<<

En collaboration avec :

Production de nouvelles connaissances sur le milieu marin de la

roduction de nouvelles connaissances sur le milieu marin de la Martinique

AMELIORATIONS DES CONNAISSANCES

SUR LES CHONDRICHTYENS EN MARTINIQUE .

mai 2017

Rédacteur pour Kap Natirel :

Océane Beaufort

[email protected] 06 90 08 05 44

AMELIORATIONS DES CONNAISSANCES SUR LES CHONDRICHTYENS EN MARTINIQUE. Un projet réalisé par :

mars 2017 Remerciements : Nous remercions l’ensemble des personnes qui ont contribué à l’élaboration de ce travail par leurs apports techniques, scientifiques, financiers ainsi que par leur partage de connaissances, d’expériences et leur soutien.

Nous remercions la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DEAL) de la Martinique, en particulier Fabien Vedie et Denis Etienne, ainsi que l’Agence des Aires Marines Protégées (AAMP), en particulier Sophie Brugneaux pour leur appui pour la réalisation de ce projet. Nous remercions également les membres du comité de pilotage du programme d’Acquisition de nouvelles connaissances sur le milieu marin martiniquais (Aquimart) pour avoir retenu ce projet.

Nous remercions également Maxym Sikora, stagiaire à la DEAL et co-encadré par Kap Natirel, pour sa motivation et son professionnalisme dans la réalisation des enquêtes de terrain auprès des acteurs de la mer.

Nous remercions les différents organismes et structures qui ont partagés et échangés leurs connaissances et leurs informations sur les requins et les raies en Martinique, notamment le CRPMEM, l’IFREMER, Impact Mer, Créocéan, le musée du Père Pinchon …

Nous remercions également toutes les personnes interrogées dans le cadre des enquêtes, les marins pêcheurs, les plongeurs et gérants de clubs de plongée, les chasseurs sous-marins, les consommateurs, sans oublier les passionnées du milieu marin et les naturalistes.

Nous remercions toutes les personnes qui ont fait part de leurs informations sur les requins et les raies via le programme de recensement.

Pour finir, merci à toute l’équipe de Kap Natirel, plus particulièrement à Sophie Bédel, Maxime Sèbe, Bruno Timmerman, Olivier Oettly, Magalie Vanier et Nicolas Boudin.

Citation : Beaufort, O., 2017. Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique. Rapport scientifique – Convention Kap Natirel / DEAL / AAMP 16/025 .98 p.

2 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Liste des figures :

Figure 1 : Un requin nourrice, cirratum, une des espèces de requins la plus fréquente dans les Antilles françaises...... 9 Figure 2 : Localisation de la Martinique...... 11 Figure 3 : Pêcheur martiniquais avec un casier...... 12 Figure 4 : Les récifs de la Caraïbe abritent de nombreuses espèces...... 13 Figure 5 : Le casier (ou la nasse) est un des engins de pêche le plus utilisé en Martinique...... 15 Figure 6 : Répartition du nombre de pêcheurs par engin de pêche (%) ...... 16 Figure 7 : Les chasseurs ciblent des poissons récifaux ainsi que des poissons pélagiques ...... 16 Figure 8 : L’épave du Roraima, un des sites de plongée située dans le Nord de la Martinique...... 17 Figure 9 : Répartition des activités professionnelles...... 18 Figure 10 : Une raie torpille, Narcinidae...... 23 Figure 11 : Répartition des statuts de conservation des espèces identifiées en Martinique...... 26 Figure 12 : Un requin longimane, Carcharhinus longimanus...... 26 Figure 13 : Une raie manta géante, Mobula birostris...... 27 Figure 14 : Nombre d’observations recueillies par taxon...... 28 Figure 15 : Répartition des observations recensées...... 30 Figure 16 : Les espèces les plus observées en Martinique...... 31 Figure 17 : Répartition des observations pour les espèces principales...... 32 Figure 18 : Répartition des caméras pour le projet Fin Print en Martinique...... 33 Figure 19 : Répartition des observations d’élasmobranches dans le cadre du projet Fin Print...... 33 Figure 20 : Observation de requins dans le lagon du François depuis un hélicoptère...... 34 Figure 21 : Répartition des captures pour la palangre de fond et le filet trémail...... 42 Figure 22 : Rendements comparés des principales espèces par tranche bathymétrique de 50 m à 300 m...... 43 Figure 23 : Proportions relativisées des rendements des principales familles en fonction de la saison...... 43 Figure 24 : Rendements comparés des principales espèces par secteur...... 44 Figure 25 : Rendements comparés des principales espèces par secteur en fonction de la bathymétrie ...... 45 Figure 26 : Abondance numérique relative et abondance pondérale relative des espèces principales et secondaires...... 46 Figure 27 : Un requin longimane ...... 47 Figure 28 : Répartition du nombre de pêcheurs de chondrichtyens ...... 48 Figure 29 : Ressenti des pêcheurs quant à l’évolution temporelle des populations de requins et de raies en Martinique ...... 48 Figure 30 : Répartition des captures de chondrichtyens par engin de pêche...... 50 Figure 31 : Illustration d’une requin nourrice, où « vache de mer »...... 50 Figure 32 : Un requin taureau, Carcharias taurus, de la famille des Odontaspidae...... 52

3 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Figure 33 : Estimation du nombre total d’individus capturés par les 121 pêcheurs sur les 12 mois précédant l’enquête...... 52 Figure 34 : Un requin griset (Hexancheus griseus), de la famille des Hexanchidae, pêché à Fond Layé...... 54 Figure 35 : Répartition relative du nombre de pêcheurs ayant pêché chaque taxon...... 55 Figure 36 : Répartition relative des espèces capturées sur les DCP (lignes et palangres)...... 56 Figure 37 : Répartition relative des espèces capturées sur à la ligne trainante...... 56 Figure 38 : Répartition relative des espèces capturées sur à la ligne à main...... 56 Figure 39 : Répartition relative des espèces capturées avec la palangre de fond...... 58 Figure 40 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet maillant encerclant...... 58 Figure 41 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet trémail...... 58 Figure 42 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet fixe...... 59 Figure 43 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet maillant dérivant...... 59 Figure 44 : Répartition relative des espèces capturées avec le casier...... 59 Figure 45 : Répartition relative des espèces capturées avec la senne de plage...... 59 Figure 46 : Répartition relative des espèces capturées en apnée...... 60 Figure 47 : Répartition des groupes d'espèces pour les principaux métiers de pêche...... 61 Figure 48 : Répartition des captures pour chaque groupe fonctionnel en fonction du secteur...... 62 Figure 49 : Répartition des captures pour chaque taxon en fonction du secteur...... 62 Figure 50 : Un chasseur sous-marin...... 62 Figure 51 : Pêche d’une femelle gestante de requin marteau halicorne (Sphyrna lewini)...... 63 Figure 52 : Pêche de 14 requins tigre (Galeocerdo cuvier)...... 63 Figure 53 : Carcasse d’un requin griset (Hexancheus griseus) à St Pierre ...... 64 Figure 54 : Collaboration avec les marins pêcheurs...... 67 Figure 55 : Schéma simplifié de la filière commerciale des élasmobranches en Martinique...... 69 Figure 56 : Fréquence de la consommation d’élasmobranches parmi les consommateurs d’élasmobranches. ... 70 Figure 57 : Des ailerons de requins en train de sécher en Polynésie françaises...... 70 Figure 58 : Commercialisation de requins congelés en Martinique...... 71 Figure 59 : Commercialisation de requins frais en Martinique...... 71 Figure 60 : Colombo de requin longimane (Carcharhinus longimanus)...... 72 Figure 61 : Deux requins griset (Hexanchus griseus) dans leur habitat naturel...... 72 Figure 62 : Mâchoire d’un requin mako, Isurus oxyrinchus, avant et après préparation pour exposition, en Martinique...... 73 Figure 63 : Nageoires caudales séchés, en Martinique...... 73 Figure 64 : La plongée en bouteille...... 74 Figure 65 : Indice d’observation pour les requins et les raies par clubs de plongée intérrogé...... 75 Figure 66 : Une raie léopard, Aetobatus narinari, observée en plongée à St Barthélemy...... 77

4 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Figure 67 : Point de vente de poissons...... 80 Figure 68 : Valorisation scientifique des captures d’élasmobranches...... 81 Figure 69 : Structure de soutien de la caméra...... 82 Figure 70 : Observation d’élasmobranches via les caméras appâtées...... 83 Figure 71 : Affiche du programme de recensement...... 83 Figure 72 : Suivi aérien des nurseries de requins côtiers en ...... 84 Figure 73 : Capture et marquage des requins côtiers juvéniles en Guadeloupe...... 84 Figure 74 : Répartition des sanctuaires à requins dans la Caraibe...... 87 Figure 75 : Le requin caraïbe (Carcharhinus perezi), l’une des espèces les plus fréquentes à St Barthélemy. ... 87 Figure 76 : Conférence sur les requins en Martinique...... 88

Liste des tableaux

Tableau 1 : Liste des espèces de chondrichtyens identifiées en Martinique ...... 244 Tableau 2 : Stade(s) du cycle de vie observé(s) dans les eaux martiniquaises ...... 366 Tableau 3 : Liste des familles observées...... 443 Tableau 4 : Liste des familles dominantes par secteur et en fonction des strates bathymétrique...... 44 Tableau 5 : Répartition des individus capturés...... 4747 Tableau 6 : Liste des taxons identifiés...... 51 Tableau 7 : Composition des groupes fonctionnels...... 52 Tableau 8 : Nombre d’individus capturés par espèce dans l’échantillon et extrapolation...... 54 Tableau 9 : Indice d’observation des différentes espèces observées par les clubs de plongée en Martinique ..... 75 Tableau 10 : Mesures de gestion des pêches...... 86

Liste des annexes 6 Annexe 1 : Carte des cantonnements de pêche ...... 98 Annexe 2 : Questionnaire ...... 99 Annexe 3 : Répartition de l’échantillonnage ...... 101 Annexe 4 : Type d’information par espèce ...... 102

5 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - SOMMAIRE

Préambule ______7 Introduction ______8 1. Site d’étude, méthodologie et échantillonnage ______10 1.1 Site d’étude ______11 1.2. Enquêtes de terrain auprès des acteurs de la mer ______14 1.3. Rencontre de structures locales ______19 1.4. Analyse des archives ______19 1.5. Informations complémentaires récoltées ______19 1.6. Conclusion de la sous-partie ______20 2. Caractérisation des populations de chondrichtyens ______22 2.1. Diversité spécifique ______23 2.2. Abondance ______27 2.3. Répartition ______29 2.4. Sites à fonctionnalités particulières ______34 2.5. Conclusion de la sous-partie ______37 3. La pêche des chondrichtyens ______39 SECTION 1 : Synthèse des données disponibles sur la pêche aux chondrichtyens en Martinique ______41 3.1. Suivi des débarquements de la pêche ______41 3.2. Etude en milieu profond (100-300 m) ______42 SECTION 2 : Recueil de données auprès des marins pêcheurs de la Martinique ______48 3.1. Informations générales ______48 3.2. Engins de pêche et techniques ______48 3.5. Conclusion de la sous-partie ______64 4. La valeur socio-économique des chondrichtyens ______68 4.1. La commercialisation ______69 4.2. Le tourisme ______74 4.3. Conclusion de la sous-partie ______76 5.Préconisations et perspectives : vers une gestion adaptée des chondrichtyens en Martinique _ 78 5.1. Amélioration des connaissances ______79 5.2. Réglementation des usages ______85 5.3. Information, sensibilisation du public et des usagers de la mer ______88 5.4. Conclusion de la sous partie ______89 Conclusion ______91 Bibliographie ______94 Annexes ______Erreur ! Signet non défini.98

6 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - PREAMBULE

Aujourd’hui, dans le monde, on constate d’après des études scientifiques que de nombreuses populations de requins et de raies sont en déclin (Bonfil et al, 2005 ; Dulvy et al, 2008). Ce constat soulève un besoin important et urgent de mesures de gestion et de conservation adaptées à ces animaux (Bonfil, 1999 ; Musick et al., 2000 ; Stevens, 2002 ; Dulvy et al.2014). Devant la diminution drastique de ces populations, certains états ont adopté une politique de gestion et/ou de protection en faveur des chondrichtyens. Dans la Caraïbe, par exemple, le premier sanctuaire pour les requins a été créé aux Bahamas en 2011. Plus récemment, le gouvernement néerlandais a déclaré les eaux de Saba et de en sanctuaire en 2015 et les eaux de Sint Maarten en 2016. Dans les Antilles françaises, la pêche des requins et des raies est réglementée par le règlement (UE) n°72/2016 du 22 janvier 2016 et Règlement (UE) n°2016/458-). Cette réglementation est applicable en Martinique, Guadeloupe et à . Le territoire de Saint Barthélémy, qui n’est pas concerné par ce règlement européen, a mis en place une réglementation locale de la pêche avec des mesures spécifiques concernant la pêche de chondrichtyens (restriction des captures en fonction de l’espèce et de la période de l’année) (Beaufort, 2017).

La mise en place de mesures adaptées impose une bonne connaissance des caractères biologiques et écologiques des populations concernées (Simpfendorfer et al, 2011 ; Rohr et al, 2014). Le manque de connaissances sur les populations de chondrichtyens des Antilles françaises est un frein au développement d’actions locales pour la protection et la conservation des populations. Depuis 2013, l’association Kap Natirel, en charge de la coordination du Réseau requins des Antilles françaises (Reguar), développe des projets pour acquérir de nouvelles informations sur ces animaux. Suite à un intérêt particulier porté par la Direction de l’Environnement, de l'Aménagement et du Logement (DEAL) de Martinique sur les chondrichtyens, l’association Kap Natirel a proposé en 2015 un projet dans le but de recueillir et de valoriser les données existantes sur cette classe (chondrichtyens) en Martinique. Ce projet a été déposé dans le cadre du programme de productions de nouvelles connaissances sur le milieu marin de la Martinique (Aquimart) s’inscrivant dans la mission d’étude pour la création d’un parc naturel marin en Martinique (porté par l’Agence des Aires Marines Protégées, AAMP et la DEAL Martinique).

Le travail présenté dans ce document est séparé en 2 axes principaux : - Un état des lieux des connaissances disponibles et la valorisation des connaissances acquises par les acteurs de la mer. Cette partie comprend une revue des rapports et articles scientifiques, de la littérature grise et d’articles de presse ainsi que la réalisation d’enquêtes auprès des acteurs de la mer. - Une réflexion (en fonction des informations obtenues) sur la mise en place d’actions

adaptées au contexte local pour favoriser une meilleure gestion des populations de Mazéas Franck © chondrichtyens.

7 AméliorationsAméliorations des des connaissances connaissances sur sur les les chondrichtyens chondrichtyens en en Martinique Martinique - - MarsMai 20172017 -- INTRODUCTION Les chondrichtyens, aussi appelés « poissons cartilagineux », sont apparus sur Terre il y a plus de 400 millions d’années (Compagno, 1990). Cette classe est composée de deux sous-classes : les « élasmobranches », représentés par les requins et les raies, ainsi que les « holocéphales », représentés par les chimères. D’après de récentes études, un quart des espèces d’élasmobranches serait menacé d’ au niveau mondial, selon les critères de la liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) (Dulvy et al, 2014). Ces populations font face à de nombreuses menaces, telles que la pêche (Bonfil, 1994), la dégradation des habitats (Jennings et al.2008), la pollution des océans (Gelsleichter et al., 2005) et le changement climatique (Chin et al., 2010). Les « poissons cartilagineux » sont particulièrement vulnérables en raison de certains critères biologiques comme une croissance lente, une maturité sexuelle tardive et un faible nombre de petits par rapport à la plupart des poissons osseux et invertébrés marins (Musick, 1999). En effet, les requins et les raies sont des espèces dites « K-sélectives », c’est-à-dire avec un potentiel reproducteur et une capacité de croissance des populations faibles. Par conséquent, la capacité de résilience des élasmobranches face aux menaces est faible (Simpfendorfer 2000) et leur adaptation face aux changements rapides des conditions environnementales semble peu envisageable (Camhi et al., 1998 ; Musick et al. ; 2000 ; Musick, 2005).

Si ces animaux ont longtemps été associés au danger, aujourd’hui leur existence se révèle essentielle à l’équilibre des océans. La diversité dans leur utilisation des habitats et leurs places dans la chaîne trophique attribuent aux élasmobranches un rôle significatif dans le maintien des écosystèmes marins (Stevens et al.2000, Ceccarelli and Ayling, 2010 ; Heupel et al, 2014) notamment dans les herbiers et les récifs coralliens (Heithaus et al. 2012, Ferretti et al. 2010). La diminution considérable de certaines populations d’élasmobranches et leur rôle dans les écosystèmes soulèvent un besoin important de mise en place d’une gestion et d’une conservation adaptées (Bonfil, 1999 ; Musick et al., 2000 ; Stevens, 2002 ; Dulvy et al.2014). Pour cela, il est essentiel d’avoir une bonne connaissance des caractères biologiques et écologiques des populations concernées (Simpfendorfer et al, 2011 ; Rohr et al, 2014).

Dans les Antilles françaises peu d’informations sont disponibles sur les chondrichtyens et il est difficile, aujourd’hui, de mesurer les enjeux de gestion liés à ce groupe (diversité, abondance, périodicité des présences, zones à fonctionnalités particulières…). Pourtant, d’après une récente étude, les Antilles françaises (et plus particulièrement la Martinique) seraient situées sur un des 15 spots représendant un enjeu majeur dans la conservation des élasmobranches (Dulvy et al.,2014).

Des opérations visant à améliorer les connaissances sont menées en Guadeloupe depuis fin 2012 par l’association Kap Natirel via la création du Reguar (le Réseau requins des Antilles françaises). Depuis 2014, les actions se sont développées à Saint Martin et à Saint Barthélémy avec l’appui de structures locales. Ces projets ont permis de mettre en évidence une diversité spécifique mais menacée : plus de 30 espèces ont été identifiées dont 30% sont inscrites sur la liste rouge de l’UICN et 40% sont quasi-menacée (Beaufort, 2015).

8 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Les actions ont notamment permis de déceler l’existence de nurseries de plusieurs espèces de requins côtiers tels que pour le requin citron (Negaprion brevirostris), le requin bordé (Carcharhinus limbatus), le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) et le requin nez noir (Carcharhinus acronotus) (Beaufort, 2013 ; Beaufort, 2014 ; Beaufort, 2015). Une 1ère étude sur la pêche aux chondrichtyens a par ailleurs mis en évidence une pêche régulière de requins et de raies sur l’archipel guadeloupéen (Beaufort, 2015). Bien que celle-ci soit généralement liée à des prises accessoires, elle concerne des espèces inscrites sur la liste rouge de l’UICN (Beaufort, 2015) ainsi que des espèces qui sont interdites à la pêche, au débarquement et à la vente (Beaufort, 2017).

Une synthèse sur le sujet à mis en évidence l’existence de mesures européennes et nationales applicables dans les départements des Antilles françaises (Beaufort, 2016). Parmi les mesures, on note une règlementation de la pêche des requins et des raies par le règlement (UE) n°72/2016 du 22 janvier 2016 et Règlement (UE) n°2016/458-). Cette réglementation est applicable en Martinique, Guadeloupe et à Saint Martin. Le territoire de Saint Barthélémy, qui n’est pas concerné par ce règlement européen, a mis en place une réglementation locale de la pêche avec des mesures spécifiques concernant la pêche de chondrichtyens (restriction des captures en fonction de l’espèce et de la période de l’année) (Beaufort, 2017).

Etant données les différences de contexte entre les Antilles françaises et la métropolitaine (espèces, engins et techniques de pêche différentes…), mais aussi au sein même des îles des Antilles françaises, il est nécessaire de développer des recherches complémentaires pour proposer des mesures de gestion adaptées et spécifiques à chaque île. C’est à cette fin que la présente étude a été mise en place. Il s’agit de la 1ère étude réalisée sur les chondrichtyens en Martinique. Son objectif étant de recenser, de recueillir et de valoriser les connaissances existantes sur les requins et les raies de Martinique.

Figure 12 : Un requin nourrice, Ginglymostoma cirratum, une des espèces de requins la plus fréquente dans les Antilles françaises. Crédit photo : Franck Mazéas 9 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Ken Bondy / Flikr.com / Bondy Ken

©

1. SITE D’ETUDE, METHODOLOGIE ET ECHANTILLONNAGE

10 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 1.1 Site d’étude 1.1.1. Description générale

La Martinique, appelé également Madinina (« l’île aux fleurs ») ou Jouanacaera (« l’île aux iguanes »), est située dans l’arc antillais entre l’océan Atlantique et la mer des Caraïbes, soit à plus de 6 850 km de la France métropolitaine. Ses coordonnées géographiques moyennes sont 14°40 N, 61°00 O. C’est l’un des cinq départements d’Outre-Mer et une des vingt-six régions françaises. Sa superficie s’élève à 1 128 km2 pour une population de 385 551 habitants (estimation au 1er janvier 2016, source : INSEE). Avec une densité de 355 habitants au km² la Martinique est la 3ème région la plus densément peuplée de France, après l'Ile-de- France et Mayotte (source : INSEE). Le principal pôle d’activité de l’île est constitué des communes de Fort de France, le Lamentin, le Robert et Schoelcher. Les principaux pôles locaux sont Trinité, le Marin et le François. Figure 3 : Localisation de la Martinique. Crédit : Images Google earth, réalisation Océane Beaufort. La Martinique est une collectivité territoriale unique, la Collectivité territoriale de Martinique (CTM) dotée d’un exécutif et d’une assemblée. L’Etat est représenté par un préfet. La Martinique fait partie de l’Union Européenne au sein de laquelle elle constitue une région ultrapériphérique ; à ce titre elle bénéficie de " mesures spécifiques " qui adaptent le droit communautaire en tenant compte des caractéristiques et contraintes particulières de ces régions : tous les textes législatifs nationaux y sont applicables mais peuvent faire l’objet de mesures d’adaptation " nécessitées par leur situation particulière " (Art. 73 de la Constitution française).

1.1.2. L’environnement Le relief de la Martinique est de type volcanique et montagneux (les plaines ne représentent que 10% de la superficie de l'ile). Le climat est de type tropical (26° de température moyenne annuelle) et humide (hygrométrie de 80 % en mars-avril et 87% en octobre-novembre). Les conditions climatiques sur l'île sont influencées par la position de l’anticyclone des Açores qui dirige l’alizé d’Est à Nord-Est et celle de la Zone de Convergence Inter Tropicale (ZCIT). Les alizés soufflent du secteur Est pendant presque toute l’année. Leur force moyenne est maximale en juillet (environ 10 nœuds) et minimale en octobre (environ 6 nœuds). On peut distinguer deux saisons : le Carême et l’Hivernage. Le Carême est généralement chaud et sec, il s’étend de décembre à mai, avec une période de grande sécheresse en février/avril et un ensoleillement maximal. L’Hivernage est humide, il s’étend de juin à novembre et se caractérise par un risque cyclonique élevé.

11 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Bordée à l'ouest par la Mer Caraïbe et à l'est par l'Océan Atlantique, l'île de la Martinique est séparée des îles de la Dominique (au Nord) et de Sainte Lucie (au Sud) par des canaux. Le courant Nord équatorial qui alimente le courant de Floride et le Gulf stream pénètre dans la mer des caraïbes avec un flux moyen estimé à 28 millions de m3/s. Les passages entre les îles voisines sont ainsi le siège d'un courant général d'Est en Ouest avec un débit de l'ordre de 1 à 2 millions de m3/s. Ces courants ne sont pas permanents et peuvent s'inverser occasionnellement. Les courants marins induits par les alizés représentent localement la principale source de renouvellement des eaux côtières. Par ailleurs, la marée est de faible amplitude, n'excédant pas 50 cm.

Les écosystèmes marins sont en partie formés de mangroves (le linéaire maritime de mangroves est estimé à plus de 40 km), d’herbiers (au moins 40 km²) et de récifs coralliens (linéaire de 70 km et couvre près de 200 km² le long des côtes)

Source : site internet de l’Observatoire de l’Eau de Martinique.

1.1.3. La pêche et la réglementation de la pêche

La pêche en Martinique se pratique essentiellement de façon artisanale. Avec 1098 navires de pêche dont 1074 de moins de 10 mètres, la flotte de la Martinique représentait en 2009 16% de la flotte française (Reynal et al, 2013). L’activité de la flotte de pêche se localise essentiellement à l’intérieur des 12 milles nautiques pour 87% du temps et entre 12 et 24 milles pour 11% du temps. Plusieurs techniques, dont certaines sont héritées des indiens Caraïbes, se sont développées sur un plateau continental étroit : la pêche à la senne depuis une plage, la pêche le long des côtes au casier ou à la ligne et la pêche au large, au-delà de visibilité des côtes, appelée "pêche à Miquelon". Le casier est l’engin de pêche le plus utilisé (61% des navires), vient ensuite la ligne de traîne sur les bois dérivants (38%) ou autour des DCP (33%), le filet maillant de fond (21%), puis la senne (11%) (Reynal et al, 2013). Généralement, les pêcheurs pratiquent Figure 4 : Pêcheur martiniquais avec un casier. Crédit photo : Flikr/Megatatan plusieurs engins dans l’année. En 2009, les débarquements ont été estimé à plus de 375 t d’espèces démersales (perroquet, mérou…), plus de 274 t de « petits pélagiques » (balaou…) et près de 744 t d’espèces pélagiques du large (daurade, thon…).

