Journal de la Société des américanistes

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Electronic version URL: http://journals.openedition.org/jsa/17109 DOI: 10.4000/jsa.17109 ISSN: 1957-7842

Publisher Société des américanistes

Printed version Date of publication: 20 December 2019 ISSN: 0037-9174

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© Société des Américanistes 1

TABLE OF CONTENTS

Claude Lévi-Strauss (1908-2009), in memoriam Philippe Erikson

Les carnets nambikwara de Lévi-Strauss Emmanuel Désveaux

Entretien de Claude Lévi-Strauss Philippe Erikson

Articles

Nuevos datos sobre Aj Ch’aaj Naah, Aj K’uhuun de Toniná Ángel A. Sánchez Gamboa, Alejandro Sheseña and Guido Krempel

Ciudadanos de la comunidad. Appropriation de la bureaucratie et expérience de la « communauté » chez les Matsigenka (Amazonie péruvienne) Raphaël Colliaux

Notes de recherche

Could the Mexica toztli have been a sun parakeet? Connecting Mexica featherwork to South America Louise Deglin

“El rostro de los días”: sobre la corporalidad y las almas entre los mayas k’iche’ de Santiago Momostenango Alonso Zamora Corona

La documentación de las lenguas patagónicas en el gabinete de Samuel A. Lafone Quevedo. El Vocabulario Guenaken Marisa Malvestitti and María Emilia Orden

Positions

Acerca de la Declaración sobre el cambio de nombre del conjunto Jívaro Grégory Deshoullière and Santiago Utitiaj Paati

Hommage à Dominique Buchillet

In memoriam Dominique Buchillet : un engagement scientifique et politique Laure Emperaire

Two anthropologists recall Dominique Buchillet Janet Chernela and Jaime Diakara Dessano Dihpotiro

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Dominique Buchillet: caminhos e trilhas no rio Negro e em outros lugares Lúcia Hussak van Velthem and Marcio Meira

Bibliographie de Dominique Buchillet Laure Emperaire and Lúcia Hussak van Velthem

Comptes rendus

WEBSTER David, The population of Tikal. Implications for Maya demography Julien Hiquet

LITTAIF Aldo, Mitologia guarani. A criação e a destrução da Terra Joaquín Ruiz Zubizarreta

CHAMORRO Graciela y Isabelle COMBÈS (eds), Povos indígenas em Mato Grosso do Sul. História, cultura e tranformações sociais Cecilia Martínez

OSSIO ACUÑA Juan, Etnografía de la cultura andina Pablo F. Sendón

MACLAREN WALSH Jane et Brett TOPPING, The man who invented Aztec crystal skulls. The adventures of Eugène Boban Pascal Riviale

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Claude Lévi-Strauss (1908-2009), in memoriam

Philippe Erikson

1 À l’occasion du dixième anniversaire de sa disparition, le Journal de la Société des américanistes se tenait d’honorer la mémoire de cette figure majeure de l’anthropologie du XXe siècle qu’aura été Claude Lévi-Strauss. Pour ce faire, plutôt que de rajouter des gloses supplémentaires à la myriade déjà produites au cours des dernières décennies, la rédaction a choisi de mettre l’accent sur quelques volets encore inédits d’une œuvre qui n’a décidément pas fini de nous livrer toute sa richesse.

2 Proposé par Emmanuel Désveaux, le premier volet de cet hommage présente son ambitieux projet de déchiffrage, numérisation et réédition critique des carnets de l’expédition menée par Claude Lévi-Strauss chez les Nambikwara de mai 1938 à janvier 1939. Si cette mission est surtout connue par la relation qui en a été faite en 1955 dans Tristes Tropiques, le JSA peut s’enorgueillir d’avoir eu, dès 1948, la primeur de ses résultats scientifiques1. Contrairement à la précédente qui portait sur les Bororo (1936)2, cette seconde contribution majeure de Lévi-Strauss au Journal de la Société des américanistes ne mettait toutefois guère à l’honneur ses talents de dessinateur. En guise de clin d’œil, sinon de compensation rétrospective, le croquis inédit choisi pour orner la couverture de la présente livraison a précisément été extrait des manuscrits nambikwara conservés à la BNF. Il est reproduit avec l’aimable autorisation des ayants droit.

3 Le second texte que nous proposons est celui d’un entretien à ce jour inédit où Lévi- Strauss essuie le feu nourri de trois interlocuteurs passionnés. Il fut réalisé en 1978 comme galop d’essai pour un ouvrage que l’éditeur Pierre Bérès avait prévu de réaliser à partir d’une série d’interviews subséquentes, qui n’eurent cependant jamais lieu. Lévi-Strauss, de son propre aveu, gardait un mauvais souvenir de cette session, et son agacement transparaît clairement dans la transcription des prolégomènes de ce projet qui ne vit jamais le jour. C’est d’ailleurs un des intérêts de ce texte, qui montre un Lévi- Strauss quelque peu bousculé par des intervieweurs moins déférents que d’habitude, et auxquels il répond avec une revigorante lucidité.

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4 Dans un courrier adressé à la rédaction, Monique Lévi-Strauss, qui avait assisté à cet entretien préliminaire, déclarait en avoir oublié la teneur mais retenu la constante mauvaise humeur de son mari « que cela ennuyait profondément d’être questionné sur ce qu’il pensait dans sa jeunesse ». Le témoignage n’en demeure pas moins passionnant, poursuit-elle, notamment parce qu’il « montre un Lévi-Strauss passionné par le futur [et qui], à force d’anticiper, devançait parfois la pensée de ses collègues, qui ne le comprenaient pas. Mais c’est aussi grâce à cela que l’on parle encore de lui ».

NOTES

1. Claude Lévi-Strauss, « Contribution à l’étude de l’organisation sociale des Indiens Bororo », Journal de la Société des américanistes, 28, 1936, p. 269-304. 2. Claude Lévi-Strauss, « La vie familiale et sociale des Indiens Nambikwara », Journal de la Société des américanistes, 37, 1948, p. 1-132.

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Les carnets nambikwara de Lévi- Strauss

Emmanuel Désveaux

1 À la suite de la publication De Montaigne à Montaigne en 2016 et d’une nouvelle édition des Structures élémentaires de la parenté en 20171, Madame Monique Lévi-Strauss m’avait confié son souhait de voir publier les carnets que son mari tenait lors de sa deuxième expédition à l’intérieur du Brésil. Ces carnets sont aujourd’hui déposés à la Bibliothèque nationale de France (BNF), où nous nous rendîmes au printemps 2017, accompagnés de Stephen Hugh-Jones qui manifesta alors son intérêt pour le projet. Anaïs Dupuy-Olivier, conservatrice en charge des manuscrits du XXe siècle, nous reçut. À la vue du matériel qui se dévoilait au fur et à mesure qu’elle ouvrait les boîtes devant nous, nous comprîmes rapidement qu’établir une telle édition exigerait un énorme travail de préparation et était hors de portée d’un seul chercheur. L’idée resta ainsi en suspens. À l’automne suivant, apparut dans ma boîte de courrier électronique l’appel annuel de l’ANR. Ce fut le déclic : « voilà la solution ; il faut soumettre à cet organisme un projet élaboré autour des carnets nambikwara de Lévi-Strauss ». Je mobilisai alors quelques chercheurs (Paolo D’Iorio, Victor Rosenthal, Michel de Fornel, Jean Lassègue, Marion Carel et Willem Leo Wetzels) en vue de préparer une soumission, en collaboration avec l’Institut des textes et manuscrits modernes (Item, ENS) et la BNF2.

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Fig. 1 – Fig. 1 – Dessins réalisés au crayon à papier issus d’un carnet intitulé « Vilhena sept. 1938. Vocabulaires comparés Sabané-Tagnani » de Claude Lévi-Strauss (conservé à la BNF).

* * *

2 Claude et Dina Lévi-Strauss menèrent deux expéditions au cœur du Brésil, l’une qui les conduisit chez les Caduveo et les Bororo (novembre 1935-janvier 1936), l’autre chez les Nambikwara (mai 1938-janvier 1939). Précisons toutefois que Dina, atteinte d’ophtalmie purulente, dut interrompre sa participation à la deuxième expédition dès la fin juillet 1938. Elle ne connût que les Nambikwara. Son mari prolongea son séjour de plusieurs mois, jusqu’à atteindre, plus au Nord, les Mondé puis les Tupi-Kawahib. Tristes Tropiques, publié deux décennies plus tard, relate ces deux équipées. L’ouvrage connut un succès immédiat. L’insipide récit de voyage est transcendé ici en chef-d’œuvre philosophico-littéraire. Au regard de l’anthropologie et de sa quête des origines, le livre a valeur cardinale puisqu’avec les Caduveo, il reflète le choc esthétique, avec les Bororo – une société à moitiés – le choc sociologique, et enfin, avec les Nambikwara, le choc ontologique. Plus encore que les autres, ces derniers occupent une place éminente dans l’imaginaire des anthropologues et des philosophes contemporains : si les Nambikwara font le choix judicieux de l’échange plutôt que celui de la guerre, ils cèdent toutefois à la tentation de l’écriture comme vecteur d’asservissement.

3 Les carnets de la première expédition sont perdus, seuls ceux de la deuxième ont donc survécu. Leur étude préliminaire est déjà extrêmement révélatrice. D’abord parce qu’elle va à l’encontre de la légende selon laquelle Lévi-Strauss aurait été un piètre homme de terrain, trop taraudé par ses ambitions théoriques pour se plier aux exigences ingrates de l’ethnographie. Bien au contraire, on réalise alors qu’il observe tout, entend tout, sent tout, note tout et dessine tout (on savait déjà par ailleurs qu’il avait beaucoup photographié).

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4 Qu’on en juge plutôt : les notes de terrain de Lévi-Strauss chez les Nambikwara se présentent sous une forme matérielle très hétérogène, à savoir plus d’une dizaine carnets de facture et de taille différentes, auxquels s’ajoutent des feuilles volantes. Le total doit avoisiner un millier de pages. Les notes sont écrites en général au crayon. Elles reflètent une fièvre graphique, puisqu’elles comportent des descriptions ethnographiques (plutôt lapidaires), des dessins, des schémas de parenté, des notations musicales et, surtout, des données linguistiques. On trouve en effet des pages et des pages entières de vocabulaire, mais aussi de très nombreuses transcriptions linguistiques littéralement imbriquées à la description ethnographique, que ce soit en nambikwara, en tupi ou en portugais vernaculaire. Cette masse documentaire a un caractère vertigineux. Le fait que Lévi-Strauss n’inscrive jamais de date sur ces carnets renforce cette impression de fourmillement, de prolifération, mais aussi paradoxalement de dé-structuration. En revanche, la graphie, bien que fine, se présente de façon régulière et ne pose pas d’énormes problèmes de déchiffrage. Il faut signaler, enfin, que le corpus déposé à la BNF contient également le journal de Dina Lévi-Strauss. D’un point de vue formel, celui-ci se situe aux antipodes des carnets. Il s’agit d’un véritable journal, rédigé pour l’essentiel sur le mode de la narration. Nous disposons donc là d’un ensemble exceptionnel, à la fois au regard de l’ethnographie et de la linguistique régionales, de la genèse de Tristes Tropiques et plus globalement de l’œuvre de Lévi-Strauss.

5 L’absence de datation précise constitue la principale difficulté face à ce corpus. Bien entendu, on peut dans une certaine mesure avoir recours au journal de Dina Lévi- Strauss afin de dater les carnets de son mari et tenter de repérer des événements produisant d’un côté une description, et de l’autre un récit. La méthode a toutefois ses limites puisque, comme nous l’avons vu, Dina quitte l’expédition assez tôt, au bout de deux mois à peine. Heureusement, il existe un second témoignage chronologiquement daté : celui de Luís de Castro Faria, un ethnologue brésilien mandaté par le musée national de Rio de Janeiro pour participer à l’expédition, qui a été publié sous la forme d’un journal de bord (Castro Faria 2001).

6 Les carnets tels qu’ils se présentent aujourd’hui ouvrent plusieurs perspectives de recherche, et ce dans plusieurs domaines. Nous en identifions essentiellement quatre : linguistique, anthropologique, psychologique, et littéraire.

7 En matière linguistique, ces carnets offrent l’occasion d’enrichir la documentation concernant les langues nambikwara et tupi, voire celle du portugais brésilien vernaculaire. Les données recueillies à la fin des années 1930 possèdent une valeur historique et ouvrent la voie à une étude diachronique de ces langues. Willem Leo Wetzels, professeur à l’université d’Amsterdam, à la fois spécialiste du français et des langues du Brésil central, a pris en charge le volet linguistique du projet. Sa compétence en phonologie s’avère très précieuse dans la mesure où Lévi-Strauss avait recours à une méthode de transcription improvisée dont il faut saisir les règles implicites afin de pouvoir exploiter les données qu’il a recueillies.

8 Pour l’histoire de l’anthropologie, au-delà de l’aspect purement chronologique de l’expédition, on peut espérer repérer dans les carnets la trace de ces événements essentiels que sont d’une part l’entrée en contact des deux groupes nambikwara hostiles qui se résoudront à s’engager dans une relation commerciale plutôt que guerrière, d’autre part, la célèbre leçon d’écriture. Un des faits qui semble avoir marqué profondément Lévi-Strauss chez les Nambikwara réside dans le privilège

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polygame du chef. Il y reviendra à plusieurs reprises et, plus tard, le fait inspirera par ailleurs Pierre Clastres. On peut alors s’interroger sur l’articulation entre ces divers ordres de phénomènes – primat de l’échange, accaparement virtuel des femmes – dans le cheminement de la pensée de Lévi-Strauss. On y observe encore la première formulation sous la plume de Lévi-Strauss des observations qui donneront lieu à la thèse centrale des Structures élémentaires de la parenté, débouchant ainsi sur des réflexions majeures pour l’anthropologie et la philosophie politique contemporaines (même si ces dernières les ont un peu perdues de vue depuis quelques temps). La place en creux de la technologie dans l’œuvre de Lévi-Strauss semble y prendre racine chez les Nambikwara, un groupe ethnique qu’il décrit lui-même comme disposant d’une culture matérielle des plus rudimentaires. En outre, on y aperçoit les conditions dans lesquelles il se détache du paradigme diffusionniste (Lévi-Strauss 2016).

9 D’un point de vue psychologique, voire phénoménologique, il semble que Lévi-Strauss ait fait preuve d’une hyper-attention extrême au monde au cours de ces expéditions. Le caractère foisonnant de ses carnets témoigne de cette disposition d’esprit. Mais ils attestent également d’une vie intérieure, toujours en alerte, ayant une étrange propension, semble-t-il, à passer à l’acte graphique. Il faut noter ces mots, il faut dessiner cette situation, il faut capter et retranscrire ce rythme. Ici, la confrontation avec le journal de Dina est précieuse. Qu’est-ce qui déclenche le désir, ou l’impératif, de noter, qu’est-ce qui fonde ce que l’on pourrait appeler une voracité phénoménologique chez l’ethnologue (ou l’écrivain) ?

10 Enfin ces carnets éclairent le processus de textualisation : l’expédition chez les Nambikwara a donné lieu à plusieurs réélaborations textuelles, avant même leur apothéose littéraire dans Tristes Tropiques, vingt ans plus tard. Il s’agit en particulier d’une série d’articles publiés pendant la guerre ou juste après, et dont la prétention est uniquement scientifique (Lévi-Strauss 1943, 1944, 1946, 1948a, 1948b, 1948c, 1950). Les carnets pourraient livrer la matrice de ces variations ou de ces strates textuelles. On peut y suivre l’introduction – ou l’effacement – du « je » (thème il est vrai déjà largement traité par l’anthropologie dite réflexive), mais plus encore le passage de la conjonction « puisque » à la conjonction « quand », autrement dit de la raison causale à la raison narrative. Un premier sondage dans le corpus des carnets a déjà révélé l’omniprésence du mot « puisque ». Au fond, la causalité (le fonctionnalisme) est le sens commun du sociologue. Comment élaborer un discours qui échappe à sa trivialité ? Mieux, ne note-t-on pas sur le terrain un fait au détriment d’un autre uniquement lorsqu’on pressent immédiatement sa potentialité heuristique en termes de « puisque » ? L’écriture narrative, en particulier celle de Tristes Tropiques, apparaît alors, à côté d’une série de réflexions qui débouchera sur le structuralisme, comme un exercice d’exorcisme de la raison fonctionnaliste. Celle-ci tendait en effet les bras à Lévi-Strauss dans les années 1950 et il lui fallait déployer d’énormes efforts théoriques et littéraires pour y échapper.

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BIBLIOGRAPHIE

CASTRO FARIA Luís de 2001 Um outro olhar. Diário da expedição à Serra do Norte, Ed. Ouro sobre Azul, Rio de Janeiro.

LÉVI-STRAUSS Claude 1943 « The social use of kinship terms among Brazilian Indians », American Anthropologist, New Series, 45 (3), part 1, p. 398-409.

1944 « Reciprocity and Hierarchy », American Anthropologist, New Series, 46 (2), part 1, p. 266-268.

1946 « The Name of the Nambikuara », American Anthropologist, New Series, 48 (1), p. 139-140.

1948a « The Tupi-Cawahib », in Julian H. Steward (dir.), Handbook of South American Indians, 3. The tropical forest tribes, Bureau of American Ethnology, Smithsonian Institution, Washington, p. 299-305.

1948b « Tribes of the right bank of the Guapore river », in Julian H. Steward (dir.), Handbook of South American Indians, 3. The tropical forest tribes, Bureau of American Ethnology, Smithsonian Institution, Washington, p. 371-379.

1948c « Tribes of the Upper Xingú river », in Julian H. Steward (dir.), Handbook of South American Indians, 3. The tropical forest tribes, Bureau of American Ethnology, Smithsonian Institution, Washington, p. 321-348.

1950 « The use of wild plants in tropical South America », in Julian H. Steward (dir.), Handbook of South American Indians, 6. Physical anthropology, linguistics and cultural geography of South American Indians, Bureau of American Ethnology, Smithsonian Institution, Washington, p. 465-486.

2016 De Montaigne à Montaigne, édition établie et présentée par Emmanuel Désveaux, Éditions de l’EHESS, Paris.

2017 [1947] Les Structures élémentaires de la parenté, nouvelle édition avec un avant-propos d’Emmanuel Désveaux, Éditions de l’EHESS, Paris.

NOTES

1. Lévi-Strauss 2016, 2017. 2. Les lignes qui suivent reprennent l’essentiel du texte que j’avais rédigé pour solliciter le financement de l’ANR. Ce projet, retenu par l’ANR en 2018, doit s’étaler sur quatre ans. Sa mise en œuvre a débuté en janvier 2019. Camille Riverti a la charge de son suivi. Les mois écoulés ont été consacrés pour l’essentiel à la numérisation du corpus et d’archives attenantes par la BNF, partenaire du projet, sous la supervision d’Anaïs Dupuy-Olivier. Le travail d’analyse scientifique commencera en 2020. Enfin, la publication des carnets de terrain de Lévi-Strauss est prévue à l’horizon 2022. (https:// nambikwara.hypotheses.org)

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AUTEUR

EMMANUEL DÉSVEAUX

École des Hautes études en sciences sociales, coordinateur du projet ANR Nambikwara

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Entretien de Claude Lévi-Strauss avec Patrick Menget, Jean-Marie Benoist et Pierre Berès

Philippe Erikson

NOTE DE L’ÉDITEUR

Avec la collaboration de : Dominique Michelet [contributeur], ArchAm (UMR 8096), CNRS.

1 En juin 2008, lors d’un colloque organisé au musée du quai Branly pour célébrer le centenaire de Claude Lévi-Strauss, un des intervenants attisa la curiosité de l’auditoire en citant des extraits d’un entretien qui, bien que réalisé trente années auparavant, était demeuré inédit (Menget 2008). Les bandes magnétiques de l’enregistrement original avaient certes disparu, mais Menget conservait un exemplaire tapuscrit de la transcription, qu’il eut la générosité de nous confier. Telle est la source des larges extraits qui suivent, soigneusement édités au cours de l’été suivant.

2 L’entretien avait eu lieu en l978, à l’initiative de l’éditeur et bibliophile Pierre Berès [PB] (1913-2008), qui projetait de réaliser un ouvrage d’entretiens avec Claude Lévi- Strauss [CLS]. Il l’avait rencontré en compagnie de l’ethnologue Patrick Menget [PM] (1942-2019) et du philosophe Jean-Marie Benoist [JMB] (1942-1990), l’un et l’autre fins connaisseurs de son œuvre. Le premier venait de soutenir, sous sa direction, une thèse de doctorat (Menget 1977), tandis que le second avait conçu et introduit cette même année l’édition du séminaire interdisciplinaire qu’il avait aidé Lévi-Strauss à organiser au Collège de France durant l’année 1974-1975 (Benoist 1977). L’ambition de Pierre Berès était de faire dialoguer de brillants jeunes chercheurs (sur un mode qu’il qualifiait de « socratique ») avec l’éminent anthropologue, espérant obtenir de lui des commentaires sur des thématiques nouvelles ne concernant ni sa personne, ni son œuvre. Lévi-Strauss se prêta de bonne grâce à l’exercice, du moins pour un entretien préliminaire. Toutefois, se déclarant peu convaincu de la pertinence de cet exercice de maïeutique, et craignant par ailleurs que ce projet ne le détourne trop de son

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programme de travail, il ne donna pas de suite à ce premier dialogue et l’ouvrage ne vit jamais le jour.

3 Trente ans plus tard, la rédaction du Journal de la Société des américanistes avait envisagé d’annexer cet inédit aux actes du colloque du quai Branly évoqué ci-dessus (Erikson 2008). Lévi-Strauss, à qui le manuscrit avait été envoyé pour validation, s’était toutefois déclaré trop affaibli pour relire le texte avant d’en autoriser la diffusion. Une lettre émouvante datée du 15 octobre 2008 et adressée au directeur de la rédaction de l’époque le formulait en ces termes : « Gravement atteint par l’âge et par la maladie, il ne faut plus rien attendre de moi et rien me demander. Mon seul souvenir de la soirée Berès est celui d’une tentative ratée […] et je ne suis plus en état de le réécrire quand il le faudrait. » En dépit de l’intérêt intrinsèque de l’entretien, Lévi-Strauss était donc réticent à le voir paraître de son vivant, et la rédaction avait alors naturellement respecté sa volonté. Les années ayant passé, et le risque de le froisser ayant malheureusement disparu avec lui, il semble aujourd’hui opportun de sortir des archives cet entretien qui éclaire un moment de son œuvre. Nous profiterons également de l’occasion pour transmettre aux intéressés les remerciements différés, mais d’autant plus touchants, du grand homme qui, dans une lettre datée du 30 novembre 2008, avait enjoint à l’organisateur du colloque en son honneur de se faire « si l’occasion s’en présente, [son] interprète pour remercier tous les participants ».

4 En conclusion de l’entretien retranscrit ci-dessous1, Lévi-Strauss fait remarquer qu’« il y a des objets qui sont des preuves, des témoignages, d’autres qui n’en sont pas ». À l’évidence, en dépit de son caractère inabouti, ce texte relève de la première catégorie. En cette année 20192 et en accord avec Monique Lévi-Strauss, la rédaction du Journal de la Société des américanistes a jugé utile de diffuser ce témoignage pour honorer, à l’occasion du dixième anniversaire de sa disparition, la mémoire du père fondateur du structuralisme en anthropologie.

BIBLIOGRAPHIE

BENOIST Jean-Marie 1977 « Facettes de l’identité », in Claude Lévi-Strauss (éd.), L’Identité. Séminaire dirigé par Claude Lévi-Strauss professeur au collège de France 1974-1975, Grasset, Paris, p. 13-23.

ERIKSON Philippe (éd.) 2008 « L’anthropologie structurale ? Voyez-vous… it’s anthropology at its best », dans « Hommage à Claude Lévi-Strauss », Journal de la Société des américanistes, 94 (2), p. 9-67.

MENGET Patrick 1977 Au nom des autres. Classification des relations sociales chez les Txicão du Haut-Xingu (Brésil), thèse de doctorat de troisième cycle, École pratique des hautes études (VIe section), Paris.

2008 « Kinship theory after Lévi-Strauss’s Elementary Structures », Journal de la Société des américanistes, 94 (2), p. 29-37.

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ANNEXES

Transcription de l’entretien

[PB, JMB et PM débattaient entre eux de l’œuvre de Lévi-Strauss quand ce dernier entra. PM lui pose alors une première question dans le prolongement direct de leur conversation.]

PM : Il existe un terme en philosophie bouddhiste, un terme sanscrit, que les traducteurs traduisent alternativement par « vacuité » et « relativité ». Peut-on parler d’une « rencontre » entre la philosophie du structuralisme et celle du bouddhisme, qui refuse l’être ? CLS : Si j’étais obligé d’avoir une religion, je serais bouddhiste. C’est la seule qui ne m’ait pas hérissé quand j’étais en contact avec elle… La religion de l’Inde m’a révulsé.

PM : Est-ce que toutes les manifestations cultuelles ne vous révulsent pas un peu ? CLS : Pas le bouddhisme.

JMB : Est-ce que la philosophie de l’Inde rencontre plus de sympathie chez vous ? CLS : Il y a chez Montherlant une page tout à fait étonnante où il fait une comparaison entre l’esprit juif et l’esprit hindou. Cela me paraît une vérité extraordinaire. C’est dans des carnets, dans des notes… [Ici s’intercale un passage sur la Colombie britannique qui n’a pas été transcrit.]

PM : Il existe toujours, en Colombie britannique, un savoir traditionnel. Ça inclut la mythologie ? CLS : Oui. Lorsque je suis allé au Canada, je venais de terminer un livre sur un masque. Je crois que je connaissais à fond toute la littérature sur ce masque et toutes les variantes du mythe d’origine. J’ai rencontré un chef indien de la région du masque. Il m’a donné sa version du mythe. Elle était très différente de toutes les versions recueillies… Ce sont des gens très imbus de leur savoir…

PB : Sur quoi portaient principalement les différences ? CLS : D’abord sur le lieu. C’est un masque qui a été pêché dans un lac ; ce n’est pas le même lac. Il y a deux sœurs, au lieu d’une sœur et un frère… Ça rentre très bien, c’est très facile de savoir où est sa place dans la série… C’est un personnage tout à fait authentique, détenteur de ses traditions. On se rend compte quand on est sur le terrain que les informations dont nous disposons sont des mailles lâches entre lesquelles il y a des tas de choses qui ont passé…

PB : Comment se présentent les Indiens ? Quelle est leur proximité avec la vie quotidienne, les drugstores, etc. ? PM : Vous observez dans leurs récits, dans leurs propos, dans leurs savoirs archaïques, l’intégration peu à peu, ou la greffe, de ces éléments modernes. Est-ce qu’il y a une contamination par des thèmes ? CLS : Ils sont complètement modernisés, mais il y a deux secteurs. Un jeune Indien, champion de hockey, retournait chez lui pour être sculpteur ; il est obligé d’apprendre la langue, mais la raison pour laquelle il veut être sculpteur c’est que, quand on vend une sculpture, il n’y a pas d’impôts à payer. C’est une très bonne affaire. Il me raconte comment il a un rôle spécial dans les cérémonies. Son rôle, cela

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consiste à faire une prestidigitation avec du feu, à faire apparaître et disparaître du feu. Quand il était enfant, ça lui paraissait extraordinaire…

JMB : Il y a une acception de la survivance rituelle qui côtoierait plutôt les thèmes modernes. CLS : Il y a une renaissance rituelle, il y a des cérémonies qu’il n’y avait plus qui ont été célébrées cette année [1978].

JMB : Donc les énoncés ne se modifient pas du fait qu’ils sont conditionnés, par la télévision par exemple. CLS : Mais si, ça modifie profondément ; en 1973 j’ai été admis par faveur très spéciale à assister à un rituel d’initiation. La fonction d’initiation a changé. Autrefois, c’était pour acquérir un statut à la fois social et surnaturel ; maintenant, c’est une espèce de thérapeutique. On leur impose une initiation pour les réintégrer, il s’agit de les attirer là où ils doivent rester.

PM : Le déplacement de certaines fonctions comme ce rite d’initiation, est-ce que vous le caractériseriez comme un bricolage ? CLS : Ce serait abuser du terme. C’est le point d’impact d’un rituel très bien constitué qui s’est déplacé. Le thème n’a pas varié. Les gens sont toujours en quête d’un esprit gardien. Quand ils ont trouvé l’esprit gardien, ils chantent le chant que l’esprit gardien leur a révélé, ils dansent la danse que l’esprit gardien leur a enseignée.

PB : Mon ambition serait d’arriver à produire un livre qui ne vous donnerait pas de mal, dans lequel vous exposeriez un certain nombre de choses en dehors de celles que vous avez le talent, ou le génie, ou l’art d’exposer vous-même. Une de mes préoccupations aujourd’hui, c’est d’essayer de vous poser des questions ou, plutôt, de vous faire dire des choses vous- même qui ne seraient pas du tout ni une suite, encore moins une redite, de prises de position déjà connues, mais qui rendraient compte d’autres investigations… Je ne peux pas vous mettre sur la voie… : votre position de philosophe et d’autre part les motivations de cette position. Au terme des Mythologiques, avant les Mythologiques, nous sommes tous très curieux de ce qu’il y a en vous. CLS : Je suis venu parce que je ne voulais pas faire la mauvaise tête, mais cela ne marchera pas, parce que je n’ai pas le goût des dialogues. Ma tendance constante, dans le dialogue, c’est de me défiler, de me rétracter, de trouver un moyen d’échapper au dialogue ; ça ne me stimule pas du tout… Je ne pense pas en conversation. Pour penser, il faut que je me mette à écrire.

PM : Vous êtes un conférencier remarquable ; à chaque séance, on éprouvait pour vous une anxiété, on se disait : « Va-t-il ramasser les fils ? » et effectivement, à la fin de la séance, tous les fils étaient ramassés. CLS : Mais un cours n’est pas une conversation.

PB : Et Rousseau ? C’est quelqu’un qui vous a toujours fasciné. Il me semblait qu’il y avait dans cet intérêt que vous portiez à Rousseau une espèce de similitude d’approche dans laquelle l’anthropologie n’était qu’un des moyens. CLS : Disons qu’il y a comme cela dans ma biographie un moment où je me suis senti faire de l’identification à Rousseau et, à ce moment-là, je l’ai ressenti de façon très aiguë et très vive. C’est passé, c’est éloigné.

PB : On ne peut pas évoquer les états d’âme de cette identification ? CLS : Là, je vous dirai : je ne me rappelle pas, j’oublie. J’ai déjà écrit à ce propos à plusieurs reprises, mais l’identité personnelle me manque totalement. J’ai

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l’impression qu’on est le lieu où des choses se passent, mais une fois qu’elles ont cessé de se passer, c’est fini.

JMB : Ce n’est pas tant une identification personnelle avec Rousseau que la rencontre avec les textes – Discours sur l’origine de l’inégalité ou Du contrat social – qui vous ont semblé peut-être à un moment opérer d’une façon assez convergente avec le projet anthropologique que vous développiez. CLS : Peut-être même pas. C’est d’avoir retrouvé une espèce de perspective sur une société autre où je me suis senti dans la même optique qu’avait Rousseau… Tout cela n’est plus présent. C’est il y a vingt ans, ce n’est plus moi, c’est quelqu’un d’autre.

PB : Ce que vous étiez à ce moment-là, on serait bien content de le savoir dans la mesure où vous ne nous l’avez pas dit. Ce que vous étiez à New York en 1941, par exemple. CLS : Je peux vous donner un bon exemple : ma mère a retrouvé au mois de juillet dans une armoire de sa maison de campagne toutes les lettres que j’écrivais de New York en 1941-1942 et j’ai passé plusieurs jours à relire ces lettres. Pour moi, c’étaient des révélations, je n’avais pas l’ombre d’un souvenir de tout ce que je raconte dedans. J’avais commencé à écrire les Structures…a et j’avais commencé à m’intéresser à la formation logico-mathématique des systèmes de parenté, avant de rencontrer Jakobson. Tout cela, je ne le savais plus.

PB : Comment avez-vous fait vos recréations à partir de lui ? CLS : Quand il m’a appris ce qu’était la linguistique structurale, j’ai tout à coup reconnu ce que j’avais envie de faire, mais ce qui est certain, c’est que j’ai fait tout à fait autre chose. En quoi cela diffère, je n’ai jamais cherché à le savoir.

PB : Vous l’avez toujours su. CLS : Non, car pour savoir ça, il faudrait s’appliquer à répondre aux critiques. C’est quelque chose que je ne peux pas faire.

PM : Vous voyez votre vie scientifique comme une suite de moments sans liens que vous oubliez au fur et à mesure. Or, pour les gens qui vous lisent, il y a quand même une très grande cohérence. Vous ne vous voyez pas du tout comme on vous voit. En particulier en ce qui concerne ce que vous n’explicitez pas dans votre philosophie. C’est-à-dire que, étant ethnologue savant, vous avez forcément une épistémologie. CLS : Vague. Est-ce qu’il y a des choses à expliciter ?

JMB : Votre polémique avec l’existentialisme a tout de même correspondu à une élaboration philosophique ou épistémologique à partir de vos travaux anthropologiques et toujours en contact avec elle. Je pense à des passages de La Pensée sauvage ou également des thèses sur l’histoire : « Histoire et dialectique ». Cela correspond tout de même à des positions épistémologiques qui ne sont pas seulement des réfutations, des boucliers dans les polémiques. Elles restent là dans la matière des mots. Elles continuent à fonctionner pour les lecteurs que nous sommes. CLS : C’est paradoxal, la cause d’un malentendu constant entre l’auteur et ses lecteurs. Il y a des gens qui ouvrent aujourd’hui les Structures… Pour eux, c’est nouveau, ils m’écrivent… Je m’en fiche de ce que j’ai écrit il y a trente ans.

JMB : Vous ne vous voyez pas du tout dans une séquence par rapport à des écrits actuels ou futurs ? Vous vous refusez à poser un rapport de conditionnement, d’approximation et même d’auto-réfutation entre ces divers écrits, entre ces divers moments ? CLS : Non, parce que, pour le faire, il faudrait justement que j’aie le sentiment que j’ai une continuité de pensée et de personne à maintenir, à défendre, à justifier, alors que c’est un sentiment qui me manque.

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JMB : Dans cette vision de la succession des phases de votre travail même se reflète un peu votre méfiance de la téléologie historique, de toute finalité, de tout projet qui concernerait l’histoire générale de l’humanité. Je me souviens d’un passage dans lequel vous discutez l’existence d’une histoire à la Hegel… Est-ce qu’il y aurait un rapport ? Est-ce que ce serait même une sorte d’indiscrétion épistémologique de pensée ? Est-ce qu’il y aurait un rapport entre votre refus de téléologie dans l’avenir de votre œuvre et ce refus de la macro-téléologie : est-ce qu’il y a un rapport ? CLS : Probablement.

PB : Vous disiez tout à l’heure que vous aviez été très actif dans le parti socialiste. Vous n’avez pas produit d’écrits politiques ? CLS : Si, pas mal d’articles. Il y a eu un livre auquel j’ai participé qui s’appelait Révolution constructive.

PB : Quelle est l’ontologie sur laquelle vous vous appuyiez ? CLS : Ma formation politique, je la devais entièrement au parti ouvrier belge dont j’ai été une sorte de pupille à un moment. Ce petit groupe s’imaginait qu’il était possible de construire la société socialiste à l’intérieur de la société capitaliste, par des coopératives, des syndicats, etc., que cela grossirait. On ne pouvait rien imaginer de plus idiot. Je ne vois ni l’avènement d’une société socialiste, ni la fin d’une société capitaliste. Je suis complètement désintéressé de ces problèmes, je ne crois plus que la politique est pensable.

JMB : Est-ce que vous pensez que notre société est pensable ? CLS : Non. Il y a des choses qui sont pensables. Par penser notre société, je veux dire être capable de maîtriser par la pensée la multiplicité de variables qui sont à l’œuvre à l’intérieur de notre société, ce n’est pas une réaction à l’extérieur de cet ensemble de valeurs morales… Je n’ai pas du tout fait un détour anthropologique pour m’interroger sur la société, j’ai fait un détour anthropologique parce que cela m’ennuyait d’enseigner la philosophie. Parce qu’il se trouvait que Nizan avait épousé une de mes cousines et qu’il m’a dit : « Quand on est philosophe, on peut filer du côté de l’ethnologie. » Je me suis dit : « Pourquoi pas ? » ; c’était beaucoup plus par goût de l’exotisme et du camping que pour m’interroger sur la société.

JMB : Je ne crois pas qu’on part à l’autre bout du monde pour s’interroger sur sa société. C’est un résultat possible au retour, quand on est parti. CLS : On peut partir parce qu’on se pose des problèmes sociologiques. Ce n’était pas du tout mon cas.

PB : Ayant fabriqué une œuvre de cette importance, vous êtes revenu trop chargé de problèmes personnels du savant que vous êtes devenu à ce moment-là, ce qui a probablement masqué l’interrogation que, simple citoyen, vous auriez conservée ? CLS : Je crois que vous poétisez les choses.

PB : Ce serait une explication du refus que vous opposez. Il fallait que ce travail fût suffisamment intense pour que les autres questions ne se posent plus à vous… CLS : Je dirais que c’est une évolution normale de faire du militantisme quand on est jeune et de s’en désintéresser plus tard. C’est arrivé à des milliers de personnes.

JMB : Il y a des engagements plus prioritaires : écrire, travailler, rassembler, rendre justice à cette matière que vous aviez collectée… CLS : Il y a tellement de contingence qui rentre là-dedans. Je faisais activement de la politique quand je suis parti au Brésil. C’était la veille de la guerre, j’ai filé aux États-

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Unis. J’ai reçu des propositions pour rejoindre de Gaulle à Londres. Si je l’avais fait, probablement que j’aurais été dans la politique au lendemain de la Libération. Je ne l’ai pas fait. Pourquoi ? Je me plaisais beaucoup à New York, à n’avoir aucune orientation.

PB : Quels étaient vos rapports avec Breton à ce moment-là ? CLS : Fort intimes. Nous nous étions beaucoup vus sur le même bateau qui nous amenait, puis nous nous sommes perdus à la Martinique parce que je suis parti sur un bateau différent du sien. J’ai retrouvé dans des lettres le récit de mes retrouvailles avec Breton sous la forme suivante : nous nous étions téléphoné, il devait venir me voir et puis il n’était pas là ; puis j’ai reçu de lui un coup de téléphone angoissé d’un café ; nous avons repris contact. On se voyait énormément, plusieurs fois par semaine.

PB : Comment est-ce que vous réagissiez à cette papauté ? CLS : Je ne faisais pas vraiment partie du groupe. On n’a jamais considéré que j’étais engagé par ce que faisait le groupe. Il y avait Duchamp, Tanguy, Max Ernst, Masson, sur quoi Breton régnait.

PB : Qu’est-ce qu’il vous apportait, est-ce que son écriture vous impressionnait ? CLS : J’avais déjà lu Breton avant, j’avais beaucoup admiré Breton. C’était pour moi une espèce de personnage mythique.

PB : Je soupçonne Breton de s’être assez peu intéressé aux autres à New York. CLS : Il était très gentil. J’ai encore des lettres de lui du bateau. Ce n’est pas publiable. Nous échangions des petites lettres, c’était sur la question de savoir si l’originalité absolue était un gage de beauté. C’était une petite correspondance. Probablement que j’avais dit non. Il m’a énormément appris, nous courrions les antiquaires. Il y avait ça, il y avait les jeux de la vérité, c’était très affriolant pour moi car je n’avais jamais connu ça, une telle liberté, sinon de mœurs car ils étaient très puritains en vérité. J’y étais en spectateur… Jakobson et Breton se voyaient à travers moi. Moi, je n’avais jamais été dans des milieux artistiques ou littéraires d’avant-garde, tandis que Jakobson y était allé en Russie : les peintres russes…

PB : Comment expliquez-vous pourquoi vous avez oublié tant de choses, même de votre correspondance, alors que vous êtes un des hommes qui ont la plus belle mémoire ? CLS : Tout cela est fait à coups de fiches. Sans cela, je ne me rappellerais pas. Ou, plus exactement, je me rappelle pendant que je le fais, dès que c’est fini, c’est oublié…

PB : Il y a sept ou huit ans j’avais commencé la collection « Miroir de l’art ». Un mot de Françoise Cachin m’avait fait entendre que vous prépariez un Rousseau ; que vous m’en auriez donné un morceau. Vous avez donc pensé cela ? CLS : J’ai toujours pensé qu’il pouvait y avoir une esthétique de Rousseau.

PB : C’est quoi, l’esthétique de Rousseau ? CLS : Il y a quelque chose que je me rappelle de façon fugitive. Dans l’Essai sur l’origine des langues, il invente par anticipation ce que c’est que la peinture non figurative pour s’en servir à des fins critiques. Il y a, d’autre part, tout l’antagonisme entre Rousseau et Rameau. Cela pose tout un problème parce que le formaliste, c’est Rameau, et on se sent plutôt du côté de Rousseau. Qu’est-ce que c’était exactement que la position de Rousseau ? C’était la position de l’art naïf devant l’art savant. En écoutant Le Devin du village, j’ai toujours été frappé de l’extraordinaire maîtrise qu’il avait de la prosodie

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du français et qu’au fond, cela se produit deux fois dans l’histoire de la musique. Cela se produit avec Le Devin du village et, ensuite, avec Pelléas. Mais savoir faire chanter le français, il n’y a que Rousseau et Debussy qui l’ont su.

JMB : Est-ce que c’est important pour vous, Le Devin du village ? CLS : C’est très réussi. Il y a un disqueb ! Le problème c’est que, pour faire quelque chose sur l’esthétique de Rousseau, il faudrait être beaucoup plus calé en musique que je ne le suis.

JMB : Mais vous avez, dans des passages des Mythologiques, montré beaucoup de savoir sur la composition musicale, sur l’analyse. CLS : Vous savez, ce que j’ai fait pour le Boléro, je n’aurais peut-être pas pu le faire pour autre chose que pour le Boléro. C’était particulièrement facile. J’ai essayé de le faire pour autre chose… J’avais essayé sur la Pastorale ; il y a des choses très étranges. On a l’impression qu’on entend des choses qui coulent et, quand on regarde la partition, la manière dont c’est construit métriquement est très compliquée. Je me suis dit que ce serait intéressant de comprendre pourquoi ce n’est pas possible.

PB : Mais les rapports de Rousseau avec les peintres de son temps sont assez maigres […]. CLS : On voit bien pourquoi il ne s’est pas intéressé à la peinture. Parce que c’était bourgeois, sophistiqué… Pourquoi il a pensé qu’en musique ce n’était pas comme en peinture : il y avait la possibilité de faire quelque chose en musique qu’on ne pouvait pas faire en peinture… probablement cette idée latente que la musique, c’est de plain- pied avec une expression populaire. Les sauvages chantent, dansent, mais ils ne font pas de tableaux, peut-être que c’est une explication…

JMB : La musique est beaucoup plus proche de la fête. CLS : Cela demanderait qu’on lise tout Rousseau dans cette perspective, qu’on lise toute la correspondance. J’ai écrit comme ça cinq, six passages légers sur Rousseau pour le 250e anniversaire de sa naissance à Genève. Gouhier, avec qui je suis en excellentes relations, m’a écrit un jour : « Tout de même, ce que vous avez écrit là n’est pas vrai. » Il a raison, car il connaît Rousseau mieux que moi. Il a travaillé en érudit sur Rousseau, ce que je n’ai pas fait.

PB : Quelle est la part de rigueur et d’érudition que vous exigez de votre création ? Quel est, entre l’artiste et le savant, le mariage que vous faites ? CLS : J’espère être un savant. L’artiste, c’est par-dessus le marché.

PB : Il n’y a jamais bousculade de l’un sur l’autre ? CLS : Très évidemment, constamment. Quand j’ai l’idée d’un article, je vais très au- delà de ce que je suis en droit scientifiquement d’affirmer et alors le travail d’écriture consiste à vérifier, à revenir en arrière sur ce que j’imaginais… Écrire c’est une agonie. Je suis très sensible à l’incantation des idées.

PB : Moi, ce qui m’intéresse, c’est l’avatar de Lévi-Strauss, sa position philosophique. CLS : Vous voulez que je donne une position philosophique, alors que j’ai constamment écrit que je n’ai pas de position philosophique ! Ou alors que j’adapte n’importe laquelle qui m’arrange au moment où…

PB : Vous avez beaucoup fréquenté Chomsky ? CLS : Je ne le connais pas.

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PB : C’est un homme qui vous intéresse ? CLS : C’est très difficile pour moi. Je lui pardonne mal d’avoir rendu la linguistique ennuyeuse.

JMB : Mais l’aspect transformationnel ne vous intéresse pas ? Vous aviez vous-même repéré les systèmes de transformations, vous ne pensez pas qu’entre Jakobson et votre travail ?… CLS : Les systèmes de transformations : il disait qu’il fallait utiliser des transformations à la science de l’homme ; c’est ni Chomsky, ni moi qui l’avons inventé, c’est déjà dans un article de Cassirer de 1938.

JMB : Mais le parallèle entre ce que, lui, a fait et ce que vous avez fait ne vous intéresse pas ? CLS : Cela, je crois que c’est très, très superficiel parce que son transformationnisme est purement formel, le mien est sémantique.

JMB : Et l’articulation de l’un à l’autre, même malgré cette différence, ne vous paraît pas être un terrain intéressant ? CLS : On peut dire que, moi aussi, je cherche des structures profondes des mythes, mais ce n’est pas la même chose, cela recouvre des contenus tout à fait différents. Ce qui me gêne dans les structures profondes de Chomsky, c’est que ses structures profondes sont encore des structures linguistiques et donc cela impliquerait que nous pensons en petit-nègre avant de penser dans notre langue, alors que mes structures profondes sont d’une autre nature que les structures superficielles.

