago iradoki dugunez, gartzelatiko ihesak gure idazlearen inguruko mitoari jaiotza eman zion, erbestealdiko urte luzeetan zehar haziz joan dela-rik mito hori, klandestinitatearen xarmak elikatuta (horrenbeste hazi non, Pako Aristiren iritziz, Sarrionandia « totem » bihurtzen ari garen : ik. 1999). Mitoak mito eta ‘totem’ak ‘totem’, argi dagoena da nolabaiteko lotura afek-tiboa dagoela Sarrionandiarekiko irakurle-talde zabal baten aldetik eta horrek baina ez horrek bakarrik, laster ikusiko dugunez — baduela zerikusirik bere harrerarekin. Zentzu honetan aintzat hartzekoa da Hnuy illa nyha majah yahoo poesia-lanak — poesia nahiko gutxi irakurtzen den gure aro honetan izugarrizko salmenta izan zuela 1995.eko Durangoko Azokan salgai atera zenean eta aintzat hartzekoa da, halaber, orduko hartan X. Mendigurenek egindako

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adierazpena : « liburua erosten dutenek bere kalitatearengatik ez ezik, idazlearekiko harreman sentimentala daukatelako erosten dute »6. 11 Nolanahi ere, ohar batzuk egin nahi nituzke idazle militantearen figu-ra horren edota mito erromantiko horren eraginaz. Hasteko, eragin kontrae-sankorra izan duelakoan nago. Izan ere, egia bada ere miresmena ekarri duela irakurle-talde baten aldetik, egia da ere bazterketa ekarri duela beste irakurle batzuen eta zenbait instantziaren aldetik, J. Gabilondok inoiz aipatu duenez (1993 : 37-38) eta B. Atxagak berak salatzen zuenez Groenlandiako lezioa-n, non gure idazlearen « Gereziak jateko sasoia iritsi da » poema jaso baitzuen « isilketaren aurka » egiteko asmoz7. 12 Bestalde, eta sekula irakurri dudanaren aurka, ez dut uste Sarrionandiaren harrera figura edota mito horrek bakarrik bultzatzen eta hortaz azaltzen duenik. Ur Apalategiren esanetan (1998 : 70), « Sarrionandia, Atxagaren obra handia argitaratzen den urte horretan, askoz ere sartuago dago helduentzako literaturaren merkatua osatzen duen irakurlego zabal eta herrikoian, popularitate hori gaizki-ulertu batetik badatorkio ere ». Eta azken adierazpen hau honela zehazten du egileak (14. oin- oharra) : Nahiz eta. Izagirrek bezala eta horretan Atxagarengandik urrunduz, Sarrionandiak Euskal Herriak lorturiko normalizazio politikoa gutxietsi eta hortaz euskal idazlearen konpromisoa ez absurdutzat jo, garbi dago idazle klandestinoa miresten duen irakurlegoaren zati handi batek ez dituela ulertu Sarrionandiaren benetako ibilbide eta mezu literarioak eta presondegitik ihes egitea lortu duen militante- idazlearen mito erromantikoa gehiago axola zaiola. 13 Alabaina, ene ustez ‘mitoa’k eraginik eduki badu ere, ezin ditugu fak-tore endotestualak inondik ere ahaztu ; hots, testutik kanpo geratzen diren halako arrazoien ondoan, testu-barnekoak ere funtsezko gertatzen dira. Zalantza barik, testuek eurek liluratu gaituzte irakurleok eta ‘gatibatu’ egin gaituzte, dela bere hizkeragatik (bazterretako euskalkietatik edaten duen hiz-kera samur eta liriko horrengatik)8, dela eskaintzen zaizkigun mundu literario berriengatik, dela umore eta ironiagatik, dela beste hamaika arrazoirengatik.

14 Egiazki, ugariak dira oso testuok eurok gure irakurketa bultzatzeko — harrera bultzatzeko, finean — agertzen dituzten eragileak (edo « estrategiak », irakurketa- ekintzaren garrantzia aldarrikatzen duen Harrera-Teoriaren formulazioari bagagozkio9). Adibide zenbait hautatzearren, funtsezko estrategiatzat jo ditzakegu Sarrionandiaren testuetako hasierak eta amaierak (irakurleon arreta bereganatu eta gure partehartzea biziki bultzatzen baitute), testuen nahiz bildumen izenburuak (Hnuy illa nyha majah yahoo bezalako izenburu bat ez ote da deigarria edozein irakurlerentzat ?)10, aurreikuspen-estrategiak, epigrafeak (Sarrionandiarengan hain ohikoak diren epigrafe apokrifoak barne), irudi grafikoak (gogoratu, adibidez, arestian aipatutako poesia-bildu-man zehar han-hemenka agertzen diren eta, hain zuzen, izenburuarekin estuki lotuta dauden zaldien irudiak) eta baita testuen arteko harremanek eratutako amarauna ere. Testuartekotasunez ari garela, gainera, bi motatakoak bereizi beharko ditugu : tradizioaren onarpena eta idazketaren izaera soziala iradokitzen duten beste egile batzuen testuekiko harremanak batetik eta, bestetik, Sarrionandiak bere testuen euren artean zabaldutako barne-testuar-tekotasun jolasak, zeintzuen bidez argi geratzen den gure idazlea keinuka ari zaiola bere irakurleari : beraren testuen artean zabaldu dituen kohesio-hari hauei heldu eta testu batetik bestera mugitzera gonbidatzen du bere irakurlea, jolastera azken finean. Eta irakurlearekiko jolas hori bultzatzea dute helburu, preseski, beste hainbat eta hainbat

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estrategiak ere, luze joko ez badigu orain-go honetan aipatzeke utzi beharko ditugunak11. 15 Izan ere, hizpidetzat har genitzakeen estrategia guztien artean bati heldu eta erreparatu nahi diot lan honetan, batetik leku benetan funtsezkoa betetzen duelako Sarrionandiaren lanean eta beronen harreran (irakurlea bere testuen muina eta protagonista bihurtzen duenez gero) ; eta, bestetik, gure idazlearengana eta bere bizitza-jarrera nahiz mundu-ikuskerara hurbiltzen lagun gaitzakeelako. Testuotan nonahi — baina azkenengoetan nabarmenkia-go — agertzen diren hutsune edota zuloez ari naiz.

II. Hutsuneak Sarrionandiaren lanean : komunikazio inplizituaren mekanismoa eta bere fruituak.

16 Harrera Teoriari jarraikiz, testu batek informazio bat ematen ez due-nean edota erdizka ematen duenean hutsuneak eratzen dira. Alabaina, hutsune bat ez da edozein informazio ezaren ondorioz eratzen (idazleari ezi-nezko zaio-eta guztia kontatzea, zehaztea, deskribatzea) ; aitzitik, irakurleok falta den hori ‘betetzera’ beharturik gaudenean eratzen dira (gure irudimen eta hausnarketaren laguntzaz kontatu ez zaiguna asmatuz, zehaztu edo deskribatu ez zaiguna geuk irudikatuz, etab.). Horrela gertatzen da, adibidez, eten-puntuekin nahiz kapitulu eta istorioen bukaeretan — bukaera ‘irekiak’ deiturikoetan — sortzen direnekin.

17 Alta, hutsuneek oso egiteko garrantzitsua betetzen dute irakurketa-ekintzan, ezinbestekoa egiten dutelako gure partehartzea. Eta partehartze horri esker, hain zuzen, irakurri ahal ditugu testuak, A. Manguel-ek Irakurketaren historia bat lanean irmoki gogorarazten digun legez : « testu bat bukatugabea delako irakur daiteke bakarrik, hots, lekua uzten diolako irakur-learen lanari » (1998 : 115)12. 18 Sarrionandiaren testuetara etorriz, han-hemenka egingo dugu topo hu-tsuneekin eta halakoetan beharturik egongo gara berauek betetzera : « Hemen ez dago udaberririk » narrazioaren erdian kontatzen ez zaizkigunak geure gogoan irudikatzera, adibidez, edota « Antzerki zaharren batetako pertso-naia » istorioaren bukaera asmatzera edota « Harriak eta herriak » poema esanguratsuak bukaeran zuzendutako galderaren erantzuna geure baitan bila-tzera, eta abar. Inoiz goitik behera hutsunez eratuta dagoen testurik ere eskai-ni digu idazleak, hutsuneetan bertan dagoelarik, preseski, testuaren mamia. Horren adibide daukagu Hitzak eta ideiak aldizkarian agertutako « Bernard Detxepare » testua : Biarnoko gartzelan, XVIgarren mendean, gartzeleroa heldu zen, giltzporra zaratatsuarekin, eta esan zuen : ‘Bernard Detxepare, libre’ ‘...... ?’ ‘Ez zara ba zu Bernard Detxepare ? Libre zaude’ ‘...... ?’ ‘Erreginak hala agindu du, kanpora !’ ‘...... ?’ ‘Hala agindu da, zure gauzak bildu eta zoazela’ ‘...... ?’ ‘Zer ba ?’ ‘...... ?’ (Hitzak & ideiak, 3. zb.. 8. or.)

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19 Zer esaten digu testu honek ez bada, hain zuzen, esaten ez diguna ? Idazleak esan ez eta, ondorioz, elkarrizketan sortutako hutsuneok zerbait komunikatzen digutela nabarmen egingo zaigu irakurleoi berehala eta, horrela, testuak agertzen ez dituen erantzunak bilatzeari ekingo diogu, elkar-rizketa osatzearekin batera — hutsuneak betetzearekin batera — testuaren mamira heltzeko.

20 Hizpide daukagun adibidean testuak esaten duena baino gehiago esaten ez duena da irakurlearentzat adierazgarri ; bestela esanda, mezua esplizituki esandakoan baino gehiago esan gabe geratutakoan dago, esanda-koaren atzean isilik geratu den inplikazio-multzoan. Begibistakoa denez, komunikazio inplizituaren mekanismoa du oinarri-oinarrian testuak eta bera-ren emaitza dira, halaber, bertako hutsuneak. 21 Bada, hain zuzen ere, gorago aipatutako hutsune-mota guztien artean hauexek dira — komunikazio inplizituaren ondorioz sortutako hutsu-neak — Sarrionandiaren lana eskuartean hartuta azpimarratu nahi nituzkee-nak, beraren bereizgarri baitira (azken lanetan gero eta gehiago, gainera) eta idazlea nahiz bere poetika ulertzeko estrategia ezin funtsezkoagoa, jarraian ikusiko dugunez. 22 Komunikazio inplizituaren mekanismoa ulertzeko beharrezkoa zaigu Pragmatikak ezarritako « esaten dena »/ « komunikatzen dena » banaketa gogoan hartzea (ikus Grice 1975, Levinson 1983, Sperber & Wilson 1986, Escandell 1993) ; alegia, edozein komunikaziotan ezberdindu beharra dago hiztunak edota idazleak « esandakoa » (enuntziatuaren eduki esplizitua edo esplikatura) batetik eta, bestetik, « esan nahi diguna », hots esandako horren bidez komunikatu asmo diguna (eduki inplizitua edo inplikatura13). Lehenengoa agerikoa den bitartean, bigarrena geuk — entzule nahiz irakur-leok — ondorioztatu behar dugu, eragiketa kognitibo konplexu-samar baina aldi berean automatikoa abian jarriz : entzun nahiz irakurri dugunetik — ’esandako’tik — bere inplikazioak eratortzen ditugu inferentzialki, hots, dau-kagun informazioa esan nahi zaigunari buruz eraikitzen ditugun hipotesiekin deduktiboki konbinatuz14. 23 Eman dezagun adibide bat. Hitzen ondoeza-ko « Bihar » testuan honelaxe dio idazleak : « Bihar, etzi, atzo da ». Hiru aditzondo hauek osatzen dute testua, besterik gabe : horixe da testuak esplizituki agertzen diguna. Baina testu horren aitzinean idazlea denboraren igarotze azkarra ari dela ira-dokitzen igerriko dugu irakurleok. Eta « iradoki » diot idazleak ez baitu espli-zituki halakorik esan (« zein azkar igarotzen den denbora » edo antzekorik) ; aitzitik, guk ondorioztatutako ‘mezua’ da, guk eratorritako inplikatura, horre-tarako aditzondook jasotzen dituzten denbora-kontzeptuei buruz daukagun informazioa jokoan jarriz eta testuan daukaten hurrenkera aintzat hartuz. 24 Asko eta asko dira komunikazio inplizituan dautzan testuak Sarrionandiaren lanaren barruan, bai prosa-lanetan, bai poesia-lanetan. Askotan umorea dute lagun eta kritikaren bat edota salaketaren bat aditzera ematea helburu. Halaxe gertatzen da, adibidez, « auto » eta « kritika » hitzekin jolasten duen « Autokritika » testuan (Hitzen ondoeza-tik) : Autokritika, badakizue zer den. Autotik autora, norbere autoa frenatu gabe, martxan, leihotik burua apur bat aterata beste autoaren txoferrari ahalik eta irainik harrigarrienak jaurtitzea. 25 Testuak esplizituki irudikatzen diguna auto-gidarien haserre-jarrera bada ere, irakurleok aise somatzen dugu harago jo behar dugula, sakonean beste zerbait ari zaigula hor komunikatzen (benetako autokritika egin behar-rean kritika besteari egiteko daukagun joera ari dela ausaz idazlea salatzen).

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26 Laburbilduz, orduan, komunikazio inplizituan dautzan testuen aur-rean irakurleok bertan esplizituki esaten zaigunetik harago goaz, gainditu egiten dugu maila horretan egindako irakurketa — irakurketa literala, nahi bada — inplikaturak eratorriz egindako irakurketari eusteko. Hau guztia argi ikusten da testu metaforikoen kasuan (metaforak, azken buruan, inplikaturen trasmisioa muturrera daramaten komunikazio-bide bat baino ez baitira, pragmatikak erakutsi duenez). Hnuy illa nyha majah yahoo bildumako « Harriak eta herriak » poeman, esate baterako, inork gutxik ulertuko du Sarrionandia harriez ari dela. maila esplizituan horretaz hitz egiten badigu ere ; aitzitik, irakurketa literal hori albo batera utziko dugu, baliogabetu egingo dugu inplikaturak eratorriz erdietsi dugun irakurketa metaforikoa hobesteko (nazioaren inguruko gogoeta, hain zuzen). 27 Alabaina, Sarrionandiak komunikazio inplizituaz egiten duen erabilera hain da aberatsa non sarritan bi mailak ezkonduz egindako jolasa proposatzen digun. Jolas honen bidez testuak bi irakurketa ametitzen ditu : alegia, honelakoetan irakurleak ez dauka irakurketa literala zertan alboratu, zentzuzkoa baita maila esplizituan esaten zaiona (komunikazio metaforikoan ez bezala) eta, hortaz, litekeena da irakurlea irakurketa horrekin geratzea. Baina gerta daiteke aldi berean testuak horrekin batera — alegia, hori baliogabetzeke — inplizituki beste zerbait ere iradokitzen duela susmatu eta bigarren irakurketara jauzi egitea. Honelakoetan, eta irakurketa biak zilegi direnez, komunikazio bikoitzaz hitz egingo dugu15. 28 Adibide bezala Hitzen ondoeza-ko « Tiroa » hitz-sarrera ekar deza-kegu gogora : Zane Greyren Spirit of the Border nobelan tiro berak zarata desberdina egiten du. 24garren atalean, tiroa jotzen duenaren lekutik ‘Crack !’ da tiro hotsa. 25garren atalean. tiroa errepikatzen denean, entzuleen ikuspegitik, tiroak ‘Spang !’ egiten du. 29 Maila esplizituan geratuz gero, testuak onomatopeien inguruko bitxikeria bat eskaintzen digula pentsa dezakegu. Alabaina, esaten zaigun horren inplikazioak eratorriz, testua ikuspegiaren garrantziaz ari dela erabaki genezake. Izan ere, edozein gauza — tiro bat, kasu — ezberdin ikusten da norberaren ikuspegiaren arabera. Beherago ikusiko dugunez, gainera, bestea-ren ikuspegia ezagutzeko premiaren iradokizuna Sarrionandiaren ikuskeraren ardatzetariko bat dateke.

30 Bi maila komunikatiborekin jolasteko joera hori benetan indartsua da Hitzen ondoeza lanean, horrenbeste non ia testu gehienen aurrean zalantzatan geratuko garen irakurleok esanahi anitz eta ezkutuak somatu ahala (hainbat adibideren artean ikus « Baloia », « Dortoka », « Elefantologia », « Jeikitzeko ordua », « Kanta », « Klandestinitatea », « Nokauta », « Otsoaren ingurukoak » eta « Sartzen »). Aurreko prosa-lanean ere, Han izanik hona naiz izenekoan, baziren ageriko esanahiaren atzean bes-telakoren bat iradokitzen zuten testuak. Orduko hartan, gainera, idazleak modu nabarmenagoan iradoki zigun bigarren irakurketaren aukera hori, tes-tuen bukaeran agertutako ritornelloen bidez (zehazkiago : « han izanik hona naiz », « honuntz etorri nintzen » eta « haizeak eraman dezala » esaldien bidez) testuek maila esplizituan esandakotik harago jotzera eta inplikaturak eratort-zera gonbidatzen baitzigun. 31 Komunikazio bikoitzaren erabilera Sarrionandiaren prosa-lanetan ez ezik, poesian ere funtsezkoa da, bereziki bere azken lanean. Hnuy illa nyha majah yahoo bildumako adibide argi zenbait hautatzearren, « Solas meteoro-logikoa », « Zaurituarekin lubakian » edota « Ezagutzen duzu negua ? » poe-mak aipa genitzake hemen. Azken honetan, adibidez, maila esplizituan haurt-zaroko gertakizun baten oroitzapena izan litekeena kontatzen zaigu, alegia, « elurtzan barrena irten » den protagonista-umeari gertatutakoa eta

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honek senti-tutakoa : zuritasunaren erdian galdu egiten da eta isiltasunak inguraturik bel-durtzen ; erori eta zutitzean ordura arte berea izandako guztia (futboleko baloia eta aittittek egindako egurrezko ezpata) galdu egin duela konturatuko da. Eta horregatik, amamak aurkitu eta etxera eramandakoan, negar egingo du. 32 Bada, irakurketa literal horrekin batera testuak beste irakurketa bat ere — metaforikoa, nahi baduzue — ametitzen duelakoan nago. Zehazkiago esateko, testua azken finean bizitzaz ari dela uler genezake, haurtzaroa atzean uzteak dakarren galera-sentsazioaz eta mundura ateratzeak ematen duen bel-durraz. Izan ere, haurtzaroa den mundu eroso eta babestutik — etxetik — mundu zabalera ateratzen garelarik (inozentziaren aro horrek suposa deza-keen guztia galduz, umeak baloia eta ezpata galdu bezala) galdurik sentituko gara mundu zabal horretan, erreferentziarik gabe zuritasunaren erdian eta, orduan, munduaren eta bizitzaren hutsa sentituko dugu, « dena elurra bezain zuria eta esanahirik/gabea egin » go zaigula. 33 Poema honetaz ari garela, gainera, « Atabala eta euria » narrazioa-rekin daukan harremana azpimarratzea ezinbestekoa da16. Bertan kontatzen zaizkigun gertakizunak parekoak dira (han ere atabala jo etajo ari den ume txikia euri artera ateratzen da, baina irristatu eta erori egingo da, atabala galduz, eta orduan negarretan hasiko da, amamari deika) eta parekoa da, hala-ber, gertakarion azpian soma daitekeen esanahi metaforikoa. Bada, zentzu honetan, gogoratzekoa da Atabala eta euria bildumari izena ematen dion narrazio honek Latorrizko danborra eleberri eta filmearekin harreman inter-testual aberatsa daukala — eta ez bakarrik izenburuan — eta harreman honi eutsiz gero, hain zuzen ere, indarra hartzen duela proposatutako bigarren ira- kurketak. Izan ere, Giinter Grass-en elaberrian eta bere gainean Volker Schlondorff-ek moldaturiko filmean haurtzaroa utzi nahi ez duen umearen istorioa kontatzen da preseski, nagusien mundura igaro nahi ez duen Oscarren istorioa. Horrela, hiru urte betetzerakoan Oscarrek bere burua eskaileretatik behera botako du eta ondorioz ez da haziko, ume txikia izango da betirako eta munduan barrena ibiliko da bere danborra etengabe joz, Sarrionandiaren narrazioan umea atabala jo eta jo ari den bezala. 34 Edozelan ere, eta poemara itzuliz, agian badago beste irakurketa bat ere egiterik : aipatu dugun galera zentzu pertsonalagoan uler genezake, Sarrionandiaren bizitzarekiko lotura estuagoan. Azken finean baserria uztea sorlekua uztea ere bada, herria uztea, « besterritik besterrira » ibiltzeko, Sarrionandiaren beraren hitzetan esanda (ikus « Faroaren talaia », Hnuy bil-duman). 35 Ikusi berri dugunez, komunikazio bikoitza prosazko testu labur nahiz poemetan ez ezik, narrazioetan ere ageri zaigu (hain modu nabarme-nean ez bada ere). Aipatutakoekin batera, Atabala eta euria bildumako « Eguzkiak ortze urdinean nabegatzen » gogora genezake. Bertan unikor-nioaren bilaketa kontatzen zaigu maila esplizituan. Haatik, maila inplizitura etorrita badirudi idazlea bizitzaz ari dela, gu ere zerbaiten bila bizi garela iradokiz. Izan ere, eta Sarrionandiak « Post scriptum » -ean azaltzen digunez, bizitza « egiaren eta zorionaren bilaketa epiko bat da ». 36 Komunikazio bikoitza bezala, Sarrionandiaren lanetan hain ohikoa den ironia eta paradoxa ere komunikazio inplizituaren mekanismoaren fruitu dira. Halakoetan ere, « kanta diezaiogun sehaska kanta bat gure herriaren sehaska hutsari » bertsoaren aurrean adibidez (« Poesiaren gauza galdua », Hnuy bilduman), beharturik gaude esplizituki esaten zaigunetik harago joaten (nola, zertarako edota zergatik kantatu sehaska kanta bat baldin eta sehaska hutsik badago...). Sarritan, inplikazioak

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eratortzeko gonbidapena umorearen eskutik iristen zaigu (« Ortodoxia » : « Ortodoxiek, esate baterako, ortopedien laguntza etengabea behar izaten dute », HO). 37 Agerian geratu denez, komunikazio inplizituaren estrategia (bai eta bere emaitzez sortzen diren hutsuneak) benetan garrantzitsua da gure idazlearen testuetan, bereziki azkenengoetan (Hitzak & Ideiak aldizkarian agertu berri diren testuek ere ildo hori jarraitzen dute). Honek, garapen baten zantzuak aditzera emateaz gain, Sarrionandiaren azken aldiko testuen bereiz-garri ere badela pentsatzera garamatza. 38 Bada, ondorio honetara heldurik, estrategia horren zergati eta zioez itaundu beharko genioke geure buruari. Labur erantzuteko, hutsuneen oinar-rian eta komunikazio inplizitu nahiz bikoitzaren erabileraren oinarrian bi planteamendu daude ene aburuz, Sarrionandiaren poetika ulertzeko funtsez-koak diren bi planteamendu hain zuzen : isiltasuna batetik (edo zehazkiago : isiltzearen eta hitz egin nahiaren artean erdigune bat topatu beharra) eta irekitasuna bestetik. 39 Gatozen, bada, lehen planteamendura.

III. Isiltasunaren eta hitz egin beharraren arteko oreka

40 XIX. mendeaz geroztiko hainbat autorerengan bezala, Sarrionandiarengan ere erroturik dago isiltasunerako joera, isiltzeko nahia eta beharra. Horrela, bere literaturak — lehen lanetatik bertatik hasita — ateak irekiko dizkio isiltasunari. Izan ere, horixe da Sarrionandiaren iritziz literatu-raren eginbeharra : « literatura, isiltasuna letretara itzultzea da » (« Letratzea », HO- n).

41 Egiaz, Izuen gordelekuetan barrena eta Narrazioak bilduman ezku-taturik zegoen idazlearen ahotsa, nahiago izan bailuen isildu bere 'ni'az hitz egin baino. Bernardo Atxagak ezin hobeto zioenez Narrazioak lanari buruz ari zela, « ixiltasunak inguratzen du nire lagunaren literatura. Ez da mintza-tzen, kasu, bere buruaz, ez du balore unibertsaltzat hartzen bere bizitza pribatua, bere intimitatea » (1983 : 140-141). 42 Halaxe da hasierako lanetan eta halaxe, halaber, hurrengoetan ere : isildurik jarraituko du Sarrionandiaren ahotsak. Idazle kritikoa izanda ere — adibide bat jarriz — ez dio ekingo bere testuetan ageriko kritikak jaurtiki-tzeari. Beraren ‘ni’ak ere isildurik dirau : ez du hitz egiten bere bizitza-espe-rientziez (Gartzelako poemak bildumako zenbait poematan salbu), ez da mintzatzen, adibidez, berak sofritutako torturaz17 ezen, bere hitzetan, « sofritu ondoren deskribatzen entseiatzen denak sentiberatasun merkea elikatzen ari delako zentzazioa du eta isildu egiten da » (Marginalia, 28. or.). 43 Horrekin batera, bere egoera pertsonalak isiltzera behartzen duela pentsa genezake. Izan ere, exiliatuak barneraturik dauzka urruntasuna eta distantzia eta, are latzagoa dena, bere buruarekiko distantzia ere gorde behar du (gogoratu « Propostas para a definição do exilio » poema)18. Ulertzekoa da, orduan, isiltasunaren bidetik abiatzea « isildu beharrekoak esan ahal dire-nak baino gehiago direnean », Ruper Ordorikari zuzendutako gutunean idaz-leak aitortzen zuen legez (M, 134. or.). 44 Horrexegatik, hain zuzen ere, leku eta denbora urrun eta zehazga-beetan kokatu ditu bere narrazioak. Alegia, Joseba Sarrionandia : irakurketa proposamen bat lanean azaldu nuenez, gure idazlearen narrazio-bildumetan kronotopo indeterminatua da nagusi. Esan nahi baita : bere istorioen kokale-kutzat inguruko eta egungo errealitatea hautatu beharrean idazleak nahiago izan du horri bizkarra eman eta Edorta Jimenezek (1989a :

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8-9 eta 1997) « ez-denbora eta ez-lekua » deituriko eremuan barneratu, bai bere literatura, bai gu. 45 Hautapen horren oinarrian arrazoi literarioa dagoke batetik. Hau da, horrelako eremu bat sinesgarriagoa da irakurlearentzat eta idazlearentzat ere irudikatzeko errazagoa19. Baina, bestetik, joera horren azpian disidentzia-jarrera bat ere badagoela pentsa genezake. Hau da, inguruko errealitateari bizkarra emanez, inguruko errealitateaz mintzatu beharrean isilduz, idazleak muzin egiten dio errealitate horri. 46 Eta horregatik ere, errealite horretatik eta bertako blagan erortzeko arriskutik aldentzearren alegia, isildu egingo du bere ahotsa eta saihestu egin-go ditu kritika esplizituak. Izan ere, idazleak badaki bere ahots kritikoa ingu-ruko errealitatean altxatuz gero, kontu handiz ibili beharko duela zarataren eta espektakuluaren zibilizazioan integratuta ez geratzeko. B. Atxagak ere arrisku horretaz ohartarazten gintuen Narrazioak lanari egindako epilogoan : « atx ! edo ai ! esanez, edo protesta eginez, ez da ezer suntsitzen, sisteman inte-gratzea baizik ez da lortzen » (1983 : 141). 47 Horregatik, idazleak nahiago du isiltasunaren bidetik abiatu bere ahotsa zarata publikoan integratuta geratu ez dadin, nahiago du inguruko errealitateari bizkarra eman bertako blagan erori baino. 48 Egiaz, egungo gizartean zarata nagusi delarik, beharrezkoa da isiltasuna, Sarrionandiak maiz adierazi duenez : Lehenago igual zarata apur bat behar zen lantzean behin isiltasuna eten ahal izateko. Gaur egun isiltasun apurrak behar dira noizean behinka ez gortzeko. zarata hain etengabea betikotu ez dadin (HO, « Zarata »). 49 Baina isiltzea ez da mututzea, mintzatu nahi ez izatea baizik. Bestela esanda, isiltasuna beharrezkoa bada ere eta idazlearen lekua hortxe badago ere (« zarata publikoaren bazterrean (...), isiltasunaren mugaldetik hurrean » M, 123. or.) aldi berean idazleak hitz egiteko beharra sentitzen du. Inork baino hobeto daki ezin dela mutu geratu errealitate mingarriaren aur-rean konformismoan eta konplizitatean erori nahi ez badu, literatura itsu eta axolagabearen sarean erori nahi ez badu.

50 Sarrionandiak behin baino gehiagotan aitortu digu bere lanetan zehar idazteko beharra sentitzen duela, inkomunikazio-sentsazioa eta konek-tatzeko ezintasunaren sentsazioa izugarria izanda ere. Coleridge-ren marinel zahar hura legez, jendeak entzuteko — irakurtzeko — astirik edota asmorik ez daukala jakin arren, kontatzeko beharra sentitzen du, ‘kantatzeko’ beharra (bere lanetan maiz agertu metafora erabiliz) nahiz eta tinta ikustezinez ari dela igerri (‘zitroi urez’, bere hitzetan20), nahiz eta ia bakardadean ari dela somatu : Gure egunetako marinelentzat ere halabeharrezkoa da kondatzea eta kantatzea, soinuarekin, edo soinurik gabe, lagun artean edo ia bakardadean (MZ, 8. or.) 51 Eta poesiaren nahiz literaturaren boterea ezdeusa dela jakinda ere, idazten jarraitzeko gogoa eta asmoa agertzen du (eta beste idazle eta poetak ere horretara deitzen ditu21), idazle legez ere 22 erresistentzia planteatuz (nori ez datorkio burura Juan Gelmanen « Confianzas » poema hura : « ‘con este poema no tomarás el poder’ dice/‘con estos versos no harás la Revolución’ dice/(...) Se sienta a la mesa y escribe »23).

52 Baina, orduan, nola lotu isiltzeko eta aldi berean hitz egiteko behar-ra ? Bada, hain zuzen, isiltasunaren bidez mintzatuz, ez esatearen bidez esa-nez, mututasunean erortzeke. Horregatik dira bere testuak diren modukoak, komunikazio inplizitu eta bikoitzaren bidez esplizituki ezer esan gabe mintzatzen ari da-eta. Izan ere, eta gorago

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azaldu dugunez, esaten ez den horretan — inplikaturan — dago testuak komunikatzen duena, testuaren mezua, salaketa, kritika edo dena delakoa ; hots, esandakotik geuk, irakurleok eratorritakoan. 53 Argi dagoenez, beraz, Sarrionandiak irakurleari ematen dio hitza, berari irekitako testuak idazten dituelarik, horrela idazlan kategoriko eta dogmatikoetatik urrunduz. Horixe da, irekitasuna, hizpide daukagun estrate-gia nagusi honen azpian dagokeen bigarren planteamendua, lehenago propo-satu dugunez.

IV. Irekitasuna, testuon oinarrian : irakurlea protagonista bihurtzen denean

54 Komunikazio inplizituaz eta bikoitzaz baliatzearen ondorioz Igorretako idazlearen testuek — azkenak bereziki, berriro diot — esanahi ugarirekin jolasten dute. Bestela esanda, polisemikoak dira, ‘alde ugarita-koak’ baliozko liburuek izan behar duten bezala24. Ondorioz testu irekiak dira, irakurketa — eta irakurle — ezberdinei irekita daudelako.

55 Gorago ikusi dugunez, maila komunikatibo birekin jolastearen ondorioz (literal eta meforikoarekin edota esplizitu eta inplizituarekin) testuek irakurketa bikoitza onartzen dute sarritan (hirukoitza ere inoiz). Beste batzutan, berriz, bertso edo poema batzuek irakurketa literal ugari ere onartzen dituzte, hain zuzen inplikatura aberatsa daukatelako. Hnuy bildu-mako « Zer egin » poemaren ondoko ahapaldia horren adibide da : Paradisura biderik ez da, Paradisurik ez da. baina saioaren sasoia da Lohi ditzagun Europako horma zuriak gure hatzamar marka fitxatuez, ekin dezagun haurren sinestearekin derrota ezagunak baino harantzago 56 Inplikazioei esker, « haurren sinestearekin » bertsoak irakurketa literal ezberdinak onartzen ditu eta, ondorioz, ahalpaldia era ezberdinetan ira-kur daiteke. Batetik, haurrak iñozoak izan ohi dira eta beraien siñesteak ere berdin. Eta, beraz, aurrera jarraitzea ere iñozoa dela uler genezake : zentzugabea dela, ironikoa dela « ekin dezagun » hori.

57 Baina, bestalde, haurrak tolesgabe bezain xaloak dira eta xaloak direlako beraientzat dena da posible. Horregatik tematiak ere badira, ilusio tematia daukate. Zentzu honi helduz, ahapaldiak azken finean errresistentzia-ren ideia agertzen duela uler genezake, alegia haurren xalotasun eta ilusio temati hori geureganatuz aurrerajarraitzeko gonbidapena agertzen duela. 58 Zein irakurketari heldu ? Irakurleak dauka hitza, nork bere irakurketa egin beharko du. Nolanahi ere — eta goragoko oin-oharrean ira-doki dugunez — aintzat hartzekoa da Sarrionandiak hainbat poema eta testu-tan saiatzearen eta ekitearen aldeko jarrera agertzen duela (nahiz eta ez modu itxi eta itsu baten, baizik eta zalantzak eta ekibokazioak onartuz eta ekiteko-tan bidea hori dela azpimarratuz : « ekiteko orduan, zihurgabetasun eta zalant-za kontzientziarekin ekin behar da » dio argi eta garbi HO-ko « Ezbeharrak » testuan). Bigarren irakurketaren haritik gogora bedi, halaber, erresistentzia-ren eta inozentziaren arteko loturaren ideia « Txabi Etxebarrieta eta gu ordu-koak » poeman (Hnuy bilduman) ere agertzen dela eta ideia horretaz mintzo dela

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egilea baita Marginalian ere, zehazki Juan Gelman poeta argentinarra-ren lanaren gainean egiten duen iruzkinean. 59 Sarrionandiaren lanean zehar (eta modu argiagoan Hnuy illa nyha majah yahoo eta Hitzen ondoeza lanetan zehar) eurrez aurkituko ditu irakur-leak irekitasun adibideak (ikusi, esaterako, Hnuy bildumako « Intxortakoak » eta « Geografia » poemak, bereziki bukaerak). Irakurketa ezberdinak egiteko aukera horrek honez gero izan du erantzunik irakurleongandik. Esan nahi baita, dagoeneko egin izan diraeta proposatu izan dira irakurketa ezberdinak zenbait poemaren inguruan ; esaterako, « Herri proiektua » poemaren ingu-ruan. Gogora dezagun bukaera : Eta finean. euskal herria. San Agustinenak eta faltsua/egia frogak pasa ondoren, bene benetako herria dadinean asmaketa ahaztuko dugu. Estatu tekniko bat utzi eta ikurrinak sukaldeko trapu bihurtuko ditugu, euskal herriak izatearenekin batera ez izatearen abantailak izan ditzan (Hnuy, 31. or.) 60 Poema honen aitzinean Jon Kortazar irakasle eta literatur kritika-riak ondoko irakurketa proposatu du : ‘Herri proeiktua’ (sic) deituriko poeman eratzen da nolabaiteko etorkizuna. baina batek baino gehiagok uste zuenez, gerlari zaharrak normaltasunera itzuli nahi du (1997 : 110 ; letra etzana neuk jarria da). 61 Nik neuk, berriz, bestelako irakurketa bat egingo nuke. Ene ustez poemak zalantza agertzen du, eraikitzen ari omen garen nazioaren inguruko zalantza, eta nolabaiteko interesik eza halako estatu tekniko artifizial baten lorpenean. Izan ere, eta beste testu batzuk gogoratuta, badirudi Sarrionandiari ez zaiola atlasean agertzeko moduko estatu hutsala eraikitzea interesatzen. Nazioaren ideia bera ere (eta bere zutabe gertatu ohi den planteamendu esentzialista eta batasunzalea) zalantzan jarri izan du behin baino gehiago-tan25. Geure irakurketaren arabera, abertzaletasun-teoriak baino garrantzi- tsuago deritzo norberaren ekimenari, ekimen independentistari, euskaldun legez irauteko egindako ahaleginari azken buruan. Horrexegatik, estatu tek-nikoa ‘izatea’ lortutakoan ere, « asmaketa ahaztu » beharko genuke ‘izatetik’ harantzago geratzen diren sakoneko arazoei eta eginkizunei lotzeko eta lanean jarraitzeko (lanean abertzaletasun kitsch-aren ereduarekin zerikusirik ez daukan Euskal Herria eraiki asmoz, lanean euskaldun legez era natural baten bizitzeko moduaren bila).

62 Komunikazio inplizituaren estrategiara itzuliz, egia da beraren ondorioz sarritan testuak anbiguoak gerta dakizkigukeela, erdiesanez beteak, ilunak inoiz. Zalantza barik, halako testuen aurrean irakurle bakoitzak bere irakurketa egin beharko du. Eta horixe da, hain zuzen, Sarrionandiaren xedea, dena delako ‘mezua’ edo afirmazioa ezarri beharrean, nahiago baitu irakur-leari hitza eman : Afirmatzen ari naizenean galdetzen ari naiz. (...) Ez uste izan ene izkribuetan, zeuk zerbait utzi gabe, ezer aurkituko duzunik. Nik buztinezko untzi bat ematen dizut, zeu zara bete behar duzuna » (NENH, 18-19. or. ; letra etzana neuk jarria da). 63 Egiaz, inplikazioz jositako testuak eskaintzen dizkigunez (eta dizkigulako) irakurleok behartuta gaude testuek diotena berpentsatzera, esplizituki esaten zaigunaren gainean gogoeta egin eta, nork bere inplika-zioak ateraz, testuok — untziok — betetzera. Edo alderantziz esanda : hain zuzen irakurleari eman diolako hitza behar dute bere testuek irekiak izan. Horregatik dira galderak hain funtsezko bere lanean. Nonahi aurkituko

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ditu-gu : Hnuy bildumako lehen poema, adibidez, galderen gainean eraikita dago goitik behera eta « Harriak eta herriak » poema (Sarrionandiaren nazioaren gaineko ikuskera ulertzeko benetan garrantzitsua den poema, arestian esan dugunez) galdera batekin bukatzen da, hots, poema irekirik utzi du idazleak geuk bila dezagun erantzuna.

64 Galderak Sarrionandiaren testuetan daukan balio, funtzio eta zentzua oso ondo azaldu du idazleak berak Hitzen ondoezako « Galderak » testuan (ohartu, bidenabar, galdera batekin bukatzen dela testua) : Galdera ez da ez egia ez gezurra, baizik eta aidean utzitako gogoeta. Galdera, jarraipena eskatzen duen egitura gramatikal osatu bakarra da. Galderak beste zeozertara eramaten du beti. Galderaren esanahia izan ditzakeen erantzun guztietan dago, erantzun ezinetik gezurreraino. Galdera hegaztiaren hegalkadaren antzerakoa da, galderetan desira artikulatzen da, baina batzutan jo eta iltzatu egiten dira hegaztiaren hegalak. Galdera. eguneroko lengoaiaren aspektorik poetikoena da ? 65 Galderek bezala, Sarrionandiaren testuek ere ‘beste zeozertara ematen dute’, jarraipena eskatzen diote irakurleari, bere partehartzea bultza-tuz. Azken batean, irakurleok bere testuen muinean jarri gaitu Igorretako idazleak, beren protagonista bihurtuz. Baina, zergatik ? Hau da, orain arteko lerroetan agerian geratu da komunikazio inplizituaren eta bere fruitu diren estrategien nagusitasuna eta agerian geratu da, halaber, estrategia horiek erabilita idazleak isiltasunaren bidez mintzatzea lortzen duela eta mintzatu, modu irekian : bere ahotsa ezarri beharrean irakurleari bere ahotsa jartzera bultzatuz. Hona heldurik, orduan, beste urrats bat eman beharko genuke eta idazleak irekitasun hori zergatik bilatzen duen hausnartu, zergatik eman dion hitza irakurleari. Erantzuna Sarrionandiaren jarrera literario eta ideologikoan dagoela uste dut, guztia bere ikuskeraren emaitza eta islada dela. Ondorengo atalean ikuskera hori irudikatzen ahaleginduko gara.

V. Sarrionandiaren ikuskerara hurbilduz

66 Sarrionandiak berak Ni ez naiz hemengoa liburuko « Izkiriatzea eta dogmatismoa » lanean azaldu zuenez Roland Barthesen adierazpen batzuen haritik, idazleak bere lanari ekiterakoan kontraesan sakon bati egin behar dio aurre. Izan ere, idazleak antidogmatikoa izan nahi duelarik ere, idazlana dogmatikoa da berez, esandakoa finkaturik geratzen baita lengoaiaren bidez, lengoaia bera sistematikoa eta hertsia izanik.

67 Sarrionandiarengana itzuliz, nik esango nuke kontraesan hori gain-ditzeko, hain zuzen ere, eman diola hitza irakurleari, horregatik bultzatzen duela irakurlea bere ahotsa jartzera idazleak berea ezarri ordez : ez duelako dogmatikoa izan nahi, ez duelako Errealitatearen interpretaziorik eman nahi, ez eta Egia bailiran egiten diren baieztapenik ezarri ere. Horrelako asmorik inork balu ere, gainera, zentzugabea bezain ezinezkoa litzatekeela ondo daki gure idazleak. Aspaldi erakutsi zion itzalak (Narrazioak bilduman idazleare-kin solasean aurkitu genuen itzal hark) maiuskuladun egiarik ez dagoela. Egia subjektiboa da, norberaren esperientziari lotuta dago beti eta, ondorioz, anitza da, eta berdin errealitatea ere : ugariegia eta aldakorregia da bere osotasunean hauteman ahal izateko (ik. NENH, 106 eta 200. or.). Igorretako idazleak ondo ohartarazi legez, errealitatea ez da ‘bat eta bakarra’ :

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Gizajendeak izugarrizko joera du edozer gauza bat eta bakarra izan behar delako pentsabideruntz. Erlijio bat, besteak sineskeriak. Errealitate ekonomiko bat, eta bera, gainerakoa irrazionala. Benetako hizkuntza bakar bat, besteak dialektoak. Programa politiko bat. beste guziak atzerakoikeriak edo utopiak. Bizimodu bakarra munduan, kontsumozko gizartean, gainerakoa primitiboa edo marginala... (« Bat eta bakarra », HO-n) 68 Orduan, errealitatea anitza eta aldakorra delarik, errealitatea azal dezaken Sistema Nagusi bat ez dagoelarik (dela filosofikoa, dela ideologi-koa), irekitasuna beharrezkoa bihurtzen da. Sarrionandiaren esanetan, « errea-litatea irekia bada, ez dugu hertsi behar gure pentsamendua » (NENH, 106. or.). Horrexegatik interpretazioen eta baieztapen eztabaidaezinen ordez, erdiesanez eta anbiguetatez jositako testu polisemikoak eskaintzen dizkigu Sarrionandiak, geuk erator ditzagun inplikaturak eta geuk interpreta dezagun errealitatea. Erantzunak eman ordez galderak planteatzen ditu erantzunak geuk bila ditzagun. Edozein afirmazio erlatibizaturik eta zalantzak inguratu-rik uzten du, badakielako eta onartu ere egiten duelako « gauzak argiak eta garbiak ez direla » (ikus HO-ko « Ausardia »). Galderekin batera, paradoxak ere lagunduko dio horretan. Izan ere, paradoxak errealitatearen ‘aurpegi’ ezberdinak jasotzen ditu eta bildu egiten ditu itxuraz kontraesankorrak diren alde ezberdin horiek.

69 Azken buruan, paradojaren eskutik errealitatea modu manikeistan ikusteko joeraren aurka egiten ari da idazlea. Alegia, gure egungo gizartean — eta baita gure eguneroko bizimoduan ere — errealitatea bitan banatzeko joera nagusi da, alde bati ‘ona’ irizten diogularik eta besteari ‘txarra’. Pentsabide hau muturrera eramanez, ‘bestea’ satanizatu egin ohi dugu, gainera. Bada, Sarrionandia maiz mintzatu da halako pentsaera eta jarreraren aurka (ikus « Satanizazioaren argudioa » NENH-n), « hau ALA bestea » auke-ra faltsua dela ohartaraziz (HO-ko « Aukerak » testua irakurtzeko oso gomen-dagarria da zentzu honetan). Jarrera manikeista eta bandozaleetatik urruntzeko (ik. « Bandoak », HO-n) eta bestearen ikuspegia ezagutzeko pre-mia azpimarratu izan du sarritan (gogoratu lehen jasotako « Tiroa »), horre-tarako ‘deabruaren abokatua’ ren papera bete behar bada ere : (...) Eztabaida daitezkeen gaietan badira gutienez bi alde edo gehiago. eta zeozer ulertu nahi duenak bi aldeen eta beste guzien arrazoiak ulertu behar ditu. Bere aldearen eritzia baino ezagutzen eta ametitzen ez duena ez da gauza arazoa ulertzeko. Arrazoi balu ere, bere ideiak benetakoak balira ere, bere burua besteen ikuspegian imintzen ez duen artean, arrazoirik aski ez du eta bere egia faltsua da, bere alderdia baizik ezagutzen ez duelako edo, hobeto esan, bestea ezagutu ezik. bere aldea bera ere ezagutzen ez duelako. Edozein arazotan bestearen ikuspegia ezagutzea beharrezkoa da. Eta kontrako ikuspegirik ez balitz, asmatu egin beharko litzateke. deabruaren abokatu papera eginez, eztabaida librea izan dadin. (...) (« Deabruaren abokatua », HO-n) 70 Dakusagunez, jarrera itxietatik urrundu egiten da Sarrionandia, bizitzaren edozein alorretan. Euskal nazioaren arazoaz daukan ikuspegia, adi-bidez, irekia da benetan : pluraltasunaren alde mintzatzen entzungo diogu (gogoratu gorago jasotako « Nazioa » testua, kasu), pluralean mintzatzen (‘Euskal Herriei’ buruz beti), guztiontzako espazioa eskatuz (ik. HO-ko « Arkitektura ») eta sektarismoaren eta hiperabertzaletasunaren aurka eginez (irakur bitez HO-ko « Auzolana » eta « Gorabertzaletasuna », besteak beste).

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71 Irekitasun hori lemazaintzat harturik, Sarrionandiak bizkarra ema-ten die ‘dotrinei’ (« latinezko mezekin » ez baikoaz inora, berak dioskunez HO-ko « Latinezko mezak » testuan) eta bizkarra ematen dio, halaber, jeneralaren berbaldiari agureak erakutsitako bideskatik abiatzeko : Maniobra gogorrak egin erazi zizkiguten eta gero iladan jarri ginen, desfilerako. Jeneralaren aurretik formazioan pasatu behar genuen. Arenga eta ordena artean abiatu ginen. martxan. bat bi ! bat bi ! eskuin ar ! bat bi !... Jeneralaren paretik pasatzean, batbatean, bestaldean agure bat ikusi nuen martxa militarraz axolatu gabe han aldamenean bideska batetik zihoana. astiro, herrenka, kanta debekatu bat erdikantatuz... Formazioa abandonatu eta agure haren atzetik abiatu nintzen, berehala konprenitu bait nuen beste hura zela ‘ene jenerala’. (« Jenerala », HO-n) 72 Sarrionandiaren idatziek nabarmen egiten dute idazleak ez dituela dogma eta ortodoxiak batere maite. Aitzitik, behin baino gehiagotan — eta esparru ezberdinetan — erakutsi du nolabaiteko jarrera heterodoxo eta disidentea. Eta jarrera horren eskutik kritikaren beharra azpimarratu du sarri-tan, bere testuak ere horretara jarriz. Hipokresia, adibidez, bere kritiken jomuga izan da behin baino gehiagotan, gure gizartean eta eguneroko bizi-moduan zabaltzen den hipokresiatik hasi eta hizkuntzan habia egin duen hipokresiaraino. Izan ere, eta gure idazleak behin eta berriro salatu duenez, erabileraren erabileraz — eta bereziki botereek egin duten hizkuntzaren era- bileraren ondorioz — hitzek euren jatorrizko esanahia barik, ideologiaz kargatutako bestelako esanahiak ezkutatzen dituzte, esanahi faltsutuak eta hipokritak sarri. Horregatik badiosku « ondoezik » daudela hitzak, guk geuk egunero darabiltzagun hitz asko eta asko ere erabat lizunak direla26.

73 Alabaina, kritikak norberaren baitan hasi behar du bere bidea. Beste modu baten esanda, autokritikaren beharra Sarrionandiaren aldarrika-penetako bat bihurtu da azken urteetan. Eta autokritika diogunean, benetako autokritika esan nahi dugu (eta ez ‘autokritikaren’ mozorroarekin bestearen-gana zuzendu ohi dena, gorago « Autokritika » testuan idazleari entzun dio-gunez). Edo alderantziz esanda : beti arrazoia daukala pentsatzen duenaren jarrera inmobilista ez du gogoko Sarrionandiak. Horregatik maiteago ditu « erloju inperfektoak », euren zehaztasun falta eta guzti27. 74 Honek guztiak, azken buruan, pentsamendu kritikoaren beharra aldarrikatzera darama idazlea, oraingoan ere benetako pentsamendu kritikoa-ren beharra : Utopia erlijioso dotrinazaleak ahuldu ondoren, utopia sozial dogmatikoak ere ahuldu dira. Ez da teorizazio unibertsal itxien sasoia eta, kateximak alde batera utzita, pentsamendu kritiko konplexua indartu behar da. Filosofiak eta politikak artearen irekitasun eta aukera aniztasun dute. Hala esaten da. eta hala errepikatzen da, eta egia izango da, baina badirudi hori esatea eta horixe erritualki errepikatzea dela gure 'manual debotionezko' berria. (« Manualak », HO-n) 75 Bada, hain zuzen ere, ‘manual’ bat eskaini beharrean gure pentsa-mendu kritikoa benetan eta praktikan bultzatu nahi duelako idazten du Sarrionandiak idazten duen bezala, bere ahotsa ezarri beharrean geure ahotsa jartzera bultzatuz : horregatik daude bere testuak galderez josita, erdiesanez eta paradoxez, horregatik dira anbiguo eta polisemikoak, horregatik daukate oinarri-oinarrian komunikazio inplizitu eta bikoitza, horrek guztiak behartu egiten gaituelako irakurleok gogoeta egitera, guztiaren gainean hausnarketa egitera. Eta guztiaren gainean diodanean esan nahi dut baita idazleak berak dioenaren gainean ere, ezen lehen ikusi dugunez berak esandakoa ere

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berpentsatu beharrean egongo baikara askotan, erlatibizaturik eta zalantzak inguraturik uzten duelako, guztia galdera bihurturik.

76 Egiaz, bere testuak diren bezalakoak direlako (oskol eta guzti hela-razten dizkigulako, Hitzen ondoeza-ko sarreran aipatzen den ipuina gogora-tuz) nork bere irakurketa egin beharko du, norberaren baitan begiratu eta norberaren iritzi eta aurreritziak errebisatuz28. Eta horrela, eta horri guztiari esker, « irakurtzen duzularik irakurri egiten zara », lan honen hasieran jasotzen genuen Sarrionandiaren aipura itzuliz. Ezbairik gabe. irakurleok badugu Sarrionandiari zer eskertu.

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NOTES

1. Pako Aristi. Urregilearen orduak. Erein. Donostia. 1998. 100. or. 2. J. Sarrionandiaren lan horien guztien zerrenda « Bibliografia » atalean aurkitu dezake irakurleak. Liburu bakoitzaren erreferentzia bibliografikoaren ondoan bakoitzari dagokion laburdura ere zehaz-tu dugu bertan. lan honetan zehar laburdura horiez baliatuko baikara askotan gure egilearen testue-tako aipuak eskaintzeko orduan. 3. Goian aipatutako literatur generoen zerrendan aurki beste bat gehitu beharko dugu : eleberriarena. Izan ere. Joseba Sarrionandiak l999ko deialdiko Jaka Beka eskuratu zuen hain zuzen orduko hartan proiektua baino ez zen eleberri bat aurrera eramateko asmoz. 4. X. Mendigurenen esanetan, « Sarrionandiaren lehenengo ipuinen — « Maddi. indazu kamamila ». « Enperadore eroa » — eta Narrazioak (1983) bildumaren eragina berebizikoa izan zen gerokoengan. bai lexiko hautaketan. bai exotismorako joeran. liburu argitaratuetan bezala edo are gehiago ipuin lehiaketetara aurkezten diren lanetan ikusten denez » (1993b : 100). 5. Ezaguna denez, 1980. urtean atxilotua eta espetxeratua izan zen Joseba Sarrionandia, etakidea zelako akusaziopean. Bost urte beranduago, baina, 1985.eko uztailaren 7an zehazki, gartzelatik ihes egin zuen Imanol abeslariak eskainitako kantaldiaren ondoren bafle baten ezkutaturik. San Fermin egun ospetsu hartaz geroztik ezkutuan bizi da gure idazlea, « besterririk besterrira » dabil, « moilarik moila » (bere hitzak dira : ikus Hnuy 131. or. eta 129. or.) eta hor nonbaitetik idazten digu, klandes-tinitatetik. 6. Ikus A.E. 1995. Adierazpena guk itzuli dugu euskerara. 7. Erein. 1998. 38-39. or. Nolanahi ere. urte luzeetan zehar literatur sistema ofizialaren bazterrean bizi izan ondoren badirudi gauzak aldatzen ari direla. Zentzu honetan esanguratsua da — eta poztekoa — Sarrionandiak l999ko deialdiko Jaka Beka eskuratu izana. 8. Sarrionandiaren hizkera landua eta honez gero konfundigaitza bere testuen harreraren eragile — funtsezkoenetakoa gertatu da beraren gaineko artikulu. erreseina nahiz azterketetan

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alderdi aipatuena eta azpimarratuena izateak darakutsan legez (besteren artean ikus Aldekoa 1998. Butron & de Pedro 1990, Epaltza 1994. Ibargutxi 1987, Jimenez 1989a eta 1997. Kortazar 1982 eta 1997a, Landa 1990. Markuleta 1990b. 1992b eta 1993a. Uribe 1997. ZZEE 1985). 9. Teoria honen arabera literatur fenomenoa ez da bukatzen idazleak testua idaztean. irakurleak berau irakurtzean baizik. Irakurketa-ekintza horretan. hain zuzen ere. jasotzen du testuak bere funtsa eta zentzua. testua ez baita ezer irakurle batek eskuartean hartzen eta irakurtzen ez badu. Ulertzekoa denez, orduan. irakurketa-ekintza hori hain funtsezkoa izanda. testuek irakurketa hori bultzatzen duten mekanismoak dauzkate beren baitan. Bestela esanda. idazlea irakurleon partehartzea eragiten saiatzen da. horretarako estrategia zenbaitez baliatuz. 10. Izenburu ahoskaezin eta ulertezin horren esanahiaz ikus Azkorbebeitia 1997. 11. Goian aipatutako estrategia horien guztien azterketa luzeago baterako ikus Azkorbebeitia 1999a. 12. Aipuaren itzulpena gurea da. 13. P. Gricek (1957 eta 1975) inplikazio mota bi ezberdindu zituen : hitzen esanahitik beretik erator-tzen dena batetik (« konbentziozko inplikazioak ») eta. bestetik. « elkarrizketazkoak ». hau da. testuin-gurutik eratortzen direnak (ez bakarrik testuinguru linguistikotik. Pragmatikarentzat testuingurua zerbait zabalagoa baita : konstrukto sikologiko bat non munduari buruz daukagun ezagutza onartua edota asuntzioak biltzen diren). Lan honetan inplikaturaz aritzean (alegia. inplikazio-multzoaz) bigarren hauen zentzuan arituko gara eta. horrela. lerrootan aurrera eskainiko dugu beraren adibi-derik. Konbentziozko inplikazioen adibide bat eskaintzearren. berriz. Sarrionandiaren beraren « Klaseak » testu umoretsua ekarri nahi dut gogora (Hitzen ondoeza lanetik) : « Estudianteena da sektorerik iraultzaileena, klaserik gabeko gizartean bizi nahi luketelako ». 14. Eragiketa hori. baina. ez da uste bezain matematiko eta objektiboa. Izan ere. maiz inferentziak egiteko orduan nork bere iritzi eta aurreritziak ere tartekatzen ditugu eta 'esandakoa'ren inplikazioak eratorri beharrean nork bere ondorioak ateratzen ditugu. Arrisku honetaz oso modu argigarrian (eta umoretsuan) ohartarazten gaitu Sarrionandiak berak « Ikuspunduak » testuan (ikus HO-n). 15. Alegorian ere irudiak kateatzearen ondorioz testua bi mailen artean mugitzen da — erreala eta figuratiboa — eta. horrela. alegorian ere posible dira bi irakurketa. Zentzu honetan alegoria eta guk ‘komunikazio bikoitza’ deitu duguna parekoak lirateke. Parekoak bai. baina ez dira berdinak. Izan ere. komunikazio bikoitzaren kasuan testua ez dago irudi-kateak osatuta. Bestalde (eta aurrekoaren ondorio da hau) irakurlea libreagoa da esanahiak eratortzeko orduan ; edo alderantziz esanda, testu alegorikoan bigarren irakurketaren zentzua ezagunagoa eta definitiboagoa egiten zaio irakurleari. halako testuen oinarrian dauden irudiek esanahi kodifikatuagoak ematen baitizkiote aditzera. 16. Lan honen hasieran Sarrionandiaren ohiko estrategien artean aipatu dugun ‘barne- testuartekota-suna’ren adibide argia daukagu. beraz, baina ez bakarra (besteak beste. irakur bitez Ifar aldeko orduak bildumako « Oroitzera eseri » narrazioa eta Hnuy illa nyha majah yahoo liburuko « Ahots hurrin eta hautsia » poema ; ohartu. gainera, oraingoan ere bi testuok esplizituki esaten zaigunetik harago jotzera bultzatzen gaituztela, bientzat parekoa den bigarren irakurketa bati atea irekiz : izan ere, biak ala biak ez ote dira inplizituki gizabanakoon pasibitate eta inmobilismoa salatzen ari... ?). 17. Torturatua izan zela ez zekienak edo jakin nahi ez zuenak irakur beza Marginalia. 29. or. 18. Erbesteak Sarrionandiarengan eta bere lanean daukan proiekzioa dela-eta irakurtzeko zinez gomendagarria da K. Izagirreren « Breve glosa del exilio Sarrionandiano » lana (ik. 1997a). 19. Sarrionandiak berak aitortu izan du halakorik : « Agian ez gara gai mundu erreal zabalegi eta konplexuegiaren mapak egiteko. Aisago deskubritzen eta marrazten dugu terra incognita imjinario bat. non eta geu garen autore. milaka egile eta desegileren manupean bizi gareneko territorio mugagabe eta konfliktiboa baino » (Marginalia, 146. or.).

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20. Ik. « Laket zait zitroi urez izkiriatzea ». Hnuy. 32. or. 21. Ik. « Poesiaren gauza galdua ». Hnuy, 107-108. or. 22. Argitu dezadan ‘ere’ horren zentzua : Sarrionandiak idazle legez ez ezik. indibiduo legez ere erre-sistentzia planteatzen du bizitzaren esparru ezberdinetan. bere lanetan behin eta berriro agertzen den bidaiaren metafora hemen kokatzen delarik gure irakurketaren arabera (ik. Azkorbebeitia 1996 eta 1997). Labur esateko. ‘bidaiatzea’ da garrantzia daukana. portura iristea baino : lortu nahi dugunaren bila abiatzea. saiatzea, ekitea. lortuko ote dugun ez badakigu ere. 23. Juan Gelman. Poesía. Casa de las Américas. Cuba. 158-159. or. 24. Sarrionandiaren beraren iritzia da : « Baliozko liburuek behintzat ez dute mezu konkretu bakar-rik. alde ugaritakoak eta erabilgarriak dira » (« Irakurraldiak ». HO). 25. Gogora dezagun. adibidez. HO-ko « Nazioa » izeneko testuan idazleak adierazitakoa : « Nazioaren definizioak arraza. hizkuntza. geografia edo borondate ‘batasunaren’ ideian oinarritzen ziren. Gaur egun diren nazio gehienak. ostera. anitzak, zatituak eta gatazkatsuak dira berez. Eta eskerrak, ezen eta zenbait abertzaleren kontzepto batasunzale estuak haintzat hartuez gero euskal naziorik ez litzateke iadanik posible ». Nazioaren inguruko Sarrionandiaren pentsaera nahiz jarrera dela-eta. ikus. baita ere. Hnuy bildu- mako « Harriak eta herriak » poema. 26. Irakur bedi. adibidez. Aberria. Demokrazia. Zibilizazioa zein Bakeaz Hitzen ondoeza-n idatzita- koa eta baita « Lengoaiaren boterea eta beste » testua ere. Marginalia-n. 27. « Bada jende asko erloju geldiaren antzerakoa dena. Badakizu erloju geldiak ordu esaktoa marka-tzen duela egunean bi aldiz. Erlojua hamarrak eta laurden markatuz gelditu bada. hamarrak eta laur-denak diren unean erloju geldiak ere benetako ordua markatzen du. Erloju geldia bezalakoa den jendea ez da bere zeretik mogitzen. Ez du ez aurrera ez atze-ra egiten. egonean igurikatuko du bere ordua seinalatuz. harik eta denborak arrazoia eman arte. Eta berea benetako orduarekin ados datorren unean ‘arrazoia nuen. begira !’ esanen dizu... Eta hor geratzen dira heurenean geldirik. heuren hamar eta laurdenetan. heuren esaktota-sun elbarrian. Gainerako erlojuak ez dira egundo hain esaktoak. segunduak aurrera edo minutuak atze-ra dabiltza. eta ez dira agian benetako orduarekin ia inoiz erabat egokitzen. Baina laketago zaizkit erloju inperfektoak. ttipi-ttapa beti hor ari direnak. zehaztasun falta eta guzi » (« Erloju geldiaren paradoxa ». HO-n). 28. Koldo Izagirreren esanetan. « Sarrionandia practica con humor e ironía la tergiversación. el contrasentido. el antiaxioma. Con ello logra sacarnos de nuestra seguridad. de nuestra moral de cámara : atenta directamente contra los cimientos de nuestros tópicos y. muchas veces. aquel juego conceptual que en una primera lectura nos hace sonreír. queda en nuestro recuerdo como pregunta inquietante o como posibilidad abrumadora » (1997b : 71).

INDEX

Thèmes : littérature Index chronologique : 20e siècle Mots-clés : critique littéraire, écrivain contemporain, littérature basque, Sarrionandia Joseba (1958-)

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Nz-bait izenordain zehaztugabeen jatorriaz

Ricardo Etxepare

NOTE DE L'AUTEUR

Eskerrak eman nahi dizkiet artikulu honen idazketan lagundu didatenei : Joseba Lakarra. Bernat Oihartzabal. Georges Rebuschi eta Xarles Videgaini. Haietariko inor ere ez da, jakina, hemen esa-ten denaren erantzule.

0. Sarrera

1 Izenordain zehaztugabeen eremuak euskaraz nor/zer galderazkoak 1 eta haien gainean eraikitako zenbatzaileak biltzen ditu (EGLU I, 87-103 ; EGLPB, 58-67) : norbait/zerbait gisako existentzialak, edonor, zernahi beza-lako unibertsalak eta inor/ezer polaritatedunak2. Eremu hau, orohar, bereziki egongaitza eta aldakorra da diakroniaren aldetik (ikus, gainbegiratu orokor baterako, Haspelmath, 1997, seigarren kapitulua). Lan honek euskarazko nor/zer-bait – en gisako izenordain zehaztugabe existentzialen jatorria trata-tzen du, eta hipotesi berri bat defendatzen : nor/zer + bait formak adjunktu funtzioa betetzen duten perpaus erlatibo libreetarik heldu direla. Hipotesi honen arabera, forma horien azpian honelako egiturak izango genituzke3 :

(1) a. ...bainan zuek trublatzen zaituztenak, ekarriren du kondemnazioa, nor ere baita hura (Leizarraga, Gal 5, 10) b. ...bainan zuek altaratzen zaituztenak ekarriko du horren pena, nor ere baida hura (Hnd. Ibidem)

2 Biak latinezko « qui autem conturbat vos, portabit iudicium, quicumque est ille »-ren itzulpenak.

3 Batetik besterako bidea (hau da, balio unibertsaleko perpaus erlatibo libreetarik balio existentzialeko izenordain mugagabeetarainokoa) tipologian ondo bermatua dago (ikus

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3.atala), eta hipotesiak euskaraz izenordain zehaz-tugabe existentzialek erakusten duten forma aldeko ugaritasuna zehazki mugatzeko bidea ematen du. Garrantzi haundia izango dute, hipotesi honen justifikazioan, izenordain zehaztugabe existentzialen jatorriaz arduratu diren ikerlari bakanek (Lafon, 1944, 1966 eta 1973 ; Trask, 1997) aintzat hartu ez dituzten eta itxura batean osoagoak ematen duten forma historiko batzuk, hala nola norbaita, zerbaita edo noizbaita bezalakoak.

1. Nz....-bait formak ahozko eta idatzizko tradizioan

4 Gauza jakina da norbait/zerbait gisako formen esparruak aldaera ugari dauzkala ahozko nahiz idatzizko tradizioan. Atal honetan, aurkitu ahal izan ditudan aldaera guztiak bildu ditut. Aldaera guztiok lau egitura oroko-rretan bil daitezke. Egitura hauek atalburuan ematen ditut.

1.1. [[NZ [(PL) [KASUA/POSPOSIZIOA]]] [ BAIT]] formak

5 Honelakoetan aipatuenak (Lafon, 1966) Dechepare-k dakarzki :

(2) a. Norc baytere amoria niri daraut muthatu (VII, 7) b. Norc vaytere eguyn deraut malicia handia (XIII, 31)

6 Horiez gain, Añibarrok noribait ere dakar (EL2 137). Nortzu formekin lotuak dira XlX.mendean Bizkaiko autoreengan agertzen diren nortzukbait (Astarloa II, 194 eta Uriarte Marll, 60) eta Juan Jose Mogelen nortzuibait, hemen ematen duguna4 :

(3) Egija da emen [...] ez dakigula iñok bere ziur ziur grazijaan aurkituten garianik, Jangoikuak nortzuibait agertu edo errebelatu ez badautsee (Mayatz 51)

7 Gipuzkoan, Agirre Asteasukoaren etsenpluak ere baditugu :

(4) Nai nuke nork ere bait begi onez ekustea, gizonai ederra iritsitzea (Eracusaldiac, III, 552)

8 Kasua tartean agertzen duten etsenpluez gainera, badira ere pospozi-zioa tartean agertzen dutenak. Horietako batzuk egun ere ohikoak dira (non-bait, noizbait, nolabait eta norabait), baina ez guztiak : Azkuek zertazbait (R-bid) « de algo, de quelque chose » eta zetanbait (B-mañ) « por algo, en busca de algo ; pour quelque chose, en quête de quelque chose ». Horiekin batera nondikbait eta nondik-baitetik ere badugu (OEHtik) :

(5) a. Lar-abere asko zan orduan erori/Alere sortu dira nondik bait iori (Izt, Condaira, 195) b. Nondikpaitik aditu dut « j'ai entendu de quelque part » (Dv, Hiztegia)

1.2. [[NZ [(B)ERE [BAIT]]]

9 Nola-rekin, baditugu nolarebait, nolerebait (Azkuek Gipuzkoan bilduak) eta nola (b) erebait eta nulerebait (Azkueren arabera zubereratikoak). Non- ekin : nunerebait, nonberebait« seguru aski » esan nahi dutenak (Añibarrorengan) eta nunerebait « nonbait (lekuzkoa) »

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(Beovide, AsL 205). Mendiburuk noraerebait dakar eta Urte-k (Hiztegia I, 501), Agirre Asteasukoak eta Beovide-k noizerebait. Horra exenplu gisa (6) :

(6) Noiz-ere bait biur gaitezen gerengana, nere kristauak (Eracusaldiac, III, 343) Forma hauen sailean sartzen dira baita ere Leizarragaren cembaterebeit, cembatrebeit, eta ceimbaitrabeit : (7) a. Eta egon guentecen hiri hartan cembatrebeit egun (Apostoluen Acteac 16, 12) b. Igorrac cembaiterebeit gende Ioppera... (Apostoluen Acteac 11, 13) c. Eta cembaitrabeit egunean buruan... (Apostoluen Acteac 24, 24)

1.3.[[NZ [-KO [-A]]] BAIT]]]

10 Azkuek nolakoabait (AN, BN, G, L...) ematen du hiztegian « régulier, passable, de qualité quelconque » esanahiarekin. Baita zelangoabait ere ( bait-sarreran, esangura adierazi gabe).

1.4. [NZ [(ERE) [BAITA]]]

11 Bere morfologian (266. Sarrera, 192.orr.), eta hiztegian ere bai, ohiko norbait/zerbait, norbeit/zerbeit eta norbaist/zerbaist – en ondoan, Azkuek nopaita (B) eta zepaita (B-mu) ere jasotzen ditu. Nopaitxe aldaera ere jasoa dago (OEH : Ortuzar, Voc, 141, V-ger), eta gaur egun bizirik dirau gutxienez Bermeon, zepaitxe -rekin batera (Bilbao, 1998). Bermeoko euskaraz idatzitako De la Quadraren 1784ko dotrinan (Bilbao, 1998) norbaita aurkitzen da :

(8) iñoc norbaita ilten dabenian... (Doctr.54)

12 Zerbaita forma, bere aldetik, ez da guziz arrotza testuetan : Juan de Zumarragaren gutunean agertzen da (A Tovar, E. Otte & L. Michelena, 1981 ;Sarasola, 1983) :

(9) mjlla ducat bidalduco ditugula urte onetan njc uste : orayn vere cerbayta voa...

13 Juan Ortiz de Velascoren itzulpenean cerbayta hori egungo zerbait arrunta da 5 : « ...pienso que enbiaremos este mill ducados. Tanbien ba algo agora... »

14 Norbaita/nopaita eta zerbaita/zepaita formez gainera, nunbaita eta nospaita ere aurkitzen dira6. Añibarro-k nunbaite dakar Esku Liburuan. Nunbaita Urquizuren bertsoetan (1737) agertzen da (OEHaren nonbait2 sarreratik) « seguru aski » ren esanahiarekin :

(10) orra nun doian erruki baga/odolezko iturriia/nunbaita oorain amaituko al dau/bere betiko egarriia

15 Azkuek, Euskalerriaren Yakintzan nunbaita be (B-l) eta nunbaite be (B, Alt) jasotzen ditu « jakina, noski, bai horixe » -ren esanahiarekin, eta hiz-tegian berriz nunebeita (S) « noski, seguru aski » ren adierarekin baita ere, mende honetan Eskualduna aldizkaritik hartua7 :

(11) Berantto orai mahatsez mintzatzeko, erranen dü nunebeita irakurzale batek beno haborok (Eskualduna, 17-XI-1905)

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16 Noizbaita- ri dagozkion aldaerak ere badira : Olaetxearen dotrinan (1740) eta Zuzaetaren idazkietan (XVIII. mendearen bukaeran). Olaetxearen exenplua, hauxe (OEH, noizbait sarrera, 847.orr.) :

(12) Nos baita bearra egin lei domeka eta jaiegun bearrik ez egiteko esanta dagozanetan ? Eta Zuzaetarena : (13) Azkenik dauko obligaziñoia nosbaita emaztiaren konsejuba artu eta bere esana egiteko

2. Egungo izenordain zehaztugabe existentzialen sorreraz bi hipo-tesi : Lafon (1944, 1966, 1978) eta Trask (1997)

17 Azkue izan zen lehenbizikoa ohartzen (edo ohartarazten) norbait/zerbait formetako -bait atzizkia menpekotasuna markatzeko baliatzen den bait- flexio-aurrizki berbera izan zitekeela (Morfologia Vasca, I, 529, sarrera). Azkuerentzat, deigarri egiten zen izenordainei lotzen zaien atzizki horrek aldaera dialektal bat duenean, adizki jokatuari lotzen zaion aurrizkiak ere aldaera bera izatea. Honela, -baist (Azkuek B, hau da bizkai- koa) eta -beit (Azkueren arabera S, hau da Zubererari dagokiona) - bait orokorragoaren aldaerak baldin badira, adizki jokatuari lotzen zaien aurrizkien kasuan eremu bertsuetan aldaera berberak aurkitzen ditugu8.

18 Lafon-ek Azkueren ohartarazpena aintzakotzat hartu eta urrutiago eramanaz aurrizki- atzizkien identitatearen tesia proposatu zuen (1944, 481-491.orr. ; 1966 ; 1973, 43-45.orr.). Lafon-en arabera, bait funtsean baiezkotasuna azpimarkatzeko erabiltzen den bai forma librearen kidea da 9. Bait forma, adizki jokatuari nahiz izenordainkiari lotzen ahal zitzaien. Ikuspegi honetan, norbaitago eta norbait dago biak ere *nor bait dago zaharrago batetik heldu dira, zeinetan bait formak alde batera edo bestera egin zezakeen, baiezko tasuna izenordainkiari edo adizki jokatuari (eta beraz, proposizioari) eratxekiaz. Bait, egun, izenordainkiaren edo forma jokatuaren parte da, baina haren behinolako izaera librea izenordain zehaztugabeen aintzineko zenbait formatan ere igar daiteke. Honela, esate baterako, Dechepare-k nork bait ere dakar, ohikoa dugun norbaitek - en aldean (ikus 1.1. atala). Asumituaz flexioari (eta beraz, kasuari) dagozkion morfemak sintagma « itxi » egiten dutela zemahi ondoko operazio morfologikorentzako, Dechepare-ren forma horiek bait oraindik bere eskuko zen garaia jasotzen dute, Lafonen iritzian10. 19 Trask-ek (1997, 197-198.orr.) Lafon-ek ez bezala, bait forma jatorrian adizki jokatuari dagokiola proposatzen du. Harentzat, nor/zer formak galderazkoak nahiz mugagabe hutsak izan zitezkeen, baina mugagabeko formek bait- aurrizkia galdetzen zuten beti adizki jokatuan. Delako egoera hartan, *nor baitzen bezalako hurrenkerak bestelako zatiketa baten bidetik interpretatzen hasi ziren : norbait zen gisa, alegia. Hortik egungo mugagabeak11. 20 Bai Lafon-ek eta bai Trask-ek gogoan duten ustezko aurreko egoeran, euskarazko nor eta zer bezalako galdera hitzek berezko balio zehaztugabea dute, eta beregainki jokatzen dute sintaxian. Hau propietate tipologiko arrunta da, munduko hizkuntza askok erakusten dutena (ikus, besteak beste, Cheng, 1991 ; Bhat, 2000).

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21 Lafonen eta Trask-en hipotesiak ez dira hein berean moldatzen bildutako mugagabeen aldaeren aurrean. Har esate baterako 1.1. ataleko kasuak, kasu marka nor/zer- en eta bait partikularen artean agertzen direnekoak :

(14) Nork bait ere amoria daraut muthatu

22 Lafonentzat, Dechepareren etsenplu honek bait partikula bere eskuko zen garai bat ematen digu aditzera. Egungo termino sintaktikoak erabiliaz, esan genezake bait, baiezkotasuna adierazten duen bai- rekin lotua dena, maila proposizionaleko buru funtzional bat dela, edo gisa horretako buru bati lotua dela (Laka, 1990 - en zentzuan). Nork horrenbestez, buru hori baino gorago dago. Lakari jarraituaz buru hori Sigma izendatuko dugu :

(15) [SSint Norki [SSint baitere [IP ti amoria daraut muthatu]]]

23 (15) eko egitura guziz hipotetikoa da noski, baina maila proposizionaleko morfemek haien semantikarekin zer ikusia duen posizio sintaktiko bat hartzen badute, (15) ezin da urrutiegi ibili behintzat nork eta bait- en elkarrekiko kokapenari dagokionean. Trask- en hipotesian, ordea, hasiera batean adizki jokatuari lotua den aurrizkiak izenordainarekin bat egiten bukatu behar luke. Bat egite hori bide morfologiko ohikotik egiten baldin bada, handik sortzen den forma konplexuak ezin du kasu marka bere baitan hartu. Nolabait esateko, Decheparerena bezalako kasuetan bait- aurrizkia bide erdian gelditu da : adizki jokatutik urrutiegi eta izenordainarengana txit ailegatu gabe.

24 Bata zein bestearen hipotesiak, bestalde, zer esanik ez dute 1.4.-ko (nopaita/zepaita) formei buruz.

3. Euskarazko izenordain zehaztugabeak tipologiaren argitan

25 Haspelmath (1997)-ek, gaur arte gai honen inguruan egin den lanik zabal eta osoenean, izenordain zehaztugabeak kasurik gehienetan deribaturiko formak direla defendatzen du, galderazko izenordainen edo izen mugagabe sinple baten eta indar kuantifikazionala eratxekitzen dion partikula baten elkarketaz eratuak. Euskararen izenordain zehaztugabeen sailari begiratzen badiogu, jeneralizazioa ezin zuzenagoa da :

(16) EsistentzialakPolaritatedunak Unibertsalak-1 Unibertsalak-2Nor- bait i - hor / ne -hor nor - nahiedo-nor(<*e-nor, Mitxelena, 1985)

26 Tipologiaren aldetik, izenordain sinpleei ezartzen zaizkien partikula edo emendailu horiek bi iturburu nagusi dute : lehena, zehazkabetasuna adierazten duten perpaus osoen gramatikalizazioa da ; bigarrena, galderazko izenordainaren edo izen mugagabe sinplearen denotazio egituran mailakatze bat eragiten duten foko partikulak dira12. Bi iturburu hauen adibide gisa, hona hemen bi kasu, lehena Lituanierari dagokiona, bigarrena Serbo-kroazierarena (Haspelmath, 1997, 131 eta 138.orr.)13 :

(17) a. kaz-kas (kazin-kas, kazno-kas) « norbait » < kas zino kas « nork daki nor » b. i-ko « edonor » < i - « ere » + -ko « nor »

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27 Lituanieraren kasuan, gramatikalizaturiko perpaus nagusi oso bat haren menpekoa zen (edo haren menpekoaren barnean) zen galdera hitzaren aurrizki bilakatu da. Bigarren kasuan, euskarazko ere-ren kide den zerbait galdera hitzari zuzenean lotzen zaio izenordain zehaztugabe unibertsal bat eratzeko.

28 Bi prozedura hauek predikzio desberdinak egiten dituzte euskarazko izenordain zehaztugabe existentzialen izaerari eta jatorriari buruz. Lehen bideari segituez gero, nor/zerbait sailaren azpian gramatikalizaturiko perpaus osoak ditugu. Bigarren bideari jarraituez gero, -bait jatorrian behintzat mailakatze balioa zuen foko partikula bat da, nor/zer galderazkoei lotzen zitzaiena. 29 Horrekin lotua dago bigarren problema bat : Azkuek eta Lafonek bait aurrizki-atzizkien artean ikusi uste izan zuten kidetasuna zinezkoa bada, zer egiten dugun itxuraz osoagoa den -baita atzizkiarekin. Azkue-Lafon-en bide-tik abiatuta, bi aukera daude bakarrik : edo bait- aurrizkia jatorrian baita- da eta adizki jokatuen aurrean (eta euskalki gehienetan, hitz bukaeran) bokala galdu du, edo -baita atzizkiak badu erantsizko zerbait, oraindik identifikatu ez duguna, eta oinarrizko forma adizki jokatuekin aurkitzen duguna da. 30 Lehen problema sailari gagozkiola, bigarren hipotesia besterik gabe bazter daitekeena da. Nor/zer galderazkoaren ondoan datorrena ez da maila-katze funtzioa duen foko partikula bat, baizik eta konplementatzaile bat, pro-posizio mailako menpekotasun erlazio bat adierazten duen zerbait, Azkuek eta Lafon-ek ikusi zuten bezala14. Honenbestez argi dago izenordain zehaz-tugabeen jatorriari begiratuez gero, lehen hipotesiari jarraiki behar gatzaiz-kiola, eta ez bigarrenari. Honek, edozein kasutan ere, ez digu bigarren arazoa konpontzen, alegia konplementatzailearen eta izenordain zehaztugabeak sortzen dituen atzizkiaren azpian baita dagoen, ala -baita atzizkia eta bait- au-rrizkia bereizi behar ditugun. Ohar gaitezen gramatikalizazioaren bidetik jotzen badugu, bukaerako - a hori gramatikalizazio prozesuan karriaturiko elementu bat izan daitekeela, jatorrian bait atzizkitik berezia dena. 3.1. ata-lean lehen posibilitatea tratatuko dut laburki. 3.2. atalean, bigarrena eta hobetsiko dudana.

3.1. Litekeen baita- aurrizkiaz

31 Bait- aurrizkiaren eta -bait atzizkiaren azpiko forma baita bada, ez da beharbada burugabea biak balizko bai eta batetik heldu direla pentsatzea 15. Adizki jokatuei lotzen zaien aurrizkiari dagokionean, ez dirudi fonologikoki problema haundiak sortzen dituenik : baita, baitu forma jokatuen azpian honelako prozesu bat izango genukeen :

(18) *bai eta da> *baita da> *baitaa> baita *bai eta dadu> *baita dadu> *baitadau> *baitau>baitu

32 Bait- forma laburragoa bilakaeraren emaitzak ahalbideraturiko segmentazio berri baten ondorio izango litzateke.

33 Azpiko eta-ren presentziak esplika lezake zergatik bait -ek berez denborazko balioa izan dezakeen Lafon-ek aspaldi nabarmendu egitura batzuetan (Lafon, 1966, 683-686 ; Oihartzabal, 1987) :

(19) zu jin báit, eginik duket « pour votre arrivée, je l'aurai fait » (Lafon, 1966, 683.orr.)

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34 Bait- beste aldetik, bitxia da menpekotasun erlazio oso desberdinak markatzen dituelako (kausalak, moduzkoak, denborazkoak, Lafon, 1966 ; Oihartzabal, 1987). Jakina da juntagailuak subordinazioari dagozkion men-pekotasun erlazioak ahalbideratzen dituztela, behin diskurtsuan txertatuez gero (Culicover eta Jackendoff, 1997 ; edo Rebuschi, 2001, juntaketa eta subordinazioaren arteko mugak desegiten dituen ikuspegi baterako), eta men-pekotasun erlazio hauek askotarikoak izan daitezkeela. Bait- en azpian baieta- dagoen ala ez berariazko azterketa merezi duen kontua da, nere irudiz, baina ez dut uste izenordain zehaztugabe esistentzialen jatorria argitzeko orduan argi gehiegi egiten digunik. Batetik, ez dugu batere lekukotasunik konplementatzaile gisa funtzionatzen duen bait- aurrizkiari dagokion azpiko forma baita dela erakusten duenik. Pentsatzekoa da hala ere, delako -baita atzizkia, bere osotasunean mantendu bada izenordainen sailean, arrastoren bat utziko zuela baita ere adizki jokatuen dermioan. Baina ez dugu bakar bat ere.

3.2. Gramatikalizazioaren hipotesia

35 Bildu ditugun aldaera guziak elkarrekin jartzen baditugu eta haien ele-mentuak forma bakar batean biltzen, ateratzen den emaitza ezagun egiten zai-guna da. Nor/zer absolutibo batetik abiatuez gero, honakoa :

(20) Nor/zer... (forma guziek dutena) = > Nor/zer ere... (1.2. formetatik) = > Nor/zer ere bait... (1.1, 1.2, 1.3) = > Nor/zer ere baita (1.4. ko formek erakusten duten akabuko bokala erantsiaz)

36 Baina, noski, azken forma hau erlatibozko libre bat da, nor/zer galderazkoen gainean eratutakoa. Hona, esate baterako, kasu eta preposizio desberdinak agertzen dituzten izenordain zehaztugabeei (1.1. formak) dagozkien (edo legozkiekeen) ale batzuk16 :

(21) a. Nor ere baita ez da sarthuko « Quel qu'il soit, il n'entrera pas » (Duvoisin- en hiztegitik) 17 b. Nola ere baita, bada fikzionez, bada egiaz, Krist predikatzen da « en quelque manière que ce soit » (Leiç., Phil 1) c. Non ere baita« quelque part qu'il soit » (Pouvreau, Hiztegia)

37 Tipologikoki, egitura hauek oso iturburu ohikoa dira izenordain zehaz-tugabeentzat. Haspelmath-en arabera (1997, 129-139.orr.), gramatikalizazioz eratu diren izenordainek hiru iturburu nagusi dituzte : lehen iturburua, berak ez dakit zer gisako zehaztugabeak (ingelesez dunno type) deitzen dituenak sortzen dituena da 18. Honelakoetan perpaus nagusi oso bat zehazkabetasuna adierazten duen aurrizki bilakatzen da. Perpaus hori jakingabetasuna adie-razten duena izaten da. Horrelakoak aurkitzen dira esate baterako Ingeles Zaharrean (22a), Bitarteko Goi Alemanieran (Middle High German, (22b)), eta egungo errumanieraz, dialektalak diren formetan (22c) (Haspelmath, 1997, 131.orr.) :

(22) a. nathwa « norbait »

38 Bigarren iturburua, nahi/gogo- ren presentzia erakusten duten izenor-dain zehaztugabeak sortzen dituena da (want/please type) : nor/zer bezalako izenordainkiei

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lotuak agertzen diren hainbat atzizki nahia, gogoa edo atse-gina adierazten duten elementuak dira, normalki aditz lexikalizatuak (Haspelmath, 1997, 132. orr.). Hauek erlatibo libreetarik heldu dira. Kasu ezagunak dira gure artean latinezkoak (23a), eta espainolezkoak (23b). (23c) errumanierako forma dialektal bat da :

(23) a. qui-vis edo quilibet« inor »

39 Euskarazko zernahi- k, dakigunez, iturburu bera du19.

40 Azkenik, Haspelmath-ek « it may be » type indefinites deitzen duenen saila dago. Hauek predikazio kopular baten gainean eraikitako erlatibo libree-tarik heldu dira. Erlatibo libre hauek euskarazko nor/zer/zein ere baita formen kide garbiak dira. Adibidetzat, frantsesezko (24a), errusierazko (24b) eta hebraierazko (24c) :

(24) a. Qui que ce soit« zein ere baita » b. kto nibud« inor, norbait »

41 Euskarazko nor/zerbait formak beraz, sail honi legozkioke : azpian predikazio kopular bat duten erlatibo libreetarik eratorritako izenordain zehaztugabeen sailari alegia. Aipatzekoa da (zernahi-ren gramatikalizazio patroi bertsuari jarraikitzen zaiolarik), forma hauetan zehazkabetasuna adierazten duen partea atzizkia dela, espero litekeen bezala. Honek (ikus azken atala) zernahi eta zerbait sailak edonor eta inor sailetatik bereizten ditu. Lehenbizikoen kasuan, gramatikalizazio prozesuak, erlatibo libreetarik abia-tuaz, atzizkiak sortu ditu, erlatibo libreetan nor/zer izenordainkiak erlatiba- tzearen markaren edo aditz-izenaren (zernahi-ren kasuan) aurretik doazelako 20. Edonor eta inor – en sailak, aurrizkien bitartez eratuak, lite-keena da gramatikalizazio prozesu baten emaitza ez izatea, baizik eta izenor-dainkien gainean zuzenean eraikitako formak21.

42 Gramatikalizazio prozesuaren azpian dauden erlatibo forma hauek berehala esplikatzen dute aurreko hipotesietan zail gertatzen ziren aldaera batzuk. Batetik, norbaita/zerbaita bezalakoak, erlatibo librearen adizki jokatua oso-rik gordetzen duten formak dira. Nolakoabeit bezalakoak, beste alde, nolakoa baita erlatibo libreari dagozkio. Horrelakoak ere arruntak dira tradizio litera-rioan22 :

(25) a. Zelangoa baista amea, alangoa oi da alabea (RS, 35) b. Nolako baita nihor bera baitan, hala iujeatzen du kanpotik (SP Imit II 4, 2)

43 Kasua tartean agertzen duten egiturak, -bait (a) formek oraindik erlatibozko librearen barne egitura gordetzen duten egoera jasotzen dute. Nolerebait bezalako formak mailakatze partikula (ere) gorde duten erlatibo libreetarik eratorritako forma fosilizatuak dira.

44 Esan behar da, kasu marka tartean agertzen duten etsenpluetan, kasua perpaus nagusiko flexioak ezartzen duela. Kasu marka galdera izenordainari atxikia erakusten duten izenordain guztiak behinolako perpaus oso baten egi-tura morfologikoa besterik gordetzen ez duten forma lexikalizatuak dira. Begiak antzeko gramatikalizazio prozesua jasan duten nornahi/zernahi for-metara itzultzen baditugu, iduri du kasu

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menpekotasun hau, adizki jokatua bera galdu baino lehenagokoa izan zitekeela (OEH, nornahi sarrera, nork nahi den azpi sarrera) :

(26) a. Fideletaric nork nahi den Iainkoa bere aita dei ahal dezake partikularki (Leiç., Ins E 4v) b. nork ere nahi den egin lezan (Samper)

3.3. Bokalaren erorikoaz

45 Hau guztia zuzena baldin bada, egungo formak norbaita/zerbaita formetarik sortuak dira, bukaerako bokala erori ondoren. Bokalaren eroriko hau ondo ordezkatua dago adizki jokatuen bukaerako - a ren kasuan (ikus Mitxelena, FHV, 131-132 ; De Rijk, 1981).

46 Hori horrela bada, baina, predikzio garbi bat egiten dugu : espero dugu gramatikalizazio prozesuan bitarteko egoera bat aurkitzea, zeinetan bokala hitzaren azken posizioan gertatzen ez denean, forma osoena aurkitzen baitugu. Bizkaialdeko idazleengan (gogora nopaita/zepaita formak bizkaie-raz aurkitzen direla bakarrik) aurkitzen ditugun alternantzia bitxi batzuk bitarteko egoera horren adierazle izan litezke. Ez Juan Antonio Moguelek, ez Zavalak, ez eta Vicenta Moguel-ek ere ez dute zerbaita bezalako formarik agertzen, baina bai, itxura batean, haietatik eratorritako zerbaitako forma :

(27) a. Bizi naizala banaiz zerbaitako ; illtzen banazute, ez ezertako (V Moguel, Ipui Onak, 96) b. Bizi nazala banaz zerbaitako ; ilten banozue ez ezetako (Zavala, Alegiak, 532) c. Aita seme batzuk juan dira sabaira, aita katu aundijaz ta semia bere bai zerbaitakuan (JA. Moguel, Peru Abarka, 61)

47 Ildo berean, Azkuek ez du zelanbaista edo zelanbaita aldaerarik jasotzen, baina bai haietatik eratorriak ematen duten zelanbaistako eta zelanbaitako « cosa buena, apreciable, magnífica ; chose bonne, appréciable, magnifique ». Honako etsenpluan bezala (B-l) :

(28) Zelanbaitako belarritako urrezkoak ekarri deutsaz osabeak Habanatik

48 Halaber zenbaitan (AN-Ond), bestela ere aurkitzen zail ez dena :

(29) Guk elkarrekin zenbaitan broma pixka bat ere izaten genuen (Lizaso, Jose JoakinMitxelena gogoan, 42.orr.)

49 Eta beste horrenbeste nolabaitan (OEH, « de alguna manera ») formarekin, nolabaita-ren arrastorik aldean ez duena :

(30) Ustegabeko erasoa nolabaitan gaindu naiean (Tomás Agirre, Uztaro, 18.orr.)

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4. Gramatikalizazio prozesuaz

4.1. Izenordain zehaztugabeak : sailkapen bat eta inplikazio erlazioak

50 Aspaldi xamar, Edmonson-ek (1983), polaritatedun adizki laguntzaileen hizkuntzarteko distribuzioa aztertu ondoren, hizkuntzek izenordain funtzioak eta izenordain formak nola uztartzen zituzten irudikatzen zuen diagrama bat proposatu zuen. Diagrama honetan, polaritatedun laguntzaileak agertzen diren kontestuak adierazten dira, halako moldez non izenordain bat funtzio horietako batean ager badaiteke, orduan ezkerreko funtzio guztietan ere agertu ahal izango baita :

(31) ezezkoak > galderazkoak > baldintzazkoak > konparaziozkoak

51 Haspelmath-ek (1997), 40 hizkuntzetako izenordain zehaztugabeak xehero aztertu ondoren, eta beste 100 hizkuntzetako datuak kontsideratu ondoren, dimentsio bitako diagrama baten bidez ordezkatzen du Edmonson-en dimentsio bakarreko diagrama23 :

52 Haslpemath-en arabera, (32) ko mapak izenordain zehaztugabeen hizkuntzarteko distribuzioaren berri ematen digute. Batetik, (32) n adierazten diren kontestuak dira hizkuntza guztietan izenordain zehaztugabeak baimen-tzen dituztenak. Bestetik, eta hau da Haspelmath-en kontribuzio tipologiko handiena, izenordain jakin batek (forma jakin bateko izenordainak) funtzio bat baino gehiago betetzen badu, direlako funtzioak elkarren ondoan egon behar dute mapa horretan. Hizkuntzen arteko diferentziak forma eta fun-tzioaren uztarketari dagokionean, ez dira beraz zoriaren baitakoak, baizik eta hein handi batean mugatuak. Ez dago, esate baterako, Haspelmath-ek aztertu hizkuntzetan, kontestu ez-espezifikoetan eta zeharbidezko ezezkoetan agertzen den izenordain zehaztugaberik, galderazkoetan ere agertzen ez denik. Egon daiteke, hala ere, ezezkoetan eta zeharbidezko ezezkoetan agertzen den izenordain bat, galderazkoetan agertzen ez dena. Hizkuntzek modu batean edo bestean banatzen dute mapak adierazten duen funtzio eremua, baina banaketa lerroak ez dituzte sekula bereizten ondoz ondo edo marra batez lotuak diren kontestuak. Euskarak, gure egunean, honelako banaketa bide du (Haspelmath, 1997, 75.orr.) :

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53 Haspelmath-ek proposaturiko mapak predikzio batzuk egiten ditu gramatikalizazio prozesuaren zer-nolakoaz ere : mapak erakusten dituzten ondo-kotasun erlazioak izenordain forma posible guztiak agortzen badituzte, gramatikalizazio bideak erlazio horiek ere obedituko ditu. Izenordainek aur-reikus daitekeen modu batean eskuratuko dituzte funtzio berriak : hain zuzen ere ondoan (eta marra batez loturik) dauden funtzioetara lerratuaz. Haspelmath-en arabera horixe da gertatzen dena. Ikertzen dituen gramatika-lizazio prozesuetan ez dago ezinezko ezein eremuri dagokion bitarteko formarik. Aldiz, gramatikalizazio prozesuaren emaitza desberdinak espero litekeen modukoak dira. Hautu libreko interpretazioa duten erlatibozko libreetarik eratorritako izenordainen kasuan honako taula ematen du adibide gisa (148.orr.) : 54 (34) espezifikoa ez-espezifikoa galdera/baldintza gonbarazioa hautu librea

55 (34) ko taulak erakusten dituen gramatikalizazio bideek bi ezaugarri dituzte : (i) funtzio desberdinen ondokotasuna ez dela hausten (forma bakoitzak (32)-eko diagraman loturik agertzen diren funtzioak hartzen ditu) ; eta (ii) funtzioen etengabeko zabaltze bat baino areago, funtzio desberdinetarako lerratze bat dagoela, jatorrizko funtzioak atzean uzten dituena. 56 Euskararen kasuan, erlatibozko libreetarik eratorritako norbait/zerbait formak hautu libreko balioa izatetik kontestu ez-espezifikoak eta gal-dera/baldintzazkoak besarkatzen dituen eremuan baimenduak diren formak izateraino iritsi dira, balio existentziala dutenak. Honetan, euskarazko norbait/zerbait frantsesezko quelque – ren kide dira (lehenak izenordainak izanik, bigarrena determinatzailea bada ere). Frantsesezko quelque ere (Haspelmath, 1997, 139.orr.) erlatibo libre baten gramatikalizazioaren emaitza da. Hona frantses zaharreko kasu batzuk (Foulet, 1928, 190-191.orr.) :

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(34) Mes quel samblant qu'el en feist li chevaliers samblant n'en fist (La Chastelaine de Bercy, 53-4)

57 XII.mendetik aurrera, quel (adjektibo balioarekin) eta que konplementatzailea elkarren ondoan agertzen hasten dira, guziz bat egin gabe, esapide ohiko batzuetan. Esapide horietan arruntena, a quel que paine « zein ere neke egiten baita, kosta ahala kosta ». XII. mendean bertan, badira etsenplu bakan batzuk non quel... que hurrenkerak osagai bakarra osatzen duen :

(35) an quelque leu que vos ailliez « nora ere joaten baitzara, edonora zoazela ere » (Chrestien de Troyes, Li Contes del Graal, Perceval, 597-9)

58 Euskaraz bezala, frantsesezko quelque erlatibo libre batetik dator, eta hautu libreko izenordain zehaztugabe izatetik izenordain zehaztugabe existentziala izatera pasatu da.

59 Nola pasa dira baina, quelque eta norbait- en gisakoak existentzial izatera ?

4.2. Gramatikalizazioaren eragileez

60 Lehen begiratuan, iduri luke izenordainaren bukaerako forma jokatuen ahulezia fonologikoa, eta haien ondorengo galerak – bait atzizkia sortu zutela. Behin hartaraz gero, hurrengo pausua bait- en aurretik zegoen flexio marka ororen (Kasu marka nahiz deklinabide atzizkien) kanporatzea izango zen. Kanporatze honen arrazoia morfologiaren antolaketa orokorraren baitan dago, eta honela eman daiteke (Haspelmath, 1993, 291.orr. ; ikus baita ere Bybee, 1985, 40.orr.) :

(36) Flexioa Deribazioaren Kanpoan Egon Beharraren Printzipioa Morfologikoki konplexua den hitz bat hobetsia da flexio hizkiak deribazio hizkiak baino urrutiago baldin badira errotik edo hitz oinetik

61 Delako hobespen printzipioa24, bestalde, ez da aspaldiko unibertsal ezagun baten birformulazioa baizik :

(37) Deribazioak eta flexioak biak ere erro edo hitz oinaren ondoan edo aitzinean badaude, deribazio hizkia beti dago erro edo hitz oinaren eta flexioaren artean (Greenberg, 1963 : 28. Unibertsala)

62 Prozesu honen emaitza egungo formak dira. Bait-ek, atzizki bihurturik, flexio atzizki guziak kanporatu ditu izen oina jo arte, nor, zer, non eta noiz forma trinkoei lotuaz25.