12 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - La Martinique étant une région ultra périphérique de l’Europe, l’activité des navires de pêche qui exploitent la ZEE1 s’inscrit donc dans le cadre de la politique commune des pêches (PCP) de l’Union européenne. La gestion des ressources partagées avec d’autres pays s’exerce dans le cadre des organisations internationales de pêche afférentes. La réglementation en vigueur sur l’île ne décrit aucune réglementation spécifique pour la pêche aux chondrichtyens.

Il existe en Martinique 5 cantonnements (aires marines délimitées) dans lesquels l’exercice de la pêche est interdite, à titre professionnel ou de loisir (y compris la pêche sous-marine). La carte des zones concernées est disponible en annexe 1.

En 1965 une étude sur les stocks

halieutiques de Martinique a mis en évidence des risques de surexploitation des stocks dans la région. Les résultats obtenus par le biais de pêches expérimentales ont présenté une grande diversité spécifique mais un faible taux de rendement par les différents engins de pêche testés (Farrugio, H, 1965). Figure 5 : Les récifs de la Caraïbe abritent de nombreuses espèces. Crédit photo : Cédric Pau

Concernant la pêche aux requins et aux raies, une récente synthèse (Beaufort, 2017a) a mis en évidence l’application de règlements européens dans les eaux de la Martinique. Les mesures mises en place ont fait l’objet d’une note nationale par la Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture (courrier DPMA_010117 du 22 juin 2016).

Parmi la réglementation, on note :

• l’interdiction d’enlever les nageoires de requins à bord des navires (opération appelée « finning »), de les conserver à bord, de les transborder ou de les débarquer mais également d’acheter, d’offrir à la vente ou de vendre lesdites nageoires de requin. Pour faciliter le stockage, les nageoires de requin peuvent cependant être partiellement tranchées et repliées contre la carcasse (Règlement (CE) n°1185/2003 du Conseil du 26 juin 2003 et le règlement (UE) n°605/2013 du Parlement européen et du Conseil du 12 juin 2013) ;

1 Une zone économique exclusive (ZEE) est, d'après le droit de la mer, un espace maritime sur lequel un État côtier exerce des droits souverains en matière d'exploration et d'usage des ressources. 13 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - • l’interdiction de capture, de débarquement et de vente de plusieurs espèces (dont le requin longimane, des requins marteau, le requin soyeux (Carcharhinus falciformis) et le requin renard à gros yeux (Règlement (UE) n°72/2016 du 22 janvier 2016 et du Règlement (UE) n°2016/458) ; • la pêche ciblée de certaines espèces est interdite (« TAC zéro ») (dont ) (Règlement (UE) n°1367/2014 du Conseil du 15 décembre 2014).

Taxon Réglementation Manta birostris Pêche, conservation à bord, transbordement et débarquement interdits Mobula spp. Pêche, conservation à bord, transbordement et débarquement interdits Pristis spp. Pêche, conservation à bord, transbordement et débarquement interdits Hexanchus griseus TAC zéro Centrophorus spp. TAC zéro Dalatias licha TAC zéro Alopias superciliosus Détention, transbordement, débarquement et commerce interdits Carcharhinus longimanus Détention, transbordement, débarquement et commerce interdits Sphyrna spp (sauf Sphyrna tiburo) Détention, transbordement, débarquement et commerce interdits Carcharhinus falciformis Détention, transbordement, débarquement et commerce interdits Alopias spp. Pêche ciblée interdite

1.2. Enquêtes auprès des acteurs de la mer Pour le déroulement des enquêtes, un enquêteur a été mobilisé sur une durée de 4 mois. Cette partie a fait l’objet d’un stage de niveau master 22. Les enquêtes ont été réalisées par contact « direct » (rencontre physique de personnes interrogées) ou « indirect » (sous forme de formulaire en ligne ou conversation téléphonique) selon la catégorie d’acteurs. Des planches d’identification spécifique ont été utilisées pour faciliter et assurer une meilleure identification des espèces par les personnes interrogées. Afin d’augmenter la participation des différents acteurs, plusieurs annonces ont été diffusées sur les réseaux sociaux et dans les médias (plus de 10 articles parus dans le France Antilles du 27 mai au 15 aout, émissions radio sur RFO, …).

1.2.1. Les pêcheurs 1.2.1. Les pêcheurs Afin d’optimiser le temps imparti sur le terrain, une sélection des ports principaux de pêche a été réalisée en se basant sur les données relevées par le SIH3 (Reynal, 2013). L’enquêteur se rendait, généralement dans la matinée, sur les points de vente sélectionnés pour rencontrer les

2 Le stage a été réalisé par M. Maxym Sikora, accueilli par la DEAL Martinique, avec un co-encadrement Kap Natirel/DEAL Martinique. Merci de nous contacter à [email protected] pour avoir accès à son rapport de stage. 3 Système d’Information Halieutique : réseau pérenne et opérationnel d’observation des ressources halieutiques 14 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - pêcheurs présents à ce moment-là. Les contacts sont aléatoires : il n’y a pas de sélection des personnes interrogées. Aucun rendez-vous n’a été fixé au préalable avec les pêcheurs.

Par ailleurs, pour éviter les « doublons » dans les informations, il a été décidé d’interroger seulement une personne par équipage, qu’il soit pêcheur professionnel ou informel4 et peu importe son statut (capitaine ou matelot).

Le questionnaire utilisé est disponible en annexe 2. Il s’agit d’un questionnaire adapté aux informations recherchées dans le cadre de cette étude. Dans l’objectif de pouvoir valoriser les données à une plus large étude, des questions supplémentaires ont été ajoutées. Les données obtenues en Martinique seront transmises au laboratoire Heithaus, de la Florida Internationale University (FIU) pour une comparaison avec d’autres pays de la Caraïbe.

Au total, 121 pêcheurs ont été interrogés entre avril et juillet 2016. Ces pêcheurs étant issus de navires différents, ce chiffre représente 14,5 % des navires actifs à la pêche (831 navires actifs à la pêche recensés en 2013 par le SIH). La répartition des pêcheurs rencontrés par secteur est présentée en annexe 3.

Parmi les pêcheurs rencontrés près de 71% sont les capitaines du navire de pêche, les 30% restant sont des matelots. Seule une femme marin-pêcheur a été rencontrée. L’activité de pêche est pratiquée toute l’année et généralement tous les jours de la semaine lorsque les conditions météorologiques le permettent. La majeure partie des pêcheurs rencontrés pratique plus d’un engin de pêche. La répartition du nombre de pêcheurs pour chaque engin de pêche est présentée dans la figure 6. D’après cette figure, le casier, les lignes/palangres sur DCP et la ligne trainante sont les engins les plus utilisés parmi les pêcheurs rencontrés. D’après les données du SIH, cela correspond aux données enregistrées globalement sur la Martinique (Reynal, 2013).

Figure 6 : Le casier (ou la nasse) est un des engins de pêche le plus utilisé en Martinique. Crédit photo : Cédric Pau

4 Pêcheur non identifié sur le registre des marins pêcheurs et/ou non enrôlé officiellement 15 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Plongée en apnée 2,5 Senne de plage 1,7 Filet trémail 10,7 Filet maillant fixe 13,2 Filet maillant encerclant 15,7 Filet maillant dérivant 5,8 Palangre de fond 13,2

Engin de de Engin pêche Ligne à main (ou avec canne) 3,3 Lignes trainante (pêche « à Miquelon ») 16,5 DCP lignes et palangres 44,6 Casier 43,0 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 70,0 80,0 90,0 100,0 Répartition du nombre de pêcheurs par engin de pêche (%)

Figure 6 : Répartition du nombre de pêcheurs par engin de pêche (%) Source : Océane Beaufort

1.2.2. Les chasseurs sous-marins (en activité de loisir) L’enquête a été réalisée via un formulaire en ligne (disponible pendant 4 mois). Au total, 8 formulaires ont été complétés. L’activité professionnelle renseignée par les chasseurs varie de moniteur d’apnée et de chasse à enseignant en passant par d’autres activités comme biologiste et menuisier. L’expérience varie de 7 mois à plus de 18 ans. Le nombre de sorties annuelles varie entre 12 à 75 sorties (soit 1 à 6 sorties par mois) et elles sont réalisées toute l’année (il n’y a pas de période spécifique pour la pratique de cette activité). La pêche sous-marine est pratiquée aussi bien sur la côte Atlantique que Caraïbe.

La zone d'évolution des chasseurs participants est de l'ordre de 35 m, avec des profondeurs de chasse variant de 15 à 35. Les parties de chasse durent généralement de 3 h à une journée complète. Les espèces ciblées sont pélagiques (thazard, saumon/colas bâtard, carangue,…) et côtières (capitaine, perroquet, barracudas, pagre,…). L’utilisation de frai5 est peu Figure 7 : Les chasseurs ciblent des poissons récifaux (mérou, courante. capitaine…) ainsi que des poissons pélagiques (thazard…). Crédit photo : Fred Flora

5 En chasse sous-marine, utiliser du « frai » consister généralement à attirer une espèce ciblée par l’utilisation d’appâts fraichement obtenus (entrailles de prises précédentes par exemple). 16 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 1.2.3. Les plongeurs L’enquête a été réalisée via un formulaire en ligne (disponible pendant 4 mois). Au total, 8 formulaires ont été complétés. Il s’agit essentiellement de résidents (plus de 87 %) qui pratiquent l’activité hors club (65,5%). La plongée est pratiquée toute l’année avec un nombre de plongées qui varie en fonction des plongeurs (de 5 à 300 plongées à l’année). L’activité est pratiquée essentiellement sur la côte Caraïbe. Les sites sont généralement fréquentés de la même manière toute l’année (pour 85,7 % des plongeurs).

Figure 8 : L’épave du Roraima, un des sites de plongée située dans le Nord de la Martinique. Crédit photo : Cédric Pau

1.2.4. Les clubs de plongée Les enquêtes auprès des clubs ont été réalisées directement dans les structures. Au total, 9 clubs ont été rencontrés. La répartition des clubs par secteur est présentée en annexe 3. Les responsables rencontrés travaillent dans leur club respectif depuis 7 mois à 30 ans (avec une moyenne de 13 ans). Globalement, l’activité est pratiquée toute l’année sur les secteurs du Nord Caraïbe, de la Baie de Fort de France et du Canal de Sainte Lucie. Le nombre de plongée annuelle varie entre 160 et 672 selon les clubs (avec un nombre moyen de plongée annuelle de 512).

1.2.5. Les consommateurs Les pêcheurs répondent à la demande des consommateurs, l’avis de ces derniers est donc important. Une enquête, sous forme de questionnaire, a été réalisée auprès des consommateurs pour obtenir des informations sur la demande, les préférences en termes d’espèce mais aussi de partie du corps. Ce sera notamment l’occasion d’évaluer l’importance de la présence de requins et de raies dans les assiettes martiniquaises.

Les enquêtes ont été réalisées exclusivement sous forme d’un formulaire en ligne. Ce dernier a été diffusé largement sur les réseaux sociaux et dans les médias. Au total, 80 formulaires ont été remplis dont 74 sont considérés comme complets et exploitables. Parmi les 74 questionnaires, 82,5% ont été complétés par des personnes résidentes en Martinique et 7% par des personnes « de passage » (vacanciers par exemple). Les 10,5% restant

17 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - n’ont pas répondu à la question. Concernant les classes d’âge des participants, la figure 8 représente la répartition des âges en fonction du nombre d’années de résidence en Martinique. Par ailleurs, l’échantillonnage est constitué essentiellement de femmes (65%). La figure 9 présente la répartition des activités professionnelles des personnes enquêtées.

100% 50 ans et + Domaine de 7% l'environnement 80% 35-49ans

25-34ans 60% 21% 18-24ans Etudiant 40% <18ans 20% 72%

0% Divers < 1 an 1 à 4 ans 5 à 9 ans 10 à 19 > 20 ans ND (photographe, ans militaire, journaliste, Nombre d'années en Martinique plombier...)

Figure 8 : Répartition par classe d’âge du nombre d’année de résidence en Martinique Figure 9 : Répartition des activités professionnelles.

1.2.6. Analyse des méthodes d’enquêtes La rencontre directe La méthode utilisée pour les marins-pêcheurs et les clubs de plongée, qui consiste à compléter l’enquête lors d’une discussion en direct avec la personne interrogée, semble être une bonne solution. Le contact « direct » entre l’interrogé et l’enquêteur semble permettre d’instaurer rapidement un climat de confiance et d’obtenir les informations recherchées en limitant certains risques (tels que les réponses données « au hasard », l’incompréhension de certaines questions, le « mutisme » de l’interrogé face au sujet …). C’est notamment l’occasion d’inciter sur l’importance de leurs connaissances et sur leur rôle dans l’étude. Néanmoins, cette méthode nécessite beaucoup de temps (déplacement sur les sites de rencontre, temps des interviews estimé entre 15 minutes à 2 heures).

Le formulaire en ligne La méthode utilisée pour les plongeurs, les chasseurs sous-marins et les consommateurs, qui consiste à mettre en ligne un formulaire et à le diffuser via les médias et les réseaux sociaux, n’a malheureusement pas permis de recueillir un nombre élevé de réponses. Bien que 80 formulaires aient été remplis par les consommateurs cela reste faible et ne permet pas de représenter significativement la population de l’île. De plus, une brève analyse du taux de réponse par formulaire montre globalement un taux élevé en début de formulaire et un taux faible à la fin du formulaire. Ces résultats laissent supposer que le formulaire est trop long et que les personnes décrochent rapidement de l’enquête.

18 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 1.3. Rencontre de structures locales Dans le cadre de cette étude, plusieurs structures de Martinique ont été contactées/rencontrées (par courriel, téléphone, où lors de réunion). Cette prise de contact a été réalisée auprès de structures qui peuvent apporter des éléments sur le sujet de l’étude (Office de l’Eau, Direction de la Mer, Office Nationale de la Chasse et de la Faune Sauvage, Comité des pêches, Associations de marins-pêcheurs…). L’objectif étant d’informer ces structures de l’existence de cette étude, recueillir leurs avis et leurs conseils concernant la réalisation et bien évidemment recenser des informations qui pourraient être valorisées dans le cadre de cette étude.

1.4. Analyse des archives Une recherche bibliographique sur les chondrichtyens de Martinique a été menée (archives de l’IFREMER, archives du France Antilles …). Bien qu’aucune étude spécifique sur les chondrichtyens n’ait été réalisée avant 2015, des données sur les espèces observées et les captures de chondrichtyens sont disponibles dans les archives. Au total, ce sont près d’une 20ène d’articles parus dans le France Antilles et moins d’une 10ène d’articles ou rapports d’étude qui ont été utilisés dans le cadre de ce rapport.

1.5. Informations complémentaires récoltées D’autres informations sur les chondrichtyens ont pu être relevées lors des enquêtes auprès des acteurs de la mer mais aussi au cours de réunions et de conférences. Par ailleurs, des personnes spécifiques ont pu être rencontrées au fil de l’étude pour obtenir plus d’informations sur le sujet (des anciens plongeurs par exemple).

En parallèle, le programme de recensement des observations de requins et de raies, mis en place sur l’ensemble des Antilles françaises par l’association Kap Natirel, a permis d’étayer les informations sur les espèces présentes en Martinique. Mis en place fin 2013 en Guadeloupe, étendu sur St Martin et St Barthélemy depuis 2014, puis sur la Martinique en 2016, le programme de recensement du Reguar recueille les observations d’élasmobranches vivants ou morts, en mer et sur terre (points de vente, échouage,…). Basé sur les sciences participatives, ce programme permet d’impliquer la population concernée (dont pêcheurs, plongeurs, surfeurs, …).

Dans le but d’augmenter les retours d’observation, la communication sur ce programme a été développée sur différents supports : • articles sur le site internet du Reguar (www.reguar.org) et sur les réseaux sociaux, • affichage de posters sur le programme dans des endroits stratégiques (clubs de plongée, magasins, …), • prise de contact avec diverses structures pouvant être amenées à faire des observations, • les retours d’observations peuvent se faire via un formulaire en ligne, par les réseaux sociaux, par courriel ou bien par appel téléphonique.

19 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 1.6. Conclusion de la sous-partie Dans le contexte actuel, avec peu d’informations disponibles sur les requins et les raies en Martinique et des observations peu courantes, le recueil et la valorisation des connaissances de sources diverses et variées (pêcheurs, plongeurs, structures environnementales, consommateurs, …) est un outil inestimable.

La Martinique est l’île des Antilles françaises située le plus au sud sur l’Arc Antillais. Avec une flottille de pêche composée essentiellement de navires de taille inférieure à 12 m, la Martinique possédait sur son territoire en 2009 près de 16% de la flottille de pêche française (Reynal et al, 2013). La pêche est principalement artisanale et 87% de l’activité est concentrée dans la bande de 0-12 milles nautiques des côtes martiniquaises (Reynal et al, 2013). Les pêcheurs pratiquent généralement plusieurs engins de pêche. Parmi les plus utilisés on note le casier (ou nasse), la traine et la pêche à la ligne et à la palangre sur DCP. La Martinique étant une région ultra périphérique de l’Europe, les navires de pêche doivent appliquer la PCP 6 de l’Union Européenne (sauf cas exceptionnels) et d’autres règlements européens. La réglementation européenne concernant la pêche de chondrichtyens a été résumée dans d’une note nationale par la Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture (Beaufort, 2017a). Elle interdit entre autres la capture, le débarquement et la vente de certaines espèces de requins et de raies.

Dans le cadre de cette étude, des informations ont été recueillies auprès de différents types de sources (enquêtes auprès des acteurs de la mer, littérature, médias, programme de recensement des observations …). Au total, 586 observations de requins et de raies ont été recensées (dont 11 % des observations qui ont eu lieu entre 1905 et 2009). Bien qu’il n’y ait pas eu, avant 2016, d’étude spécifique sur les chondrichtyens en Martinique, des données sont disponibles dans divers ouvrages (rapports d’étude de pêche, articles dans les médias…) notamment sur les espèces présentes, leurs répartitions et leurs occurrences. La rencontre des acteurs locaux a été une source importante d’informations. En parallèle, des enquêtes auprès de certains acteurs de la mer (marin-pêcheur, plongeurs, gérants de club de plongée, chasseurs sous-marins, consommateurs) ont été réalisées sur la Martinique afin de recueillir des données complémentaires. Certaines enquêtes ont été réalisées par rencontre physique avec les personnes interrogées tandis que d’autres consistaient en des formulaires en ligne. Globalement, la méthode « directe » permet de recueillir des éléments en limitant certains biais (notamment lié à une mauvaise compréhension des questions) et permet d’insister auprès des interrogés sur la valeur de leurs savoirs. Néanmoins, cette technique nécessite des moyens humains et logistiques importants par rapport à d’autres méthodes. En comparaison, les enquêtes par formulaires en ligne nécessitent peu de moyens humains et logistiques. En revanche, le nombre de formulaires complétés en ligne semble faible par rapport aux moyens de diffusion mis en place (articles sur les réseaux sociaux, diffusion via la presse « papier » et la radio). De plus, cette méthode peut augmenter certains biais présents lors de l’utilisation des sciences participatives.

6 La politique commune de la pêche (PCP) est une politique de l'Union européenne née en 1983 qui règlemente la pêche et l’exploitation des ressources halieutiques. 20 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Cela étant, bien que l’échantillonnage de certaines catégories d’acteurs puisse être considéré comme faible, les informations ainsi recueillies permettent d’apporter les premières informations sur le sujet et d’émettre certaines tendances concernant les populations de requins et de raies. Des études complémentaires pourraient permettre d’apporter des informations plus représentatives de la situation en Martinique.

21 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Flikr.com travel/ © ©

2. CARACTERISATION DES POPULATIONS DE CHONDRICHTYENS

22 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 2.1. Diversité spécifique La Martinique présente une vaste diversité spécifique ; une vingtaine d'espèces étaient supposée dans la zone, mais la présente étude a permis de confirmer la présence d’au moins 43 espèces de chondrichtyens dans ses eaux territoriales. Au total, 20 familles sont représentées, appartenant à 7 ordres. La liste des espèces est disponible dans le tableau 1. Les enquêtes auprès des pêcheurs ont permis de mettre en évidence des noms utilisés localement pour certaines espèces. Pour plus d’informations sur le(s) type(s) d’information(s) ayant permis l’ajout de chaque espèce, veuillez-vous référer à l’annexe 4.

Dans le cadre de cette étude, aucune espèce de chimère n’a été référencée en Martinique. Par conséquent, pour la suite de ce rapport les termes « chondrichtyens » (requins, raies et chimères) et « élasmobranches » (requins et raies) seront tous deux employés pour désigner les requins et les raies. Cette absence d’observation de chimères pourrait s’expliquer par la difficulté d’observer de tels animaux (les chimères vivent dans les grandes profondeurs). Il est également possible que, de par sa morphologie, cette espèce soit confondue avec un poisson osseux par les personnes qui la rencontrent (notamment les pêcheurs qui exploitent les grandes profondeurs).

Les raies torpilles sont une des 7 familles identifiées dans les eaux de Martinique. Cette famille est connue pour envoyer des décharges électriques comme moyen de défense ou pour attraper ses proies.

Figure 10 : Une raie torpille, Narcinidae. Crédit photo : Sebastien Gréaux

23 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

EN

LC

NE

CR

LC

LC

LC

DD

DD

NT

NT

NT

NT

DD

NT

VU

NT

DD

DD VU / CR / VU Statut*

: en danger critique. danger en :

maché-pran-y,nare papa-jan, naer,

Vach, godziya , rétchin-sab, dormè, dormè, rétchin-sab, , godziya Vach,

Nae

Nae

Naé

Retchin sable/Godzilla Retchin

Naé

Tranblè

Tranblè

Tranblè

Mante

Wakawa, ouakawa, akawa,makawa, lanj akawa,makawa, ouakawa, Wakawa,

Ré Ré Nomlocal

: en danger, CR danger, en :

: Statut mondial / Statut dans laCaraïbe. région dans Statut / mondial Statut :

Requin baleine Requin

requin dormeur requin

Requin nourrice, vache de mer, mer, de vache nourrice, Requin

Aiguillat cubain Aiguillat

Requin lanterne Requin

Liche

Aiguillat gros yeux gros Aiguillat

Requin vache Requin

Requin griset Requin

Requin perlon Requin

Torpillenoire

Torpille de Bancroft Torpillede

Raie électrique brésilienne électrique Raie

MourineAméricaine

Raie manta Raie

Raie léopard, raie aigle raie léopard, Raie

Aigle de mer taureau mer de Aigle

Raie pastenague violette pastenague Raie

Raie nez émoussée Raie

Raie pastenague américaine pastenague Raie

Raie pastenague épineuse pastenague Raie

Nomvernaculaire

: vulnérable, EN vulnérable, :

menacée, VUmenacée,

-

e la manière suivante manière la e

ées en Martinique ées en

: quasi :

Rhinocodon typus Rhinocodon

Ginglymostoma cirratum Ginglymostoma

Squalus cubensis Squalus

Etmopterus virens Etmopterus

Dalatias licha Dalatias

Centrophorusgranulosus

Hexanchus nakamurai Hexanchus

Hexanchus griseus Hexanchus

Heptranchias perlo Heptranchias

Tetronarce nobiliana Tetronarce

Torpedo nobiliana, Torpedonobiliana,

Tetronarce occidentalis ? ? occidentalis Tetronarce

Narcine bancroftii Narcine

Narcine brasilensis Narcine

Rhinoptera quadriloba Rhinoptera

Rhinoptera bonasus, Rhinoptera

Mobula birostris Mobula

Aetobatus narinari Aetobatus

Myliobatis fremenvillei Myliobatis

Dasyatis violacea Dasyatis

Pteroplatytrygon violacea, violacea, Pteroplatytrygon

Hypanus say, Dasyatis say HypanusDasyatis say,

Dasyatis americana Dasyatis

Hypanus americanus,

Dasyatis centroura Dasyatis

Bathytoshia centroura, centroura, Bathytoshia

Nomscientifique

identifi

chondrichtyens

Famille

Squalidae

Dalatidae

Narcinidae

Mobulidae

Dasyatidae

Hexanchidae

Rhincontidae

Etmopteridae

Torpedinidae

Myliobatidae

: peu concernée, NTpeu :

Rhinopteridae.