JMB : Si on vous dit « générativité », chez vous cela se situe tout à fait différemment, vous êtes dans l’après. CLS : Les Structures… sont un livre génératif : il s’agit d’engendrer un certain nombre de règles de mariage à partir d’un petit nombre de principes.

PM : Comment avez-vous reçu la critique de Chomsky sur le type de structures dont s’occupent les structuralistes, où Chomsky dit : « Au fond, ce n’est qu’un artifice de la procédure de découverte et cela ne va pas bien loin. » Il me semble surtout, dans sa critique, qu’il s’adressait aux linguistes. CLS : Je crois que ce que fait la linguistique structurale classique et ce que j’essaie de faire, même, atteint la façon dont on pense. Quand je suis en face des transformations de Chomsky, je ne peux pas croire qu’on pense comme ça. Je suis tout prêt à croire que c’est la manière la plus économique pour essayer de faire fabriquer des structures superficielles par un ordinateur, mais je ne crois pas qu’un esprit humain pense comme un ordinateur.

JMB : C’est la sémantique qui empêche l’esprit humain de penser comme un ordinateur ? Quel serait l’obstacle ? CLS : C’est le côté additif de la transformation chomskyenne. On commence par quelque chose et on ajoute quelque chose et on ajoute encore quelque chose. J’ai l’impression que l’esprit travaille par une espèce d’appréhension globale du résultat qui s’affine, et cela fonctionne dans l’autre sens.

PB : Vous réfutez le microscope ? Le microscope n’y verrait pas autre chose. CLS : Je refuse ce cartésianisme à l’envers. Je ne crois pas qu’on le libère de cette façon-là par des parties qu’on ajoute les unes aux autres et qui finalement donnent un résultat.

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PB : Ce qui débouche très vite sur le problème de l’intuition, alors, à quelque degré qu’elle se situe. CLS : C’est plutôt un côté mécanisme et téléonomie.

JMB : Qui va de pair avec une métaphysique du sujet que vous critiquez d’autre part. CLS : Je suis tout prêt à reconnaître qu’il [Chomsky] a fait des choses très importantes dans la théorie de la syntaxe… Que la théorie de la syntaxe ait été négligée par les structuralistes classiques… Ou les structures sont profondes et alors elles ne sont pas déjà linguistiques, ou elles sont déjà linguistiques et elles ne sont pas profondes. Piaget a dit des choses très justes là-dessus. Il y a en effet des structures profondes, mais qui ne sont pas proprement linguistiques, qui sont communes à toutes les formes de l’activité symbolique et qui se spécifient en langage. Mais cette idée qu’il y a quelque chose sous le langage et que c’est encore du langage, à mon avis cela ne marche pas, parce qu’alors il y a encore quelque chose dessous et ainsi de suite indéfiniment. Et si, sous les structures profondes, il y a des structures non linguistiques, alors je ne vois pas pourquoi on a besoin des structures profondes.

PM : Chomsky l’a fait probablement parce que c’est commode, c’est simple. C’est un bon mécanisme générateur, cela permet de rendre compte de la syntaxe, en particulier. L’objet de Chomsky n’étant pas au départ de rendre compte de toute l’activité de l’esprit humain, mais de la langue et de la façon dont cela parle, dont cela circule. CLS : Oui, qu’il ait fabriqué des règles qui sont parfaitement cohérentes et qui permettent de reconstituer un certain nombre de choses, je veux bien… Simplement, je ne peux pas croire que c’est comme ça que cela fonctionne.

PM : Ce n’est pas sa métaphysique qui vous gêne, sa métaphysique du sujet cartésien de l’infinité des possibles ? CLS : Pourquoi est-ce qu’il y a une infinité des possibles ? Cela ne me paraît pas sérieux. Pratiquement tout se passe comme si c’était infini, donc de savoir si ça l’est en droit et en fait, c’est une question scholastique, ça devient gênant à partir du moment où on s’en sert pour en faire une métaphysique…

PB : Quelles ont été les réactions de Chomsky par rapport à l’œuvre de Lévi-Strauss ? CLS : Il est très négatif ; il en a très peu parlé et, au fond, ce qu’il en a dit, c’est que cela ne l’intéresse pas.

JMB : Il vous voit comme une extension d’une méthode linguistique. PB : Cette façon de réfuter Chomsky, ou plutôt ce mécanisme, est déjà une prise de position philosophique, finalement, que vous le vouliez ou non. CLS : Ce n’est pas une réfutation, je ne me le permettrai pas parce que je ne suis pas assez linguiste pour faire la réfutation, c’est pourquoi cela ne m’accroche pas.

JMB : Est-ce que vous approuvez les gens qui se considèrent comme des hommes de science, mais qui relativisent l’attitude du savant et qui contestent même le projet d’un logos scientifique ou d’une raison scientifique ? CLS : Je serais porté à dire le contraire. Dans notre civilisation, la seule chose qui me paraît mériter le respect et l’estime, c’est la science.

JMB : Dans la mesure où les cultures que vous étudiez en tant qu’anthropologue ne sont pas porteuses de projets scientifiques, vous ne voyez pas ce phénomène d’un regard d’anthropologue. Ce n’est pas un objet pour l’anthropologie, l’anthropologie vise à être une

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science, mais le fait qu’il y ait une raison scientifique dans une culture particulière n’est pas un objet anthropologique. CLS : C’est pourquoi je crois à la science.

PM : Vous ne pensez pas que la rationalité scientifique puisse être contestée institutionnellement, c’est-à-dire parce qu’elle est organiquement liée à certaines institutions qu’on peut contester pour d’autres raisons ? Donc, du même coup, on rejetterait la rationalité scientifique. CLS : De la même façon on peut dire qu’il n’y aurait pas d’ethnologie s’il n’y avait pas eu de colonialisme, donc il faut rejeter l’ethnologie. Cela s’est dit. PB : Il n’y avait pas de colonialisme au temps de Bougainvilliers ? JMB : Si, il y avait quand même des formes d’exploitation, il y avait des formes commerciales. CLS : Il y avait un embryon de colonialisme, comme il y avait un embryon d’ethnologie, cela s’est tout de même développé de pair, mais l’un à l’abri de l’autre.

JMB : Vous ne pensez pas qu’il y a un terrorisme du discours scientifique pour employer une expression gauchiste, c’est-à-dire que la parole scientifique ne s’impose pas selon des critères rationnels, mais elle s’impose parce qu’elle vient d’une position institutionnelle dans laquelle se trouvent nos savants. C’est l’essentiel de la critique institutionnelle qu’on trouve partout en ce moment aux États-Unis, en France, en URSS également. CLS : Non, moi je suis imperméable à tout cela. Ce qui m’intéresse, c’est qu’on a découvert le code génétique.

PB : Je voulais vous demander, justement, quels sont vos intérêts ou vos activités avec la science en marche. C’est-à-dire, la découverte physique, même lorsqu’elle est incertaine, vous importe ? Est-ce que le code génétique flatte chez vous l’espoir d’une explication plus précise de l’homme, etc. ? CLS : Je lis très attentivement tous les mois le Scientific American. Je ne comprends pas tout.

PB : Et vous êtes plus satisfait d’être Lévi-Strauss, contemporain du code génétique et des travaux de Grothendieck, que si vous étiez Montaigne, contemporain de la zoologie de Watsonc ? Vous n’avez pas l’impression que la science, au fond, c’est vous ou Montaigne plutôt que Grothendieck ou Jacques Monod ? CLS : La science, ce sont des physiciens ou des biologistes.

PB : Cette institutionalité (ou cette autorité) de la science mène donc des hommes comme chacun de nous – et, ce qui est plus grave, de votre importance – à faire un crédit à quelque chose qui finalement est quelquefois un dogme. CLS : Il y a, à toutes les époques et dans toutes les sociétés, par rapport à toutes les institutions, des hommes qui ont vu juste et des hommes qui se sont trompés… Il n’y a pas une telle quantité de sociétés qui veulent avoir une science qui soit en accord avec ses dogmes politiques. Enfin, cela s’est vu dans le passé, cela se voit encore aujourd’hui de temps en temps, on ne peut pas dire que cela soit dans le monde entier… J’ai parcouru l’autre jour un article dans Les Temps modernes destiné à montrer que les mathématiques étaient réactionnaires, fonction d’un système institutionneld. J’avoue qu’après avoir lu l’article, j’étais aussi avancé qu’avant. On a même dit que le structuralisme était une philosophie d’un monde technique et technocrate… Du moment que cela arrive dans toutes les sociétés, je ne vois pas pourquoi cela n’arriverait pas dans la nôtre, cela ne crée pas un vice particulier à notre société.

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JMB : Le discours scientifique et le statut du savant vous paraissent relever d’une anthropologie, tout de même. Sans contestation politique, est-ce que cela vous paraît un objet d’anthropologie ? CLS : Il y a sûrement une sociologie du savant qui peut être faite. Je ne crois pas que ce soit une anthropologie… Tout cela me paraît tellement secondaire et insignifiant par rapport à la démarche de la science.

PB : Donc, vous attendez quoi ? CLS : De comprendre des choses qu’on ne comprenait pas.

PB : C’est intéressant dans votre bouche car vous, justement, vous n’avez besoin de rien de tout ça pour comprendre ce que d’autres n’ont pas compris. Vous n’avez en rien profité des enseignements de la science. CLS : Mais je dirais : « malheureusement », car si nous étions capables d’en profiter mieux, nous serions capables de faire des choses bien meilleures. Nous ne nous sommes pas encore rejoints dans ce que nous appelons les « sciences humaines », qui manipulent des ombres ou des fantômes.

PB : Mais comme vous, vous êtes l’exemple qu’on peut les manipuler de façon très bonne et très scientifique ! CLS : Non, de façon préscientifique ; je dirais volontiers que ce que je fais – et encore je manque de modestie –, au mieux, ce que je fais, cela ressemble à de l’astronomie du temps des Babyloniens… Qui tout de même commençaient à comprendre d’autres choses…

JMB : Qu’elle était l’instrument d’un pouvoir… CLS : Parce qu’en effet, le pouvoir peut s’en servir. Votre comparaison serait juste si le pouvoir se disait : « Lévi-Strauss nous a montré comment les mythes étaient faits, nous avons besoin de mythes pour faire marcher les foules, nous allons donc fabriquer des mythes qui seront susceptibles de paraître comme des vrais mythes et nous pourrons faire marcher les foules. »

JMB : Je ne le pensais pas dans ce sens-là. Je le pensais plutôt dans le sens où je ne connais pas de société où une astronomie ou une astrologie soit née en dehors d’une structure étatique, d’une organisation étatique. Si vous voulez, l’astronomie est liée à l’État. CLS : L’astronomie n’existerait pas s’il n’y avait pas eu une structure étatique qui a fait aussi le CNRS, des professeurs d’ethnologie… Le pouvoir estime qu’il est bon qu’il y ait des ethnologues, quand ce ne serait, disons, que pour faire un travail de diversion.

JMB : La question à laquelle je voulais en venir c’est : est-ce que votre expérience d’ethnologue et de savant – vos réflexions sur cette société sans État – vous a parfois amené à vous poser des questions sur les sociétés avec État et sur l’État ; en particulier, sur notre État ? CLS : On se heurte toujours à cet obstacle qu’on n’est pas devant le même ordre de grandeur et qu’il ne s’agit pas de comprendre ou de préférer des sociétés sans État et des sociétés avec État. Nous sommes devant des sociétés qui sont tellement grosses qu’elles ne peuvent être que des sociétés avec État. On peut se dire qu’on aimerait mieux que les sociétés ne soient pas devenues si grosses, qu’il n’y ait pas tellement d’hommes sur la terre, etc. Mais nous n’avons pas le choix, c’est incomparable.

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JMB : Vous pensez que la différence est qualitative ? Nous avons affaire à des types de sociétés qui sont incommensurables ? CLS : Je crois que les changements d’échelle ont un rôle ; même, du temps où je m’occupais du Conseil international des sciences sociales, j’avais essayé de lancer un grand projet qui n’a pas pu voir le jour parce que les gens n’y comprenaient rien à l’époque, qui était l’influence des changements d’échelle. Quelles sont les choses qui peuvent se passer dans un certain ordre de grandeur et qui ne peuvent pas se passer dans un autre ordre de grandeur ?

PM : Au fond, j’objecterais les trouvailles que vous avez vous-même citées, qui sont des trouvailles de démographes et de généticiens sur une sorte d’optimum humain qu’on retrouve dans beaucoup de sociétés primitives sans État et qu’on retrouve à l’état communautaire, donc subordonné, dans nos sociétés complexes. Donc il y a beaucoup de points de comparaison et d’analogie. CLS : En effet, dans nos sociétés complexes, il y a des niveaux qui fonctionnent dans une certaine mesure très restreinte, mais par certains aspects, comme peuvent fonctionner des sociétés plus simples. C’est pour cela que les études de villages sont tellement intéressantes.

PB :Mais, dans votre esprit, cela rejoint le mécanicisme de Chomsky en somme, c’est-à-dire que cela rend compte de phénomènes de façon analysable, mais pas réelle. CLS : Non, au laboratoire il y a des types qui travaillent depuis cinq, six ans dans un village et qui rencontrent des choses très intéressantes. Ce sont des niveaux qui, dans une petite mesure, fonctionnent encore anthropologiquement, si j’ose dire.

JMB : Et vous pensez que la comparaison est à éviter, c’est-à-dire des phénomènes aussi importants dans ces sous-sociétés ou ces niveaux de notre société qui, de plus en plus, apparaissent parfaitement incomparables… Il y a une limite dans la possibilité de comparabilité, c’est-à-dire qu’une science des sociétés devrait être stochastique, être faite de différentes ruptures à différents niveaux. CLS : Il y a des espèces de sociétés comme il y a des espèces animales.

JMB : Je suis un peu surpris de vous entendre parler d’espèces de sociétés, alors que vous avez été le plus systématiquement opposé à l’évolutionnisme en matière sociale. CLS : Ce n’est pas une position évolutionniste, je ne dis pas du tout qu’une espèce évolue pour devenir une autre espèce.

JMB : Néanmoins, il existe des rapports entre ces différentes espèces, est-ce que vous pensez que c’est un objet valide d’investigation ? CLS : Bien sûr… c’est-à-dire : qu’est-ce qu’on aurait mieux aimé être ? Se pose tout de suite la question très judicieuse de savoir quelle est la position qu’on occuperait dans cette société. Si on était sûr d’occuper la meilleure, alors je dirais n’importe quelle société vaut mieux que la nôtre. Le seul vrai luxe qu’aient jamais eu les hommes, c’est l’esclavage.

PB : Je suis très frappé de ce que vous avez dit sur les scientifiques. Le respect pour les scientifiques de la part de n’importe qui ne me surprendrait pas tant que de votre part à vous, qui, justement, avez cette singularité d’être un scientifique et de n’avoir pas utilisé les éléments scientifiques pour cela. CLS : Les sciences humaines ne sont pas les sciences, n’est-ce pas ! Si on pouvait avoir la recherche fondamentale et pas la science appliquée, ce serait parfait !

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PM : Est-ce que c’est concevable, une cité scientifique qui serait tout à fait divorcée de la cité tout court ? CLS : Non, ce n’est pas concevable… Ce serait idéal et puis, surtout, il y a des échanges constants entre la science théorique et la science appliquée et je ne pense pas qu’il pourrait y avoir une science fondamentale s’il n’y avait pas à côté une science appliquée.

PB : Quelle place avez-vous fait dans vos travaux et dans vos recherches aux applications, en tout cas scientifiques, d’ordinateurs… ? CLS : Je ne m’en suis jamais servi. J’ai été très stimulé par la lecture des cybernéticiens… J’ai des collègues qui travaillent sur les mythes avec des ordinateurs… Il en sortira des choses probablement plus curieuses que celles que j’ai faites moi-même. On ne sait pas encore comment s’y prendre pour y arriver. Pas encore. Cela dit, je crois que Françoise Héritier est en train de traquer les systèmes crow/omaha avec un ordinateur.

PM : Pour en revenir aux Structures… Depuis une vingtaine d’années, on découvre un nombre croissant de systèmes qui ne sont pas unilinéaires (ni patrilinéaire, ni matrilinéaire) et qui, pourtant, ont des choses qui ressemblent à des structures d’échange. La théorie standard semble, devant un certain nombre de faits croissants, inadéquate. CLS : Dans les limites des systèmes unilinéaires, j’espère avoir mis un peu d’ordre là où il y avait du bazar. De même qu’il y avait eu une tendance à ramener tous les problèmes dans le « corset » unilinéaire, je me demande s’il n’y a pas eu une tendance vers l’autre côté, de façon excessive. […] Cela n’empêche qu’il y a une masse de systèmes qui sont indifférenciés et qu’il faut arriver à en faire la théorie de façon satisfaisante. À supposer que j’aie liquidé la question de l’unilinéaire, il faut qu’il y ait quelqu’un d’autre (ou plusieurs) qui, maintenant, la liquide de même pour les systèmes indifférenciés. Il faut essayer de rassembler une masse énorme de documentation, et faire la synthèse des deux, qui construira le méta-système. II y a pas mal de questions de mode. On est devant des données contradictoires. L’interprétation en fonction de l’indifférenciation ne permet pas de faire abstraction des faits contraires qui existent.

PM : Même dans les systèmes que vous pensez avoir résolus, des recherches récentes montrent qu’il y a encore des problèmes. Je pense au système australien. La jeune école australienne a proposé un modèle de son système qui est radicalement opposé au vôtre et qui, d’une certaine manière, le remet en cause […]. On aboutit en ce moment à avoir deux modèles : un modèle qui est un modèle normatif auquel les jeunes ethnologues australiens disent : « Ceci peut réglementer ce qui se passe dans la tête des Australiens, leur monde idéal de la société ; mais nous, nous proposons un modèle qui, lui, rend compte de la circulation des femmes, de la réalité des faits d’échange. » A-t-on affaire à deux modèles incompatibles ? Est-ce qu’on peut dire qu’un modèle infirme l’autre ? CLS : Je n’ai jamais essayé de chercher autre chose que ce qui se passait dans la tête des gens, et la façon dont ils pensaient leur propre système. Je ne me suis jamais préoccupé de la façon dont ce système fonctionnait réellement dans les faits.

PM : Je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous là-dessus. Un système d’échange, qu’il soit restreint ou généralisé, a des implications sociologiques, au niveau de la façon dont la solidarité sociale en fin de compte s’organise, la façon dont les groupes sont solidaires. CLS : Ce sont des modèles de laboratoire. J’ai tout à fait pensé les Structures… dans une perspective marxiste, de la façon dont Marx s’y est pris, qui consiste à transporter des faits en laboratoire, et à bâtir des modèles et à voir ce qui se passerait si rien de

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l’extérieur ne venait infléchir ou modifier le fonctionnement du modèle. C’est très intéressant, mais ça ne suffit pas.

PM : Si les Australiens avaient raison, si les modèles gérontocratiques de mariages australiens fonctionnaient réellement, on pourrait se poser la question de savoir comment il est possible qu’ils aient conçu ce système qui ne peut pas fonctionner dans la réalité, et qui serait donc un mythe. Pourtant, les données sur lesquelles ils s’appuient ne semblent pas être uniquement le résultat des procès de transformation aborigènes. CLS : Nous avons jusqu’à présent porté une attention principale aux normes et aux faits.

PM : Quel rapport peut-on concevoir entre ce système de normes et ce système de fonctionnement ? CLS : On peut très bien concevoir de dégager les notions sous-jacentes et les paradigmes qui orientent la pensée juridique française, et puis regarder ensuite comment ça fonctionne dans la réalité. Vous verrez que c’est très différent. Les gens trichent avec la juridiction.

PM : Je pense à toute l’ethnologie africaniste traditionnelle et même récente ; on n’y trouve pas toute cette discordance entre les modèles normatifs (que vous avez proposés notamment pour les Australiens) et les modèles qu’on propose actuellement (depuis une quinzaine d’années). CLS : Je n’ai pas proposé de modèles normatifs, je n’ai rien inventé, puisque les gens avaient observé et j’ai simplement essayé de les classer. J’ai repris les faits de Radcliffe-Brown et de pas mal d’autres, je les ai classés d’une façon un peu différente.

PM : Vous avez fait plus que les classer ; vous avez montré leurs principes et leur logique. CLS : Quand je lis chez les jeunes Australiens – je ne dis pas qu’ils le disent en propres termes – que, depuis Spencer et Gillen, les gens ont complètement rêvé, je ne peux pas le croire.

PM : Je suis d’accord avec vous – ça ne peut pas être un pur fantasme libre et gratuit. Cependant le monopole des jeunes femmes dans les sociétés sur lesquelles on a un minimum de données historiques – je pense aux Tiwi par exemplee – existe bien. La gérontocratie et la monopolisation des jeunes épouses par les hommes les plus âgés semblent être des faits anciens et avérés. Pour beaucoup d’ethnologues (je me mets dans le nombre) et pour tous les Anglo-Saxons, ce qu’ont représenté principalement les Structures…, c’est une classification, mais aussi un principe d’ordre général dans toutes les familles de sociétés. Mais ce principe d’ordre ne s’appliquerait pas seulement à des conceptions. Il s’appliquait à un fonctionnement réel, c’est-à-dire à un échange réel de partenaires et la façon dont les Anglo-Saxons ont interprété les systèmes qu’ils appellent maintenant prescriptifs, c’est bien des normes qui régissent effectivement un échange réel. Vous me dites maintenant que vous vous êtes préoccupé d’une expérience de laboratoire sur ce qui se passait dans la tête des gens, cependant vous faites très souvent référence dans votre livre, et à juste titre, à des mécanismes de solidarité globale. CLS : Mais naturellement, car on fait un modèle de laboratoire et puis, dans la mesure où les informations dont on dispose le permettent, on vérifie le fonctionnement du modèle sur l’expérience.

PM : Contrairement à ce que disent les Anglo-Saxons, je pense que c’est vérifié beaucoup plus souvent que les critiques les plus pointilleux de votre œuvre ne l’ont fait. Je pense à Needham par exemple, qui réduirait les systèmes prescriptifs par le monde. Ça permet de

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vous poser une question : ce n’est pas seulement au niveau des normes idéales, vous parlez aussi du fonctionnement réel ? CLS : Disons que ça représente un état d’équilibre du système. Mais, bien sûr, un état d’équilibre avec lequel les gens trichent tout le temps. Je n’appellerai même pas ça des déviances, parce que ce sont des déviances normales.

PM : Il y a une autre objection qu’on peut vous faire, [celle] de Norbert Wiener disant que si l’on prend un système quelconque et si l’on envisage la chose sous l’angle le plus général, qu’on lui donne un programme tout à fait aléatoire, ce système aura différentes positions et il y en a qui seront plus fréquentes. On conviendra d’appeler ces positions « positions d’équilibre ». Elles nous donneront l’apparence d’une intentionalité et pourront donc nous paraître comme des structures. CLS : Ce n’est pas recevable. La littérature ethnologique est remplie de preuves que les gens pensent leur système et que l’invention est vraiment dans leur tête. Je ne dis pas toujours et partout…

PM : Vous croyez qu’en fin de compte, le pouvoir régulateur de ces conceptions peut se réaliser dans certaines situations d’équilibre des sociétés et contribuer à cet équilibre. CLS : Disons que ça a une fonction pilote pour le système.

PM : Ce qui, du même coup, rend toute transformation du système presque incompréhensible ? PB : Dans quelle mesure y a-t-il des exemples, dans la littérature ethnologique, de transpositions de systèmes, de mouvements ? Quand on pense que notre société, soit à Lisbonne hier, soit en Grèce avant-hier, peut actuellement changer une mentalité, est-ce que dans les mentalités plus… CLS : Bien sûr que ça change, selon les auteurs. Stanner a publié des documents merveilleux sur les gens qui s’en vont chez des voisins, qui voient ce qui se passe chez les voisins, et qui disent que c’est beaucoup mieux chez euxf.

JMB : Vous pensez que ça suffit à changer la fabrique de tout le système social ? CLS : Il n’y a pas que cela. Il y a des fluctuations démographiques, des guerres, des ambitions individuelles… […] N’oubliez pas non plus qu’à côté des jeunes Australiens dont vous parlez, il y a d’autres Australiens qui travaillent dans un sens tout à fait différent. Par exemple les articles de Stanner qui restent dans la perspective la plus classique tout en l’enrichissant considérablement.

JMB : La question plus générale qu’on peut se poser est : est-ce que vous n’avez pas contribué à divorcer l’ethnologie d’une sociologie ? Au sens classique, au sens durkheimien ? C’est-à-dire, en fin de compte, à restreindre l’étude des structures de la parenté à des structures mentales. CLS : Oui, c’était déjà chez Durkheim. Il n’y a pas que la conscience collective chez lui, mais aussi la solidarité. Mais je n’ai jamais été convaincu de cela.

JMB : Pourtant quand vous parlez de l’efficacité respective de l’échange restreint et de l’échange généralisé, on sent comme un écho à la conception durkheimienne de la solidarité. CLS : On l’a écrit. On a dit que c’était la différence entre la solidarité mécanique et la solidarité organique, mais ce n’est pas vrai du tout. Tout ça, ce sont différentes modalités de solidarité mécanique […]. Je suis d’accord que le grand challenge de maintenant, c’est le système indifférencié. Mais je pense qu’on arrivera à le traiter de la même façon et dans le même esprit, non pas par rapport à un repère fixe, mais par rapport à des repères qui se redéfinissent eux-mêmes à chaque instant.

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JMB : Et dans un système de transformation analogue à ce que vous découvrez à l’œuvre dans les Mythologiques ? CLS : Disons qu’à chaque moment de son devenir une certaine configuration se définit à l’intérieur du groupe social, par rapport à laquelle les choses peuvent se reformuler de la même façon, et non pas un repère fixe qui est donné une fois pour toutes comme la filiation patrilinéaire ou matrilinéaire. Cela se rejoue constamment comme un kaléidoscope où les figures sont constamment différentes et imprévisibles, mais où chaque figure qui se réalise a son plan de symétries, a son centre de gravité…

PM : La préoccupation d’un ordre social ne vous gêne pas ? JMB : On vous a beaucoup reproché de faire du « mentalisme » – l’ordre des structures, vous le définissez principalement aujourd’hui comme étant un ordre mental. L’ordre des sociétés sur lequel on peut se poser des questions est pour vous un phénomène en partie aléatoire ? Qui dépend de contingences historiques, d’événements ? CLS : Oui. Je vais user d’une parabole dont je me suis souvent déjà servi. Si vous prenez un coquillage, il y a deux choses : la coquille et le mollusque qui sécrète la coquille. Moi, je fais de la malacologie – je comprends très bien qu’il y ait des gens qui s’intéressent à la façon dont les animaux eux-mêmes vivent ensemble, se disputent, cherchent leur nourriture… Je n’ai absolument pas besoin de cela pour comprendre les fonctions algébriques auxquelles chaque involution des stries de chaque type de coquillage correspond. Ce qui n’empêche pas qu’il y ait un problème très important qui est de savoir pourquoi tel organisme sécrète telle sorte de coquillage et tel autre organisme telle autre espèce.

PM : C’est-à-dire que les formes vous préoccupent plus que l’élément engendreur, ou générateur ? CLS : Oui, à condition de s’entendre sur le mot « générateur » ou « engendreur ». Je peux considérer que les formes s’engendrent les unes les autres. Je peux aussi faire comme s’il n’y avait pas d’organisme du tout et considérer que je pouvais passer par transformation d’une forme simple de coquille à une forme plus complexe et qu’en ce sens ces formes de coquilles s’engendrent les unes les autres.

JMB : Ce qui récuse notre question de savoir s’il y avait, dans la réalité des mythes, autre chose que ce que vous en voyez dans les représentations. L’inscription des mythes. CLS : Quelle relation doit-on établir entre l’ordre de connaissance et de dévoilement des mythes, et l’ordre des processus de transformations qui les constituent ? Je n’ai jamais dit que c’était une structure commune. Il faut que vous m’expliquiez cela parce que je suis perdu…

JMB : On vous avait posé la question d’engendrement des coquilles les unes par les autres. On pourrait dire que cet ordre d’engendrement est ou dans un réel, ou dans un ordre de déchiffrement pour le lecteur. Est-ce qu’il y a complète adéquation entre votre lecture, ou votre déchiffrement, et l’ordre de génération de ces structures ? CLS : Il y a d’heureuses rencontres, mais cela n’est pas évident. De toute façon, nous n’avons pas de moyens de le vérifier. Il y a des cas où on peut dire – si vous avez deux étapes A et B, ça n’a pu que se passer de A à B ; ça n’a pas pu se passer de B à A.

PM : Quels sont les critères de vérifiabilité de cette adéquation ? CLS : Il peut y en avoir deux. Le premier qui est interne, et les corroborations archéologiques et linguistiques.

PM : En prenant toujours l’Amérique comme terrain, est-ce que vous pensez qu’en fin de parcours vous auriez abouti aux mêmes structures communes et au même système de

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transformation, entre ces structures que vous dégagez des mythes. Il n’est pas absurde d’imaginer que vous soyez parti de l’Amérique du Nord plutôt que du dénicheur d’oiseaux. CLS : Il y a une quantité prodigieuse de cheminements possibles. Le réseau des mythes est un réseau qui a une connectivité énorme. J’ai suivi un trajet qui est un trajet possible parmi une quantité d’autres, donc j’aurais aussi bien pu en suivre un autre. Je pense qu’il serait apparu les mêmes vérités sur la nature des rapports qui existent entre les mythes – pas nécessairement les mêmes mythes – ou les mêmes, mais envisagés par d’autres interconnexions.

PM : On suppose qu’il y ait donc un référent extérieur, que ça ne soit pas un intercode complètement lisible. Qu’il y ait une sorte d’au-delà des trajets que vous pouvez… CLS : Le matériel mythique que j’ai utilisé pour les deux Amériques représente à peu près 10 à 20 % du matériel recueilli. Ce matériel recueilli représente probablement 5 % du matériel qui a existé, alors je trouve que la question n’a pas beaucoup de sens, et je suis comme quelqu’un qui a essayé de faire la description d’une langue inconnue, c’est-à-dire, de façon tout à fait provisoire et partielle, la mise en évidence d’un certain nombre des propriétés du système. Il y en a bien sûr des quantités d’autres, que nous ne connaissons pas, que je n’ai pas atteintes et dont nous ne connaîtrons jamais certaines, parce que nous ne possédons qu’une petite partie du matériel.

PM : Dont l’organisation n’a pas de lois ? CLS : Je suis convaincu qu’elle en a, mais comme elles nous échappent… Les Indiens ont raconté des quantités de mythes que personne n’a recueillis. Supposez que vous arrivez sur une planète inconnue et qu’il y ait des gens qui émettent des bruits. Pendant des années, les gens écoutent ces bruits et disent que ce sont des bruits incohérents. Quelqu’un vient, c’est moi, et dit : c’est une langue, et je vais vous montrer pourquoi c’est une langue. Ça ne veut pas dire que je comprends la langue, qu’il connaît les propriétés de la langue.

PM : Vous faites donc l’hypothèse que les mythes ont plus de sens quand on les étudie dans le réseau qu’ils forment, à l’échelle continentale, que lorsqu’on les étudie ethnographiquement, c’est-à-dire par rapport aux gens qui les ont produits, narrés, écoutés. CLS : Je proteste. Car, pour tout mythe que j’ai étudié, j’ai commencé par rassembler la totalité des informations ethnographiques dont on disposait. Je l’ai utilisée à bloc. Seulement cela ne suffit pas, parce qu’un mythe n’est pas la propriété particulière d’un petit groupe qui est sourd et aveugle à tous les autres groupes qui l’entourent. Un mythe est – que les gens en soient conscients ou non – une discussion, un dialogue avec les mythes des gens d’à côté. Une fois qu’on a bien utilisé les informations ethnographiques, premier quart indispensable, il reste encore les trois quarts à faire.

PM : Je ne vois pas bien en quel sens ce réseau de mythes peut donner naissance à une langue nouvelle. Une langue suppose des interlocuteurs, or personne n’est à l’écoute. CLS : Quand je dis « une langue », je veux dire que ça a un sens, que ça veut dire quelque chose. Les mythes se parlent entre eux, au moyen des hommes. Un mythe ne s’interprète jamais en fonction d’un code particulier (biologique, astronomique, etc.) mais il consiste à mettre en relation plusieurs codes.

PM : Tels que vous les interprétez, les mythes ne disent pas grand-chose. Finalement, les gens qui les écoutent n’en comprennent qu’une partie. L’ensemble des sens à différents

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niveaux, y compris celui du symbolisme, est plus restreint que celui que vous dégagez par l’étude d’un réseau de mythes. CLS : Il est probablement plus vaste. Je n’arrive à en dégager qu’une partie. Il y a probablement plus de choses dans un mythe que ce que j’arrive à en sortir. Plus vous élargissez le réseau mythique, moins il signifie. L’explication par les mythes, c’est une grande illusion.

PM : Néanmoins, vous supposez quand même qu’il y a une pauvreté de sens au mythe, ce que beaucoup d’ethnographes ont dit à tort. Beaucoup d’ethnographes ne se sont pas intéressés aux mythes parce que ce sont des histoires incompréhensibles et les Indiens n’ont pas l’air de les comprendre très bien. CLS : Ils ne les comprennent pas, mais ça fonctionne. Ça fonctionne par un certain nombre de propriétés logiques qui ne sont pas perçues comme telles, mais qui sont perçues par leur résonance sur une multitude de plans simultanés. Si vous voulez, cela fonctionne comme la musique quand nous l’écoutons et qu’elle nous gratifie. Nous ne savons pas exactement pourquoi.

PM : Avec cette différence qu’il y a une chose qu’on peut faire sur les mythes et qu’on ne peut pas faire sur la musique, c’est les commenter. CLS : C’est là précisément qu’il faudrait relancer la balle ; il faudrait commenter la musique comme nous commentons les mythes. C’est ce que j’ai essayé de faire avec le Boléro.

PM : Il me semble que le commentaire du mythe est homogène au mythe, et le commentaire musical a toujours été pour moi une sorte de scandale. CLS : La matière première du mythe est le langage, et celle de la musique est hétérogène. Je veux bien qu’il y ait là un écart impossible à combler.

PM : Et comme vous le savez, dans les mythes qu’on recueille, il y a souvent des commentaires inclus – il est souvent très difficile de faire la part de la narration et de la glose. Il y a sans doute des analogies en musique moderne, de glose et de commentaires sur un thème. JMB : J’aurais voulu revenir sur votre conception de l’histoire. Vous avez très bien montré comment la dimension diachronique des structures, que vous ne niez pas, malgré tous les reproches éternels qui ont été faits au structuralisme, était autre chose que l’histoire. Est-ce que ça vous paraît fécond de revenir sur la conception que vous avez de l’histoire en tant qu’impact sur la vie des sociétés et leur structuration, l’histoire étant quelque chose dont nous ne pouvons pas nous passer parce qu’elle nous met constamment en face de phénomènes irréductibles – irréductibilité de l’événement par rapport à la structure. CLS : L’histoire recouvre une quantité d’événements dont nous ne pouvons rien dire d’autre, sinon qu’ils se sont produits. Il y a une quantité de phénomènes structuraux qui se déroulent dans la diachronie mais, en plus de cela, il y a des événements qui ne relèvent, eux, d’aucune structure à ce niveau-là.

PB : Vous admettez une structure venant d’un autre ordre de grandeur ? CLS : Il y a des niveaux de réalité qui sont complètement instructuraux quand nous les saisissons à un certain point, et qui le deviennent quand on en saisit un autre. C’est la grande découverte de Boulainvilliers et de Gobineau à sa suite.

PM : Et entre ces systèmes de transformation structuraux et ces événements, n’y a-t-il jamais de relation traçable, à votre avis ? Y a-t-il une incidence des seconds sur les premiers ? CLS : Il peut y en avoir, mais on ne peut jamais postuler qu’il y en a obligatoirement. Ça a été une critique que m’a faite Godelier. Il a prétendu voir une contradiction

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entre des textes où j’affirmais le primat des infrastructures et l’inanité de l’événement. Ce ne serait vrai que si les infrastructures étaient elles-mêmes sujettes à un déterminisme. Ce qui n’est en aucune façon impliqué. Autrement dit, il ne me semblait pas nécessaire que le commodore Perryg aille au Japon en 1853…

PM : Est-ce qu’un historien ne vous demanderait pas si ce n’était pas fort probable qu’il y fut allé dans ces dix années-là ? Ce n’est pas l’année qui compte, mais le moment… Cela devait se produire. CLS : Je suis d’accord pour dire que c’était probable, mais pas que c’était nécessaire. Il aurait pu se produire une grande crise économique aux États-Unis ou en Occident, ou il aurait pu y avoir une guerre entre l’Europe et l’Amérique et cela ne se serait pas produit. Une épidémie de peste, ou toute autre chose.

PM : Les historiens semblent croire beaucoup à la nécessité. La découverte de l’Amérique semble être la clôture du chemin pour aller en Chine. CLS : Ça n’est absolument pas une nécessité. Ça explique et permet de comprendre pourquoi ça s’est passé comme ça. Il aurait pu se passer mille autres choses.

PM : Pas sûr. Certains écrits vont jusqu’à dire que les premières activités qu’on a installées en Amérique (dont la découverte est sans doute fortuite) étaient du même ordre que ce qu’on voulait faire avec la Chine. C’est-à-dire des matières précieuses. CLS : Peut-être que je ne sais pas ce que c’est que la nécessité.

PB : Quelle est la position entre la fermeté de la structure et l’irréductibilité de l’événement ? CLS : Supposez que Christophe Colomb ait découvert l’Amérique et que les Aztèques aient eu la peau de Cortez […]. Une chose m’a beaucoup frappé lorsque j’ai été à Vienne et que j’ai visité le trésor des Habsbourg, où il y a à la fois toutes ces tapisseries, ces objets européens et les trophées mexicains. Supposez qu’ils aient été les plus forts et que cela ait amené les Habsbourg, au lieu de faire la guerre, à s’unir aux Mexicains. Toute l’histoire aurait été complètement changée. Je pense qu’il existe des moyens de comprendre pourquoi les choses qui se sont passées se sont passées. Ça ne veut pas dire qu’elles devaient se passer de cette façon-là.

JMB : C’est très important. Cette irréductibilité de l’événement ne vous fait pas voir en lui davantage qu’un clinamen, au sens des Épicuriensh ? CLS : Si, sûrement.

JMB : Ces événements, leur production dans le temps, n’a jamais de rapport avec la temporalité dans laquelle les structures se combineraient ou se transformeraient les unes dans les autres : il n’y a jamais pour vous – et ce serait un problème de causalité (métaphysique) –, il n’y aurait jamais, donc, de rapport entre les transformations des structures les unes dans les autres et l’impact de ces clinamens ? Est-ce que ces « événements dérangeants » peuvent amener des processus de transformation structuraux ? CLS : Sûrement. Prenez un exemple théorique. Une société qui est organisée en un certain nombre de clans. Survient une épidémie qui détruit la moitié de la population et qui fait que certains clans disparaissent. Il faut que la chose se réorganise, et les clans vont se mettre à former un nouveau système.

JMB : Est-ce qu’il y a incidence de la production de l’événement sur la forme ultérieure du système, ou sur le choix d’un itinéraire de transformation ? Étant bien entendu que

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l’événement n’a pas de nécessité, est-ce qu’il détermine une certaine configuration, par son impact, des structures en aval ? CLS : J’imagine qu’on pourrait trouver des exemples de toutes les combinaisons possibles, de toutes les modalités possibles. On ne peut pas, en tous cas, l’édicter sous forme de principe.

PB : Est-ce qu’il y a pour Claude Lévi-Strauss un ordre établi ? JMB : Non, ce n’est pas tout à fait ça. Je me demandais si on pouvait étendre en sortant de l’aléatoire, dans le système de transformation structurale, l’incidence de tel ou tel événement en tant que levier ou point d’appui sur la production de telle ou telle structure, dans le champ du possible. CLS : Je ne crois pas que les ethnologues soient équipés pour répondre à de telles questions. Cela supposerait qu’on puisse monter des expériences dans les laboratoires.

JMB : C’était l’idée de certaines règles de transformation. L’articulation, l’impact de l’événement et les règles de transformations dans l’histoire d’une société, puisque vous avez souligné l’importance de la déviance dans cette histoire. CLS : Ce qu’on peut dire, c’est que les événements obligent les structures à se transformer ; dans certains cas on peut arriver à voir comment.

PM : Les événements qui manifestent une certaine dose de prévisibilité, si on était beaucoup plus équipé : mouvements anomiques dans la tradition durkheimienne, qui a montré que ces conduites individuelles anomiques en fait exprimaient des mouvements de foules, de nature sociale et collective. CLS : Je ne peux pas penser que les mouvements messianiques sont des mouvements anomiques. Ce sont au contraire des mouvements qui essaient de réorganiser la structure. Ce sont des réorganisations.

PM : Est-ce que vous pensez que ces faits d’anomie sont susceptibles d’être analysés structuralement ? CLS : Par définition, ce sont des faits statistiques. Je veux dire par là que ce sont des conduites qui se manifestent chez une certaine proportion d’individus à l’intérieur du groupe social et que vous les appréhendez par la voie statistique […]. La statistique en elle-même ne veut rien dire, elle est l’indice de quelque chose. Différence structurale qui explique un écart entre deux sociétés. Les faits d’anomie pourront vous mettre sur la piste d’une propriété structurale, mais en eux-mêmes ne la constituent pas.

PM : Est-ce que les faits comme la sorcellerie, vous les considéreriez comme des faits d’anomie ? CLS : Sûrement pas.

PM : Elle implique pourtant un certain nombre de désordres sociaux. CLS : Ce ne sont pas des désordres, ce sont certains aspects de l’ordre social dans une société où il y a des sorciers.

PM : C’est aussi un phénomène soumis à une assez grande variabilité historique. En cela, c’est peut-être comparable au taux des suicides. JMB : Je ne pense pas personnellement que la sorcellerie soit un fait dont les conséquences sont toujours les mêmes. Ça existe comme système dans toutes les sociétés, mais je ne pense pas que les conséquences soient uniformément les mêmes dans le temps, et dans l’espace, bien entendu. CLS : Vous entrez là dans une zone où vous êtes obligé de faire appel à l’histoire de la société. Je ne pense pas du tout que l’approche structurale oblige à s’intéresser à tout

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et permette encore moins de tout expliquer. Ce n’est jamais la société qui est considérée comme une totalité… statique. Il s’agit d’expliquer un certain nombre de choses à l’intérieur de la société.

JMB : On prête à tort à l’explication structurale une ambition d’exhaustivité et on lui reproche ensuite de ne pas l’avoir suivie. CLS : C’est très juste. Il y a, dans les sociétés humaines, certaines plages où il est possible de faire comme si le nombre de variables était petit. C’est à ça que je m’intéresse. Je ne nie absolument pas qu’il y ait d’autres plages ou d’autres niveaux où les choses se passent différemment.

JMB : Est-ce qu’on n’est pas obligé, ethnologue, de faire une hypothèse provisoire d’ensemble de la société, de la considérer provisoirement comme une totalité ? Je ne parle pas de l’ethnographe. Mais est-ce que l’ethnologue, l’analyste ne fait pas la même hypothèse ? CLS : Il est beaucoup plus facile de considérer comme une totalité une société qui est petite en volume et, donc, quand il s’agit de très petites sociétés, on se rapproche de cette limite. Quand il s’agit de sociétés plus nombreuses et plus compliquées, on en reste toujours très loin. Ce n’est absolument pas la même méthode, la même attitude d’esprit, la même attitude épistémologique, qu’on peut avoir devant une tribu brésilienne dont l’effectif est de 300 personnes et devant une société africaine qui en a 30 000.

PM : Cela interdirait alors le retour vers une fameuse anthropologie des sociétés complexes… CLS : Non, quand nous sommes devant ces sociétés complexes, les plages auxquelles nous avons accès par les méthodes structurales sont beaucoup plus petites et moins nombreuses.

PM : Vous admettez qu’il y ait des implications idéologiques aux choix méthodologiques que vous avez faits. Je pense à des prises de position épistémologiques pures qui ont des conséquences quant à une vision de l’histoire, également quant aux rapports entre l’observateur et l’objet… CLS : On peut faire des prévisions qui tiennent à des rapports de force et qui n’ont rien de structural, et encore…

PM : Est-ce qu’au contact des sociétés (les nôtres), je pense à l’Amérique, les formes culturelles développées [résultant] d’interférence sont susceptibles d’analyses aussi fécondes et aussi fines que celles faites sur des sociétés davantage isolées ? Et est-ce que les phénomènes de greffe de certains mythes ou de certaines idéologies ou certaines distorsions sont susceptibles d’un renouvellement de l’approche ethnologique ? Je pense à la contagion par notre société de sociétés d’Indiens qui changent les contenus et les formes de leur culture – éclatement de la topologie d’un village par suite de l’agression des missionnaires [comme chez les Bororo]… CLS : Les Colombiens [Amérindiens de la Colombie britannique] sont en train de recélébrer des rituels traditionnels qui n’avaient sans doute pas disparu et se faisaient clandestinement et qui maintenant se font plus « librement » et ne sont plus passibles de persécutions. On aurait pu supposer que, sous l’impact missionnaire ou autre, ces rituels disparaissent complètement – c’est vrai de certains d’entre eux… Or ce qui se passe actuellement, c’est qu’ils se poursuivent avec un changement de finalité, et l’initiation se trouve ainsi avoir des fins thérapeutiques (boisson, vol…). Personne n’aurait pu prévoir cela.

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PM : Est-ce que cette fonction « salutaire » ne faisait pas partie de l’initiation traditionnelle multifonctionnelle ? CLS : Comme ethnologue, ce qui m’intéresse passionnément est que ça m’aide à mieux comprendre ce qui est consigné dans la littérature, grâce à ce qu’il en subsiste. Bien entendu, un sociologue ou un psychologue y cherchera tout autre chose.