63 Alabaina, bizkaierazko forma osoagoek erakusten dute (hain zuzen ere adizki jokatua gorde dutelako) segmentu fonologia ez dela aldaketaren eragilea izan. Kontutan hartu behar dugu baita ere, delako gramatikalizazio prozesuak ez duela ekarri ezabarazi duen egitura sintaktikoaren desagertzea. Norbait eta zerbait, biak nor(ere) baita eta zer(ere) baita egituretatik heldu zaizkigu (jatorrizko formak ezabatu dituen gramatikalizazio prozesu baten bidez), baina egitura horiek berak ez dira desagertu, produktibo izaten segitzen dute literatura klasikoan. Honek ez du hemen defendaturiko gramatikalizazio prozesua baliogabetzen. Forma gardenagoak eman duten bestelako gramatikalizazioetan, zernahi/nornahi kasuetan esaterako, antzeko gauza gertatzen da : nornahi eta zernahi – ren ondoan haien iturburua ematen duten nor nahi den, nor nahi

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baita ditugu, eta gramatikalizazio prozesuak hemen ere antzeko bitarteko formak eman ditu (OEH, nornahi sarrera) :

(38) a. Fite du garaitzen noren nahi konbata (Harizmendi, 50) b. Bazekien, nurk nahi bezin ongi (Larreguy, I 357) c. Tranze batean nori nai gerta dakikeo argala izatea (Agirre Asteasukoa, Eracusaldiac III 295)

64 Ber gauza gertatzen da euskarazko norbait/zerbait-en antzeko bidea egin duen frantsesezko quelque-rekin. Lehen esan dugun bezala (3.2. atala), quelque forma balio kontzesiboko erlatibo libre batetik heldu da. XII. mendetik aurrera galdera izenordaina eta konplementatzailea elkarrekin lotuak agertzen hasten dira. XVII. menderako, bi elementuen lotura guziz burutua dago, eta quelque determinatzaile huts bezala erabiltzen da. Hori horrela delarik, XVII. mendeko idazleek quelque-ren azpian ustez dauden balio kontzesiboko erlatibo libreak enplegatzen segitzen dute, Molière-n perpaus honek erakusten duen bezala (Brunot eta Bruneau, 1949, 479.orr.) :

(39) Quelle violence que je me fasse (George Dandin, III, 7)

65 Erlatibo libreetarik abiaturiko lerratzea inolako segmentu fonologikorik galdu ez duten forma osoagoen baitan gertatu da, eta jatorrizko forma uneoro « gogorarazi » behar zuten erlatibo libre kontzesiboen aitzinean. Hau da, izenordainen azpiko formak garden bihurtzen zituzten elementuak mantendu dira, baina ez dute gramatikalizazioa galarazi. Haspelmath-ek berak (1997, 136.orr.) ez du garbi ikusten nola gertatu den lerratze hori. Bistan da, hala ere, fonologikoki izenordainak forma ahulduak direla, segmentu fonologiaren aldetik ez bada, bai segmentuaz gainekoaren aldetik. Haspelmath-entzat, erlatiboen gramatikalizazioaren oinarrian batera gertatzen diren bi fenomeno daude : lehena, erlatibozko formen mailakatze balioaren galera da, berak « esanguraren ahultzea » deitzen duen prozesuaren bitartez azaltzen duena. Adibide gisa, jarri ditzagun ondoz ondo izenordain zehaztugabe existentziala, eta ustez haren azpian dagoen erlatibo librea :

(40) a. Norbait ekar dezakezu b. Nor ere baita ekar dezakezu

66 Hautu libreko erlatiboak eskala pragmatiko baten azken maila adierazten du. Norbait existentzialak, berriz, ez. Biek partekatzen dute ez-espezifikotasuna. Hautu libreko erlatibo bat balio existentzialeko izenordain bilakatzen denean, esan daiteke gramatikalizazioa semantikoki mailakatze funtzioaren (foko tasunaren) galerari zor zaiola, eta fonologikoki (hona hemen bigarren feno-menoa) fokoak berez eskatzen duen azentuaren galerari. Galeraren ondoan, mailakatzeak suposatzen zuen multzo jakin baten gaineko zenbaketa ahal-mena galtzen da. Gelditzen den zenbaketa ahalmena existentzial huts batena da. Hau jakina, gramatikalizazio prozesuaren parte bat besterik ez da. Ez dakigu, esate baterako, nola integratu ziren forma hauek perpaus egituran argumentu xoil gisa, jatorrian adjunktuak zirelarik. Atal honek, bistan da, ikerketa luzeagoa behar du.

4.3. Zer zegoen zerbait izan baino lehen

67 Hemen aurkeztu dugun gramatikalizazio prozesuak berehalako galdera pizten du : norbait/zerbait bezalako izenordainak euskarak aspaldi gabe bil-dutako gaiak badira,

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zerk betetzen zuen izenordain horiek egun betetzen duten espazioa ? Leizarragarengana jotzen badugu, norbait/zerbait-en ondoan edozein (bat) ere aurkitzen dugu balio esistentzialarekin baiezko per-pausetan. Izenordain zehaztugabeen sistemaren bilakaerak azterketa serios bat behar duen alorra da, artikulu honen mugak guziz gainditzen dituena. Litekeena da, hala ere, balio esistentziala ere bazuen edozein (bat)-ek egungo norbait/zerbait-en funtzioak betetzea. Hemen besterik gabe, edozein (bat) existentzial balioko etsenplu batzuk emango ditut, OEHtik hartuak. (41) a. Baina are erranen du edozeinek...« Quelqu'un dira » (Leiç. Iac, 18) b. Baina baldin edozeinek uste badu ezen desohore duela « Si quelqu'un... » (Leiç. Cor 7,36) c. Zen bada fariseutaric edozeinbat Nikodemo deitzen zenik (Leiç. Io 3,l) d. Fikotze bat zuen edozein batec landatua bere mahastian (Leiç. Lc 13,6)

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NOTES

1. Nor/zer bezalakoak euskaraz ez dira segurenik berez galderazkoak. Nor/zer formek indar zenba-tzaile aldakorra dute. batzutan unibertsal gisa (a). bestetan galdera izenordain gisa (b) eta bestetan berriz izenordain anaforiko plural gisa jokatzen dutelarik (c) : (i) a. Nork bere herria maite du b. Nork maite du bere herria ? c. Nor oinez nor autobusez etorri zen/ziren Etxepare-k (2001. agertzekoa) nor/zer elementuen zenbatasun ahalmena sintaktikoki mugarritua dela proposatzen du. hau da. nor/zer- en zenbaketa ahalmen askotarikoak perpaus egituran gauzatuak diren tasun kuantifikazional diferenteekin asoziatuak izatearen ondorio direla. Beghelli (1995). Beghelli eta Stovvell (1997) eta Szabolcsiren (1997) lanen izpirituan. Aurrerakoan nor/zer formak. ohi bezala. galderazkoak direla emango dut, irakurketa errazte aldera.

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2. Existentzialen sailean sartu behar dira baita ere nor edo nor, nor edo hura edo nonor- en gisakoak. Badirudi. testuaren lekukotasunari begiratzen badiogu behintzat (OEH-ek ematen duena) forma hauek besteak baino berriagoak direla. Zaharragoak diren izenordainen jatorriaz jarduten garen bitartean bazter utzi daitezke beraz. 3. Bi exenpluok George Rebuschi-k helaraziak dira. 4. Erreferentzia guztiak Orotariko Euskal Hiztegitik hartuak dira. besterik esaten ez bada. 5. Sarasolak bere iruzkinetan hauxe dio : « la-a de cerbayta. clarísima en el manuscrito, no acertamos a explicarla si no es por lapsus de escritura » Mitxelenak. Tovar-ek eta Otte-k (1981) berriz, « çer-bayta. con una-a inexplicable » diote. Artikulu honetan defendatzen den hipotesiaren arabera, ez da miresteko forma bat, baizik eta Azkuek jasotako zepaita- ren kidea. 6. OEHak ere norabaita bat ematen du. Salbatore Mitxelenarengandik jasoa. Hala ere, zaila da jaki-tea hemen norabait eman duen forma osoago bat dugun ala nonbaiten gisako forma bat. Zeinetan bukaerako-a hori izenordainaren barneko adlatiboa errepikatzen duen. Norabaitera bezalako forma pleonastikoak ez dira bestela ere ezagungabeak : (i) Jolasak norabaitera eraman ezbaditu (Agirre, Garoa, 162.orr.) 7. Lhande-k honen jatorria garbi zuen (1926) : nunebeita

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bezalako kontzeptuak adierazten dituz-ten izen soilak zenbait hizkuntzatan izenordain zehaztugabe gisa baliatzen ahal direnak (frantse-sezko rien bezalakoak). Agian hemen sartu beharko genuke euskarazko deus ere (cf. Mitxelena. 1965). Haspelmath-en ustea, galderazkoen eta forma bereko izenordainen arteko erlazioari dagokionean ez zait aski oinarritua iruditzen, eta izenordainen iturburu posibleez ari garenean kontutan hartzeko zerbait da. Ez dut uste hala ere lan honen gaia. bere zehatzean. ukitzen duenik. 13. Hona hemen bigarren tipoaren exenplu gehiago. (Haspelmath, 1997, 138. orr.) (i) Alemaniera wer auch immer = edonor wer « nor », auch « ere » Serbo-kroaziera i-ko = edonor -ko « nor ». i- « ere » Indonesioa siapa-pun = edonor siapa- « nor ». -pun « ere » Gooniyandia ngoorndoo-ngaddaya = norbait -ngaddaya « ere » Sanskritoa kas cana = edonor cana « ere » Japoniera nani-mo = ezer ez -mo « baitaere » nan-demo = ezer/deus -demo « ere » Hindi/Urdu koii bhii = inor koii « nor (zehaztugabea) » bhii « ere » 14. Inork esan lezake baita-k baduela eiterik aski baita lokailuarekin, eta hau ez dagoela urrutiegi mailakatze funtzioa duen ere – tik. Antzekotasunaren azpian mamizko deus ere ez dagoela garbi aski uzten dute honako hiru datuek : (i) baita aditzondoak ez du baista edo beita aldaerarik : (ii) baita-k ez du sekulan, guk dakigunez, mailakatze funtziorik izan, bere baitarik : eta (iii) baita eta ere elka-rrekin agertzen direnean ordena baita... ere da, ez ere... baita, baina azken hau da nolerebait ize-nordain konplexuetan aurkitzen duguna. 15. Jakina, honek behartzen gaitu – baist aldaeraz galde egitera. Konbikzio haundirik gabe mintza-tuaz. baist – en azpian bai ez eta egon liteke (cf. baizik<*bai-ez-ik eta baizen > *bai-ez-en, Lafon. 1957-58, 242-tik aurrera). 16. Nor – en kasuan behintzat, ere – rik gabekoak ere badira (OEH) :(i) Nor baita txarrena,/ hark dik hark hobena (Zalduby. RIEV 1909, 228) 17. Baita Pouvreau ere, bere hiztegian : Nor ere baita « quel qu'il soit ». Eta Urte, gramatikan : Norerebaita... « Qui que ce soit... » (Gramatika, 75) 18. Bide horretatik abiatuak iduri dute iparraldeko nik dakita nor/zer/non/zenbat bezalakoak. -a galderazkoarekin. Eskerrak B. Oihartzabali oharragatik.ek zeinein (BN-aezk) jasotzen du hiztegian « cualquiera : quelconque ». zein+nahi+den – etik. bere ustetan. 19. Azku 20. Hemen kontutan hartu behar da ere euskaraz juntagailuak klitizatzen direnean atzetik egiten dutela. cf. edo-ren joera juntadura moztuetan (bihar-edo joango da) eta – ta atzizkia orohar. Eskerrak B. Oihartzabali ohar honengatik. 21. Trask-en ustetan edonor nor edo nor formatik heldu da. laburbidez. Hipotesiak gutxienez problema bat du. eta da nor edo nor eta edonor formek ez dutela zenbatasun balio bera (baina ikus 4.3.atala). 22. Esan behar da testuan ematen ditudanak ez direla egitura libreak. korrelatiboak baizik. Asumituko dut forma libreak ere izan zirela edo badirela. hiztegiek aipatzen ez badute ere. 23. Termino batzuk ez dira beharbada identifikatzen errez : « zeharbidezko ezeztapena »-z (Haspelmath-en « indirect negation ») adierazi nahi dugu ezeztapena eta harekin loturiko izenordaina perpaus berean agertzen ez diren kasua, hainbat hizkuntzatan izenordain berezi bat behar duena. Adibide gisa, hungariera (Haspelmath, 1997, 33) : (i) a. Nem lát-t-am sem-mi-t ez nekusan ezer ez b. Nem hisz-em, hogy vala-ki lát-t-a volna dut-uste Konp inork ikusi duen Non ezeztapena dagoen perpaus berean agertzen den izenordain zehaztugabea eta ezezko formarik ez duen menpeko perpaus batean agertzen dena bi izenordain sail diferenteri

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dagozkion, formalki. « Irrealis ez-espezifikoa » terminoaz, berriz, subjektu baten menpeko espazio mental edo denbora-moduzko batetik kanpo erreferentziarik ez duen izenordaina (Fauconnier, 1985). hizkuntza askotan ere forma berezia galdetzen duena. Haspelmath-en kontestu guztiak lau bitariko tasunen laguntzaz karakteriza daitezke (1997, 119.orr.) : (ii) Hiztunaren ezaguna vs. hiztunaren ezagungabea (iii) Espezifikoa vs. ez-espezifikoa (iv) Mailakatzerik erakusten duena vs. mailakatzerik erakusten ez duena (v) Ezeztapenaren menpekoa vs. ezeztapenaren gainekoa Mapako loturak halako moldez daude eratuak non tasun bera duten funtzioek maparen eremu jar-raitu bat osatzen baitute. 24. Haspelmathen arrazoia. (24) antolaketa printzipio hertsia baino hobespen printzipio gisa hartzeko, gramatikalizazio prozesuan sortzen diren forma pleonastikoak dira. Kontsideratu esate baterako Georgieraren izenordain zehaztugabeen (edonor/zer sailari dagozkionak) bilakaera histori-koa :

Non ra- gure zer -en ordaina den eta – me izenrodain zehaztugabea sortzen duen partikula. Forma zaharretan. euskaraz bezala, partikula hori kasu marken ondoren dator (s-. -d-. -is- eta – iti- kasu markak dira). Bitarteko formak pleonastikoak dira. kasu marka me-ren aurretik eta ondoan agertzen direlarik. Forma berriek flexioa kanpoan dute. Haspelmath-en arabera. lexikoaren antolaketa mor-fologiko hertsi batek ez du forma pleonastikoen presentzia esplikatzen. Euskaraz forma pleonasti-koak ere agertzen dira. flexioaren kanporatze prozesuan : nondikbaitik. norabaita, nonbaiten. Halere ohar gaitezen ez dugula *norkbaitek. *noribaiti edo *nortzubaitzu bezalakorik. Agian ez da kasua-litatea. georgieraren kasuan ere genitibo eta instrumentaleko formak aldaera pleonastikorik ez sor-tzea gramatikalizazio prozesuan zehar. Litekeena da forma pleonastikoen presentziak maila deribazional eta flexiboaren arteko bereizketa ez kolokan jartzea. baizik eta maila flexiboan bertan dauden linearizazio arauen laxatzea erakustea. 25. Interesgarria da, hartara, egungo norabait/nonbaitera alternantzia, adlatiboaren azpian lokatiboa dagoela erakusten duena. Hau bestalde ere ikusten da zubererazko deklinabidean. inesiboko – a morfema posposizionala ager baitaiteke adlatiboan : oihaniala, etxilat > etxialat (B. Oihartzabali zor diodan oharra).

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INDEX

Index chronologique : 20e siècle Thèmes : linguistique Mots-clés : basque (langue), diachronie, grammaticalisation, morphosyntaxe, syntaxe

AUTEUR

RICARDO ETXEPARE

(CNRS, IKER, UMR 5478) [email protected]

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Epaiketa eta Endogamia Nafarroako Margaritaren Le Miroir de l'âme pécheresse-n [Arima Bekatariaren Mirailan]

Koldo J. Garai

NOTE DE L'AUTEUR

Testu honen aurretiko ahozko bertsio ingelesa Rhetoric Society of Americako bederatzigarren biur-tekariko kongresu nazionalean irakurri nuen. Kongresu horrek, 2.000ko Maiatzaren 28an Washingtonen antolatu zena, « Professing Rhetoric » « Erretorika Irakatsiz » zeukan izena. Horren aurretik, ingelesezko aurreko bertsio idatzia Jane Donawerth doktorearen Errenazimenduko idazle emakumeen gaineko mintegirako prestatu nuen, mintegi hori 1999ko Ekainean antolatu zen College Parkeko Marylandeko Unibertsitateko Ingeles departamenduan. Berari nire eskerrik minenak. Gajoak testu honen aldaki guztiak irentsi behar izan ditu ; kontutan izanik unibertsitate espainolek ez dutela erretorika praktikorik irakasten, hots, ez dutela onuragarritzat hartzen artikuluak idazten irakastea (eta ez nabil bibliografia konbentzioez), andre doktore dotore horrek egin behar izan duen lana ez da hutsaren hurrengoa izan ; hala ere, noski, artikuluak huts egin dezanean esanonekoa izan ez naizelako izan daiteke. Antzeko egoeran egon izan dira nire bidaide eta hauspo emaile diren Ana I. Morales eta Ricardo Etxepare, baina gainera Ana I. Moralesek itzuli egin ditu ingelesetik euskarara ia-ia aipu guztiak musu truke (inoiz ez hobeto esana), beraz, literatura ona gure itzultzai-lerik onenetakoak emana dastatzeko aukera izango dugu artikuluan. Azkenik (baina ez gutxienik), eskertu gura nuke Aurelia Arkotxa, lana erabat zokoratuta zegoenean, ingelesez irakurri eta euske-raz emateko beta eta moien eman didalako. To Jane Donawerth and Jeanne Fahnestock, thanks.

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1. Sarrera

1.1. Artikuluaren alderdi zabalak

1 Gurako nioke nire lanari abia eman berez duen itzala baino esparru zabalagoan kokatuz eta holan iradokiz inoizkorako asko interesatzen zaizkidan zenbait ikerlerro ; hots ikerlerrook ez dira artikuluan bertan landuko baina esparrua definitzen langa lanak egingo dituzte. Ikerlerro horiek hurrengo kontzeptuen arteko hartu emana dute lan- hazitzat : ahozkotasunaren eta ida-tzizkotasunaren arteko harremanak. Horren harian susmo batek narabil haus-nar azken aspaldi honetan eta hauxe da : hamaseigarren mendeko Europa kontinentalak ez ote zuen « ahozkotasuna » maila askotatik ezabatu nahi izan. Argi dago honegaz guztiaz ahozkotasuna literaturari baino zerbait sakona- goari lotzen ari natzaiola, edota, literatura gure ingurune akademikoan ulertu ohi den kontzeptu txiro, kanoniko eta handigura hori baino gauza sakonagoa eta errotikoagoa dugula.1

2 Orain goazen mailarik maila ikusten zer esan gura dudan « hozkota-suna » ideiarekin. Adibidez maila politikoan, estatu berri isomorfoek nazio ahulagoak eta tarteko lurraldeak antolatzen zituzten unitate geopolitiko eta judizialak kendu egin zituzten, Nafarroako erresumak pairatu zuen bezala. « Ahozkotasuna » esan diodana berdindu liteke Inperioak ahalbidetzen zuen heterogeneitate Machiaveliarrarekin, hots, lekuan lekuko itunak agintzeare-kin, mendetasun maila diferentedun erresuma txiki eta bestelako antola-kuntza geopolitikoei bidea eginez. Heterogeneitatea ahozkotasunari lotzen zaio eta isomorfismoa idatzizkotasunari. 3 Maila judizialean, dedukziozko definizio geopolitiko berri honek ezabatuko zituen tokian tokiko parlamentuetako lege, ohitura eta foru guzti, identitate eta partikulartasunak ezabatuz, goitik behera emanda zetorren orokortasunaren alde. 2 Dedukzioa idatzizkoari lotzen diot, eta indukzioa ahozkotasunari, Adrian Celayari jarraituz ; esaterako Euskal Foruak indukti-boak lirateke tipikoki.3 Era honetara, alde batean heterogeneitatea, partiku-lartasuna eta indukzioa ahozkotasunarekin lerratzen ari naiz, eta, bestean, isomorfismoa, orokortasuna eta dedukzioa idatzizkotasunarekin. Erlazio hauek berez, gehiagorik gabe, ez dira zertan onartu, maila espekulatiboari baitagozkio, baina intuitiboki zuzenak dirudite. 4 Apur bat aurrerago azartuko naiz eta irudikapen mailari edo maila sinbolikoari eutsiko diot —hots, kultur ekoizpenetan gizartearen kontzeptua-lizazioak nola ageri diren ispilaturik— eta proposatuko dut irudia ahozkota-sunarekin lerra daitekeela eta itzulpena idatzizkotasunarekin. Esan dezagun hamaseigarren mendean hipotesizatzen ari naizen ahozkotasunaren kontrako erasoa intelektualek eta erreformistek eratu zuten mugimendu ikonoklastan gauzatu zela. Berbarako, Erasmusen Copia (Ugaritasunaz) hizkuntza idatzia-ren nahikotasunaren goraipatze bezala irakur dezakegu, katolikoek erabili ohi zuten irudien bidezko indoktrinazio sinbolikoaren kontra. Irudia, eta areago sinbolotzat hartu beharreko irudia, hitzetara ekartzen erraza ez izan arren, horrek ez dio kontaketarako ahalmenik kentzen, narratibogarritasunik kentzen, Mieke Balek ondo ageri duenez.4 Beraz, irudien kontrako mugi-menduak arrazoimena erretorikaren bidez gidatuko dela suposatzen du. bai alde heuristikoan bai alde hermeneutikoan. Hori horrela izango bada, hots, hitzak irudia ordezkatuko badu, beste eskakizun soziokulturalik ere gauzatu beharko da : biztanleriaren parte handi

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batek alfabetaturik behar du egon eta, gainera, testu idatziak eskura egon behar dira larguro. Hain zuzen horixe zen erreformisten eskakizunetako bat, Bibliara bitarteko hermeneuta edo ekle-siastiko barik heltzeko eskubidea, eta testuaren lehentasuna liturgia eta sakra-mentuen gainetik ; bi sozio-kultur eskakizunok ezinezkoak izango ziratekeen ez balitz XIV mendetik zetorren informazioaren demokratizazioagatik — burgesak unibertsitateetara sartzen hasi zirenekoa—, eta ildo beretik, inpren-tagatik. Hemendik dator ba biztanleria alfabetatzeko grina hori.5 Noan orain artikulu honen funtsezko hipotesia aipatzera.

1.2. Azterbideak eta azterburuak

5 Artikulu honetan Nafarroako Margaritaren Le Miroir de l'âme pécheresse : Discord étant en l'homme par contrarieté de l'esprit et de la chair bertsozko obra erlijioso protorreformista aztertuko dut. Obra horretan arima-ren eta Jainkoaren arteko erlazioak azaltzen zaizkigu. Testuko narratzailea eta pertsonaia nagusia arima da : arimak kontatuko dizkigu Jainkoagazkoak, familiaren barruko erlazio gisa formulatuta.

6 Lan honi heltzean nire ustea zen XVI mendean Europako Mendebaldean aldaketa bat gertatzen ari zela emakumeari leporatu ohi zitzaion rolean, ama roletik emaztearen rolera doan aldaketa, alegia. Roelkerrek (1968) dioskunez, ingurune erreformistan emakumeek plaza-kontuetan esku hartze zabalagoa izango zuten inguru katolikoan baino, eta honek eman lezake muturrean bertan gezurtatzen duela proposatzen ari naizen rolen aldaketarekin emakumeek estatusa galdu izana ; alabaina Belseyk (1985) dioenez, rolen atontze berri honetan emakumeek luzaroan estatusa galdu arren, aldaketok berok ahalbideratuko zuten garaiko emakume batzuek zerbait askeago jarduteko profitatzeko moduko zirrikiturik eta pitza-durarik asko. 7 Rolen aldaketa hau eskuz esku letorke esparru politikoan gertatu zen Absolutismoaren ezarpenarekin. Bestela esanda, loturik datorkigu Europako Mendebaldeko herrialde gehienetan XVI mendean suertatu zen beste alda-keta bati, hots, norbanakoaren eta botere egituraren arteko harremanen definizio berriari. Izan ere, ikerketa honek erakusten du Europako XVI mendean, ezkontza jaun-basailu edo jaurespen erlaziotzat hartzen zela, eta, horretara, ez zela pentsaezina senar-emazte, aita-alaba, lurjabe- maizter, errege-menpeko eta Jainkoa-arima bikoteak erlazio mota bat eta beraren aldakitzat jotzea. 8 Jainkoa-arima erlazioa bi halakora izango da metaforikoa maila orokorrenean, bi metafora iturri erabiliko baititu batik bat : a) familia barruko hartu-emanak, eta b) epaiketaren irudia. Azkenengoari dagokionez, esan dezadan testuan badela harako pribatizatze edo etxeratze prozesu bat, arima-ren epaiketa plaza-lekuan gertatzetik etxe barruko arazo bilakatuko duena, hots, epaiketa izatetik senar-emazteen arteko erlazioa izatera. Lehengoari dagokionez, bada azpi metafora bat ere : familia patriarkalean erlazio hierar-kikoak baino ez du balio, hau da, bakoitzak aita- lehenarekin edo patriarkare-kin dauzkan hartu-emanen araberakoak6. Bestela esanda, norbanakoa buruz buru eta banaka definitzen da aitarekiko. Bertikalismo honek azpian duen beste metaforak familia patriarkala bi elementuko giza gorputz bezala ematen digu aditzera, elementu biok burua eta giza gorputzaren beste edozein atal direlarik. Hori esanda, aurrera dezadan nire azterketarako familia patriarkalaren erlazioen esparru metaforikoari eutsiko diodala. Bestalde, sendi erla-zioen emakera horiek nire

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hipotesi nagusian aipatuko ditudan kontzeptu erre-torikoen ordezkapenaren testuinguruan ere ikertuko ditut. 9 Lan honetako hipotesi nagusia hauxe da : Nafarroako Margaritaren Le Miroir de l'âme pecheresse obran, fedea-karitatea kontzeptuek berdinta-suna-errukia kontzeptuak ordezkatuko dituzte, egokitasunaren edo adekua-zioaren kontzeptua ezabatzearren. Edenen (1997) Ciceroren Topicaren anali-siari jarraituz, berdintasuna legea instantzia partikularretara egokitzeko prozesu gisa definituko dut. Gure kasuan hauxe gertatzen da : berdintasuna edo egokitzapena gertatu ordez, berdintze lana egin ordez, goikoak karitate obra bat egingo dio fededunari. Labur eman, errukiaren ordez karitatea izango dugu, eta egokitzapenaren ordez, berriz, fedea. Halan da eze, elkarren buruz buru dauden erlazio funtzioak berdintasuna vs. jaurespena izango direla. Erlazio funtzioen ordezkatze hori familia patriarkalaren esparru meta-forikoaren bidez agitzen da. Beherago ikusiko ditugu funtsezko erlazio hauek astiroago. 10 Azkenik, esan beharra daukat kontzeptu batzuen azterketa erretorikoak oso sendo oratuko diola linguistika kognitiboari. Azken hogei urteotan erre-torikako alderdi berri bat sortu da linguistika kognitiboa oinarri hartuta, begiratuz eguneroko hizkuntzan zelan metaforizatzen dugun mundua. Aipatu metodoa erabili gurako nuke testuaren azpian datzan sare kontzeptuala argitzeko. Bide nabar, zenbait konparazio egingo ditut katolikoen sare kon-tzeptualarekin, eta horretarako baliatuko naiz Bernard Etxepareren Linguae Uasconum Primitiae obran bekatu eta bekatari kontzeptuez neuk behinola batean eginiko azterketaz.

1.3. Testuaren inguru historikoaz

11 Testua inportantea da arrazoi zenbaitengatik. Hasteko, testuaren bera-ren ekoizpenean esku hartu zuten autoreen garrantzia historikoagatik : Nafarroako Margarita egilea izan zen, geroagogarrenean Ingalaterrako Elizabeth Ia izango zena eskuizkribuaren itzultzailea izan zen, Catherine Parr Ingalaterrako Henry VIIIaren orduko emaztea itzulpenaren emendiogilea edo zuzentzailea izan zen, eta Bale jakitunak editatu eta argitaratu zuen A Godly Meditacyon of the Christen Sowle izenburuaren pean bere erbesteratze germaniarrean.

12 Nire azterketan ardatza izango den edo testu nagusi gisa erabiliko dudan aldakia Elizabethek Gabon Zaharretako opari eman zion Parreri. Garai horietan Gabon Zaharretan opariak egiten ziren, opariok bat etorri behar izaten zutelarik emaileak gizartean hartzen zuen lekuarekin ; adibidez, apez-pikuei zilarra oparitzea bazegokien ezingo zuten urrezkorik oparitu. Deccoruma zaintzeak edo egoki izate horrek zeukan zailtasuna era honetara areagotzen zen Elizabethen kasuan : Elizabethen ama zendua Ana Boleyn izan zen, adulterioagatik kondenatua eta exekutatua izan zen. Hamaika urteko neskatoa zen Elizabethek oso gaitz izan zuen Gabon Zaharretan saritzat zer hauta jakitea : alde batetik iturri ofizialek sasikumea zela esaten ziotelako — argudioa honetara dator : bere ama adulteroa baldin bazen, erregea ez zen popertza bere aita izango, beste edonor izan zitekeen, eta beraz ez zen printzesa—, baina bestetik, bere burua sasikumetzat ez bazuen jotzen, bere aita Erregea zen eta Erregina bere amaordea ; alaba gaitzetsia, baina erregina-ren alabaordea eta printzesa, hala ere. Beraz, gabonsaria hautatzearekin bere burua definitzen eta ezagunera ematen zebilen.

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13 Ingalaterrako egoera ideologiko-politikoaz jardungo dut hurren. Ezagun denez, Henri VIIIa Anglikanismoaren fundatzailea izan zen. Anglikanismoa Katolizismoaren aldakia baitzen, erregea eta bere agindupe-koak dendatu ziren doktrina kontuetan Erromatik lar ez urruntzen, eta oso gogor aritu ziren heretikotzat jotzen zen bestelako erreformismoa zapaltzen7. Aitzitik, orduko erreginaren gortean, Catherine Parrenean, Erreforma ageriago ala ezkutuago, babesten eta bultzatzen zen. Ingalaterran, areago gabiltzan garaitik aurrerantzean, hiru gorte zeuden, erregearena, erreginarena eta Walesko printzearena, bakoitzak bere botere eta eragin ingurua zuelarik. Hortaz, orduko erreginak ere bere gortea zuen, eta gorte hori erreformista zen, nahiz eta erregearen gortea katoliko anglikanoa izan. Guztiarekin ere, Erreginaren babesa gorabehera, Balek, gure autorearen editoreak erbestera joan behar izan zuen. 14 Noan azaltzera orain zein den Elizabethek testuarekin zeukan harre-mana. Ana Boleyn, Elizabethen ama, Henri VIIIaren emazte eta, honez, Ingalaterrako erregina izan baino lehen, Henri zortzigarrenaren arrebaren gela laguntzailea edo azafata izan zen, hura Frantziara ezkondu zenean Margaritaren nebarekin, François Frantziako erregearekin alegia. Dirudienez Ana Boleyn eta Margarita lagun minak izan ziren, bi-biok baitzituzten kezka erreformistak. Margaritaren sasoietan, Elizaren ustelkeria eta honen errefor-maren beharra hizpide arrunta zen intelektualen artean, beranduagora bilaka- tuko zen sarraskietarako atxakia. Margaritak testua idatzi zuenean Sorbonak hasieran galazo egin zuen hura argitaratzea, gero baina, Maroten bitarte-kotzaz, baimendu egin zuten. Litekeena da Margaritak kopia bat Boleyni erregalatu izana, eta halan, urteak aurrera, Elizabethek amaren liburutegian aurkitzea. Emakumezkoek egin ohi zituzten bezuza tipikoak brodatuak izaten ziren : hariaren kalitateak eta erakutsitako « kaligrafiak » ispilatu beharko zuen damaren gizarte maila. Brodatuaren pareko izango zen Elizabethek egingo zuen itzulpena. (Nota bene kritika feministarako, josi- idatzi erlazioa alfabeti-zazioarekin eta ekoizpen kulturalarekin loturik). 15 Beraz, Elizabethen Gabonsari hautaketa ezin hobea izan zen, Margaritaren testua protorreformista izanik, Parren gustukoa izango zelako, eta beste aldetik, itzulpena bete-betean sartzen zenez hezkuntza humanistan, Elizabeth esaten zebilelako bera ere

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bazela gauza erregina izateko, edo behintzat formazioa bazuela jesarleku horretarako. Gainera, bere etxeko libu-rutegian aurkitutako eskuizkribuaren bitartez Margarita aiputan hartzeagaz, iragan Frantsesa inbokatzen zebilen eta horrekin bere balizko indar politikoa, hain zuzen, Gisatar katoliko fanatikoen kontrakoa izan litekeena, Nafarroa etxean babesa harturik.8 16 Testu honen nabarmentasunerako beste arrazoi bat egileak sortu zueneko baldintza historiko eta biografiakoetatik atera daiteke, batez ere irakurketa feminista egitekotan. Margaritak bere borondatea murriztu eta mozturik zuen alde bitatik : bere neba Frantziako erregea zen, François I Valoisko, eta bere senarra Henri Labriteko, Nafarroako erregea. Margaritaren lekua, esateko, hegi bikoa da, arreba den aldetik bere nebari bidea eman behar diola irakatsi baitzaio, eta emazte den aldetik, bere senarraren « laguntzailea » izaten. Gogoan izan beza irakurleak Nafarroako erresuma, geografia ezabatua zen aldetik, Europako « nazio » berrien eta botere absolu-tistaren eraketarako argudioen guda-zelaietako nagusienetakoa zela, eta beraz, zein posizio argalean zegoen Margarita (eta, hala ere, zenbatetan ez ote zen bera egon bitartekari nazioarteko arazoetan).9

17 Testuaren iturriei nagokiela, hiru aldaki izan ditut begien aurrean : 1/ Ingalaterrako Elizabeth I erregina izango zenak hamaika urte zituela eginiko ingeles itzulpenaren autografoaren edizio gaurkotua Marc Shellek paratua (1993) Elizabeth's Glass. 2/ Balek 1548an argitaratu zuen itzulpenaren lehen edizioa A Godly Medytacyon of The Christen Soule izenarekin. Lehen edizio argitaratu hori Brown Unibertsitateak egindako edizio elektronikoaren bitartez lortu dut ; edizio hori « Women Writers Project » en dago The Renaissance Women Online Collection orrian. (Ikus bukaerako erreferentzia bibliografikoak). 3/ Le Miroir de l'âme pécheresse jatorrizko frantsesa XIX mendeko edizio batetik atera dut : Early Modern French Women Writers bilduman Minnesotako Unibertsitateko Electronic Text Research Centerrek (ETCR) berriro argitaratu zuena. (Ikus bukaerako erreferentzia bibliografikoak). 18 Beraz, bi itzulpen eta jatorrizko bat. Hiru testu horietatik nik aipatu dudan lehenari jarraitu diot batik bat (1993koari alegia). Bilaketa konputeri-zatu zenbaitetarako 1548koari begitu diot. Eta azkenik, jatorrizko frantsesa azpian izan dut interpretazioak fidelak ote ziren egiaztatzeko.

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19 Zeren nabilen edukiaren oinarriko egiturari begitutzen, testu aniztasun honek ez luke arazo larregirik sortu behar, bestera baino, dugun testuaren ulertzea aberastu beharko luke. Oinarrizko testutzat ingelesezko eskuizkri-buaren edizioa darabildanez, artikuluaren gorputzean ageri diren aipuak edizio horretatikoak izanen dira. Alabaina, ia beti dakartzat edo frantsesezko jatorrizkoaren hemeretzigarren mendeko edizioa edo ingelesezko lehen edizio inprimatua, neure erruz leudekeen txarto ulertuak zuzen daitezentzat.

2. Ethos : Emakumea eta San Augustin

20 Aristotelek bere Erretorikako lehen liburuan azaltzen du nola pertsua-siorako indarra edo burutara emateko indarra hiru alderditan jar daitekeen10. Hasteko, igorlearen aldean11 hemen hizlariaren irudi edo autoritatea edo ethos-a lantzen da. Horixe egiten da, adibidez, egunkarietako albisteen hasie-ran berri agentziaren izena aipatzen denean, Agencia Efe edo dena delakoa. Bigarrenik, indarra mezuan bertan edo logos-ean jartzen denean, esaterako egunkarietan informazioak berri objektibotzat ematen zaizkigunean, halan direlakoan, hots, entzuleria unibertsalari zuzenduak balira bezala12. Eta hiru-garrenez entzuleriaren iritzian edo pathos- ean oinarritzen denean pertsuasio-rako indarra, iritzi artikuluetan « denok dakigu » bezalako formulekin lortzen dena, kasurako. Orain bada, Margaritak zelan eraikitzen duen bere ethos- a behatuko dugu.

21 Margaritak aitzinsolasean dio lanaren egilea emakumea dela, zientzia-rik eta ezagutzarik bakoa, desioaz baizik ez horniturik.bUstezko apaltasuna-ren topikoaz gain —CAPTATIO BENEVOLENTIAE arrunta dirudiena—, ohar gaitezen ezagutza eta desioa elkarri kontrajarrita aurkezten dituela. Alde batetik, testuan bada generoagazko lotura inpliziturik : desioa femeninoa da, eta ezagutza, berriz (nahiz eta kasuan bezala absente egon) maskulinoa. Halan da ze emakumeak desioa daukala, eta aldiz gizonak ezagutza behar lukeela. Lehen pauso honetan autoreak geure sinpatia bereganatzen jardun du ; hurrengoarekin bere autoritatea eraikiko du. 22 Dio autoreak gizonak ez duela ezaguerarik, hain zuzen fedea norbera-ganatu baino lehen ez baitago ezagutzarik lortzerik. Hementxe dator kritika feministarako interesgunea, hain zuzen fedea lortzeko desioa behar delako, eta desioa, gero ikusiko dugunez, nolakotasun femeninotzat joko duelako testuak. Autorearen deskripzioan, jakituria edo egiaren iturri bakarra jainkoa da, baina gizonak ez dauka bereganatzeko edo jasotzeko jarrerarik, emaku-meaz bestela (eta hemen generoen portaera-rolez gain,

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tartean daude, halaber, genero horiei harreman sexualetan suposatu ohi zitzaizkien rolak ere). Beraz, gizonak egia jaso ezin duenez, egin lezakeen gauza bakarra egiaren birmol-daketa da, hots, erretorikan jardutea. Halan da ezen, autoreak rhapsodo ezja- kinaren papera harturik errebelazioa egin zaion profetaren gisa azalduko zaigula. Fedea hiru mailatan iradokiko du autoreak : maila sexualean, jakintza mailan eta maila erlijiosoan : hiruretan, fedea desioarekin berdinduz gero, harrera aktibotzat jorik. 23 Orain goazen astiroago izenburuan agindutako San Augustinen testuingurura. Margaritak baieztatzen du gizonak Fedea baino lehenago ez duela « ontasunaren ezagutzarik, Jainkoaren botere eta jakituriaren berririk. Egia ezagutu bezain laster, orduantxe du [gizonak] bihotza maitasunez eta karitatez beterik » : « ...knowledge of the goodness, of the wisdom and of the power of God. As soon as he knoweth the truth, then is his heart full of love and charity. »c 24 Bertute augustindarrak — fedea, itxaropena eta karitatea, (edota paulindarrak, filologiak zuen erreformisten testuinguru historikoan pertinenteagoak izan litezke eta) — testu osoan zehar ageri dira. Honen aurrean badira gogoan hartzeko hausnar-bide garrantzizko bi : alde batetik erretorikak edo antzinate greko-latindarreko tradizio literarioko erlazioek kristau tradizioan lituzketen kideak eta, bestetik, hermeneutika abiagunea izendatuko dudana, hots, zelako jarrera izan behar duen testuari hurbiltzen zaionak.13

25 Harreman erlazioen kidetzea : ÆQUALITAS

26 Eragin paulindarrak alde batera utzirik, nire abiapuntuko suposamen-dua da San Augustinen bertute teologikoak eurenez kontzeptu erretoriko batzuen moldaketa direla, izan. Har dezagun ÆQUALITAS kontzeptua, konpa-razioa denez gero, antonomasiazko erlaziotzat jo baitezakegu. Cicerok bere TopicanÆQUALITAS kontzeptua hiru erlaziotan zatitzen du : pietatea edo zeruetako jainkoekiko erlazioa, errespetua edo joandakoen izpirituekikoa, eta justizia edo hauzutasuna edo gizakien artekoa. Hirukote hori erraz berrantola daiteke honetara : fedea : azpikoagandik goikoarenganakoa, karitatea : goikoarengandik azpikoarengana, eta, esperantza : berdinen artekoa. 27 Ohar gaitezen nire kidetzea ez dela guztiz biribila. Erretorikako hiru-kotean ekile bakarra gizakia zen. Hirukote kristauan agentzia alda daiteke baldin eta hierarkia errespetatzen bada. Bestela esateko : berridazketa kris-tauan azpiko maila sortu da, eta goiko maila, berriz, soildu. Dena den, testu honen arazo nagusira artez garamatzan kontu inportantea zera da, pietatea desagertu egin dela, hain zuzen irudi katolikoetan Mariak pertsonifikatuko duena14. Cicerok eman berdintasunaren definiziotik gure bigarren kidetzera dagoen aldea hauxe da : fedeak pietatea ordezkatu du15. Orain noan seinala-tzera testuan dauden harreman-funtzioak : arimaren fedea jainkoarenganako, graziaren emaria eta Jesusen karitatea arimarenganako. 28 Horiexek dira arima-jainkoaren arteko hartu-emanen arauak testuan. « Harreman funtzio » terminoarekin bi agenteen arteko hartu-emanen kontzeptualizatzea adierazi gura dut. Hartu-eman horrek bakoitzaren funtzioa definitzen du erlazioan bertan, eta/ edo kide batengandik bestearengana truka daitekeen objektuaren nolakotasuna. Kasu honetan objektu bezala kontzeptualizatzen den trukaketarako gaia grazia da, objektu

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hori jasotzeko hartzaileak erakutsi behar duen jarrera fedea da, eta objektu hori ematen duenak bere azpikoari erakusten dion jarrera karitatea da.

2.1. Abiagune Hermeneutikoa : fedea-desioa

29 Augustinek bere Kristau Doktrinan Eskrituren ulerkuntza sinpatiko-rako, hots, Eskriturak irakurri aurretik noraezeko den gogo-jarrera lortzeko, arako bertuteak proposatzen ditu : fedea, esperantza eta karitatea16. Margaritak ere berdin, gogo- bihotzen argitze jainkotiarrari loturik darabiltza beti bertuteok, hau da, bestela ulertezina zatekeen ezagutzari loturik. Lehen aipatu testukira itzultzeko, badakusagu zelan genero biak ala biak ere ezjaki-nean dauden baturik, eta elkarrekin harremanetan jarriak fedea dela medio ; fedeak ematen baitu ezagumendua. Labur esan, gizona erretorikaren jabe da, baina ez du ezagumendurik, emakumeak, berriz, ez daki erretorikarik baina desioa dauka. Desioak azpian daukan irudi-eskema17 ontziarena da : bada iturburu bat, desiratutako gaia isurtzen duena, eta bada hartzaile bat, desira-tutako gaiaz betetzeko prest dagoena. Bestalde, emakumeari sexu harrema- netan egotzi izan zaion rola hartzaile (pasibo)arena izan da. Desiratzea objektu bat hartzeko prest eta irrikatan egotean datza ; hortaz, fedea sexualki ulerturik desioa da. Ikuspegi tradizionalean gizonaren rola aktiboa izanik, horrek berorrek eragotzi egiten dio Jainkoaren jakituriak argitua izatea. Margaritak liburuaren hasieran bere generoa aipatzen zuen bere burua apaltzeko, baina hara non arrazoi berberak balio duen oraingoan egilea goresteko.

30 Testua hasi bezala bukatzen da, Jainkoaren maitasuna ulertzeko edo adierazteko idazleak duen ezintasunaren gaineko hausnarketa erretorikoarekin18. Augustinek esaten zuen ebanjelizatzailearen elokuentzia edo etorria nahikoa ez zenean, erretorika libururik onena Biblia bera zela, eta beraz gomendatzen zuen hura buruz ikasi eta hango hitzekin hitz egitea, zeren Bibliak izan behar baitzuen inon den erretorikarik egokiena edo audientzia guztiei « egokituena » (Septuagintaren azalpen mitikoa)19. Beraz, Margaritak ere berdin egingo du : « Ez dut ezagutzarik (...) Adierazteko biderik ez (...) », baina, halan eta ere « zeren hain nagusi onaren ontasuna isilduko lukeenak bekatu egingo bailuke..., erdu, beraz, nigana O Paul zorionekoa... ». « I have no knowledge (...) The impossibility of the declaration (...), » but yet « ...for he that would hide the goodness of so good a master should commit a sin...Therefore come, O happy Paul... »d 31 Edolan ere, autoreak hasi bezala eman dio amaiera aitzinsolasari, maitasuna eta « desiratzeko esperantza » ezein gizonen jakituriatik bereiztuz eta aldenduz : « ...gure bihotza, maitasuna eta esperantza bultza ditzagun desiratzera inongo gizonak ikusi, igarri edo pentsatu ezin duen hori... » « ...to draw our hearts, love, and hope to desire this which no man also can either see, feel, or think... »e 32 Labur dezadan : heuristikaren aldetik, INVENTIO edo sorkuntzaren aldetik alegia, bertute agustindarrek eta topikoek eginbehar bertsua dute. Topikoak argudioen jesarleku izendatu ohi ziren ; (filosofia edo lege) arazo baten inguruan argudioak bilatzeko hausnar-bideak izan ohi ziren. Topikoek hermeneutika edo interpretazioaren aldetik (legea) desanbiguatzeko balio zuten ; hots. testuko balizko kontraesanak argitzeko. San Augustinen bertuteek ere berdin egiten zuten —nahiz eta iturrien trantsitibitateari buruz ez dudan baieztapen zehatzik egin, Cicero dut gogoan— baina, autoritatearen kontzeptuarekin loturik, bazuten ordain moralik. Zuzen interpretatzeko testuari

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erabateko autoritatea aitortu behar zaio eta irakurleak bere burua testuaren azpitik ezarri. Horrela irakurleak sortu dituen hipotesiak testuaren hurrenkerak arteztuko dizkio, testuan bertan ez baitago kontraesanik, eta txarto ulertuak irakurlearen erantzukizuna baitira. Testuaren autoritatea onartzeko fedea behar da, esaneko ikaslearena alegia, hartzeko pronto dagoenarena. Sorkuntzaren aldetik ere berdin, idazteko abiapuntua eta argudioen jesarleku edo eragilea karitatea izan behar da ; idatziko dugun testuak baino gutxiago dakien bati irakastea da helburua. Ekintzen munduan ere berdin : gure ekintzak Jainkoaren nahira makurtu behar dira eta horretarako gure borondatea malgua izan behar da (hauxe da erreformazaleek berreskuratu nahi duten kontzeptua). Maila biok, intelektuala edo epistemikoa eta pragmatikoa edo jokaerena, lotuta daude bai « testamentu » hitzaren polisemiaren bitartez, bai kristauen jainkoa jainko intelektual bezala ulerturik.

33 Baina, gure testurako, batez ere Etxeparek aurkezten digun eszenare-kin kontrastatzeko, funtsezko suertatzen zaiguna zera da, borondatearen kontzeptualizazioa bekatuaren arazoari loturik. Hurren ikusiko dugu nola.

3. Epaiketa eszena : legea eta barkamena

34 Sarreran esan dudan bezala, Margaritaren obra osorako metaforasorburu nagusiak bi dira : familiarteko harremanen eszena eta epaiketaren eszena. Metafora sare biok harreman- funtzioaren bidez josi zaizkio elkarri, kontratuaren ideiaren bitartez. Kontratua apurtzen bada, berba jaten bada, bekatua izan zein krimena izan, legea aplikatu egin beharko da. Bai katolikoen eta bai erreformisten ikuskeran gizakiak bere izaeragatik beragatik huts emango du, eta bekatu hori garbitzeko borondatezko keinu bat egin behar du. Katolikoen kasuan keinu hori norabidea adatze bezala kontzeptualizatuko da, ama birjinagana bihurtzea, alegia. Bestela esan, legea hautsi izana barkatzeko mesedea eskatuko zaio Jainkoari Mariaren errukia edo pietatearen bitartez. Bestalde, erreformisten irudian, bekatariak borondatea malgutu behar du Jainkoarenarekin bat etor dadin ; bekatariak bere borondatea Jainkoaren testamentura ekarriz gero, malgutasun horrekin fedea erakusten dio Jainkoari eta hark karitatezko obra bat egingo du gizaki hori salbatzeko graziaren opariarekin.

35 Hori halan denentz ikusteko, zati honetan epaiketaren irudiaren alderdi batzuk aztertuko ditut, Etxeparek eskaintzen dizkigun lorratzei eutsita. Aztertu behar ditugunak hiru arlo hauetan sartuko ditut : zelan kontzeptuali-zatzen dugun legea eta zelan ageri den legea kontzeptualizatuta erlijio testue-tan, zein eginkizun edo rol hartzen duten erlijio testuetako pertsonaiek epai-ketaren eszenan, eta zeintzuk diren aurreko sailean landu ditugun erlazio-funtzioei aplika dakizkiekeen propietateak.

3.1. Legearen kontzeptualizazioa eta azterketa kognitiboa

36 Linguistika kognitiboaren mugimendua laurogeigarren hamarkadan hasi zen20. Eta hasi zen metaforari so eginez, esanez metafora ez zela ez lite-rarioa soilik ez arbitrarioa sortzez, ordea gure eguneroko hizkeran metaforak erabili ohi ditugula oharkabean. Baina oharkabean egote horrek ez dituela desmetaforizatzen ; katakresiak ez dakarrela halabeharrez metaforaren desa-gerpena, metaforaz ez ohartzea baino. Halan da ze hizkuntzalariok heldu zirela erakustera zelan eguneroko hizkerak oinarriko metafora kontzeptualak dituen, zeintzuen bitartez hedapen semantikoa eta polisemia gertatzen

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diren. Oinarriko metafora kontzeptualen azterketa Lakoff eta Johnsonen eskutik etorri zen21. Esan daroadan legez, oinarriko metafora kontzeptualak eguneroko hizkuntzan erabili ohi ditugun kontzeptuen sarea sustatzen duten metaforak dira22. Halaxe erakusten dute honako adierazpideek, esaterako : « ez dut bat ere argi ikusten kontu hori, » edota « azalpen iluna eman zigun » edota « begi-bistakoa da », edota Bermeoko kantan bezala « egije da...neuk ikusi dotelakon », non egia erreferentea begizko ohartzeari lotzen zaion, eta ez entzumenari, adibidez, eta abar23. Adierazpen guzti horien azpian dagoena JAKITEA IKUSTEA DA metafora dugu.24

3.1.1. Zuzena vs. okerra

37 Orain begira diezaiegun legearen eremuan erabiltzen diren berba ez-tekniko batzuei beste hizkuntza batzuetan : ingelesezko « right(s) », edo frantsesezko « droit(s) », edota espainolezko « derecho(s) ». Honek erakusten digu etimologia, polisemia eta hedapen semantikoa (metaforikoki) motibaturik daudela ; har dezagun kontuan zelan dauden loturik bai etimologikoki bai semantikoki directum eta rectus : zuzena, legea eta eskoia. Euskaraz « zuzenbidea » daukagu, baina baita « gizon arteza » edo « gauzak zuzen » edo « bide okerretik doa hori » edo « okerreko samatik » bezalako adierazpideak ere : okerrak eta zuzenak zama axiologikoa daukate, hau da, legea ona bada « zuzena » izango da, eta gure ekintzak txarrak badira « okerrak » edo « makurrak » edo « bihurkeriak » izango dira. Bestalde, oraingoz aipatu besterik ez baina, gorde dezagun gogoan gerorako zuzentasunarekin eta okertasunarekin batera datozela zurruntasuna eta malgutasuna : zuzena denari zurruntasuna suposatzen zaio, eta okerrari, behintzat momenturen batean, malgutasuna. Lotura hauek gero azalduko ditudan korrelazio metaforakaz daukate zer entenidurik.

3.1.2. Bidea eta Legea

38 Aurrekoarekin batera, badakigu euskeraz legeaz jarduteko « bide » esparrua darabilguna. Esate baterako « zuzenbidea », « eskubideak » edo « bidezkoa » egunero erabiltzen ditugun esapide metaforikoak dira. Etxeparek adibidez : « Beccatore guira eta mira eztaquigula / Balinetan vide gabe acusatu baguira ». 39 Nola lotzen diren legea eta bidea arazo korapilotsuagoa da ; alde bate-tik bidea bizitzari lotzea arras arrunta da, behintzat Europako mendebaldean, BIZITZA BIDAIA DA (LIFE IS A JOURNEY Lakoff & Turner 1989) oinarriko meta-fora kontzeptualaren bitartez25 : • Bizitzan helburuak daude, bidaiako helmugak bezala, • Bizitzak hasiera bat dauka, bidaiaren abiapuntua bezalakoa, • Bizitzan gertaerak suertatzen dira, bidaian bezala, • Eta azkenik bizitzan denbora igaro doa, bidaian lekuak igaro doazen legez.

40 Helburuak eta helmugak lotuta badaude, bidea helburu horietaraino heltzeko modua izango da. Beraz, hemendik lotu daitezke bidea eta legea, biak dira zerbaitetarako modu ; bidea « modu » edo « kera » bezala ulertu behar da lehenago, eta legea prozedura bezala, eta biak lotu26. Gure kulturan eta hizkuntzan bizitza bide bezala aditzera ematen digun oinarriko metafora kontzeptuala daukagulako, hain zuzen, uler ditzakegu « bizitza/bizimodu txarra » = « bide txarra » bezalako kontuak. Behin kultura batean legea eta bidea bateraturik egonez gero, biek izan ditzaketen propietateak lotzeko ere jauzi txiki bat baino ez dago : bidea arteza edo zuzena, eta legea ere arteza edo zuzena, bidea okerra edo makurra eta abar. Gainera —eta hau inportantea izango

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zaigu aurrerago azalduko dudan volitioaren esparrurako— bideari eutsi ala bidea uztea borondatezko ekintzak dira. Beraz, « bide » esparruari begiratu ahal diogu testuan diren legeari buruzko metaforak azaleratzeko, eta ikusteko zeintzuk diren termino horren azpian izendatutako kontzeptuak. Etxeparerengandik hartutako adibide batzuk emango ditut, honako esanahi hauek ageri dituztenak : zuzena, aukera, baimena, zilegia, [in]justizia, antza denez27 : • Erregueren aduocatu videzco eta nobleari • Eta orduyan çuc ydaçu indar eta gratia / Beccatuyez vqheyteco vide dudan doluya / Perfectuqui eguiteco neure confessionia / Neure beqhatuyez oroz dudan varqhamenduya • Herri orotan gauça oroz eztu vere paria / Othoyce bat baneguyon larradala eguia / Biderican liçatenez nynzan haren gracian • Hiri eguin vadaraye bidegabe handia / Ieyncoari gomendezac eure gauça gucia / Harc orori emanen dic bere merexituya • Horla erraytia errax duçu erho bocen vadaquiçu / çure pena dioçunoc nonbayt handi videytuçu. • Nic oguenic eznuyela honguiguitez verceric / Bidegabec haritu nu vide eznuyen leqhutic / Erregueri gayzqui saldu guertuz oguen gaberic. • Nic vaycitut offensatu bide eztudan veçala • Nola dugun cerbiçacen hanbat gure exaya /Iangoycua desconoci gure saluaçalia / Eta oroc eçagucen dela videgabia • Pensa othoy nola gauden bi bideren erdian / Salua bano damnaçeco perileco punduyan / Ehor fida eztadila othoy vanitatian • Secretuqui minçaceco othoy bide ydaçu

41 Etxepareren poemak ikertu nituenean, ikasi nuen legea gainditu behar-reko oztopo edo langa gisa ageri dela testuan ; salbaziorako bidea lotuta dago zabaldu edo itxi egiten den atearekin, eta bidean aurki genitzakeen oztopoak bide hori itxi diezagukete : « Orotaric cerraturic daude paussu guciac ». Hau ulertzeko bizitza bidaia bezala hartu behar da, eta bidaiaren bukaeran atea edo itzulinguratu beharreko gunea. Baina ikuspegi osoago bat jadesteko epai-keta horretan Jainkoak eta Mariak eta bekatariak berak zein rol hartuko duten aztertu beharko dugu. Alabaina, hori baino lehenago legearen kontzeptuali-zazioaren azken alderdia ikertu behar dugu.

3.1.3. Zurruntasuna eta malgutasuna : korrelaziozko metaforak

42 Korrelazio metafora Joseph Gradyren Foundations of Meaning doktorego tesitik maileguan harturiko kontzeptua da. Gradyk, linguistika kogniti-boak metaforari eman izaten zion garrantzia eta lehentasunari jarraiki, oinarriko metafora-lehengaiak aztertu ditu bere tesian. Hasteko bereizi ditu alde batetik tradizioan luze eztabaidatutako metaforak (Akile legoi bat da), eta bestetik « inflazioak gora egin du » diogunean, adibidez, azpian legokeen gehiago gora da oinarriko metafora kontzeptualak bezalakoak, zeinetan kantitatea altueraren arabera kontzeptualizatzen den. Zehatzago esan, lehen aipatu ditudan oinarriko metafora hauetarako bi eratako motibazio iturri bereiztuko ditu : alde batetik antzekotasuna —eta era horretara Gradyk gaurko ikuspegitik berreskuratu nahi izan du arbuiatua izan den baina Aristotelerengandik datorkigun tradizio bat—, eta, bestetik, korrelazio meta-forak28. Korrelazioz eraikitako oinarriko metafora gure esperientziaren bi esparru lotzeko gertatzen den metaforari esaten zaio29. Esaterako, « trigonometria total egiten zait aldats gora oso » esapidean, aldats bat igokeran dugun esperientzia eta arazo bati aurre

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egikeran dugun esperientzia lotzen ditugu, eta beraz, mundu fisikotiko adierazpena mundu intelektualari aplikatzen diogu30. Beste adibide batzuk « astuna » edo « latza » izan daitezke, eta abar.

43 Bidearen metaforak salbazioarekin eta legearekin batzandukeran bi tasun bereganatzen ditu : malgutasuna edo biguntasuna, eta zurruntasuna edo urrikalgaiztasuna. Gure kasuan zurruntasun fisikoa sentitzen dugun modua litzateke bestelako zurruntasun moral edo psikologikoak adierazteko sorburua (Grady 1998). Biguntasun eta malgutasunaren kontzeptuak gure eguneroko esperientzian oinarri harturik lotzen ditugu : gauza bat biguna da guk egin diezaiokegun presioari erresistentziarik jartzen ez dionean. Antzera, gauza bat malgua dela diogu gure presioaren pean forma aldatzen duenean. Esperimentu txiki hau egin dezakegu : « hartu nuen alanbre bat, saiatu nintzen okertzen, eta azkenean lortu egin nuen...Zelan zegoen alanbrea nik hartu baino lehenago ? » Erantzun automatikoa « zuzen » izan ohi da, nahiz eta berez alanbre okerra bihurtzen saia nintekeen. Joera hori segurutik formen hierarkia kultural bati lotuta dago : suposatzen dugu hasierako forma zuzena dela, eta eratorria (hots, indar egin eta gerokoa, edo higatua, etab.) okerra. Beraz zuzenak zurruna dakar eta okerrak malgua. 44 Bestalde, « egitarau edota ordutegi malgua » daukagula esan ohi dugu, edota halako eta holako erakundea oso zurruna (edo zorrotza) dela31. Holako adierazpenen oinarriko metafora kontzeptuala, oso maila orokor batean, hauxe da : ERAKUNDEAK EGITURA FISIKOAK DIRA (Grady 1997). Erakunde eta entitate abstraktuak beratasun fisikoaren arabera ulertzeak badu bere parekorik esparru erretoriko-forentsean equitas bezala. Izan ere, Eden aipatu dudanean nioen legez, equitas delakoaren bidez lege orokorra errealitatera makurtu edo kasu konkretuari egokitzen zaio. Justizia kontu-liburu, balantze eta matematikaren arabera kontzeptualizatzen dugu. Ildo horretatik, kontu matematikoen finkotasunari emaitzen zurruntasuna dagokio, eta kontu-liburuaren emaitza epaiketako epaiarekin lotzen dugu, hots, akusatuak jabegoan bildutako bekatu edo krimenei dagokien zigorrarekin. Legea izatez zurruna da (cf. dura lex, sed lex) baina legearen aplikazioa edo egokitzapena —equitas edo hauzutasuna edo berdintasuna, alegia— malgua da, eta berdin errukia, gupida eta barkazioa. 45 « Biguna » Ama Birjinari egotzitako adjektibo tipikoa izango da euskal literaturan ere, cf. J. J. Mogelen « Ama biguna » eta paradigma unibertsalago batean xamur adjektiboa ere. Xamurtasuna ere malgutasunari edo presiopean forma aldatzeari dago lotuta. Hemen gako hitza « sentibera » litzateke, eta ziur aski erreakzionatzearen ideia ere oso lotuta egongo da. Erreakzioa edo erantzunezko portaera sentimenduarekin edo sentibera izatearekin erlazionatzen da ; forma aldaketa, berriz, kanpoko estimulu baten aurreko erreakzio mota bat da, haragi malgu edo xamurraren kasuan bezalaxe. Ezagutzen ez ditudan arrazoiengatik, malgutasuna estuago lotzen zaio forma aldaketari, eta xamurtasuna, aldiz, sentiberatasunari.

3.2. Azken epaiketako Pertsonaien rolak

46 Judizio Jeneralaren eszena nagusietan, ama bigun hori legea gainditzeko bidexkak oso ondo ezagutzen dituen abokatu bilakatuko zaigu. Etxepareren hitzetan ostera ere, « Ceru eta lur ororen erreguina dignia | Beqhatoren aduocata eta confortaria ». Bere funtzioa equitas eta mesedea da, hots, egokitzearena. Orain goazen begiratzera

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sofistikazio handixeagoarekin Etxepareren hurrengo pasarteari, zati honetan pertsonaia nagusien eginkizunak erabat zehazturik ageri baitzaizkigu : Beccatoren saluaceco ieyncoac eguin cinducen / Bere buruya eguin dici iuge iusticiaren / çu misericordiaren refugio cinaden / Nola berac iustician ecin salua liçaque / çure misericordiaz remedia litecen / Balinetan eguiazqui çugana gin valite 47 Etxepareren lerro hauetako metafora-sorburua estasi edo egoera juridiko-erretorikoa da. Bertan Jainkoaren eta Mariaren rolak azaltzen zaizkigu argi eta garbi : aurrenarena epailea, hurrenarena abokatua. Alde batean, Jainkoak bere burua izendatu eta egin du epaile. Bestean, Jainkoak Maria egin du errukiaren (mesedearen) aterpe, eta bere burua epaile. Hori horrela izanik, ez zen ba errazago izango Jainkoak berak, hots, epaileak berak bekataria zuzenean salbatzea halako sotilkerietara jo barik ? Horri erantzuteko, kontuan har dezagun justizia edo zuzentasuna zurruna dela zuzena delako, zeren biguna eta malgua balitz okerra bailitzateke, goian ikusi dugun bezala. Legea zurruna denez, ezin du barkatu, ezin da makurtu, eta barkamena beharrezkoa da salbaziorako. Edozein kasutan, zurruntasuna versus barkaberatasuna bikoteak ematen diguten irudi orokorra kontzeptu oinarrikoago batzuetan datza : • Zuzentasuna errukiaren (mesedearen) kontrakoa da • Salbatzea barkatzea da • Beraz, barkatzea legea ez ezartzean datza • Hortaz, bat salbatua izateko beharrezkoa da legea saihestea • Legea saihesteko modua ararteko baten bitartekotza eskatzea da • Legea bideko oztopo edo langa bezala ikusten da, eta arartekoa berriz, hesi horren itzulingurua nola egin edo legearen gainetik nola pasatu dakiena da (esan nahi baita, hesiaren beste aldera heltzeko, Zerura, segurutik). • Jarduera honetan esku hartzen duten propietateak biguntasuna versus zurruntasuna izan daitezke. Interesgarria da ikustea nola propietate fisiko horiek proiektatzen diren giza ezaugarrietan eta nola erlazionatzen den barkaberatasuna biguntasunarekin

48 Deskribatzea falta zaigun azken pertsonaia bekataria bera da. Goiko testukian oso argi ageri zaigu zein den salbaziorako baldintza : « çugana gin valite ». Esapide horren azpian dagoen kontzeptualizazioa dendatuko naiz argitzen hurren. Har dezagun Etxepareren honako pasartea : O andere gloriosa eta ama eztia / çutan dago beqhatoren sperança gucia | Ni çugana nyatorqueçu beqhatore handia | Arimaren saluacera çu çaquiztan valia. 49 Berriz ere « zugana », hots, adlatiboa eta mugimenduzko aditz bat. Definizioz guraria erakusten duten aditzak lekuz aldatzeko aditzak dira, mugimenduzkoak ; eta hori jazartzen zaio subjektu-objektuaren berezko nola-kotasunari32. Guraria eta norabidez aldatzearen arteko harremana honetara eman daiteke : INTENTZIOA NORABIDEZ ALDATZEA da eta INTENTZIOA NORABIDEA DA.33 Honi loturik esan genezake norabide bezala kontzeptualizatutako intentzioa korrelaziozko metafora dela. Hori sendo baieztatzeko pareko adibideak aurkitu beharko genituzkeen, esaterako IN-TENDERE joera (preposi- zioaz) bideratua bezalakoak alegia.

50 Ikus dezagun beste adibide bat, adlatiborik eta mugimenduzko aditzik erakusten ez duena : çutan dago beccatoren remedio gucia | Sperança ossagarri eta salua-menduya / çuc guibela demaçuna nola vayta galduya / çure gomenduyan dena halaver da salbuya. 51 Alde batetik « gibela » bera badago metaforikoki erabilita —edo, hobeto esan, metonimikoki erabilita, esparru beraren barruan gertatzen baita proiek-zioa—, nahiz

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eta hiztunak holakotzat ez jo : maila fisikoko organoa « atzea » esateko erabili da34. Baina gainera, edozein hiztunek badaki atzea edo gibela eman esapideak « bazter utzi » esan gura duela. Beraz, laguntzarik ez ematea edo atentziorik ez ematea, atzea edo gibela ematea baldin bada, atentzioa ematea gorputzaren aurrealdean egon behar da kokaturik, agian aurpegian bertan (« aurre egin » etab.). Atentzioa zuzen daiteke, eta lotuta egon behar du zuzen daitezkeen zentzuei. Iritzi batean ezingo genuke atentziorik erakutsi zuzendu ezin diren zentzuetan oinarri harturik, usaimenari edo dastamenari loturik, alegia. Ohar gaitezen adibidez zelako esapideetan ageri den « begi » hizkia : « begi ederrak egin », « begiramen» begirune », « norbaiten begira egon » etab eta hauetako zenbaitetan ageri den atentzioari edo zentzu zuzenduei loturiko esanguraren bat. Interesgarriro, atentzioak badu zerikusi etimologikorik intentzioarekin. Beraz : INTENTZIOA NORABIDEA DA, NAHIA NORABIDE ALDAKETA DA, eta ATENTZIOA AURPEGIAREN (EDO GORPUTZAREN AURRE ALDEAREN) NORABIDEA DA. Eta zer egin behar du bekatariak testuinguru katolikoan ? Ama birjinagana bihurtu bideari utziz, eta abar. Intentzioa erakutsiz gero Andre Mariak bilatuko dio zirrikituren bat legeari itzulingurua egiteko, Jainkoa biguntzeko, edo, bestela esanda, mesede edo errukiaren bitartez epaiketa irizpideak aldatzeko.

52 Irudi hau bat dator generoaren bereizketarekin : legea zurruna eta maskulinoa da, eta malgua edo biguna edo errukia femeninoa da. Mirailaren jomugetako bat eskema hau aldatzea izango da. « Helas, Jesus ona ! Ikusten zenuela nire itsutasuna, eta nire beharrean ezingo nukeela gizonengandik laguntzarik izan, nire salbaziorako bidea zabaldu zenuen. O zein ontasun eta eztitasuna ! Ba ote da aitarik alabarentzako, edo bestela, nebarik arrebarentzako, Berak egin duena inoiz egingo lukeenik ? (...) Helas ! Zeuk maite izan duzu. O karitatea, sutsu eta sugartsua, zu ez zara batere laxoa maitatzen ; guztiak maite dituzu, bai horixe, baita zure etsaiak ere, eta irainak barkatu ez eze, zeure burua eskaintzen duzu heriotza, gurutze, neke, min eta oinazean (euren salbamen, libertate eta askatasunaren alde) « « Alas, good Jesus ! Thou seeing my blindness and that at my need I could have no succor of men, then didst Thou open the way of my salvation. O what goodness and sweetness ! Is there any father to the daughter, or else brother to the sister, which would ever do as He hath done ?f (...) Alas ! Thou hast loved her. O charity, fervent and inflamed, Thou art not slack to love ; Thou which lovest everybody, yea, and also Thy enemies, not only forgiving them their offenses but also to give Thyself (for their salvation, liberty, and deliverance) to the death, cross, travail, pain, and suffering.g 53 Testu honetan bide zabalari edo zabalduari buruzko aipua dugu. Kontratu apurtuaren sare kontzeptualean atea itxita dago, eta itxita egon behar da arimak bere duen bekaturako isuriagatik. Baina, kasuan Katolikoekin gertatu ohi zenaz bestera, Jesusek, eta ez Mariak, zabaldu du atea. Holako ontasunerako zioa honetara ematen da : konparatzen dira Jesusen arimarekiko hartu emanak, karitatea dela medio, familia artekoekin : aita alabaganako, eta neba arrebaganako.

54 Ingurune katolikoan Mariaren biguntasunak bekatariaren bolizioa erakartzen zuen, Etxepareren adibidean ikusi dugunez ; beraz, ekintzaren noranzkoa bekatari maskulinotik (defektuz) ama-abokatu-femeninoarenga-nanzkoa zen. Margaritaren testuan, ordea, alde batetik, katolikoen genero rolak aldatu dira —orain maskulinoa goian da, Jainkoa, eta femeninoa behean, arima—, eta, bestalde, ekintzaren abiagunea ere aldatu da. Orain goitik beherakoa izango da, Jesusengan hasi eta arimarenganaino, eta Jainkoaren karitate-maitasuna aita-nebek alaba-arrebei lieketenarekin parekatzen da. Bi kokaguneen arteko erlazio-funtzioa karitatea izateak erakusten du oso dela

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garrantzizkoa erlazio-egituraren mailaketa mantentzea ; hots, familia harremanak jaun-basailu esparruaren arabera ulertu behar direla. 55 Harremanen esparrua birdefinitzeak badakar besterik ere, hots, arimaren eta Jainko- epailearen arartekoak ezabatzea, Jainko-aita-senarrarekiko familia harremanen alde ; berba batean, sarreran esan dugunez, espazio judizialaren pribatizazioa daukagu : « Ez diot inori eskerrik eman beharrik zeuri baino...[ez bakarrik zuk] barkatu dizkidazulako nire bekatuak, baizik eta graziaren opari artez graziatsua eman didazulako ». « I ought to give no thanks for my salvation but only unto Thee... have forgiven me my sins, but also given unto me the right gracious gift of grace. » 56 Ez da bakarrik legea arima batentzat beren-beregi malgutu dena, arimarentzako berebiziko lege-malgutzea alegia, eta hartara salbuespena egin dela (mesedea-errukia), eszena katolikoan gertatu ohi zen legez ; harreman berri honetan trukaketa bat ere badago, hots, bekatuak graziaren truke. Hori azaltzeko ikusi behar dugu senitarteko harremanak zeintzuk diren zalduneria testuinguru batean.

4. Familia harremanak

57 Aurretik argi ikusi dugunez, istorioaren narratzailea arima da —arimaren generoa femeninoa delarik, eta gogoan erabilirik ingelesak posesiboez aterantz ez daukala gramatikazko generorik (euskerak bezala), oso itzultzaile trebea agertu da Elizabeth jatorrizkoa horrela bihurturik—arimak autobio-grafikoki kontatuko dizkigu bere gora beherak35.

58 Esana dago, halaber, Mirailak azpian dituen metafora esparruak bi direla, bata epaiketarena eta bestea familia patriarkalarena. Epaiketaren eszena ez da bere osotasunean inoiz irudikatzen testuan, baina bekatua dagoenetik, batez ere bekatua legearen haustura bezala hartu ezkero, epaia suposatua da ; suposatua bai —eta aipu ugari eginda gainera—, baina margotua ez testu honetan. Zelanbait esan, Margaritaren irakurleek gogoan izango zuten epaiketaren irudia, oso ezaguna egingo baitzitzaien, ez da, ordea, hori Margaritaren asmoa. Berez, Margaritarenean, epaiketa familia esparruaren barruan suertatuko da, arestian aipatu dudan pribatizazioaren bitartez, eta hori posiblea da, alde batetik, familia patriarkala jaun-basailu esparru metaforikoaren arabera ulertuz gero, bekatua legearen haustura izan beharrean, ituna apurtzea legez hartzen delako, otseinak ugazabarekin duen harremana bertan behera uztea bezala hartzen delako. Esatea legez, katolikoen usterako Maria euren ama bazen, erreformisten arimaren ahaidetzea Jainkoarengana hedatuko da : « ze epaiketa ari dira horiek, baldin epailea gure aita baldin bada ! » esanez bezala. Ez zaizkio Jainkoari epaile lanak ukatzen, baina bai legeari leporatzen zaion zorroztasun itsu hori (itsutasunak hain zuzen ez egokitzea esan nahi du, ingurukoak edo zirkunstantziak aintzakotzat ez hartzea alegia). Gainera jaun-basailu erlazioa errazago ekar daiteke merkatal itun batera, eta horixe izango da elestatuko naizen azken eszena. Halan da ezen idazlea zuzenean hasiko dela familiaren esparruan esangura eraikitzen, baina betiere familia patriarkala jaun-basailu botere harremanak kautan harturik. Ikus dezagun nola. 59 Testuaren eman moduak edo hurrenkerak antolaketa honi jarraitzen dio : 1/ Arimak bere burua aurkezten du, (bataioaren eszenan) 2/ Arima bere lagunartearen arabera definituko da, eta (Familia harremanak 1) 3/ Arimak duen jokaera bere lagunekiko eta lagunaren erantzuna bere ekintzekiko. (Familia Harremanak 2)

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4.1. Sendiarekikoak : Jainkoagandik Arimaganakoak

60 Erreskadan eman ditudan hiru ataletako lehenari dagokion poema zatiak arimaren nolakotasuna Jainkoarenarekin erkatuta erakutsiko digu. Lehen parte hori, arimak bere burua aurkezten duenekoa, alde batetik orain arterainokoarekin apur batez landu dugun arren (« Helas, Jesus ona... »), geratzen zaiguna beranduagorako utziko dugu, artikuluaren akabutarako, hain zuzen kontratuaren eszenarako. Hala ere, esan dezadan nahikoa arrunta dela arimaren merezimendu gutxia Jainkoak egiten dion begi ederrarekin erkatzea. Aitzitik, bere osotasunean hartuta, poema honek itzulia emango dio eskema horri, eta arima goratuta lotuko da hain zuzen Jainkoarekin dituen harremanetan oinarriturik, hurrengo arauri jarraituz : zenbat eta maila altua-gokoak izan zure « ezagunak » halan eta maila goragokoa izango zara zeu ere. « Laguna » sen- ide bezala ulertu behar da testu osoan ; lagunak, garai horretan, maila sozio- ekonomikoekin daude lotuta, zelako maila halako lagunak, eta, atsotitzak dioen bezala, kontrakoa ere bai, hots, lagunek ematen dute maila eta prestigioa. Beraz, testuan ageriko diren Jainkoaren ekintzek Jainkoaren ontasuna erakusteko ez ezen, arimaren estatus soziala azpimarratzeko ere balio izango dute.

4.1.1. Ohorea eta endogamia

61 Aristokraziaren endogamia ohoreari buruzko kontzeptuaren ondorioa baino ez zen. Malinak (1993) azaldu bezala bi ohore mota zeuden : metatu ahal zen ohorea edo eskuratua eta metatu ezin zena edo jaiotzatikoa. Gizonezkoek ohorea metatu ahal zuten izen onarekin batera, itzalaren bitartez, ekintza gogoangarrien bitartez eta abar. Horrek luzarora diru iturria ere handituko zuen, baina printzipioz dirua eta ohorea ez zeuden guztiz lotuta. Metatu ezin zen ohorea bat jaio zen familiaren itzalari lotua zegoen. Emakumeek azken mota hau bakarrik zuten, eta ohore hori, nolabait esan, euren himenean zegoen kokatuta. Emakumeek ohorea galdu baino ezin zutenez egin himena urratzearekin batera, saiatu beharko ziren ohorea galtzen eurek baino ohore handiago zuen norbaitekin, baina noski, behin gizonak aginduz gero jabe egingo ziola damari, hau da, aginduta bere ohorean damak ere parte izango zuela. Malinak errekurtso iturri mugatuko gizarte Mediterraneorako azaltzen duenez, hura « gora » egiteko moduetako bat zen, ezkontza politika alegia. Ondorioz, emakumeak edo euren familiaren baitara ezkontzen ziren —ohore kantitate berari behintzat eusteko—, edo goragoko mailetarantz begira jartzen ziren « humanitatea » edo « kondizioa » hobe- tzearren. Mailarik goren gorena erregea zen, aita izena eraman ohi zuena (horregatik goi mailako handikiek euren artean mintzatzean « anaia » edota « ahizpa » eta abar erabili ohi zuten).36

62 Halaxe azal daitezke Margaritak erakusten dituen endogamiako edo intzestuzko harremanak : arima, emakumezkoa den aldetik, dendatzen ari da bere jaiotzatiko ohore kantitatea erakusten, bere « odolaren balioa ». Arimaren ohorea berreskuratzeko bideak Jainkoarekin dituen hartu-emanetara eramango gaitu, arimak litekeen eta harremanik estuena daukala litekeen eta izakirik gorenenarekin. 63 Sendiarekiko harremanei aipua goiko testuan, aitak alabari edota nebak arrebari dion maitasunaren konparaketan mamitzen zen : « Ba ote da aitarik alabarentzako, edo bestela, nebarik arrebarentzako, Berak egin duena inoiz egingo lukeenik ? » Oraingotan berriz, bigarren aldian, zenturioi erroma-tarrak Jesusi etxera joateko eskatzen zioneko aipu

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Biblikoarekin batera datorkigu. Berriz ere, dikotomia merezi dena vs. jasotzen dena erkatuz lortzen da ; merezi dena ezezagun bati legokiokeena da, eta jasotzen dena, aldiz, etxeko bati emango zitzaiona ; honen helburua ekintza Jainkoarengandik abiatzen dela esatea da. Kontura gaitezen testuki honek karrajo edo igarobide lanak egingo dituela, alegia pribatizatze prozesu honetan oraindik ere badela bitartekorik — zenturioiak bere semearen ordez hitz egiten du—, eta Jesus ez dela oraindik etxean hartua, hots, oraindik arima-Jesus harremana ez dela zuzena, azken emaitzan izango den legez. Hala ere, etxerakotzeko ahalegina Jesusek egin beharko du : « zeren nahikoa izan beharko bainuke (halako arris-kutik atera naizelarik) arrotz bati bezala zuzendua izan nadin ; aldiz, zuk ama, alaba, arreba, eta emazte gisa erabili didazu arima (hala esatera ausartu banadi) ». « For it should suffice me (I coming out of such a danger) to be orde-red like a stranger ; but Thou dost handle my soul (if so I durst say) as a mother, daughter, sister, and wife (117.orr.). »h 64 Margaritaren bigarren zatiari buruz goian eman dudan ezaupide hura ardatza da : arima goraltxatuko da Jainkoarekin dituen harreman eta tratuak direla bide. Areago, arimak ohorea eskuratu du Jainkoak berak arimari erakusten dion jokamoldeagatik, arima Jainkoak ama, arreba, alaba eta emazte balu bezala tratatuko baitu. Horregatik dator Lukas 15 hurrengo para-grafoan : « Ni, Jauna, ogia eskatzeko on ez naizena, ez eta zure bizilekua den leku goreneko atera hurbiltzeko ere ! O zer-nolako grazia den bat-batean zuk niri adeia egin eta nire arima hain gora eramatea, non nire gorputzaren jabe sentitzen den. Pobre, ezjakin eta ahula izanik, ene arimak zurekin aurkitzen du bere burua, aberats, jakintsu eta sendoa zaren horrekin, zure izpirituaren erroilua eta berba santua idatzi dituzulako haren bihotzean, (...) eta horrek zure semeaz ernaldu du ene arima... Horrenbestez, ontzat duzu ene arimari ziurtatzea zure semearen ama dela, zu zeu aita bakar zaituen semearena ». « I, Lord, I which am not worthy to ask bread, to come near the door of the right high place where Thy dwelling is ! O what grace is this, that so suddenly Thou vouchafest to draw my soul in such highness that she feeleth herself the ruler of my body. She, poor, ignorant, and lame, doth find herself with Thee rich, wise, and strong, because Thou hast written in her heart the roll of Thy spirit and holy word, (...) which thing made her conceive Thy son... Therefore dost Thou vouchsafe to assure her that she is mother of Thy son of whom Thou art the only father (1 18.orr.). »i 65 Erlazio espazioaren edo erlazioak gauzatzen diren espazioaren definizio berria poemaren lehen zatian hasi zen. Jainkoa bizi zen lekua aipatzearekin, gora, eta konparaturik arima bizi zen lekuarekin, behea. Kautan hartze-koa da ogibidea, eginkizuna. lantokia eta lekua antzeko kontzeptuak zirela ; batek lanbidea zuen jaiotza lekua eta mailaren araberakoa. « egoera » bat zen. Gainera bizilekuak (dwelling-demeure) kasu honetan sunda edo kutsu mari-talak edo ezkontzazkoak ere baditu. Horri erantsi behar zaio « lzpintuaren erroilua » arimaren bihotzean idaztea sexualki ulertu behar dela ; gura horren hartze femeninoak (hau da, fedeak) Semea ernatzea ekarri zion. Goazen asti-roago.

66 Zati horretan, esan genezake gizakiari buruzko kontzeptualizatukeran bi kontzeptu- sistema daudela elkar gurutzaturik. Bata gorputza/arima dikoto-mia platonikoa da, poema osoaren planteamenduak edo hari narratiboak dakarkigun bezala, bestea bibliatikoa da, gizaki eta Jainkoaren trebetasun kognitiboak hiru alderditan banatzen dituena : ulermena —bihotz-begiak, edo Aita—, komunikazioa —belarri-ahoak, edo Semea—, eta ekintza —eskua, oina, atzamarra, zakila... edo Gogo Zaindua— Malinak

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1993an azaldu bezala (Ikus beherago). Elkar gurutzaketa hau Nahasketa Espazioan edo Bateraketa Espazio Mentalean agitzen da, Turnerrek eta Fauconnierrek 1994tik aurrera eman legez (ikus beherago). Jainkoaren kontzeptuak hiru kontzeptualizatze bide horiotatik —ulermena, komunikazioa eta ekintza— osagarriak bilduko ditu, alabaina Jainkoaren kontzeptua ez da horietako bakar bat ere. Pasarteak bi esparrutatik hartuko ditu osagarriak. bai esparru biblikotik eta bai esparru platonikotik. baina. berriro ere, era zehatz batera nahasturik dauzka esparruok, eta era hori ez da ez platonikoa ez biblikoa. Orain begiratuko diegu trinkoegi aipatu ditudan bi ardatzoi banan-banan, lehenago antropologiako ikarrari eta gero kognitiboari.

4.1.2. Gizakiari buruzko irudia Biblian : organoetatik ahalmenetarako bide metaforikoa

67 Malinak (1993) diosku gizakiaren eta munduaren arteko elkareragike-taren eremuaren mugak modu metaforikoan deskribatzen direla, giza gorputzaren atalen bidez. Bihotzaz pentsatzen dugu (cf. gaztelaniaz concor-dia, recordar, acuerdo, cuerdo. denek dute latineko cor =bihotza etimoa azpian) eta begiek informazioa ematen diote bihotzari ; ahoa daukagu berba egiteko, eta belarriak besteen hizketa jasotzeko ; oinak eta eskuak, berriz. gauzak egiteko. Modu abstraktuagoan, gizakiak ingurunearekin daukan elka- reragiketa hiru eremutan banatzen da, Eremuok elkarren mugen barruan sar daitezke, baina ondo bereizten dira bata bestetik : alderdi emotibo-kogniti-boa, adierazpen- diskurtsoaren alderdia, eta ekintza-helburuen alderdia. Biblian. gizakiek borrokan dihardute ingurune fisiko eta sozialean euren lekua lortzeko ; borroka hori euren erreakzio barru-barrukoen arabera antze-maten da (begi-bihotzen bidez), hizkuntzaren bidez adierazten (aho-be-larriez) edota kanporako ekintza bihurtzen (oin-eskuez).

68 Malinak, Testamentu Berrian beste kasu interesgarri bat aurkitzen du. Oraingoan azpiko motiboa Jesusen esperientzia da, eta Jesusek Jainkoarekin daukan harremana. Jesusek Aita deitzen dio Jainkoari, hots, Ugazaba. Pasarte askotan ematen zaigu Aitak egiten duenaren berri, eta bertan ikusten dugu Aitak hiru eremu horiexen arabera betetzen dituela Jainko zereginak. Hala ere, zenbait pasartetan Jesus Aitarengandik bereizten zaigu. Seme den alde-tik. eta halakoetan Aita begi-bihotzen eremu gisa azaltzen da.37 Areago : Jainkoa den aldetik, Jesus, Seme gisa, Aitaren agerpidea da ; Aitaren agertze hori aho-belarrien arabera deskribatzen zaigu. bete beharreko Hitza dugu. Alabaina, gizona den aldetik, Jesusek hiru alderdiak ageri ditu, edozein giza-kiren moduan. Bestela esanda, Jainkoa den aldetik Aitaren ahoa da, eta hiru alderdiak dituenez gero, gizakia ere bada. 69 Azkenik, oin-eskuen alderdia Jainkoari aplikatzen zaionean Izpiritu Santuari dagokio beti-beti. « Spiritus » berbak haizea esan nahi du. antzinateko energia iturririk garrantzitsuena, giharren indarra alde batera utzita. Haize santuak jarduera. ekintza. eraginkortasuna adierazten du beti (« Jaunaren eskua eurengan zegoen lErregeak 18:46, etab. Jesusek Jainkoaren atzamarraren bidez egiten du ona, suzko mihiak hitz egitearen faktitiboa dira). Malinaren ustez garai hartako fisikaren arabera, haizeak, urak eta suak isurkien ezaugarriak zituzten. Beraz, Izpiritua isuri egin zitekeen, eta, hartara, gizakien ahalmenen hiru alderdietan zabaldu bere eragina, ez bakarrik oin-eskuetan. Laburbilduz. kristautasuneko Jainko Hirukoitzaren sustraiak hemen azaldutako kulturaren hiru alderdien ereduan daude. Nolabait esan, gizakiaren osaeraren modeloa Jainkoaren esperientziari aplikatzen zaio, eta, areago. Biblian azaltzen diren

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jainkozkotasunaren ideiek, oro har, gizakien gogo eraikuntzaren hiru alderdien ereduan dauzkate erroak.38

4.1.3. Metafora kontzcptualetik bateraketa teoriara (Blending Theory)

70 Lehen esan dudan bezala, linguistika kognitiboak metaforaren ikerke-tari ekin zion, ustez ezen horrela gizakiaren pentsatzeko mekanismoak idoroko zituela ; hots. metaforek, batez ere eguneroko hizkuntzan ageri ohi ziren oinarriko metafora kontzeptualek, zerbait esaten ziguten gizakiaren gogoaz. Azterketa egiterako metodologikoki bi arlo edo eskupe (« domain ») postulatzen ziren : sorburua eta xedea. Halan esan nezake « burtsa mariagora dabil » ; metafora horretan iturria edo sorburua itsasoa da eta xedea burtsa ; itsasoak gora egiten du sei ordurik behin, eta burtsako akzioek garestitu egiten dira honenbestero : garestitze hori garaiera bezala ulertzen dugu lehen ikusi dugunez korrelazio metafora delako (kantitatea altuera bezala ulertzea) ; gainera inplikazio batzuk ere badatoz sorburutik xedera. hots, burtsak isurki-tasuna edo egonkortasunik gutxi izatea, edo behintzat akzioen balio gora eta behera ibiliko dela beti, eta holakoak. Horrez gain, nire hizketakideak are gehiago gara lezake metafora. urrats bat aurrera eta erantzun « bai baina zure diru ttanttak oraindik sikutan dituzu » eta horrela esaten dit nik karuagotan erosi nituela ditudan akzio apurrak eta oraindik ez dudala dirua berreskurat-zeko garaia. eta abar. Aldiz. ezingo nuke ulertu egitura horretatik kanpo gera zitekeen beste edozein « metatbra ». adibidez, « bai baina txaparrada datorkizu eta ez dira mazopak gero ». sorburu berari dagokion arren ez zaio egokitzen gertaeraren topologiari eta. hartara. ulertezina da.

71 Metaforak aztertzeko eredu hau ondo zegoen sorburuko egitura eta topolo-giak ondo zetozenean bat xedeko topologiarekin. hots, egituraren proiekzio analogiazkora mugatzen zenean. Arazoa sorburuko arloko egitura eta xede-koa desberdinak zirenean zetorren baina, eta are metafora sorberriak bere eskuko egitura sortzen zuenean. 72 Aurreko ereduaren muga deskriptiboak erakutsi zituzten adibideetako batzuk hauexek izan ziren : « You are digging your own financial grave » (literalki « zeure finantza hilobia ari zara egiten ») eta « this surgeon is a butcher » (« zirujau hori harakina da »)39. Har dezagun azken adibidea ; iturria harakina da eta xedea zirujaua eta esan nahi dugu zirujau hori oso baldarra dela eta « sarraskiak » egiten dituela. Baina berez harakina ez da bere lanean baldarra ez zantarra, fin fina izan daiteke. Orduan nondik datorkigu harakin bezala ezagututako zirujauaren baldartasunak eta abarrak ? Berez sortzen den egitura batetik ; eta non sortzen da egitura hori ? Ba nahasketa espazioan. Espazio hauek erdiko espazio mentalak edo gogo espazioak deitu ziren Fauconnierren lanaren ildotik. Beraz. nahasketa espazioa edo bateraketa espazioa (« blending space ») gogo-espazioa da, espazio horrek informazioa ekartzen du beste bi (behintzat) sarrera espazio mentaletatik, baina bere eskuko egitura kontzep-tuala sortuko duelarik.

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Lehengo sorburu-xede terminoen ordez orain sarrera espazioak ditugu. Gainera laugarren gogo espazio bat ere izango dugu espa-zio orokorra edo generikoa deritzona. 73 Lehengo eskupe edo arlo (domain) terminoaren ordez orain gogo-espazioa daukagu. Gogo espazioa lekuan lekuko ulermenerako eraikitako kontzeptu mataza txiki samarra da. Gogo espazioak pentsatukeran eta berba egikeran eraikiz daroatzagu ; elkarri lotuta daude eta alda daitezke mintzaldia garatu ahala (Fauconnier, 1994 [1985]). Adibidez, diodanean « 1991ko Larrunerakoa » gogo-espazioa sortu dut, eta gogo espazio horretan Larrunera joan ginen lagunak daude. erabili genuen beribila, hartu genuen disgustua goian teleferikoa ikustean, egin nuen komentarioa Lourdesko Pic du Jerri buruzkoa, data, lekua eta beste. Horrez gain, « ibilaldi » arlotik egitura part-ziala eskuratuko du, baina « ibilaldi » arloari lotutako ezagutzatik apur bat baino ez da gogo espaziora esplizituki jasoko, bestelako egitura gehigarria defektuz eta jardunbide pragmatikoen bitartez eskuratuko baita. 74 Espazio askoko ereduak sarrera espazio bi izateagaz sorburua eta xedearen ordez, metafora eta analogia baino haragoko mekanismo kontzeptualak ikertu ahal ditu, bestela esan, orokortasun maila handiago lortu du. Erdiko beste bi espazioak, esan dudan bezala hauexek dira : espazio orokorra edo generikoa, zeinek sarrera espazio biotan dagoen egituraren hezurdura dagoen, eta batera-keta espazioa, espazio aberatsa da eta beste sarrera espazioetatik integratzen du aldi baterako egitura zehatza eta lokala. Espazio honek beste bi espazioetatik proiektatu ez den egitura berria sortzen du sarri.40

4.1.4. Margaritaren estrategia orokorra

75 Alde antropologikoa ikusita eta metodologia kognitiboa geureganaturik, itzul gaitezen gure testukira. Alde batetik autoreak zabaltzen du arlo edo eskupe biblikoa zenturioiari egindako aipuarekin (« ogia eskatzeko on ez naizena »). Esparru biblikoa informazio iturrietako bat izango da, hau da, sarrera espazio bat. Jainkoa xedean edo bigarren sarrera espazioan Jesusi dagokio lehen espazioan edo sorburuan, hala ere. konturatu

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gaitezen lehen sarrera espazioan zenturioia eta zenturioiaren semea dauzkagun bitartean xedean arima baino ez daukagula. eta egokitze edo kidetze lanak penazak izango ditugula :

76 Ohar bedi irakurlea berez Bibliako bertako idazleak emana digula oso meta-fora landua : lehenbizi zenturioiak seme gaixoaren ordez hitz egingo zuen, baina eskaera bukatzen dueneko bere buruaz ari dela dirudi : « Jauna ni ez naiz nor zu nire etxera sartzeko baina esazu hitz bat eta osatuko naiz » (ez zen ba semea gaixorik zegoena ?). Berez, ondinokarrenean ere. kideketa ez dut bere konplexutasun osoan eman, zeren guk testuan irakurri duguna « ogia hartzeko ere ona ez naizena » izan denez, eta horrek bultzatu baikaitu lehenago inguru liturgikoa imajinatzera, errito teofagikoa alegia. eta hortik gero esparru biblikora.

77 Gure kulturan bai bekatua eta bai gaixotasuna zikina bezala ulertzen dira ; oinarriko metafora kontzeptual hori daukagulako badakigu « gaixorik » dagoena arima dela, eta beraz kideketa zenturioiaren semea eta arimaren artean ezarri behar dugula. Semea arima baldin bada, semea dagoen etxea zerekin identifikatu eta gorputzarekin. Katolikoen erritoetan komekatzeko orduan esaten dira berbok, ahoa etxeko atearekin identifikatuz eta abar. Zenturioiak bere burua semearekin identifikatzean, eta behin gure gogoan semea arimarekin bateratuta, berehala konturatzen gara zenturioia eta etxea gauza bere direla, hots, gorputza ; zenturioiaren semea eta aita identifikatuz zenturioia eta etxearen arteko metonimiazko lotura lantzen dugu ; esateko, metonimia batek bestea dakar. Hau guztia testu biblikoan bertan emana zaigu, behin testua katolikoen inguru teofagikoan kokatuz gero. Hartara, kontzeptuok bateraturik eclo integraturik datoz testuan integrazioa bigarren aldiz gertatzen denerako, hau da, testuko hariarekin bat egiten dugunerako. 78 Testuaren haria ez da eteten esparru biblikotik esparru platonikora igaro doanean. gorputzaren eta arimaren arteko desberdintasuna jakint/at ematen duenean. Hori da aurretik irakurleak zabaldurik duelako arima-Jainkoaren gogo espazioa, irakurlea

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saiatu baita Bibliako pasartea ordura arteko istorioarekin batera ekartzen. Beraz, ez da bestelako ahalegin kon-tzienterik egin behar, baina ohar gaitezen esparru hori prest daukagula (eta idazleak badaki) behar dugun informazioa hortik eskuratzeko. Idazleak egiten duena oso sinplea da : hierarkiaz dugun ulermena esplotatuko du. Mendetasun ez uniformearen kontzeptua ulertu eta azaltzeko mailaketaren irudia erabili ohi dugu. Altuera boterearen hedadurarekin parekatzen da. Beraz, zenbat eta garaiago izan belauna edo maila halan eta botere botere-tsuagoa. Halan da ze arima Jainkoak beregana daramanez. oso leku garaira doala. eta leku altu horrek botere handia ematen diola (eta honez. gorputza-ren « gainetik jarri da » edo nagusitu zaio). 79 Konturatu gaitezen zati honek zuen garrantzia ideologikoa zenbaterai-nokoa den, eta zein erraz lortu duen idazleak. Guk orain arte daukagun irudia buruan komekatzeko ordua da, hor sinestedunari objektu bat ematen zaio jateko. zelanbait Jesus zenturioiaren etxera doala ; gorputza arimaren ontzia bezala ikusten denez (eta arima isurki bezala), arimara heltzeko, esateko, ontzi horren barrura heltzeko ahotik sartu behar. Margaritaren testuan irudi horren gainetik egingo dugu jauzi. trukaketarako objektua grazia bera baita ogi sinbolikoaren ordez. horretara arima-isurki hori Jainkoarengana eroana dela. Berba batean, sakramentuen ordez hausnarketa proposatzen zen. 80 Hurren zatirik polisemikoena dator, graziaren oparia zertan datzan azalduko baitzaigu. « Graziaz » ari dela badakigu kausalaren marka ikusi dugulako. Hizkuntzazko marka bat antzemateak badu bere garrantzirik teoria honetan : hizkuntza markak espazio mentalak zabaltzeko lorratzak bezala hartzen ditu Fauconnierrek. beraz hizkuntza hartzaileak esangura eraiki dezan aztarrenak dira. Kausalaren marka hori irakurtzean atzeko espazio batera. edo denboran aurretik agitu den gertaeraren batera itzuli behar izan dugulako, nolabait esan, kausa ematen bazaigu lehenagotik eman zaiguna ondorioa izango zen (leku garaira heldu izana alegia). Grazia honetan zetzan : arimaren bihotzean izpirituaren erroilua eta berba santua idatzi da. Jainkoaz lehen esan dudanak berdin balio du gizakiarengan bihotzak duen funtzioa ikusteko : ulermenaren eta nahiaren egonlekua. Bestetara esan : arimaren nahian borondate bat idatzi da. Idazteak badu zerikusirik denboran zehar irautearekin, idazten denak hantxe dirau, bihotzean idazten bada. hots, oso sakon, oso sendo idatzita egon beharko da (konturatu gaitezen kausa-ondorio inbertsioaz hemen. « You are digging your own grave » kasuan bezalakoa). [daztea eskribauen eta baratarien kontua da, eta idazten dituzten gauzetako bat testamentuak edo hilburukoak dira. Idatzia, noski, Hitza da. hots. Eskriturak (testamentua. hilburukoa. ituna. etab). Hauxe berori ari ziren erre-formistak errebindikatzen : eskriturei libreki hurreratu ahal izatea. Hitz hori Jainkoaren borondatea bada. eta borondate hori neure borondatean idatzita haldin badut, neure nahia eta harena bat izango dira. eta hori izan behar da komekatzeko modua. Honez gain, Semea ernaltzea dago ; pentsa dezagun bide batetik hizkuntza erromantzeetan « conceptiok » dituen bi esangurak. biologikoa eta intelektuala. Esparru biblikoan biek bat egiten dute. hitzak ordain gorpuztua ere baduelako. Intelektualki « kontzebitzeak » sexualki ernaltzearekin identifikatuko da, eta hortaz idazleak xedean demostratuko du nola arima Jesusen ama den. Hori berez « double scope integration » da41 : isuri bikoitzeko bateraketa. bestelako bateraketa bezalakoa da, baina abantai-letako bat zera da, behin bateratze espazioa sortu ezkero ere, itzul gaitezkeela sarrera espazioetako edozeinetara berriro ere, baina orain bateraketa espazio-tik informazio eta egituraketa berria eskuratuta. Eta hementxe utziko dut pasarte honen azterketa.

