Collection Eduardo Arroyo De La Boxe, Etc
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Collection Eduardo Arroyo De la boxe, Etc. Jeudi 22 OCTOBRe 2015 PIASA Collection Eduardo Arroyo De la boxe, Etc. Vente : jeudi 22 octobre 2015 à 15h PIASA 118, rue du Faubourg Saint-Honoré 75 008 Paris Exposition publique Lundi 19 octobre 2015 de 10 à 19 heures Mardi 20 octobre 2015 de 10 à 19 heures Mercredi 21 octobre 2015 de 10 à 19 heures Jeudi 22 octobre 2015 de 10 à 12 heures Téléphone pendant l’exposition et la vente +33 1 53 34 10 10 PIASA 118, rue du Faubourg Saint-Honoré 75 008 Paris Enchérissez en direct sur www.piasa.fr COLLECTION EDUARDO ARROYO - DE LA BOXE, ETC De la boxe, etc. Collection Eduardo Arroyo Ouvrir ce catalogue (De la boxe, etc.), c’est embarquer sur le manège chatoyant et complexe d’Eduardo Arroyo. Ce manège tourne autour de trois figures essentielles, l’Ecrivain, le Peintre et le Boxeur. Le maître du manège est le dieu du Temps. Arroyo a le privilège enviable, que je lui envie, d’être écrivain et peintre. Ce porte-flambeau d’une Europe des esprits, l’un des héritiers du prince de Ligne, a découvert la boxe encore enfant. Le fiancé de la femme de chambre de ses parents avait l’habitude de l’emmener à la salle d’entrainement des frères Moreno ou aux arènes de las Ventas à Madrid (il lui arrivait aussi d’aller au Campo del Gas, un terrain de foot sur lequel on installait un ring). La romancière américaine Joyce Carol Oates a découvert la boxe au même âge. Son père l’avait invitée à un tournoi des Golden Gloves à Buffalo dans l’Etat de New York. « Je lui ai demandé, écrit-elle, pourquoi ces garçons voulaient se battre les uns contre les autres, pourquoi ils voulaient avoir mal ». Son père lui avait répondu : « Les boxeurs ne ressentent pas vraiment la douleur comme nous ». « La douleur, note Joyce Carol Oates, dans le contexte adéquat, est autre chose que la douleur ». L’etc. d’Arroyo, c’est précisément cet autre chose que la douleur. Nous nous sommes rencontrés de façon étrange. Un coup de fil posa la première pierre d’une « amitié arrangée ». Un soir de décembre 2014, il faisait froid dans la grange de ma maison en Champagne, là où je m’entraine depuis dix ans, et j’avais mis un bonnet de laine sur ma tête. Mon portable avait sonné alors que le coach me faisait travailler au sac un nouvel enchainement, à la nuit tombée. « -Direct du gauche, uppercut gauche, crochet gauche, crochet droit, allez ! Boxe ! ». Mon direct partait bien, d’assez haut, j’arrivais à le lâcher (ce qui n’est pas aussi naturel qu’on l’imagine), l’impact faisait sur le sac un bruit net, très agréable, et surtout j’arrivais à le ramener aussi vite qu’il était parti, en même temps, je me laissais tomber sur ma jambe gauche, je prenais mon appui, remontais le genou, la hanche pivotait légèrement, et l’uppercut partait tout seul, les deux crochets suivaient, gauche, droite, je n’avais qu’à les appuyer. « - Tu vois, me disait le coach, c’est ton bras avant qui donne le tempo. » Cela changeait de ce qu’il m’avait répété la semaine précédente : « - C’est pas mal, mais je ne vois pas le bras avant ». Eduardo Arroyo © Marino Ciguenza Arroyo Eduardo Au bout de dix ans, je pouvais croire que je continuais à progresser. COLLECTION EDUARDO ARROYO - DE LA BOXE, ETC J’avais décroché, car un numéro étranger s’affichait sur l’écran de mon I phone. Deux amis m’appelaient de Madrid pour me proposer de rencontrer le peintre Eduardo Arroyo, il était question de boxe. « - Il t’attend, viens le plus tôt possible. ». Avec Eduardo Arroyo, ce fut donc une amitié arrangée (comme on parle d’un mariage arrangé). Il parait que certains mariages arrangés fonctionnent très bien. Le mariage du duc de Saint-Simon avec Marie-Gabrielle de Durfort de Lorges, le 8 avril 1695, n’avait rien d’un mariage d’amour, et pourtant leur union fut heureuse au point que le Duc refusa que la mort le sépare de sa femme. Il exigea que leurs cercueils soient scellés dans leur sépulture commune, par «anneaux, crochets et liens de fer qui attachent nos deux cercueils si étroitement ensemble et si bien rivés qu’il soit impossible de les séparer l’un de l’autre sans les briser tous deux », écrit-il dans son testament. (Les deux cercueils furent séparés et violés à la révolution). Quelques semaines, plus tard, j’arrivais à Madrid pour faire la connaissance de cet ami nouveau qui m’attendait rue Costanilla de los Angeles, dans le vieux quartier de la Maison d’Autriche. Etrangement, nous avons commencé à parler comme si nous nous connaissions depuis très longtemps, à tel point que les témoins de cette scène en furent troublés pendant