JMB : Dans notre propre société, l’étude de villages, de sociétés rurales, assez closes… relève-t-elle d’une approche ethnologique comparable à celle qui vous a porté vers les rivages de l’autre… CLS : Il y a une quantité de choses que le sociologue, le psychologue, l’historien, ne peuvent pas voir, et que l’ethnologue peut voir parce qu’il a d’autres techniques et d’autres méthodes d’approche. Nous disposons d’une gamme d’expériences humaines et donc nous pouvons trouver ailleurs des choses qui nous aident à mieux comprendre. Nous ne travaillons pas avec des livres ou des statistiques, mais nous essayons de suivre la vie et la pensée des gens au jour le jour et cela permet « d’atteindre » des choses qui ne sont pas accessibles d’autre façon.

JMB : Et le fait que ces sociétés « prochaines » aient évolué selon le rythme d’une histoire qui est la nôtre affecte-t-il ce regard ethnologique qu’il est possible d’y porter ? CLS : De même que, lorsqu’on veut étudier structuralement quelque chose, il faut commencer par ramasser toute l’ethnographie disponible, de même pour une société contemporaine, l’ethnographie n’a pas qu’une dimension ; elle en a deux : spatiale et temporelle. Ce que nous apporte l’histoire est un matériel ethnographique.

JMB : L’histoire nous apporte plus, des encombrements – une notion implicite de la causalité séquentielle par simple succession. Il y a une tendance à considérer que l’événement précédent a en partie provoqué l’événement qui succède. CLS : Il aide à le comprendre, à l’expliquer, je ne dirai pas qu’il l’a provoqué, parce qu’il aurait pu en provoquer un autre.

JMB : Vous vous intéressez à des masques actuellement, avec une problématique… Comment arrivez-vous à faire l’économie – à court-circuiter – de tout le regard esthétique que notre société porte sur ces masques, pour les analyser comme des objets signifiants ethnologiquement ? CLS : En considérant les masques non pas en eux-mêmes, mais dans les rapports qui les unissent. Sur le plan purement plastique, le rapport est rigoureusement identique à celui qui existe entre les mythes respectivement attachés aux masques en question. Si le rite A contredit le rite B, le mythe A contredit le mythe B et, plastiquement, le masque A contredit le masque B […]. Mais les gens n’ont absolument pas la notion de ce rapport. Ils considèrent qu’ils ont la propriété exclusive d’un type, donc l’autre type n’existe pas pour eux.

PB : Est-ce que la plastique ou l’expression a une signification en dehors de celle que vous rejetez pour faire une analyse plus rigoureuse et plus profonde ? CLS : Dans certains cas, la plastique s’accompagne de certaines intentions et de certaines significations ; dans d’autres, elle est purement traditionnelle. Le masque est comme ça parce qu’il doit être comme ça. Les masques sont tout de même beaux pour les gens qui les utilisent. En Afrique, on a essayé de voir la manière dont les usagers eux-mêmes jugeaient de la qualité des masques faits par des sculpteurs différents.

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JMB : La fabrication du masque, qui est un acte important, pas forcément entouré de rituel, est-elle liée chez l’artisan à la possession d’un certain type de savoir particulier ? CLS : Elle est liée à la possession, au droit de faire le masque justifié par la légende, à un certain nombre de rites de sa lignée ou de sa place sociale. Il le fera en s’inspirant d’un modèle plus ancien.

JMB : Est-ce qu’il a un savoir de ce mythe dont il illustre… CLS : J’ai rencontré un chef indien qui m’a longuement raconté le mythe en vertu duquel sa famille est propriétaire d’un certain nombre de masques. Il m’a dit qu’il avait l’intention d’en resculpter un et de recélébrer le rituel. Il y a beaucoup de types de masques…

JMB : L’artisan a donc le droit de faire le masque. Il n’utilise que son savoir-faire, ne met pas en jeu dans sa fabrication un autre savoir ? CLS : Dans ce cas particulier, non, mais il y en a d’autres.

JMB : Y a-t-il conscience d’une symbolisation possible entre les instruments iconographiques abstraits, les ornements du masque et les éléments signifiants dans le mythe ? CLS : Le mythe décrit le masque, ou l’inverse.

PB : À partir du moment où il n’y a pas de savoir esthétique, ni aujourd’hui, ni il y a cent ans, il est évident que ce non-savoir produit le même objet… JMB : Dans le cadre de l’unicité de l’objet d’art, nous savons que, dans certaines sociétés, un objet a une valeur telle qu’on le garde, et d’autres où des objets fort beaux sont immédiatement jetés une fois le rituel terminé. Est-ce que vous pensez que l’on peut relier ces attitudes à quelque chose ? CLS : Il y a des intermédiaires. Il y a des objets qu’on garde pendant une période déterminée rituellement et après laquelle ils sont détruits. Il y a aussi des peuples qui ont gardé des trésors et les ont fétichisés. Les Indiens d’Alaska ont refusé récemment une proposition de 400 000 dollars pour l’acquisition de quelques sculptures – et ce sont des gens très pauvres.

PM : Est-ce que vous croyez qu’on peut relier cela à un mode de permanence sociale qui serait fondé sur l’unifiliation ? Au fur et à mesure que j’avance dans mon exploration de l’Amérique du Sud, j’ai l’impression qu’il se confirme, à presque chaque lecture, que c’est une région du monde où le mode de permanence sociale n’est pas fondamentalement organisé par la filiation, la transmission d’un nombre d’éléments de père en fils. Si vous prenez le cannibalisme, on est frappé par une sorte d’horizontalité. Or toutes ces sociétés n’ont pas de trésors. PB : En poussant le raisonnement jusqu’à l’absurde, on pourrait dire que, sans conserver ses traces, une société ne peut pas s’organiser et s’établir ? CLS : Ça dépend. Chez les Bororo, qui fabriquent pour leurs fêtes un tas d’ornements, certains sont jetés et d’autres conservés précieusement et transmis de génération en génération.

JMB : Est-ce que ce qui compte le plus n’est pas la relation qu’ils entretiennent avec cet esprit totémique originaire, donc l’objet devient secondaire ? CLS : Il y a aussi des objets périssables et d’autres moins, ou non périssables.

PM : Il y a des objets non périssables réutilisés de façon constante, mais dont la fonction est variable. Les haches de pierre, par exemple. Souvent, brisées, elles sont réutilisées

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comme amulettes ou objets magiques. La réutilisation et la conservation sont pour moi très opposées. CLS : Il y a des objets d’origine humaine et des objets d’origine surnaturelle. Il y a des objets qui sont des preuves, des témoignages, d’autres qui n’en sont pas.

NOTES

1. … et dont la forme a été respectée même en cas d’anacoluthe. 2. Par une tragique coïncidence, le hasard fait également de cette année celle de la perte de Patrick Menget, qui fut le mentor de bien des américanistes de ma génération. Quelques semaines avant son décès, Menget m’avait encouragé à publier cet entretien, dont il était alors le dernier protagoniste encore en vie. Il faisait notamment valoir l’intérêt, pour l’histoire de la discipline, de certains de ses passages concernant Durkheim. Hommage d’un maître au maître de son maître… Simultanément à celle de la figure majeure de l’anthropologie de ce pays (Lévi-Strauss), que cette parution soit donc aussi l’occasion de saluer la mémoire de l’un des plus grands sociologues qui l’aient inspiré (Durkheim) et de l’un des plus remarquables ethnologues qu’il ait formés (Menget). Une lignée qui a balisé le chemin des générations précédentes et restera longtemps encore source d’inspiration pour les suivantes. a. Structures… pour Les structures élémentaires de la parenté. N. B. Toutes les notes sont de la rédaction. b. Jean-Jacques Rouseau, Le Devin du village. Danièle Borst, Louis Devos, Philippe Huttenlocher, Orchestre « Le Collegium Academicum », Genève, sous la direction de Robert Dunand, CBS 76716 (1 V), 1978. c. PB a possiblement procédé à l’amalgame anachronique du scientifique James Watson – co-inventeur, en 1953, du code génétique et initialement formé à la zoologie – avec un de ses homonymes naturalistes du XVIIIe siècle (PM, comm. pers.). d. CLS fait vraisemblablement allusion ici à un article de Georges Pòr intitulé « Vous n’êtes qu’une donnée de la science », paru dans la livraison de février 1978 de la revue Les Temps Modernes (n o 379, p. 1269-1285). L’auteur y dénonce les usages déshumanisants et aliénants de la statistique auxquels s’abaisserait ce qu’il appelle « la sociologie-chien-de-garde » [sic]. e. Charles W. M. Hart et Arnold R. Pilling, The Tiwi of North Australia, Holt, Rinehart and Winston, New York, 1960. f. William Stanner, « Aboriginal territorial organization: estate, range, domain and regime », Oceania, 36 (1), 1965, p. 1-26. g. Le commodore Perry commandait la flotte américaine qui a été reçue au Japon en 1853, ce qui fut le signal de l’ouverture de ce pays au monde occidental après des siècles d’isolement. h. Clinamen : terme signifiant « déviation », utilisé notamment par Lucrèce et les atomistes pour se référer à la déviation infime supposée rendre compte de l’existence du monde en permettant aux atomes de se rencontrer au lieu de tomber parallèlement, sans jamais se rencontrer.

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AUTEUR

PHILIPPE ERIKSON

LESC (UMR 7186), université Paris Nanterre

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Articles

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Nuevos datos sobre Aj Ch’aaj Naah, Aj K’uhuun de Toniná New Data on Aj Ch’aaj Naah, Aj K’uhuun from Tonina Nouvelles données sur Aj Ch’aaj Naah, Aj K’uhuun de Toniná

Ángel A. Sánchez Gamboa, Alejandro Sheseña y Guido Krempel

NOTA DEL EDITOR

Manuscrit reçu en octobre 2018, accepté pour publication en juillet 2019.

Agradecimientos – Agradecemos a la Coordinación Nacional de Conservación del Patrimonio Cultural (CNCPC) del INAH el apoyo recibido para realizar el presente estudio, que forma parte del proyecto de conservación y documentación de Toniná bajo la dirección de la arqueóloga Martha Cuevas García y la restauradora Luz de Lourdes Herbert Pesquera. A la restauradora Dora Maviael Méndez Sánchez, Subdirectora de Conservación en Museos y Talleres de la CNCPC- INAH, agradecemos el apoyo incondicional durante todo el proyecto de conservación y documentación de Toniná. Extendemos nuestra gratitud al restaurador del proyecto Benito Velásquez Tello, sin cuya labor y la de su equipo hubiera sido imposible avanzar en la restauración y organización del material escultórico, al igual que a Jorge Pérez de Lara por sus valiosos registros fotográficos realizados durante las temporadas 2017 y 2018. De igual manera agradecemos a Yuriy Polyukhovych sus observaciones en torno del Aj K’uhuun registrado en el muro del “Templo de la Luciérnaga” y en el Monumento 156, así como a Christian Prager por sus comentarios en relación con el término kooj/koj/koja[l]. También a Gabriel Mora por sus comentarios sobre el texto. Asimismo, expresamos nuestra gratitud a Eric Taladoire y a los evaluadores anónimos de Journal de la Société des américanistes por sus atinadas y valiosas observaciones. Finalmente, un profundo agradecimiento para todo el personal de la Zona Arqueológica y del Museo de Sitio de Toniná por las atenciones brindadas a los integrantes del proyecto de la CNCPC del INAH durante las temporadas 2016, 2017 y 2018, y en particular a la entonces administradora de la Zona Arqueológica y del Museo de sitio de Toniná Julissa Camacho

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Ramírez, al jefe de seguridad Mariano de Jesús Cruz Pérez y al contador Juan Enrique Santiz Magaña.

1 Sin lugar a dudas, Aj Ch’aaj Naah es uno de los personajes más destacados en la historia de los funcionarios Aj K’uhuun en Toniná (Figura 1). Aj Ch’aaj Naah tuvo gran trascendencia en la corte no real de esta ciudad durante los gobiernos de K’ihnich Baaknal Chahk, K’ihnich Chuwaaj?1 K’ahk’ (Gobernante 4) y K’ihnich Ich’aak Chapaht (Martin y Grube 2008, p. 181-187). A pesar de que se trata de una figura político- religiosa claramente identificada en la literatura sobre Toniná, era poca la información con la que contábamos acerca de él. Sin embargo, gracias a la reciente recuperación de dos nuevos monumentos registrados en el marco del proyecto de conservación de Toniná de la Coordinación Nacional de Conservación del Patrimonio Cultural del Instituto Nacional de Antropología e Historia, ahora podemos enriquecer nuestro conocimiento de algunos aspectos previamente desconocidos no sólo sobre Aj Ch’aaj Naah sino también, como habremos de ver en las siguientes páginas, sobre la complejidad y jerarquización del cargo de Aj K’uhuun en Toniná.

Fig. 1 – Localización de Tonina (mapa tomado y modificado de Mathews 1983, p. 5).

La corte de Toniná: antecedentes sobre Aj Ch’aaj Naah

2 La estructura política de Toniná descansaba sobre dos instituciones principales: por un lado, el gobierno del linaje dinástico basado en la figura del Ajaw – K’uhul Ajaw, y por el otro, la corte no real, centrada en los personajes con el cargo de Aj K’uhuun (Jackson 2015, p. 246; véase también Sánchez Gamboa et al. 2019). El significado del título Aj K’uhuun (AJ-K’UH-na, a-K’UH-HUUN-na) ha sido objeto de largo debate en las últimas tres décadas2. Actualmente hay consenso en torno de la interpretación ofrecida por Marc Zender (2004, p. 164-195) a partir de una de las ideas propuestas en su momento por Sarah Jackson y David Stuart (2001). Considerando que el segmento K’UH-HUUN-na transmite un verbo transitivo derivado de un nombre, Zender argumenta convincentemente que el título en cuestión puede entenderse como “el que venera” y hace alusión a un cargo sacerdotal (Zender 2004, p. 164-195). Cabe señalar

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que los contextos donde aparece este título no se limitan al ámbito religioso sino también, en igualdad de importancia, al ámbito político, por lo que queda pendiente profundizar la forma en que la propuesta de Zender puede extenderse más allá de lo religioso. En este contexto, consideramos que una opción posible podría ser la traducción más amplia de “el que obedece” o “el que sirve” ya que en una de las fuentes utilizadas por el mismo Zender, el diccionario de tsotsil colonial de Santo Domingo de Zinancantán, la palabra ch’uun, cognada de k’uhuun, se traduce no sólo como “honrar”, “reverenciar” y “tener respeto” sino también como “obedecer” o “acatar” (Laughlin y Haviland 1988, vol. I, p. 200). De hecho, en el proto-tseltal la palabra *ch’uhun significaba “obedecer” (Kaufman 1972, p. 101), mientras que en el tsotsil actual la palabra ch’un quiere decir “servir” (Laughlin 1975, p. 142). El título de “el que obedece” o “el que sirve” se referiría así a la función de los Aj K’uhuun de cumplir, en nombre del gobernante y de los dioses, con una variedad de actividades tanto de índole religiosa como también política. Así, con respecto a Toniná, nosotros consideraremos a los Aj K’uhuun como “funcionarios político-religiosos”.

3 Durante el gobierno de K’ihnich Baaknal Chahk, a finales del siglo VII d.C., se observa que dentro de esta estructura no real del Aj K’uhuun en Toniná se distinguían dos cargos: el Ti’ Sak Huun y el Yajaw K’ahk’. El primero era el más importante y el de mayor prestigio, y estuvo ocupado durante tres generaciones por la figura de K’elen Hix. La construcción TI’-SAK-HUUN-na, ti’ sak huun, primero leída como “en la boca/en el borde del papel blanco” (Houston y Stuart 2001, p. 68-69), se refiere a la banda blanca (sak huun) que era insignia de las élites mayas, por lo que la construcción se ha traducido como “el orador de la banda blanca” (Zender 2004, p. 221). En el segundo orden se encontraba el ya-AJAW-K’AHK’, yajaw k’ahk’, “Vasallo del Fuego” (ibid., p. 198), cargo ocupado por Aj Ch’aaj Naah, objeto de estudio en este artículo. El aspecto militar de este cargo ha quedado plasmado en la literatura (Schele y Mathews 1993, p. 130; Martin y Grube 2000, p. 173; Martin 2001, p. 177; Grube, Martin y Zender 2002, II, p. 41), por más que las funciones que tenía el portador de este cargo no se limitaban solamente al ámbito militar –el cual resulta ambiguo aún de entender y era aparentemente simbólico–, pues en las fuentes es más evidente su papel religioso, principalmente debido a su vínculo con los rituales de fuego (Schele y Grube 1995, p. 22; Zender 2004, p. 205) y de alguna manera con el Dios Jaguar del Inframundo, patrono del fuego y de la guerra durante el periodo Clásico en las Tierras Bajas mayas (Stuart 1998; Stuart 2005, p. 176).

4 Este sistema del cargo del Aj K’uhuun como eje de la corte no real de Toniná se caracterizó por ser compartido por diferentes miembros, aunque a la vez jerarquizado a través de los diferentes méritos realizados en vida (Zender 2004, p. 153). No es posible hablar de las cortes mayas como entidades o aparatos burocráticos en un sentido rígido de la palabra –más allá de reflejar un estatus social–, sino que, en el caso de Toniná, advertimos flexibilidad y movimiento dentro la propia corte: los personajes van escalando su posición y relación con el gobernante en turno. Por su parte, aunque compartían un primer estadio como Aj K’uhuun, su importancia dentro de la corte dependía de si el portador era un Ti’ Sak Huun o un Yajaw K’ahk’, aunque esta distinción no deja de lado su inherente retroalimentación, como se verá luego. Con respecto a esta sofisticación en la estructura del cargo, contamos con evidencia que se remonta a una generación atrás, durante los primeros años del gobierno de K’ihnich Bahlam Chapaht,

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a comienzos del siglo VII d.C., cuando fue introducido el cargo de Ti’ Huun (Sánchez Gamboa et al. 2019).

5 Una de las figuras más importantes de Toniná fue K’elen Hix, investido como Aj K’uhuun durante el reinado del llamado “Gobernante 2” (667-687 d.C.). No se conoce la fecha exacta de su investidura, pero se le menciona participando en el final de periodo 9.12.10.0.0 9 Ajaw 18 Suutz’, 8 de mayo de 682 d.C. (Monumento 8, C5-D5). Pronto se establece como el funcionario Aj K’uhuun principal de Toniná y así continúa durante el gobierno de K’ihnich Baaknal Chahk (Martin y Grube 2008, p. 180-181).

6 Indudablemente, la derrota sufrida a manos de Palenque en el año 687 d.C. y la aparente muerte del “Gobernante 2” fueron eventos que determinarían el rumbo y ambiciones de Toniná como entidad política en el occidente de las Tierras Bajas mayas. Con el ascenso de K’ihnich Baaknal Chahk, en el año 688 d.C., a la edad de 35 años, Toniná no solamente tendría su revancha por la humillación sufrida sino que se encaminaría hacia uno de sus momentos de mayor esplendor (Martin y Grube 2008, p. 181-183). Es en este escenario de guerra y reconstrucciones urbanísticas en Toniná cuando es investido Aj Ch’aaj Naah. Tanto K’elen Hix como Aj Ch’aaj Naah tendrían un papel fundamental durante el gobierno de K’ihnich Baaknal Chahk y posteriormente a su muerte.

7 Pero estos no fueron los únicos Aj K’uhuun de Toniná durante los reinados del “Gobernante 2” y K’ihnich Baaknal Chahk. En los monumentos 8 y 156 (Mathews 1983, p. 30; Graham et al. 2006, p. 90), así como en el muro de estuco del “Templo de las Luciérnagas”, aparece un tercero. En la inscripción del mural (Polyukhovych 2007; Yadeún Angulo, Espinoza y Pallán 2009, p. 25), se menciona primero que en 9.13.16.4.1 12 Imix 9 Wo, 12 de marzo de 708 d.C., el templo en cuestión fue dedicado: B1-B3: (B1) 12-IMIX (A2) 9-IHK[AT]-ta (B2) OCH-K’AHK’ (A3) 12-u-BAAH (B3) ta-… lajcha’ imix bolo’n ihkat och k’ahk’ lajcha ubaah ta... En 12 Imix 9 Wo fue la entrada del fuego [a la casa de] las Doce Imágenes de... Después se señala que, pocos meses después, en 9.13.16.8.10 10 Ok 18 Xul, 11 de junio de 708 d.C., fue dedicado el mural (kot “muro” de acuerdo con Polyukhovych 2007, p. 2, y Boot 2009, p. 98), mismo que se adjudica justo a un tercer Aj K’uhuun llamado “AJ-T650- na”3: A6-B12: (A6) i-T’AB (B6) u-ko-to (A7) wi-WINIKHAAB (B7) a-K’UH-na (A8) a-T650- na (B8) a-4-k’u-NAL (A9) ya-ja-K’UH-na (B9) WINIKHAAB-AJAW-wa (A11) K’IHNICH (B11) BAAK-NAL-CHAHK (A12) K’UH-po-o-AJAW (B12) KAL-TE’ i t’ab[aay] ukot winikhaab aj k’uhuun aj …n aj chan k’u...nal yaj k’uhuun winikhaab ajaw k’ihnich baaknal chahk k’uh[ul] po’ ajaw kal[oom]te’ entonces se dedicó el muro del Aj K’uhuun de 1 katun, Aj ...n, el del Lugar de los Cuatro ..., el Aj K’uhuun del Señor del katun, K’ihnich Baaknal Chahk, Divino Señor de Toniná, el Kaloomte’. De suma importancia resulta el Monumento 8 (Mathews 1983, p. 27-31), en el cual se celebra el final de periodo 9.12.10.0.0 9 Ajaw 18 Suutz’, el 8 de mayo de 682 d.C., con un evento de esparcimiento de incienso por parte del “Gobernante 2”, acompañado de K’elen Hix, pero también de nuestro enigmático Aj K’uhuun “AJ-T650-na”, al igual que de los Dioses Remeros.

8 Ahora bien, en 9.14.5.8.4 7 K’an 7 Suutz’, el 19 de abril de 717 d.C., murió K’elen Hix. Un par de meses después se conmemoró su muerte a través de un monumento fúnebre: el Monumento 165 (Graham et al. 2006, p. 107). El inicio del texto nos refiere que el último final de periodo celebrado por K’elen Hix ocurrió en el 9.14.5.0.0 12 Ajaw 8 K’ank’in, el 6

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de noviembre de 716 d.C. (A1-E1), refiriendo que era un Aj K’uhuun de dos katunes. Un número distancia nos lleva a la referencia de su muerte a través de un eufemismo muy común en las inscripciones mayas del Clásico: H1-P1: (H1) 7-K’AN (I1) HUL-SIBIK-TI’-HUUN-na (J1) 7-SUUTZ’ (K1) K’A’-yi-ya (L1) u-T5334-SAK-IK’-li (M1) 2-WINIKHAA’B AJ-K’UH-na (N1) u-K’UH-hu-lu (O1) TI’-SAK-HUUN (P1) NAAH-5-CHAN-AJAW wuk k’an hul sibik ti’ huun wuk suutz’ k’a’ayiiy u... [u]sak ik’il cha’ winikhaa’b aj k’uhuun uk’uhul ti’ sak huun naah ho’ chan ajaw En el 7 K’an, Hul Sibik era el Ti’ Huun, en 7 Suutz’, se acabó su ..., su aliento blanco del Aj K’uhuun de dos katunes, el divino Ti’ Sak Huun de los Señores del Naah Ho’ Chan Como resulta claro, K’elen Hix murió siendo un Aj K’uhuun de dos katunes, de exactamente 35 años: vivió del 682 d.C. al 717 d.C. Además, era el uk’uhul ti’ sak huun naah ho’ chan ajaw “el divino Ti’ Sak Huun de los Señores del Naah Ho’ Chan”; es decir, era el encargado del culto de los Dioses Remeros, las deidades patronas de Toniná. La muerte de K’elen Hix indudablemente trastocó la estructura de la corte no real de Toniná, pero pronto se restableció quedando al frente Aj Ch’aaj Naah, quien sería una pieza clave detrás del gobernante infante K’ihnich Chuwaaj? K’ahk’ y de Ix K’awiil Kan, una Ix Po’ Ajaw “Señora de Toniná” (Monumento 144, E1-G1), así como durante la primera etapa de gobierno de K’ihnich Ich’aahk Chapaht, como veremos luego.

9 Si retornamos algunos años atrás, la introducción de Aj Ch’aaj Naah como Aj K’uhuun ocurrió en medio de las campañas militares de K’ihnich Baaknal Chahk en contra de ciudades vasallas a Palenque (691-695 d.C.). El Monumento 3 (Mathews 1983, p. 15-18) refiere que, al final de periodo 9.13.0.0.0 8 Ajaw 8 Wo, el 16 de marzo de 692 d.C., fue atada una banda en la frente de Aj Ch’aaj Naah; es decir, que en esa fecha fue investido como Aj K’uhuun: B9-B10: (B9) K’AL-HUUN-ja (A10) tu-ba-hi (B10) AJ-CH’AAJ-NAAH k’a[h]laj huun tubaah aj ch’aaj naah Fue atada la banda en la frente de Aj Ch’aaj Naah aunque pudiera tratarse de un estadio posterior a su fecha de investidura, la cual aún desconocemos.

10 Luego del Monumento 3 no volvemos a saber de Aj Ch’aaj Naah hasta casi cinco años después. En el Monumento 140 (Graham y Mathews 1999, p. 171) se celebra el final de periodo 9.13.5.0.0 1 Ajaw 3 Pop, 18 de febrero de 697 d.C., que correspondería al naah ho’ tuun “primer lustro” de Aj Ch’aaj Naah como Aj K’uhuun. Durante este final de periodo, el esparcimiento de incienso uchokoow ch’aaj y la dedicación de monumentos uk’al[aaw] tuun por parte del gobernante ocurrieron en compañía de K’elen Hix y Aj Ch’aaj Naah. Sin embargo, es interesante que K’ihnich Baaknal Chahk le da mayor peso a este último –lo introduce primero– a pesar de que K’elen Hix era de mayor jerarquía y edad: N1-R1: (N1) yi-ta-ji AJ-CH’AAJ-NAAH (O1) AJ-K’UH-na ya-AJAW-K’AHK’ (P1) yi-ta- ji k’e[HIX]-le-ni (Q1) *AJ-*K’UH-*na (R1) *TI’-*SAK-HUUN yitaaj aj ch’aaj naah aj k’uhuun yajaw k’ahk’ yitaaj k’eleen hix aj k’uhuun ti’ sak huun en compañía de Aj Ch’aaj Naah, Aj K’uhuun y Yajaw K’ahk’ en compañía de K’eleen Hix, Aj K’uhuun y Ti’ Sak Huun5.

11 Otro monumento destacable en este contexto es un yugo decorado con un texto jeroglífico proveniente del sitio arqueológico de Bolonkin, cerca del actual poblado de Chilón, a 40 km aproximadamente en línea recta al noroeste de Toniná (Sheseña y Lee 2004). La inscripción precisa que la pieza fue elaborada durante el gobierno de K’ihnich Baaknal Chahk6 y que era “la piedra” de un Aj K’uhuun, aunque

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desafortunadamente no se conservó el nombre del portador del título. Dada la importancia otorgada a Aj Ch’aaj Naah por parte de K’ihnich Baaknal Chahk, no descartamos la posibilidad de que el dueño de este yugo haya sido este Aj K’uhuun: A1-K1: (A1) …-7-”IMIX” (B1) … (C1) … (D1) u-TUUN-ni-li (E1) … (F1) ya-AJ-K’UH- na (G1) ya-AJAW-TE’ pi-tzi-la (H1) K’IHNICH-BAAK-NAL-CHAHK (I1) … (J1) … (K1) ba-ka-ba … wuk imix … … utuunil … yaj k’uhuun yajaw te’ pitziil k’ihnich baaknal chahk … … baah kab En 7 Imix … … la piedra de … Aj K’uhuun del Señor de Linaje, Jugador de Pelota, K’ihnich Baaknal Chahk … … Primero de la Tierra.

12 No sabemos de otra referencia de Aj Ch’aaj Naah durante el gobierno de K’ihnich Baaknal Chahk pero, junto con K’elen Hix, ambos fueron piezas claves en la transición del gobierno del infante K’ihnich Chuwaaj? K’ahk’ en el año 708 d.C. Pronto aparecen en escena en el final de periodo 9.13.17.9.0 3 Ajaw 3 Yaxk’in, 16 de junio de 709 d.C., señalándose que fueron vistos en esta ceremonia, ocupando de nuevo K’elen Hix la posición principal dentro de la corte no real de Toniná, esto debido a que es mencionado primero en el Monumento 170: K1-P1: (K1) i-IL-ji (L1) k’e[HIX]-le-ne (M1) TI’-SAK-HUUN (N1) i-IL-ji (O1) AJ- CH’AAJ-NAAH-hi (P1) ya-AJAW-K’AHK’ i i[h]laj k’elen hix ti’ sak huun i i[h]laj aj ch’aaj naah yajaw k’ahk’ entonces fue visto K’elen Hix, el Ti’ Sak Huun, entonces fue visto Aj Ch’aaj Naah, el Yajaw K’ahk’.

13 Tras la muerte de K’elen Hix únicamente era conocida una referencia más sobre Aj Ch’aaj Naah: el Monumento 110. En él se celebra el final de periodo 9.14.10.0.0 5 Ajaw 3 Mak, 11 de octubre de 721 d.C., con la atadura de una piedra y el esparcimiento de incienso por parte del joven gobernante K’ihnich Chuwaaj? K’ahk’. Se menciona que de este ceremonial fue testigo Aj Ch’aaj Naah, pero acompañado por un nuevo personaje de la corte no real de Toniná, el Aj K’uhuun Yaxuun Bahlam: M1-O1: (M1b) yi-IL-ji (N1) AJ-CH’AAJ-NAAH AJ-K’UH-na (O1) YAXUUN-BAHLAM AJ-K’UH-na yi[h]laj aj ch’a[aj] naah aj k’uhuun yaxuun bahlam aj k’uhuun Lo vieron Aj Ch’aaj Naah, Aj K’uhuun, y Yaxuun Bahlam, Aj K’uhuun. Como parte de la ceremonia de final de periodo, estos dos personajes participaron en el emblemático baño yatiij de los Dioses Remeros (P1-Q1). Desafortunadamente, dentro del corpus escultórico de Toniná no se vuelve a saber de Yaxuun Bahlam, pero resulta obvio que ocupó el lugar secundario en el cargo de Aj K’uhuun, en cuya cabeza se encontraba ahora Aj Ch’aaj Naah.

Los últimos años de vida de Aj Ch’aaj Naah

14 Entre el nuevo material escultórico recuperado por el proyecto de conservación de Toniná de la CNCPC-INAH se encuentra una estela que nombramos Monumento 183 (para la numeración anterior ver Graham et al. 2006; Mayer 2007a y b; Sánchez Gamboa, Sheseña y Yadeún Angulo 2018; Sánchez Gamboa et al. 2019) (Figura 2). Se trata de la estela compañera del Monumento 161 (Graham et al. 2006, p. 102), conocido altar que registra una reentrada och’ k’ahk’ a la tumba de K’ihnich Baaknal Chahk en el año 730 d.C., durante el gobierno de K’ihnich Ich’aak Chapaht (Martin y Grube 2008, p. 186-187; Fitzsimmons 2009, p. 160-161). El Monumento 161 (Yadeún Angulo 1991, p. 77-78, 91-94, figs. 17-20; 1998, p. 34) fue descubierto in situ en la base de la escalinata

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del Templo IV en la Séptima Plataforma (templo oeste de la Estructura D5-3 en la nomenclatura de la Misión Arqueológica Francesa), mientras que el Monumento 183 yace sobre un piso de estuco en la alfarda este de la escalinata del Templo III (Yadeún Angulo 1998, p. 47) (en este caso corresponde al templo este de la Estructura D5-3). A pesar de que ambos monumentos no fueron encontrados juntos, sí fueron asociados al mismo sector de la Séptima Plataforma con los Templos III y IV –ambos templos gemelos con base en su orientación y planta arquitectónica, aunque varían ligeramente en tamaño. Tanto la estela como su altar presentan la fecha 9.14.18.14.12 5 Eb 10 Yaxk’in, 18 de junio de 730 d.C., utilizando simbólicamente el día 5 Eb que corresponde al día en el que K’ihnich Baaknal Chahk asumió el poder más de cuarenta años atrás.

Fig. 2a – Monumento 183 de Toniná (fotografía de Jorge Pérez de Lara, Coordinación Nacional de Conservación del Patrimonio Cultural – INAH).

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Fig. 2b – Monumento 183 de Toniná (dibujos preliminares de Guido Krempel, 2018).

15 Como parte de los rituales vinculados con la tumba de K’ihnich Baaknal Chahk se incluyó la dedicación del Monumento 161 y el Monumento 183. Este último representa al difunto gobernante, según lo refiere el propio texto inscrito en su espalda. El rostro del gobernante está fracturado en la parte media superior, no contándose hasta la fecha con el tocado que lo decoraba; además, se encuentran perdidos un pie y una esquina de la base lisa sobre la que se encuentra parado el personaje. La piedra con la que fue manufacturado el monumento corresponde a la típica arenisca amarillenta del Valle de Ocosingo. Tiene una altura de 96 cm, 47 cm de ancho y 26 cm de grosor. El gobernante se encuentra ricamente ataviado con su cinturón real acompañado por un mascarón de alguna deidad o criatura sobrenatural en la parte frontal, muy erosionado en la actualidad para su identificación. En los costados del cuerpo del gobernante hay unas pestañas o aletas con una secuencia de cartuchos con rostros de tiburón XOOK adosadas a tiras que penden verticalmente –otros casos de la asociación del tiburón en la indumentaria del gobernante de Toniná ocurren en los Monumentos 12 y 13 (Mathews 1983, p. 41, 43). En sus brazos carga una barra ceremonial en cuyos extremos hay rostros de deidades zoomorfas, presumiblemente de K’awiil.

16 No se cuenta con el inicio del texto porque fue fracturada la parte superior de la cabeza del monumento. El texto conservado nos señala que en la simbólica fecha del 5 Eb 10 Yaxk’in, 18 de junio de 730 d.C., se levantó “el poste/pedestal–imagen, la estela” de K’ihnich Baaknal Chahk; es decir, el Monumento 183, como un monumento póstumo de este gobernante: A1-C7: *(A1) tzi-ka-HAAB *(A2) 9-PIK *(A3) 14-WINIKHAAB (A4) 18-HAAB (A5) 14- WINIK-ki (B1) 12-K’IN-ni (C1) 5-”EB” (B2) 7-SIBIK (C2) u-TI’-HUUN-na (B3) 10- YAX-K’IN-ni (C3) WA’-la-ja (B4) u-yo-OOK-TE’-le (C4) BAAH-hi (B5) u-LAKAM (C5) TUUN-li (B6) K’IHNICH (C6) BAAK-NAL-la (B7) CHAHK (C7) K’UH-po-o-AJAW [tziikhaab bolo’n pik chanlajuun winikhaab] waxaklajuun haab chanlajuun winik lajcha’

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k’in ho’ eb wuk sibik uti’ huun lajuun yaxk’in wa’laj uyookte’el baah ulakamtuunil k’ihnich baaknal chahk k’uh[ul] po’ ajaw Ésta es la cuenta del año, 9 Baktunes, 14 katunes, 18 años, 14 veintenas y 12 días, en el día 5 Eb, Wuk Sibik es el Ti’ Huun, en el día 10 Yaxk’in, fue levantado el poste/ pedestal –imagen, la estela de K’ihnich Baaknal Chahk, Divino Señor de Toniná. De gran relevancia, para referirse a la elevación de un monumento póstumo que representa a K’ihnich Baaknal Chahk, resulta la construcción uyookte’el baah ulakamtuunil “su poste/pedestal–imagen, su estela”, como una figura de equivalencia semántica (Lacadena García Gallo 2009, p. 39), una manera ornamentada de establecer conexiones asociativas (Hull 2012, p. 74) en una fecha simbólica, un día 5 Eb, en la que se conmemora a su más grande gobernante que haya tenido Toniná por medio de una re-entrada a su tumba y con el levantamiento de un monumento que representa al gobernante ya muerto.

17 Es preciso hacer una breve pausa y reparar nuestra atención en (C5) TUUN-li en el Monumento 183, debido a que esta variante del logograma TUUN presenta dos motivos prefijados en el costado izquierdo del signo (Figura 3a). Houston et al. (2017) fueron los primeros en reparar en esta variante del logograma en Toniná, pero señalaron que los motivos prefijos representaban una joya y el fleco del Dios del Maíz –detectando en algunos casos la presencia de estos elementos diagnósticos de la deidad jovial del maíz en el nombre de la Serpiente Acuática o Witz’. Sin embargo, en nuestro caso, en torno de esta variante del logograma TUUN la parte superior corresponde en realidad a un motivo plegado con los extremos ligeramente curvados hacia los extremos asociado en el arte maya con capullos de lirio acuático y no con una joya del Dios del Maíz (ver, por ejemplo, Pilastra F, Casa D del Palacio en Palenque, ver Greene Robertson 1985, III, fig. 2227; Hellmuth 1987, p. 206, fig. 430 y p. 188, fig. 397; ver también el fragmento de un panel presumiblemente de Lacanha, Chiapas, Krempel 2016, p. 62, figs. 1 y 2; véase Figura 3i). Este motivo está sobrepuesto a una foliación que desciende de manera ondulante, dentro de la cual se encuentran una, dos o más líneas incisas con la misma disposición, en este caso sí asociado con el fleco del Dios del Maíz (Figuras 3a-3g)8.

Fig. 3 – Ejemplos del logograma TUUN con capullo de lirio acuático en la parte superior y foliación en la parte inferior: a. Monumento 183, B5-C5; b. Cautivo de bulto Chan Ma’s del Juego de Pelota, C3-C4; c. Monumento 84, J1; d. Monumento 72, B3; e. Fragmento de la lápida de cautivo de Aj Pe’ Tuun, pA-pB1; f. Monumento 145, F1; g. Monumento 134, B8; h. Cautivo de bulto “bu-k’u-T533” del Juego de Pelota; i. Panel de procedencia desconocida (presumiblemente de Lacanha) con representación de los mismos elementos en un paisaje acuático (Figuras 3a-3h, dibujos de Guido Krempel 2018).

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18 Al revisar la totalidad del corpus escultórico de Toniná es interesante notar que, además del Monumento 183 del gobierno de K’ihnich Ich’aahk Chapaht, se cuenta con siete casos más de monumentos dedicados durante el gobierno de K’ihnich Baaknal Chahk en donde aparece esta variante del logograma TUUN, así como en la variante de cabeza. En cuatro de estos casos ocurre como parte del toponímico de Aj Pe’ Tuun, es decir del sitio de La Mar, mientras que se tienen dos ejemplos de la construcción k’al tuun (Monumento 145, Figura 3f; Escultura de bulto del cautivo llamado “bu-k’u-T533”, Figura 3h, Yadeún Angulo 2011; Stuart 2011) y otro de naah ho’ tuun (Monumento 134, Figura 3g). Con respecto al toponímico de La Mar se cuentan con la Escultura de Bulto del Cautivo Chan Ma’s (Figura 3b, Yadeún Angulo 2011; Stuart 2011), el Monumento 84 (Figura 3c), el Monumento 72 (Figura 3d) –al cual recientemente le fue identificada y pegada la parte inferior del texto– y un fragmento de lápida de cautivo que no se ha publicado hasta ahora (Figura 3e).

19 Hemos detectado que, durante el gobierno de K’ihnich Chuwaaj? K’ahk’ y durante gran parte de su sucesor K’ihnich Ich’aahk Chapaht, desaparece esta variante del logograma TUUN con el capullo del lirio acuático y la foliación del Dios del Maíz en la parte inferior, tanto en su variante abstracta como de cabeza, hasta que nuevamente es reintroducida años después en el Monumento 183, durante el evento conmemorativo alrededor de la figura de K’ihnich Baaknal Chahk dirigido por Aj Ch’aaj Naah.

20 De regreso al Monumento 183, el final del texto es clave para entender los eventos póstumos alrededor de K’ihnich Baaknal Chahk: la reentrada a su tumba y la erección de esta estela. Se señala aquí que dichos eventos fueron atestiguados por Aj Ch’aaj Naah: B8-C9: (B8) yi-la-ji (C8) AJ-CH’AAJ-NAAH (B9) K’AHK’-TI’-HUUN-na (C9) AJ-K’UH- na yilaj aj ch’aaj naah ti’ k’ahk’ huun aj k’uhuun lo atestiguó Aj Ch’aaj Naah, Ti’ K’ahk’ Huun y Aj K’uhuun. Este último pasaje deja claro que Aj Ch’aaj Naah estuvo a cargo de las celebraciones del 9.14.18.14.12 5 Eb 10 Yaxk’in, 18 de junio de 730 d.C., los cuales rememoraban la figura de K’ihnich Baaknal Chahk. Ni en el altar (Monumento 161) ni en la estela (Monumento 183) se menciona al gobernante en turno, es decir a K’ihnich Ich’aak Chapaht. El hecho de que solamente sea referido Aj Ch’aah Naah puede ser evidencia de que fue él quien encaminó estas ceremonias en torno a su antiguo señor K’ihnich Baaknal Chahk, quien casi cuatro décadas atrás lo invistió en el cargo de Aj K’uhuun.

21 Pero más importante aún es la nueva jerarquía o estatus adquirido por Aj Ch’aaj Naah durante esta celebración póstuma de K’ihnich Baaknal Chahk. Aj Ch’aaj Naah es ahora referido como portador del singular título TI’-K’AHK’-HUUN-na, Ti’ K’ahk’ Huun, el cual al parecer está mezclando atributos del Ti’ Sak Huun y del Yajaw K’ahk’ –otro ejemplo asociado con bandas de fuego (k’ahk’ huun) lo encontramos asociado al Yajaw K’ahk’ Chak Suutz’ en el Tablero de los Esclavos (C2-D2) del Grupo IV en Palenque. Esta puede ser una evidencia clave para ahondar en la complejidad y jerarquización dentro de la estructura política no real de Toniná, en la cual un Yajaw K’ahk’ llegaría a convertirse en la cabeza principal y ser un Ti’ Sak Huun. De esta manera el singular estatus de Ti’ K’ahk’ Huun “Orador de la Banda de Fuego” podría representar un estatus transicional entre el Yajaw K’ahk’, que está en vías de convertirse en un Ti’ Sak Huun, o bien podría ser evidencia de que en ese momento Aj Ch’aaj Naah ocupó ambos cargos de manera temporal, aunque nos inclinamos por el primer caso. Con esto dicho, Aj Ch’aaj Naah no solamente funge como Aj K’uhuun en el año 730 d.C., sino que está en el proceso de

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adquirir un nuevo estatus dentro de la corte de Toniná, buscando conseguir una prestigiada posición similar a la alcanzada por K’elen Hix. Gracias al Monumento 183 podemos extender ahora la presencia de este funcionario político-religioso en Toniná casi nueve años más adelante de lo que se sabía de él, teniendo como antecedente el Monumento 110 del año 721 d.C.

22 Sin embargo, queda aún otro monumento por analizar. Con base en él conocemos mejor los últimos años de vida de Aj Ch’aaj Naah como Aj K’uhuun de Toniná. Pero antes es preciso remontarnos al año de 1973, cuando la Misión Arqueológica Francesa (Becquelin y Baudez 1982, fig. 145a) encontró dos fragmentos de un altar en el escombro ubicado entre el muro de retención de la Sexta Plataforma y la plataforma oeste de la Estructura E5-11. A estos dos fragmentos los nombraron Monumento 76, con el supuesto de que unían perfectamente y correspondían a la misma pieza. Sin embargo, en la Temporada 2017 del proyecto de conservación de Toniná de la CNCPC- INAH, se logró detectar otro fragmento que pertenece a la parte inferior del Monumento 76, el cual encajó a la perfección en el lado derecho. Al compararse con el fragmento superior izquierdo del referido monumento pudimos observar que, aunque aparentemente encajaban los cartuchos en este lado, eran más pequeños y no mostraban relación con el nuevo fragmento descubierto. En cambio, la parte inferior y el nuevo fragmento superior derecho dan continuidad al texto y resulta ser información de gran valor histórico alrededor de la figura de Aj Ch’aaj Naah. Por lo tanto, nombramos a este altar como el Monumento 184 (Figura 4), debido a la trascendencia de su contenido, pese a estar incompleto, mientras que el fragmento superior izquierdo quedó como Monumento 76, en espera que futuros fragmentos salgan a la luz y completen esta escultura.

Fig. 4a – Monumento 184 de Toniná (fotografía de Jorge Pérez de Lara, CNCPC-INAH).

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Fig. 4b – Monumento 184 de Toniná (dibujo preliminar de Guido Krempel, 2018).

23 Este nuevo altar se compone de la típica piedra arenisca de la región y tiene un diámetro de 60 cm. A pesar de estar incompleto, se conservan algunos elementos importantes de la escena central. Se detecta un rostro zoomórfico dispuesto sobre una banda horizontal con motivos de estera JEL y motivos en forma de SAK en los extremos. El rostro zoomórfico está de perfil y porta una orejera adornada con una joya similar a la sílaba -la. La parte frontal del rostro de la criatura está perdida, pero sobre la cabeza se distingue un signo K’AN, así como encima otro motivo IHK’, coronado por dos protuberancias o foliaciones enroscadas en las puntas que se vinculan con el signo NAL. Se trata sin duda de la referencia a un sitio mítico (Kubler 1977; Carlson 1997 y 2007) que antiguamente se llamaba 7-IHK’-K’AN-NAL, wuk ihk’ k’an nal (Figuras 5a-5d) posiblemente relacionado con el inframundo (Sheseña 2007). En Toniná este sitio mítico está asociado directamente con el juego de pelota (Monumento 141, D3; Monumento 115, Figura 5b).