Centrophoridae

Ginglymostomatidae

de de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). Certaines espèces possèdent un statut différent en

: Liste des espèces de de des : Liste espèces

a

Orde

Squaliformes

Tableau 1 Tableau

Hexanchiformes

Torpediniformes

Myliobatiformes

Orectolobiformes

: données déficientes, déficientes, LC données :

*Statut *Statut de conservation serastatut ced cas, inscrit le dans de l’échelle, fonction DD

24 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

EN

EN

LC

LC

NT

VU

VU

DD

NT

NT

NT

VU

VU

NT

NT

NT

NT

NT

VU

VU

VU

VU / CR / VU VU / EN / VU Statut *

: en danger critique. danger en :

pantoufle, zygène

Alikône, rétchin-mato, pantouflié, rétchin-mato, Alikône,

pantoufle, zygène

Alikône, rétchin-mato, pantouflié, rétchin-mato, Alikône,

pantoufle, zygène

Alikône, rétchin-mato, pantouflié, rétchin-mato, Alikône,

pantoufle, zygène

alikône, rétchin-mato, pantouflié, rétchin-mato, alikône,

Rétchin-jinga, rékin-jinga Rétchin-jinga,

Rétchin-blanc, ti-rétchin-blan, rékin-blan ti-rétchin-blan, Rétchin-blanc,

pich-ton, pis-ton, piche-thon requin

Retchin blan Retchin

Retchin tigr Retchin

Retchin

Retchin

Retchin

Mazagran

Retchin-ardwaz/retchin-zèl-nwé

Retchin

Retchin

Retchin

Retchin

Retchin

Pich-ton, pis-ton, piche-thon requin Pich-dlo, pich-blé, kréak, mabouya kréak, pich-blé, Pich-dlo, Nom local

CR danger, en :

: Statut mondial / Statut dans laCaraïbe. région dans Statut / mondial Statut :

Emissolle lisse Emissolle

Requin marteau commun marteau Requin

Requin marteau à petits à marteau yeuxRequin

Grand requin marteau requin Grand

Requin marteau halicorne marteau Requin

Roussette boa

Aiguille antillais Aiguille

Requin peau bleu Requin

Requin citron Requin

Requin tigre Requin

Requin sombre Requin

Requin d'estuaire Requin

Requin gris des Caraïbes des gris Requin

du large, requin océanique requin large, du

Requin longimane, pointe blanche pointe blanche longimane, Requin

Requin bordé Requin

Requin bouledogue Requin

Requin soyeuxRequin

Requin nez noir Requin

Requin féroce Requin

Requin taureau Requin

Requin mako, taupe mako, bleu Requin

Requin renard à gros yeux gros à renard Requin

Nom vernaculaire

: vulnérable, EN vulnérable, :

(suite)

menacée, VUmenacée,

-

Mustelus canis Mustelus

Sphyrna zygaena Sphyrna

Sphyrna tudes Sphyrna

Sphyrna mokarran Sphyrna

Sphyrna lewini Sphyrna

Galeus antillensis Galeus

Scyliorhinus boa Scyliorhinus

Rhizoprionodon porosus Rhizoprionodon

Prionace glauca Prionace

Negaprion brevirostris Negaprion

Galeocerdo cuvier Galeocerdo

Carcharhinus signatus

Carcharhinus plumbeus

Carcharhinus perezi

Carcharhinus longimanus

Carcharhinus limbatus

Carcharhinus leucas

Carcharhinus falciformis

Carcharhinus acronotus

Odontaspis ferox

Carcharhias taurus

Isurus oxyrinchus

Alopias superciliosus Alopias

Nom scientifique : quasi :

Famille

Triakidae

Lamnidae

Alopiidae

Sphyrnidae

Scyliorhinidae Carcharhinidae

Odontaspididae : peu concernée, NTpeu :

de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). Certaines espèces possèdent un statut différent en

: Liste des espèces de chondrichtyens Martinique identifiées en de chondrichtyens des : Liste espèces

b

Orde

Lamniformes

Tableau 1 Tableau de l’échelle, dans ce cas, le statut sera inscrit de la manière suivante manière serastatut ce de la cas, inscrit le dans de l’échelle,

Carcharhiniformes : données déficientes, déficientes, LC données :

fonction fonction DD *Statut de conservation

25 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - La Martinique présente un taux élevé d’espèces de chondrichtyens menacées d’extinction ou quasi-menacées. La figure 11 présente la répartition des statuts de conservation pour les espèces identifiées dans les eaux de Martinique. Lorsqu’une espèce possède 2 statuts (mondial et régional), le statut à l’échelle de la région caraïbe est utilisé. Parmi les espèces recensées, 35 % sont inscrites sur la liste rouge des espèces menacées d’extinction. De plus, les espèces considérées comme quasi menacées, soit 33 %, risquent de rejoindre la liste rouge dans un avenir proche. Par ailleurs, on note des lacunes dans les connaissances sur l’état des stocks pour 18 % des espèces.

Figure 11 : Répartition des statuts de conservation des espèces identifiées en Martinique.

4,8 2,3 NE : non déterminé, DD : données insuffisantes, LC : 9,5 NE 16,7 peu concernée, NT : quasi-menacée, VU : vulnérable, DD EN : en danger, CR : en danger critique. LC

21,4 14,3 NT VU EN CR 33,3

Le requin longimane (Carcharhinus longimanus) est une espèce classée en danger critique d’extinction dans la Caraïbe.

Appelé localement « mazagran » il

est occasionnellement pêché en Martinique bien que la réglementation européenne interdit la pêche, le débarquement et la vente de cette espèce dans les eaux des Antilles françaises (Beaufort, 2017a).

Figure 12 : Un requin longimane, Carcharhinus longimanus. Crédit photo : Jürgen Donauer/Flickr

26 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 2.2. Abondance Les données recensées dans le cadre de cette étude n’ont pas permis d’estimer l’abondance relative pour chaque espèce de chondrichtyens. Néanmoins, le nombre d’observations recensées par espèce permet d’apporter un indice sur les espèces les plus fréquemment observées. Dans le cadre de cette analyse, chaque observation (qu’il s’agisse d’un individu ou de plusieurs individus) sera comptée comme une seule observation (par exemple, l’observation de 10 raies léopards en même temps sera comptée comme 1 observation de raie léopard).

La figure 14 présente le nombre d’observations recueillies par taxon. Liés à des risques d’erreur dans l’identification spécifique de certaines espèces, certains taxons sont présentés au niveau de la famille (regroupement de plusieurs espèces), tel que pour les raies pastenagues (Dasiatidae) et les requins marteaux (Sphyrnidae).

Les requins nourrice (Ginglymostoma cirratum), marteaux (Sphyrnidae) et mako (Isurus oxyrinchus) sont les espèces présentant le plus grand nombre d’observations recensées (avec plus de 60 observations). Suivis par les raies pastenagues (Dasiatidae), le requin longimane (Carcharhinus longimanus), le requin tigre (Galeocerdo cuvier), la raie léopard (Aetobatus narinari) et le requin baleine (Rhinocodon typus) (entre 30 et 45 observations). Pour rappel ces informations sont issues de recensement auprès des acteurs de la mer (plongeurs, pêcheurs, chasseurs…), de recherches dans la littérature et sur le net. Il ne s’agit pas de données récoltées avec un protocole bien précis et avec un effort d’échantillonnage mesurable. Par conséquent, ces données sont présentées à titre indicatif. Elles présentent la répartition des espèces dans les observations et non l’abondance des espèces dans les eaux martiniquaises.

Les grands planctonophages tels que le requin baleine (Rhinocodon typus) et les raies manta (Mobulidae) sont des espèces observées plus fréquemment que ce qu’on aurait pu imaginer. En effet, ces espèces sont classées respectivement aux 8ème et 13ème rangs parmi les espèces les plus observées en Martinique.

Figure 13 : Une raie manta géante, Mobula birostris Crédit photo : Franck Mazéas

27 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Galeus antillensis Squalus cubensis Heptranchias perlo Tetronarce occidentalis/Torpedo nobiliana Rhinoptera bonasus, Rhinoptera quadriloba Myliobatis fremenvillei Pteroplatytrygon violacea, Dasyatis violacea Mustelus canis Carcharhinus signatus Carcharhinus plumbeus Etmopterus virens Dalatias licha Centrophorus granulosus Hexanchus nakamurai Odontaspis ferox Rhizoprionodon porosus Carcharhinus limbatus Carcharhinus falciformis Carcharhinus perezi Carcharhias taurus Narcinidae Carcharhinus sp Carcharhinus acronotus Scyliorhinus boa Negaprion brevirostris Mobulidae Carcharhinus leucas Alopidae Hexanchus griseus Prionace glauca Rhinocodon typus Aetobatus narinari Galeocerdo cuvier Carcharhinus longimanus Dasiatidae Isurus oxyrinchus Sphyrnidae Ginglymostoma cirratum 0 10 20 30 40 50 60 70

Date indéterminé Avant 2010 Après 2010

Figure 14 : Nombre d’observations recueillies par taxon.

Figure 7

28 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 2.3. Répartition Pour des raisons similaires à celles présentées dans le paragraphe précédent, les informations sur la répartition sont présentées à titre indicatif. Il est important de rappeler qu’il s’agit de secteurs de tailles différentes. De plus, les activités (pêche, plongée…) sont plus ou moins développées en fonction des secteurs. Par conséquent les probabilités d’obtenir des observations sont plus importantes sur des secteurs accueillant beaucoup d’activités. Les informations présentées correspondent donc à la répartition des observations recensées et non la répartition des espèces dans les eaux martiniquaises. Par ailleurs, seules les observations pour lesquelles les données permettaient d’identifier la zone où l’ a été observé ont été utilisées (soit un total de 474 observations).

2.3.1. Répartition des observations en fonction des secteurs Pour l’analyse de la répartition des observations il a été décidé de classer les espèces en trois catégories (voir annexe 5) : - les espèces côtières : espèces qui utilisent principalement les zones près des côtes ; - les espèces pélagiques et/ou migratrices : espèces qui utilisent principalement, ou de manière régulière, les zones situées au large des côtes ; - les espèces profondes : espèces qui utilisent principalement les habitats situés dans les eaux profondes ( > 100 m).

La figure 15 présente la répartition des observations recensées (voir tableau 1.a. et 1.b.). On observe une différence dans le nombre d’observations en fonction des secteurs. Les élasmobranches sont principalement observés dans le Sud Atlantique, qui abrite majoritairement des espèces côtières et pélagiques/migratrices, et le Nord Caraïbe avec des espèces principalement pélagiques/migratrices. Les observations par les plongeurs et apnéistes sont peu nombreuses et sont principalement réalisées dans le Canal de St Lucie.

Les observations d’espèces profondes sont réalisées essentiellement dans les secteurs de Fort de France et du Nord Caraïbe. Les observations d’espèces pélagiques sont principalement faites dans le Nord Caraïbe, le canal de Sainte Lucie et le Sud Atlantique. Enfin, les espèces côtières sont plus observées dans le Sud Atlantique.

29 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Figure 15 : Répartition des observations recensées. 30 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 2.3.2. Répartition des observations par espèce en fonction des secteurs Sur la figure 17 sont représentées les répartitions des espèces principales (soit plus de 15 observations relevées pour la même espèce) en fonction des secteurs. Le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) est l’espèce principalement observée sur l’ensemble des secteurs. Pour le secteur du Nord Caraïbe et du Sud Atlantique on note également un nombre important d’observations de requins marteaux (Sphyrnidae) et de requin mako (Isurus oxyrinchus). Ce dernier fait notamment parti des espèces les plus observées dans le Nord Atlantique, accompagné du requin tigre (Galeocerdo cuvier), et dans Fort de France accompagné des requins de la famille du requin griset (Hexanchidae).

A noter que les observations des grands planctonophages tels que le requin baleine (Rhinocodon typus) et les raies manta (Mobulidae) sont principalement faites dans les secteurs du Sud Atlantique, de Fort de France et de Sainte Lucie.

Figure 16 : Les espèces les plus observées en Martinique.

En haut, de gauche à droite : un requin nourrice (Ginglymostoma cirratum), photo de Franck Mazéas ; un requin marteau halicorne (Sphyrna lewini), photo de Franck Mazéas ; un requin mako (Isurus oxyrinchus), photo de Jidanchaomian/Flickr. En base, de gauche à droite : un requin tigre (Galeocerdo cuvier), photo de Kevin Bryant/Flickr ; un requin griset (Hexanchus griseus), photo de Egg11/Flickr ; une raie manta océanique (Mobula birostris), photo de Yuxuan Wang/Flickr ; un requin baleine (Rhinocodon typus), photo de Derek Keats/Flickr.

31 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - n = 49

n = 169

n = 149

n = 50

n = 112

Figure 17 : Répartition des observations pour les espèces principales.

32 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

FIN PRINT dans les Antilles françaises (Beaufort, 2017c)

Durant l’année 2016, l’association Kap Natirel a déployé le protocole Fin Print dans les eaux de la Martinique. Basé sur l’utilisation de caméras appâtées, le projet Global Fin Print est mis en place sur plus de 400 zones récifales réparties dans les Océans Pacifique, Atlantique et Indien. C’est le 1er suivi normalisé à l'échelle mondiale sur la diversité et l’abondance des élasmobranches sur les plateaux continentaux et insulaires du monde. L’utilisation d’une méthode unique et standardisée a pour objectif de permettre la comparaison des données entre les différents sites.

Cet effort à grande échelle a pour but de combler les lacunes dans les connaissances sur l’abondance des élasmobranches, l’utilisation de l'habitat par ces espèces et les impacts humains. L’objectif principal étant d’améliorer la gestion et les efforts de conservation pour les élasmobranches. Le laboratoire du Dr Mike Heithaus, de la Florida International University (FIU), a chargé l’association Kap Natirel d’échantillonner les récifs de la Guadeloupe et de la Martinique.

Avec l’appui de la DEAL Martinique et d’apnéistes bénévoles, l’association a installé des caméras sur 147 positions avec une durée totale de près de 320 heures d’enregistrement. Deux zones ont été prospectées : la barrière récifale en façade atlantique et la face sud de l’ile (figure 18).

La 1ère analyse, réalisée par Kap Natirel, a mis en évidence une faible présence d’élasmobranches sur les images avec seulement 18% d’enregistrements considérés comme « positif » à la présence de requin et de raie (observation d’au moins 1 élasmobranche sur toute la durée de l’enregistrement), voir la figure 19. La majeure partie des observations concernent les raies pastenagues (famille des Daysatidae). Au total, 3 espèces ont été recensées durant l’étude.

Sur St Barthélemy, un suivi similaire a été réalisé par Kap Natirel, en collaboration avec l’ATE. Les résultats montrent des enregistrements positifs sur plus de 90 % et la présence d’au moins 8 espèces différentes (Beaufort, 2017b). Une comparaison avec d’autres zones du monde sera prochainement réalisée par la FIU.

1% 16% 1% Raie pastenague Raie léopard

Requin nourrice

RAS

82%

Google earth Google ©

Figure 18 : Répartition des caméras pour Figure 19 : Répartition des observations d’élasmobranches dans le projet Fin Print en Martinique. le cadre du projet Fin Print.

33 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 2.4. Sites à fonctionnalités particulières Les sites à fonctionnalités particulières sont des sites qui possèdent un rôle important pour une ou plusieurs parties du cycle de vie d’une espèce. Par exemple, pour les requins, les zones de reproduction et les zones de nurseries sont considérées comme des sites à fonctionnalités particulières. Ces sites possèdent donc une importance majeure pour la survie de l’espèce. Leur dégradation peut entrainer un dérèglement du cycle de vie de l’espèce concernée et par conséquent augmenter les risques de diminution de la population. De plus ces sites sont généralement des zones d’agrégations : plusieurs individus de la même espèce se regroupent. Par conséquent, certaines activités humaines (telle que la pêche) sur ces sites peuvent entrainer des conséquences catastrophiques sur la population concernée.

Les informations disponibles à ce jour n’ont pas permis d’identifier avec certitude des sites à fonctionnalités particulières dans les eaux martiniquaises. Néanmoins, des indices laissent supposer la présence de zones de nurseries7 dans le secteur du François. En effet, en 2010 la gendarmerie a observé depuis un hélicoptère plusieurs individus (4 à 5) de petite taille (< 80 cm). Les photos n’ont pas permis d’identifier l’espèce, néanmoins, les silhouettes correspondent à des requins de type « requiem » 8 . Par ailleurs, un chasseur sous-marin a fait part d’observations occasionnelles de requins requiem de petite taille dans le secteur du François, et plus particulièrement vers la Caye Pinsonnelle. Enfin, un jeune requin nez-noir (Carcharhinus acronotus), pêché dans le lagon du François en 2015, a été naturalisé pour être exposé dans la collection du musée du Père Pinchon. Figure 20 : Observation de requins dans le lagon du François depuis un hélicoptère. Crédit photo : Ccil.B Par ailleurs, d’après les recensements, plusieurs observations de requins marteau (Sphyrnidae) ont été recensées dans le secteur du rocher du Diamant (au sud de l’ile). Parmi les individus observés, des mâles immatures et des femelles gestantes de requin marteau halicorne (Sphyrna lewini). A ce jour, aucun regroupement de requins marteau n’a été observé en Martinique.

7 Une nurserie est une zone relativement restreinte utilisée par les animaux lors des premières années de leurs vies. 8 Requins de la famille des Carcharhinidae.

34 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - En parallèle, il a été possible d’établir, pour chaque espèce présente dans les eaux martiniquaises, les classes d’âge via les informations sur la taille des individus observés.

Trois catégories sont utilisées : - juvénile (nouveau-né, jeune de l’année), - sub-adulte (individu de taille supérieure à un juvénile mais non mature sexuellement), - adulte (individu de taille supérieure à un juvénile et mature sexuellement). Les tailles correspondantes à chacune de ces catégories varient en fonction des espèces. Elles ont été obtenues sur les sites internet de Fish Base (http://www.fishbase.org/) et de l’UICN (http://www.iucnredlist.org/).

35 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Tableau 2 : Stade(s) du cycle de vie observé(s) dans les eaux martiniquaises.« x » : présence ; « - » : aucune observation recensée ; « * » : présence de femelles gestantes

Famille Nom scientifique Nom vernaculaire Juvénile Sub-adulte Adulte (*) Ordre Bathytoshia centroura, Dasyatis centroura Raie pastenague épineuse - - - Hypanus americanus, Dasyatis americana Raie pastenague américaine - x x Dasyatidae Hypanus say, Dasyatis say Raie nez émoussée - - - Pteroplatytrygon violacea, Dasyatis violacea Raie pastenague violette - - - Dasiatidae sp. - - - Myliobatis fremenvillei Aigle de mer taureau - - - Myliobatidae Aetobatus narinari Raie léopard, raie aigle Myliobatiformes - x x Mobulidae sp - - - Mobulidae Mobula birostris Raie manta - x x Rhinopteridae. Rhinoptera bonasus, Rhinoptera quadriloba Mourine Américaine - - - Narcine brasilensis Raie électrique brésilienne - x x Narcinidae Narcine bancroftii Torpille de Bancroft - - - Narcinidae sp - - - Torpedinidae Tetronarce occidentalis ? Torpedo nobiliana, Tetronarce nobiliana Torpille noire

Torpediniformes - - -

Heptranchias perlo Requin perlon - - x Hexanchidae Hexanchus griseus Requin griset - x x Hexanchus nakamurai Requin vache Hexanchiformes x x x Centrophoridae Centrophorus granulosus Aiguillat gros yeux x x x Dalatidae Dalatias licha Liche - - - Etmopteridae Etmopterus virens Requin lanterne - x x Squaliformes Squalidae Squalus cubensis Aiguillat cubain - - x

Ginglymostomatidae Ginglymostoma cirratum Requin nourrice, vache de mer, requin dormeur - x x

Rhincontidae Rhinocodon typus Requin baleine - x x Orectolobiformes Alopias superciliosus Requin renard à gros yeux - - x Alopiidae Alopias sp - - - Lamnidae Isurus oxyrinchus Requin mako, taupe bleu - x x Carcharhias taurus Requin taureau - - x Lamniformes Odontaspididae Odontaspis ferox Requin féroce - x - Carcharhinus acronotus Requin nez noir x x x Carcharhinus falciformis Requin soyeux - x Carcharhinus leucas Requin bouledogue - x x Carcharhinus limbatus Requin bordé - - - Carcharhinus longimanus Requin longimane, pointe blanche du large, requin océanique x x x Carcharhinus perezi Requin gris des Caraïbes - x - Carcharhinidae Carcharhinus plumbeus Requin d'estuaire - - x Carcharhinus signatus Requin sombre - - x Galeocerdo cuvier Requin tigre - x x Negaprion brevirostris Requin citron - x x Prionace glauca Requin peau bleu - x x Rhizoprionodon porosus Aiguille antillais - - x Carcharhiniformes Carcharhinus sp - - - Scyliorhinus boa Roussette boa - - - Scyliorhinidae Galeus antillensis - - - Sphyrna lewini Requin marteau halicorne - - x* Sphyrna mokarran Grand requin marteau - x x Sphyrnidae Sphyrna tudes Requin marteau à petits yeux - - - Sphyrna zygaena Requin marteau commun - - - Sphyrna sp - - - Triakidae Mustelus canis Emissolle lisse - x x

36 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 2.5. Conclusion de la sous-partie Parler de requins et de raies en Martinique n’est pas monnaie courante. Ceci est probablement lié au côté tabou afin d’éviter d’aggraver une possible psychose dans la population (liée à la diffusion de film à sensation sur ces animaux) ou bien à l’idée qu’il n’y a pas ou très peu de requins et de raies dans les eaux martiniquaises.

Ce premier recensement des observations de requins et de raies a mis en évidence la présence d’une grande diversité spécifique. En effet ce sont 43 espèces de chondrichtyens, appartenant à 20 familles différentes et 7 ordres, qui ont été identifiées comme ayant été observées dans les eaux territoriales (49 espèces recensées sur l’ensemble des Antilles françaises, comm. pers. Beaufort). Ces espèces sont exclusivement composées de requins et de raies : aucune chimère n’a été recensée. Cette diversité présente cependant une double fragilité : - Parmi les espèces identifiées, 35% sont inscrites sur la liste rouge des espèces menacées d’extinction (d’après l’UICN), et 33% sont quasi menacées. D’après cette liste rouge, seul 14% des espèces seraient peu concernées par le risque d’extinction. - Le faible nombre d’observations recensées de chondrichtyens laisse supposer une abondance potentiellement faible pour les différentes espèces. Ce constat est nettement partagé par les clubs de plongée (voir partie 4.2. de ce rapport) avec, en moyenne, 1 observation de requin toutes les 1500 plongées (en comparaison, sur d’autres îles des Antilles françaises, comme St Barthélemy, on suppose qu’au moins un requin est observé toutes les 10 plongées, une étude sera réalisée en 2017 pour obtenir des résultats plus précis, comm. pers. O.Beaufort). D’après la littérature et les témoignages d’anciens pêcheurs, les observations de requins et de raies étaient plus fréquentes il y a plus de 20 ans. Notamment concernant les requins marteau (Sphyrnidae), le requin mako (Isurus oxyrinchus) et le requin peau bleu (Prionace glauca). Cette faible fréquence d’observations et la potentielle diminution des populations de requins et de raies en Martinique pourraient s’expliquer par une surexploitation des ressources marines (locales et régionales).

Concernant la répartition des observations, sur la base des témoignages obtenus, le secteur du Sud Atlantique et celui du Nord Caraïbe présentent le plus d’observations. Cependant il est important de rappeler que la pression d’observation n’est pas forcément la même sur les différents secteurs de l’île.

De manière globale, le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum), les requins marteau (Sphyrnidae) et le requin mako (Isurus oxyrinchus) sont les taxons les plus fréquents parmi les observations relevées. On note aussi des grands planctonophages tels que le requin baleine (Rhinocodon typus) et les raies manta (Mobulidae) parmi les 15 espèces les plus observées en Martinique.

Dans les Antilles françaises, plusieurs zones de nurseries ont été identifiées en Guadeloupe, à St Martin et à St Barthélemy et cela pour plusieurs espèces (Carcharhinus limbatus, Carcharhinus acronotus, Carcharhinus perezi, Negaprion brevirostris, Ginglymostoma

37 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - cirratum) (O.Beaufort, 2016). Des sites de repos pour les femelles gestantes ont notamment été découverts sur St Martin (O.Beaufort et al, 2016). L’identification de ces zones à fonctionnalités particulières est un enjeu important pour déterminer les zones prioritaires pour la conservation des élasmobranches. Malheureusement, cette première étude n’a pas permis d’identifier clairement la présence de zones similaires en Martinique. On note tout de même une zone potentielle d’accueil de juvéniles de requins (Carcharhiniformes) dans la zone récifale de la commune du François et des observations occasionnelles de requins marteau dans le secteur du canal de Sainte Luce.

38 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

: Colombia travel/ Flikr.com :Colombiatravel/

Crédit photo Crédit

Cédric Millon Cédric

©

3. LA PECHE DE CHONDRICHTYENS

39 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Probablement lié au caractère artisanal de la pêche locale, à l’absence d’une filière structurée et spécialisée de pêche sur ces animaux ainsi qu’à un tonnage relativement faible par rapport aux autres espèces pêchées sur l’île (1 à 3% du poids total en 2009 et 2010, Reynal et al, 2013), la pêche des chondrichtyens est considérée comme quasi inexistante. Pourtant, d’après la littérature, la pêche accidentelle/accessoire/opportuniste est une menace majeure pour les populations de chondrichtyens (Molina et Cook, 2012). De plus, le manque de données sur les pêcheries artisanales est un frein à la mise en place de mesures de gestion adaptées notamment lié à l’importance de cette pêcherie : la pêche artisanale représenterait plus de 90% des pêcheurs dans le monde (Béné et al, 2007).

Par ailleurs, la pêche locale permet de répondre en partie à la demande des consommateurs locaux, ce qui met en évidence l’importance des mesures de gestion durable. De plus, de par les engagements de la France en faveur de la conservation chondrichtyens et à la localisation de la Martinique (qui est située sur un des 15 spots ayant un enjeu majeur pour la conservation des élasmobranches (Dulvy et al. 2014)), l’étude des chondrichtyens et plus particulièrement sur l’impact des pêcheries locales sur ses populations s’avère essentielle.

Cette partie de l’étude est divisée en deux sections : - Section 1 : Synthèse des données disponibles sur la pêche aux chondrichtyens en Martinique (hors enquête) - Section 2 : Recueil de données auprès des marins pêcheurs de la Martinique (enquêtes réalisées d’avril à juillet 2016)

Bien qu’étant considérés depuis des années comme des prises accessoires, les requins et les raies étaient évaluées à plus 75 tonnes dans les débarquements à Fort de France en 1954 et 1955 (Morice, 1958).

