Avant-Propos
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heritage days / MEETING POINTS / 1 Avant-propos Le Covid nous a tenus trop longtemps éloignés des meeting points emblématiques, du plaisir de s’y retrouver et d’y fêter ces retrou- vailles. Il nous est donc apparu essentiel de mettre en avant ces lieux de fête, de célébration, d’expression de la démocratie et de rencontre pour ces Heritage Days. Un nouveau nom pour une nouvelle dynamique, plus inclusive et élargie. Plus de 140 lieux vont ouvrir leur porte ce week-end. Certes il faudra réserver afin de pouvoir gérer les flux et éviter les longues files d’attente. Mais ces Journées ont été conçues comme des fêtes autour de notre patrimoine immobilier, mobilier et immatériel. Je suis très heureux du partenariat noué avec le monde de l’Horeca pour mettre en bouche et en appétit les amoureux de l’histoire de Bruxelles. Bruxelles est notre fierté et, aujourd’hui, nous sommes particulièrement heureux de nous réunir pour la célébrer partout dans notre capitale. Pour la première fois, nous avons proposé aux Bruxellois∙es d’ouvrir les portes de leur patrimoine. Une version « off » qui laisse la place à la créativité et vous offrira des surprises. Laissez aller votre curiosité, le patrimoine made in Brussels s’offre à vous. Pascal SMET, Secrétaire d’État en charge de l’urbanisme et du patrimoine 2 / MEETING POINTS / heritage days Pourquoi Urban adopte aujourd’hui le nom « Heritage Days » ? Comme la société évolue, les mots utilisés évoluent Voilà, pourquoi, en Français, le terme « patrimoine » également est devenu obsolète. Comme la société évolue, les mots utilisés évoluent également. Les Journées du Patrimoine ont été créés en France en 1984 ; elles portent alors le nom de « Journées Quel nom adopter désormais ? Portes ouvertes des Monuments historiques ». Si l’on se fie à diverses définitions du concept Cependant, très vite, ces Journées s’intéressent de patrimoine (par exemple celle donnée par à divers types d’architecture, au-delà des « monu- l’UNESCO : « Le patrimoine est l’héritage du ments », allant à se consacrer à des exemples d’ar- passé dont nous profitons aujourd’hui et que nous chitecture vernaculaire ou rurale. C’est pourquoi, transmettons aux générations à venir ») l’on voit en 1992, elles changent déjà une première fois bien que le terme « heritage » lui est très souvent de nom pour devenir les « Journées nationales associé. Aujourd’hui, il apparaît en effet que ce du Patrimoine ». Lorsque cette manifestation est terme, signifiant en latin « tout ce qui est transmis reprise à Bruxelles, en 1989, la Région bruxelloise de génération en génération », est globalisant et adopte déjà le nom « Journées du Patrimoine ». donc plus juste au regard de nos préoccupations actuelles vis-à-vis de la diversité sexuelle ou de En 2018, une table ronde organisée par l’Univer- genre, des femmes mais aussi de minorités visibles sité du Québec pose la question : « Le patrimoine et invisibles qui tous.tes contribuent à la richesse est-il sexiste ? ». En effet, de plus en plus d’intel- de notre culture. lectuel∙les notent le fait que le terme « patrimoine » provient du latin « patrimonium » qui signifie lit- En néerlandais, Bruxelles avait conservé l’appel- téralement « l’héritage du père », c’est-à-dire les lation « Open Monumentendag » qui, comme nous biens que l’on tient du père et que l’on transmet à l’avons vu ci-dessus, semble laisser supposer que ses enfants, et même parfois uniquement aux fils. ces journées se limiteraient exclusivement aux monuments. Cette appellation se devait donc Or, le mot matrimoine existait encore au Moyen- d’être également revue. âge, la femme pouvant alors hériter au même titre que l’homme. Il disparaît au XVIIe siècle, notam- Urban veillera à ce que les Heritage Days des ment dans le Dictionnaire de l’Académie française, années à venir soient plus inclusifs et respectueux lorsque se politise le langage et se créent les insti- et fassent état de la large palette culturelle que tutions culturelles, la grammaire, les dictionnaires. nous offre notre passé, au-delà d’anciens discours officiels. Même s’il est ici question de « patrimoine culturel », le mot « patrimoine » porte encore en lui le souve- Ensemble faisons évoluer notre histoire. nir d’un temps où la femme était écartée de tout processus de transmission de richesse et rendue financièrement dépendante de l’homme (cfr. Code civil français de 1804, appliqué en Belgique). heritage days / MEETING POINTS / 3 Préface Depuis 1989, la Région de Bruxelles-Capitale organise les Heritage Days. Cet événement majeur de la rentrée a pour objectifs de rap- procher la population du patrimoine de sa ville et de permettre au public de découvrir des lieux qui lui sont rarement ouverts, voire inaccessibles. Avec la thématique « Meeting points », cette 33e édition met à l’hon- neur les espaces