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Fig. 5 – Ejemplos de Wuk Ihk’ K’an Nal: a. Pasaje del Monumento 141 de Toniná (D3-D5) (dibujo de Linda Schele, tomado de The Linda Schele’s Drawing Collection, © David Schele, 2000); b. Monumento 115 de Toniná (dibujo de Guido Krempel, 2018); c. Dintel de procedencia desconocida (dibujo de Guido Krempel, 2018); d. Detalle de la Estela 1 de Cancuén (dibujo de Guido Krempel, 2018).

24 Al respecto, es importante remitirnos a la re-inauguración de la cancha de juego de pelota por K’ihnich Baaknal Chahk en el año 699 d.C., según lo refiere el Monumento 141 (Figura 5a): i-EL-NAAH-ja 7-IHK’-K’AN-NAL-la 3-a-ha-li ‘CANCHA DE JUEGO DE PELOTA’-na, u-’CANCHA DE JUEGO DE PELOTA’-na ya-AJAW-TE’-pi-tzi-la K’INICH- BAAK[CHAAHK]-NAL K’UH-o[po]-AJAW-wa i elnaaj? wuk ihk’ k’an nal huux ahal …n u …n yajaw te’ pitzil k’ihnich baaknal chahk k’uhul po’ ajaw se quemó Wuk Ihk’ K’an Nal, la cancha de juego de pelota de las tres victorias, la cancha de juego de pelota del Señor de Linaje, Jugador de Pelota, K’ihnich Baaknal Chahk, Divino Señor de Toniná. Este lugar Wuk Ihk’ K’an Nal está asociado con el verbo el y con la presunta quema de incensarios (Stuart 1998, p. 389-393). Puede asumirse que en el 9.13.7.9.0 4 Ajaw 13 Ch’en, 7 de agosto de 699 d.C., fueron encendidos los incensarios para celebrar a la cancha de juego de pelota de K’ihnich Baaknal Chahk con los programas escultóricos de los cautivos vencidos que eran aliados de Aj Pitziil, es decir de K’ihnich Kan Bahlam – aunque aún no queda claro cuándo fueron desplegados estos programas escultóricos, si entre los años 696 d.C.-697 d.C. o si en el evento posterior durante el año 699 d.C.

25 Aunque en el Monumento 184 no se encuentra representado el Aj K’uhuun, como sí ocurrió con K’elen Hix en el Monumento 165, la relevancia de este altar se debe a que se trata de un monumento funerario de Aj Ch’aaj Naah. Gracias a su inscripción sabemos que murió en la fecha 9.15.4.6.8 12 Lamat 1 Pax, 5 de diciembre de 735 d.C.: A1-F1: (A1) 12-”LAMAT” (B1) 1-TE’-PAX (C1) CHAM-ya (D1) AJ-CH’AAJ-NAAH (E1) TI’-SAK-HUUN-na (F1) AJ-K’UH-na

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lajcha’ lamat ju’n te’ pax chamiiy aj ch’aaj naah ti’ sak huun aj k’uhuun En el 12 Lamat 1 Pax murió Aj Ch’aaj Naah, Ti’ Sak Huun y Aj K’uhuun lo que es coherente con la representación de Wuk Ihk’ K’an Nal como escena central del altar. Además, con base en este Monumento 184, podemos confirmar el estatus transicional de Ti’ K’ahk’ Huun “Orador de la Banda de Fuego” por el cual atravesaba Aj Ch’aaj Naah en el año 730 d.C., según se atestiguó en el Monumento 183; pues ahora, en su altar fúnebre, Aj Ch’aaj Naah es referido como Ti’ Sak Huun “Orador de la Banda Blanca”.

26 Se entiende entonces que, para los últimos años de su vida, ca. 735 d.C., Aj Ch’aaj Naah ya ocupaba la máxima posición dentro de la corte no real de Toniná: el mismo lugar que K’elen Hix ocupó más de quince años atrás. La última parte del texto introduce una rueda calendárica por medio de una construcción (G1) ko-ja kooj/koja[l]. Por el momento, el único caso similar de este término ocurre con ko-jo koj en el Monumento 164 (Graham et al. 2006, p. 106) donde también este término koj introduce precisamente una rueda calendárica (Christian Prager, comunicación personal, 2018). Además, una secuencia i-ko-jo-yi, presente en Naj Tunich (Stone 1995, p. 230), forma la frase verbal i kojoy “desciende” (Boot 2009, p. 97). En este sentido, y aplicando esta comparación a los dos contextos calendáricos de Tonina (Monumentos 164 y 184), sugerimos tentativamente que se trata de un término que introduce la próxima rueda calendárica por medio de la palabra koj/kooj o kojal con un posible sentido de “desciende/ocurrió el día”. Sin embargo, por falta de más ejemplos el significado de koj/kooj o koja[l] sigue siendo enigmático y se necesitan más ejemplos para verificar esta propuesta. La fecha que a continuación se conserva señala que en el día 13 Ben 16 Yax (9.15.6.1.13 13 Ben 16 Yax, 21 de agosto de 737 d.C.), casi dos años después de la muerte de Aj Ch’aaj Naah, ocurrió un evento por el momento desconocido para nosotros debido a la erosión del jeroglífico que lo refiere, aunque es posible que se trate de algo asociado con la conmemoración de la muerte de Aj Ch’aaj Naah o con el mismo altar, el Monumento 184.

27 Con esta nueva información vemos que un funcionario de alto prestigio como Aj Ch’aaj Naah fue paciente en su afán de ocupar el lugar que alguna vez tuvo K’elen Hix. Tal fue el peso de este Aj K’uhuun que por muchos años se respetó su figura política y religiosa en Toniná, incluso como un Aj K’uhuun divinizado y como el responsable de propiciar a los Dioses Remeros. Sin embargo, los méritos realizados por Aj Ch’aaj Naah durante los gobiernos de K’ihnich Baaknal Chahk, K’ihnich Chuwaaj? K’ahk’ y K’ihnich Ich’aak Chapaht le valieron alcanzar esta máxima posición y quedar registrado como una figura central de Toniná entre los años 692-735 d.C. Anteriormente se pensaba que K’elen Hix había sido más longevo que Aj Ch’aaj Naah, pero gracias a esta nueva información presentada sabemos ahora que este último estuvo ocho años más que el primero, alrededor de 43 años como Aj K’uhuun, además de haber atravesado los cargos de Yajaw K’ahk’ – Ti’ K’ahk’ Huun – Ti’ Sak Huun en diferentes momentos de su vida.

Palabras finales

28 De relevancia al ahondar en la importancia de la corte no real en Toniná resulta que el cargo de Aj K’uhuun en esta ciudad se asumiera como jerarquizado y compartido, con el Ti’ Sak Huun como el principal cargo y el Yajaw Kahk’ en un lugar secundario, aunque no menos importante. Sin embargo, con los Monumentos 183 y 184 es posible establecer, a

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través de la vida de Aj Ch’aaj Naah, que un Yajaw K’ahk’ podía llegar a convertirse en un Ti’ Sak Huun, pero al parecer antes tenía que ser un Ti’ K’ahk’ Huun u ocupar ambos cargos en determinados momentos de transición. No pueden generalizarse estos tres estadios a todas las cortes de las Tierras Bajas mayas, en principio porque su composición y organización tuvieron peculiaridades regionales, pero cabe señalar que están presentes en la etapa de mayor esplendor de Toniná. Es posible, entonces, determinar que la estructura del cargo de Aj K’uhuun en Toniná adquirió su mayor complejidad entre los años 682 d.C. y 735 d.C. con los dos funcionarios más importantes que haya tenido la corte no real de esta ciudad maya.

29 Con este texto aportamos nuevas luces sobre la biografía de Aj Ch’aaj Naah como un importante funcionario Aj K’uhuun durante tres diferentes gobiernos: K’ihnich Baaknal Chahk (del año 692 d.C. al 708 d.C.), K’ihnich Chuwaaj? K’ahk’ (del año 708 d.C. al 721 d.C.) y K’ihnich Ich’aak Chapaht (del año 723 al 735 d.C.). Con el primero entabló aparentemente una relación más estrecha, debido a que fue el gobernante que lo introdujo en el cargo de Aj K’uhuun, aun teniendo en cuenta todo el prestigio de K’elen Hix. Tras la muerte de este último, Aj Ch’aaj Naah quedó a la cabeza de la corte no real de Toniná, acompañado fugazmente por un tal Yaxuun Bahlam, del cual no volvemos a saber más allá del Monumento 110. No podemos olvidar al enigmático Aj K’uhuun “AJ- T650-na” mencionado en los monumentos 8, 156 y en el muro estucado del “Templo de las Luciérnagas”, quien durante el reinado de K’ihnich Baaknal Chahk fue contemporáneo de K’elen Hix y Aj Ch’aaj Naah –e incluso ahora sabemos que K’elen Hix y “AJ-T650-na” fueron los Aj K’uhuun del “Gobernante 2”.

30 Uno de los mayores eventos religiosos que Aj Ch’aaj Naah presidió como cabeza de la corte no real de Toniná fueron las ceremonias conmemorativas alrededor de K’ihnich Baaknal Chahk en el año 730 d.C., evidencia suficiente para confirmar el estrecho vínculo entre Aj Ch’aaj Naah y este gobernante. Fundamental, también, resulta la existencia de un posible estadio intermedio entre los cargos de Yajaw K’ahk’ y Ti’ Sak Huun: el Ti’ K’ahk’ Huun, el cual aún queda en espera de ser cotejado en otros contextos y entidades políticas. Sin embargo, estos tres estadios o jerarquías de un Aj K’uhuun las atravesó en vida Aj Ch’aaj Naah y quedaron registrados en los monumentos escultóricos de la ciudad, siendo ahora una de las figuras político–religiosas mejor conocidas de Toniná y de las Tierras Bajas mayas. Futuros monumentos llenarán los vacíos que todavía existen de la vida de Aj Ch’aaj Naah, pero esperamos ofrecer con este artículo una idea más completa de este importante personaje de la corte no real de Toniná, amén de introducir dos nuevos monumentos que enriquecen nuestro conocimiento general sobre esta entidad política y su corpus escultórico.

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NOTAS

1. La lectura del nombre del Dios Jaguar del Inframundo fue propuesta hace algunos años por Luís Lopes (s. f.), en un manuscrito inédito. 2. Para una historia de las interpretaciones de este título, véase Jackson y Stuart 2001, p. 291-322 y Zender 2004, p. 164-195. 3. El signo T650, el cual forma parte del nombre de este tercer Aj K’uhuun, ha sido objeto de breves reflexiones en el pasado. Yuriy Polyukhovych en 2007 propuso una lectura de -ch’e como silabograma, pero más importante aún es que vinculó el mural de estuco del “Templo de las Luciérnagas” con el Monumento 156 debido a que se menciona al mismo personaje. Por su parte, Marc Zender (2017, p. 17, n. 28) señala que el comportamiento del signo T650 sugiere que en realidad se trata de un logograma. Ello debido a que, en la concha marina del Ethnologisches Museum der Staatlichen Museen zu Berlin (IV Ca 504668), el signo T650 se muestra formando lo que al parecer es un adjetivo derivado usando el sufijo -Vl, en tanto que en el mural del “Templo de las Luciérnagas” T650 presenta un complemento fonético -na, dando la forma (CV)CAN. Polyukhovych (comunicación personal, 2018) ha reparado nuevamente en la presencia de este signo en el nombre de nuestro Aj K’uhuun y ha notado que en el Monumento 156 nos encontramos ante dos signos diferentes: por un lado, el superior corresponde a T650, mientras que el signo inferior corresponde a otro semejante por su contorno al signo -chu, en tanto que en el mural están combinados ambos signos y se acompañan de un complemento fonético - na que podría corresponder a cualquiera de estos dos signos en conflación. Otro caso menos claro de la construcción del nombre de este Aj K’uhuun ocurre en el Monumento 8, quedando evidenciado que era contemporáneo de K’elen Hix; el problema radica en que, después de la referencia del año 708 d.C. en el “Templo de las Luciérnagas”, no volvemos a saber de él, mientras que sí sabemos que K’elen Hix murió en el año 717 d.C. (Monumento 165, Graham et al. 2006). Por su parte, Simon Martin (comunicación personal de Simon Martin con Marc Zender, 2017) refiere la presencia del signo T650 en un poco entendido teónimo presente en el área de Yaxchilán, además de que forma parte del nombre del Gobernante 17 del linaje de Kaanul en Dzibanché (Martin 2017, fig. 2, n. 4). 4. Se han propuesto varias lecturas para el signo T533 sin haber, por el momento, un consenso entre los especialistas. 5. La preponderancia que recibe Aj Ch’aaj Naah por parte de K’ihnich Baaknal Chahk en este momento puede deberse a que (1) fue investido en el cargo del Aj K’uhuun por este gobernante, o (2) porque se trata de su primer final de periodo importante que celebra. Creemos que ambos puntos son importantes en la preferencia por este funcionario menor por sobre el más experimentado K’elen Hix. Además, con la dedicación de los monumentos 161 y 183 en el año 730 d.C., Aj Ch’aaj Naah dejaría reflejada su inclinación hacia K’ihnich Baaknal Chahk, incluso después de la muerte de este gobernante.

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6. Desafortunadamente la rueda calendárica del texto del yugo está incompleta, pues únicamente se cuenta con la fecha del tzolk’in. Por el estilo caligráfico de algunos signos es posible la hipotética reconstrucción de esta fecha. El cartucho del tzolk’in no es simétricamente redondeado en las esquinas, y presenta una ligera inclinación en la parte frontal del cartucho “IMIX” (inclinación que podemos comparar con el cartucho G1 del Monumento 139 del año 702 d.C.; incluso comparten el mismo estilo los llenadores de espacio del 7); pero, más importante, la parte inferior del cartucho del tzolk’in presenta los extremos enroscados y abombados, en tanto que el motivo central presenta una forma similar al signo -la o AJAW aunque invertido y con forma trilobulada asociado con joyas. Clave resulta la comparación de la sílaba -la en la construcción pi-tzi-la para “jugador de pelota”, debido a que en el yugo aparecen las dos esferas con los motivos -la, pero en el centro las tres cuentas que caracterizan a esta sílaba están dispuestas verticalmente, ligeramente separadas una de otra. Este estilo caligráfico de la sílaba -la lo encontramos en el Monumento 134 (A7) del año 697 d.C., aunque, si bien las tres cuentas están alineadas verticalmente, están más pegadas unas de otras. A la par convive otro estilo de la sílaba -la en donde las tres cuentas están inclinadas (Monumento 142, A5, B6). Pero, nuevamente, en el Monumento 139 encontramos importantes indicios: sobre todo porque en T1 aparece la construcción ya-AJAW-TE’ pi-tzi-la, muy similar a la del yugo de Bolonkin, aunque con ligeras variantes: el logograma TE’ aparece en variante de cabeza, pero pi-tzi-la es prácticamente el mismo, la misma forma de la sílaba pi-, aunque -tzi ocurre en variante de cabeza, pero -la nuevamente presenta las tres cuentas dispuestas verticalmente. Por su parte en el Monumento 141 (D4) del año 699 d.C., los signos TE’ y -tzi para Yajaw Te’ Pitziil aparecen en variante de cabeza. Por lo tanto, tenemos un rango de posibilidad entre los años 697-702 d.C., siendo el año 702 d.C. un hipotético candidato para la fecha de este yugo (Sheseña y Lee 2004). 7. En Palenque contamos con otros ejemplos del uso de los capullos del lirio acuático en uno de los dos aspectos del Dios Jaguar del Inframundo, en dos incensarios efigie del Templo de la Cruz Foliada, el Elemento 6b/54 (Cuevas García 2004, p. 288, fig. 193) y Elemento 17/93 (ibid., p. 289, fig. 194), manufacturados durante el Complejo Cerámico Balunté (770-850 d.C.). La narrativa visual con la que se asocia el Dios Jaguar del Inframundo presenta en el remate superior del incensario-efigie una banda acuática representada de manera esquematizada, con una cuenta redonda que representan el flujo del agua, además de volutas de agua y conchas seccionadas, pilas de agua (“water stacks”) y, en los extremos de la banda acuática, flanqueando se encuentran capullos de lirio acuático, estrechamente relacionados con el motivo superior de la variante del logograma TUUN bajo discusión en C5 del Monumento 183 de Toniná. 8. Houston et al. (2017) consideran que la presencia de esta variante de TUUN en Toniná se asocia con esculturas vinculadas con la fecha 1 Ajaw, la cual corresponde al final del periodo 9.13.5.0.0 1 Ajaw 3 Pop, 15 de febrero de 697 d.C., registrada en los Monumentos 134, 140 y 145 y en la escultura en bulto del cautivo llamado “bu-k’u- T533” descubierta en 2011 por el arqueólogo Juan Yadeún Angulo. Sin embargo, el corpus de ejemplos de esta variante de TUUN es muy limitado para afirmar que todos los ejemplos de esta variante de logograma en Toniná se relacionen con este final de periodo que cae en la fecha 1 Ajaw. Cabe señalar que el resto de los ejemplares de este logograma están asociados con el toponímico de La Mar, Pe’ Tuun, y con la captura de Chan Ma’s en el año 693 d.C. Esto implicaría que todas estas esculturas fueron parte del programa escultórico asociado con la inauguración de la cancha de juego de pelota en

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el año 696 d.C., así como con el final de periodo 1 Ajaw 3 Pop, el siguiente año. Si partimos de que los años 696-697 d.C. constituyeron la etapa de máximo esplendor alcanzada por Toniná bajo el gobierno de K’ihnich Baaknal Chahk, podemos pensar que la reintroducción de esta variante de logograma TUUN en el Monumento 183 presumiblemente fue una manera de evocar no solamente al gobernante ya muerto, sino también, una variante del logograma del signo de piedra que usó K’ihnich Baaknal Chahk y que se extendió en los años más importantes de su gobierno.

RESÚMENES

La figura de Aj Ch’aaj Naah es sin lugar a duda una de las más destacadas en la historia de los funcionarios Aj K’uhuun de Toniná. No obstante ser una figura político-religiosa muy bien identificada en la literatura académica sobre esta ciudad, era poca la información con la que contábamos acerca de él. Sin embargo, gracias a la reciente recuperación de dos nuevos monumentos, ahora podemos enriquecer aspectos antes desconocidos no sólo de la vida de Aj Ch’aaj Naah sino también relativos a la complejidad y particularidades del cargo de Aj K’uhuun en Toniná.

The figure of Aj Ch’aaj Naah is undoubtedly one of the most outstanding in the history of the Aj K’uhuun officials of Tonina. Despite being a politico-religious figure very well identified in the academic literature about this city, there was very little known about him. However, thanks to the recent recovery of two new monuments, we can now enrich previously unknown aspects not only about the life of Aj Ch’aaj Naah but also about the complexity and particularities of the Aj K’uhuun office in Tonina.

La figure d’Aj Ch’aaj Naah est sans aucun doute l’une des plus remarquables de l’histoire des responsables Aj K’uhuun de Toniná. Bien qu’il s’agisse d’un personnage politico-religieux très bien identifié dans la littérature universitaire sur cette ville, nous disposions de peu d’informations à son sujet. Cependant, grâce à la récupération récente de deux nouveaux monuments, nous pouvons maintenant enrichir des aspects jusqu’alors inconnus de la vie d’Aj Ch’aaj Naah, mais également de la complexité et des particularités de sa charge à Toniná.

ÍNDICE

Palabras claves: Toniná, epigrafía maya, mayas clásicos, élite maya clásica, títulos mayas clásicos Mots-clés: Toniná, épigraphie maya, classique maya, élite classique maya, titres classiques maya Keywords: Tonina, Maya epigraphy, Classic Maya, Classic Maya elite, Classic Maya titles

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AUTORES

ÁNGEL A. SÁNCHEZ GAMBOA

Coordinación Nacional de Conservación del Patrimonio Cultural, INAH Universidad de Ciencias y Artes de Chiapas

ALEJANDRO SHESEÑA

Universidad de Ciencias y Artes de Chiapas Universidad de Bonn/Coordinación Nacional de Conservación del Patrimonio Cultural, INAH

GUIDO KREMPEL

Universidad de Bonn/Coordinación Nacional de Conservación del Patrimonio Cultural, INAH

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Ciudadanos de la comunidad. Appropriation de la bureaucratie et expérience de la « communauté » chez les Matsigenka (Amazonie péruvienne) Ciudadanos de la comunidad. Appropriation of bureaucracy and experience of “community” among the Matsigenka (Peruvian Amazon) Ciudadanos de la comunidad. Apropiación de burocracia y experiencia de la “comunidad” entre los Matsigenka (Amazonía peruana)

Raphaël Colliaux

NOTE DE L’ÉDITEUR

Manuscrit reçu en juin 2019, accepté pour publication en novembre 2019.

Remerciements – Ce texte est tiré de notre thèse de doctorat en sociologie, soutenue en janvier 2019 à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS, Paris). Dans ce cadre, nous avons mené trois séjours de terrain entre 2014 et 2017, cumulant au total une dizaine de mois d’enquête. Ces séjours ont été financés grâce au concours du Labex Tepsis (EHESS), du Legs Lelong en anthropologie sociale (CNRS), ainsi que par une bourse de mobilité de l’Institut français d’études andines (Umifre 17 MEAE/CNRS). Les dernières étapes de cette recherche ont été réalisées dans le cadre du projet AMAZ (ANR-17-CE41-0013). Je remercie chaleureusement Catherine Alès, Isabel Yaya McKenzie, l’équipe de rédaction du JSA ainsi que ses relecteurs anonymes pour leur révision attentive de ce travail et leurs précieux commentaires.

1 Introduit dans les basses terres en 1974, le régime de la comunidad nativa1 (communauté autochtone) a permis aux Amérindiens d’acquérir des droits fonciers collectifs,

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mécanisme indispensable à la défense de leur souveraineté territoriale. Toutefois, on ne peut manquer d’observer une certaine continuité historique, tant sur le plan spatial qu’idéologique, entre, d’une part, ce dispositif récemment généralisé en Amazonie et, d’autre part, les comunidades de réduction imposées dans les dès les débuts de la colonie, institutions elles-mêmes organisées sur le modèle des communautés rurales de Castille, d’Estrémadure et du Royaume de Léon (Fioravanti-Molinié 1978 ; Zagalsky 2009). Il s’agissait, pour les colons du XVIe siècle, de regrouper les Amérindiens autour des principaux centres miniers et agricoles et de leur imposer subrepticement une « conception européenne de l’espace prévalant à la Renaissance, qui tendait à privilégier des structures concentrées et bien délimitées, avec, pour chaque collectivité, leurs diverses fonctions centrales, aux dépens d’autres, diffuses et dispersées, considérées comme impropres à la vie en société » (García Martínez, cité et traduit dans Herzog 2007, p. 510). Une telle généalogie explique sans nul doute l’ambiguïté dont est porteuse la « communauté autochtone » contemporaine en Amazonie, instrument d’une souveraineté amérindienne autant que dispositif de colonisation sur la longue durée.

2 Aussi, si l’introduction du régime de la comunidad nativa représente, pour beaucoup d’Amérindiens, une promesse d’autonomie retrouvée après les périodes les plus sombres de l’exploitation du caoutchouc naturel des basses terres péruviennes, la façon dont les communiers2 objectivent leur propre processus de regroupement trahit fréquemment, sous l’influence du discours missionnaire, une moralisation des concepts liés à l’idée de « communauté ». Les ecclésiastiques des différentes obédiences – tant catholiques que protestantes – ont en effet largement défendu les vertus présumées de la corésidence communale. Après les affres de la colonisation, celle-ci devait assurer la recomposition culturelle des groupes autour d’un collectivisme qui leur était supposé « naturel »3. Doublée en outre d’une politique de scolarisation systématique, la vie communale devait mettre les Amérindiens sur la voie de la « civilisation », promettant un dépassement substantiel de la « sauvagerie » et de l’« ignorance » des temps anciens. De sorte que, pour reprendre les mots de Stoll et Folhes (2014, p. 83-84), « la formation du village suggère, dès ses débuts, une reclassification sociale et une évaluation morale de l’espace et de ses occupants »4.

3 C’est le processus de formation de Palotoa-Teparo, petite communauté administrative matsigenka du département du Madre de Dios, qui sera étudiée au premier chef. Ce processus sera éclairé par quelques témoignages complémentaires recueillis dans le bas Urubamba (région de Cusco), où réside la majorité de la population matsigenka5. On reviendra d’abord sur l’histoire du regroupement de Palotoa-Teparo, le sens que les Matsigenka lui donnent, avant d’explorer l’exercice contemporain du politique dans le cadre imposé par l’État.

4 Ce texte repose sur deux hypothèses de travail, élaborées au fur et à mesure de nos enquêtes de terrain. La première d’entre elle est que c’est en assumant leur identité politique de communier, c’est-à-dire d’individu inscrit dans les registres publics, qu’une partie des membres de cette ethnie se construit aujourd’hui comme « groupe » et qu’elle tente d’assurer l’interface avec l’État, ses administrations, voire avec le reste de la société nationale. Cela implique que, comme le montre l’enquête, les Matsigenka regroupés en « communautés6 » reprennent à leur compte le répertoire administratif imposé, qu’ils s’approprient son lexique et ses outils de manière à construire une représentativité politique qui leur est propre. De la sorte, ce sont des ramifications de

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l’État que les communiers ne cessent de reproduire, tout en exerçant, mutatis mutandis, une forme d’autonomie politique sur le territoire qui leur a été reconnue.

5 Ce point nous amène à notre deuxième hypothèse, selon laquelle l’activité politique des communiers consisterait, pour une large part, à envisager la « communauté » qu’ils administrent à l’image de l’État, en tant que celui-ci délègue les schèmes et dispositifs à partir desquels ils vont adosser leurs propres pratiques. Dans ce rapport de subsidiarité ainsi entretenu à l’égard de la puissance étatique, on ne cesse d’être surpris par le fait que l’hégémonie semble tout à la fois détournée et subrepticement reproduite. C’est une ambigüité comparable que Thomas Abercombrie mettait en lumière dans un article consacré aux liens entre ethnogenèse et domination coloniale dans les Andes boliviennes : Ma thèse est que les unités ethniques modernes telles que nous les connaissons aujourd’hui, comme les Macha ou les K’ulta, sont issues de la prise en main par leurs ancêtres des stratégies administratives imposées, comme la réduction et les institutions de doctrine, pour reconstruire un système d’articulation qui servait autant leurs propres fins que celles de leurs dominateurs. […] Dans les sociétés coloniales, la conquête n’est pas un événement singulier. La confrontation de systèmes culturels distincts est régulièrement recréée sur des formes rituelles en tant que locus de leur articulation historique. Elle préserve les formes de l’intervention coloniale tout en produisant les individus qui définissent les termes de l’articulation entre les ordres locaux et globaux. (Abercombrie 1990, p. 99)

6 Le cas de Palotoa-Teparo nous donne à voir, précisément, cette articulation paradoxale selon laquelle le modèle communal est, pour les Matsigenka, à la fois un instrument effectif d’émancipation, un dispositif acculturant autant qu’un générateur d’ethnicité.

Palotoa-Teparo : genèse d’une communauté administrative

7 Palotoa-Teparo est une petite communauté administrative du Madre de Dios dont la création a été encouragée par les missionnaires dominicains, mais mise en œuvre par un métis qui s’est peu à peu affranchi des catholiques. Située aujourd’hui dans la zone dite d’« amortissement » (amortiguamento) du parc national du Manu, Palotoa-Teparo réunit près de 130 personnes, toutes de langue matsigenka. On compte actuellement 48 adultes inscrits dans le registre communal. Installé sur la rive gauche de la rivière Shinkiveni, la « rivière du maïs », le regroupement fut formellement reconnu comme « communauté autochtone » (comunidad nativa) en 1987 et obtint son titre de propriété collective en 1990. Le territoire communal compte aujourd’hui plus de 6 000 hectares7.

8 La présence missionnaire dans la zone remonte au début du XXe siècle. Délégué en 1902 par l’ordre dominicain d’Espagne8, le père Zubierta a d’abord fondé une mission dans la vallée de Kosñipata, dans les contreforts des Andes, qui devint un lieu stratégique pour le projet d’évangélisation des Amérindiens des basses terres. Partant, Zubierta mandata les pères Osende et Pío Aza pour installer une mission à la confluence des fleuves Manu et Madre de Dios. Avec l’aide de deux colons locaux – Don Bernardino Pérez et Don Antonio Rengifo –, ils établirent la mission de San Luis del Manu en 1908, où se concentra l’essentiel de l’activité dominicaine après la fermeture de l’établissement de Kosñipata (Egido 2006, p. 42).

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9 Plus en aval sur le haut Madre de Dios, un autre ecclésiastique, le père Vicente de Cenitagoya, tenta ensuite plusieurs incursions le long de la rivière Shinkiveni (ou Pantiacolla), où se situe actuellement la communauté administrative de Palotoa- Teparo, dans le but de fonder une nouvelle mission. Fuyant l’époque trouble de l’exploitation du caoutchouc9, plusieurs groupes s’y étaient en effet réfugiés. Rejetée par les Matsigenka, l’initiative missionnaire resta longtemps un échec. Ce n’est qu’en juillet 1921 que fut créée la mission de Nuestra Señora del Rosario de Pantiacolla, qui fut fermée en 1926 après la mort accidentelle de plusieurs individus. En 1958 enfin, après de nombreuses tentatives visant à rassembler les groupes harakmbut, l’actuelle mission de San Gabriel de Shintuya est finalement créée, à quelques kilomètres sur l’autre rive du Madre de Dios (ibid., p. 43-45).

10 Il faut par ailleurs souligner qu’à partir des années 1950, les missionnaires évangéliques de l’Instituto Lingüistico de Verano10 (Institut linguistique d’été, ILV) firent parallèlement leur entrée dans la région. Ils occupèrent l’aval du fleuve désormais délaissé par les dominicains, centrés comme on l’a vu sur le haut Madre de Dios. Ils regroupèrent plusieurs familles au sein de deux communautés administratives relativement importantes : Yomybato et Tayakome. Les évangéliques s’appuyèrent pour cela sur des Amérindiens ou des métis pouvant faire office de rabatteurs auprès des Matsigenka (Shepard et Izquierdo 2003). L’un d’entre eux, Vitaliano Cabrera, décédé dans les années 2000, fut l’un des fondateurs de Palotoa-Teparo.

11 Selon Guillermo Cabrera, fils de Vitaliano, son père était un métis né à Camisea, dans le bas Urubamba, d’une mère matsigenka et d’un père d’origine andine issu de Quillabamba. Présent à Tayakome au début des années 1970, l’anthropologue André- Marcel d’Ans (1981) mentionne le rôle de Cabrera, qu’il prénomme à cette époque « Italiano »11. Il décrit un homme « intelligent », faisant preuve d’une grande éloquence et familier des grandes villes du sud du pays (Arequipa, Puno, Cusco). Visiblement doté d’une importante capacité d’influence sur ses pairs, Vitaliano Cabrera fut d’abord envoyé à Tayakome, où il commença à rassembler les familles dispersées le long du fleuve et de ses affluents pour le compte de l’ILV : Vitaliano a regroupé les gens à Tayakome, il les a ramenés des affluents. Il leur apportait des haches, il leur apportait des machettes, des couteaux. Les linguistes donnaient tout cela à mon père et lui disaient : « Tu donnes ça à ceux qui vivent sur les affluents. Les enfants tu les ramènes ici pour qu’ils apprennent [à l’école]. » (Guillermo Cabrera, 29/08/2014, traduction de l’auteur)

12 Selon le récit de d’Ans (ibid.), Tayakome regroupait en 1971 plus de 200 Matsigenka. Les missionnaires dégagèrent pour cela un vaste espace de forêt et bâtirent une école en son centre. Autour de l’établissement étaient organisées des « rues » le long desquelles étaient disposées les familles. Avec la formation de la réserve naturelle protégée du Manu, en mai 1973, les autorités péruviennes tentèrent d’expulser les missionnaires et les Amérindiens. L’ILV incita alors les Matsigenka à se rabattre dans le bas Urubamba (région de Cusco), ce qui donnera naissance à la communauté administrative de Segakiato. Une partie des Matsigenka parvint néanmoins à rester à Tayakome, mais fut soumise à différentes interdictions liées à la règlementation du parc naturel qui sont en vigueur encore aujourd’hui, comme celle d’utiliser des armes à feu ou de faire commerce des ressources naturelles (Puygrenier Vargas 2007).

13 Cabrera se replia pour sa part sur la rivière Shinkiveni, où il jouera à nouveau un rôle de rabatteur, cette fois pour le compte des dominicains établis dans la mission de

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Shintuya. Une de ses filles, Sandy Cabrera, qui a été présidente de Palotoa-Teparo de 2011 à 2013, explique : Mon père est celui qui les a fait se former, celui qui les a regroupés en communauté. Sans ça, nous aurions été au service des colons de Shintuya12, nous aurions été leurs esclaves. Mon père a appelé les familles qui étaient sur les affluents du Madre de Dios, et elles se sont regroupées, et de là a commencé la communauté. Il leur a expliqué : « Nous nous regroupons pour que nous ayons notre territoire. Une fois que nous aurons notre territoire on fera ce que l’on voudra. Si nous voulons faire un jardin, nous ferons un jardin. Si au contraire nous restons [vivre] auprès des colons, ils vont nous prendre tout ce que nous avons, ils nous feront travailler sans cesse », leur a-t-il dit. Elles [les familles] ont compris et elles se sont regroupées pour obtenir le titre [de propriété] de la communauté. Comme à ce moment-là elles ne savaient pas jusqu’où pouvait aller la frontière de la communauté, jusqu’où elles pouvaient faire leurs maisons, il y a eu des difficultés pour l’obtention du titre. Nous avons rapidement fait construire l’école en dur, en ciment. (Sandy Cabrera, 21/02/2015, traduction de l’auteur)

14 Comme le souligne ce témoignage, l’un des principaux arguments justifiant la création de la communauté administrative était d’échapper à une forme de servitude vis-à-vis des colons locaux. L’arrivée de la comunidad nativa représente alors une autonomie retrouvée après les périodes les plus hostiles de l’avancée du front pionnier dans la région13. Toutefois, le sésame qui sanctionne la formation de cet espace d’émancipation est l’obtention d’un titre formel de propriété reconnu par l’État, la stabilisation de la vie communale coïncidant ainsi avec l’apprivoisement progressif des exigences des institutions publiques dont dépend l’octroi de ce titre. Comme on le verra plus bas, les communiers de Palotoa-Teparo souffriront en particulier de la possibilité de délimiter de façon précise le territoire communal, ce qui sera à l’origine de plusieurs expulsions.

Un long chemin vers l’autonomie

15 Les conditions de création de Palotoa-Teparo expliquent probablement l’esprit d’indépendance que la plupart de ses membres revendiquent. Certes, l’initiative du regroupement fut encouragée par les prêtres dominicains et ce sont eux qui firent construire la première école. Il semble néanmoins que Vitaliano Cabrera, conformément à son tempérament de franc-tireur décrit par d’Ans (1981, p. 149-150), s’affranchit rapidement de la mission de Shintuya voisine pour défendre l’autonomie de la communauté administrative qu’il avait contribué à rassembler14. À ce titre, Vitaliano Cabrera incarne de manière typique la figure du curaca, servant d’intermédiaire avec les missionnaires et tentant de soutirer d’eux un maximum d’avantages pour le groupe de familles auquel il est lié15.

16 Au cours des années 1970-1980 vraisemblablement, un premier regroupement de cinq à six familles matsigenka vivait à l’embouchure du Shinkibeni. La situation resta stable durant une dizaine d’années. De l’autre côté de la rive se trouvait déjà la communauté administrative de Shintuya, où les Harakmbut sont majoritaires et avec qui les Matsigenka entretiennent de vieilles querelles. Alors que les communiers les plus anciens évoquent une époque où les différends se réglaient à jets de flèches, l’introduction du régime communal semble avoir déplacé ces tensions dans le champ administratif. Au début des années 1990 en effet, les résidants de Shintuya font valoir un droit de propriété sur le territoire occupé par les Matsigenka. À force de tractations, ils obtiennent le départ de la communauté administrative, obligée de migrer plus en

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amont sur le Shinkibeni, à l’embouchure d’un petit ruisseau, le Jerontoria. L’épisode se répète à nouveau en 2000, repoussant le regroupement de Palotoa-Teparo plus haut encore sur la rivière. Sandy Cabrera se rappelle : Ils nous ont expulsés et nous ont dit : « Allez-vous-en sur le terrain qui vous est dû. » Mon père disait : « Ils nous ont rejetés, qu’allons-nous faire ? » Nous sommes partis en amont et nous ne nous sommes pas rendu compte que nous étions toujours sur le territoire de Shintuya. Nous avons vécu là dix ans et à nouveau, ils nous ont expulsés, ils nous ont rejetés et, après ça, nous sommes venus ici. Mais là aussi nous avons construit rapidement une école en béton, en ciment. (Sandy Cabrera, 21/02/2015, traduction de l’auteur)

17 L’événement est cette fois retranscrit dans les comptes rendus écrits que les communiers tiennent rigoureusement à chacune de leur assemblée mensuelle. Quelques semaines avant l’expulsion, on y fait état des repérages des lieux potentiels et des travaux de défrichements. Le procès-verbal de la réunion du 8 août 2000 mentionne un débat sur la façon dont doit s’organiser le déplacement. Faut-il reconstruire en priorité un nouveau local communal ou bien les structures de l’école primaire ? « Ce point a suscité une ample discussion, et nous sommes parvenus à prioriser en premier lieu le local scolaire du Centre éducatif, préoccupation première des communiers et des familles » (Palotoa-Teparo, assemblée générale du 15/08/2000, traduction de l’auteur). Les communiers décident à cette occasion de solliciter du matériel à la municipalité du district. La requête est l’objet d’un document écrit et une « délégation » est désignée pour aller le porter aux autorités. On y demande 60 sacs de ciment, 200 plaques de tôles ondulées, 60 gallons d’essence, des clous, etc.

18 L’un des éléments notables qui ressort de cet épisode est que l’école est l’une des entités à partir de laquelle la communauté administrative se reconstitue en cas de difficulté. Elle est à la fois le signe d’une assise concrète autour de laquelle s’établir et d’un développement continu de la communauté administrative. À nouveau, il faut invoquer ici l’influence du discours missionnaire, qui a largement insisté sur les vertus civilisatrices de la scolarisation, perçue comme un processus corollaire au rassemblement des Amérindiens au sein de « communautés »16. Néanmoins, il ressort aujourd’hui du témoignage des communiers que la mise à l’école de leurs enfants, si elle contraste indubitablement avec les formes de transmissions familiales des savoirs et des pratiques, garantit la formation d’une génération rompue aux mécanismes de la négociation administrative, en particulier grâce à l’apprentissage de la lecture et de l’espagnol. L’établissement symbolise ainsi la consolidation progressive et continue du groupe, qui existe dorénavant sous cette forme politique et administrative spécifique17.

19 Selon Guillermo Cabrera, la première école de Palotoa-Teparo aurait ouvert avec une douzaine d’enfants. À la différence des évangéliques de l’ILV – qui utilisaient les langues vernaculaires pour parfaire leur travail d’évangélisation –, les prêtres catholiques, à l’origine de ce premier établissement, y dispensaient leurs enseignements en espagnol exclusivement. Comme l’a souligné Sheila Aikman (2003, p. 78), le peu d’intérêt des dominicains pour les langues autochtones les amènera à recruter des enseignants venus des hautes terres, souvent quechuaphones. En déléguant sur place ces professeurs, les dominicains limitèrent de fait leur propre présence18, ménageant une marge d’autonomie des communautés administratives vis-à- vis de la mission, à l’instar de Palotoa-Teparo.

20 Comme on l’a vu, l’établissement scolaire et sa construction revêtent une dimension centrale dans la formation de la communauté administrative, reléguant finalement les

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activités prosélytes à un second plan. L’intensité du rayonnement de l’école, autour de laquelle se presse aujourd’hui l’essentiel de la vie communale de Palotoa-Teparo, contraste en effet avec l’activité de la petite chapelle de bois – le choix du matériau n’est pas anodin – qui jouxte les salles de classe. La première abrite nombre d’activités qui ne concernent pas simplement la classe (réunions politiques, fêtes, jeux, activités sportives), tandis que la seconde tombe à l’abandon, n’étant plus fréquentée que deux ou trois fois l’an par le prêtre dominicain de Shintuya. Au contraire, c’est de ciment armé que l’école est bâtie, emblème de modernité et de durabilité, comme les communiers ne manquent pas de le souligner. Enfin, et ce dernier point est fondamental, c’est l’école qui accueillera les assemblées mensuelles de Palotoa-Teparo, aucun local spécifique n’ayant été construit par la suite. De sorte que l’établissement scolaire s’apparente à un « lieu anthropologique », au sens donné par Marc Augé (1992) à ce terme, c’est-à-dire un espace auquel les individus s’identifient, où ils établissent des relations sociales durables et autour duquel ils construisent une histoire collective.

Ce que la communauté administrative veut dire

21 Si le bon fonctionnement de l’école est l’un des sujets de préoccupation majeurs des communiers, sinon une des façons d’assurer la (re)production de la communauté administrative, il y a par conséquent un enjeu, autant pour les parents que pour les enseignants de Palotoa-Teparo, d’augmenter le nombre d’élèves inscrits dans l’établissement. Une des stratégies consiste à convaincre les familles qui vivent de façon encore très isolée en dehors du territoire communal, en amont de la rivière Shinkiveni, de venir s’établir dans la communauté administrative afin de peser démographiquement face aux colons andins qui se montrent souvent avides d’exploiter les ressources sylvicoles de la zone. Les communiers, qui entretiennent parfois des liens de parenté anciens avec ces familles, leur rendent fréquemment visite lors de sorties de pêche ou de chasse qui s’étendent sur plusieurs jours. En échange de leur rattachement à la communauté administrative, ils leur proposent de les aider à construire des maisons et leur garantissent des espaces de culture, voire des alliances. Cette stratégie convient également aux enseignants, pour qui le fait d’avoir un nombre conséquent d’élèves leur permet d’exiger auprès des autorités locales davantage de matériel scolaire, de soutien logistique, ou encore de capter une part plus importante des programmes d’aide alimentaire à l’attention des écoles rurales.

22 Ainsi, début 2017, après avoir essuyé plusieurs défections et avoir expulsé différentes personnes considérées comme trop peu impliquées dans le fonctionnement de la communauté administrative, Palotoa-Teparo accueille deux nouvelles familles venues de l’amont de la rivière, dont sept enfants en bas âge. Inquiétées par l’attaque d’un jaguar (matsontsori), ces familles ont été ramenées par un communier qui les a convaincues d’y trouver un espace de sécurité. Les autorités de la communauté administrative se sont aussitôt chargées de leur créer une existence légale, faisant le nécessaire pour leur octroyer des cartes nationales d’identité (DNI), processus long et complexe qui a impliqué de fréquents voyages à Cusco. Après avoir reçu des patronymes à consonance hispanophone, leurs enfants ont été inscrits à l’école, où ils ont appris leurs premiers mots d’espagnol19. L’initiative des communiers à l’égard de ces familles peut paraître ambiguë. Il y a d’abord un projet politique, qui est de résister aux pressions coloniales contemporaines en leur opposant une force démographique

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amérindienne plus importante. Mais, de manière plus indirecte, les communiers en viennent à perpétuer le projet missionnaire de regroupement et de mise à l’école des Amérindiens, autrement dit le projet de contrôle et de « civilisation ».

23 Ajoutons encore que ces personnes récemment intégrées à la communauté administrative ne participent que rarement aux assemblées communales mensuelles, aux dépens de la règle générale qui veut que les communiers soient soumis à une amende (multa) en cas d’absence. Comme nous l’expliquait Ruben Semperi, qui par deux fois a été porté à la présidence de Palotoa-Teparo, cette clémence s’explique notamment par leur ignorance du fonctionnement de la communauté administrative : – Pourquoi est-ce que les gens récemment intégrés à la communauté ne viennent-ils pas systématiquement aux assemblées ? – Ils viennent du haut de la rivière, ils sont arrivés il n’y a pas longtemps. Ils ne connaissent pas encore les statuts de la communauté. Ils ne savent pas, nous ne pouvons pas leur dire « respectez les statuts ». Ils vivent en amont [de la rivière], ils ont leur maison, ils vont pêcher, ils sortent, ils collectent des fruits. Leur vie se résume à cela, rien de plus. Ils n’ont jamais été au courant de la façon dont s’organise une communauté. Qu’est-ce qu’ils savent des statuts, des lois ? Ils ne savent rien ! Donc on ne peut pas leur exiger d’aller aux travaux collectifs comme les autres personnes qui sont inscrites dans le registre des communiers. À eux, oui, on le leur exige. Mais aux autres, non, ce sont des communiers en « contact initial » qui sont en processus d’intégration dans la communauté. Nous ne pouvons pas les forcer [en leur disant] : « travaille comme nous ». Il vaut mieux qu’ils intègrent eux- mêmes le fonctionnement de la communauté. Par exemple Japon vient à des réunions, parfois il vient lors de travaux collectifs et, petit à petit, il s’intègre. Il n’y a pas seulement des travaux collectifs, il y a aussi des donations, par exemple dans la cantine communale, il y a parfois des vêtements. À lui aussi on lui distribue [ces biens] à égalité avec les autres. Donc, en échange de tout cela, il doit se rendre compte qu’il doit lui aussi participer à l’avenir [de la communauté administrative]. Le bénéfice ne revient pas seulement au communier mais à tout le monde, et par conséquent nous devons travailler tous ensemble. […] Petit à petit, ils vont apprendre. Avant c’était le même problème dans la communauté. Lorsque je suis arrivé pour la première fois, personne ne savait ce qu’étaient les lois. Nous avons organisé la communauté, petit à petit. Certains vivaient loin, désunis, ils travaillaient dans leur coin. Le travail doit toujours se faire de manière commune, [il faut] des travaux mutuels, pour que la communauté puisse s’organiser. C’est comme cela que pense la communauté. Avant, personne ne respectait [les contraintes collectives]. Il n’y avait pas de travaux collectifs, il n’y avait pas d’organisation capable de réclamer devant les autorités, pour les besoins de la communauté. [Il ne s’agit pas] seulement d’être dans la communauté ; mais d’aller dehors, de réclamer… Parce que l’État soutient tout le monde. […] Les besoins de la communauté, il faut les [lui] réclamer. (Ruben Semperi, 24/11/2014, traduction de l’auteur)

24 Le témoignage de Ruben Semperi, que nous avons choisi de citer longuement, est très explicite quant au processus de construction de la communauté administrative. Il soulève le fait que l’intégration politique est, sur le plan individuel et collectif, le fruit d’une longue acclimatation. Ce point ne peut être pleinement compris qu’au regard des modalités d’occupation traditionnelles du territoire liées au principe de parenté, qui se caractérisent, comme cela est évoqué dans le témoignage, par la dispersion des groupes de résidence20. Aussi, l’ethos résidentiel privilégié par les Matsigenka est marqué par la fluidité et la discontinuité, tandis que le territoire (kipatsi) est théoriquement extensif et ne peut être circonscrit aux limites étroites d’un cadastre communal (Arias 2006). Il s’agit d’autant de conceptions de la territorialité et de la résidence contre lesquelles les

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leaders communaux sont désormais forcés de lutter, faisant de l’« unité » de la communauté administrative un idéal instable et toujours à reprendre21.