40 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - SECTION 1 : Synthèse des données disponibles sur la pêche aux chondrichtyens en Martinique

3.1. Suivi des débarquements de la pêche Document de référence Reynal Lionel, Demaneche Sebastien, Guyader Olivier, Bertrand Jacques, Berthou Patrick, Dromer Clement, Maros Emmanuel, Bruneau Marie, Bellanger Manuel, Merrien Claude, Guegan Fabrice, Lespagnol Patrick, Pitel-Roudaut Mathilde, Jezequel Michele, Leblond Emilie, Daures Fabienne (2013). Projet pilote du Système d’Informations Halieutiques (SIH) Martinique (2007-2010). Premières données sur la pêche en Martinique (2009-2010). http://archimer.ifremer.fr/doc/00156/26762/, 176p.

Méthode Le Système d’Informations Halieutiques (SIH) est mis en place en Martinique depuis 2009 par l’IFREMER. Il a pour objectif d’améliorer les connaissances sur les ressources halieutiques, d’évaluer et de mettre en valeur les ressources des océans et permettre leur exploitation durable. L’évaluation des débarquements est réalisée via des enquêtes téléphoniques et des relevés aux débarquements des pêcheurs.

Espèces Les données relevées sur les chondrichtyens par le SIH sont classées a un faible niveau taxonomique : « requin » ou « raie ». Ceci est lié en partie à la complexité de l’identification spécifique pouvant entrainer de nombreuses erreurs lors d’enquêtes téléphoniques et à la faible occurrence des observations lors des comptages aux débarquements par les enquêteurs.

Informations importantes Les données relevées en 2009 et 2010 mettent en évidence une part importante de chondrichtyens dans les captures de certains engins de pêche : - pour la palangre de fond les chondrichtyens représentent 60,8% des captures totales en 2009 (54% de requin et 6,8% de raie) et 69,4 % des captures totales en 2010 (47,3% de requin et 22,1% de raie), - pour le filet trémail les raies représentent 14,8 % des captures totales en 2009 et 33,4 % en 2010.

Dans les rapports disponibles en ligne sur le site de l’IFREMER pour les années postérieures à 2010, les requins et les raies ayant été assimilés à des espèces NI il n’a pas été possible d’obtenir des données sur les quantités prélevées.

De manière générale, la comparaison des données du SIH par rapport aux données de l’enquête réalisée pour cette étude (voir Section 2) est difficile car les unités de mesure sont différentes : en tonnes pour le SIH, en nombre d’individus pour les enquêtes. De plus, n’ayant que très peu d’informations sur les tailles des individus, il est quasiment impossible de faire des conversions nombre-poids adéquates. Si des comptages aux débarquements sont mis en place par la suite, il sera important d’identifier l’espèce et de relever le nombre d’individus et la taille de chacun. Ces informations permettront, à l’aide d’abaque, de déterminer des quantités en tonnes qui pourront alors être comparées aux valeurs du SIH.

41 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Figure 21 : Répartition des captures pour la palangre de fond (à gauche) et le filet trémail (à droite). Source : Reynal et al, 2013

3.2. Etude en milieu profond (100-300 m) Etude expérimentale sur la pêche profonde au trémail en Martinique. Documents de référence Guillou, 1989. A. (1989). Ressources démersales du plateau insulaire de la Martinique. IDRV n°89.037.IFREMER, Laboratoire Ressources Halieutiques, Martinique, FR. 121p. ; Battaglia, A., Guillou, A., Lagin, P., Reynal, L. (1989). Développement de la pêche martiniquaise - Mise en valeur des ressources démersales : des bancs du nord de la Guadeloupe, entre 100 et 300 m de profondeur autour de la Martinique. REGION MARTINIQUE Contrat de plan Etat / Région 1984 – 1988.

Méthode Une étude expérimentale a été réalisée dans les profondeurs de la Martinique de novembre 1986 à mars 1988 via le déploiement de filets trémails à des profondeurs comprises entre 100 et 300 m. Cette étude avait pour objectif d’évaluer le rendement de la pêche profonde. Le rendement est ici considéré comme étant la quantité (kg) du taxon considéré sur 100 m de filet. Pour cela des filets trémails ont été déployés une vingtaine d’heures à diverses profondeurs et sur l’ensemble de la Martinique.

Espèces Dans les captures, 16 espèces ont été observées (14 requins, 2 raies), appartenant à 8 familles et à 4 ordres (voir le tableau 3). La liste des espèces et la taille des individus capturés sont disponibles dans le rapport d’étude.

42 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Tableau 3 : Liste des familles observées.

Ordre Famille Nombre d'espèces Scyliorhinidae 1 Triakidae 1 Carcharhiniformes Carcharhinidae 3 Sphyrnidae 2 Lamniformes Ondontaspididae 1 Squaliformes Centrophoridae 3

Hexanchiformes Hexanchidae 3

Torpediniformes Torpedinidae 2

Informations importantes Les résultats mettent en évidence une présence importante de requins dans les captures (pouvant dépasser 75% du poids total des captures). La répartition des captures varie en fonction de la profondeur, de la période (saison sèche, saison humide) et des secteurs de la Martinique (figures 22, 23 et 24).

L’analyse par strates de profondeur met en évidence un gradient de diversité. - entre 100 et 150 m : 2 familles avec une dominance des Sphyrnidae (>45 %) - entre 150 et 200 m : 4 familles avec une dominance des Sphyrnidae (> 50 %) - entre 200 et 250 m : 7 familles avec une co-dominance des Hexanchidae et des Odontaspididae - entre 250 à 300 m : 5 familles avec une co-dominance des Centrophoridae et des Scyliorhinidae Figure 22 : Rendements comparés des principales L’analyse en fonction de la période de l’année (figure espèces par tranche bathymétrique de 50 m à 300 m. Source : Guillou et al, 1989. 23) montre une proportion de capture de requins similaire en saison sèche et en saison humide (plus de 60 % des captures). En revanche on observe une différence dans les proportions au niveau de la famille. En saison sèche, les requins sont dominés par des Sphyrnidae avec près de 35 % du poids total des captures. En saison humide on note une co-dominance des Sphyrnidae, Odontaspidae, Squalidae et Hexanchidae.

L’analyse en fonction des secteurs montre une proportion de requin plus importante dans les captures réalisées dans le Sud Atlantique (> 70% des captures totales du secteur) ainsi que celles réalisées dans le Canal de St Lucie (> 60 % des Figure 23 : Proportions relativisées des rendements captures totales du secteur). Concernant la répartition en des principales familles en fonction de la saison. fonction des familles, la dominance des familles varie en Source : Guillou et al, 1989. fonction des secteurs pour les profondeurs comprises entre 100 et 200m (voir tableau 4). En revanche,

43 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - entre 200 et 300 m, la famille les Sphyrnidae dominent dans tous les secteurs à l’exception du Canal de St Lucie qui est principalement dominé par les Hexanchidae et les Triakidae à ces profondeurs.

Des préconisations concluent l'étude pour permettre une exploitation durable de la ressource des profondeurs, notamment lié à la présence importante de requins dans les captures et à leur fragilité face à l’exploitation. On note la mise en place d’un suivi rigoureux de celle-ci (via le recueil de données de captures et d’effort de pêche) et l’acquisition de connaissances sur la biologie des espèces ciblés (croissance, reproduction, migration, mortalité, éthologie).

Les résultats montrent un nombre élevé de captures d’élasmobranches dans les profondeurs de 100 à 300 m avec une forte diversité spécifique (8 familles représentées). On observe une différence dans la répartition des familles en fonction de la profondeur, du secteur et de la saison. Certains taxons sont plus présents dans les captures tels que le requin marteau halicorne (Sphyrna lewini), une espèce en danger d’extinction d’après l’UICN. Il est à noter que ces résultats sont portés sur le poids (kg) et non sur le nombre d’individu. Ainsi pour un même poids, une espèce dont les tailles maximales sont grandes sera représentée par moins d'individus (comme les Sphyrnidae) par rapport à une espèce de petite taille (comme les Scyliorhinidae).

Tableau 4 : Liste des familles dominantes par secteur et en fonction des strates bathymétrique.

Nombre total Secteur Strate (m) Famille(s) dominante (s) de familles Nord Atlantique 100 - 200 Hexanchidae, Ondontaspididae 6 200 - 300 Sphyrnidae 3 Sud Atlantique 100 - 200 Hexanchidae, Ondontaspididae 7 200 - 300 Sphyrnidae 3 Centrophoridae, Canal de St Lucie 100 - 200 5 Scyliorhinidae 200 - 300 Hexanchidae, Triakidae 2 Nord Caraibe 100 - 200 Sphyrnidae, Ondontaspididae 5 200 - 300 Sphyrnidae 1 Banc d’Amérique 100 - 200 Centrophoridae 1 200 - 300 Sphyrnidae, Carcharhinidae 4

Figure 24 : Rendements comparés des principales espèces par secteur. Source : Guillou et al, 1989.

44 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Figure 25 : Rendements comparés des principales espèces par secteur en fonction de la bathymétrie. A gauche : de 200 à 300 m, à droite de 100 à 200 m. Source : Guillou et al, 1989.

3.3. Etude en milieu côtier (profondeurs < 50 m) Document de référence Farrugio, H., Saint Felix, C. (1975) Etude des fonds de pêche du littoral atlantique Martiniquais. S.T.P.M. Science et pêche, Bulletin d'information et de documentation de l'institut scientifiques et technique des pêches maritimes, Octobre 1975, N°251.

Méthode Une étude expérimentale a été réalisée en Martinique d'octobre 1974 au mois de juillet 1975 via le déploiement de filets trémails sur 40 stations à des profondeurs comprises entre 10 et 50 m. Les filets étaient calés à la tombée du jour et relevés le lendemain matin à l'aube. L’objectif de cette étude était d'apporter des informations d’ordre systématique, biométrique et bioécologique sur les poissons et les invertébrés du milieu.

Espèces Sur l’ensemble des captures, 4 familles de chondrichtyens ont été observées (2 familles de raie, 2 familles de requins) : Dasyatidae (raies pastenagues) Torpedinidae (raies torpilles) Orectilobidae (requin nourrice) Sphyrnidae (requins marteaux)

45 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Informations importantes Dans cette étude les espèces « primaires », comme les chirurgiens (Acanthurus bahianus et A. coeruleus) sont définies comme les espèces possèdent une fréquence supérieure ou égale à 50%, les espèces secondaires sont définies comme les espèces possèdent une fréquence comprise entre 16 % et 49%. La raie pastenague américaine (Dasyatis americana, nommée depuis octobre 2016 Hapanus americanus, famille des Dasiatidae) est la seule espèce d’élasmobranche identifiée dans cette étude. Avec une fréquence de 36 % (c’est-à-dire que l’espèce a été pêchée sur 36 % des stations), elle est considérée comme une espèce « secondaire ». Concernant la répartition par rapport aux autres espèces, en termes d’abondance numérique (nombre total d’individus capturés) la raie pastenague représente moins de 10 % des espèces « secondaires ». En termes d’abondance pondérale (poids total de l’ensemble des individus capturés) la raie pastenague représente plus de 30 % des espèces « secondaires ».

Figure 26 : Abondance numérique relative et abondance pondérale relative des espèces principales et secondaires. Source : Farrugio et al, 1975

3.4. Etude en milieu pélagique Document de référence Taquet Marc (2000). Grands pélagiques et Dispositifs de Concentration de Poissons (DCP) en Martinique (Antilles françaises). http://archimer.ifremer.fr/doc/00128/23907/

Méthode Une étude expérimentale sur les grands poissons pélagiques a été réalisée en Martinique d’octobre 1985 à octobre 1997 via le déploiement de différents engins de pêche (palangre dérivante, ligne en dérive et filet maillant à poissons volants) et à des profondeurs comprises entre 0 et 600 m. Des campagnes de pêches expérimentales, d’une durée de 7 jours chacune, ont été réalisées mensuellement pendant les 2 années de terrain. L’objectif de cette étude était d'accompagner le redéploiement de l'activité de la flottille martiniquaise de proximité vers l'exploitation des ressources en grands poissons.

46 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Espèces Durant l’étude, 9 requins et 58 raies ont été capturés, appartenant à 5 espèces, 3 familles et 3 ordres (tableau 5).

Tableau 5 : Répartition des individus capturés.

Ordre Famille Nom scientifique Nombre d'individus capturés Carcharhiniformes Carcharhinidae Carcharhinus signatus 1 Carcharhinus longimanus 3 Lamniformes Laminidae Prionace glauca 4 Isurus oxyrinchus 1 Rajiformes Dasyatidae Dasyatis violacea 58

Informations importantes Les résultats obtenus ont mis en évidence un faible taux de capture de requins malgré une technique de pêche qui pourrait être considérée comme adaptée à la capture de ces animaux. En effet, la palangre dérivante a été utilisée de jour et de nuit avec au total, plus de27 000 hameçons déployés durant l’étude. Les auteurs en ont conclu que les requins pélagiques sont peu abondants dans les eaux martiniquaises. Et par conséquent les potentialités de développement de la pêche de requins pélagiques semblent assez limitées, d’autant que la chair des requins serait de qualité variable suivant les espèces.

Figure 27 : Un requin longimane. Crédit photo : Markus Diver/Flikr

47 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - SECTION 2 : Recueil de données auprès des marins pêcheurs de la Martinique

3.1. Informations générales

D’après l’enquête, 90% des pêcheurs ont déjà capturé des chondrichtyens (figure 28). Il s’agit principalement de prises accessoires : seulement 7 % des pêcheurs ciblent les requins et les raies. L’enquête a notamment permis de recueillir le ressenti des pêcheurs vis-à-vis de l’évolution des populations de chondrichtyens sur les 20 dernières années. D’après les résultats obtenus (figure 29), plus de 87% des pêcheurs estiment que les populations de requins et de raies ont diminué. Aucun pêcheur n’a parlé d’augmentation des populations.

ND 4% 9%

Aucune Moins capture Plus 8% 90% 83% Prise 2% Egale 7% accessoire Ne sait pas Prise ciblée 87%

Figure 28 : Répartition du nombre de pêcheurs de Figure 29 : Ressenti des pêcheurs quant à l’évolution temporelle chondrichtyens des populations de requins et de raies en Martinique

3.2. Engins de pêche et techniques

3.2.1. Fréquence des captures

Les engins de pêches utilisés ont été regroupés en 11 catégories (définies par l’IFREMER, Reynal et al, 2013). A noter que chaque engin de pêche n’est pas représenté par le même nombre de pêcheurs (voir partie 1.2.1.). Ainsi la senne de plage, la plongée en apnée et le filet maillant dérivant sont représentés par un nombre de pêcheurs inférieur à celui des casiers, de la ligne de traine et le la ligne/palangre sur DCP. D’après le rapport de l’IFREMER (Reynal et al, 2013) ce sont ces mêmes engins qui sont principalement utilisés.

La figure 30 présente le nombre de captures d’élasmobranches sur les 12 derniers mois en fonction de l’engin de pêche. Pour chaque engin de pêche le nombre de pêcheurs utilisant l’engin est indiqué dans le titre (n=X). Un pêcheur peut utiliser plusieurs engins de pêche.

48 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - L’estimation du nombre annuel de captures est organisée en 4 catégories : - « très rare » : 0 chondrichtyen - « rare » : 1-2 chondrichtyens - « peu fréquent » : 3-5 chondrichtyens - « occasionnel » : 6-9 chondrichtyens - « fréquent » : > 10 chondrichtyens

Globalement, les élasmobranches sont pêchés par les 11 catégories d’engins. Plus de 90% des pêcheurs utilisant les lignes et palangres sur DCP, la palangre de fond et la ligne trainante, ont déjà pêché des élasmobranches au cours de leur carrière.

D’après les résultats, certains engins de pêche ont permis à chaque pêcheur qui les utilise de capturer au moins un élasmobranche durant les 12 derniers mois (cas de la ligne à main et du filet trémail).

La palangre de fond semble entrainer des prises régulières de requins et de raies. Parmi les personnes qui utilisent ce type d’engin, 20% pêchent fréquemment des élasmobranches, 20% en pêchent occasionnellement, 33 % en pêchent peu fréquemment, 20 % en pêchent rarement et près de 5 % n’ont pas pêché d’élasmobranches durant cette dernière année.

Le filet trémail entrainerait des captures occasionnelles pour près de 25% des pêcheurs, des captures peu fréquentes pour plus de 45% des pêcheurs et des captures rares pour près de 30% des pêcheurs.

La ligne trainante (pêche « à Miquelon ») présente une variabilité dans la fréquence des captures avec des captures occasionnelles pour plus de 10 % des pêcheurs, des captures peu fréquentes pour plus de 15% des pêcheurs et des captures rares pour près de 63% des pêcheurs.

Les lignes et palangres sur DCP entraineraient des captures fréquentes pour 2 % des pêcheurs, des captures occasionnelles pour près de 4 % des pêcheurs, des captures peu fréquentes pour plus de 17 % des pêcheurs et des captures rares pour près de 72% des pêcheurs.

Le filet maillant fixe entrainerait des captures fréquentes pour plus de 6% des pêcheurs, des captures occasionnelles pour près de 18% des pêcheurs, des captures peu fréquentes pour plus de 18% des pêcheurs et des captures rares pour près de 37% des pêcheurs

Le filet maillant encerclant entrainerait des captures peu fréquentes pour près de 4 % des pêcheurs et des captures rares pour près de 48 % des pêcheurs.

La ligne à main (ou avec canne) entrainerait des captures peu fréquentes pour 25% des pêcheurs et des captures rares pour 75% des pêcheurs.

Le casier entrainerait des captures rares pour près de 70% des pêcheurs.

49 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Le filet maillant dérivant entrainerait des captures rares pour 50% des pêcheurs.

La senne de plage entrainerait des captures fréquentes pour 25% des pêcheurs et des captures rares pour 25% des pêcheurs.

La plongée en apnée entrainerait des captures peu fréquentes pour 25 % des pêcheurs. La pêche d’élasmobranche dans le cadre de cette pratique est exclusivement sélective.

Palangre de fond (n=16) Filet maillant dérivant (n=7) Ligne à main (ou avec canne) (n=4) Filet trémail (n=13) 0 Plongée en apnée (n=3) 1 et 2 Filet maillant encerclant (n=19) 3 à 5 Senne de plage (n=2) Filet maillant fixe (n=16) 6 à 9 Lignes trainante (pêche « à Miquelon ») (n=16) plus de 10 DCP lignes et palangres (n=54) Casier (n=52) Engin de pêche 0% 20% 40% 60% 80% 100% Fréquence (%) Figure 30 : Répartition des captures de chondrichtyens par engin de pêche.

.

Le requin nourrice est aussi appelé « vache de mer ». Autrefois, les pêcheurs attachaient une corde autour de la queue du requin et l’autre extrémité était rattachée à un piquet près de la plage. L’animal était ensuite laissé dans la mer, proche du rivage, le temps de grossir puis il était hissé à terre pour être consommé (d’après des récits d’anciens pêcheurs).

Figure 31 : Illustration d’une requin nourrice, où « vache de mer ». Réalisation : Karl Questel

50 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 3.2.2. Abondance et répartition des captures

Lié à des possibilités élevées d’erreur dans l’identification de certaines espèces, il a été décidé de travailler à différents niveaux taxonomiques. Ainsi, pour les espèces qui sont considérées comme complexes à identifier, le niveau taxonomique sera plus faible (genre, famille, ou ordre) comparé à celui des espèces considérées comme suffisamment reconnaissables (espèce). Les différents taxons rencontrés et leur niveau taxonomique sont indiqués dans le tableau 6. Les taxons qui seront utilisés pour la suite de ce rapport sont en gras.

Tableau 6 : Liste des taxons identifiés. Ordre Famille Espèce(s) Rajiformes Myliobatidae Aetobatus narinari Rajiformes Dasyatidae Hypanus centroura, Hypanus americanus … Hexanchiformes Hexanchidae Hexanchus griseus*, Hexanchus nakamurai, Heptranchias perlo Squaliformes Squalidae, Centrophoridae, Dalidae, Dalatia licha, Cirrhigaleus asper, Squalus cubensis Etmopteridae, Somniosidae, Centrophorus granulosus* … Oxynotidae Orectolobiformes Ginglystomatidae Ginglymostoma cirratum Carcharhiniformes Carcharhinidae Galeocerdo cuvier Carcharhiniformes Carcharhinidae Carcharhinus longimanus* Carcharhiniformes Carcharhinidae Prionace glauca Carcharhiniformes Carcharhinidae Carcharhinus leucas, Carcharhinus acronotus, Negaprion brevirostris, Carcharhinus perezi, Carcharhinus falciformis*, Carcharhinus limbatus,Rhizoprionodon porosus … Carcharhiniformes Sphyrnidae Sphyrna lewini*, Sphyrna mokarran* … Carcharhiniformes Scyliorhinidae Scyliorhinus boa Lamniformes Lamnidae Isurus oxyrinchus Lamniformes Alopiidae Alopias superciliosus*, Alopias vulpinus* Lamniformes Odontaspidae Carcharhias taurus, Odontaspis ferox *espèces dont la pêche, la vente et le débarquement sont réglementés par un règlement européen (Beaufort, 2017).

Les différents taxons seront par la suite classés en fonction de leur groupe fonctionnel principal (voir tableau 7). Par exemple, dans cette étude, la famille des Dasyatidae sera considérée comme appartenant aux espèces néritiques peu migratrices. Néanmoins, il est important de rappeler que ce n’est pas une généralité, cette famille regroupe de nombreuses espèces aux comportements différents notamment des espèces pélagiques (telle que Pteroplatytrygon violacea). Pour les Carcharhinidae, cette famille présente aussi différents comportements, il a été décidé de les mettre dans un groupe unique à l’exception des taxons identifiés au niveau de l’espèce (tel que Carcharhinus longimanus).

51 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Tableau 7 : Composition des groupes fonctionnels. Groupe fonctionnel Taxon Aetobatus narinari Espèces néritiques peu Ginglymostoma cirratum migratrices (NPeu) Dasyatidae Galeocerdo cuvier Espèces néritiques migratrices Sphyrnidae (NMig) Odontaspidae Alopiidae

Espèces pélagiques Carcharhinus longimanus (Péla) Isurus oxyrinchus

Prionace glauca Figure 32 : Un requin taureau, Carcharias taurus, de la famille des Hexanchidae Odontaspidae. Espèces profondes Crédit photo : Klaus Stiefel/Flickr Scyliorhinus boa (Pr) Squaliformes Espèces mixtes (Mix) Carcharhinidae

3.2.2.1. Estimation de l’abondance des captures

La figure 33 représente le nombre de capture de chondrichtyen relevé sur les 12 mois précédant les enquêtes pour les 121 pêcheurs rencontrés. Les données sont issues des estimations et identifications spécifiques transmises par les pêcheurs rencontrés. Le nombre total de capture sur 1 an (noté NC1) est de 447 individus (128 raies et 319 requins) dont près de 170 individus appartenant à des espèces menacées d’extinction (soit près de 40 % des captures). Les taxons « principaux » (qui représentent au moins 10 % des captures) sont : - les raies pastenagues (Dasyatidae) qui représentent 17% des captures ; - le requin mako (Isurus oxyrinchus) avec 11% ; - la raie léopard (Aetobatus narinari) avec 11% ; - le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) avec 11% ; - les requins marteau (Sphyrnidae) avec 10%.

2% Taxon Figure 33 : Estimation du nombre total d’individus 3% 3% Aetobatus narinari capturés par les 121 pêcheurs sur les 12 mois Ginglymostoma cirratum précédant l’enquête. 5% 11% Dasyatidae Carcharhinidae *espèces inscrites sur la liste rouge des espèces menacées 11% 11% Galeocerdo cuvier d’extinction de l’UICN (ou famille comportant Sphyrnidae * majoritairement des espèces inscrites sur la liste) Odontaspidae * 7% Alopiidae * 3% 17% Carcharhinus longimanus * Isurus oxyrinchus * 1% 10% Prionace glauca * 8% Hexanchidae 8% Scyliorhinus boa Squaliformes

52 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Les 121 pêcheurs rencontrés, issus de navires de pêche différents, représentent 14,5 % du nombre de navires actifs à la pêche enregistrés au sein des affaires maritimes (831 navires actifs en 2013, source SIH). En partant de l’hypothèse que l’échantillonnage est représentatif de la population de pêcheurs en Martinique, une estimation du nombre annuel de captures de chondrichtyens sur la Martinique peut être faite par extrapolation.

La formule utilisée est la suivante : NCE1 = NC1 * fe

NCE1= nombre estimé de captures annuelles sur la Martinique NC1 = nombre de captures annuelles de l’échantillonnage

Nombre de navires de pêche actifs fe = facteur d’extrapolation = Nombre de navires de pêche échantillonnés

Dans le cas présent fe = 6,87 car le nombre de navires actifs à la pêche et déclaré en 2013 est de 831(source : SIH, IFREMER), le nombre de l’échantillonnage est de 121 (1 pêcheur rencontré représente 1 navire actif à la pêche).

Le tableau 8 présente les valeurs obtenues dans l’échantillon et les valeurs obtenues par extrapolation. D’après ces données, la Martinique prélèverait plus de 3 000 requins et raies chaque année dont près de 1 150 individus appartenant à des espèces menacées d’extinction (et dont la pêche, le débarquement et la vente sont réglementés pour certaines espèces, Beaufort, 2017).

Il est à noter que dans le cadre de cette extrapolation il est supposé que l’échantillon est représentatif de l’ensemble des marins pêcheurs de la Martinique, notamment au niveau de la répartition des engins de pêche et de la pression de pêche. D’après les données sur la flotte de pêche de la Martinique, les engins les plus utilisés sont le casier, la ligne de traine, la pêche sur DCP et le filet maillent fixe (source SIH, année 2013). Il s’agit des mêmes engins principalement utilisés dans l’échantillon de cette étude. On observe tout de même des différences avec, par exemple, un nombre de navires plus important pour le casier dans les données du SIH par rapport à l’échantillon. Ces différences peuvent biaiser l’extrapolation car la probabilité de capture de requins et de raies varie en fonction de l’engin de pêche utilisé (voir partie 3.2.1.)

