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Jacques Perrin

Jacques Perrin

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Séquences La revue de cinéma

En gros plan Jacques Perrin

Le cinéma canadien II Number 51, December 1967

URI: https://id.erudit.org/iderudit/51686ac

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Publisher(s) La revue Séquences Inc.

ISSN 0037-2412 (print) 1923-5100 (digital)

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Cite this document (1967). En gros plan : Jacques Perrin. Séquences, (51), 51–55.

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Jacques Perrin (de son vrai nom Jacques Simonet) est né a Paris, le 13 juillet 1941. Enfant de la balle, il débute au théâtre à 14 ans en jouant dans Dans la gueule du loup. En 1957, on l'aperçoit pour la première fois à l'écran dan» le film, La Peau de l'ours. Au dernier festival de Cannes, nous l'avons vu dans Horizon de Jacques Rouffio. A cette occasion, nous avons eu avec lui un agréable entretien dont voici la substance. L.B.

L.B. — Af. Jacques Perrin, vous a- J.P. — Ce sont deux choses pas­ vez commencé votre carrière d'ac­ sionnantes. Si jetais professionnel, teur au théâtre avant de passer au je me contenterais de faire de l'ar­ cinéma. gent au cinéma. Heureusement, je J.P. — En effet, j'ai fait le Conser­ fais des choses dont je me sens res­ vatoire puis je suis passé naturelle­ ponsable. ment au théâtre. Très vite, j'ai été L.B. — Vous avez tourné avec plu­ noyé dans le courant du cinéma. Ce sieurs réalisateurs. Est-ce indiscret n'est pas que je voukis quitter le de vous demander lequel vous a le théâtre mais les circonstances m'ont plus marqué ? fait aller vers le cinéma. Aujour­ J.P. — Ce qui m'a le plus apporté, d'hui, c'est trop tard. c'est peut-être le cinéma qui est en L.B. — Regrettez-vous le théâtre ? train de changer. Enfin on deman-

DÉCEMBRE 1967 51 de aux acteurs d'être plus responsa­ lui conditionné par l'histoire qu'il vi­ bles de ce qu'ils sont. Ils ne doi­ vait. N'est-ce pas formidable ? Cela vent pas être simplement des ob­ permet à l'acteur d'aller plus loin jets, des interprètes qui s'incorpo- dans son interprétation. D'un seul rent à une situation donnée. Il faut coup, il se sent concerné par son qu'ils soient des éléments vivants. interprétation. Le tournage a duré La première expérience de cette na­ sep>t mois. ture, je l'ai faite avec Vittorio de L.B. — Vous avouer ai-je que je Seta dans le film Un Uomo a meta vous ai trouvé supérieur quand vous (Un Homme à moitié). étiez dirigé par des réalisateurs LB. — De quoi s'agit-il? comme Zurlini, de Seta. Alors je J.P. — Le scénario était entièrement me suis demandé si, dans certains construit. Il s'agit d'un homme de films, on vous dirigeait mal ou vingt-sept ans qui fait une dépres­ si on vous laissait faire n'importe sion nerveuse. A cette occasion, il quoi. s'approfondit et il fait le procès de J.P. — Je ne sais pas. Cependant sa vie. U cherche à savoir si les évé­ j'ai commencé à faire des films ac­ nements qu'il a vécus en '45, il ceptables avec Zurlini. Parce qu'il les assumait pleinement. Un beau me considérait non seulement com­ jour, il se retrouve écrivain sans me un acteur mais surtout comme trop savoir pourquoi. A mesure une personne. Il m'incrustait le per­ qu'il s'analyse, il s'éloigne de la sonnage et le scénario. Et finale­ réalité et sa dépression augmente. ment j'étais l'élément responsable Vous le constatez, c'est un sujet du film. J'ai mis quelque temps à très difficile et très psychologique. m'en rendre compte. J'ai commen­ On ne pouvait pas s'attacher à des cé à être beaucoup plus indépendant situations trop précises. Il falkit et à avoir moins recours au direc­ les bousculer un peu et même les teur d'acteurs à partir de La 317e provoquer parfois. A ces moments- Section. k, il faut faire confiance aux ac- L.B. — A quelle date ? teuts. Les acteurs deviennent né­ J.P. — C'était deux ans après Jour­ cessairement les personnages. En nal intime. De toute façon, si j'ai conséquence, si je trouvais un sen­ pu faire ce que j'ai fait avec De timent nouveau, si j'alkis plus loin Seta, c'est parce que je suis passé dans une scène donnée, de Seta me par l'école de Zurlini, c'est-à-dire poursuivait. En fait, j'étais k réa­ par l'identification au personnage. lité et de Seta faisait un documen­ L.B. — Dans La Corruption, je vous taire sur moi. Et moi je devenais trouvais franchement mauvais. deux personnages. Moi-même et ce­ J.P. — Vous avez entièrement rai-