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81 Pasarte horren azterketak balio izan digu Margaritaren estrategia orokor bat diseinatzeko.

82 Arin esatera, Margaritak Bibliako aipamena eta bere poemaren haria sendiaren barruko harremanen arabera interpretatuko ditu biak. Beraz, Bibliako harremana familiartekotzat jo daiteke, eta hortik bere haria ere, hots arima-Jainkoa ere familia harreman gisa har daiteke. Horrela demostraturik uzten du berari interesatzen zaion azken hau : Jainkoa eta arima ahaideak direna alegia. Familia harremanak ez datoz inongo espaziotatik, baina irakurleok oso ezagunak ditugunez erraz eraiki genitzake nahasketa edo bateraketa espazioan bertan ; gainera, gauzak errazteko, normalean Bibliatiko aipame-nean badago familiarteko harremanen bat egotez. 83 Kontaerari nagokiolarik. esan beharra dago, arimak nozitu duen Jainkoaren manipulazioaren bitartez, aldaketa ontologikoa gertatu dela, eta orain lortu duela arimak Jainkoarekin ezkontzeko beharrezkoa zuen gorengo maila.

4.1.4.1. Arima Jesus-Jainkoaren Ama da

84 Jainkoak bere ariman idazten duen legez, eta Izpiritua hartzeko fedea eman dionez, arima Jesusen ama bilakatu da, baina, denarekin ere, Aitaren alaba sortzez. Eskura dauden metafora esparruetatik informazioa jadesteaz gain. edota hipotestu biblikoetatik eszena berriak iradokitzeko, Margaritak autoritate hiblikoa erruz darabil proba gisa (AUCTORITAS). Antzinako erreto-rika liburuetan bi eratako probak bereizten ziren, artistikoak edo arteaz sortuak eta artetik kanpokoak edo sortu gabeak. Norbaiten lekukotasuna, jainkoena barne edo « apostrofa », erretorikatik kanpo zegoen hau da, ez zen arteaz sortua. Gogora ekar dezagun lehen azaldu dudan bezala Margaritak bere burua erretorikarik ez zekien emakume ezjakin gisa aurkeztu digula, eta gainera San Augustinek gomendatzen zuela elokuentzia edo etorri eskaseko hizlarientzat eskritura buruz ikasi eta bertatik erabiltzea hizkera (zeina bai-tzen egon zitekeenik eta egokiena). Honez, etorriaren ordez memoria behar dugu. baina memoria erudizioa da, eta Margaritak erudizio itzela erakuste digu.

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85 Hemen. esatea legez, aipu bat bestearen barruan ageri digu : « Nire aita-ren nahia egiten duena. hura da nire anaia eta arreba. eta ama » Mateo 12. « Those that shall do the will of My father, they are My brethren and mother »j 86 Argudioa bat dator lehen emanikoagaz, Jainkoaren nahia edo ituna (testamentuak edo hilburukoak gizakiak familia bilakatzen baititu. Nahia bietara ulertu behar da, ondasunak ondorenei partitzen dizkien hilburuko testu gisa, eta borondate gisa. borondateak dituen direkzionaltasun edo zuzenbide guztiekin.42

87 Arima Jainkoaren amaren izena (eta egoera) erabiltzen ari denez, errespetua erakutsi behar dio etxeko Amari, Mariari. alegia. Malina antropologoak argitaratu zuen bezala, Europako gizarte diadikoan emakumeak semeaz erditzearekin eskuratuko zuen etxean boterea, bestela senarraren amaren pean bizi beharko zen. Behin gizonezko batez erdituz gero hierarkia azpikoz gora jarriko zen.43 Uste dut testuinguru honetan ezarri behar dugula Mariari egiten dion (azken) gorazarrea : Maria arimaren senarraren ama da, baina arima Semeaz erditu denez, arima Mariaren dinakoa izango da aurre- rantzean. Andre Maria Jesusen ama da gorputzez eta arimaz. baina hartuak ditu ohore handienak, Jainkoak bera emanak : « Inongo gizonek eman uste izango balizu Jainkoak berak baino gorazarre handiagokorik. blasfemia litzateke » : « ...if any man should think to give thee greater praise than God Himself hath done, it were a blasphemy (120). »k 88 Hauxe dugu testuko pasarterik ardatzena. Areago, usteak ematen dit hauxe dela testuaren benetako helburua : Mariaren irudia doktrinetatik ezaba-tzea, sinesmena sineskerietatik garbitzearren. Suposatu genezakeenez Mariak lekuan lekuko izena hartzeari paganismoaren sunda igarriko zioten errefor-mazaleek, izen horren aniztasunaren azpian legokeen politeismoagatik edo animismoagatik. Gainera Maria artekarien paradigma da, eta erreformazaleek kristautasun zuzenagoa nahi zuten.

89 Arima Jesusen arreba eta anaia da

90 Semeak gure hautsekin bat egin duenez —berez, Aitak gugandik hain gertura jarri duenez— : « deituko diogu gure ahizpa eta neba » « ...then do we call Him sister and brother (p. I 18). »l 91 Hortaz, arima Jesusen ama izateaz gain, bere arreba ere bada : « orain bada. arimak (zeinek Jainkoaren arreba dei bailiezaioke bere buruari) beharko du... ». « Now, the soul (which may say of herself that she is the sister of God) ought.... » 92 Eta familia unibertsala ahotan hartuta, Aita bakarra daukagula eta, arimak (Jesus) Jainkoari « neba » esango dio. Indartzeko argudioa Salomonen Abestitik edo Kantuen kantatik ekarriko du aipu biblikoa44 : « Ezdutzuri neba deitzeko lotsarik edukiko, zeren Salomonen bidez bere baladan esan baituzu. esanez. arreba neurea. zure begietako baten eta zure ileetako baten begiratu gozoaz zauritu didazu bihotza » : « ...I will not fear to call Thee my brother, for so hast Thou said by Solomon in his ballad, saying. My sister. thou hast wounded my heart with the sweet look of one of thy eyes and with one of thy hairs. »m 93 Jesusi ahizpa eta neba deitzea agian izan daiteke gorputza eta arimaren generoaz diharduelako, baina ez dut erantzun errazik.

94 Arima Jainkoaren alaba da

95 « Honen ostean maitasun handiz adierazten duzu noia haren sortzea ez den besterik harengana beti izan plazer duzun onginahia baino. eta ziurtatzen duzu (bera zaindu zenuen) lehen eguna baino lehenagotik berarengan izan duzula zure maitasuna, eta

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zelan (maitasunaren bidez) zeuk sortu duzun, zeuk (bakarrik) oso ondo egin dezakezun moduan (...) Orduan egiak sentia-razten dio benetako aitatasuna dela zugan ». « After this dost Thon declare with great love how her creation is only the good will which it pleaseth Tliee to have always toward her. giving assu-rance that hefore her first day (providing for her) Thou hast had Thy love in her, and how (through love) Thou hast begotten her, as (alone) Thou canst do very well. (...) Then the truth maketh her to feel that there is true paternity in Thee. »n 96 Jainkoaren aitatasuna, honetaz, bere arimagazko jokaeran datza, bere isuri maitekorrean. eta areago, arimari gorputza eman dionez gero, izate fisi-koa eman ere. Margaritak darabiltzan familia metafora guztietarik honixe irizten diot nik ilunena, segurutik metaforarik onartuena delako. Gogoan erabil dezagun gizakiok kausazioa sorrera bezala metaforizatu ohi dugula ; hots, sorburua gerokoaren kausa dela uste dugu, eta, honen harian, egon zela joera bat hamaseigarren mendeko Europako herrialde batzuetan erregea ia-ia kausa bezala ez bazen behintzat aginte printzipio bezala ikustekoa.

97 Jainkoa kausa bada, eta kasua jatorria bezala ulertzen badugu, orduan Aita izan behar du, hots, jatorria eta kausa. LEHENA KAUSA DA oinarriko meta-fora proposatu daiteke, kausatzea termino sortzaileetan ulertzen dugula azal-duko ligukeena. Erraz jartze aldera, esan dezagun zerrenda tenporala maila abstraktuagora metaforizatzen dela, eta beraz lehen gertaera bigarrenaren kausatzat hartzen dugula. Kausazioa horrela harturik kausazio erretorikoa edo hizketaldikoa da, non kausa baldintza nahikoa den baina ez ezinbestekoa, geometrian gertatu denaren kontrara. Adibidez, « Hiri bi horiek ahizpa bizkiak dituzu trafikoari dagokionez », esaldian familia erlazioek kausaren arabera aterako dute esangura. Erabil ditzagun gogoan hurrengo predikazioak, « ama berekoak », « aita bat dute », « lehengusuak dira », « ez du ematen ama bera dute-nik ere ». etab.45 Hala ere. testuki honek diosku aitatasuna maitasunean datzala, arrazoiketaren pisu guztia Jainkoak duen arimarekiko jokaeran datza, bere borondate ona arimarentzako. Honek oparien trukaketarantz abiatuko gaitu, oparia maitasunaren seinale bezala. 98 Geroago arimak « aita » deituko dio Jainkoari (119orr.). bi aldeko argu-dio bal gehituta : Aita Gurearen bidez biei egiten die aipu : Eskrituren autori-tateari eta familia unibertsalari. Bestalde, autoreak « alaba » hitza jartzen du Jainkoaren ahoan berari deitzeko, berriz ere Eskrituren autoritatera joaz (Prov. 23). Eta atzera ere, « Helas. nire aita zaharraren leinua hautsi baituzu, zalantza barik, alaba ordeko deitu didazunean (121) » « Alas. yea, for Thou hast broken the kindred of my old father, calling me daughter of adoption (121). »o 99 Ezkontzak, etxe aldaketak. etxe berriko ugazaba jauna aitatzat hartzea dakar, emakumeei inongo jabegorik izatea eragozten zien legeriaren arabera. Erromatarren Deminutiori dago lotuta : behin ezkonduz gero. emakumeek bi aukera zituzten. aitaren abizena eraman ala senarrarena. Aitarena eramatea erabakitzen bazuten, dibortziatu ahal izango ziren (hots, aitarenera bueltatu). baina. senarra hilez geroz, ezin izango zuten senarraren etxepartetik gozame-nik izan. Senarraren abizena eramatea erabakilzen bazuten. gauza bera gertatuko zitzaien aitarekin. zelanbait esan, legez euren senarren alaba bilakatuko ziren.

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4.1.4.2. Arima Jainkoaren emaztea da

100 Urrats honetan argudioak erreferentzia egingo dio ezkontzaren ingu-niko lege jokabide bati. alegia. ezkontza kontratuaren agerkari moduan senar-emaztegaiek egin ohi zuten opari trukaketari.46 Jainkoak arimari agindu dio haren egoera hobetuko duela, eta agindu horrek berekin dakar Jainkoak arima emazte hartzea. Arimaren dotea, berriz, haren bekatuak izango dira. Hortaz, Adanen alaba izanda, Jainkoaren emaztea izan daiteke, eta bere egoera soziala hobetu. « Ontzat izan duzu arimari beste izen hat ematea. eta emazte deitzea, eta hark zuri senarra deitzea, eta adierazi duzu nola askatasunez ezkondu zaren berarekin. Bataioaren bidez zure ondasun eta aberastasunak berari ematea agindu duzu. Hartu haren bekatuak, ez baitu hori baino, Adan bere aitak eman zizkionak ». « It pleaseth Thee to give her another name, to call her Thy wife and she to call Thee husband, declaring how Thou hast freely declared the marriage of her. By the baptism Thou hast made a promise to give her Thy goods and riches. Thou dost take her sins, for she hath nothing else, vvhich Adam her father did give her. »p 101 Arima Jainkoaren emaztea da Kantuen Kantari errenazimenduan ematen zitzaion interpretazioa dela bide47 : « Eta, antzera, deituidazu emazte, eta erakutsi maite nauzula, eta (benetako maitasun arduratsuaz) esadazu honela : Ene usoa, jaiki zaitez, ene emaztea ». « And likewise Thou dost call me wife, shovving that Thou lovest me, and call me (by true jealous love), My dove, rise up my spouse. »q

4.2. Sendiarekikoak : arimagandik Jainkoagana

102 Arima lau bider segurtaturiko lekuan dago « kokatuta », baina arimak familiako lau posizio horietan Jainkoarengana erakusten duen jarrerak kolokan jarriko ditu leku horiek :

4.2.1. Arima umea eta Jainkoa aita

103 Margaritak seme galduaren parabola dakarkigu oraingoan. Parabola horretan etxe bateko semeak etxe-partea eskatzen dio aitari eta badoa handik. Diru guztia gastatu eta gero, denik eta lanik umilena hartzea besterik ez zaio geratzen : txerriak zaintzea. Bere egoeraz gogoeta eginda, etxera itzultzea erabakitzen du, baina morroi, ez seme. Hala ere, aitak ohore eta festa handiez hartzen du berriro. Parabola horretan bezala, gure testuan ere arimak huts egin dio Jainkoari : « Eta irain egin dizudala ume galduak egin zuen legez, haragiaren salerosketa ergelari jarraika ». « Also that I have offended Thee as the prodigal child did, following the foolish trade of the flesh. »r 104 Hemen generoaren egokitze interesgarria daukagu. Hasieran, Margaritak generoa zehaztu barik aipatzen du Bibliako pertsonaia, « semea » esan beharrean « umea » esanez. Gero ume horren bekatuak « haragiaren salerosketa » anbiguoaren bidez deskribatzen ditu. Hori bi modutara uler daiteke, « salerosketa » hitza segun eta zelan ulertzen dugun : edo prostitutaren sexu harreman ordainduak direla pentsatuz edo, bestela, modu orokorragoan, merkatari munduzalearen negozioak.

105 Alabaina, parabolan bezala, aitak ez du bere umearen bekatua ikusiko. Hori garrantzitsua da bai estasi legalaren ikuspegitik arlo politikoan (aitaren jarrera) eta bai aitortzaren sakramentuaren arbuiapenaren aldetik, arlo erlijio-soan : « Non da, orduan,

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ni zigortuko nauenik, neure aitak ene bekatua ukatzen dionean ? Ez dago inongo gizona kondena dezakeen epailerik, baldin eta Jainkoak berak gizon hori gaitzesten ez badu. Ez naiz ondasunik ez izatearen beldur, Jainkoa dut-eta aita ». « Where is he then that shall punish me when my father shall deny him my sin ? There is no judge that can condemn any man, unless God himself would damn him. I fear not to have lack of goods since I have God for my father. »s 106 Berriz ere, bertikala da erlazioa : ez dago bitartekaririk, ez abokatu eta ez abaderik.

4.2.2. Arima, Jainkoaren ama

107 Familia harreman hau poemaren bigarren zatiko kontzepturik landuenetako bat zenez, hirugarren zati honetan ere testuak zenbait gogoeta interes-garri eskainiko dizkigu arima eta gorputzaren arteko harremanez. Lehenago esan dudanez, arima manipulatuz, arima eskutan erabiliz, Jainkoak leku berria ematen dio. Ukitze horrek arimari dakarkion lehendabiziko aldaketa gorputzaren gainetik jartzea da (gorago aipu batean ikusi dugunez). Arimak ezin du esan Jainkoaren alboan dagoenik, baina Jainkoaren ekintzaren bidez gorputzaren jabe sentituko da. Garrantzitsua da gogoratzea frantsesez arima femeninoa dela, eta gorputza, berriz, maskulinoa. Elizabethen itzulpenak ez du gorputz maskulinoan aurkezten, baina argi eta garbi azpimarratzen du arimaren femeninotasuna.

108 Arima eta gorputzaren arteko erlazioen beste alde interesgarri bat zera da, berriz ere sexu harreman (debekatu) en bidez sinbolizatuta datozela. Jainkoak gorputzaren barruan jarri du arima : « ez nagiaz lokartzeko, baizik eta batak eta besteak beste lanik izan ez dezaten zeu zelan zerbitzatu pentsatzea baino » « not for sleep with sloth but that both of them should have no other exercise but only to think how to do some service unto Thee (118). »t 109 Aipu honek egoeraren konnotazio sexualak argiro ispilatzen ez baditu ere, poemaren bukaeran autoreak modu esplizituagoan adieraziko du (ikus beherago, heriotzaren beldurra dela eta). Garrantzitsua arima eta gorputzaren arteko harremanen norabidea da, hots, batak bestearekiko vs biek Jainkoagana. Ziur aski sexua edo maitasuna erlazio prototipikotzat har deza-kegu. Beraz, kide biek, arimak eta gorputzak, Jainkoa zaintzea izango dute eginbehar, printze baten zaindariak balira bezala.

110 Baina orduan arimak huts egingo du eginbehar horretan : « Izan ere, zutaz ernaldu eta erditu ondoren, arrazoimena utzi nuen albo batera ; eta neure borondatearen menpeko bihurturik, eta zuri jaramonik egin gabe, lo geratu nintzen eta lekua utzi nion nire etsai handiari : ezjakintasunaren gauean (lo bainengoen) nigandik ostu zintuen, maltzurkeriaz, eta zure lekuan bere ume hila utzi zidan. (...) Nire etsaiak, nire sentsualitateak (ni piztikeriazko lo zorroan nengoela) neugandik ostu zintuen, eta beste ume bat eman zídan. bere baitan bizirik ez zuena. eta bekatua deritzona ». « For after I have conceived and brought Thee forth, I left reason ; and taking subject unto my own will, not taking heed unto Thee, I fell asleep and gave place to my great enemy : the vvhich in the night of ignorance (I being asleep) did steal Thee from me, craftily, and in the place she did put her child which was dead. (...) My enemy, my sensuality (I being in my beastly sleep) did steal Thee from me and gave me another child having no life in him, which is called sin...(p. 123). »u 111 Alde batetik, ama bi ditugu : arima, hots. benetako ama, eta sentsuali-tatea, ama gaiztoa. Bestetik, lo geratu eta arrazoimena bazter uztea bekatua izan da, eta umea galtzea horren ondorioa. Honen atzean dagoen dikotomia honako hau da : arima=

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arrazoimena vs. gorputza=animalia. Piztiazaletasunaren edo bestialitatearen aipamenak interpretazio sexualera bultzatzen gaitu. Arimaren arrazoimena eginbeharrak betetzearen aldeko indar nagusia izan beharko zen (gogoratu Platonen irudian arima zaldi bik tiratutako karroza zela).48Alabaina, arima —hau da, agintaria— lo geratuz gero, parte arrazoiduna desagertu egiten da. Ustez maitasunak bi alde ditu, fisikoa eta espirituala. Seme ttipia maitasunarekin identifikatzen badugu, gorputza, berriz, maitasun fisikoarekin, eta maitasun espirituala kontalariare-kin, harreman batean alde espirituala lo geratzen denean horren emaitza maitasun fisiko hutsa izango da. Hortik dator kontalariak sentsualitate deitzea arrazoimena edo alde espirituala lo geratuz gero geratzen denari (« ma voisine, » « my enemy. »).49

112 Lehenago esan dudanez, sexuak harreman prototipikoa irudikatzen du. Erlazioa bektore bat da, eta badu sorlekua, norabidea eta zentzua. Desira eta intentzio konnotazio nabarmenak direla medio, arima lo geratzeak gorputza-rekin erlazio sexualak izatea esan nahi du, eta hortik sentsualitate etsai/auzo-kidea etortzea. 113 Ama bien arteko epaiketa Salomon epailearen eta ama bien pasarte biblikoa gogora ekarriz konpontzen da, Seme-Jesus honek, bestalde, badu aztertu beharreko korolario edo atxiki bat. Semea Elizarekin identifikatzen badugu gorputzaren metaforaren bidez, ama egiazkoak hartutako erabakiak ispilatuko luke hamaseigarren mendeko Frantziako lehen erreformatzaile intelektualek Eliza Katolikoaren aurrean hartutako jarrera, hau da, Eliza Katolikoaren « irrazionaltasuna » kolokan jartzea, baina zatiketa saihestuz. Nolabait esan, nahiago zuten amaizunari (sentsualitatea=imajinak ?) benetako semearekin geratzen utzi, Seme-Eliza zatikatua ikusi baino.50

4.2.3. Arima, Jainkoaren arreba

114 Arima nebaren kontra altxatzen da. Hemen gogoratzen den Bibliako pasartea 12 Zenbakiak da, Maria eta Aaron Moisesen kontra mintzatu zire-nean hura arrotz batekin ezkontzeagatik, debekatua baitzegoen halakorik egitea. Kontalaria —arima— Aaronen emazte Mariarekin identifikatzen da. Bibliako pasartean Maria eta Aaron kexu dira, esanez Jainkoak eurei ere hitz egin ziela. Beraz, itxura batean auzia apurtutako legeren bati zor bazaio ere, azpian bada legearen jabe nor den esateko norgehiagoka, Jainkoaren boron-datea interpretatzeko lehia. Jainkoak erantzuten du, eta erakusten Moisesekin daukan harremana eta beste profeta batzuekin daukana arras desberdinak direla : besteengandik ostentzen bada ere, Moisesi aurrez aurre mintzo bai-tzaio.

115 Pasarte honetan arazoa interpretazioaren zuzentasuna da, hots, noraino daukagun Jainkoaren hitzaren ezaguera zuzena. Jakina, korolario erlijiosoa inspirazioaren jabegoaren arazoa da, eta interpretatzeko autoritatearena. Dakigunez, Moisesek Egiptoko faraoiarekin berba egiten ez joateko eman-dako aitzakietako bat zera izan zen, bera, Moises, hiztun ona ez izatea. Jainkoak esan zion Aaron anaia eramateko bere ordezkari gisa. Gaia gehiago elaboratuz, esan dezakegu bigarren pasarte honek egia vs erretorikaren arazo platonikoa aurkezten duela. Irakurketa metonimikoa eginez, Aaronek Legean oinarritutako interpretazio rabinikoa ordezkatzen duela esan genezake, eta Moisesek, berriz, interpretazio profetiko edo inspiratua : gnomismoa vs. erre-belazioa, trebetasuna vs. inspirazioa. 116 Gure testura itzuliaz, arimak aukera egin behar du Aaron eta Moisesen artean : erretorika vs. errebelazioa, abadea vs. profeta, eta, irakurketa biogra-flkoa eginez, Henri senarra vs. François neba, beharbada. « ... zeren nik (hain leinu prestuaren ohorea eta

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jatorria ahazturik, eta baita nigana duzun neha portaera eztia ere) zure aurka altxatu nintzen (nire hutsegiteak gogoratu barik, eta zugandik urrunduz) eta Aaron nebarekin elkar hartuta, gertu egon nintzen zure lanen kontrako epaia emateko, eta hakarrik nengoencan ere marmarka jardun nuen zure aurka. Horregatik damu handitan dago ene kontzientzia (...) Oh Jainko eskuzabala, neha, eta Moises egiazkoa... » « ...for I (forgetting the honor and adoption of so noble kindred, also Thy so sweet a brotherly behavior toward me) did rise against Thee and (not remembering my faults, but going far from Thee) did agree with my brother Aaron, willing to give judgment against Thy works, and also grudging against Thee privily, which thing causeth me to have a great remorse in my conscience. (...) 0 bountiful God, brother, and true Moses...( 125.orr.). »v 117 Gogoan izan behar dugu oro har profeziak kolokan jartzen duela autoritate rabinikoa. Hala ere, Numeroak 12-ko pasartean autoritatea profetari ematen zaio, eta, areago, legeak ez du berarengan eraginik. Ohar gaitezen pasarte hau absolutismo politikoaren erakuntzaren testuinguruan interpreta-tzen badugu, Moises-Erregearen identifikazio bikoitzak zera dakarrela, Jainkoak berak hautatu duela bien artean eta ez herriak, edo gorteak, edo zaharrek edo parlamentuak (hau da, Çiden ageri zaigun arazo bera, ohoreen arteko gatazka). Gainera, ildo horretalik jarraiki, erregea kritikatzeak beka- tuaren zama dakar, estigma. Guztiei eragiten dien legeak ez dauka indarrik erregearengan, eta hark nahi bezala apur dezake.

118 Lehenago aipatu dudanez, bizitza errealean Margarita intrigetan ibili zen senar deseredatuarekin bere nebaren kontra, Henriri Nafarroako erresuma berreskuratzen laguntzeko. Testuinguru politiko honen berri eman nahi izan dut Margaritak testuan aipatzen dituen « hutsegiteak » aztertzeko51. 119 Moises emakume arrotz batekin (eta arrotz baten alaba gainera) ezkondu zen, hau da, ez zion endogamia tradizioari jarraitu. 120 Moisesek hilketa egin dezake zigorrik hartu gabe, baina gainerakoek ez.

121 Hauxe da proposatzen dudan irakurketa : emakume arrotzarekin ezkontzea beste herri batzuekiko bake aliantza da, hots, sistema zaharreko errege/erreginek beren-beregi debekatuta zeukaten ekintza politikoa. Aldiberean, horiexek ziren sistema zaharreko aristokratek zeuzkaten eskubide biak : mendekurako eskubidea eta euren etxearen interesen alde jokatzeko independentzia. Nobleak behin gortesau bihurturik, euren kexua izango zen erabaki politiko inportanteak hartzerakoan sarritan errege/erreginak bazter-rean uzten zituela. Baina Aaron Henrirekin identifikatu ahal bada, artean ez zen gortesaua. 122 Testura itzuliz, arimak okerreko bidea hautatu du (erreotorika egiaren ordez ?), eta horregatik deskomekatua da, gortetik kanpora botea : « Eta horrela dendetatik eta jendearen bizilekuetatik egotzi ninduten (legentsu baten moduan) » « And so was I put (like a lazar) from the tents and habitation of the people. (125). » w

123 Eta ostera ere, barkamena iraina baino sendoagoa da : « Ulertuidazu orduan, eta barkatu nire ezjakintasuna, zure arreba izateko bezain leinu handikoa naiz eta. » « Thou shouldst not to such a good turn unto such a poor woman as I am (126). » « Take my meaning then, and excuse mine ignorance, since I am of so great a kindred as to be Thy sister (126). » 124 Hurren, arimak bere nebaren lurrak aitortuko ditu bere senipartetzat, eta onartuko du etxe bakarra izan behar duela, nebarena alegiax. Horrela, kontalariak ezkontzaren

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gaiari helduko dio, eta hemen aipatu dugun auziari, hots, emakumeei bi eginbehar moralen artean planteatzen zitzaien dilema : alde batetik gurasoei obeditu beharra, eta bestetik euren senarren interesak zaindu beharra, senarrak gurasoen lehiakide izanik lurraren baliabide muga-tuetan oinarritutako ekonomia batean.

4.2.4. Arima, Jainkoaren emazte

125 Oinordekoen jabegoa ziurtatzeko emakumearen sexualitatea zapaldu behar zuen gizarte batean, emazte batek senarrari egin ziezaiokeen iraina, definioz, infidelitatea zen52. Areago, testu honetan irain hori orain arte aipa-tutako beste guztiak baino handiagoa da : « Amaren bat bere semeaz ezerta-rako arduratu baldin bada, inongo nebaren batek arrebaren hutsegitea ezku-tatu baldin badu, sekulan ez dut ikusi (edo bestela ikaragarrizko sekretua izan da) inongo senarrak emaztea barkatu izana emazteak iraindu eta bera-rengana itzultzcan. » « If any mother hath taken any care for her son, if any brother hid the fault of his sister, I never saw it (or else it was kept wondrous secret) that any husband would forgive his wife after she had offended and did return unto him (126). »y 126 Ereduzko portaeraren eta benetakoaren arteko konparazioa egiteko, testuak ez dio emakumearen jokabideari erreparatzen, gizonaren erantzunari baino. Honela karakterizatzen du senarra : « Euren gaitzaren mendekua har-tzeko, hainbatek emaztea heriotzera kondenatzera bultzatzen zituzten epai-leak. Beste batzuek, emaztea bekatua egiten ikusita, euren eskuez hiltzen zituzten. Beste batzuek (emazteen hutsegiteak azaleratzen ikusirik) etxetik bidaltzen zituzten, euren lagunengana. Beste batzuek (emazteen gaizkieginak ikustean) gartzeleratu egiten zituzten. Labur esateko, begiratu haien izakerei, euren azken helburua zigorra besterik ez baita ». « There be enough of them which for to avenge their wrong did cause the judges to condemn them to die. Others, seeing their wives sin, did not suddenly spare their own hands to kill them. Others also (seeing their faults appear) did send them home again to their own friends. Others (seeing their ill deeds) did shut them in a prison. Now, to speak short, look upon all their complexions, for the end of their pretense is nothing else but punishment. »z 127 Horren guztiaren xedea edozein gizonen jokaera mesprezatzea da, Jainkoaren portaerarekin alderatuta. Hamaseigarren mendeko Europan, Jainkoaren erreakzioa tentelkeriatzat hartuko zuten. Beharbada Margarita hemen adierazten ari da emakumearen ohorea ez dagoela bere himenean, desproportzio zoroa dagoela bekatuaren eta zigorraren artean. Testuan hauxe da gertaeren hurrenkera : 1) hutsegitea gauza jakintzat hartzen da, 2) gizonen ohiko erreakzioa erakusten zaigu, senar pertektuarenarekin kontrastean, 3) senar perfektu horrek aurretik emandako (eta beraz, galtzekotan diren) onda-sunak zerrendatzen dira :

128 Neu hautatu nau (hainbaten artean, ustez)

129 Duintasun handia eman dit, Jainkoaren emaztea izatea denik eta duin-tasun handiena delako. Jainkoaren ondasun guztien erregina, ugazaba eta dama naiz, eta seguru nago bai gorputzez eta bai arimaz (garai hartako hiru gauzarik garrantzitsuenak : itzala edo maila, jabegoa eta segurtasuna).53 130 Ezkon harreman horretan arimak egiten duen lehenengo hutsegitea senarra utzi eta beste « txarrago » bat hartzea da : « Bai. utzi zaitut, eta ahaztu, eta zugandik ihes egin. Neure gogara joateko utzi zaitut. Bazter utzi zaitut txarrago bat hartzeko (...) Baina nora joan naiz ? Tristura besterik ez dagoen leku batera (...) Neure borondate gaiztoaz utzi zaitut (...) Eta (neure

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burua zure maitasunetik hobeto apartatzeko) zure etsaia hartu dut, zein den deabrua, mundua eta haragia » « Yea, I have left, forgotten and run away from Thee. I did leave Thee to go at my pleasure. I have forsaken Thee to choose it worse. (...) But whither went I ? Into a place where nothing is but cursedness. (...) I have left Thee through my own ill will (...) And (for the better to outdraw myself from Thy love) I have taken Thine enemy, which is the devil, the world and the flesh (128).... »aa 131 Paragrafo anplifikatu honetan oraindik, gizonaren izena bera ere gorro-tatu izana da hurrengo hutsegitea, eta konbentzioen arabera jokatu izana, zintzoz eta bihotzez jokatu ordez : « Eta zugana izan behar nituen maitasun eta karitateari dagokienez, halako moldez ito zizkidaten, non Jesus ene senarraren izena (lehen hain eztia zitzaidana) gogaikarria zitzaidan, eta halako gorrotoa nion ezen askotan burlatan hartzen nuen. Eta (sermoi bat entzutean) gizonen batek esaten baldin bazidan Predikatzaileak ondo dio, nik erantzuten nion, Egia da. Baina nire hitzak hegaz joaten ziren, luma baten moduan. Eta ez nintzen inoiz elizara joaten, itxuragatik ez bazen. Nire egite guztiak hipokresia baino ez ziren. nire gogoa beste leku batzuetan zegoen eta. Zutaz entzuten nuenean ernegatu egiten nintzen, nahiago bainuen neure gogara ibiltzea. » « And as for the love and charity that I should have toward Thee, they did quench it so that the name of Jesus my husband (which before I had found so sweet) was to me tedious, and I did hate it so that oftentimes I did jest at it. And if any man (we hearing a sermon) should say unto me, The preacher saith well I will answer, It is true. But my words did flee away as a feather doth. And I went never to the church but for manner's sake. All my deeds were but hypocrisy, for my mind was in other places. I was annoyed when I heard speak of Thee, for I was more willing to go at my pleasure (128) »bb 132 Maitasun eta karitatearen arteko lotura testuinguru augustindarrean jarri behar dugu testuaren interpretazioaren bidez : biak dira jakituria eskuratzeko gogoeta baldintza.54 Bestalde, garai hartako bizimodu erlijiosoaren aurkako kritika ere badugu hemen, « kanporako » jokabidearen eta antzinako pentsaera paganoan hain errotutako formulismoaren gaitzespenarekin. Labur esan, autoreak berak adierazten duenez, hauek izan dira hutsegiteak : senarra gorrotatu, bertan behera utzi, harengandik alde egin eta berori traizionatzea, zertarako-eta « beste bati emateko zure lekua », lehen senide-harremanetan ikusi dugun modu berberean ia. Ondoren, senarraren erreakzio posibleak zerrendatzen dizkigu, beti ere modu negatiboan, hau da, Jesusek halakorik egingo ez zuela adieraziz. • Emaztea burlatan hartu, jipoitu edo hil dezaten uztea • Emaztea kartzelaratu edo etxetik bidaltzea • Emazteari bere opari edo bitxiak kentzea • Emazteari emandako etxe-lurrak kentzea • Senarrak emaztea akusatzea epailearen aurrean • Senarrak emazteari debekatzea sekulan bere aurrean agertzea edo bere etxera joatea

133 Horren ordez, hauek dira Jainkoaren baldintzak : « Ene alaba... » • Zu arretaz entzun eta ikusi, eta zeure entzutea nigana jarri • Jendearen jokamoldeak ahaztu (ezagun berrienak), eta (Adan) zure aita zaharraren etxea

134 Nire irakurketan, ohiko jokabidearen eta Jesusen erreakzioaren arteko kontraste honek Legearen (rol maskulinoaren) eta erruki eta mesedearen (Mariak abokatu gisa daukan rolaren) arteko dikotomia ordezkatzen du. Ez da zinpekoen epaimahairik edo abokaturik behar ; nahikoa da arimak fiskalaren baldintzak betetzea : bere jatorria eta

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sustraiak ahaztea, batetik, eta oraingo kontratua betetzea, bestetik. Nire ustez, honek guztionek indibidual-tasun urbanoaren eraketara garamatzacc. Testu honen helburua Maria eta beste edozein ararteko ezabatzea delako hipotesia hurrengo paragrafoak sendotzen du, diskurtsoak Mater Nutrix (beatitudeak) gogorazten duen tonu anbiguoa hartzen duenean, gogoz kontra, arimak ez duelako kasurik egin nahi : « ... Negarrez hasi zinen. Etorri nigana lanaz nekaturik zandeten guztiok. Neu nauzue zuok guztiok hartu eta ene ogiaz elikatuko zaituzte-dana ». « ...Thou beganst to cry : Come unto Me all ye which are weary with labor. I am I that shall receive and feed you with My bread. »dd 135 Hurren gogoeta meta-narratibo interesgarria dator. Protagonistak, arimak, dio ez dakiela ea horiek hitz hutsak diren ala benetan Jainkoaren berbak. Honek arima zalantza momentu batean irudikatuko liguke. Aurretik sermoia entzutera joan zen moduan, orain ere argi dago arima ez dagoela aurrez aurre hizketan Jainkoarekin. Biblia irakurtzen ari da, baina maitasunik gabe irakurtzen : berriz ere San Augustinen hermeneutika. Arimak irakurri dituen pasarteak aipatzen zaizkigu : mahasti pozoitsuaren konparazioa, Shulamita arimarekin identifikatzen duen alegoria, eta, azkenik, Jeremias (Jer. 3). Aurreko pasarteak maitasun barik irakurri dituen legez, hau ere « bihotzean beldurra eta aurpegian lotsa » dituela irakurri du. Pasarte guztiek orain arteko ideia bera azpimarratzen dute : Legeak zigor izugarriak ezartzen dizkio senarra utzi duen emazteari, baina Jainkoak beste era batera jokatzen du, behin baldintzak betez gero, jakina : « Nire borondatea zu obeditzera jarria zegoela jakin bezain laster, (nigan fede bizia ezarri eta) zure gupida eta ontasunaz baliatu baitzinen, eta, horrela, zu Jauna, ugazaba eta errege zinela (eta zure beldur izan behar nintzela) jakin nuenean (eta lehenago ezkutatuko ninduzula, jendaurrean agerian jarri baino), ez nuen zure bila abiatzeko beldurrik izan, eta, bilatuta, aurkitu egin zintudan ». « For as soon as Thou knewest my will bowed to obey Thee, then (putting in me a lively faith) Thou didst use Thy clemency and goodness ; so that after I knew Thee to be Lord, master, and king (of whom I ought to have fear), then found I my fear to be quenched, believing that Thou were so gracious, good, sweet, and pitiful [a] husband that I (which should rather hide me than show myself) was not afraid to go and seek for Thee ; and in seeking I found Thee. »ee 136 Esan dudanez, arimak bete beharreko baldintzak obedientzia agintzea eta Jainkoaren autoritatea onartzea dira (maitasunik gabe irakurtzea testua-ren autoritatea zalantzatan jartzea baitzen). Bere aginte eta lekuagatik beldur-garria izateko modukoa bada ere, Jainkoak barruko ona eta handia dauka.

137 Gogoratu lehen esan dudana intentzioa eta norabidearen gainean, bai idazki katolikoetan eta bai erreformazaleen artekoetan. Garaiko idazki kato-likoetan bekatariak salbazioa lortzeko bete beharreko baldintza Mariarengana « bihurtzea » zen. Paraleloki, bide bati jarraitzeak obeditzea esan gura du, eta bihurtzea, norabidea aldatzea edo bidea uzteak, ordea, norberaren gogoa edo asmoa erakustea da. Maite izatea, hortaz, norbaitengana edo zerbaitetara bihurtzea da, maite dugun objekturantz egitea, alegia. Maitasuna funtzio bektorea da, norberaren borondatetik xede baterantz55. Bihurtze hori garran-tzitsua da, hemen Jainkoa utzi eta besterik hautatzea bezala aurkezten zaiguna azken batean Jainkoak gura duenaz bestelako zerbait gura izatea baino ez baita. Infidelitatea eremu honetan norberaren nahiei jarraitzea bezala ulertzen da, Jainkoaren nahiarekin jazargoan. 138 Horrenbestez, arimari egiten zaion akusazioa bere borondatea erabiltzea da. Hori jatorrizko bekatuarekin erlaziona daitekeelakoan nago, jakitu-riaren arbolaren

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interpretazioari eutsiz gero. Horrexegatik esan dezakegu testu honetan ageri den obedientzia konpromisoa paraleloa zaiola teologia katolikoan Mariarenganako bihurtze gisa ageri den guraria. Diferentzia zera da, biguntasun edo malgutasunaren kontzeptua zein puntutan sartzen den jokoan : bitarteko osagai batean katolikoentzat, eta norberaren borondatean erreformatzaileen kasuan. Katolikoek arauaren salbuespenena bilatzen dute ; erreformistek, ordea, borondate malgua. Hortaz, azkenen kasuan harremana zuzena izan behar da. Hautatzearen bekatua bera obedientziari kontrajartzen zaio, eta obedientzia ugazaba eta otseinaren edo jaun eta basailuaren arteko kontratuaren zimentarria da. • Arimak bekatua egin duen lau lekuetan laburbilduta, honakoa esan dezakegu : • Alaba gisa, arimak aitagandik egin zuen ihes, eta senipartea xahutu zuen : burujabetza. • Ama gisa, arima lo geratu zen, arrazoimena galdu eta piztikeria egin zuen gorputzarekin : sentsualitatea. • Arreba gisa, beste neba bat hautatu zuen, benetako mezuaren ordez hitz jarioa darabilena : erretorika edo trebeziak. • Emazte gisa beste jaun batzuk hautatu zituen : borondatea.

139 Honetara laburbiltzen zaizkigu arimak Jainkoarekin dauzkan senide harremanak : « O ene salbagilea, feclearen bidez zurekin errotu eta batu naiz. A zelako batasuna, (fedearen bidez) ziur bainago zutaz. Eta orain seme, aita, senar eta neba deitu ahal dizut. Aita, neba, seme, senarra. O zelako opariak ematen dizkidazun izen horien ontasunaz. O, aita neurea, zelako aitatasuna ; O, neba neurea, zelako nebatasuna ; O ume neurea, zelako gozamena ; O senar neruea, zelako elkartzea ! Umiltasunez betetako aita, gure antza hartu-tako semea, fedeaz eta karitateaz sortutako semea, azken muturreraino maite duen senarra. » « O my savior, through faith I am planted and joined with Thee. O what union is this, since (through faith) I am sure of Thee. And now I may call Thee son, father, spouse, and brother. Father, brother, son, husband : O what gifts Thou dost give by the goodness of those names. O my father, what paternity ; O my brother, what fraternity ; O my child, what delectation ; O my husband, O what conjunction ! Father full of humility, brother having taken our similitude, son engendered through faith and charity, husband loving in all extremity (133). »ff 140 Giltzarria fedea batasuna legez hartzea da, eta giltzarri halaber batasun horren alderdi bakoitzetik eratorritako etekinak : aitatasunetik umiltasuna, nebatasunetik antzekotasuna, fedea eta karitatearen bidetik gozamena ; eta elkarketatik maitasuna. Fedea gurasotasun-haurtasun harremanaren alderdi bietan dago, hori berori izango da geroko jaurespen erlaziorako gakoa. Erreparatu, bidenabar, ordena aldaketari : lehendabiziko antolaeran harrema-nak antzeko tipoetan parekatzean datza segurutik (aita-semea, mendera-kuntza ; senarra-neba, alborakuntza). Hona hemen bakoitzak arimarekiko daukan eginkizuna : aitak alaba gazte buruarina defendatzea, nebak arimari bere nahigabeetan laguntzea, semeak zahartzaroaren ahuldadean euskarria ematea, eta senar zintzo eta leialak haren bihotz osoa betetzea. Honek. lotura batzuk izan litzake azken judizioarekin.gg

5. Jaurespen harremana

141 Esana dut poema osoak sustrai hartzen duela bi metafora esparru nagusitatik : bata epaiketa eszena eta bestea familiakoa. Azaldu dut epaiketa eszena Etxepare oinarri harturik, eta adierazi dut zelan epaiketa bera ez den zuzenean deskribatzen Margaritaren poeman, baina etengabe dagoela azpitik suposatua. Ikusi ditugu familia

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harremanak eta zelan erabiltzen dituen marga-ritak Bibliatiko aipuak irakurleak nahasketa edo bateraketa espazioak sor litzan, eta halaber, epaiketaren eszena etengabe suposatu egote horrek dakarren pribatizatze prozesua. Orain ikustera goazena zera da, hain zuzen epaiketa eszenaren ordez eskaintzen zaigun itunaren irtenbidea. Itunak bi alderdi ditu : merkatal alderdia eta jaun-basailu alderdia, bietan maila ezber-dinen arteko berba ematea izango da, baina, halaber, objektuen edo zerbitzuen trukaketa ere bai. Ituna testuan hasieran datorren bataioarekin ezartzen da, eta ituna bermatzen da azkenean datorren zaldun-guda edo turnamentaren bitartez, hain zuzen epaiketa eszena artezen ordezkatuko duen eszena.

5.1 Otsein-Ugazaben artekoak

142 Arimak bere ahuleziak azalduko ditu : alde batetik bekatu larregi egin ditu eta, bestetik, indarrik bat ere ez du ezagutzarako. Gizakiaren izaera okerraren gaineko leku komunak dira berauek. Hots, autoreak esango digu definizioz arima bekataria dela, edo bestetara, bekatuak bere sustraiak giza ariman dauzkala barrenduta. Arima bekataria izateaz gainera, ararteko eta artekarien hutsaltasunaz jardungo du gero « Ez da gizonik, ez santurik, ez aingerurik zeinaren bitartez bekatariaren bihotza aldatuko denik. » « there is neither man, saint, nor angel for whom the heart of a sinner will change. » (117.orr.). 143 Bitartean autoreak Jainkoaren eta arimaren arteko konparaketa Erdi Aroko jaun- basailuaren esparruan kokatuko du, sendiko harremanak ez baitira jabe-mirabeen artekoetatik bereizten ; hori bi eratara erakutsiko digu autoreak, alde batetik familia barruko hierarkiaren azpimarratzeaz, hau guztia aurreko atalean ikusi dugu, eta bestetik jaun-basailuaren harremana ugazabaren ontasunean oinarrituz. Testuak azal eta zelai agertu behar du zerbitzariak ez duela zerbitzatzen, jaso baino. Testuinguru honetan interpretatu beharko dira « jainkoaren grazia » bezalako kontzeptuak, eta « lurreko har guztiz biluzia » bezalako adierazpideak : « Helas, zelako ugazaba baina ! Beragandik onik ez dut merezi, kontrara baizik, zerbitzari nagia izan natzaio eta... » « Alas, what a master ! Without having deserved any goodness of Him but rather served Him slothfully... »hh. 144 Esaldi honetan egitura hierarkikoa gorde da ; otseinaren kalitate faltak ugazabaren kalitatea azpimarratzen du. Horrelako konparaketak ez dira berriak, gogoratu Mio Çiden « como oviera buen vasallo si oviera buen señor. » Honek pentsamendu magikoarekin lotzen gaitu, zeinetan uste baita lurreko gertakariak zeruko gertaeren ispilu baino ez direla (ikus oharretan lehen emandako patriarkalismoari buruzko aipua). Beraz, hortik hurrengo urra-tsean, goiko katenbegiko nolakotasunak beheko katenbegikoek jasoko dituzte herentzian (Çiden kasuan), eta are hurrengo urrats batean, herentzia hori ez onartzea izango da bekatu egitea (Margaritaren kasuan).

145 Goazen astiroago : « Helas, ene Jainkoa, ez zaitut bilatu, baina hegaz eta ihes egin dut zugandik ; eta nigana zure azpira makurtzen zara orain, zer-eta lurreko har erabat biluzia baino ez naizen honengana ». « Alas, my God, I did not seek Thee, but fled and ran away from Thee ; and here beneath Thou camest to me which am nothing but a worm of the earth all naked. »ii 146 « Lurreko har erabat biluzia »ren konparatzeak espazioaren kontzeptua erakusten du era bitara. Manda batetik, Katea nagusiaren metaforari buruz Lakoffek eta Turnerrek

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egin ikerketei jarraiki (1989), harra bizidun ibiltarien arteko katenbegirik beherengoena litzateke, baina, oroz gain, bizidun horiek guztiek elkarrekin duten zerikusi handiena zera da, lurjabetzan oinarritutako gizartean dituzten lurrarekin uztartutako hartu emanak. Lakoffek eta Turnerrek 1989an azaldu zuten zertan zen « The Great Chain of Being Metaphor ». Katea horren arabera, izadiko izaki guztiak hierarkikoki ulertzen ditugu ; horrek ez dakar popertza izakiak hierarkian batean daudena berez, baizik eta gizakiok mendebaldeko kulturan halan ikusten dituguna. Adibide klasiko bat jartzearren, « Akiles lehoi bat da », ez gabiltza Akiles, Iliadako pertsonaia lehoi batekin sofistikatuki konparatzen —ezaugarri txikiagoak edo sememak erkatuz Greimasen eskolaren arabera kasu—, baizik eta lehoi batez mendebaldeko kulturan (Indoeuroparrean segurutik) gizakiok dugun irudia-rekin baino. Bide honetatik, oso esanguratsua da euskal atsotitzetan lehoiaren ordez hartza agertzea : « otsoak hartzari min legio » hierarkia horri erronka eginez (in « Izpazterreko errefrauak »).56

147 Beste manda batetik, maila izpiritualean, lurra aireari jazartzen zaio, eta negatiboki polarizatu, batik bat arimak « hegaz eta ihes asago zugandik » egin duenean.57 Esaldian zehaztu gabe lotu diren espazioak « azpira, » « nigana zatoz, » denak dira hizlariaren ikuspegitikoak, eta hartu eman hierarkikoa azaltzeko hor jarriak. 148 Jaun-basailu erlazioak bataioaren bitartez sinbolizatzen dira : bataioan arimaren « lagunek » eutsitako aginduak dira arimak eginbeharreko lanak. Bera zerbitzari txarra izatea agerian azaldu da aginduok jan egin dituelako. Otseinaren eginbeharrak hauexek dira : 149 (Zure nekaldiaren bitartez halakoa izatea nire haragiaren mortifikazioa sentitzerainokoa senti dezadan.) Being such always through Thy passion to feel the mortifying of my flesh (Zeugaz beti egotea gurutzean, non herioa bera josi duzun -hala sines-ten baituteta bertan hilik utzi) to be always with Thee in the cross, where Thou hast nailed (as I do believe) and yielded death dead (bekatuak oro ere utzi zenituen bezala, nik neuk sarri askotan bertatik eraitsi eta berriz askatu baditut ere) and also all sin, which I have oftentimes taken down again and untied.jj 150 Kontrakarra, ugazabaren betebeharrak hauexek dira :

151 (fedez eta sagaramenduz ni ohartaraztea) to warn by faith and sacraments (otoitzez niri agirika egitea) to admonish me by preaching (zure gorputz onurakoaren eta odol santuaren hartzeaz ni lasaitzea) to comfort me by the receiving of Thy worthy body and holy blood 152 Betekizun hauen gabeziak batzuetan atxakia dira mirabearen alde, horrexegatik dio arimak burua ateratze aldera : « Sarri askotan apurtu izan dut zugazko ituna, ezen nire arima gaixoari sobera eman izan baitzaio jaten ogi txarra eta dotrina kaltegarria » « Oftentimes have I broken with Thy covenant, for my poor soul was too much fed with ill bred and damnable doctrine. » 153 Ohartu gaitezen bi betebeharron tankerak arras diferenteak direna : otseinaren eginbeharrak gogo-kidetasuna (bestera esateko adiz-kidea izatea), laguntzioa eta bekatua saihestea dira (berau dena delarik ere). Ugazabaren betekizunak, berriz, apaiztasunari datxezkio : sagaramenduak eta dotrina. Horregatik hain zuzen ere ugazabari ogi txarra eta dotrina kaltegarria lepo-ratzearen ustezko inkontsistentzia

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abadeen kontrako kritika bilakatzen da. Bi kide daude, kideok ez daude maila berean, eta bi maila diferente horien artean kontratua ezartzen da bataioaren bitartez.

5.2. Zaldun-gudaren eszena : bekatuak eskaini grazia jaso

154 Heriotza da maitaleen arteko azken lotunea. Holako lotura bi lokarri moduren bitartez aztertzen da testuan : heriotza-bizitza eta arima-gorputza. Maitasunak (Jainkoak) lotu ditu heriotza eta bizitza elkarrekin. Gurutzearen misterioaren bitartez, heriotza ez da gehiago atzen azkena. Holaxe lotu ditu maitasunak alde bi-biak : « bizitza hilez, eta bizitza amairik gabea ». « Bizitza hilez » honek bizitza erreala esan gura du, eta « amaigabeko bizitza » esapideak heriotzez osteko bizitza esan nahi du. Beraz, Jainkoarenganako lotu desira honetan bi aukera ditugu : edo heriotza badator arimak Jainkoa aurki dezan, edo Maitasunak arima itxuraldatzeko mirakulu mistikoa egin beharko du.

5.2.1. Lotunea

155 Gurutzearen misterioa baino lehen heriotza zorrotza zen denongan, baina, « gorputza eta arimaren arteko kopulazioa kautan harturik, euron ordena, maitasuna eta adostasuna, tristezia gehiena bata bestearengandik aldentzean zetzan ». « considering the copulation of the body and the soul, their order, love, and agreement, where the extreme sorrow was in the departing one from another. »kk 156 Gorputz-arimen erlazioa elkarrekiko maitasuna zen (piztiazaletasuna edo zoofilia, lehenago esan bezala) eta horregatik zitzaion heriotzari beldurra. Baina orain bi kontzeptu ditugu gure helburuetarako interesgarri. Bata heriotzaren zorroztasuna (ley severa, Quevedok): zurruna dena ez da Jainkoaren Legea Etxeparerengan bezala, baizik eta lege naturala, eta lege naturalak dio arima eta gorputza elkarrengandik aldenduko direla. Bigarrena zera da, Jesusek heriotzaren aurkako borroka irabazi zuenez gero, berarekiko maitasuna sortarazi ziola arimari. Era honetara, arimak ez du areago egon gura gorputzarekin ; zelanbait indartsuenarekin egon nahiago du. Behin zurruntasuna legera igarota, eta gero legetik heriotzara, ez zaio jada beldurrik Judizio Jeneralari.ll Hemen Jainkoa da oreka-haizutasunarekin (equitas-erru-kia) bat egiten dena. Horrekin guztiarekin ere, autoreak gordeko du azpian kontu-liburuaren irudia eta bekatuen gaindikinarena.

157 Katolikoen iruditeriatik ateratako beste ezaugarri bat bekatuen erakus-tea da. Katolikoen psikologian bekatuak garbitzeko modu bat eurek plazara-tzean, argitaratzean, begietaratzean zetzan ; iritzi publikoari erakutsiz, hone-tara ohore kopurua, balio pekuniario gisa (prestigioa, boterea eta hortaz, bezeroak) lotsarekin orekatzen zen. Testu honetan garrantzizkoa dena zera da, norberaren jokaeraren alde isildua—hitzak eta gogoetak—erroilu batean idatziak balira bezala erakusten direla— eta holan Jainkoak jakin badakiela azpimarratzen da. Ez da bekatuen garbiketarik bekatuok publiko egitearen bitartez konfesioan edo aitortzan bezala, fidantza kriminalaren ordainketa baino. « Charity does not offend justice and truth, » « Karitateak ez dio irainik egiten zuzentasunari eta egiari » esaldiak esan gura du zorren ordainketa esku-zabalak ez lukeela justiziaren kontra egingo (hots equitas-en kontra), zeren zorra kitatzeko baldintza bakarra fedea edukitzea bai-bailitzateke (eta ez pietatea edo errukia).

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158 Arimak berez irabazi du galera, baina Maria-mesedea zen bide judizial hura ez da aurrerantzean. Ustezko oztopo hau gainditzeko bidea fedea da ; fedea, ezinezkoan sinestea, hots, Jesusek ekintza gaiztoak bertute bihurtuko dituela sinetsi behar, eta zeren bidez eta ezkontza itunaren bitartez. Fedea, beraz, oso tankera zehatz bateko erlazioa da, equitas edo mesedearen oso bestelakoa, baina antzerako funtzioa beteaz. Hara hemen arartekoa zen alde-tik aitortzaren kontrako erasoa : « Hortaz, O Jauna, nork kondena nintzake, Bera (epailetzat emana zaidana) nire senarra, nire aita, eta nire aterpea baldin bada ? » « Then, O Lord, who shall condemn me, since He (which is given me for a judge) is my husband, my father, and my refuge ? »mm 159 Epaiketa honetara dator : • Aita epailea da ; alabaina, edozein aita onen jokaera naturala da bere umea inoiz ez kondenatzea, betiere zuritzea eta defendatzea baino. Horixe litzateke gure egungo terminoetan errugabetasun suposamendua. • Akusatzailea Jesus da eta, aldi berean, bere erredentorea da. Areago, ez da bakarrik haren akusatzailea, baizik eta haren legegizona (boze-ramalea) ere bai. Akusatu beharrean eskusatu egiten du, eta beragatik mintzatu.nn

160 Europako hamaseigarren mendeko pentsamoldeak giza izaera defini-zioz gaiztotzat zuen. Beraz, Jainkoagazkoak arima goraltxatu arren, bada isuri arazo bat garbitu beharrekoa, arimak txarrerako eroria izatea, alegia. Autoreak dakarren irudia turnamentarena da, Jesus eta Bekatuaren arteko zaldun-guda. Borrokaren ostean, Bekatuk ez du indarrik (prestigiorik) inor infernuan edukitzeko, galdu ditu bere bezeroak ohorearekin batera. Segituan autoreak metafora destolesten du : Jesusenganako maitasuna bekatuarenga-nako eroria baino indartsuagoa da. Justa eszena honetan, barkatu den bekatu bakoitza Jesusen gloriarakoa da (gloria zaldunerian ulertzen den bezala), zenbat eta bekatu gehiago, orduan eta postura edo apustu zailago « faborito » ez zenarentzat. Jesusek bekatuen zorra kitatzen du. Trukaketak ezkontzan oinarritzen dira : bere ondasunak gure ondasunak dira Bataioan agindu bai-tzizkigun ; bere merituak gure merituak dira bere karitateagatik, eta gure bekatuek bere gloriarako balio diote. Puntu honetan, karitatea zuzentasunari edo berdintasunari jazartzen zitzaion esaldi hura argituko da : fedea gure aldean da, eta karitatea bere aldean da, eta bi-biek betetzen dute mesedeak edo errukiak dotrina katolikoetan egiten duen rola. Fedeak (oparia jadesteko) karitatearen bitartez lotuko ditu : « Otsein umila bere jabearekin. (...) Ezaguturik neurez ahula naizena eta Jainkoarekin indar-indartsua... » « the humble servant unto his master. (...) Knowing that as for myself I am weak and with God I am right strong... »oo

Ondorioak

161 Margaritaren Mirailak Andre Marian emandako rola Jainkoagazko jaurespen erlazio feudala bilakatzen du. ÆQUITAS edo berdintasunaren kon-tzeptua, legearen zurruntasuna biguntzeko tarteko zoru bezala ulerturik, mesedearen edo errukiaren rol femeninoa bilakatu zen ; Jainkoaren legea zurruna, Andre Mari biguna. Aitzitik, Margaritaren irudi berrian malgutasu-nak arimaren borondatean egon behar du, eta Jainkoarekiko erlazioak ispila-tzeko bi kontzeptu darabiltza : fedea arimarengandik Jainkoarenganaino, eta karitatea Jaikoarengandik arimarenganaino.

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Equitas : legea berdintzea→ epaiketa : mesedea-errukia vs. jaurespena : fedea- karitatea 162 Epaiketa eszena familia harremanen eszena batera aldatuz gero, Margaritak Jainkoa eskainiko du Aitatzat eta epailetzat, eta Jesus semea akusatzailetzat eta senartzat ; eta arima emakumearekin identifikatzen da eurekiko harremanetarako : alaba, arreba, ama eta emaztea.

163 Esango nuke Europako hamaseigarren mendeko goi mailetakoek ezkontza jaurespen erlazio gisa ulertzen zela. Jesus-senarrak itzala irabaziko du bere emazte-arimaren fedearen bitartez, eta arima-emazteak baliatu ahal ditu bere senar-Jesusen ondasun- izenak. Atzean dautzan irudietako bat arimaren faboreagatik Jesusek eta Bekatuak duten turnamenta da. Fedea jauntza-ren ezagutza da ; trukean jaunaren karitateak bekatuak ordaintzen ditu. Ez da tartekorik, harremanak ez du bitartekorik. 164 Goi mailako aristokratentzako harreman biribilenak familiaren barru-koak ziren. Emakumeak aitari obeditu behar zionez, eta begirunea zor nebari, baina, era berean bere senarra ere zerbitzatu behar, bada emakumearentzat ere, segurutik lehian leudekeen bi etxe desberdinen arteko tentsioa lasaituko zen baldin eta aita eta senarra berbera baziren ; hartara etxe bakarra zen gobernatzeko eta tentsioa saihestuko zen.

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NOTES

1. Oso eztabaida interesgarria zaigu, batez ere postkolonialismoaren atzaparretan erortzeko arrisku bizian gauden guri euskaldunoi, Mark Turnerrek bere Reading Minds 1991ko lehen atalean egiten duena : « Pretext : Professing English in the Age of Cognitive Science » [3]-24 orr. Guztiz bat nator hangoarekin. Literatura ezin da botere jakin bat oinarrituko duen testu kanonikoen erreskada izan, edo erreskada horren kontra eraiki daitekeen beste erreskada altematiboa ; adibidez, eta horrelako bihurketarik gure literaturaren historian gerta baledi horrek izan lezakeen onuragarritasun ideolo-giari garau bat ere kendu gura izan barik ere, Etxepare aztertzetik hasi beharrean Milia Lasturkoagandik hasiko bagina bezala (Leizaolak legez) edota Orixe aztertu beharrean Errose Bustintzaren ipuinak ikertuko balira (ailedi izan !). Ondino erradikalagoak izan behar dugu : Literatura giza fakultate kognitiboa da, zeinaren bitartez mundu posibleak eta horien esangurak erai-kitzen ditugun ; beraz, literatura pentsatzeko eta arrazoitzeko mekanismoa da. 2. Perelmanek eta Olbrects-Tytecak 1958ko euren liburu klasikoan (orain gutxi espainolera itzuli da lehengoz) bereizten dute inkonpatibilitatea eta kontraesana. Jar bedi irakurlea Cicerok bere Topican « anbiguotasuna » azaltzen dueneko kokaeran, hots, legea noiz eta zelan den anbiguoa. Bi perpausen arteko kontraesanak sistema formalen bat eskatzen du, ez badago sistema formalik kontraesana ez da existitzen. Inkonpatibilitatea aldiz zirkunstantzia kontingenteek, gertaera partikularrek edo giza-kien erabakiek eraikitzen dute. Inkonpatibilitateak saihesteko hiru hurbilketa azaltzen dituzte Perelmanek eta Olbrechts-Tytecak. Lehenak edo logikoak aldez aurretik egon daitezkeen zailtasun eta arazoak ikustea litzateke, eta horrela legeak eta arauak : aplikatuz alboratzen dira imajinatu diren inkonpantibilitateok. Honi dedukzioa deitzen diote. Bigarrena da gizaki praktikoak egingo lukeena, arazoei aurre eginaz biderdiratu heinean, ez lehenago, kontzeptuak berplanteatuz eta berrezarriz bakoitzean, behar den heinean bakarrik. Lehen hurbilketa gizaki teorikoarena bazen, hau gizaki praktikoarena da, zeinak ez duen lar agindu nahi, bada ezpada, egoera berrietara makurtu ahal izateko. Eta hirugarrena da gaixotasun diplomatikoa deitzen diotena, arazoari aurre egiteko momen-tua atzeratzea edo arazoarekin topo egingo den egoera edo kokagunea saihestea. Guri lehen biak interesatzen zaizkigu gure ahozkotasun/idatzizkotasun dikotomiarako. 3. Hau izaten da Celaya Ibarrak eman ohi duen dikotomia : lege idatzia = dedukzioa (lege orokorra-ren interpretazioa kasu partikularrari aplikatu) vs. Forua = indukzioa (kasu partikularretik lege orokorrera, askotan lege orokor hori hitzetaratu ere egin behar ez delarik).

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Ez nioke abaguneari igarotzen utzi nahi, foruaren azterketa erretoriko-literarioa egitea nori dagokion galdetu gabe : abokatuei ?, historiagileei ? Ala literatur kritikoei ? Esan behar dut ikaragarri eragin zidala eta didala abiapuntu honek nire ibilbide akademiko osoan. Adibidez Ayalako foruari Celayak idatzitako sarrera edota Celaya Ibarra, A. Vizcaya y su fuero civil. Iruñea : 1965. 4. Ikus Mieke Balen Narratology : Introduction to the Theory of Narrative (1985), (Espainolera ere itzulita daukazue Cátedran) batez ere fokalizazioaz hitz egiteko erabiltzen duen « testua », zein den erliebe batean ageri den kontaketa. Bestalde lehen aipatu dudan Euskal Foruaren azterketa erretorikorako pertinentea dugu guztiz Mark Turnerren The Literary Mind (1996) liburuko lehen atala : « Bedtime with Shahrazad » (3-11 or). Atal honetan Turnerrek parabolaren bidezko pentsabidea azaldu nahi digu ; halan da ezen giza-kiok egoera irreal (iraganeko zein alegiazko) batetik orainaldiko egoera batera informazio eta egitura beharrezkoenak proiektatzen ditugula. Proiekzio hori image-schema edo irudien hezurdura soildua proiektatuz egiten da hein handi batean. Bide honetatik Erdi Aroan exempla edo consejek zergatik zuten halako garrantzia igartzera hel gaitezke, literatura didaktikotzat jo beharrean gnomiko bezala definituz. Adibidez, egia baldin bada Erdi Aroko mundu muslimean, Granadan esaterako, vizir izatera zapatagin xume bat hel zitekeela baldin eta literatur ahalmenik bazuen, honek agian erakuts lezake gizarte hartan pentsaera paradig-matikoak (Aristoteleren paradeigma kontzeptuaren ildotik) lehentasuna zuela. Aristotelek paradeigma azaltzeko (enthymemari jazarrita) honako adibidea jartzen du : Iraganean, persek Egipto inbaditu duten guztietan gero Greziari eraso diote ; gaur persek Egipto inbaditu dute, beraz, goazen Pertsia erasotzera berandu baino lehen. Euskal Foruek ere arrazoibide paradigmatiko honi emango ei liokete lehentasuna. Aristotelek dio paradigma indukzio bat dela, eta ez doala ez aldetik orokortasunera, ez orokortasunetik aldera. baizik eta aldetik aldera, berdinetik berdinera. gauza bi genus beraren barruan daudenean baina bi horietarik bat hobeto ezagutzen denean. Hau da paradigma premisa partikularretik ondorio partikularrera doan arrazoibidea da. lotura unibertsala esplizitu egon behar ez delarik. Eta honek analogia aztertzera abiatzen gaitu. 5. Gogoratu, bestela. kontrarreforman nori zuzendu zitzaion Axular bera : erdi mailako kultura zuen biztanleria erabat alfabetatuari. ordurako ahozkotasuna iraganeko kontua zen seinale. Bestalde, orainarteko paragrafootan eman ditudanak susmo eta senak gidatutako oldozketak baino ez dira : aurre hipotesiok baliagarri izan dakizkiguke ahozkotasunaren eta idatzizkotasunaren kontzeptuei hauspo handiagoa emateko. agian Ongek ematen duen analisiari jarraituz : Oraliry and Literacy liburu klasikoan. (Patxi Salaberrik ere Ong darabil Axularren gaineko bere tesian). Gainera Ong ezinbestekoa zaigu garai hauetako Euskal literaturari dagokionez. zeren Ongek bere tesian Petrus Ramusen edo Pierre de la Raméeren dialektika aztertu zuelarik bi azterbide atera baikeni-tzake : alde batetik Dialektika « egia bilatzeko » mekanismoa da, Platonek egiten duen Sokrateren irakurketan behintzat, eta horretara. ahozkotasunarekin loturik dago (dotrina katolikoak dauden bezalaxe). Baina bestetik Ramusengandik abiatuko da XVIII mendean suertatu zen ikasketen gaineko ikuskeran (« zientzietakoa naiz » vs. « letretakoa naiz » esapidearekin gaurdaino inmortaliza-tzen dutena batzuk batzuk). Dialektikak Topika gisa ulerturik argumentuen bilaketaz eta ebaluatzeaz ziharduen, gero Logikak bere gain hartuko zuen eginkizuna : diziplinen banaketa beraz honetara lotzen da : zientzia edo « egia » alde batetik. eta humanitateak edo « forma » bestetik. Bide honi eutsi-rik, joan gaitezke aztertzera ze alde zegoen Larramendik bultzatutako erreformaren eta RSBAPek bultzatutakoaren artean. 6. « Patriarkalismoa aitaren botera da, hau da, sistema familiar-soziala, ideologikoa eta politikoa zeinetan gizonek erabakitzen duten emakumeek zein eginkizun bete dezaketen eta zein ez —dela indarraren bidez, presio zuzenaz, erritualen bidez, tradizioaz, legeaz eta hizkuntzaz, ohituren

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bitartez, etiketaren bidez, heziketaz nahiz Ian banaketaz— eta zeinetan emakumea gizonaren pean dagoen leku guztietan. Ez du nahitaez esan nahi inongo emakumerik botererik ez daukanik, edota kultura jakin batean emakumeek ezin ditzaketenik izan nolabaiteko botere batzuk. Esaterako, Crow tribu matrilinealean, emakumeek maila handiko eginkizun ohorezkoak betetzen dituzte zeremonia eta jaialdietan. baina hilekoarekin daudenean ezin dute inorekin harreman sozialik izan, eta objektu sakratu bilakatzen dira. Emakumeek eta gizonek fenomeno kultural jakin bat konpartitzen dutenean oso gauza diferenteak esan nahi ditu genero bakoitzarentzat. Gizonek beloak daramatzatenean — adibidez Ipar Afrikako Tuaregen moduan— urruntasun horrek pertsona horren estatusa eta boterea areagotzeko balio du, baina nekez esan genezake halakorik purdah jokabide kodepean bizi diren emakumeen gainean. Azken buruan banaketa lerroa markatzen da beti, eta kultura guzti-guztietan markatzen da. modu diferenteetara bada ere. » « Era berean, patriarkalismoak ez du esan nahi aitaren boterea zuzenean semearengana pasa- tzea. nahiz eta botere-erlazio hori garai batean ez zen zalantzan jartzen, esate baterako feudalismoan edo familia victoriarrean. Alexander Mitscherlich psikoanalista alemanak arrastoa jarraitu dio aita-seme erlazio horren gainbeherari. industrializazioaren presioetan, masa produkzioan eta lan espe-zializazioan barrena : « lana » etxetik kanpora irten bezala eta gizartea konplexuago eta zatikatuago egin ahala, aita familiarengandik urrun dagoen figura bihurtu zen, hau da, garai batean zeukan aginte praktikoaren « mamia » galdu zuen. Hala ere. Mitscherlichek dioenez, « gure gizartearen egitura patriarkala oso lotuta dago pentsaera magikoari. Honako uste hau du oinarri : aita-seme, Jainkogizaki, arautzaile-arautuaren artean dagoen botere harremana (ahalguztiduna vs ezindua) antola-mendu sozialaren printzipio naturala dela ». Ahalguztidun- ezindu harreman hori batez ere gizonen eta emakumeen artean gertatzen da, eta gure hezkuntzak, antolamendu sozialak eta « pentsamendu magikoak » oraindik daramate irudi paternalista horren aztarna. » (Adrienne Rich. Of Woman Born. liburu klasikotik Ana I. Moralesek itzuli eta moldatua). 7. Oso esanguratsua da Anne Loken martirioa ; Anne Loken martirioaren berri segurutik ez zuen Erregeak berak ere izan, errepresio mekanismoak bere bideak baitzituen. eta Erregearen jakinera maila goreneko erreformazaleen kasuak baino ez baitziren helduko. Anne Lokek ingelesezko lehen hamalaurkunak eratu zituen, Calvinen sermoien itzulpenekin batera ; hamalaurkunak edo sonetoak liburua 1560an inprimatu ostean idatzi ziren atzealdeko orrietan (Jane Donawerthek eta Linda Dovek eginiko transkripzioa in « University of Maryland. Course Packet #10. Course name : English 719, Rhetoric and Early Modern Women's Writing. Instructor : Jane Donawerth. » BelJean Printing. Beltsvilee MD, 1999) : Sermons of John Cal-/vin, vpon the Songe/that Ezechias made af-/ter he had bene sicke, and / afflicted by the hand of/ God, conteyned in the 38. Chapi/ter of Esay. / Translated out of Frenche / into Englishe, / 1560. 8. De Guise eta Navarre etxeak elkarren etsai izango ziren Europako mendebaldeko gorte askotan. Elizabethen ahizpa-erdia eta arerioa, Eskoziarren Mary erregina alegia, De Guise etxekoa zen. Labriteko Joanak bere buruaren justifikazioa den gutun liluragarri bat idatzi zion Elizabethi, eta hantxe diotsoz gauzak bion amen adiskidantzari eutsita : Memoires et poesies de Jeanne d'Albret publies par le Baron de Ruble, Paris 1893., edota : Historie de nostre temps contenant un receuil des choses memorables passees et publiees pour le faict de la religion et stat de la France despuis l 'edict de paciffication du 23 jour de mars, jusqu'au present, 1570. Tamalez gutun hori ez dago oraindik euskeratuta, eta benetan mereziko luke, bai ikuspegi feminista batetik (adibidez, garaiko emakume idazleen artean lehen pertsonako izenordearen erabilera ez ohikoagatik), eta bai euskal literaturaren eskubide osoko testua delako, edo behintzat eskubide hori eztabaidatzen hasi ahal izateko beste leku batzuetan egiten denaren argitan. Cf. Mary Eskoziarren erreginak frantsesez idatzitako sonetoak nola ageri ohi diren Ingelesezko poesia antologietan. 9. Hurren Nafarroako Margaritaren bizitzari buruzko azalpen bat eman gogo dut, beharrezko uste ditudanak bakarrik. Oso nortasun konplexukoa zen bera, hamaseigarren mendeko Europako

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politi-kan pertsonalitaterik handienetakotzat jo izan da sarritan. Garaiko letren munduan ederto ezaguna zen, poesiarako eta literaturarako zituen trebeziengatik. Gaur egun, ia-ia bakarrik aipatu ohi da Heptameroiagatik (zein, euskaldunon lotsarako, ez baitago euskeratuta). Gehienetan Mirraila aipatu ere ez da egiten. Bere ama Savoyko Louise zen, eta hark irakatsi zion bere nebagazko deboziorainoko isuria ; noraino eta, ume denboran, amak euren buruei « hirutasun santua » esateraino. Neba Frantziako errege izango zen : Frantzisko lehena —Iztuetari sinestekotan, Irundar batek atxilotu zuena Paviako gudan—zeinarengan Margaritak eragin handia izango zuen Frantziako tronura heldutakoan. Oraindik Angulemako Margarita zenaren lehen senarra, d'Alençon, ez zen itzal handiegikoa gizartean, baina hura hiltzean, Margarita Normandiaren jabe egin zen : beraz, Margarita Angulema eta Alentzonekoa ordurako. Bere bigarren senarra Henri Albretekoa Labritekoa edo Lebrettekoa izan zen (« erbiño »). Henrik Goi Nafarroatik alde egin behar izan zuen arrapalada batean, bere ama Catherina Foixkoarekin batera, espainolek Erresuma inbaditu zutenean. Baina beti iritzi izan zion bere buruari Nafarroako errege (eta susmoa daukat hizkuntzaz euskalduna zela, bere ondorengoak ez bezala, gero aipatuko dudan aztarna bategatik) ; kontua da ze gortesau bilakatu ez ziren handikienetako bat izan zela, bere bizitza osoa eman zuen Erresuma berreskuratu nahian, familiak Frantziako gizarteko katenbegietan gora egitea bainoago. Enperadoreak, Karlos bosgarrenak, Paviako gudan atrapatu zuen atxilo. Frantziako erregearekin batera ; baina Frantziskok ez bezala, ihes egitea lortu zuen, oso era « gaskoi » batean : izarez osaturiko eskailera batetik jaitsiaz. Horren ondorioz, alde batetik Henri gerrako heroitzat hartu zuten Frantzesek, baina, bestalde Parisen atzerritarra zen, eta Frantsesek ez zuten ulertzen zergatik erabiltzen zuen errege bati zor zitzaion ponpa eta parizta ; antza bere gorteak Parisen zuen gastua izugarria zen, eta agian hortik hedatuko zen gero Frantziar literaturan ageri den gaskoiaren irudia. Irudi hori honakoan azter daiteke : Poisson, Raymonden « Le poëte basque » antzezlana in Les oeuvres de mr Poisson. Divisées en deux tomes. Seconde edition, corrigée & augmentée ... A Paris, Chez Thomas Guillain, 1687 (Bidenabar, pare bat esaldi ageri dira hor euske-raz, eta horien gainean ez dut lan filologikorik ezagutzen). Paviako gerraren ondorioz, Carlos V.ak urtebete izan zuen atxilo François la. Frantziako erre-gea askatzeko diplomazia lanetan Margarita ibili zen. Erregea askatzeko eskakizunen artean, erre- gearen seme biak trukean han geratu beharraz gain, Nafarroako auzia erabaki zen : Madrileko itunean (1525) Frantziak Nafarroaren gaineko eskubideei uko egin behar izan zien, edo bestela esanda, Françoisek ez zion Henriri lagunduko Nafarroa berreskuratzen. Guzti honetaz Henrik ez zuen ezer jakin urte askoan —bestela Henrik Carlosekin bat egin zezakeen Françoisen kontra, noski, eta horrek espainolak jarriko zituen Boderleren ateetan—, eta Margarita bera ere ezjakina zen kontu horretaz, edo halan ziurtatu zuen berak behin eta berriro geroagogarrenean. Nafarroa betirako zen galdua 1525eko Madrileko itunean, eta Labritarrak ezjakinean omen zeuden horretaz. Henrik, urteak igarota, ez zion inoiz sinetsiko bere emazteari parte hartze guzti horretaz ezer jakin ez ei izana, eta bikotearen hartu emana gaiztotuz joan zen aurrerantzean. Margaritaren lekua oso zaila izango zen hortik aurrera : alde batetik hezia zen bere nebaren alde egiteko, eta hala, bere nebari obeditzeagatik, ezkondu zen Henrirekin, baina, bestalde, bere senarrak eragiten zion bere nebaren-gan indar egiteko Nafarroaren arazoan. Margaritaren bideak eraginbakoak zirela ohartu ondoren, Henri zaharra bere lurraldeetara gorde zen, eta ordutik aurrera bizitza osoa emango zuen Valoisko koroaren kontra azpitik jokatzen. Honek aukera bi ekarriko zizkion Margaritari : edo bere senarraren atzetik joan eta gortea utzi behar zuen (garai horretan gortea ibiltaria zen, baina beti ere Bordeletik iparraldean, hots, Henriren lurral-deetatik kanpo), edo senarra utzi eta nebari jarraitu. Pentsa ezazue « heziera oneko » etxandre baten-tzat zer zen hori. Bestalde, nahi baino gehiagotan zegoen bere senarraren azpijokoen jakitun, konpli-zitateagatik epaitua izateko arriskuarekin, eta bere senarrak Frantziako gortean zuen izan txarra ere jasan beharko zuen. Senarrarekin zegoenean,

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nebak traizioaren sunda hartzen zion, eta presioa ezarri. Nebarekin zegoenean, senarrak abandonatua zela esaten zion. Esan bezala, senar-emazteki-koek hondoa jo zuten. Margaritaren bizitzak ispilatzen du garai horretako goi mailako emakumeen ezbaia : euren aiten etxaldea handitzeko trukaketa objektuak ziren, eta, hala ere, senarren laguntzaile zirelarik, ezkondu berri ziren etxearen onura eta onerakoen bilatzeari buru belarri ekin behar izaten zioten. Margarita bizi zen etxe biak elkarren arerio zirenez, ez zuen arreba-alaba ona eta, aldi berean, emazte ona izaterik. Margaritaren lehen umea emakumezkoa izan zen. Joana (Jehane) Labritekoa —guk aitortu eta ikertu baino garrantzia handiagoa izango zuena euskal literaturan— eta gero galdutako beste bat. Bikotearentzako Joana eztabaidagai eta liskarren iturburu ere izango zen : alde batetik lege Salikoagatik ez zen Henrik nahiko zukeen primua, eta bestalde, erregearen aginduz, Joana aitaren lurraldeetatik kanpo hezia zen, amaren lurraldeetan, Normandian hain zuzen. Gogoratu euskal legeen jardunak agintariari eskatzen diola batzarretan egotea eta Herriaren lege eta ohiturak ondo ezagutzea. Erlijio arloan eta intelektualean, Margaritak lehen mugimendu erreformista babestu zuen. Bere nebak hasieran ontzat hartu zuen, baina gero, erreformismoak egitura hierarkikoen kontra egoteare-kin batera bere baitan daraman demokraziarako haziak atzez eraginda edo, gogor jazarri zitzaion ; berez, gainera, Françoisek ez zuen Erromatiko urrunagoko aldentzerik behar, zeren Erromak, Ingalaterran gertatutakoa Frantzian ere gerta zedin beldurrez, emanak baitzizkion libertate franko Galikanismoaren bitartez. Aitzitik, Henrik bere lurraldeetan zuen erlijio politika itzuri bikoa edo anbiguoa zen : legez edo teorian, erreformisten kontra zegoen, berez edo praktikan, erlijio kontuetan ez zuen bere burua nahasi nahi. Jarrera honek lur neutrala sortu zuen, bere alabaren garaian adierazpen askatasunera eramango zuena. Artean baina, Margaritak nozitu behar izango zuen bere senti-kortasun erlijiosoak eta intelektualak ezin gauzatzea bide politikoak urratu gabe egoteagatik. Kalbinismoak presio handia jartzen zuen handikiengan —ustez buruen atzetik etorriko zela herri xehea— atera zitezen armairutik eta erakutsi munduari zer pentsatzen zuten benetan. Margarita ez zegoen horren egoera orekatsuan non senarrari eta nebari. bi-bioi. aurre egin ahal izan ziezaiekeen. baina guztiarekin ere. bestera pentsatzen zuen giro disidentea bultzatu eta indartzea lortu zuen. Margaritaren alabaren idazkien azterketan oinarriturik. eta Orthezko Akademiaren curriculu- mari buruzko araudia kontuan harturik (Roelker 1968). Maroten Salmoen itzulpena aipatuko nuke garai hartako pentsalari askeen ikur gisa. Oraindik ez dakit nola josi. baina uste dut garai hartako ingurune intelektualerako giltzarri suertatu behar duela salmoen inguruko (adibidez Jean Ezpondaren) meditazio lanek edota lan aszetikoek. Tamalgarria da Oñatiko Unibertsitatearen gainean egindako lanek erakusten duten beldur postkoloniala (vasco edo nazionalista dei ez ditza-ten) : Nire ustez hiru dira Euskalerrian kontutan hartu beharreko gauzak garaiko mugimendu kultu-rala ulertzeko : Jesuiten sorrera (eta euren erlazioa Frantziskotarrekin eta Agustindarrekin hezkun-tzari dagokionez), Orthezeko Akademiaren sorrera eta Oñatiko Unibertsitatearen sorrera, azken biok elkarri loturik zeuden bandoekin erlazionaturik : zein zen hiru instituzio horietan eskatzen ziren bete-behar akademikoak eta zein zen ikasle sartu berriei sartu aurretik suposatzen zitzaiena. (Eskuragarriago gurako nuke erreferentzia hauxe : Coudirolle, Joseph. Etude sur I'Academie d'Orthez, fin du XVIe et commencement du XVIIe siecle.. J. Goude-Dumesnil. Orthez : 1885). Lehen agindu dut azalduko nuela zertatik atera diodan susmoa Henri zaharra, Margeriteren senarra eta Joanaren aita, euskalduna zela ; oso oinarri ahula da. baina ikerketarako abiapuntua izan daiteke hala ere, eta arrazoia hauxe da : Karlos V.ak Henrigaz azpiko harremanetan espioitzan aritzeko Martin Ezkurra arabarra (« Descuna » garaiko testuetan) izendatu zuen. Nik uste dut Karlosek bazekiela zer egiten zuen euskaldun bat beste euskaldun batekin lotzean. Berriz, bere ilobak. Henri IV.ak, ez zekien euskeraz. eta hori demostratuta dago, behin, bere amaren izenean Behe Nafarroako matxinada bat zapaltzera joan zenean, hangoekin berba

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egiteko itzultzailea behar izan zuela dioelako testuak. Nik uste dut François Frantziako erregeak ere bazekiela zer egiten zuen Henri zaharraren alaba. Joana, Normandian, amaren lurraldeetan, eta ez aitarenetan, heztea agindu zuenean, hizkuntzari eta lege-ohiturei dagokienez. Beste iker- bide interesgarri bat izan daiteke aztertzea zelan aldatu zuen herriaz zuen ikuskera Behe- Nafarroako foruak agindukeran senarra bere buruaren gainetik jarri zuenetik Akademiako araudiak eragin zituen arte. 10. Erretorika. Lehen liburua. bigarren atala, 4, 5 eta 6 paragrafoetan ; 1356a-1356b bitartean. Noski, ethos eta pathos gaur egungo narratologian ere landu izan dira. adibidez. Seymour Chatmanek kontzeptu hauek bereizi zituen : Benetako egilea, egile inplizitua edo suposatua eta narratzailea Benetako irakurlea. irakurle suposatua eta narrazioak nori diotson edo hartzailea (narratee-a) Chatman (1980). Story and Discourse. Apud David H. Richter (arg.). Narrative/Theory. 1996 : New York. Longman Publishers USA. 11. Michael J. Reddyk azaldu zuen zelan komunikazio prozesua ulertzeko erabiltzen duguna kanala-ren metafora den : hots, igorlea, kodea edo mezua, eta hartzailea kontzeptuak komunikazioa kanala balitz bezala metaforizatzetik datoz. Metaforek gertaera baten gainean argi berria isurtzen dute. baina gertaera horren beste alderdi asko ezkutatu ere egiten digute. Esan nahi baita askotan ahaztu egiten zaigula komunikazio prozesua ez dela igorle bat, mezua eta hartzailea. horiek kanalaren metaforaren alderdiak baino ez direla. komunikazio prozesua askoz ere gauza konplexuagoa dela eta segurutik informazioaren « trukaketarena » alderdirik sinpleenetakoa dela prozesu horretan. Edo bestela esan, ahaztu egiten zaigu metafora bat erabiltzen ari garela, eta metafora deskribatzen dihar-dugu. Komunikazio prozesurako erabili ohi den kanalaren metafora hori folk teoria edo herri ikuskera da (eta ziurrenik komunikazioaz mintzatzeko erabil dezakegun bide bakarra ere bai). Ikus Michael J. Reddy « The conduit metaphor : A case of frame conflict in our language about language » adibidez bilduma honetan : Ortony, Andrew (arg.) Metaphor and Thought. 2.ed. Cambridge University Press. 1993. Espainolera itzulita dagoen Lakoff eta Johnsonen Metaphors We Live Bx ( Metaforas de la vida cotidiana) horretan ere zeharka azalduta dago. 12. Ikus Perelman eta Olbrecths-Tyteca horretaz. b. Si vous lisez ceste oeuvre toute entiere, Arrestez vous, sans plus, à la matiere, En excusant la rhythme et le langage, Voyant que cest d'une femme l'ouvrage, Qui n'a en soy science, ne sçavoir, Fors un desir, que chacun puisse voir Que fait le don de DIEU le Createur, Quand il luy plaist justifier un coeur : 1548ko ediziotik : IF thu do throughly reade thys vvorke (dere frynde in the lorde) marke rather the matter than the homely speache therof, consyderynge it is the stodye of a woman, whych hath in her neyther connynge nor scyence, but a fervent desyre that yche one maye se, what the gifte of God the creatour doth whan it pleaseth hym to justyfye a hart. Ohar bedi irakurlea itzultzaileak metri causa sartu duen lerro horrek daukan berdintasunaren aldeko bindikaziozko itzalaz (batez ere kontutan harturik emakume batek diotsola gizon bati) : « dear friend in the Lord » Jainkoagan lagun-senide-kide maitea. c. Quel est le coeur d'un homme, quant a soy, Avant qu'il ayt receu le don de Foy. Par lequel seul l'homme a la congnoissance De la Bonté, Sapience et Puissance. Et aussi tost qu'il congnoit Verité, Son coeur est plein d'Amour et Charité

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1548 : For what is the hart of a Man. concernynge hys owne strength, before he hath receyved the gift of faythe ? [*]Therby only hath he knowledge of the goodnesse, wysedome. and power of God. And as sone as he through that fayth, knoweth pythely the truthe hys hart is anon full of charyte and love. 13. Gogoan izan Augustinen egin beharra, behin kristautasuna boterera heldu eta gero, kristautasu-nerako zein iturri izan litekeen baliagarri epaitzea izan zela. bere Doctrina Christianan ageri den bezala. Bestalde honek bere garrantzia ere badu zeren Erreformistek esango bailukete San Augustin izan zela gauzak artez ikusi zituen azken katolikoa, hortik aurrerantzean katolikotasunak bereganatu baitzituen lekuan lekuko sineste paganoak. Hau da, erreformistek euren gain hartuko zuten eginki-zuna kristautasuna paganismotik garbitzea zen (pietatea zer zen eta superstizioa zer zen bereiztea, alegia). hots, kristautasuna baino lehenagoko ohituretatik begiratzea : horrelaxe ulertu behar da Joana Labritekok esaten zuen hura Euskalerriko eliza guztiak kandeletatik libratu zituela, eta marko hori da lan honen hasierako paragrafoetan ezartzen saiatu naizena ahozkotasuna eta idatzizkotasuna kontrajarri ditudanean testutik haratago esparruetarako. 14. Gogoratu Cicerok SUPERSTITIO gehiegizko pietate bezala definitzen zuela, eta horren harian erre-formisten gainean lehenago aipatu dudana. Bestalde, hemen eman ditudanak bidea laburtzeko izan dira, baina berez honek erretorikaren ikerketa sakonagora eramango gintuzke, Augustinek berak ematen baitio pietateari legea desanbi-guatzeko ahalmena, hots, aequalitas delakoaren eginbeharra : « Beraz, otzan bihurtu behar gara erru-kiaren bidez, Eskritura Sakratuari kontra egin ez diezaiogun, de la ulertzen ez dugunean eta gure bizioren bati eraso diola iruditzen zaigunean, dela ulertzen ez dugunean eta bera baino jakintsua-goak eta arauak emateko egokiagoak garela iruditzen zaigunean. Aitzitik, hobe genuke pentsatu eta sinestea idatzita dagoena hobea eta egiagoa dela guk geurenez pentsa genezakeen edozein gauza baino, baita idatzita dagoen hori iluna denean ere ». Bigarren liburua, VII atala, 9. Paragrafoa (ikus bibliografia darabildan bertsiorako). Argi dago Etxepareren lana ulertzeko honekin batera aztertu behar dela. 15. Berdintasuna bi eratara erabili dut : Aequalitas esateko (orain) eta equitas esateko (gorago). Hauzutasuna erabili dut pasarte honetan, baina normalean equitas esateko erabiliko dudan berba « berdintasuna » izango da. Kontuan har beza irakurleak termino teknikoa dela. hots, legea instantzia partikularretara egokitzea. 16. Augustinen lehen liburukia laburbilduko dut hurren. ikus dezagun zelan eralzen duen alde hermeneutikoa jokabiderako arauetatik aterata. Nire iritzirako, lehen liburu honetan hermeneuta-gaiaren gogo egoera prestatzen ari da. Alde batetik, bere lehen liburuan Eskrituren irodoketa eta euren irakaspena bereiziko ditu : ikerkuntza eta pedagogia alegia, edo bestelajarrita, hermeneutika eta heuristika (1, I-1). Gero gauza eta zeinua bereiziko ditu : esaten du gauzak zeinuen bitartez ulertzen ditugula, hau da, erreferente bakarreko berbak « gauzak » dira (egurra. harria, aberea), eta horien erabilera metaforikoa « zeinuak » (1, II-2). Bigarren liburukiaren hasieran berriro jardungo du honetaz, eta badirudi « gauzak » erreferente kontestuala duen bitartean, « zeinuak » simulazioren bat suposatzen duela (simulazioa teknikoki hartuta). Bigarren maila batean hasiko da bereizten desiragarri izan daitezkeenen artean eta bi multzo egiten : erabiltzekoak eta gozatzekoak. Erabiltzeko gauzak gozatzeko gauzak lortzeko bide dira, eta gozatzekoak halakoak dira berez : Aita, Semea eta Gogo Saindua ; batasuna, berdintasuna eta bien bateratasuna (I, II-V). Alabaina, dio Augustinek (1, XXIII-22), erabiltzeko den guzti ez da maitagarria. Gauza maitagarriak lau motatakoak izan daitezke — eta berriz goaz Ciceroren œqualitas- era— : gure gainetikoak, gu geu eratzen gaituztenak, gure berdinak direnak, eta gure azpikoak. Laurotatik merezi dutenak lehendabizikoak dira. Bi mailok XXXVI, 40-41 paragrafoetan lotuko ditu, maila morala eta maila intelektuala (berez lotuta daudenak Jainkoaren definizio intelektualarekin, Jakituria hutsa den aldetik) eta esango du zelan Eskriturak ulertzearekin

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maitasunaren arau bikoitza (Jaikoari eta lagun hurkoari) eraiki behar duen hermeneutagaiak. Zelanbait esan, irakurtzeko jakin-mina izan behar da, eta idazkiari autoritatea aitortu behar zaio (fedea) ; hori alde interpretatiboari dagokionez. Eta behin zerbait idoroz gero, aurkitutakoa irakasteko karitatea beharko da. Hori guztia Jainkoarekiko maitasunak, hots, gozamenerako gure gainetiko gauzari arimak dion desirak gidatuko du. Augustinek esango du (XXXVII-XL) interpretazio erratu bat erratua dela jakin daitekeela aurreragoko testuarekin bat ez baldin badator ; horren aurrean jokabide zuzena litzateke norberaren interpretazioa bertan behera uztea. Lehenagoko inter-pretazio okerrari eutsiz gero, horrek fedea ahulduko dio hermeneutari (hots, hermeneutak ez dielako Eskriturei behar besteko autoritaterik aitortuko). Baina maite eta sinesten duenak esperantza izan lezake maite duenera inoiz heltzekoa. « Horrela, jakituria eta profezia oro hiru gauzaren atzetik dabiltza ekinean, eta hauek dira : fedea, esperantza eta karitatea ». Eta aurrerago : « Beraz, batek ‘bihotz garbiaz, kontzientzia onaz eta fede zintzoaz’ (Cor. I, 13 13.) ezagutzen duenean Jainkoaren aginduen xedea karitatea dela, eta Eskritura Sakratuez ulertzen duen guztia hiru horiekin erlazioan jartzen duenean, orduan hel diezaieke ziurtasunez liburu horiei ». 17. « image-schema » apud Turner 1996. Ikus erreferentzia bibliografikoak. 18. Danteren Komedia Jainkotiarreko azken stanzarekiko antzekotasuna ere nabarmena da, baina horrek ez garamatza inora, lan honetan behintzat, askoz jota inefabilitatea leku arras komuna zela esatera. 19. Augustinek oroimena etorriaren gainetik jartzen du esplizituki. d. Donc. attendu qu'un sy tresgrand Apoustre Comme saint Pol n'a voulu parler oultre, Suyvant le trac de sa tressage eschole Je me tairay ; mais, suyvant sa parole (Bien que je sois fein, poudre, ordure et fange), Ne puis faillir a rendre la louenge De tant de biens, qu'avoir je ne merite, Qu'il luy plaist faire a moy sa MARGUERITE. 1548 : Therfor come. O happy Paule, vvhych hast tasted so moche of the same svvete ho nye. beynge blynded for the space of thre dayes, & rapte up unto the thirde haven. Now I besech the. satisfye my ignoraunce & faulte. & tel me what in suche vysyon thu hast seane. e. O l'heureux don, qui fait l'homme DIEU estre, Pseau. 81 Et posseder son tant desirable Estre. Helas ! jamais nul ne le peult entendre, Si par ce don n'a pleu a DIEU le prendre. Et grand'raison ha celuy d'en douter, Si DIEU au coeur ne luy a fait gouster. Mais vous, Lecteurs de bonne conscience, Je vous requiers, prenez la patience Lire du tout ceste oeuvre qui n'est rien, Et n'en prenez seulement que le bien. Mais priez DIEU, plein de bonte naïve, Qu'en vostre coeur il plante la Foy vive. 1548 : He wylleth us also therin to esteme, that he neyther can declare nor yet name it, & so to geve forth our hartes to pacyence & hope of that thynge whych never man yet coulde se, neyther yet dyscerne, what though many through love for it hath dyed. 20. Orduko hizkuntzalari ortodoxoek bakarrik begiratzen zioten joskerari, eta gustu txarrekoa ematen zuen esanguraz jarduteak, baldin eta ez bazen ikuskera positibista edo formaletik. Areago, metafora bezalako gauza komunak amandre ipuintzat hartzen ziren « zientziaren » izenean, eta zientzia egiteko fisikaren erretorika erabili beharra zegoen. Batzuk-batzuek

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metaforaren existentzia ukatu eta guzti egin zuten, edo baldin bazen metaforarik ezinezkoa zela horretaz zientifikoki hitz egitea esaten zuten. Bernardezek badu liburu zoragarriro argi bat garaiko hizkuntzalaritzaren zorroztasun eta mehartasun honetaz. Bere helburua oso bestelakoa da, hain zuzen zientziari (paradigma estandarrari) zurruntasuna biguntzea, eguraldiaz diharduten zientzia fisikoen malgutasuna aplika dakion testu mailako ikerketari (Kaosaren teoria), probabilitatearen aldagaia igargarritasunari edo predikti-bilitateari erantsiz. Bernardezen liburu horrek ispilatzen ditu artezen sintaxi arazoak ikertu nahi ez izan arren hizkuntzaz (modu zientifikoan) eta baita literaturaz ere genbiltzanon arazoak. (Bernardez Metodologia v Epistemología del Texto. Cátedra. Madrid : 1993). Penaz izan dute hizkuntzalari sortzaile edo generatiboek gure unibertsitateetara sartzeko, baina behin sartuta aurrekoak bezala egon dira begi motzaz lagun hurkoaren lana gutxiesten, batzuetan terminologia diferentean babes harturik, eta askotan euren formazioko alde garrantzitsuenetako bat ukatzen : horrek ito egin ditzake hainbat ikerbide eta egitasmo. Pentsatu behar duguna zera da, segurutik Newtonek aurrera egin zuela ez bere teoria Ptolomeorena baino hobea zelako (hasieran ez behintzat), jendea zeruari begiratzeaz aspertu egin zelako baino. Momentu honetan Euskal Herriak ditu inoizko hizkuntzalari eta ikerlari bikainenak, gehienak atzerrian ibiliak gutxi asko, joera eta isuri ikaragarri aberatsekoak : (harrigarriro, soziolinguistika eta euskera-lehen hizkuntzaren jabekuntza izan daitezke gutxien landu direnetakoak). Batzuen eta bitzuen txokokeria eta sektarismoak gaindituz gero. eta erakundeak inbertitzera ausartzen badira kanpokoen baimena edo kanpotiko ereduren baten zain egon barik. uste dut munduari eman ahal izango diogula aurrerapenik eta ekarririk asko ; bakarrik jarraitu behar diogu Kanten esapideari : Sapere aude. 21. Lakoff eta Johnson, ikus bibliografia. Bada gaztelerara itzulpen bat ere, bost bat urte beranduago atera zena Cátedra argitaletxean. Baina nire ustez liburu landuagoa eta mamitsuagoa da Lakoff eta Turnerrena 1989 batez ere ikerketa literariorako (ikus bibliografian). 22. Integratze Kontzeptualaren Teoria edo Bateraketa gogo-espazioaren Teoria (Fauconnier & Turner I994tik aurrera) baino aurreko paradigma teorikoan (cf. adibidez Lakoff 1993) metafora honelaxe definitzen zen : sorburu batetik ateratako egitura eta topologiak jomuga batera proiektatzea. Proiekzio hori esparru diferenteen artean gertatu behar zen, esparru berean gertatuz gero metafora barik metonimia baikenuke. Hizki larriaz idazten diren adierazpideak X=Y tankerakoak dira, non lehen elementuak (xedeak) bigarrenaren (sorburuaren) egitura eta topologiak bereganatzen dituen. Adierazpideok ez dira exhaustiboak, baina ahalik eta hizkuntza naturaleko adierazpide metaforiko gehien azaldu behar dituzte. Oinarrikoago adierazpide bat aurkituz gero, horixe genuke oinarriko metafora kontzeptuala. 23. Oso aberasgarria litzateke Bonapartek agindutako itzulpen biblikoetan honako adierazpideak aztertzea : mutuak askatu, herrenak zuzendu, itsuak argitu...eta abar. Zein dira esamolde horien azpian leudekeen oinarriko metaforak ? 24. Sweetserren (1990) liburuaren ekarririk garrantzizkoena hauxe litzateke : aurkitzea, baita etimo-logian bertan ere, motibazio metaforiko bat aldaketa semantikorako, polisemiarako bezain bestean ; hots, eboluzio semantikoa ez da arbitrarioa. Mundu fisikoarekiko esperientziatikoak proiektatuz lortzen ditugu kontzeptu abstraktuak, eta bigarren metaforizatze batez hizkuntza- egitateak. Ikusi, bestela, « evident » en etimologia KNOWING IS SEEING ( JAKITEA IKUSTEA DA) metaforaren araura. Cf. « Begiaz eta egiaz » esamoldea. Euskeraz, hala ere, « aditu »ren polisemia korapilotsuagoa da : entzun, usaindu, ulertu, ikusi. Beste kasu bat Iztuetak nola darabilen « ulertu » aditza izan daiteke, Euskera esparru indoeuroparrean erabat sartzen ez den seinale, baina guztiarekin, aldaketa semantikoa eta polisemia arbitrarioa ez dena. Oharmen aditzen gainean ikus Iraide Ibarretxeren tesia : Ibarretxe-Antuñano, Iraide. 1999a. Polysemy and Metaphor in Perception Verbs : A Cross-linguistic Study. PhD Thesis. University of Edinburgh. 25. Honen sublimazioa « Neu naiz bidea eta bizitza » esaldian daukagu, zeinetan Jesusek modua eta helburua dela baieztatzen duen ; berez integrazio kontzeptuala da. Ikus Turner 1996.