publics : parcs, marchés, cafés, restaurants, cercles littéraires, salles de bal et de fêtes, théâtres, etc., mais aussi des lieux plus confidentiels tels que les parloirs, les salles de guichets, les salles de conseil d’administration, de réunion, les salons privés ou de réception, de même que les lieux de mobilisation collective, devenus emblématiques. La crise sanitaire que nous traversons depuis plusieurs mois nous démontre combien le simple fait, pour tout un chacun, de se ren- contrer physiquement, pour pouvoir échanger, faire part de ses expériences et de son vécu, est essentiel. Le nombre de propositions reçues par Urban en est la preuve. Jamais mobilisation n’a été aussi importante : pas moins de 142 sites et plus de 100 activités sont proposés dans ce programme rempli de nouvelles découvertes mais aussi de « classiques », que toutes et tous ont chaque année envie de visiter. Je tiens à remercier tout particulièrement l’ensemble des personnes – responsables des lieux, associations, administrations communales, etc. – qui veillent au bon déroulement de ces Journées et qui s’inves- tissent, chaque jour, à la préservation des témoins de notre passé. Je souhaite à toutes et à tous d’agréables et enrichissantes découvertes. Bety WAKNINE, directrice générale Urban 4 / MEETING POINTS / heritage days Introduction Décider de se rencontrer Pour ne prendre qu’un exemple parmi tant est déjà un acte d’architecture d’autres, il suffit de passer par nos principales places publiques à Bruxelles et de voir tout ce En réalité, le thème « Meeting points » de cette monde assis à même le sol avec ses boissons pour année pourrait aller bien au-delà des lieux de ren- comprendre combien la terrasse de café est un contre « physiques » que nous connaissons encore concept menacé. On voit aujourd’hui comment et qui structurent si bien notre vie en société, tels la jeune génération s’approprie des espaces de les salles de réunion ou de fêtes, les places et les la ville par le seul fait… de se les approprier : un jardins publics, etc. Si ces lieux se matérialisent square à la pelouse bien taillée autour d’une sculp- traditionnellement au travers de typologies archi- ture équestre devient une aire de pique-nique, tecturales qui ont traversé les époques avec de une esplanade d’immeuble de bureaux devient fort minimes évolutions formelles, ils n’ont pas un skate-park parce que s’y retrouvent plusieurs fondamentalement changés depuis qu’ils existent. skateurs, tout simplement. Décider est déjà un Certains architectes1 défendent cependant l’idée acte d’architecture. simple qu’un lieu, en ce compris tout espace public, ne doit pas toujours être défini matériel- Fin de la typologie architecturale ? lement par un type d’aménagement précis ; il peut Dans les années 1960, Michel Foucault invente aussi se définir par le simple fait d’une décision. le concept d’hétérotopie qu’il définit comme Fermer une rue au trafic par une barrière Nadar est étant le lieu physique de l’utopie. Si l’utopie est déjà, en soi, d’une certaine façon, un acte archi- par définition un lieu imaginaire, l’hétérotopie est tectural qui peut faire totalement basculer, très au contraire un lieu concret, mais qui n’en abrite naturellement, le statut de cet espace sans pour pas moins des conventions imaginaires, abs- autant qu’il ait été nécessaire de désasphalter ou traites, celles de nos règles sociales et rituelles, de payer des travaux couteux de mise en œuvre. pures constructions mentales forgées pour vivre Ces Heritage Days nous montrerons plusieurs ensemble. Le cimetière, le parc d’attraction, la exemples de lieux que la société d’autrefois, cabane d’enfant, autant de lieux très définis en avec ses conventions et les architectes qui les termes de typologie architecturale mais qui pour- ont servies, a mis à la disposition de nos besoins tant n’abritent que du « vent »… Dans les années de rencontres. Ils illustrent aussi, par contraste, le 1960 et 1970, les mœurs se sont relâchées au point décalage entre ces successives époques du passé, que l’on ait pu en effet s’étonner de ces lieux qui si bien organisées, et l’époque qui s’ouvre à nous ressemblaient désormais plus à des scènes de où l’appropriation devient un mode de vie. théâtre abritant autant de simagrées sociales dont on commençait à douter du bien fondé. Et si aujourd’hui, nous étions un pas plus loin et que le concept même de typologie architecturale venait de s’écrouler ? 1 Installation pour Urban Summer 2020 par Something Fantastic, Berlin heritage days / MEETING POINTS / 5 Au Moyen Âge, les églises étaient aussi bien des lieux de convivialité, de théâtre, de marché couvert et de réunion que les marchés étaient eux-mêmes des lieux de vente, d’enseignement, de théâtre ou de prêche… Nous sommes peut-être en train de redécouvrir ce potentiel de liberté qui s’ouvre à nous dans l’appropriation des espaces publics.