52 SÉQUENCES 51 son. Je dois dire que dans ce film J.P. — Je ne sais trop. Ça impres­ l'auteur avait adapté le personnage sionne toujours de débuter avec un à mon physique. Je ne savais pas acteur qui a un certain renom. Au­ très bien ce que je devais faire. Il jourd'hui, je m'intéresse profondé­ me semblait que je n'avais seule­ ment à ce que je fais. L'acteur n'est ment qu'à me promener. En fait, plus en face de moi comme une j'ai prêté ma physionomie au per­ notoriété artistique. Il est un per­ sonnage croyant que tout se passe­ sonnage avec lequel j'ai des rap­ rait très bien. En fait, je me suis ports dictés par le scénario. Tant cassé k figure. mieux si je m'affronte avec un LB. — // faut avouer que le film grand acteur : le combat n'en sera était commercial mais pas très bon. que plus fort. Quand j'ai tourné avec Mastroianni, j'ai constaté qu'un J.P. — Intelligemment commercial. homme comme lui élimine, éclipse C'est la forme k plus hypocrite. complètement sa personnalité pu­ L.B. — Vous avez joué avec de blique pour se couler dans un per­ grands acteurs comme Claudia Car­ sonnage. C'est formidable. Pendant dinale, . Vous Journal intime, j'avais vraiment sentiez-vous écrasé par ces acteurs l'impression d'avoir un grand frè­ ou vous trouviez-vous à l'aise avec re. Mastroianni est un acteur extra­ eux? ordinaire.

L'Écume des jours, de Charles Belmont

1 /?

i^« L.B. — Comment travaillez-vous ? sé, bien composé. Ce qui est for­ J.P. — Aujourd'hui, je me mets pe­ midable, c'est k possibilité qu'a un tit à petit dans ce que je fais. Je acteur d'être placé dans différents crois maintenant maîtriser plus ou états que la vie autour de lui ne moins ce que je fais. Il faut dire lui permet pas de ressentir. Quand que j'ai besoin d'une longue pré­ on a du caractère et de bons scéna­ paration. Au contraire, Mastroian­ rios, on vit dans le climat du sujet ni, c'est merveilleux ! Plus il est traité. A travers les personnages, à distrait, plus il est hors de la situa­ travers les films, je découvre mille tion, mieux il se penche au dernier choses... moment à l'intérieur de son per­ L.B. — Remplir un rôle, vous de- sonnage. C'est subit. Mastroianni, mande-t-il une longue prépara­ c'est un acteur à fleur de peau. tion ? L.B. — Est-ce du métier ? J.P. — Pour moi, oui. Je ne suis J.P. — C'est plus que du métier pas un comédien instantané. Je ne parce que c'est vrai. Dans le mé­ suis pas un comédien doué. Ma tier, on voit le "truc". Chez lui, tout préparation est laborieuse, difficile. est naturel et spontané. A n'impor­ Mon travail est réfléchi. Mais plus te quel moment, il est disponible. va le cinéma, plus il a besoin d'ac­ C'est très beau. teurs qui incarnent vraiment les L.B. — De tous les rôles que vous personnages. Ils n'y arriveront pas avez remplis, lequel préférez-vous ? s'ils ne pensent pas suffisamment et J.P. — Je préfère les rôles qui s'ils manquent de préparation. L'é­ m'apportent des enrichissements cole de Stanislowsky est néfaste au personnels. Par exemple, lorsque théâtre mais est peut-être profita­ j'ai fait La 317e section, le sujet ble au cinéma. Remarquez. Quand était brûlant en France. C'était la on tournait Voleur de bicyclette, guerre d'Indochine. Quand on est au temps du néo-réalisme, les inter­ mêlé à un sujet aussi fort dans un prètes avaient une autre vérité. Il cadre réaliste qui rappelle les hos­ faut arriver jusque là : être aussi tilités, on ne peut rester indifférent. fort que les amateurs. En fait, c'est C'est pourquoi ce film m'a apporté ça être professionnel. certaines choses. Il faut dire que le L.B. — Vous travaillez beaucoup ? film a été tourné sur les lieux, aux J.P. — Enormément. Quand je fais frontières du Viet-Nam et du Laos. un film, j'essaie de m'isoler com­ C'est plus passionnant que d'aller plètement dans le cadre du sujet. tourner dans un studio. Là on ne L.B. — Vous avez été assez délaissé fait que son petit travail bien pen­ par la France.