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26. Honek gramatikan bertan ere badauka garrantzia. Ikus,adibidez, ingelesak berezkoa duen « bide »- dun egituraren azterketarako : Goldbergen Construction Grammar. Chicago : 1996, eta horren iker keta historikorako Michael Israelen « The Way Constructions Grow. » In : Adele Goldberg (arg.) Conceptual Structure, Discourse and Language. CSLI. Stanford : 1996. Hor aztertzen diren egiturak hurrengoaren tankerakoak dira : « hordirik bere bidea narrastu zuen gelatik kanpora »( ?). 27. Noski, euskeraren kasuan « bide » eremua zailtasunik ere badu, « bide » « antza denez »-ren sinonimoaere kontsideratu beharko baikenuke. Halaber, aipatu dudan « bide »-ren beste esparru semantiko hori ere, 'modu' edo 'kera' esanahiarena alegia. barruan hartu beharko zen. Ahalegina ez datza hiru ulermoduak har zitzakeen kontzeptu zabal askoa aurkitzean, baizik eta hirurok elkarrekin izan deza-keten bide metaforikoaren nondik norakoak zehaztean, hau da, aurkitu behar da zein litzatekeen esperientzia fisikoarekin lotua dagoena (adibidez, « bide biren artean » cf. LIFE IS A JOURNEY, BIZITZA BIDAIA DA, eta bidaia horretan erabakiak hartu behar dira, v.g. « bidegurutzean » eta abar.). Andres Urrutiaren lanak ( »Olerkaria lege autuetan : Etxepareren Linguae Uasconum Primitiae ikusmira juri-dikopean » In : Enseiukarrean. 12 (1996) : 36-55) alderdi lexikalari eusten dio ; hala ere, legearen lexi-koa hitz teknikoez osaturik dagoen heinean aztertzea oso bestelakoa da hemen azaltzen dendatzen naizen bidetik. Honez aparte, argi dago Etxeparek, Margaritak bezala (edo Garci-Lassok bere bosgarren kantuan) zerabilten hizkuntzaren polisemiaren barruan erabat aurreikusia zutela legearen ubera. 28. Ez dut honetan lar luzatu gura. baina aipamentxo bat egin beharrekoa da. Antzekotasuna diogu-nean ez gabiltza estrukturalista zaharrak ematen zizkiguten sema berrantolaketaren gainean, antze-kotasun hau ez baita objektibista ; hauxe da kontua : kultura batek « lehoia » modu batera dauka kontzeptualizaturik, adibidez errege bezala (berez legoia katu handi bat da, ez errege, zeren gober-nuaren kontua, eta are monarkiaren anakronismoa, gizakiona baita). Legoiaren kontzeptualizazio kultural horrekin bilatuko zaio antzekotasuna Akileri. Animalien kontzeptualizazioan bere biziko garrantzia du « Izaeraren Katea Nagusiaren Metafora » eredu kulturalak (Great Chain of Being Metaphor, Lakoff & Turner 1989). Eredu horren arabera, izaeraren itxuran oinarriturik izaki horri gizakien jokaera batzuk leporatzen zaizkio : beraz, itxura edo forma sorburua da eta jokaera, berriz, xedea. Honekin loturik, esan genezake euskal zoologian legoiaren funtzio batzuk hartzak betetzen dituela. 29. Santa Barbaran 2001eko uztailean egindako Linguistika Kognitiboko kongresuan Lakoffek metafora bi neuronen arteko lotura bezala definitu du. Horrekin agertu duen jarrerak konekxionismoare-kin bat egin du ; oso jarrera erradikala (ez ona ez txarra, baina bai bulartsua). Zuzen ala oker dagoen, neurobiologiak esango digu (eta badirudi hein batean halan dioskula), baina bada lotura bat Gradyren aurkikuntzekin ; Gradyk bi esperientzia maila zeharo diferenteren arteko lotura aipatzen du, lotura horren nolakotasuna zelakoa den deskribatzen denean helduko gara Lakoffen plantea-mendua epaitzeko tresneria izatera. 30. Konkretutik abstraktura esango lukete batzuek, baina niri iruditzen zait « abstraktu » terminoak esangura labainegiak dituela. Hizkuntzalari kognitiboek erabiltzen dutenean « abstraktu » terminoa hauxe esan gura du : esperientzian zuzenean oinarritu bakoa. 31. Berez, euskarak zorrotza eta zurruna bereiziko lituzke. Gai honen ikerketa litzateke hizkuntzalari kognitiboen eginbeharra. Gainera ikerketa horrek etimologikoki bi terminoon artean egon litekeen (susmoa da) parekotasunaren zergatia eman beharko luke. Etimologian lexikogintza metaforak gidatzen duela argi ikus daiteke termino hauekin : moztu, mozkor, motil (eta mutildu), motz. 32. Hau oso gai korapilotsua da, saia nadin labur ematen. Berez, kausa indar-dinamikaren arabera ulertzen dugu ; zelanbait esan, paradigma mekanizista, non gorputz batek beste bat abian jartzen duen kontaktu fisikoaren bitartez, herri teoria da, edo bestela esan, txikitandik eta gure esperientzian oinarritutakoa. Beraz, hortik zera dakargu, mugimendu guztik kausatua izan behar duela. Berez mugitzen diren izakiek arazoa sortzen dute azalpen orokor honetan. eta

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hortik dator arima edo animaren asmatzea. Motu propio edo berez mugitzen denak animatua edo arimaduna izan behar du. Eta arimari nahia edo intentzioa leporatu ohi zaio (azken batez Jainko edo azken kausaren zati bat dira, eta abar). Hortaz arima berezko mugimenduaren, hots biziaren, eta intentzioaren printzipioa da. Honi itzulia eman ahal zaio eta esan berez mugitzen denak intentzioa duela. 33. Horrelako Oinarriko Metafora kontzeptuala proposatzeko askoz ere datu gehiago beharko nituzke. datuok hizkuntzatik eta kulturatik ateratakoak liratekeelarik. Beraz, NAHIA NORAMDEA DA edo LIFE IS A FLUID ez dute maila epistemologiko bera. azken honen atzean ikerketa eta datu multzo askoz ere handiagoa baitago. Beude neureak, hortaz. proposamen mailan eta besterenak maila enpi-rikoan. 34. Antzeko metonimia atsotitz honek erakusten du : « Behin Maria Elizara, eta bertan ipurdiaz alda-rera ». Ipurdia aldareari emateak daukan esangurak argitzen du atsotitza. « Izpazterreko Errefrauak. » In : Bonaparte Ondareko Eskuizkribuak, Bizkaiera. I. liburukia. Bilbo. Deustuko Unibertsitatea, Euskal Ikaskuntzen Institutua, 1992, orr. 177- f. Las ! bon JESUS, voyant ma cecité, Et que secours en ma necessité Ne puis avoir d'aucune creature, Actes 4. De mon salut avez fait l'ouverture. Quelle bonté, mais quelle grand' douceur ! Est il pere à fille, ou frere à soeur. Qui un tel tour jamais eust voulu faire, Tant fust il doux, piteux et debonnaire : g. Sans vous aymer, las ! vous l'avez aymée. O charitée ! ardente et enflammée, Vous n'estes pas d'aymer froid ne remis, Qui aymez tous, voire voz ennemis ; Roma. Non seulement leur voulant pardonner Leur grefve offense, ains vous mesmes donner Pour leur salut, liberté, delivrance, A mort et croix, travail, peine et souffrance. 35. Hona hemen testuan familia erlazioei aipu egiten dieten lexiko item batzuk (1548ko ediziotik atereak eta TACT programa erabiliz) : fraternyte (1) ; brother (22) : brotherhede (1) ; brotherly (1) ; brotherlynesse (1) ; syster (18) ; mother (22) ; father (33) ; pater (1) ; paternyte (3) ; chylde (17) ; chyelde (2) ; doughter (6) ; doughters (1) ; doughterly (1) ; daughter (5) ; daughterly (1) ; spouse (11) ; husbande (12) ; husbandes (1) ; wyfe (13) ; mariyage (1) ; marry (1) ; marryage (1) ; marryed (1) ; marye (1) quene (3) ; kynge (6) ; kyng (1) ; lord (1) ; lorde (14) ; master (3) ; mastre (1) ; mastres (1) ; 36. Ohorea ulertu beharko genuke arako merkatal iragarpen gisa edo hauteskundeetarako propaganda bezala : boto emaile edo erosleen kopuruak zerikusi zuzena zuten prestigioarekin, eta, luzarora, bote-rearekin ; kontrakoa ere suertatzen zen, menpekoak indartsuenengana jotzen zuten babes eske ; luza-roan horrek diru sarrera ugarituko zuen. Zenbat eta lagun, lotura eta « ukondo » gehiago eduki lekue-tan. halan eta boteretsuago bilakatu (edota boteretsua zen seinale argiagoa izan). Izaera diadikoak esan gura du inguruneak ezagutzen duela norbanakoa ; pertsona bati izena eta ezaguera inguruneak ematen dio. eta kokatuta dagoen familiaren araberakoa da. Adibidez, Bermeon galdetzeko « zu nor zara » beti galdetuko dizute « nongoa zara » —baldin eta uste badute herrikoa zarela—, hau da, zein familiatakoa zaren ari

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diragaldetzen, edo, horren ezean, zein herritakoa. Horregatik ezizenek abizen funtzioa betetzen dute Bermeon, ezizena hurrengo belaunaldietara ere igaroko baita. Itzala edo omena (cf. nomen) baten familiari besteek ematen zioten izenari lotua zegoen. Beraz, botereak gora egingo zuen prestigioarekin batera, lekuetan izandako lotura eta ukondoekin batera, eta lagunen maila sozialarekin batera. h. Bien suffiroit, saillant de tel danger, De me traiter ainsi qu'un estranger. Mais comme soeur mere (si dire l'ouse) Traitez mon ame, et ainsi comme espouse. i. Moy, Monseigneur. moy. qui digne ne suis Luc 15. Pour demander du pain. approchor l'huis Du treshault lieu où est votre demeure ! El qu'est cecy ? Tout soudain en ceste heure Daigner tirer mon ame en tell' haultesse Qu'elle se sent de mon corps la maistresse ! Elle povrette. ignorante. impotente. Philip. 4. Se sent en vous riche. sage et puissante. Pour luy avoir au coeur escrit le rolle De vostre Esprit et sacrée Parole. En luy donnant Foy pour la recevoir. Qui luy a fait vostre filz concevoir ; En le croyant homme. DIEU. Salvateur. Roma. 5. De fous pecheurs le vray restaurateur. Parquoy daignez rasseurer qu'ell est Mere De vostre filz. dont vous estes seul Pere. 37. Malina 1993 : 79. Or 38. Malina : 1993. Ikus bibliografia. Malinaren analisiari nik alde kognitiboaren garapena baino ez nioke erantsiko, hots. LIFE IS A FLUID, BIZTZA ISURKIA DA. Bilatu beharko genuke horrela gertatzen ez den kulturaren bat, eta, gainera, saiatu ateratzen zelan oinarritzen den gure esperientzian arako kontzeptualizazioa. Bestela erabat koherentea eta batera dator hurbilketa kognitiboarekin : adibidez, objektu fisikoak metafori-zatzen dira ahalmen abstraktuei aipu egiteko, eta beste. 39. Euskeraz honen antzekoren bat erabiliko genuke « zeure egur ( ?finantziero) en bila zabiltza gero ». Arazoa euskarazkoarekin zera da, oso zaila dela zehaztea zein den iturria : gurutzerako egurrak, norbera sutan erretzeko egurrak, ala garrotea ? Baina adibide hau honetara zetorren : zuk zeure hilo-bia oso sakon egin arren horrek sorburuan ez zaituela heriotzara hurbiltzen, metaforaren emaitzan jasotzen dugunaren kontrara. 40. Mark Turner and Gilles Fauconnier (1995) « Conceptual Integration and Formal Expression ». URL : osophy..htm Eskuratua : 01/08/29. 41. « Les êtres humains ont une aptitude unique pour exécuter un genre très avance d'intégration conceptuelle. Ce genre avance est appelé, en anglais, « double-scope integration », et en français, de manière inexacte, « l'integration bilatérale. » Lintegration « double-scope » est, comme je propose, l'aptitude principale que nous utilisons pour innover. C'est la faculté mentale qui caractérise le cerveau humain. C'est la faculté qui sous-tend d'autres facultés mentales uniquement humaines. » Mark Turner, 2000. « L'imagination et le cerveau » conference donnée au College de France, 11, place Marcelin-Berthelot, Paris 5e, le mardi 6 juin 2000 a 14h30, dans la salle 2. URL : . Eskuratua : 01/08/30.

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j. Quand en preschant, estendant voz bras, distes Ceux qui feront le vouloir de mon Pere, Matth,12. Mes freres sont. et ma soeur. et ma mere. 42. Lehen Etxepare aztertu dugunean, deskubritu dugu borondatea bektore bezala ulertzen dela, leku batetik besterako norabidearekin. Etimologiak berak erakusten digu in-tentzioa norabaiteko joera edo isuria dela, Axularrek oso ondo zekien bezala. Atentzioa aurpegiari lotzen zaio, eta direkzio-naltasun horretan norabide aldaketa erakusten du. Paradigma katolikoan « Amagana bihurtzeak » borondatearen erakusle gisa ulertzen da, eta beraz, ordura arteko norabideaz damua. Paradigma erre-formistan, ikusiko denez, borondate hori ezabatu behar da, borondatea malgutu. (Cf. « Behor zahar-rari orgabidean nekez da irakasten », zergatik ?). 43. Honen harian ulertu behar dugu « Aldats Dorrean » erromantzea, senarraren amaren ahotik entzun dezakegunez : « ...esan baebanan lehenengotatik jaubea/ izango ebanan Aldats Dorrean partea » (...) (amaginarrebak) « Haurtxo txikiak deust sabelean ostiko/ Jaun zerukoak ahal dau semea sortuko » (emazteak) ...nahi dan seme nahi dan alaba Aldats Dorrean partea izango jona » (amaginarrebak) Ohar bedi irakurlea, « jona » eta ez « dona », hots, umeak izango dun parte, baina ez heuk. k. De cuyder mieux vous louer. c'esl blaspheme. Il n'est louenge telle que de DIEU mesme. l. Quand vostre filz plein de divinite A prins le corps dc nostre humanité Philip. 2. Et s'est meslé avecques nostre cendre : Ce que sans Foy nul ne pourroit entendre, II vous a pleu de nous tant l'approcher Qu’il s'est uny avecques nostre chair : Qui le voyant (comme soy) nommé homme, Se dit sa Soeur. et Frere elle le nomme. Bien doit avoir le coeur ferme et asseur Qui de son DIEU se peult dire la Soeur. 44. Oso esanguratsua da zenbatetan ageri diren Kantuen Kantatiko aipuak. m. Je ne craindray de vous nommer mon frere. Vous l'avez dit en lieu bien autentique. Par Salomon. en vostre doux cantique Disant : « Ma soeur. tu as navre mon coeur. Cantique 4. Ta as navré mon coeur par la douceur D'un de tes yeux et d'un de tes cheveux » Testu aldakiak badira itzulpenean, segurutik Biblia diferenteak erabili diren seinale. I548an argitaratutakoak halaxe dio : Well than, seynge ihat we have both but one falher. I wyll not feare to call the my brother. For so hast thu reported it by Salomon in hys bellet.saynge. My syster and spouse thu hast wounded my harte with the swete loke of one of thyne eyes. and with one cheyne of thy necke. n. Apres. venez. par grand' dilection Luy declarer que sa creation N’est seulement que par le bon vouloir Qu'il vous a pleu tousjours à elle avoir. En l'asseurant qu'avant son premier jour. Ephe. 1. La prevoyant y avez eu amour.

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Par celle amour engendrée l'avez. Comme vous seul bien faire le sçavez : 45. Azterketa oso eta agortzerainoko baterako ikus hobeto Tumerren tesia, batez ere bosgarren eta bigarren atalak, « progeneration as Cause » kontzeptua : Turner, Mark. Death is the Mother of Beauty. 1987. o. Helas ! ouy. car du pere maudit Avez rompu la filiation En me nommant fille d'adoption. 46. Honen adibide asko eta asko Ibon Sarasolak Contribución...en argitaratutako gutunekin dauz- kagu. p. Il vous plaist bien luy donner autre nom Vostre Espouse la nommer. et de vous, Vous appeller son mary et espoux : Luy declarant comme de franc courage Osee. 2. Avez juré d'elle le mariage. Fait luy avez au Baptesme promesse De luy donner vostre bien et richesse. Ses maux prenez. car riens que peché n'ha. Lequel Adam son pere lui donna. 47. Bada Kantuen Kantari buruzko interpretazio bat Genesian galdutako paradisuaren berreskuratzea bezala, bekatu-bertute berberen bidez. Eva erakarri zuen lurreko har-sugearen ordez, Shulamitak Erregea maite du. Galdu zen ohorea berrezartzen da. Agian interpretazio hau azal eta zabal ibiliko zen garaian. Baina are zuzenago diosku San Augustinek : « Our malady arose through the corrupted spirit of a woman : from the incorrupted flesh of a woman proceeded our salvation ». !, XIV. q. Pareillement espouse me clamez En ce lieu là. monstrant que vous m'aymez, Et m'appellez, par vraye amour jalouse, Vostre Colombe, et aussi vostre Espouse. Cantique 2. r. Donc, à mon Pere ! où gist amour non feinte, Jaques 3. De quoy fault il qu'en mon coeur j'aye crainte ? Je recongnois avoir fait tous les maux Que faire on peult ; et que rien je ne vaux, Et que vous ay, comme l'enfant prodigue, Abandonné, suyvant la folle ligue, Où despcndu j'ay toutc ma substance, Et tous voz biens recenz en abondance ; s. En lieu d'avoir par vous punition, Vous m'asseurez de ma salvation. Ou est celuy donc qui me punira Quand mon peché mon Dieu luy niera ? Juge n'est point qui puisse condemner Nul. puis que DIEU ne le veult point damner. Doute je n'ay d'avoir faute de biens, Puis que Mon DIEU pour mon Pere je tiens. t. Et puis apres dens ce corps l'avez mise, Non pour dormir. ne pour estre remise, Mais pour tous deux n'avoir autre exercice Que de penser à vous faire service :

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u. Car vous ayant conceu et enfanté, Laissant raison subjette à volunté, Sans vous garder. je me suis endormie, 3. des Roys, Et donné lieu à ma grande ennemie, Qui en la nuict d'ignorance, en dormant, Vous a robbé pres de moy : finement En vostre lieu m'a mis le sien tout mort. (...) Ma voisine. ma sensualité En non dorrnir de beslialité Privée m'a de vous par son envie, En me donnant un autre enfant sans vie, Qui est Peché, duquel je ne veux point. 1548ko edizioak « Ma voisine » mantentzen du : Sensualyte my neyghbour ( I beynge in my beastly sleape) ded steale the from me, & gave me, an other chylde whych had no lyfe in hym, named synne, whom I wyll not have, for I do utterly forsake hym. 48. Gorgias. 49. Termino horiexek erabiltzen dira gaur egungo gaztelanian maitelagunak aipatzeko.Bilakaera semantiko horrek balizko polisemia batean izan lezake motibazioren bat, Sweetserren ildotik. 50. Urteak aurrera igarota, hauxe izango dugu holako eztabaidetako argudio tipikoa, adibidez Susanna Parr-en Apology Against the Elders 1659 (Graham et al. 1989). v. Car oubliant l'honneur du parentage, L'adoption de sy noble lignage, Vostre tant doux et fraternel recueil, Montée suis contre vous en orgueil, De mes forfaitz ne me suis recordée ; Mais m'esloingnant de vous. suis accordée Avec Aaron, mon frere, en trahison, Nomb. 12. Voulant donner a voz oeuvres raison, En murmurant de vous tout en secret Qui me devroit donner un grand regret. Helas ! mon DIEU . mon frere et vray Moïse, 51. Nafarroako erregetza ez zen absolutista, ohituren menpekoa baizik (Foruak edo Common Law). Beraz, indarren oreka zegoen parlamentuaren, hots, alde zibilaren, eta erregearen edo alde mili-tarraren artean. Jakina denez, sistema honetan errege edo erreginak foruen zina egin behar zuen koroa hartu ahal izateko. Foruen kontra zihoan legeren bat emanez gero, herriko sindikoek esku hartuko zuten. Sindikoen zeregina herriaren usadioa gogoratzea zen, kolektibitatearen nolabaiteko « disko gogorra » ziren ahozko sistema hartan. Errege edo erreginaren boterea murrizteko modu bere-zia, hala ere, gerra kontuak mugatzea zen. Beren-beregi adierazita zegoen errege/erreginak ezin zuela ez gerrarik egin ez bakerik sinatu « herriko hamahiru zaharren » baimenik gabe. w. Ainsi je fuz mise, comme ladresse, Dehors du parc du peuple et de la presse : l548ko edizioan : For I became a lazar, so that whan any body shulde loke upon me, they myght wele se that I had not bene wyse. And so was I put out from the tentes and tabernacles of the people, bycause that a sycke bodye maye infecte them whych be in helthe x. I have done the evyll, and thu gevyst me good for it, I am thyne, and thu sayest, thu arte myne. Even so I am, and wyll be so for ever. I feare nomore the great folyshenesse of Aaron, for no man maye separat me from the. Now that we are brother & syster togyther, I care very lytle for all other men. Thy landes are myne owne inherytaunce. [*]Lete us than kepe (if it please the) but one hows-holde. Syth it have pleased the to humble thy selfe so moche, as to joyne thy hart

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with myne, in makynge thy selfe a levely man, I do ryght hartely thanke the And as to do it as I ought, it lyeth not in my small power. 52. Bestalde, interesgarria ere bada aztertzea noiz hasten diren gizonezkoak fideltasuna eta ezkontza agintzen eta eskaintzen maitasun edo mesede sexualen truke, horrek aurreko egoera libreago bat begietaratzen baitu (Tere Irastortza « Oihenarten Poemagintza. » In : Hegats : Literatur Aldizkaria. 7(Abendua 1992) : 17-33). Gainera gauzakez ziren berdinak izango gizarteko maila guztietan, hime-naren kontrola primuaren jabegoarekin baitago lotuta, hots, aitatasunarekin (amatasuna ezin da zalantzan jarri eta). y. Si pere a eu dc son enfant mercy, Si mere a eu pour son filz du soucy, Si frere à soeur a couvert le peché, Je n'ay point veu, ou il est bien caché, Que nul Mary, pour à luy retourner, Ayt à sa femme one voulu pardonner. Ikus l548ko edizioa eta eskuizkribuan falta den bertsoa : « Aitaren bat errukitu bada... » : If anye father have had anye pytie upon hys chylde. If anye mother have take anye care for her sonne. If anye brother hav hyd the synne of hys syster, it is thu. I never sawe (or els it was kepte wonders secrete) that ever husbande wolde througly forgyve hys wyfe, after she had hym ones offended, and ded retume unto hym. z. Assez en est qui pour venger leur tort, Par jugement les ont fait mettre à mort. Autres. voyans leur peché, tout soudain A les tuer n'ont espargné leur main. Autres, voyans leurs maux trop apparentz, Renvoyées les ont chez leurs parentz. Autres. cuydans punir leur mauvais tour, Enfermées les ont dens une tour. Bref. regardez toutes complexions, La fin n'en tend qu'à grands punitions. Et le moins mal que j'en ay peu sçavoir, C'est que jamais ilz ne les veulent voir. Testuinguru zabalagoxea eman dut frantseseko bertsioan (aurreko oharrekoaren jarraipena da), bide batez erakusteko maitasun motetan. irainetan eta iraindutakoaren erantzunetan ageri den gradazioa.. « If any mother...I never saw it(...) that any husband... » 126 53. Bidenabar, ingelesezko itzulpenean bada jatorrizkoan ez dagoen esaldi bat : : « Eta inongo gizonek desira dezakeena baino gehiago eta hobearen jabe naiz » (« I have more and better than any man can desire » (Elizabethek apropos sartutako aldakia ?). a. a Laissé vous ay, oublié et fouy. Laissé vous ay, pour suyvre mon plaisir ; Laissé vous ay, pour un mauvais choisir Laissé vous ay, source de tout mon bien, Laissé vous ay, en rompant le lien De vraye amour et loyauté promise. Laissé vous ay ; mais où me suis je mise ? Au lieu où n'a que malediction. Laissé vous ay, l'amy sans fiction, I.'amy de tous digne d'estre estimé, L'amy aymant premier que d'estre aymé. Laissé vous ay, ô source de bonté, Par ma mauvaise et seule volunté.

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Laissé vous ay, le beau, le bon, le sage, Le fort de bras et le doux de courage. Laissé vous ay, et, pour mieux me retraireDeuter. 32. De Vostre amour, ay prins vostre contraire. C'est l'Ennemy, et le Monde, et la Chair, Ohartu, bide batez, errosario kutsu zoragarriaz ; xehetasun hau bat dator nire tesiarekin, hau da, testu honek Jesus kokatzen duela Mariaren leku tradizionalean. b. b Hemen letra etzanaz nabarmendu ditudan bertsolerroak ez dira agertzen bi edizioetako batean ere. Oharraren amaieran l548ko edizioko pasartea emango dut : Et qui me suis de tous trois acointée, Et de tous cas avec eux appointée. Et propre amour, qui trop est faulse et feinte, A charité de vous en moy esteinte, Tant que le nom de JESUS mon espoux, (Que par avant j'avois trouvé si doux) Avois quasi en hayne et fascherie, Proverbe 2. Et bien souvent en faisois moquerie. Si l'on disoit en oyant un sermon : Il a bien dit, je respondois : Ce a mon. La parole s'en voloit comme plume. A l'Eglise n'allois que par coustume. Tous mes beaux faitz n'estoyent qu'hipocrisie, Car j'avois bien ailleurs ma phantasie. Il m'ennuyoit d'ouyr de vous parler ; J'aymois bien mieux à mon plaisir aller. Erkatu l548ko edizioarekin : And so bounde, that no man coulde cause me to humble my selfe And as for the love & charyte that I shul de have had towardes the, they ded quenche it so that the name of Jesus my hushande, whych before I had founde so swete, was to me tedyouse & hatefull. So that often tymes I ded jest at it.[*] And if any man (I hearynge a sermon) had sayd unto me, the preacher sayth wele. I wolde afferme it but the worde went awaye from me, as a fether doth in the wynde. I went never yet to the preachynge, but for maner only. All my dedes were playne hypocresye, for my mynde was in other places. I was anoyed whan I hearde speake of the, for I was more wyllynge to go at my pleasure. 54. Uste dut honek harreman zuzena izan dezakeela katolikotasunak filologia judutik bereganatutako Izenaren inguruko hermeneutikarekin (adb. Hillelen arauak edo notarikoia, halaber Fray Luis de Leon, De los Nombres de Cristo. c. c 1548ko edizioa : « My dere doughter harken, and se, and bowe thy hearynge towardes me. Forget that straunge nacyon to whom thu dedyst ronne awaye and also the house of thyne olde father, where thu has dwelled so longe Than shall the kynge full of all faythfulnesse, desyre thy bewtie. » d. d Venez à moy, vous tous qui par labeurMatth. 11. Estes lassez et chargez de douleur ; Je suis celuy qui vous accepteray, Et de mon pain refectionneray. Ohar gaitezen nire interpretazioak oinarri galdu duela 1548ko edizioari jarraitzeko bagina : « ...than begannyst thu to crye lowder. Come unto me all yow whych are wearyly loaden with laboure, for I am he that shall plenteously refreshe yow and feade yow with my breade of lyfe. » e. e Car aussi tost qu'avez veu abaissée Ma volunté soubz vostre obeissance.

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Avez usé de vostre grand’ clemence. Mettant en moy une sy vive Foy, Que vous sachant Maistre, Seigneur et Roy. (De qui devois par raison avoir crainte) Par vraye amour senty ma peur esteinte, En vous croyant mary sy gratieux. Bon, doux, piteux, misericordieux, Que moy (qui tant me devoye cacher) Ne craingniz point de vous aller chercher. 55. Azterbide honek luzeegi joko luke artikulu honen helburuetarako, baina ezin utzi aipatu barik hemen egin daitezkeen inferentziak. Maitasun neoplatonikoa daukat gogoan, non aurpegia hain inportantea zen, eta horrek gaur egungo zenbait esapiderekin (« aurre egin diezaiogun arazoari ») daukan erlazioa. Neure analisiaren arabera aurpegia asmo edo intentzioaren korrelatiboa izango litzateke, hots, atentzioa (eta, ez dezagun ahaztu, « aurpegia arimaren ispilua » ei da) : « Hast thu turned thy face from me ? No, for thyne eye so swete ded penetrate my harte, woundynge it almost to the deathe, and gevynge me remorse of my synnes ». f. f O mon Sauveur, par Foy je suis plantée, Rom. 11. Et par amour en vous, jointe et entée. Quelle union, quelle bienheureté. Puis que par Foy j'ay de vous seureté Nommer vous puis par amour hardiment Filz, Pere, Espoux et Frere, entierement Jean 1. Pere. Filz, Frere et Mary : 6 quelz dons. De me donner le bien de tous ces noms ! O mon Pere. quelle paternité ! O mon Frere, quelle fraternité ! O mon Enfant, quelle dilection ! O mon Espoux, quelle conjonction ! Pere, envers moy plein de mansuetude : Frere, ayant prins nostre similitude ; Filz, engendré par Foy et Charité ; Mary, aymant en toute extremité. g. g Or vous ay je, mon Pere, pour defense Des folles de ma trop longue enfance. Or vous ay je, mon Frere. pour secours De mes ennuyz que je ne trouve courtz. Or vous ay je, mon Filz, de ma vieillesse Le seul baston, support de ma foiblesse. Or vous ay je l'espoux sans fiction, De tout mon coeur la satisfaction. 1548ko edizioa : Now have I the my father, for defence of my longe youth from wanton folyshnesse. Now have I the my brother, for to socoure my sorowes wherin I fynde non ende. Now have I the my sonne, for my feble age as an only staye. Now have 1 the a true, & faythfull husbande, for the satis-fyenge of my whole harte. h. h Las ! quel maistre, sans avoir desservy Nul bien de luy, mais l'ayant mal servy, 1548 : O what a master is that, without deservynge any goodnesse of hym ? I served hym slouth- fully,...

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i. i Helas ! Mon DIEU, je ne vous cerchois pas, Mais vous fuyois en courant le grand pas ; Et vous ça bas a moy estes venu, Jean 3. A moy, qui suis ver de terre tout nud. 56. Horregatik garrantzia handikoa da Rosslyn Frank eta Mikel Susperregiren lana. « Conflicting Indentities : Non-commensurate Root Metaphors in Basque and European Image Schemata. » URL : . 57. Oso interesgarria da aspaldi batean Lloydek polarizazioaren gainean emandako azalpena ; gainera garai aurre-Aristoteliarrekin jartzen du harremanetan (cf. Aristoteleren oposaketen taula) j. j Ce qu'ont promis mes amys au baptesme Psal. 118. Et que depuis j'ay confermé moymesme (Qui est sans fin de vostre passion Roma. 6. Sentir en moy mortification, Psal. 43. Estre tousjours avecques vous en croix, Ou vous avez cloué. comme je crois. Et rendu mortz la Mort et tout peché, Roma. 6. Que souvent j'ay reprins et detaché). k. k Car où la mort, avant le grand mystere De ceste croix, estoit a tous austere, Ecclesiaste. Et n'y avoit coeur qui n'en eust frayeur, En regardant sa face et sa rigueur, Veu I'union qui est de l'ame au corps, Et l'ordonnance. et l'amour. et accordz. Dont la douleur estoit du separer, Extreme acces pour tout desemparer : l. l 1548ko edizioan : Now syth that deathe is so plesaunt a lyfe, that she pleasith me more than feareth me. than ought I to feare nothynge but the ryght judgement of God. All my synnes with hys just (Fo.32.) balaunce shall be wayed & shewed openly. Thys that I have done, also my thought and worde shall be better knowne, than if they were written in a rolle. And we maye not thynke that charyte wolde offende justyce & truthe. For whoso ever doth lyve unfaythfully, shall be ponnyshed in everlasytnge payne. m. m Las, mon DIEU, non : car la Foy invisible Matth. 19. Croire me fait, que tout mon impossible Est tresfacile à vous, tant que mon Rien Convertissez en quelque = de bien. Rom. 5. Donc, Monseigneur, qui me condemnera ? Rom. 8. Et quel Juge jamais me damnera, Quand celuy là qui m'est donne pour Juge Est mon Espoux, mon Pere et mon refuge ? Psal. 8, 9. n. n 1548ko ediziotik : O redemer, here is a great love. We fynde but fewe suche men of lawe. Swete Jesus Christ, it is unto the that I am a detter, yet dost thu both praye, and speake for me. And moreover whan thu dost se that I am poore, with the abundaunce of thy goodes thu dost paye my debte (...) O my father, dost thu vouchesave to be my judge, not wyllynge the deathe of a synner. O Jesus Christ, true fysher, and saver of the sowle, frynde above all fryndes, so thu beynge my man of lawe, de(Fo.33.)dyst excuse and speake for me, where thu couldest justly have accused me. 1 feare nomore to be undone by any man for the lawe is satisfyed by the for all. My swete spouse hath made the payment so habundaunt, that the lawe can aske nothynge of me but is payed of hym. For as I beleve, he hath taken all my synnes upon hym, and hath geven me in place of them, hys owne goodes in habundaunce.

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o. o Y a il rien qui me puisse plus nuire, Si DIEU me veult par Foy a luy conduire ? J'entens la Foy toute telle, qu'il fault, Ephes. 2. Digne d'avoir le nom du don d'enhault : Foy, qui unit par Charité ardente Au Createur sa treshumble servante. (...) Trop foible suis en moy, en DIEU tresforte (...)

INDEX

Thèmes : littérature, philologie Mots-clés : critique littéraire, Marguerite d'Angoulême reine de Navarre (1492-1549), poésie Index chronologique : 16e siècle

AUTEUR

KOLDO J. GARAI

English DepartmentUniversity of Maryland eta Hizkuntza eta Literaturaren Didaktika Euskal Herriko Unibertsitatea [email protected]

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Euskalduna eta Piarres Lafitte

Amelia Hernandez

1. Eskualduna kazeta

1 Martial-Henry Berdoly Mauleko suprefetak Le Réveil basque astekari errepublikarra kaleratu zuenean, 1886-ko abuztuan, Louis Etcheberry deputagai erregezaleak Eskualduna argitaratu zuen, 1887ko martxoaren 15ean, Le Réveil Basquek hautesle euskaldun guztiak erakarriko lituzkeen beldurrez1.

2 Izan ere, garai hartako politikariek ohitura zuten argitalpenenak kaleratzeko hauteskundeetan botuak lortzearren. 3 Hala ere, Le Réveil Basque desagertu egin zen hauteskundeak burutu zirenetik gutxira, 1894ko uztailean, helburu politiko hutsarekin sortu baitzuten. Ostera, Eskualdunaren arduradunek astekaria argitaratzen jarraitu zuten, 1944ra arte, adieraziz, hauteskundeak jadanik amaiturik zeuden legez, politika pixka bat alde batera utziko zutela eta laborari eta familien gaiak landuko zituztela2. 4 Horrela, Eskualdunan euskal herrietako gertakarien berri eman zuten « Nouvelles du Pays » atalean, nekazarien arazoez hitz egiten zuten « Laborarier » izenburupean eta erreklutatu eta gerlarien egoeraz « Nouvelles militaires »-n3. 5 Dena dela, ez zuten politika erabat baztertu ; eskuindarraren batasuna bilatu zuten4 eta Errepublikaren pentsamoldeari aurka egiten jarraitu zuten. 6 Kutsu erlijiosoa nabaria zen Eskualdunaren ia berri guztietan, Elizaren inguruan buruturiko ekintzak espreski aipatzeaz gain5. Izan ere, Eskualduna helburu politikoekin sortu zutenean, xede horiek bat zetozen Elizaren pentsamoldearekin. Are gehiago, Louis Etcheverry sortzailea, « politikaz, bihotz-bihotzez bonapartetiarra »6 zena, batzuetan kontra agertu zen Elizaren jokabidearen aurrean, errepublikazalea zelakoan7 7 Era berean, Eskualduna ez zen mazoizalea, ezta juduen zalea ere : « Asmatzen dituzten tzarkeriak gure eta erligioneko guzien kontra egiteko framazondarrak juduen esku-makhil dire »8.

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8 Euskal herrietatik Ameriketarako emigrazioari buruz, Eskualduna n eten egitea proposatu zuten, herriak hustu ez zitezen9. Horrekin batera, hirietako protesta sozialak ez ziren Eskualdunaren gustukoak, komunistek sustatzen zituztelakoan : « Polizak ez du buru egiten ahal gizon errabiatu horien. Gazeta gorriak berriz gizon horier etsenplu onak emaite orde gehiago asalda-arazten dituzte »10. 9 Laburbilduz, Javier Diaz Nocirekin batera esangu dugu Eskualdunak pentsamolde bat finkatu zuela irakurleen artean11, oso handia izanda astekari horren hedapena eta eragina herritarren artean, 8000 irakurle izatera helduz 1930, hamarkadaren hasieran.

10 Lafittek Eskualdunan 1921ean lehenengoz idatzi bazuen ere, Saint Pierre 1925ean astekariaren gidari izendatu zutenean12 hasi zen Lafitte maitasunez idazten : 81 artikulu argitaratu zituen Saint Pierren bost urtetako zuzendaritzapean. Lafitteren lankideak izen ziren Laurent Apestéguy, Jean Barbier, Louis Dassance, Dominique Dufau, Pierre Duhour, Jean Elissalde « Zerbitzari », Jean Etchepare, Goyheneche, Julien Héguy, Michel Iriart, Gratien Istilart, Piarres Lafitte, Leon Léon, Jules Moulier « Oxobi » eta Maurice Otacéhé13. 11 Hala ere, 1929ko abuztutik 1933ko abendura arteko Eskualdunak jaso zituen Lafitteren lan gehienak, zeren eta Michel Iriartek, Ustaritzeko erretora, « Ebanjelio » izenburuko artikulua prestatzen baitzuen Eskualduna astekarirako eta 1929an hil zenean Lafittek ekin zion14 lan horri. 12 1930ean Jean Saint Pierre Carthageko artzapezpikuaren laguntzaile izendatu zuten eta Dominique Soubelet Eskualdunaren zuzendaritzarako aukeratu, kalonje bilakatzearekin batera. Aurreko parragrafoan aipatu ditugun idazleei Xalbat Arotçarena gehitu zitzaien lankide bezala15. Soubeletek astero idatzi zuen Eskualdunaren lehenengo orrialdean : apezpikuaren hitzak goratu egin zituen, Espainiako Errepublika arbuiatu, soldado frantziarrak adoretu, etab. Piarres Lafittek ia zenbaki guztietan idatzi zuen Ebanjelioz - 142 artikuluetatik, 128 ziren « Ebanjelioa » izenburudunak- eta liburu berriez noizbehinka, P.L.-z sinaturik. 13 Soubeleten garaiko Eskualdunak Frantzia eta Italiaren arteko hitzarmenaren alde agertu zen16, Hitlerek poterea eskuratu zuelakoaren beldur baitzen17. Tokiko politikaren alorrean, Eskualdunan Ybarnégaray aurkeztu zuten euskal politiko eta hizlari hobezin bezala, idealizaziora eramateraino : « C'est devant une assistance fatiguée par de trop longs discours que notre député basque Jean Ybarnégaray a fait entendre sa remarquable interpretation. Fermeté du ton, logique du raisonnement, ironie mesurée, éloquence du débit, tout dans cette intervention révéle le grand orateur »18 14 1937an Soubeletek zuzendaritza utzi zuen, gaixorik baitzegoen, eta Xalbat Arotçarenak hartu, martxoaren 24an19.

15 Arotçarenarekin, eta Bigarren Mundu-Gerraren urteak zirelarik, astekariak bat egin zuen Frantzian ezarritako Vichyko gobernu zein Pétainen pentsabidearekin : Révolution Nationalaren alde agertu zen20 - « lana, familia eta aberria » leloari jarraituz-, frantses guztiak Frantziaren batasunaren alde adoretu zituen21 eta Vichyko Milice Française aintzat hartu zuen22. 16 Berriro ere Eskualdunak komunismoarekiko beldurra agertu zuen : « Egungo-egunean, gehiago ezin ukhatuzko gauza ez othe da : komunista guri bihotzeko phisu-minenen trenkatzerat doala... Komunistak mehatchatzen dituela oro, bai Herria, bai familia, bai erlisionea, bai bakea ? »23

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17 Arotçarenaren garai hartan Eskualduna Francoren alde ere agertu zen 24. Horrela, Frankistek Bilbao hartu zutenean, honako lerro hauek argitaratu zituzten astekarian : « Bilbaoko jendea alegera zen Francoren soldadoak ikustearekin... Zer atsekabe guretzat eskualdunak ikustea, komunichtekin eskuz ikustea, tresna berak eskuetan, Francoren soldadoen kontra... Bazutena arrazoinik aski komunizteri laguntza emaiteko ? Hori bertzerik da. Guri hasteko ez iduri... Eskualdun guziak eman balire Francoren alde, Gipuzkoakoak eta Bizkaiakoak, Alabakoak bezala guri iduri odol gutiago izanen zela Espainian »25 18 eta itxaropentsu agertu zen Alemania Bigarren Mundu-Gerraren garaile suertatzeko aukeraren aurrean : « Beraz salbamenduraz heltzeko bide bakhar bat dugu... Bide eta athe bakhar bat, ez biga : Alemaniaren bitoria... Zombat erresuma komunismoaren pozoin latzgarriak pozoindaturik dauzkanak »26 19 Alemanenganako begikotasuna zela eta, Eskualdunaren irakurle asko kazetaren etsai bilakatu ziren eta salmenten kopuruak beherantz egin zuen, 2.200 aletara helduz27.

20 Era berean, Arotçarena Eskualdunaren zuzendari izendatzearekin, Lafittek asko gutxitu zuen astekarirako lana : hamabost artikulu baino ez28.

2. Piarres Lafitteren estatus intelektuala Eskualdunaren gainontzeko lankideekiko.

21 Eskualdunako Piarres Lafitteren eta garaiko lankideen emaitzak biltzearren, hona hemen 1920. eta 30. hamarkadetako idazleen zerrenda eta astekarian argitaraturiko artikuluen kopuruak :

29. Ez dugu Eskualdunaren 1920ko alerik topatu, ez Belokeko, ez Baionako ezta Euskal Museoko liburutegietan ere.

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22 Laukiak erakusten digun legez, Eskualdunan idatzi zuten 28 idazleengandik 18ren jaiotze data ezagutzen dugu. Hogeitabost urteko Pierre Larzabal izan ezik, guztiak ziren Lafitte baino zaharragoak. Hala ere, artikuluen kopuruari begiratuz gero, ikusiko dugu 1940an bost idazlek baino ez zutela Lafitte gainditzen Eskualdinan argitaratzeari zegokionez.

23 Argi dago, beraz, Lafitte ia gazteena bazen ere, intelektual emankorre-netariko bat izan zela 1920. eta 30. hamarkadetako Eskualdunan.

BIBLIOGRAPHIE

EUSKALTZAINDIA : Piarres Lafitte-ri omenaldia, Bilbo, Iker, 1983.

HARITSCHELHAR, Jean eta beste batzuk : « Hommage à Pierre Lafitte », Bulletin du Musée Basque, 1986, 113-114 zkiak.

« Herria 25 urte », Herria, 1969.

LAFITTE, P. : Euskal literaturaz, San Sebastian, Erein, 1990.

NOTES

1. Le Réveil Basqueren kontrako erasoak ugariak izan ziren Eskualdunan, batez ere hasierako zenbakietan : “Egia Errepublikaren eta Erligionearen gainean”. “L'Autorité des chefs de famille”, “La bonne foi du Réveil Basque”. Eskualduna, 1887ko maiatzaren 15a ; “Au Réveil Basque”. Eskualduna, 1887ko irailaren 24a ; “Au Réveil Basque”. Eskualduna, 1887ko urriaren 21a ; “La colère du Réveil Basque”, Eskualduna. 1889ko apirilaren 19a, etab. 2. Eskualduna : “Gure irakurtzaleri”. Eskualduna, 1890eko apirilaren 4a. 3. Eskualdunan armadarenganako itxaropena agertu zuten : “Après Dieu. notre unique espérance pour le salut de la France est dans notre brave et admirable armée”, “Soldadoguaco lege berria”. Eskualduna, 1887ko irailaren 17a. Gai berberari buruz : “Nouvelles militaires. La Mobilisation”, Eskualduna, 1887ko irailaren 17a ; “Nouvelles militaires”, Eskualduna, 1887ko urriaren 14a ; “Recrutement”, Eskualduna, 1887ko azaroaren 18a, etab. 4. “ez zen xurien arteko batasunik : baziren erregetiarrak, bonapartixtak baieta errepublikano girixtinoak. Erregetiarrek ez zuten erregegai bera sustengatzen, ez eta bonapartixtek inperadoregai bera. Errepublikano girixtinoek kontra zituzten gorriak, hauiek erlisionerik ez baitzuten nahi ; bai eta bertze xuriak, hauiek ez baitzuten uste izan zitakela errepublika onik”, “ Herria 25 urte”. Herria, 1969. 5. “Nouvelles Religieuses”. Eskualduna, 1887ko irailaren 17a ; “Larressore”, Eskualduna, 1887ko urriaren 28an ; “Hazparneko predikuak”. Eskualduna, 1888ko uztailaren 13a ; “Installation du curé doyen”. Eskualduna, 1889ko apirilaren 5ean : “Nominations dans le clergé”. Eskualduna, 1893ko urtarrilaren 13a ; “Une lettre de Léon XIII”, Eskualduna, 1893ko urtarrilaren 27a ; “Garizumako lehen igandearen Ebanjelioa”. Eskualduna. 1894ko azaroaren 9a, etab. 6. Lafitte, P. : Euskal Literaturaz, Erein, 1990. 225. or.

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7. “Erromako politikaz duda azkar zonbait gora-behera”. Lafitte, R. Euskal literaturaz.... 225. or. Ideia berbera agertu du Michel Oronosek Louis Etcheverryz : “Etcheverry, aux sentiments bonapartistes bien marques, s'attaque même à l'Eglise qu'il juge trop républicaine”. Oronos. M. : L'information religieuse en basque dans les publications du Pays Basque Nord, de la fin du Concile Vatican II (8 décembre 1965) au Ve Synode romain (29 octobre 1977). Question pour une histoire future, Université de Bordeaux. 1982, 73. or. 8. “Juduak Frantzian nausi”. Eskualduna, 1891ko azaroaren 13a 9. “Nouvelles du Pays. Conthseilu bat”. Eskualduna, 1887ko abenduaren 2a. 10. “La grève”, Eskualduna, 1888ko abuztuaren l0a 11. Díaz Noci, Javier : Euskal prentsaren sorrera eta garapena (1834-1939), Donostia, Eusko Ikaskuntza, 1995,51. or. 12. Eskualdunaren zuzendari izendatu zutenean Jean Saint Pierre astekariaren lehenengo orrialdean idazten hasi zen, J.S.P.-z sinatuz. Polika eta ekonomia gaiak oinarritzat harturik komentarioak egiteaz gain, herrietako gertakizunak eman zituen aditzera bigarren edo hirugarren orrialdeetan. 13. Aipatu idazleak Eskualdunaren azterketa lanean aurkitu ditugunak dira. Hala ere, “Herria 25 urte” artikuluan Donech, Larrieu eta Valence lankideak ere aipatzen dira Saint-Pierren garaikide bezala, guk geuk orduko Eskualdunaren orrialdeetan aurkitu ez ditugunak. 14. Xarriton, P. : Jean Etchepare mirikuaren (1877-1935) idazlanak. I Euskal Gaiak. 1984, Donostia, Elkar, 351. or. 15. “Herria 25 urte” artikuluan lankide gehiago aipatzen dute Soubeleten garaian idatzi zutenen artean : Athor, Dirassar, Esperne, Etcheverry Milafrankako erretorea. J. B. Etcheverry, Iturbide. Lompageu eta Olhagaray. 16. “L'amitié Franco-Italienne”, Eskualduna 1932ko martxoaren 18a. 17. “Sekulan ez du Frantziak orai baino armada azkar baten beharra izan. Alemaniak Hitler nausijarriz geroztik, ez du bertzerik asmatzen baizik eta gerlaren berriz phiztea”, “Berriak, Frantzia. Egon gaiten azkar” Eskualduna, 1933ko irailaren la. 18. “Vibrante interpellation du député basque Ybarnégaray”. Eskualduna, 1934ko urtarrilaren 19a. Eraberean : “Il est de droite parce qu'il représente a la Chambre une foi et des traditions comme il n'en fleurit qu'au Pays basque, a l'ombre dorée de ses sanctuaires. sous le signe d'une piété sans apprêt. Sans trouble. simple et nue comme la pierre dépouillée de ses cimes", Eskualduna, I932ko irailaren 30a. 19. “euskalzale argitsu eta sutsua izan arren. Action françaisen pentsakeratik hurbil zegoena”, Oronos, M.. aipatu liburua, 73. or. 20. S. A. : “Bihotzez Marechalarekin”. Eskualduna 1942ko maiatzaren la. 21. S. A. : “Hitz bakhar... bi sentsu”, Eskualduna, 1942ko urtarrilaren 23a ; S. A. : “Révolution Nationale”, Eskualduna, 1942ko maiatzaren 19a ; S. A. : “Révolution Nationale”. Eskualduna 1942ko abuztuaren 7a. 22. S. A. : “Bihotzetik gure agurra igortzen diogu Baionan jarri berri zaukun “La Milice Française” horri, esperantcha baitugu... gizontasuna... garbitasuna derauzkula gure choko huntarat ekharten”, Eskualduna, 1944ko ekainaren 23a. 23. S. A. : Eskualduna, 1937ko apirilaren 9a. 24. “Eskualduneri Francoren hitzak”, Eskualduna 1937ko azaroaren 28a. 25. “Auzo erresumetan”, Eskualduna 1937ko uztailaren 2a. 26. S. A. : “Utz haurkeriak”, Eskualduna, 1942ko urriaren 16a. 27. “Herria 25 urte... aipatu artikulua. 28. Ikus Eranskina.

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INDEX

Thèmes : littérature Mots-clés : écrivain contemporain, Lafitte Pierre (1901-1985), Eskualduna (journal) Index chronologique : 20e siècle

AUTEUR

AMELIA HERNANDEZ

Universidad del Pais Vasco/EHU

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Et... le hérisson se réveilla : Passé et présent de la littérature basque

Mari Jose Olaziregi

Le sommeil fut long, la bibliothèque brève ; Mais au XXe siècle, le hérisson se réveilla.

Bernardo Atxaga (« J'écris dans une langue bizarre »)

1 Le réveil du hérisson, ce mystérieux animal qui se roule en boule et hérisse ses piquants à l'approche du danger, sert parfaitement à symboliser le développement de la littérature en langue basque. Comme Bernardo Atxaga le suggère dans son poème, il s'agit d'un hérisson qui, après une trop longue léthargie, a heureusement réussi à s'éveiller au XXe siècle. La période la plus intéressante et remarquable de notre histoire littéraire se situe donc dans les cent dernières années, période qui fera l'objet de la plupart des lignes qui suivent. D'où les rares références à notre passé littéraire le plus reculé, car, depuis la parution en 1545 du premier livre en basque, le recueil de poèmes Linguae Vasconum Primitiae de B. Etxepare, seuls 101 livres ont été publiés avant 1879, dont quatre seulement peuvent être considérés comme strictement littéraires. De ce fait, nous parlons d'une littérature tardive, d'une littérature qui n'a pas connu de conditions socio-historiques fort favorables à son développement et qui a été liée, cela va de soi, aux avatars de la langue qui la soutient : la langue basque.

2 Et puisque nous parlons de langue basque, il conviendrait de faire quelques précisions à son sujet, dans le but de mieux connaître, voire d'aimer notre passé et notre présent littéraires. Tout d'abord, rappelons que nous écrivons et percevons dans une langue très ancienne, pré-indoeuropéenne d'après les experts ; même si la date exacte de son origine reste inconnue, la plupart des anthropologues, des historiens et des linguistes sont d'accord pour dire qu'au Néolithique on parlait déjà cette langue. Ensuite, précisons qu'il s'agit d'une communauté linguistique très réduite, constituée à l'heure actuelle par quelque 700000 individus habitant des deux côtés des Pyrénées. La frontière politique qui divise aujourd'hui le Pays Basque, ou Euskal Herria, entraîne à

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son tour une situation légale différente. Si, depuis l'adoption de la Constitution Espagnole de 1978, la langue basque a un statut de co-officialité, au même titre que l'espagnol, dans les deux communautés autonomes de la zone espagnole, il n'en est pas de même au Pays Basque français, où la langue basque ne jouit pas de ce caractère de langue officielle. Les conséquences de cette inégalité sont facilement prévisibles : grâce à l'instauration de modèles d'enseignement bilingues ou aux aides à l'édition en langue basque, le panorama littéraire basque s'avère beaucoup plus fort et dynamique au Pays Basque espagnol que dans la zone continentale. 3 Mais cela n'a pas toujours été le cas : les premières publications de notre histoire littéraire ont quand même vu le jour dans le Pays Basque français. D'autres textes ont suivi celui d'Etxepare et constituent des tournants importants dans le développement de la littérature en langue basque : la traduction, en 1571, du Nouveau Testament et de quelques écrits calvinistes réalisés par J. de Leizarraga ainsi que la parution en 1643 de l'œuvre Gero de Pedro de Axular, considérée comme le fleuron de la prose ascétique en notre langue. La publication de textes d'édification et de traductions se poursuit et, au XVIIIe siècle, c'est au Pays Basque espagnol qu'il faut situer la renaissance des œuvres et des auteurs. En 1765 sont fondés la Société Royale Basque des Amis du Pays et le Royal Séminaire de Vergara. Soutenus par les idées de l'Illustration, des auteurs tels que Francisco Javier Maria Munibe, Comte de Peñaflorida, ont éveillé et ravivé l'ambiance culturelle de l'époque. Dans la période 1794-1808 nous voulons souligner le niveau atteint par les activités liées à la langue. À ce moment-là, l'éminent linguiste G. de Humboldt nous rend visite pour devenir ensuite le diffuseur du basque dans les cercles européens. Beaucoup d'autres se succèdent ; à l'ombre du Romantisme, le Pays Basque et notre ancienne langue attirent aussi l'attention de créateurs et de curieux, tels que le poète anglais W. Wordsworth ou l'écrivain français P. Mérimée, qui choisit un personnage basque, Carmen, comme héroïne de son célèbre roman. 4 Quoi qu'il en soit, c'est dans la dernière décennie du siècle précédent que nous découvrons les premiers indices d'un esprit nouveau, un esprit qui bouleverse de fond en comble l'avenir de notre littérature. Aussi assistons-nous à la fin de la prépondérance des ouvrages d'édification et de formation religieuse, et l'éventail des genres littéraires s'élargit : la trajectoire de certains poètes tels que Bilintx ou Etxahun s'enrichit avec les apports de nouveaux auteurs tels que Arrese Beitia ; les récits, notamment des romans, font irruption dans le panorama littéraire basque. La perte des fors à la suite de la deuxième guerre carliste ( 1873-1876) a marqué le début de ce que la critique a appelé la « Renaissance » de la littérature basque. C'est à cette époque-là qu'avec Sabino Arana sont jetées les bases du nationalisme basque ; celui-ci à son tour exerce son emprise sur toute la littérature basque du premier tiers du XXe siècle. La suprématie de l'idéologie nationaliste a deux effets sur la production littéraire des premières décennies du XXe siècle : d'une part elle est troublée par des objectifs extra- littéraires et d'autre part elle passe à côté du mouvement moderniste européen qui a tenté de bouleverser et le langage et les formes déjà éclatées de l'époque moderne. Nous parlons des écrivains qui ont souscrit au manifeste lancé en 1930 par le poète E. Pound : « Make it new ! » et dont les tons novateurs ne sont arrivés chez nous que le siècle étant déjà bien entamé, vers les années 60. Le roman basque qui fait ses premiers pas à la fin du XIXe siècle sous la plume de D. Aguirre essaiera de peindre un monde idéalisé et essentialiste, éloigné des cités industrielles qui se sont formées dans le Pays Basque. Il s'agit, en fait, d'un roman à thèse conçu autour de trois axes principaux : la

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foi, le patriotisme et son caractère basque. Voici le modèle qui subsistera jusqu'aux années 50. 5 Parmi les autres genres, c'est sans doute la poésie qui l'emporte dans la première moitié du XXe siècle. Forte d'une tradition littéraire bien plus formelle que celle de la narration, la poésie post-symboliste qui trouve sa meilleure expression dans l'œuvre de J. M. Lizardi, Lauaxeta et Orixe, a essayé d'explorer les possibilités expressives de notre langue. La Guerre Civile espagnole (1936-1939) a fait des ravages dans la production littéraire basque. Au grand nombre de pertes et d'exilés il faut ajouter la forte répression exercée par les vainqueurs. Nous parlons d'une époque où les prénoms basques ont été interdits, de même que les inscriptions en basque sur les pierres tombales des cimetières ; une époque où les citoyens, l'administration, la culture sont autant de milieux sur lesquels la censure du régime de Franco s'est exercée. On a affirmé que la génération de l'après-guerre a été l'une des plus importantes pour la littérature basque, car elle lui a offert ce dont elle avait le plus grand besoin : une certaine continuité. La poésie a été le genre le plus cultivé, parmi d'autres raisons, parce qu'il était plus facile de publier des poèmes isolés que des œuvres complètes et que dans les années 1940-1959 l'activité éditoriale régulière était presque impossible. Signalons, parmi les poètes de cette époque, Ion Mirande : il a transgressé l'esprit religieux dissimulé dans la poésie basque jusqu'aux années 50. Hétérodoxe et nihiliste, héritier de Poe et de Baudelaire et lecteur de Nietzsche, Mirande nous a aussi laissé un roman, La filleule (1970), une sorte de version basque de Lolita de Nabokov. Aussi bien J. Mirande que G. Aresti (1933-1975) appartenaient à ce qu'on est convenu d'appeler la « Génération de 56 », génération qui a cherché à mettre à jour la littérature basque par le biais de l'incorporation des propositions modernes des littératures européennes ; elle a surtout tenu à débarrasser la littérature basque de son servilisme politique, religieux ou folklorique, pour qu'enfin, la fonction esthétique du fait littéraire l'emporte sur toutes les autres. Les événements qui se sont succédé au Pays Basque quelques années plus tard, dans les années 60, (développement industriel et économique, consolidation des écoles basques ou ikastolas, unification de la langue basque, activité politique importante contre le régime de Franco qui censurait toute activité culturelle en basque, campagnes d'alphabétisation en langue basque...), ont préparé un terrain propice à la germination des nouveaux principes littéraires. On a dit qu'on a opposé à l'orthodoxie culturelle en vigueur à l'époque une hétérodoxie culturelle et politique animée par des auteurs tels que le poète G. Aresti, le remarquable philologue K. Mitxelena (1915-1987) et le sculpteur J. Oteiza (1908). Après la publication de Maldan Behera [La descente] (1960) qui présente l'empreinte évidente de la sensibilité d'Elliot, Gabriel Aresti s'est penché vers la poésie sociale à la suite de la parution de Harri eta Herri [Pierre et Peuple] (1964). 6 Quant aux récits, le roman existentialiste Leturiaren egunkari ezkutua [Le journal secret de Leturia] (1957) de Txillardegi marque le début de la modernité pour le roman écrit en basque. Quelques années plus tard, en 1969, lors de la publication de Egunero hasten delako [Parce que ça commence tous les jours], l'écrivain Ramón Saizarbitoria bouleverse de fond en comble la donne romanesque : un roman expérimental proche du Nouveau Roman français se substitue à la poétique existentialiste. Commence une nouvelle période où la forme romanesque et l'expérimentation l'emporteront dans les univers littéraires des auteurs de l'époque. Cet étalage formel bat son plein en 1976 avec la publication de Ene Jesús [Oh ! mon Dieu], du même auteur. Dans les années 70, le plus international de nos auteurs fait irruption dans le panorama de la littérature basque : Bernardo Atxaga. Même si à ses débuts il a publié des ouvrages au goût post-avant-

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gardiste et de facture expérimentale, il a vite évolué vers des conceptions plus fantastiques ou réalistes. Étant donné que nous nous occuperons plus tard de son évolution littéraire, pour l'instant nous allons nous borner à compléter ce commentaire en disant que vers la fin des années 70, tout comme dans les littératures contiguës, le roman basque a récupéré le goût du conte. La prémisse post-moderne « tout est déjà raconté mais il faut le rappeler » est à l'origine de beaucoup de textes des dernières décennies. 7 Bien qu'il n'ait pas entraîné de bouleversement dans les paradigmes littéraires basques de l'époque, le début de l'ère démocratique espagnole en 1975 a permis de mettre en place des conditions objectives menant au plein développement de la littérature basque en tant qu'activité autonome. Les données de ce nouveau panorama sont éloquentes : actuellement on publie quelque 1500 nouveaux titres par an, il y a quelque 100 maisons d'édition sur le territoire du Pays Basque, environ 300 écrivains, dont 10 % seulement sont des femmes, et la narration est le genre le plus cultivé, en particulier le roman, genre plébiscité par les lecteurs de la dernière décennie. D'un autre côté, à partir de 1981, on peut suivre des études universitaires de langue et littérature basque, ce qui permet le renforcement de la critique académique ainsi que la parution de nouvelles générations de chercheurs. On assiste à la consolidation d'événements importants, tels que la Foire annuelle du Livre de Durango. Les traductions d'œuvres universelles en basque connaissent un développement quantitatif et qualitatif inouï, au point que j'oserais affirmer qu'à l'heure actuelle on est en mesure de lire en basque sans problème des auteurs universels tels que Faulkner, Joyce, Kundera, Hasek, Skvoreck ?... Ce ne sont que des indicateurs qui dessinent un panorama éditorial assez consolidé, où la publication et la lecture de textes littéraires en basque a atteint des niveaux inconnus jusqu'à présent. Sans aucun doute l'aspect le plus faible de notre système littéraire est toujours le nombre réduit d'ouvrages écrits en basque qui sont traduits à d'autres langues. Sur les 60 titres qui ont été traduits en différentes langues, l'œuvre de B. Atxaga vient en tête non seulement à cause du nombre de langues dans lesquelles elle a été traduite (Obabakoak peut se lire en 25 langues différentes) mais aussi grâce à l'écho et au succès international connus par l'auteur. Malgré la remarquable infrastructure éditoriale, médiatique et académique dont nous disposons aujourd'hui, la littérature basque ne se montre toujours pas telle qu'elle est : une littérature en quête de nouveaux lecteurs. 8 Reprenons cette courte révision de notre littérature contemporaine. Dans les années 70 la poésie sociale d'Aresti est remplacée par une poésie existentialiste, telle que celle de X. Lete ou celle d'auteurs comme A. Urretabizkaia ou M. Lasa [Memory Dump] (1993). D'autres auteurs sont partis de positions post-symbolistes pour évoluer vers un style plus concentré et synthétique (J. M. Lekuona), ou bien vers l'instrospection personnelle. (B. Gandiaga). K. Izagirre entame aussi sa trajectoire poétique dans les années 70 : Itsaso Ahantzia [La mer oubliée] (1976) est un texte proche de l'esthétique surréaliste, pour évoluer vers une poésie engagée en 1989, avec la parution de Balizko erroten erresuma [Le royaume des moulins fictifs]. Pour sa part, J. Sarriaonandia, après le recueil de poèmes riches de références culturelles Izuen gordelekuetan barrena [À travers les cachettes de la peur] (1981), un voyage littéraire où il puisait surtout dans Kavafis, Holan et Pessoa, il s'est approché aussi d'une poétique plus engagée dans Marinel zaharrak [Les vieux marins] (1987) et Huny illa nyha majah yahoo (1995).

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9 Mais le livre qui a vraiment bouleversé la donne poétique de l'époque est Etiopia (1978), de Bernardo Atxaga : ce livre a établi le canon de la poésie moderne parmi nous. La parution de l'ouvrage a eu lieu à une époque où la poésie basque connaît sa période d'avant-garde, grâce à la prolifération de revues littéraires qui ont joué le rôle de plaque tournante pour beaucoup d'auteurs. Pour compléter cette présentation, il nous reste à signaler que dans les années 80 nous assistons à une pluralité de tendances poétiques, dont la consolidation de la poésie dite de l'expérience. Des poètes de la taille de F. Juaristi (Denbora, nostalgia) [Temps, nostalgie] (1985), Galderen geografia [Géographie des questions] (1997), A. Iturbide, J.K. Igerabide ou M. J. Kerexeta, vont combiner une approche au symbolisme et à l'esthéticisme et le recours à l'expérience personnelle, en tant que base de leur poésie personnelle. D'autres auteurs, tels que T. Irastorza, ont publié des poèmes plus intimistes. Malgré la diminution du nombre d'ouvrages poétiques publiés dans les années 90, d'autres auteurs se sont incorporés à notre panorama : R. Diaz de Heredia (Hari hauskorrak) [Les fils fragiles] (1993), Kartografia (1998) ou G. Markuleta. D'un autre côté, les écrivains groupés autour de la revue Susa, auteurs d'une poésie rupturiste, underground pour ainsi dire, ont assisté à l'élargissement de leur groupe initial de poètes (Izagirre, Aranbarri, Nabarro, Montoia, Otamendi, Borda...) grâce à l'incorporation d'autres noms dans les années 90 (J. Olasagarre, H. Cano, G. Berasaluze...). 10 Quant à la narration, genre nettement prépondérant dans les dernières décennies, signalons que la prolifération de revues littéraires dans les années 80 a contribué au développement du conte moderne du fait de leur brièveté. Les ouvrages de J. Sarrionandia (Narrazioak) (1983) ou de Atxaga, notamment son excellent livre Obabakoak (1988), nous emmènent à des mondes fantastiques et imaginaires, auparavant inconnus dans la prose écrite de notre langue. Cette trajectoire du conte moderne s'est vue confirmée par les narrations portant l'empreinte de Rulfo de I. Mujika Iraola dans Azukrea belazeetan [Du sucre dans les prés] (1987), ou par le réalisme sale de X. Montoia. Quoi qu'il en soit, comme il arrive dans la littérature espagnole de la fin du siècle, l'activité littéraire basque a aussi tourné autour du roman dans les derniers temps. À présent la narration est le genre qui connaît le plus grand succès, le plus grand prestige et offre, bien sûr, la plus grande rentabilité éditoriale. Si nous devions présenter brièvement les tendances et les auteurs les plus remarquables d'aujourd'hui, nous devrions commencer par les auteurs qui adhérent au roman lyrique ou poétique ; celui- là a commencé à proliférer à la fin des années 70 et parmi ses représentants se comptent le texte intimiste et proche du « féminisme de la différence » des années 70 : Zergatik Panpox [Pourquoi panpox ?], (Orain, 1995) de A. Urretabizkaia, ou les romans de Juan Luis Zabala : Zigarrokin ziztrin baten azken keak [La fumée d'un mégot insignifiant] (1985) et Kaka esplikatzen [Bag out] (1989). Ces ouvrages rappellent le goût pour le détail symbolique de Hanhka ou le désespoir omniprésent dans l'univers de T. Bernhard. Un autre genre romanesque qui foisonne chez nous ces derniers temps est bien le roman policier sous ses divers aspects. Par ailleurs, si dans la plupart des romans publiés dans les années 70 prédominaient la préoccupation linguistique et les modèles classiques anglais du whodunit, à partir des années 80 d'autres éléments du thriller contemporain et du roman noir américain s'y sont progressivement incorporés. Pour ne citer que quelques titres intéressants, voilà le roman d'espionnage : Izua hemen [La peur ici] (1991) de J.M. Iturralde ; l'excellent roman Ur uherrak [De l'eau trouble] (Hiru, 1995) de A. Epalza ; El hombre solo [L'homme seul] (1994), de B. Atxaga, thriller psychologique qui a remporté plusieurs prix ; l'inquiétante histoire de mystère Katebegi galdua [Le maillon

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perdu] (1996) de Jon Alonso ou les romans à rebondissements Beluna Jazz (1996) et Pasaia Blues (1999) de Harkaitz Cano. 11 Outre les caractéristiques signalées, le réalisme, l'observation de la réalité extérieure règnent dans les ouvrages de narration les plus récents. Il s'agit d'un réalisme agrandi par les nouvelles perspectives et points de vue, par leur rayonnement fabulateur ou par le traitement formel. Ce regard vers l'extérieur est à l'origine de la prolifération des romans autour d'événements historico-politiques importants pour notre histoire contemporaine. En plus des romans réalistes signalés de B. Atxaga, nous avons les dernières publications de R. Saizarbitoria : Los pasos incontables [Les pas incalculables] (1998) et Amor y guerra [Amour et guerre] ( 1999), où la mémoire joue le rôle d'axe narratif autour duquel il écrit une sorte de roman de témoignage. Pour compléter ce puzzle il faut parler de la trajectoire importante de certains auteurs tels que J.M. Irigoien, qui a apporté des airs sudaméricains à nos romans (Babylone) (1998), ou encore du perpétuel renouveau poétique qui est à l'origine de toute la production de A. Lertxundi. Ses débuts néorréalistes (Goiko kale) (1973) ont évolué vers des univers littéraires qui ne s'inspirent plus d'événements réels mais de simples conjectures littéraires. Avec Lertxundi nous entamons un voyage littéraire, un voyage intertextuel, qui se nourrit de différentes traditions poétiques. Les romans Las últimas sombras (1996) [Les dernières ombres] et Un final para Nora (1999) [ Une fin pour Nora] en sont des exemples.

Bernardo Atxaga (1951) : charmeur de lecteurs.

12 Il n'est peut-être pas très orthodoxe de parler de José Irazu Garmendia, connu sous son nom d'auteur de « Bernardo Atxaga », comme d'un charmeur de lecteurs. Mais les mots charme et séduction pourraient bien décrire à eux seuls le succès que connaît chez nous notre auteur le plus universel. Étant donné l'incontestable mercantilisation de la littérature, l'expression « l'auteur le plus lu » peut nous induire en erreur. Pourtant Bernardo Atxaga est bel et bien l'auteur plébiscité par le public, l'auteur qui vend le plus d'ouvrages écrits en basque, le plus apprécié par les autres écrivains ; enfin l'auteur devant lequel s'incline la critique académique basque. D'ailleurs, tous ceux qui ont assisté à l'une de ses lectures poétiques ou à ses conférences connaissent son dévouement, son empressement envers ses lecteurs. Cette attitude artistique a contribué à ce que la littérature de B. Atxaga fasse partie de nos vies. C'est pourquoi il n'est pas rare aujourd'hui de lire des titres de presse évoquant l'un de ses ouvrages, ni de voir des B.D. humoristiques montrant l'un de ses personnages. La phrase de la petite chienne Shola dans Poèmes et Hybrides (« personne n'est apprécié chez soi ») n'est plus vraie pour Atxaga. C'est aussi sans doute cet attrait et ce charme que suscite son œuvre qui sont à l'origine du livre intitulé Le sourire de Bernardo Atxaga publié par Dinapiera di Donato au Venezuela et de ce que le journal anglais The Guardian compte Atxaga parmi les 21 meilleurs écrivains du XXe siècle.

13 En reprenant ses propres termes, nous pourrions présenter son œuvre littéraire comme un inventaire qui comprendrait trois grands volets. D'un côté, les textes fantastiques situés à Obaba. D'un autre côté, les romans réalistes qui prennent les personnages pour trame narrative. Et enfin toute une série d'ouvrages où se manifeste son aspect d'avant- garde, le plus innovateur : la littérature pour enfants et pour les jeunes, les alphabets ou les ouvrages poétiques tels que Poèmes et Hybrides. Même si les dimensions de cet

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article ne nous permettent pas de trop nous occuper de chacun d'entre eux, nous essaierons d'en préciser les principales caractéristiques. 14 Commençons par Obaba, cette géographie imaginaire qui confère son unité à tout un cycle fantastique comprenant des contes et des récits publiés dans les années 80 tels que Lorsqu'un serpent... (1984), Deux lettres (1984), le roman Deux Frères (1985), ou le célèbre livre de récits Obabakoak (1988). Si ce topo littéraire a pour origine une berceuse biscayenne, ses descriptions nous parlent d'un paysage affectif plus large, d'un paysage relié au passé, à un monde ancien. Il s'agit d'une géographie vécue qui fuit toute concrétisation topologique et dans laquelle règne la causalité magique, (cf. J.L. Borges). Dans ce monde primitif les personnages se servent des animaux pour exprimer divers malheurs ou diverses situations. C'est pourquoi il n'y a rien d'étonnant à ce que ses habitants croient dur comme fer qu'un enfant puisse devenir un sanglier blanc, ni à ce que les lézards verts soient des êtres dangereux qui pourraient faire des ravages dans nos têtes s'ils réussissaient à s'y introduire par nos oreilles. Par le biais de ces superstitions, si présentes dans notre tradition orale, Atxaga nous parle de sentiments aussi universels que la peur, ou de la lutte perpétuelle entre la nature et la civilisation. Ainsi, dans Obabakoak (1988), excellent livre traduit en 25 langues, qui a reçu de nombreux prix, dont le Prix National de Narration- 1989, Atxaga nous présente un voyage littéraire qui, à partir de motifs et d'éléments bel et bien basques (particuliers), rend hommage aux maîtres universels du conte littéraire. Cet hommage littéraire est rendu par le biais des citations de contes (par exemple, le célèbre Le serviteur du riche marchand), des résumés (tels que ceux des contes de Tchekhov, Waugh et Maupassant dans À propos des contes), des paraphrases aux transformations thématico-formelles (telles que Wei Lie Deshang), des plagiats (comme dans le conte Torture par espérance de Villiers de l'Isle Adam dans Une crevasse dans la neige gelée) des parodies, des imitations, etc. Au cas où ces références ne seraient pas suffisantes, des titres tels que Margarete et Heinrich, jumeaux (cf. G. Trakl) ou E. Werfell (cf. F. Werfel) nous parlent des racines expressionnistes de certains contes du livre. 15 Dans le délicieux roman qui raconte les souvenirs de la vache Mo, Mémoires d'une vache (1991), Atxaga annonce les caractéristiques de ses romans postérieurs : le réalisme et l'utilisation de voix intérieures pour raconter le discours intérieur des personnages. Traduit en 13 langues, le roman L'homme seul (1993), tourne bien autour d'un personnage (Charles) et de l'impitoyable solitude qu'il éprouve. Hanté par les voix qu'il entend au fond de son âme ainsi que par les souvenirs du passé, Carlos, ancien activiste de l'E.T.A., ne défend plus les idéaux révolutionnaires d'antan. L'image surréaliste de la mer glacée qui ne quitte jamais le protagoniste de cet inquiétant thriller traduirait parfaitement l'angoisse qu'il éprouve en se sentant perpetuellement traqué. Tout comme dans les romans de Pavese, dans L'homme seul le lecteur saisit l'impitoyable sentiment de solitude qui entoure les personnages principaux. Quelques années plus tard, en 1995, Atxaga publiait Ciels, roman court où l'on raconte le voyage de retour d'une ancienne militante réinsérée de l'ETA, Irène. À nouveau nous avons affaire à un personnage déçu et solitaire qui essaie de s'éloigner d'un passé qui le rend prisonnier. Mais cette fois-ci c'est la littérature qui va permettre à Irène de s'éloigner de ce sentiment de solitude qui la saisit. L'excellente anthologie poétique que comporte le roman nous rappelle ce vers célèbre de E. M. Cioran : « Y a-t-il de critère artistique sans s'approcher des ciels ? ». D'où l'importance accordée dans ce roman à la symbologie des ciels : un ciel où se reflète parfois Irène et qu'elle désire « toucher ».

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16 Peu à peu nous arrivons au dernier grand volet de l'œuvre d'Atxaga, formé par ses textes d'avant-garde. Nous y découvrons un auteur plus novateur et hardi, qui aime faire des expérimentations avec des engins littéraires tels que les textes pour enfants, les alphabets ou abécédaires, ou qui n'hésite pas à proposer des lectures poétiques publiques à la manière de Dylan Thomas. 17 Comme nous l'avons dit plus haut, la publication du recueil de poèmes Etiopia ( 1978) a marqué une date dans le développement de la poésie basque moderne. Il s'agit d'un collage de livres de récits et de poèmes, organisés dans une structure circulaire. Deux récits ouvrent et ferment le livre et, au milieu, imitant le célèbre texte de Dante, nous trouvons neuf cercles de sable délimitant ce voyage littéraire vers Etiopia (Utopie). Et c'est sur le sable que le temps oublie des montres cassées ; la mémoire, des lettres jaunâtres ; la culture, un dictionnaire lilliputien et le courage, un bouclier rouillé (réf. « À propos du sable »). En fait ce qui se dégage d'Etiopia, c'est bien la lassitude poétique qui a précédé la fin de la modernité. Atxaga tente de bouleverser le langage poétique corrompu et nous annonce l'arrivée de wagons pleins de silence qui luttent contre les substantifs et les adverbes (réf. « Chronique partielle des années 70 »). Le protagoniste est un apatride empreint de l'esprit Dada et qui cherche à imiter Rimbaud. Ainsi flâne- t-il dans cette ville dramatique (et nettement expressionniste). Devenue un terrible labyrinthe, la ville est peuplée d'anti-héros et de perdants (tels qu'explorateurs, boxeurs) ou... de poètes suicidaires. Les camarades de voyage invoqués par le poète (Nerval, Rigaut, Rimbaud ou Cravan) ont aussi cherché à fuir la Ville, c'est-à-dire, les limites du langage. 18 Débarrassé des excès et de l'ornement, éloigné du dramatisme qui règne dans le livre précédent, dans Poèmes et Hybrides (1990) Atxaga essaie de récupérer le sens essentiel de la poésie. Pour ce faire, il déchire le langage topique dont la poésie se servait, en le brisant à l'aide du dadaïsme et à l'aide d'éléments primitifs et enfantins. Humour et tendresse président l'univers de l'auteur, mais c'est surtout le besoin de s'éloigner de toute conception élitiste du travail poétique qui l'emporte. Les personnages de Poèmes et Hybrides tels que Ainhoa avec sa robe fraise et vanille (réf. « Famille III »), la « mystérieuse » Shola (réf. « Famille IV »), ou l'immigrant Ezekiel Masisi Dembele (réf. « Chansons IX ») témoignent du regard humaniste et engagé d'Atxaga. Sa quête de nouvelles possibilités expressives comprend des chansons, des lectures poétiques sous forme d'inventaire (réf. Henry Bengoa Inventarium), voire des peintures, dont le charme a fait de Nouvelle Etiopia (1998) un livre vraiment séducteur. De n'importe quel point de vue qu'on l'observe, le réveil du hérisson s'avère extrêmement intéressant.

RÉSUMÉS

Ce court article essaie de réaliser une révision de l'histoire de la littérature basque et de présenter un diagnostic de notre actualité littéraire. Pour ce faire, nous sommes partis de quelques vers de l'écrivain Bernardo Atxaga dans lesquels il compare notre littérature à un hérisson qui a vécu une trop longue léthargie, mais qui, heureusement, a réussi à s'éveiller au

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XXe siècle. Les caractéristiques de la langue basque, les débuts tardifs de notre littérature ou les allusions aux divers cadres politiques où elle se développe, constituent des aspects qui peuvent intéresser les lecteurs qui, ne parlant pas le basque, souhaitent découvrir notre littérature. L'article résume en suite les tendances qui ont marqué le développement du genre poétique et de la narration basques au XXe siècle. La Génération de poètes post-symbolistes de la décennie des années 30, le relais de la poésie sociale à l'initiative de G. Aresti, ou l'irruption des idées post- avant-gardistes à la fin des années 70, ne représentent que quelques arrêts dans notre itinéraire. Quant à la narration, nous allons parler de la prépondérance de la poétique de mœurs dans la première moitié du siècle, de l'irruption, dans les années 60, du roman moderne selon des typologies aussi distinctes que le roman existentialiste ou le roman expérimental proche du Nouveau Roman, du renouveau des récits courts, les contes, dans les années 80, ou du panorama narratif actuel extrêmement varié. Nous complétons notre donne littéraire avec l'approche de l'œuvre de notre auteur le plus international, Bernardo Atxaga.

This short article attempts to give an overview of the history of Basque literature and make a diagnostic of our current literary scene. To that end, we have borrowed a few lines by the author Bernardo Atxaga in which he makes a comparison between our literature and a hedgehog that has been lethargic for too long, but has fortunately managed to wake up in the twentieth century. The peculiarities of the Basque language, the late awakening of our literature and the references to the various political scenarios in which is has developed may be of interest to non-Basque readers who want to become familiar with our literature. After a few introductory notes, the article goes over the main currents that have shaped up the Basque poetic and narrative genres throughout the twentieth century. The generation of post-symbolist poets in the thirties, the social poetry of which G. Aresti is the main exponent, or the post-avanguard approach at the end of the seventies are some of the steps that we have taken in our journey. As far as the narrative production is concerned, the description of local customs (known as costumbrismo) dominated the first half of the century, with modern novel bursting in in the sixties with varieties ranging from existencial novels to experimental works close to the Nouveau Roman, followed by the renovation of the short narrative genre, ie the writing of stories, in the eighties, all of which has resulted in the current multicoloured narrative scene. We complete this short description with a few ideas about the work of our most international author, Bernardo Atxaga. (...)

INDEX

Index chronologique : 20e siècle Mots-clés : Atxaga Bernardo (1951-), écrivain contemporain, littérature basque, poésie Thèmes : histoire, littérature

AUTEUR

MARI JOSE OLAZIREGI

(Université du Pays Basque. Vitoria) [email protected]

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Statut et évolution des lettres basques durant les XVIIème et XVIII ème siècles

Bernard Oyharçabal

NOTE DE L'AUTEUR

Cet article est une version augmentée et adaptée à un lectorat éventuellement non bascophone ou hispanophone, d'un article à paraître en basque (Oyharçabal à par.), qui synthétise et complète diverses études antérieures.

1 Si les premières publications en langue basque datent du 16ème siècle, avec les poèmes de B. Echepare (1545), la traduction du Nouveau Testament et de l'Instruction chrétienne calvinistes (1571) par J. Liçarrague, le recueil de proverbes biscayens de 1596 et, de manière secondaire, la rédaction de petits catéchismes bilingues en Navarre (Elso, 1561) et en Biscaye (Betolaça, 1596)1, la fixation d'une variété de langue écrite en langue basque, qui servira de base à ce que l'on désigne sous le nom de labourdin classique, ne se fit qu'au siècle suivant, essentiellement dans une zone géographiquement bien délimitée, entre Sare et Saint-Jean-de-Luz. En effet, à partir de 1617, la publication d'ouvrages rédigés en labourdin connut un essor notable, et ce dialecte donna alors aux lettres basques une assise significative, de telle sorte que les ouvrages réalisés dans des variétés différentes au cours de ce siècle, que ce soit avec Oihenart (1656) ou Tartas (1666, 1672), tinrent compte de cet apport2. Pourtant, assez rapidement, après que dans la seconde moitié du siècle la production d'oeuvres nouvelles originales eut ralenti, cette impulsion s'affaiblit nettement, et cessa de produire ses effets, si bien qu'au siècle suivant, en particulier durant sa première moitié, fort peu de textes labourdins inédits furent publiés. Aussi considère-t-on que le 18ème siècle marque le déclin de cette tradition labourdine, en même temps qu'il se caractérise par l'apparition d'un mouvement favorable aux lettres basques de l'autre côté de la frontière, en Guipuzcoa surtout, sous l'impulsion de Larramendi, auteur de la

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première grammaire basque publiée (1729), et d'un dictionnaire trilingue appelé à recevoir un large écho (1749).

2 Les historiens de la littérature basque ont principalement évoqué des raisons d'ordre économique pour expliquer ces données : la prospérité de la côte labourdine au 17ème siècle aurait permis l'apparition et le développement d'une tradition locale dans la sphère des lettres, et, inversement, la dégradation des conditions économiques au siècle suivant, du fait de la chute de l'activité maritime consécutive au Traité d'Utrecht, aurait entraîné le déclin des lettres labourdines. Parallèlement, le rôle nouveau et prééminent joué par les auteurs du Guipuzcoa dans les lettres basques au cours de ce même 18ème siècle devait être mis en relation avec le développement du commerce de cette province avec le Nouveau Monde à cette époque. 3 Cette analyse est séduisante. Pourtant, elle repose sur une mise en correspondance entre activité économique en Labourd et production d'ouvrages écrits en labourdin, à laquelle la répétition a conféré peu à peu le statut de topique, mais dont la validité doit être questionnée. On peut tout d'abord avoir quelques doutes quant à la pertinence d'une démarche consistant à rendre compte des phénomènes de la vie socioculturelle, certes significatifs, mais de portée ou d'incidence limitée du point de vue matériel, par l'évolution des conditions économiques. Au surplus, il est fort douteux, en l'occurrence, que les bases factuelles de ce rapprochement soient aussi bien assurées qu'on l'a longtemps cru. Je voudrais par conséquent mettre en question ici cette vue, profitant de la circonstance pour conduire une réflexion relative à la situation que connurent durant cette période les provinces basques, tant aquitaines qu'ibériques, dans le domaine culturel considéré dans ses aspects linguistiques. 4 J'examinerai principalement l'évolution des lettres basques dans les provinces basques d'Aquitaine. Je montrerai en premier lieu qu'il ne semble pas que les changements survenus dans le domaine économique, notamment en ce qui concerne l'activité maritime, dans le Labourd des 17ème et 18 ème siècles, eurent un écho direct dans la création et l'évolution de la production des écrits basques (§1). Dans un second temps, je m'interrogerai sur le type de lectorat auquel les écrits labourdins de cette époque étaient destinés, en mettant en évidence l'existence et l'importance dans la première partie du 17ème siècle d'un lectorat bascophone moyennement cultivé ne lisant pas ou difficilement le français (§2). Ceci me conduira à mettre en lumière un conflit linguistique resté longtemps inaperçu, et qui surgit dans les années 1627-1635 dans l'entourage de l'évêque de Bayonne et dont l'un des protagonistes majeurs fut J. Etcheberri (§3). Je prolongerai cette réflexion en mettant en évidence un double processus d'évolution du statut sociolinguistique des langues de l'écrit au cours des 17 ème et 18 ème siècles dans les provinces basques aquitaines : renforcement du français comme langue d'accès à la connaissance et à la culture pour les couches intermédiaires (§4), progression du basque comme langue associée à la première alphabétisation des couches sociales moins favorisées. Cette double évolution explique le paradoxe de la production d'ouvrages en langue basque en France durant cette période, caractéristique d'une situation de diglossie littéraire : elle ne cesse de progresser en quantité (nombre de publications, toutes catégories confondues), alors que l'on observe, dès la fin du 17ème siècle, une absence presque totale de publications de textes créés en basque (qui ne soient ni une réédition, ni une traduction ou une adaptation), même dans le domaine des textes utilitaires (§5).

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5 Cette analyse m'amènera à considérer, dans une partie finale, la situation des lettres basques dans les provinces ibériques durant cette période. Je montrerai d'abord que les conditions matérielles pour le développement d'une production écrite dans les provinces basques péninsulaires existaient bien avant le 18ème siècle, et de façon beaucoup plus évidente, en réalité, qu'en Labourd ou, à plus forte raison, en Soule. C'est en raison d'une situation diglossique dissemblable, caractérisée par un positionnement du castillan face au latin beaucoup plus précoce, que les lettres basques se trouvèrent comme empêchées d'apparaître plus tôt en Biscaye, Guipuzcoa et Haute-Navarre (§6). Je m'arrêterai ensuite sur les ambiguïtés du mouvement euska-rophile tel qu'il se développa dans la seconde partie du 18ème siècle, en Guipuzcoa notamment, d'abord avec Larramendi, puis bientôt chez les promoteurs des Lumières dans la péninsule, à savoir les membres de la Real Compañia Bascongada de los Amigos del País. Cette ambiguïté caractérise, en effet, une attitude du mouvement euskarophile qui se prolongera pour l'essentiel durant les deux siècles suivants, sur les deux côtés de la frontière, jusqu'à une date toute récente (§7). Je conclurai par quelques observations générales complétant les remarques de cette introduction (§8).

1. L'évolution des lettres labourdines et l'activité maritime en Labourd.

6 Comme nous l'avons rappelé dans les propos précédents, les historiens de la littérature basque ont principalement cherché dans l'économie les facteurs expliquant l'évolution des lettres labourdines. C'est surtout pour expliquer l'affaiblissement survenu au 18ème siècle que cette analyse a été proposée par Lafitte dès 1941 : Le XVIIIe siècle est un moment de décadence pour le Pays basque français. La région se trouve soudain dans la misère. Le traité d'Utrecht (1713) lui a fermé les portes du Nouveau Monde : plus de débouchés pour ses multiples industries locales naguère florissantes. Le malheur économique n'est pas favorable aux Muses (Lafitte 1941 : 43). 7 A la suite de Lafitte, la plupart des historiens de la littérature ont repris cet argument, attribuant le déclin des lettres labourdines aux conséquences économiques du Traité d'Utrecht, réputées néfastes pour les pêches labourdines : Mitxelena (1960 : 85), Sarasola (1976 : 51), Villasante (1979 : 102), Sagarna (1984), Juaristi (1987 : 49), Urkizu & autres (2000 : 233).

8 En affirmant que l'affaiblissement de l'économie labourdine, consécutif aux difficultés de l'activité maritime, eut pour conséquence la baisse de la production d'ouvrages en langue basque, on donnait à penser que la vigueur du secteur économique n'était pas étrangère à l'essor et la vitalité des lettres basques dans la période précédente. De même, une telle approche conduisait à considérer que ce type d'explication pouvait rendre compte du fait que ce qui était observé en Labourd ne s'était pas produit à la même époque dans les provinces ibériques. De ce point de vue, il est significatif que Michelena (1960), et à sa suite Juaristi (1987), n'hésitent pas à rapprocher l'essor premier des lettres guipuzcoanes au 18ème siècle du développement du commerce, qu'exprime la création de la Real Compañía Guipuzcoana de Caracas3 : (1) La littérature labourdine ne se maintint pas au 17ème siècle au niveau qu'elle avait atteint au siècle précédent. P. Lafitte voit en ceci le reflet des difficultés économiques qui résultèrent du traité d'Utrecht pour la côte basque française. On pourrait ajouter, sans établir pour cela une corrélation étroite entre des phénomènes d'ordre différent, que le premier épanouissement littéraire survenu chez nous [outre-Bidassoa] est postérieur à

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l'expansion commerciale, dont la fondation de la Real Compañia Guipuzcoana de Caracas est un bon indice (Michelena 1960 : 85).4 9 Pourtant, lorsque l'on analyse de plus près les fondements de cette analyse souvent répétée, il ne semble pas qu'ils soient aussi bien établis qu'on pourrait s'y attendre. En premier lieu, ainsi d'ailleurs que Michelena lui-même l'indique, il convient de garder à l'esprit que les phénomènes que l'on veut associer sont de nature différente. S'il est évident que la production d'ouvrages imprimés nécessite, comme toute production sociale de cette sorte, l'existence des conditions matérielles adéquates, il s'agit de conditions nécessaires, mais non suffisantes. On ne saurait en particulier négliger en cette matière les effets de la situation de diglossie (ou, si l'on veut, en tenant compte du latin, triglossique) existant dans les zones bascophones. En effet, l'une des caractéristiques des sociétés diglossiques, ainsi que l'indique le créateur du terme de diglossie lui-même (Ferguson 1959), est que la langue socialement infériorisée se trouve exclue des usages socialement valorisés, à la définition desquels l'écrit contribue grandement. Comme nous le verrons (infra § 6), le cas du Pays Basque ibérique illustre parfaitement cette situation, car la production d'ouvrages au 16ème et 17ème siècles y fut fort peu profitable à la langue basque, et se réalisa presque exclusivement au profit du castillan.

10 Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne le labourdin, les éléments factuels sur lesquels Lafitte se fondait il y a soixante ans pour poser son hypothèse s'avèrent très fragiles lorsqu'on les examine à la lumière des travaux réalisés par les historiens depuis lors. En effet, le parallélisme qu'il croyait pouvoir observer entre l'évolution de la production d'ouvrages labourdins et celle de l'activité des ports de la côte du Labourd n'est en aucune façon établi. En raison de l'habitude de découper le temps par siècles, on a coutume d'opposer, en ce qui regarde les lettres labourdines, les 17ème et 18ème siècles, le premier ayant été relativement productif et le second, au contraire, beaucoup moins. Mais si l'on opte pour un découpage par demi-siècles, on observe que les auteurs labourdins avaient commencé à montrer des signes patents d'essoufflement dès la seconde moitié du 17ème siècle. En effet, durant cette période, le nombre de premières publications originales baisse de manière significative (d'un tiers) par rapport au demi- siècle précédent : on en compte six dans la première moitié du siècle, et quatre dans la seconde (il n'y en aura qu'une durant la première moitié du siècle suivant) ; cf. Sarasola (1976 : 182-183). Or, on ne voit pas dans cette évolution de parallélisme significatif avec l'activité maritime et portuaire en Labourd. Celle-ci, selon Turgeon (1982), atteignit d'ailleurs son apogée nettement avant la naissance de la littérature labourdine, dans les années 1585, pour se maintenir à ce niveau élevé, malgré quelques variations intermittentes, durant pratiquement un siècle et demi jusque dans les années 1735 : La reconstitution de l'armement montre, en effet, que les pêches basques plafonnèrent dès 1580-90 pour se maintenir à des niveaux élevés jusqu'en 1730-40. (Turgeon 1982 : 08) 11 Ce décalage entre production d'ouvrages nouveaux et activité économique est encore plus manifeste lorsque l'on observe les phases de décadence. Pour les lettres labourdines, la chute se manifeste dès la seconde partie du 17ème siècle et cette production atteint son degré le plus bas dans la première partie du 18ème siècle. Au plan économique, par contre, c'est bien plus tard, au cours des années 1740, et non pas un quart de siècle plus tôt, à la suite du Traité d'Utrecht, que les ports de Saint-Jean-de- Luz et Ciboure connurent la crise durable qui les affecta au 18ème siècle. L'absence de parallélisme significatif entre l'évolution du secteur socio-économique en Labourd et la production de textes basques est d'ailleurs évidente si l'on retient le critère de la

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démographie : c'est en effet à partir des années 1740, et durant toute la seconde moitié du siècle, que l'on observe une dégradation considérable dans la zone de Saint Jean de Luz (Darrobers 1994 : 86-91). Au contraire, en ce qui concerne les ouvrages labourdins, les choses ont tendance à s'améliorer par rapport à la période antérieure : au cours de la seconde partie du 18ème siècle, le nombre d'ouvrages publiés double (18 → 36), celui des premières publications (y compris les traductions) également (6 → 12) ; et la même tendance s'observe en ce qui concerne les textes de création, même s'il s'agit de quantités peu significatives (1 → 3) ; cf. Sarasola (1976 : 182-3).

12 Il semble par conséquent que l'on se soit satisfait d'explications sans grands fondements pour interpréter l'évolution des lettres labourdines. Remarquons d'ailleurs, même si ceci à un caractère quelque peu anecdotique, qu'après l'impulsion donnée par Materre, les lettres labourdines connurent leur apogée entre 1627 (année de la publication du premier ouvrage d'Etcheberri de Ciboure) et 1643 (année de la publication de l'ouvrage d'Axular). Durant cette période si prometteuse pour les lettres labourdines, le Labourd connut pourtant des années fort difficiles, en raison de la guerre franco-espagnole5. Les troupes du Roi d'Espagne, venues du Guipuzcoa, envahirent et occupèrent toute la côte labourdine. Ciboure fut presque entièrement détruite et toutes ses réserves pillées. Saint-Jean-de-Luz, Ascain, Urrugne furent également occupées pendant un an (Nogaret 1925 : 138), et dans les années suivantes le Labourd fut ainsi parcouru par des troupes en conflit spolié et presque ruiné tant par les courses des ennemis que par le passage des gens de guerre lors du siège de Fontarrabie, indique l'évêque (cf. Dupuy 1972). C'est pourtant dans ce contexte socio-politique si peu favorable que les lettres labourdines connurent les années parmi les plus remarquables de leur histoire. 13 Observons toutefois que l'évolution économique évoquée ci-dessus eut très certainement une influence sur la place prise par le lectorat et les thèmes marins dans les textes : ils sont suffisamment importants durant la première moitié du 17ème siècle pour justifier les compositions spécifiques (Arcocha-Scarcia 1999), y compris dans le domaine des textes techniques, tel que celui des livres de navigation (Arcocha-Scarcia 2000), mais ils sont absents au siècle suivant dans l'écrit basque, de plus en plus associé à la ruralité.

2. Le lectorat des écrits labourdins du 17ème siècle.

14 Au début du 17ème siècle, en dehors de la périphérie bayonnaise et de quelques bourgades occitanophones dans la proximité de l'Adour, le basque est la langue de communication ordinaire des trois provinces basques du nord, et le latin la principale langue du savoir et d'accès à la connaissance. Le gascon, langue romane de prestige dans cette région durant les époques précédentes (avec le castillan pour la Basse- Navarre), avait cédé sa place de principale langue du droit au profit du français, bien que dans certains usages au moins il maintint ses positions jusqu'au milieu du siècle6 En dehors des gens de robe et des gentilhommes fréquentant la Cour que de Lancre (1612 [1982 : 78]) évoque dans ses indications sur le Labourd, et qui sont élevés à la française (idem), ou encore des gens d'armes ou des membres du clergé qui avaient eu l'occasion de sortir du pays de manière durable, le français, langue du pouvoir et du droit, était connu des cercles directement intéressés en ces matières, mais certainement ignoré ou mal maîtrisé en dehors de ceux-ci, y compris parmi les personnes ayant eu une

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formation scolaire, lorsque du moins celle-ci était reçue localement. Le témoignage de de Lancre concernant les difficultés liées à la langue qu'il rencontra lors de son séjour en Labourd, et l'importance de l'interprétariat dans les procédures durant l'instruction des procès de sorcellerie de 1609, montrent en effet que la connaissance du français était limitée, par exemple, chez les membres du clergé7.

