Roy Mcmurtry, Les Droits Des Franco-Ontariens Et La Nation Canadienne Linda Cardinal Et Stéphane Lang
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Document généré le 28 sept. 2021 14:21 Mens revue d'histoire intellectuelle de l’Amérique française Roy McMurtry, les droits des Franco-Ontariens et la nation canadienne Linda Cardinal et Stéphane Lang Volume 7, numéro 2, printemps 2007 Résumé de l'article Les travaux sur les idées constitutionnelles au Canada pendant les années 1970 URI : https://id.erudit.org/iderudit/1024126ar et 1980 négligent trop souvent la pluralité idéologique existant parmi les DOI : https://doi.org/10.7202/1024126ar principaux acteurs de l’époque. Cet article tente de pallier cette lacune en analysant l’apport de l’ancien procureur général de l’Ontario, Roy McMurtry, à Aller au sommaire du numéro la redéfinition de l’identité nationale canadienne dans le contexte des bouleversements constitutionnels de 1982. Le texte montre que le nom de McMurtry devrait aussi être associé aux débats constitutionnels du tournant Éditeur(s) des années 1980 au même titre que celui de Pierre Trudeau. Il porte aussi sur son attitude à l’égard de la minorité franco-ontarienne en raison du rôle clé Centre de recherche en civilisation canadienne-française qu’il souhaitait qu’elle joue dans le rapprochement entre le Québec et le reste du pays. Associé au courant red tory, McMurtry a ainsi mis son héritage ISSN intellectuel au service des droits des minorités. 1492-8647 (imprimé) 1927-9299 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Cardinal, L. & Lang, S. (2007). Roy McMurtry, les droits des Franco-Ontariens et la nation canadienne. Mens, 7(2), 279–311. https://doi.org/10.7202/1024126ar Tous droits réservés © Mens, 2007 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ ROY McMURTRY, LES DROITS DES FRANCO-ONTARIENS ET LA NATION CANADIENNE Linda Cardinal et Stéphane Lang1 Chaire de recherche sur la francophonie et les politiques publiques Université d'Ottawa Résumé Les travaux sur les idées constitutionnelles au Canada pendant les années 1970 et 1980 négligent trop souvent la pluralité idéologique existant parmi les principaux acteurs de l'époque. Cet article tente de pallier cette lacune en analysant l'apport de l'ancien procureur général de l'Ontario, Roy McMurtry, à la redéfinition de l'identité nationale canadienne dans le contexte des bouleversements constitutionnels de 1982. Le texte montre que le nom de McMurtry devrait aussi être associé aux débats constitutionnels du tournant des an nées 1980 au même titre que celui de Pierre Trudeau. Il porte aussi sur son attitude à l'égard de la minorité franco-ontarienne en raison du rôle clé qu'il souhaitait qu'elle joue dans le rap prochement entre le Québec et le reste du pays. Associé au courant red tory, McMurtry a ainsi mis son héritage intellectuel au service des droits des minorités. Abstract Scholarly research on Canadian constitutional thought in the 1970s and 1980s often neglects the ideological pluralism that characterised the era's leading figures. The present article seeks to mitigate this oversight by examining the contribution Mens, vol. VII, n° 2 (printemps 2007) 280 Mens of former Ontario attorney general Roy McMurtry to the redefinition of Canadian identity during the constitutional upheaval of 1982. The authors argue that McMurtry was no less significant to the constitutional debate of the early 1980s than was Pierre Trudeau. The article also examines McMurtry s attitude towards Ontario's French-speaking minority and the role that he hoped it would play in bridging the gap between Quebec and the rest of Canada. A Red Toryy McMurtry mustered his intellectual heritage in the service of minority rights. Roy McMurtry est procureur général de l'Ontario de 1975 à 1985. Il est ensuite nommé Haut-Commissaire du Canada en Grande-Bretagne, poste qu'il occupe jusqu'en 1988. En 1991, il devient juge en chef adjoint de la Cour supérieure de l'Ontario, Division de première instance et juge en chef de cette même Cour en 1994. Depuis 1996, il est juge en chef de l'Ontario. À 75 ans, l'on peut dire qu'il a consacré toute sa carrière au service public. Notre intérêt pour l'œuvre de McMurtry est lié à son rôle, à titre de procureur général de l'Ontario, dans les débats constitutionnels des années 1980 et, de façon concomitante, dans le développement des services en français au sein du système judiciaire de la province. Certes, il n'a pas innové lorsqu'il a choisi de mouler la position constitutionnelle de l'Ontario sur le projet du gouvernement fédéral de rapatrier