53 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Tableau 8 : Nombre d’individus capturés par taxon dans l’échantillon et extrapolation. Taxon NC1a NCE1b

Aetobatus narinari 51 350 NPe Ginglymostoma cirratum 48 330 u Dasyatidae 77 529 Mix Carcharhinidae 37 254 Galeocerdo cuvier 37 254 NMig Sphyrnidae* 45 309 Odontaspidae * 6 41 Alopiidae* 14 96

Pél Carcharhinus longimanus* 30 206 a Isurus oxyrinchus * 51 350 Prionace glauca * 22 151 Hexanchidae 11 76 Pr Scyliorhinus boa 7 48 Squaliformes 11 76 Nombre total de captures 447 3070 Figure 34 : Un requin griset (Hexancheus a NC1 = nombre de captures annuelles de l’échantillonnage griseus), de la famille des Hexanchidae, pêché b NCE1= nombre estimé de captures annuelles sur la Martinique à Fond Layé.

Crédit photo : photo de couverture de France Antilles

3.2.2.2. Répartition des captures par taxon

Afin de limiter les biais liés à une estimation peu précise du nombre d’individus capturés par taxon, pour la suite de cette partie, il a été décidé de travailler en prenant comme base de référence le nombre de pêcheurs et non le nombre d’élasmobranches capturés. Ainsi, un pourcentage élevé pour un taxon donné signifie que le taxon est capturé par un nombre élevé de pêcheurs. Les informations qui seront présentées ne donneront donc pas d’estimation des quantités (en poids ou en nombre) prélevées par taxon mais donneront le nombre de pêcheurs pêchant ces taxons. La somme des pourcentages pourra donc être supérieure à 100.

Fp = la proportion de pêcheurs ayant capturé l'espèce au moins une fois au cours des 12 derniers mois (%)

La figure 35 présente l’indice Fp de chaque taxon. Le requin mako (Isurus oxyrinchus), avec un Fp = 38,8, est le requin pêché par le plus grand nombre de pêcheurs, suivi du requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) avec Fp = 33,9, le requin marteau (Sphyrnidae) avec Fp = 31,4% et le requin longimane (Carcharhinus longimanus ;Fp = 25,6). Il est important de rappeler que ces données sont représentatives de l’échantillonnage, soit 121 pêcheurs dont près de 40 % pratiquent le casier et/ou la pêche sur DCP.

54 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Squaliformes 9,1 Pr Scyliorhinus boa 5,8 Hexanchidae 9,1

Prionace glauca 18,2 Pél Isurus oxyrinchus 38,8 Carcharhinusa longimanus 25,6 Alopiidae 11,6

Odontaspidae 4,1 NMig Sphyrnidae 31,4 Galeocerdo cuvier 19,0

Mix Carcharhinidae 19,0

NPe Dasyatidae 19,8 Ginglymostomau cirratum 33,9 Aetobatus narinari 14,0 Taxon 0,0 10,0 20,0 30,0 40,0 50,0 60,0 70,0 80,0 90,0 100,0 Fréquence (%)

Figure 35 : Répartition relative du nombre de pêcheurs ayant pêché chaque taxon (indice Fp).

3.2.2.2. Répartition des captures par engin de pêche en fonction des taxons

Les figures ci-dessous représentent la répartition des espèces capturées par chaque engin de pêche. Pour chaque engin de pêche le nombre de pêcheurs utilisant l’engin est indiqué dans le titre (n=X). Un pêcheur peut capturer plusieurs espèces d’élasmobranches avec un même engin.

L’engin «DCP lignes et palangres » permet de capturer différentes espèces de requin et majoritairement des espèces pélagiques (figure 36). Les 5 taxons les plus rencontrés par les pêcheurs concernent une ou plusieurs espèces menacées d’extinction d’après l’UICN (espèces inscrites sur la liste rouge des espèces menacées) : le requin mako (Isurus oxyrinchus) avec 70,4 %, le requin longimane (Carcharhinus longimanus) avec 48,1%, le requin peau bleue (Prionace glauca) avec 29,6 %, les Alopiidae avec 16,7 % et les Sphyrnidae avec 11,1 %.

La ligne trainante (figure 37) permet de capturer différentes espèces appartenant à différents groupes fonctionnels. Les requins marteau (Sphyrnidae) sont les élasmobranches rencontrés par le plus grand nombre de pêcheurs pratiquant la ligne trainante (50 %). Ils sont suivis par le requin mako (35 %), le requin tigre (25%), le requin peau bleue (20%) et les requins renard (20 %).

Pour la ligne à main (figure 38) seuls 4 pêcheurs pratiquant cet engin ont été rencontrés. Néanmoins on peut noter la présence d’espèces des familles de Carcharhinidae et de Sphyrnidae (requins marteau).

55 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - DCP lignes et palangres (n=54)

Isurus oxyrinchus 70,4 Pél Prionace glauca 29,6 Carcharhinus a longimanus 48,1 Alopiidae 16,7

Odontaspidae 1,9 NMig Sphyrnidae 11,1 Galeocerdo cuvier 5,6

Mix Carcharhinidae 3,7

Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%)

Figure 36 : Répartition relative des espèces capturées sur les DCP (lignes et palangres).

Ligne trainante (pêche « à Miquelon ») (n=20)

Prionace glauca 20,0 Pél Isurus oxyrinchus 35,0 Carcharhinus a longimanus 10,0 Alopiidae 20,0

NMig Sphyrnidae 50,0 Galeocerdo cuvier 25,0

Mix Carcharhinidae 10,0

NPe Dasyatidae 10,0 Ginglymostoma u cirratum 5,0 Aetobatus narinari 5,0

Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%) Figure 37 : Répartition relative des espèces capturées sur à la ligne trainante.

Ligne à main (ou avec canne) (n=4)

Odontaspidae 25,0 NMig Sphyrnidae 25,0 Galeocerdo cuivier 25,0

Carcharhinidae Mix 75,0 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%)

Figure 38 : Répartition relative des espèces capturées sur à la ligne à main.

56 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - La palangre de fond (figure 39) permet de capturer différentes espèces appartenant aux différents groupes fonctionnels. Les espèces profondes sont capturées par le plus grand nombre de pêcheurs utilisant cet engin (68,8 % pour la famille des Hexanchidae et pour la roussette boa, Scyliorhinus boa). La présence de taxons plus « côtiers » (comme les Carcharhinidae) et/ou « pélagiques » (comme le requin peau bleu, Prionace glauca) est liée au regroupement de plusieurs techniques de pêche dans une même catégorie d’engins. Il aurait été intéressant de distinguer différentes classes de profondeur pour le déploiement de la palangre de fond (par exemple [0-50[, [50-100[, [100-300[, [300- ∞ [ ).

Pour le filet maillant encerclant (figure 40) ce sont les requins marteau (Sphyrnidae) qui sont pêchés par le plus grand nombre de pêcheurs (36,8 %), suivi des Carcharhinidae (31,6 %). On note aussi la présence de requins renard (Alopiidae), qui sont avec les requins marteau, inscrits sur la liste rouge des espèces menacées d’extinction.

Pour le filet trémail (figure 41), la raie léopard (Aetobatus narinari) est pêchée par le plus grand nombre de pêcheurs (76,9 %), suivi des requins marteau (Sphyrnidae, 61,5 %) et du requin tigre (Galeocerdo cuvier, 53,8 %). On note aussi la présence du requin mako (Isurus oxyrinchus) et du requin longimane (Carcharhinus longimanus) qui sont, avec les requins marteau, inscrits sur la liste rouge des espèces menacées d’extinction.

Pour le filet maillant fixe (figure 42), les raies pastenagues (Dasiatidae) sont pêchées par le plus grand nombre de pêcheurs (43,8 %), suivi des Carcharhinidae (37,5 %) et des requins marteau (Sphyrnidae, 31,3 %).

Pour le filet maillant dérivant (figure 43), seuls 7 pêcheurs pratiquant cet engin ont été rencontrés. Néanmoins, on peut noter la présence de requins marteau (Sphyrnidae) et d’espèces de la famille des Carcharhinidae (dont le requin tigre, Galeocerdo cuvier).

Pour le casier (figure 44), seul 1 espèce a été relevée : le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum), elle est pêchée au moins une fois dans les 12 derniers mois par 67,3% des pêcheurs pratiquant le casier.

Pour la senne et l’apnée (figures 45 et 46), seuls 2 et 3 pêcheurs pratiquant ces engins respectifs ont été rencontrés. On note la présence d’espèces néritiques comme le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum), la raie léopard (Aetobatus narinari) et des raies pastenagues (Dasyatidae).

57 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Palangre de fond (n=16) Squaliformes 68,8 Pr Scyliorhinus boa 43,8 Hexanchidae 68,8

Prionace glauca 12,5 Pél Isurus oxyrinchus 12,5 Carcharhinus a longimanus 6,3 NMig Odontaspidae 18,8

Mix Carcharhinidae 6,3

NPe Dasyatidae 56,3 Aetobatus narinari u 18,8 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%) Figure 39 : Répartition relative des espèces capturées avec la palangre de fond.

Filet maillant encerclant (n=19)

Pél Alopiidae 5,3 a NMig Sphyrnidae 36,8 Galeocerdo cuvier 15,8 Mix Carcharhinidae 31,6

NPe Dasyatidae 5,3 u Aetobatus narinari 5,3 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%) Figure 40 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet maillant encerclant.

Filet trémail (n=13)

Pél Isurus oxyrinchus 7,7 Carcharhinus a longimanus 15,4

NMig Sphyrnidae 61,5 Galeocerdo cuvier 53,8

Mix Carcharhinidae 15,4 Dasyatidae NPe 23,1 Aetobatus narinari 76,9 u Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%)

Figure 41 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet trémail.

58 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Filet maillant fixe (n=16)

NMig Sphyrnidae 31,3 Galeocerdo cuvier 18,8

Mix Carcharhinidae 37,5

NPe Dasyatidae 43,8 Ginglymostomau cirratum 18,8 Aetobatus narinari 18,8 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%)

Figure 42 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet fixe.

Filet maillant dérivant (n=7)

NMig Sphyrnidae 14,3 Galeocerdo cuvier 14,3

Mix Carcharhinidae 14,3

NPe Ginglymostomau cirratum 14,3 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%) Figure 43 : Répartition relative des espèces capturées avec le filet maillant dérivant.

Casier (n=52) NPe Ginglymostomau cirratum 67,3 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%)

Figure 44 : Répartition relative des espèces capturées avec le casier.

Senne de plage (n=2)

NPe Dasyatidae 50,0 u Ginglymostoma cirratum 50,0 Aetobatus narinari 50,0 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%) Figure 45 : Répartition relative des espèces capturées avec la senne de plage.

59 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - NPe Plongée en apnée (n=3) u Dasyatidae 33,3 Taxon 0,0 20,0 40,0 60,0 80,0 100,0 Fréquence (%) Figure 46 : Répartition relative des espèces capturées en apnée.

3.2.3. Répartition des captures par taxon en fonction des engins de pêche

La figure 47 présente pour chaque taxon d’élasmobranche (espèce, genre, famille ou ordre) la répartition des engins de pêche permettant leur capture. Ainsi un pourcentage élevé pour un engin de pêche signifie que le taxon concerné est capturé essentiellement par cet engin. L’information présentée ne donne pas d’estimation des quantités (en poids ou en nombre) prélevées. Pour chaque taxon utilisé, le nombre de pêcheurs ayant déjà pêché le taxon concerné est indiqué à la suite du taxon (n=X). Un pêcheur peut capturer une même espèce avec plusieurs engins de pêche.

Les taxons appartenant au groupe fonctionnel des espèces profondes sont tous pêchés par la palangre de fond.

Pour les espèces pélagiques, la majeure partie des captures se fait sur les DCP par des lignes ou des palangres. On note la présence de capture de requin longimane (Carcharhinus longimanus) par le filet trémail et la palangre de fond. Ces résultats sont étonnants lié à la différence entre l’habitat utilisée par l’espèce concernée (espèce qui évolue généralement proche de la surface) et l’habitat où sont déployés les engins de pêche (filet posé généralement sur le substrat et à des profondeurs entre 20 et 50 m ; palangre de fond positionnée sur le fond et à des profondeurs pouvant dépasser les 50 m). Ces déclaration sont à considérer avec parcimonie : il pourrait s'agir d’exception ou bien d’erreurs dans l’identification de l’espèce ou de l’engin de pêche. On observe le même résultat pour le requin mako (Isurus oxyrichus) qui se déplace généralement en pleine eau et à des profondeurs inférieures à 100 m. Néanmoins certains individus peuvent se déplacer près du substrat ainsi qu’à des profondeurs atteignant au moins 500 m (Compagno, 2002 ; Taylor and Holts 2001). Concernant les espèces néritiques migratrices, les filets maillants entraineraient le plus de capture (filet maillant fixe, encerclant et dérivant, et filet trémail) chez les requins marteau (Sphyrnidae) et le requin tigre (Galeocerdo cuvier). La ligne trainante permet notamment la capture de ces taxons. Chez les Odontaspidae (requin taureau et requin féroce), les captures se font principalement avec la palangre de fond.

Pour les Carcharhinidae, ils sont capturés par la plupart des engins et techniques utilisés (à l’exception du casier, de la senne de plage et de la plongée en apnée). Ce résultat est probablement lié à la grande diversité présente chez cette famille de requins. En effet, certaines espèces de cette famille sont présentes près des côtes et affectionnent les eaux peu profondes (comme le requin des Caraïbes, Carcharhinus perezi), d’autres sont plutôt océaniques et

60 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - peuvent se déplacer à plus de 500 m de profondeur (comme le requin soyeux, Carcharhinus falciformis).

Enfin, pour le groupe fonctionnel des espèces néritiques, le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) est principalement capturé par le casier. La raie léopard (Aetobatus narinari) est principalement capturée par le filet trémail. Les raies de la famille des Dasyatidae (dont la raie pastenague américaine, Hypanus americana) sont capturées par la plupart des engins et techniques de pêche (à l’exception du casier, de la ligne à main, et des palangres et lignes sur DCP).

Squaliformes (n=9) Pr Scyliorhinus boa (n=7) Hexanchidae (n=11)

Prionace glauca (n=22) Pél Isurus oxyrinchus (n=47) aCarcharhinus longimanus (n=31) Alopiidae (n=14)

Odontaspidae (n=5) NMig Sphyrnidae (n=32) Galeocerdo cuvier (n=23)

Mix Carcharhinidae (n=20)

NPe Dasyatidae (n=24) uGinglymostoma cirratum (n=41) Aetobatus narinari (n=17) 0% 20% 40% 60% 80% 100% Taxon Fréquence de capture des espèces par technique (%) Casier DCP lignes et palangres Lignes trainante (pêche « à Miquelon ») Filet maillant fixe Senne de plage Filet maillant encerclant Plongée en apnée Filet trémail Ligne à main (ou avec canne) Filet maillant dérivant Palangre de fond

Figure 47 : Répartition des groupes d'espèces pour les principaux métiers de pêche (en pourcentage)

3.2.4. Répartition des captures en fonction des secteurs La figure 48 présente la répartition des captures par groupe fonctionnel en fonction des secteurs et la figure 49 présente la répartition des captures par taxons en fonction des secteurs. Globalement, les secteurs du Nord Caraïbe et du Sud Atlantique semblent les principaux secteurs de capture de chondrichtyens (tous groupes fonctionnels confondus). Il est important de rappeler que l’effort d’échantillonnage n’est pas le même sur l’ensemble de l’île (annexe 3).

61 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Autre (Carcharhinidae) Baie de Fort de France Espèces profondes Canal de Sainte Lucie Espèces pélagiques Nord Atlantique Espèces néritiques peu mobiles Nord Caraibe Groupe fonctionnel 0 50 100 150 200 Sud Atlantique Nombre de captures Figure 48 : Répartition des captures pour chaque groupe fonctionnel en fonction du secteur.

Squaliformes Pr Scyliorhinus boa Hexanchidae

Prionace glauca Pél Isurus oxyrinchus Carcharhinusa longimanus Alopiidae

Odontaspidae NMig Sphyrna sp. Galeocerdo cuvier

Mix Carcharhinidae

NPe Dasyatidae Ginglymostomau cirratum Aetobatus narinari 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% 80% 90% 100%

Baie de Fort de France Canal de Sainte Lucie Nord Atlantique Nord Caraibe Sud Atlantique

Figure 49 : Répartition des captures pour chaque taxon en fonction du secteur.

Et la pêche de loisir ? La pêche de loisir regroupe différents engins et

techniques de pêche, notamment la pêche sportive

(comme la traine) et la chasse sous-marine. Dans le cadre de cette étude, seuls des chasseurs sous- marins ont été rencontrés. D’après les résultats obtenus, la chasse de la raie est réalisée par 12,5% des chasseurs rencontrés. Figure 50 : Un chasseur sous-marin. Crédit photo : Fred Flora

Et la pêche de loisir ?

62 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

La capture d’espèces menacées

Dans ce cas présent, il s’agit d’un requin marteau halicorne (Sphyrna lewini), espèce en danger d’extinction d’après l’UICN et dont la pêche, le débarquement et la vente sont interdits par un règlement européen (Beaufort, 2017a). Cette femelle mature, arrivant à terme de sa gestation (comme en témoigne la photo ci- dessous), a été pêchée accidentellement par un filet maillant.

La capture d’espèces menacées, qu’elle soit accidentelle ou ciblée, participe au déclin de la population locale et pourrait avoir un impact sur les populations régionales et mondiales. De plus, la pêche de femelles gestantes réduit le stock de reproducteurs et la capacité de recrutement de l’espèce. Or les jeunes et les reproducteurs sont essentiels à la survie des populations.

Figure 51 : Pêche d’une femelle gestante de requin marteau halicorne (Sphyrna lewini). Crédit photo : Maxym Sikora Crédit photo : Fred Flora

La capture d’un nombre élevé de requins Des débarquements importants de requins tigre (pouvant dépasser 10 individus) ont été recensés à plusieurs reprises en Martinique ces 10 dernières années.

La capture d’un nombre élevé de requins dans un contexte comme celui de la Martinique (où les requins sont peu rencontrés) peut être lié à un phénomène d’agrégation. Si le regroupement d’individus est lié à un évènement important du cycle de vie (comme la nurserie, la reproduction, la mise-bas…) la pêche peut entrainer des dégâts considérables dans les stocks des populations concernées.

De plus, d ’un point de vue économique, la capture d’un nombre trop élevé de requins risque de saturer le marché avec pour conséquence une baisse des prix.

Figure 52 : Pêche de 14 requins tigre (Galeocerdo cuvier). Crédit photo : ATV Martinique.

63 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Le développement d’une capture ciblée d’espèces vulnérables Les requins des profondeurs (notamment les Hexanchidae) font l’objet d’une pêche qui peut être considérée comme ciblée en Martinique. En effet, aux dires des pêcheurs, la pose de palangres à des profondeurs supérieures de 100 m permet, quasiment à chaque calé e, de pêcher des requins des profondeurs (dont des Hexanchidae et des Squalidae). Les requins des profondeurs seraient recherchés en Martinique pour leur chair et leur foie (voir partie 4.1. ). Bien que peu de pêcheurs utilisent la palangre de fond, l’exploitation de requins des profondeurs pourrait avoir un impact Figure 53 : Carcasse d’un requin griset (Hexancheus sur les stocks lié aux fortes vulnérabilités des espèces des griseus) à St Pierre. Crédit photo : Jacques Yves Imbert profondeurs. . Crédit photo : ATV Martinique.

Par ailleurs, d’après une synthèse sur la réglementation en vigueur dans les Antilles françaises (Beaufort, 2017a), la pêche ciblée de certaines espèces des profondeurs (dont des espèces appartenant aux Hexanchidae et Squalidae ) est réglementée par une TAC 0 : il n’y a pas de quota autorisé.

/ Flickr.com /

NOAA Research& Ocean Exploration NOAA

©

64 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 3.5. Conclusion de la sous-partie Les données recueillies dans la bibliographie couplées aux données recueillies auprès des pêcheurs par Kap Natirel mettent en évidence la fréquence non négligeable de chondrichtyens dans les débarquements en Martinique. De manière générale, la pêche de requins et de raies est principalement accidentelle : peu de pêcheurs sont spécialisés dans la pêche aux chondrichtyens (7 % de l’échantillonnage). On observe une différence en fonction de l’engin de pêche, du secteur et des taxons concernés. L’impact d’un engin de pêche sur les chondrichtyens va varier en fonction de plusieurs critères dont le nombre de pêcheurs utilisant l’engin et la probabilité de capturer un élasmobranche. Cette dernière sera influencée elle-même par d’autres facteurs comme la technique de capture, la période de l’année, la profondeur et le lieu de la calée. Identifier avec précision l’impact des engins de pêche est difficile dans ce cas présent car peu de données sont disponibles. Néanmoins, cette étude a permis de mettre en évidence certains points.

Bien que les 11 catégories d’engins de pêche définies par le SIH permettent de capturer des élasmobranches, certains engins présentent une plus grande probabilité de capture. En effet, les données relevées auprès des pêcheurs montrent une probabilité plus élevée de pêcher des requins avec les lignes / palangres sur DCP, la palangre de fond, le filet trémail ainsi que la ligne trainante (plus de 90% des pêcheurs utilisant ces engins ont déjà pêché des élasmobranches au cours de leur carrière). Concernant la fréquence des captures, certains engins permettent une capture régulière de chondrichtyens tels que la palangre de fond et le filet trémail (plus de 70% des pêcheurs ont capturé plus de 3 individus sur les 12 derniers mois). A noter que la palangre de fond serait notamment utilisée pour la pêche ciblée aux élasmobranches (comm. pers de pêcheurs). Dans les données relevées par le SIH, les chondrichtyens représenteraient pour la palangre de fond entre 60 et 70 % du poids total des captures en 2009 et 2010 (54% de requin et 6,8% de raie en 2009 ; 47,3% de requin et 22,1 raie en 2010, Reynal et al, 2013). Quant au filet trémail, les chondrichtyens représenteraient 14,8 % des captures totales en 2009 et 33,4 % en 2010 (principalement des raies, Reynal et al, 2013). D’autres engins montrent une fréquence plus faible (1 à 2 captures sur les 12 derniers mois pour 25 à 70% des pêcheurs) comme le casier et la ligne à main. Cependant, il est à noter que ces deux engins sont les plus utilisés sur l’île (Reynal et al, 2013).

Concernant la diversité spécifique, près de 30 espèces ont été identifiées par les pêcheurs comme étant présentes dans les captures en Martinique. Du fait des possibilités d’erreur dans l’identification de certaines espèces, il a été décidé de travailler à différents niveaux taxonomiques. L’estimation du nombre de captures par les 121 pêcheurs rencontrés s’élève à 447 individus (128 raies et 319 requins) pour les 12 mois précédents l’enquête. Parmi ces captures, 170 individus appartiennent à des espèces menacées d’extinction ce qui représente près de 40 % des captures. Les taxons « principaux » (qui représentent au moins 10 % des captures) sont les raies pastenagues (Dasyatidae) avec 17% des captures, le requin mako (Isurus oxyrinchus) avec 11%, la raie léopard (Aetobatus narinari) avec 11%, le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) avec 11% et les requins marteau (Sphyrnidae) avec 10%. Les estimations obtenues via l’extrapolation des données de l’échantillonnage montrent que plus de 3 000 requins et raies auraient été prélevés en Martinique au cours des 12 derniers mois. Pour limiter des biais liés à l’estimation du nombre de capture par les pêcheurs une analyse a été réalisée sur le nombre de pêcheurs (et non le nombre d’individus capturés par les pêcheurs). Le requin mako (Isurus oxyrinchus) est le requin péché par le plus grand nombre de pêcheurs avec 38,8 % des pêcheurs, suivi du requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) avec 33,9%, les requins marteau (Sphyrnidae) avec 31,4% et le requin longimane (Carcharhinus longimanus).

65 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

A noter, les données relevées lors des enquêtes auprès des marins pêcheurs mettent en évidence une forte occurrence de requins marteau (Sphyrnidae) et de requin longimane (Carcharhinus longimanus) dans les captures. Ainsi que la présence de requins renard (Alopiidae) et d’espèces des profondeurs (Hexanchidae et Squalidae). Les photos recueillies dans le cadre de cette étude ont permis d’identifier avec certitude la présence dans les captures de requins marteau halicorne (Sphyrna lewini), de requin longimane (Carcharhinus longimanus), de requin renard à gros yeux (Alopias superciliosus), de requin griset (Hexanchus griseus) et de requins chargin (Centrophorus granulosus). La pêche de ces espèces étant réglementée par des règlements européens (pêche, débarquement et vente interdits pour les 4 premières espèces et TAC zéro pour la dernière ; pour plus d’information voir partie 1.1.3.).

Concernant le secteur, on observe une répartition différente des captures avec des captures plus importantes en Nord Atlantique et Nord Caraïbe (tous groupes fonctionnels confondus). Ceci pourrait être lié à une pression de pêche différente (nombre de pêcheurs, répartition des engins de pêche…) ainsi qu’à des différences en termes d'habitats disponibles et exploités.