15 Dans ce contexte, l'attitude adoptée par l'Evêché en matière linguistique prenait une grande importance, car c'est sur lui que reposait principalement la formation des esprits, et la surveillance de l'enseignement élémentaire dans les paroisses, lui même étroitement associé à la catéchèse. De fait, l'apparition d'une tradition écrite en langue basque était largement dépendante des choix linguistiques de l'évêché dans l'organisation de sa pastorale et l'élaboration de la littérature correspondante. 16 A la suite du concile de Trente, et face à la menace protestante, qui n'était pas que virtuelle dans les évêchés incluant des zones bascophones8, cette question était plus que théorique : il convenait de parvenir à un encadrement satisfaisant des populations grâce à un contrôle étroit de l'instruction chrétienne et à sa généralisation9. Ceci impliquait évidemment l'emploi d'une langue accessible aux paroissiens, c'est-à-dire l'emploi du basque dans les provinces basques. 17 Depuis 1598, l'évêque de Bayonne était B. d'Etchauz, qui savait le basque (de Lancre rapporte qu'il fut en mesure d'interroger directement les prêtres sorciers en 1609), comme d'ailleurs le béarnais, l'espagnol et le français. Il était par conséquent bien en mesure d'apprécier pleinement, à la fois, l'importance et la difficulté de l'entreprise d'adaptation linguistique à réaliser. Evêque politique (Boucher 2000, Pontet 2000), l'une des actions qu'il convient sans doute de souligner dans son action pastorale est celle d'avoir, non pas commandé, mais du moins parrainé la publication du premier ouvrage catholique original en langue basque10 bien illustratif du type de textes qui seront publiés dans les décennies suivantes en Labourd. 18 On peut assez bien se représenter le lectorat auquel les premiers auteurs labourdins s'adressèrent, du fait, d'une part, de la nature de leurs écrits, d'autre part, par la lecture de leurs témoignages. Leurs ouvrages sont tous constitués de textes religieux, en prose ou en vers : dévotion, prières, édification morale, tel est l'unique registre que connaissent les textes labourdins du 17ème siècle11. Les lecteurs supposés sont des laïcs, et en particulier ceux ignorant ou sachant peu le français et le latin12 Materre nous fournit cette indication dans son avertissement au lecteur : (3) ...et comme il y en beaucoup au Pays Basque qui savent lire, mais qui n'entendent d'autre langue que le basque, j'ai fait pour eux des oraisons et prières de dévotion en basque. (Materre, Dotrina christiana, 1623 : Au lecteur) 19 Cette remarque, qui sera confirmée par un propos assez semblable d'Axular un quart de siècle plus tard est importante. Elle souligne que dès cette époque les auteurs publiant en basque en Labourd conçoivent leur lec-torat comme constitué de gens ne pouvant lire qu'en basque13 (cas de figure qui, on le verra, ne se présente pas à cette époque dans les mêmes conditions dans les provinces basques ibériques, où même la première alphabétisation accompagnant la catéchèse se fait en castillan).

20 Nous n'avons pas de renseignements précis sur la formation du clergé labourdin de ce temps, en matière linguistique notamment. On peut penser qu'une partie des prêtres et notamment les curés en charge de paroisse, lesquels étaient en principe gradués, avaient quelques connaissances en latin. Pour autant, il est peu probable que beaucoup d'entre eux aient été en mesure d'exprimer dans un basque de même tenue ce qu'ils

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avaient appris en matière de religion, par le biais de langues ayant une longue tradition écrite, car après les événements ayant marqué les dernières décennies du 16ème siècle, les Basques ne disposaient pas encore d'un modèle de langue qui fut réellement disponible après l'échec de la Réforme. Belapeyre, auteur du premier catéchisme souletin (1696), nous indique dans la préface de son ouvrage que cette difficulté était réelle, puisqu'il évoque la tentative malheureuse d'un jeune prêtre qui en 1686 avait traduit un catéchisme en souletin pour le diocèse d'Oloron. En effet, le clergé de Soule dans sa majorité refusa cet ouvrage, parce qu'il était défaillant non seulement du point de vue de la doctrine, mais également en ce qui concerne la langue : (4) La plupart d'entre vous n'avez pas approuvé le catéchisme qu'un jeune prêtre de ce pays, il y a peu, a traduit en basque, et vous ne voulez pas l'utiliser ; et il est sûr que si nous ne reconnaissions pas que son auteur avait plus de volonté de bien faire que de connaissance en théologie, beaucoup de fautes involontaires, et de termes de son ouvrage, impropres tant en ce qui concerne le basque que la doctrine, se trouveraient dans une sévère condamnation ; mais par bonté nous les tairons désormais ici, afin que celui qui avait celé son nom dans son ouvrage ait moins de regrets. (Belapeyre 1696 : 20-21)14. 21 Peu après, au siècle suivant, les témoignages de Mendiburu, Larramendi et Cardaberaz montreront que dans des circonstances analogues des difficultés comparables apparurent aussi de l'autre côté de la frontière.

22 C'est dans ce contexte qu'il convient d'interpréter certains des propos de Materre, initiateur par le biais de l'écrit du mouvement d'adaptation linguistique de la catéchèse catholique dans le diocèse du Labourd. Dans son avertissement aux Basques il indiquait qu'en réalisant son ouvrage son objectif était double : d'une part, il souhaitait instruire les Basques en matière religieuse, d'autre part, il voulait leur montrer comment il faut écrire et lire le basque (nola behar den euscara esquiribatu eta iracurtu). On aura remarqué l'apparente contradiction existant entre ce second objectif, signalant une absence de tradition écrite précédant sa propre publication, et le fait que Materre, comme nous l'avons rappelé plus haut, indiquait s'adresser à un lec-torat ne sachant lire qu'en basque, ce qui implique l'existence préalable de ce lectorat monolingue. 23 Ce serait certainement une erreur de croire que la contradiction résulte d'une incohérence dans le propos, car on retrouve le même genre de considérations, superficiellement contradictoires, chez Axular, une vingtaine d'années plus tard. Ce dernier également déplorait le fait que la langue basque paraissait sommaire, pauvre et étriquée (labur, eskas eta hertsi), n'osant pas apparaître en société(ez [...] iend'artean ausart), au point que parmi les locuteurs du pays certains ignoraient comment le lire et l'écrire (bere herricoen artean ezpaitaquite batçuec, nola esquiriba eta ez nola iracur), autant d'indications paraissant pointer vers une absence de tradition et d'un public formé à la lecture en basque ; alors que par ailleurs c'est précisément à l'intention d'un tel lectorat, surtout pour ceux qui ne savaient que le basque (guztiz ere euscararic baicen etciaquitenentçat),qu'il entendait écrire son ouvrage. Signalons que dans l'esprit d'Axular, ce lectorat n'est pas constitué d'ignorants, mais de ce qu'on pourrait appeler de petits lettrés : Je ne fais pas ce livre pour les grands lettrés. Et non plus pour ceux qui ne savent rien (Eztut liburutto haur, letratu handientçat eguiten. Eta ez choil, deus eztaqui- tenentçat ere)15. 24 Qui étaient ces lecteurs minimalement alphabétisés pour la lecture mais fonctionnellement monolingues ? 25 Il ne pouvait guère s'agir que des gens appartenant aux couches populaires et intermédiaires, celles que Chartier (1987 : 88) définit comme n'appartenant à aucune

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des trois robes, à savoir, paysans, compagnons et maîtres des métiers, marchands et bourgeois retirés du commerce, qui avaient pu bénéficier de quelque instruction, sans doute dans le cadre de l'enseignement des paroisses ou des classes privées, seules formes d'instruction existant dans le Labourd de cette époque. Materre nous indique que son lectorat incluait les marins, puisqu'il entend leur montrer comment il leur faut prier durant leur séjour en mer : (5) Comme je sais qu'il y a beaucoup de gens qui en Pays Basque naviguent en mer, je dois leur montrer à eux également comment ils doivent adresser leurs prières et leurs oraisons à Dieu. (Materre, Dotrina christiana, 1623 : 325) 26 Ce propos est d'ailleurs accompagné d'indications d'ordre pratique qui montrent qu'il ne s'agit pas d'une figure de style. En effet, dans la partie de son ouvrage où sont indiquées les prières des marins, Materre, s'adressant directement à ses lecteurs, précise la manière dont il souhaite que son livre soit utilisé par les gens de mer : (6) Le matin, lorque le temps le permet, vous, marins qui navi guez en mer, rassemblez-vous, et mettez-vous à genoux (...). Et (...) que l'un d'entre vous dise d'une voix un peu haute et à maintes reprises la prière que je mets ici : Et pendant ce temps que les autres y concentrent leur esprit, qu'ils l'écoutent, ou bien que chacun la lise dans son livre en silence, car j'estime qu'il n 'y aura aucun marin sachant lire qui n'aura point ce livre. (Materre, Dotrina christiana, 1623 : 327-328) 27 Materre, comme on le voit, conçoit fort bien que parmi les marins embarqués sur les navires labourdins certains pourront lire, et il ne doute guère du succès de son ouvrage chez ces lecteurs16

28 Essayons de nous figurer comment ce lectorat avait pu se constituer. Il n'existe pas à cette époque de collège17 dans les provinces basques aquitaines, et le mouvement en faveur d'une généralisation des petites écoles sous l'impulsion à la fois du Roi et de l'Eglise ne sera lancé que plus tard dans le diocèse du Labourd18 C'est dans ces conditions que les fils19 de famille qui n'étaient pas en mesure de sortir du pays pour recevoir une formation plus solide pouvaient recevoir une instruction de base en matière de lecture, voire de compte et d'écriture, et en dehors très certainement de tout autre objectif lié aux belles lettres ou aux arts20 29 C'est à partir de ces éléments que l'on doit sans doute interpréter les propos de Materre : ceux ayant reçu une éducation élémentaire sur place avaient acquis, après une initiation première fondée sur le déchiffrement des prières latines qu'il fallait apprendre par cœur, une compétence minimale en matière de lecture, mais ils étaient généralement monolingues, et par conséquent il convenait pour ce public, certainement relativement important dans la zone luzienne, de mettre en place l'infrastructure linguistique utile au développement d'une bonne catéchèse21 Pour Materre, le basque a le statut d'un vulgaire roman, et les bascophones monolingues ont besoin d'une langue écrite permettant leur instruction religieuse, d'où la nécessité de créer un standard adéquat, comme cela avait été fait auparavant pour le français. 30 Il est important de noter ici que l'option en faveur de l'écrit basque n'est pas le résultat d'un choix symbolique à base glosso-identitaire (contrairement sans doute à ce qu'il adviendra bientôt avec Etcheberri, mais sans prolongement significatif). Il est plutôt le produit de circonstances déterminées par la situation de diglossie latin vs basque, caractérisant le domaine religieux à cette époque au nord de la Bidassoa. Au fur et à mesure que cette modalité diglossique vieillira laissant peu à peu la place à une diglossie basque vs français, la nature des écrits s'adaptera au lectorat concerné 22 : la diffusion du français se réalisant depuis le haut vers le bas de l'échelle sociale, plus sa

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connaissance se répandra, plus, corrélativement, l'écrit basque sera réservé à un public socialement défavorisé, avec toutes les caractéristiques de ce type de textualité.

3. Un conflit linguistique autour des textes Iabourdins (1627-1635).

31 Dans le panorama linguistique dont nous avons fait l'esquisse dans les lignes précédentes, et alors que les troubles entraînés par la Réforme n'étaient pas encore oubliés en ce début du 17ème siècle, une certaine divergence de vue pouvait régner quant à la politique linguistique que l'évêché devait encourager dans son action d'éducation.

32 D'aucuns pouvaient considérer que l'orientation générale définie lors du concile de Trente en faveur d'une instruction religieuse tenant compte de la réalité linguistique avait ses limites, et qu'elle devait s'entendre comme devant s'incarner à travers les langues ayant acquis un certain statut. N'était-il pas blasphématoire de transmettre la parole divine dans une langue dépourvue de règles23 et de structure, barbare et grossière 24, inusitée et impropre à être employée dans le domaine de la réflexion religieuse comme dans celui des arts et des lettres ? D'ailleurs, qui était en mesure de garantir qu'il existât dans ces langues des esprits en mesure d'apprécier valablement la correction non seulement linguistique mais aussi doctrinale des textes offerts aux populations ou des traductions effectuées ? On sait, par exemple, qu'au siècle précédent Montaigne avait manifesté sa gêne à savoir que le Nouveau-Testament était traduit en diverses langues, dont certaines lui paraissaient hors d'atteinte pour un contrôle satisfaisant : Je croi aussi que la liberté à chacun de dissiper une parole si religieuse et importante à tant de sortes d'idiomes a beaucoup plus de danger que d'utilité. (...) Sçavons nous bien qu'en Basque et en Bretaigne, il y ait des Juges assez pour establir cette traduction faicte en leur langue ? (Montaigne, Essais, 1er liv., 56ème ch.) 33 Il ne faut pas se méprendre. Montaigne, et sans doute les opposants à la pastorale écrite en basque du siècle suivant, ne sont pas hostiles à l'emploi des langues comme le basque ou le breton à l'oral. Leur défiance porte essentiellement sur l'écrit25 car en preschant et parlant, l'interprétation est vague, libre, muable, et d'une parcelle ; ainsi ce n 'est pas de mesme. (idem)

34 Entre 1690 et 1610 on assista à un renouvellement des cadres épisco-paux dans le Royaume de France : entre 1585 et 1607 le corps épiscopal français fut entièrement renouvelé (Suire 2000), et la Contre-Réforme s'accompagna d'un important mouvement de reprise en main, et d'un renforcement des structures d'encadrement, entrepris par le pouvoir royal en collaboration avec l'Eglise26 En Pays Basque, les nécessités de la Contre-Réforme plaidaient en faveur d'une mise en pratique effective de l'orientation tridentine, mais cette politique comportait deux objectifs qui pouvaient paraître contradictoires sur le plan linguistique : d'une part, la généralisation de l'éducation religieuse, et d'autre part l'assurance de la correction et de la conformité au dogme dans cet enseignement. Le premier objectif impliquait un large usage de la langue basque dans les zones bascophones des diocèses, notamment dans l'instruction, le second objectif, par contre, plaidait plutôt pour l'emploi d'une autre langue, susceptible de contrôle en dehors du clergé autochtone, et par conséquent non suspecte27, bref, en pratique, du français.

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35 Le premier ouvrage catholique post-tridentin fut donc à la fois un catéchisme et un livre de prières et destiné à une large diffusion. Son auteur, E. Materre, était un religieux franciscain ayant appris le basque tardivement, à l'âge adulte, après avoir déjà publié un ouvrage en français et être venu en Labourd, peut-être à la suite des désordres associés aux procès de sorcellerie, lors de la mise en place du couvent des Récollets à Saint-Jean-de-Luz. Cette circonstance mettait l'ouvrage à l'abri de la suspicion dont aurait pu être l'objet une production entièrement perçue comme inaccessible à un regard extérieur. 36 Certes, la défiance aurait alors pu venir du clergé basque pour des raisons linguistiques ; mais tel ne fut pas le cas. D'une part, lors de la première édition, en 1617, l'évêque était encore B. d'Etxauz, et ce dernier pouvait juger par lui-même de la qualité de la langue. D'autre part, il est probable que Materre, qui avait appris le basque à Sare, et qui avait donc très certainement bien connu Axular (par ailleurs approbateur de l'ouvrage), avait sollicité l'aide de locuteurs natifs, et s'était assuré auprès d'eux de sa langue : son texte est d'ailleurs d'excellente facture et adapté à son objet. Bref, avec Materre, prédicateur ayant fait ses preuves, était surmonté un obstacle que de Lancre avait cru devoir mettre en évidence une demi-douzaine d'années plus tôt : Cette forte petite contrée de Labourd, laquelle pour le défaut et difficulté de la langue ne peut être fournie de bon prédicateurs, comme tout le reste de la France. (de Lancre, 6-2, [1612] 1982 : 284) 37 Le succès de l'entreprise de Materre fut confirmé lorsqu'en 1623 une seconde édition, augmentée, fut publiée avec le soutien du nouvel évêque, Claudius de Rueil, lequel ignorait le basque, mais soutint néanmoins le projet, sans aucune opposition, semble-t- il.

38 Pourtant, malgré ces débuts apparemment dépourvus de difficultés pour les textes d'instruction religieuse catholique, très vite, dès la parution du second ouvrage de doctrine catholique en basque, le Manuel de dévotion de J. Etcheberri (1627), on relève les signes d'une crise centrée sur la question linguistique. 39 Etcheberri, docteur en théologie, est l'auteur de trois ouvrages en basque à caractère religieux, tous trois en vers, qu'il publia en 1627, 1630 et 1636, dates des premières éditions (celle du second ouvrage, toutefois, n'ayant pu être absolument confirmée à ce jour). On sait par Oihenart qu'il était également l'auteur d'un dictionnaire et de conjugaisons (peut-être un embryon de grammaire), mais ces derniers ont été perdus. A n'en pas douter, il s'agit d'un auteur doté d'une solide formation intellectuelle. 40 Dans sa dédicace à l'évêque C. de Rueil du 1er livre de son Manuel de dévotion, il est fait référence, pour la première fois, à un climat conflictuel surgi, selon toute vraisemblance, à propos du statut de la langue basque (Oyharçabal, 2001). Chose surprenante peut-être aux yeux de beaucoup aujourd'hui, Etcheberri invoque, devant l'autorité religieuse à laquelle il s'adresse, le positionnement exemplaire de l'état en la personne du Roi, lequel est présenté comme favorable à la diversité et à l'égalité linguistique dans le Royaume. Cette revendication prend même un caractère en quelque sorte per-formatif très remarquable, car Etcheberri, qui écrit sa dédicace en basque, ne la traduit pas, et justifie cette abstention que d'aucuns pouvaient probablement juger irrespectueuse28 : (7) Vous n'aurez que de l'honneur, Monseigneur, A écouter celui qui craintivement vous parle dans une langue étrangère, Car, selon le dicton, l'honneur des rois

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Est d'avoir des sujets parlant beaucoup de langues. Je vous tiens, quant à moi, pour plus important que le Roi, Et vous avez sur moi plus une plus grande autorité. Aussi, appréciez, vous aussi, l'honneur D'un sujet vous parlant dans une langue étrangère. (Etcheberri, Manual devotionezcoa, [1627] 1669 : 6-7) 41 Après cet hommage en forme de plaidoyer, Etcheberri fait une allusion directe à une opposition de laquelle l'évêque l'a protégé, ce qui donne à penser, dans le contexte des vers précédents, que cette opposition avait des motifs linguistiques. Au demeurant, c'est par une véritable profession de foi en faveur du respect du plurilinguisme qu'il conclut sa dédicace, en invoquant une nouvelle fois l'exemple du roi, lequel se doit de respecter la diversité linguistique dans son royaume : (8) Pour cela, je vous ai choisi comme patron de cet ouvrage, Car vous avez condamné les médisants. C'est à vous que je l'offre, de grâce, préservez-le, Afin que la voix des envieux ne vous le souille point. Le Roi doit défendre les gens, Aussi bien ceux d'une langue, que les autres. (Etcheberri, Manual devotionezcoa, [1627] 1669 : 6-7) 42 Qui étaient ces médisants et envieux qui, selon Etcheberri, avaient voulu souiller son ouvrage et que l'évêque avait dû condamner ? Cette question a été discutée par P. Altuna, éditeur contemporain du premier livre de l'ouvrage d'Etcheberri. Selon cet auteur, ces propos font allusion à une querelle littéraire opposant Etcheberri à Oihenart. Je doute que cette interprétation, développée également dans un article plus récent (Altuna 1994), puisse être réellement soutenue (cf. Oyharçabal, 2001).

43 Certes, l'auteur souletin avait émis dans Art poétique basque de 1665 des critiques relatives au mode de versification, et même à la langue, employés par Etcheberri, qu'il estimait défaillants et trop enclins à des licences exorbitantes. Mais ceci n'explique pas les propos que près de quarante ans plus tôt Etcheberri tenait dans la dédicace du premier ouvrage qu'il publiait. Un examen attentif du texte de la dédicace montre sans équivoque que la nature du conflit n'était pas littéraire, mais linguistique. Ce ne sont pas les rimes d'Etcheberri, jugées fautives par Oihenart, ni les vices de ses vers en matière de quantité syllabique, qui sont l'objet des critiques que l'évêque a dû faire taire, mais, comme le montre clairement l'environnement textuel de la dédicace, la réalisation même de ce type d'ouvrage en basque. 44 D'ailleurs, lorsque trois ans plus tard Etcheberri publiera ses Noëls, S. Hirigoiti dans un compliment placé en tête de l'ouvrage, rendra hommage à l'action de l'auteur en faveur de la promotion du basque. Par-delà les propos habituels attenant aux figures rhétoriques des paratextes (Orpustan 1999, Oyharçabal 1999), nul doute que Hirigoiti fait dans ces vers une allusion directe au conflit linguistique qui opposa Etcheberri à un groupe hostile à la langue basque29 : (9) Moi, en tout cas, je reconnais que nous sommes votre débiteur, Que vous êtes la torche propre à nous sortir des ténèbres. Ceux qui ignorent le basque peuvent s'en aller chacun dans son pays, Résignés à ce qu'ils ne conduiront pas la langue basque à sa perte. La langue basque qui, vieillie, allait tomber, Entrée dans la maison Etcheberri, va renaître. Celle qui, depuis longtemps, pour tous, était dépréciée, Etcheberri l'ayant relevée, se situera au plus haut.

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Que les Basques viennent à moi pour l'honorer, Car il a mis la langue basque au-dessus du français (Etcheberri, Noelac [1630] 1645, édition d'Akesolo : 22) 45 Hirigoiti fait apparaître les opposants d'Etcheberri comme des erdaldun, autrement dit des personnes ignorant le basque. Il les présente également comme étrangers au pays, puisqu'il souhaite leur départ vers leur pays d'origine, ce qui pointerait vers un entourage épiscopal ayant accompagné le prélat lors de sa venue à Bayonne, à moins qu'il ne faille voir là un bannissement symbolique de Basques ayant adopté une attitude hostile au basque dans cette circonstance30 Quoi qu'il en soit, il est probable que ce groupe préférait qu'on utilisât des livres d'instruction religieuse rédigés en français, puisque Hirigoiti félicite Etcheberri d'avoir fait triompher le basque sur l'erdara, terme qui dans ce contexte désigne le français, comme on l'a indiqué dans la traduction31.

46 Il n'est pas impossible que cette hostilité, dont rien ne montre, rappelons-le, qu'elle se soit manifestée à la suite de la publication de l'ouvrage de Materre, ni de sa réédition, quelques années plus tôt, ait été accentuée par la relative originalité de l'ouvrage, qui pouvait passer pour excessivement audacieuse en ce temps de remise en ordre religieuse32. 47 L'originalité du texte d'Etcheberri, qui se présentait comme un ouvrage d'instruction religieuse, se manifestait non seulement par ses choix linguistiques (emploi du basque) et stylistiques (recours à la versification), mais encore par le développement de thèmes et l'emploi de représentations métaphoriques particulières, adaptés au lectorat du Labourd côtier, et en particulier à celui des gens de mer. 48 Oihenart (1665) avait souligné les préoccupations pastorales d'Etcheberri, et il trouvait dans celles-ci un motif d'indulgence à l'égard de ce qu'il considérait comme des faiblesses littéraires : le lui ay ouy dire au temps qu'il composoit ses Vers qu'il trauaillait principalement pour les mariniers Lesquels les chantoint sur la mer ; Ce qui faict luger qu'il Escriuoit plus tost par Un motif de Charitté que par aucune ambition, ou Vainegloire, Et quil auoit le zèle de profiter à son prochain que doit avoir Un Veritable Ecclesiastique. (Oihenart 1665, L'Art poétique basque) 49 Ces propos d'Oihenart confirment ceux d'Etcheberri lui-même, lequel indique avoir écrit son manuel en vers afin de faciliter l'apprentissage des prières : (12) Chrétien, j'ai mis en vers basques Le manuel catholique durant mes temps de loisir. Voyant, étant basque de naissance, Que notre nation aime le chant, Pour cette raison, volontairement, je l'ai disposé en vers Afin qu'il soit plus vite appris et plus fréquemment dit. (Etcheberri, Manual devotionezcoa, Avertissement au lecteur dévot, [1627] 1669 : 4) 50 Selon Mitxelena (1981), cette indication montre qu'Etcheberri écrivait à l'intention d'un public analphabète ayant à apprendre les prières par cœur et qui trouvait sa tâche facilitée par l'emploi de la versification. Cette pratique est d'ailleurs attestée au 17ème siècle en dehors du Pays Basque, comme le montre, par exemple, la publication en 1641 de La douctrino Crestiano meso en rimos, per poude èstre cantado sur dibérses ayres, è per atal ajuda la memorio del popple de Toulouso, par Pierre Dupont (cf. Eygun 1992), ou la traduction en vers du catéchisme de Ripalda par Juan de Almarza en Espagne vers 1650 (cf. Resines 1997 : 330)33.

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51 Pour autant, je ne suis pas sûr qu'en ce qui concerne Etcheberri il faille s'en tenir à cette interprétation. Je crois même que d'une certaine façon elle masque les enjeux réels qui étaient en cause dans le conflit dont Etcheberri et Hirigoiti portent témoignage. En réalité, si Etcheberri se revendique d'un effort d'adaptation linguistique motivé par le fait que son lectorat est bascophone, et qu'il est notamment constitué de gens de mer, son écriture montre également qu'il aspire à plus. S'il entend faciliter aux Basques l'expression de leur foi dans leur langue, il veut également montrer que celle-ci est à même d'exprimer, avec la force et la tenue requises, les sentiments attachés à cette foi. La langue d'Etcheberri révèle cette ambition, donnant à son entreprise une dimension littéraire. En effet, la syntaxe qu'il emploie n'est pas celle que l'on rencontre dans la tradition populaire, car elle est souvent fortement marquée par des positionnements d'origine savante, directement inspirés du latin. Ce sont les licences exorbitantes dénoncées par Oihenart. Comme on le sait, le latin permet de dissocier librement les composants des syntagmes nominaux grâce à la concordance flexionnelle. Ce recours est en principe exclu en basque où, contrairement au latin, les composants périphériques des syntagmes nominaux ne sont pas porteurs des désinences de flexion de la tête nominale, et où, par conséquent, les contraintes de localité sont fortes à l'intérieur du syntagme nominal. Pourtant Etcheberri n'hésite pas à violer ces contraintes et à recourir à ce procédé en tant que licence poétique à de très nombreuses reprises, ce qui rend son texte, sinon difficile à la compréhension immédiate, du moins passablement artificiel, effet que d'aucuns, tel Oihenart, pouvaient juger malvenu, mais dont tout porte à croire qu'il était apprécié par d'autres lettrés labourdins du temps comme Hirigoity, et en tout état de cause recherché. 52 Cette liberté d'Etcheberri à l'égard de certaines contraintes syntaxiques peut difficilement être attribuée à son souci de s'adapter à un public analphabète et donc peu au fait des usages de la versification latine. Elle est plutôt le signe d'un effort de construction stylistique et d'une audace assumée en cette matière. On retrouve cette liberté et cette audace dans la façon d'aborder les thèmes de son ouvrage. Citons un exemple : dans la première partie de son Manuel de dévotion consacrée aux éléments de base de la doctrine, la première personne peut référer au Christ, et la seconde personne au lecteur. Etcheberri détourne ainsi le discours direct familier34 de sorte que c'est le Christ qui formule dans le registre lié à l'intimité la métaphore expliquant au lecteur ce qu'est l'Eglise : (13) Ecoute, encore ma parole Pour savoir ce qu'est l'Eglise. L'église est un arbre qui monte jusqu'aux étoiles Son ombre abrite toute l'étendue du monde. Le fruit en est la religion, mise en place par moi-même, La chair les bonnes œuvres, la peau le rite. Ne méprise en rien la peau Car elle est la protectrice loyale du fruit (Manual devotionezcoa, [1627] 1669, lre partie, vers 679-686 de l'édition d'Altuna) 53 Toute la doctrine est ainsi revue et exprimée à travers un très remarquable effort d'adaptation culturelle, dont on peut penser qu'elle pouvait choquer certains esprits orthodoxes, (voir un autre exemple de métaphore où la Trinité est comparée et expliquée en suivant la distribution des rôles dans les navires, in Oyharçabal à par.).

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4. La progression du français comme langue de l'écrit au 17ème et 18ème siècles.

54 Déjà au 16ème siècle, Scaliger avait noté que les Basques devaient parler quatre langues35, en soulignant que c'était en particulier pour les besoins de la vie judiciaire qu'il leur fallait savoir le français ; cf. Urkizu 1986. Au début du siècle suivant, le français est avant tout la langue du pouvoir et de la loi dans ces provinces. Autour du tribunal du bailliage de Labourd à Ustaritz, les gens de robe avaient constitué un groupe influent qui n'hésitait pas, sem-ble-t-il, à abuser de la situation de diglossie, puisqu'à la fin du siècle les procédures pénales pouvaient être conduites sans qu'aucun interprète soit mis à la disposition des justiciables ignorant le français. Le témoignage de cet abus nous est rapporté dans un arrêt de 1695 du Parlement de Bordeaux dans lequel la Cour a enjoint audit Baillif de Labourd de se servir d'interprète dans les procédures criminelles qu'il fera faire à l'avenir lorsque les accusés n'entendront pas la langue françoise ; cf. Duvigneau-Légasse (1993 : 1, 91).

55 Il est difficile d'estimer la place qu'avait le français en Labourd, Basse-Navarre et Soûle dans la première partie du siècle, en dehors de la sphère juridico-administrative. Le latin était sans doute la langue de prestige et de référence principale en matière culturelle. C'est par exemple en latin qu'Oihenart publie son importante étude historique sur les pays basques en 1638, et qu'il édite la seconde édition en 1656. Bien que ce soit le français qu'en dehors de son ouvrage historique il utilise comme métalangue dans ses écrits théoriques relatifs au basque (orthographe, versification, explicitation des proverbes et dictons), les références littéraires mentionnées par Oihenart dans ses écrits littéraires ne montrent aucune inclinaison privilégiée envers les auteurs français, qui sont cités en même temps que des auteurs gascons, italiens ou espagnols, et bien sûr latins. Ceci vaut également pour Etcheberri de Ciboure36. Le prestige du latin dans l'éducation locale se prolongera encore jusqu'au début du siècle suivant, puisque la première grammaire écrite en basque est une grammaire destinée à apprendre le latin aux jeunes37. 56 Pourtant, dans la seconde moitié du 17ème siècle, la présence du français se fait de plus en plus forte. Lorsque dans les années 1675, Bidegarai demande une subvention au Parlement de Navarre pour publier un dictionnaire trilingue basque son argumentation porte sur l'utilité de ces ouvrages pour apprendre le latin et le français, jugés tous deux nécessaires : Ce livre sera d'une grande utilité pour apprendre le latin et le fran-çois, deux langues qui nous sont nécessaires, et les enfants par son moyen du dictionnaire réussiront et en un et en l'autre, sans sortir du pays, et sans s'exposer aux despenses qu'on essuye d'ordinaire, en les faisant étudier dans les autres provinces (Actes du 14/07/1676 du Parlement de Navarre ; cf. Dubarat 1914). 57 Jusqu'à la mise en place du séminaire de Larressore dans les années 1735, il n'y a aucun collège dans la province de Labourd elle-même et, ainsi que l'avait indiqué de Lancre au début du siècle précédent, les jeunes doivent quitter la province pour bénéficier d'études sérieuses, ce qui apparemment était assez fréquent, du moins dans les classes aisées (Duvoisin 1861 : 35).

58 Au demeurant c'est en usant de l'argument linguistique, associé à sa dimension sociale, que Daguerre, le fondateur du séminaire de Larressore, obtint du Duc d'Orléans en 1733 l'autorisation pour l'ouverture de l'établissement, eu égard à :

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l'utilité singulière qu'il y a d'y former pour l'état ecclésiastique de pauvres écoliers basques, qui de là sont distribués dans les pays basques de ce diocèse et y enseignent les vérités et les maximes de notre sainte religion pour la facilité qu'ils ont d'entendre et parler le langage ; cf. Dubarat 1901 : CCCXLLVI. 59 Si la pénétration du français dans les milieux populaires dans le premier tiers du 18ème siècle reste assez limitée, en particulier dans les campagnes, comme l'indique la citation ci-dessus, le français est devenu sans aucun doute le vulgaire de référence principal dans le domaine culturel38, notamment dans les couches les plus aisées des villes. On peut citer deux faits illustrant cette évolution : la mission du père Clément Duhalde en 1734 à Saint-Jean-de-Luz, les propos de M. Harriet dans l'introduction à sa grammaire de 1741.

60 L'anecdote de la mission de Duhalde est illustrative des changements intervenus depuis le siècle précédent dans la distribution sociale de la partition diglossique français- basque, dans les villes basques, dans le cas présent de Saint-Jean-de-Luz. De quoi s'agit- il ? Dans les années 1734-1735, les édiles luziens et en particulier le maire Leremboure souhaitèrent faire venir dans leur ville une mission, dirigée par Duhalde, un capucin natif du village voisin d'Ascain, devenu un prédicateur prestigieux, et appelé père Clément. L'organisation de cette mission se heurta à un certain nombre de difficultés matérielles de telle sorte que divers documents écrits ont été conservés concernant cet épisode, et en particulier le programme des journées de cette mission qui dura près d'un mois (Duvoisin 1861 : 92-95 ; Nogaret 1925 : 79 ; et surtout Darrobers 1994 : 123-135). En effet, l'un des éléments intéressants de cette mission est qu'elle matérialise dans son programme quotidien la partition diglossique qui s'impose dans le premier tiers du 18ème siècle à Saint-Jean-de-Luz lors des solennités religieuses importantes, avec un emploi du basque réservé aux actes destinés aux classes modestes : Le plan que nous suivons... étoit de donner un sermon en basque à six heures du matin en faveur des artisans et des domestiques, une méditation en basque à huit heures pour préparer à la confession successivement les filles, les femmes, les garçons et les hommes, un s (econd) sermon en françois à dix heures, une conférence alternativement en basque et en françois à deux heures de relevée, et un troisième sermon en françois vers les trois heures et demi. (Lettre du père C. Duhalde du 31/07/1734 ; cf. Darrobers 1994 : 125) 61 Ainsi qu'on le constate, sont prévus en basque, les sermons de l'office de six heures destiné aux artisans et aux domestiques, ainsi que la méditation de huit heures avant la confession, acte de nature individuelle et intime, tandis qu'à dix heures, à une heure convenant mieux à un public plus bourgeois, est programmé le prêche en français. Illustration expressive de la distribution sociale liée à la diglossie à l'occasion d'actes religieux solennels, qui montre la place acquise par le français comme langue de référence culturelle des classes privilégiées à Saint-Jean-de-Luz au début du second tiers du 18ème siècle.

62 La situation de la production des textes basques est alors assez proche de celle que dénonçait Larramendi au-delà de la frontière, où la langue basque est celle qui est réservée aux gens du commun39 : (15) Et l'infamie est désormais arrivée au point d'utiliser ces prédicateurs [ne pouvant prêcher en basque] pour que dans beaucoup de villages, de communautés moniales et de confréries on tienne pour chose de moindre valeur ce qui se prêche en basque. Au prétexte que le basque est seulement une langue pour les ruraux, paysans et gens pauvres. (Larramendi, Corografía de Guipúzcoa : 305)

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63 Un autre témoignage de l'évolution des rapports polyglossiques et de la progression du français tant à l'égard du latin que du basque en Labourd nous est offert par M. Harriet quelques années plus tard. Ce dernier était notaire à Larressore, et nous est connu comme l'auteur d'une grammaire (1741) rédigée en basque mais destinée à faciliter l'apprentissage du français. C'est en quelque sorte l'équivalent du travail réalisé par Etcheberri de Sare un quart de siècle plus tôt avec sa grammaire latine, bien que ni par leur ambition, ni par leur contenu, les deux ouvrages ne puissent être comparés. Alors qu'Etcheberri situe son ouvrage en faveur de l'éducation de la jeunesse basque dans le cadre de la vieille diglossie, avec en perspective une promotion du basque comme langue du savoir et de la culture, Harriet se place clairement dans une perspective différente : il veut simplement faciliter l'aide à la lecture des livres écrits en français, et insiste sur l'absence d'ambition de son travail qu'il associe à la modestie du public auquel il s'adresse : (16) La raison qui m'a amené à publier cet humble travail n'est rien d'autre que celle de porter un peu d'aide aux Basques qui essaient d'apprendre le français. Ainsi, je ne fais point ce modeste livre pour qu'il soit examiné en lui-même, mais pour que par son intermédiaire les Basques qui ont le désir d'apprendre la langue française trouvent quelque aide et facilité, afin de comprendre quelque chose des livres écrits par les personnes savantes et d'en tirer quelque profit. (Harriet, Gramatica escuaraz eta francesez, 1741, Au lecteur) 64 Harriet s'adresse à un public alphabétisé, mais ne pouvant entendre que le basque, de sorte qu'il offre les rudiments de grammaire française en usant du basque comme métalangue. Ses propos montrent que pour le public plutôt modeste auquel il s'adresse l'acquisition des savoirs avancés passe par la lecture en français qu'il faut donc apprendre. La question de l'expression de ces savoirs en basque, qu'Etcheberri de Sare avait posée un quart de siècle plus tôt, n'est pas évoquée.

65 L'extension de cette alphabétisation, dans les campagnes notamment, au cours de la première moitié du 18ème siècle est encouragée par les autorités religieuses. Dans sa préface à l'ouvrage rassemblant les lettres de la fondatrice de la maison de Hasparren (1751), l'évêque de Bellefonds présentait ainsi la situation du Pays Basque dans la première partie du siècle : Le Pays Basque est situé sur les frontières de la France et de l'Espagne, dans les diocèses de Bayonne, de Dax, d'Oloron et de Pampelune. Malgré le commerce avec ces deux royaumes, et le passage continuel de toute sorte de personnes, on peut dire que la langue le rend presque inaccessible aux étrangers ; il leur est presque impossible de l'apprendre ; elle n'a aucun rapport avec une langue connue. Ce pays ne peut donc trouver de ressources que dans lui- même pour l'instruction des peuples et l'éducation de la jeunesse. Peu de familles sont en état d'envoyer leurs enfants ailleurs ; les personnes du sexe et les gens de la campagne y seraient absolument sans secours, si des prédicateurs, des maîtres et des maîtresses du pays, ne se chargeaient pas de les instruire dans leur langue. (Vie et lettres de Mme d'Etcheverry, 1751, Préface de l'évêque de Bellefonds) 66 Ce texte est intéressant en ce qu'il montre la part prise par l'église dans l'organisation de l'alphabétisation (prédicateurs, maîtres et maîtresses sont assimilés en tant qu'instructeurs). Cette instruction modeste est conçue comme s'adressant aux populations les moins favorisées (femmes et gens de la campagne) qui n'ont pas les moyens de faire former leurs enfants en dehors du pays, où ils pourraient apprendre le français.

67 Dans la seconde partie du 18ème siècle, nous trouvons le témoignage indirect des effets entraînés par la progression des langues de culture dans les populations intermédiaires bénéficiant d'une scolarité plus avancée. Ces dernières sont perçues comme n'étant

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plus en mesure de lire des textes basques d'une certaine tenue, tels que, par exemple, pour les Souletins, la traduction de l'Imitation de Jésus Christ, publiée dans ce dialecte en 1757. Dans sa dédicace à l'évêque d'Oloron, l'auteur indique d'une part, avoir réalisé sa traduction pour faire connaître ce texte à ceux qui ne savaient que leur langue de naissance (reprise de la conception traditionnelle du lectorat des textes basques), mais, d'autre part, son espoir de voir son ouvrage utilisé à l'école pour que les enfants basques apprennent à lire aussi bien qu'en latin et français40. Maister est à ma connaissance le seul auteur du 18ème siècle dans la sphère des dialectes orientaux à poser, au moins implicitement, le problème de la lecture en basque pour un lectorat bascophone mieux formé à la lecture en français, voire en latin. Il n'hésite pas, d'ailleurs, à proposer que l'on use de sa traduction pour apprendre à ces enfants à lire dans leur langue, de même qu'ils apprennent à lire en français et latin : (17b) il semble que les enfants fréquentant l'école obtiendront ce bénéfice [tiré de la lecture de l'Imitation], en apprenant à lire le basque, de même qu'ils apprennent le latin et le français, et en conservant beaucoup plus facilement à l'esprit les saintes vérités qu'on leur enseigne au catéchisme. (Maister, Jesus-Christen Imitationia, décicace à l'évêque d'Oloron) 68 Il est possible que l'œuvre basque restée en son temps inédite de J. Eguiateguy, lui- même étant enseignant en Soule, soit également à situer dans le contexte d'une prise de conscience des problèmes de diglossie littéraire chez une certaine élite locale (en l'occurrence peut-être spécifiquement sou-letine). Le titre de l'un de ses ouvrages (Le philosophe basque, écrit dont la copie du manuscrit porte la date de 1785) et ses choix linguistiques, largement marqués par l'influence de Larramendi, vont en ce sens, même si cet essai, il est vrai mal engagé, demeura sans suite.

5. Dévalorisation de l'écrit basque au 18ème siècle.

69 Jusqu'au milieu du 17ème siècle, la présence sociale du basque en Labourd est suffisamment forte pour que, lors de leur venue dans le diocèse de Labourd, des membres du clergé non-natifs mais ouverts à l'altérité linguistique, apprennent en un temps relativement court la langue et, avant de s'éloigner du Pays Basque pour poursuivre leur carrière, deviennent des promoteurs efficaces du labourdin classique. Ce fut, nous l'avons vu, le cas de Materre, initiateur de la tradition écrite labourdine ; ce fut également celui d'un autre prêtre, S. Pouvreau, qui traduisit divers ouvrages en basque, et qui est également l'auteur du premier dictionnaire à entrées basques connu41.

70 Il est peu probable que ce fut là le seul fait du hasard, et il est significatif que cette circonstance ne se renouvellera plus dans les lettres basques42. Certes, à partir de la fin du 18ème siècle, et tout au long des 19 ème et 20 ème siècles, nombreux seront les scientifiques non basques qui s'intéresseront à la langue, mais aucun d'entre eux ne devint un auteur basque comme purent l'être Materre ou Pouvreau. Plus jamais jusqu'à une date toute récente la langue basque ne rencontrera un environnement social en mesure de susciter des vocations ou des initiatives individuelles de cette nature. 71 Au cours du 18ème siècle, les conséquences attachées à la perte de prestige de la langue basque se firent plus manifestes. La tentative quelque peu pathétique d'Etcheberri de Sare, appelant la jeunesse du Labourd à s'engager dans la guerre du savoir et à cultiver la langue basque ne rencontra guère d'échos. L'Assemblée du Labourd refusa de lui

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attribuer la subvention qu'il avait sollicitée pour publier sa grammaire latine écrite en basque (1718). Etcheberri, qui était médecin, avait d'ailleurs quitté le Labourd pour le Guipuzcoa, où ses travaux, en particulier un dictionnaire (perdu), eurent un certain écho grâce à Larramendi qui en eut connaissance. 72 Durant la même période, et notamment au cours de la première moitié du 18ème siècle, l'alphabétisation de premier niveau s'étendit au sein de la population. Cette alphabétisation eut pour effet d'accroître le lectorat basque potentiel car elle s'effectuait au bénéfice des populations modestes. Toutefois, dans le même temps, la diffusion du français progressa dans les couches intermédiaires, grâce en particulier à l'amélioration de son enseignement dans les écoles. Ce double mouvement eut pour conséquence de conduire à une dévalorisation de l'écrit basque. En effet, l'attitude et les comportements antérieurs, déterminés par l'asymétrie propre aux rapports diglossiques, et selon laquelle l'écrit basque s'adressait à ceux ne sachant que le basque, n'avait pas disparu. On n'incluait pas dans la représentation sociale du lectorat potentiel des textes basques, les lecteurs bascophones en mesure de lire le français. De ce point de vue, l'attitude de Maister en Soule, souhaitant attirer un lectorat familiarisé avec la lecture de textes français ou latins, était réellement atypique, ainsi que nous l'avons indiqué dans le paragraphe précédent. 73 On a un exemple particulièrement net des conséquences de cette attitude avec l'ouvrage publié par Lopez en 1782. Il s'agit d'une adaptation d'un ouvrage de A. Rodriguez intitulé dans l'original castillan Práctica de la perfection Cristiana (1609). Le titre de l'ouvrage basque, très certainement adapté d'une traduction française, comme le donne à penser Lopez dans son avertissement43, indique qu'il s'adresse à ceux qui ne savent que le basque (heuzkara bezik eztakitenen dako). Certes, Materre avait dit de même, tout comme Axular, mais un siècle et demi plus tard la signification sociale de cette restriction est toute autre, en raison des progrès du français parmi les couches intermédiaires comme langue de l'écrit. Désormais ce genre de texte s'adresse aux gens des campagnes de peu de moyens, et il convient de leur fournir des textes ni trop longs44 ni trop onéreux. L'approbation de Philippes d'Abense, curé de Juxue, en tête de l'ouvrage de Lopez le précise : (19) il [le livre de Lopez] présente deux avantages, d'abord, il offre dans un livre qui n'est point trop grand ce qui se trouve de plus profitable pour le peuple des villages dans un des meilleurs des ouvrages de dévotion que nous ayons, et qui est quatre fois plus long, ensuite, par sa briéveté il se trouve à portée d'achat des familles les plus pauvres. (Lopez, Alphonsa Rodriguez (...) Aitaren Guiristhinho Perfeccioniaren praticaren pparte bat Heuzcarala itçulia, 1782, Approbation de P. D'Abense). 74 L'auteur également insiste dans son avertissement sur le type de public qu'il vise en réalisant cette adaptation basque : (20) Concernant la longueur de l'ouvrage, (...) il était préférable de ne traduire en basque qu'une partie de ce long livre, la meilleure pour les gens du commun, en délaissant les autres ; car ainsi le livre sera plus court et moins cher, et par conséquent les gens pauvres l'achèteront plus facilement, et ceux qui en tireront profit seront plus nombreux. (Lopez, Alphonsa Rodriguez (...) Aitaren Guiristhinho Perfeccioniaren praticaren pparte bat Heuzcarala itçulia, 1782, Avertissement) 75 Les conséquences de cette évolution sur la nature et la qualité littéraire des textes basques sont également apparentes. Les textes correspondant à des créations diminuent sensiblement comme on l'a dit plus haut, et les premières traditions écrites renvoyant à des productions populaires apparaissent avec le développement d'un

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théâtre dramatique populaire en Soule au 18ème siècle. Bien que reposant sur l'écrit, toujours manuscrit dans la tradition, ce théâtre possède les caractéristiques de la littérature orale traditionnelle (absence d'autorité, fixation instable des textes laissant libre cours aux remaniements, appropriation collective au travers de modes narratifs et représen-tationnels ritualisés, etc.), et une indifférence assumée à l'égard des critères habituels de l'esthétique littéraire de l'écrit. Les pastorales tragiques souleti-nes de cette époque représentent ainsi une expression directe de l'évolution des rapports diglossiques dans le domaine des lettres45 : la langue basque, langue de première alphabétisation des populations46, peut être employée pour faire vivre dans de petites bourgades et villages, en dehors de toute structure spécialisée et en marge des circuits de diffusion classiques correspondant à l'imprimé47, un théâtre populaire dont le répertoire était principalement fondé sur la thématique religieuse hagiographique ou légendaire de la littérature populaire publiée en français.

76 Il n'est pas non plus exclu que les évolutions dialectales amorcées dans la seconde partie du 17ème siècle, mais qui se marquent plus nettement dans les textes du 18 ème siècle, traduisent également les modifications évoquées ci-dessus dans le paysage géographique et social associé à l'euskara. En l'absence de forte tradition littéraire, il est inévitable que la perception des différences dialectales à l'écrit soient ressenties de manière aiguë, car la transcription les met en évidence. Aux difficultés de maîtrise du code scriptural s'ajoutent celles qui peuvent correspondre à des différences linguistiques proprement dites. De façon générale, malgré la forte empreinte du modèle labourdin, vaillamment défendu par Etcheberri de Sare, ce standard fut bientôt accompagné de variantes orientales, dans lesquelles progressivement l'empreinte bas- navarraise se fit mieux sentir (Pikabea 1993). Je serais assez tenté d'associer cette évolution à la perte de prestige et à une certaine ruralisation des textes labourdins et de l'écrit basque en général (processus qui s'achèvera à la fin du 19ème siècle avec l'abandon du labourdin classique). 77 L'exemple de la mission du père Duhalde à Saint-Jean-de-Luz à la fin 1734, et que nous avons évoqué plus haut, est de ce point de vue assez illus-tratif. Lorsque Duhalde annonça son programme en indiquant que la mission compterait une douzaine de personnes, et durerait un mois, il précisa qu'il n'y aurait que deux prédicateurs du Labourd, dont lui-même (il ajoutait qu'ayant beaucoup oublié le basque, il ne serait pas en mesure de prêcher dans cette langue), et que la plupart des missionnaires seraient originaires de Soule ou de Basse-Navarre. Les conditions de réalisation de la mission inquiétèrent les responsables luziens, qui devaient prendre en charge les frais de séjour des missionnaires et ceux attenant aux coûts annexes. Ils suggérèrent donc au capucin de réduire la durée de la mission, ainsi que le nombre de missionnaires. Pour justifier ce second aspect de leur demande, ils arguèrent de la difficulté pour les Luziens à comprendre des prédicateurs bas-navarrais en raison de l'écart dialectal, et proposèrent de fournir eux-mêmes ces prédicateurs locaux : Nous vous prions... de faire attention au langage des Prédicateurs Basques. L'idiome de Basse-Navarre est Grec pour nous, nous ne l'entendons absolument pas et à supposer que vous seriés en peine d'en trouver de ceux qui parlent à notre façon. Nous avons icy deux ou trois dignes éclésiastiques qui rempliront ce devoir avec honneur et à la satisfaction de notre peuple. (Lettre du maire Leremboure du 04/08/1734, Darrobers 1994 : 128) 78 La réponse du responsable de la mission fut sèche : il objectait que cette question dialectale avait fait l'objet d'une discussion préalable, au cours de laquelle les Luziens avaient indiqué que la différence d'idiome ne leur paraissait pas un obstacle à la

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compréhension. Il semble bien que la question de la distance dialectale ait été en l'occurrence utilisée avec une certaine mauvaise foi pour appuyer une requête dont les motifs étaient avant tout financiers48.

79 Cette instrumentalisation est toutefois significative d'une situation sociolinguistique où ces arguments peuvent être avancés49.

6. La difficulté à naître des lettres basques dans les provinces ibériques.

80 Dans la comptabilité des ouvrages basques rapportés par Sarasola50 (1976 : 179), la très faible production d'ouvrages basques outre-Bidassoa, à plus forte raison d'ouvrages monolingues originaux, est frappante. La question se pose donc d'expliquer cette carence, qui contraste avec le relatif dynamisme que l'on observe en Labourd. Comment peut-on rendre compte de cette donnée ?

81 Il faut en premier lieu écarter toute explication qui se fonderait sur un manque de moyens matériels ou humains, conséquence d'un quelconque retard socioculturel. A vrai dire, ce serait plutôt le phénomène inverse. Les conditions objectives nécessaires au développement d'une tradition écrite en langue vulgaire existaient bien dès le 16ème siècle dans les provinces basques ibériques, mais cette tradition se déploya principalement, sinon exclusivement, au bénéfice du castillan, qui était devenu depuis longtemps au sein de Royaume du Castille, y compris dans les provinces basques en dépendant51, la principale langue de pouvoir, et même dans une certaine mesure de diffusion du savoir52. Cette tradition s'était également imposée en Navarre, habituée dès le 13ème siècle à recourir au roman dans la documentation juridique puisque le Fuero general (dont la rédaction définitive date de 1266) est rédigé en navarro-aragonais 53 (Goyenetche 1998 : 418). 82 Pour ne prendre que l'exemple des imprimeries, on observe que c'est dans les provinces ibériques que furent créés les premiers établissements en Pays Basque ou à sa frontière. Bien avant que la première imprimerie fût créée à Bayonne, il y en eut à Pampelune, Estella, Tudela, Bilbao, Saint-Sébastien54, mais en dehors des textes latins ce fut essentiellement au profit du castillan55. 83 Plus significatif de ce phénomène est ce que l'on observe dans le secteur de l'éducation. Nous avons vu que pour les Basques de France, il était nécessaire jusqu'au milieu du 18 ème siècle de quitter le pays pour recevoir une éducation quelque peu avancée et apprendre le français. Comparons cette situation avec celle que l'on rencontrait dans le diocèse de Navarre, dans lequel il y avait également une proportion importante que de bascophones, puisque, s'il contenait une partie de l'Aragon et le sud de la Navarre, tous deux non bascophones, il incluait aussi toute la Navarre bascophone et la plus grande partie du Guipuzcoa56. 84 De fait, en Navarre, la question de l'éducation prend un relief notable dès le milieu du 16ème siècle, d'une part, parce que de façon générale l'Eglise d'Espagne anticipe quelque peu les réformes tridentines, et, d'autre part, parce qu'après la guerre de conquête du début du siècle, qui avait débouché sur un conflit latent, les évolutions religieuses de l'autre côté d'une frontière encore contestée, donnaient une grande importance à ce problème57.

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85 Ce souci se manifesta en premier lieu dans l'enseignement, puisque l'année où l'université d'Oñate était créée (1550), les Cortes de Navarre débattaient de l'utilité de créer une université en Navarre (Vergara Ciorda 1991 : 37)58 . En fait certaines difficulté surgirent et c'est en 1615 que naquit une première université à Irache et, peu après, en 1630, une seconde à Pampelune, sans compter le collège des Jésuites de Pampelune (1580), les collèges séculaires59, et les écoles de grammaire60. 86 L'organisation de l'enseignement élémentaire également commença au 16ème siècle, l'objectif principal étant, comme généralement en France, l'instruction religieuse, appuyée sur une maîtrise minimale de la lecture. Goñi Gaztambide (1947 : 282) souligne ainsi que les écoles élémentaires se rencontrent au milieu du 16ème siècle non seulement à Pampelune, mais encore dans des villages et bourgades comme Muruzábal, Burlada, Obanos, Belascoain et Artajona, ce qui suppose que dans la seconde moitié du 16ème siècle l'instruction primaire avait atteint un certain développement, même en dehors de Pampelune. 87 Placées sous le contrôle de l'Eglise, certaines de ces écoles recevaient un financement public, comme Belapeyre souhaitait que cela se fît en Soule. Laspalas Perez (1987 : 30) dénombre dix-neuf paroisses de Navarre qui ont des écoles de premier degré ainsi financées61. 88 D'autres correspondaient à des fondations privées comme à Azkoitia62 ou Motrico, où, en 1610, une somme fut versée afin de salarier un maître d'école pour enseigner aux enfants de cette ville la doctrine chrétienne, lire, écrire et compter (Azpiazu 1998). 89 Tout indique que cet enseignement élémentaire se faisait en castillan. Il en était ainsi bien sûr dans les collèges comme celui de Pampelune (Vergara Ciorda 1991 : 172-185), mais également dans les degrés inférieurs ; cf. Goñi Gaztambide (1947 : 288). La coupure sociale attachée à la diglossie pouvait ainsi s'exprimer à travers l'écrit ; on en a l'illustration avec l'introduction dans les Fors du Guipuzcoa d'une ordonnance, approuvée par décret royal en 1573, exigeant que les représentants aux juntes de la province sachent lire et écrire, ce qui, en fait, signifiait qu'ils devaient savoir le castillan (Goyhenetche 1998 : 211). Une quarantaine d'années plus tard (1613), les juntes de Biscaye adoptent une disposition semblable précisant qu'il convient de savoir lire et écrire en romance63, ce qui excluait de cette charge la majorité de la population, comme le remarque Fernández de Pinedo (1974 : 67-77). 90 De façon symptomatique, parmi les textes administratifs rédigés en basque, évidemment peu nombreux et de niveau très local, que l'on rencontre, les principaux sont ceux qui résultent d'un échange de lettres entre municipalités des deux côtés de la frontière. Les plus anciens connus, qui datent de 1616, renvoient à un courrier entre deux responsables publics souletin et roncalais. Cette correspondance n'est que très partiellement connue car non éditée, mais le peu que l'on en connaît exprime clairement la cause du choix de langue et son caractère exceptionnel : (17) Monsieur, comme vous ne comprenez pas le langage français, et comme je ne sais pas écrire en espagnol, pour cette raison j'écris cette lettre en basque, avec l'espoir que vous prendrez plaisir à lire en notre langage naturel. (cf. Lettre de Gabriel d'Etchart à Miguel Ros, 1616, d'après la citation rapportée par Altuna & Miranda (1995 : 532) 91 Comme on le voit la langue basque vient en dernier recours. Il est implicitement indiqué dans les propos de l'auteur que, dans des circonstances où les correspondants seraient en mesure de communiquer au moyen de l'une des deux langues de pouvoir,

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l'emploi du basque, défini pourtant comme la langue commune naturelle des interlocuteurs, serait écarté.

92 Même dans les échanges entre responsables de chaque côté de la frontière, l'emploi du basque exigeait une maîtrise minimale de l'écrit basque, ce qui n'était pas une situation se rencontrant toujours, du moins outre-Bidassoa. Pour illustrer ceci, on citera le cas d'un échange de lettres en basque datant de 1680 entre les responsables de deux villes voisines de chaque côté de la Bidassoa, Urrugne et Fontarrabie. Dans une des lettres (22/01/1680), le rédacteur de Fontarrabie indiquait qu'en raison des différences dialectales et des difficultés à entendre les écrits basques de ses correspondants, il désirait que ceux-ci leur écrivissent en espagnol, lui-même étant disposé si nécessaire à poursuivre en basque ou en français (zuen eta gure iscuntza escaraz aguitz differenta baita pena dugu chit ezin explicatuz zuen letra. Halla desiratzen guinduque zuec guri espainoles escribatzea, eta guc zuei franceses edo escaras), cf. Sarasola (1983 : 135). Compte tenu de la proximité des deux villes, pratiquement contiguës bien que séparées par la frontière des royaumes (Hendaye fut un quartier d'Urrugne jusqu'au milieu du 17ème siècle), la distance linguistique ne peut expliquer ces difficultés de compréhension, qu'il convient d'attribuer, comme le fait Sarasola, l'éditeur de ces lettres, au manque de maîtrise de l'écrit basque chez les rédacteurs de Fontarrabie ; ils n'étaient probablement pas en mesure de saisir avec la précision nécessaire les courriers adressés en basque par leurs voisins sur des sujets relativement délicats à dimension juridique. 93 Cette mise à l'écart du basque dans la documentation administrative se rencontre dans les documents relatifs à la vie commerciale dans les provinces ibériques. Et ceci, encore une fois, de manière très précoce. Cette donnée nous est rapportée par Madariaga dans un ouvrage de 1565 dans lequel il manifeste sa contrariété à voir ses compatriotes écarter systématiquement le basque lors de l'usage de l'écrit dans leurs activités commerciales : (18) Je ne puis m'empêcher de quelque sentiment de colère envers mes Biscayens, qui ne se servent pas de celle-ci [la langue biscayenne] dans leur correspondance et leur négoce, et qui donnent ainsi à beaucoup l'occasion de penser qu'elle ne peut s'écrire, alors qu'il existe pourtant des livres imprimés. (Madariaga, Tercera parte del libro intitulado honrra de escriuanos (...) 1565, apud Altzibar (1989,2 : 03) 94 Les raisons expliquant l'absence d'un mouvement en faveur d'un développement des lettres basques dans les provinces ibériques semblent avant tout reposer sur les habitudes et représentations associées à la partition diglossique. En fait, contrairement à ce que l'on a tendance à penser, il n'y a pas de grande différence en ce domaine de chaque côté de la frontière, car de façon générale, avec les rares exceptions que nous avons rappelées, l'écrit basque est spécialement destiné aux personnes ignorant, ici, le français, ou, là, l'espagnol. Toutefois, le vulgaire castillan acquit très tôt ses positions de langue de pouvoir dans les provinces basques ibériques, et il disposa également d'un réseau de diffusion mis en place de manière précoce. Lorsqu'au 16ème siècle se produisit le mouvement de vulgarisation linguistique favorisé par la diffusion de l'imprimerie et la propagation des idées nouvelles, puis par le développement de la réforme catholique, il ne put guère profiter au basque dans ces provinces, car la place du vulgaire dans l'organisation diglossique associée à l'écrit était déjà prise par le castillan. Ce dernier, au surplus, apparut longtemps comme la meilleure arme de défense de la catholicité dans le royaume. L'interdiction imposée par Philippe II pour les ressortissants de son royaume de sortir des frontières pour étudier (1559) afin d'éviter toute contagion hérétique, si elle ne concernait pas l'écrit basque, manifestait cet état d'esprit, et, de

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fait, force est de constater que les deux contributions aux lettres basques réalisées en ce siècle dans les provinces non contrôlées par le Roi d'Espagne n'étaient, ni l'une (Dechepare), ni, à plus forte raison, l'autre (Liçarrague), de celles qui pouvaient contribuer à lever d'éventuelles suspicions dans ce domaine.

95 Le 17ème siècle confirma la stabilité et la constance de ces attitudes et comportements linguistiques, lesquels ne doivent en rien être associés à une perte de prestige symbolique de la langue au sens où on l'entend habituellement. En fait, très tôt la langue basque est investie d'une charge symbolique forte dans le cadre des références instituées au sein de la monarchie espagnole, et fortement marquée par l'idée d'authenticité et de pureté des origines. La basquité qu'elle exprime est un gage de christianité et de nobilité. Un contraste s'établit donc dès le 16ème siècle parmi les défenseurs de la langue entre le maintien d'un statut sociolinguistique, où la langue basque est dépréciée et écartée de tous les emplois écrits et socialement valorisants, et un fort investissement emblématique où l'on défend l'idée que le basque fut la langue primitive de l'ensemble des terres d'Espagne (cf. Tovar 1980, Zubiaur 1990). C'est cette contradiction que Claverie, dans un hommage en vers adressé à l'auteur, en tête du troisième ouvrage d'Etcheberri de Ciboure (1636), avait moquée, en raillant les auteurs qui, comme Garibay ou Echave, avaient parlé en espagnol des Basques, alors qu'étant Basques c'est en basque qu'ils auraient dû défendre leurs idées (Villasante 1979 : 71). 96 L'exclusion à peu près totale du basque dans l'enseignement d'outre-Bidassoa contrastait avec la situation rencontrée sur l'autre rive, laquelle paraissait relativement enviable aux yeux des bascophiles du Guipuzcoa du 18ème siècle. C'est ainsi que dans son ouvrage Eusqueraren berri onac [Les bonnes nouvelles de la langue basque] Cardaberaz oppose au système d'enseignement des écoles du Pays Basque de France où dit-il (1761 : 18) on explique et enseigne les règles de grammaire en basque aux Basques français (Frances Euscaldunai Gramaticaco Erreglac Eusqueraz adiraci, ta era-custen diezcate), celui des écoles des provinces d'Espagne, où déjà s'était répandu64 l'usage du signal stigmatisant l'emploi de la langue basque à l'école, pratique qui se poursuivra jusqu'au 20ème siècle, y compris en France à partir du 19ème siècle : (19) Ici les parents et les maîtres d'école doivent remédier à une faute grave, et rendre à notre langue basque plus de services que cela a été le cas jusqu'à présent. On n'a vu nulle part dans la société de langue ayant un sort plus malheureux que celui de la langue basque ; on veut l'enterrer et la retirer de la société des gens comme si elle n'était pas notre langue maternelle ou de naissance, et dans les écoles ils veulent l'interdire au moyen de la punition, du fouet, et de l'anneau ou signal. Quelle folie plus abominable que celle là ? (Cardaberaz, Eusqueraren berri onac, 1761 : 17) 97 La réaction de Cardaberaz montre que dans certains secteurs un sentiment d'incompréhension apparaît alors, relativement à l'exclusion du basque de l'enseignement, en particulier élémentaire, bien que l'on ne voie pas les conséquences concrètes de cette prise de conscience, dès lors en tous les cas que l'on quitte le secteur des couches sociales les plus modestes. Par exemple, il ne semble pas que lorsqu'en 1751 on demanda à Larramendi de rédiger le programme du collège pour jeunes filles que l'on voulait créer à Vergara, il ait prévu la moindre place pour l'enseignement de la langue basque, alors même que le programme prévu - relativement avancé pour le temps - accordait une place non négligeable à l'apprentissage de la grammaire et de l'orthographe du castillan (Malaxechevarrίa 1926 : 147). 98 Nous avons un autre témoignage d'une prise de conscience quelques années plus tard, non plus chez un Jésuite, mais chez un esprit rattaché à un autre courant de pensée,

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puisqu'il appartenait à la Real Sociedad Bascongada de los Amigos del Paίs, dont il soutenait les activités. Installé à Cadiz et travaillant également avec l'Amérique du Sud, cet illustrado, nommé J. de Eguino, adressa en 1771 un courrier à la société, dans lequel il fait une description très réaliste de la manière dont les rapports diglossiques avaient été gérés dans les provinces basques65. Le texte suivant, extrait de cette lettre, est cité par Altzibar (1985) : (20)... [la langue basque] se maintient dans les contrées arides de quelques montagnes où les natifs, quel qu'ait été leur attachement à son égard, l'ont uniquement conservée comme un joyau domestique, reléguée dans un coin, sans autre parure que celle de sa pureté originelle, les attaques reçues de toute part la condamnant à une totale extermination ; ainsi, comme il est nécessaire de savoir le castillan dans les relations ordinaires avec les autres Espagnols, et que ce dernier présente plus d'intérêt que le basque pour toute sortes de raisons de commodité, tout l'effort vise à maîtriser celui-ci depuis l'enfance. Dans les écoles primaires on apprend à lire et à écrire en castillan, et même on interdit aux enfants de parler basque, afin qu'il ne les gêne pas pour apprendre l'autre idiome. Dans tous les bourgs, et spécialement les plus grands, le castillan est courant et même dominant entre ecclésiastiques, gentilhommes et toutes personnes de quelque distinction. On prêche en castillan. Les écritures, les accords et les conventions publiques se font en castillan dans les tribunaux des provinces et au Conseil royal de Navarre. On dispose et ordonne en tout en castillan : les capitaines généraux et intendants, magistrats royaux et autres ministres du roi parlent, gouvernent et donnent leurs ordres en castillan. Et même les fors et ordonnances particulières des bourgs sont en castillan. Ainsi, bien loin de contribuer à polir, embellir et préserver le basque, depuis des siècles tout conspire à sa décadence... (lettre d'Eguino à la RSBAP de 1771, citée par Altzibar 1985) 99 La situation décrite par Eguino, correspondant à la seconde partie du 18ème siècle, avait été mise en place très tôt dans les zones bascophones des provinces ibériques, car en ce qui concerne la place relative des vulgaires, elle constituait le prolongement direct des rapports interlinguistiques établis bien avant l'invention de l'imprimerie, dans lesquels le castillan avait acquis au sein du système polyglossique le statut de vulgaire supérieur. Le 16ème siècle n'avait fait que renforcer la position du castillan qui monopolisait donc les nouveaux usages écrits conquis sur le latin y compris dans le domaine de l'administration religieuse. Par exemple, dès 1544, le latin avait supplanté par l'espagnol dans les procédures et dans les écrits de la curie dans le diocèse de Navarre (Jimeno Jurίo 1995 : 59)66. 100 Les considérations émises dans ces derniers paragraphes doivent être mises en contraste avec les indications rapportées dans les sections précédentes. Elles définissent de façon nette une perspective chronologique dans laquelle la faiblesse, en nombre et en qualité, de la production écrite en langue basque dans les provinces ibériques jusqu'au 18ème siècle, n'est pas le résultat d'un retard dans l'évolution des rapports diglossiques, mais plutôt le fruit d'une anticipation de ce qui se produira de l'autre côté de la frontière à partir d'abord de la seconde partie du 17ème siècle, puis, de façon plus marquée au siècle suivant.

7. Le mouvement bascophile du 18ème siècle outre- Bidassoa : Larramendi et la Real Sociedad Bascongada de los Amigos del País.

101 Comme nous l'avons dit dans les lignes précédentes, le concile de Trente n'eut guère de conséquences pour les lettres basques dans les provinces basques ibériques, sinon à

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travers la publication de petits catéchismes traduits, sans ambition. Exclu de l'enseignement67, même dans ses formes les plus élémentaires, sans emploi dans l'écrit public, le basque se trouvait de fait écarté des usages oraux socialement valorisés, y compris dans le domaine religieux, le seul où la situation de diglossie aurait pu lui offrir un terrain d'expression, comme ce fut le cas dans une certaine mesure de l'autre côté de la frontière. La langue basque n'avait donc pu être forgée et façonnée pour répondre aux nécessités de ces registres. C'est ce constat que faisait Larramendi dans la lettre qu'il adressait à Mendiburu en 1747, en regrettant que les prédicateurs ne fussent pas en mesure de prêcher en basque, faute d'une maîtrise suffisante de la langue : (21) Mais peu savent ne serait-ce qu'à moitié le basque de leur pays natal, et comme ils sont paresseux, ils ne veulent pas mieux l'apprendre, et ils ne veulent pas s'en donner la peine. Et que résulte-t-il de tout ceci ? Avec le peu qu'il savent, comme ils ne sont pas en mesure avec un petit ensemble de mots, pas même une poignée, d'exprimer ce qu'ils ont à dire, ils utilisent en chaire un langage confus, parfois basque, parfois castillan, parfois latin, l'ensemble étant souillé, sali, appauvri, de telle sorte qu'il semble qu'ils se sont hissés sur la chaire pour se moquer les auditeurs ; et je m'étonne toujours, comment beaucoup d'entre eux ne se font pas pousser et jeter au bas de la tribune pour leur infortune. (Larramendi, Lettre à Mendiburu du 15 mars 1747, Euskal testuak : 35) 102 Face à cette carence, au 18ème siècle, un certain nombre de membres du clergé régulier, comprenant un groupe de Jésuites composé de Mendiburu, Cardaberaz, et de leur maître à penser en matière linguistique, M. Larramendi, et également des Franciscains, en particulier ceux du couvent de Zarautz68, voulurent réagir. Il est difficile de déterminer la part de l'attachement linguistique et du zèle pastoral dans ce mouvement. Probablement les deux facteurs jouèrent, dans des proportions variables selon les individus.

103 Cette réaction se produisit face à une situation où de façon générale le clergé n'usait souvent que du castillan, faute d'une maîtrise suffisante de la langue du pays. C'est ce qu'indique Larramendi dans sa lettre de 1747 à Mendiburu : (22) Et quoi ? De nombreux prédicateurs ne fréquentent-ils pas nos églises ? Ne prêchent-ils pas par clameurs et chuchotements la connaissance conduisant au ciel ? C'est vrai, ils prêchent et ils sermonnent. Mais quelle importance, si la plupart des auditeurs n'entendent pas leur propos ? On veut nous faire croire que le castillan est compris, même chez ceux qui ne l'ont pas appris. Ceci n'est pas vrai : ce sont des prétextes et des propos de paresseux : même si quelques mots sont entendus, le vent emporte les autres, et le pain de la parole divine reste pour le Basque sans profit, faute d'être morcelé. (Larramendi, Lettre à Mendiburu du 15 mars 1747, Euskal testuak : 35) 104 Les causes de cette situation sont analysées par Mendiburu. Il y voit la conséquence d'une formation acquise en dehors d'un environnement bascophone, de sorte que leur connaissance du basque se limite à ce qui avait été appris dans l'enfance : (23) Les hommes d'église basques deviennent ecclésiastiques et prédicateurs après avoir fait toutes leurs études dans quelque ville où l'on parle castillan. Ils partent faire leurs études en n'ayant appris qu'un basque d'enfant, et rien d'autre, et le peu qu'ils savaient est émoussé lorsqu'ils atteignent la fin de leurs études ; et quand ils deviennent ecclésiastiques et prédicateurs, ils se retrouvent au niveau de leur enfance, ne sachant même pas le basque. (Mendiburu, Mendibururen idazlan argitaragabeak, 1er livre : 53) 105 L'effort d'une partie du clargé régulier pour remédier à cette situation eut un certain succès. Pourtant, malgré l'ambition de Larramendi de conférer à la langue basque un statut digne des ambitions qu'il avait pour elle, dans une certaine mesure, cette tentative se solda par un échec, dont témoignent les positions adoptées par le principal mouvement de modernisation intellectuelle et sociale que les provinces basques

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ibériques connurent dans la seconde partie du 18ème siècle : la Real Sociedad Bascongada de los Amigos del Paίs (RSBAP désormais). 106 Ce mouvement est considéré comme ayant introduit les idées encyclopédistes en Espagne, et l'intérêt qu'il montra à l'égard de la langue basque a pu donner à penser qu'il favorisa, après Larramendi, et dans un contexte nouveau, à la suite notamment de l'expulsion des Jésuites (1767), l'éveil d'une conscience linguistique dans les provinces basques. 107 Il a été indiqué dans une note précédente (note 50) que le fondateur de la RSBAP, J. Muñibe, avait contribué à une activité théâtrale relativement riche en Guipuzcoa, et qu'il avait à cette occasion manifesté son attachement à la langue basque. Un propos de l'un des membres de la RSBAP, J. Eguino, a été également rapporté, qui montrait la claire conscience que l'on pouvait avoir dans la seconde partie du 18ème siècle du sort fait à la langue basque dans les provinces ibériques. Dans le même sens, les statuts et les actes des réunions annuelles de la société expriment cette préoccupation. Ainsi les statuts de 1765, année suivant celle de la création de la RSBAP, indiquent que si certains membres se consacreront à l'étude de la littérature espagnole, d'autres s'appliqueront à polir et à cultiver la langue basque (a puliry cultivar la lengua bascongada ; art. 9 des statuts). Altzibar (1985) a montré que ce dernier point, surtout jusqu'en 1776, fut effectivement mis en œuvre, comme le prouvent les travaux de versification basque (réalisés, principalement, semble-t-il, à l'occasion de réceptions et visites), les dialogues basques prévus comme intermèdes lors des réunions académiques, et les travaux de lexicographie envisagés. 108 Pourtant, lorsque l'on examine de plus près comment cet attachement à la langue se concrétise dans des projets relatifs au développement de l'éducation, on constate qu'il n'est suivi d'aucun effet, et qu'aucune remise en cause réelle du statut social de la langue n'est à l'ordre du jour. Compte tenu des idées des membres de la société concernant l'importance de l'instruction et l'enseignement des langues, on aurait attendu que la bascophilie des membres de la RSBAP transparût dans les programmes de la société dans le domaine de l'éducation ; or ce ne fut pas le cas. Un incident significatif illustre, on ne peut mieux, ce qui pourrait apparaître comme un paradoxe, si l'on oubliait la force des mécanismes de reproduction des représentations et des attitudes déterminées par des siècles de diglossie, renforcés en l'occurrence, nous le verrons, par la pression que les structures d'état exerçaient afin que l'on ne s'écartât pas des comportements antérieurs. 109 La RSBAP accordait une grande importance à l'éducation, et se montrait tout à fait novatrice dans ses programmes. Sur le plan linguistique, notamment, elle défendait l'idée de faire accéder les enfants à la connaissance de la grammaire par un enseignement dans leur langue maternelle (lengua nativa). Mais puisque le basque était la langue maternelle des habitants du Guipuzcoa, province dont, selon tous les témoignages, les natifs étaient universellement bascophones en ce temps, ne fallait-il pas que l'enseignement fût dispensé en basque ? 110 Voici dans quelles circonstances la question fut posée. En 1771, les actes de la commission chargée de ces questions au sein de la RSBAP décidèrent de créer un concours afin d'introduire dans les écoles du pays, dont la société entendait encourager le développement, l'étude de la grammaire et de l'orthographe espagnoles dans les meilleures conditions. Il s'agissait de récompenser le meilleur ouvrage scolaire permettant d'enseigner la grammaire et l'orthographe du castillan à partir des travaux

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de l'Académie de la Langue espagnole69. Cette initiative ne fut pas comprise par tout le monde. En effet, les actes des assemblées de 1772 se firent l'écho d'une protestation anonyme70, signée El amigo alabés, dans laquelle il était notamment reproché à la RSBAP de promouvoir pour les écoles publiques l'enseignement de la grammaire espagnole. Après avoir invoqué l'autorité de divers auteurs pour établir que la première grammaire qui doit être enseignée aux enfants est celle de la langue native, l'auteur concluait, selon les extraits des actes de la RSBAP de 1772 : (24) ... que [la langue native] étant pour ces provinces la langue basque et non le castillan, l'essai de la Société est diamétralement opposé à la doctrine de ces sages, et à ce que les Grecs et les Romains pratiquaient. (Extractos del Año 1772 : 88) 111 Dans sa réponse, la Commission assure qu'elle fait sienne l'idée selon laquelle ne pas enseigner la grammaire dans la langue maternelle des enfants est une erreur. Puis elle poursuit, en envisageant, pour y répondre, l'objection que pourrait lui faire l'auteur de la lettre anonyme : (25) Mais (répliquera l'Anonyme) elle [la RSBAP] se contredit elle-même en enseignant la grammaire castillane dans les écoles basques. C'est ici qu'est l'erreur. 1°) Parce que, bien que la langue particulière du pays soit la langue basque, celte de la Nation est la castillane, laquelle est par conséquent la langue native de tous les Espagnols. 2°) Parce que par décision du gouvernement on ne peut employer d'autre langue que le castillan ; de sorte que tous les plis, livres, manuscrits et matières qui sont donnés aux enfants sont en castillan, avec simultanément interdiction du basque, si bien qu'il a été établi l'usage d'un anneau qui passe de main en main entre ceux qui fautent sur ce point, de manière que celui qui le possède en fin de semaine reçoive une punition. 3°) Parce que la compréhension du castillan devenant usuelle dans les écoles basques grâce à ses moyens, et la fin de la doctrine dont nous parlons ici consistant à enseigner la grammaire dans la langue qui est par avance connue, on obtient parfaitement ceci par le moyen déterminé par la Société. (Extractos del Año de 1772 : 100-101) 112 Ainsi qu'on le voit, la commission donne une réponse politique à une question qui, telle qu'elle était présentée, se voulait avant tout pédagogique : user de la langue du pays pour faciliter la diffusion du savoir. A aucun moment l'interprétation politique n'est discutée comme telle, et si les interdits et obligations établis par le gouvernement sont rappelés, il ne sont pas l'objet de réserve. Les auteurs (Sarrailh 1954, Alborg 1985, Martinez Gorriarán 1993) ont généralement analysé ceci comme une approbation de cette politique, ce qui est probable. Il est néanmoins vraisemblable que cette approbation ne fut pas unanime, bien que l'on ne trouve plus dans les extraits des travaux des commissions d'écho d'une autre divergence de vue. Les seuls témoignages d'un désaccord de fonds apparaissent dans certaines lettres. Nous avons parlé plus haut de la lettre d'Eguino ; on peut également mentionner celle adressée en 1775 par R. Gaetano Aldaeta, curé de l'église Santa Marina de Vergara, au Comte de Peñaflorifa. Hélas, cette lettre, que J. Urquijo avait conservée, n'a pu être retrouvée et nous n'en avons qu'une connaissance indirecte (Euskaltzaindia, Euskararen liburu zuria : 473).

113 Ainsi qu'on le voit, le renouvellement et la modernisation apportés en matière d'enseignement par la RSBAP ne profitèrent en rien à la langue basque, qui demeura pour la société un objet d'étude (voire, durant les premières années, d'exercice littéraire), mais qui ne put franchir les portes de l'école, où elle continua d'être interdite et objet de pratiques vexatoires comme celle du signal. Il est symptomatique qu'en 1775, lorsque fut présenté le projet d'une école patriotique de niveau secondaire tout à fait novatrice car orientée vers le bien social et non plus vers le seul enseignement général comme dans les collèges et les séminaires, il était prévu outre l'enseignement

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de l'orthographe et de la grammaire espagnoles et du déchiffrage des lettres anciennes, l'apprentissage des langues suivantes : latin, français, italien, anglais, allemand. Aucune place par conséquent n'était faite au basque pour cette école qui devait être créée au cœur du Pays Basque occidental, à Vergara71.

8. Conclusion.

114 Parvenu au terme de ce parcours, concluons en prolongeant nos réflexions introductives. On observe qu'à la fin du 18ème siècle les déterminants culturels et notamment sociolinguistiques pesant sur les lettres basques ont évolué de telle manière que les situations de chaque côté de la frontière se sont rapprochées, même si les pesanteurs des processus déjà bien engagés deux siècles plus tôt font encore sentir leurs effets.

115 En Labourd, Basse-Navarre et Soule, le basque, au début du 17ème siècle, avait pu bénéficier d'une situation de polyglossie où le français n'avait pas encore acquis face au latin l'ensemble des positions que le castillan avait antérieurement conquises outre- Bidassoa. Ce dernier était devenu, de façon très précoce, par un processus déclenché dès la première moitié du 13ème siècle par le Roi de Castille, la langue d'usage dans le domaine de l'administration et du droit dans tous les territoires dépendant du royaume, et sa position fut renforcée par le dynamisme et prestige acquis par les lettres castillanes au 16ème siècle. De façon précoce également, c'est le roman, très bientôt le castillan spécifiquement, qui s'imposa en Navarre. Le castillan fut donc institué dans les zones bascophones d'outre-Bidassoa comme vulgaire de référence face au latin, et avec le développement de l'imprimerie, le système diglossique qui s'instaura au 16ème siècle réserva dès le départ le domaine de l'écrit et de l'instruction élémentaire et secondaire au latin et au castillan. Ainsi, la langue basque, qui aurait pu bénéficier du mouvement de la Contre-Réforme en faveur des parlers locaux, n'en profita pratiquement pas. 116 En France, si le français bénéficia grandement du mouvement renaissant, les conséquences secondaires de ce changement (celles qui pouvaient affecter la langue basque) atteignirent assez tardivement les provinces basques frontalières. D'abord, en raison de l'influence très sensible d'un roman ibérique au sein de la principale structure politique régionale, le Royaume de Navarre. Ensuite, du fait également de la présence d'une tradition occitane qui s'était imposée préalablement, et resta présente dans certains domaines de la vie publique jusqu'au 16ème, voire même, comme nous l'avons vu plus haut, jusqu'au 17ème siècle pour certains textes juridiques. D'ailleurs, le basque ne s'était pas trouvé totalement exclu du grand mouvement de promotion linguistique du 16ème siècle, comme en témoigne la publication des vers de Dechepare en 1545. L'existence d'une forte impulsion calviniste dans la seconde moitié du 16ème siècle contribua également à donner à la langue basque un statut dans le domaine de l'écrit, avec la traduction du Nouveau Testament réalisée à la demande de Jeanne d'Albret, Reine de Navarre, et publiée en 1571. Aussi, la réforme catholique qui fut mise en œuvre au tournant du siècle, dans les deux principaux diocèses français incluant des zones bascophones tint compte de cette situation et bénéficia à la langue basque, laquelle constitua pour les couches populaires la langue de première alphabétisation, celle attachée à l'instruction religieuse. Il est probable, comme nous l'avons vu, que ceci donna lieu dans les années 1625-1635 à un certain nombre d'oppositions, lorsque du moins l'usage du basque s'éloignait des modes d'expression usuels rencontrés en

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français dans le cadre de l'instruction doctrinale. Malgré ce contexte conflictuel, une tradition écrite en langue basque put se développer dans ces provinces, principalement fondée sur l'idée d'un lectorat monolingue. De façon inverse, une telle tradition ne put surgir dans les provinces ibériques, car il n'existait pas à cette époque de représentation sociale correspondant à un lectorat bascophone ignorant le castillan. 117 En fait, il fallut deux ou trois décennies pour que les nouveaux rapports diglossiques se stabilisent dans les provinces basques aquitaines, réservant au basque une certaine place dans les domaines considérés comme primordiaux (en pratique, la religion), mais où le français était jugé stérile car ignoré des lecteurs potentiels. Les efforts de quelques auteurs, comme notamment ceux d'Etcheberri de Ciboure pour dépasser ces limites, qui faisaient du basque une langue du dernier recours, réservée aux seules populations monolingues, n'eurent guère de suite, malgré les tentatives de personnalités comme Oihénart ou Etcheberri de Sare, seuls écrivains basques laïcs de ce temps, dégagés par conséquent des préoccupations utilitaires liées à l'apostolat. Au cours du siècle suivant, à mesure que les positions sociales et l'usage de la langue française progressaient, l'emploi du basque à l'écrit se trouva relégué dans des registres de moins en moins gratifiants et presque toujours dépendants (traductions et adaptations), et dans un environnement social de plus en plus pauvre et rural, si bien qu'au milieu du 18ème siècle, la situation de l'écrit basque était devenue assez semblable de chaque côté de la frontière : pour le dire sans les nuances qu'il conviendrait néanmoins d'ajouter, compte tenu de la complexité de la matière, il était socialement perçu comme destiné aux seuls bascophones monolingues peu scolarisés et donc appartenant aux populations les moins favorisées des campagnes, exclues d'une éducation quelque peu avancée. 118 Le mouvement qui apparut en Guipuzcoa et Biscaye au 18ème siècle pour donner à la langue basque un autre statut ne remit pas véritablement en cause cette situation, même s'il permit aux dialectes d'outre-Bidassoa de développer une certaine tradition, un peu sur le modèle de ce qui avait déjà été réalisé en labourdin et souletin. La naissance et le développement d'un mouvement de rénovation intellectuelle telle que celui représenté par la RSBAP aurait pu offrir une occasion de sortir la langue du carcan dans lequel les rapports diglossiques la tenaient enfermée depuis plusieurs siècles. Mais si la question put se poser, la réponse fut à nouveau négative. S'il est probable que l'attitude agressive en matière linguistique de la part du pouvoir royal dans le dernier tiers du siècle ne favorisa pas un tel changement, il semble également que l'élan social qui eût été nécessaire pour entraîner une telle modification des rapports diglossiques ne fut jamais suffisamment vigoureux. L'analyse lucide d'Eguino concernant la situation sociale de la langue basque n'eut guère d'échos, sinon négatifs comme nous l'avons vu, parmi ses collègues de la société, et lui-même se contenta par la suite de promouvoir des thèses historiques de Larramendi. En fait, ce qui se jouait alors dans les provinces ibériques ne faisait que préfigurer ce qui advint deux décennies plus tard dans les provinces aquitaines lors de la Révolution. Le mouvement intellectuel bascophile et favorable aux idées nouvelles que purent représenter par exemple les frères Garat ne déboucha sur rien, et l'idée de bilinguisme, parfois évoquée à propos de la réalisation de traductions des textes révolutionnaires, outre qu'elle fut conçue chez certains de ses promoteurs comme un instrument à fonctionnalité double d'acculturation et de déculturation linguistique72, resta lettre morte en Pays Basque.

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NOTES

1. Nous ne mentionnons ici que les ouvrages réellement connus (au moins indirectement, comme dans le cas du catéchisme d'EIso). Il est fort possible que d'autres ouvrages furent publiés dont aucune trace n'a été conservée, comme semblent l'indiquer certaines observations d'auteurs du 16ème siècle, tel Madariaga ; voir Altzibar (1989 : 2, 03), et les références citées. 2. De l'autre côté de la frontière également, le mouvement bascophile du 18ème siècle ne manqua pas de reconnaître l'importance de l'école labourdine. Ainsi Larramendi, qui en eut une connaissance directe à travers ses lectures et peut-être également à l'occasion de son séjour dans les environs de Bayonne avec la Reine Anne de Neubourg, veuve de Charles II, dont il fut le confesseur. On rappellera aussi qu'Añibarro ( 1748-1830) réalisa une adaptation biscayenne de l'ouvrage majeur de la littérature labourdine classique. Gero (‘Après’) d'Axular. 3. Société qui avait obtenu le monopole du commerce avec le Venezuela.

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4. Le texte original en basque ou espagnol des citations traduites dans le texte est donné en appendice. La numérotation précédant la citation renvoie à celle de cet appendice. 5. Le début de cette période se signale aussi par les retombées du conflit engagé dans le Royaume pour réduire les foyers protestants. Des bâtiments des ports de Saint-Jean-de-Luz et Bayonne. dûment armés, furent ainsi engagés dans la défense de l'île de Ré, menacée par la flotte anglaise, et dans le siège de la Rochelle. (Goyetche 1883 : 76, Nogaret 1925 : 176) 6. Les Fors de Basse-Navarre, que le Roi approuva en 1611 et qui furent publiés en 1645, sont écrits en gascon, tout comme d'ailleurs les Coutumes de Labourd et celles de Soule, mais celles-ci furent rédigées beaucoup plus tôt (1513 pour le Labourd, 1520 pour la Soule), et imprimées pour la première fois en 1553, soit près d'un siècle plus tôt. 7. De Lancre indique qu'un prêtre régulier s'était présenté à lui pour accomplir la tâche d'interprète, et discute les difficultés pouvant résulter de cette situation du fait notamment de l'existence de prêtres sorciers : Qu'étant de même partie, tant d'éxécutions faites par Justice le [l'interprète] pourrait tirer à commisération, ou bien étant Prêtre, à se plaire au sang, voyant qu'il se présentait plusieurs Prêtres sorciers, se ressentant plus que les autres de l'indignité commise par des gens élevés en même fonction et dignité que lui, et à ce saint ordre de Prêtrise. (1612 [1982 : 279]). De Lancre. pour interroger les prêtres, devait donc utiliser les services d'un interprète. Celui qui s'était présenté à lui donna apparemment toute satisfaction, bien que sa connaissance du français ne fût pas aussi bonne que souhaitable : encore qu'il fût bien versé en la langue Basque, il n'était pas si suffisant en la langue Française (idem : 278). Au demeurant, malgré cette insuffisance, il fallait s'en contenter, car. confie de Lancre. à peine aussi s'en trouverait-il un dans le pays plus suffisant pour cet office. (idem : 280) 8. Malgré l'exiguïté des territoires, trois Evêchés étaient concernés : celui de Bayonne. qui, même après la perte en 1566 des derniers archiprêtrés situés en Guipuzcoa et Haute-Navarre, couvrait pour l'essentiel un territoire bascophone, puisqu'il incluait tout le Labourd et la plus grande partie de la Basse-Navarre ; celui de Dax qui incluait diverses paroisses de Basse-Navarre (Pays de Mixe et d'Ostabaret); et enfin celui d'Oloron. qui incluait les paroisses de Soule. Dans la seconde partie du 16ème siècle, les trois évêchés connurent une activité protestante, plus ou moins intensive selon les zones. 9. Le besoin d'instruction avait été souligné également par de Lancre relativement au problème de la sorcellerie :... le nombre des Sorciers est si grand en ce pays de Labourd, et si trouve tant d'âmes dévoyées, que de penser les ramener ou déterminer par la voie de justice, il est du tout impossible, La dévotion et bonne instruction y feraient beaucoup plus d'effort. (De Lancre 1612 [1982 : 80]) 10. La qualité de l'ouvrage de Materre n'a rien de comparable avec celle du petit texte biscayen de Betolaça (1596), qui correspondait plutôt à une cartilla bilingue, et qui était sans grand intérêt (en dehors bien sûr du domaine linguistique); cf. Resines (1988). 11. L'œuvre basque d'Oihenart (recueil de dictons et proverbes, poèmes à thème amoureux) se distingue évidemment dans ce panorama. Mais si Oihenart connaissait bien les auteurs et les textes labourdins, comme le montrent les correspondances entretenues avec J. Etcheberri et S. Pouvreau, et son Art poétique basque (1665), on ne peut le rattacher aux lettres labourdines, ne serait-ce que pour des raisons linguistiques. 12. Il ne semble pas que les auteurs labourdins aient voulu s'adresser à un lectorat de transmetteurs (constitué d'enseignants et, en pratique, appartenant au clergé), contrairement par exemple à Belapeyre en Soule (et sans doute aussi à Liçarrague). Materre dans son avertissement aux Basques indique son souhait de voir le livre atteindre un large public : (2) J'ai formé le projet d'écrire et de mettre à la disposition des gens ce petit livre, afin qu'on y lise (lorsqu'il n'y a pas d'autre enseignant) ce qu'il convient de croire, et comment il faut agir et demander. Axular, qui figurait parmi les approbateurs de l'ouvrage de Materre, indique également que ce dernier méritait de circuler parmi les gens et dans les mains de tous (meregi duena ibil dadin iendartean, eta guztien escuetan).

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13. En dehors du Labourd, Oihenart offre l'exemple d'une démarche différente. En effet, lorsqu'il publie ses poèmes ( 1656), il a sans aucun doute à l'esprit un lectorat cultivé, allant bien au-delà des monolingues bascophones. 14. Cet ouvrage est perdu. On ne le connaît qu'à travers la mention qu'en fit Belapeyre une dizaine d'années plus tard dans l'avertissement adressé au clergé de Soule, duquel cette citation est extraite. 15. La vision que les auteurs labourdins ont de leur lectorat est proche de celle que l'on rencontre dans la littérature romane ibérique au moment où elle se construit face au latin. Juan Manuel avait également associé l'usage du vulgaire roman à un lectorat laïc peu lettré, en évoquant ceux qui font ou font faire certains livres, principalement en roman, ce qui est le signe qu'ils sont destinés aux laïcs qui ne sont pas très lettrés ; (par esta razon, los que fazen o mandan fazer algunos libros, mayor mente en romançe, que es sennal que se fazen para los legos que no son muy letrados) ; cf. Montoya Martínez & Riquer (1998 : 272). 16. L'importance de ce lectorat est également confirmée par la place qui lui est accordée dans le second ouvrage en labourdin classique, ayant succédé à celui de Materre, le Manual devotionezcoa d'Etcheberri de Ciboure (1627), dont le second livre contient également des prières destinées aux gens en mer ; voir en particulier l’Avertissement au lecteur marin. 17. Aux portes du Labourd, le collège de Bayonne, qui venait de s'ouvrir à la fin du 16 ème siècle, ne bénéficia guère aux jeunes Labourdins, en particulier parce qu'il s'agissait d'un collège municipal. destiné à recevoir les fils de la ville, et donc sans internat. Par ailleurs, l'enseignement dispensé était d'un niveau modeste (Pontet 1980). Le premier séminaire diocésain ne fut ouvert qu'en 1722, mais comme il était sous l'influence janséniste, il ne connut pas le développement attendu. De fait, c'est le collège de Larressore, créé une douzaine d'années plus tard par Daguerre, qui s'imposa, et devint le principal centre de formation de la jeunesse labourdine à partir du milieu du 18ème siècle. Une exception doit être peut être faite pour l'école d'hydrographie créée à Bayonne en 1676 (Pontet- Fourmigué 1990 : 542), bien qu'on ignore si les marins labourdins y eurent beaucoup recours, les enseignements étant en tout état de cause dispensés en français (Arcocha-Scarcia 2000). Observons que plus d'un siècle plus tard, en 1790, une pétition de marins de Saint-Jean-de-Luz et Ciboure réclamait que les articles de l'examen de pilote et de capitaine fussent traduits en basque ; cf. Lassus (1987 : 270-271). 18. Dubarat (1901 : CCCXLVII) rapporte que les statuts sinodaux de l'évêché du Labourd en 1553 ne faisaient pas mention des questions d'enseignement, dont la catéchèse pourtant dépendait. Par contre ceux de 1663 abordent ce sujet : Les statuts de 1666 ordonnent qu'il y ait dans chaque paroisse un régent ou instituteur pour instruire les garçons et leur apprendre le catéchisme ; les filles seront confiées aux sœurs appellées vulgairement benoistes. Bien sûr ceci ne signifie pas que cet enseignement n'existait pas auparavant, mais qu'on entendait le généraliser. En ce qui concerne cet enseignement jusqu'à la Révolution, voir Oyharçabal 1999a. 19. Il va sans dire que, même à ce niveau, l'instruction était sexuellement inégalitaire. Les dispositions synodales du 17ème ne font pas apparaître une opposition de principe à un enseignement féminin, mais en instituant une instruction séparée (cf. note précédente), elles mettaient en place un système où les filles étaient généralement défavorisées ; cf. Oyharçabal 1999a. En Labourd, la maison de retraite créée par Melle Etcheverry à Hasparren en 1738, sous l'égide de Daguerre, fondateur du Séminaire de Larressore, proposait un enseignement élémentaire destiné aux jeunes filles pauvres. 20. De façon générale, au-delà de l'acquisition des rudiments religieux, les secteurs de la société associés au négoce n'envisagent sans doute guère les questions de formation en dehors des objectifs liés à leur activité. Au début du siècle suivant. Lespès de Hureaux, Lieutenant Général de la Sénéchaussée de Bayonne, souligne dans un rapport rédigé vers 1718 le désintérêt qu'il observe à Bayonne relativement aux questions d'art et de science : Cette ville n 'étant presque composée que de négocians et gens de commerce il n 'est pas surprenant que peu de personnes s'y adonnent

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aux lettres et aux belles sciences. (Mémoire sur Bayonne, Labourt et le Bourg St Esprit, manuscrit de la Bibliothèque Municipale de Bayonne). 21. Sur les distinctions à opérer concernant l'alphabétisation de lecture et d'écriture dans la société de l'Ancien Régime, et les précautions à prendre à l'égard d'une évaluation se limitant aux statistiques de signatures comme on l'a fait pour le 19eme siècle, on se rapportera aux travaux de R. Chartier. Voir en particulier dans Pratiques de la lecture (1985), le chapitre Du livre au lire. 22. Le type diglossique basque vs français se distingue du précédent (basque vs latin) en ce qu'à terme il est porteur d'une solution à l'opposition diglossique par l'extinction de la langue infériorisée, ou sa transformation en langue minoritaire minorée. Il suffit qu'à travers quelques générations les conditions sociales conduisent les locuteurs ayant acquis une compétence bilingue à ne transmettre que la seule langue à statut prestigieux (cas typique pour le basque en Pays Basque à l'époque moderne). Dans le type diglossique où la langue de prestige est une langue morte (le latin au 17ème siècle), au contraire, la transmission de la langue infériorisée n'est pas mise en cause à moyen terme. En fait, le dépassement de l'opposition diglossique passe alors par la conquête par la langue à statut inférieur des domaines réservés précédemment à la langue à statut supérieur (langues romanesface au latin). 23. Le statut des langues a longtemps été associé dans la tradition occidentale à leur soumission à des règles. L'absence de grammaire pour une langue est donc perçue comme un défaut et une insuffisance de cette langue. Comme il l'indique dans le prologue, c'est pour réfuter la croyance générale que le basque ne pouvait être réduit à règles et méthodes (impossible reducir à methodo, y reglas el Bascuenze) que lorsqu'il rédigea sa grammaire en 1729, Larramendi l'intitula El impossible vencido. 24. Ces adjectifs sont ceux utilisés par Juan de Mariana à propos du basque (grosero v bárbaro), propos qu'Oihenart dénonça vivement dans sa Notifia (1636, 1er liv., 12ème ch.). 25. La distinction écrit vs oral dans l'enseignement religieux se rencontre souvent. Elle est très bien illustrée notamment dans les pays de langue d'oc, où la distance entre les langues de la diglossie est moins marquée. Par exemple dans le diocèse de Dax, au 18ème siècle, l'évêque Suarès d'Aulan exige des prêtres et des régents qu'ils enseignent en gascon alors qu'il fait publier le catéchisme en français (Sérurier 1874). De manière très significative, on en arrive parfois à faire des catéchismes en français en introduisant des gasconismes de façon à s'assurer que le clergé effectuera les traductions de manière à peu près uniforme dans l'instruction. Eygun (1992) signale ainsi cette observation de l'évêque d'Auch en 1764 : On nous a fait apercevoir que le Catéchisme devant être, presque partout, enseigné en Langue Vulgaire, il étoit à propos d'employer, autant qu'il seroit possible, dans le Français, un tour et des expressions qui puissent être rendus comme mot pour mot, dans l'idiome qui est en usage dans ce Diocèse, afin que par-là. la traduction fut partout la même. 26. Depuis le Concordat de Bologne (1516) les évêques étaient choisis par le Roi de France, même si après 1591 une enquête préalable était menée par le représentant de à Paris. 27. L'église catholique demeura longtemps, jusqu'à la seconde moitié du 18ème siècle, hostile à la traduction en langue vulgaire de la Vulgate latine. Cette réticence (moins marquée en France en raison d'abord du jansénisme, puis de la pastorale écrite ayant suivi la révocation de l'Edit de Nantes) prit fin dans les années qui suivirent le bref pontifical de Benoît XIV ( 1757) autorisant l'usage des versions de la Bible en langue vulgaire (Julia 1997 : 286); l'édit de Benoit XIV demandant que les textes des écritures saintes soient lus en langue vulgaire lors des offices, date de 1782 (Abellan, 1986 : 19). Les traductions en basque du Nouveau Testament, malgré l'existence d'un manuscrit du 18ème siècle (version des évangiles de 1740 due à Haraneder), ne furent reconnues par l'église qu'en 1855 pour la France (traduction de Harriet), et 1931 pour l'Espagne (traduction d'Olabide). Sachant l'attachement des populations basques à la religion catholique durant cette période, il est difficile de ne pas associer la nature tardive de ces reconnaissances au statut social de la langue basque.