25 Notons toutefois que pour donner sens à ces obligations collectives inédites, on tend à exiger des nouveaux arrivants ce qui, traditionnellement, est demandé aux beaux-fils dans le cadre de leur service marital. À l’instar de ces derniers en effet, les futurs communiers entrent dans une période dite de « probation » au cours de laquelle ils doivent démontrer, parfois plusieurs années durant, leur engagement pour le collectif en s’investissant activement dans les tâches communes et les réunions – même si un délai d’adaptation est octroyé aux personnes particulièrement étrangères à la communalisation. Pour ceux qui arrivent effectivement dans la communauté administrative dans une position de futurs époux, il s’agit en quelque sorte d’une extension du service marital, dans la mesure où c’est par l’ensemble des communiers réunis en assemblée – et pas uniquement par leurs futurs beaux-parents – qu’ils seront potentiellement évalués et sollicités. Pour les non-gendres, cette mise à l’épreuve relève davantage d’un calque du schème traditionnel des obligations et des devoirs du service marital qui, dès lors, est effectué dans le cadre des institutions de la communauté administrative contemporaine.

26 Un autre élément qui ressort du témoignage de Ruben Semperi est l’importance de l’arsenal légal – ce qu’il nomme les statuts et les lois – qui contribue à faire tenir le collectif sous cette forme politico-administrative spécifique qu’est la comunidad nativa. Agglomérer les individus et communaliser les efforts et les bénéfices est alors une manière de réclamer davantage de biens auprès des institutions publiques. Toutefois, l’enquête indique que l’appropriation des catégories légales et administratives n’est pas réductible à une stratégie de négociation – ou de diplomatie – avec l’État et ses administrations. Ces catégories, nous semble-t-il, acquièrent en effet une autonomie propre à l’intérieur de la communauté administrative.

La fabrique du droit communal

27 Soulignons tout d’abord qu’un grand nombre de règles de vie, qui vont de la gestion du territoire et de ses ressources à l’incorporation de nouveaux membres, sont consignées dans des statuts communaux, que les communiers de Palotoa-Teparo qualifient parfois de « lois ». Ces statuts ont une base commune à l’ensemble des communautés administratives autochtones au Pérou, Andes et Amazonie confondues, à savoir des textes légaux comme le Code civil ou la loi des communautés natives. Ce sont ces statuts qui obligent par exemple les Amérindiens à organiser des assemblées mensuelles, à charge d’un comité directeur (Junta Directiva) élu tous les deux ans. Ce comité a ainsi un rôle institutionnel fondamental et la législation péruvienne en fait « l’organe de gouvernement, d’administration et de représentation légale de la communauté » (loi des communautés natives, chap. 4, art. 23, traduction de l’auteur). À Palotoa-Teparo, les statuts communaux comportent 70 articles. Ceux-ci ont été modifiés par deux fois dans le cadre d’assemblées communales.

28 La loi impose par ailleurs qu’un suivi des réunions soit réalisé de façon systématique via des procès-verbaux, autrement appelés Actes d’assemblées (Actas de asambleas), rédigés par un secrétaire dont c’est le rôle. Ces comptes rendus sont archivés dans des cahiers visés annuellement par un juge de paix, ce qui en fait des documents légaux. Nous avons pu longuement consulter les Actes de Palotoa-Teparo, qui sont tenus de manière

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systématique depuis mars 1997. Au fil de plus de 1 000 pages d’une écriture souvent hésitante et aux formules ampoulées, regroupées en cinq cahiers de grand format, les communiers ont ainsi rendu compte du déroulement des assemblées mensuelles ordinaires (une fois le mois), et parfois extraordinaires, lorsqu’un événement impromptu nécessitait une réunion d’urgence. Ces Actes décrivent, souvent avec force détails, les propos des communiers, leurs prises de position, les débats qui les opposent. Sont également consignés les rapports (informes) que chacun fait concernant des tâches qu’il a accomplies durant le mois écoulé, les missives qu’une quelconque autorité publique locale a pu confier à l’attention de la communauté administrative. On y exprime enfin certaines requêtes, comme l’autorisation de couper un arbre, ou de l’aide pour certains travaux. Il est à noter que l’étude de ce corpus ne permet pas de découvrir d’emblée ce qui serait la véritable motivation de l’institution communale et de son assemblée. Au contraire, c’est en revenant sur le modus operandi d’un tel document, autrement dit sur les « opérations du droit » (Thomas 2011), que l’on peut saisir la façon dont l’institution est peu à peu produite22.

29 S’il n’est pas possible ici de décrire en détail les dynamiques internes des assemblées communales et le processus de ritualisation qui leur sont propres23, il faut néanmoins souligner que l’une des étapes cruciales de ces réunions est la lecture à voix haute des Actes de la réunion antérieure, exercice essentiel à la matérialisation du collectif et à son inscription dans une figure culturelle officielle : celle de la « communauté autochtone matsigenka », appartenant à tel district, à telle province et à tel département. Plus encore, ce que montre cette lecture publique, c’est que les cahiers d’Actes sont le lieu privilégié de fabrication d’une législation interne à la communauté. Au cours des débats qui émaillent les assemblées, ce sont en effet des propositions de type normatif qui apparaissent de manière itérative. Peut-on faire commerce du bois et du poisson ? À quelles conditions et en quelles quantités ? Quelles sont les conditions pour avoir le droit de s’absenter de la communauté ? Quelles sont les sanctions pour ceux qui ne participent pas aux assemblées ou aux travaux communaux ? Qui peut entrer dans le territoire communal ?

30 De telles propositions sont alors discutées, rejetées ou acceptées par le vote, puis dûment consignées dans les cahiers d’Actes, ce qui contribue à enrichir la normativité prévue par les « statuts » officiels de la communauté administrative24. Il faut, sans nul doute, souligner le rôle des ONG et des institutions publiques, qui encouragent, par des interventions ponctuelles mais soutenues, un tel quadrillage des activités quotidiennes. On peut prendre pour exemple les « plans de vie » (Espinosa de Rivero 2014) promus par ces organisations, et qui visent à délimiter géographiquement les activités de subsistance (chasse, pêche, agriculture), voire à définir des quotas de prélèvement – pratiques d’autant plus encouragées par la proximité du parc national du Manu tout proche. À Palotoa-Teparo par exemple, suite aux conseils d’une ONG de défense de l’environnement, on n’autorise la pêche au filet (plus dommageable écologiquement) qu’en certaines zones, on limite l’exploitation de bois à quelques parcelles, les activités touristiques – s’il y en a – à d’autres. Ces accords pris en assemblée sont largement respectés, et ceux qui s’en écartent sont sommés de se justifier (Colliaux 2019).

31 Les communiers ne cessent, par leurs propres pratiques, de reproduire ce processus de planification, travaillant activement à la création d’un registre de sanctions à appliquer le cas échéant. La production écrite devient alors un instrument de contrôle du territoire, des personnes et des activités qui s’y déroulent. Encastrant chaque fois

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davantage les rapports sociaux dans cette normativité interne, cette dynamique illustre par là même un souci d’exactitude et de prévisibilité des événements, où le passé est appréhendé à l’aune du présent légitimé25. Ainsi, la lecture publique des Actes, au début de chaque nouvelle assemblée, fait autant référence à un cadre normatif à respecter, qu’à un programme politico-administratif que l’on se propose de mettre en œuvre collectivement. Un jeune homme rencontré dans une autre communauté administrative matsigenka, celle de Kirigueti (bas Urubamba, région de Cusco) traduit bien cet aspect programmatique des Actes de réunion : – Pourquoi les Actes sont-ils importants ? – C’est un document où l’on détaille les choses que l’on va faire et que l’on doit accomplir. Les choses qu’on doit réaliser et qu’on ne doit pas ignorer. Comme on dit, « ce qu’il s’est dit en réunion doit être écrit dans l’Acte ». (Harlin Burges, 31/07/2017, traduction de l’auteur)

32 C’est également à Kirigueti que son jeune président, un ancien étudiant en anthropologie de l’université de Cusco, nous proposa d’apposer le sceau de la communauté administrative sur notre thèse, afin que nous puissions prouver de la validité de notre enquête auprès de notre établissement de rattachement. Cette anecdote témoigne, comme les précédentes, de l’efficacité symbolique de ces documents produits par ces communautés administratives. Cela contraste avec ce que l’on peut observer ailleurs en Amazonie amérindienne, où ce sont plutôt les documents produits à l’extérieur qui semblent dotés de performativité (Allard 2012 ; Gordillo 2006).

Ciudadanos de la comunidad

33 À partir du cas singulier du regroupement matsigenka de Palotoa-Teparo (département du Madre de Dios), cet article a voulu décrire les perspectives diverses qui se cristallisent autour de la notion de « communauté amérindienne » en Amazonie péruvienne. Tout se passe comme si, d’un côté, le modèle communal nous ramenait inexorablement à l’histoire coloniale du pays, et aux multiples missions « civilisatrices » que les populations autochtones ont dû affronter. Mais, d’un autre côté, il s’agit aussi – et désormais surtout – d’un puissant instrument d’émancipation, garantissant aux Amérindiens l’accès à un territoire propre, certes limité – tant physiquement que symboliquement –, mais effectif politiquement. En partant de cette ambivalence fondamentale de la « communauté administrative » contemporaine, nous avons alors interrogé la façon dont celle-ci vient organiser le commun politique amérindien à l’aide d’un répertoire administratif imposé par l’État, et au moyen duquel la socialité est objectivée dans les termes promus par les institutions publiques.

34 Ce que le cas de Palotoa-Teparo donne à voir, de manière exemplaire, c’est un travail d’intégration de ces catégories légales et administratives exogènes, au point de faire émerger, parmi les Matsigenka qui en font l’expérience, un mode spécifique de représentation et d’action politique. Or, cette singulière « conscience du droit » (Ewick et Silbey 2004), et la créativité politique locale qui en découle, ne sont pas dépourvues d’ambiguïté. Car dans l’exercice de cette souveraineté amérindienne, ce sont la bureaucratie et les structures administratives qui se trouvent automatiquement reproduites. Comment manœuvrer, dès lors, avec des schèmes pratiques et discursifs imposées par ces dernières, et qui ne cherchent, par nature, qu’à exprimer une « pensée d’État », davantage qu’une quelconque autonomie amérindienne ? Comment

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appréhender ce rapport de subsidiarité entre la « communauté » que les communiers administrent et l’État péruvien ?

35 Ce dilemme, et la façon dont les Matsigenka l’envisagent, ne sont peut-être jamais aussi apparents que lorsque que les communiers de Palotoa-Teparo se réunissent chaque mois dans une des salles de classe de l’école, espace qui, légalement, appartient à l’État26. En investissant mensuellement l’institution scolaire et en produisant à cette occasion une ample documentation administrative qui a vocation à contrôler le territoire, les personnes et les activités qui s’y déroulent, ce sont certes des ramifications de l’État que la « communauté » amérindienne recrée activement, mais aussi qu’elle s’approprie, générant par là même les conditions de sa propre autonomie.

36 Une expression fréquemment entendue lors de nos séjours de terrain apporte un éclairage complémentaire. Les parents d’élèves nous soulignaient en effet que le passage par l’école communale permettait de former ce qu’ils appelaient des « citoyens de la communauté » (ciudadanos de la comunidad). En d’autres termes, plutôt qu’une communauté de citoyens semblablement intégrés à une nation moderne – autrement dit non-amérindienne –, c’est une communauté proprement autochtone, ici une communauté matsigenka, que l’établissement scolaire devait, aux yeux de ces parents, contribuer à produire.

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NOTES

1. La Ley de Comunidades Nativas y de Promoción Agropecuaria de las Regiones de Selva y Ceja de Selva (loi no 20653) est promulgée en 1974, dans la dynamique de la réforme agraire impulsée par le régime militaire de Juan Velasco Alvarado. Ce texte sera modifié en 1977 (loi no 22175), à l’initiative du gouvernement du général Morales Bermúdez. Si cette loi garantie théoriquement l’inaliénabilité des terres communales – du moins jusqu’à la Constitution de 1993 –, l’État central, profondément jacobin, reste propriétaire de l’eau, de la faune et du sous-sol : il cède en usage le sol et les ressources forestières aux communautés. Il se réserve donc le droit d’octroyer des parcelles à des entreprises extractives, comme les sociétés pétrolières, en dépit des conséquences de ces activités pour l’environnement et pour la santé des populations. Pour les gouvernements de l’époque, l’inscription de ces collectifs dans un maillage administratif complexe, l’élection de représentants chargés d’incarner localement l’État, dont la comunidad nativa n’est finalement qu’une sorte d’excroissance, sont autant de façons d’asseoir la légitimité des institutions publiques dans le quotidien des Amérindiens. 2. Au Pérou, les membres inscrits dans les registres communaux sont désignés par le terme de comuneros, difficilement traduisible en français. Nous proposons d’utiliser le terme de « communier », employé dans la version française de Customs in common, d’Edward P. Thompson (2015). Traduit de l’anglais commoners, les communiers représentent « l’ensemble des individus qui avaient, dans les campagnes, le droit d’utiliser les biens communaux et qui étaient, de ce fait, des acteurs clés du monde rural, défenseurs de la solidarité communautaire » (Boutier et Virmani 2015, p. 37). Cette terminologie semble appropriée à notre cas d’étude, d’autant qu’elle permet de rappeler implicitement l’implication des missionnaires, catholiques et protestants, dans les regroupements des Amérindiens au sein de « communautés ». 3. Il s’agissait de créer localement de nouveaux pôles d’identification permettant de dépasser une « indistinction » de la masse indigène que les ecclésiastiques déploraient, et qui avait été encouragée selon eux par l’exploitation coloniale des basses terres. 4. Stoll et Folhes font ici référence aux communautés riveraines de Santarém, en Amazonie brésilienne (État du Pará), qui ont été formées dans les années 1960-1970 à l’initiative de missionnaires catholiques proches de la théorie de la libération. Les auteurs soulignent que si ce mode de résidence a d’abord été l’objet de critiques voire de rejets de la part des Amérindiens, ces derniers se sont peu à peu mobilisés pour

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« s’approprier un territoire idéel et symbolique qu’ils avaient tous contribué à forger et qu’ils considéraient désormais leur : l’idée d’une « communauté » solidaire et un ensemble de bénéfices incarnés dans la vila, principalement l’accès aux droits citoyens (école, église, infrastructures, affiliation administrative au syndicat, à la commune, inscription sur les listes électorales, etc.), mais aussi et surtout la participation à une forme de sociabilité morale qui est valorisée par opposition aux modes de vie des temps anciens où les riverains vivaient comme des “bêtes dans la forêt” » (Stoll et Folhes 2014, p. 96). 5. Les Matsigenka se répartissent historiquement entre les départements de Cusco et celui du Madre de Dios. Parmi les 12 000 personnes qui composent cette ethnie parlant une langue la famille arawak, près de 80-85 % d’entre elles se trouve dans le bassin du bas Urubamba (Cusco), essentiellement entre le río Mishagua et la ville de Quillabamba. Les Matsigenka du Madre de Dios occupent pour leur part le haut Madre de Dios, le río Manu ainsi que ses affluents. Les Matsigenka seraient arrivés dans le bassin du haut Madre de Dios au début du XIXe siècle, où ils établirent des relations avec les populations harakmbut de la région, relations marquées par des échanges et des conflits guerriers (Shepard et Izquierdo 2003). 6. Pour éviter les confusions entre les formes de socialité autochtones précoloniales et celles qui sont directement suscitées par les regroupements communaux contemporains, nous utiliserons systématiquement des guillemets pour parler de « communauté », ou bien nous préciserons qu’il s’agit de communautés administratives, autrement appelées « communautés natives » (comunidades nativas) en Amazonie péruvienne. 7. Pour l’octroi de son titre de propriété, la communauté administrative de Palotoa- Teparo a reçu initialement l’appui régulier d’une ONG dénommée Centre de développement de l’indigène amazonien (CEDIA), qui s’est peu à peu retirée au cours des années 2000, avant d’y cesser complètement ses activités à partir de 2010. 8. L’Église catholique a distingué l’Amazonie péruvienne en trois régions (nord, centre et sud), confiant chacune d’entre elle à ses différents ordres – jésuites, franciscains et dominicains respectivement. Un recueil de textes produits par les dominicains et consacré aux Matsigenka a été récemment édité par Alonso Ordieres (2006). 9. La colonisation du Madre de Dios prend notamment son essor à la fin du XIXe siècle, lorsque l’entrepreneur Carlos Fermín Fitzcarrald parvient à relier la rivière Mishagua, un affluent de l’Urubamba et du bassin de l’Ucayali, à la rivière du Manu, précipitant la région dans le commerce du caoutchouc naturel. Accompagné de mercenaires lourdement armés, Fitzcarrald fera massacrer plusieurs milliers d’Amérindiens qui s’étaient rassemblés pour repousser les entreprises du cauchero (Casevitz 1969). Sur la violence de l’extraction du caoutchouc dans le Madre de Dios, voir également Piel (1980). 10. L’ILV est une émanation du Wycliffe Bible Translator (WBT), une organisation missionnaire évangélique nord-américaine fondée en 1942 par Guillermo Cameron Townsend (1896-1982). Le WBT s’était donné pour mission de traduire le Nouveau Testament dans toutes les langues du monde, et en particulier dans les langues autochtones, dans le but de les évangéliser. Sous la dénomination faussement académique d’ILV, le WBT s’est installé dans une quarantaine de pays du monde, traduisant leur Bible dans plus de 360 langues – dont 45 au Pérou. Sur l’entreprise d’évangélisation de l’ILV en Amazonie péruvienne, qui a parfois été qualifié

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d’« ethnocide » en raison de l’idéologie réactionnaire qui animait ses membres, voir en particulier d’Ans 1981 ; Hvalkof et Aaby 1981 ; Moore 1984. 11. Dans un texte des années 1980 dans lequel il revient sur sa présence à Tayakome, d’Ans (1981, p. 149) mentionne le rôle de Vitaliano Cabrera, dont il fait un portrait chaleureux. Un autre Matsigenka, dénommé Martín Vargas, aurait joué un rôle similaire lors de la formation de Tayakome. 12. La communauté administrative de Shintuya abrite aujourd’hui plus de 500 personnes, principalement des groupes de la famille linguistique harakmbut (des Arakbut et des Amarakaeri notamment). Un nombre important de colons d’origine andine y est également installé. Une piste relie Shintuya aux réseaux routiers qui permettent de se rendre dans la ville de Cusco. En outre, la mission catholique occupe toujours une position centrale dans la vie de la « communauté ». Jusqu’en 2018, elle était administrée par le père Pedro Rey, un prêtre dominicain originaire d’Espagne qui continuait à visiter ponctuellement les différentes communautés administratives du haut Madre de Dios pour y organiser des offices. 13. Peter Gow décrit un découpage historique similaire dans le discours des Yine de l’Ucayali : « Dans la narration de l’histoire des peuples autochtones, la Comunidad Nativa marque leur libération de l’esclavage. La reconnaissance des droits fonciers des peuples autochtones définit la communauté autochtone comme un caserío legítimo, un “véritable village”, et symbolise leur autonomie résidentielle vis-à-vis des patrons. Les autochtones considèrent la Comunidad Nativa comme l’opposé de l’hacienda, lorsqu’ils vivaient dans l’esclavage des patrons, et comme un résultat historique de cette période » (Gow 1991, p. 211, traduction de l’auteur). Dans un sens proche, José Pimenta (2015) souligne que les Asháninka de l’Amônia (Brésil) insistent quant à eux sur le passage du « temps des patrons » au « temps des droits ». 14. Lors d’une discussion en octobre 2015, le père Pedro Rey Fernández, alors administrateur de la mission de Shintuya, décrivait – non sans amertume – Vitaliano Cabrera comme un homme autoritaire et défendant farouchement l’autonomie de Palotoa-Teparo. 15. Sur l’imposition missionnaire de la figure du curaca en Amazonie péruvienne, voir notamment Chaumeil (1990). Dans le cas spécifique des Matsigenka, voir également Rosengren (1987). 16. Aussi, l’importance de la scolarisation dans le processus de formation de Palotoa- Teparo apparaît-t-elle clairement dans le récit de Guillermo Cabrera : « Les familles venaient du haut du fleuve, elles vivaient le long des affluents. Vitaliano est allé les rencontrer et les a fait se regrouper ici pour construire une école, pour que les enfants apprennent. Pour qu’ils puissent lire certaines choses, pour que certains nous aident à négocier les [ventes de] bananes, le nécessaire. Alors Vitaliano en a regroupé quelques- uns, les autres sont restés là-haut. […] Petit à petit les familles sont venues se rapprocher » (Guillermo Cabrera, 29/08/2014, traduction de l’auteur). Un autre témoignage, recueilli cette fois dans le bas Urubamba (communauté administrative de Nuevo Mundo, formée à l’initiative des missionnaires protestants), nous semble également particulièrement éloquent : « – [Pour les missionnaires de l’ILV], la communauté et l’école étaient l’unique solution pour protéger les gens. Cet enfant n’allait pas être vendu parce qu’il allait à l’école. Ou plutôt, il allait être vendu à l’école. Il y a eu un changement. Avant on vendait les enfants à un patron, et maintenant on vend l’enfant à l’éducation. Que l’enfant apprenne à faire quelque chose, et qu’il vive au

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sein de la communauté. Tandis qu’un enfant qui est vendu à un patron disparaît, il se perd, il s’intègre dans la société métisse » (Angel Diaz, 06/06/2017, traduction de l’auteur). 17. Peter Gow (1991, 2001) souligne également la centralité de l’établissement scolaire au sein des communautés administratives yine de l’Ucayali : « L’école, comme institution, est clairement centrale pour les communautés autochtones. Chaque jour de l’année, l’école domine la vie quotidienne du village. […] Même les jours où il n’y a pas classe, comme les dimanches ou les jours de fêtes, l’école est le centre des activités du village, que ce soit pour des services religieux ou pour danser. L’école est la partie la plus “civilisée” du village, en tant que lieu où le savoir civilisé est transmis et où l’édifice est construit sur une structure proche de celle de la ville » (Gow 1991, p. 247, traduction de l’auteur). L’étude que Laura Rival (1996, p. 271-272) consacre aux Huaorani d’Équateur insiste tout autant sur l’importance de l’établissement scolaire au sein des regroupements amérindiens. Toutefois, l’auteure insiste moins sur l’intégration de cette institution dans l’univers symbolique amérindien, que sur les bouleversements qu’elle suscite sur la morphologie des groupes. La scolarisation provoquerait en effet un « changement social structuré et structurant » chez les Huaorani, qui tend à convertir les regroupements en « unités sociales durables ». La mise à l’école fait notamment expérimenter une nouvelle « façon de se vêtir ou de se procurer de la nourriture qui participe à la fabrication des gens “civilisés” et [qui] cesse, dès lors qu’il n’y a plus de professeur ». Rival note en effet que les villages qui perdent leur établissement tendent à se défaire. 18. Dans les années 1950, les écoles fondées par les missionnaires dominicains sont regroupées via un réseau scolaire appelé le Red Escolar de la Selva Sur Oriente Peruano (RESSOP, Réseau scolaire de l’Amazonie sud-orientale péruvienne), qui est reconnu par le ministère de l’Éducation péruvien en 1971. 19. On peut imaginer l’étrangeté qu’a dû représenter, pour ces enfants, le fait de devoir se rendre quotidiennement dans l’espace clos de la salle de classe, où les conditions de transmission des savoirs sont fondées sur une stricte organisation de l’espace et du temps, sur la définition des rôles et des places de chacun, de même que sur le contrôle de la parole et du geste qui organisent l’ordre scolaire et en génèrent les diverses modalités (Marchive 2007). 20. Constitués généralement d’une quinzaine de personnes, les groupes résidentiels matsigenka ont traditionnellement pour origine un couple fondateur autour duquel gravitent leurs filles et leurs gendres. Le mode de résidence privilégié étant matri- uxorilocal, les jeunes hommes viennent s’établir sur le territoire de leurs beaux- parents, tandis que les femmes restent habituellement ancrées dans un territoire qui est le leur. Il n’est pas possible de détailler ici les modes d’occupation du territoire liés au système de parenté, sur lesquels France-Marie Renard-Casevitz a écrit des articles capitaux (1977, 1993, 2007). Par ailleurs, le travail de Renard-Casevitz bat en brèche l’idée que la société matsigenka serait politiquement et socialement atomisée, comme l’ont longtemps pensé les observateurs extérieurs, et particulièrement les missionnaires catholiques. Au contraire, de vastes réseaux d’alliances commerciaux et guerriers liaient non seulement les Matsigenka entre eux, mais également l’ensemble des groupes arawak de l’Amazonie du piémont andin. Ces alliances, plus ou moins éphémères, ont longtemps permis de repousser les avancées coloniales hors des basses

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terres, du moins jusqu’à l’intensification de l’exploitation du caoutchouc, à la fin du XIXe siècle. 21. Dans un article consacré aux Korowai de Nouvelle-Guinée, Rupert Stasch décrit les regroupements de cette population au sein de villages, après avoir privilégié un mode de résidence plus dispersé. L’auteur évoque une périodisation relativement similaire à celle qui est faite par les Matsigenka : « Ces villages contrastent fortement avec l’ancien système spatial de résidence dispersée, comprenant non seulement le nombre de personnes vivant ensemble dans un même lieu, mais également le style architectural, la permanence de l’emplacement et l’étendue de l’abattis de la végétation. Dans divers contextes de discours, les Korowai périodisent leur histoire en un “temps sans villages” (xampung-alin-alüp) et un “temps où les villages ont été construits” (xampung-dotel-alüp). La géographie des espaces contrastés est vécue comme une expérience historique et le temps de l’histoire comme une expérience géographique » (Stasch 2017, p. 442, traduction de l’auteur). 22. Comme l’indique l’historien Angelo Torre (2007, p. 103) à propos des actes communaux dans le Piémont italien médiéval, « il convient d’examiner, outre le discours que le document véhicule, la genèse du document lui-même ». Certains travaux de sociologie des institutions soulignent en ce sens que ce sont souvent les pratiques scripturaires, à savoir le travail de rédaction des documents administratifs, qui contribuent à « produire » l’institution. D’où l’intérêt d’analyser la littérature bureaucratique « en train de se faire » (Gayon 2016). 23. Un certain nombre de « rituels » administratifs tendent chaque fois à délimiter ces assemblées en tant que lieu politique distinct des affaires courantes (Colliaux 2019). 24. Dans le cas andin, Ingrid Hall (2015, p. 98) évoque le fait que durant les assemblées communales, « les orateurs déplorent régulièrement le fait que ces statuts n’envisagent pas tous les cas ; ce qui les oblige à prendre parti ». Mais l’auteur n’en tire pas les mêmes conséquences que nous, à savoir le déclenchement d’un processus jurisprudentiel interne à la communauté administrative. 25. Les analyses de Laura Baietto (2002) sur les communautés italiennes du XIIIe siècle, et en particulier ce qui concerne l’écrit et la production d’une juridiction interne, méritent quelques rapprochements avec notre cas d’étude : « le système documentaire a désormais pour fonction d’organiser le présent et de prévoir le futur. Ainsi, les pratiques d’écritures sous forme de livres et de registres assument une fonction de contrôle de l’espace, c’est-à-dire du territoire, et des personnes qui y résident, mais aussi du temps : sur le passé qui doit être décrit et interprété en fonction de la légitimation du présent, sur le présent qui doit être organisé et sur le futur qui peut être planifié » (Baietto 2002, p. 678, traduction de l’auteur). 26. Le terrain qui abrite l’école – d’une surface de 4 000 mètres carrés dans le cas de Palotoa-Teparo – est en effet une « donation » que la communauté administrative doit légalement concéder à l’État, étape nécessaire avant que celui-ci n’y construise l’établissement, et n’y délègue des enseignants. Ce procédé est l’objet d’une assemblée communale extraordinaire, puis, inévitablement, d’un procès-verbal dans les livres d’Actes de la communauté administrative.

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RÉSUMÉS

Cet article étudie la façon dont certains membres de l’ethnie matsigenka, une population arawak du sud-est de l’Amazonie péruvienne, s’approprient et font vivre l’unité administrative au sein de laquelle ils se trouvent aujourd’hui regroupés, c’est-à-dire celle de la « communauté autochtone » (comunidad nativa). C’est le processus de formation de Palotoa-Teparo, petite communauté administrative matsigenka du département du Madre de Dios, qui sera en particulier étudié. On verra comment les Matsigenka ainsi regroupés en « communauté » reprennent à leur compte le répertoire administratif imposé par l’État, combien ils s’approprient son lexique et ses outils de manière à construire une représentativité politique qui leur est propre. De la sorte, ce sont des ramifications de l’État qu’ils ne cessent de reproduire, tout en exerçant, mutatis mutandis, une forme d’autonomie politique sur le territoire qui leur a été reconnu – aussi exigu soit-il.

This article examines how some members of the Matsigenka ethnic group, an Arawak population from the south-east of the Peruvian Amazon, take ownership of and relate to the administrative unit in which they are now grouped together: the comunidad nativa (“indigenous community”). Our study will focus on the formation process of Palotoa-Teparo, a small matsigenka administrative community of the Madre de Dios department. We will see how the Matsigenka thus regrouped in a “community” take over the administrative directory imposed by the state, how they appropriate its lexicon and tools in order to build a political representation of their own. They are thereby constantly reproducing ramifications of the state, all while exercising, mutatis mutandis, political sovereignty of sorts over the territory which has been alloted to them —albeit in a cramped form.

Este artículo examina la forma por la cual ciertos miembros del grupo étnico matsigenka, una población Arawak del sureste de la Amazonía peruana, se apropian y hacen vivir a la unidad administrativa en la que ahora están agrupados, es decir la “comunidad indígena” (comunidad nativa). Es el proceso de formación de Palotoa-Teparo, una pequeña comunidad administrativa matsigenka del departamento de Madre de Dios, que será especialmente estudiado. Veremos cómo los Matsigenka así agrupados en “comunidad” hacen suyos el repertorio administrativo impuesto por el Estado, cómo se apropian su léxico y sus herramientas para construir una representación política propia. De esta manera, son ramificaciones del Estado que reproducen constantemente, mientras ejercen, mutatis mutandis, una forma de autonomía política en el territorio que les ha sido reconocida –tan frágil como es.

INDEX

Keywords : administrative community, assembly, bureaucracy, Matsigenka, Amazonia, Peru Palabras claves : comunidad administrativa, asamblea, burocracia, Matsigenka, Amazonia, Perú Mots-clés : communauté administrative, assemblée, bureaucratie, Matsigenka, Amazonie, Pérou

AUTEUR

RAPHAËL COLLIAUX

Institut français d’études andines (IFEA), Lima, Pérou

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Notes de recherche

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Could the Mexica toztli have been a sun parakeet? Connecting Mexica featherwork to South America Vers une nouvelle identification du toztli : connexions entre la plumasserie aztèque et l’Amérique du Sud Hacia una nueva identificación del toztli: vínculos entre el arte plumerío Mexica y America del Sur

Louise Deglin

EDITOR'S NOTE

Manuscrit reçu en mars 2018, accepté pour publication en mai 2019.

1 Shimmering Mesoamerican feathers have mesmerized Europeans from very early on: in 1556, the “Anonymous Conquistador” expressed his awe when beholding “one garment […] covered with a layer of feathers of different colors, making a fine effect” (Filloy Nadal and Olvido Moreno Guzman 2017, p. 162). Exotica par excellence, symbol of the Americas (Mongne 2014a, p. 7), feathers were praised for their delicacy by both Indians and non-Indians at the time. The idea of New Spain could be reduced to the sole mention of feathers: on the Ricci map that was printed in 1602 in Hangzhou, China, the region is accompanied by the following comment: The land of Mexico produces bird feathers of all colors. The people collect them and make them into paintings. The landscapes and humans figures (they do) are all marvellous [sic]. (Russo 2015, p. 60)

2 Many scholars and conservators are familiar with this topic, which has been investigated repeatedly since the 19th century (Denis 1875). Despite the prolific literature that has been published on the subject, however, many questions remain to be answered or reassessed, such as the identification of the bird species that the Aztec- Mexica1 featherworkers used in their productions. Indeed, if some species are amply

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documented by early colonial sources, and others have been determined through modern analytical techniques, several have not yet been convincingly identified. In addition, uncertainties arise as the field of ornithology keeps growing, bird species being regularly recategorized or even discovered: in 2017, scholars identified a new species of parrot in Mexico, the blue-winged Amazon (Amazona gomezgarzai; Silva et al. 2017).

3 It should be stressed that early texts referencing New Spain’s avifauna and featherwork are very limited in number. Researchers mainly refer to the tribute section of the Codex Mendoza, and to book IX (“De los mercaderes”) and book XI (“De las cosas naturales”) of the Florentine Codex. Late pre- and early post-invasion indigenous documents such as the Codex Borbonicus do seem to depict very specific kinds of birds (Gilonne 1977), but they provide no further information. Hence, historic sources should be handled with care, for they may be plagued with incoherences or approximations, and cannot be combined with a broad corpus of artifacts surviving from before the Spanish arrival. Many incompatibilities appear when coupling volumes on New Spain’s natural history with contemporary knowledge about Mexica avifauna: are some species now extinct? Are some still unknown to modern ornithologists? Or are the descriptions in the colonial written sources inaccurate? The fact is, almost five centuries after the fall of Tenochtitlan, much is still to be learned about Mexica featherwork.

4 It is not recent news that feathers have been, and are still today, highly valued by indigenous peoples of the Americas (Mongne 2014b, p. 53). According to the Codex Mendoza, they composed a significant part of the tribute imposed by the Mexica upon their provinces, and according to the Florentine Codex, some amanteca (featherwork specialist) were entirely dedicated to the creation of courtly paraphernalia (Filloy Nadal and Olvido Moreno Guzman 2017, p. 169). Feathers covered the images of the Mexica sacred forces, the heads of their rulers, and the bodies of their warriors. To that end, long-distance trade routes were implemented throughout the empire and beyond (Mongne 2014a, p. 15), providing the Mexica elite with precious and colorful appendages of tropical birds. From the present-day Southeastern United States to the southern coast of Peru, parrots have especially been sought after by indigenous groups of the Americas for their vibrant feathers, imported from the jungle of Central America and Amazonia. Today, numerous species of parrots are listed as endangered, including all the subspecies of the well-known scarlet macaw (Ara macao) since February 2019, 2 reflecting the high demand for those colorful birds. Indeed, the disappearance of those parrots is mainly related to human actions such as the destruction of the natural habitat of the birds, and their capture for pet trade.3

5 Considering the upsetting consequences of the European invasion and the political, social, and economic reorganization that ensued in the Americas, exchange networks that provided feathers to non-tropical regions must have been interrupted in the second half of the 16th century. Therefore, the species used to produce feather artifacts in colonial times may have differed from the ones used before the contact with Europeans, and the absence of a type of bird on colonial feather mosaics should not negate the possibility of it having been used earlier in time.

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Feathers in the Primeros Memoriales

6 For this study, I will of course refer to the Florentine Codex as a primary source of information, but I will also make use of a considerably less studied document: the Primeros Memoriales. Compiled between 1558 and 1561 in the city of Tepepolco by Fray Bernadino de Sahagún and four indigenous artists, this ensemble of 645 folios documents the religious, political, and military life and accoutrement of the Mexica. Sometimes considered a mere draft of the Florentine Codex, the Primeros Memoriales was actually thoroughly elaborated (Quiñones Keber 1997, p. 16), illustrating local knowledge in an encyclopedic manner. The main interest of this volume lies in its association of Nahuatl texts and lexicon with colored illustrations, hence enabling non- Mexica readers to envision events, concepts, and artifacts that are alien to them. In the Primeros Memoriales, many bird species are indicated in Nahuatl when detailing costumes and insignia, providing us with precious information on their use. How are these feathers depicted in the corresponding illustrations?

7 Throughout the many folios that compose the Primeros Memoriales, nine bird species are named when referring to feathers: the cotinga (Cotinga amabilis), the heron (Ardeidae), the quetzal (Pharomacrus mocinno), the yellow parrot, the turkey hen (Meleagris gallopavo), the hummingbird (Selasphorus), the scarlet macaw (Ara macao), the eagle (Aquila chrysaetos), and the roseate spoonbill (Ajaia ajaja) (Davis 1972). Most of these species such as the quetzal or the cotinga, are well known to Mesoamerican specialists and their use is attested on feather mosaics, shields, and headdresses housed in museums worldwide (Riedler 2015). When detailing the depiction of such feathers in the Primeros Memoriales, and especially in its section dedicated to Mexica deities (f. 261 to 267), one is struck by the coherence of the colors used. Indeed, quetzal feathers are consistently painted in green, heron and eagle in white, red macaw in orange, cotinga in blue, and roseate spoonbill in pink, which corresponds to the hues of their respective plumage. The use of pink especially, such a rare color in indigenous and early colonial documents, does imply that the painter in charge of this section sought to replicate nature with his palette. Why, then, did he depict the yellow parrot feathers in blue?

Current identification of the yellow parrot

8 A mistake on the part of the tlacuilo (painter) seems quite unlikely. Indeed, the two deities with which this bird is associated appear in first place in the listing of the gods: Huitzilopochtli, the patron of the Mexicas, and his delegate Paynal. Both were therefore highly regarded by the Mexica population, and the traces of sketches on the two figures4 reveal that they were meticulously elaborated by the artist. In both cases, the headdresses are designated in Nahuatl as “ytozpulol,” where “toz” refers to the color yellow. What could have possibly justified the use of blue on the two divine adornments? This incongruity was already noted by Eduard Seler (Seler 1908, p. 168), who could not come to any conclusive explanation.

9 The feathers of the yellow parrot are further mentioned in the Primeros Memoriales: on the yellow parrot tunic,5 the yellow parrot xolotl headdress,6 on the quetzal-bestrewn headdress with the face covered in yellow parrot feathers,7 and on the yellow parrot serpentine insignia.8 On these, the yellow parrot feathers are, as expected, painted yellow. But strikingly, the icuçuyavalol, a “circular fan of yellow parrot feathers”

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(Sullivan and Nicholson 1997) worn by rulers as a regalia in their hair,9 is painted half- yellow and half-blue on several occurrences, with sections in red and green. Was this, again, an initiative of the tlacuilo’s imagination, or did this coloration correspond to a reality?

Fig. 1 – Toznene. Historia general de las cosas de nueva Espana (1577), vol. 3, book XI, f. 23r, Biblioteca Medicea Laurenziana, Florence, Ms. Med. Palat. 220, http://teca.bmlonline.it.

10 In early colonial literature, the yellow parrot is designated in Nahuatl as both “toznene” and “toztli.” According to book XI of the Florentine Codex, the toznene (Figure 1) can be defined as follows: It has a yellow, curved bill, like that of the white-fronted parrot; the head is crested. Its breeding place is especially [the province of] Cuextlan. These are its chicks feathers—herb green, dark, dark green on its back, and about its neck, and its tails, and its wings. And those at the tip of its wing-bend are green (and) yellow; they cover its flight feathers. And on its breast, on its belly, its feathers are yellow, dark yellow. They are called xollotl. And its tail and its wings are ruddy. (Sahagún 1963, p. 22)

Fig. 2 – Toztli. Historia general de las cosas de Nueva Espana (1577), vol. 3, book XI, f. 22v, Biblioteca Medicea Laurenziana, Florence, Ms. Med. Palat. 220, http://teca.bmlonline.it.

11 The toztli would actually be the adult toznene (Figure 2), differing slightly: When the young (yellow) parrot is already developed, it turns yellow, it becomes very yellow. It develops fluffy feathers. When completely feathered, then it is called toztli. (Sahagún 1963, p. 23)

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12 As of today, the toznene and toztli (which belong to the same species according to the Florentine Codex) have not been unanimously identified. They are mainly said to be two different ages of the yellow-headed parrot (Amazona oratrix, see Figure 3; Mongne 2012, p. 9; Filloy Nadal and Olvido Moreno Guzman 2017, table 6.3; Reyes Equiguas 2011, p. 301), but they have also been identified as the green macaw (Ara militaris; Reyes Equiguas 2011, p. 301) or as the montezuma oropendola (Psarocolius montezuma; Berdan 2015, p. 327). However, these species hardly correspond to the descriptions and depictions of the toznene and the toztli in the Florentine Codex. They differ on several aspects, but overall lack one major point: their bodies are covered in green or black feathers instead of yellow, when this color gave its name to the bird. Why would the Florentine Codex insist on the species being “very yellow” (Sahagún 1577, f. 23r), and why would the tlacuilo depict it accordingly, if the parrot in question was predominantly green? Unconvinced by the suggestion that the Amazona oratrix is the indigenous yellow parrot, Michel Gilonne has dismissed the issue by positing that the toztli may have become extinct since the 16th century, as it has not been recorded by ornithologists (Gilonne 1977, p. 40).

Fig. 3 – Yellow Headed Amazon (E_monk, Tuxedo, 2019) © e_monk (CC BY-NC-SA 2.0).

A yellow parrot from South America

13 Since the Florentine Codex’s account of the yellow parrot mentions that it was bred on the Gulf Coast (the Cuextlan province roughly corresponds to present-day Veracruz), scholars have limited their propositions to the Mexican avifauna. Nevertheless, I suggest that the toztli being raised on Mexica soil does not necessarily imply that it originated from there. Indeed, the Mexica practice of breeding birds in captivity,

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particularly to provide material for featherworkers, is well documented in the literature: for example, “[t]he amantecas who worked in the palace [of Tenochtitlan] could also obtain feathers from the royal zoo” (Filloy Nadal and Olvido Moreno Guzman 2017, p. 183). According to Pascal Mongne, in the art of featherwork, “the collection of living birds must have been the norm”10 (Mongne 2014a, p. 12). Thus, could the toztli have been brought from southern lands?

Fig. 4 – Young Sun Conure (Savage, 2012) © Eric Savage (CC BY-SA 2.0).

14 In effect, one species of bird, not endemic to Mexico, almost perfectly fits the description made of the toznene and toztli in the Florentine Codex. The sun parakeet, or sun conure (Aratinga solsticialis), strikingly resembles both the written and the pictorial accounts of the yellow parrot: the young sun parakeet displays vivid green feathers on its back (Figure 4), while its head and belly are covered in yellow with touches of red. When maturing, the bird becomes predominantly yellow (Figure 5), still highlighted with patches of red and green. In addition, the blue feathers that decorate the adult sun conure’s tail could also account for the blue headdresses of Huitzilopochtli and Paynal in the Primeros Memoriales. It should be noted that the Aratinga solsticialis, with its flamboyant plumage, does coincide very well with the solar imagery associated with the Mexica patron Huitzilopochtli. Overall, the only detail in which the sun conure (Aratinga solsticialis) differs from the toznene description in the Florentine Codex concerns its beak, which is actually dark and not yellow.

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Fig. 5 – Sun Conure (Roche, Brookfield Zoo, 2007) © Richard Roche (CC BY-NC 2.0).

15 In book XI of the Florentine Codex, the yellow parrot is also mentioned as a comparison to the cocho; the latter is said to resemble the young yellow-headed parrot (Sahagún 1577, f. 23v), the toznene, with dark green feathers and touches of red and yellow. It seems that the cocho has been unanimously identified as the white-fronted parrot (Amazona albifrons; Mongne 2014b; Filloy Nadal and Olvido Moreno Guzman 2017), even if this species does not display any yellow apart from its beak. The white-fronted parrot and the young sun parakeet (Aratinga solsticialis) do not look markedly alike, but they do share a similar silhouette and a dense green hue. This argument thus neither disproves nor confirms the sun parakeet’s case.

16 Regarding the sun parakeet’s origin, its natural habitat is located in the coastal region of the Guyanas and the northeastern border of the Brazilian forest. Albeit situated thousands of miles from the Mexican Gulf coast, the two regions do share a similar tropical climate on their littoral zone. It has been shown that the Mexica provinces that provided tribute in feathers to the central power were not always the regions producing these feathers (Mongne 2014a, p. 18). Therefore, one could go as far as imagining that the four mysterious handles of green and yellow feathers depicted on f. 46r of the Codex Mendoza could belong to the toztli, as Pascal Mongne has already suggested (ibid., p. 18). In that case, the surprisingly low number of feathers of this type would be explained by the fact that they come from the precious sun parakeet (Aratinga solsticialis), and not simply from a yellow-headed amazon (Amazona oratrix).

17 The golden parakeet (Guaruba guarouba), also from the Psittacidae family and native to the northern Amazon, could also be a likely candidate. With its clear beak and uniformly yellow plumage (Figure 6), it strikingly corresponds to the textual description of the toztli. However, it lacks the distinctive red patches mentioned in the text and depicted on the illustrations of the Florentine Codex.