Globalement, cette étude a permis de recenser les premières informations sur la pêche de requins et de raies en Martinique. Probablement lié au caractère artisanal de la pêche locale, à l’absence d’une filière structurée et spécialisée de pêche sur ces animaux et à un tonnage relativement faible par rapport aux autres espèces pêchées sur l’île (1 à 3% du poids total en 2009 et 2010, Reynal et al, 2013), la pêche des chondrichtyens est considérée comme quasi inexistante. Bien que la pêche de chondrichtyens en Martinique soit principalement liée à des captures accidentelles, cela n'exclut pas le risque d'impact sur les populations. En effet, au niveau mondial les prises accidentelles sont la 1ère menace pour les populations de requins et jouent un rôle sur la décroissance des stocks pour 67% des espèces menacées d’extinction (Molina et Cook, 2012).

A l’échelle mondiale, la surpêche a entrainé une baisse considérable dans les populations d’élasmobranches, y compris dans la région des Caraïbes (Myers et al. 2007, Ferretti et al. 2010, Ward- Paige et al., 2010). En raison de leurs positions clé dans les réseaux trophiques (que ce soit en haut comme les grands prédateurs ou à un plus bas niveau comme les consommateurs d’invertébrés benthiques par exemple), il est probable qu’un changement dans l'abondance des requins et des raies entraine des conséquences en cascades importantes à l’échelle des écosystèmes, y compris sur les espèces d'importance économique (Heithaus et al. 2008, 2010, Ferretti et al.).

En Martinique, la pêche locale permet de satisfaire la majeure partie de la demande des consommateurs locaux, ce qui met en évidence l’importance de mesures de gestion pour une exploitation durable des ressources marines. De plus, de par les engagements de la France en faveur de la conservation des chondrichtyens et à la localisation de la Martinique (qui est située sur un des 15 spots ayant un enjeu majeur dans la conservation des élasmobranches (Dulvy et al. 2014)), l’étude des chondrichtyens et plus particulièrement sur l’impact des pêcheries locales sur les populations s’avère essentielle. Bien que les élasmobranches semblent avoir une place plus importante dans l’économie et la consommation locale par rapport au reste des Antilles françaises (comm. pers. O.Beaufort) la mise en place de mesures de gestion adaptées en faveur des populations de requins et de raies pourrait être envisageable sans induire de réelles perturbations auprès de la population locale.

Le rôle d’une gestion consiste avant tout à reconstruire les populations à un niveau qui supporte la productivité tout en gardant la structure et la biodiversité écosystémique, mais aussi de permettre aux autres populations de maintenir leur productivité (FAO, 2003 , Worm et al, 2009). Cependant il est

66 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - important d’adapter les mesures au contexte local (en prenant en compte les connaissances sur les populations d’élasmobranches ainsi que le contexte économique). Pour cela, il est nécessaire de récolter plus de données, notamment pour caractériser les populations présentes en Martinique et évaluer la pression induite par la pêche locale (via un comptage au débarquement par exemple).

La connaissance des pêcheurs étant un atout important pour mieux connaitre les requins et les raies, il est essentiel de poursuivre et de privilégier les échanges avec ces usagers de la mer tout en valorisant leur participation. Il est à noter que la collaboration n’est pas toujours facile en partie liée à la crainte des pêcheurs de voir la réglementation des pêches évoluer en faveur de la protection des élasmobranches.

Par ailleurs, des campagnes d’informations doivent être envisagées. D’une part pour informer et/ou rappeler la réglementation existante (dont l’interdiction de capture de certaines espèces), mais aussi pour sensibiliser les pêcheurs au rôle des élasmobranches dans les océans et à l’importance d’une meilleure gestion des stocks.

En Guadeloupe, l’association

Kap Natirel a développé un réseau avec les marins pêcheurs. Sur cette photo, deux pêcheurs de Vieux Fort ont invité l’association pour marquer et relâcher un jeune requin pêché dans un casier.

Figure 54 : Collaboration avec les marins pêcheurs. Crédit photo : Océane Beaufort

67 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Cédric Millon Cédric

:

Flickr.com / iscione

Crédit Crédit photo

Rodrigo Fr Rodrigo

©

4. LA VALEUR SOCIO-ECONOMIQUE DES CHONDRICHTYENS

68 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 4.1. La commercialisation Les différentes enquêtes réalisées ainsi que la synthèse bibliographique ont permis de recueillir des éléments sur la place des requins et des raies dans le commerce local. Les éléments présentés dans cette partie sont donnés à titre indicatif. Une étude plus poussée permettrait d’obtenir de plus amples informations et des résultats plus représentatifs.

Les produits issus de requins et de raies sont observés en vente auprès de différentes structures (points de débarquement des pêcheurs, auprès des mareyeurs et poissonniers, dans les supermarchés et les pharmacies). Ces produits, qui proviennent de l’importation et de prélèvements locaux, peuvent être commercialisés sous différentes formes : produit frais, produit congelé et produit transformé (voir figure 55).

En Martinique, la valeur commerciale (au kg) est relativement faible par rapport à d’autres ressources exploitées. D’après le SIH, la raie est vendue de l’ordre de 7 à 8 euros/kg et le requin 9 euros/kg (la majeure partie des poissons étant vendu autour de 10 euros/kg). En 2009, les raies et les requins étaient classés parmi les 30 taxons ayant la plus grande valeur économique annuelle (respectivement 23ème place avec 119 519 euros et 29ème place avec 81 682 euros) (Reynal et al, 2013).

Figure 55 : Schéma simplifié de la filière commerciale des élasmobranches en Martinique.

La demande, parmi les consommateurs interrogés en Martinique (n = 74), 25 % consomment ou ont déjà consommé du requin et 40 % consomment ou ont déjà consommé de la raie au cours de leur vie. La consommation d’élasmobranches est principalement occasionnelle (voir figure 56), les consommateurs achètent de la raie ou du requin lorsqu’il y en a sur les points de vente

69 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - (respectivement 50 % et 30 % des consommateurs en consomment quelques fois par an). Par ailleurs, on note une grande proportion des consommateurs qui ont mangé de la raie et/ou du requin une seule fois au cours de leur vie (respectivement 40% et 60%). Les parties les plus prisées sont les darnes chez les requins et les ailes chez les raies. Il n’y a pas d’espèce plus recherchée que d’autres.

La consommation de requin et de raie se ferait principalement pour le goût (31% pour le requin, 65% pour la raie) et la curiosité (47% pour le requin, 20 % pour la raie). Quant aux personnes qui ne consomment pas d’élasmobranches, ce serait lié principalement à des questions de convictions écologiques (49% pour le requin, 31% pour la raie).

ND Régulièrement Occasionnellement raieSérie2 Une seule fois

requinSérie1 consommation Fréquence de la la de Fréquence 0 10 20 30 40 50 60 Réparition des consommateurs (fréquence, %) n=

Figure 56 : Fréquence de la consommation d’élasmobranches parmi les consommateurs d’élasmobranches. Régulièrement : plusieurs fois par semaine ou par mois ; Occasionnellement : quelques fois par an ; Rarement : moins d’une fois par an ; Une seule fois : une seule fois dans la vie

La vente des ailerons de requins

La vente des ailerons de requins est un commerce international très important. La valeur de certains ailerons a engendré une surexploitation des populations de requins, notamment via le développement du

« finning ». Cette pratique consiste à prélever les nageoires sur les requins puis à rejeter l’animal vivant à la mer, voué à une lente asphyxie. Cette pratique est strictement interdite dans les eaux et à bord des navires appartenant à l’Union Européenne.

En Martinique, l’aileron n’est pala partie la plus recherchée chez les requins. La commercialisation locale est principalement portée sur la chair (vendue sous forme de darnes).

Figure 57 : Des ailerons de requins en train de sécher en Polynésie françaises. Crédit photo : Laurent Bouveret

70 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - La commercialisation de requin et de raie en Martinique

La vente de produit locaux se fait majoritairement auprès du pêcheur (vente directe) ou par les mareyeurs sur les marchés aux poissons et points de débarquement.

Les produits importés sont vendus dans les magasins généralistes (petites et grandes surfaces) et dans les poissonneries. On y trouve des produits frais en provenance de la Guyane, de Grenade, du

Les produits congelés (dont du Prionace glauca et Carcharhinus sp.) proviennent notamment du Vietnam et de Guyane. Ces produits congelés sont généralement vendus à des prix très compétitifs pouvant atteindre moins de 5€/Kg.

Figure 58 : Commercialisation de requins congelés en Martinique. Crédit photo : Maxym Sikora/Kap Natirel

Figure 59 : Commercialisation de requins frais en Martinique. De haut en bas : requin tigre, Galeocerdo cuvier, de Nans Monet/IFREMER ; requin mako, Isurus oxyrinchus, de Olivier Ribot ; darnes de requins de Maxym Sikora.

71 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Du requin dans les plats traditionnels ?

La raie et le requin sont appréciés localement sous différentes recettes dont le classique court-bouillon, en marin ade dans des épices créoles comme un colombo, grillé ou encore à la poêle. La raie est parfois cuisinée au beurre ou braisée au barbecue. Ci-contre une photo d’un plat présenté dans un restaurant de Martinique. Il s’agit d’un colombo de requin longimane (Carcharhinus longimanus), espèce en danger critique d’extinction dans la Caraïbe d’après l’UICN) et dont la pêche, le débarquement et la vente sont interdits en Martinique . Photo obtenue sur les réseaux sociaux.

Figure 60 : Colombo de requin longimane (Carcharhinus longimanus). Photo : facebook. . Outre la consommation directe de certaines parties du corps, les requins sont aussi valorisés localement sous forme de produits dérivés.

L’huile de foie de requin : un remède naturel ?

L'huile de foie de requin est un produit dérivé du foie de diverses espèces. En Martinique, cette huile est fabriquée et commercialisée par les pêcheurs. Cette huile serait utilisée pour ses vertus thérapeutiques : l’huile est consommée comme complément alimentaire en tant qu’antioxydant. Elle serait aussi employée comme huile de massage pour détendre les courbatures et faciliter la cicatrisation des plaies. L’huile est recueillie après putréfaction du foie ou bien après avoir ébouillanté celui-ci à feu doux le foie (comm. de pêcheurs).

Certaines espèces sont particulièrement recherchées pour leur foie. D’après certains pêcheurs martiniquais, les requins de la famille des Hexanchidae sont particulièrement ciblés car leur foie peut atteindre des tailles très importantes.

Figure 61 : Deux requins griset (Hexanchus griseus) dans leur habitat naturel. Photo : NOAA Ocean Exploration / FlickR .

72 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Indémodables dents de la mer

Près de 40 ans après le film à sensation des Dents de la mer de Steven Spielberg les mâchoires de requins sont toujours recherchées comme trophées. Ci-contre, un requin mako après sa capture, puis, quelques heures après, la mâchoire extraite du requin.

Le musée du Père Pinchon (situé à Fort de France) possède dans sa collection deux mâchoires de requins dont une de requin citron (Negaprion brevirostris) et une de requin tigre (Galeocerdo cuvier). D’autres « trophés » sont présents, notamment un rostre de poisson scie. Cependant, ce rostre proviendrait d’un autre pays, il aurait été envoyé en cadeau au Père Pinchon . Figure 62 : Mâchoire d’un requin mako, Isurus oxyrinchus, avant et après préparation pour exposition, en Martinique. .

Les ailerons : souvenirs ou trophées ?

Bien que les ailerons ne soient pas

consommés localement, des

ailerons séchés sont parfois gardés

en souvenir ou en tant que trophée.

Figure 63 : Nageoires caudales séchés, en Martinique. Crédit photo : Maxym Sikora .

73 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

4.2. Le tourisme En Martinique, les activités de loisirs liés au milieu marin (plongée, randonnée palmée, sorties en bateau …) représentent une part importante de l’économie touristique. Ces activités, en plus d’apporter plus de 67 millions d’euros par an (montant généré par les activités elles-mêmes ainsi que les autres dépenses des résidents et touristes sur les sites) favorisent les emplois dans le secteur. Le tourisme porté sur l’observation des animaux marins (plongée bouteille, randonnée palmée…) représente à lui seul près de 11 millions d’euros par an. C’est une source économique non négligeable pour l’île.

D’après les enquêtes auprès des plongeurs et des clubs de Figure 64 : La plongée en bouteille. plongée, la faune est le principal critère de sélection des sites Crédit photo : Sébastien Gréaux . de plongée. Les raies (et plus particulièrement la raie léopard et les raies manta) sont principalement recherchées par les plongeurs. La majeure partie des plongeurs interrogés ont néanmoins fait part de leurs craintes quant à la possibilité de rencontrer des requins. Ce dernier point met en évidence l’importance de poursuivre l’information et la sensibilisation des usagers de la mer sur le sujet des requins.

Pour évaluer la fréquence des observations en plongée, un indice d’observation a été considéré (IO). Cet indice est proposé afin d’apporter une estimation du nombre de plongées nécessaires pour observer le taxon concerné. Cet outil, utilisé à titre indicatif, ne prend pas en compte certains facteurs qui peuvent jouer sur les probabilités d’observation (tel que l’habitat et l’abondance du taxon, l’influence des pressions humaines sur ce taxon…).

L’IO (requins ou raies) est calculé de la manière suivante :

퐧퐨퐦퐛퐫퐞 퐝′퐚퐧퐧é퐞퐬 퐝퐞 퐩퐥퐨퐧퐠é퐞 퐗 퐧퐨퐦퐛퐫퐞 퐝퐞 퐩퐥퐨퐧퐠é퐞 퐦퐨퐲퐞퐧 퐞퐬퐭퐢퐦é 퐩퐚퐫 퐚퐧 IO taxon = 퐧퐨퐦퐛퐫퐞 퐝′퐨퐛퐬퐞퐫퐯퐚퐭퐢퐨퐧퐬 퐝퐮 퐭퐚퐱퐨퐧

En raison d’un manque de précisions dans les données récoltées sur les raies pastenagues (Dasiatidae) et les raies torpilles (Narcinidae), ces familles n’ont pas été incluses dans la figure 65. Globalement, à l’exception des raies pastenagues et des raies torpilles, l’observation de requins et de raies est considérée comme très rare en Martinique. En effet, d’après les données recueillies auprès des clubs de plongée rencontrés, il faut entre 400 et 3500 plongée (soit une moyenne de 1537) pour observer 1 requin et entre 84 et 6720 plongées (soit une

74 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - moyenne de 2473) pour observer une raie (autre que de la famille des Dasyatidae et Narcinidae) (voir figure 65).

L’IO a été calculé pour les différentes espèces recensées auprès des clubs de plongée (tableau 10). Les données recueillies sur les raies pastenagues et les torpilles n’ont pas permis d’estimer précisément l’IO pour ces taxons. Néanmoins, d’après les retours d’informations, ces espèces sont les plus observées sur la Martinique.

8000

7000 6000 5000

4000 Nombre minimal de plongéesplonger 3000 pour observer 1 requin

2000 Nombre minimal de plongerplongées 1000 pour observer 1 raie (hors Dasiatidae et Naricinae) Indice d’observation (IO) d’observation plongée Indice 0 Marin Histoire Passion Kariba Club de H20 CSMM UCPA Tropicasub Plongée d'air Plongée Plongée plongée Plongée la Batelière Clubs de plongée

Figure 65 : Indice d’observation pour les requins et les raies par clubs de plongée intérrogé.

Tableau 9 : Indice d’observation (IO) des différentes espèces observées par les clubs de plongée en Martinique

Nom vernaculaire Nom scientifique Indice d'observation Torpille/trembleur Narcinidae < 29 Raie pastenague Dasyatidae <150 Raie léopard Aetobatus narinari 448 Requin nourrice Ginglymostoma cirratum 1741 Requin baleine Rhinocodon typus 2449 Requin marteau Sphyrnidae 2592 Raie manta Mobulidae 7866 requin tigre Galeocerdo cuvier 50032 Requin "requiem" Carcharhinidae 72533 Requin mako Isurus oxyrinchus 120960

Par comparaison, dans les îles du Nord (St Barthélemy et St Martin) un IO < 100 est supposé pour la raie léopard, le requin nourrice et les requins « requiem » d’après les informations recueillies auprès de clubs de plongée (comm.pers. O. Beaufort).

75 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 4.3. Conclusion de la sous-partie L’importance socio-économique des requins et des raies varie en fonction des pays. La principale source économique basée sur les élasmobranches dans le monde est la commercialisation pour la consommation (le commerce mondial est estimé à 1 milliard de dollars américains par an (Dent et al, 2015). Cette source économique entraine pourtant des dégâts importants sur les populations de requins et raies ce qui pourraient avoir des répercussions économiques à moyen terme. Depuis quelques années un nouveau secteur se développe : le tourisme porté sur l'observation des requins et des raies. Bien que la mauvaise réputation de ces animaux les précède, le tourisme basé sur l’observation des élasmobranches est en plein essor dans le monde. De récentes études ont notamment mis en évidence qu’un requin vivant avait plus de valeur qu’un requin mort. Par exemple, à Palau, un requin de récif a une valeur annuelle estimée à 179 000 $ (soit 1,9 million de dollars américains au cours de sa vie) en comparaison, ce même requin a une valeur de 108 $ s’il est pêché et vendu pour sa chair (Vianna et al, 2010). En plus d’être une source de revenus et une source d’emplois, le tourisme porté sur l’observation des élasmobranches est notamment un appui pour sensibiliser le public, améliorer les connaissances sur les élasmobranches et faire évoluer les mesures de gestions et de conservation (Simpfendorfer et al., 2011 ; Ward-Paige et al, 2012).

En Martinique, le commerce d’élasmobranches est présent sous diverses formes. Les produits frais (darnes de requins, ailes de raies…) sont vendus sur le marché, dans les poissonneries et les points de débarquement des pêcheurs. Les produits congelés (darnes de requins, ailes de raies …) sont en vente dans les magasins. Enfin, des produits dérivés (huile de foie de requin, gélules de cartilages …) sont en vente en pharmacie et auprès des pêcheurs. Les produits sont d’origine locale ou bien issue de l’importation. D’après les données du SIH et les informations relevées auprès des marins-pêcheurs, les élasmobranches issus de la pêche locale sont généralement vendus à un prix inférieur à 10 euros/kg et il peut parfois atteindre moins de 5 euros/kg lorsque le marché est saturé. Cette valeur est inférieure à la plupart des autres espèces pêchées (Serranidae, Scombridae …). Le prix est cependant plus élevé dans les magasins et poissonneries, mais il s’agit généralement de produits importés.

Localement, ce sont les darnes de requins et les ailes de raies qui sont les plus prisées par les consommateurs. Il n’y a pas de commerce développé sur les ailerons. La consommation d’élasmobranches est principalement occasionnelle à exceptionnelle : les consommateurs achètent du requin ou de la raie lorsqu’il y en a sur les points de vente ou cherche à en acquérir par curiosité culinaire. Les élasmobranches sont cuisinés dans les plats traditionnels tel que le colombo. On note aussi un marché porté sur l’huile de foie de requins, un des produits dérivés issus de la pêche locale. Cette huile est utilisée comme complément alimentaire et comme huile de massage et/ou cicatrisante. Le marché de produit dérivé serait plus développé en Martinique que sur le reste des Antilles françaises (comm . pers. O.Beaufort). D’après plusieurs pêcheurs, la production de cette huile inciterait la pêche ciblée aux requins des profondeurs car ces derniers peuvent atteindre de grandes tailles et possèdent un foie particulièrement imposant (Hexanchidae).

76 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Par ailleurs, le tourisme basé sur l’observation du milieu marin possède une place importante sur l’île avec notamment un apport annuel estimé à près de 11 millions d’euros. Cependant, le tourisme basé exclusivement sur l’observation de requins et de raies ne semble pas développé sur l’île, et pour cause principale, le faible taux de rencontre. En effet, à l’exception des raies pastenagues (Dasyatidae) et des raies torpilles (Narcinidae) les observations d’élasmobranches en plongée sont occasionnelles à rares selon les espèces. D’après les données recueillies auprès de clubs de plongée, on estime qu’une’observation de raie léopard (Aeotobatus narinari) et de requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) aurait lieu respectivement toutes les 448 et 1 700 plongées. Ces espèces sont pourtant considérées comme « courantes » en plongée sur d’autres sites des Antilles françaises (dont St Martin et St Barthélemy ; comm.pers. O. Beaufort).

Globalement, bien que la pêche et la commercialisation des élasmobranches aient une valeur économique pour l’île, ce secteur semble relativement peu développé. Par conséquent la mise en place de mesures de gestion et de conservation des élasmobranches semble favorable sur la Martinique. En effet, des mesures de protection de certaines espèces pourraient être envisagées sans entrainer une baisse économique importante pour le secteur de la pêche. Néanmoins il est conseillé d’envisager des mesures de conservation en concertation avec les services du secteur de la pêche. Par ailleurs, de telles mesures seraient un atout pour potentiellement favoriser le développement économique du tourisme basé sur le milieu marin. En effet, des mesures de protection pourraient augmenter la fréquence d’observations des espèces « recherchées » par les plongeurs (telles que la raie léopard et le requin nourrice). De plus, en raison du rôle important des élasmobranches sur les écosystèmes, et plus particulièrement sur les milieux récifaux, l’augmentation de la population récifale d’élasmobranches pourrait avoir un impact favorable sur les habitats marins martiniquais, vecteur de tourisme.

La raie léopard, Aetobatus narinari, est l’une des espèces les plus recherchées par les plongeurs.

Figure 66 : Une raie léopard, Aetobatus narinari, observée en plongée à St Barthélemy. Crédit photo : Sébastien Gréaux.

77 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

/ Flikr.com /

Bryant

© Kevin

5. PRECONISATIONS ET PERSPECTIVES : VERS UNE GESTION ADAPTEE DES CHONDRICHTYENS EN MARTINIQUE

78 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - La gestion et la conservation des chondrichtyens peuvent être favorisées via différentes actions. Ces actions seront développées sous trois axes principaux et complémentaires : - l’amélioration des connaissances sur les requins et les raies (détermination des espèces présentes, identification de zones importantes pour certains cycles de vie…) ; - la réglementation des usages et son application pour la protection directe des requins et des raies mais aussi indirecte (protection des habitats par exemple) ; - l’information et la sensibilisation du public et des usagers.

5.1. Amélioration des connaissances Avoir une bonne connaissance de la diversité spécifique, des caractères biologiques et écologiques des populations concernées est essentielle pour proposer des mesures de gestion adaptées (Simpfendorfer et al, 2011, Rohr et al, 2014). Par exemple, une aire marine protégée9 devrait apporter plus de protection à une espèce sédentaire si la zone de distribution de cette espèce est incluse de la zone protégée. En revanche, cette même aire marine aura un rôle de conservation moins important pour une espèce migratrice avec une zone de distribution plus étendue à la zone protégée. Ces informations, couplées à l’identification des menaces existantes sur les espèces vulnérables, pourront permettre de proposer et de hiérarchiser des actions concrètes et adaptées au contexte local.

Il semble donc essentiel : - de caractériser les populations présentes (quelles espèces, quels stades du cycle de vie, quelle répartition dans l’espace et dans le temps…), - d’identifier les menaces (pression de pêche, destruction des habitats naturels…).

Concernant les principales menaces au niveau mondial, la littérature cite la pêche (ciblée ou accidentelle), la dégradation des habitats (Jennings et al, 2008, Knip et al, 2010, Heupel et al, 2007), la surpêche induisant une diminution des proies potentielles, et la pollution (UICN, 2010). Globalement, ces différentes menaces semblent présentes en Martinique. Des études réalisées dans les années 1850 abordaient déjà le risque de surpêche de la ressource côtière (Farrugio, H, 1965). Concernant la pêche des élasmobranches, bien qu’il n’y ait pas de filière spécifique, elle concerne de nombreuses espèces (dont des espèces menacées d’extinction d’après l’UICN) et des stades du cycle de vie considérés comme vulnérables (dont des femelles gestantes). Une étude sur la viabilité des populations de requins de récifs dans la Caraïbe indique qu’une faible pression de la pêche (ciblée ou accidentelle) peut causer un déclin des populations de requins en quelques décennies (Ward-Paige 2010). Quant à la destruction des habitats naturels et la pollution, le développement des activités anthropiques sur la Martinique ont entrainé une modification des zones côtières (notamment via la destruction des mangroves, lieu de nurserie pour certaines espèces d’élasmobranche). Des informations complémentaires sur ces

9 Définie ici comme une zone restreinte où certaines activités sont interdites (la pêche par exemple). 79 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - différentes thématiques devraient permettent de hiérarchiser ces menaces. Ceci dans l’objectif de définir des priorités dans les mesures de gestion et de conservation.

Pour la caractérisation des populations plusieurs méthodes de suivi sont employées sur les requins et les raies dans le monde (suivi par captures physiques et/ou visuelles, suivi acoustique ou satellitaire …). La suite de cette partie présentera les méthodes qui semblent, au vu des premières informations récoltées, les plus adaptées pour améliorer les connaissances sur les requins et les raies en Martinique dans les meilleurs délais et avec un budget abordable.

5.1.1. Suivi des captures (ou valorisation scientifique des captures)

La valorisation scientifique des requins et des raies peut être réalisée par un suivi des débarquements des captures de pêcheurs. Bien qu’un suivi de ce type soit déjà mis en place sur l’île (SIH), il n'a pas permis jusqu'à maintenant d’obtenir des informations précises concernant les chondrichtyens, notamment du fait de problème d'identification. Ceci est en parti lié à une identification spécifique avec un niveau taxonomique non adapté (« requin » et « raie »). Les enquêtes de terrain réalisées auprès de différents acteurs de la mer ont confirmé l’importance du savoir des pêcheurs. Concrètement, les pêcheurs sont la source principale d’informations sur les requins et les raies en Martinique : ce sont les acteurs de la mer qui ont le plus d’opportunités de contacts avec des chondrichtyens. Par ailleurs, les pêcheurs exploitent quasiment toute l’année différents habitats marins ce qui permet d’obtenir des informations sur un plus grand nombre d’espèces (espèces côtières/pélagiques ; espèces récifales/ océaniques ; espèces de surface/des profondeurs …).