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28. Les dédicaces antérieures adressées à des autorités non bascophones, étaient soient bilingues (Liçarrague), soit rédigées en français (Materre). 29. Le mépris dont le basque pouvait être l'objet dans certains milieux cléricaux en cette première moitié du 17ème siècle est également dénoncé par Haranburu dans l'avertissement de son manuel de 1635 ; voir Oyharçabal (2001). 30. On trouve chez Etcheberri de Sare (1712 [1907 : 87]) une allusion à ce cas de figure. Ayant rapporte' une anecdote concernant l'Empereur Sévère et selon laquelle celui-ci avait éloigné sa sœur au motif qu'elle parlait mal le latin (négligé au bénéfice du grec), Etcheberri fait cette remarque : (10) Il serait bon aujourd'hui aussi d'éloigner et d'enlever du pays de tels Basques déshonorants ; et d'ajouter ces mots rayés dans le manuscrit : je crois bien qu'on en trouverait quelques uns propres à s'éloigner, et qui d'ailleurs s'en iraient de bon cœur, s'il se trouvait ailleurs une autre charge semblable et d'aussi bon rapport. Visiblement Etcheberri. dans cette remarque qu'une prudence postérieure lui a sans doute fait rayer sur son manuscrit, a certains Basques à l'esprit, qui, jouissant d'une position enviable en Labourd, n'ont guère d'estime pour la langue du pays. Parmi les personnes méprisant le basque, Etcheberri distinguait, d'une part, les non-natifs qui ignoraient la langue tels Mariana. et d'autre part, les Basques, qui, confondant capacité expressive et extension géographique. méprisaient la langue considérée comme impropre à une communication riche : (11) le basque n 'est pas aussi aussi pauvre en mots qu'il est étroit et limité en territoire : et ils [les Basques détracteurs du basque] n'ont pas à rendre le basque coupable et fautif, mais bien eux-mêmes, d'être si négligents et inappliqués à apprendre la langue que la naissance leur a donnée. Etcheberri de Sare (1712 [1907 : 85]) 31. Au sens propre, le terme erdara désigne toute langue autre que le basque. En pratique, dans les contextes de bilinguisme social, il dénote aussi souvent l'autre langue, par exemple le français en Labourd, ou le castillan dans les provinces ibériques. 32. Comme on ignore l'argumentation des adversaires d'Etcheberri. on peut imaginer que leur opposition à l'emploi du basque pouvait avoir des formes plus ou moins radicales. La version la moins agressive pouvait consister à limiter l'usage du basque dans les textes d'instruction religieuse à la traduction, éventuellement dans des éditions bilingues. 33. Résines (1997 : 177) indique que dès le 16ème siècle certains auteurs, comme notamment Juan de Avila, n'hésitent pas à utiliser la versification pour faciliter l'apprentissage de certains points de doctrine par le chant. Il convient aussi de signaler dans le même esprit le Cancionero General de la Doctrina Cristiana (1579) de Juan López de Ubeda, fondateur d'un séminaire destiné spécialement à la formation de catéchistes à Alcalá de Henares ; cf. Rodriguez-Moñino (1942-1944). 34. Ce registre est très expressif en basque, où il est en quelque sorte grammaticalisé, car il entraîne l'accord dit allocutif dans toutes les formes verbales non subordonnées. 35. La citation qu'Urkizu (1986) rapporte est extraite d'un ouvrage datant de 1569 (Prima Scaligerana...); les deux autres langues, outre le basque et le français, sont bien sûr le gascon (pour les pays basques, c'est-à-dire, en ce temps, ceux d'en decà des Pyrénées), et l'espagnol : Il faut que les Basques parlent quatre langues. François, parce qu'ils plaident en français au Presidial de Bayonne, & de là à la seneschaussée d'Aqs ; Gascon pour les pays basque & Espagnol. 36. Etcheberri commence son avertissement au lecteur du 1 er livre de son Manual devotionezcoa en citant divers auteurs ayant chanté leur pays. Les noms qu'il cite sont Caton (Italie), Pibrac (France), Verino (Espagne) et Ader (Gascogne). 37. Il s'agit de la grammaire rédigée par Etcheberri de Sare (1712), qui cependant ne fut pas publiée : Escual Herriari eta escualdun guztiei escuarazco hatsapenac latin ikhasteco (Rudiments en langue basque pour apprendre le latin, destinés au Pays Basque et à tous les Basques). 38. On peut également illustrer ce point en rapportant une anecdote relative à l'un des principaux animateurs de la vie intellectuelle labourdine au milieu du 18ème siècle en Labourd. à savoir l'abbé Daguerre. fondateur et directeur du principal séminaire du diocèse du Labourd. La

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correspondance que Melle d'Etcheverry, l'une de ses protégées qui dirigeait un établissement destiné à accueillir des jeunes filles et novices à Hasparren. a été publiée, et on peut y apprendre que Daguerre tenait à ce qu'il lui fût écrit en français. Dans une lettre en date du 24 avril 1745, Melle d'Etcheverry lui faisait observer qu'il avait placé l'une des novices en grande difficulté en l'obligeant à lui adresser sa correspondance en français : vous l'avez mise à une grande épreuve, en voulant qu'elle vous écrivît en français ce qu'il lui est absolument impossible (Lettres et vie de Mademoiselle d'Etcheverry, 1751 : 173). Daguerre était certainement connu comme prédicateur basque car c'est probablement lui que les édiles luziens avaient voulu faire venir à Saint-Jean-de-Luz pour prêcher en basque en 1734 en équipe avec Duhalde. Il écrivit également dans un basque excellent l'approbation du manuel de vie chrétienne de Baratciart (1784), professeur dans son établissement de Larressore. Mais c'est en français qu'il rédigea la seule publication (1763) qu'on lui connaît. L'ouvrage, qui traitait de morale chrétienne, eut d'ailleurs un certain succès (cinq éditions jusqu'en 1823). On peut voir dans cette figure une illustration de la primauté acquise par le français dans le clergé labourdin cultivé du 18ème siècle. 39. Larramendi acceptait, au moins par résignation, la diglossie classique à base thématique (le basque étant la langue de l'intime et du quotidien dans les couches privilégiées bilingues), mais refusait l'évolution conduisant à l'abandon complet de l'usage du basque chez les bilingues cultivés, dans leur rapports interpersonnels. Ce processus était apparemment en cours en son temps comme le montre la citation suivante : (14) Que ce principe [selon lequel le basque n'est bon que pour s'adresser aux gens de la campagne de condition modeste] soit bien reçu et accepté entre les jeunes des collèges et séminaires, très imbus de belles lettres et de latin, castillan ou français, langues dans lesquelles ils ont étudié, et qu'ils pratiquent dans leurs conversations sur ces matières, qui ne sont ni communes, ni populaires, passons, puisque jusqu'ici on n'a pas écrit sur elles en basque. Mais qu'ainsi ces jeunes comme d'autres anciens, ecclésiastiques, religieux et séculiers basques, engagent une conversation sur des sujets usuels et communs et dédaignent d'employer alors la langue maternelle du pays, parce que cela a moins de valeur, est irrationnel et folie. (Larramendi, Corografia de Guipúzcoa : 305) 40. Dans l'avertissement au lecteur également, Maister, l'auteur probable de cette traduction de l'Imitation, aborde la question de la difficulté de lecture (supposée plus grande que dans les langues de référence habituelles) : (17a) Il y aura quelques personnes pour dire que l'absence d'habitude de lire en basque rendra sans attrait, pénible et difficile, l'accomplissement de cette tâche [lire l'ouvrage] ; même s'il en est ainsi au début, par la suite ces difficultés iront diminuant à mesure que l'on s'accoutumera, et petit à petit, de même que l'on apprend à lire les autres langues, on apprendra à lire celle- ci. Pour cette raison c'est dans ce livre que les instituteurs devraient apprendre à lire aux enfants qui ne savent que le basque ; (Maister. Jesus-Christen Imitationia, 1757. Iracurçaliari). On rejoint ici. sur un registre distinct, les préoccupations des Jésuites guipuzcoans quant au manque de formation des élites locales dans la langue du pays ; cf. infra § 7. 41. S. Pouvreau. natif de Bourges, fut secrétaire de Duvergier de Hauranne, né à Bayonne (où Jansenius fut durant quelque temps principal du collège). On a pu penser que c'est à cette occasion que Pouvreau eut ses premiers rapports avec la langue basque (Villasante 1979 : § 78). Il vint à Bayonne avec l'évêque Fouquet. et. après son départ pour Paris, il réalisa trois traductions de textes à thèmes religieux, dont deux furent publiées. Son dictionnaire à entrées basques, dont deux manuscrits sont conservés à la Bibliothèque Nationale, n'a pas encore été publié. 42. Nous ne voulons pas dire qu'il n'y eut plus de membres du clergé sans lien d'origine avec le Pays Basque, qui, ayant eu à y exercer leur ministère en apprirent la langue. Ce serait certainement inexact, et on pourrait notamment opposer le cas de B. Recio, jésuite natif de Valladolid (1714), qui fut enseignant à l'université d'Oñate. où il apprit le basque. L'un des poèmes qu'il composa en basque nous est connu (Villasante. 1979 : § 158). Nous restreignons notre observation aux auteurs ou traducteurs, qui n'ayant que séjourné en Pays Basque, acquirent malgré tout une place dans l'histoire des publications en langue basque.

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43. Dans son avertissement au lecteur, l'auteur de la traduction indique s'être efforcé de restituer clairement le sens du texte à traduire, sans s'attacher de trop près aux termes français (froncez therminhuer sobera chehe jarraiki gabe), indiquant ainsi que le texte source était en français. 44. En Labourd également on rencontre des comportements semblables. Certains auteurs ne s'autorisent un travail de publication qu'en tant qu'adaptateurs d'ouvrages longs qu'ils abrègent pour les rendre accessibles à un public de condition modeste. Ainsi dans son avertissement au lecteur, Baratciart (1784) indique que sa tâche a consisté à sélectionner, pour un public de personnes gagnant leur vie grâce à un travail pénible, des propos rédigés de façon plus longue à l'intention d'une élite : (18) ces considérations [écrites pour un public restreint par un auteur précédent] auraient été trop longues pour ceux qui gagnent leur vie dans la peine et la sueur, car elles avaient été écrites à l'intention de quelques personnes choisies au sein de la population ; aussi, je les ai disposées dans une forme brève et claire, afin que tous, chaque jour, les lisent. (Baratciart, Guiristinoqui bicitceco eta hiltceco mol-dea, 1784, Avertissement) 45. Sur les sources des pastorales tragiques du répertoire traditionnel ancien, voir Hérelle 1926. 46. Un opuscule à usage scolaire (vers 1800) nous est parvenu issu de cette tradition : cf. Oyharçabal 1999a. 47. Ceci concerne évidemment le seul répertoire basque et non ses sources (qui ressortent principa lement de la littérature de colportage et donc de circuits de distribution de l'imprimé connus). Les pastorales souletines traditionnelles ignoraient l'imprimé : les textes circulent par cahiers manuscrits dont les copies sont monnayables. 48. Dans sa lettre. Duhalde mettait au défit les Luziens de renoncer à la venue de la mission, ce qu'ils n'osèrent faire, probablement pour ne pas décevoir l'opinion publique (Darrobers 1994 : 129). La mission eut donc lieu dans les conditions fixées au départ, selon les souhaits de Duhalde. 49. Il existe un autre exemple, survenu trois décennies plus tard en Guipuzcoa, où les écarts dialec taux furent invoqués dans un contexte certes tout différent mais intéressant du point de vue socio-linguistique : il ne s'agissait pas de justifier une requête dont l'arrière-plan était financier, mais d'expliquer les raisons d'avoir écrit un opéra comique bilingue et non uniquement basque (en fait la place du basque y est très réduite et réservée aux parties chantées). L'anecdote concerne l'auteur de El borracho burlado (1764), à savoir J. Muñibe, comte de Peñaflorida et membre fondateur de la Real Sociedad de los Amigos del Paίs, dont nous parlerons plus loin. Il indiquait dans sa préface avoir voulu dans un premier temps écrire sa pièce en basque, mais avoir renoncé en raison de l'écart entre les parlers du Haut-Guipuzcoa et du Bas- Guipuzcoa, de telle sorte qu'il réserva le basque aux parties chantées : (21) Je dis, donc, que ma première idée était que tout cet opéra fût en basque, mais ensuite la difficulté du dialecte dont je devais me servir m'apparut. Si j'avais utilisé celui d'Azcoitia, cela aurait été mal vu par le reste du pays jusqu'à la frontière de France, en raison de la prévention que leur inspire le basque ou dialecte du haut pays, et si j'avais voulu utiliser celui de Tolosa, Hernani et Saint-Sébastien, etc., j'exposais les acteurs au ridicule, car il leur aurait été difficile de bien l'imiter. Pour cette raison, je dus me contenter de réserver le basque pour les parties chantées, en écrivant les parties représentées en castillan. On sait que les représentations et les croyances jouent un rôle important dans la perception des différences linguistiques et le positionnement à leur égard, et il est difficile d'apprécier le fondement ou la pertinence réelle de ces propos. s'agissant de l'opposition entre deux variétés de guipuzcoan. Mais le fait même qu'ils puissent être énoncés dans un tel contexte, et de la part d'une des plus éminentes personnalités intellectuelles du pays, témoigne des conséquences attachées à l'absence d'un standard de l'écrit basque dans le Guipuzcoa de ce temps pour le développement d'un répertoire dramatique. Durant cette période. l'activité théâtrale dans la région d'Azkoitia, basée en particulier sur les traductions du répertoire français, fut importante, mais elle se réalisa presque uniquement en castillan. 50. Sarasola ne comptabilise ni les ouvrages ayant un nombre de pages inférieur à 50 ni les ouvrages bilingues.

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51. La première chronique de Biscaye, par exemple, qui date du milieu du 15 ème siècle, est rédigée en castillan.; cf. Aguirre Gandarias (1984) 52. On considère que le castillan s'était imposé comme principale langue de l'écrit dans le Royaume de Castille dès le début du 13ème siècle, la chancellerie royale abandonnant le latin au profit du castillan dès 1230, et Alphonse X élaborant ensuite le Fuero Real en cinq livres rédigés en castillan (Rucquoi 1993 : 218). Bien que le latin fût connu, au 15ème siècle les traductions se multiplient, de sorte qu'il n'y eut pas dans l'Occident chrétien péninsulaire, de profondes différences entre culture « savante » et culture « populaire » (idem : 336). A la fin du siècle, la publication de la grammaire de Nebrija en 1492, première grammaire d'une langue romane publiée, symbolisera l'avancement de ce processus, clairement associé, comme on le sait, à un dessein politique, ainsi que l'auteur l'indique lui-même au début de sa célèbre dédicace à la Reine Isabelle : La langue fut toujours compagne de l'empire, et elle le suivit de telle façon qu'ensemble ils commencèrent, crûrent, et fleurirent, et qu'ensuite ensemble ils chutèrent (siempre la lengua fue compañera del imperio ; y de tal manera lo suguió que junta mente començaron, crecieron y florecieron, y después junta fue la caida de entrambos) ; citation d'après l'édition d'A. Quilis 53. L'influence occitane fut également notable, notamment en Navarre ; cf. Cierbide Martinena (1988). 54. Le premier livre imprimé en Pays Basque le fut par Brocar à Pampelune en 1489, mais cet imprimeur quitta la Navarre en 1501, et il n'y eut pas d'imprimerie jusqu'en 1546, année où un imprimeur s'installa à Estella ; c'est celui-ci qui imprima le catéchisme d'Elso en 1560 (Goñi Gaztambide 1995). En dehors de la Navarre, le premier imprimeur fut Mares qui s'installa à Bilbao en 1576 (il imprima la célèbre apologie du basque de Poza De la antigua lengua y poblaciones de las Españas... en 1587), et le second P. Cole de Ibarrarena, qui fut l'imprimeur du catéchisme bilingue de Betolaça en 1596. Le premier imprimeur à s'installer en Guipuzcoa fut Borgoña (Saint- Sébastien 1586) ; sur l'histoire de l'imprimerie en Pays Basque, voir Arana Martija (1994). A Bayonne, il est fait mention d'une brochure imprimée à deux reprises par J. Merlet en 1607 et 1608, mais il est probable qu'il s'agissait d'un imprimeur itinérant (Godinot 1965, Desgraves 1972). Le premier livre connu imprimé à Bayonne est une réédition du Trésor trilingue de Voltoire (1642). Selon les indications de Desgraves (1972, 1974), les textes basques eurent un rôle important dans l'histoire de l'imprimerie bayonnaise au 17ème siècle et même au 18 ème siècle, puisqu'une grosse moitié des impressions concernaient des textes basques. 55. Outre les éditions elles-mêmes, on a un exemple de l'importance du castillan dans le développement de l'imprimerie dans les provinces basques, par le fait que les premiers imprimeurs exportaient leur production vers la Castille. Perez Goyena a publié l'extrait d'un imprimé de 1569 dans lequel A. Anvers. imprimeur à Pampelune. se plaint de ce que l'exportation de ses imprimés vers le Royaume de Castille est empêchée en raison d'un fort protectionnisme, ce qui menace son activité : (22) Il a été interdit qu'aucun livre imprimé en vulgaire roman hors du Royaume de Castille pénètre dans ledit Royaume et comme ce Royaume [de Navarre] est petit, et qu'on y parle basque dans sa plus grande partie, on y vend fort peu de ce qui s'y imprime, de sorte que si l'on ne pouvait vendre en Castille le suppliant subirait de grands dommages, et ne pourrait maintenir sa maison. (Perez-Goyena 1947, 1 : 128) 56. Le reste du Guipuzcoa (en gros, la partie occidentale de parler biscayen), comme la Biscaye et l'Alava étaient rattachés à l'évêché de Calahorra. 57. Le diocèse de Pampelune avait réagi de façon très précoce aux excès auxquels le Concile de Trente devait s'efforcer de remédier. Goñi Gaztambide(1947 : 145) considère que l'effort de redressement et de rénovation fut entrepris dans le diocèse navarrais au 16ème siècle, avant même la fin du concile de Trente. 58. Goñi Gaztambide (1947 : 141) fournit des indications très précises relatives à la formation supérieure dans le clergé du diocèse en 1577 : 25 docteurs, 111 licenciés eta 127 bacheliers, soit au total 263 gradués (avant même la création des universités). Vergara Ciorda (1991 : 38) indique

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qu'en 1594 le clergé du diocèse comprenait 9000 clercs, pour 160 000 habitants, soit un clerc pour 17 habitants. Si l'on admet qu'entre 1577 et 1594 le nombre des gradués resta semblable, on voit que 3% du clergé environ était gradué, ce qui est à la fois peu mais aussi beaucoup pour le siècle, puisque dans d'autres diocèses on a 1 %. Au 17 ème siècle, le collège le plus important pour la Navarre fut celui des Jésuites : il eut bientôt 450 étudiants, 500 en 1620 et 600 à la fin du siècle (Goñi Gaztambide 1947 : 213). 59. En réalité, le succès de ces universités, en particulier de celle d'Irache, fut très relatif, mais ce point n'est pas décisif dans le contexte de notre propos ; voir à ce sujet Martinez Arce (1999). 60. Le latin était enseigné dans les villes de quelque importance de Navarre et du Guipuzcoa dans le diocèse de Pampelune : Depuis ta fin du 15ème siècle le diocèse de Pampelune s'était vu contaminé par la fièvre humaniste qui secouait l'Europe et chaque ville importante voulait avoir son école de grammaire (école secondaire). Au I6ème siècle il y avait des classes de latin à Pampelune, Sangüesa, Otite, Tafalla, Puente la Reina, Tolosa, Saint-Sebastien et Uncastillo (Goñi Gaztambide 1947 : 210). Par ailleurs. Vergara Ciorda (1991 : 39) mentionne les enseignements dispensés dans certains couvents, comme les Franciscains de Pampelune, Tolosa et Mondragon et les dominicains de Pampelune et Estella. 61. Les juntes de Guipuzcoa délibérèrent en 1721 qu'il y aurait dans chaque village de la province un instituteur ; cf. Cortina (1986 : 29). 62. La famille d'Ignace de Loyola fonda en 1600 une école élémentaire à Azkoitia. Son programme devait comprendre théoriquement l'apprentissage de la lecture, l'écriture, la numération, la doctrine chrétienne et la grammaire latine. Mais, selon Goñi Gaztambide (1947 : 213), ce n'est qu'en 1732 que le latin y fut effectivement enseigné. 63. La question de l'application de ce type de dispositions est controversée. Torrealdai (1998 : 7) indique qu'en 1624, 1625, 1628, pour le moins, le Corregidor empêcha pour ce motif divers représentants de villes d'assister à l'assemblée des juntes. 64. L'usage d'un objet symbolisant l'interdiction de parler basque à l'école est attesté à Beasain (Guipuzcoa) en 1730, sous la forme d'un anneau ; cf. Torrealdai (1998 : 15). 65. Par la suite, Eguino consacra son énergie à défendre les vues de Larramendi. Les Extractos de 1775 mentionnent un manuscrit dont il était l'auteur et dans lequel il défendait la thèse de l'universalité exclusive du basque en Espagne dans l'antiquité (p. 118-122). 66. Jimeno Jurίo (1995 : 59) indique que dans la Navarre du 16 ème siècle le castillan est d'usage général dans tous les textes juridiques, tant civils que religieux : Toute la documentation des procédures notariales, des tribunaux civils et ecclésiastiques, des municipalités, des paroisses et couvents est écrite en castillan : de même une grande partie des livres. 67. Ce point est incontestable. Ceci ne veut pas dire qu'il n'y eut pas quelques tentatives pour enseigner le basque de façon isolée et sans doute tardive. Cardaberaz (1761 : 18-19) évoque cette situation tant pour l'enseignement de latin, que pour l'enseignement de la lecture aux enfants, puisqu'il évoque l'activité d'une maîtresse qui apprenait également basque, castillan et latin aux enfants à partir de six ans. 68. Larramendi tenait en haute estime l'activité de ces Franciscains, en particulier en ce qui concerne la langue (Corografía de Guipuzcoa : 309-310). 69. Il y a une coïncidence entre les efforts de l'Académie de la langue espagnole en matière d'unification et de fixation des formes et le centralisme impulsé par Charles III. La grammaire de l'académie que la RSBAP veut promouvoir vient d'être publiée (1771) ; cf. Sarmiento (1992) 70. La lettre est perdue. On ne la connaît que par ce qui en est dit dans les Extraits [Actes des assemblées annuelles de la société] de l'année 1772. Elle y est décrite comme datée du 24 juillet 1772 et écrite depuis Armiñon, l'auteur ayant utilisé une écriture contrefaite et employé un style satirique. La Commission en principe ne répondait pas aux écrits anonymes, mais avait jugé de faire une exception pour cette lettre dans sa partie en relation avec les écoles publiques, car l'érudition et les autorités [les auteurs que l'anonyme mentionnait dans sa lettre, à savoir Mayans, Barbadiño,

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Marsio, l'abbé Fleury, Lamy et Lancelot] pourraient préoccuper certains, si l'on ne répondait aux erreurs sur lesquelles elle se fonde (Extrados del Año 1772 : 98). Il est difficile d'interpréter le fait que le protestataire ait cru devoir dissimuler son nom et son écriture. S'agissait-il d'un faux anonymat, chacun connaissant en réalité l'auteur de la lettre ? En tous les cas, cette situation montre une crainte en un temps où le pouvoir royal avait adopté une attitude agressive en matière linguistique : interdiction par le comte Aranda au nom du conseil de Castille d'imprimer des livres qui n'étaient pas en castillan, prononcée à l'occasion de l'interdiction d'imprimer la vie de Saint Ignace de Cardaberaz (1/11/1766) ; obligation d'enseigner en castillan (déclaration royale du 23/06/1768) ; obligation d'employer le castillan dans les livres de commerce (déclaration royale du 23/12/1772). Cette politique se situait dans un contexte plus général où le Roi et ses ministres ambitionnaient de mettre en œuvre une forte politique dirigiste en matière culturelle, celle-ci se manifestant dans ses aspects répressifs par la censure à l'égard de ce qui sortait du contrôle royal, et notamment à rencontre des œuvres d'imagination, du théâtre baroque et de la littérature de colportage ; cf. Rodriguez Puertolas(1987 : 2,45). 71. Le programme prévoyait que l'enseignement de l'allemand et de l'anglais se limiterait à la connaissance passive (compréhension et traduction), ce qui était considéré comme suffisant pour l'usage programmé, qui réservait ces langues à certaines matières de l'enseignement dit particulier, à savoir, le commerce, la politique et les sciences métalliques. (Extractos del Año 1775 : 172) 72. C'est à l'occasion des événements révolutionnaires (à commencer par les cahiers de doléances du Labourd) que. pour la première fois, le basque fut utilisé dans le registre politique, selon une démarche assez semblable à celle qui avait été celle des clercs lors du développement de la réforme catholique. Toutefois, pour certains révolutionnaires, les pratiques bilingues, en pratique toujours orientées de manière unique : français (source) → basque (cible), ne se concevaient que comme des étapes intermédiaires nécessaires avant l'extinction du basque, à laquelle devait conduire le développement de l'instruction républicaine, conçue dans l'idéologie nationaliste caractéristique du temps comme devant être linguistiquement uniforme. La formulation la plus crue de cette conception apparaît dans une correspondance de Dithurbide à Grégoire, publiée dans Oyharçabal (1994, annexe 1) : la voie des traductions est la seule qui puisse mettre les lois à la portée des habitants de ces pays [Alsace, Bretagne et Pays Basque], et leur faire comprendre leurs droits et devoirs, tandis que l'institution des écoles préparera la génération future à ne parler que la langue de la République.

INDEX

Thèmes : littérature, philologie Mots-clés : littérature basque, politique linguistique Index chronologique : 17e siècle, 18e siècle

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AUTEUR

BERNARD OYHARÇABAL

(CNRS, IKER, UMR 5478) [email protected]

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Note sur les phrases complexes à protase corrélative du basque

Georges Rebuschi

1. Introduction

1 L'objectif central de cet article-ci est le suivant1 : reprendre le § 241 de la Grammaire [...] de Lafitte (1962, p. 105) consacré aux « relatifs indéfinis en ere » et à la structure des phrases dans lesquelles on les trouve, sur la base des acquis de la linguistique des vingt dernières années. Dans cette perspective, j'essaierai de monter en particulier que les « relatifs indéfinis en ere » ne sont en fait pas des relatifs – mais des éléments wh- non- relatifs, que la présence, dans la principale, d'un pronom résomptif appartenant « à la série [du démonstratif] hura » n'est pas un artifice stylistique typique de l'euskara, que le pronom haina que les « anciens » lui substituaient (parfois !) n'est pas un simple pronom, mais un élément quantificationnel, et enfin (et surtout) que la conjonction eta qui apparaît soit en tête de la principale, soit immédiatement après l'indéfini, n'est pas non plus un simple élément décoratif « renforçant » quoi que ce soit, mais une tête fonctionnelle qui est toujours présente, même si elle n'est pas réalisée, et qui contribue à l'interprétation globale de la phrase complexe.

2 Si je vais donc être amené à prendre le contre-pied d'à peu près tout ce qui est dit dans cette section 241, ce n'est pas pour le simple plaisir d'effectuer un exercice d'application de la « philosophie du non » chère à Bachelard : on verra au contraire que ces résultats permettent d'unifier le traitement des phrases complexes conditionnelles et des phrases complexes à corrélatives, en ramenant les secondes à une variante morpho- syntaxique des premières — ce qui, si l'analyse est dans la bonne direction, n'est somme toute pas tout à fait trivial.

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2. Les phrases complexes à protase corrélative (PCPC) : éléments de description et problématique

3 2.1. Il s'agit de constructions complexes comme celle de (1), où l'on a deux propositions ; la première (ou protase) contient un élément Wh- (dit NZ en basque), ainsi qu'une marque de subordination (non-complétive) ; la raison pour laquelle j'évite d'employer l'expression « relatives libres » pour m'y référer apparaîtra dans les sections 3 et 42. Crucial pour nous sera le fait que la seconde, l'apodose, contient (optionnellement) d'une part un pronom de rappel ou pronom corrélat (hura ci- dessous) et d'autre part qu'elle peut être introduite par le mot eta, qui est par ailleurs une banale conjonction de coordination.

(1) Nork ere huts eginen bait du, (eta) (hura) gaztigatua izanen da qui-E ere faute faire-FUT bait AUX et lui puni être-FUT AUX « Celui qui commettra une faute sera puni » lit. « Quiconque3 fera faute, (et) (lui) sera puni »

4 Ces constructions sont attestées dans tout le domaine oriental (sauf dans les documents de roncalais auxquels j'ai eu accès) depuis les premiers textes, qui datent du 16e siècle, jusqu'au 20e siècle ; la marque de subordination de la protase est (presque) toujours bait- dans les dialectes du Nord, et soit -(e)n, soit, plus rarement, bait- dans ceux parlés en Navarre. Par ex., dans la trad. de l'Evangile selon St. Jean par Joaquin Lizarraga d'Elkano, texte de la fin du 18e ou du début du 19e, j'ai relevé quinze corrélatives en - (e)n, mais une seule en bait-, citée en (2) [Jn 14,21]4 :

(2) Nork ere bait itu ene manamenduak, ta guardátzen : ori dá onesten- nauéna. qui-E ere bait- les- a mes commandements et gardant celui-là est le- qui-m'aime lit. « Quiconque a mes commandements et les retient, celui-là est celui qui m'aime ». [baititu = bait ditu]

5 Ces phrases complexes sont aussi attestées dans les dialectes occidentaux, du moins dans leurs plus anciens monuments, cf. (3a) – où baist- est une variante de bait-5 – et (b), probablement déjà archaïsant – sinon, ce sont uniquement des constructions elliptiques, sans verbe fléchi et donc sans marque de subordination ou de dépendance dans la protase, qu'on y trouve, cf. (4) :

(3) [dialecte bizcayen] a Zelan baista oiala alakoa mendela. comment baist-est le-tissu telle/de-cette-sorte la-lisière « Comme est l'étoffe, ainsi (est) la lisière » (Refranes y Sentencias, 1596, n° 20) b Nortzuben pekatubak parkatu daikezubeza.n, parkatuko jakez, qui-pl-gén péchés pardonné vous-les-leur[SUBJ]-n pardonner- FUT AUX eta nortzubenak geratu daikezubeza.n geratuak izango dira. [=Jn 20,23] et qui-PL- GÉN-PL LAISSÉ AUX[SUBJ]-n laissés être-FUT AUX « Leurs péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, et ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus » (Astarloa 1816-18, cité in Arejita 1978 : 135) (4) [dialecte guipuzcoan] Nolako elizalde, alako abade. « Qual la ante iglesia, tal el abad » (Isasti 1625, n° 60)6

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6 2.2. Il existe diverses possibilités d'analyse des PCPC, qui sont autant influencées par les langues spécifiques étudiées que par les préférences théoriques des auteurs qui ont effectué ces études. La position que j'adopte peut se résumer par les points suivants :

(5) a Tant l'existence d'un pronom corrélatif que la possibilité pour la protase d'exhiber deux expressions wh- interdit une analyse par mouvement. b La conjonction qui introduit l'apodose est en fait une tête fonctionnelle conjonctive qui prend la protase comme spécificateur et l'apodose comme complément. c La phrase complexe ainsi construite, qui semble hériter son statut énonciatif (sa « force » dans les termes de Chomsky et Rizzi) de l'apodose, la reçoit en fait d'une tête C° qui prend la PCPC comme complément.

7 En ce qui concerne (5a), notons simplement ici que s'il y a deux expressions wh- dans la protase, et donc deux pronoms corrélatifs dans l'apodose, il est tout simplement impossible de considérer que la première a été extraite de l'une de ces deux positions dans l'apodose, car (i) elle ne peut avoir été extraite des deux simultanément, et (ii) il faudrait reconnaître de toute manière que l'autre pronom n'est pas une trace « déguisée » en résomptif, mais bien un pronom généré dans la base dans cette position. En voici deux exemples bas-navarrais, le premier du 16e siècle, et le second du 20e :

(6) a B. d'Etxepare (1545, Doctrina Christiana, v. 14) Nork zer hazi erein [baitu] biltzen dizi komunki. qui-e quelle semence semé bait-aux récoltant aux communément « On récolte ordinairement le grain qu'on a semé » [trad. de Lafon] lit. ‘Qui quel grain il sème, (il le) récolte communément.’ b Nork zertan baitu bere burua bilhatzen alabainan, qui-e en-quoi bait- AUX lui-même cherchant en-effet hartan ere du hark bere amodioa galtzen. (Léon 1929., p. 148 : 3.5.6) en-cela même AUX lui son amour perdant « En effet, en quoi qu'on se recherche soi-même, en cela-même on perd son amour. »

8 De son côté, (5b) représente tout simplement l'hypothèse nulle, i.e. celle qui exige le moins de justifications indépendantes, du moins dans un cadre théorique qui admet les têtes fonctionnelles (« Gouvernement et liage » ou GB depuis Barriers, le Programme minimaliste ou PM chomskyen depuis une dizaine d'années, l'Antisymétrie de Kayne). En effet, même dans les modèles qui admettent plusieurs adjonctions, comme le PM, on voit mal comment mettre sur le même plan l'adjonction de la conjonction eta d'une part, et celle de la protase elle-même de l'autre7. De plus, rien ne justifierait l'ordre protase + conjonction plutôt que l'ordre inverse.

9 Quant à (5c), cf. Rebuschi (sous presse) ; il suffit de mentionner ici qu'une PCPC entière peut fonctionner comme une complétive, avant ou après des verbes comme erran ‘dire’ ou uste izan/ukan ‘croire’ : c'est alors le verbe fléchi de l'apodose qui porte le suffixe de subordination requis, -(e)la. 10 La problématique de l'interface entre la structure syntaxique et l'interprétation peut alors se concevoir de la manière suivante : quelles sont les contributions respectives (i) du pronom en wh- de la protase, (ii) de cette protase considérée globalement, (iii) de la conjonction, et (iv) du pronom corrélat contenu dans l'apodose ? Il va de soi qu'une démarche compositionnelle exige que l'on traite simultanément de toutes ces questions,

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ce que fort peu d'auteurs ont en fait tenté de faire jusqu'ici, se contentant généralement de ne traiter que de la valeur de la protase, ignorant le rôle de la conjonction (qui n'est pas toujours visible, ceci expliquant alors cela), et laissant à une théorie des pronoms résomptifs (toujours à construire) ou à une interprétation peu scrupuleuse des travaux d'Evans sur les pronoms dits « de type-E » le soin de se charger de la non-contribution sémantique du corrélat, etc. Nous allons examiner ces questions dans les deux sections suivantes.

3. Sur les protases corrélatives : nature et position de l'élément wh-

11 3.1. La question de la structure interne des protases corrélatives et celle de la nature et de la position exactes de l'élément, ou des éléments, Wh- qu'on y trouve sont intimement liées : s'agit-il de pronoms (ou adjectifs) interrogatifs, ou de relatifs, ou encore d'autre chose, et quelle est leur contribution à l'interprétation de cette subordonnée disloquée à gauche ?

12 La question de la nature des pronoms wh- n'est pas oiseuse, parce que la sémantique de ces éléments n'est pas la même, et parce que, depuis le travail de Rizzi (1997) et bien d'autres à sa suite, on a de bonnes raisons de penser que la généralisation de Chomsky (1977) dans un article au titre explicite, ‘On Wh- Movement’, est partiellement une surgénéralisation, en ce sens que, syntaxiquement, les pronoms relatifs et les pronoms interrogatifs n'occupent pas la même position périphérique, les premiers se trouvant dans le spécificateur de la tête fonctionnelle la plus haute, et les seconds, dans celui d'une tête fonctionnelle inférieure, cf. (7)8 :

13 Peu importe en fait la nature exacte de la tête et de la projection intermédiaire. Ce qui compte, sur le plan empirique, ce sont les différences que l'on peut observer entre la position « REL » (pour relatif) et la position « INT » (pour interrogatif) dans cet arbre. De ce point de vue, le hongrois est une langue particulièrement significative, parce que, comme le montrent les ex. (8a,b) empruntés à Lipták (2000), cette langue possède les deux types de protases corrélatives.

(8) a A.ki a.mi.t kér, az.t elve.het.i. [Lipták 2000, ex. (1)] qui [REL] quoi [REL, ACC] veut cela-ACC il-peut-le-prendre ‘Everyone can take what he wants’ /‘chacun peut prendre ce qu'il veut.’

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b Ki mit kér, azt elveheti. [(ibid.), ex. (3)] qui [INT] quoi [INT,ACC] (id.)

14 Cet auteur (dont l'analyse est indépendante du travail de Rizzi) indique crucialement à cet égard que les propriétés syntaxiques des deux types de protases ne sont pas les mêmes ; en particulier, une expression quantifiée et un XP focalisé peuvent suivre un wh- relatif, mais pas un wh- interrogatif, cf. (9a,b) [ses ex. (5a,b)] :

(9) a Aki amit tegnap PETERNEK adott, qui [REL] quoi [REL,ACC] hier à-Pierre[+F] donna azt sosem látja vissza. cela-ACC jamais il-le-verra à-nouveau ‘Ce que quiconque a donné hier à Pierre, jamais il ne le reverra.’ b *Ki mit... tegnap PETERNEK adott,... qui[INT] quoi [INT,ACC]

15 3.2. En basque, il y a deux types d'arguments que l'on peut donner pour dire que les éléments wh- des protases corrélatives ne sont pas des relatifs. D'une part, sur le plan lexical, le paradigme des interrogatifs et des relatifs (tels qu'ils étaient employés jusqu'au 19e siècle, puisqu'un opérateur phoniquement vide les a usuellement remplacés depuis) n'est pas strictement identique, car dans les interrogatives qui ne sont pas liées étroitement au contexte ou au « discours », le pronom qui correspond à des référents humains était, et reste, nor (quoique, il est vrai, il tende à être remplacé par zein chez de nombreux locuteurs de guipuzcoan), tandis qu'à de très rares exceptions près, le pronom relatif pour les humains, aussi longtemps qu'il a été employé, était zein (ou zoin) ; dans le domaine des locatifs, de la même manière, lorsqu'il n'y a pas un ensemble de référence clos et de petite taille, l'interrogatif a toujours été non, nun, alors que le relatif était zeintan, zointan. Or, dans les protases corrélatives, et, à nouveau, lorsqu'il n'est pas fait référence à un domaine connu et réduit, ce sont les mots nor et non qui sont employés. (Signalons aussi qu'Altube (1929, p. 139-140) proposait déjà explicitement un rapprochement entre les structures qui nous intéressent et des enchaînements de questions et de réponses.)

16 D'autre part, syntaxiquement, le basque offre des exemples analogues à ceux que Lipták cite pour les corrélatives à interrogatif en hongrois, cf. par ex. (10) avec un quantificateur universel distributif qui précède l'élément wh-/NZ dans la protase (ce qui semble indiquer, il faut le remarquer, qu'une tête et une projection de quantifieur doivent s'intercaler au-dessus de la tête et de la projection de Focus – si c'est bien là la projection dont la position de spé-cificateur accueille l'élément wh-) :

(10) Nor-bera ZONBAT ere baita oldartzerat uzkurrago, chacun combien ere bait- est à-s'attaquer plus-veule hanbatez da egunetik egunerat ahulago... d'autant il-est du-jour au-jour plus-faible ‘Plus on met de de langueur à le repousser [=le mal], plus on s'affaiblit de jour en jour...’ [L.Léon (1929, p. 35, 1.13.5)]

17 Le système de Rizzi, cf. (7), prévoit aussi qu'un topique puisse précéder un interrogatif, mais pas un relatif – et les données de Lipták le confirment. Or l'exemple (11) nous donne exactement cela : un XP topicalisé à gauche d'un syntagme en wh-.

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(11)Bertutean NOR ere baita barnago sartzen, [L. Léon (id., p. 127, 2.12.7)] dans-la-vertu qui ere bait- AUX plus-dedans entrant hak berak maiz kurutze dorpeagoak ditu kausitzen. celui-là-E même-E souvent croix lourdes AUX trouvant ‘Souvent, plus un homme pénètre dans la vertu, plus il trouve ses croix pesantes.’

18 Il paraît donc bien établi que les éléments wh- des corrélatives basques ne sont des relatifs ni du point de vue lexico-morphologique, ni du point de vue syntaxique (sur le rôle sémantique de maiz ‘souvent’, cf. 4.2.4 infra). La question se pose donc de savoir s'il y a des corrélats sémantiques à cette conclusion.

4. Aspects sémantiques de la construction

19 4.1. En fait, dire que nor ou zer (et les autres éléments wh- du basque) dans les protases corrélatives n'occupent pas la position d'un relatif ne veut pas nécessairement dire qu'ils n'en ont pas l'interprétation dans le contexte qui nous intéresse, de même que dire qu'ils se rapprochent morpho-lexicale-ment et distributionnellement des interrogatifs ne signifie pas qu'ils en ont la sémantique (quelle qu'elle puisse être). Par ailleurs, comme on l'a dit plus haut, cela n'aurait aucun sens de se demander quelle contribution sémantique ces éléments apportent sans tenir compte en même temps de la structure globale de la phrase complexe dans laquelle ils se trouvent, et de la contribution sémantique individuelle des autres éléments pertinents.

20 De ce point de vue, on peut construire le problème comme suit : si un élément wh- est extrait d'une proposition (disons d'un IP pour faire simple, mais on pourrait aussi bien dire ici d'un TP ou d'un AgrSP), au niveau interprétatif, sa trace sera traitée comme une variable. En d'autres termes, la traduction de l'IP en question sera ce qu'on appelle une proposition ouverte (angl. open proposition), c'est-à-dire un objet sémantiquement mal formé. 21 Or il existe trois types d'opérateurs qui peuvent, en liant la variable libre, transformer une proposition ouverte en une expression bien formée. Si donc nous trouvons parmi ces opérateurs celui qui, en harmonie avec la contribution des autres éléments pertinents de la phrase complexe prise dans sa totalité, peut lier correctement la variable, alors nous pourrons dire que cet opérateur est la traduction du wh- qui nous intéresse. Nous allons donc considérer ces opérateurs un à un, et chercher à voir dans quelle mesure ils sont compatibles (ou non) avec certaines données (plus ou moins) spécifiques au basque. 22 4.2. Tout d'abord, il y a les quantificateurs, qu'ils soient standard (comme tout ou il existe au moins un ... ) ou non (comme beaucoup, peu, un peu plus de 25,8 % etc.) : en étant préfixés à une proposition ouverte, ils fournissent avec celle-ci une proposition quantifiée close, et donc susceptible d'être (in-)validée. 23 4.2.1. Dans un travail que j'avoue trouver discutable aujourd'hui (Rebuschi 1999), j'avais cru pouvoir, sur une base translinguistique relativement large, proposer que les langues à corrélatives dans lesquelles les éléments wh- sont des interrogatifs, et non des relatifs, sont aussi des langues dans lesquelles ces corrélatives s'interprètent de façon au moins non-marquée comme universelles ou génériques, alors qu'à l'inverse, en hindi (ou en latin, qui employait qui et non quis pour les humains), c'est-à-dire dans les

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langues qui emploient des relatifs lexicalement ou morphologiquement au moins parfois distincts des interrogatifs, c'est l'interprétation des protases comme des relatives restrictives qui est la plus normale – avec de simples extensions vers le sens des relatives libres. 24 Si ce fait n'est pas absolument faux, et si la formulation adoptée ici permet l'existence de langues à structures corrélatives des deux types avec ambiguïté (comme en hongrois supra) ou sans ambiguïté, comme en allemand, cf. (12a,b) ci-dessous9, il y a des arguments de taille qui s'y opposent.

(12) a Wer Ohren hat zu hören, der höre ! Qui[INT] oreilles a pour entendre celui-là entende ‘Que celui [quel qu'il soit] qui a des oreilles pour entendre entende !’ b Der die Hand mit mir in die Schüssel getaucht hat, qui[REL] la main avec moi dans le plat trempé (aur)a der wird mich verraten. (Mt 26,2) celui-là AUX me trahira ‘Celui [+spécifique= la personne particulière] qui aura trempé sa main avec moi dans le plat, c'est lui qui me trahira.’

25 4.2.2. Ainsi, d'un côté, du point de vue strictement théorique, on doitse demander comment un quantificateur par exemple universel (ou encoregénérique) pourrait s'extraire de la proposition (syntaxique) de statut subordonné, et prendre l'ensemble de la structure complexe, bi-propositionnelle,sous sa portée. Noter de ce point de vue que les expressions universellementquantifiées de (13) n'ont précisément pas une grande portée :

(13) a Si tout le monde te critique, alors tu pourras être malheureux. b Si tu trouves toutes les réponses, tu gagneras 10 euros.

26 En effet, dans de tels exemples, le quantificateur de la protase conditionnante ne prend pas l'ensemble de la phrase complexe sous sa portée ; ainsi, les conditions de vérité de (13b) sont radicalement différentes de celles d'une phrase où la quantification universelle aura la portée la plus grande, comme : Pout toute réponse x [=pour quelque réponse x que ce soit], si tu trouves x, tu gagneras 10 euros. Par parité de raisonnement, on voit mal comment une protase corrélative dont l'élément wh- serait de manière inhérente générique ou universel pourrait quantifier la PCPC entière.

27 4.2.3. Un second problème est lié à l'interprétation du pronom de reprise ou corrélatif, cf. hura (parmi d'autres, en basque), tot (en russe), der (en allemand), us (en hindi), etc. Il est vrai qu'il existe des théories séman tiques qui traitent parfois les pronoms de manière non-compositionnelle (la DRT), mais ces théories sont construites précisément pour rendre compte de phénomènes qui vont au-delà de la phrase, même complexe, ou encore ne tiennent pas compte du tout de cette notion10. Mais s'il est possible de traiter parfois les pronoms corrélats comme de pures variables, cela ne paraît absolument pas possible lorsque ces pronoms sont emphatiques, comme la forme complexe hak berak dans (11) supra11, ou encore lorsqu'ils sont remplacés par ce que j'ai cru pouvoir analyser comme un quantificateur universel « déguisé » en pronom (et alors nécessairement associé dans son interprétation à une position vide), haina (cf. Rebuschi 1997, 1998). 28 Observons ainsi certaines de ses propriétés. On le trouve (entre autres contextes) dans des phrases du type de (14), qui ne diffèrent de (1) que par le pronom en question :

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(14) Nork ere huts eginen bait du, (eta) haina gaztigatua izanen da qui-E ere faute faire-fut bait aux, et lui puni être-fut aux ‘Quiconque commettra une faute sera puni’

29 Il faut en particulier noter que haina, attesté dans les textes labourdins depuis le 16e siècle jusqu'au 19e, ne se substituait jamais aux pronoms personnels de 3e personne (en fait, des démonstratifs, comme hura), lorsqu'il reprenait une relative « semi-libre » 12 disloquée et explicitement quantifiée par guz(t)ia(k) ou oro ‘ tout/tous’, cf. (15a-c)13 :

(15) a huts egiten du.en.a, hura / haina gaztigatua izanen da faute faisant il- l'a-C°-DET lui h. puni être-FUT AUX lit. le qui [=celui qui] fera une faute, celui-là sera puni’ [cf. (1)] b huts egiten du.en guz(t)i.a, hura/*haina... faute faisant il-l'a-C° tout- DET lui h. lit. ‘tout le qui fait...’ c huts egiten du.te.n guz(t)i.ak, hek/*hainak... faute faisant ils-l'ont-C° tout-PL eux haina-PL lit. ‘tous les qui font...’

30 Par ailleurs, haina est totalement inattesté dans les phrases soumises à quantification adverbiale (comme, à nouveau, dans (11) supra, où figure dans l'apodose l'adverbe maiz ‘souvent’ — j'y reviens en 4.2.4 ci-dessous).

31 Voici pour finir un argument peut-être plus anecdotique (il ne figure pas dans Rebuschi (1997,1998)), mais qui est cependant, à mon avis, significatif en ce qui concerne la contribution sémantique de haina à la phrase dans laquelle il apparaît : dans les trois traductions labourdines de la période pertinente, à savoir, celles de Haraneder (1740), de Harriet (1855) et Duvoisin (1859-65), qui ne se correspondent mot-à-mot que très rarement, les trois textes emploient le pronom haina pour rendre le omnis latin de Mt 19,29, comme indiqué en (16).

(16) Mt 19,29 Et omnis, qui relique rit domum, velfratres [...] propler nomen meum, centuplum accipiet [...] ‘Et quiconque délaissera sa maison ou ses frères [...] pour moi (en) recevra le centuple.’ a Eta nork ere utziko bai[t]ditu bere etxea edo bere anaiak [...] ene izena gatik, hainak izanen duela ehunetan hainbertze. (Haraneder 1740) b Eta nork ere utziko baititu bere etxea, edo bere anaiak [...] ene izena gatik, hainari ordain emanen zaio ehunetan bertzen hainbertze [...] (Harriet 1855) c Eta nork ere ene izenaren ariaz utziko baititu etxea, edo anaiak [...], hainak ehunkun izanen [...] duela. (Duvoisin 1859-65)

32 4.2.4. Un autre argument qui va contre l'hypothèse d'une quantification universelle inhérente des protases corrélatives basques est fourni par la quantification adverbiale (ou « non-sélective ») à laquelle je viens de faire allusion à propos de (11), et qui est naturelle dans cette langue dans les contextes qui nous préoccupent. Considérons de ce point de vue les trois traductions suivantes, qui s'étalent sur trois siècles maintenant, d'un même passage de l'Imitation, déjà citée, de Thomas A Kempis (3.12.4) 14 (voir aussi (6a) supra, qui date du 16e siècle, et qui contient l'adverbe komunki) :

(17) a Nondik ere hartzen baitute atsegin, d'où ere prenant bait— AUX plaisir hainitzetan handik izaiten dute min eta dolore. (Pouvreau, 1669) souvent de- là ayant AUX peine et douleur lit. ‘D'où (qu’)ils tirent leur plaisir, souvent, (c'est) de là (qu’)ils ont leur peine et leur douleur.’ b Maiz zerk ere egin baitu hekien bozkariorik handiena, souvent quoi-E ere fait bait-AUX leur joie la-plus-grande hark kausatzen ere du hekien dolorerik

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minena. (Chourio, 1720) cela-E causant aussi AUX leur douleur la-pire lit. ‘Souvent, quoi que ce soit qui leur donne leur plus grande joie, (c'est) cela (qui) leur cause aussi leur plus grande douleur.’ c Zertan ere baitute kausitzen atsegin, hartan ere dute en-quoi ere bait- AUX trouvant plaisir en-cela aussi AUX ardura nasaiki biltzen bihozmin. (Léon, 1929) souvent abondamment recueillant douleur-morale lit. ‘En quoi que ce soit qu'ils trouvent leur plaisir, (c'est) aussi en cela (qu’)ils récoltent souvent (un) chagrin abondant.’

33 S'il est intéressant de constater que ce ne sont pas les mêmes arguments ou adjoints adverbiaux qui font l'objet du dédoublement corrélatif, il faut surtout noter que l'interprétation naturelle ici de souvent n'est pas une interprétation qui revient à quantifier des moments, ou des occurrences d'événements, mais une interprétation dite non-sélective telle que ces phrases reviennent à dire qu'il est vrai de beaucoup de gens qu'ils trouvent leur pire chagrin dans cela même où ils avaient trouvé trouvé leur joie la plus grande.

34 Si, d'une manière ou d'une autre, l'élément wh- initial des protases corrélatives ci- dessus devait déclencher une quantification universelle ou générique pour ces phrases complexes, on serait cependant forcé de se rabattre sur la quantification adverbiale littérale, car il est impossible de quantifier deux fois les mêmes variables (ou encore de laisser un quantificateur sans variable à lier, cf. le principe chomskyen dit de « Pleine interprétation », repris quelques années plus tard par les sémanticiens sous le slogan « Il est interdit de quantifier à vide »). Or si l'interprétation selon laquelle ‘il est vrai de tout individu qu'il trouve souvent sa plus grande peine dans ce dans quoi il avait auparavant trouvé sa plus grande joie’ n'est pas à strictement parler impossible, elle est très peu naturelle. 35 De ce point de vue, on peut aussi réexaminer l'ex. (11) supra, qui pose, de manière peut- être plus aiguë encore, le même problème, car on a du mal à imaginer que cette phrase veuille dire qu'un individu quelconque pénètre, sorte, et entre à nouveau, mais plus profondément, dans la vertu, et qu'il trouve alors souvent que sa croix est plus dure à porter : à nouveau, maiz ne quantifie pas les occurrences d'événements, mais les individus concernés15. 36 4.3. Le second type d'objet formel qui permet de clore une proposition ouverte est l'opérateur iota de Russell, éventuellement revu à la lumière de la méréologie de Lesniewki. L'objet ainsi obtenu, au niveau du CP, n'est alors plus une proposition, mais une entité ou un quantificateur généralisé, quelque chose comme : l'unique individu (maximal) qui a la propriété P. La question de l'interprétabilité de la phrase complexe devient alors au moins aussi compliquée que dans le cas précédent, en particulier lorsqu'une quantification générique ou universelle est donnée par le pronom corrélat de l'apodose, cf. (16), ou dans le cas d'une quantification non-sélective à partir d'un adverbe par ailleurs temporel comme maiz, ardura, hainitzetan dans (17). Notons par ailleurs que personne n'a jamais proposé qu'un opérateur (syntaxique) wh- se traduise par un opérateur (logico-sémantique) iota : lorsque Srivastav (1991) a proposé d'interpréter globalement les protases corrélatives comme des individus (pluriels) maximaux, elle a en effet eu recours à un changement de type dans la composante sémantique de sa description, se contentant de traiter la relative appositive comme une relative intersective ordinaire, c'est-à-dire se traduisant par une propriété (voir 4.4. ci- dessous). De plus, ce changement de type (réinterprété par Grosu & Landman (1998)

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comme une opération de maximalisation), dont je ne m'aventurerai pas à dire qu'il n'a pas lieu d'être postulé en hindi, est tout à fait exclu en basque pour les raisons quantificationnelles qui viennent d'être exposées16. 37 4.4. Le troisième moyen de faire d'une proposition ouverte une expression bien formée est de la préfixer d'un opérateur lambda qui lierait la variable libre. L'objet résultant est alors une propriété (ou, en extension, un ensemble d'individus ou d'objets qui se différencient de tous les autres par la possession de cette propriété). Dans le cas où les protases corrélatives s'interprètent comme des relatives restrictives, et où l'élément wh- est effectivement un pronom relatif, il n'y a aucune difficulté : il y a plus de 25 ans déjà que B. Partee proposait que la contribution sémantique d'un pronom relatif est précisément celle d'un opérateur lambda (Partee 1975) ; si donc la proposition ouverte correspond à IP, l'expression-lamba entière correspondra au CP, l'élément wh- se traduisant, tout simplement, par l'opérateur λ17 :

(18) a [cp wh-i C°[IP...t1...]]

b [λx[ ψ(x)]]

38 Il suivrait de cette approche que la corrélative, interprétée comme une propriété, lierait une variable de propriété contenue dans la traduction ou interprétation du pronom corrélat : c'est la solution adoptée dans Rebuschi (1997, 1998).

39 Mais on a vu plus haut que les wh- basques ne sont pas syntaxiquement des relatifs. Par ailleurs, même si les constructions corrélatives basques sont parfois (quoique rarement, en fait) employées pour faire référence à des individus spécifiques (au sens pragmatique ou énonciatif, c'est-à-dire à des individus connus du locuteur mais non de l'interlocuteur), je ne connais aucun usage strictement restrictif ou intersectif des protases corrélatives en basque ; or si les PCPC se traduisaient directement comme des expressions lambda et donc indiquaient des propriétés, on ne voit pas pourquoi elles ne pourraient pas servir à construire des relatives restrictives.

5. Vers une solution

40 Il faut donc ou bien se résoudre à une certaine distortion entre les données syntaxiques et les données sémantiques (ce que, pour des raisons méthodologiques, je préfère considérer comme un pis-aller, ou un constat d'échec, au moins temporaire), ou bien considérer qu'aucune des solutions envisagées à l'instant n'est satisfaisante.

41 5.1. Je souhaiterais donc terminer ce travail en proposant une autre approche, qui est au moins aussi compatible avec les données que l'hypothè se d'un wh- non-relatif qui serait malgré tout, sémantiquement, un opérateur lambda : le mot en wh- n'aurait simplement aucune propriété sémantique 18. Il aurait simplement le trait [+wh-] requis pour son mouvement, et sa fonction serait donc tout simplement de laisser une trace qui serait forcément inter prétée comme une variable libre. Dans ces conditions, le liage non-sélectif de cette dernière par un adverbe explicite (comme maiz, etc., ‘souvent’) ou implicite, mais relié au temps générique de l'apodose (la proposition principale) serait tout à fait naturel et automatique. La trace des wh- déplacésfonctionnerait donc exactement comme les indéfinis tels qu'ils ont été réanalysés dans divers travaux plus ou moins récents, travaux selon lesquels, contrairement à l'analyse usuelle, un indéfini comme quelqu'un dans (19a,b) ci-dessous n'est pas une expression quantifiée, mais

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précisément une variable libre dans la proposition minimale qui la contient, et à nouveau liée adverbialement ou génériquement par un opérateur issu de l'apodose (la proposition « conditionnée ») et ayant portée sur la phrase complexe dans sa totalité19 :

(19) a Si quelqu'un parle, Pierre l'écoute souvent. BCP, [humain’(x) & parle’(x) : écoute’(p’,x)] b Si quelqu'un parle, Pierre l'écoute. GÉN, [humain'(x) & parle’(x) : écoute’(p’,x)]

42 5.2. De ce point de vue, la parenté très étroite et évidente que le basque (parmi bien d'autres langues naturelles) offre entre les indéfinis et les wh- devient elle-même tout aussi naturelle, cf. les deux premières colonnes de (20) :

(20) nor ‘ qui’ norbait ‘ quelqu'un’ inor / nehor ‘ personne/qui que ce soit’ non ‘ où’ nonbait ‘ qlq part’ inon/nihon ‘ nulle part/où que ce soit’ zer ‘ quoi’ zerbait ‘ qlq chose’ ezer ‘ rien/quoi que ce soit’ etc.

43 Ce n'est évidemment pas un hasard si l'on retrouve le suffixe bait- dans la deuxième colonne : j'y reviens bientôt. Mais il y a plus. Du point de vue de l'interprétation des phrases complexes qui nous intéressent, il est clair qu'il y a une relation de paraphrase étroite entre les deux variantes de (21) :

(21) a Norbaitek huts egiten ba-du, (orduan) (hura) gaztigatua izanen da. quelqu'un-E faute faisant si-AUX alors celui-là puni être-FUT AUX ‘Si quelqu'un commet une faute, il sera puni.’ b Nork ere huts eginen bait du, (eta) (hura) gaztigatua izanen da. qui-E ere faute faire-FUT bait-AUX et lui puni être-FUT AUX ‘Celui qui commettra une faute sera puni.’ [=(18)] lit. ‘Qui que/qui fera faute, et lui sera puni.’

44 Dans les deux cas en effet, on peut considérer qu'un opérateur de géné-ricité lie deux occurrences d'une même variable, comme dans (22) :

(22) GENx [P’(x) : Q’(x)]

45 où P’ représente le prédicat de la protase, Q’ celui de l'apodose, et les deux points entre les deux propositions, le connecteur non-standard, puisque la quantification n'est ni universelle ni existentielle — si elle était universelle, comme l'adverbe beti (ere) ‘toujours’, ou le pronom haina, cf. les ex. de (16), l'imposeraient, on aurait la variante (23) :

F0 22 → (23) x[P’(x) Q’(x)]

46 De ce point de vue, en ce qui concerne les pronoms corrélats, on peut donc proposer que si les pronoms non-emphatiques (y-compris pro) se traduisent bien, dans les contextes pertinents, comme des variables liées par un opérateur non-sélectif ou adverbial, dans les autres cas, il faut en faire une analyse complexe, le pronom haina ou les emphatiques comme (hura) bera ‘celui-là et nul autre’ (cf. l'ex. (11) et la note 11) apportant une force quanti-ficationnelle propre à la phrase complexe prise dans sa globalité.

47 5.3. A observer soigneusement les rapports entre (21a) et (b), on voit que le choix lexical du connecteur linguistique (i.e. de la conjonction) qui unit les deux propositions syntaxiques est corrélé à la tête du premier CP, i.e. de la protase, ce qui est un

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phénomène bien connu sous le nom d'accord entre spécifieur et tête : on a la paire ba- et orduan d'une part, et la paire bait- et eta de l'autre. Techniquement, cet accord se décompose plus précisément entre (i) une percolation du trait distinctif, quel qu'il soit – mais qui serait non-interprétable si mon analyse est corrrecte – qui permet d'opposer les têtes ba- et bait- de la protase, vers la projection maximale CP de cette même proposition, et (ii) un « accord » entre la tête de la construction complexe (la conjonction, orduan ou eta) et la propriété que le CP qui occupe son spécificateur a ainsi héritée de sa propre tête – pour des arguments en faveur de l'hypothèse que ces conjonctions sont bien des têtes fonctionnelles, cf. Rebuschi (sous-presse). 48 Qui plus est, à l'intérieur même de la protase, on a aussi une forme d'accord entre la tête et le spécifieur, puisque, on y revient enfin, l'élément bait- figure ou bien sous C°, ou bien sur le pronom dont la position argumentale est interprétée comme une variable. 49 Mais il y a plus. Dans divers textes, j'ai relevé la présence de ba- là où l'on attendrait bait-. Le premier dans l'ordre chronologique pose aussi un problème d'emprunts entre dialectes, car, comme l'a fait observer P. Altuna, une structure corrélative comme (24), qui contient un verbe fléchi, n'est pas usitée en guipuzcoan (voir (5) et les commentaires qui s'y rapportent). Les seconds exemples sont en baztanais du 19e siècle, cf. (25). Enfin, les troisièmes sont dans un autre dialecte encore, et d'une autre époque, à savoir, en bas-navarrais de la seconde moitié du 20e siècle, cf. (26).

(24) J.A. Ubillos (1785, p. 151) [=Jn 20,23] Nori ere barkatzen BAdiozkatzue bekatuak, ta haei à-qui ere pardonnant ba-vous-les-leur(AUX) péchés, et à-eux barkatuko zaizte, ta nori ere ez BAdiozkatzue barkatzen pardonner-FUT ils-leur-sont et à-qui ere NEG ba-AUX pardonnant ta haei ez-zaizte barkatuko. et à-eux NEG-AUX pardonner-FUT ‘A [ceux à] qui vous pardonnerez leurs péchés, ils leur seront pardonnés, et à [ceux à] qui vous ne les pardonnerez pas, ils ne leur seront pas pardonnes.’ (25) B. Echenique (1857) a Artakotz, nork ere austen BAdu20 manamendu ttipi otarik bat, [...] pour-cela qui-E ere brisant s'il- AUX commandement petit de-ces un arras ttikia deitua izain da zeruetako erreinuan ; très petit appelé être-FUT AUX céleste dans-le- royaume baño nork ere egiten BAdu, eta erakusten BAdu, ura mais qui-E ere faisant s'il-AUX et montrant s'il-AUX, celui-là deitua izain da andia zeruetako erreinuan. (Mt 5,19) appelé être-FUT AUX grand céleste dans-le-royaume lit. ‘ Ainsi, celui (qui) s'il viole [=violera] le plus petit de ces commandements sera appelé petit dans le royaume des cieux ; mais celui qui le fera, et l'enseignera, celui-là sera appelé grand ...’ b [...] nork ere iltzen BAdu21 gelditukoda juiziora obligatua. (Mt5,21) qui-E ere tuant s'il-AUX rester- FUT AUX au-jugement soumis lit. ‘qui s'il tue, il reste passible du tribunal’ c [...] nor ere aserretzen BAda bere anaiain kontra qui ere se-fâchant s'il-AUX son frère-GÉN contre arrozoñik gabe, obligatua izain da juiziora ;... (Mt 5.22) raison sans obligé être-FUT AUX au-jugement lit. ‘ qui s'il se fâche contre son frère sans raison, il sera passible du tribunal’ d [...] nork ere beatzen BAdu emakume bati ura gutiziatzeko, qui-E ere regardant s'il-AUX femme une- DAT celle-là désirant egiten du yadanik adulterioa aikin bere biotzean. (Mt 5.28)

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faisant AUX déjà adultère avec-elle son cœur- LOC lit. ‘qui s'il regarde en femme en la désirant, il commet déjà l'adultère dans son cœur.’ (26) D. Soubelet, (1969, p. 104)22 a Ni niz munduaren argia, nor ere jarraikitzen BAzaut, hura moi je-suis du- monde la-lumière qui ere suivant ba-il-me( AUX) luiez dabila ilhunbetan, bainan ukanen du harek biziko argia.NEG marche dans-la-pénombre mais aura AUX lui de-la-vie la-lumière‘Je suis la lumière du monde : qui me suit ne marche[ra] pas dans les ténèbres,mais aura la lumière de la vie’ [= Jn 8,12] b Nork ere ez BAdu onhartzen Jainkoaren erresuma haur ttipi batek qui-E ere NEG ba-AUX recevant de-Dieu le-royaume enfant petit un-E bezala ez da hartan sartuko. comme NEG AUX là entrer-FUT [p. 138 = Le 18,17 & Me 10,15] ‘Quiconque n'accueille pas le royaume des cieux comme un petit enfant n'y entrera pas’

50 Enfin, Lafitte signale explicitement (op. cit., p. 461) que ba- et bait- alternent librement dans des phrases concessives que certains appelleraient « inconditionnelles » aujourd'hui, comme les suivantes :

(27) Nor bazira / Nor baitzira / Nor ere baitzira qui ba-vous-êtes qui bait-vous-êtes qui ere bait-vous-ètes ‘ Qui que vous soyez’

6. Récapitulation et problèmes en suspens

51 6.1. Dans le cas particulier du basque au moins, il semble bien, au vu de la section précédente, que l'on puisse ramener les phrases complexes à corrélatives à une variante morphologique des conditionnelles23, dans la mesure où, d'une part, dans les variétés standard de la langue écrite, on a un choix bloqué clair entre deux triplets comprenant un indéfini, un marqueur de subordination, et une conjonction, cf. (28), chaque élément de ces triplets pouvant apparaître comme une variante combinatoire ou distributionnelle de celui de la ligne du dessus ou du dessous, et, d'autre part, dans la mesure où des variétés moins « lissées » de la langue font apparaître certains glissements d'une ligne à l'autre.

(28) indéfini C° conjonction Norbait ba- orduan Nor bail eta % nor ba- eta

52 Si cette conclusion est exacte, on peut alors représenter plus précisément les PCPC et les conditionnelles par un même schéma, cf. (29)24 :

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53 En d'autres termes, tant ba- que bait- occupent la tête C° de la prota-se, et, par suite, l'indéfini norbait (ou inor) se déplace aussi en syntaxe dite visible, avant s-s / Spell-Out : voir 7.3 pour une réévaluation et l'esquisse d'un développement de cette idée. 54 6.2. L'analyse présentée ici offre au moins trois avantages. Premièrement, elle est compatible avec la théorie X-barre la plus restrictive qui soit, celle proposée par Kayne (1994), en prenant au sérieux l'idée que la conjonction est en fait la tête fonctionnelle de la phrase complexe : tout recours à l'outil d'adjonction (que Kayne rejette axiomatiquement) est donc inutile. Ensuite, elle permet de se passer en même temps de tout mouvement entre une position interne à l'apodose vers le spécificateur de la conjonction, la protase étant considérée comme étant « générée dans la base » (on pourrait parler de merging dans le jargon du PM) dans cette position, cf. la discussion autour des ex. (6a,b) : le défaut méthodologique qui est si souvent fait à la théorie de l'antisymétrie de Kayne, à savoir, qu'elle impose non seulement des têtes (fonctionnelles) ad hoc, mais encore des mouvements tout aussi ad hoc, est donc évité. Enfin, cette approche est maximalement compatible avec une démarche compositionnelle concernant l'interface syntaxe-sémantique, dans la mesure où elle permet d'interpréter chaque proposition syntaxique (anglais clauses) comme une proposition logique (angl. proposition), la conjonction se traduisant précisément par le connecteur requis par la quantification, standard ou non, à laquelle l'expression entière est soumise. 55 A ce sujet, il faut remarquer que la représentation arborescente de (29) est en fait incomplète : il faut également disposer d'une tête quantification-nelle (cf. Beghelli & Stowell 1995) qui permette à un adverbe comme le ‘souvent’ de (17b) de prendre l'ensemble de la phrase complexe sous sa portée dès la structure-s (ou Spell-Out)25.

7. Problèmes en suspens

56 Pour terminer, je souhaite signaler quelques directions de recherche qui me paraissent pertinentes par rapport aux thèmes abordés dans cet article.

57 7.1. Tout d'abord, il y a la question de l'étymologie et de la réanalyse morphosyntaxique et sémantique (en synchronie) des morphèmes ou morphes qui entrent enjeu dans les constructions décrites. Considérons plus particulièrement bait- :

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deux solutions d'égale vraisemblance sont disponibles. Il peut s'agir, bien entendu, du ba- suppositif suivi d'une forme contractée (et bien attestée comme telle) de eta, à savoir, ta, ce qui revient à dire qu'il y aurait déjà eu copie de la conjonction introduisant l'apodose sur la tête de la protase. 58 Mais on peut aussi bien imaginer que le suffixe qui suit ba- serait plutôt le morphème i que l'on trouve par ailleurs dans la seconde série de pronoms indéfinis, celle qui est donnée dans la troisième colonne de (20). En effet, dans les dialectes du Nord, les diphtongues ont tendance à « durcir » les consonnes qui les suivent après une frontière de morphème — par exemple en dévoisant une plosive sonore, comme dans zaiku (ou zauku) ‘il nous est’, qui s'analyse clairement (et se réalise en guipuzcoan et en basque littéraire unifié) comme zaigu, ou encore en transformant une fricative en affriquée, comme dans zaitzu, zautzu ‘ il vous est’ en face de la forme régulière zaizu. Dans cette perspective, on aurait dans les protases ou bien un indéfini comme nor ‘qui’, suivi de ba-, lui-même suivi de -i, ou encore, avec déplacement de ce dernier morphème, la séquence i+nor ... ba.. 59 Quoi qu'il en soit, il est évident qu'une réanalyse revenant à ne plus identifier ces segments comme des morphèmes indépendants a dû se produire très tôt dans l'histoire de la langue, dans la mesure où, comme cela a été rappelé en 2.1, les variétés de basque parlées Outre-Bidassoa ont toujours employé beaucoup plus fréquemment le suffixe complémenteur -en que le préfixe bait- dans dans les protases corrélatives (et dans les relatives formellement appositives), alors que ce suffixe est lui-même totalement opaque ou inanalysable aujourd'hui. Rappelons aussi à cet égard qu'Azkue (loc.cit.) notait que la variante biscayenne très locale baist- de bait- se retrouve tant dans les propositions subordonnées où cet élément fonctionne comme un C° que dans les indéfinis du type norbai(s)t ‘ quelqu'un’. 60 7.2. Revenons maintenant sur l'accord indirect que l'on a constaté plus haut entre la conjonction introduisant la proposition principale et l'élément wh- qui spécifie la protase corrélative. On a suggéré plus haut qu'un mécanisme à triple détente était à l'œuvre, l'accord entre la tête conjonctive et son spécificateur conduisant ce dernier, un CP, à recevoir ainsi un trait syntaxique ; dans un second temps, ce trait percolerait vers le C° de la protase ; enfin, dans un troisième temps, l'élément wh- hériterait ce trait du C°. En fait, on est en droit de se demander s'il n'existerait pas plutôt un mécanisme d'accord entre la conjonction tête et le spécifieur de son spécifieur (l'image miroir du marquage de cas exceptionnel qui permet à une tête d'assigner un cas non pas à son complément structural, mais au spécifieur de ce dernier). 61 En effet, comme le notait déjà Lafitte (op. cit., p. 105) dans l'exemple repris ci-dessous en (30), il arrive que eta apparaisse entre le mot en wh- et ere (cf. aussi Euskaltzaindia 1999, p. 255, ex. (193))26 : 62 Inutile de le dire, les rapports syntaxiques (qui semblent évidents) et sémantiques entre les PCPC et les phrases complexes à circonstancielle spécifique disloquée à gauche (comme c'est le cas ici) demandent aussi à être approfondis. :

(30) Non eta ere aurkituko baituzu, han hil zazu où et ere trouver-FUT bait-AUX, là tuer IMPER ‘Tuez-le là où vous le trouverez’, lit. ‘ En quelque lieu que vous le trouviez, tuez-le là’ (double trad. de Lafitte)

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63 Il est évidemment possible de considérer que le trait syntaxique quel qu'il soit qui est transmis de la tête vers son spécificateur ne puisse se réaliser que dans le spécificateur de ce dernier — où encore comme suffixe sur la protase, comme dans l'ex. suivant, dû à P. Larzabal, un auteur contemporain (cité d'après Euskaltzaindia 1999, p. 255, ex ; (192)) :

(31) Lehenago, nork ere pagatzen baitzuen barrika arno gehienik-eta, huraautrefois, qui-E ere payant bait-AUX barrique vin le-plus-eto celui- làzukan pasatzen bozetan. AUX passant aux-élections ‘Jadis, c'était celui qui payait le plus grand nombre de barriques de vin qui gagnait les élections’ – lit. ‘Qui ere payait le plus de barriques de vin-et, celui- là gagnait’

64 Cela dit, il faut aussi tenir compte du fait (qui exige une analyse minutieuse que je suis bien incapable de faire pour le moment) que eta n'est pas simplement déplacé, mais peut être copié ou dupliqué, lorsque les phrases complexes à corrélatives sont des comparatives de degré. En voici quelques exemples guipuzcoans, empruntés à un recueil récent de proverbes (Zavala 1985, vol. 2)27.

(32) a Zenbat eta geiago izan, gero ta geiago nai (n° 3034) combien et plus avoir après et plus vouloir ‘Plus on a (et) plus on veut’ b Zenbat eta geiago, orduan ta naiago (n° 3035) combien et plus alors et plus-volontiers (id.) (33) Zenbat eta obia, ordun ta okerr[ag]o (n° 3037) combien et meilleur, alors et pire ‘Meilleur c'est, pire c'est’ (cf. plus ça change, plus c'est la même chose’) (34) Zenbat eta zarr[ag]o, ordun ta berro (n° 3038) plus et plus-vieux alors eta plus-nécessiteux [berro = bearrago] ‘Plus on vieillit, plus on est dans le besoin’

65 Evidemment, l'interprétation minimaliste actuelle, qui revient à postuler que tout déplacement est une copie suivie d'un effacement, peut être invoquée, mais le blocage même de l'effacement de eta dans l'apodose reste problématique.28

66 7.3. Revenons enfin aux conditionnelles. Le fait que, dans ces phrases complexes, le mot baldin puisse se trouver en tête de la subordonnée conditionnante, et être en quelque sorte repris par ba-, cf. (35b), indique peut-être que plusieurs têtes fonctionnelles sont en jeu, ce que semble corroborer l'existence du morphème complexe balinba-, cf. (35c), ce mot s'analysant alors comme la forme contractée résultant de l'incorporation de ba- à baldin, opération qui aurait à son tour pour conséquence la montée de l'indéfini :

(35) a Norbait / Inor etortzen ba.da quelqu'un/anvfow/y venant si AUX ‘Si quelqu'un / qui que ce soit vient’ b Baldin norbait / inor etortzen ba. da (id.) c Norbait / Inor etortzen balinba.da (id.)

67 Par parité de raisonnement, on serait alors en droit de réinterpréter le ere des protases corrélatives (cf. la note 16) comme étant en fait le correspondant corrélatif du baldin conditionnant, ere forçant la montée de l'élément wh- dans son spécificateur, et baldin,

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par contre, le bloquant. Mais cette remarque demande, bien entendu, un travail technique qui reste à faire.

68 En tout cas, un dernier argument en faveur de la thèse centrale de cet article, à savoir, que les PCPC sont des variantes de conditionnelles, est encore fourni par les très nombreux allomorphes et variantes dialectales de baldin, qui incorporent toutes d'une manière ou d'une autre la conjonction eta : baldin-eta, baldinetari, baldinetaria, baldinetarik, baldinetariak, baldi-netarian... (cf. Michelena et al. 1989, pp. 788-791), phénomène qui pourrait s'expliquer par les mécanismes d'échange de traits discutés en 7.2.

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NOTES

1. Ce texte développe la deuxième partie de l'exposé que j'ai fait à Bayonne lors du Colloque international organisé, à l'occasion du centenaire de la naissance de Pierre Lafitte, par l'UMR IKER et l'Académie basque (Euskaltzaindia) en octobre 2001. La première partie, plus spécifiquement consacrée à la syntaxe des phrases complexes dans diverses langues, dont le basque bien entendu, doit être publiée dans les Actes de ce Colloque (Rebuschi, sous presse) ; dans la mesure du possible, je tenterai d'éviter les répétitions, mais de légers recoupements sont inévitables. Je souhaite remercier les participants à ce colloque pour leurs remarques et questions, ainsi qu'Alex Grosu, pour ses commentaires sur une version antérieure de ce texte, et André Rousseau pour nos échanges espacés mais, du moins en ce qui me concerne, très fructueux sur les rapports logiques entre corrélatives et conditionnelles. Une version préliminaire de ce travail avait été présentée à la Table ronde internationale sur la syntaxe et la sémantique des relatives (Tel Aviv, juin 2000) : que les organisateurs et les participants à cette table ronde soient également remerciés. Les abréviations suivantes seront utilisées : ACC, accusatif ; AUX, auxiliaire ; DAT, datif ; E, ergatif ; F, focus ; Fem, féminin ; FUT, futur (ou prospectif) ; GEN, génitif ; Impér, impératif ; INT, interrogatif ; LOC, locatif ; PL, pluriel ; REL, relatif ; SUBJ, subjonctif. 2. Les PCPC sont traitées comme des relatives d'un type particulier dans Euskaltzaindia (1999, chap. 5, 247-257). 3. Se rappeler que ce mot s'écrivait en qui c'onques en ancien français, où l'on trouve, outre qui, un que subordonnant (noté c’) et enfin onc, onques ‘jamais’, cf. l'anglais ever – sur le basque ere, que je ne traduis pas, voir la note 16 infra), puis le § 7.3, sous (35). 4. La proportion de préfixation en bait- de la forme verbale fléchie dans les relatives adnominales est par contre un peu plus grande. Il en va de même des corrélatives dans les divers sermons du même auteur, e.g. Urteko igande guzietarako prediku laburrak (ms. ± 1800, éd. de 1990, p. 156) : Ala nola bista labúr duéna baliatzen baita begiórdes edo anteójoes, billatuz árgi, ta beirátuz óngi : alá ari-man ezautzekó óngi dá eskátzea árgi Jangoikoai... « De même que celui qui a la vue courte se sert de verres ou lunettes, trouvant [ainsi] la clarté et voyant bien, de même, pour connaître l'âme, il estbon de demander la lumière à Dieu »

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5. Azkue (1923-25, p. 357), signale que cette variante était encore vivante dans certains parlers biscayens au début du 20e siècle. 6. Voir aussi les num. 61-63, même page. Sur l'unique corrélative présente dans le catéchisme guipuzcoan d'Ubillos (1775), voir (24) infra et l'alinéa qui précède cet exemple. 7. Si le eta des PCPC basques devait être analysé comme étant adjoint à l'apodose dans une approche moins restrictive de la structure X-barre, les règles du jeu données par Kayne 1994 exi- geraient par contre que cet élément se trouve alors dans la position de spécificateur d'une autre tête fonctionnelle, située plus bas que celle qui prend la protase pour spécificateur. En l'absence d'arguments allant dans ce sens, il est évidemment plus simple de faire de ces connecteurs non- standard les têtes elles-mêmes. 8. Rizzi (1997) propose aussi la présence d'une tête et d'une projection de Top. en-dessous de Foc, mais cela est sans importance en ce qui nous concerne. 9. Ex. tirés de Heilige Schrift, Genève, Genfer BibelGeselhchaft (1985).Ajoutons que l'emploi de der dans la protase est aujourd'hui archaïsant. 10. Ceci n'est pas une critique, car il faut bien rendre compte du fait que certains « textes » comportant plusieurs phrases syntaxiques autonomes concaténées peuvent induire les mêmes interprétations, ou avoir les mêmes conditions de vérité, que des phrases complexes, ce qu'illustre le parallélisme entre (i) et (i’) d’une part, et (ii) et (ii’) de l’autre : (i’) Un homme entra, et il commanda une bière. (ii) Tous les hommes sont mortels. Or Socrate est un homme. Donc Socrate est mortel. (ii’) Socrate étant un homme et tous les hommes étant mortels, Socrate est mortel. Cela dit, dans la mesure même où les langues varient (au moins « superficiellement ») dans leurs structures morpho-syntaxiques, l'identification des phrases radicales (indépendantes) comme un domaine pertinent pour la linguistique proprement dite me paraît rester fondamentalement correcte. 11. En effet, tout emploi emphatique ouvre au moins potentiellement la porte à une interprétation quantificationnelle du type : « celui-là ET NUL AUTRE ». 12. Les relatives « semi-libres » sont des structures que l'on peut traduire par des relatives libres (en quiconque en français, whoever en anglais, etc..) mais qui présentent crucialement un déterminant à droite du C° -(e)n, comme le montre le SN disloqué de (15a). 13. Avec des référents [+hn], les construction avec guz(t)ia au singulier sont aujourd'hui archaïques. 14. Je n'ai malheureusement pas pu accéder à l'original latin. 15. En ce qui concerne le komunki de (6a), il a d'autres incidences encore, car il interagit de manièreun peu surprenante avec l'effet quantificationnel normalement induit par la présence de deux éléments wh- dans des structures de ce type (cf. aussi les interrogatives à wh- multiple). 16. Ces mêmes raisons me poussent à considérer que, depuis les premiers textes connus, la particu le ere qui accompagne souvent (mais pas toujours : voir (3) ou (4) par ex.) l'élément wh- des prota ses corrélatives, et qui se traduit dans d'autres contextes par « même » ou « aussi », est, dans les phrases qui nous concernent, vide de sens, c'est-à-dire qu'elle ne peut pas s'interpréter comme le ever des mots anglais whoever, whatever (ou du onque de quiconque, cf. la note 3 plus haut) qui sont, eux, incompatibles avec toute forme de quantification adverbiale ou non- sélective. Pour une réinterprétation radicale, mais très programmatique, de ere, voir la fin de 6.1. Pour en revenir à l'aspect quantificationnel des choses, je ne me prononcerai pas sur la maximalisation supposée par Grosu & Landman (op. cit.) à propos des relatives corrélatives du hindi, mais soulignerai qu'il est sans doute prématuré de généraliser les descriptions spécifiques de certaines langues ou certains groupes de langues à la « grammaire universelle » – cf. aussi Grosu (2000. p. 102) pour qui « une configuration avec adjonction à gauche [d'une relative libre] bloque toute autre interprétation que celle de la maximalisation ».

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17. Remarquer cependant que lorsque l'élément wh- est phoniquement réalisé (au lieu d'être un « opérateur abstrait »), il est normalement accompagné d'une caractérisation du domaine concerné ([± humain], par ex., l'anglais who ≈ which), manifestant ainsi une propriété très générale des opérateurs syntaxiques des langues naturelles. 18. Voir Cheng (1995) pour des arguments (évidemment) tout à fait différents qui conduisent à la même conclusion en ce qui concerne le chinois. 19. L'apostrophe, ici comme infra, signale des constantes non-logiques. 20. La version manuscrite de 1855, publiée récemment par Pagola et al. (1995), contient bait-, mais tout le monde s'accorde pour reconnaître que la version imprimée, qui avait été révisée par L.-L. Bonaparte sur place, est plus typique du baztanais d'Elizondo. 21. Le ms. cité dans la note précédente présente ici une relative semi-libre ; il en va de même pour les versets cités en (c) et (d). 22. Dans un texte du même dialecte mais datant d'un siècle plus tôt, j'ai aussi relevé un emploi de ba- au lieu de bait-, mais maintenant dans une relative (structuralement appositive) introduite par un pronom relatif explicite : (i) Uroz zerbitzari hura zoina, jiten denean nausia heureux serviteur celui-là qui-sg venant aux-n-loc le- maître hatzemaiten BAdu hola ari dela (A. Cazenave, ±1850, Mt 24,46) trouvant ba- AUX ainsi actif qu'il-est « Heureux le serviteur que son maître, quand il rentre, trouve en train de travailler » Cet exemple, malheureusement unique à ma connaissance, montre que le schéma logique , que j'ai tenté ici d'appliquer aux PCPC, pourrait aussi, au moins dans certains cas (lorsque l'expression nominale est non-référentielle ou non-spécifique), s'appliquer aussi à certaines relatives restrictives. Pour André Rousseau (communication personnelle) l'exemple scolaire bien connu du latin en (b) serait d'ailleurs paraphrasable par : « Si tu m'as écrit une lettre, elle m'a fait grand plaisir ». (ii) Quas scripsisti litteras, que[acc-fm-pl] tu-écrivis lettre[acc-fm-pl] eae mihi joncundissimae fuerunt elles moi-dat très-agréables furent « La lettre que tu as écrite m'a fait grand plaisir. » 23. En tout état de cause, je n'aurai pas seulement pris le contre-pied de la description traditionnellede Lafitte, loc. cit. dans l'introduction, mais aussi celui de Bittner (2001), qui tente plutôt de ramener les conditionnelles à des structures corrélatives, sur la base du parallélisme de la distribution despréfixes en j- et t- dans des exemples comme les suivants en marathi (empruntés à Andrews (1975)) : (i) j a mula-ni j a muli-shi dues kela quel garçon-E quelle fille-gen haine faisait t ya-ni t i-la mar-li lui -E elleace tuer-passé « Quant au garçon et à la fille qu'il haïssait, il l'a tuée. » (ii) j er t o ithe yel, t er min tya-la marin si lui ici vient alors moi-e lui-acc tuer-fut « S'il vient ici, (alors) je le tuerai. » 24. Sur C°1, cf. la remarque concernant le point (5 c) en 2.2. 25. Je ne me prononce pas sur ce qui peut se passer en « Forme Logique », à savoir, si cette tête est activée de façon à ce que l'adverbe « souvent », lorsqu'il se trouve dans l'apodose en s- structure, comme en (17a,c) ou (6a), monte dans son spécificateur pour s'interpréter comme ayant portée sur la structure complexe, ou si une adjonction (mécanisme dont on a vu qu'on pouvait se passer dans la syntaxe dite visible) peut être retenue « après » spell-out (ceci vaut bien sûr également pour la contribution quantificationnelle du pronom labourdin haina, et de l'opérateur générique phonique-ment vide que l'on rencontre dans la plupart des cas).

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26. A vrai dire, il semble que ce tour soit surtout fréquent lorsque la protase s'interprète comme une circonstancielle de temps, comme en (i) : (i) Noiz eta ere ikusi bainuen [...], tiro batez hil nuen. (Lafitte 1962, p. 459) quand et ere vu bait-aux. coup de feu d'un tué aux Quand je le vis..., je le tuai d'un coup de fusil. » 27. On notera au passage, trois fois sur quatre, la présence de la conjonction ordu(a)n ‘alors’ qui caractérise « normalement » les apodoses conditionnées. Il significatif qu'inversement, dans certaines langues, le « même » morphème puisse être employé soit pour coordonner deux éléments (en ce qui nous concerne, deux propositions [syntaxiques]), soit pour associer une protase conditionnante et une apodose conditionnée : c'est par exemple le cas du swahili, mais c'est aussi le casde l'ancien français, cf. Rebuschi (sous p.). 28. De même que son placement à droite de gero ou orduan, quelle que soit la machinerie syntaxique adoptée.

INDEX

Index chronologique : 20e siècle Thèmes : linguistique Mots-clés : basque (langue), conditionnel, morphosyntaxe, phrase complexe, protase corrélative, sémantique, syntaxe

AUTEUR

GEORGES REBUSCHI

Sorbonne Nouvelle & CNRS, (LACITO, & associé à l'UMR 5478) [email protected]

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Jean-Martin Hiribarren, Iruñeko bestak 1845

Patri Urkizu

1 Agosti Chaho, Jean Duvoisin, Maurice Harriet, Joanes Oxalde, Emmanuel Inchauspe, Jean-Martin Hiribarren.... Hona 1810etik 15erako epean Euskal Herriko Iparraldean jaiotako euskaltzale ospetsuen zenbait izen. Lore-xorta ederra benetan ! Euskal hizkuntza eta literaturaren pizkun-dean zuzi distiratsu eta itzalezinak, Pierre Lafittek1 ongiaski azpimarratzen digun arabera.

2 Azkainen sortua genuen Hiribarren, etorki nobleko familia batean, Etcheberria baitan, hain zuzen. Bere amona Juana Dutari, Dominike de Hiribarrenen emaztea, Baztango Dutari Azpilikuetarren leinu famatutik zetorren. Honetakoak izan ziren, ere, besteak beste, San Frantzisko Xabier eta Martin Azpilikueta ‘doctor navarrus’ ospetsuak. 3 Hona bere aitaren heriotze biharamunean besteren artean idatzi zuen bertso xorta gorabehera zenbait aipatuz : Guziek bazakiten zenbat zen zuzena, Hauzi guzietan zen lekhuko emana, Frantziako aferak nahasi zirenian Ihesari eman zen denbora zuenian. Aita amak ziozten gathibo egorri, Frantziarat norapeit bihotz zilhagarri, Berak jo zuen urrun Madrilgo alderat, Gorthian gora zituan ahaiden arterat, Haren aitatxia aiphatu Duthary, Espainiako gorthian lehen aitzindari2. 4 Hamalau urte zituela joan zen apaiz ikasketak Baionako seminarioan burutzera eta bertan apeztu zen 1833. ekainaren batean, hogeita hiru urte zituelarik. Denboraldi bat Urruñan eman ondoren Goyetche erretoraren laguntzaile, Bardozera iragan zen apez- laguntzaile gisara, eta apez nagusi bilakatu Borda 1839an hil zenean, bertako arimen gidaritza 1865. urterarte hartuz. Nekaturik, Baionako ohorezko kalonje izendatu zuten, baina berehala kota gaitzak jota hurrengo urtean hil zen.

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5 Langile amorratu eta apala, bere eleizkizunek eta gazteendako ardurak uzten zizkioten uneak oro idazten murgildurik igarotzen zituen, eta bizi zelarik argia ikusi zuten poemen artean hauexek dauzkagu : Iruñeco bestak3 (1845) ; Montebideoco berriac 4 (1853) ; Eskaldunac5... (1853). 6 Montebideoco berriac maiatzean plazaratu zen. Poemak 223 lauko ditu, hamahiru silaba duelarik bertsolerro bakoitzak eta binaka errimak bildurik. Euskal Herriko odoluste izugarri haren aurka jasotako ahotsa izan zen, eta irailean Abbadiak antolatu lore Jokoetan ere gaia beraxe izan zen. 7 Eskaldunac, abenduan argitaratua, oraindik askoz ere luzeagoa da, bost mila bertsolerro inguru baitu, Euskal Herrietako historia egiten du bertan hala nola bertan sorturiko hainbat eta hainbat pertsonaia garrantziz-koeren bizitza zertzeladak ematen. Hona zioena Andima Ibiñagabeitiak6 obra honetaz : ...olerkari baino neurtizlariago ageri zaigu Hiribarren. Alare ba ditu bere bertsu aldietan poeta garaienak ere onartuko lituken ahapaldiak. Arrigarria benetan apaiz onez euskera nola menderatu eta erabiltzen zuen ikustea, txoriari tzinta bezin errex ta aisa ateratzen zaizkio bertsuak luma-muturretik. 8 Ez da bere balioetarik tipiena ere Orixeri bere Euskaldunak sortzea pentsarazi izana. Hitz-lauz ere argitaratu zuen beste lan bat Eskaraz Eguia7 7(1858) duena titulutzat, erlijio ezberdinei buruzko historia, eta noski, knstau katolikoaren apologia dena.

9 Utzi zituen, ordea, lan mordoxka argitaragabe, hauetarik batzuk geroa-go argitaratu direnak eta beste batzuk oraindik argitaragabe dirautenak, hala nola : 891an eskaldun gerla8 ; Napoleon lehena9, Laborarien erran zaharrak10, Laborariak11 (argitaragabea, mila bostehun bertsolerro inguru-koa) ; Hiztegia12 (argitaragabea). 10 Ez bakarrik euskaraz, frantsesez ere asko idatzi zuen, hala Ariel bere lagun Chahok zuzentzen zuen aldizkari errepublikanoan, nola Journal du peuple, Le Messager de Bayonne eta Le Courrier de Bayonne gazetetan. Uneak bultzaturik idatzi zituen ere bertso iraultzaileak, hala nola 1848ko otsailaren 25ean honela hasten direnak : Jo du, jo noizbeit orenak Justizia dakhartenak, Orai bada Eskaldunak, Porroska zuen burdinak. Errege da populua, Altxa dezake burua, Hanbat mendez lehertua, Ager bedi zutitua13. 11 Egun honetan, igande goiza zen, Chaho, Stein eta Villa Baionako Comite Republicain Central delakoaren partaideek, jende xehea eta argin-beltz talde ugaria atzetik zutela Harisperi bisita egin zioten, eta eskatu jaialdi bat antola zezan herria eta troparekin anaitasunean ospatzeko II. Errepublikaren sorrera. Harispek ordenak espero zituela erantzun zien, baina, noski, populua ez zegoen zain egoteko. Harispe utzi, eta Udaletxerantz abia-tu zen. Hemen zeudenek eskaerak onartuz Garde Nationale-erako eta Udala berritzeko hauteskundeak prestatu zituzten. Askatasunaren zuhaitza plaza erdian jaso zuten eta okasio honekin Hiribarrenek bandera errepublikanoa bedeinkatu zuen, ondoren frantsesez solas eder batez mintzatu zelarik aska-tasuna (Libertatea zein eder den !-errepikatuz euskaraz-), berdintasuna eta anaitasuna goraipatuz. Lafittek zati bat ematen digularik honako hitzak eransten dizkio, je me demande si le discours de Hiribarren n'est pas un chef-d'oeuvre de ce genre bâtard, alegia, jenero bastart honetan

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maisu lantzat jo daitekeela. Baina, gauza jakina den bezala, zirkunstantziazko literatura hori ugaria da herrialde guztietako literaturetan.

IRUÑEKO BESTAK 1845

12 Hiribarren berak dioenez, lapurteraz idatzitako poema txiki bat da « Petit poème sur les fêtes de Pampelune 1845. En dialecte labourdin le plus pur ». Baditu, ordea, poematxo honek ehun eta hogeitamar zortziko, beraz, 1362 bertsolerro, aitzakitzat harturik Chahok, Nemours-eko duke eta dukesa, Aumale-ko dukeak eta beste konpainia eder batek (tartean bera) 1845 urteko irailean Iruñeara egin zuten bidaia eta hemen dastatu zituzten bestak.

13 Dukeen Euskal Herrirako bisitak utzi zizkigum hainbat bertso eta kanta nola Bizente Etxegaraik14 eskaini ziena Donostiatik igarotzean, edota Tolosatik15, edota Hazparneko Larralde Bordaxurik16 kantatuak. Baina ez ziren iristen Hiribarrenen tamainara, noski, zeinen obraren zati bat Chahok argitaratu zuen, pentsatzen baitzuen edizio elebiduna, euskara-frantsesa, egitea, asmo huts gelditu zena, ordea, Lafittek dioskun legez. 14 Azkaindarrak atharraztarraren aipamenarekin hasten digu poema Ariel-en, kortesiazko deikia, noski, baina poema berridatzi zuenean, urteak igaro eta, zati hau aldatu egin zuen, beste zenbait orraztu eta zuzenduz. Beraz azken idaz-kera moldatu dugu gure ediziorako. Bidaiariak, muga pasa ondoren Urdazubi, Arizkun, Elizondo, Moringo Zubia, Belate, Ultzama eta azkenean Iruñeara iritsiko dira erregina Isabel Ilarekin eta honen gortearekin elkartzeko. 15 Hau bere ama Kristina eta ahizpa Luisa Femandarekin Donostiatik zetorren, hemen mainu batzuk hartu eta hiriak harrera benetan ederra eskaini ondoren. Boulevard-eko Txakur-Txulo zeritzaion ostatuan egonak ziren eta musika jaialdi bat oparitu zion hiriak Luisa Fernandari, Bizente Etxegaraik, okasio guztietarako prest zegoen donostiar poetak asmatu zortzikoak kantatu zizkiotelarik. Hauetariko bigarrenak honela zioen : Infanta gaztetxoa Espainiakoa, Isabelen aizpatxo biotz gurekoa : erregeren alaba zorionekoa, ar ezazu oroitze Donostiakoa17. 16 Hemendik Iruñeara joan ziren eta Joakin Ignazio Menkos, Guendulaingo kontearen etxean hartu zuten ostatu. Eta bertan biltzen ziren Frantziako printzeekin, egun batean hirurogeita hamar gonbitatuei platera ugari eta onaskoak eta dantza eder bat eskaini zitzaielarik18.