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Fig. 6 – Golden parakeet (Galaviz, Brazil, 2008) © Rogelio A. Galaviz C. (CC BY-NC 2.0).

Aviculture or “tapirage”?

18 Aviculture was a well-developed practice in North America before the 16th century. Scarlet macaws (Ara macao) were imported from Southern Mexico by the Mimbres people, established from the 11th to the 13th century in what is today the American Southwest (Creel and McKusik 1994). In order to do so, the birds would have traveled at least 1100 km, whether carried by foot or by boat (Crown 2016). Remains of both green macaws (Ara militaris) and scarlet macaws (Ara macao) were found at the site of Paquime, in northwestern Mexico (Holeman 2014). While both were found buried alive in cages, it seems that only the scarlet macaw was bred in captivity, as remains of this bird at different ages, including eggshells, were recovered (ibid., p. 129). Hence, parrot aviculture could take many forms in the ancient Americas, including in regions with a non-tropical climate.

19 Ornithologist Allison Schultz considers that sun parakeets (Aratinga solsticialis) could easily survive on the Gulf coast of Mexico, especially as some are even presently thriving on the coast of Florida.11 American parakeets and parrots were commonly traded and sold in France during the late 17th and early 18th century, where they served as distinguished pets far from their natural habitat (Robbins 2002, p. 113). The Spanish invasion and the end of aviculture in the Mexica empire may even be enough to account for the disappearance of the sun parakeet in Mexico, following what Michel Gilonne had foreseen (Gilonne 1977). Indeed, Dr. Schultz posits that parrots bred in captivity may not have survived in the wilderness in the 16th century; the birds may even have been killed instead of being released after the Spanish invasion.12 Overall, if a South American parrot was raised in captivity far from its natural habitat, it would

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have likely been fragile and may not have survived on the Gulf Coast without specific care.

20 Another possibility to explain the origin of the yellow parrot would be the practice of “tapirage”, or “contrafeitos” in Portuguese, as described by Alfred Métraux in 1928 (Métraux 1928; Buono 2009). This artificial modification of bird feathers’ color by Tupi and Karib groups in northern Amazonia is performed directly on living birds. “Tapirage” consists of applying a tinted mixture to plucked birds that will alter the hue of the future feathers (Métraux 1928, p. 183-184); most often, the blood of the dyeing poisonous frog (Dendrobates tinctorius) is used, mixed with other substances to give a yellow or red color to the feather that will consequently grow on the bird (Buono 2009, p. 292). However, the final effects would have been that of colored spots rather than a uniform tint (Métraux 1928, p. 185). Hence, the hypothesis of the yellow parrot feathers being the result of “tapirage” seems less likely than that of the breeding of colorful birds from remote regions, especially as this practice has not been attested outside of northern Amazonia.

Conclusion

21 Both the Aratinga solsticialis and the Guaruba guarouba species from South America show significant similarities with the description and depiction of the toznene and the toztli of the Florentine Codex, more than any endemic species presently known in Mexico. The outstanding distance that would have been traveled to obtain the feathers of these birds, or more probably the birds themselves, does seem questionable. However, other indigenous societies in the Americas had already established large-scale trade networks since the first millennium CE in order to obtain birds or feathers, from the Nasca in the Central Andes to the Mimbres in the American Southwest.

22 The remoteness of the parrots’ habitat would have justified the rarity of their feathers associated with the patron deity of the Mexica, with the emperors themselves, and with highly ranked warriors. All parts of the young toznene and the adult toztli, from yellow to blue feathers, would have been used if the colored illustrations of the Primeros Memoriales are correct. The collapse of the Mexica empire could logically account for the disappearance of these birds after the Spanish invasion, especially as aviculture was put to an end. Hence, could a South American bird species have been bred in the Mexica empire? Further research might someday ascertain this hypothesis, attesting contacts between the two continents.

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NOTES

1. Hereby referred to as Mexica. 2. See the list of endangered parrot species on the U.S. Fish & Wildlife Service website: https://www.fws.gov/endangered/what-we-do/parrots.html (consulted 21/11/19). 3. See “Scarlet Macaw Receives Endangered Species Act Protections,” News Release, February 25, 2019, U.S. Fish & Wildlife Service, Office of Public Affairs. 4. For example, on Paynal’s shield. 5. Mentioned on f. 68r and 72v, depicted on the latter folio. 6. Mentioned and depicted on f. 72v. 7. Mentioned on f. 68r, depicted on 73v. 8. Mentioned on f. 68v and depicted on f. 77v. 9. Mentioned and depicted on f. 51r and 52r. 10. Translation by the author. 11. See https://ebird.org/map/sunpar1? neg=true&env.minX=&env.minY=&env.maxX=&env.maxY=&zh=false&gp=false&ev=Z&mr=1-12&bmo=1&emo=12&yr=all&byr=1900&eyr=2019

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12. Dr. Allison Schultz, personal communication, February 28, 2019.

ABSTRACTS

Colorful feathers were an important part of the regalia and martial attributes of the Mexicas, who used them on headdresses, shields, capes, but also on the images of their gods. Despite the early interest of Europeans in the American featherwork, some bird species used by the amanteca remain undetermined to this day. The thorough study of two manuscripts written under the direction of Fray Bernardino de Sahagún, the Primeros Memoriales and the Florentine Codex, has revealed an inconsistency between the way the toztli, or “yellow parrot,” has been described and depicted in the colonial sources, and its current identification as the Amazona oratrix. This bird is more likely to have been a rarer specimen, native to lands located far from the Mexica heartland.

Les plumes bigarrées constituaient une part importante de l’apanage régalien et martial des Aztèques (couvre-chefs, rondaches, capes, etc.), qui ornaient également leurs divinités de phanères d’oiseaux tropicaux. Pour autant, en dépit de l’intérêt porté très tôt par les Européens pour la plumasserie des Amériques, certaines espèces ornithologiques utilisées par les Aztèques dans leurs œuvres de plumes demeurent à ce jour indéterminées. L’étude attentive de deux manuscrits rédigés sous la direction de Fray Bernardino de Sahagún, les Primeros Memoriales et le Codex Florentin, a ainsi révélé une incohérence entre les représentations et descriptions coloniales du toztli, ou « perroquet jaune », et son identification actuelle comme l’Amazona oratrix. Il est probable que cet oiseau soit en effet un spécimen plus rare, originaire de territoires bien éloignés du cœur de l’Empire aztèque.

Las plumas abigarradas constituían una parte importante de las prerrogativas reales y marciales de los Mexicas (sombreros, escudos, capas, etc.), que también adornaban sus divinidades con plumas de aves tropicales. A pesar de que los Europeos se interesaron temprano al arte plumario de las Américas, ciertas especies ornitológicas utilizadas por los Mexicas en sus obras aun son indeterminadas. El estudio atento de dos manuscritos redactados bajo la dirección de Fray Bernardino de Sahagún, los Primeros Memoriales y el Códice Florentino, reveló así una incoherencia entre las representaciones y descripciones coloniales del toztli, o “papagayo amarillo”, y su identificación actual como la Amazona oratrix. Es probable que esta ave sea en efecto una especie más rara, originaria de territorios bien alejados del corazón del Imperio Mexica.

INDEX

Mots-clés: plumasserie, Mexica, Aztèque, perroquet jaune, Codex Florentin, Primeros Memoriales, toztli Palabras claves: plumería, Mexica, Azteca, papagayo amarillo, Códice Florentino, Primeros Memoriales, toztli Keywords: featherwork, Mexica, Aztec, yellow parrot, Florentine Codex, Primeros Memoriales, toztli

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AUTHOR

LOUISE DEGLIN

Ph.D. student, Department of Art History, University of California, Los Angeles, USA

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“El rostro de los días”: sobre la corporalidad y las almas entre los mayas k’iche’ de Santiago Momostenango “The visage of the days”: on corporality and souls among the K’iche’ Maya of Santiago Momostenango « Le visage des jours » : sur la corporalité et les âmes chez les K’iche’ de Santiago Momostenango

Alonso Zamora Corona

NOTA DEL EDITOR

Manuscrit reçu en janvier 2019, accepté pour publication en juin 2019.

Agradecimientos – Este artículo presenta algunos datos obtenidos como parte de mi proyecto doctoral sobre las ideas cosmológicas de los k’iche’ momostecos, realizado con apoyo de CONACYT y University College London. Agradezco a mi supervisor, Martin Holbraad, por su guía durante mi trabajo de campo. Quisiera agradecer asimismo a mis colegas Johannes Neurath, Fernando Guerrero y Canek Estrada Peña por sus observaciones y orientación durante la elaboración de este artículo. Quisiera también agradecer a mis informantes y a las autoridades tradicionales de Momostenango por su hospitalidad y apoyo durante mi trabajo de campo.

1 Momostenango, comunidad maya k’iche’ de los altos de Guatemala, ha recibido a lo largo de los últimos cien años la atención de algunos de los más reconocidos etnógrafos e historiadores dedicados al estudio de la región, como Leonhard Schultze-Jena (1933), Robert Carmack (1995, 1998), Barbara Tedlock (1992) o Garrett Cook (1981, 2000). Podría considerarse que queda poco que decir sobre dicha comunidad y sus creencias: tal vez una de las pocas lagunas de nuestro conocimiento sobre la misma sea la exposición más

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sistemática sobre las ideas de los momostecos en torno de la corporalidad y las almas. Producto de una temporada de campo de dieciséis meses en la comunidad entre 2017 y 2018, este trabajo representa un primer intento por presentar de manera sistemática dichas concepciones, que ciertamente han aparecido en trabajos anteriores y tratadas con grados mayores o menores de profundidad, aunque de manera fragmentaria. Asimismo, nuevas informaciones sobre las mismas serán presentadas a lo largo de este artículo.

2 Recientemente, Pedro Pitarch ha propuesto un modelo cuadripartito de la corporalidad y las almas entre los mayas, basado en su trabajo etnográfico entre los tzeltales (2011). Los cuatro elementos principales del mismo son: del lado de la corporalidad, un “cuerpo-carne” y un “cuerpo-presencia”; y, del lado de las almas, un “alma-humana” y una o varias “almas-espíritu”. En lo particular, retomaré en ese trabajo algunos aspectos de dicho modelo, que en su planteamiento resulta muy adecuado; empero, como es natural, mis datos de campo disienten en ciertos puntos del mismo, no sólo por la naturaleza o tipo de almas particulares que existen entre los k’iche’, sino también por algunas de las ideas atribuidas al ámbito del “cuerpo-carne”, diferencias que especificaré al tratar cada caso, y que en ciertos puntos me obligan a optar por otras denominaciones. La primera parte de este artículo estará destinada al cuerpo, y comprenderá tanto el aspecto orgánico del mismo (lo que Pitarch denomina “cuerpo- carne”) como al llamado “cuerpo-presencia”. La segunda parte estará dedicada a las múltiples almas de los k’iche’, entre las que destacan el k’ux o “corazón”, el chikop (“animal”) con forma de ave, el nawal, un complejo anímico asociado al calor y al calendario, y los llamados win, conjunto de espíritus de carácter agresivo y depredador utilizados por los brujos o ajitz.

3 A pesar de partir del modelo de Pitarch en la dicotomía entre corporalidad y almas, no seguiré del todo su división cuadripartita inspirada en Greimas (1963), que no encaja completamente con las concepciones k’iche’, y en particular con respecto a la oposición entre “almas humanas” y “almas espíritu”. Entre los k’iche’, las almas con forma humana –como el k’ux o corazón– se consideran como “espíritus”, vahos o soplos (uxlab’ ), y están asociadas con la idea de viento y del frío, mientras que las almas con formas animales, en particular el nawal, están asociadas con el calor y el fuego, son radiantes y solares. Asimismo, como explicaré, la distinción entre las almas de los k’iche’ no reside tanto en una simetría semiótica sino más bien en su tipo y grado de agencia y sus relaciones con los ancestros y con otros seres. Por lo tanto, más que adoptar un esquema de oposiciones semióticas, quisiera subrayar que, a mi parecer, la diferencia entre estas almas puede concebirse mejor en términos relacionales (Strathern 2018) y de agencia social y sobrenatural (Gell 1998, p. 16), independientemente del esquema clasificatorio adoptado.

El cuerpo orgánico entre los momostecos: b’aqil, tiojil y kik’el

4 En la propuesta de Pitarch, el “cuerpo-carne” estaría integrado por “el conjunto del cuerpo humano, excepto los huesos, el cabello, el resto del vello corporal y la sangre”, siendo ésta última la que definiría dicho ámbito corporal. Los tzeltales lo denominan bak’etal, “carne”. Empero, entre los k’iche’ el cuerpo físico consta de una larga lista de partes, entre las que destacan el b’aqil (hueso), tiojil (carne) y kik’el (sangre). La palabra

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b’aqil se usa para denotar el cuerpo de un animal o persona; lo mismo aplica para el término tiojil, “carne”, que también puede designar la totalidad del cuerpo humano. La sangre es de igual importancia que los dos anteriores pues, aunque no denomina metonímicamente a la persona, se considera que en ella reside la vida.

5 Se puede afirmar que, entre los k’iche’, hueso, carne y sangre son integrantes físicos de suma importancia para la corporalidad física de la persona. Por tanto, no adopto aquí el término “cuerpo-carne” debido al lugar central del hueso en las concepciones k’iche’, tan central de hecho que la palabra misma puede designar a la totalidad del cuerpo. Por otro lado, a pesar de que el cuerpo orgánico y sus componentes no pueden considerarse como independientes de su realidad física, cabe mencionar que, en el contexto de la adivinación calendárica, son capaces de recibir mensajes a través del llamado relámpago o koyopa, un tema que ha sido estudiado a profundidad por Tedlock (1992) y sobre el cual me detendré brevemente al tratar el kik’el (sangre).

6 Sería largo enumerar aquí las partes individuales del cuerpo, por lo que sólo mencionaré algunas de las creencias relativas al b’aqil, el tiojil y el kik’el. Sólo observaré que algunas partes del cuerpo en particular se usan para denotar relaciones de parentesco de manera metafórica: así, nuwi’, wixk’aq (mis cabellos, mis uñas) pueden referir a los miembros del patrilinaje (alaxik), y en particular de los descendientes. La explicación ofrecida es que wi’ denomina genéricamente a la idea de “punta”, por lo que los descendientes son comparados a dichos crecimientos del cuerpo.

7 B’aqil: además de designar al cuerpo humano en su totalidad, la palabra b’aqil designa a los huesos de la persona. Como afirma Schultze-Jena, la palabra b’aq también se usa para referirse a la semilla o a su centro: “núcleo, grano de la semilla, hueso, porque la criatura puede emerger de él como si fuera la semilla del maíz” (1933, p. 333). En efecto, la creencia de que los huesos de los animales deben ser apartados para permitir la regeneración de la especie –ampliamente documentada por Brown entre los tz’utujil (2005)– es todavía referida entre las familias momostecas, aunque el papel de la cacería en la subsistencia ha decaído casi por completo en años recientes. De la misma manera, se considera que los huesos o b’aqil de los ancestros del patrilinaje (nantat ri alaxik) poseen cierta potencia especial, y en ciertos contextos se utiliza la expresión b’aqil durante la invocación de los ancestros. Tedlock registra la expresión muchulik b’aq, muchulik ulew, muchulik poqlaj (“hueso molido, tierra molida, polvo molido”) durante la invocación del ajq’ij ante los altares o awas (1992, p. 239) para evocar los restos físicos del patrilinaje, expresión que recuerda al difrasismo ulew, poqlaj (tierra, polvo), recogido por Schultze-Jena en Chichicastenango (1933, p. 19). Como refiere Carmack, el contacto físico con los huesos de los antepasados fallecidos era una característica muy importante de la religión momosteca a inicios del siglo XX. En efecto, la iglesia del centro de la población en Momostenango fue alzada sobre un viejo cementerio; originalmente el suelo de la misma era de tierra, y se habían enterrado ya tantos restos ahí que algunos huesos sobresalían. Sobre dicha tierra la gente quemaba velas para alimentar a sus antepasados. El recubrimiento del piso de la iglesia representó un fuerte conflicto entre las autoridades indígenas y la iglesia católica (Carmack 1995, p. 232, 241).

8 Aparte de este aspecto sagrado de los huesos, el uso del polvo de huesos de muerto como material para la brujería es todavía importante entre los k’iche’ (Bunzel 1952, p. 296). En este sentido, los huesos de los ancestros son asociados con el castigo (toj) y el dolor (k’ax). En mi trabajo de campo, he encontrado la invocación al b’aqil como hueso

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en ceremonias de contra-brujería, en las que el ajq’ij llama a los huesos de su patrilinaje para castigar al brujo: Kaqa sik’ij ri ub’aqil, ri Julio Felipe, ri Marcelino Rosales kin waj b’a ri kamik k’o ri k’ax, k’o ri toj… Llamamos a los huesos De Julio Felipe, de Marcelino Rosales, Quiero que haya hoy dolor, quiero que hoy haya castigo…

9 Finalmente, cabe destacar que, en el contexto de la adivinación calendárica mediante el “rayo” (koyopa), los mensajes recibidos cerca del hueso casi siempre denotan brujería, maldad o castigo.

10 Tiojil (carne, músculo): como ocurre con baq’il, la palabra tiojil o “carne” puede referir al cuerpo en su totalidad. En contraposición con lo que ocurre con el baq’il, los mensajes enviados por el koyopa cerca del tiojil casi son siempre de naturaleza benigna (Tedlock 1992, p. 145).

11 Kik’el (sangre): los k’iche’ momostecos consideran que el kik’el es sede de la vida (k’aslemal) y, para algunos, incluso del alma; de ahí que se diga: k’o ta chi ukik’el: “ya no tiene sangre” como sinónimo de la frase “ya no tiene vida”. También es un sinónimo de la presencia de la persona, por lo que se puede decir utz ru’ kik’el, “es buena su sangre”; es decir, que su presencia es benigna. Gracias al trabajo etnográfico de Tedlock (1992) es bien conocido que, para los k’iche’, “la sangre habla” (kacha ukik’el). Actualmente, la expresión castellana más usada es que “revibra la sangre”. Dicha capacidad de recibir mensajes, indispensable para la iniciación en la adivinación calendárica, es atribuida a la acción del “relámpago” o koyopa sobre la sangre en diversos puntos del cuerpo, aunque también puede actuar sobre la carne y el hueso. No abundaré en los detalles de la adivinación calendárica asociada al koyopa, bien tratados por Tedlock, por lo que me limitaré a añadir algunas observaciones propias.

12 La capacidad de recibir mensajes a través del koyopa puede ser calificada de innata e incluso puede considerarse generalizada hasta cierto punto: no es necesario ser iniciado como ajq’ij para que la sangre envíe mensajes, y he registrado que hasta los niños son capaces de manifestar esta capacidad, lo que entre los patrilinajes momostecos de religión tradicional constituye un indicio para saber cuál de los hijos será destinado a suceder a su padre en sus labores rituales como chuchqajaw o jefe del patrilinaje. Empero, no sólo los hijos de los costumbristas pueden manifestarla, sino incluso los de familias evangélicas, para molestia y asombro de sus padres. En la vida diaria, una persona puede expresar una inquietud, relatar un sueño, referir haber visto un animal o contar un suceso y, si la persona que escucha esto tiene el koyopa, es sumamente común que le “revibre la sangre” y reciba un “mensaje” de manera espontánea sobre el tema, lo que es más frecuente que la adivinación calendárica mediante las semillas de tzite’. Sobre si los extranjeros pueden poseer el koyopa, las opiniones de los momostecos están divididas: para algunos, “los gringos están muertos por dentro”, y para otros es algo posible.

13 Además de manifestarse de manera innata, el koyopa puede ser reconocido en las personas que la adivinación calendárica indique como potenciales candidatos para ser ajq’ij, por lo que en cierto modo es posible “adquirirla”; asimismo, es posible y a veces necesario fortalecer dicha capacidad mediante ciertos rituales, que algunos ajq’ij llevan a cabo en altares asociados con el agua tanto en las tierras de su patrilinaje como en

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santuarios cercanos a ríos y lagos, a veces en lugares lejanos, tal y como lo registra Tedlock (1992, p. 139). Según mis informantes, la principal entidad asociada con el poder del koyopa son los ríos, lagos y lagunas, comprendidos bajo la expresión ayin cho, ayin plo, que literalmente significa “lagarto lago, lagarto mar”, expresión usada durante las invocaciones al koyopa, pues se asimila la acción del koyopa sobre la sangre como un relámpago que aparece sobre el agua (véase ibid., p. 53). Considero posible, aunque sólo tentativo, considerar que dicha frase, hoy puramente lexicalizada, haya derivado de creencias anteriores relacionadas con el papel del caimán y del agua en la adivinación, en especial a la luz del simbolismo del día Imox, todavía hoy asociado con el agua (Estrada Peña 2014)1.

El wachib’al o “cuerpo-presencia”

14 En la propuesta de Pitarch, la noción de “cuerpo-presencia” comprende toda una serie de atributos de la persona que pueden quedar comprendidos bajo la idea de visibilidad, percepción o apariencia; para los tzeltales de Cancuc dicho aspecto de la corporalidad se denomina con el término winkilel (2011, p. 155). En el caso de los k’iche’ momostecos, un aspecto equiparable de la corporalidad está comprendido por la expresión wachib’al. El término posiblemente sea una abstracción de la polisémica raíz wach. Recogí las siguientes acepciones de la misma entre los momostecos: frente, rostro, ojo, presencia, imagen, semblante, figura, dibujo, disfraz e incluso “opinión”, dependiendo del contexto de uso. Wachib’al significa, de manera abstracta, la presencia de la persona, y puede predicarse no sólo de la persona en sí misma sino de sus imágenes, o aun de objetos que la denotan o que recuerden a ella si es que son suyos. Por ejemplo, según me explicó un informante, incluso la ropa de la gente es considerada como su wachib’al, siempre y cuando esa ropa remita a la persona como un tipo de “índice” visual que la identifique: por ejemplo, una gorra propia dejada sobre la mesa se considera el wachib’al de uno. Por lo tanto, un dibujo, una fotografía, una imagen, la ropa de las personas, su cara, todo lo anterior es su wachib’al.

15 Entre los momostecos las imágenes de los santos también son llamadas wachib’al, tal y como lo registra Cook (2000, p. 272); como explica dicho autor, en el caso de los santos el wachib’al puede ser considerado particularmente peligroso o delicado, pues se considera poseedor de agencia. Por ejemplo, algunos de mis informantes refieren que el wachib’al o imagen de Santiago, el santo patrono del pueblo, es capaz de pisotear espiritualmente a la gente con su caballo, por lo que se evita que las personas se coloquen directamente frente a él durante la feria patronal o se queden dormidos frente a él durante las velaciones. Un informante que llegó a formar parte de las velaciones de la cofradía de Santiago lo refiere de esta forma: Yo iba ahí, me invitaban, formaba parte de la ceremonia… Nos quedábamos durmiendo allá en la ermita, y el alcalde de Santiago o el chuchqajaw de la imagen no permite que se acueste uno delante de la imagen, porque el caballo sale, lo puede dejar pateado a uno y puede que uno amanece sin vida, uno tiene que quedarse pero a un costado, yo lo he escuchado, yo me he quedado cuidándolo y se escucha, se levanta, se cambia, se levanta, le da agua al caballo y sale, se escucha cuando abre la puerta, da la vuelta y regresa…

16 Durante la feria patronal, a Santiago se le ofrenda incienso y también se comparten alimentos y bebidas frente a él. Empero, el ámbito comprendido por el wachib’al no sólo abarca el cuerpo del santo en sí, sino aún sus atributos iconográficos y accesorios, como

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su espada y su caballo. Dichos atributos también tienen agencia, y pueden transmitir tanto el enojo del santo como su bendición, mediante el contacto con las partes de la imagen como la ropa o incluso una pequeña guitarra que acompaña al santo (Figura 1).

Fig. 1a – Mujer alimenta al wachib’al de Santiago y San Felipe con incienso durante la Feria Patronal (2017; fotografía del autor).

Fig. 1b – Hombre recibe la bendición de Santiago y San Felipe al ser tocado por la guitarra que forma parte del wachib’al del mismo (fotografía del autor).

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17 La palabra wachib’al no sólo se predica sobre las imágenes de seres sobrenaturales y la agencia asociada con las mismas, sino sobre las imágenes de cualquier persona, animal o planta. Como hemos explicado, el wachib’al designa a todo tipo de figuras, dibujos o formas. Como veremos más adelante, los días del calendario también tienen su wach o “rostro”, el cual influye en el destino y carácter de las personas; en tal carácter, el signo calendárico de una persona es llamado wach uq’ij, “el rostro de su día”. Empero, trataremos de esta parte de la persona al hablar de uno de los sinónimos de dicha expresión, el término nawal.

18 El epigrafista Érik Velásquez García (2010b) ha identificado el concepto de cuerpo- presencia propuesto por Pitarch con el b’aahis de los Mayas del período clásico, término que designaba a las imágenes de los gobernantes en estelas y otros tipos de arte monumental, y del que deriva la palabra b’aahila’n como nombre de los personificadores rituales de los dioses. Por supuesto, ya he mencionado al winkilel de los tzeltales como origen del concepto. Por tanto, sugiero adscribir al wachib’al de los momostecos al mismo orden conceptual dentro de las nociones de la corporalidad maya.

Las almas. El aire, el aliento y lo espiritual: el tewal kaqiq’al y el uxlab’al

19 Además de los aspectos de la persona que pueden comprenderse bajo los conceptos de cuerpo-carne y cuerpo-presencia, los k’iche’ creen en una variedad de almas de diversos tipos. He decidido no seguir de manera estricta la dicotomía entre alma- humana y alma-espíritu propuesta por Pitarch; en su lugar, intentaré exponer de la manera más detallada y abierta los tipos de almas que he recogido. Empero, antes de describir la primera de estas almas, el k’ux o corazón, debe decirse que el ámbito relacionado con algunas de estas almas está comprendido para los k’iche’ bajo el término tew kaqiq’, “frío, viento”, un difrasismo de altísima importancia en el lenguaje ritual. Cuando los ancestros (nantat) están presentes en las ceremonias, se dice que están pa tew kaqiq’, “en el frío y en el viento”, una manera de decir que están “en lo espiritual”. Por ejemplo, el chuchqajaw puede dirigirse de la siguiente manera a sus antepasados: Xuj jokow chu wachulew K’o alaq pa tew kaqiq’. Nosotros pasamos sobre la tierra, ustedes están en el frío y en el viento.

20 Como explican mis informantes: “Lo espiritual de la persona es tewal kaqiq’al. No se ve, no se toca.” Mucha gente atribuye a las almas de los nantat la cualidad de ser tewal kaqiq’al: “Los ancestros llegan, pero están chi tewal kaqiq’al”. La expresión denota por tanto lo intangible, como la presencia de los antepasados, el lenguaje que se utiliza para dirigirse a ellos, así como también el doble carácter de las ofrendas que los alimentan pues éstas no sólo son físicas: Ri nantat e k’olik pa tew kaqik’, k’e wakatik, ke’ solokotik, koj kilo’, koj ki to e k’ori’ quk’, ke’ b’isonik we ma k’e chab’ixik. Che ri chuchqajaw, ri k’amal b’e kelem chi kiwach ku’ chab’ej konojel, kikitabej, we maltyoxibal we ne sari kuriyii ranima jun chomb’al ku ta chike a re ri kikito, kikich’obo are ri’ cha’. Los ancestros están en el frío y en el viento, están caminando, nos visitan, nos ven, nos escuchan, están ante nosotros, se entristecen si no se les habla. Ante el chuchqajaw, ante el k’amal b’e se hacen presentes todos, lo escuchan si hay en él

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gratitud, tal vez lo que desea su corazón. Con su pensamiento él les pide qué es lo que desean y opinan, esto es lo que se dice.

21 La expresión tewal kakiq’al también es cercana al término uxlab’ o uxlab’al, que quiere decir “aliento” pero que también se usa como sinónimo de “espíritu”. Dicha palabra remite al término uxlab’ ja’, que significa “vapor”. Tedlock menciona que los nantat son considerados como uxlab’ en su aspecto espiritual, o como ulew, poqlaj (“tierra, polvo”) en sus restos físicos (1992, p. 41). En todo caso, se considera que el tewal kaqiq’ol pertenece a usumil ranima, “lo más escondido del alma”, o “lo más hondo”. Asimismo, se considera que las expresiones del lenguaje ritual k’iche’ comparten esta naturaleza, reconociéndoseles una eficacia distinta a la del lenguaje cotidiano.

22 Se ha reconocido la dificultad de hablar de un “alma-aliento” entre los pueblos indígenas mesoamericanos (Martínez González, p. 2007); asimismo, cabe destacar que no todas las almas de los momostecos están asociadas con la idea de hálito o viento, fuertemente asociada con el frío en el lenguaje ritual, puesto que, como veremos, el nawal o alma animal está asociado con el calor y lo solar. Parece ser que, entre todas las almas, de forma humana y asociado al corazón el k’ux sea el que se considera más cercano a esa idea. Por tanto, no consideraré al tewal kaqiq’ol como un alma en sí, sino como algo que define a una parte del ámbito de las almas en contraposición al cuerpo físico y al cuerpo-presencia, que ante todo es una imagen.

El alma-corazón: el k’ux o anima

23 La primera de las almas que consideraré es llamada k’ux (“corazón”), también llamada mediante el término castellano anima. El k’ux es la sede del pensamiento, la volición y el deseo, y de ahí que se diga sobre la opinión de alguien pa uk’ux, “según su pensamiento” o “según su parecer”. La facultad del pensamiento es también llamada no’j (“razón”), aunque se cree que el no’j está más bien en la cabeza; éste último término, empero, también es identificado con la sensibilidad y el ámbito de los sentidos2. Por otra parte, el k’ux es identificado con la vida misma del sujeto o k’aslemal. Como principio vital, el k’ux puede denotar un alma con la forma de la persona completa, pero “en el frío y en el viento” (pa ri tew pa ri kaqiq’), es decir, de carácter “espiritual”. Más aún, se considera que el k’ux de la persona está depositado en los altares domésticos (awas) ubicados en las tierras de los patrilinajes k’iche’, en particular el llamado winel, altar donde se encuentran los espíritus del patrilinaje y se les rinde culto.

24 Por ejemplo, un ajq’ij me mostró el winel de su familia y me dijo “yo estoy aquí metido”, refiriéndose tanto a su k’ux como al alma llamada chikop (“animal”), sobre la que hablaremos más adelante. Sobre la presencia del k’ux en el awas, un joven que sucederá a su padre como chuchqajaw en su patrilinaje me explicó lo siguiente: Pa ri awas k’owi ri uk’ux, ranima ri chuchwajaw, chila’ k’owi. Konojel ri ralk’ua’l, ri umam, uxikin, ralaxik… En el awas está el corazón, el alma del chuchqajaw, ahí está, junto con todos sus hijos, sus nietos, sus bisnietos, su linaje…

25 Puede considerarse que el k’ux es co-presente en el espacio denominado Santo Mundo, también llamado juyub’ taq’aj (montaña-valle) o simplemente juyub’al (montaña). Todos estos nombres denotan un espacio telúrico de carácter sobrenatural, así como su personificación en una o varias divinidades terrestres (dios mundo o dioses mundo). Los altares privados (awas rech alaxik) son un espacio que se comunica con el juyub’al en el

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que habitan las almas de los miembros del patrilinaje. Algunas personas consideran que los ancestros habitan en la cumbre de las montañas (tzam juyub’), por lo que puede decirse, cuando una persona ha realizado una acción deshonrosa, “tus ancestros lloran en la cumbre de la montaña”. Los ancestros son seres telúricos, identificados con las cumbres de las montañas cubiertas de nubes, y de ahí que en el lenguaje ritual se diga “blancos son sus cabellos y sus cabezas” (saq kiwi’, saq kijolom), metáfora oportunamente explicada a Schultze-Jena (1933, p. 20). Como dicho erudito notó en Chichicastenango, el culto a los ancestros entre los k’iche’ comparte características con el culto a los dueños de las montañas y cerros, pues se dice que ambos son “dueños de la nube y la neblina” (rajawal ri sutz, ri mayul), o bien que caminan “en el frío y en el viento”; más aún, el propio Schultze-Jena registra la expresión rajawal ri kaj, ri juyub’ “señores del cielo y la montaña”, lo que implica una identificación entre el ámbito telúrico y el celeste. Cuando una persona muere se realiza una ceremonia en el día Junajpu (contraparte k’iche’ del día Ajaw en el período clásico) para asegurar su entrada en el juyub’al junto con todos sus ancestros; otros aseguran que Ajpu sirve para meter a la gente al espacio llamado korral, sobre el que hablaré más adelante al tratar sobre el pájaro del alma o chikop. Tedlock explica que esta ceremonia se hace para “unirse a los otros espíritus” (1992, p. 124). El coeficiente del día para realizar dicha ceremonia depende de la edad de la persona al morir: entre más alto, más vieja y por tanto más respetada y poderosa la persona. Al contrario, los muertos que no reciben culto se convierten en xib’inel o simples espectros.

26 Podemos sugerir, entonces, que el k’ux es equivalente al ch’ulel de los tzeltales, un alma que, como explica Pitarch, existe tanto en el interior del corazón de la persona como en un espacio externo a ella: la montaña sagrada del patrilinaje o ch’iibal (1996, p. 80-81). Empero, la principal diferencia es que entre los momostecos esta alma no sólo está presente dentro del corazón y en el espacio sagrado de la montaña, sino también en el interior de los altares de patrilinaje o awas; es decir, que tiene una contraparte material. Se considera que el mantenimiento de estos altares mediante ofrendas de velas, incienso (pom) y otros materiales es esencial para el sostén de la vida de la persona y de la fortuna del patrilinaje; más adelante detallaremos las consecuencias de la negligencia en la realización de esos rituales. Destacando sus relaciones rituales, podemos considerar que el k’ux es el alma de las personas en tanto imagen de sus ancestros y eventuales ancestros ellas mismas; en cuanto a sus contrapartes en otros grupos indígenas, es posible sugerir que el k’ux podría considerarse como una contraparte del teyolia de los nahuas clásicos (López Austin 1980, p. 252-286), el ohlis de los mayas clásicos (Velásquez García 2015, p. 182-183), el pixan u óol de los mayas yucatecos contemporáneos (Güemes Pineda 2000, p. 313), así como el ch’ulel de los tzotziles (Vogt 1969, p. 369-371) o bien de los tzeltales (Hermitte 2004, p. 104-109; Pitarch 1996, p. 80-81; Figuerola Pujol 2010, p. 529), entre otras muchas “almas- corazón” de otros pueblos indígenas mesoamericanos (Martínez González 2007, p. 10-13).

El chikop

27 Previamente no identificada como un alma entre los grupos k’iche’ de las Tierras Altas, la palabra chikop ha sido registrada en diccionarios con el significado de “animal, insecto, ave” (Henne Pontious 1980, p. 86). Sin embargo, durante mi trabajo de campo

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obtuve información que confirma que, entre los momostecos, la palabra designa también a un alma con forma de ave (puede ser un pollito) que se considera habita en un lugar cerrado (korral) protegido por los espíritus ancestrales del patrilinaje en el espacio sobrenatural de la montaña.

28 Según las explicaciones ofrecidas por mis informantes, la razón por la que se hacen ceremonias a sus antepasados y a las divinidades telúricas o dioses mundo en determinados días del calendario ritual es que el alma de la gente puede ser considerada como un “pollito” (chikop) que vive en un corral. Mientras se hagan ofrendas a los ancestros y seres telúricos, este corral permanece cerrado; empero, si uno olvida celebrar dichos rituales, la puerta del corral se abre y el chikop de la gente queda expuesto a los ataques de las contrapartes animales de las divinidades telúricas e incluso de sus propios antepasados, quienes se consideran que pasan hambre. Dichos animales son llamados awajmundo, y tienen forma de “coyotes, tigres, perros”, entre otros. Para expresar la idea del castigo sobrenatural por parte de estas criaturas, se usa el término kationik, “ladrar y morder”. Se dice que dichos animales salvajes habitan tanto los altares domésticos de los patrilinajes (awas rech alaxik) como los altares ubicados en la población y sus alrededores, siendo sus nawales, creencia registrada por Carmack sólo para el caso de los altares principales de los cuatro puntos cardinales (1998, p. 343); de hecho, la creencia es más generalizada, y se aplica a todos los altares de los patrilinajes (awas rech alaxik), además de los ubicados en las montañas y otros puntos de la población.

Fig. 2 – Un awajmundo con forma de perro ataca a un chikop cuyo corral se ha quedado abierto (dibujo de un informante).

29 Entre los momostecos, los infortunios del individuo son muchas veces atribuidos al castigo que los ancestros divinizados infligen sobre el chikop. Fracasos económicos, pérdidas de estatus social, desventuras personales de todo tipo son atribuidos a la acción de “morder” (kationik) que los awajmundo ejercen contra la persona una vez que la puerta del “corral” se abre, acción ocasionada por el olvido de sus descendientes, pues hacer ofrendas equivale a “mantener la puerta cerrada”. En dichas ocasiones, los ajq’ij afirman que “el awas está ladrando/mordiendo”. Como me explicó un hombre que me mostraba los altares ancestrales de sus tierras: Y ahora, si ya no se le da su mantenimiento, si no se le da su comida, entonces empiezan los vecinos, kationik, se van a morir, se va a picar el otro, cualquier fracaso que hay, porque ya no hay quien le dé su comida, kationik, pues, muerde […] si no se

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le da comida, entonces muerde, entonces se muere la familia, hay fracasos económicos y enfermedades…

30 Lejos de ser una concepción excepcional, parece ser que la idea del interior del awas como un corral es de vital importancia para los momostecos. Electo a inicios de 2018, el especialista ritual de más alta jerarquía en Momostenango, el chuchqajaw rech tinamit, cargo actualmente en manos de Miguel Vicente Ixchop, me explicó que el principal altar a su cuidado, el altar del pueblo o awas rech tinamit, ubicado en el local número 10 del portal de comercio ubicado junto a la plaza principal de Momostenango, es justamente un corral en el que están metidas las almas de todas las 32 comunidades que conforman Momostenango: Ri awas rech tinamit xajunam ruk’ ri jun korral, konojel ri winaq e nimom chipam, ronojel ri Chwitz’aq e nimom chupam, a’retaq ku ri e k’o chirik, jape jun utiw k’u tijo, ku riq k’ax. El altar del pueblo es como un corral, todas las personas están metidas adentro, todo Momostenango está adentro, y los que están afuera viene un coyote, se los come, tienen problemas.

31 Las funciones del awas rech tinamit son extensas y es imposible cubrirlas aquí, pero la principal consiste justamente en proteger a las comunidades de las calamidades procedentes del exterior, así como de la negligencia en el culto a los dioses mundo. Resulta extraño que esta noción central en la religión momosteca no haya sido recogida por ninguno de los etnógrafos que ha trabajado en la comunidad, pero la idea no resulta excepcional dentro del contexto maya si se compara con nociones como el Bankilal Muk’ta Vits de los tzotziles de Zinacantan, la montaña en la que las almas animales (chanul) de todos los zinacantecos están protegidas por las divinidades ancestrales o totilme’iletik, montaña a la que los h’ilol o chamanes rinden culto (Vogt 1969, p. 383-385). Como me explicó un informante, en el caso de Momostenango “el chuchqajaw rech tinamit pide por todo el pueblo […] La gente no sabe, pero todos están amarrados por el chuchqajaw rech tinamit. El los amarra a todos, él pide por todos, todos están amarrados por él […] la gente vive en la tierra, aunque no se acuerde, se ruega por ella”.

32 Por otra parte, a diferencia de lo que ocurre en los ritos de curación de los tzotziles registrados por Vogt (1993 [1976], p. 11), o en los ritos descritos por Bunzel en Chichicastenango (1952, p. 296), en los cuales se ofrecen gallinas en sustitución del alma de la persona afectada, el chikop no parece tener una corporalidad en los rituales momostecos de curación. Empero he registrado que, de acuerdo con testimonios orales, en la brujería sí es posible atacar al chikop de una persona al torturar y sacrificar una gallina sobre un awas mientras se recitan oraciones, por ejemplo torciéndole la cabeza y desangrándola, dolores que padecerá la víctima de manera análoga.

33 Considerando dichas informaciones, puede decirse que las concepciones de los momostecos en torno al chikop resultan cercanas a las reportadas por Vogt para los tzotziles con respecto al chanul (1966, p. 90), así como a aquellas reportadas por Hermitte entre los tzeltales de Pinola referidas al nagual (2004, p. 59-63) o por Stratmeyer y Stratmeyer para los naguales tipo ixom piṣ◌̌ane de los jacaltecos (1977, p. 152). Es decir, se trataría de un alma de forma animal a cargo de las divinidades ancestrales, quienes pueden castigarla cuando la persona incurre en conductas antisociales. De manera más específica, el uso dado al término chikop entre los k’iche’ resulta prácticamente idéntico al que los tzeltales dan a la palabra chanul, que significa justamente animal, bicho o pájaro en un sentido genérico, pero que concebido como

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alma designa al “ave del corazón” (mutil ko’tantik) o al “bicho del corazón” (chanul ko’tantik), entidad que puede ser perjudicada por los espíritus lab cuando éstos son hostiles a la persona (Figuerola Pujol 2010, p. 527; Pitarch 1996, p. 80). Sin embargo, más allá de estas comparaciones podríamos decir que el chikop es el alma animal de la persona en su aspecto pasivo, un alma capaz de ser protegida o depredada dependiendo de si sus relaciones rituales con los dioses mundo y los ancestros son buenas o malas.

El nawal o wach uq’ij

34 En k’iche’, el término nawal es polisémico, y tiene una historia compleja y problemática. Su origen no está en las lenguas mayas sino que parece ser yuto-azteca: sería afín entonces a la palabra nahualli de los nahuas clásicos, lo cual no es sorprendente considerando la influencia de dichas lenguas sobre el k’iche’ (Campbell 1970). Durante la colonia, parece que la palabra nagual designaba tanto a un animal protector adquirido desde el nacimiento (Fuentes y Guzmán 1882-1883 [1690], vol. 2, p. 45), como a la transformación de ciertos hombres poderosos en espíritus animales (Recinos 2013, p. 225), poder que entre los kaqchikeles estaba asociado con el q’aq’al o calor y era concebido directamente en relación con el señorío o tepewal (Maxwell y Hill 2006, p. 32). Recientemente el término nawal ha sido resignificado en el contexto de la llamada “espiritualidad maya”, la cual lo interpreta como las “energías” que tendrían los días del calendario (Zapil Xivir 2007). Empero, más allá de estas reinterpretaciones – innegablemente influyentes entre algunos ajq’ij contemporáneos–, entre los momostecos encontré al menos tres concepciones sobre el nawal, distintas entre sí, pero finalmente asociadas.

35 Entre los momostecos el nawal es “otra alma de la persona”, distinta del k’ux y del chikop; su equivalente propiamente k’iche’ es wach uq’ij, “el rostro de su día”; ambos términos son equivalentes, pero por lo general nawal es más frecuente. Dicha alma está relacionada con el calor (q’aq’il) y se relaciona con el temperamento: si uno está “bravo” o “enojado” se dice que el nawal es más caliente, si uno está tranquilo, el nawal es frío. Empero, no sólo las personas tienen nawal, también los animales lo tienen. En un sentido elemental, nawal es lo que los animales usan para cazar y matar a otros. Por ejemplo, una vaca tiene un nawal débil o frío, a pesar de ser un animal grande, por ser mansa para su tamaño, mientras que una serpiente tiene un nawal fuerte o caliente, porque, a pesar de su tamaño, es capaz de matar a seres mucho más grandes que ella. Lo mismo se predica de las personas en su relación con los animales: se dice que una persona que pierde la vida ante un animal depredador ha sido vencida por el nawal del mismo, como si el calor del animal lo sofocara. Por tanto, nawal designa la agencia de los seres vivos y de las personas en términos de su calor corporal.

36 Al igual que las personas y los animales, los días del calendario o q’ij tienen nawal, lo cual designa, en su significado más básico, su influencia en términos de calor. Dicha influencia es cuantificada por su coeficiente numérico: entre más alto el numeral, más alto el nawal del día, y más fuerte y violenta su influencia por ser más caliente. De ahí que, como reporta Bunzel, los días con numeral alto sean usados en ceremonias con fines fuertes o violentos (1952, p. 274-283). Por supuesto, el término nawal también designa a las cualidades semánticas y a la agencia de cada día en la adivinación, un asunto que ha sido tratado ampliamente por la literatura (Schultze-Jena 1933;

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Bunzel 1952; Tedlock 1992). Tan sólo quiero destacar, entonces, la importancia de la idea de calor en el sistema calendárico k’iche’, que ha pasado un tanto desapercibida.

37 En segundo lugar, nawal designaría al animal compañero que una persona tiene por nacimiento, una idea que podría asimilarse a la concepción nahua de “tonalismo” (Foster 1944). En general, la idea parece ser similar a la que existe en algunas comunidades nahuas, para las que tonal o itonal designa entre otras cosas a un animal que resume las características de la persona y explica su destino (Montoya Briones 2008 [1964], p. 153-178). Por ejemplo, el amigo de un informante, un comerciante de edad madura, se quejaba de que su nawal no era un animal bravo o valiente como un águila, que lo haría más atrevido o valiente en el comercio, o un animal como un coyote, que lo haría astuto: Mi amigo me lo dijo, de los éxitos, que tiene que ver con el nawal, un hombre que tiene nawal águila siempre consigue lo que quiere. El nawal gavilán es una persona muy atrevida, muy animosa, no tiene temor. Me dice (mi amigo): “yo busco dinero, pero mi nawal no ayuda…” Otros tienen nawal coyote, los que tienen nawal coyote son astutos, piden fiado y les prestan. No todas las personas tienen el mismo animal, si no, todos fuésemos iguales…

38 Al nawal como animal compañero también se le llama “destino” (e) y, por eso, suele decirse sobre las características personales asociadas con el nawal: xa su re la’, “sólo es su destino”. En Chichicastenango, Bunzel describió rituales calendáricos para reconocer al nawal (1952, p. 317-320); empero, el reconocimiento del nawal entre los momostecos parece ser hoy en día una cuestión casual, relacionada con las características percibidas de la persona, y no he registrado la presencia de rituales asociados al mismo. Por otra parte, entre los k’iche’ existen ideas complejas sobre el nawal propio de los animales, no sólo como calor; empero, este artículo se centrará ante todo en la persona humana.