Description : La méthode consiste à se rendre régulièrement sur les points de débarquement et/ou les points de vente pour relever la présence ou l’absence de requins et de raies. En présence de requins ou de raies les informations sur l’espèce, la taille, et le sexe sont relevées. Les pêcheurs seront une source d’informations complémentaire pour identifier les zones de pêche (localisation, type de substrat, profondeur…).

Afin de valoriser le plus possible les captures accessoires des pêcheurs, et avec leur accord, il est possible d’effectuer un prélèvement de tégument et une nécropsie. Le prélèvement de tégument pourra être utilisé pour de futures analyses génétiques afin de connaitre les relations de parenté entre les individus des eaux martiniquaises et les individus en provenance de la caraïbe voire d’autres régions du monde. La Figure 67 : Point de vente de poissons. nécropsie permettra d’obtenir des informations sur le Crédit photo : Jeremy Fauchet 80 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - stade de maturité sexuelle et sur le régime alimentaire (via le contenu stomacal et/ou les isotopes stables).

Type d’informations pouvant être obtenues : - diversité spécifique, - abondance, - répartition spatio-temporelle, - stade du cycle de vie présent, - taille moyenne à maturité sexuelle, - régime alimentaire, - structure des populations et dynamique, - estimation du nombre de capture par espèce, - engin de pêche impliqué dans la capture, - …

Informations complémentaires : Cette méthode permet d’impliquer directement les pêcheurs dans l’étude des chondrichtyens. Les pêcheurs peuvent être sollicités pour transmettre par eux-mêmes les informations sur leurs captures. La mise en place d’un tel suivi présente néanmoins quelques difficultés notamment liées au nombre important de points de débarquements répartis sur toutes la Martinique.

Figure 68 : Valorisation scientifique des captures d’élasmobranches. De gauche à droite : prise de mesure sur un requin marteau halicorne (Sphyrna lewini) pêché à St François, Guadeloupe. ©Tibo Foch. Identification des espèces d’élasmobranche dans un filet maillant à St Barthélemy. ©ATE. Observation d’un « chien de mer » (Mustelus canis) à Marie Galante. ©Océane Beaufort

81 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 5.1.2. Suivi par captures visuelles (caméras sous-marines avec une source d’appât) Cette méthode a été utilisée en 2016 par Kap Natirel dans le cadre du projet mondial Global Fin Print (Beaufort, 2017c). En Martinique, deux zones ont été échantillonnées : la pente externe de la barrière atlantique et la pente externe du sud de l’île.

Description : La méthode utilisée est celle des « BRUVs10 ». Elle est portée sur l’utilisation d’une caméra avec une source d’appât à distance. Les espèces ciblées (ici les requins et les raies) sont identifiées et comptées dans le champ de vision de la caméra sur une période d'échantillonnage définie. Chaque caméra est installée sur une structure en acier qui maintient une source d’appât (de préférence du poisson « gras », type sardine ou chinchard) à distance. La quantité d’appât utilisée permet d’attirer seulement les animaux à proximité du site d’étude. Chaque structure est signalée en surface par une bouée. Des paramètres environnementaux peuvent être relevés à chaque déploiement (profondeur, température, pH…) pour identifier des paramètres pouvant influencer l’abondance des requins et des raies. Figure 69 : Structure de soutien de la caméra. Les caméras peuvent être installées à Crédit photo : Kap Natirel / FIU diverses profondeurs (l’étanchéité de la caméra étant le facteur limitant) et sur différents types de substrats (sableux, rocheux, coralliens…). Elles peuvent être déposées de jour comme de nuit (via l’ajout d’une source lumineuse). Le déploiement des caméras peut se faire de manière aléatoire ou bien sur des zones définies au préalable (par exemple des zones où des requins/raies sont régulièrement observés par des chasseurs sous-marins).

Type d’informations obtenues : - diversité spécifique, - indice d’abondance, - répartition spatio-temporelle, - stade du cycle de vie présent, - statut de résidence - …

10 Abréviation du terme anglais : Baited Remote Underwater Video 82 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Informations complémentaires : A noter que ce suivi permet d’obtenir des informations sur d’autres taxons (tortues marines, espèces de poisson considérées comme « rares » comme le mérou de Nassau, Epinephelus striatus, et espèces commerciales comme le capitaine, Lachnolaimus maximus).

Figure 70 : Observation d’élasmobranches via les caméras appâtées. De gauche à droite : observation d’un requin tigre (Galeocerdo cuvier) à St Barthélemy ©Kap Natirel/ATE ; observation d’une raie pastenague américaine (Hypanus americanus ) en Martinique ©Kap Natirel/FIU/Fin Print ; observation d’un requin nourrice en Guadeloupe (Ginglymostoma cirratum) ©Kap Natirel/FIU/Fin Print .

5.1.3. Recensement des observations opportunistes Créé en 2013 par l’association Kap Natirel, le programme de recensement du Reguar a pour objectif de recueillir les observations de requins et de raies sur l’archipel guadeloupéen. Ce programme s’est étendu à St Martin puis à St Barthélemy respectivement en 2014 et 2015. En 2016, des posters du programme ont été distribués en Martinique afin de recueillir les observations du public. L’utilisation des sciences participatives semble adaptée à la situation : les observations de requins et de raies sont peu courantes en Martinique (que ce soit en plongée sous-marine, en chasse sous- marine…). Par conséquent plus il y a d’observateurs et plus il y a de chances d’obtenir des informations. Figure 71 : Affiche du programme de recensement. Description : Création : Kap Natirel Le programme de recensement est basé sur les sciences participatives. Ainsi, toute personne qui observe un requin ou une raie peut transmettre son observation (via le site internet, les réseaux sociaux ou par mail). Différentes informations sont recherchées dont les conditions de l’observation (pêche, plongée…) la date et le lieu de l’observation, l’espèce observée et la taille de l’animal. Ce programme permet de recenser les observations d’animaux vivants mais aussi l’observation d’animaux sur les points de vente.

83 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Type d’informations obtenues : - diversité spécifique, - occurrence des observations, - répartition spatio-temporelle, - stade du cycle de vie présent, - …

Informations complémentaires : Outre l’importance de disposer de données régulières, ce type de démarche permet également de fédérer les usagers autour d’un projet commun et de sensibiliser le grand public à la fragilité de la biodiversité par une approche ludique et éducative. Ce type de suivi étant basé sur les sciences participatives, il présente des difficultés pour la valorisation scientifique des données (risque d’erreur dans l’identification spécifique en absence de photos, effort d’échantillonnage difficilement quantifiable…).

Actuellement, le recueil d’informations se fait via un formulaire en ligne ou bien par contact téléphonique ou mail. Les sciences participatives sont en plein essor et le développement d’applications et de sites adaptés est de plus en plus courant. La mise en place d’une plateforme adaptée (avec une méthode facile et rapide pour transmettre les informations) pourrait permettre d’augmenter le retour d’informations. Ce type de plateforme pourrait être utilisé pour divers taxons (tortues marines, mammifères marins, requins et raies…). Cette méthode, par exemple, est utilisée à Mayotte (via le réseau Tsiono, http://www.tsiono.fr/).

5.1.4. Autres suivis D’autres méthodes peuvent être utilisées dont la méthode de suivi visuel par survol aérien (en hélicoptère, en drone) et la méthode par capture. Les deux méthodes sont utilisées par Kap Natirel en Guadeloupe depuis quelques années.

Figure 72 : Suivi aérien des nurseries de requins côtiers en Figure 73 : Capture et marquage des requins côtiers juvéniles en Guadeloupe. Crédit photo : Kap Natirel Guadeloupe. Crédit photo : Kap Natirel

84 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 5.2. Réglementation des usages

Certaines activités humaines peuvent entrainer des modifications chez les populations de chondrichtyens. On remarque notamment des risques de diminution des stocks lié à la pêche par exemple, de manière directe par la pêche de requins/raies mais aussi indirecte via la pêche de proies potentielles et la modification du réseau trophique. D’autres modifications peuvent être observées telles que le changement du comportement et de l’utilisation de l’espace lié à la pratique de nourrissage (modification du statut de résidence des individus), ou la dégradation des habitats qui pourrait pousser les individus à migrer vers des zones plus accueillantes.

A travers le monde, des réglementations sont mises en place pour limiter, réduire ou même arrêter certaines menaces qui peuvent engendrer le déclin des populations de requins et de raies. Ces réglementations peuvent être internationales, nationales, régionales ou même communales. Elles peuvent être mise en place pour l’ensemble des espèces de requins et de raies ou bien pour certaines espèces. La réglementation des usages dans ce contexte a pour objectif principal de limiter, autant que possible, les modifications environnementales liées aux activités humaines. Le rôle d’une gestion étant avant tout de reconstruire les populations à un niveau qui supporte l’exploitation tout en gardant la structure et la biodiversité écosystémique, mais aussi de permettre aux autres populations de maintenir leur productivité (FAO,2003, Worm et al, 2009).

Une récente synthèse de la réglementation en vigueur pour la pêche de chondrichtyens dans les eaux françaises, ainsi que son application dans les Antilles françaises, a mis en évidence la présence de mesures applicables dans les eaux des Antilles françaises (Beaufort, 2017a). La pêche des chondrichtyens en Martinique est réglementée par des règlements européens (voir partie 1.1.3. de ce rapport). Néanmoins, d’après les données recueillies, la réglementation ne semble pas être appliquée sur le territoire (présence des espèces interdites à la pêche dans les débarquements). D’après les premiers éléments relevés, il ne s’agirait non pas d’un refus de l’application du règlement de la part des pêcheurs mais plutôt d’une méconnaissance de cette réglementation. Des campagnes d’information auprès des marins pêcheurs serait un premier pas pour faciliter l’application des réglementations déjà existantes.

Par ailleurs, de part certaines spécificités locales, des mesures propres à la Martinique (voire aux Antilles françaises) pourraient être envisagées. Pour la suite de cette partie, les mesures de gestion de l’exploitation des chondrichtyens, considérées comme prioritaires, seront présentées. En effet, face aux différentes menaces sur les populations de chondrichtyens, de récentes études ont mis en évidence le besoin urgent de mettre en place des mesures de gestion pour les requins, en particulier dans les pêcheries artisanales pauvres en données (FAO, 1999; John and Varghese, 2009; Hoq, 2011).

Il existe plusieurs types de mesures de gestion des pêches employées dans le monde pour encadrer l’exploitation des populations de chondrichtyens.

85 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Ces mesures sont présentées dans le tableau ci-dessous (ICES, 2013) :

Tableau 10 : Mesures de gestion des pêches. Source ICES, 2013 Type de mesure Détails Contrôles externes Mise en place de Totaux Admissibles de Captures (TAC) simples ou multi-spécifiques Contrôles internes - Encadrement (restriction/contrôle) de l’effort - Régimes des licences - Restrictions sur l’effort effectif pour des types d’engins particuliers (nombre d’hameçons, temps d’immersion, …) Mesures techniques - Mesures de gestion spatio-temporelles (dont les fermetures en temps réel) - Réglementation du maillage - Tailles limites de débarquement (minimale ou maximale) Interdiction de - Espèces sur liste interdite : interdiction de captures, capture/débarquement détention à bord, transbordement et débarquement - TAC zéro

Parmi ces mesures, la mise en place de TAC et de tailles limites de débarquement nécessitent des contrôles réguliers et une connaissance dans la reconnaissance des espèces concernées.

Concernant la régulation des engins de pêche et des pratiques, il s’agit d’une méthode adaptée pour limiter les prises accidentelles, ou à minima, diminuer la mortalité des espèces attrapées accidentellement (Lewison et al, 2004). Ce type de régulation est basé sur la minimisation des interactions entre l’engin de pêche et l’espèce accessoire concernée. L’objectif étant de diminuer les prises accessoires et donc d’augmenter les taux de capture des prises ciblées : cette méthode allie bénéfices économiques et bénéfices écologiques (Ward-Paige 2010).

Concernant la mise en place de gestion spatio-temporelle (dont les aires marines protégées et les sanctuaires), ces mesures sont généralement instaurées suite à un déclin alarmant de certaines populations (cas du sanctuaire des Maldives). Dans certains cas, ce type de mesure est installé par sécurité sans avoir de données justifiant l’urgence de la situation (lié à un manque de données car l’acquisition de données peut être onéreuse et longue ou lié à un simple principe de précaution). Aux Bahamas, par exemple, un sanctuaire a été créé avant le développement d’une filière de pêche aux requins pour éviter le déclin de population. Cette action a ainsi permis au tourisme de prendre de l’ampleur avec le développement des plongées aux requins. Ce type de gestion est efficace si la zone protégée correspond à la zone où les espèces concernées vivent la majeure partie de leur vie (tous les stades de vie de l’espèce seraient protégés). Cependant ceci semble compliqué pour la majeure partie des espèces de chondrichtyens possédant des domaines vitaux très étendus (Bonfils, 1999).

86 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Dans la Caraïbe, plusieurs sanctuaires ont été créés depuis 2011 (figure 74). Les plus proches des Antilles françaises sont ceux de Saba (2015) et de Sint Maarten (2016). Dans les Antilles françaises, seul le territoire de St Barthélemy possède des mesures de gestion en faveur de la conservation des populations de requins et de raies (voir encadré ci-dessous).

Figure 74 : Répartition des sanctuaires à requins dans la Caraibe (en rouge). ©MPAatlas

REGLEMENTATION DE LA PECHE DE CHONDRICHTYENS SUR ST BARTHELEMY

Extraits de la délibération du conseil territorial N°2015-035 CT du 27 juillet 2015 portant sur le règlement de l’exercice de la pêche de la pêche côtière dans les eaux de Saint-Barthélemy.

- Chapitre 3, Article 12- Les palangres à requins sont interdites en tout temps à moins de 300 mètres des côtes de Saint Barthélemy (îlets exclus). Le temps de calée des palangres à requins ne doit pas excéder 12 heures.

- Chapitre 7, Article 35- La pêche, le colportage et la vente des espèces suivantes sont interdits en tout temps, tous lieux : Ginglymostoma cirratum

Rhinocodon typus,

Sphyrna spp Rajiformes (excepté Dasyatis americana) En cas de capture accidentelle de l’une de ces espèces, si celle-ci est remontée morte et ne peut être rejetée vivante à la mer, elle peut être conservée mais reste strictement interdite à la vente. Le poisson doit alors obligatoirement avoir l’un des lobes de la nageoire caudale coupé.

- Chapitre 7, Article 38- La pêche, le colportage et la vente de tout requin sont interdis en tous lieux du 1er mai au 31 aout. Les requins sont débarqués entiers pour permettre l’identification de l’espèce.

Figure 75 : Le requin caraïbe (Carcharhinus perezi), l’une des espèces les plus fréquentes à St Barthélemy. Crédit photo : Franck Mazéas

87 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 5.3. Information, sensibilisation du public et des usagers de la mer Les chondrichtyens, et plus particulièrement les requins, sont victimes de nombreux préjugés. Pour démystifier cette mauvaise image, l’information et la sensibilisation du public et des usagers de la mer est essentielle.

En Martinique, le sujet des requins est peu abordé à l’exception des évènements tragiques de ces dernières années à la Réunion. On peut notamment lire sur plusieurs forums et sites touristiques que les eaux de la Martinique n’hébergent pas de requins. Il est important d’informer le public sur la présence de ces animaux dans les eaux martiniquaises, non pas pour effrayer le public, mais pour le sensibiliser et lui faire savoir qu'il est tout à fait envisageable de cohabiter avec des requins.

Dans le cadre de cette étude, les enquêtes de terrain auprès des différents acteurs (pêcheurs, plongeurs, chasseurs, consommateurs, clubs de plongée) ont permis d’identifier les besoins prioritaires en terme de sensibilisation et d’information en Martinique. Des campagnes de sensibilisation pourraient être envisagées pour les années à venir.

Thématiques d’informations et de sensibilisation : - présentation générale sur les chondrichtyens ; - description des espèces locales (abondance et distribution, critères d’identification, cycle de vie, habitat…) ; - description des menaces locales (destruction des habitats, risques de surpêche (directe, indirecte), présentation de la pêche locales aux requins/raies…) - description d’actions pour agir en faveur de la protection des requins et des raies en Martinique (faire attention à sa consommation…) ; - interactions à risques et dangers pour les humains (situation mondiale des accidents, situation dans les Antilles françaises, comportements à éviter dans des zones à présence de requins/de raies, risques d’intoxication alimentaire …).

Supports de communication : D’après les retours d’enquête auprès du public, les documentaires, les articles en ligne et les expositions semblent être les méthodes les plus adaptées pour la population martiniquaise, suivi par les brochures et les articles dans la presse.

Une première conférence a été réalisée

en Martinique en octobre 2016 à l’occasion de la Fête de la Science, évènement organisé par la Maison du Carbet.

Figure 86 : Conférence sur les requins en Martinique. Crédit photo : Océane Beaufort

88 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - 5.4. Conclusion de la sous partie Pour permettre la mise en place de mesures de gestion et de conservation adaptées des requins et des raies en Martinique, il est essentiel de développer trois types d’actions complémentaires : l’amélioration des connaissances, la réglementation des usages et l’information/la sensibilisation du public et des usagers de la mer.

L’amélioration des connaissances sur les populations de requins et de raies présentes dans les eaux martiniquaises est un axe important. La réflexion pour la mise en place de mesures réglementaires doit prendre en compte différentes informations dont la diversité spécifique, l’abondance des animaux et l’utilisation des habitats par ces animaux. Ces informations pourront permettre d’identifier des zones à fonctionnalités particulières sur lesquelles il sera essentiel de limiter les menaces. Les informations obtenues permettront de hiérarchiser les actions à mettre en place et de définir des priorités pour la conservation.

Lié au contexte local de l’île, avec peu d’observations de requins et de raies par les plongeurs et chasseurs sous-marins et une pêche accidentelle présente sur l’île, certaines méthodes de suivi semblent plus adaptées que d’autres pour accroitre nos connaissances. La valorisation scientifique des captures de pêcheurs, via le comptage aux débarquements, pourrait apporter de nombreux éléments. Cette méthode apporterait des informations pour caractériser les populations d’élasmobranche mais aussi évaluer la pression de pêche sur ces animaux. De plus, cette méthode permet de travailler en collaboration directe avec les pêcheurs et de les impliquer dans la conservation des chondrichtyens. Par ailleurs, la méthode des caméras appâtées (« BRUVs »), qui a su montrer son intérêt dans les Antilles françaises en 2016, serait adaptée pour caractériser les populations d’élasmobranches (indice d’abondance, diversité spécifique…) et identifier des zones à fonctionnalités particulières (avec, par exemple, l’observation de femelles gestantes). Enfin, les sciences participatives permettraient d’augmenter nos connaissances sur les élasmobranches par la création d’un large réseau d’observateurs. Cette une approche ludique et éducative permettra en plus d’informer et de sensibiliser le public à la fragilité de la biodiversité.

Les connaissances obtenues pourront être utilisées pour la mise en place de mesures de gestion et de conservation, notamment en ciblant des priorités. Parmi ces mesures, la réglementation, qui a pour objectif de limiter autant que possible l’impact des activités humaines sur les populations d’élasmobranches. Les réglementations peuvent être appliquées à différents niveaux (international, national, régional…), être multi-spécifique ou uni-spécifique et limiter différents domaines (réglementation de la pêche, réglementation des activités touristiques…). En Martinique, des mesures européennes réglementent la pêche des requins et des raies, notamment par l’interdiction de capturer certaines espèces (voir partie 1.1.3., Beaufort, 2017a). Cependant cette réglementation semble à ce jour peu appliquée avec la présence d’espèces, dont la pêche est interdite, dans les débarquements de Martinique. Il est recommandé d’informer et de sensibiliser les marins pêcheurs à l’existence de cette réglementation. Par ailleurs, de part certaines spécificités locales, des mesures propres à la Martinique (voire aux Antilles françaises) pourraient être envisagées.

89 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

D’après la littérature la réglementation de la pêche, notamment dans les pêcheries artisanales pauvres en données, peut être considérée comme une priorité (FAO, 1999; John and Varghese, 2009; Hoq, 2011). L’exploitation des chondrichtyens peut être réglementée par différentes méthodes dont la réglementation des engins et des techniques. Dans le cadre d’une pêche principalement accidentelle, ce qui est le cas en Martinique, ce type de mesure présente un bénéfice économique et écologique : l’objectif étant d’augmenter les taux de capture des espèces ciblées et de diminuer le taux des prises accidentelles. Ces dernières ayant bien souvent une valeur économique faible. D’autres mesures se développent dans le monde, comme la gestion spatio-temporelle, avec la création d’aires marines protégées et de sanctuaires. Ces mesures peuvent être instaurées par urgence (suite à un déclin important des populations de chondrichtyens) ou bien par sécurité (pour éviter les risques de déclin des populations de chondrichtyens). Ce type de mesure est actuellement en plein essor dans la Caraïbe, avec notamment la création de sanctuaires à Saba en 2015 et à Sint Maarten en 2016.

Enfin, pour permettre une gestion durable des populations de requin et de raie, il est important d’informer et de sensibiliser le public sur les différentes thématiques qui touchent les requins et les raies (espèces présentes en Martinique, les menaces sur ces espèces, la consommation de requins…). Différents types de supports peuvent être envisagés, avec une préférence pour les documentaires, les articles en ligne et les expositions.

90 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - CONCLUSION

La Martinique est une île des Antilles françaises située le plus au sud sur l’Arc Antillais. La pêche locale est principalement artisanale et 87% de l’activité est concentrée dans la bande de 0-12 milles nautiques des côtes martiniquaises (Reynal et al, 2013). Parmi les engins les plus utilisés on note le casier, la traine et la pêche à la ligne et à la palangre sur DCP. La Martinique étant une région ultra périphérique de l’Europe, la pêche est réglementée par des textes locaux, nationaux et européens. Bien qu’il n’y ait pas de réglementation locale spécifique de la pêche de chondrichtyens en Martinique, la pêche est réglementée par des textes européens (Beaufort, 2017a). Ces derniers interdisent, entre autres, le pêche, le débarquement et la vente de certaines espèces comme le requin longimane (Carcharhinus longimanus), des requins marteau (Sphyrna sp.), le requin soyeux (Carcharhinus falciformis) et le requin renard à gros yeux (Alopias superciliosus) ainsi que la pêche ciblée de certaines espèces des profondeurs appartenant à la famille des Hexanchidae et Squalidae.

Dans le contexte actuel, avec peu d’informations disponibles sur les requins et les raies en Martinique et des observations peu courantes, le recueil et la valorisation des connaissances de sources diverses et variées (pêcheurs, plongeurs, structures environnementales, consommateurs, …) est un outil inestimable. Dans le cadre de cette étude, des informations ont été recueillies auprès de différents types de sources (enquêtes auprès des acteurs de la mer, littérature, médias, programme de recensement des observations …). Au total ce sont près de 600 observations de requins et de raies qui ont été recensées.

Avec 43 espèces de chondrichtyens identifiées (appartenant à 20 familles différentes et 7 ordres), la Martinique présente une grande diversité spécifique. Ces espèces sont exclusivement composées de requins et de raies : aucune chimère n’a été recensée. Cette diversité présente cependant une double fragilité avec un nombre élevé d’espèces menacées (35% sont inscrites sur la liste rouge des espèces menacées d’extinction et 33% qui risquent de rejoindre prochainement cette liste, source :UICN) et un faible nombre d’observations laissant supposer une abondance potentiellement faible.

De manière globale, le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum), les requins marteau (Sphyrnidae) et le requin mako (Isurus oxyrinchus) sont les taxons les plus fréquents parmi les observations relevées. On note aussi des grands planctonophages tels que le requin baleine (Rhinocodon typus) et les raies manta (Mobulidae) parmi les 15 espèces les plus observées en Martinique.

Malgré cette forte diversité, la Martinique semble abriter peu de sites à fonctionnalités particulières par rapport aux autres îles des Antilles françaises. En effet, les données recensées n’ont pas permis de mettre en évidence avec certitude la présence de zones de nurseries, de zones d’alimentation et/ou de zone liée à la reproduction. Néanmoins, quelques observations

91 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - ont permis de cibler certaines zones de l’île comme zone potentielle de passage et/ou de regroupement de requins de l’ordre des carcharhiniformes.

Avec près de 30 espèces identifiées dans les captures et une estimation de près de 3 000 individus (environ 71,5 % de requins et 21,5 % de raies) prélevés en Martinique au cours des 12 derniers mois, les données recueillies auprès des pêcheurs mettent en évidence une présence non négligeable de chondrichtyens dans les débarquements en Martinique. Les taxons « principaux » (qui représentent au moins 10 % des captures) sont les raies pastenagues (Dasyatidae) avec 17% des captures, le requin mako (Isurus oxyrinchus) avec 11%, la raie léopard (Aetobatus narinari) avec 11%, le requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) avec 11% et les requins marteau (Sphyrnidae) avec 10%. Pour limiter des biais liés à l’estimation du nombre de capture par les pêcheurs une analyse a été réalisée sur le nombre de pêcheurs (et non le nombre d’individus capturés par les pêcheurs). Le requin mako (Isurus oxyrinchus) est le requin péché par le plus grand nombre de pêcheurs avec 38,8 % des pêcheurs, suivi du requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) avec 33,9%, les requins marteau (Sphyrnidae) avec 31,4% et le requin longimane (Carcharhinus longimanus).