quelques instants. Nous avions suivi des chemins parallèles, nous nous étions frôlés, à diverses reprises, compagnons d’une époque qui était notre ring plus que notre terrain de jeu, sans jamais nous rencontrer. Ma surprise fut de constater que l’appartement-atelier d’Arroyo logeait un extraordinaire musée de la boxe. Plusieurs milliers de livres, en toutes langues, impeccablement rangés, des photos rarissimes (combat d’Al Brown), des affiches (Ray Sugar Robinson contre Armand Vanucci, Palais des Sports de Paris, décembre 1963, à 20h50), et aussi des aquarelles, des croquis, des lithos. Je lui avais demandé s’il n’avait jamais été tenté de pratiquer la boxe. « -Non, m’avait-il répondu, à cause de mes bras trop courts. Je n’aurais pas eu d’allonge… ». Eduardo Arroyo © Marino Ciguenza Arroyo Eduardo Pendant qu’il me montrait ses plus belles pièces, (je les trouvais toutes passionnantes car c’était lui, Eduardo Arroyo, en les regardant, en les choisissant, en les rassemblant, qui avait fixé le cours de leur beauté ou de leur intérêt). J’avais expliqué à Arroyo que je pratiquais un peu la boxe avec un coach merveilleux nommé Jérôme Vilmain qui animait un Boxing club à Epernay. Je lui avais fait une description rapide des boxeurs de Jérôme et notamment d’Amira Hamzaoui, championne du monde des poids mouche, puis nous étions partis déjeuner dans un restaurant proche. « -Attention, c’est le plus laid de la ville, avait dit Eduardo Arroyo, il a reçu le Prix de la laideur, mais on ne trouve pas de meilleure viande dans tout Madrid ». Le restaurant avait tenu la promesse du peintre. Le chef nous avait régalés avec des platées de boudin et d’un chorizo tiède et fondant, avant de nous servir un agneau succulent dans sa croquante de peau grillée. Le soir, j’avais assisté au vernissage de l’exposition Arroyo et Balzac. Arroyo s’inscrit dans la tradition des peintres qui ont fait le portrait de Balzac, -Rodin, Picasso, Giacometti-, mais il nous invite aussi à entrer dans la folie Balzac. Folie de talents et d’aptitudes, d’ambitions, folie d’écriture et d’imagination. Folie d’une œuvre-monde et d’une « société peinte en action », d’un écrivain-derviche dévoré par ses personnages, « intoxiqué par eux », disait Malraux. Le lundi suivant, j’avais raconté au coach ces retrouvailles inattendues entre deux amis qui ne se connaissaient pas et la découverte de ce temple secret de la boxe. Eduardo Arroyo dévoile aujourd’hui quelques-uns de ses secrets. Chacun d’entre nous peut maintenant tenir sous son regard ces pièces qui toutes parlent de ce théâtre tragique de l’histoire que les hommes écrivent avec leurs poings depuis les pugilistes d’Homère. Affiches, photographies, tickets d’entrée, autographes, sculptures, dessins originaux, gravures, toiles, lithographies. Les statues du temple se nomment Marcel Cerdan (magnifique huile sur toile), Jean-Claude Bouttier, Ray Sugar Robinson, Mohamed Ali, Marcel Thil, etc.. Eduardo Arroyo © Marino Ciguenza Arroyo Eduardo COLLECTION EDUARDO ARROYO - DE LA BOXE, ETC Dans cette constellation de légendes, Eduardo Arroyo fait un sort particulier à Arthur Cravan et à Panama Al Brown. Cravan, poète et boxeur, mesurait près de deux mètres. Il apparait dans le ciel de Paris à la fin des années 1900, venant de Berlin, où il avait dépensé une part de son énergie à déplaire. Il se promenait sur le Ku-Damm avec des prostituées sur l’épaule, suivi par un nuage d’éphèbes. Le colosse désinvolte, papa de tous les fils à Dada, devenu champion de France de boxe (catégorie mi-lourd, en 1910), traite André Gide à la légère, assez drôlement, puis crée une revue de poésie, Maintenant, dont il est le seul rédacteur. Se souvenant de son grand-père qui vendait des bagues à poil d’éléphants et des oiseaux en cage sur les grands boulevards, il propose les numéros de sa revue au public dans une voiture à bras à la sortie des hippodromes. Il y publie des poèmes sans mélancolie qui chantent la beauté mobile des machines. Il est l’auteur de cette phrase : « Le génie n’est qu’une manifestation extravagante du corps. » Panama Al Brown, né au Panama en 1902, mort à New York en 1951, la merveille noire, comme l’appelaient les journalistes, était un véritable génie de la boxe. Eduardo Arroyo (qui parle de son « obsession » pour Al Brown) a écrit un très beau livre sur ce poids coq, devenu champion du monde et l’une des coqueluches du Paris de Coco Chanel et de Jean Cocteau. Arroyo raconte que Melle Chanel, avait fait aménager l’une de ses fermes en camp d’entrainement (à Aubigny) et qu’elle avait déclaré qu’Al Brown était l’une des rares personnes de valeur dans l’entourage de Cocteau.