17 Poemak ez dion arren, printze frantsesek Ezpeletako Kontearen jaure-gian hartu zuten ostatu, bertan banketeen ondoren serenatak, gau-dantza eta gau-argiak dastatu zituztelarik. Erregina Isabelek Frantziako printzeak erre-galatu nahi zituen, eta honetarako momentuan zen toreatzailerik famatuenari eskatu zion torea zezan Iruñean. Gonbitea Ministro de Instruccion y de Hacienda zenak berak egin zion, eta Madridetik pasatzerakoan Montes bere koadrilarekin jai eder bat ere eskaini zitzaion.

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18 Frantziako eta Espainiako korteak Iruñean, iraun zuten bitartean, hau jendez beterik zegoen, ezen topaketa ilustrearen aitzakiaz iragarritako ikus-kizunek Pirineoetako mainutegietarik ur-hartzaile anitz erakarri baitzuten. 19 Poemak bederatzi atal ditu : Bidaia (1-12) ; Argiak (13-21) ; Zezenetako tokia (22-62) ; Zezenak (63-125) ; Zaldi Lasterketak (126-140) ; Zuziak (141-148), Zuziazko Tiruak (149-155) ; Pasaiuak (156- 162) ; eta Harmada (163-170). 20 Zatirik nagusienak, beraz, zezen plazako giroak eta zezenek hartzen dute (22b.-125b.), bertan kantatzen direlarik garaiko toreadore famatuenaren, Francisco Montesen19 azaina bildurgarriak, eta zeinen irudia honelaxe ematen digun euskal poetak : Hasia ilia urdintzen Baina ez zangua pisatzen, Bezti galtza labur ferdez, Sedazko gairik senduenez, Aztalak xuri zirikuz, Oinetan zapatak larruz, Hark duen maipolisa, Izan behar da belusa, Errexago da ikustia Ezen ez haren pintatzia. 21 Lehen korridan zazpi zezenek jokatu zuten. Montesek lehen estokadaz etzanarazi zuen lehenbiziko arerioa. Bigarrenean, nola ez baitzen oso oldarkor, jendetza zakurrak ! zakurrak ! oihuka hasi zen, Santerak azkenean lau estokadaz hil zuelarik. Hirugarren zezena Chiclanakoak guztiz dotore eta ederki akabatu zuen txaloen artean. Laugarrenean zaldia lurrean sabela hau-tsirik, lehen estokadaz bota zuen Montesek. Bostgarrenean berriro zaldiak lurrean etzanik tripak kanpoan, eta banderilak ezarri zituenean usoak atera ziren txorimalotik zezenak hau adarkatu zuenean, eta bigarren aldian sartzerakoan hil zuen Montesek. Seigarrenak berriro pikadoreak bota zituen, berriro Santera zezenzalearen kontra madarikazioak entzun zirelarik. Zazpigarrena eta azkena irinez betea atera zen, eta hamabi mutil errotariek, - galtza txuri, alkandora txuri eta zapia buruan loturik -, hamar mila liberaren ordainez saiatu ziren zezena botatzen, halere eskerrak azkenean toreatzailea atera zela, ezen batzuek gaizki zauriturik bukatu baitzuten.

22 Korrida arratsaldeko hiruretan bukatu zen, eta bostetan berriro itzuli ziren printzeak atseden zertxobait hartu ondoren. Zaldun mordo bat atera zen beren zaldi dotoretan Luis XV eta Felipe IV. garaiko jantziez, eta bukatuta-koan antzezkizuna erregina Isabel Ilak parte hartzaileen artean dominak hedatu zituen. Besta hau zazpiretan amaitu zen. 23 Bigarren korrida irailaren zazpian ospatu zen. Erregina ordubiak pasata iritsi zen, idazkariak zilarrezko platera batean eskaini zizkion giltzak alkateari, eta honek erreginari, zeinak halaberetsu eskuinean eserita zegoen Nemourseko dukesari, beronek plazara jaurti zezan. Zeremoni hau eginda-koan korrida hasi zen. 24 Lehen zezenak zaldien artean triskantza izugarria egin zuen. Montes, dirudienez, ez zegoen forman eta hiltzera sartu zenean jendetza aspertu egin zuen eta txistuak entzun behar izan zituen. Beste zezenak aski oldarkor izan ziren eta txaloak errezibitu zituen. Bostgarrenari hiru gizonek zaintzen zituzten bost zakurtzar bota zizkioten, eta zakurrek zezena kozkatzen zuten bitartean, ezpata sartu zioten. Zakur hauek Jose Joakin Arrese Tolosarrak era-manak ziren bi mila eta zortzirehun errealen truke. Ikuskizun krudel eta odoltsu hau, ordea, ez zen izan ikuslegoaren gustokoa.

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25 Ekintza hau Iñaki Azkunek20 beste era honetan biltzen eta itzultzen digu, El Heraldo Madrid-etik harturik : Lehen hiru zakurrek ez zuten horzka egiterik lortu. Gero zeze-nari bota zizkioten beste biak, hain txikiak zirenez gero, ez ziren zaun-ka egitera ere ausartu. Joaldunak atera eta orduerdia baino gehiago behar izan zuten zezena plazatik eramateko. Errotariek zezen hura eskatu zieten orduan agintariei biharamunean lantzaz hiltzeko. 24 errotarik beren haga punta zorrotzak lerrokaturik ipintzen zizkioten zezenari, eta zezenak hirutan hautsi zien lerroa, mutik-gazteak lurrera bota eta zapalduz. 26 Printze eta Printzesa frantsesek Montes zezenlariari eta bere pikatzaile Joakin Coyto, alias Charpari diamantezko eraztun bat eta esmeraldez hornitu orratz bat oparitu zieten.

27 Dena den, ez zuen utzi gure poemagilea ikuskizun krudel honek oso kontent eta honako bertsoa ere idatzi zuen : ni banintz erregetarik/ez liteke zezenarik. [124 b.] 28 Baleztenak21 topaketa hauek komentatzerakoan honako iruzkin mal-tzurra eransten du : Egiaz, Nemours-eko dukesa ederrak zezenari ezarri zizkioten suzko banderilak Frantziako Printzeen bidaia Nafarroarekin eta Probintziekin Foruen arazoa konpontzea eta Isabel Ilaren ezkontza Carlos VIa, Montemolingo dukearekin, zeinen alde hainbeste lan egin zuten Balmes filosofo ospetsuak eta La Esperanza gazetak, helburu zuela uste zutenek hartu zituzten. 29 Poema euskaldunei eskaini lauko batez amaitzen da :

30 Irailaren 8an goizeko zortzietan irten ziren printze frantsesak hiritik, hiru mila liberako oparia eman zietelarik bertako benefizentziazko etxeei. Eskalduna Pirenetan Ez da izitu gerletan, Aitak ehortzi tokian Izanen bethi agian ! 31 Aski. Amai dezadan aurkezpentxo hau esanez Hiribarren zezen-korri-detan oso aditua ez bazen ere bertsogile aparte zela, erritmoaren zentzu berezi eta nabarmenaren jabe, garaikideen artean poeta handitzat kontsidera-tua, baina halere bertsolariengandik aski hurbil dagoena, batipat hiperbato-nak eta elipsiak baztertzen dituenean. Hau dela eta Lafitterentzat gertuago legoke koplariengandik olerkariengandik baino, eta bere burua epikotzat jotzen eta halakoxe nahi bazuen ere, ezin uka daiteke anitzetan moldatzen dituen bertsoak errexegiak ez direnik. Bere benetazko izpiritu zorrotz eta luma landua, ordea, ziri bertsotan, giza kritikazkoetan hala nola deskripzioe-tan, goi mailako eta arnas handiko ageri zaigularik. 22

NOTES

1. Pierre Lafitte, « Jean-Martin Hiribarren (1810-1866) », Euskal Herria (I 789-1850). Actes ducolloque international d'Etudes Basques (Bordeaux 3-5 mai 1973), Société des Amis du Musée Basque. Bayonne, 1978, 181-191.

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2. Patri Urkizu, « Euskal idazleen bertsoak bigarren Errepublikaren gainean (1848-1851) », « La révolution française dans l'histoire et la littérature basques du XlXe siecle ». Sous la direction de Jean- Baptiste Orpustan, Izpegi, Baigorri, 1994, 121-147. 3. Ariel aldizkaria. Baiona, n° 53, 54, 55, 56, 57, 59, 60, 61 ; 1845-X-5, 12, 19, 26-, XI-2, 16, 23, 30. Bukatugabea. 4. Montebideoko berriac. Bayonne, Foré et Lasserre, 1853. Patri Urkizu (ed., 1991), Lapurdi, Baxanabarre era Zuberoako Bertso eta Kantak. II, 1545-1900, 543-5 84. 5. Eskaldunac, Iberia, Cantabria, Eskal-herriac, Eskal-Herri bakhotcha eta hari darraicona. Foré eta Laserre imprimerian. Baionan, 1853. Fac-simil, Enciclopedia General Ilustrada del País Vasco, Zarautz, 1971. 6. Andima lbiñagabeitia, « Hiribarren'en « Eskaldunac » (1853-1953) », Gernika, n’22, Paris, 1953, 143. 7. Escaraz. eguia. Baionan, E. Lassserre, 1858. 8. Xipri Arbelbide (ed., 1991), « 891 an Eskaldun Gerla », Memoriae L. Mitxelena magistri sacrum, ASJU, Donostia, 485-503. 9. Eskuzkribua. 1 856. 231 fols. Ms, 217, Euskaltzaindia, Azkue Biblioteka. R. M. Pagola etab. (ed.), 1994, « Napoleon lehena ». Bonapaarte Ondareko eskuizkriboak. Lapurtera I, 41-183. 10. Eskuzkribua, Piarres Andiazabalen fondoan. 11. Eskuzkribua, Baionako Euskal Erakustegiko Liburutegia. Ms. 129. 12. Eskuzkribua, Piarres Andiazabalen fondoan. 13. n. 2(129-132). 14. Le Pharedes Pyrénées, zb. 729,1845.VIII.13 ; zb. 732,1845. VIII.20. 15. Idem. zb. 740. 1845.IX.7 ; Le Courrier de la Gironde, 1845.IX.8 16. Id., zb. 744. 1845. IX. 17. 17. Jose Vicente de Echegaray, Festara (Bere bertso guzien bilduma). A. Zavalaren edizioa. Auspoa. 35-36. Donostia, 1964. 18. Memorias de Joaquin Ignacio Mencos, Conde de Guendulain, 1799-1882. Instituciόn Príncipe de Viana, 1952,194. 19. Francisco Montes « Paquiro » (1805-1851). Chiclanan jaioa, igeltzero lanetan peoitzan hasia, baina txikitandik zezenetako grinaz amorratua, pala ezpataz trukatu zuen. Jadanik 1830.ean Sevillan toreatu zuen, eta bertako zezenlarien arte eta ofizioaz jabetu. Madriden 1831.ean presentatu zen Juan Jimenez « El Morenillo » eta Manuel Romerorekin. « Garrocha »z jauzi ederrak egiten zekien, eta kaparekin xit abila izaki Espainiako lehen ezpata izatera iritsi zen. Euskal Herrian maiz ibilia. bertako koadrilak lagun zituela. Komisio batek eskatu zion Louis- Philippe, Frantziako erregearen semeentzat, Aumale eta Nemourseko dukeentzat toreatu zezan. Hasieran ezezkoa eman bazuen ere, erreginaren nahia zela adierazi ziotenean, baiezkoa eman zuen. El Fandango egunkariak honela des-kribatu zuen « Korrida » : Don Francisco Montes estuvo admirable en las corridas de Pamphma. Y si es cierto lo que hemos oido decir a personas fidedignas, de que en consecuencia de su arrojo y habi-lidad se le ha nombrado conde de Chiclana, tiene mucho mejor ganado su título que otras excelen-cias de escotillón (Jose María Cosso, Los Toros, T. III. Espasa, Madrid 1980, 632). 20. Iñaki Azkune, Zezenak Euskal Herrian, gure baitan dituzlen erro luze-ezkutuak. UEU, Bilbo, 1989,349. 21. Baleztena, « Iruñerias. Las banderillas de Fuego », Diario de Navarra, 1950-111-25, in J. M. Iribarren, Pamplona y lo.s viajeros de otros siglos. Pamplona, Principe de Viana, 1952, 170. 22. Anton Abbadiaren koplarien guduak. Bertso eta aire zenbaiten bilduma Patxi Urkizuren edizioa.Eusko Ikaskuntza-Euskaltzaindia, Donostia 1997, 89-91, 96-98, 119, 130, 156-157, 181, 182, 192,193, 197, 203, 204.

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INDEX

Thèmes : littérature Index chronologique : 19e siècle Mots-clés : écrivain classique, Hiribarren Jean-Martin (1810-1866), littérature basque, poésie

AUTEUR

PATRI URKIZU

(UNED) [email protected]

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Position de recherche - Ikerketa aurkezpenak

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Catholicisme et construction identitaire basque : retour sur le postulat d'une sécularisation achevée

Xabier Itçaina

1 La recherche présentée ici1 entend « détourner » quatre approches du lien entre religion et identité collective : le récit essentialiste (il y a une fusion entre appartenances religieuse et ethnique), le récit exégétique ou théologique (il y a une spiritualité identitaire spécifique, qui requiert un ajustement normatif du religieux), le récit instrumentaliste (la religion, forme déguisée de l'idéologie, est une structure de domination parmi d'autres) et le récit annexionniste (tout est religieux : les mouvements identitaires ne sont que des religions séculières, qui se sont substituées à un système de pratiques et de croyances en perte de vitesse). A partir d'une vision à la fois plus constructiviste et plus compréhensive des identités catholique et basque, la thèse propose un cinquième récit.

2 La recherche a été guidée par la question suivante : dans quelle mesure l'interaction entre les deux activités identitaires catholique et basque a-t-elle effectivement généré des objectivations et des subjectivations spécifiques ayant en retour des effets structurants sur ces deux types de mobilisations ? En guise d'hypothèse, posons que la catholicité, en tant que système de valeurs et construit institutionnel, relève du structurel (au sens de Giddens, 1987) et est à la fois contraignante et habilitante dans le travail de construction de la référence et de la compétence identitaires basques, résultats d'une construction à la fois subjectivée et objectivée. Par référence, au sens de F. Dumont (Dumont, 1994), nous désignons la part de mémoire et d'utopie nécessaires à une affirmation identitaire mobilisable, sous une forme nationaliste ou pas. La référence renvoie à un niveau d'identification que Fernand Dumont voit comme un échelon supérieur à l'appartenance et à l'intégration. La religion intervient ensuite dans la construction de la compétence identitaire, dans les conditions d'émergence de ce savoir-faire spécifique lié à une conscience discursive et à une conscience pratique particulières ; à la

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mobilisation de ressources et à la transformation des contraintes en ressources. La référence d'un côté, la compétence de l'autre : l'intervention du religieux dans la structuration de la motivation identitaire prend deux formes indissociables mais nécessitant deux approches méthodologiques distinctes, qui constituent l'ossature de ce travail.

Clergé et nation : catholicisme et construction de la référence identitaire

3 Une première partie s'interroge sur la part du religieux dans la construction d'une référence collective associée à l'idée de nation basque. En considérant la nation et sa traduction politique, le nationalisme, comme autant de conflits d'exégèse, nous considérons que le religieux a contribué à diffuser et à installer dans les représentations sociales une interprétation particulière, une référence. Les mémoires des deux piliers institutionnels les plus visibles du religieux et de l'identitaire, clergé et mouvements nationalistes, sont confrontés ici. Une telle orientation, sous un aspect généraliste, implique au moins un double choix : nous ne traitons pas de la part de la religion locale (terme qu'avec W. A. Christian (Christian, 1997) nous préférons à celui, ambigu, de religion populaire) dans l'identité des Basques, sauf lorsque la routinisation de la religion locale sera perturbée par une relecture politique. En recentrant ensuite l'analyse sur les prêtres, nous excluons du même coup le personnel religieux féminin, objet, pourtant, d'un questionnement sociologique spécifique. La moindre visibilité en terrain basque de la portée politique des mobilisations religieuses féminines a déterminé ce choix. Concernant l'objet ainsi réduit, on observe la co-occurrence étroite de deux processus, sans qu'il soit possible d'établir entre eux une relation de causalité : la construction d'un mouvement nationaliste/nationalitaire institutionnalisé d'une part, l'émergence du clergé basque comme acteur politique semi-autonome d'autre part. L'émergence du « clergé basque » comme vecteur d'action collective est antérieure à la première expression politique du nationalisme à la fin du XIXe siècle. Avec des traductions différentes des deux côtés de la frontière, la trajectoire historique du clergé a pu diffuser la référence d'un mode d'action alternatif à la construction des Etats-nations français et espagnol, sans qu'une telle attitude, d'abord motivée par des intérêts religieux, n'induise forcément un quelconque engagement nationaliste. Reste qu'en agissant contre l'Etat et en s'érigeant comme représentant légitime du peuple, le clergé basque a pu contribuer à diffuser une culture de la distance.

Le fil rouge : le répertoire d'action collective du clergé basque.

4 La périodisation d'une référence en construction s'est alignée sur les phases du nationalisme, en prenant comme fil rouge l'action collective du clergé. Il y a un répertoire spécifique de l'action cléricale basque, historiquement construit, et modulable en fonction des structures d'opportunité politiques. Cette façon d'agir ensemble, historiquement transversale, présente cinq caractéristiques (chapitre 1) : a) Le mode de direction est marqué par des pratiques assembléistes et une dilution des leaders. Il y a un leadership informel au sein des groupes de prêtres mobilisés, mais sa visibilité est volontairement réduite au minimum dans le souci d'une image égalitariste.

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b) Le mouvement est restreint aux prêtres de paroisse, aux religieux, aux aumôniers. La hiérarchie diocésaine apparaît comme occupant une position médiane entre autorités étatiques et clergé. Son statut de régulateur intègre petit à petit une gestion institutionnalisée de la question identitaire. L'interaction entre la hiérarchie et les groupes de prêtres ne peut être qualifiée de façon abrupte : en règle générale, cependant, la défiance mutuelle est de mise, sans pour autant que les écarts de position aboutissent nécessairement au conflit. c) Les ressources de la mobilisation cléricale sont essentiellement de nature symbolique et réactivées par des groupes latents peu institutionnalisés. La création de groupes durables de prêtres et de chrétiens abertzale dans l'immédiat post- franquisme constitue à ce titre une innovation, mais ces structures ne sont réactivées que ponctuellement. d) Il y a des degrés divers dans la protestation, qui va de la réunion de prière jusqu'à l'incendie volontaire de la prison, en passant par la pétition, la grève de la faim ou l'accueil aux clandestins. Ce répertoire est modulable : il s'est ajusté aux changements historiques en privilégiant telle ou telle forme d'action. Dans les années 1960, le répertoire d'action est directement inspiré du renouveau mondial en la matière (grèves de la faim, occupations de locaux, grève des séminaristes, marches). La plupart des anciens savoir-faire, cependant, persistent : les actions concertées des prêtres prennent la forme de sermons, de pétitions, de réunions, et surtout d'un appel vers Rome, court-circuitant l'autorité diocésaine. e) Il y a un écart entre la réponse des destinataires formels de l'action (les autorités ecclésiastiques), généralement négative, et la réception forte de l'action dans les milieux politiques et sociaux. 5 Ces cinq caractéristiques se retrouvent de façon variable et combinatoire sur chacune des périodes, et contribuent à ériger un modèle spécifique de protestation. Par sa récurrence historique et sa dimension utopique, un tel registre a pu constituer une référence : au-delà des revirements idéologiques radicaux, une même manière de protester persiste. Ce répertoire constitue, pour une minorité du clergé, ce que S. Tarrow qualifie de cadre culturel de signification (cultural frame of meaning). Les prêtres protestant contre le régime franquiste en 1968 ont recours à un usage de la parole et de l'acte dont la genèse remontait aux guerres carlistes, mais ils le font au nom d'une idéologie diamétralement opposée à celle des curés légitimistes du XIXe siècle. Les savoir-faire pratiques se sont mieux transmis que les idéologies, instaurant ce que S. Tarrow nomme « une convention dans le contentieux » (contention by convention) : « L'action collective n'est pas sortie de la tête des organisateurs, mais elle est culturellement inscrite et communiquée. Les conventions apprises d'action collective font partie de la culture publique/politique (public culture) d'une société. Les groupes particuliers ont une histoire particulière - et une mémoire - de l'action collective. Les ouvriers savent comment faire grève, parce que des générations d'ouvriers ont fait grève avant eux ; les Parisiens construisent des barricades parce que les barricades sont inscrites dans l'histoire des contentieux parisiens ; les paysans s'emparent de la terre en utilisant les symboles que leurs aïeuls ont utilisés dans le passé » (Tarrow, 1994 : 19). Les prêtres font des pétitions, des grèves de la faim, en appellent à Rome, parce qu'ils connaissent cette façon de faire et parce que la structure des opportunités politiques les y pousse. Une telle récurrence n'implique en rien une position dominante de cette forme de protestation au sein de l'institution ; la plus grande partie de l'Eglise fonctionne sur d'autres régimes de la parole et du symbolique, non évoqués ici, mais qui relèvent aussi d'une mémoire en construction. Le répertoire analysé est historiquement minoritaire, mais périodiquement réactivé.

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Généalogie historique d'un répertoire.

6 La récurrence historique d'un tel répertoire a contribué à instaurer une mémoire de la distance vis-à-vis des constructions stato-nationales française et espagnole. La référence ainsi constituée se nourrit de la traduction partielle dans le champ politique (par les partis et organisations légitimistes, nationalistes et nationalitaires) des catégories religieuses de l'intransigeantisme, du libéralisme, de l'intégralisme et, dans une moindre mesure, du fondamentalisme. Ce modèle, historiquement dynamique, a connu quatre phases : a) La réaction légitimiste : la défense du catholicisme intransigeant va de pair avec celle des droits historiques au Sud. Elle critique l'Etat mais contribue à une socialisation nationale française de la population au Nord. Dans tous les cas, la mobilisation carliste au Sud comme le discours anti-républicain du clergé au Nord instituent selon des modalités différentes les conditions pour que ces territoires expérimentent une défiance vis-à-vis d'une représentation fortement normative et prescriptive de l'Etat central (chapitre 2). b) L'affirmation ethno-nationaliste : le nationalisme basque évolue d'un intégrisme racial vers une démocratie-chrétienne ethnique, qui bénéficie du soutien des prêtres mais est critiqué par la hiérarchie de l'Eglise. Il se diffuse de façon marginale au Nord, où sa réduction à une forme culturaliste est due en grande partie à l'action du clergé (chapitre 3). c) L'émergence nationalitaire : l'affirmation ethno-territoriale se sécularise, au Nord comme au Sud. Cependant, le clergé, loin de disparaître de la scène politique, ajuste son répertoire d'action à la nouvelle donne. Le recours à une théologie de la libération réajustée au contexte basque est une issue théorique opérationnelle aux questionnements liés à la sécularisation (chapitre 4). d) L'instauration d'une démocratie libérale en Espagne et l'institutionnalisation progressive des mouvements identitaires côté français marginalisent le répertoire d'action du clergé basque. En revanche, d'autres secteurs ecclésiaux (en premier lieu l'épiscopat) réinvestissent l'espace public en prononçant en particulier des expertises éthiques sur la paix. Côté français, l'enjeu identitaire est traité par l'institution, mais de façon dissimulée et en respectant mieux la séparation des domaines politiques et religieux (chapitre 5).

Socialisation religieuse et construction de la compétence identitaire

De la référence à la compétence : vers une approche complémentaire.

7 Deux questions restent en suspens : les mobilisations identitaires se résument-elles à l'action collective nationaliste ? L'influence du religieux se ressent-t-elle uniquement au travers des actions collectives du clergé ? Afin d'y répondre, la deuxième partie de la thèse a été construite autour de la notion de compétence. La première partie a analysé la construction de la référence mobilisatrice sur le temps long en se centrant sur les organisations et les acteurs les plus visibles des deux pôles : le clergé et les nationalistes. Or l'interaction entre le religieux et l'identitaire est loin de se résumer à cette visibilité. L'analyse historique doit être complétée par une sociologie de la construction d'une identité militante : celle-ci est d'abord une prise de rôle institutionnelle qui implique le réinvestissement d'un savoir-faire appris puis réajusté, sans qu'une telle socialisation de base n'induise un quelconque déterminisme. Cette

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partie est chronologiquement plus restreinte (deuxième moitié du XXe siècle), mais thématiquement plus large, dans la mesure où l'expression de la militance sera recherchée dans des domaines ne relevant pas stricto sensu d'une action nationaliste objectivée (c'est-à-dire orientée vers une coïncidence exacte entre l'Etat et la nation) mais contribuant tout autant à construire une référence identitaire dans des secteurs plus spécialisés, abusivement situés hors du politique.

8 Une socialisation religieuse forte a pu contribuer à générer des prédispositions pour l'apparition d'un militant généraliste. Celui-ci s'affranchira progressivement de la tutelle religieuse et se mutera en expert avec la spécialisation des tâches inhérentes à l'institutionnalisation de la mobilisation identitaire. La construction de la compétence a été analysée dans un moment historique particulier, celui d'un retrait institutionnel et social rapide et inédit de l'Eglise catholique en Pays basque, retrait doublé d'une recomposition importante de la mobilisation identitaire qui, loin de se limiter à ses seules expressions nationalistes/nationalitaires, a aussi emprunté d'autres voies. A partir d'une approche critique à la fois des théories classiques de la sécularisation du politique et des perceptions totalisantes de la culture (chapitre 6), nous avons pu repérer la permanence des effets de la socialisation catholique sur trois sites d'observation : a) La culture : l'objectivation d'une culture basque autonome, centrée autour de l'enjeu linguistique, s'est effectuée en grande partie dans les institutions religieuses, en particulier dans le contexte ascétique et utopique des communautés monastiques2 (chapitre 7). b) L'économie : les formes identitaires de l'économie (syndicalisme agricole et coopérativisme) trouvent une source de leur genèse dans l'Action catholique et les institutions d'enseignement catholiques3 (chapitre 8). c) La socialisation militante : l'expérience institutionnelle d'une socialisation religieuse forte a pu contribuer à construire un ethos militant particulier, suivant trois modalités biographiquement répérables4 (à partir d'une trentaine de récits de vie d'anciens prêtres et d'anciens séminaristes) : continuité, séparation, entre-deux relativiste (chapitre 9). 9 L'institution catholique a ainsi contribué, par la socialisation aux valeurs et aux compétences, à former un militant identitaire porteur d'une éthique particulière, à la fois généraliste et spécialisée, mais toujours orientée vers l'engagement. Le recul institutionnel de l'Eglise catholique n 'élimine pas les effets culturels d'une socialisation religieuse, et bon nombre d'objectivations et d'institutionnalisations qualifiées de culturelles, économiques ou politiques « basques » peuvent être relues comme des traductions de valeurs, de croyances et de savoir-faire partiellement acquis au sein de l'institution catholique. Une socialisation au sein de l'institution religieuse est le lieu et le temps où s'effectuent l'apprentissage et la construction des définitions rivales de la réalité. Elle agit en ce sens à la fois comme ressource et contrainte dans l'objectivation préalable aux rôles institutionnels futurs. La socialisation catholique a de l'importance dans l'émergence d'une première figure du militant, puis dans sa transformation en expert en matière de corps raréfié de connaissances, au terme d'un processus de spécialisation et de division du travail (on distingue désormais le politique, le culturel, l'économique) qui affecte l'ensemble des mobilisations identitaires basques.

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Une compétence partagée entre croyances, valeurs et savoir-faire.

10 La compétence identitaire basque en construction s'articule sur des croyances, des valeurs et des savoir-faire spécifiques, partiellement reliés à une socialisation religieuse des acteurs. Il y a un système dynamique de valeurs identitaires, au sens de principes spécifiques de régulation de l'action. Nous parlons bien de valeurs et non pas d'idéologies. En réservant le terme d'idéologie aux formulations spécifiquement nationalistes, nous soulignons bien que les valeurs qui guident partiellement les actions des militants/experts identitaires ne reposent pas forcément sur des théories formalisées. Si l'on consent, avec R. Boudon, à définir les idéologies comme « des doctrines reposant sur des théories scientifiques, mais sur des théories fausses ou douteuses ou sur des théories indûment interprétées, auxquelles on accorde une crédibilité qu'elles ne méritent pas » (Boudon, 1986 : 45), il nous faut alors réserver l'emploi de ce terme, comme nous l'avons fait dans la première partie, aux expressions postulant l'existence d'une nation basque aspirant à une souveraineté politique. En se centrant sur des domaines projetés par le sens commun hors du politique, cette deuxième partie a quitté le domaine de l'idéologie pour s'inscrire dans celui, plus large et moins repérable, des valeurs.

11 Or, c'est précisément sur ce terrain que la relation au religieux est la plus féconde. Si, par exemple, au lieu de ne voir dans l'expérience coopérative basque qu'une simple transposition économique de l'idéologie nationalitaire, on la considère plutôt comme une tentative d'application de préceptes comme la solidarité, la participation et le développement endogène, alors la comparaison avec les référents religieux devient opératoire (chapitre 8). De même si, par l'autonomisation de la culture, nous repérons autre chose que l'institutionnalisation d'un nationalisme culturel ou ethnique, mais bien plus profondément la fixation sous une forme graphique d'une culture dispersée (aux sens de J. Goody (Goody, 1977) et de F. Dumont (Dumont, 1995), on voit mieux sur quels processus longs largement mis en place par l'institution catholique se greffe l'objectivation culturelle (chapitre 7). Enfin, lorsque les acteurs, au terme d'une révision de leur itinéraire, situent les ponts entre socialisation catholique et engagement identitaire au niveau de l'apprentissage de l'engagement, de l'altruisme voire de la méfiance vis-à-vis des institutions, le discours porte sur les valeurs et non pas sur l'idéologie (chapitre 9). D'où, en particulier, notre réserve au moment de traduire le terme d'abertzale par nationaliste/nationalitaire. D'où, plus généralement, le pluriel accolé à « identité basque » dans ce travail. Lorsque les acteurs se disent abertzale, ils entendent bien désigner l'ajout d'une conscience politique à une conscience culturelle, mais sans pour autant associer automatiquement une telle aspiration à telle ou telle théorie formalisée et explicitement reconnue par les partis et organisations. Se dire abertzale est plutôt une façon d'affirmer que tout est lié : l'économique, le culturel ne peuvent fonctionner sans le politique, et vice versa. Une vision globale, qui montre la persistance du premier modèle du militant généraliste, et qui s'ajuste à l'exigence de réalisation connotée par la référence aux valeurs. 12 L'approche par les valeurs comporte un risque, que nous avons souligné à plusieurs reprises, en particulier grâce aux analyses d'A. Giddens et de J. Lagroye (Lagroye, 1997a, 1997b) : celui de se limiter à la conscience discursive des acteurs, d'arrêter l'analyse à ce que les acteurs disent d'eux-mêmes et de leur action, et de confondre ce qui est dit et ce qui est fait5. Même si l'on reste dans la sphère des valeurs, une telle approche ne

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retiendra que les valeurs positives verbalisées par les militants. Or, derrière l'engagement, la solidarité, la défense des faibles (des minorités sociales ou culturelles), on trouve la permanence d'autres principes non verbalisés, ou implicitement dissimulés : le refus de transiger sur certains points, un recours fréquent au conflit comme mode de fonctionnement, enfin une sur-détermination de l'action précisément par les valeurs verbalisées. Encore une fois, les variations dans le degré d'engagement - y compris dans sa dimension physique et violente - induisent un rapport distinct à ces valeurs implicites. En quittant cette fois le monde des principes, nous avons vu que l'apprentissage en milieu religieux pouvait conduire à l'intériorisation de savoir-faire pratiques réinvestis ensuite dans l'action identitaire (pratiques assembléistes et participatives, initiatives par le bas, etc.). En termes organisationnels, l'exemple de la fabrication culturelle à l'œuvre dans les revues issues des institutions religieuses et celui des structures syndicales et coopératives reliées à l'origine à des mouvements d'Action catholique et à des prêtres-animateurs illustre ce travail de traduction de savoir-faire intériorisés. Les itinéraires individuels témoignent aussi d'une pré- disposition au travail militant acquise en partie au sein de l'institution. Ces processus ne sont pas toujours verbalisés, ils relèvent de la conscience pratique des acteurs, mais sont des composants essentiels de leur compétence, schématiquement repris ici :

Les limites du recours au religieux.

13 En montrant que des « ponts » existaient entre les croyances, les valeurs et les savoir- faire catholique et identitaire-basque, nous n'avons pas voulu signifier que la compétence du militant/expert était entièrement déterminée par le religieux. La variété des regards que portent les acteurs sur leur propre itinéraire interdit d'instaurer une relation automatique. Ce qui, en revanche, ne laisse que peu de place au doute, c'est qu'une socialisation religieuse poussée comme a pu l'être un long séjour au séminaire ou, dans une moindre mesure, au sein de l'Action Catholique, est un choc

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biographique qui, en retour, structure les changements d'identités ou alternations, au sens de P. Berger et T. Luckmann (Berger et Luckmann, 1986). Bien sûr, les circonstances historiques considérées ici sont propices à ce que l'évolution identitaire prenne un tournant dramatique : un régime national-catholique vit ses dernières années en Espagne, marquées par un raidissement répressif inédit depuis la fin de la guerre civile. Au Nord, la structuration du mouvement nationalitaire et l'arrivée des réfugiés du Sud imposent un sens politique inédit aux expressions identitaires. L'Eglise, de son côté, est dans une situation ambivalente : elle est en pleine remise en question interne et externe mais elle occupe encore en Pays basque une position sociale prédominante. Nous rejoignons ici l'interprétation de la culture comme « boîte à outils » (tool kit) d'Ann Swidler (Swidler, 1986) pour qui la visibilité de l'effet de la culture sur les compétences (skills) engagées dans l'action et sa reproduction est beaucoup plus importante lors de périodes d'instabilité.

14 Le militant en construction, en somme, se trouve dans une situation assez facile à interpréter. La plupart des témoignages sollicités ici le soulignent : à l'époque (avant la relative sécularisation interne des institutions catholiques), la situation est perçue comme simple. Il y a le bloc des institutions dominantes d'un côté, où l'on range l'Eglise, le régime politique et les notables, et un peuple/pays qui souffre de l'autre. D'autre part, l'expérience d'une socialisation religieuse forte est une expérience politique : l'institution est vécue de l'intérieur, avec ses luttes de pouvoir, ses conflits de valeurs et d'idéologies. Le décalage entre le mode de fonctionnement d'une institution catholique et l'évolution sociale donne une portée conflictuelle à la moindre contestation. Il pousse surtout les membres de l'institution à objectiver leur situation et à l'interpréter de manière politique, c'est-à-dire en termes de rapports de pouvoir. 15 Autrement dit, dans ce contexte, l'acteur peut assez rapidement s'estimer et être estimé compétent en matière politique, contrairement, par exemple, à la génération de ses parents. Une analyse inspirée de P. Bourdieu (Bourdieu, 1979) verrait là une réhabilitation de la compétence politique provoquée par un changement des positions des agents sociaux dans le champ des rapports de classes. A cette réserve près qu'une socialisation catholique forte ne peut pas être interprétée comme un changement de position dans le champ des rapports de classe : si les futurs militants réalisent l'existence de classes sociales lorsqu'ils sont à l'intérieur de l'institution catholique, cela ne signifie pas qu'ils accèdent forcément eux-mêmes à une position sociale plus élevée que celle de leur milieu d'origine. La construction de la compétence passe davantage par l'expérience de rôles successifs très différents pourtant associés à des positions institutionnelles très proches que par un changement attribué de statut social. La dramatisation historique particulière associée à l'expérience vécue de l'institution contribue à construire la compétence identitaire de chacun, qui se traduit ensuite en termes organisationnels et institutionnels. 16 * *

17 *

18 Les deux réponses (celles de la référence et de la compétence) se veulent complémentaires : si la première fournit à « la religion pour mémoire » (Hervieu-Léger, 1993) la profondeur historique qu'elle sous-entend, la deuxième entend replacer l'acteur au cœur de ces processus de recomposition. La part du religieux dans la socialisation militante est effective mais non déterministe. L'acteur est libre de ses choix, mais il doit renégocier en permanence ses affiliations identitaires précédentes. Il

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ne peut, en l'occurrence, faire totalement abstraction de certaines prédispositions qui, elles, n'étaient que partiellement choisies au cours des différentes étapes biographiques. Autrement dit, l'exemple du religieux en terrain basque confirme une fois de plus, à un niveau plus général, la vacuité de l'opposition entre approches objectivistes et approches phénoménologiques et individualistes que dénonce P. Bourdieu (Chartier, Bourdieu, 1989 : 54). L'action militante identitaire est tout autant motivée par l'accès à des objectifs concrets (le motif en-vue-de) que par une réponse à une série de prédispositions (le motif parce que) (Schütz, 1998 : 56-59) qui font que l'objectif n'est pas forcément celui affiché sous une forme rationnelle. Or une socialisation religieuse a pu influer sur ces deux dimensions, dont l'exploration plus approfondie relèverait davantage de la psychosociologie ou d'une sociologie phénoménologique poussée que de la sociologie politique esquissée ici. 19 Au total, de façon théorique et empirique, cette recherche propose un cheminement allant d'une sociologie historique des institutions vers les constructions identitaires individuelles. En montrant comment le religieux a contribué à former la compétence des experts identitaires tout en l'inscrivant à l'horizon d'une référence collective, ce « cinquième récit » s'assigne surtout une mission exploratoire pour des recherches futures. C'est en ce sens qu'il prétend au statut d'innovation relative vis-à-vis d'une thématique déjà partiellement exploitée.

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NOTES

1. Cet article reprend brièvement les principales articulations et conclusions d'une thèse de doctorat en science politique soutenue en novembre 2000 à l'IEP de Bordeaux (Itçaina, 2000). La thèse a bénéficié du soutien du Ministère de la recherche et d'Eusko Ikaskuntza. 2. On s'inspire ici des analyses de Jean Séguy sur la dimension utopique du monachisme (Séguy, 1980), de l'approche de l'institutionnalisation de la culture chez M. de Certeau (De Certeau. 1980) et de l'anthropologie de l'écriture de J. Goody (Goody, 1977). 3. L'approche weberienne classique (Weber, 1964) est ici combinée à l'approche de l'économie sociale et de la sociologie religieuse chez H. Desroche (Desroche, 1968) et à des études de cas contemporaines des ressources sociales et culturelles de telle forme spécifique de développement local (Palard, 1999). 4. Sur les problèmes posés par la méthodologie des récits de vie dans l'analyse de la socialisation, voir (Dubar, 1997). 5. Même si, objecteraient les tenants de la philosophie analytique, « dire, c'est faire », surtout lorsque les conditions d'un énoncé performatif sont réunies, ce qui est particulièrement crucial en matière religieuse (Austin, 1970).

INDEX

Mots-clés : catholicisme, clergé, identité, nationalisme, socialisation Index chronologique : 19e siècle, 20e siècle Thèmes : histoire, religion

AUTEUR

XABIER ITÇAINA

CNRS-CERVL, Pouvoir, Action publique, Territoire IEP Bordeaux [email protected]

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La précarité des journalistes locaux

Eguzki Urteaga

NOTE DE L'AUTEUR

Eguzki Urteaga est Docteur en Sociologie de l'Université Victor Segalen Bordeaux II et Licencié en Histoire mention Géographie de l'Université de Pau et des Pays de l'Adour. Après avoir effectué des recherches sur les mouvements sociaux et le militantisme, il a réalisé une Thèse de Doctorat intitulée Les journalistes locaux : mutation d'une profession sous la direction de François Dubet au sein du CADIS-CNRS. Il a publié un ouvrage ayant pour titre Le mouvement antimilitariste basque contemporain ainsi que plusieurs articles dans des revues universitaires dont La revista vasca de sociología y ciencia política : Inguruak et Giza eta gizarte zientzien aldizkaria : Uztaro. Actuellement, il travaille sur la théorie sociologique.

Introduction

1 La littérature sociologique s'est peu intéressée aux journalistes locaux. La faible documentation existante sur ce sujet est révélatrice du manque de considération portée à ces acteurs ayant davantage suscité le mépris que la curiosité. La raison en incombe notamment au fait que ces chercheurs, dont Wolton1, lisent, regardent et écoutent peu ces professionnels et leurs titres d'appartenance. Toutefois, c'est de moins en moins le cas car ils ne peuvent les ignorer plus longtemps tant par leur nombre que par la diffusion de leurs médias largement supérieure à celle des organes de presse nationaux que d'aucuns qualifient de parisiens.

2 C'est pourquoi, depuis quelques années, des études concernent les journalistes de région privilégiant des questionnements divers. Certaines se sont penchées sur les rapports qu'ils entretiennent avec les notables en général et les élus locaux en particulier. L'attention est dès lors portée sur la fréquence, les lieux et les modalités des rencontres entre ces acteurs témoignant d'une connivence qui est mise en exergue afin de mieux saisir l'incidence qu'ont ces relations sur la manière dont les titres relatent

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les faits concernant le député-maire, le président du Conseil Général ou le conseiller régional. Influence qui est tantôt démontrée tantôt postulée. Ces travaux s'inscrivent dans une tradition visant à prouver la collusion entre les pouvoirs politique et médiatique. 3 D'autres travaux ont préféré attirer l'attention sur le rôle joué par les journalistes locaux et leurs médias dans le développement du sentiment d'insécurité voire de la violence elle-même. « Les représentations de l'insécurité sont façonnées par les médias. (...). De fait, la presse locale disqualifie constamment, et sans s'en rendre nécessairement compte, des quartiers ou des groupes qu'elle associe à la délinquance ou au crime, les donnant à voir sous l'angle principal du fait divers et de la menace ». Cela « conforte des représentations qui amplifient la violence en flattant les préjugés de la population, mais parfois aussi en rendant compte avec objectivité des phénomènes observés ». Et d'ajouter, « en conférant aux acteurs tentés par la violence une visibilité qu'ils n'atteignent pas autrement, les médias peuvent encourager, éventuellement malgré eux, des conduites spectaculaires »2. 4 En revanche, la condition de ces journalistes n'a guère piqué la curiosité des chercheurs car nous ne connaissons ni leurs carrières, ni leurs statuts. Tel est justement notre propos en examinant celle des journalistes professionnels dans les Pyrénées- Atlantiques. A ce sujet, nous défendons l'hypothèse selon laquelle, depuis les années 70, la condition journalistique locale se précarise3 peu à peu avec la faible progression des carrières, la fragilité de statuts et la modestie des revenus, bien que nous centrions notre analyse sur les deux premiers indicateurs. Plus précisément, à la promotion limitée des postes, des échelons et des fonctions s'ajoute la fragilité des statuts avec le développement des contrats précaires, du pigisme, du temps partiel comme du chômage pouvant précipiter momentanément ou durablement les journalistes dans l'exclusion sociale4. Cette précarité touche la profession dans sa totalité, malgré le fait que ses conséquences sont plus visibles et manifestes à ses lisières.

1. Faible promotion des carrières

1.1. Progression de poste limitée

5 En effet, au cours des années 80 et 90, l'évolution de poste est réduite puisque la plupart des rédacteurs n'accèdent guère à l'encadrement, certains d'entre eux ne deviennent chef de service qu'après de nombreuses années d'attente et les rédacteurs en chef proviennent souvent de départements annexes. Rares sont ceux qui parviennent à la direction des médias locaux exigeant formation spécialisée, mobilité externe, qualification élevée et investissement supérieur. Même lorsque la possibilité leur en est offerte, ils la refusent, jugeant les responsabilités excessives, d'autant que le poids de la gestion humaine, administrative et financière ne leur laisse guère de temps pour le reportage.

6 L'accès à la direction illustre cette difficulté puisque peu nombreux sont les journalistes parvenant à ce poste aussi convoité que lointain, notamment dans les locales de Radio France, d'autant que multitude de directeurs sont issus de l'animation. Atteindre le poste de rédacteur en chef est également semé d'embûches dans la mesure où Sud Ouest, France 3, Radio France voire Pyrénées Presse préfèrent les accorder aux professionnels ayant œuvré en dehors de leur zone de diffusion. Ainsi, l'actuel rédacteur en chef de

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France . ? Pays Basque provient de la locale de Tours, le rédacteur en chef de Radio Bleu Pau Béarn est issu de la région nantaise ou celui de Radio Bleu Pays Basque est originaire de Bordeaux. Le renouvellement des perceptions, des méthodes de travail et des hommes se fait au détriment du déroulement des carrières des autochtones. Dès lors, ces derniers se sentent souvent coincés, pris au piège, sans option véritable. 7 A l'exemple de la rédactrice de Radio Orthez 2001 qui y a débuté peu après sa création en juillet 1982 en faisant à la fois de l'animation et du journalisme. Son investissement lui a permis de bénéficier d'un contrat emploi solidarité (CES) en 1985 suivi d'autres contrats précaires. Cependant, il lui a fallu attendre 1989 pour obtenir un CDI en tant que rédactrice chargée de l'élaboration et de la présentation des journaux et, progressivement, ce rôle s'est transformé dans la mesure où elle assurait la formation comme la coordination des CES-CEC tout en s'occupant de la confection des plannings, des programmes, de la comptabilité, des dossiers de candidature pour l'obtention de subventions. Pourtant, bien qu'exerçant le rôle de rédactrice en chef, elle s'est vue refuser ce rang par la direction. 8 Les obstacles abondent tout autant pour devenir adjoint, la plupart des rédacteurs et des chefs de service n'ayant pas cette opportunité, tel ce professionnel : « J'ai débuté dans le journalisme en 1964 en tant que pigiste pour La Dépêche du Midi résidant dans les Hautes Pyrénées. En 1966, le titre m'a proposé le poste de rédacteur sportif à Lannemezan avant de m'intégrer en tant que journaliste polyvalent à la rédaction d'un quotidien départemental, s'appelant La Nouvelle République des Pyrénées, journal dont le siège se trouve à Tarbes. Très rapidement, j'ai été affecté au service des sports, composé alors de deux membres, dont j'ai pris la direction à partir de 1973. A ce titre, j'avais la responsabilité des journalistes, des pigistes comme des correspondants sportifs. En 1993, suite au changement politique du Groupe La Dépêche du Midi auquel appartient le titre, j'ai accepté la proposition de Pyrénées Presse pour devenir chef du service des sports avec peu de chances de gravir les postes, d'autant que je suis en fin de carrière » 5. 9 Les raisons de l'élévation restreinte de poste sont les suivantes. Premièrement, malgré la professionnalisation graduelle, un grand nombre de médias ne comprend guère d'encadrements chargés de gérer le budget, de nouer des partenariats, de représenter l'entreprise de presse ou d'animer l'équipe. La plupart des directions se trouvent au siège distant de nombreux kilomètres, à l'image des titres transfrontaliers. Certains organes de presse n'en disposent pas davantage pour d'autres motifs, à l'image d'Irulegiko Irratia. « Dès la création de la station en 1982, nous nous sommes opposés à la présence d'un directeur ayant une fonction gestionnaire et rédactionnelle par souci de préserver l'autonomie de la rédaction et d'assurer l'égalité entre journalistes en évitant tout rapport hiérarchique. La gestion est assurée par le bureau et par le Conseil d'Administration »6. 10 Deuxièmement, des journalistes ne parviennent souvent à ces postes qu'à la faveur de crises, à l'image de la directrice de Radio Oloron qui a fait ses débuts dans le journalisme à Oloron en 1987 suite à la décision de la station de recruter un professionnel. Elle était rédactrice chargée des reportages, du montage et de la présentation des bulletins d'information. Avec le temps, à l'aide de contrats précaires, la radio a fait appel à de nouveaux salariés n'ayant pas ou peu d'expérience du journalisme comme de la radiodiffusion. En 1992, elle accède à la direction de la station dans un contexte de crise qui risque de se solder par la vente de Radio Oloron à Chérie FM. Avec l'aide de deux

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personnes, elle la reprend en main en la dotant de nouveaux bureaux et Conseil d'Administration tout en leur assignant des objectifs clairs. Sans cette crise, elle n'y serait sans doute jamais parvenue. 11 Troisièmement, l'absence de mobilité externe est en cause. En effet, les médias locaux en général et les quotidiens départementaux en particulier se caractérisent par une faible mobilité interne (entre agences) et surtout externe (entre médias) de leur personnel. Il n'est pas rare que des personnes fassent la totalité de leur carrière au sein des mêmes titre et service. Dès lors, ils n'ont pas été confrontés à d'autres sources, méthodes de travail, cultures d'entreprise qui leur permettent de s'ouvrir à de nouvelles pratiques professionnelles. Ce ne sont guère les personnes adéquates pour impulser une dynamique, insuffler de l'air frais et donner un nouveau souffle à des rédactions passablement engourdies. Or, c'est précisément ce que recherchent les PDG à défaut de faire signer une clause de mobilité, comme la pratique Sud Ouest depuis 1974.

1.2. Élévation d'échelon réduite

12 L'avancement d'échelon connaît des restrictions analogues puisque l'ancienneté dans l'entreprise de presse comme dans la profession ne suffit plus pour passer à l'échelon supérieur et devenir successivement journaliste spécialisé, chef d'édition voire grand reporter. Les médias s'efforcent d'y ralentir l'accès et/ou d'être plus sélectifs dans leur attribution. De ce fait, quelques chanceux connaissent une évolution relativement rapide alors que quantité d'autres sont condamnés à la base après vingt ans de carrière.

13 Ainsi, devenir grand reporter n'est pas tâche aisée compte tenu du fait que, dans l'ensemble du département, l'on n'en dénombre que quatre, chiffre inchangé au cours des dernières années. Cet échelon n'est plus exclusivement lié à l'ancienneté, mais la formation professionnelle7, l'investissement, la qualité du travail voire la dynamisation de l'équipe entrent également en jeu. Plus encore, la mobilité de l'encadrement entre médias et entre supports est telle que la discontinuité est de mise de sorte que l'effort opéré et les sacrifices consentis ne reçoivent plus de récompense, le témoin de ce travail ayant quitté l'entreprise. En un mot, les journalistes ne récoltent plus les fruits de leur labeur. 14 De même, arriver à l'échelon « chef d'édition » n'a rien de systématique puisque le département n'en compte que six dont trois à France Bleu Béarn, un à France Bleu Pays Basque et un autre dans chaque rédaction départementale de Sud Ouest. Pis encore, aucun rédacteur œuvrant dans les médias locaux et transfrontaliers n'y parvient. Devenir journaliste spécialisé est également ardu, parce que les organes de presse réfléchissent à deux fois avant d'accorder ce rang, sachant qu'une promotion précoce et généralisée donne lieu à une augmentation massive des dépenses. « Nous, les PDG, devons faire preuve de rigueur dans la gestion, en traquant les frais inutiles et les gaspillages sans revenir sur les acquis sociaux. L'un des meilleurs moyens consiste à retarder les élévations d'échelon du personnel »8. 15 Comment rendre compte de telles difficultés ? En premier lieu, bien que l'ancienneté ne garantisse plus la progression d'échelon, gravir les marches suppose un certain âge. Les médias des Pyrénées-Atlantiques récompensent ainsi les années de fidèles et loyaux services, tel ces deux grands reporters quinquagénaires. Par contre, nul bénéficiaire de cet échelon n'a moins de quarante ans. Le problème réside dans le rajeunissement de la

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profession qui affecte l'ensemble des titres de telle sorte qu'il est ardu de devenir grand reporter. Tout au plus, les journalistes peuvent précipiter le processus. 16 En second lieu, l'affaiblissement syndical et le recul des adhésions auprès des « nouveaux journalistes » notamment ne sont pas sans effet, surtout dans le service public où les centrales syndicales jouent un rôle majeur lors des commissions paritaires regroupant les partenaires sociaux qui négocient les promotions du personnel. « Nous appuyons l'ensemble des candidatures, dont celles de la direction, ce qui ne nous empêche nullement de proposer nos candidats et de nous battre pour qu'ils obtiennent des avancements. Ainsi, grâce à mon action et à leur travail, plusieurs journalistes de Radio Bleu Pays Basque ont connu des carrières plus rapides. Ils ont gravi les échelons en l'espace de quelques années, ce qui leur permet de jouir de salaires largement supérieurs au mien »9. 17 En dernier lieu, cela est directement corrélé à la précarité des statuts car le pigisme fait disparaître les échelons de grand reporter, de chef d'édition et de journaliste spécialisé. N'étant pas titulaires, ils ne jouissent d'aucun avancement lié à l'ancienneté. Comme l'explique cet indépendant, « l'ancienneté est une donnée n'ayant aucun sens lorsque l'on est pigiste car le montant des piges est constant et ne progresse pas suivant le nombre d'années de collaboration. Résultat : l'on stagne par rapport à nous-mêmes et l'on régresse en relation aux journalistes intégrés dans des médias comme Sud Ouest, France Bleu Pays Basque ou France 3 Aquitaine. Les organes de presse locaux ou nationaux pour lesquels l'on travaille n'ont guère l'intention de prendre en compte notre expérience et de la traduire dans un système d'échelons parallèle »10.

1.3. Avancée de fonction restreinte

18 Une faible avancée, pour ne point parler de stagnation, est tout aussi perceptible entre fonctions dans la mesure où la transition de la photographie à la rédaction, du secrétariat de rédaction à la rédaction ou du laboratoire à la photographie est complexe, puisque les rédactions sont plus structurées et les services plus cloisonnés. Le rôle dévolu à chaque section se spécifie empêchant les transitions rapides et conséquentes.

19 Ainsi, être rédacteur relève du rêve pour nombre de secrétaires de rédaction, de journalistes reporter d'images (JRI) et de photographes. Rêve dont la réalisation s'éloigne. La dévalorisation des fonctions techniques au sein de la profession les incite à postuler à la rédaction qui facilite les déplacements, les relations privilégiées comme l'écriture, bref, qui permet d'être un personnage public. Ceci dit, le nombre de places disponibles est inférieur aux demandes adressées, d'autant que les rédacteurs issus des écoles de journalisme abondent, sont mieux formés et moins onéreux. Résultat : de tels avancements se comptent sur les doigts d'une main. 20 Les journalistes des Pyrénées-Atlantiques peinent aussi à parvenir au secrétariat de rédaction, cette fonction exigeant une maîtrise technique spécifique. Son exercice implique de savoir sélectionner, corriger, réécrire les articles mais aussi d'élaborer des maquettes papier puis informatisées à partir des textes, photographies et infographies disponibles suivant l'actualité. L'avènement de l'informatique a profondément altéré le secrétariat de rédaction au point qu'un rédacteur ne l'exerçant point régulièrement ou n'ayant pas suivi de stage de formation continue est incapable de s'y retrouver. Les titres hésitent même à confier cette tâche aux jeunes stagiaires car l'enseignement des

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bases est non seulement long et coûteux mais en plus suppose de désigner un formateur qui ne pourra plus effectuer son propre travail. 21 Les candidats ont du mal enfin à devenir JRI, d'autant que la concurrence est féroce comme l'agence de télévision ETV en a fait l'expérience. Tandis qu'elle jouissait d'un contrat avec Euskal Telebista, la chaîne publique a décidé de le rompre et de lancer un appel d'offre sur l'ensemble du Pays Basque, de part et d'autre de la frontière. Les conditions imposées sur la disponibilité, le temps de travail et la rémunération étant des plus restrictives, ETV n'était plus compétitive. Le marché est emporté par une entreprise rivale, dont le siège se trouve outre-Bidassoa, qui fournit les images à Iparraldearen Orena et dont les cameramans œuvrent en coopération avec les rédacteurs d'ETB. Finalement, ETV a licencié ses journalistes reporters d'images et son directeur peine à trouver des piges. 22 La rivalité est d'autant plus rude que le nombre de télévisions dans les Pyrénées- Atlantiques est restreint. Le département ne dénombre que deux chaînes locales, France 3 Pays Basque et Euskal Telebista Iparralde en l'occurrence, et deux bureaux détachés de France 3 Aquitaine. Au total, elles comptent huit JRI titulaires et deux ou trois JRI pigistes. Ces derniers, béarnais de surcroît, sont mal lotis car les opportunités de travail s'amenuisent comme peau de chagrin au point de les contraindre à se déplacer au Pays Basque, dans les Landes, dans les Hautes-Pyrénées voire dans le Lot-et-Garonne. La situation n'est guère comparable à celle de la région parisienne et des métropoles régionales où se trouvent les sièges des différentes chaînes généralistes et spécialisées sans compter les agences de télévisions privées. 23 Ainsi, pour quantité de candidats, le songe est fugace dans la mesure où ils renoncent au journalisme reportage d'images eu égard aux complications inhérentes à cette fonction. Leur choix s'est porté sur la photographie parce qu'ils estiment que leurs chances s'en trouveraient accrues. « A mes débuts, j'ai voulu être JRI. Étant attiré par l'image, animée de surcroît, je trouvais qu'elle offrait de grandes potentialités car l'image est beaucoup plus puissante et efficace que le texte pour traduire les émotions, les sentiments, bref, le vécu. Mais j'ai rapidement fait une croix dessus et me suis orienté vers la photographie qui m'autorisait à rester dans cet univers »11. 24 Enfin, laborantins, titulaires d'un CAP photo ou personnes extérieures à la profession qui arrivent au photo-journalisme sont rares actuellement. Les reporters titulaires ou pigistes de la presse quotidienne et hebdomadaire, du Béarn et du Pays Basque, de magazines et d'agences de presse, représentent un nombre suffisant eu égard au marché. Chaque média dispose de ses reporters attitrés et puise parmi les indépendants lorsque l'actualité se densifie et s'amoncelle. « Toutes les places sont prises, d'autant que le marché départemental est réduit. En somme : les quelques photographes indépendants éprouvent les pires difficultés pour obtenir la moindre pige et certains galèrent en ne parvenant pas à joindre les deux bouts »12.

2. Fragilité des statuts

25 S'y ajoute une fragilisation des statuts avec l'accroissement des contrats précaires (CDD, CES, Contrats de Qualification, Contrats Commerciaux), des temps partiels13, du pigisme comme du chômage qui affectent particulièrement les femmes, les jeunes et les quinquagénaires, les moins diplômés.

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2.1. Développement des contrats précaires

26 Les contrats précaires se multiplient depuis les années 80, à l'instar des CDD. Sur l'ensemble de l'Hexagone, les précaires (CDD et pigistes) augmentent de 38 % en six ans allant de 4 100 en 1993 à 5 650 en 1999, leur pourcentage passant de 15 % à 19 % des journalistes. Idem dans les Pyrénées-Atlantiques, d'autant que les départements frontaliers et côtiers sont attractifs. De la sorte, les précaires sont passés de 28 en 1996 à 33 en 1999, soit 18 % de la profession. « Encore faut-il préciser que ce total est largement minoré tant les obstacles sont grands sur la route de l'obtention du sésame de la carte. De l'ignorance du statut en passant par les moyennes de piges insuffisantes (plus proches du RMI que du SMIC) sans oublier les invites patronales à différer la demande quand le statut du correspondant local n'est pas proposé »14.

27 Le recours aux Contrats Emploi Solidarité (CES) s'est aussi amplifié15. Alors qu'ils n'existaient point (le plan pour l'emploi des jeunes date de 1986, le décret pour la réinsertion des chômeurs de longue durée de 1985 et le plan pour l'emploi de 1988) ou n'étaient pas employés par l'audiovisuel public, Sud Ouest, ni Pyrénées Presse, les TUC- CES sont devenus la norme pour nombre de professionnels. Souvent, le provisoire dure et les journalistes entreprennent une carrière précaire qui les mène d'un CES à un Emploi Jeune en transitant par un CEC et un Contrat de Qualification. 28 Les bénéficiaires des CES sont les jeunes de 18 à 25 ans, les titulaires au plus d'un CAP- BEP, les demandeurs d'emploi inscrits pendant 12 mois au cours des 18 mois précédant la date d'embauche, les personnes percevant l'allocation de fin de droits ou l'allocation de solidarité spécifique, les titulaires du RMI et, à titre exceptionnel, des personnes ne remplissant pas ces conditions mais rencontrant des tracas particuliers d'accès à l'emploi. La durée de ces contrats oscille entre 3 et 12 mois, pouvant atteindre 24 mois, et suppose un investissement hebdomadaire d'au moins 20 heures. Ces contrats sont fort avantageux pour les médias, l'État prenant en charge la totalité ou la majeure partie (85 %) de la rémunération des salariés ainsi que les frais de formation complémentaires sur une base forfaitaire, tout en étant exonérés des charges patronales. En réalité, les CES concernent un public bien plus ample, les contrats aidés étant détournés de leur vocation initiale. 29 Les radios locales privées y ont spécialement recours pour assurer leur constitution puis leur survie, à l'exemple de Radio Oloron qui utilise régulièrement les CES dans la mesure où, actuellement, la station compte deux personnes en CES auxquelles s'ajoutent trois individus en CEC dont deux à 130 heures par mois et une à 87 heures par mois. Ces contrats étant de courte durée, le renouvellement du personnel est fréquent, malgré les efforts de la direction pour le garder. Depuis 1992, la radio recrute trois à quatre CES par an et les conditions d'accès à ces contrats sont telles que la station emploie avant tout des jeunes non qualifiés, des chômeurs de longue durée voire des RMIstes. 30 L'usage du contrat de qualification a également augmenté compte tenu du fait qu'il assure une prise en charge partielle de la rémunération, des frais de formation et des charges patronales par l'État (encouragé par des mesures gouvernementales d'insertion et de réinsertion dans le marché de l'emploi telles que le Plan Avenir Jeune de 1981, le Plan pour l'emploi des jeunes de 1986, le plan pour l'emploi de 1988). Les médias, dont les radios locales privées et les quotidiens transfrontaliers, l'utilisent sans retenue et

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même les principaux titres sont tentés d'employer de jeunes recrues par ce biais, ce qui est rentable pour le titre et qualifiant pour le journaliste. 31 La rédactrice de Gara qui dispose d'un tel contrat en est l'illustration. « Je suis entrée à Gara comme journaliste stagiaire afin de couvrir l'actualité du Pays Basque nord tout en étant formée par mon collègue. Les mois passant, je me suis retrouvée sans véritable contrat de travail ni couverture sociale. Nous avons donc demandé que ma situation soit régularisée aux yeux des législations française et espagnole. Après plusieurs semaines de discussion, nous sommes parvenus à un accord stipulant que je disposais d'un contrat de qualification durant deux ans qui me permet de conjuguer travail salarié et formation professionnelle. L'attribution du contrat a été tardive, la direction cherchant à profiter des opportunités offertes par la loi »16. 32 D'autres journalistes sont davantage concernés par les contrats commerciaux qui sont usés par les médias transfrontaliers, à savoir Egin puis Gara, Radio Euskadi, Euskadi Irratia et Euskal Telebista. Sans équivalent en France, ils sont décernés aux salariés pour une période n'excédant pas douze mois puis reconduits à l'envi. Comme le dit cette rédactrice, « mon contrat de travail est renouvelé tacitement chaque année par le quotidien Egin. Mais il suffit que les ventes déclinent, que les recettes publicitaires chutent ou qu'un juge ferme temporairement ou définitivement le journal pour me retrouver sans emploi. Egin a ainsi procédé à des licenciements au début des années 90 dans un contexte de crise publicitaire »17. 33 Comment comprendre cet accroissement des contrats précaires ? Premièrement, outre la volonté croissante des médias de réduire les dépenses de personnel, il s'explique par le fait que ces journalistes ont un niveau de qualification inférieur à celui de leurs homologues nationaux. Ainsi, deux des trois photographes pigistes de Pyrénées Presse disposent d'un CAP quand le troisième est bachelier. Les rédacteurs de Xiberoko Botza et des radios municipales béarnaises ne sont pas diplômés d'écoles de journalisme. Dès lors, ils sont condamnés à entrer dans la profession par la petite porte, synonyme de CES, de contrats de qualification ou de contrats commerciaux alors que ceux issus de ces écoles obtiennent immédiatement des stages, des CDD puis des CDI. 34 Deuxièmement, cela fait suite au manque d'expérience des journalistes novices dans la profession. Les médias préfèrent leur concéder des contrats précaires parce qu'ils ne disposent guère des savoirs, savoir-faire, savoir-dire et savoir-être exigés par l'exercice du journalisme local. D'un côté, le jeune a l'occasion d'acquérir une expérience et de faire la preuve de ses compétences professionnelles. D'un autre côté, l'employeur dispose d'une main d'oeuvre bon marché qui, si elle est performante, se verra proposer un contrat en bonne et due forme. 35 Troisièmement, cela résulte de la volonté des entreprises de presse d'opérer une meilleure utilisation du temps. « Lorsque l'activité connaît des fluctuations saisonnières ou lorsqu'il faut honorer des commandes imprévues, il est facile de faire appel à ce type de main d'oeuvre. Ainsi, l'entreprise économise sur les temps morts en ajustant au plus près le travail rémunéré au travail effectif. Les entreprises font appel en général à l'intérim pour un besoin bref, au CDD pour un besoin prévu, régulier et plus long »18.

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2.2. Prolifération des temps partiels

36 Les temps partiels foisonnent aussi à partir des années 80, particulièrement auprès des femmes et des jeunes journalistes qui représentent 70 % des temps partiels. Les radios locales privées y font amplement appel, à l'image de Cure Irratia où la totalité des animateurs et trois journalistes sur quatre pâtissent de temps partiels (20h, 25h, 35h) et d'irulegiko Irratia qui employait ses quatre reporters-présentateurs à temps. Le service public n'est guère épargné puisque deux des huit journalistes de France 3 Pays Basque oeuvrent à mi-temps, France Bleu Pays Basque offrant un panorama comparable.

37 D'abord, le trois-quart temps se généralise dans les Pyrénées-Atlantiques car l'ensemble des supports l'utilise, la presse, la radio comme la télévision ainsi qu'un grand nombre de médias, de Gure Irratia à La Semaine du Pays Basque en passant par La République des Pyrénées. Ainsi, le photographe de l'hebdomadaire et deux des quatre reporters de la station locale associative sont à trois-quart temps, permettant de concilier les emplois d'un rédacteur et d'un secrétaire de rédaction, d'un journaliste et d'un animateur, d'un rédacteur et d'un JRI. Si le trois-quart temps accorde vie privée et vie professionnelle, surtout pour les femmes mariées avec enfants à charge, il est préjudiciable professionnellement car synonyme de salaire limité et de stagnation de carrière19. 38 Ensuite, le mi-temps connaît un développement notoire aussi bien au Pays Basque qu'en Béarn dans la mesure où il concerne surtout les médias locaux, dont les locales de Radio France et France 3 Pays Basque. Les femmes et les jeunes figurent en bonne place parmi les bénéficiaires du mi-temps alors que les hommes de plus de quarante ans sont peu concernés. S'il est parfois choisi afin de consacrer davantage de temps à leur famille, à leurs loisirs voire à leur santé, il est souvent subi. Qu'il émane de la direction ou d'une décision collégiale, tel que cela s'opère dans les radios d'expression basque, il est rarement conforme au souhait de la personne concernée. 39 Enfin, le temps de travail indéterminé se propage avec l'avènement du pigisme de masse. Il est restreint sans pouvoir préciser sa durée tant les situations sont diverses et fluctuantes. D'un journaliste à l'autre, d'un mois à l'autre, d'un entreprise de presse à l'autre, le temps de travail change. De dix à trente-cinq heures par semaine, de deux à quatre jours de travail hebdomadaire, de trois à dix heures par jour. Ne figurant sur aucun document, il varie suivant les CDD, les piges journalières et les articles rédigés. Or, il parvient difficilement à quarante heures tant les piges sont insuffisantes avec l'augmentation des journalistes, d'une part, et la diminution des piges pour indépendants, d'autre part. Deux cas de figure se présentent. 40 Premièrement, les journalistes œuvrant à la journée, tel ce photographe pigiste de Pyrénées Presse. « En moyenne, mon temps de travail hebdomadaire équivaut à deux jours complets. Il peut aussi bien s'agir du lundi et du mercredi, du mardi et du vendredi ou du week-end. Cela est tributaire de la densité de l'actualité, de la disponibilité des autres indépendants (étant le plus jeune et le dernier arrivé), du budget piges disponible. Ponctuellement, le chef du service photo de Pyrénées Presse me propose d'oeuvrer jusqu'à cinq jours par semaine. Cette semaine, par exemple, j'ai travaillé lundi, mardi, mercredi, samedi et dimanche. Dans tous les cas, les journées débutent à 9h30 et se terminent à 21 h et, lorsque je suis de permanence, elles peuvent se prolonger jusqu'à 2h du matin »20.

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41 Deuxièmement, les journalistes rémunérés à l'article n'ont pas de temps de travail précis, telle cette correspondante du Diario Vasco. « Je n'ai pas de temps de travail quotidien ni hebdomadaire. Mes horaires fluctuent fortement d'une semaine à l'autre suivant l'actualité, le nombre et la longueur des articles à rédiger, les demandes des chefs de service. En moyenne, cela représente vingt-cinq heures par semaine, soit deux à six heures par jour. Dans ce laps de temps, je lis la presse, je passe des appels téléphoniques, je me documente, je me rends à des conférences de presse ou à des manifestations, je rédige les articles. Mon temps de labeur actuel est inférieur à ce qu'il était au début dans la mesure où, l'expérience aidant, j'ai constitué des dossiers, j'ai une meilleure maîtrise des sujets, je travaille davantage par téléphone et je rédige plus rapidement »21. 42 Le recours massif au temps partiel a divers fondements. D'une part, il accroît la productivité des journalistes compte tenu du fait que, œuvrant vingt à trente heures par semaine, ils ne sont point affectés par la fatigue et le surmenage. Ils se consacrent entièrement à leur tâche et perdent moins de temps en pause-café et en débats représentant plusieurs heures par semaine. Plus encore, ayant une vie privée plus dense sur les plans familial comme des loisirs (lectures d'ouvrages, visionnages de films, activités sportives), ils sont plus à même de proposer des sujets originaux et novateurs. Les discussions alimentées ou écoutées à l'improviste dans un café ou un marché concourent à ce renouvellement. Leurs angles témoignent des moments passés à observer voire à scruter des acteurs de la vie politique, économique, culturelle et les scènes de la vie quotidienne dans une banque, une fête de village ou un supermarché. 43 D'autre part, cette forme de sous-emploi accroît les heures travaillées puisqu'un journaliste disposant d'un trois-quart temps œuvre, en fait, l'équivalent d'un temps plein. Comme le relate cette rédactrice, « je bénéficie d'un trois-quart temps à Irulegiko Irratia alors que j'opère environ quarante heures par semaine. Au terme de mon temps de travail légal, je reste au studio afin de monter un reportage, avancer la besogne du lendemain, aider un collègue à réaliser son sujet ou ranger les dossiers ; d'autant que les effectifs sont réduits. Mais, ce travail additionnel n'est pas rémunéré sous la forme d'heures supplémentaires »22. Cette pratique s'est vite généralisée car la culture professionnelle valorise l'investissement, la présence, l'absence d'horaires. Seule l'actualité compte et toute tentative de respecter les horaires se heurte à la réprobation de la direction voire des collègues.

2.3. Accroissement du pigisme

44 « On assiste à un accroissement considérable du pourcentage de pigistes au sein de la profession, dont témoignent les statistiques de la Commission de la carte. Longtemps compris en dessous des 8 % de l'ensemble des professionnels, au temps du plein emploi, il s'emballe brusquement dans les années 80 : 9,6 % en 1980, 12,1 % en 1985, 14,7 % en 1990, (26,8 % en 1995)23. Signe de précarité, la pige est d'abord pratiquée par les jeunes et les femmes : 31,7 % des pigistes étaient des femmes en 1981, 40,5 % en 1990 » 24. Les reporters-photographes sont particulièrement touchés passant de 16,7 % en 1955 à 24,4 % en 1970 pour atteindre 44,1 % en 1990. La situation ne semble guère s'améliorer puisque l'on dénombre 5 501 pigistes au niveau national, 123 au niveau régional et plus d'une trentaine au niveau départemental. Pis encore, sur 1880 nouvelles cartes de journalistes délivrées en 1998, 846 (environ 40 %) sont pigistes ou chômeurs.25

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45 En réalité, les chiffres sont bien supérieurs. « On peut supposer que la vraie valeur est plus importante. Ainsi, nombre de pigistes travaillent pour la presse institutionnelle ou d'entreprise en même temps qu'ils pigent pour la presse magazine grand public ou spécialisée. Or, leurs revenus étant constitués pour plus de 50 % par le secteur communication, ils ne peuvent plus prétendre à la carte de journaliste. Il en va de même dans la presse audiovisuelle, où un certain nombre de pigistes relèvent du régime des intermittents du spectacle pour bénéficier de meilleures allocations aux Assedics et n'ont plus de carte. Enfin, d'autres pigistes touchent des sommes insuffisantes pour prétendre à cette fameuse carte (par exemple un certain nombre de correspondants de la presse quotidienne ou hebdomadaire régionale) ». 46 Plus en détail, la presse écrite du département observe un essor notable du pigisme, la totalité des titres étant affectée. Dans le seul service photographique de Pyrénées Presse comprenant trois titulaires, l'on énumère autant de photographes pigistes réguliers auxquels s'ajoutent des indépendants occasionnels. Les quotidiens transfrontaliers font appel à un photographe pigiste pour opérer l'ensemble des clichés et à des rédacteurs indépendants afin de remplacer les titulaires absents. Sans compter les centaines de correspondants, 330 pour Pyrénées Presse et 300 pour Sud Ouest Béarn et Soule, chargés de couvrir l'actualité de leur village et leur canton qui opèrent un travail comparable à celui des pigistes sans jouir ni de leur statut ni de leur rémunération. 47 L'intérim connaît aussi une extension nouvelle dans la radiodiffusion des Pyrénées- Atlantiques, notamment dans les locales de Radio France qui ne font guère exception. Pis encore, elles se trouvent à l'avant-garde du mouvement dénombrant davantage de pigistes que les radios locales privées pourtant décriées pour la fragilité des statuts octroyés. Ce journaliste illustre le phénomène. « Je suis indépendant depuis de nombreuses années à Pau où j'ai obtenu maintes piges dans le bureau palois de France 3 Aquitaine et la locale de France Bleu Béarn. Étant inscrit dans leur planning local, je suis appelé dès qu'un rédacteur s'absente, l'actualité se densifie et un événement sportif d'importance survient. Étant spécialisé en sport, je suis contacté pour couvrir une rencontre de l'Élan Béarnais, de la Section Paloise et le Grand Prix de Formule 3 de Pau. Les piges vont d'un jour à plusieurs semaines et leur dotation dépend des saisons, des ressources et des effectifs »26. 48 Le pigisme de télévision s'accroît tout autant, notamment à France 3 Pays Basque où l'on dénombre cinq indépendants réguliers ainsi que des collaborateurs sporadiques en provenance de stations de France 3, alors que la rédaction de France 3 Pays Basque compte sept titulaires. La situation n'est pas meilleure à ETB Iparralde puisque les deux rédacteurs titulaires et les cameramans disposent de contrats commerciaux de neuf mois. 49 Rendre compte de cette évolution suppose de considérer, d'abord, que le pigisme autorise la baisse des frais de personnel. « Pour échapper aux garanties salariales conventionnelles, ces entreprises (...) recourent de plus en plus à des collaborations extérieures, essentiellement des pigistes dont le nombre est en constante augmentation. La pige (...) est devenue un véritable système de sous-traitance qui permet aux entreprises de presse de réaliser des économies substantielles. Les pigistes ne disposent pas, en effet, de bureaux dans les locaux des journaux. sont payés à la tâche et peuvent être mobilisés ponctuellement. Par contre, ils doivent supporter des coûts d'équipement individuel de plus en plus lourds : fax, téléphone portable pour pouvoir être joints à tout moment par les rédactions, micro-ordinateur, modem et

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imprimante. De plus, ces petits producteurs individuels doivent tout faire eux-mêmes, ne sont payés qu'après parution de leurs articles, les délais, fait significatif, pouvant aller de 7 à 90 jours »27. 50 Ensuite, l'intérim « présente également l'avantage de mettre à la disposition des entreprises de presse des journalistes qui se plient aux lignes rédactionnelles. En effet, parce que la plupart des pigistes se trouvent dans une situation précaire, (...) ils ne peuvent être que dociles vis-à-vis des commanditaires et fabriquent, sans état d'âme, les articles souhaités par les journaux qui les emploient. La rédaction d'articles de complaisance ou de publicité rédactionnelle non avouée comme telle (par exemple la promotion d'un film en échange de places gratuites à distribuer par le journal à ses lecteurs), qui pourrait poser problème au sein des rédactions si elle était discutée en conférence de rédaction et confiée à des journalistes salariés, peut être sous-traitée par des pigistes qui ne sont pas en mesure de soulever des problèmes déontologiques »28. 51 Enfin, le pigisme offre plus de souplesse et d'élasticité aux entreprises de presse. Fonctionnant peu à peu en flux tendu29, les médias du département sont tributaires des repos hebdomadaires, congés, stages dans le cadre de la formation continue. Plus encore, les maladies subites ou les problèmes familiaux génèrent un besoin de main d'œuvre qui n'est guère disponible immédiatement. A Sud Ouest Béarn et Soule, par exemple, les rédacteurs absents ne sont point remplacés, générant un surcroît de travail. Pareillement, la forte densité de l'actualité locale allant de la visite d'un ministre à un fait divers sanglant en passant par l'implantation d'une entreprise génératrice de dizaines d'emplois suppose l'aide d'un ou de deux reporters supplémentaires. Dès lors, le recours à l'intérim devient la solution dans la mesure où les pigistes locaux sont promptement disponibles, rompus aux techniques spécifiques de chaque fonction et connaisseurs des acteurs comme des problématiques locales.

2.4. Essor du chômage

52 Sans surprise, le chômage de ces journalistes n'a cessé de grandir au cours des années 80 et 90 passant de 0,4 % en 1970 à 3,1 % en 1990. Là encore, il va bien au-delà dans les faits. D'abord, « la carte de presse est refusée au-delà de deux années de chômage, si aucune pige n'a été faite ni aucune formation entreprise »30. Ensuite, de nombreux sans-emplois ne signalent leur situation ni à la Commission de la Carte ni à l'ANPE autant par honte que par espoir de trouver quelques « papiers » les aidant à vivre de leur activité professionnelle. Enfin, la réalisation de quelques piges octroie un revenu inférieur à 3 000 francs écarte les journalistes de la catégorie chômeur. Ce que confirme Delporte : « la pige permet de limiter les effets du chômage. Les entreprises de presse disposent alors d'une main d'œuvre souple à gérer »31.

53 Certains publics sont singulièrement touchés, à l'image des jeunes journalistes32. Qu'ils œuvrent dans la presse, la radio ou la télévision, le constat est similaire. Souvent dépourvus de diplômes reconnus, ils peinent à trouver des CDD voire des piges. Méconnus des confrères comme des employeurs, ils ne disposent guère des réseaux relationnels susceptibles d'être mobilisés afin de mettre le pied à l'étrier. Cela pousse les uns à réaliser des stages gratuitement afin de faire montre de leurs compétences mais, à leur terme, le rédacteur en chef les remercie sans contrat. Les autres envisagent de quitter le département à la recherche de régions plus propices. Lorsqu'ils obtiennent

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un voire plusieurs contrats à durée déterminée et que l'entreprise connaît des difficultés, ils en sont les premières victimes. 54 Ce rédacteur de presse locale hebdomadaire en offre l'exemple. « Mon parcours professionnel a connu des interruptions synonymes de chômage car, entre ma sortie de l'école de journalisme en juin 1998 et mon arrivée à La Semaine du Pays Basque en février 1996, vingt mois se sont écoulés. Période au cours de laquelle j'ai alterné dix mois de CDD avec autant de temps d'inactivité. Le chômage est difficile à vivre car si cela est supportable durant les premiers mois, la situation se dégrade à partir du sixième mois. On se sent mal à l'aise dans les conversations avec autrui même si je n'ai jamais douté de moi sachant que des opportunités se présenteraient. C'est pourquoi j'ai continué à envoyer des curriculum vitae. Cela a été facilité par le soutien de ma famille »33. 55 Ensuite, les quinquagénaires sont aussi visés, d'autant qu'ils sont confrontés au chômage sans y être préparés s'agissant d'enfants des « trente glorieuses »34. Les journalistes œuvrant dans les radios locales municipales et associatives ainsi que dans les quotidiens tranfrontaliers sont fort concernés puisque les trois rédacteurs en chef de Radio Bayonne, Radio Païs et Egin en ont fait l'expérience. Leur licenciement résulte de la disparition des médias, dans lesquels ils occupaient des postes à responsabilité, ou du souci de réduire les frais de personnel. Retrouver un emploi suppose de renoncer à l'encadrement et d'accepter de repartir comme rédacteur de base. 56 En outre, les femmes sont très affectées par le chômage indépendamment des médias, des postes et des fonctions. Sur les 40 % des pigistes de sexe féminin, nombreuses sont celles oscillant entre la pige et le chômage. Les employeurs rechignent à les recruter par crainte que leur condition féminine ne porte préjudice à l'entreprise car elles seraient plus souvent absentes, moins présentes le soir, trop émotives. Les femmes seraient moins agressives dans la recherche d'un emploi et guère prêtes à tout pour y parvenir, leur vie privée occupant une place de choix. Les directeurs perçoivent souvent les sphères familiales et professionnelles comme antagoniques alors qu'elles sont jugées complémentaires pour les hommes. 57 La perte d'emploi entraine des tracas financiers, surtout lorsque les membres de la gente féminine sont divorcées avec enfants à charge. « Les fins de mois étaient souvent rudes et nous devions faire des sacrifices dans les loisirs, les vêtements, la nourriture. Les enfants ne comprenaient pas toujours que nous ne puissions pas partir en vacances ou acheter un jouet dont ils avaient follement envie. Nous allions voir des assistantes sociales afin d'obtenir des aides à destination des personnes en difficulté, dont le RMI, et des aides spécifiques aux familles monoparentales »35. Les célibataires, sans enfant et vivant maritalement, s'en sortent mieux parce que le salaire de leur conjoint associé à leurs indemnités suffit à assurer un niveau de vie convenable. 58 Enfin, les journalistes peu diplômés sont tout aussi concernés par ce drame étant deux à trois fois plus nombreux à en pâtir que ceux ayant transité par une école de journalisme reconnue par la convention collective. Être dépourvu de diplômes de l'enseignement supérieur est synonyme de culture (technique et non générale), de manière de penser (anecdotique et non systématique), de style d'écriture (littéraire et non journalistique) inadaptés. Plus encore, ils sont privés des connaissances nouées durant les études, des pratiques culturelles et des loisirs susceptibles d'être mobilisés pour la recherche d'un emploi. 59 Ce rédacteur bachelier l'illustre puisqu'il a été confronté au chômage à plusieurs reprises. Une première fois, lorsque le CDD de trois mois dont il disposait au Berry

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Républicain n'a pas été renouvelé suite à un changement de direction puis à sa volonté de placer ses hommes de confiance. Une deuxième fois, quand Pyrénées Presse a décidé de le licencier après avoir multiplié les contrats à durée indéterminée durant un an. Le titre devait choisir entre l'intégrer ou le congédier, car l'inspection du travail risquait d'y mettre son nez. Une troisième fois lorsqu'il est venu au Pays Basque dans l'espoir de trouver un emploi fixe ou, à défaut, de piger pour les médias locaux et régionaux. Il a littéralement « galéré » durant un an, entre son CDD de quatre mois au Midi Olympique en 1994 et sa correspondance pour Sud Ouest en 1995. 60 L'augmentation du chômage est liée, en premier lieu, à la fonction primordiale des écoles de journalisme excluant ceux qui n'y entrent point. En effet, le rôle des établissements reconnus par la convention collective de la profession est essentiel dans la recherche d'emploi. Les personnes qui sortent de l'ESJ, du CFJ et, dans une moindre mesure, des IUT, ont beaucoup plus de chances de trouver un emploi parce que ces institutions ont noué des conventions avec les principaux médias nationaux, régionaux voire locaux. Cela les aide à entreprendre des stages prolongés dans les titres de leur choix et à constituer des carnets d'adresses. Alors que celles n'y transitant pas éprouvent les pires résistances pour trouver le moindre stage et sont confrontées au chômage. 61 En second lieu, le chômage résulte de l'augmentation substantielle des journalistes professionnels car chaque année, des centaines d'étudiants sortent des SIC de Bordeaux, de Leioa et des écoles spécialisées. Ils sont de plus en plus nombreux à prétendre à des postes limités en quantité dans les médias locaux et régionaux. L'offre étant supérieure à la demande, certains d'entre eux connaissent le chômage qui est bien plus important que ne le laissent croire les chiffres divulgués par la profession car certains professionnels sont contraints de quitter momentanément voire définitivement leur métier pour travailler dans les services de commerce et de communication. 62 En dernier lieu, la raison réside dans la fragilité financière des entreprises de presse consécutive à leur dépendance face aux débiteurs, à savoir des annonceurs, le Fond de Soutien à l'Expression Radiophonique, le Conseil Général, les mairies ou les associations. Il suffit qu'une aide soit abrogée ou qu'une subvention tarde pour placer la radio dans une situation délicate. Lorsque la subvention supprimée est d'une grande ampleur, les radios municipales, surtout, éprouvent les pires embarras pour trouver des recettes annexes, d'autant qu'elles ne peuvent souvent compter sur la mobilisation des auditeurs pour infléchir la décision des institutions ou combler le déficit. Cela donne lieu à la disparition pure et simple de la station ou à sa reprise par un réseau national intéressé par sa fréquence. Dans les deux cas, cela débouche sur des licenciements.

Conclusion

63 Rappelons que cet article défend l'hypothèse selon laquelle, depuis les années 70, la condition journalistique locale connaît une précarité grandissante avec la faible progression de carrière, la fragilité des statuts et la modestie des revenus, bien que nous nous soyons contenté d'évoquer les deux premières dimensions. Plus en détail, à la promotion réduite de postes, d'échelons et de fonctions se joint la fragilité des statuts avec l'expansion des contrats précaires, du pigisme, des temps partiels comme

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du chômage. Le sous-emploi est le plus souvent subi par les journalistes, même si certaines femmes le choisissent afin de concilier vie professionnelle et vie familiale, alors que l'absence d'emploi peut conduire à la misère, à la marginalité voire à la désaffiliation36. La précarité affecte le centre même de la profession, même si ses effets sont plus perceptibles à ses marges.

64 Au-delà, cette précarité s'inscrit dans la fragilisation de la profession observable dans les années 80 et 90 consécutivement à la multiplication et à la diversification des systèmes médiatiques et journalistiques locaux, et se manifeste tout autant dans les dérives de la pratique. D'abord, l'accès aux sources d'information politique, économique et médiatique est parfois malaisé car si les grands titres font aussi bien appel aux agences de presse, aux élus, aux entreprises qu'aux institutions locales, tel n'est point forcément le cas des nouveaux médias. Ensuite, les journalistes disposent d'une autonomie sous contraintes qui circonscrivent leur liberté dans le choix des sujets, des angles, de la hiérarchisation et de l'emplacement de l'information devant faire face aux impératifs économiques et techniques entre autres. Enfin, la rigueur fait quelquefois défaut, l'information n'étant pas systématiquement vérifiée et l'impartialité comme la neutralité étant parfois bafouées. 65 Nonobstant, cet affaiblissement n'est point synonyme de crise sérieuse de la profession journalistique locale. Loin d'être la preuve d'une dégradation profonde et durable au regard d'un passé glorifié et d'un présent dramatisé, il indique un ralentissement voire un arrêt momentané du processus de professionnalisation à l'œuvre depuis l'entre- deux-guerres. Cette professionnalisation s'est traduite par la dotation d'un statut professionnel, d'une convention collective, d'une organisation syndicale, d'un code de déontologie, d'une protection légale du monopole, bref, de tout ce qui définit une profession au sens anglo-saxon37 du terme. 66 D'autant que la fragilisation est partiellement compensée par l'apparition ou le renforcement de régulateurs. Ainsi, au cours des années 90, les relations professionnelles se redynamisent avec l'explosion des organisations comme des mobilisations professionnelles. D'un côté, aux syndicats de journalistes se joignent des associations spécialisées qui jouissent d'une ample représentativité et qui proposent des actions aussi consensuelles et variées que l'information, le service, le soutien des confrères en difficulté, la pression sur les pouvoirs publics ou l'organisation de débats. D'un autre côté, leurs mobilisations connaissent des processus analogues à l'instar des thèmes (salaires, abattement fiscal de 30 %, 35 heures, emploi, programmes locaux, droits d'auteur), des modes d'action (procès, rassemblement, grève, pétition, lobbying, conférence de presse) et des acteurs engagés.

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NOTES

1. Wolton. D., Penser la communication. Paris, Flammarion, 1997. 2. Wieviorka. M., Violence en France. Paris, Seuil, 1999 p. 10. 3. Accardo. A., Journalistes précaires. Bordeaux, Le Mascaret, 1998. 4. Paugam. S., Le salarié de la précarité. Paris, PUF, 2000. 5. Entretien avec le chef du service des sports de Pyrénées Presse. 6. Entretien avec un rédacteur de Radio Irouleguy. 7. Urteaga. E., « Kazetariak eta heziketa profesional iraunkorra ». Bilbo, Giza eta Gizarte Zientzien Aldizkaria : Uztaro, n°36, 2001, pp.53-71. 8. Entretien avec le PDG de Pyrénées Presse. 9. Entretien avec un délégué syndical du SNJ. 10. Entretien avec un rédacteur pigiste. 11. Entretien avec un reporter-photographe. 12. Entretien avec un photographe indépendant. 13. Audric. S, Forgeot. G., « Le développement du travail à temps partiel ». Paris, Données Sociales, INSEE, 1999. 14. Le Journaliste, 2è trimestre 1999. 15. Belloc. B, Lagarenne. C, « Emplois temporaires et emplois aidés ». Paris, Données Sociales, INSEE, 1996. 16. Propos d'une rédactrice de Gara. 17. Entretien avec la rédactrice d'Egin. 18. Paugam. S., Le salarié de la précarité. p.71. Paris. PUF, 2000. 19. Nicole-Drancourt. C„ Carrières masculines, carrières féminines. Paris, CNAF, 1988. 20. Entretien avec un reporter pigiste à Pyrénées Presse. 21. Entretien avec la correspondante du Diario Vasco. 22. Entretien avec une rédactrice d'Irulegiko Irratia. 23. Balbastre. G., « Une information précaire », p.76, Actes de la recherche en sciences sociales, n°131-1.32, 2000. 24. Delporte. C. Histoire du journalisme et des journalistes en France, p.87, Paris, PUF, 1995. 25. Jourdain. C, « L'intérim, une voie d'accès à l'emploi ». Paris, Données Sociales, INSEE, 1999. 26. Entretien avec un pigiste de l'audiovisuel. 27. Champagne. P., « Le journalisme à l'économie ». Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n° 131-132, 2000, p.5. 28. Champagne. P.. idem. p.5-6. Actes de la Recherche en Sciences Sociales, n°131-132, 2000. 29. Amar. M., « Les effets du flux tendu ». L'Entreprise, n°2518. 1992. 30. Profession journaliste n°289, mai-juin 1999. 31. Delporte. C, idem. Paris, PUF, 1995. 32. Baudelot. C, Establet. R., Avoir 30 ans en 1968 et en 1998. Paris, Seuil, 2000. 33. Entretien avec un rédacteur de la Semaine du Pays Basque. 34. Fourastié. J., Les trente glorieuses. Paris, Fayard, 1979. 35. Entretien avec une pigiste. 36. Castel. R., Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat. Paris, Fayard, 1995. 37. Wilensky. H.. « The Professionalization of Everyone ? ». American Journal of Sociology, 2, p. 137-158, 1964.

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INDEX

Index chronologique : 20e siècle Index géographique : Aquitaine, Midi-Pyrénées, Pays basque Thèmes : sociologie Mots-clés : journalisme, média, précarité

AUTEUR

EGUZKI URTEAGA

Docteur en sociologie Université de Bordeaux 2 [email protected]

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Notes de lecture - Irakur gaiak

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A propos de Les Emprunts de la Langue Basque à L'occitan de Gascogne Etude du dialecte souletin de l'euskara de Txomin Peillen Estudios de la UNED, Madrid, 1998, 125 p. ISBN : 84-362-3678-5

Jean-Baptiste Coyos

1 Dans un premier temps je voudrais souligner tout l'intérêt de cet ouvrage récent passé quasiment inaperçu alors qu'il concerne les liens entre la langue basque et la langue occitane, plus précisément les emprunts lexicaux du dialecte basque souletin au dialecte gascon béarnais voisin et qu'il est rédigé en français1. On sait pourtant que ce sujet des relations entre les deux langues a donné lieu à beaucoup de commentaires et de travaux depuis que des études linguistiques sont menées par les bascologues. Nous avions certes certains dictionnaires qui indiquaient ponctuellement que tel ou tel terme avait une origine gasconne ou béarnaise, comme ceux d'Azkue et de Lhande, ou le lexique de Larrasquet2. Mais Les Emprunts de la Langue Basque à L'occitan de Gascogne (dorénavant Les Emprunts...) est la première étude spécifique complète et systématique concernant l'apport lexical du gascon à la langue basque dans sa forme souletine.

2 Jacques Allières était un de ceux qui étaient le plus attaché à ce domaine d'étude, de par ses compétences de bascologue et de spécialiste de l'occitan. En 1994 il écrivait : « ...si l'on s'est beaucoup préoccupé d'ausculter le gascon pour comprendre le rôle qu'un substrat euskaroïde a pu jouer dans sa formation, on s'est peu intéressé au rôle d'« adstrat » que ce gascon joue chez le basque voisin »3. Les Emprunts... est la réponse de Txomin Peillen à Jacques Allières qui lui demandait d'étudier les liens entre souletin et béarnais4.

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1. Compte rendu de l'ouvrage

3 L'ouvrage est partagé en une longue et riche introduction, p. 13 à 57, suivie du corpus recueilli, p. 61 à 124. Il se lit facilement et aborde toutes les questions liées à l'emprunt lexical d'une langue à une autre.

4 Une des caractéristiques principales de ces termes empruntés est qu'on a affaire à un pan de lexique qui peu à peu diminue (voir Les Emprunts..., p. 31). Le dialecte souletin n'emprunte plus au béarnais et, pour partie, ce lexique réfère à un mode de vie disparu, à des techniques abandonnées (agriculture, artisanat), p. 32. La pratique du dialecte béarnais parmi les souleti-nophones est de plus en plus rare au fur et à mesure que la langue est moins parlée en Béarn, alors que tous parlent français5. L'auteur estime à propos des emprunts du souletin qu'il a relevés : « Les trois quarts des gasconnismes que nous citons sont connus de tous les parlers orientaux et beaucoup par tous les autres dialectes », p. 51. 5 L'utilisation d'une catégorisation des emprunts en « t.u. très usuel, u. usuel, a.u., assez usuel, p.u. peu usité, obs. obsolète » (p. 22) est tout à fait pratique, même si elle ne correspond pas toujours au point de vue des informateurs que j'ai consultés. Par exemple, xiflét « gifle », p. 118, donné comme obsolète est couramment utilisé. A chaque entrée de la nomenclature, Peillen prend soin de donner le terme source occitan et des équivalents basques s'il en existe.

1.1 Le problème de l'établissement de l'origine de l'emprunt

6 La tâche n'était pas simple : « Il est souvent difficile de distinguer les emprunts à l'occitan, ceux au latin d'Église, au latin populaire, au castillan... impossibilité de trancher entre l'occitan et le castillan, ces langues ayant réalisé des emprunts mutuels », p. 19. Fort prudemment Peillen ne choisit pas toujours. Exemple p. 70 : butíla « bouteille » est indiqué d'origine gasconne ou castillane, de même karga « charger » p. 88 « peut provenir du cast. ou du lat. ». Il avertit : « ...nous sommes conscients d'avoir forcé un peu sur le classement en occitan de certaine latinismes du basque, faute de pouvoir trancher sur une latinisation qui nous est historiquement moins bien connue », p. 19-20, « il se peut que certains soient d'origine aragonaise et/ou castillane », p. 33. Une petite réserve à ce sujet. Peillen avertit : « Nous avons repris également les étymologies du Dictionnaire du souletin nord-oriental de Jean Larrasquet », p. 23. Larrasquet dans son dictionnaire basque-français de Le Basque de la Basse-Soule Orientale de 1939 donne de nombreux termes comme étant d'origine béarnaise. Ceci peut s'expliquer en partie car il décrit une forme de souletin limitrophe du Béarn. Mais il semble tout de même que très souvent un mot d'origine romane sera considéré par Larrasquet comme d'origine béarnaise. Plus surprenant par exemple, une onomatopée comme burrunba est donnée comme venant du béarnais bourroumbé (Le Basque..., p. 85). Lhande invoque, lui, plus souvent, une origine espagnole/castillane. On l'a compris, chaque unité ou presque mériterait une monographie et les éléments réunis ne seraient pas toujours décisifs.

7 Une chose est certaine dans cette difficile question de l'établissement de l'origine des emprunts, « les langues dans lesquelles l'euskara pouvait puiser étaient le gascon et le castillan », p. 206. On peut avancer aussi que le dialecte souletin a plus emprunté à l'occitan gascon en particulier béarnais qu'au castillan, que depuis c'était au français

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qu'il empruntait et maintenant au batu (basque unifié) et aux dialectes basques plus centraux qu'il le fait.

1.2. La complétude

8 Peillen a donc recueilli 885 termes environ empruntés à l'occitan (p. 31). Une liste complémentaire vient compléter le corpus général (p. 121 à 124). Peillen avertit : « Malgré ce dernier criblage de 97 mots il se peut que quelques dizaines d'hapax et quelques termes courant aient échappé à notre vigilance... », p. 124. En effet, ce compte rendu a été pour moi l'occasion de trouver d'autres termes que Peillen n'a pas relevés. Certains d'entre eux, certes, ne sont connus que des anciens car le référent n'est plus en usage, par exemple arrosta « soupe au vin » ou kaxa « louche pour l'eau de la ferreta » , mais je ne les qualifierais pas d'hapax.