unilatéralement la Constitution2. Toutefois, il a formulé un discours sur la nation canadienne qui diffère substantielle ment de celui de Pierre Trudeau. En outre, si pour Trudeau, à en juger par ses déclarations à l'époque du Lac Meech, les droits linguistiques des minorités servent à protéger l'indi vidu contre tous droits collectifs3, pour McMurtry, ils doivent plutôt s'insérer dans le cadre de droits accordés aux commu nautés linguistiques, ce qui l'incitera à appuyer la reconnais sance du statut de société distincte du Québec. Ses idées n'ont Roy McMurtry et les droits des Franco-Ontariens 281 toutefois pas retenu l'attention des historiens ni celle des com mentateurs de la période4. Pourtant, nous aurions intérêt à mieux étudier la façon dont il se représentait la nation et les droits des minorités afin d'en approfondir la signification dans le contexte du débat sur l'identité canadienne qui s'élabore à l'époque. Les travaux font habituellement rimer l'évolution du Canada avec la pensée constitutionnelle de Trudeau. Pen sons, pour nous en convaincre, aux études de la question réa lisées par Kenneth McRoberts ou Guy Laforest5. Les com mentateurs n'ont pas tort de procéder à un tel rapprochement mais leur discours sert aussi à gommer l'existence d'une plu ralité idéologique bien réelle au sein de l'historiographie et de la politique canadiennes6. Ce texte tentera de pallier cette la cune en analysant l'apport de McMurtry à la redéfinition de l'identité nationale au Canada dans le contexte des boulever sements constitutionnels de 1982. Il portera aussi sur son at titude à l'égard de la minorité franco-ontarienne en raison du rôle clé qu'il souhaitera qu'elle joue dans le rapprochement entre le Québec et le reste du pays. En effet, il a contribué à forger une représentation particulière de la nation canadienne au cœur de laquelle se trouve un engagement qui peut sur prendre à l'égard des droits des Franco-Ontariens et des mi norités francophones hors Québec de façon plus générale. Associé au courant red tory, il a mis son héritage intellectuel au service des droits des minorités7. Ce texte servira donc à montrer que le nom de McMurtry devrait être associé aux débats constitutionnels des années 1980 au même titre que l'ont été ceux de Pierre Trudeau ou de Jean Chrétien8. Au centre de notre réflexion, nous retrou vons notamment son interprétation de la Charte canadienne des droits et libertés comme un document fondateur de la nation canadienne. Pour certains, il est ironique que le Qué bec rejette un document du type de la Charte, d'autant plus 282 Mens que celle-ci est tributaire d'un raisonnement civiliste étranger au monde de la common lav?. Or, ce texte montrera que l'esprit de McMurtry plane aussi sur le document de l'époque. Par ailleurs, si l'on connaît mal son apport au constitutionnalisme canadien, son rôle clé dans le développe ment des services en français en Ontario a été reconnu par l'ensemble du milieu francophone de la province, que l'on pense au doctorat honorifique que lui a conféré l'Université d'Ottawa en 1983 ou encore aux nombreux discours qu'il a prononcés devant les membres de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario (AJEFO). Il a fait preuve, très tôt dans sa carrière de politicien, d'un engagement indé fectible envers la cause du bilinguisme, des services en fran çais et du respect de la citoyenneté des Franco-Ontariens. Ce texte est divisé en trois parties. Dans un premier temps, nous présentons quelques éléments du parcours de McMurtry. Nous étudierons ainsi sa pensée comme une forme d'intervention dans l'histoire du Canada et non uniquement comme un témoignage sur une période révolue. Dans un deuxième temps, nous présenterons sa conception des mino rités et de la nation canadienne. Dans un troisième temps, nous montrerons comment il a fait valoir ses idées constitu tionnelles dans la tourmente constitutionnelle de 1982. En somme, nous verrons comment il est devenu un acteur im portant sur la scène politique canadienne. Roy McMurtry, le réformateur Originaire de Toronto, McMurtry se définit lui-même comme étant d'origine irlandaise, venant d'une famille pro testante et orangiste par surcroît10. Il a fréquenté les meilleurs écoles du Canada anglais, pensons aux collèges d'Upper Ca nada et de St. Andrew's. En 1954, il reçoit un baccalauréat es Arts de l'Université de Toronto et en 1958, un diplôme en Roy McMurtry et les droits des Franco-Ontariens 283 droit de Osgoode Hall. Pendant ses années à l'université, il rencontre et se lie d'amitié avec William Davis, le futur pre mier ministre de l'Ontario.