54 SÉQUENCES 51 J.P. — Ce n'est pas très grave. De­ change. Le "vedettariat", c'est un puis trois ans, je fais des films qui peu fini. Quels sont les grands ac- me pkisent. L'année prochaine, je teuts en France ? Il y a Gabin, veux devenir réalisateur. J'ai prépa­ Bardot, mais ils n'attirent plus le ré un film ; j'ai monté une maison public. Aujourd'hui on demande au de production. Ce n'est pas que je film d'être homogène. me construise une petite vie bour­ L.B. — Et vos projets ? geoise mais j'arrive à faire douce­ J.P. — Après L'Ecume des jours ment les choses que je voukis faire. de Charles Belmont, d'après un ro­ Je ne peux demander mieux. man de Boris Vian, je vais faire un film policier avec Serge Korber. Puis L.B. — Les conditions de travail l'an prochain, avec Zurlini, j'incar­ s ont-elles intéressantes ? nerai Arthur Rimbaud après sa sé­ J.P. — Absolument. Travailler a- paration d'avec Verlaine, au mo­ vec de Seta, Zurlini, c'est toujours ment de son départ pour l'Afrique. agréable. De toute façon le cinéma Il avait vingt ans.

FILMOGRAPHIE 1957 — La Peau de l'ours de Claude Boissol 1959 — La verte Moisson, de François Villiers 1960 — Les Nymphettes, d'Henri Zaphiratos La Vérité, de Georges-Henri Clouzot La Ragazza con la Valigia (La Fille à la valise), de 1961 — Les Croulants se portant bien, de Jean Boyer Le Soleil dans l'oeil, de Jacques Bourdon 1962 — Et Satan conduit le bal, de Grisha Dabat Cronaca Familiare (Journal intime), de Valerio Zurlini Il Fornaretto de Venezia (Le Procès des Doges), de Duccio Tessari 1963 — La Corruzione (La Corruption), de La Calda Vita, de Florestano Vancini 1964 — Oltraggio al Pudore, de Silvio Amadio La Chance et l'amour, sketch d'Eric Schlumberger La 317e Section, de 1965 — Rose rosse per Angelica (Le Chevalier à la rose rouge), de Sténo Compartiment tueurs, de Costa Gavras 1966 — Un Uomo a meta (Un Homme à moitié), de Vittorio de Seta La Busca, d'Angelino Fons Les Demoiselles de Rochefort, de La Ligne de démarcation, de Claude Chabrol 1967 — L'Horizon, de Jacques Rouffio Un Homme de trop, de Costa Gavras Le grand Dadais, de Pierre Granier-Deferre L'Ecume des jours, de Charles Belmont La petite Vertu, de Serge Korber

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