9 Signalons que quelques termes ne sont pas donnés dans la nomenclature mais dans le corps du texte comme synonymes d'autres références : estatü « état », taulada « plancher, estrade », etc. sans préciser qu'ils sont d'origine occitane. Certains termes ou expressions comme Diu biban « Dieu vivant », Per Diu « par Dieu » sont cités dans l'introduction et ne sont pas repris dans la nomenclature, Perdin « idem » n'est pas signalé. Remarquons que l'emprunt Diu « Dieu » ne s'emploie pas seul en basque. 10 Comme cela est prévisible avec une langue à transmission essentiellement orale, certaines acceptions sont différentes selon mes informateurs (il en ira de même pour la prononciation, voir en 1.3.). Exemples : planéta signifie « épidémie en général » et non comme p. 107 « peste » seulement, txípa « petit poisson, alevin » et non « sanglot » p. 116. 11 Pour un emprunt donné, les dérivés ne sont pas recensés systématiquement. Exemples : barróil est indiqué seulement comme nom « loquet » p. 68, et pas comme verbe barroila « verrouiller » ; inbeia est indiqué seulement comme verbe « avoir envie » p. 84, et pas comme nom inbeia/inbea « envie » ; on a serius « sérieux », p. 111, mais pas seriuski « sérieusement » ; certains dérivés adjectivaux en des-, préfixe de négation, privation, contraire, ne sont pas donnés : desobedient « désobéissant », desunest « malhonnête ». De même pour les emprunts complémentaires que j'ai relevés en 2.1, l'ensemble des dérivés ne sera pas systématiquement donné. 12 Parmi les suffixes occitans indiqués, p. 41-42, on ne trouve pas celui en - (a) de, - (a) da qui sert à former le nom d'action à partir du verbe nu : buhada « bouffée », pausada « repos ». Il n'est d'ailleurs pas recensé comme tel par les dictionnaires occitans7. C'est - ada que Lhande considère comme « probablement roman » (Dictionnaire..., p. 6). De même -ura : fresküra « fraîcheur ». Des- préfixe de négation, privation évoqué ci-dessus n'est pas non plus recensé. Larrasquet le donne comme béarnais (Le Basque..., p. 88), Lhande, lui, comme espagnol (Dictionnaire..., p. 203). On retrouve ici toute la difficulté à déterminer la langue source de l'emprunt. 13 Signalons aussi l'existence de quelques emprunts au béarnais dans le français parlé en Soule et ne se trouvant pas dans le dialecte. Exemples : brigailles « petits bouts, restes » (béarnais brigalha), gave « torrent ».

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1.3. La forme orale, la phonétique

14 La présentation de la phonétique des deux langues, faite de la page 23 à la page 27, est suffisante.

15 Il n'y est pas noté que l'accent oxyton est un indice non décisif mais utile pour repérer un emprunt. Exemples : arrail [aráλ] arrail « grosse bûche », biarnes [biarnέş] « béarnais », kaminet [kaminέt] « armoire ». Signalons que les suffixes occitans monosyllabiques participent à la formation d'unités oxytones. Par exemple le suffixe d'agent - ant p. 42 : arraileilant [araλeλã ́ t] « qui aime la plaisanterie, qui a de l'humour », frantzimant « qui estropie le français, qui essaie de parler français », le suffixe -ot, (ill) ot, -xot diminutif kokillot [kokiλɔ◌́t] « coquin », peilot [peλɔ◌́t] « nigaud, niais », le suffixe – ent d'adjectif non signalé : desobedient [dézobedjɛ◌̃ʹ t] « désobéissant ». 16 Page 25 on relève une erreur. Peillen parle des « consonnes aspirées du basque oriental rh, lh, nh, ph et th ». Les trois premières ne sont pas des consonnes aspirées mais bien une suite de deux consonnes distinctes r+h, l+h et n+h dans laquelle [h] n'appartient pas à la même syllabe que la consonne qui la précède. L'auteur oublie de signaler [kh], occlusive aspirée très fréquente qu'il note pourtant dans le corpus. 17 Dans le recueil, Peillen donne parfois les variantes souletines pour une entrée donnée mais pas systématiquement. Exemples : Peillen note bükhata, bokháta « lessive » qui est réalisé [bukháta] par mes informateurs ; debéia « s'ennuyer » et inbéia « envie » sont réalisés [debéa], [íbéa] ; erréin « rein » est réalisé [erán] ; errejént « instituteur » est E8 réalisé [eriz A0 t] par A.C. Fusíll « fusil » est réalisé [pysýλ] par J.P.E. Erridéü « rideau » est uniquement réalisé [aridéy], etc.

1.4. La composition des unités linguistiques

18 Voici un thème d'étude que l'auteur n'illustre que par la suffixation (p. 41-42). L'utilisation des deux langues en souletin pour créer des unités nouvelles est assez diversifiée, en composition comme en dérivation8.

19 Exemples de dérivation : faizuzü « maniéré » : nom occitan faizu « façon » et -zü suffixe basque indiquant l'abondance, pour former un adjectif. ogendant « fautif, coupable » : nom basque ogen « faute » et suffixe -dant occitan. pintukari « amateur de chopine, buveur de vin » : nom occitan pintu « pinte, chopine » et suffixe basque – kari « amateur de », pour former un nom. ematxot « petite femme (péjoratif) » : nom basque emazte « femme » et suffixe diminutif occitan -ot, haurrot « petit enfant (dédaigneux) » : nom basque haur « enfant » et suffixe occitan -ot. menstü « devenir idiot, simplet » : nom occitan ments « manque, moins » et suffixe basque d'accompli – tü, pour former un verbe. desoropila « dénouer » : préfixe occitan de négation, de contraire des- et verbe basque, oropila « nouer » pour former un autre verbe. 20 Exemples de composition : pixuntzi « pot de chambre » : nom occitan pixa « pisse » et nom basque untzi « récipient » à comparer à pixapot « pot de chambre » également, composé de deux

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noms empruntés. Lespy dans son dictionnaire donne pichepot (voir ci-dessous en 2.). C'est donc le composé lui-même qui a dû être emprunté. moskofi « bec fin, délicat » : nom basque mosko « bec » et adjectif occitan fi « fin ». kuntrexilo « (avaler) de travers » : préposition occitane kuntre « contre » et nom basque xilo « trou ». adarpalet « vache à cornes écartées » formé : nom basque adar « corne » et occitan palét « bovin qui a les cornes aplaties » (dictionnaire de Palay, voir en 2.). eskümantxu « gant » : nom basque eskü « main » et nom occitan mantxu « manchon ».

1.5. La présentation, la qualité de l'édition

21 Il faut souligner que la qualité de l'édition laisse un peu à désirer. En voici quelques exemples.

22 La « carte ci-jointe » annoncée p. 16 ne se trouve nulle part. L'ouvrage de Jean Larrasquet, Le basque souletin nord-oriental noté p. 21 comme ayant fait l'objet d'un dépouillement n'a pu en faire l'objet car il ne contient pas de lexique. Il s'agit en fait de celui de 1939, Le Basque de la Basse-Soule Orientale qui lui contient un lexique souletin- français. Le Dictionnaire du béarnais et du gascon modernes de Simin Palay est daté à tort de 1957, p. 21, puis, ce qui est exact, de 1932-1934, p. 23. 23 Les coquilles et fautes d'orthographe ne manquent pas : ne pour en (p. 22, 23, 37), erreurs ou plus souvent manques d'accent (p. 29, 36, 83, 101, 105, 124...), fakulté pour faculté p. 65, por pour pour p. 84, comper pour compter p. 90, iccitan pour occitan p. 121, etc., manques de ponctuation, emploi anarchique de majuscules, répétitions comme « les limites limites géographiques » p. 19, laziña recensé dans le corpus p. 95 est donné dans le supplément p. 123, un paragraphe de 10 lignes p. 25 se retrouve in extenso p. 39, etc. 24 Dans le corpus, l'ordre alphabétique n'est pas respecté parfois. Exemples : ardít après 6 mots de arkamás à arneila p. 63, arrága donné deux fois et après 3 mots comme arráil p. 64, brigánt devant brída p. 70, arnéila « attirail » est noté deux fois p. 63. 25 Toutefois ces imperfections, certes assez nombreuses, ne gênent pas la compréhension du propos.

2. Compléments à la liste contenue dans Les Emprunts...

26 Les informateurs auprès de qui j'ai contrôlé tous les termes supplémentaires retenus sont : Mmes A. C. (87 ans, originaire de Mendy), A. M. E. (78 ans, originaire d'Ordiarp), T. E. (77 ans, originaire d'Aussurucq) et M. J. P. E. (80 ans, originaire de Mendy). Tous les termes donnés sont connus d'au moins un des quatre informateurs, souvent de tous.

27 Dans une telle recherche, des informateurs d'un certain âge sont particulièrement utiles car, comme on l'a signalé plus haut, les termes empruntés au gascon béarnais sont pour partie des termes spécialisés liés à des techniques, à un mode de vie rural qui ont quasiment disparu. Il est certain qu'une enquête auprès de jeunes locuteurs souletins ayant appris le basque à l'ikastola n'aurait apporté aucune unité nouvelle au corpus établi par Peillen.

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28 Par ailleurs si l'enquête avait été menée auprès de locuteurs natifs de Chéraute, Barcus ou Roquiague, zone limitrophe du Béarn, on peut être certain que d'autres termes auraient été trouvés. 29 Les dictionnaires de Lhande et de Larrasquet m'ont permis de relever certains termes indiqués comme d'origine béarnaise ou gasconne qui ont été soumis ensuite aux informateurs. 30 Les dictionnaires occitans portant sur le gascon qui ont été utilisés sont les suivants : • Associations La CIVADA et PER NOSTE, 1998 (1984), Petit dictionnaire français/occitan, Pau, Edicion Quatau, 133 p. • LESPY Vastin et RAYMOND Paul, 1998 ( 1887), Dictionnaire béarnais ancien et moderne, réédition remaniée, Pau, Marrimpouey, 661 p. • MORÀ Pèir, 1994, Diccionari Occitan-Francés segon los parlars de Gasconha, Artigues près Bordeaux, Princi Negre Editor, 245 p. • PALAY Simin, 1991 (1932-34, 1974), Dictionnaire du béarnais et du gascon modernes (Bassin Aquitain), 3e édition complétée, Pau, Éditions du Centre national de la recherche scientifique, 1053 p.

31 Palay utilise une graphie « phonétique » issue du français, comme Mistral mais adaptée au gascon. La Civada et Morà utilisent la graphie classique d'Allibert qui est en train de s'imposer progressivement.

32 Enfin pour m'assurer de l'existence actuelle de ces termes et de leur prononciation, j'ai fait appel à Gilbert Narioo9. 33 Les termes recueillis et non donnés dans le corpus général de Les Emprunts... ont été répartis en deux catégories : 2.1 emprunts d'origine occitane assez sûre (78 entrées sans les dérivés) et 2.2 emprunts d'origine douteuse (48 entrées sans les dérivés).

2.1. Emprunts d'origine occitane assez sûre10

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11 Henri Frei, le premier, avait bien décrit ce type de production pour le français en 1929 dans La grammaire des fautes.

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« Koteina » : ce nom est, au contraire, peut-être d'origine basque.

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2.2. Emprunts d'origine douteuse

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12 La diffculté est de déterminer l'origine de cette syllabe fnale oxytone.

34 Les Emprunts de la Langue Basque à L'occitan de Gascogne est un ouvrage d'un grand intérêt, qui comble un vide dans le domaine des contacts entre les langues basque et occitane de Gascogne. Face à la difficulté de la tâche, l'auteur a su faire des choix prudents tout en traitant le sujet en profondeur. On pourra donc consulter Les

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Emprunts... en toute confiance, tout en sachant, mais il était difficile d'y échapper, qu'il manque un certain nombre d'entrées dans le corpus recueilli par Txomin Peillen11 35 Avec lui on peut regretter que, sauf erreur, « de telles monographies des emprunts n'existent pas pour tous les dialectes [basques] », p. 54. On lui saura gré d'avoir ainsi permis de dépasser les approximations qu'on peut lire ou entendre, du type « en souletin la moitié du vocabulaire, c'est du béarnais ». Un peu plus de 1000 termes représente certes une quantité conséquente mais finalement loin d'être aussi importante qu'on pouvait le croire. Bien sûr des recherches et une synthèse restent à faire concernant les autres domaines linguistiques de l'emprunt du basque à l'occitan, la phonétique et la phonologie (on a sur ce point un certain nombre de travaux), la syntaxe, la sémantique et l'énonciation.

NOTES

1. Par « occitan », il faudra comprendre ici gascon béarnais. Hors de toute polémique, on pose que le dialecte béarnais est une forme de gascon qui lui-même appartient à l'ensemble linguistique occitan. On emploiera indifféremment les termes espagnol et castillan. 2. AZKUH Resurrección María de, 1905-1906 (1984), Diccionario vasco-español-francés, Bilbo, Euskaltzaindia, 1219 p. LHANDE Pierre, 1926, Dictionnaire basque-français et français-basque (dialectes labourdin, bas-navarrais et souletin), tome I, Dictionnaire basque-français. Paris, Gabriel Beauchesne. LII+1117 p. Larrasquet Jean, 1939, Le Basque de la Basse-Soule Orientale, Paris, Klincksieck, 223 p. 3. Basque et gascon, La langue basque parmi les autres. 1994, sous la direction de Jean-Baptiste Orpustan, Baigorri, Izpegi. p. 17. 4. Jacques Allières m'avait fait la même demande lors de ma soutenance de thèse dont il était membre du jury. 5. Le seul lieu où il reste encore utilisé, et de façon très circonscrite, est celui de la mascarade dont. d'ailleurs, de nombreux personnages ont un nom d'origine béarnaise. Les kherestu « les hongreurs » (béarn. crestadou) ont quelques échanges en un béarnais approximatif pour ajouter au comique des scènes. 6. Parfois il est difficile d'établir si c'est le souletin qui a emprunté au béarnais ou l'inverse. Exemple : diua ! pour faire ralentir les vaches, avec [d] palatalisé à l'initiale, [ɖú (w) a] est utilisé tant en Béarn qu'en Soule (peut-être de [dû (w) a] « il, elle va » en souletin ?). 7. Après une syllabe accentuée, -a est réalisé en Béarn - [ə] en plaine et - [o] dans la partie montagneuse. 8. La plupart des termes utilisés ici pour exemplifier ne sont pas donnés dans Les Emprunts... 9. Locuteur béarnais natif de la région d'Orthez, il est président de l'association Per Noste, section Béarn-Gascogne de l'Institut d'Études Occitanes Qu'il me soit permis de le remercier ici. Les finales écrites non accentuée en – a seront réalisée – [ə] : bandera [bãdέrə] « drapeau, bannière », vaishèra [ba∫έrə] « vaisselle » (voir note 7). 10. Les abréviations utilisées sont béarn. : béarnais, C. : commun aux dialectes de France, cast. : castillan, esp. : espagnol, fr. : français, péj. : péjoratif, L. : labourdin, lat. : latin, N. : bas-navarrais, S. : souletin.

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Les verbes sont présentés dans leur forme minimale, sans le suffixe d'accompli : -tü, etc. 11. En complément voici deux expressions que j'ai relevées : l'une à propos du prénom Baptiste, Batistu paga lu pintu [batistú pág ( ') lu pitú] « Baptiste paie la pinte », l'autre, expression triviale de fatalisme utilisée par ma grand mère maternelle Lexa pixa lu xibau ke pixera « Laisse pisser le cheval, il pissera ».

INDEX

Index chronologique : 20e siècle Thèmes : linguistique, littérature Mots-clés : basque (langue), dialecte gascon béarnais, dialecte Souletin, dialectologie, écrivain contemporain, littérature basque, occitan (langue), Peillen Txomin (1934-)

AUTEUR

JEAN-BAPTISTE COYOS

(CNRS, IKER, UMR 5478) [email protected]

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Comptes rendus - Liburu ikertzeak

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Compte rendu de Anne-Marie Lagarde, L'univers psychique des Basques : une instauration de la symétrie des sexes. Expression sociale et linguistique Thèse d'Etudes Basques U.P.P.A., 2000

Manex Goyhenetche

1 Des thèmes similaires ont déjà attiré l'attention des auteurs et des chercheurs. Cette fois-ci, l'entreprise a l'intérêt de mobiliser les ressources de l'interdisciplinarité, dans un éventail très large et très varié des sciences humaines. Elle comporte des angles d'approche divers et différents. Certains chapitres, auxquels je me suis intéressé tout particulièrement, pourraient relever, dans une certaine mesure, de l'histoire ethnographique ou anthropologique ayant pour champ d'investigation le repérage des attitudes, des comportements, des traits de psychisme à partir des traces qui nous en ont été laissées1. L'entreprise n'est pas à l'abri des risques déjà signalés par Ferdinand Braudel2, notamment sur l'utilisation - ou la tentative de découverte - de la notion de « cultures primitives ». La tâche n'est pas impossible, d'un point de vue historiographique, à condition que la méthode d'investigation repose sur l'enquête documentaire.

2 Aussi, la contribution ou le regard critique que je porte sur ce travail ne concerne que le domaine que je connais : l'histoire. Pour des raisons d'épistémologie, il n'est pas question d'aborder les domaines qui ne sont pas miens, mais que l'auteur aborde : philosophie, philologie, psychologie, droit, ethnologie, anthropologie, psychanalyse. Les notes qui suivent n'ont pas pour objet de nier l'importance et l'intérêt de ce travail, mais, dans une perspective historiographique, d'aider à la réflexion d'ordre épistémologique qu'il est nécessaire de mener autour d'une discipline appelée, ici, dans la thèse, « Etudes basques ».

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3 Je n'aborderai pas le sujet même du travail (l'univers psychique des Basques). Je me contenterai seulement de quelques remarques ou corrections, d'ordre historique ou historiographique, suscitées par la lecture linéaire du texte dactylographié de la thèse. P. 27 : « l'euskara langue paléolithique » : 4 Les conclusions des dernières recherches sur cette question sont très loin d'une telle affirmation. J.B. Orpustan, ouvrant les débats du Colloque du C.N.R.S. tenu à Bayonne, en 1993, évoquait le « scepticisme général qui s'est emparé de la bascologie moderne quant aux origines du basque »3. P. 29 :« L'examen balayera à grands traits le cours de l'histoire, chapitre après chapitre. Antiquité d'abord, avec une incursion dans la mythologie basque. Période allant de la pax romana au XIIème siècle, ensuite. Puis du XIIème au XVIIIème siècle. Enfin XIXème et XXème siècle ». 5 J'admire une telle capacité intellectuelle et épistémologique à pouvoir embrasser ainsi - et ramasser en quelques 130 pages dactylographiées - tous les temps de l'histoire des Basques de l'Antiquité à nos jours, alors que les historiens sont toujours réduits à se poser bien des questions, à poursuivre inlassablement la quête documentaire de masses d'archives non exploitées encore et où doivent se cacher bien des éléments d'éclairage de notre histoire. P. 30 : « Le regard de Strabon ». 6 Dans la thèse, la présentation historique des informations fournies par Strabon est très contestable : Strabon signale les Cantabri, les Berones, les Barduli, les Vascones, les Jacetani, les Ilergetes, les Celibères. Pour pouvoir en tirer des déductions d'ordre anthropologique et/ou ethnologique, voire sociologique sur « les ancêtres des Basques », il faudrait reprendre le traitement documentaire, à partir notamment des travaux de Koldo Larrañaga (Université du Pays Basque), peu connus car publiés en euskara4. P. 31 : « (...) témoigne de l'existence de tribus dont les noms rebutent Strabon : il s'agit donc pour lui sur le plan linguistique d'une expérience d'altérité absolue ». 7 L'emploi du verbe « rebuter » est ici proche du jugement de valeur, d'autant plus anachronique que, en l'état actuel de la documentation, il semble que Strabon n'ait jamais parcouru le Pays Basque. Né en Cappadoce (actuelle Turquie), ayant séjourné à Alexandrie (importante ville possédant une riche bibliothèque), ayant ensuite parcouru l'Italie de l'Empire romain, il a travaillé à partir des sources bibliographiques de Rome. Quels documents, quels témoignages a-t-il utilisé ? Comment, de qui a-t-il recueilli le terme « wascones » ?

8 Par ailleurs, le regard porté par Strabon n'a pas de quoi nous surprendre, c'est celui d'un homme de civilisation grecque et romaine. On rejoint là le thème de « l'altérité et la barbarie » ou « la barbarie et la civilisation » inséré dans les nouveaux programmes de T.P.E. (travaux personnels encadrés) de l'Education Nationale pour les lycées. Et l'on sait que bien des tiraillements existent entre anthropologues, ethnologues et historiens sur le thème de « l'altérité absolue » appliquée aux civilisations dites primitives et dont on tente de redécouvrir l'état primitif. Dans le cas de l'univers psychique des Basques, il s'agit en quelque sorte de reconstituer l'état primitif ou d'origine et d'en suivre les vicissitudes à travers le temps. P. 32 : lignes 13-17, toujours sur Strabon. 9 Il est surprenant que pour l'étude des Vascons de cette même époque (celle de Strabon),- « il y a dans les structures médiévales de ces derniers au Moyen-Age (...) » - l'auteur de la thèse ait recours au « droit basque tel qu 'il est attesté au XIIe siècle ». Je serais

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heureux de connaître ce droit basque du XIIe siècle en Labourd, Soule, Guipuscoa, etc. Nous avons, pour la Navarre (et l'Aragon), des fors locaux qui apparaissent à Jaca (1076), à Estella (1090), Puente la Reina (1095), Sanguesa (1122), le nouveau quartier de San Saturnino (ou Cernino) à Pampelune (1129), fors accordés en premier lieu aux « Francos » et non aux autochtones navarrais ! Ce nouveau modèle juridique fut étendu au Guipuzcoa seulement à partir de la fin du XIIe siècle (Saint-Sébastien en 1180)5. P. 33 : « L'examen des témoignages de l'Antiquité sur la « gynécocratie » cantabro- pyrénéenne » (...) « Le matriarcat cantabre (....) ». 10 Toujours la même question pour l'Antiquité : quelle source documentaire historique nous autorise à établir un lien entre le matriarcat cantabre et celui des Vascons (« les données antiques concernant le droit féminin chez les Vascons ») ? P. 33, note 52 : description du festin « (...) le long de la paroi un siège construit avec le mur, où l'on prend place selon son âge et son rang ». 11 Le témoignage de la documentation écrite est attesté par l'apport de l'archéologie qui a mis à jour les sites d'habitat urbain de cette époque. Mais il reste toujours la question de fond : cela concerne-t-il les Cantabres, les Ibères, les Vascons, les Celtibères ? A moins de faire de tout ce « melting pot » d'avant la lettre « nos ancêtres les Vascons ». Et cela nous amène à une autre piste de quête documentaire et de recherche : à l'époque de Strabon, dans l'espace compris, grosso modo, entre les Pyrénées et la rive droite de l'Ebre, quel était le fonds autochtone (vascon ?), quels étaient les apports exogènes ? De quels peuples, de quelles migrations ? de quelle (s) période (s) témoignent les sources tant archéologiques que documentaires ? De quels éléments (autochtones, exogènes, endogènes) était composée la civilisation dite « celtibère » (si tant est qu'on puisse utiliser une telle appellation, mais les textes de Strabon nous y autorisent). P. 41 « Le goût de la fête (...) » (...). « L'ensemble de ces notations n 'est pas sans nous rappeler les « akelarre » (ou fêtes du bouc) qui avaient lieu les nuits de pleine lune, et furent attestés au début du XVIIe siècle encore en Pays Basque par de Lancre (...) ». 12 Pour expliquer les us et coutumes des « ancêtres des Basques » dans l'Antiquité, avoir recours au traité de Pierre de Lancre au XVIIe siècle, donne le vertige. La question des procès de sorcellerie, dont la grande période se situe entre la fin du XVe siècle et le XVIIe siècle, est assez bien circonscrite à l'heure actuelle par les historiens, même si des interrogations demeurent toujours (voir les travaux de Julio Caro Baroja, Bernard Guillemin, Nicole Jacques-Chaquin, ou les actes du Colloque International tenu à Fontenay -Saint-Cloud en 1992)6. Nicole Jacques-Chaquin et Maxime Préaud ont montré, dans la présentation des actes de ce colloque, que, un peu partout en Europe, à partir de la fin du XVe siècle, la cérémonie du sabbat a constitué l'élément essentiel de l'imaginaire de la sorcellerie. Il s'agit d'un récit que l'on (le juge, les autorités) fait faire à la victime, qui est obtenu par des méthodes de coercition et de mauvais traitements. Le stéréotype ou l'archétype du sabbat a été élaboré par les inquisiteurs et les démonologues (Pierre de Lancre en était un). A travers toute l'Europe (notamment en Suisse, en Allemagne, vallées italiennes, Aragon), nous avons les mêmes rites de la « lande au bouc » (akelarre). P. 42 « Et le viol (...) ». 13 Avoir recours à la Coutume de Soule de 1520 pour résoudre cette question, dans le cadre de l'étude de Strabon qui ne l'évoque même pas d'ailleurs, laisse perplexe en ce qui concerne le traitement historiographique. Les mesures contre le viol étaient

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prévues dans les législations médiévales, par exemple dans le titre III du livre quatre du Fuero General : « de fuerzas de mugeres et de adulterios » ; chapitre III : « que pena ha el yfanzon que forza yfanzona (...) » ; chapitre IV : « que pena ha yfanzon que forza a villana » ; chapitre VI : « que pena ha villano que forza a yfanzona » ; chapitre VIII : « que pena ha qui forza a muyller casada » ; chapitre IX : « que pena ha ombre casado que forza a muyller casada », etc. P. 43 « Dispositions du droit basque concernant la guerre de conquête : elle est proscrite. Les Biscayens avaient l'obligation, de par le Fuero, de défendre leur terre, mais, arrivés aux limites de celle-ci, ils ne devaient pas poursuivre l'ennemi dans un esprit de conquête. Ils plantaient symboliquement leurs Manex Goyenetche glaives dans « l'arbre de Malato » qui se trouvait à la frontière biscaïenne ». 14 L'auteur tombe ici dans l'imprécision, l'anachronisme et le contre-sens historique. Tout d'abord, comme source documentaire de cette pratique médiévale, l'auteur cite Philippe Oyhamburu, de profession journaliste et artiste. Pour une thèse digne de ce nom, on aurait aimé avoir la référence historique précise, ainsi que le contenu exact de cette pratique. Il s'agit de la loi V du titre I du Fuero de Biscaye élaboré en 15267 qui stipule : 1°) que les nobles de Biscaye (Los Caballeros-Escuderos, hombres Hijosdalgo), et non tous les Biscayens, ont l'obligation d'être au service du seigneur de Biscaye (« que a su servicio los mandase llamar »), sans recevoir de solde (« sin sueldo alguno »), jusqu'à l'arbre Malato (« el Arbol Malato »), situé à Lujando. Mais si le seigneur leur mande d'aller au-delà, il devra assurer la solde de deux mois, s'ils sortent jusqu'aux ports, « les debe pagar el sueldo de dos meses, si hubieren de ir a aquende los puertos », et, au-delà, trois mois. Si ces conditions ne sont pas remplies, les nobles biscayens ne sont pas tenus d'obéir à leur seigneur.

15 A vrai dire, une telle pratique est bien connue des historiens médiévistes : il s'agit de la version biscayenne du droit de ban (commandement), plus exactement de la « chevauchée » (service militaire dû par le vassal hors de la seigneurie du seigneur et dont la durée était limitée dans les coutumes), et du « service d'ost » ; ce dernier était illimité dans la durée et l'espace, mais un complément de solde était versé par rapport aux gages de la « chevauchée »8. P. 48 « Quant à la prise en compte de sa parole (celle de la femme « vasco- cantabre »), elle apparaît dans un épisode conté par Plutarque et rapporté par Albert Tessier » (auteur d'un ouvrage publié en 1918). 16 Ici aussi, nous attendons en vain la source documentaire précise, la citation exacte de Plutarque, l'auteur se contentant de donner une source de deuxième main (celle d'Albert Tessier). P. 48 « la ville gersoise d'Auch qui s'appelait autrefois Elliberre et avait été fondée par des tribus vasconnes ». 17 Sur une telle fondation vasconne, nous n'avons aucune preuve documentaire écrite. Strabon situe les Ausci parmi les « Akouitanos ». Il en est de même pour Pline « Aquitanicae sunt (...) Ausci (...) », ainsi que pour Pomponius Mela (« Aquitanorum clarissimi sunt Ausci »). Ce dernier, qui vivait au Ier siècle après J.C., ajoute une indication non donnée par ses prédécesseurs : « urbes opulentissimae in Auscis Elimberrum »9. Aucun auteur gréco-romain ne mentionne une fondation vasconne. P. 65 « Au sujet de « L'Etxe (...) ce tout indivisible qui englobe la demeure ancestrale et ses terres, et la demeure des morts. Le culte rendu dans la maison s'adressait indubitablement aux âmes des ancêtres » (...) « Ce culte a conditionné jusqu'à aujourd'hui la vie économique et sociale des Basques et ce système juridique si

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original qui apparaît dans les fors et coutumes consignés par écrit à partir du XIVème siècle ». 18 Ce paragraphe aussi contient bien des confusions. D'accord sur le fait que le régime de conservation et de succession des biens apparaît dans les textes législatifs à partir de la fin du Moyen-Age. Mais je ne vois pas dans quel document on évoque la notion de « demeure des morts » ou « le culte rendu (...) aux âmes des ancêtres. » Et l'auteur elle- même ne donne aucune référence précise. P. 71 « Après la conquête romaine » (...). L'on ne dispose d'aucune source concernant les aménagements précis effectués par les envahisseurs sur le plan administratif. Seul l'écho de la lutte est parvenu jusqu'à nous puis le silence de la « pax romana ». 19 Ou n'est-ce pas plutôt que l'auteur ne connaît pas les sources ? Il suffit de reprendre les travaux de transcription réalisés par Koldo Larrañaga (cité en note 4), notamment les chapitres II et III de son corpus documentaire : voilà un matériau de choix pour connaître, du moins quelque peu, le Pays Basque au temps de la « pax romana », sur le plan économique, démographique, social, administratif. Par ailleurs, les recherches archéologiques menées à Irun, Andelos, Pampelune, Gasteiz, Saint-Jean-le-Vieux, etc, permettent de jeter un éclairage partiel sur la période romaine en Pays basque. P. 76 et suivantes : « Du Ve au Xe siècle ». 20 Roger Collins et Eugène Goyheneche sont cités abondamment. Par contre, aucune mention des travaux de Michel Rouche et Renée Mussot-Goulard10. Ces deux médiévistes, excellents latinistes, ont entièrement renouvelé la connaissance de cette période en ce qui concerne l'histoire des Vascons. P. 78. Au sujet de l'« état vascon pratiquement indépendant » et « par la suite, il semble qu'il y ait eu deux duchés : celui d'Aquitaine et celui de Vasconie » : 21 Que de confusions ! Pourtant, il suffisait de reprendre les travaux de Michel Rouche et Renée Mussot-Goulard, même si des zones de contradiction et d'incertitude subsistent entre les deux auteurs. P. 79 « Les conséquences politiques de Roncevaux furent selon les spécialistes la création du royaume de Pampelune ». 22 De quel spécialiste d'histoire médiévale s'agit-il ? Si l'on suit Michel Rouche ou Mussot- Goulard, ou même Jose Maria Lacarra (op. cit. en note 5), la coalition aquitano-vasconne (c'est le terme exact qu'il faudrait employer) fut vaincue en 781, le fils de Charlemagne, Louis le Pieux contrôla l'espace Bordeaux - Pampelune (où il résida même en 810-812). La nouvelle rébellion des Vascons n'intervint qu'à partir de 816, après la mort de Sanche-Loup. P. 80. Au sujet de Sanche le Grand : « la réunion des sept provinces sous un même sceptre fut de courte durée ». 23 Les royaumes et domaines de ce roi s'étendaient bien au-delà de l'actuel Zazpiak Bat. P. 81 « L'on peut penser que l'importance de la femme dans la société basque a pu freiner la christianisation ». 24 La problématique introduite par l'auteur est intéressante et l'hypothèse pertinente : encore faut-il apporter un minimum de matériau documentaire à l'appui de l'hypothèse, ce qui n'est pas le cas. P. 85 « Leur adhésion extrêmement tardive à la royauté et au christianisme » (au sujet des Basques).

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25 L'auteur est en contradiction avec ce qu'elle a écrit dans les pages précédentes au sujet de « la conversion au christianisme ». Il est vrai que l'on trouve ici le thème récurrent de la conversion tardive des Basques au christianisme. Se cantonner au leitmotiv ne fait guère avancer la recherche si l'on ne s'attelle pas à l'étude des sources écrites, épigraphiques, à l'examen des fouilles archéologiques. Il serait temps là aussi, au cours d'un Colloque par exemple, d'en dresser le bilan11. On verrait à ce moment-là, hypothèse légitime, que le processus d'implantation du christianisme en Pays Basque fut analogue à ce qui se passa ailleurs : la nouvelle religion se répandit, à partir du pourtour méditerranéen, le long des voies romaines, d'abord dans les noyaux urbains et les cités, ensuite dans le pagus, et progressivement dans le saltus vasconum. Dès le IVe siècle, Prudence, Vascon de la cité de Calagurris, en vallée de l'Ebre (Vasco Iberus), issu d'une famille chrétienne, déplore « la grossière gentilité des Vascons » (Vasconum gentilitas) d'alentour. Toujours au IVe siècle, Ausin et Paulin de Nole, deux Aquitains romanisés, chrétiens, expriment la crainte du « Vasconis saltus », mais en 626, d'après le Chronicon de Frédégaire, l'évêque d'Eauze fut condamné à l'exil pour complicité avec les Vascons (rebellione Wascorum)12. P. 85 « Jamais l'organisation qui permit à ce peuple de s'opposer aux envahisseurs germaniques très supérieurs en nombre n 'a été explorée ni n'a tout simplement suscité de questions, tant il est vrai que pour les historiens (…) ». 26 Au risque de plagier Hubert Reeves, il est bon de rappeler que le discours scientifique n'est pas un discours d'affirmation d'une vérité, mais une recherche permanente, un questionnement. Avant d'affirmer, de façon péremptoire, que « jamais... », peut-être faut-il commencer par lire l'importante contribution de Michel Rouche sur ce sujet (cité en note 10). P. 86 et 87 « Les fueros ou fors » pour l'étude de « l'organisation sociale des Basques ». 27 Je suis entièrement d'accord sur le fait que l'histoire institutionnelle permet de saisir les traits de l'organisation sociale. Mais je dois avouer que la présentation historique qui en est faite contient énormément d'imprécisions et de confusions. Une abondante bibliographie existe sur la question, et l'auteur se contente de citer Roger Collins qui n'est pas du tout spécialiste en la matière. Aucune distinction entre les fors locaux ou municipaux et les fors généraux, étendus à un pays, une vallée ; aucune référence aux Hermandades dont les ordonnances sont à l'origine de bien des fueros et des Juntas notamment en Guipuscoa, mais aussi en Alava ; confusion entre le fuero d'Alava et d'Ayala ; ignorance des fors et coutumes des versants septentrionaux (Soule, Labourd, Basse-Navarre) élaborés bien avant le XVIe siècle (coutume de Bayonne au XIIIe siècle, coutume de Montory au XIVe siècle, de Labastide au XIVe siècle, de Saint-Jean-Pied-de- Port au moins dès le XIIIe siècle, d'Ostabat vers les XII e-XIIIe siècles, ordonnances de Ultrapuertos de 1341, coutume du pays de Mixe réformée par Amanieu d'Albret dès 1316, etc13). Et le comble est atteint avec cette affabulation :« d'ailleurs, selon Roger Collins ce sont des colons vascons qui impulsèrent l'émergence des fueros de Castille ». P. 23 : « la version qu'en donne le vieux droit basque en ses coutumes transcrites à partir du XIVe siècle ». 28 Une confirmation de plus sur les confusions qu'entretient l'auteur de la thèse sur les différentes époques d'élaboration, de confection, de transcription ou de rédaction nouvelle des fors et coutumes.

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29 En guise de « vieux droit basque », il eût été intéressant, par exemple, de trouver dans cette thèse des développements sur les titres I, II, et III du Livre IV du Fuero General de Navarre consacrés respectivement au mariage (de casamientos), aux arras (donation antiphernale ou don du matin accordé par l'homme comme le prix de la virginité de la femme), aux viols, adultères et rapts (defuerzas de mugeres et de adulterios), aux enfants (de criar fijos). P. 87 « Inexistence de toute classe servile » (pour le Moyen-Age en Pays Basque). 30 Et que faire alors de la masse de documents d'archives du Moyen-Age où apparaissent les « pecheros », les « collazos », les « botoys », les « mesquinos », les « servi » ? Que faire du Fuero General de Navarre où apparaissent des catégories paysannes sur lesquelles pesaient des redevances en nature ou en force de travail ayant nom cena ou albergada, peyta de fonsadera, pecha de reconoscienza, semana peon, labor ou facendera, pecha de perga, pecha de cazadores, etc, etc ? 14. Certes, il ne s'agit pas de « classes » au sens où l'entendent les auteurs des XIXe XIXe siècles, mais ce ne sont pas moins des catégories sociales inférieures. P. 128 : « » obedezco pero no cumplo » (...) ingénieuses figures juridiques lui permettant de se jouer des décrets madrilènes ». 31 Ici aussi, comme pour el Arbol Malato, la référence documentaire n'est guère donnée, le contexte historique n'est pas dressé avec précision. Il s'agit du « pase forai ». Les dernières études15 montrent que cette pratique était l'équivalent du droit de remontrance usité par les parlements et les assemblées d'états à l'égard de toute mesure du souverain. Ce mécanisme de contrôle des décisions royales trouve son origine dans le droit castillan du bas Moyen Age. Il ne fut introduit en Biscaye, Guipuscoa et Navarre qu'aux XVe-XVIe siècles. On ne le trouve pas dans les provinces basques septentrionales. P. 200 : « Présentation des Cagots ». 32 Francisque-Michel est abondamment cité. Mais rien sur les recherches d'universitaires actuelles comme Véronique Bériac ou Benoit Cursente16 qui ont renouvelé la problématique de ce sujet. P. 246. Au sujet de la délégation de « tous les Vascons seniores » qui se rendit au VIIe siècle auprès du roi Dagobert : « Il n'y a aucune raison de penser que la perception du chroniqueur Frédégaire soit fausse et que les « seniores » ne soient des chefs de parentèle (...). Ceci n'enlève rien de sa réalité au fait que par ailleurs, dans l'ensemble de la société vasconne, le système à maison prévalait depuis très longtemps (...) et sûrement au temps de Strabon ». 33 Effectivement, il n'y a aucune raison d'opposer système de parentèle et système à maison. Mais dans le cadre de la problématique étudiée dans la thèse, il serait intéressant de poser la question suivante : dans le contexte du VIIe siècle, et plus exactement celui des VIe-VIIIe siècles, marqués par ce que Georges Duby appelle la « civilisation de la guerre et de l'agression (...) née des grandes migrations »17, qu'était un « senior » vascon ? Quelle évolution, par rapport à « la société traditionnelle basque » (voir p. 12 de la thèse) entraînèrent ces trois siècles de guerre ? Dans quelle mesure ceux-ci intervinrent-ils dans « la genèse du lignage patrilinéaire » 18 ? On peut prolonger le questionnement à partir du fait qu'à la fin du Ville siècle, selon les chroniqueurs francs, les Vascons vaincus furent décimés, massacrés, les chefs ou princes (les « seniores » de Frédégaire ?) qui étaient vivants, pris en otage avec les enfants. Dans l'organisation (ou

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la réorganisation) sociale, quelle transformation, adaptation subirent, par voie de conséquence, les femmes vasconnes ?

34 On peut poursuivre cete interrogation, l'étendre vers d'autres périodes charnières. La lecture de certains documents navarrais du haut Moyen Age (voir Documentacion medieval de Leire et Coleccion diplomatica de Irache cit. en note 13) mettent en lumière, par endroits, l'existence de structures sociales et familiales servant de réserve de main- d'œuvre. Dans ces documents, l'emploi fréquent de termes comme servus, servi, servire (ou d'expressions analogues) montre que le premier devoir est le service. La valeur sociale et économique de la famille semblait, dans ce cas, organisée autour de la gestion des redevances, des perceptions et des réquisitions. 35 Par contre, les XIe-XIIIe siècles, ces « beaux siècles » du Moyen Age occidental, furent caractérisés en Pays Basque par l'émergence et l'expansion des fors et coutumes. Dans le cadre de la renaissance du commerce et de l'essor des villes et des foires, notamment sur la route de Saint-Jacques-de-Compostelle, les nouveaux noyaux de population, acquirent le droit de se constituer en corps juridique et administratif autonome, en « commune ». Les relations sociales furent altérées, les liens avec les seigneurs, laïques ou ecclésiastiques, se distendirent. Dans ce contexte, quelle évolution ou transformation connut la femme quant à sa place et à son rôle ? La valeur sociale et économique de la famille fut-elle la même que dans les périodes antérieures ? 36 Il s'agit donc de repérer, dans le temps, les permanences et les mutations du « système à maison » (pour reprendre l'expression de l'auteur), du modèle familial qui a été construit, ici comme ailleurs, par la culture (ou les apports des différents substrats de culture) et par l'histoire. P. 247 : Au sujet de l'analyse du Prologue du Fuero General de Navarre par Manex Goyhenetche (Histoire générale du Pays Basque, T. I) : « L'on comprend et l'on partage le souci qui sous-tend son argumentation : car il s'agit d'éviter le péril d'une idéologie raciste (...) ». 37 Mais non ! Je ne vois pas ce que viendrait faire l'idéologie dans une analyse ou un commentaire de document historique. Comme on l'apprend aux lycéens pour la préparation au baccalauréat, l'analyse d'un document commence par l'étude de la nature de ce document, l'origine de son inspiration, sa source, les conditions de sa rédaction, l'identité de ses rédacteurs. C'est ce que j'ai essayé de faire, tout comme pour les autres documents historiques.

38 Pour revenir au Fuero General, à l'heure actuelle, bien des historiens sont convaincus que la rédaction du Prologue fut une entreprise de mystification impulsée ou inspirée par l'historien navarrais du XIIIe siècle, Rodrigo Ximenez de Rada. La chose était courante au Moyen Age comme l'a démontré Julio Caro Baroja19. 39 Par ailleurs, il n'y a rien de surprenant qu'à l'époque de la rédaction du Fuero General, la pratique juridique en Navarre (et non la « pratique judiciaire » comme l'écrit l'auteur de la thèse) s'inspire des traditions et des enseignements juridiques de Rome, de Lombardie, de France. La Navarre ne constituait pas un îlot. Il faut placer la rédaction du Fuero General dans le contexte du XIIIe siècle empreint d'une forte influence juridique impulsée notamment par l'école de Bologne. Il faut savoir que le prestige juridique de Bologne était à son apogée à cette époque, en Occident, et notamment dans les royaumes dits ibériques, dont faisait partie la Navarre20. P. 252 : au sujet de l'interdiction faite à la femme au Biltzar de Labourd en 1784 et mentionnée par Manex Goyhenetche dans Histoire générale du Pays Basque (T. II, p.

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265) : « L'on s'attend donc à ce qu'il explique la raison de l'interdiction (...) du moins à ce qu'il pose la question » (...) « L'explication concernant l'interdiction (...) ne viendra pas ». 40 L'auteur aurait dû lire la page 266 où je pose la question avant de proposer une recherche : « Le vent de la contestation féminine soufflait-il dans les campagnes labourdines ? La piste reste ouverte pour l'investigation » (Histoire générale du Pays Basque, T. II, p. 266). P. 253 : « Il (Manex Goyhenetche) est convaincu que seul le Siècle des Lumières apportera la touche manquant à la conception de la démocratie ». 41 A l'appui d'une telle affirmation à mon sujet, l'auteur avance une interview donnée au journal Enbata. Tout le monde sait que les interviews sont rarement contrôlées par celui qui les donne et ne constituent pas une position de thèse. Par ailleurs, il serait bien illusoire, et surtout anachronique, d'appréhender le fonctionnement des institutions de l'Ancien Régime en terme de « démocratie » dont le concept apparaît tardivement (époque de Bossuet). Les institutions de l'Ancien Régime furent bâties sur des textes normatifs qui encadraient le réel, assuraient la permanence de certains comportements sociaux, économiques, moraux, politiques, culturels, donc prétendaient régler les rapports sociaux dans leur ensemble. Cela, dans un temps donné, dans un espace déterminé. L'objet de l'historien, dans ce cas précis, est d'essayer d'établir un lien entre l'histoire institutionnelle et l'histoire sociale. C'est modeste et ambitieux à la fois. Des historiens tentent de le faire en Pays Basque21. P. 252-254 : Au sujet de Manex Goyhenetche (Histoire Générale du Pays Basque, T. II) : « On a à lire les développements de l'historien l'impression de naviguer entre deux plans de réflexion, voire dans un malentendu, et la question sur laquelle on reste, tant on est dérouté parfois par sa façon de présenter les choses (....). Et l'on reste sur sa faim ». 42 Mais je crois que le malentendu est total, car il n'a jamais été dans mes objectifs et mes propos d'aborder, même d'un point de vue historiographique, la question du matriarcat chez les Basques, mais, dans une perspective d'histoire institutionnelle et sociale, de jeter les jalons d'une investigation sur le rôle et la place de la femme, dans le sillage de ce que propose Jose Antonio Azpiazu, position admirablement ramassée dans le titre : « Soumission et pouvoir »22. Et la réalité sociale historique est souvent difficile à saisir, compliquée, contrastée, échappe à la simplification, à nos schémas culturels et idéologiques. Pour l'historien, elle exige l'inventaire des sources et le traitement documentaire, sans écarter les sources orales, sans minimiser l'apport de l'anthropologie sociale et historique, l'apport de l'histoire des mentalités. P. 249 : « Il (Manex Goyhenetche) ne partage pas la conviction de certains chercheurs du domaine des études basques quant à une égalité structurelle des sexes dans l'histoire de ce pays. Il s'en tient à tout ce qui prouve la dépendance des femmes dans le Fuero General de Navarre ». 43 L'égalité (structurelle ou pas) des sexes ne se trouve pas dans une histoire intemporelle, engendrée par nos chimères et nos imaginations, mais dans un réel complexe, situé dans un temps précis de l'histoire, dans un espace donné. Pour essayer de saisir ce réel complexe, autant que faire se peut, la quête documentaire est une démarche nécessaire, même si le document ne dévoile pas tout le réel.

44 Pour revenir au Fuero general, base du droit navarrais, l'auteur semble ne l'avoir pas consulté directement dans le texte. Pourtant, ce texte normatif qui devait encadrer le réel, est très riche d'informations sur le rôle et la place de la femme, sa capacité juridique, sur le contrat de mariage, la constitution des arras, le régime matrimonial, la

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condition de la femme pendant le mariage, les tâches de la femme selon que le mari était présent ou absent, les obligations réciproques des époux, l'administration des biens, la condition de la femme après la dissolution du mariage, les secondes noces, l'usufruit des veuves, etc. Faut-il faire abstraction de tous ces textes ? Ne constituent-ils pas un matériau pour l'approche de l'univers psychique des Basques et la symétrie des sexes ? Mais à un moment précis de leur histoire, la Navarre au XIIIe siècle. Surtout ne séparons pas la Navarre et le Pays Basque, et par voie de conséquence un quelconque droit basque que l'on ne trouverait pas dans le Fuero General. Certes, il est vrai que peu consultent le texte dans son ensemble, surtout côté Pays Basque Nord, car il est rédigé en navarro-aragonais et n'a pas été traduit en français (ni en basque non plus d'ailleurs). Pourtant, il reste un document fondamental pour connaître la société navarraise, celle des Basques, du XIIIe siècle. Le seul travail d'investigation réalisé de ce côté-ci a été mené par G. Desdevises du Dézert dont la thèse au titre évocateur (De conditione mulierum....) mériterait d'être rééditée pour qu'on ne continue pas à faire une histoire intemporelle du droit basque23. 45 Qu'on le veuille ou non, pour connaître l'histoire du Pays Basque, y compris celle de la femme en Pays Basque, la consultation approfondie du Fuero General est indispensable. C'est la Navarre aussi qui a conservé le plus de sources documentaires écrites, car elle constituait un royaume, et à ce titre disposait d'une administration permettant la conservation des archives. Cela n'a pas été pour d'autres territoires du Pays Basque. 46 Elargissons le débat, et plaçons-nous au carrefour de l'interdisciplinarité, entre l'histoire, l'anthropologie, voire la philosophie. Dans cette étude, en quête de l'univers psychique des Basques et de la symétrie des sexes, différents temps de l'histoire ont été évoqués : l'Antiquité, celle des Ibères comme celle de Strabon, ou celle de Rome ; le temps de l'implantation du christianisme, celui de l'émergence et du renforcement des différents états (Navarre, France, Castille, Angleterre), les XIe-XIIe siècles des premiers fors locaux, le XIIIe siècle du Fuero General, le XVIe siècle de la Coutume de Soule, le XVIIIe siècle du Biltzar de Labourd, la Révolution etc. 47 Tous ces temps (ces événements) constituent-ils les vicissitudes de l'histoire, les éléments d'altération par rapport à un état de nature originel, creuset en quelque sorte de l'identité basque, de l'être basque ? Mais à ce moment-là, ne sommes-nous pas confrontés à la question de la nature et de l'histoire, dans la mesure où l'homme n'existe pas seulement à l'état de nature, il est aussi histoire (être historique), avec sa capacité à transformer et à se transformer, à devenir ? Peut-on conjuguer l'être basque en faisant abstraction de l'événement et du devenir ? 48 Car il n'y a pas de nature, d'état de nature, d'état primitif à l'état zéro. Les Basques, tout comme leurs ancêtres (si tant est qu'il faille chercher des ancêtres, et lesquels ?), n'ont existé, comme tous les peuples, que dans l'événement (provoqué ou subi), qui les fait rentrer dans l'historique, plus exactement dans la gangue de l'histoire. Nier cela, c'est dépouiller de leur histoire les hommes et les femmes du Pays Basque. 49 Dans cette perspective, on peut considérer comme un modèle d'investigation les actes du Séminaire I.P.E.S. Ikastaroak tenu à Bilbao en 199624. Nous avons là les prémices de ce qui pourrait être une histoire des femmes en Pays Basque. Sous l'égide de l'Université du Pays Basque ou de la Société Eusko Ikaskuntza, d'autres travaux de monographie, menés par de nouvelles équipes de recherche, ont vu le jour à Bilbao. Vitoria. Bermeo25.

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50 L'univers des Basques qui s'en dégage, surtout celui des femmes, n'est plus ce que José Urrutikoetxea Lizarraga appelle « la grande essence dans un monde des essences » 26. Loin des procédés d'idéalisation, le traitement des sources documentaires restitue plutôt les images contrastées d'identités sociales et culturelles vécues, produites, forgées, moulées dans l'expérience de situations, d'histoires, d'existences historiques réelles. L'étude de la famille, vacille souvent, il est vrai, entre « les chemins tortueux de l'idéalisation idéologique »27 et l'approche difficile des réalités historiques concrètes. C'est dans cette dernière voie que s'est engagée désormais l'historiographie en Pays Basque.

NOTES

1. Voir Michel Vovelle, De la cave au grenier, Québec, Serge Fleury. 1980. 2. Ferdinand Braudel, Ecrits sur l'Histoire, Flammarion, 1996. Les problèmes méthodologiques ont été aussi abordés par Christian Desplat, « Anthropologie et histoire », Charivaris en Gascogne. La « morale » des peuples du XVIe au XXe siècle, Berger-Levrault, 1982, p. 251-256. 3. (Sous la direction de J.B. Orpustan), La langue basque parmi les autres. Influences et comparaisons. Izpegi, 1994, p. 8. 4. Koldo Larrañaga Elorza, Euskal Herria Antzinatean. Materiale eta Agiriak, Kriselu, UNED, Bergara, 1988. 5. Voir les travaux de J.M. Lacarra, guère utilisés dans cette thèse, notamment la série Fueros de Navarra, Fueros derivados de Jaca, 1. Estella-San Sebastian, 1969, 2. Pamplona, 1975. On peut aussi consulter avec profit l'ouvrage de Marcelin Defourneaux, Les Français en Espagne aux XIe et XIIe s., P.U.F., 1947 6. Nicole Jacques-Chaquin et Maxime Préaud, Le sabbat des sorciers en Europe. XV e-XVIIIe siècles. Jérôme Millon, 1993. 7. Texte consulté : El fuero, privilegios, franquezas y libertades del M.N. y M.L. señorio de Vizcaya, Bilbao, 1977. 8. Bibliographie à consulter : René Fédou, Lexique historique du Moyen Age, Colin, 1980. Jean Favier, Dictionnaire de la France médiévale, Fayard, 1993. 9. Pour l'ensemble des citations, voir K. Larrañaga, op. cit. en note 4. 10. Michel Rouche, L'Aquitaine, Jean Touzot, 1979, Renée Mussot-Goulard, Les princes de Gascogne, 768-1070, C.T.R., 1982. 11. Pour les références des sources bibliographiques, consulter Manex Goyhenetche, Histoire générale du Pays Basque, Elkarlanean, 1998, T. I, p. 130-135, 156-157. 12. Pour les références des sources bibliographiques, consulter Manex Goyhenetche, Histoire générale du Pays Basque, Elkarlanean, 1998, T. I, p. 130-135, 156-157. 13. Consulter Jornadas sobre cortes, juntas y parlamentos del pueblo vasco, Cuadernos de seccion Derecho, Eusko Ikaskuntza, 1984. Instituciones, eco-nomia y sociedad (siglos VIII-XV), Congreso de Historia de Euskal Herria, 1988, T. II. Antonio Beristain, Maria Angeles Larrea, Rafael Maria Mieza, « Fuentes de derecho penal vasco (siglos XI-XVI) », Anthropologia vasca, Bilbao, 1980, T. V. 14. Outre le Fuero General (édition de 1869 établie par Pablo Ilarregui et Segundo Lapuerta), bibliographie complémentaire : G. Desdevises du Dézert, « De la condition de la femme mariée en Navarre d'après le Fuero General », Revue des Pyrénées, année 1890, t. II, p. 804-833 (voir supra note 21), Maurice Berthe, Famines et épidémies dans les campagnes navarraises à la fin du Moyen Age,

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Paris, S.F.I.E.D., 1984, Angel J. Martin Duque, Documentacion medieval de Leire (siglos IX a XII), Pampelune 1983, Jose Maria Lacarra et Angel Martin Duque, Coleccion diplomatica de Irache, Pampelune, 1986. Comme matériau de choix susceptible d'être utilisé aussi bien par les historiens, les anthropologues que les ethnologues, signalons l'importante collection Fuentes Documentates Medievales del Pais Vasco, sous l'égide d'Eusko Ikaskuntza. 15. Bibliographie à consulter : Ricardo Gomez Rivero, « Un derecho historico no actualizado : el uso ou pase forai », Congreso de Historia del Pais Vasco, op. cit., p. 73-84. Du même auteur, El Pase foral en Guipuzcoa en el siglo XVIII, Sans Sebastian, 1982. 16. Françoise Bériac, Des lépreux aux Cagots. Une société marginale. Bordeaux, F.H.S.O., 1990. Benoît Cursente, « Hypothèses nouvelles sur un vieux problème : l'origine des cagots pyrénéens », Actes du Colloque international de Foix, 1998. 17. Georges Duby, Guerriers et paysans, Flammarion, p. 60. 18. Martin Aurell, La noblesse en Occident (Ve-XVe siècles), Colin, 1996, p. 63-64. 19. Julio Caro Baroja, Las falsificaciones de la Historia, Seix Barrai. Biblioteca Breve, 1992. En fait, le thème de la mystification en histoire et surtout dans les chroniques médiévales, y compris celles concernant l'histoire des territoires basques, avait été déjà abordé par Ramon Menendez Pidal dans sa collection Catalogo de cronicas. 20. Bibliographie à consulter sur ce sujet et que semble ignorer l'auteur : Hortensia Vines Rueda, Hablar Navarro en el Fuero generai, Pampelune, éd. Gomez, 1977. J. Beneito, Fuero, costumbre y doctrina en el Derecho Medieval español, Madrid, 1968, p. 8, A. D'Ors, Nueva Enciclopedia Juridica, Barcelona, 1969. 21. Dans cette perspective, voir les nouveaux travaux de recherche menés par Susana Truchuelo Garcia, La representacion de las corporaciones locales guipuz-coanas en el entramado politico provincial, Alfonso de Otazu, El igualita-rismo vasco : mito y realidad, Txertoa, 1986, Fernando Martinez Rueda, Los Poderes Locales en Vizcaya, U.P.V., Bilbao, 1994, Alfonso F. Gonzalez, Instituciones y sociedad guipuzcoanas en los comienzos del centralismo (1680-1730), Donostia-San Sebastian, 1995. 22. Jose Antonio Azpiazu, Mujeres vascas. Sumision y poder, Haranburu, 1995. 23. Georges Nicolas Desdevizes Du Désert, De conditione mulierum juxta forum Navarrensium, thèse de la Faculté des Lettres de Paris, Caen H. Delesques, 1888. Traduction en français, De la condition de la femme mariée en Navarre d'après le Fuero General, Toulouse, Privat, 1890. Extraits dans la Revue des Pyrénées, 1890, T. II, p. 804-833, la revue Euskal Erria, 1891, XXIV, p. 326-355, 366-372, 402-404. 24. Las mujeres vascas en la historia, I.P.E.S., Cuadernos de formacion, 24. Consulter aussi le n° 12 : Emakumea Euskalerriko historian (La femme dans l'histoire du Pays Basque). 25. M. Arbaiza Villalonga, Familia, trabajo y reproducion social. Una perspectiva microhistόrica de la sociedad vizcaina del Antiguo Regimen. U.P.V., Bilbao, 1996. Paloma Manzanos Arreal, « La mujer y el mundo del trabajo en la Vitoria del siglo XVIII », Revue Vasconia, n° 30, année 2000, p. 397-411. Femandez Fonseca, Maria Jesus Prado Antunez, Ana Isabel, « El trabajo femenino en la Bizkaia del siglo XIX : analisis del trabajo femenino en la villa de Bermeo en 1860 », Ibidem, p. 413-427. Rocio Garcia Abad, « Mercado de Trabajo y Estrategias Familiares en las mujeres durante la primera indus-trializacion vizcaina : el hospedaje », V. Jornadas de Estudios Historico-locales. La familia en Euskal Herria, revue Vasconia, n° 28, p. 93-115. 26. « Estamos ante la gran esencia en un mundo de las esencias », José Urrutikoetxea Lizarraga, « Ets- adi »/« Etse » (« Etxe »)- « Familia »/ « Casa » : a los terrenos de la historia por los vericuetos de la idealizacion y la ideologizacion, V Jornadas de estudios historico-locales. La familia en Euskal Herria, op. cit., p. 278. 27. « Familia Vasca : ideologia y realidad : nuevas perspectivas » (Ibidem).

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INDEX

Mots-clés : critique littéraire, histoire du Pays basque Thèmes : histoire, littérature Index chronologique : de l’Antiquité à nos jours

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Liburu ikertzea : Xabier Artiagoitia Hatsarreak eta parametroak lantzen Euskal Herriko Unibertsitatea eta Arabako Foru Aldundia, 2000, 446 orr.

Ricardo Etxepare

1 Gramatika sortzaileak bide luzea egin du honezkero gure artean, eta esan genezake egun zabalduen den ikermoldea dela bai hemen, eta orohar, baita hemendik kanpo ere. Patxi Goenagaren Gramatika Bideetan (1980) klasikotik Artiagoitia irakasleak plazara berri duen Hatsarreak eta Parametroak honetaraino, hala ere, ez dira ugari izan (nolabait esatearren) iker-molde hedatu honen berri xehe emateko eginak izan diren liburuak. euskaraz. Sintaxiaren alorrera mugatuaz, eta Goenagarenaz aparte, Itziar Lakak itzulitako Lasnik eta Uriagerekaren GB Ikastaro Bat ezaguna eta oinarrizko zenbait gai tratatzen dituzten Goenagaren (1986) eta Salabururen (1987, 1989) aspaldiko lan bildumak besterik ez genituen. Urtetako hutsartea bete-tzera dator beraz, argitara berri den Hatsarreak eta Parametroak hau, eta esku ezin hobeagotik gainera : ofizioaren nekeak aspaldi probatuak eta gaiaren zokoak ondo miatuak dituen Xabier Artiagoitia, Euskal Herriko Unibertsitateko irakaslearenetik, alegia.

2 Liburua mardula da (446 orrialde), eta ez gaingiroki irakurtzen diren horietakoak. Arrazoiak bitarikoak dira : batetik, liburua euskal sintaxiak azken hamar-hamabost urteetan eman duenaren sintesi lan gisa pentsatua izan delako, eta ez bakarrik diziplinaren bilakaera eta oinarrien azalpide orokor gisa. Bestetik, egileak aitortzen duen bezala, liburua ez delako « txoil deus ez dakitenentzako » egina, baizik eta sintaxiarekin eta gramatika sortzailearekin gutxie-neko ezagupidea egina dutenentzako (egileak liburua EHUko Euskal Filologia lizentziaturako laugarren mailako eskoletarik sortua dela esaten digu). Liburua nahikoa modu tradizionalean antolatua dago : gramatika sortzailearen oinarrian diren ideien azalpen orokor baten ondoren (lehen atala), Gobernu eta Uztardura ereduaren modulu ezagunen errepasoa egiten da : Perpaus Egitura (bigarren kapitulua), Hiztegia eta Theta Teoria (hirugarrena), Kasu Teoria eta Ergatibitatea (laugarrena), Mugimendu Teoria eta NZ- hitzen mugida (bostgarrena), Uztardura Teoria (seigarren kapitulua). Zazpigarren kapituluak buru mugimenduari eta sintaxiaren eta morfologiaren arteko erlazioei heltzen die, azken sei-zazpi urteotan garatu den programa minimalistaren ildotik.

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3 Lehen kapituluak, Hatsarreak eta Parametroak ikermoldearen oinarrizko ideiak, gramatika sortzailearen azpian dagoen ikusmoldea azaltzen du : ikerketa bide hau mugatzen duten galderak (zer den hizkuntza bat, nola jabetzen garen hartaz, nola erabiltzen dugun, nola sortu zen espeziean eta azkenik, nola gauzatzen den burmuinean), modularitatearen eta hizkuntzaren beregaintasunaren tesia (1.2.), barne eta kanpo hizkuntzaren arteko diferentzia (ingelesezko I-language eta E-language), hiztun idealaren kontzeptua eta onargarritasuna eta gramatikaltasunaren arteko diferentzia (1.3.), hizkuntz jakintzaren eta haurrak ingurune linguistikotik jasotzen duen input urriaren arteko jauziaren handia, Chomsky-k Platon-en problema deitu zuena eta sortzezkotasunaren hipotesia bermatzen duena (1.4.1.), hizkuntzen arteko bereizketa eremua eta haren mugak (hatsarreen eta parametroen arteko oreka) (1.4.2.), gramatika partikularren eta gramatika unibertsalaren arteko erlazioa (egokitasun deskriptibo eta teorikoaren arteko tenkaren auzia) (1.4.3.), eta azkenik, gramatikaren antolaketa orokorra-ren lehen itxuratze bat (1.5.). Atala ondo idatzia dago eta argia da azalpenetan, nahiz eta gramatikagintza sortzailearen aitzin uste guziak atal bakar batean bildu nahiak nabartasun eta dispertsio itxura pittin bat ematen duen batzuetan. Deus ere aipatze aldera, zenbait kontzeptuk nere ustez formulazio laxoegia dute beren zuzenean. Horietako bat, gramatikagintzaren jomu-gari dagokio. Egileak honelaxe dio : « Burmuinaren egoerek ardura diote hizkuntzalari choms-kyarrari, hizkuntz gaitasuna giza burmuinaren osagaietariko bat den aldetik » (19. orr.). Orobal « 'zer da hizkuntz bat jakitea » galderari ematen zaion erantzunean (20. orr.) : « halako hizkuntz jakin bat barneratu duen hiztun baten burmuin-egoeraren teoria ». Edota 24. orrialdean : « Gramatikaren baieztapenak gogoaren teoriak barne hizkuntzari, hots, burmuinaren egiturei buruz egiten dituen baieztapenak izango dira. » Hori guzia egia da, eta Chomsky-k hizkuntza-laritzaren ikerketa gaiaren jomuga aipatzen duenenan komunzki gogo/burmuina terminoa erabiltzen du. Chomsky-k dioen bezala, lengoaiaren fakultatea giza biologian erroturiko ahal-mena da, eta giza-burmuinaren antolamendu bereziaren emaitza. Baina hizkuntzalariak iker-tzen dituen gogo atalen propietateak zuzenean burmuinaz predikatzen direla esatearekin batera, beharbada ez zen soberan egongo aipatzea ere burmuina delakoak badituela analisi maila desberdinak, elkarrekin nahasi behar ez direnak. Chomsky-ren hitzetan : « Burmuina maila desberdinetan iker daiteke : atomoen mailan, zelula, zelula-multzoen eta neurona sareen mailan eta baita errepresentazio-konputazio sistemen mailan ere » (Chomsky, 1993, 93. orr.) Hau pellokeria bat baino zerbait gehiago da, batetik errepresentazio-konputazio sistema analisi maila berezi eta beregaineko gisa ezartzea hautu jakin bat delako. Chosmky bera gainera, ezkor agertzen da maila arteko ustezko loturabideen inguruan. Cogo/burmuin terminoaren erabilera, beraz, ez da axolarik gabea, Chomsky-z denaz bezanbatean. 4 Formulazio laxoegia duen bigarren kontzeptua, lehen atal honetan, Logika Formaren definizioa da. Egileak LF « perpausen interpretazioa eta kontzeptualizazioa jasotzen duen maila » dela dio (34. orrialdea), eta agian egokiagoa litzateke esatea Logika Forma gramatikak interpretazio moduluei eskuetaratzen dien egitura sintaktikoa dela, interpretazioa neurri handi batean, baina ez guziz, determinatzen duena. 5 Bigarren kapitulua, perpaus egiturari dagokiona, kategoriaren nozioarekin (2.2.0) eta sintagma eta osagaien eraketari buruzko X-barra eskemaren hipotesiarekin hasten da (2.2.1 eta 2.2.2). Honen ondoren, izen sintagmatik hasi eta perpaus jokatuetaraino aurkitzen diren sintag-men oinarrizko egiturak agertzen ditu (izen sintagma eta Artiagoitiak berak berriki ikertu duen determinatzaile sintagma, inflexio eta

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konplementatzaile sintagmak, eta aditz sintagma eta posposizio sintagmak). Hirugarrenik, balio sintaktikoa duten egitura harremanen gaineko azpi atalak datoz, o- komando erlazioa eta gobernu erlazioa aurkezten dituztenak. Bukatzeko, Kayne-ren antisimetriaren hipotesiaren berri laburra ematen da. 6 Ohiko bideari segituaz, osagaiaren nozioa egitura erizpideen bitartez justifikatzen da. Osagaien presentzia salatzen duten fenomenoei dagokienean (koordinazioa, ordezkapena, mugimendua, elipsia, galdera-erantzun jokoak, partikulen kokapena) adibideak ez dira beti ondo aukeratuak. Honela, ordezkapenaren kasuan, honako adibideak ematen dira (43.orr.) :

(1) a. Diputazioek aho batez onartu dute... b. Nola onartu dute diputazioek... ? c. *Nola onartu dute batez...

7 Aho batez segidak osagai bat eratzen duela erakusteko, nola bezalako ordezkapen forma batek ezin zatitua duela agertzen da. Baina jakina, nola batek sekula ez lezake aho bezalako zerbait ordezka, aho izena osagai baten barnean egon ala ez.

8 Koordinazioaren kasuan, exenplua hauxe da (44.orr.) :

(2) Diputaioek [legearen aurreproiektua] eta [errepide gehiago egingo dituztela] onartu dituzte

9 (2) kategoria bereko osagaiak bakarrik koordina daitezkeela erakusteko baliatzen da. Kategoria desberdintasunaren bitartez etsenpluaren onargaiztasuna esplika daitekeen neurrian (hor DS eta KonpS koordinatzen saiatzen ari gara), koordinazioak kategoria nozioaren eragin- kortasun sintaktikoa erakusten du. Hala ere, badirudi hemen arazoa beste bat dela, eta perpau- sek komunztatzeko duten zailtasunarekin lotua dagoela :

(3) a. Diputazioek [legearen aurreproiektua berehala prest egongo dela] eta [errepide gehiago egingo dituztela] onartu dute/*dituzte b. Diputazioek [legearen aurreproiektua] eta [errepide gehiago egingo dituztela] onartu dute.

10 Izen sintagmaren barne egituraz diharduela, eta X-barrak bereizten dituen osagarri/ espezifi-katzaile erlazioak identifikatu asmoz, egileak jeneralizazio hauxe proposatzen du : « osagarriak I-tik hurrago behar du espezifikatzaileak baino. harekin apurtu ezinezko l'osagaia osatzen duelako edo. » Horren adibidetzat haren (37) exenpluak (diakritikoak egilearenak dira) (55.orr.) :

(4) a. Valverderen Atxagaren erretratua b. *Atxagaren Valverderen erretratua (Valverde erretratugilea izanik) (5) a. Aitaren berebilaren erosketa b. *Berebilaren aitaren erosketa (Eguzkitza, 1993)

11 Hainbat hiztunen belarriaren arabera, ordea, bada diferentzia nabarmen bat (4) eta (5) en artean : (4) b guziz naturala da ; (5) b berriz, ezinezkoa. Diferentzia noski, osagaien ardatz den izenaren nolakotasuenan dago : eventu izaera eta argumentu egitura duen erosketa batetik ; emaitza huts den erretratua bestetik. Antzeko fenomenoa gertatzen

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da ingelesez (Grimshaw, 1990, 145) : egile erroldunaren lekualdaketa (estraposizio bidez) posible da izen hutsekin, baina ez aditzetik eratorritako izenki batekin :

(6) a. An attack by the enemy occurredb. An attack occurred by the enemyc. *The destruction of the city occurred by the enemy

12 Besterik da, noski, zergatik gertatzen den horrelakorik.

13 Hirugarren kapitulu bikaina, Hiztegia eta Theta-Teoriari buruzkoa da, eta segida natu- ral bat dauka Kasu Teoriari buruzko laugarrenean. Hirugarren atal hau lexikoiean gordetzen diren tasunen eztabaida orokor batekin hasten da. Egileak hautapen thematikoa eta kategoria hautapenaren arteko diferentziak tratatzen ditu, eta argumentu-egitura eta theta errolen kon-tzeptuen artean lehen bereizketa egiten. Argumentu egituraren nozioa aurkezteko Grimshavv-ren predikatuen sailkapena erabiltzen du. Egileak, izendatuki, alde batera uzten ditu dimentsionalitate edo tipo semantikoekin zer ikusia duten hautapen galdakizunak (Zucchi 1989, Asher 1993 edo Ormazabal 1995 lanen zentzuan, hau da, proposizioa, eventua, galdera, gertatua bezalako dimentsionalitate desberdineko tipo semantikoak), nahiz eta gero theta hautapenaren sailean berragertzen diren (115.orr.). Egitura lexiko-kontzeptualen izaerari buruzko azpiatal labur bat ere bada (3.1.3.). Sarrera lexikoen lehen itxuratze honen ondoren eta argumentu eta predikatuen arteko diferentzia orokorrak agertu eta gero, egilea argumentu egitura sintaxi egituran nola islatzen den aztertzen du. Bertan, Marancz-en adibide klasikoaren (1984) egokitzapen eder baten bidez theta errolen ezarpen konposizionala erakusten da (123.orr.) eta Baker-en Theta Ezarpenaren Uniformetasunaren Hipotesia aurkezten da. Islapen Hatsarrearen (Projection Principle, Chomsky. 1981) eta harekin loturiko zenbait kontzepturen inguruko eztabaidaren ondoren (3.4.) egilea aditzaz bestelako predikatuen propietateen azter-ketari ekiten dio (izenak, adjektiboak eta posposizioak). Bereziki interesgarria da hemen lehe-nagotik Artiagoitiak (1997,1998) landua duen DS predikatuen analisia, zeinen arabera determinatzailearen agertzea bi faktoreren mendean baitago : batetik predikatua izaki maila-koa izatea ; bestetik, eta partizipioekin batera agertzen denean, eventua burutua izatea (151.orr.). 14 Laugarren kapitulua, Kasu Teoria eta Ergatibitatea, aurrekoaren luzapen natural-tzat jo dezakegu, eta argumentu egituraren sintaxi islapena aztertzen du, Kasuaren teoria tarteko. Egiturazko kasua eta berezko kasuak bereizi ondoren, egilea euskarazko predikatu iragangaitzen sailkapen dagoeneko ohikoa egiten du, ez-akusatiboen eta ez- ergatiboen artean, Perlmutter, Burzio eta Levin-en lanetatik abiatuz. Azken honen tesia, zeinaren arabera aditz inakusatiboen saila NOR aditz formen sail berbera den, kritikatzen da. Euskararen kasu sistema ere aztertzen da, ergatibitatearen parametroaren ikuspegitik, eta ergatibitate morfolo-gikoa eta sintaktikoa bereizten dira (euskara lehen sailari dagokiolarik, Ortiz de Urbina, 1989). Atal honek igoera aditzen eztabaida interesgarri bat dakar (berez Artiagoitia I999ren labur-pena), Salaburu-k aspaldi xamar (1987) aztertutako irudi aditzaren erabilera zenbaiten inguru- koa :

(10) Apaiz honek iduri du Apezpikua oso haserre dagoela

15 (10), guziz bitxi egiten dena hiztun gehienentzako, onargarria da hiztun talde batentzako. Hiztun batzuentzat ematen du irudi aditzak zinezko subjektu thematikoa

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duela. Subjektu thematiko honek mendeko perpauseko subjektua kontrolatzen du. Honela esplikatzen dira bigarren pertsonako kasuak :

(11) Zuk [pro gaisorik zaudela) ematen duzu

16 Hartara, Artiagoitiaren ondorioa da euskarak badituela bi sarrera irudi aditzari dagozkionak (182.orr.), lehena bitxitasun tipologikotzat har genezakeena :

(12) a. iduri, A : gaia, proposizioa b. irudi, A : -TH, proposizioa

17 (10) bezalako kasuak baina, ez dira agian hain bakan munduko beste hizkuntzetan : Rothstein-ek erakusten duen bezala (2001, l89.orr.) irudi bezalako aditzek subjektu lexikoa izan deza-kete, lexikoa izateak berez thematikoa izatea ez dakarrelarik. Honelakoetan baina, irudi aditzak ez du juntagailu ohikoa hartzen :

(13) John seems as if his baby kept him up all night

18 Baliteke (10) en azpian dagoen egitura (12) ren parekoa izatea. (12) bezalako etsenpluetan John-ek kasu nominatiboa du, seems-ek ezarria, baina bere lotura aditzarekin topiko batena bezain lausoa da (Rothstein-ek izan ere, topikalizazio berezi baten gisa hartzen du).

19 Nago, gainera, portaera hau ez ote den irudi aditzaz harat ere hedatzen. Har, esate baterako, merezi izan, zenbait hiztunen ahotan. Lehen etsenpluak igoera aditza peto petoa ematen du. Bigarrenak kontrol egitura baten itxura guztia dauka. Beste biak berriz, ez dira ez bat ez beste :

(14) a. pro merezi du [norbait joatea] b. [(*norbait)/PRO joateak] merezi du d. Jonek [norbait/pro haraino joatea] merezi du e. Zuk [ pro/norbait haraino joatea] merezi duzu

20 Bostgarren kapituluak, Mugimendu teoria eta NZ-hitzen mugida izenburua du. Lehenbiziko azpiatalek oinarrizko kontuak tratatzen dituzte : mugimenduaren existentzia eta beronen izaera ziklikoa (1.1.), eta aztarnen justitlkazio teoriko eta enpirikoa (1.2.). NZ-mugi-darik ez duten hizkuntzen bitartez (Txinerazko etsenpluak erabiltzen dira hemen) Logika Forma errepresentazio mailaren aurkezpena egiten da (1.3.). Hurrengo azpiatalak, operadore-aldagai egituren saila zabaltzen dute erlatibagintzako operadore mugimendua aztertuaz. NZ-mugidaren eta erlatibagintzako mugidaren arteko paralelotasunak frantsesezko iraultze estilistikoaren (stylistic inversion) eta irlanderaren konplementatzaile jokoaren bitartez (McCloskey, 1979) erakusten dira. Kapituluaren hasieran Chomsky-ren « On Wh-movement » (1977) hizpidera ekartzen denez gero, beharbada ez zatekeen soberan izango bestelako opera-dore-aldagai egiturak iragaitzean bederen aipatzea, hala nola konparazio egiturak eta infiniti-bozko erlatiboak.

21 1.6. azpiatal luzeak mugimenduaren gaineko murriztapenak tratatzen ditu, ikerketa eremu honen bilakaera historikoaren ildoari segituaz. Honela, hurrenez hurren datoz Ross-en lehen muga kategoriak (1967), Chomskyren Azpikotasunaren Baldintza (1973), Kategoria Isilaren Hatsarrearen formulazioa ekarri zuten kanporaketa asimetriak (Chomsky, 1981 eta ondorengoak), Huang-en Ateraketa Eremuen Gaineko Baldintza (1982), Chomskyren saioa azpikotasun eta gobernu hertsidurak formulazio bakar baten

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bitartez esplikatzeko (Barriers-eko sistema, edo Artiagoitiak bataiatzen duen bezala Behaztopo sistema. 1986) eta azkenik Rizzi-ren Hurkotasun Erlatibatuaren Hatsarrea (1990). Etsenpluak ondo aukeratuak daude (irakaslearentzat biziki lagungarri izango dena), eta gaiak dituen konplexutasunak ez dira isil-bidez saihesten, batzutan soluziobideak eta hiztunen senaren nondik norakoak zabalik uzten direlarik. Egileak kapitulu hauxe aukeratu du egitasmo minimalista gaingiroki bada ere aurkezteko (1.6.5. azpiatala), azpian diren intuizioei areago begiratuaz, egungo eztabaidaren gorabeherei baino. Aurkezpen hau gehienbat Mugidarik Laburrenaren Baldintzara eta Kateen Uniformetasunaren Printzipiora mugatzen da (Chomsky, 1993, 1995). 22 Bostgarren atalaren bigarren zatiak foko egitura sintaktikoak ditu mintzagai. Egileak Altuberen arau deskriptibo ezagunaren funtsa auzitan jartzen du (hor Hidalgoren lana aipatu beharko litzateke, 1995). baina azkenean. eztabaidarako aukeratutako fenomeno multzoa hurbiletik segitzen dio delako Altuberen legeari (fokoaren aditz aurreko posizioa. aditzaren ondokotasun derrigorrezkoa). Egia da halere, Artiagoitiak NZ- mugidaren eta fokoaren arteko paralelotasunak bilatu nahi dituela espreski, eta NZ- mugidak ordenu hertsiagoa ezartzen duela perpauseko elementuen artean. Interegarria da hartara. Altuberen arauak perpaus bakunen baitan duela indarrik gutxien. Hiztun askorentzat aditzaren ondoko fokoa guziz zilegi da. aldaera estilistiko gisa bederen :

(15) Jonek eman dio MUSU HAUNDI BAT Mireni

23 Bizkitartean. fokoak perpaus arteko besarkadura baldin badu. hau da NZ-hitzak bezala. operadoreen gisan portatzen bada, orduan aditz aurreko posizioa eta aditzaren ondo- kotasuna derrigorrezkoak dira :

(16) a. *Jonek esan dio BIZIKLETA HAUNDI BAT Mireni erosi duela b. BIZIKLETA HAUNDI BAT esan dio Jonek Mireni erosi duela

24 Artiagoitiak aditza eta fokoaren arteko loturaren analisi sintaktiko desberdinak errepa- satzen ditu : Ortiz de Urbinaren saioa, ondokotasun erlazio hori Aditza Bigarren deituriko fenomeno tipologikora hurbiltzeko (2.1.2.). Lakaren Sigma kategoria, ezeztapena, baieztapen enfatikoa eta ezkerreratutako fokoa bilduko lituzkeena eta Denbora buruaren mugimendua behartzen duena, eta azkenik Laka eta Uriagereka (1987) eta Uriagerekaren hipotesia (1999), zeinen arabera ondokotasuna ez baita konfigurazio jakin batetik segitzen (espezifikatzaiie-buru konfigurazioa), baizik eta tartean deus ere egotea galerazten duen propietate morfosin-taktikoetarik (Fukui eta Speas-en proposamen bati jarraituaz (1986). Agian merezi zukeen hemen derrigorrezko ondokotasun hori auzitan jartzen duen zenbait gertakari agertzea. Esate baterako, ezaguna da ezeztapenaren ondoan fokoak eta aditz lexikoak ez dutela zertan elkarren ondoan egon behar, ez eta fokoak eta aditz laguntzaileak ere (Etxepare eta Ortiz de Urbina, 1999) :

(16) Ez dio JONEK Mireni lore sorta hori erosi. Aitorrek baizik.

25 Atal luze eta interesgarri hau topikalizazioaren eztabaida labur baina jakingarri batekin bukatzen da (3.).

26 Seigarren kapitulua, Uztardura Teoriari buruzkoa, izenordainen, anaforen eta errefe- rentzia adierazpideen distribuzio propietate nagusien lehen analisi batekin hasten da. O-ko-mando erlazioa berriz ere hartzen da, eta haren bitartez Uztardura Baldintzen lehen formulazio bat proposatzen. Handik abiatuta, egileak Chomsky (1981) etik

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Chomsky (1986) ra doan bidea aztertzen du, uztardura eremuen formulazio sofistikatuagoak behartu dituzten problemak ager-tuaz. 6.5. azpiatalak PRO teorema aurkezten du. Kapituluak Rebuschiren lan interesgarriaren (1988, 1989) sintesi bat dakar, elkar eta bata bestea anaforen uztardura eremu desberdinak batetik, eta bere/ haren izenordainki posesiboena bestetik, erakusten dituena. Atalak uztardura teoriak GB teoriaren baitako beste eremuetako fenomenoak esplikatzeko duen baliagarritasuna agertzen du (bereziki Larson-en osagarri biko aditzen barne egitura, euskarazko datibo-abso-lutibo konfigurazioak azaltzeko egokitzen dena (6.7). Azken azpiatalak uztardura baldintzen aplikazio maila eztabaidatzen du (6.8). 27 Zazpigarren kapitulua da, agian, irakurlearen aldetik arretarik handiena eskatzen duena. Aditzaren Mugida, Komunztadura eta Kasuaren Erkatzea izenburua duen atal honen azpiko giltza, aztergaiak eta proposamen desberdinak lotzen dituen haria, morfologia eta sintaxiaren arteko erlazioarena da. Zenbateraino morfologikoki konplexuak diren elementu morfosintaktikoak sintaxiaren arau hertsien bitartez esplikatzen ahal diren, edo zenbateraino jo behar dugun morfologia modulu beregaineko batera. Euskal sintaxiaren azken urteetako joera nagusia (eta orohar, GBtik minimalismora doan ikerbide osoarena) lotura aski zuzen baten aldeko hautua izan denez gero (Baker-en Ispiluaren Hatsarrea flexioaren dermiora eka-rriaz), atala ikusmira ezin hobea da hainbat eremu itxuraz bereiziren joko konplexua argitara ekarri nahi izan duten lanak eztabaidatzeko, batzutan zinezko tour de force sintaktikoak dire-nak. Atala Emonds-Pollock hipotesiaren (eta hura justifikatzen duten datuen) deskripzioarekin hasten da. Pollock-en hipotesiak Inflexio Sintagmaren barnean biltzen diren tasunen bereiz-keta proposatzen du, halako moldez non denbora, aspektu edo komunztadura tasunek bakoi— tzak beren proiekzio sintaktiko propioa islatzen duten. Pollock-en hipotesia aintzat hartu eta gero, haren ondorio zenbait tratatzen dira : batetik Chomsky 1991 ren perpaus egitura hedatua, Subjektu Komunztadura Buruaren alde egiten duena, eta bestetik Ouhallaren (1991) Ispiluaren Hatsarrearen interpretazio hertsia, zeinen arabera hizkuntzatik hizkuntzara adizki jokatuetan aurkitzen diren afixuen posizio desberdinak perpaus egitura mailako erlazio hierarkikoen islada diren. Lehen azpiatala Chomsky (1993) ko morfologia eta sintaxiaren arteko erlazioa-ren ikuspegiarekin bukatzen da. Ikuspegi honetan, morfologia eta sintaxiaren arteko erlazioa ez da hain zuzena, flexio-hizkiak ez baitira zuzenean deribazio sintaktikoan batzen. Aitzitik, adizki jokatuak osorik heldu dira lexikotik, eta beren tasunak perpaus egiturako buru egokie-kin erkatu behar dira. Bi ikuspegi hauek euskal adizki jokatuen eta perpaus egituraren azter-bideetan beren isla izan dute : lehenaren baitan para liteke esate baterako Lakaren lan garrantzitsua (1993a) adizki jokatuen barne eraketari buruzkoa (7.2.3), eta bigarrenean Fernandezen komunztaduraren gauzatze sintaktikoari buruzkoa (1997). Perpaus egituraren nondik norakoarekin loturik dago baita ere argumentuen oinarrizko ordenaren auzia. Atalak sintesi eztabaida interesgarria dakar (Ortiz de Urbina 1994, Fernandez 1997. Albizu 1997. eta Ormazabal eta Romero 2000 lanetatik) datibo komunztaduraren eta datibozko argumentuen posizio sintaktikoaren inguruan (7.4.2.). Euskararen Kasu sistema ergatiboak ere merezi duen arreta jasotzen du, Chomsky (1993) eta Bobaljiken (1993) ergatibitate morfologikoaren inter-pretazioa azaltzen da, eta euskararen kasu sistema ergatiborako Lakaren egokitzapena (1993b) aztertzen da, besteak beste.

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28 Eduki teorikoaz aparte, liburuak bibliografia zabal bat eskeintzen du, bi zatitan emana. Lehen zatian, ikuspegi orokor batetik idatzitako artikuluak eta liburuak biltzen dira : bigarre-nean, euskarari zuzenkiago lotuak diren lanak. 29 Liburuaren balorazio gisa, esan behar dut liburua ez dela bakarrik lagungarri diren horietakoa, baizik eta, areago, luzaroan lagun izango duguna. Artiagoitiaren lana guziz aipa-garria da, eta halaxe izango zatekeen gurea bezalako eskasiarik ezagutzen ez duten beste aldee-tan ere. Horrekin batera, aitortu behar dut tarteka badudala liburuak bere baitan gehiegi hartzen ote duen susmoa. Eskola baten kontestuan zilegi bezain ohiko diren zehar aipamenak (analisi baten luzapen edo aldaera posibleak, honako edo bestelako analisiak suposatzen duen harako erreferentzia) batzutan liburuan testu estatusa hartu ote duten nago. Horrelakoetan, egilea arti-kulu edo sistema baten mamia laburtu beharrez aritzen dela iruditzen zait, zer hori inoiz ilun xamar egiteraino laburbiltzen duelarik. Tankera hori hartzen diet nik esate baterako, bostgarren kapituluan, Rudin-en NZ anitzen mugimenduaren tipologiaren azalpenari (214. orr), subjektu vs. osagarria asimetria- ri dagokion sekzioa, that/aztarna efektuaz ari delarik (231. orr), Lasnik eta Saitoren sistemaren deskripzioari (233. orr) edo Chomskyren Barriers sistemako adjunkzio aukeren eztabaidari (May-ren lana aipatzen delarik). Erreferentzia horiek egon behar dutenik ez dut ukatuko (lanean sakontzeko nondik nora jo behar den argitzeko beha-rrezkoak dira), baina testuaren harian emanda berez trinko xamarra den testua moteldu egiten dute. 30 Bistan da liburu batek (honek edo bestek) ezin duela dena bere baitan hartu. Bada, hala ere, Artiagoitiaren liburuan gutxienez nabarmena den hutsune bat : Kuantifikazioa ez da ezertarako agertzen, Logika Formaren sintaxian rol garrantzitsua izan badu eta badauka ere. Hemen jakina, errua ez da autorearena : liburua euskal sintaxiaren azken urteotako lanaren sintesia den aldetik, etxeko sintaxiak hartu duen bide meharregiaren berri ematen digu. 31 Artiagoitiaren lanak dituen alde laudagarrien artean, ezin dugu ahaztu gramatika sortzailearen terminologia (maiz aski bihurria) euskaraz emateko ahalegin berezia, hainbat irakasle borroka etsigarri batetik aterako dituena. Hemen, bataio kontu guzietan bezala, nork gehiago nork gutxiago maiteko ditu, baina ezin aipatu gabe utzi esate baterako, rol themati-koen izendatze egokia (106-107. orr), Chomskyren blocking category-ren ordaina den behaz-topo kategoria, harako structure preservation-ena den egiturari eutsi hatsarrea, edo superiority terminoari egokitu zaion goragotasuna, besteak beste. 32 Liburu hau dudarik gabe berri ona da euskararen inguruan lanean ari diren hizkun- tzalari guztientzako, eta euskal sintaxiak. bere apalean. lortu duen sofistikazio mailaren erakusgarri bikaina da. Lanerako gonbita baizik ez dena, bestalde.

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INDEX

Index chronologique : 20e siècle Thèmes : linguistique Mots-clés : Artiagoitia Beaskoetxea Xabier (1965-), basque (langue), Chomsky Noam (1928-), critique littéraire, syntaxe

AUTEUR

RICARDO ETXEPARE

(CNRS, IKER, UMR 5478) [email protected]

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Compte rendu de lecture : Félix Arnaudin. Dictionnaire de la Grande- Lande, I, Œuvres complètes, VI. Edition établie par Jacques Boisgontier, présentée par Joël Miro, Parc Naturel Régional des Landes de Gascogne & Editions Confluences, 2001, XLIII + 524 p.

Charles Videgain

1 Il faut saluer l'initiative des intellectuels attachés au gascon qui ont su mener à publication ce remarquable outil de travail que constitue le premier tome du dictionnaire du grand ethnographe et lexicographe Félix Arnaudin. Nous saluons – sinon jalousons-le soutien institutionnel du Parc Naturel Régional des Landes de Gascogne, celui du CNRS, du Conseil Régional d'Aquitaine, du Conseil Général des Landes et de la Communauté Européenne qui ont permis d'éviter à ce dictionnaire le sort de trop de ses semblables : de vieux tiroirs et la poussière des archives. D'une manière ou d'une autre, outre J. Boisgontier (tôt disparu) et Joël Miro, ont travaillé à ce projet des intellectuels qui comptent : Pierre Bec, le regretté Jacques Allières, Jean- Pierre Chambon, François Pic et notre confrère Guy Latry, ce dernier ayant justement consacré sa thèse à F. Arnaudin.

2 F. Arnaudin n'a aucune visée pan-gasconne, encore moins pan-occitane quand il réalise l'ingrate tâche de relever le matériau pour son dictionnaire. C'est tout l'intérêt de sa démarche que d'avoir sélectionné des termes parfaitement localisés sans recours à des termes non endémiques ou provenant de source livresque. Les matériaux sont d'une grande richesse tant l'auteur est intéressé autant par les choses que par les mots puisque l'aspect encyclopédique est souvent sollicité. Le regretté J. Boisgontier a repris les 20 000 fiches pour les ordonner et leur donner une homogénéité permettant la publication, en particulier en améliorant cette articulation entre entrées gasconnes portant leur équivalent français et la riche information ethnolinguistique répartie sur d'autres fiches. Les éditeurs mettent justement l'accent sur cette richesse intensive et la relative limitation du nombre de fiches : Arnaudin n'a aucun souci de performance quantitative et ne cherche pas à dérouler un nombre record d'entrées gasconnes.

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3 Arnaudin a commencé sa quête en 1864 alors qu'il n'a encore qu'une vingtaine d'années, en termes sans doute de sauvetage au départ. La contradiction ne l'épargne pas : en même temps qu'il fait part de sa tendresse pour son « patois » il insiste sur ses limitations, sa dégradation, son incapacité à traiter de tout sujet, sans oublier de vilipender le traitement que lui réservent certains intellectuels non indigènes « faiseurs de patois ». Il délimite précisément son terrain d'enquête : la Grande-Lande et rien que la Grande-Lande. Marensin, Gosse, Marsan, à plus forte raison Chalosse sont exclus. Il reproche à Mistral d'avoir opéré une rectification des termes endémiques et de « provençaliser le landais ». Et si Arnaudin lui-même note des termes utilisés relevés en Grande-Lande mais repérés comme venant d'ailleurs, il les classe soigneusement à part. Arnaudin souligne aussi de façon plutôt moderne la nécessité de l'enquêteur de s'insérer dans le milieu qu'il étudie, auprès des locuteurs qu'il appelle « fournisseurs » et dont les conditions d'authenticité sont soigneusement surveillées. La place de l'écrit y est réduite, l'oral assurant l'essentiel des données. 4 La méthode suivie par Arnaudin offre l'avantage de donner, quand c'est utile, un mot en contexte avec une citation non forgée. Dans cette intention, il reproduit des phrases « prises sur la bouche du peuple » auprès de locuteurs dont il a établi un embryon de fichier : des noms comme Jantillot, Dupuch, Bombaut de Gaillard, attestent de son goût de la précision qui rappelle les fichiers des atlas linguistiques nés bien plus tard. Le crime parfait lui est interdit, tout terme relevé devait pouvoir être contrôlé auprès du locuteur qui l'avait donné (j'appelle crime parfait la méthode qui consiste à donner un objet linguistique comme ayant été collecté par l'auteur, sans aucune indication sur l'origine et les conditions d'obtention de cet objet). L'âge des locuteurs est sollicité pour signaler une évolution qui se produit durant sa vie, tel le mot gouhit entendu à un témoin à Labouheyre quand Arnaudin avait 12 ans, alors que durant son âge mûr c'est le terme goufit qui triomphe, déjà concurrencé par counfit. Où l'on voit qu'Arnaudin est complètement pénétré de son sujet et donne des exemples intéressants des interférences entre diachronie et synchronie. On ne lui reprochera donc pas de tenter de rechercher la forme la plus ancienne, mout avant mot, hèste et non nosse, et il hésite d'ailleurs dans sa sagesse à prôner le retour systématique à l'emploi de la forme la plus ancienne. 5 Arnaudin vit douloureusement le mépris manifesté envers le gascon par certains de ses concitoyens, plus douloureusement encore l'influence incontrôlée du français sur le gascon. Des phrases emblématiques ou des anecdotes plus ou moins comiques - qu'il faudrait comparer à celles relatives au basque à même période - cristallisent cette « décomposition ». Il pousse même ce refus du mélange linguistique jusqu'à tancer les notables locaux parce qu'ils parlent un français trop teint de gascon ! 6 Venons-en aux entrées du dictionnaire lui-même et à quelques-unes des caractéristiques qui éveillent l'intérêt. 7 On notera le soin à donner témoignage de la polysémie : ainsi aneyt peut signifier ici ‘ce soir, cette nuit’ mais là ‘aujourd'hui’ et le lecteur bascophone établira le parallélisme avec le basque gaur qui signifie ‘aujourd'hui’, en gros outre-Bidassoa et ‘ce soir’ en deçà. 8 L'ethnographie n'est pas absente : à l'entrée abelhe, le dictionnaire rappelle le statut privilégié de ces bêtes dans la communauté traditionnelle, manifesté par l'emploi de moren et non de crében pour ‘elles meurent’. On songe au tabou en basque avec le mot kalitu par exemple réservé aux animaux considérés comme néfastes. A abroque « ensemble des pièces qui constituent le système d'attache des canards appelants », un

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article encyclopédique indique le fonctionnement de l'objet et réunit les termes proches sémantiquement, ici capboure (boule de bois). Adichats est signalé comme formule de salutation pour aborder ou quitter plusieurs personnes ou une seule personne vouvoyée tandis que adiu est réservé à une personne tutoyée, d'où l'on comprend la réticence de certains Basques soucieux de courtoisie à utiliser en basque l'emprunt adio à tort et à travers. Les appellations ethniques ne sont pas rares qui rappellent les epistolak de Soule ou les blasons de façon plus générale : lous abelherayres désignent les habitants de Lue et de Trensacq, les ajartayres (‘insulteurs’) ceux de Sore, les ajiuayre (‘apparieurs de jeunes bœufs au joug’) ceux de Mios, les alhayres (‘marchands d'ail’) ceux de Noaillan, anguilaryres (‘pêcheurs d'anguilles’) ceux de Gastes, assembladayres (‘coureurs d'assemblée, de fête’) ceux de Moustey, audiençayres (‘qui fréquentent les prétoires’) ceux de Biganon, Muret et Sanguinet, autcherayres (‘oiseleurs’) ceux de Parentis, pour nous en tenir à la lettre A. On est peu surpris de nombreuses observations sur danses, chants, rites, gastronomie et pratiques. 9 La phraséologie a sa place, dont la métaphore par exemple l'expression bachére de Chalosse « exclamation à l'endroit de gens qui ne valent pas grand-chose, comme la poterie grossière de Chalosse » qui a le sens de « qui se ressemble s'assemble ». Ou bien que't ba baga ‘spia lou trauc dou charpentié ‘tu vas avoir l'occasion de regarder le trou du charpentier’, expression qui serait parfaitement opaque si Arnaudin ne la rendait transparente en ajoutant tout d'abord que le sens pragmatique est « pour avertir quelqu'un qu'on va le mettre dehors » et ensuite en précisant que le trauc dou charpentié n'est rien d'autre que la ‘porte’. On sera attentif aussi à la formule S'i'a barat qu‘i’ a craste « s'il y a digue il y a fossé’ ». Arnaudin explique longuement ce proverbe, quasi un axiome de droit, relatif à la détermination du droit de propriété à la limite entre deux biens fonciers. Le glissement de sens que révèle Arnaudin rappelle la difficulté en basque pour enquêter autour des mêmes signifiés comme pezoin et pezoi-arrolla, ou arla et même muna et muga. Le savoir encyclopédique précis d'Arnaudin, en recourant y compris à la microtoponymie, offre un éclairage sur le proverbe et les lexies qu'il comporte, dont il offre des géosynonymes. Plus loin Estupa lous barredeys « boire de l'eau le lendemain d'une cuvée afin de dissiper l'échauffement causé par la boisson » est expliqué par le sens de barredey qui est un « traversier de bois » qui sert à fermer le four et qui « s'il s'enflamme doit être éteint en y jetant de l'eau ». La chasse fournit la métaphore si balha l'ale « ralentir les mouvements des ailes. Se dit des palombes qui commencent à planer pour se poser », le sens métaphorique étant « en parlant d'une femme, répondre aux avances qu'un homme lui fait », expression elle aussi qui serait opaque sans le sens concret de base assigné à la palombe, à ajouter au vocabulaire de la chasse et de la séduction. Arregagna « montrer les dents » au sens propre en parlant d'un chien par exemple est illustré par cette phrase : les mountagnes qu'arregagnen, séy pas, qu'éy pou de pluye « les sommets des montagnes montrent les dents, je crains que nous n'ayons la pluie », la citation ayant aussi valeur d'information météorologique sous forme presque gnomique. 10 L'iconographie, grâce à 98 illustrations, permet de découvrir des référents peu connus du lecteur d'aujourd'hui tels que les pièges ; on y retrouve parfois le coup de main de J. Allières déjà présent dans l'ALG. Il semble cependant que l'illustration qui accompagne le mot esplangoun (on appelle ce piège xedera en basque oriental, j'en ignore le signifiant en français mais il rappelle la chasse aux tenderies des Ardennes) montre un objet qui

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n'est pas complet de ses nœuds coulants mais c'est là peccadille que tout braconnier corrigera aisément. 11 Nous n'avons fait que picorer dans ce beau dictionnaire élégamment édité. On le voit, cette publication est le témoignage d'une réflexion scientifiquement respectable et humainement émouvante faite de l'intérieur du lexique et de l'intérieur d'une communauté. Elle permet de mieux connaître le monde de la Grande-Lande. Que tous ceux qui ont apporté leur contribution à faire connaître la moisson d'Arnaudin en soient remerciés.

INDEX

Thèmes : linguistique, littérature Mots-clés : Arnaudin Félix (1844-1921), critique littéraire, gascon (langue) Index géographique : Grande-Lande

AUTEUR

CHARLES VIDEGAIN

(CNRS, IKER, UMR 5478) [email protected]

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