Concernant les engins de pêche, certains présentent une probabilité plus élevée de pêcher des requins et/ou des raies dont les lignes / palangres sur DCP, la palangre de fond, le filet trémail ainsi que la ligne trainante (plus de 90% des pêcheurs utilisant ces engins ont déjà pêché des élasmobranches au cours de leur carrière). Concernant la fréquence des captures, certains engins permettent une capture régulière de chondrichtyens tels que la palangre de fond et le filet trémail (plus de 70% des pêcheurs ont capturé plus de 3 individus sur les 12 derniers mois). A noter que la palangre de fond serait notamment utilisée pour la pêche ciblée de requins dans les profondeurs (comm. pers de pêcheurs).

Parmi les espèces identifiées dans les captures, on note la présence d’espèces dont la pêche, le débarquement et la vente sont interdits par des règlements européens (voir partie 1.1.3., Beaufort, 2017a) dont le requin marteau halicorne (Sphyrna lewini), le requin longimane (Carcharhinus longimanus), le requin renard à gros yeux (Alopias superciliosus). Ainsi que des espèces dont la pêche ciblée est réglementée (TAC zéro) dont le requin griset (Hexanchus griseus) et le requins chargin (Centrophorus granulosus). D’après les premiers éléments relevés, il ne s’agirait non pas d’un refus de l’application du règlement de la part des pêcheurs mais plutôt d’une méconnaissance de cette réglementation. Des campagnes d’information auprès des marins pêcheurs seraient un atout pour faciliter l’application des réglementations déjà existantes.

Concernant le rôle socio-économique des élasmobranches en Martinique, on distingue deux axes différents : la commercialisation et le tourisme. Le commerce d’élasmobranches sur l’île est présent sous diverses formes : les produits frais (darnes de requins, ailes de raies…), les produits congelés (darnes de requins, ailes de raies …) et les produits dérivés (huile de foie de requin, gélules de cartilages …). Les produits sont issus de la pêche locale et de l’importation. Localement, les darnes de requins et les ailes de raies

92 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - sont les plus prisées par les consommateurs : il n’y a pas de commerce développé sur les ailerons. La consommation d’élasmobranches est principalement occasionnelle à exceptionnelle : les consommateurs achètent du requin ou de la raie lorsqu’il y en a sur les points de vente ou cherche à en acquérir par curiosité culinaire. Les élasmobranches sont cuisinés dans les plats traditionnels tel que le colombo. On note aussi un marché porté sur l’huile de foie de requins qui est utilisée en complément alimentaire et comme huile de massage et/ou cicatrisante. Le marché de ce produit dérivé serait plus développé en Martinique que sur le reste des Antilles françaises (comm . pers. O.Beaufort). D’après plusieurs pêcheurs, la production de cette huile inciterait la pêche ciblée aux requins des profondeurs car ces derniers peuvent atteindre de grandes tailles et possèdent un foie particulièrement imposant (Hexanchidae). Il est important de rappeler que ces espèces sont considérées comme vulnérable à la pêche.

Le tourisme basé exclusivement sur l’observation de requins et de raies ne semble pas développé sur l’île, et pour cause principale, le faible taux de rencontre. En effet, à l’exception des raies pastenagues (Dasyatidae) et des raies torpilles (Narcinidae) les observations d’élasmobranches en plongée sont occasionnelles à rares selon les espèces. D’après les données recueillies auprès de clubs de plongée, on estime qu’une observation de raie léopard (Aeotobatus narinari) et de requin nourrice (Ginglymostoma cirratum) aurait lieu respectivement toutes les 448 et 1 700 plongées. Ces espèces sont pourtant régulièrement observées en plongée sur d’autres sites des Antilles françaises (dont St Martin et St Barthélemy ; comm.pers. O. Beaufort).

Cette première étude a mis en évidence la présence d’une grande diversité spécifique. Cette diversité est cependant fragile de part une abondance relative qui semble faible et la présence de nombreuses espèces menacées d’extinction. Bien qu’il n’y ait pas, à ce jour, de commerce important établi sur la chair des chondrichtyens, les premières informations recueillies montrent l’existence d’une pression de pêche non négligeable. Pour mieux évaluer l’impact potentiel des activités humaines sur les populations de chondrichtyens il est essentiel d’acquérir de nouvelles connaissances. La caractérisation des populations de chondrichtyens (diversité, abondance, répartition, sites à fonctionnalités particulières …) et la caractérisation des activités humaines sur le milieu marin (dont la pression de pêche) doivent être les axes prioritaires pour les prochaines années. Les informations recueillies seront des atouts pour la réflexion et la mise en place de mesures de gestion adaptées au contexte de l’île (notamment aux populations de requins et de raies mais aussi à l’utilisation de la mer par les martiniquais). Enfin, il est important de poursuivre l’information et la sensibilisation du public et des usagers de la mer. De part une image négative (principalement véhiculée par les médias), le terme « requin » est trop fréquemment suivi par les mots « danger » et « attaque ». Dans un contexte comme celui de la Martinique, une île tropicale située au milieu de la Caraïbe et abritant une diversité menacée de requins et de raies, il est essentiel que le public accepte la présence de ces animaux. La diffusion d’information est notamment un atout pour favoriser l’application des mesures déjà existantes (notamment l’interdiction de pêche, débarquement et de vente de certaines espèces de requins et de raies).

93 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - BIBLIOGRAPHIE

Beaufort, O.(2017a). Synthèse des recommandations et des réglementations en vigueur dans les eaux françaises et leurs applications dans les Antilles françaises. Synthèse. Association Kap Natirel. 9p.

Beaufort, O.(2017b). Suivi des populations côtières de chondrichtyens sur St Barthélemy par la méthode des caméras appâtées. Rapport d'étude. Association Kap Natirel. 22p.

Beaufort, O.(2017c). Déploiement du projet mondial Global Fin Print dans les Antilles françaises. Rapport de mission. Association Kap Natirel.

Beaufort, O., Boudin, N.(2016). Etude du phénomène d’agrégation de requins nourrice (Ginglymostoma cirratum) Saint Martin, Petites Antilles. Rapport d'étude. Association Kap Natirel. 19p.

Beaufort, O.(2015). Etude préliminaire de la pêche et de la consommation des élasmobranches en Guadeloupe. Association Kap Natirel. 33p. Rapport d'étude. Association Kap Natirel. 28p.

Beaufort, O.(2014). Abondance et distribution des requins citron (Negaprion brevirostris) autour de l’archipel Guadeloupéen et des îles du nord. Rapport d'étude. Association Kap Natirel. 23p.

Beaufort, O.(2013). Etude préliminaire des requins citron (Negaprion brevirostris) dans la réserve naturelle des îlets de Petite Terre. Rapport d'étude. Association Kap Natirel, Université des Antilles et de la Guyane. 35p.

Béné, C.; Macfadyen, G.; Allison, E.H.(2007). Increasing the contribution of small-scale fisheries to poverty alleviation and food securityFAO Fisheries Technical Paper. No. 481. Rome, FAO. 2007. 125p.

Bonfil R., Meyer M., Scholl M., Johnson R., O'Brien S., Oosthuizen H., Swanson S., Kotze D., Paterson M. 2005 Transoceanic migration, spatial dynamics, and population linkages of white . Science 310, 100–103. (doi:10.1126/science.1114898)

Bonfil, R.(1999). The dogfish (Squalus acanthias) fishery of British Columbia, Canada and its management. FAO Fisheries Technical Paper, 378/2: 54 pp

Bonfil, R. 1994. Overview of world elasmobranch fisheries. FAO Fisheries Technical Paper No. 341. Rome. 119 pp.

94 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Camhi, M., Fowler, S., Musick, J., Bräutigam, A. & Fordham, S.(1998). Sharks and their relatives: Ecology and Conservation. Occasional Paper of the IUCN Species Survival Commission Occas. Pap. No. 20.

Ceccarelli, D., Ayling, T.(2010). Role, importance and vulnerability of top predators on the Great Barrier Reef — a review.Research Publication No. 105, Great Barrier Reef Marine Park Authority, Townsville.

Chin A, Kyne PM, Walker TI, McAuley RB. 2010. A new integrated risk assessment for climate change: analysing the vulnerability of sharks and rays on Australia’s Great Barrier Reef. Global Change Biology 16:1936–1953. 10.1111/j.1365-2486.2009.02128.x

Compagno, L.J.V.(1990). exploitation and conservation. Elasmobranchs as living resources: advances in the biology, ecology, systematics, and the status of the fisheries.NOAA Technical Report NMFS, 90: 397–414

Dent, F., Clarke, S.(2015). State of the global market for shark products. FAO Fisheries and Aquaculture Technical Paper, 590: 1–187,IV

Dulvy, N.K., Baum J.K., Clarke S. et al. (2008) You can swim but you can’t hide: the global status and conservation of oceanic pelagic sharks. Aquat Conserv 18, 459– 482.

Dulvy, N.K., Fowler, S.L., Musick, J.A. et al. (2014a) Extinction risk and conservation of the world’s sharks and rays. eLife 3, e00590

Farrugio, H., Saint Felix, C.(1965). Etude des fonds de peche du littoral atlantique Martiniquais. I.S.T.P.M. Science et pêche, Bulletin d'information et de documentation de l'institut scientifiques et technique des pêches maritimes, Octobre 1975, N°251

Ferretti, F., Worm, B., Britten, G. L., Heithaus, M. R., & Lotze, H. K. (2010). Patterns and ecosystem consequences of shark declines in the ocean. Ecology Letters, 13(8), 1055-1071.

Gelsleichter, J., Manire, C.A., Szabo, N.J., Cortés, E., Carlson, J., Lombardi-Carlson, L., 2005. Organochlorine concentrations in bonnethead sharks (Sphyrna tiburo) from four Florida estuaries. Arch. Environ. Contam. Toxicol. 48, 474–483.

Heithaus, M. R., Frid, A., Wirsing, A. J., & Worm, B. (2008). Predicting ecological consequences of marine top predator declines. Trends in Ecology & Evolution, 23(4), 202-210. Heithaus, M. R., Wirsing, A. J., & Dill, L. M. (2012). The ecological importance of intact top- predator populations: a synthesis of 15 years of research in a seagrass ecosystem. Marine and Freshwater Research, 63(11), 1039-1050.

95 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Heupel, M.R., Carlson, J.K., Simpfendorfer, C.A. (2007). Shark nursery areas: concepts, definition, characterization and assumptions. Marine Ecology Progress Series, 337: 287– 297 DOI: 10.3354/meps337287

Heupel MR, Knip DM, Simpfendorfer CA and Dulvy NK (2014). Sizing up the ecological role of sharks as predators. Mar Ecol Prog Ser 495: 291-298.

Hoq, M.E., Yousuf A.K.H., Hussain M.G.(2011). Shark Fisheries in the Bay of Bengal, Bangladesh: Status and PotentialitiesSupport to Sustainable Management of the BOBLME Project, Bangladesh Fisheries Research Institute (BFRI), Bangladesh. 76 p.

Jennings, D. E., Gruber, S. H., Franks, B. R., Kessel, S. T. & Robertson, A. L. (2008). Effects of large-scale anthropogenic development on juvenile lemon shark (Negaprion brevirostris) populations of Bimini, Bahamas. Environmental Biology of Fishes 83,369–377.

John, M.E., Varghese B.(2009). Decline in CPUE of oceanic sharks in the Indian EEZ: urgent need for precautionary approach. IOTC–2009–WPEB05–17

Knip, D.M., Heupel, M.R., Simpfendorfer, C.A.(2010). Sharks in nearshore environments: models, importance, and consequences. Marine Ecology Progress Series, 402: 1– 11 DOI: 10.3354/meps08498

Lewison, R.L., Crowder, L.B., Read, A.J., Freeman, S.A.(2004). Understanding impacts of fisheries bycatch on marine megafauna. Trends Ecol. Evol. 2004;19:598–604.

Molina, J. M. and S. J. Cooke. 2012. Trends in shark bycatch research: current status and research needs. Reviews in Fish Biology and Fisheries 22:719-737.

Musick, J.A., Burgess, G.H., Cailliet, G.M., Camhi, M., Fordham, S. (2000). Management of Sharks and Their Relatives (Elasmobranchii). Fisheries, 25 (3): 9–13 DOI: 10.1577/1548- 8446(2000)025<0009:MOSATR>2.0.CO;2

Musick, J.A., Ellis, J.K. (2005). Reproductive evolution of chondrichthyans. In: Hamlett, W.C. (ed.) Reproductive biology and phylogeny of : sharks, rays and chimaeras, Vol. 3. Endfield, USA: Science Publishers: 45–79 Myers, R.A., Baum, J.K., Shepherd, T.D., Powers, S.P., Peterson, C.H. (2007). Cascading effects of the loss of apex predatory sharks from a coastal ocean. Science, 315 (1846): 1846– 1850 DOI: 10.1126/science.1138657

Reynal, L., Demaneche, S., Guyader, O., Bertrand, J., Berthou, P., Dromer, C., Maros, E., Bruneau, M., Bellanger, M., Merrien, C., Guegan, F., Lespagnol, P., Pitel-Roudaut, M., Jezequel, M., Leblond, E., Daures, F.(2013). Projet pilote du Système d’Informations

96 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Halieutiques (SIH) Martinique (2007-2010). Premières données sur la pêche en Martinique (2009-2010). http://archimer.ifremer.fr/doc/00156/26762/, 176p.

Rohr, A. , Stephan, E., Tachoires, S.(2014). Synthèse bibliographique sur les mesures de gestion spatio-temporelles liées aux élasmobranches.Rapport scientifique - Convention APECS/AAMP n° 13/124. 73 p

Simpfendorfer, C.A.(2000). Impacts of pollution and habitat degradation on shark populations. Abstract. American Elasmobranch Society 16th Annual Meeting, 14–20 June 2000, La Paz,

Simpfendorfer, C.A., Heupel, M.R., White, W.T., Dulvy, N.K.(2011). The importance of research and public opinion to conservation management of sharks and rays: a synthesis.DOI: 10.1071/MF11086 Marine and Freshwater Research, 62 (6): 518–527

Stevens, J. D., Bonfil, R., Dulvy, N. K., & Walker, P. A. (2000). The effects of fishing on sharks, rays, and chimaeras (chondrichthyans), and the implications for marine ecosystems Ices Journal of Marine Science (Vol. 57, pp. 476-494).

Stevens, J.D.(2002). The role of protected areas in elasmobranch fisheries management and conservation. In: Elasmobranch Biodiversity, Conservation and Management. Proceedings of the conference on Shark and Ray Biodiversity, Conservation and Management, Sabah,

Malaysia, July 1997. IUCN, Gland, Switzerland: 241–242 DOI: 10.1006/jmsc.2000.0724 UICN, 2010

Vianna, G.M.S., Meekan, M.G., Pannell, D., Marsh, S., Meeuwig, J.(2010). Wanted Dead or Alive? The relative value of reef sharks as a fishery and an ecotourism asset in Palau. Australian Institute of Marine Science and University of Western Australia, Perth.

Ward-Paige, C.A., Mora, C., Lotze, H.K., Pattengill-Semmens, C., Mcclenachan, L., Arias- Castro, E., Myers, R.A. (2010). Large-Scale Absence of Sharks on Reefs in the Greater- Caribbean: A Footprint of Human Pressures PLoS ONE, 5 (8): e11968 DOI: 10.1371/journal.pone.0011968

Worm, B., R. Hilborn, J.K. Baum, T.A. Branch, J.S. Collie, C. Costello, M.J. Fogarty, E.A. Fulton, J.A. Hutchings, S. Jennings, O.P. Jensen, H.K. Lotze, P.M. Mace, T.R. McClanahan, C. Minto, S.R. Palumbi, A.M. Parma, D. Richard, A.A. Rosenberg, R. Watson, and D. Zeller. (2009). Rebuilding global fisheries.Science 325: 578-585. doi:10.1126/science.1173146.

97 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

Annexe 1 : Carte des zones de pêche réglementées a

98 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Annexe 2 : Questionnaire pêcheur

99 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -

100 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Annexe 3 : Répartition de l’échantillonnage

Secteur

Nord Caraïbe Secteur Nord Atlantique

Grand Rivière

3

Le Marigot Le Prêcheur

1

2

Saint-Pierre

4 / 2 La Trinité

16

Le Carbet Secteur 7 Le Robert Sud Atlantique Belle Fontaine

10 1 Case-Pilote Le François

4 Schoelcher

21 4 / 3 Fort-de-France 2

Le Vauclin

Baie de Fort-de-France 10

Le Diamant Anses d’Arlet 6 Sainte-Luce Le Marin 5 / 1 4 / 1 9 / 1

Sainte-Anne X : nombre de marins-pêcheurs 1 X : nombre de clubs de plongée Canal de Sainte-Luce

101 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Annexe 4 : Description du type d’information par espèce

Nombre Espèce Type de source ayant permis la validation de la présence de l'espèce d'observations Année d'observation recensées* Archives Sciences Enquête de Date Famille Nom scientifique Nom vernaculaire Photo/vidéo Site du SINP TOTAL Avant 2010 Après 2010

Orde scientifiques participatives terrain indéterminé

Bathytoshia centroura, Raie pastenague épineuse 2 Dasyatis centroura X 2 Hypanus americanus, Raie pastenague 2 24 Dasyatis americana américaine X X X X 26 Dasyatidae Hypanus say, Dasyatis say Raie nez émoussée X 1 1 0 Pteroplatytrygon violacea, Raie pastenague violette 1 0 Dasyatis violacea X 1 Dasiatidae sp. 15 1 14 Myliobatis fremenvillei Aigle de mer taureau X 1 1 0

Myliobatiformes Myliobatidae Aetobatus narinari Raie léopard, raie aigle X X X X 34 2 32 Mobulidae sp 1 1 1 Mobulidae Mobula birostris Raie manta X X 13 1 2 10 Rhinoptera bonasus, Rhinopteridae. Mourine Américaine 1 0 Rhinoptera quadriloba X 1 Narcine brasilensis Raie électrique brésilienne X X X X 1 1 0 Narcinidae Narcine bancroftii Torpille de Bancroft X 1 1 Narcinidae sp 6 2 1 3 Tetronarce occidentalis ?

Torpediniformes Torpedinidae Torpedo nobiliana, Torpille noire X 1 1 0 Tetronarce nobiliana

Heptranchias perlo Requin perlon X 1 1 Hexanchidae Hexanchus griseus Requin griset X X X 21 4 17 rmes

Hexanchifo Hexanchus nakamurai Requin vache X 2 2 0 Centrophoridae Centrophorus granulosus Aiguillat gros yeux X X 2 2 0 Dalatidae Dalatias licha Liche X 2 2

Etmopteridae Etmopterus virens Requin lanterne X 2 2 0 Squaliformes Squalidae Squalus cubensis Aiguillat cubain X X X 1 1 Ginglymostomatid Requin nourrice, vache de Ginglymostoma cirratum X X X X X 71 7 3 61

ae mer, requin dormeur biformes Orectolo Rhincontidae Rhinocodon typus Requin baleine X X X X 30 2 9 19 Alopias superciliosus Requin renard à gros yeux X X X 3 1 2 Alopiidae Alopias sp 15 15 Lamnidae Isurus oxyrinchus Requin mako, taupe bleu X X X X X 61 1 7 41

Lamniformes Carcharhias taurus Requin taureau X X 6 6 Odontaspididae Odontaspis ferox Requin féroce X 3 3 Carcharhinus acronotus Requin nez noir X X 8 8 Carcharhinus falciformis Requin soyeux X X X X 3 1 2 Carcharhinus leucas Requin bouledogue X X X 16 16 Carcharhinus limbatus Requin bordé X X X 3 1 2 Requin longimane, pointe Carcharhinus longimanus blanche du large, requin X X X X X 41 1 6 34 océanique

Carcharhinidae Carcharhinus perezi Requin gris des Caraïbes X X X 5 5 Carcharhinus plumbeus Requin d'estuaire X X 2 2 Carcharhinus signatus Requin sombre X 2 2 Galeocerdo cuvier Requin tigre X X X X 40 1 5 35 Negaprion brevirostris Requin citron X X 11 1 10 Prionace glauca Requin peau bleu X X 25 3 22 Rhizoprionodon porosus Aiguille antillais X X X 3 1 2 Carcharhiniformes Carcharhinus sp 8 1 1 6 Scyliorhinus boa Roussette boa X X X X 10 2 8 Scyliorhinidae Galeus antillensis X 1 1 Sphyrna lewini Requin marteau halicorne X X X X 42 3 39 Sphyrna mokarran Grand requin marteau X X 12 4 8 Requin marteau à petits Sphyrnidae Sphyrna tudes X 1 1 0 yeux Sphyrna zygaena Requin marteau commun X X 1 1 0 Sphyrna sp 9 2 1 6 Triakidae Mustelus canis Emissolle lisse X X 2 2 0 TOTAL 17 29 13 28 16 569 25 77 457 * Attention, il s'agit du nombre d'observation d'au moins 1 individu de l'espèce concernée. Dans le cas d'observation de plusieurs individus d'une même espèce en même temps, la valeur sera de 1. 102 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 - Annexe 5 : Type d’habitat principal pour chaque taxon

Orde Famille Nom scientifique Nom vernaculaire Catégorie principale

Bathytoshia centroura, Raie pastenague épineuse espèce côtière Dasyatis centroura Hypanus americanus, Pour les espèces (ou taxons) qui utilisent Raie pastenague américaine espèce côtière Dasyatis americana Dasyatidae différents types d’habitats, l’habitat Hypanus say, Dasyatis say Raie nez émoussée espèce côtière Pteroplatytrygon violacea, Raie pastenague violette espèce profonde principal sera retenu pour identifier la Dasyatis violacea Myliobatiformes Dasiatidae sp. espèce côtière catégorie. Myliobatis fremenvillei Aigle de mer taureau espèce côtière Myliobatidae Aetobatus narinari Raie léopard, raie aigle espèce côtière - les espèces côtières : espèces qui Mobulidae sp espèce pélagique et/ou migratrice Mobulidae Mobula birostris Raie manta espèce pélagique et/ou migratrice utilisent principalement les zones près Rhinoptera bonasus, Rhinopteridae. Mourine Américaine espèce côtière Rhinoptera quadriloba des côtes ; Narcine brasilensis Raie électrique brésilienne espèce côtière - les espèces pélagiques et/ou migratrices Narcinidae Narcine bancroftii Torpille de Bancroft espèce côtière : espèces qui utilisent principalement, ou Torpediniformes Narcinidae sp espèce côtière Tetronarce occidentalis ? de manière régulière, les zones situées au Torpedinidae Torpedo nobiliana, Torpille noire espèce côtière Tetronarce nobiliana large des côtes ;

Heptranchias perlo Requin perlon espèce profonde - les espèces profondes : espèces qui Hexanchiformes Hexanchidae Hexanchus griseus Requin griset espèce profonde utilisent principalement les habitats situés Hexanchus nakamurai Requin vache espèce profonde dans les eaux profondes ( > 100 m). Centrophoridae Centrophorus granulosus Aiguillat gros yeux espèce profonde

Squaliformes Dalatidae Dalatias licha Liche espèce profonde Etmopteridae Etmopterus virens Requin lanterne espèce profonde Squalidae Squalus cubensis Aiguillat cubain espèce profonde

Requin nourrice, vache de mer, Ginglymostomatidae Ginglymostoma cirratum espèce côtière Orectolobiformes requin dormeur

Rhincontidae Rhinocodon typus Requin baleine espèce pélagique et/ou migratrice

Alopias superciliosus Requin renard à gros yeux espèce pélagique et/ou migratrice Alopiidae Alopias sp espèce pélagique et/ou migratrice

Lamniformes Lamnidae Isurus oxyrinchus Requin mako, taupe bleu espèce pélagique et/ou migratrice

Carcharhias taurus Requin taureau espèce profonde Odontaspididae Odontaspis ferox Requin féroce espèce profonde Carcharhinus acronotus Requin nez noir espèce côtière Carcharhinus falciformis Requin soyeux espèce pélagique et/ou migratrice Carcharhinus leucas Requin bouledogue espèce côtière Carcharhinus limbatus Requin bordé espèce côtière Requin longimane, pointe blanche Carcharhinus longimanus espèce pélagique et/ou migratrice du large, requin océanique

Carcharhinus perezi Requin gris des Caraïbes espèce côtière Carcharhinidae Carcharhinus plumbeus Requin d'estuaire espèce côtière Carcharhinus signatus Requin sombre espèce côtière Galeocerdo cuvier Requin tigre espèce côtière Negaprion brevirostris Requin citron espèce côtière Prionace glauca Requin peau bleu espèce pélagique et/ou migratrice Carcharhiniformes Rhizoprionodon porosus Aiguille antillais espèce côtière

Carcharhinus sp espèce côtière Scyliorhinus boa Roussette boa espèce profonde Scyliorhinidae Galeus antillensis espèce profonde

Sphyrna lewini Requin marteau halicorne espèce pélagique et/ou migratrice

Sphyrna mokarran Grand requin marteau espèce pélagique et/ou migratrice

Sphyrnidae Sphyrna tudes Requin marteau à petits yeux espèce pélagique et/ou migratrice

Sphyrna zygaena Requin marteau commun espèce pélagique et/ou migratrice

Sphyrna sp espèce pélagique et/ou migratrice Triakidae Mustelus canis Emissolle lisse espèce profonde

103 Améliorations des connaissances sur les chondrichtyens en Martinique - Mai 2017 -