39 El tercer significado del término nawal es el del signo calendárico de la persona, que no obstante debe considerarse como un alma denominada wach uq’ij, “el rostro de su día”. En las informaciones que he obtenido, el wach uq’ij puede ser visualizado como un equivalente del k’ux o anima; es decir, como un alma autónoma. Así, en ciertos sueños donde aparecen los nantat o ancestros, el alma con la que los mismos interactúan es nada menos que el wach uq’ij de la persona. Nawal designa en ese sentido al signo calendárico y a la influencia del día (q’ij) regente del mismo sobre una persona determinada. En general, la explicación que se da al uso del término wach uq’ij es que la persona nace “frente” o “ante” (chu wach) los regentes de los días del calendario, de modo que comparte el destino o carga calendárica impartida por la divinidad presente durante su nacimiento, el cual no sólo ocurre en el mundo exterior sino simultáneamente en el espacio sobrenatural de la montaña o juyub’al, dentro del llamado Santo Mundo o juyub’ taq’aj que designa a la totalidad del espacio inframundano. Al parecer, los seres sobrenaturales del cosmos k’iche’, como los nantat o ancestros, los dueños de los cerros y fenómenos naturales o rajawal, así como los días del calendario o ajaw habitan dicho espacio, en una de cuyas múltiples montañas o juyub’al habitan los ancestros del patrilinaje que guardan las almas animales de sus descendientes en corrales. El nacimiento ocurre en presencia de los ancestros (nantat), el santo protector del patrilinaje (santoral ri alaxik) y los regentes calendáricos relevantes; todos estos seres influyen sobre el destino de la persona. Así, un hombre con un nawal particularmente fuerte se jactaba ante mí: “yo nací ante el ajaw 13 Kiej”, atribuyendo al día personalidad y presencia; el tener dicho nawal, asociado con el poder político por

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ser considerado el regente de los portadores calendáricos o Mam, lo hacía particularmente dominante.

40 Como hemos visto, en virtud de su carácter polisémico y su complicada historia, nawal es un término sumamente complejo. Resulta interesante que el nawal de los k’iche’ parezca comprender muchos de los mismos atributos semánticos que el tonal entre los nahuas contemporáneos, como ser un animal compañero asignado desde el nacimiento, o ser un tipo de alma asociada con el calor, o ser sinónimo de la “suerte” de la gente (Sandstrom 1991, p. 258). Sugiero que el término nawal tal vez pueda entenderse como una contraparte k’iche’ del tonal de ciertos grupos nahuas de Atla (Montoya Briones 2008 [1964]) o Cuetzalan (Signorini y Lupo 1989), y probablemente del tonalli de los mexicas, que significaba tanto el signo calendárico como el calor de la persona (López Austin 1980, p. 226-223), aunque cabe advertir que la asociación del tonalli con un animal compañero no aparece en las fuentes coloniales centro-mexicanas tempranas (ibid., p. 226). En cuanto a los mayas del período clásico, autores como Érik Velásquez García sugieren la existencia de una fuerza anímica llamada k’ihn con características semejantes al tonalli (Velásquez García 2015, p. 186-187). Entre otros grupos mayas, como los tzotziles, el k’ak’al o k’al (calor) aparece asociado con el ch’ulel (Favre 1992, p. 258), el poder, la virilidad y la edad (Guiteras Holmes 1961 [1965], p. 237); entre los tzeltales, el k’al está asociado con el poder, la vitalidad y la capacidad de hacer daño (Pitt-Rivers 1971, p. 12), pero no son “almas” y no tienen significado calendárico. Provisionalmente, puede decirse entonces que entre los k’iche’ el nawal es un alma de naturaleza solar y caliente, asociada con un animal que influye el destino (e), el cual determina la agencia de la persona y su temperamento, y también designa la influencia de un día (q’ij, palabra que, por supuesto, quiere decir “sol”) sobre la persona, siendo un sinónimo de nawal la expresión wach uq’ij. En resumen, se trata de un alma que condensa la agentividad de la persona y que expresa su relación con otras personas mediante la influencia de su signo calendárico y su animal compañero.

Almas-espíritu de los hechiceros: el win

41 A diferencia del uso que se le daba durante la colonia al término nagual, que designaba a la transformación de un hombre poderoso en un espíritu animal, tal y como lo registró Thomas Gage en el caso del cacique colonial de Pinola Juan Gómez (Gage 1958 [1648], p. 273; Pitt-Rivers 1971), lo mismo que a un animal ligado a la vida de la persona, los k’iche’ perciben hoy en día una diferencia entre el nawal concebido como animal- destino y alma calendárica, y el win, que es la transformación de una persona en animal o el uso de un espíritu con fines perversos. Así, un informante refirió, sobre la naturaleza animal del win y el nawal: “El win se convierte; en el caso del nawal no se convierte, lo traigo de nacimiento.” El concepto del win fue descrito por Benson Saler (1964) para los k’iche’ de El Palmar, que distingue al win, capaz de transformarse en animal o utilizar a un espíritu contra un enemigo, del ajitz, que sólo sería un hechicero en sentido genérico. Empero, dicha dicotomía no es tan rígida entre los momostecos contemporáneos, para quienes el win designa a un tipo de ajitz o “brujo” capaz de transformarse en un animal, así como también al espíritu utilizado por el mismo para llevar a cabo sus intenciones, siempre antisocial y maligno. Según mis informantes, win es apócope de winak, “persona”. Sinónimos usados para el win son xib’inel (“espectro”), lab’aj (“espanto”), ch’ekenel (“vencedor”, “capturador”) y sub’unel (“engañador”),

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aunque como veremos hay otros usos más específicos. La forma castellanizada del plural, wines, también es popular.

42 Entre los k’iche’ el win no parece poder ser adquirido desde el nacimiento, a diferencia de ciertos tipos de lab de los tzeltales (Figuerola Pujol 2010, p. 123). Empero, para convertirse en win sí se considera importante haber nacido en el signo calendárico Tijax, información que ya había sido recogida por David Hile entre los k’iche’ de Santa María Chiquimula (Stratmeyer y Stratmeyer 1977, p. 138). A pesar de este carácter “no co-esencial” del win, algunos informantes me han expresado la idea de que un ajitz tenía un win propio a su servicio; de tal modo, no sólo una persona “es” win, sino que “tiene” su win. Para los momostecos, el win parece concebido en términos del uso de uno de los animales a cargo de los dioses mundo, con fines perversos. Asimismo, las personas que tuvieron una mala muerte (ánimas perdidas) o la gente que no recibe entierro ni ofrendas terminan por convertirse en xib’inel o espectros, y pueden ser invocados como wines, pues se considera que sus almas “flotan en la oscuridad”. Los rituales relacionados con el win pueden verse de dos maneras: en unos, el win es invocado para causar daño o sufrimiento a otro, generalmente mediante terroríficas visiones nocturnas; en otra concepción, el hechicero transforma su alma-corazón en un win con forma animal tras recitar sus oraciones y realizar nueve o trece saltos mortales y tenderse en el piso, con lo que su espíritu saldrá por su boca ya transformado. Las invocaciones a las divinidades telúricas son necesarias para llevar a cabo este propósito, pues se considera que los wines se disfrazan de animales a cargo de los mismos; dichas invocaciones por lo general involucran el uso de libros de magia negra occidentales que, empero, son equiparados por los ajitz que los usan a awas o altares “pues en ellos se pide lo que deseamos” a los dioses mundo. Esta concepción resulta similar a la reportada por Stratmeyer y Stratmeyer con respecto al hechicero nawal entre los jacaltecos, quienes piden permiso al Nax Wik o “dios de la montaña” para transformarse en animales (ibid., p. 153).

43 Entre los momostecos, el tipo de win invocado, o en el que el hechicero se transforma, parece determinado por el día utilizado en el ritual. Por ejemplo, un hombre con fama de ser ajitz o hechicero me explicó que invocaba al win en diferentes días: Kiej para el “venado del inframundo”, Kan para “echar culebra” contra sus enemigos, Kame para mandar ante él a los muertos del cementerio. Otro día usado es Iq’, en el que se invoca al xoch’ (“lechuza”), palabra que denota a todo win volador pero que puede ser incluso “un tecolote con cara de persona”. Para invocar al win, en perfecta oscuridad, se pueden quemar ofrendas en el cementerio, en altares ubicados en montañas remotas y hasta en el interior de habitaciones cerradas. Se considera que los wines son carnívoros, y pueden devorar al chikop. A diferencia de los tzeltales, donde los lab tipo pale u ‘obispo’, de forma humana, son los más proclives a la antropofagia (Figuerola Pujol 2010, p. 94), entre los k’iche’ la idea de depredación atribuida a los wines es generalizada y especialmente atribuida a aquellos con forma animal; uno de los actos más claramente asociados con dichos espíritus es devorar las almas de sus víctimas, generalmente niños pequeños. En los relatos donde ser narra esta práctica, el alma de la persona, a veces con forma de pajarito (precisamente el chikop) o de bebé, es devorada por wines con formas de animales, que destrozan a la víctima, no sin antes cubrirla de zarpazos y arrojarla de un lado a otro. He recogido algunos relatos orales sobre el win y algunos aspectos de la ritualidad asociada a los mismos, que pretendo publicar en un futuro; éstos muestran una notable continuidad con las informaciones

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coloniales sobre la brujería “transformista” en la zona k’iche’, recogidas por el padre Margil (Dupiech Cavaleri y Ruz 1988).

44 Consideraré al win, de manera provisional, como un tipo de alma de forma animal o espectral utilizada por el hechicero o ajitz con fines perversos. Dicha alma, cuando tiene forma animal, es en realidad uno de los animales (awajmundo) a cargo de las divinidades de la montaña o dioses mundo, mientras que, cuando el win tiene forma de espanto (xib’inel), se trata de la invocación de una de las “almas perdidas” que, se dice, flotan en la oscuridad de la noche. Sugiero que el win puede considerarse como la contraparte k’iche’ de los espíritus wahyis de los Mayas Clásicos (Houston y Stuart 1989), de los wayoob’ de los yucatecos contemporáneos (Quintal et al. 2013), los xi’bajob y wäyob de los choles (Moreno Zaragoza 2013), el nawal pedido a la divinidad Nax Wik de los jacaltecos (Stratmeyer y Stratmeyer 1977), los wayijel de los tzotziles al ser utilizados por un brujo o ak’chamel (Laughlin 2007, p. 600) o bien de los lab de los tzeltales (Pitarch 1996, p. 81-82; Figuerola Pujol 2010, p. 532), tan sólo por mencionar algunos grupos mayas en el espacio y el tiempo. En cuanto a su aspecto relacional, el win es el alma depredadora por excelencia, aspecto por el cual está fuertemente asociada con lo ilícito, la brujería y lo antisocial.

Conclusiones

45 Como resumen de lo anterior, quisiera proponer el siguiente modelo provisional sobre el cuerpo y las almas entre los k’iche’ momostecos:

46 En cuanto a la corporalidad existe, • Un cuerpo orgánico y físico constituido ante todo por hueso (b’aqil), carne (tiojil) y sangre (kik’el), además de múltiples órganos específicos. Este aspecto corporal de la persona no está exento de recibir directamente la influencia de poderes sobrenaturales, como el llamado koyopa (relámpago). • Un “cuerpo-presencia” llamado wachib’al, que comprende la imagen y presencia de la persona, pero que también denomina metonímicamente a todo aquello relacionado con ella, como su ropa, una fotografía o un símbolo.

47 En cuanto a las almas existen, • El k’ux (corazón) o anima. Tiene forma humana y está depositada en los altares de patrilinaje. Se asocia con la parte espiritual de la persona, el “frío y viento”. Propongo que representa las almas de los ancestros divinizados y sus descendientes en el espacio llamado Santo Mundo; es decir, que puede considerarse como el espíritu de la persona en tanto imagen de sus ancestros y eventual ancestro, en oposición con los muertos que no reciben culto y “flotan en la oscuridad”, los xib’inel. • El chikop, un alma con forma de pájaro o pollito que habita en un “corral” dentro del espacio sobrenatural de la montaña. También está depositada en los altares de los patrilinajes. Puede sufrir el castigo de sus antepasados, devorada por los animales de las divinidades telúricas, o al ser atacada por hechiceros hostiles. Puede considerársele como el aspecto pasivo o con menor agencia entre las almas k’iche’, pues esencialmente expresa la relación de indefensión o de protección ante los ancestros y las divinidades telúricas, dependiendo del comportamiento ritual de la persona. • El nawal o wach uq’ij, un alma asociada con el calor corporal. Designa dos cosas: un alma animal que se trae de nacimiento y que simboliza el “destino” (e) de la persona, y el alma

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calendárica de la persona. Propongo que el nawal designa la agencia de la persona ante otros seres tanto en términos del signo calendárico como del animal compañero, influencia que es ejercida como “calor”. • El win. Puede tener forma animal o espectral. Hay versiones en las que el win es un disfraz del k’ux, el cual sale por la boca del brujo con forma animal; en otras, se trata de la invocación de un muerto. Aunque un hechicero puede utilizarlos y “domarlos” de modo que se consideren suyos, realmente pertenecen a los dioses mundo cuando tienen formas animales, mientras que los que tienen forma de espectros son almas de muertos invocadas por el hechicero. Propongo, por tanto, que entre los momostecos el win no es co-esencial a la persona, sino un disfraz del k’ux.

48 Quisiera enfatizar que, a mi parecer, la diferencia entre estas almas no reside tanto en su pertenencia a un esquema semiótico de oposiciones sino en sus diferentes grados de agentividad y en sus relaciones rituales: el k’ux es el alma de la persona en su relación con los ancestros divinizados y como eventual ancestro mismo; el nawal es un alma animal activa que expresa la agentividad de la persona tanto en el espacio sobrenatural de la montaña como en su vida cotidiana; el chikop es un alma capaz de ser depredada o protegida, esencialmente vulnerable, mientras que el win es un alma depredadora, por más que sea un disfraz que el brujo adquiere justamente en su función (socialmente ilícita) de depredador de otras almas. Por tanto, más que reafirmar un enfoque de oposiciones semióticas, quisiera subrayar que estas almas deben ser concebidas de manera relacional, siendo su principal diferencia su grado de agencia y sus relaciones con ancestros y otros seres de la cosmología k’iche’.

49 Además de este breve esquema, quisiera mencionar lo que este texto puede aportar para reconceptualizar nuestras ideas sobre la cosmología de los k’iche’. En primer lugar, resulta sorprendente que, a pesar del intenso trabajo etnográfico realizado en la zona, estas concepciones hayan pasado desapercibidas en la obra de los grandes etnógrafos y etnohistoriadores de la región (Schultze-Jena 1933; Tedlock 1992; Carmack 1995, 1998; Cook 1981, 2000). Esta nueva información nos permite repensar la cosmología de los momostecos en el panorama más amplio de otros grupos mayas, pues sus ideas en torno de las almas, particularmente con respecto al chikop, guardan semejanzas notables con las concepciones reportadas por investigadores como Guiteras Holmes (1965 [1961]), Holland (1964), Vogt (1969), y Gossen (1999) para los tzotziles, Pitarch (1996) y Figuerola Pujol (2010) para los tzeltales, Oakes (1951) para los mames, así como Stratmeyer y Stratmeyer para los jacaltecos (1977). En todos estos grupos diversos tipos de almas se consideran co-existentes en un espacio telúrico o montañoso; tienen formas animales y están a cargo de divinidades ancestrales de linaje, generalmente con nombres estilo “madres-padres” o “padres-madres” (nantat, me’iltatil, totilme’iletik), las cuales pueden castigar a sus protegidos al dejarlos encerrados afuera de sus “corrales”, abrir los “corrales”, o bien ser devoradas por las acciones de brujos y espíritus hostiles. Por lo tanto, un primer aporte de este trabajo consiste en reconocer la cercanía entre las concepciones de los k’iche’ y las de otros grupos mayas, concepciones que, empero, por alguna razón han sido inexplicablemente soslayadas.

50 Empero, las concepciones momostecas sobre las almas presentan características vinculadas con la particularidad de dicha comunidad. En Momostenango, el espacio donde habitan los ancestros está representado materialmente por los altares de linaje, por lo que el vínculo entre las almas y su concreción material en estas estructuras es innegable. La idea es tan fuerte que se considera que la destrucción de sus altares

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traería la muerte de los miembros de un linaje. Incluso algunos de mis informantes convertidos al protestantismo dejaban intactos los altares en sus tierras, por miedo al castigo por parte de sus antepasados: pese a haber cambiado de religión, estaban convencidos de que sus almas estaban depositadas en los altares y que morirían, enfermarían o perderían la razón si éstos fueran destruidos. Los momostecos expresan la idea de estar dentro de estos altares con la imagen del registro y la escritura. Afirman que los ancestros tienen listas en el inframundo y que son “los dueños de sus nombres”: algunos le llaman a esto “la nómina” o dicen que su nombre “está escrito” en el inframundo o “recomendado” ante sus ancestros, o bien que su nombre fue “colocado” mediante las oraciones de los chuchqajaw en el altar de linaje al ser presentados a sus antepasados luego de nacer. De ahí que se diga ronojel alax tz’ibatalik pa jun porob’al: “todo apellido está escrito en un altar” y, más aún, que “los nombres (de las personas) pertenecen al altar”, ri b’iaj rech ri porob’al.

51 Asimismo, puede considerarse que dichos altares forman una jerarquía asociada con el poder ritual, de modo que el jefe de un linaje o chuchqajaw rech alaxik es el encargado de proteger las almas de su familia solamente; dichas almas son “la carga del awas” (ekomal ri awas). Un especialista de mayor jerarquía puede ofrendar por sus vecinos y comunidad en altares conocidos como mesa, mientras que el chuchqajaw rech tinamit, o especialista ritual del pueblo, es el encargado de proteger a las 32 comunidades en el altar ubicado en un local cerrado frente a la municipalidad además de hacer ofrendas para proteger a los líderes políticos de la población, siendo por tanto el líder ritual con la mayor carga o responsabilidad (ekomal). De ahí la profusión de altares en la comunidad, que en tiempos coloniales le dio su nombre: ‘lugar de adoratorios’ (Tedlock 1992, p. 22). Por tanto, he de concluir este texto señalando que entre los momostecos es difícil considerar el tema de las “almas” como separado de la cultura material, las estructuras rituales y el poder, algo que indudablemente podría ser el punto de partida no sólo para reconsiderar la noción de agencia de lo inanimado entre los pueblos mayas (Hendon 2012), sino para abordar la interrelación entre almas, altares, patrilinajes y vida social; tema que, empero, debe reservarse para futuros trabajos.

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NOTAS

1. Algunos de mis informantes reconocen el significado literal de la expresión ayin cho, ayin plo como “lagarto lago, lagarto mar”, pero no ofrecen explicación al respecto. Considero posible, empero, que haya alguna conexión histórica con el papel que ríos y lagos han tenido en las concepciones cosmológicas de los mayas antiguos. Véase, al respecto, Velásquez García 2010a. 2. Como en la oración kinao’ le kape’, “pruebo el café”.

RESÚMENES

El estudio de las ideas sobre la corporalidad y las almas se ha consagrado en años recientes como uno de los temas más importantes en el conocimiento de los pueblos mayas del pasado y el presente (Pitarch 1996, 2011; Figuerola Pujol 2010; Velásquez García 2015). En el caso de los k’iche’ de Santiago Momostenango, importantes trabajos se han centrado en temas como las prácticas calendáricas (Tedlock 1992), la cosmología (Cook 1981) y la etnohistoria (Carmack 1995), pero la información sobre el cuerpo humano y las almas resulta todavía poco sistemática. Siguiendo la propuesta de Pedro Pitarch en torno a la persona maya (2011), en este artículo presento nueva información sobre las ideas en torno de la corporalidad y las almas entre los momostecos. Destaca la existencia del chikop, un alma con forma de pájaro muy similar al “ave del corazón” de los tzeltales, la cual puede ser castigada por las divinidades ancestrales cuando una persona olvida hacer ofrendas en los altares del patrilinaje.

The study of ideas regarding corporeality and souls has consolidated itself in recent years as one of the most important subjects in our knowledge of the Maya peoples of the past and the present (Pitarch 1996, 2011; Figuerola Pujol 2010; Velásquez García 2015). Regarding the K’iche’ Maya of Santiago Momostenango, important works have been dedicated to subjects such as calendric practices (Tedlock 1992), cosmology (Cook 1981) and ethnohistory (Carmack 1995), but information regarding the body and souls is still unsystematic. In this article, I present new information regarding the body and the soul among the Momostecos, following the recent proposal of Pedro Pitarch regarding Maya personhood (2011). Notable is the existence among the momostecos of the chikop, a soul with the form of a bird very similar to the “bird of the heart” of the Maya Tzeltal, which can be punished by the ancestral deities when people forget to do offerings at their patrilineage’s altars.

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L’étude des idées sur la corporéité et les âmes a été consolidé ces dernières années comme une partie les plus importante dans notre connaissance des peuples mayas du passé et du présent (Pitarch 1996, 2011 ; Figuerola Pujol 2010 ; Velásquez García 2015). Dans le cas des K’iche’ de Santiago Momostenango, des travaux marquants ont traité de sujets tels que le calendrier (Tedlock 1992), la cosmologie (Cook 1981) et l’ethnohistoire (Carmack 1995) ; toutefois, des informations sur le corps humain et les âmes restent peu systématiques. Dans cet article, je présente de nouvelles informations sur ces conceptions à Momostenango, suivant le modèle de Pedro Pitarch (2011). Je montre, entre autres, l’existence parmi les Momostecos du chikop ou “oiseau de l’âme”, très semblable à “l’oiseau du cœur” des Tzeltal, qui peut être puni par les divinités ancestrales lorsque les gens oublient de faire des offrandes sur les autels des ancêtres.

ÍNDICE

Mots-clés: corporalité, âme, Maya K’iche’, Momostenango, ethnologie Palabras claves: corporalidad, alma, mayas k’iche’, Momostenango, etnología Keywords: corporality, soul, K’iche’ Maya, Momostenango, ethnology

AUTOR

ALONSO ZAMORA CORONA

University College London

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La documentación de las lenguas patagónicas en el gabinete de Samuel A. Lafone Quevedo. El Vocabulario Guenaken La documentation des langues de Patagonie dans le cabinet de Samuel A. Lafone Quevedo. Le vocabulaire guenaken The documentation of Patagonian languages in Samuel A. Lafone Quevedo’s cabinet. The Guenaken Vocabulary

Marisa Malvestitti y María Emilia Orden

NOTA DEL EDITOR

Manuscrit reçu en février 2019, accepté pour publication en juin 2019.

1 En el último tercio del siglo XIX la formación de los museos en la Argentina requirió del acopio de ejemplares paleontológicos y naturales, así como de bienes tangibles y simbólicos concernientes a los pueblos originarios que se encontraban dentro de los límites del territorio nacional. De modo sistemático, desde el Museo de La Plata (en adelante, MDLP) se impulsaron campañas a la Patagonia con el doble fin de mapear el territorio y reunir tales elementos, y de ese modo contribuir al desarrollo de las ciencias locales enmarcadas en el americanismo (Podgorny y Lopes 2013).

2 En ese periodo, así como en las dos primeras décadas del siglo XX, antropólogos y naturalistas vinculados con el Museo realizaron distintas documentaciones sobre las lenguas de la región patagónica y del norte del país. Entre los registros y los estudios producidos sobre los idiomas en la región sur se destacan, por su amplitud, las investigaciones lideradas por Roberto Lehmann-Nitsche (Malvestitti 2012, 2014, 2015; Malvestitti y Orden 2014). A ese conjunto se suman las anotaciones formuladas en el contexto de campañas de otros agentes vinculados con la institución: Francisco

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Pascasio Moreno (1879; Mitre 1909, I, p. 214-215), Carlos Ameghino (en Malvestitti 2018) y Carlos Burmeister (1891). En cambio, resulta menos conocida la labor de documentación y reflexión sobre las variedades patagónicas desarrollada en el MDLP por Samuel Alexander Lafone Quevedo (1835-1920), quien se desempeñó como encargado de la sección de “Arqueología y Lenguas Americanas” del museo durante el periodo de 1888 a 1906 y, desde ese año hasta su fallecimiento, revistió el cargo de director de la institución.

3 Los estudios que analizan la trayectoria biográfica de Lafone Quevedo se han concentrado en la diversidad de las investigaciones americanistas que realizó en relación con el folclore, la arqueología, la historia, la etnología y la lingüística (AAVV 1921, 1962; Furlong Cardiff 1964). Farro (2009, 2013) se refiere detalladamente a su enfoque teórico y metodológico en el terreno filológico, y expone las instrumentalidades empleadas para el abordaje de las lenguas guaycurúes, mataco- mataguayas y cacán. Describe así la forma en que su gabinete, con la ayuda de un escribiente, sistematizó un amplio corpus de datos lingüísticos a través de un riguroso trabajo de transcripción en cuadernillos de tapa de cartón “donde se ordenaban alfabéticamente las entradas, asentando en una columna los vocablos en idioma indígena y en una columna contigua sus equivalentes en castellano” (Farro 2013, p. 537). Estos recursos oficiaron como documentos de trabajo –aportando ejemplos concretos que sustentaban sus hipótesis sobre la afijación en las variedades americanas– y constituyen un antecedente para el trabajo comparativo posteriormente realizado en el marco del MDLP sobre dos lenguas de la Patagonia: tehuelche y günün a iajüch.

4 En este trabajo1 consideramos un aspecto de la tarea de documentación y análisis que Lafone Quevedo realizó sobre esta última lengua, genéticamente relacionada con las del tronco chon (Viegas Barros 2015) y denominada alternativamente en las fuentes de la época como “guenaken”, “gennaken”, “puelche” o “pampa”2. La misma contaba con pocas documentaciones previas en la época en que Lafone Quevedo se abocó a su análisis, y constituía una suerte de mito lingüístico, por un lado, cimentado en la ambigua clasificación del grupo y, por otro, por la singularidad que presentaba, pues de hecho no se asemejaba a ninguna de las lenguas con las que estaba en contacto al momento de ser relevada. Su elucidación resultaba así de crucial importancia, pues Lafone Quevedo (1898c; 1900) hipotetizaba que el “guenaken” constituía el “eslabón” entre las lenguas de Patagonia y de Chaco.

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Fig. 1 – Mapa de las lenguas indígenas del territorio argentino analizadas por Lafone Quevedo, según su propia denominación (© formato de mapa de Creative Commons, mapa realizada por Orden, 2019).

5 El análisis de sus manuscritos, publicaciones y correspondencia permite inferir que Lafone Quevedo mantuvo un interés duradero por el günün a iajüch. Por un lado, en 1896, en el marco de su trabajo en el Museo de La Plata, se entrevistó con un hablante de la lengua con quien elicitó un conjunto de enunciados que permaneció inédito entre sus papeles de trabajo. Luego compuso un vocabulario comparado, que por datos internos del texto puede situarse en 1898, en el que compila los datos léxico- gramaticales que había registrado junto con los relevados en otras fuentes anotadas en los siglos XVIII y XIX3. En la misma época escribió un breve tratado en el que intentó establecer relaciones genéticas entre el “guenaken” y las lenguas de la familia Chon; este texto tampoco fue publicado y sólo es posible recuperar algunos fragmentos en una copia manuscrita de Bartolomé Mitre, que este autor conservó en su archivo personal. Asimismo, en distintas publicaciones y en la correspondencia de Lafone Quevedo se encuentran referencias a su interés por que se realicen estudios más profundos sobre la lengua, para reconocer su filiación respecto de otras variedades patagónicas4.

6 De este corpus, nos proponemos aquí realizar una presentación crítica de los vocabularios comparados y, en particular, recuperar la nómina original que Lafone Quevedo elicitó. A tal fin, además de describir la fuente en su materialidad, expurgamos los datos que el filólogo documenta, y analizamos la forma en que sus principales intereses e hipótesis se ponen de manifiesto tanto en su propia recolección como en la sistematización realizada. Consideramos, además, aspectos del contexto de producción de su registro, proponemos una identificación del consultante, y evaluamos las contribuciones que su recopilación realiza a los estudios actuales sobre la lengua. De este modo, además de colaborar en el incremento de los registros existentes sobre esta

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variedad patagónica, el análisis del manuscrito contribuye a clarificar el formato instrumental que adoptó la elicitación lingüística en la Argentina hacia fines de siglo XIX, así como a puntualizar su principal finalidad: proporcionar un acceso a la lengua que permitiera un cotejo contrastivo con la bibliografía previa y con otros registros contemporáneos.

Las hipótesis lingüísticas de Lafone Quevedo

7 Como señalan los diferentes autores que se han ocupado de su obra, en el periodo en que se vinculó con el MDLP Lafone Quevedo era un referente nacional en cuestiones lingüísticas. Las relaciones entabladas con destacados americanistas como Bartolomé Mitre, Vicente Fidel López, Francisco Pascasio Moreno o Manuel Trelles, así como sus vínculos con el misionero anglicano Thomas Bridges, le proporcionaron una situación privilegiada para la obtención de diversos materiales lingüísticos. Esto, como señaló Salvador Debenedetti, le permitió transitar “nuevas y desconocidas rutas hacia la solución de los complicados problemas de las afinidades de los idiomas americanos” (AAVV 1921, p. xiv). Para tal fin, además de efectuar recolecciones de datos orales, como la que referiremos, reunió una serie de documentos manuscritos y libros sobre las lenguas americanas esparcidos en colecciones privadas (Outes y Bruch 1910, p. 26). Asimismo, mantuvo un intercambio epistolar con destacados lingüistas internacionales como Lucien Adam y Daniel Garrison Brinton, quienes destacaron su labor debido a la “escrupulosidad, la organización y la presentación metódica de la información” que Lafone Quevedo realizaba (Farro 2013, p. 535).

8 Lafone Quevedo compartió con Brinton la idea de que la lengua constituía un factor central en la clasificación etnológica (Imbelloni 1936). Se interesó por establecer una “‘geografía histórica’ de las lenguas indígenas del territorio argentino por medio de la publicación sostenida de sus trabajos y la elaboración de mapas étnico-lingüísticos donde se integraron visualmente los datos recolectados” (Farro 2013, p. 528). Su enfoque se sustenta en ciertas perspectivas del americanismo, en tanto se circunscribe al estudio de las lenguas sudamericanas y establece vínculos entre el análisis gramatical, los procesos etnohistóricos –que implicaban a menudo contacto– y los artefactos materiales y arqueológicos localizados. Esta articulación fue destacada por Boman (1922, p. 207), al observar que en su tarea docente “Lafone n’y enseigna point l’archéologie, mais la linguistique et l’ethnologie basée sur la linguistique”. Por otro lado, en su práctica Lafone Quevedo fue consecuente con su premisa de “que todo estudiante puede y debe concurrir con algo de su propia cosecha hacia el desarrollo de la lingüística americana” (Lafone Quevedo 1892a, p. 1). En tal sentido, intervino en la clarificación del complejo panorama lingüístico del territorio nacional, aportando criterios para la clasificación de las lenguas americanas. En su acercamiento, en primer lugar, priorizó la adscripción, no al tipo lingüístico (flexivo, aglutinante o aislante), sino a una modelización morfológica basada en la posición de los morfemas o clíticos pronominales en los sintagmas nominal y verbal. Esto le permitió elaborar dos esquemas típicos a los que denominó “gramáticas matrices”, según la tendencia por prefijar o sufijar dichos elementos a los núcleos sintácticos: Es costumbre de los filólogos hablar de lenguas aglutinantes, sintéticas o qué se yo; pero a mí me llamó más la atención la manera y no el hecho de la aglutinación, y desde luego establecí para mí una ley gramatical que someto a toda lengua nueva que se me presente. En tesis general, pues, parece que en nuestra América hay dos

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gramáticas matrices: la una que prefija sus partículas pronominales (como el Guaraní) las otras que las subfija (como el Quechua). (Lafone Quevedo 1892a, p. 1)

9 En la cita precedente es posible observar el posicionamiento que adopta respecto de los modelos analíticos vigentes en la época, que buscaban reconocer las tendencias a la aglutinación y polisíntesis en las lenguas del mundo5. Lafone Quevedo señala que esas percepciones, si bien son correctas, no constituyen parámetros suficientes para la clasificación. Por ello propone ir más allá de la esquematización del tipo de fenómeno que refiere y focaliza sobre el lugar donde ocurren los mismos: en el orden de la prefijación o sufijación de los posesivos se codifica la genética de las razas del continente.

10 El peso relativo de este criterio en la clasificación aumentó a través de los años. En las “Instrucciones del Museo de La Plata para los colectores de vocabularios indígenas” (Lafone Quevedo 1892b) Lafone Quevedo solicitaba que se documentaran expresiones posesivas en las frases nominales (“mi cara, tu cara, su cara [de él]”, etc.) haciendo especial hincapié en observar “si la forma que se da es universal, o si las partículas agregadas varían según la palabra”; y, si se detectara variación, se proporcionaran “más ejemplos con voces que signifiquen partes del cuerpo, porque así se comprenderá mejor la regla del caso” (ibid., p. 406). También sugería anotar la formulación de las referencias pronominales personales en la frase verbal transitiva6. Aplicó luego el mismo razonamiento en los vocabularios de 1898 que aquí analizamos, y posteriormente también en los cotejos efectuados entre varias lenguas del Chaco (mocoví, toba nocten y wichi vejoz) y el quechua (Lafone Quevedo 1912). En línea con los análisis lingüísticos de sus contemporáneos, en su desarrollo conceptual insistió en que, más que guiarse por la afinidad de cognados léxicos, las clasificaciones debían priorizar el parámetro exhibido en el plano de la gramática: We arrive to this conclusion: that we are justified in classifying some most considerable South American stocks linguistically by their pronouns, ignoring wholly or in part their vocabularies or other ethnic affinities. (Lafone Quevedo 1912, p. 5)

11 Por otro lado, postuló que morfemas formalmente similares constituían un elemento compartido por distintas lenguas sudamericanas: My starting point was that the I or Y of the 1st person in all their combination with strengthening particles, and it soon became evident that they gave us the key note to most of the tongues in this part of our American Continent. (Lafone Quevedo 1912, p. 4)

12 Precisamente el günün a iajüch le permitirá corroborar esta segunda afirmación, dado que en la codificación de las personas se observan los fonemas que el autor destaca como recurrentes: y- en la primera persona, m- en la segunda. Esto lo lleva a postular que “los dialectos Tehuelche, nuevo y viejo, septentrional y meridional, Ona, Guenaken, etc. son todos modificaciones serias de una sola lengua […]. Lo único que parece que queda inconmovible son las articulaciones pronominales de 1ª. y 2a. persona” (Lafone Quevedo 1900, p. 122). “A pesar de las serias diferencias léxicas”, observa entonces como indudable la semejanza entre el tehuelche y el günün a iajüch, y postula además que “algo muy remoto tienen en común las lenguas patagónicas con la Araucana”, sobre la base de otro parámetro gramatical compartido, como es el número dual (ibid., p. 122-123).

13 Como puede observarse, la correspondencia pronominal le ofreció a Lafone Quevedo pistas interpretativas para establecer relaciones entre las lenguas de la Patagonia, pero

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ellas se basaron principalmente en la intuición y en un cotejo de datos restringido en categorías y acotado a las gramáticas disponibles en ese momento. Por otro lado, la diversificación de sus estudios y el estado de inédito de muchos de sus trabajos llevó posteriormente a afirmar que Lafone Quevedo no escribió ninguna “obra fundamental o doctrinaria de conjunto” y que sus trabajos se basan en criterios empíricos y un método vacilante (Rojas 1960 [1917], p. 147). Si se observa el conjunto de materiales inéditos, las plantillas de recolección y el esquema analítico-comparativo del autor presentado, se deduce por el contrario que Lafone Quevedo presentó una metodología coherente y con objetivos claros, aunque los resultados definitivos de su propuesta de análisis no fueran expuestos en un único tratado.

La composición del vocabulario

Aspectos de su materialidad

14 En lo que sigue nos proponemos reconstruir el vocabulario que Lafone Quevedo documentó en 1896 –en tanto actualmente es incierto el paradero de su manuscrito original–, para luego explicar su trabajo de cotejo con otras fuentes realizado dos años más tarde en el ámbito de su gabinete.

15 Para ello describiremos en primer lugar los manuscritos titulados “Vocabulario Puelche-Guenaken, base el de Lafone Quevedo 1896” y “Vocabulario Guenaken- Español”, que comprenden 12 y 15 fojas respectivamente (archivo del Museo de La Plata, Fondo Lafone Quevedo, Carpeta 42, Manuscritos 9 y 10). Los mismos fueron transcriptos por el propio Lafone Quevedo en hojas cuadriculadas, luego encarpetadas y con una encuadernación cosida en forma manual. Este formato se identifica como propio de la etapa final del trabajo de elaboración lingüística que realiza también para otras lenguas (Farro 2013, p. 537).

16 El orden consistente de ambos manuscritos y las pocas enmiendas que se observan permiten inferir ese estatus de versión avanzada o final. De todos modos, es posible observar el carácter procesual en los documentos: existen espacios en blanco entre agrupamientos alfabéticos de palabras donde podrían posteriormente incluirse nuevos datos, y también se observan inserciones interlineales de elementos léxicos o aclaraciones. El Manuscrito 9 presenta una variación en el uso de sucesivas tintas negras o azules7 y un mayor número de enmiendas que el Manuscrito 10. Por su parte, en este último se pone de manifiesto una calidad de tinta azul homogénea, y se incorporan en tinta negra sólo las palabras tomadas de la obra del jesuita Thomas Falkner en su Descripción de la Patagonia publicada en inglés en 17748. Además en el Manuscrito 10 se incluyen numerosos comentarios analíticos sobre fonética y morfología, lo cual nos lleva a sostener que ambos manuscritos representan distintos momentos en el trabajo de gabinete: el primero es de reconocimiento y reescritura de los datos accesibles, mientras que el segundo sienta las bases analíticas del estudio lingüístico que emprendió Lafone Quevedo.

17 Por otro lado, se observa que ambos vocabularios se presentan en orden alfabético. Este tipo de plantilla era usual en otras recopilaciones sobre lenguas patagónicas realizadas desde el MDLP, como las ya mencionadas de Moreno, Burmeister o Carlos Ameghino. Sin embargo, en esos casos sólo se proponen vocabularios unidireccionales español- lengua amerindia. La innovación de Lafone Quevedo fue sumar la contraparte lengua

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amerindia-español, de modo similar a los textos misioneros jesuitas o a la sistematización de Thomas Bridges (1987 [1933]) para el léxico del yagan. Ese ordenamiento le permitió organizar el corpus de manera tal que evidenciara los fenómenos gramaticales y fonológicos que le interesaba analizar.

Fig. 2 – Plantilla alfabética y anotaciones lingüísticas hechas por Lafone Quevedo (archivo histórico del Museo de La Plata, Buenos Aires, Fondo Lafone Quevedo, Carpeta 42, Ms. 10, f. 9).

18 Por último, cabe destacar que, al margen de algunos lexemas, en el Manuscrito 10 Lafone Quevedo anota reiteradamente el comentario “ojo”, probablemente para llamarse a sí mismo la atención en casos en que las fuentes proponían diferentes entradas en günün a iajüch para un mismo o distinto sentido conceptual en castellano, como se observa en las siguientes entradas:

(1) Yamzai (C.)a Pantorrilla

Yanekí (C.) Pantorrilla. ojo

(2) Apiujek Luna

Apiujek (C.) Luna

Apiukùk (D.M.) Sol. ojo

a. Como se verá más abajo, Lafone Quevedo recopila lexemas de distintos vocabularios y denota con iniciales, a veces entre paréntesis, la referencia al documentador. En estos ejemplos, C. corresponde a Guillermo Cox y D.M. a Domenico Milanesio.

19 Por otro lado, en el Manuscrito 10 se observa un comentario insertado por Lehmann- Nitsche, en el que este autor indica una errata y un posible reordenamiento del lexema ‘veinte’ bajo otra inicial (ver nota “Póngase bajo la letra P!” Lafone Quevedo 1898b, Ms. 10, f. 59). Esta intervención denota que el antropólogo alemán accedió a estos materiales, aun cuando en sus publicaciones nunca se refiera a este corpus de datos producido por su colega del MDLP. La interacción sobre el mutuo interés en el günün a

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iajüch se extendió en el tiempo y, así, se observa en sendas cartas que en 1915 y 1916 Lehmann-Nitsche le envió a Lafone Quevedo desde el Territorio Nacional de Río Negro, en las que le transmitía su entusiasmo por haber hallado datos empíricos que despejaban dudas en las hipótesis compartidas por ambos. En las mismas se tematiza el interés por obtener datos gramaticales y por aumentar el volumen de vocabulario disponible hasta el momento, así como también de buscar la coincidencia con fuentes anteriormente documentadas10. Es sumamente llamativo que en un periodo en que los materiales manuscritos se compartían entre estudiosos, la fuente que analizamos haya permanecido ignorada en el gabinete del lingüista. Aun cuando consta que la conoció, Lehmann-Nitsche no la incorporó al cotejo con sus datos de campo, ni se refiere al documento de Lafone Quevedo en ninguno de sus análisis de gabinete sobre las lenguas “het” de la pampa argentina (Lehmann-Nitsche 1922, 1930).

Circunstancias de elicitación

20 Lafone Quevedo registró un total de 116 entradas, algunas de las cuales son en realidad sintagmas o frases por su estructura y sentido. El propio filólogo ofrece dos explicaciones sobre las circunstancias de elicitación. En primer lugar, indica en el tratado (Lafone Quevedo 1898c): En julio de 1898 [sic], el Dr. Moreno, director del Museo de La Plata, me proporcionó la ocasión de conferenciar con un indio Manzanero que hablaba el idioma de los Guenaken, y de boca de él apunté los datos que se contienen en el siguiente vocabulario. (ibid., f. 9)

21 Posteriormente, en su publicación de 1900, señala haber documentado las palabras pechua ‘guanaco’ y yag’ep ‘agua’ –junto con sus equivalentes na y le-é del tehuelche– de la siguiente manera: Estos datos los he recogido yo mismo de la boca de indios Manzaneros, que se hallaban en el Museo de La Plata, huéspedes del doctor Moreno. (Lafone Quevedo 1900, p. 37)

22 Las citas permiten entrever que el interés por las lenguas patagónicas, y más precisamente por el idioma “guenaken”, si no inducido fue probablemente incitado por los afanes documentales de Moreno y posibilitado por la presencia de hablantes nativos en el ámbito de la institución. En “Matériaux pour servir à l’anthropologie des Indiens de la République Argentine” (1906), Herman F.C. ten Kate refiere que en el mes de junio de 1896 tomó medidas antropométricas y fotografió a un hombre adulto referido como “l’un des amis de Rufino de la tribu des Manzaneros” que se acercó al Museo con Rufino Vera, antiguo intérprete de Inacayal y guía en distintas expediciones del MDLP, y su hija, a partir de una convocatoria realizada por Moreno. El grupo que se acercó a la institución en esa ocasión era en realidad más numeroso, y estaba compuesto por personas mapuche radicadas en La Plata y Buenos Aires, algunos de los cuales cumplían funciones en las fuerzas militares, policiales y los bomberos, o bien como jornaleros (Kate 1906, p. 52). No obstante, solamente ellos tres (Rufino Vera, su hija y el hombre acompañante) accedieron a realizar la prueba a cargo de ten Kate, y es debido a esta situación que se conocen algunos datos acerca de quien enunció el vocabulario. En la publicación se lo designa como “Manzanero” y “Manzanero (Araucan)” y se indican su género, su edad de entre 42 y 45 años y sus características fisonómicas (ibid., p. 52-54; véase también plancha fotográfica 611). En cambio, en los manuscritos, Lafone Quevedo no registró aspectos de su trayectoria biográfica o de su dominio lingüístico. Sobre la

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base del apelativo, hipotetizamos su origen patagónico y su pertenencia a este colectivo socioétnico del noroeste de la Patagonia, vinculado con la gente de Sayhueque, Foyel e Inacayal (quienes en esos años ya no se encontraban deportados en el Museo). Este grupo se caracterizaba, además, por el empleo del bilingüismo mapuzungun-günun a iajüch, al que en muchos casos también sumaban conocimiento del castellano.

Fig. 3. Interlocutor manzanero (archivo histórico del Museo de La Plata, colección fotográfica, ARQ-002-011-0004).

El vocabulario registrado

23 Reproducimos a continuación la nómina que Lafone Quevedo elicitó, a partir de los enunciados que se registran en ambos vocabularios manuscritos: Castellano-Guenaken y Puelche Guenaken-Castellano. Salvo indicación contraria, explicada en nota al pie, todas las expresiones se listan en ambos documentos, en distinto orden, debido a que se organizan respectivamente, sobre la base del castellano y el günün a iajüch12. En los casos en que aparecen dos variantes, aclaramos en cuál manuscrito se encuentran. La nómina comprende el siguiente corpus léxico y de frases13:

1 Agua yag’ep, yagùpa

2 Agua dame yag’ m chalumkia

3 Allí koshná

4 Amigo yenua

5 Anda (¿Cómo anda?) keshmen pahante

6 Aquí huat’n

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7 Armadillo heikman

8 Avestruz gai

9 Barba (pelo) hupelgues

10 Barriga huetetr

11 Bebo chokek

12 Boca huepetk

13 Brazo aschcap

14 Bueno attke

15 Cabeza agehe, aguehe

16 Tu cabeza agehelga

17 Calor getsé, getsè b

18 Canilla ayaúgùs

19 Cara apk

20 Mi cara huipk

21 Carne pichua

22 Cinco tanke

23 Comer guelmepenke, gelmeken’ke

24 Como chokeknek

25 Corazón tsaju

26 Cuatro mal-l-(e)

27 Cuero lejlùk

28 Dame agua yag’m chalaukía

29 Día amáha

30 Diente ahái

31 Dientes ojaiue

32 Dientes (mis) huaikia

33 Diez zamatske

34 Dormir (yo), duermo chukuplauke

35 Dos pech

36 Esta casa es mía huasa-ahuay-kia

37 Estrella t’se’selk

38 Fuego aguakek

39 Guanaco pechua

40 Hablo chujesealk

41 Hembra ayehesiluche

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42 Hermana ugupatzum

43 Hermana (tuya?) uguepatsum

44 Hermano ukkūne

45 Hermano (mío) ukenkia

46 Hija (mia) zegankia

47 Hijo agatrki

48 Hijo (mio) agatschkia

49 Hombre kenna

50 Hombre pastrey

51 Invierno mágguin, magguinc

52 Lejos yekke, yekkéd

53 Laguna ek’ken

54 Lengua aónak, aunùk

55 Lengua (mía) aunùkya

56 León haina

57 Luna appioj, apiujek

58 Luna york

59 Llanura chalach

60 Lluvia zenána

61 Macho kamaia

62 Madre mía, mi madree mamakia

63 Mano aágallk, aagallkf

64 Más mejor kette-sasseg, kette attke

65 Matar chauban

66 Mia kia (subfijo), yah

67 Mocetón pastrai

68 Muchacho agatr

69 Muera (yo) chajkam

70 Mujer yamkank, yamkanke

71 Mujer mía yamkankia

72 Mujer tuya yamkankilgá

73 Narices (mis/mía) huinetr

74 Nieva yahau

75 No kanéu

76 Noche trùmu, tchemen

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77 Nueve tchiiba

78 Ocho porsa

79 Ojos atetk

80 Ojos (tus) huitetkelgai

81 Once zamatske-chia

82 Oreja atshke

83 Orejas huitzesk

84 Orines attesk

85 Padre (mi) yaugen-kia, yauguenkia, llauguen-kia

86 Padre (tu) llauguen-elga

87 Padre (su) kosian-guenka

88 Perro dash’a

89 Pié atsk

90 Pié (mi) huetzk

91 Piedra tchiye

92 Pierna attgp

93 Prestar chalau

94 Préstame chalaukia

95 Río arskatch

96 Seis tremman

97 Si a’a

98 Sierra atek

99 Siete katchpitch

100 Sol amáha, ishauauj

101 Suri gai

102 Tierra jiam

103 Tío mio apgézekiá

104 Toldo (casa) ahuay

105 Tres guettrh

106 Tú, tus elga, ilga (subfijo)k

107 Uno chi

108 Uña huepas

109 Veinte petcha-zamaske

110 Venas atchichi

111 Verano ishauaul

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112 Viento eyiyi

113 Vosotros kùman

114 Vulva arski

115 Yo kioua

116 Zorro yeshgai

a. La primera forma aparece en ambos vocabularios (Ms. 9, f. 1; Ms. 10, f. 10) y la segunda sólo en Ms. 10, f. 10. b. El primer lexema aparece en Ms. 9, f. 2 y el segundo en Ms. 10, f. 8. c. El término lleva tilde en el Ms. 9, f. 6 y carece de ella en Ms. 10, f. 12. d. El término lleva tilde sólo en el Ms. 10, f. 10 y carece de ella en Ms. 9, f. 7. e. La primera expresión en Ms. 9, f. 7, y la segunda en Ms. 10, f. 12. f. El término lleva tilde en el Ms. 9, f. 7 y carece de ella en Ms. 10, f. 2. g. El guión intermedio en la primera expresión aparece sólo en el Ms. 10, f. 10; no así en Ms. 9, f. 7. h. La primera forma en el Ms. 9, f. 8; la segunda, en Ms. 10, f. 8. i. Esta forma posesiva sólo se registra en el Ms. 9, f. 9. j. Ambos términos aparecen secuenciados en Ms. 9, f. 11. El primero también en Ms. 10, f. 3 con el mismo sentido; el segundo, en Ms. 10, f. 10 como equivalente de ‘verano’. k. Esta forma posesiva solo se registra en el Ms. 9, f. 11. l. ‘Verano’ como equivalente sólo se registra en el Ms. 10, f. 10.

24 Entre los lexemas que anota Lafone Quevedo se destacan varias expresiones que preconizaba recopilar en las Instrucciones. Registra así denominaciones en günün a iajüch para partes del cuerpo humano, términos de parentesco y expresiones de uso cotidiano, y provee los equivalentes del sustantivo ‘agua’, de verbos (‘dar’, ‘prestar’, ‘beber’ ‘comer’, ‘dormir’, ‘matar’) y de otras categorías gramaticales (‘sí’, ‘no’, ‘allí’, ‘aquí’), junto con pronombres personales y posesivos aplicados a los elementos corporales. Se destaca además en la nómina presentada que una cuarta parte de los lexemas de los que solicita equivalencia (‘agua’, ‘barba’, ‘boca’, ‘cabeza’, ‘dientes’, ‘estrella’, ‘fuego’, ‘hombre’, ‘yo’, ‘lengua’, ‘luna’, ‘mano’, ‘narices’, ‘ojos’, ‘oreja’, ‘pie’, ‘pierna’, ‘río’, ‘tierra’, ‘sol’, ‘vosotros’) también se presenta en el cuadro comparativo en el que contrasta ejemplos de lenguas del Chaco a fin de clasificar, como mencionamos antes, los agrupamientos lingüísticos sudamericanos (Lafone Quevedo 1912). Por último, en sintonía con un campo conceptual generalmente recopilado en las documentaciones coloniales de la época, registra los numerales del uno al diez y el veinte. Todo ello constituye un claro indicador de que Lafone Quevedo recoge las expresiones en günün a iajüch de acuerdo con una sistematización que no aleatoria sino con base en un instrumento ordenado alfabéticamente y previamente estandarizado.

25 Aun cuando se trate de una lista corta, adecuada a una situación de elicitación temporalmente acotada, queda en evidencia que la bibliografía anterior –que expondremos en el apartado siguiente– constituye la guía para este listado, en tanto Lafone Quevedo intentaba chequear con su registro muchos lexemas anteriormente documentados. En cuanto al registro naturalista, en la nómina que reconstruimos se observa que anota nombres de la fauna patagónica como ‘armadillo’, ‘avestruz’, ‘guanaco’; elementos naturales de la región, como ‘montaña’, ‘llanura’, ‘sierra’, ‘nieve’ y ‘viento’; además de referentes culturales, como ‘toldo’ y ‘cuero’. Entre las

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denominaciones corporales, incorpora los términos arski ‘vulva’ y attesk ‘orines’, no atestados en otros registros previos de la lengua. Por último, también enuncia algunas expresiones emergentes del marco conversacional informal, como por ejemplo: ‘cómo anda’, ‘más mejor’, ‘dame agua’ y ‘préstame’, integrando en estas últimas las referencias pronominales que buscaba relevar.

Los vocabularios comparados

26 Tiempo después, Lafone Quevedo decidió volcar en otro instrumento los datos recolectados en esta instancia en el MDLP, junto con otros registros sobre el günün a iajüch de los que disponía. De este modo compiló 339 entradas alfabéticas en los dos manuscritos que arriba presentamos –lo que no implica ese mismo número de palabras, ya que en varios casos se recogen diversos registros de un mismo término.

Fig. 4 – Estrategia de cotejo (archivo histórico del Museo de La Plata, Buenos Aires, Fondo Lafone Quevedo, Carpeta 42, Ms. 9, f. 1).

27 Desde las primeras menciones de la lengua hechas por los jesuitas en el siglo XVIII en adelante, la documentación sobre el günün a iajüch presentó relevamientos fragmentarios, que el mundo académico recuperó sistemática y recursivamente (Orden 2017). Lafone Quevedo cita en la portada de ambos textos, bajo el título “Clave”, las fuentes léxicas que consideró para la elaboración de sus dos vocabularios integrados: Thomas Falkner (1774), Alcide d’Orbigny (1839), Guillermo Cox (1863), Domenico Milanesio (1898), y los apuntes entonces inéditos de Francisco Moreno14, además de su propia muestra. La referencia a las fuentes consultadas nos permite datar su cotejo como posterior a la publicación, en 1898, del texto de Milanesio en Buenos Aires. Además, cuando en abril de 1898 Lafone Quevedo presentó su trabajo “La raza pampeana y la raza guaraní” en el Congreso Científico Latinoamericano, informaba

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haberse basado en los datos de d’Orbigny, Cox, Moreno y sus propios apuntes (Lafone Quevedo 1900, p. 107), sin mencionar aún la recopilación efectuada por el salesiano.

28 De Cox y Milanesio copió toda la nómina de lexemas (65 en el caso de Cox y 64 en Milanesio, además en este último caso, de los numerales), mientras que de Moreno sólo transcribió tres pronombres (tú, él, nosotros), de Falkner cinco nominales (los sustantivos guanaco, agua, sierra y abrevadero y el adjetivo alto) y de d’Orbigny treinta y cuatro términos (básicamente sustantivos, pronombres y algunos verbos) que el viajero francés había publicado15. De este modo, sus propios datos de campo se cotejaron con los de otros cinco registros: algunos temporalmente disímiles (del siglo XVIII y de principios y mediados del siglo XIX) y otros contemporáneos, que habían sido tomados en lugares diversos como Sierra de los Padres, Carmen de Patagones, meseta de Somuncura y precordillera de los Andes16.

29 La preeminencia que asignaba a las recopilaciones de Cox y Milanesio se explica porque estas documentaciones, además de ser cercanas temporalmente, también habían sido anotadas en interacciones con hablantes de procedencia manzanera y norpatagónica, tanto en la región neuquina recorrida por Cox como en las reducciones posteriores a la Campaña del Desierto en donde misionaba Milanesio. Por otro lado, Lafone Quevedo utiliza un grafemario similar al de Cox para registrar sus datos, y marca el acento agudo sobre la u de modo congruente con el salesiano.

30 Para su cotejo, Lafone Quevedo imprimió una estrategia alfabética secuencial al vocabulario comparado. En lugar de plantear una distribución de los lexemas en columnas paralelas, cada una correspondiente a una lengua o a un recopilador, que era el formato más usual en el ámbito nacional, realizó una enunciación consecutiva de las distintas entradas de una misma palabra, que extrapoló de sus fuentes. Este formato paratextual recuerda el utilizado posteriormente por Lehmann-Nitsche en su bien conocida obra acerca de las lenguas chon (1913), aunque el trabajo de Lafone Quevedo se diferencia de éste en tanto no reúne los lexemas por categorías (sustantivos, adjetivos, verbos, etc.) ni por campos semánticos.

Aportes de la recopilación y la sistematización de Lafone Quevedo al conocimiento del günün a iajüch

31 A continuación ofrecemos una descripción de los datos lingüísticos que provee el vocabulario anotado por Lafone Quevedo, así como los comentarios metalingüísticos que incluye, enfatizando su relevancia para los estudios lingüísticos actuales. Observamos, además, en qué medida los mismos están sesgados por los problemas lingüísticos que le interesaban y por los distintos niveles de análisis involucrados en su estudio.

Nivel fonético-fonológico

32 Como mencionamos, el grafemario empleado es congruente con el de Guillermo Cox. Lafone Quevedo incluye en el mismo las vocales a, e, i, o, u y las consonantes b, c, ch, d, g, h, j, k, kk, l, ll, m, n, p, s, t, tz, z. Se preocupa además por mantener coherencia en este plano, y por ello, en comentarios expone la reformulación realizada respecto de la

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transcripción original de la fuente, como por ejemplo: “En D.M. hu=w del original.” (Ms. 10, f. 3).

Sistema fonológico (reconstruido en Orden 2017) Grafemario utilizado por Lafone Quevedo

p- oclusiva bilabial sorda p

t- oclusiva dental sorda t

k- oclusiva velar sorda k

b- oclusiva bilabial sonora b

d- oclusiva dental sonora d

g- oclusiva velar sonora g

tɹ- africada ápico prepalatal sorda tr, thr

tʃ- africada dorso prepalatal sorda ch

ş- fricativa ápico prepalatal sorda s, z

x- fricativa dorso velar sorda h, j, x

Ɂ- oclusiva glotal ’

m- nasal bilabial sonora m

n- nasal dental sonora n

r- vibrante dental sonora r

l- lateral ápico prepalatal sonora l

ł- lateral ápico prepalatal sorda pl

j- semiconsonante palatal sonora y

w- semiconsonante labiovelar sonora hu, o, u, w

i- anterior alta cerrada i

ü- central alta cerrada ù

u- posterior alta cerrada u

e- media anterior e

a- central baja abierta a

Fig. 5 – Fonemas de la lengua y grafemas correspondientes en los vocabularios elicitados por Lafone Quevedo (Orden 2017).

33 Para tratar de transcribir fonemas del günün a iajüch inexistentes en castellano, recurre a dos estrategias. Por un lado, ofrece en algunos casos una breve descripción en la que propone un paralelo con los fonemas de lenguas europeas (“La ū es la e francesa” [Ms. 10, f. 13]; “u inglesa como en tuck” [Ms. 10, f. 11]; “rs = x catalana” [Ms. 9, f. 9]), y en otros, recurre al mapudungun para marcar la similitud fónica (“La Tr o Thr es más o menos la Th del Araucano” [Ms. 10, f. 12]).

34 Por otro lado, como anticipamos, en la versión Guenaken-castellano, proporciona algunos comentarios metalingüísticos en los que efectúa observaciones articulatorias

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acerca de fonos que presentan procesos de aspiración –“la J es una aspiración que suple la H cuando esta debe sonar” (Ms. 10, f. 9); “la X es más bien como la S gruesa, como en Catalán. Como H ver Haina” (Ms. 10, f. 13)– y glotalización –“La K es una C dura o Qu ante E o I. En realidad, son una sola letra” (Ms. 10, f. 10). Además, refleja los procesos de glotalización en la oclusiva velar al interior de palabra, representándolos gráficamente con la duplicación del grafema (3) y el uso de una comilla simple (4):

(3) Lejos yekke

Invierno mágguin

(4) Laguna ek’ken

Estrella t’se’selk

35 También ofrece un ejemplo de geminación de la palatal en interior de palabra, representada a través de la separación de /l/ mediante guiones: ma-l-l-e ‘cuatro’. Esta diferenciación aporta al reconocimiento de un proceso de palatalización en marcha en el sistema del günün a iajüch, principalmente visible para la posición final de palabra como cuando transcribe, por ejemplo, aágallk: ‘mano’.

36 En cuanto a las vocales, en frases sencillas y en ciertos lexemas también hay pistas fonéticas sobre su elisión o brevedad (principalmente de la central alta cerrada /ü/) en el contexto de palabras (5) y frases (6):

(5) Aquí huat’n

watün

‘aquí’

(6) Dame agua yag’m chalaukia

yagüp mü-cha-taw-kjaa

agua MI.2.SG-A-dar-1.SGb

‘agua dame’

a. La base verbal dar se registra en las fuentes con dos variantes: tau y lau; en las glosas lingüísticas utilizamos la primera forma. b. Empleamos las siguientes abreviaturas gramaticales: ASP: aspectual; FUNC: funcional; FUT: futuro; INTERR: interrogativo; POS.AL: posesivo alienable; POS.INAL: posesivo inalienable; PTE: presente; MI: modo imperativo; MR: modo realis; SG: singular; 1, 2, 3: primera, segunda y tercera persona. En los ejemplos con glosas, mantenemos en la primera línea la grafía de los recopiladores según el texto de Lafone Quevedo; en la segunda, efectuamos nuestra propia transcripción fonológica y en la tercera, la segmentación gramatical. En la cuarta línea ofrecemos nuestra traducción al español.

37 A nivel suprasegmental, el autor emplea dos tipos de tildes: el acento agudo (`) y el grave (´). En las fuentes por él consultadas solo es posible observar un patrón de marca suprasegmental en Milanesio, aunque el religioso sólo marca el acento agudo, como en el francés; mientras que Lafone Quevedo amplía las posibilidades. Utiliza así claramente el acento grave para marcar la tonicidad del lexema en su función culminativa (7), o bien una función demarcativa, entre nominales y sufijos (8):

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(7) Sol amáha

Lluvia zenána

No kanéu

(8) Tío (mío) apgéze-kiá

apgüşü-kjá

tío-POS.AL.1.SG

‘mi tío’

Mujer tuya yamkankilgá

yamkank-ilga

mujer-POS.AL.2.SG

‘tu mujer’

38 Las ocurrencias del acento agudo no pueden especificarse con igual precisión, aunque puede hipotetizarse que es una de las marcas para la vocal central alta cerrada /ü/ (9). En ocasiones ambos tipos de tilde coinciden o se usan alternativamente en una misma palabra (10):

(9) Vosotros kùman

Noche trùmu

(10) Canilla ayaúgùs

Calor getsé, getsè

39 En síntesis, Lafone Quevedo emplea algunos recursos grafémicos que intentan reflejar intuitivamente lo escuchado de su consultante. En especial, las distinciones suprasegmentales que establece son importantes para los estudios que abordan actualmente la descripción del sistema, en tanto se trata de una de las pocas fuentes que registran este nivel de análisis.

Nivel gramatical

40 Lafone Quevedo (1900, p. 123) describe acertadamente el günün a iajüch como “una lengua subfijadora de partículas de relación personal”. A partir de expresiones referidas a partes del cuerpo y relaciones de parentesco, coteja, como dijimos, diferentes formas para delimitar los sufijos posesivos y de persona anexados a las bases léxicas, intuyendo tal vez la existencia de posesión inherente en el günün a iajüch. Como se observa en los ejemplos que expone en su artículo de 1900, se pregunta si “ue” (que representa el morfema de posesión inalienable para la primera persona del singular w-) debería coocurrir en los lexemas “cabeza” y “tu cabeza”, tomados de su propio vocabulario:

(11) Cabeza ageheue?

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Tu cabeza agehelgaue? (Lafone Quevedo 1900, p. 107)

41 También segmenta los sufijos posesivos en los términos de parentesco, de modo de reponer las distintas opciones morfológicas:

(12) Padre mío yaugen-kia o yauguenkia

Padre (mi) llauguen-kia

Padre (tu) llauguen-elga

Padre (su) kosian-guenka (Ms. 9, f. 10)

(13) yamkankiá mi mujer

yamkamkilgá tu mujer (Ms. 10, f. 8; ver Fig. 2)

42 En pos de este reconocimiento de los morfemas posesivos, segmenta los ítems recopilados en otras fuentes como lexemas en expresiones más complejas. Esto se observa en varios términos de Milanesio y de Cox, que Lafone Quevedo interviene separando la marca de posesivo “y” – ya-, y otorgando una correspondencia de persona:

(14) Lengua (mi!) D.M. y-ahun

Mi cabeza C. y-agueje

43 Intenta además deducir de modo explícito los sentidos y funciones de prefijos y sufijos que refieren a las personas, en comentarios como los siguientes: “Ja- ver- Kia parece ser ‘yo’” (Ms. 10, f. 7); “(Parece que K sea prefijo común a las tres personas lo que dejaría libre el Ja de 1ra persona. Ver kian y kmao)” (Ms. 10, f. 10). Es decir que, aunque sin explayarse ni indicar su función, devela que la forma k- se añade a la marca de primera persona. Su propuesta de segmentación coincide con los análisis lingüísticos actuales de este morfema. Tal como se postula en Orden (2017), k- corresponde a un marcador de animacidad que compone tanto formas libres de pronombres personales como sufijos posesivos de alienabilidad; así, estos se segmentan: k-w-a (animacidad-1 persona- singular) y -k-j-a (animacidad-1 persona- singular). Por otro lado, en secuencias como la siguiente puede notarse que el autor detecta la existencia de otros afijos que intervienen en las expresiones posesivas, apelando a pares comparativos:

(15) Diente L.Q. Ahai

Dientes C. Ojaiye

L.Q. Ojaiue

Dientes (mis) L.Q. Huaikia

44 En las tres formas documentadas por Lafone Quevedo se observan variaciones en la prefijación: el primer ejemplo corresponde a una forma genérica, mientras que los otros tres ponen de manifiesto el prefijo inalienable de primera persona w-. En el último término, se observa una doble afijación posesiva, que suele registrarse en

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fuentes del siglo XX: w- (ha)i-kja; primero el prefijo de posesión inalienable, y luego el sufijo de posesión alienable. En Orden (2017) hemos explicado cómo la distinción obligatoria alienable/inalienable comenzó a atravesar un proceso de cambio, principalmente en relación con los términos referidos a partes del cuerpo y parentesco. Por ejemplo, en los registros posteriores tomados por Lehmann-Nitsche en 1915-1916 se observa una notable alternancia y múltiples posibilidades de afijación de los posesivos:

(16) w-kual

w-kwal

POS.INAL.1.SG - pescuezo

w-kuál-kia

w-kwal-kja

POS.INAL.1.SG- pescuezo- POS. AL.1.SG

w-kual-kia kūa

w-kwal-kja kwa

POS.INAL.1.SG. - pescuezo-POS.AL.1.SG. 1.SG

‘mi pescuezo’ (Malvestitti y Orden 2014, p. 53)

45 En cuanto al registro del sufijo -lga para referir a la posesión de segunda persona singular, no se evidencia en las fuentes consultadas por Lafone Quevedo aunque sí en su propio registro. También se reconoce en la documentación de campo de su colega, quien aclara que esa forma sólo corresponde al singular. Esta coincidencia de ambos relevamientos, que no se relacionaron y que fueron realizados en distintos momentos y circunstancias, nos permite confirmar la existencia de otra forma sufijada para la segunda persona del singular que alterna con el posesivo alienable de segunda persona -kma. Suponemos que posiblemente se vincule con restricciones de tratamiento (como vos/usted del castellano), o bien a su integración en una variedad dialectal denominada “manzanera”, propia del contrafuerte cordillerano, con cuyos hablantes se relacionaron ambos investigadores. Respecto de la categoría de número, también se observa una búsqueda contrastiva a fin de establecer los morfemas que denotan pluralidad en la lengua. En este sentido, el autor coloca pares para constatar la existencia de marcación morfológica:

(17) Oreja atshke

Orejas huitzesk

(18) Pié atsk

Pié huetzk

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46 En este caso, si bien no reconoce entre su transcripción o sus comentarios la existencia de una marca plural17, su corpus nos permite evidenciar el morfema -sk que constituye, según nuestra hipótesis (Orden 2017), un marcador plural de par simétrico.

47 En cuanto a la marcación de género, también el vocabulario de Lafone Quevedo realiza un gran aporte, ya que registró el par léxico ayehesiluch ‘hembra’/kamaia ‘macho’, documentado en el siglo XX por Lehmann-Nitsche (Malvestitti y Orden 2014), Tomás Harrington (s. f.) y Rodolfo Casamiquela (1983), como yewülnüch ‘yegua’/ kümayü ‘macho’. En cuanto a la distinción gramatical, solo encontramos en su listado un término que contiene el sufijo -chum, que es el marcador para femenino en humanos, animales y seres mitológicos:

(19) Hermana ugupatzum

Hermana (tuya?) uguepatsum

48 En relación con la frase verbal, el autor recolecta ejemplos con bases que presentan flexión de primera persona. De este modo, su corpus es similar al relevado por Cox, quien sólo atestigua esa persona gramatical. A diferencia de éste, por medio de la segmentación de los prefijos y en las glosas al castellano, Lafone Quevedo identifica que no se trata de un infinitivo sino de un verbo conjugado. Podemos apreciar así una serie de verbos activos en los que el autor destaca el uso de la primera persona, en tiempo presente con el prefijo kücha- (la elisión de la primera sílaba kü en los ejemplos se debe a fenómenos articulatorios):

(20) Muero (yo): chajkam

(kü)cha-xkam

MR.PTE.1.SG-MORIR

‘muero’

(21) Matar: chauban

(kü)cha-uban

MR.PTE.1.SG-matar

‘mato’

(22) Yo bebo: chokek

(kü)cha-gü-ka

MR.PTE.1.SG-beber-ASP

´bebo’

a. La base verbal ‘beber’ es registrada en las fuentes con alternancia de sonoridad en el fono velar: gü y kü.

49 Asimismo, en otros ejemplos, se atestigua la categoría de tiempo con marca morfológica de futuro, en el uso del prefijo chükü- para la primera persona:

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(23) Duermo: chukuplauke

chükü-płau-kü

MR.FUT.1.SG-dormir-VM

‘dormiré’

(24) Como: chokeknek

chükü-knü-k

MR.FUT.1.SG-comer-ASP

‘comeré’

(25) Hablo: chujesealk

chü(kü)-jüchü-ak

MR.FUT.1.SG-hablar-ASP

‘hablaré’

50 En cambio, solamente hay tres frases verbales que refieren a la segunda persona del singular, en las modalidades imperativa (26) –ver también ejemplo (4)– e interrogativa (27).

(26) Préstame: chalaukia

(mü)-cha-law-kja

MI.2.SG-A-dar-1.SG

‘préstame’a

(27) ¿Cómo anda?: keshmenpahante

keșe mü-npahn

INTERR MI.2.SG-estar

‘¿cómo anda?’

a. Los marcadores de O (objeto) en verbos transitivos comportan el mismo paradigma de morfemas que se aplica para la posesión alienable.

51 Estas últimas cláusulas ofrecen ejemplos del ordenamiento de constituyentes en oraciones simples: (26) (OD)-V-OI y (27) INTERR-V. Además, la frase (28) confirma el orden canónico de los elementos en oraciones ecuativas:

(28) Esta casa es mía: huasa-ahuai-kia

waşe ahwai-kja

este casa-POS.AL.1.SG

‘ésta mi casa’

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52 Por otro lado, junto con la reproducción de las expresiones a’a ‘sí’ y kette sasse- kette attke ‘más mejor’, algunas cláusulas reflejan emisiones con usos pragmáticos propios de la interacción de la conversación cotidiana. Destacamos que el adverbio katük (transcripto kette por Lafone Quevedo) sólo será registrado casi un siglo después por Casamiquela (1983, p. 143). En nuestro análisis,

(29) Kette sasse

katük şaşe

más ese

‘más ese’

Kette attke

katük hatkü

más bueno

‘más bueno’

53 En síntesis, y aun en su brevedad, el vocabulario que Lafone Quevedo compiló hace importantes contribuciones al conocimiento de la lengua, ratificando, por un lado, lo que se conoce actualmente a partir de otras fuentes, por otro, ampliando con nuevos elementos el análisis del sistema tanto en el plano morfológico como en el léxico, el sintáctico y el fonético-fonológico.

Conclusiones

54 A modo de cierre, destacamos la relevancia para los estudios historiográfico- lingüísticos de la recuperación de este manuscrito y el análisis de los criterios y procedimientos de producción utilizados por Lafone Quevedo.

55 En cuanto al documento presentado, solo se conocían tres palabras que el propio Lafone Quevedo había publicado (las equivalencias de ‘agua’, ‘cabeza’, ‘padre’) y la declinación de la posesión en las tres personas del singular en los dos últimos sustantivos (1900, p. 107). Su vocabulario incrementa notoriamente el corpus de expresiones existentes en la época, considerándose además que entre su recopilación y la inmediatamente subsiguiente, desarrollada por Lehmann-Nitsche, transcurrieron veinte años.

56 Como hemos analizado, junto con la transcripción de los datos el autor efectúa algunas hipótesis (de manera intuitiva y como notas al margen de los lexemas y frases) que han sido corroboradas por estudios posteriores sobre esta lengua indígena. Percibe categorías, segmenta morfemas y algunos valores fonéticos y suprasegmentales además de registrar elementos que no se habían recopilado en las otras fuentes existentes hasta entonces, como por ejemplo el posesivo alienable -ilga, la estructura comparativa katük y un equivalente para ‘luna’: york sólo documentado en su vocabulario.

57 Fue además este filólogo, mucho antes que Lehmann-Nitsche (1913), quien enfocó el problema del agrupamiento de las lenguas patagónicas, intentando fundamentar su perspectiva mediante el acopio y el análisis de datos originales. También aportó a la

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consolidación de una metodología de contraste léxico aplicada a estas lenguas, en la cual las expresiones se ordenan con indicación del recopilador de cada entrada en un formato muy similar al que utilizarían posteriormente otros especialistas en el país. Cabe destacar en Lafone Quevedo, también, una propuesta de comparación de alcance más amplio, que no sólo se aplicó al trabajo en gabinete sino que también modeló la documentación realizada en el campo.

58 El análisis propuesto permitió reconstruir las prácticas, objetivos e instrumentalidades empleadas por quien fuera considerado un reconocido exponente del americanismo decimonónico en el Cono Sur. Desde nuestro punto de vista, el examen de las producciones y reflexiones de Lafone Quevedo acerca del günün a iajüch permite clarificar mejor sus hipótesis en relación con las lenguas de esta región del continente, así como los mecanismos específicos que diseñó para confirmarlas. En otro plano, la investigación contribuye a reponer las tramas de relaciones y los focos de investigación del mundo académico local, en el marco de los debates de la comunidad científica internacional acerca del “hombre americano”. En este sentido, el argumento lingüístico adoptado por Lafone Quevedo y sustentado no sólo por datos históricos, sino contemporáneos, le permitió desplegar razonamientos que guiaban el análisis hacia problemas situados en un amplio campo de intereses de estudio con proyecciones sudamericanas. Esto posiciona a Lafone Quevedo como uno de los pioneros de la lingüística argentina, en gran parte desarrollada a partir del abordaje de las diversas lenguas originarias.

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NOTAS

1. Nuestra investigación se enmarca en el marco del proyecto PICT 2015-1507 “Tecnologías de papel. Patrones para la documentación y comunicación científica en los estudios de lenguas indígenas de Patagonia y Tierra del Fuego (1860-1930)”, financiado por la Agencia Nacional de Promoción Científica y Tecnológica y radicado entre 2017-2020 en la Universidad Nacional de Río Negro. 2. En fuentes posteriores también se registran “tehuelche septentrional” y “gününa yajich” (ISO 639-3 pue). Günün a iajüch significa “Lengua de la gente”; la marca de

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dependencia entre ‘gente’ y ‘lengua’ se señala gramaticalmente mediante el funcional ‘a’. 3. Este manuscrito fue identificado por Máximo Farro en 2014, en el curso de la catalogación del Fondo Lafone Quevedo en el archivo del Museo de La Plata. Le agradecemos nos lo haya facilitado para su análisis y publicación. 4. Indica por ejemplo en 1892: “¿Qué falta pues, para llenar el catálogo de las lenguas típicas de nuestro continente? El patagón, el fueguino, los idiomas de la Banda Oriental […], y el mismo estudio que se está haciendo facilitará su clasificación” (Lafone Quevedo 1892a, p. 1). En los años siguientes expone el anhelo de que “antes que se cierre el siglo XIX […] tengamos en letra de molde todo lo concerniente a Puelches, Tehuelches y Fueguinos” (1898d, p. vi) y que el filólogo alemán Rodolfo Lenz, radicado en Chile, ampliara sus estudios sobre mapuzugun para ofrecer “algunos datos sobre los Puelches, muy particularmente los pronombres y articulaciones de relación personal para nombres y verbos” (Lafone Quevedo 1895, p. 3). 5. En este sentido, en el marco del análisis de las lenguas nativas americanas se distinguieron distintos agrupamientos lingüísticos basados en criterios morfológicos. Por un lado, las lenguas que tendían a la “incorporación” –según los desarrollos teóricos de von Humboldt y Steinthal, entre otros– y, por el otro, aquellas que recurrían a la “polisíntesis”, hipótesis principalmente propuesta por Du Ponceau (véase al respecto una síntesis en Brinton 1886). Este tipo de análisis no se limitaba a la clasificación de las gramáticas sino que se vinculaba con lo que define Gunn (2015, p. 18-19) como “filología de las razas”: “a loose set of theoretical propositions and analytical practices for the comparison of Indian vocabularies and grammars that was informed by the methods of comparative anatomy and touted by its proponents as a scholarly method that promised unprecedented insight into questions concerning Native American origins and the phenomenon of human diversity more broadly”. 6. Por ejemplo, en expresiones como “yo te quiero”, “yo lo quiero”, “él os quiere”, y también en otros verbos: “se puede hacer con dar y castigar, lo que se ha hecho con el verbo querer” (Lafone Quevedo 1892b, p. 408). 7. El Manuscrito 9 está escrito con tinta negra hasta la letra LL y, a partir de la M, con azul, aunque se encuentran inserciones de contraste con otras fuentes en color azul en las letras D, I y L, así como en tinta negra en la M y T. 8. Recordemos que Lafone Quevedo realizó la traducción al castellano y la edición crítica de esta obra, publicada en la Argentina en 1911 (Falkner 1911). 9. NDR: Todas las referencias Ms. 9 y Ms. 10 corresponden a los dos cuadernillos del manuscrito de Lafone Quevedo 1898: Ms. 9 para Lafone Quevedo 1898a y Ms. 10 para Lafone Quevedo 1898b. 10. “Estoy tomando un vocabulario muy completo y me esfuerzo en conseguir las construcciones gramaticales. […] La novedad para todos nosotros es el hecho que, ‘gente’ se dice ‘künü’… El dialecto que estoy apuntando coincide muy bien con el dialecto II de Hale” (Lehmann-Nitsche 1915); “Los tehuelches de F. [Falkner] son nuestros Puelche-Pampa!!!” (Lehmann-Nitsche 1916). 11. La imagen también fue reproducida por Vignati (1942, lámina XXVIII) con el epígrafe “manzanero araucano”. Para un análisis de las colecciones fotográficas a fines del siglo XIX en el Museo de La Plata véase Farro (2012).

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12. La publicación completa de ambos manuscritos se encuentra actualmente en preparación a cargo de las autoras de este artículo. 13. Mantenemos en la transcripción los grafemas y diacríticos propuestos por el autor; nuestra única intervención consistió en reubicar en orden alfabético algunos pocos lexemas respecto del original y consignar el orden numérico aquí expuesto. Colocamos entre paréntesis las fojas correspondientes de los lexemas en los dos vocabularios. 14. Durante su viaje a Norpatagonia en 1873, Moreno (1876) reporta haber interactuado con distintas personas hablantes de günün a iajüch y haber confeccionado un vocabulario. Del mismo sólo se conservan actualmente dos páginas manuscritas en el Museo Mitre de Buenos Aires, publicadas en 1909, como indicamos antes, en el Catálogo razonado… de ese autor. 15. Lafone Quevedo accedió a los materiales lingüísticos del cuadro publicado en el Tomo IV de Voyage dans l’Amérique méridionale (Orbigny 1839, p. 80). La documentación completa de d’Orbigny fue publicada recién en 1902 por Raoul de La Grasserie. 16. En cambio, no hay indicios de que el autor haya consultado el vocabulario y fraseario anotado por el filólogo estadounidense Horatio Hale en 1839 en Carmen de Patagones (Hale 1846), con el que contaron tanto Mitre como Lehmann-Nitsche. Tampoco informa haber dispuesto del material de Carlos Ameghino, quien entre 1887 y 1902 realizó quince viajes a la Patagonia como colaborador de su hermano Florentino (Vizcaino 2011), contexto en el que se indica que recopiló un vocabulario actualmente inhallable. 17. Nótese que, en el ejemplo que reproducimos como (18), Lafone Quevedo utiliza el singular en el equivalente en castellano en lugar del transparente ‘pies’ para referirse al par.

RESÚMENES

En el último tercio del siglo XIX, en pleno auge de la descripción de los grupos indígenas de Latinoamérica, Samuel A. Lafone Quevedo (1835-1920) comenzó su labor de recolección y descripción lingüísticas. Preocupado por la configuración de un mapa étnico americano, estableció patrones léxico-gramaticales que permitieran reconocer vínculos genéticos o procesos de difusión. En esa búsqueda se entrevistó en el Museo de La Plata con un hablante de günün a iajüch (entonces conocida como guenaken o puelche), con quien elicitó un vocabulario que consta de 116 entradas y permaneció inédito entre sus papeles de trabajo. En este artículo ofrecemos acceso a la fuente, que amplía los registros existentes sobre este idioma, y explicamos cómo la documentación del filólogo se realizó con un patrón estandarizado en diálogo con la bibliografía previa y con fines contrastivos con otras lenguas patagónicas.

Au cours du dernier tiers du XIXe siècle, en plein boom de la description des ethnies indigènes d’Amérique latine, Samuel A. Lafone Quevedo (1835-1920) s’engagea dans un travail de récolte et de description linguistique. Tentant de dresser une carte ethnique de l’Amérique, il recherchait des régularités lexico-grammaticales qui permettraient de reconnaître des liens génétiques ou des processus de diffusion. C’est dans cette optique qu’il enquêta au musée de La Plata avec un

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locuteur du günün a iajüch (alors connu sous les noms de guenaken ou de puelche), avec qui il élicita un vocabulaire contenant 116 entrées, resté inédit parmi ses documents de travail. Dans cet article, nous donnons accès à la source, ce qui augmente les données disponibles sur cette langue, et nous expliquons comment la documentation du philologue a été réalisée conformément à un modèle standardisé, en dialogue avec la bibliographie antérieure et afin d’établir des contrastes avec les autres langues de Patagonie.

Towards the end of the nineteenth century, during the boom of the description of indigenous groups in Latin America, Samuel A. Lafone Quevedo (1835-1920) began his work of collection and linguistic description. Concerned about the configuration of a Latin American ethnic map, he established lexical-grammatical patterns in order to detect structural patterns allowing the recognition of genetic links or diffusion processes. During his research at the La Plata Museum, Lafone Quevedo met a speaker of the Günün a iajüch language (also known as Guenaken or Puelche) and elicited with him a wordlist of 116 entries which has remained unpublished until now. In this text we offer access to the source, which expands existing records about this language, and we explain that the philologist’s elicitation was carried out according to a standardized method, supported by the previous bibliography and comparison with other Patagonian languages.

ÍNDICE

Mots-clés: documentation linguistique, Guenaken, musée de La Plata, Lafone Quevedo Palabras claves: documentación lingüística, guenaken, Museo de La Plata, Lafone Quevedo Keywords: Linguistic documentation, Guenaken, La Plata Museum, Lafone Quevedo

AUTORES

MARISA MALVESTITTI

Universidad Nacional de Río Negro

MARÍA EMILIA ORDEN

Universidad Nacional de La Pampa

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Positions

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Acerca de la Declaración sobre el cambio de nombre del conjunto Jívaro

Grégory Deshoullière y Santiago Utitiaj Paati

1 El documento que sigue, titulado Declaración para el cambio de nombre del conjunto lingüístico erróneamente llamado “Jíbaro”, deriva de una serie de resoluciones tomadas entre personalidades shuar y achuar e investigadores nacionales e internacionales en el Congreso “Yápankam. Las voces de la investigación en la Alta Amazonia”, que se desarrolló entre el 19 y el 21 de abril de 2018 en el espacio cubierto del pueblo de Sevilla Don Bosco, en el piedemonte amazónico del . Reuniendo a unos cuarenta panelistas de varias profesiones, el congreso Yápankam proporcionó un espacio público para discutir, entre otros temas, la forma en que grupos sociales investigados y antropólogos investigadores podrían lograr condiciones de igualdad en la producción del conocimiento científico1.

2 Dirigida a “todos los investigadores, colectivos, misioneros y otros académicos del mundo”, la Declaración Yápankam plantea como principio la sustitución del término “jívaro” por “Aénts Chicham”. Desde su primera aparición en los escritos de colonizadores del siglo XVI2, el término “Xíbaro”, que ha conocido un gran número de variantes ortográficas (kivaro, gíbaro, chiwaro, fibaro, zibaro, etc.), se ha difundido por la mayor parte de América Latina y el Caribe donde ha adquirido una variedad de significados asociados con la connotación de salvajismo y ferocidad, ya sea para designar grupos de rebeldes amerindios, o bien campesinos criollos y mestizos en Puerto-Rico3. En las publicaciones actuales, “jívaro” (también escrito “jíbaro” en castellano) se usa para nombrar el continuum dialectal que reúne a las variantes achuar, awajun, shiwiar, shuar y wampis, continuum que manifiesta entre los diferentes grupos mencionados junto a los kandozi- chapra (de idioma Candoa, familia lingüística aislada) una unidad cultural obvia, por lo cual también se usa “jívaro” en antropología para nombrar a este conjunto sociocultural4. Además, en el pasado, “jívaro” ha sido el etnónimo atribuido al único grupo ahora autodenominado “Shuar”5.

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3 Es probable que “jívaro” provenga de una alteración por parte de hispanohablantes de * ʃíwar (shiwar, proto-forma hipotética), que ha evolucionado fonéticamente en shuar (ʃ uár) y shiwiar (ʃíwʲar)6. El derivado “shuar”, generalmente traducido como “pariente” o “persona”, se utiliza primariamente en las variantes achuar, shuar, wampis y shiwiar para designar a las unidades de parentesco ego-centradas; o sea, dependiendo del contexto, para referirse a la familia nuclear, al grupo local, a los parientes bilaterales o eventualmente, por extensión, a las personas del grupo dialectal, mientras que los awajun usan más “pataag”7. En cambio, el término “shiwiar”/“shiwág” se refiere primariamente, en el caso de los awajun y los achuar8 (pues casi ha caído en el olvido entre los shuar y wampis), a “personas de otro(s) grupo(s)”; lo cual, en contraste con los enemigos internos (llamados “némas”), equivale a “enemigos sin relación de parentesco”. Finalmente, “aénts”, otra palabra importante de la clasificación social que se encuentra en todas las variantes dialectales, se traduce como “persona” o “gente” en un sentido genérico, que puede incluir seres no-humanos de acuerdo con sus cualidades de interlocutores dotados de intencionalidad9. Es la ausencia de un vocablo endógeno para designar a un abstracto conjunto sociocultural y lingüístico lo que llevó a los antropólogos y lingüistas a seguir usando la palabra “jívaro” desde una perspectiva analítica, como es sistemáticamente explicitado con notas de página en todas las publicaciones científicas posteriores a la monografía de Michael J. Harner (1994 [1972])10.

4 Cabe subrayar que en el pasado (y hasta cierto punto hoy todavía), la falta de un término que transcienda las denominaciones que cada grupo local aplica a sí mismo preocupaba principalmente a los observadores, mientras que los nativos se dedicaban más bien a mantener las diferencias intra e inter-tribales y a experimentar con la superposición de filiaciones identitarias distintas y cambiantes. En relación con los desarrollos de la soberanía estatal peruana y ecuatoriana, las décadas de 1960-1970 dieron lugar a la promoción de solidaridades étnicas contrastantes (proceso tanto referido como “tribalización” o “etnicización” del conjunto sociocultural), cediendo a una definición cada vez más unívoca de las identidades, por más que múltiples relaciones familiares unen a los diferentes grupos. Es cierto, también, que en esas mismas décadas las persistentes tensiones entre los gobiernos del Perú y Ecuador no alentaron a esas poblaciones fronterizas a establecer un enfoque común de la etnicidad.

5 Sin embargo, la elección de un término capaz de llevar una perspectiva unitaria –y eventualmente el reemplazo de “jívaro” por otra palabra– no remonta únicamente al congreso Yápankam. Desde la creación de organizaciones federativas, la difusión de la literacidad en la región y la importancia política del discurso etnográfico centrado en la idea de cultura, diversos actores locales han buscado y propuesto alternativas a “jívaro” a la hora de designar al conjunto lingüístico o sociocultural. Entre ellas citamos la propuesta de Miguel Tankamash, primer presidente de la federación shuar FICSH en Ecuador, de reemplazar “jívaro” por “shuar”, y de afirmar así que “los achuar son shuar y los awajun también”11, una aseveración que por un tiempo fue usada en sus obras por el salesiano Alfredo Germani12. Poco después, el padre Luis Bolla escribió sobre un “Pueblo de los Aínts” en sus publicaciones13, oponiéndose explícitamente a la afirmación del presidente de la FICSH, en la cual veía una intención de dominar, a través de la Federación Shuar, a los otros grupos. Los conflictos armados de 1981 y 1995 entre Perú y Ecuador han puesto en primer plano las intenciones políticas que motivan una perspectiva unitaria del conjunto por parte de los actores locales. La cuestión

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nacionalista se volvió una cuestión indígena, con el interés de nombrar la “verdadera identidad étnica” de las poblaciones establecidas en los espacios fronterizos en disputa: del lado peruano, líderes awajun y wampis tendían a usar el término “jívaro” para hablar de una unidad étnica, y así incluir a los “shuar” de Ecuador; mientras que del lado ecuatoriano los líderes shuar tendían a hablar de los awajun y wampis como “shuar” para poder “ecuatorianizarlos”14.

6 Después de los acuerdos de paz, el enfoque en los planes binacionales de desarrollo y la internacionalización de los movimientos indígenas ponen sobre el tapete nuevamente la cuestión de un término común.15 Aunque la mayoría de los temas tratados durante los encuentros binacionales entre líderes achuar, awajun, shuar y wampis se relacionan con el desarrollo económico y con planes de conservación ambiental, se ha avanzado también la hipótesis de una unificación política que trascienda las fronteras estatales en el plano organizativo. Sin embargo, si en Perú el término “jívaro” es usado a veces por organizaciones indígenas para designar al conjunto sociocultural (aunque de forma circunstancial), en Ecuador, debido a sus fuertes connotaciones peyorativas, el término “jívaro” jamás fue oficialmente adoptado como autodenominación tribal, étnica o incluso para referirse a la lengua16. En el contexto de acercamiento entre federaciones en 2003, el antropólogo Shane Greene describe la proposición de un secretario wampis de la Asociación Interétnica de Desarrollo de la Selva Peruana (AIDESEP) de usar “aents” para no ofender a los shuar y achuar del Ecuador, aunque precisó que “no era necesariamente una buena idea debido a su fuerte asociación con la persona individual” 17. En el encuentro binacional de 2004, que tuvo lugar en la ciudad de Sucúa (Ecuador), fue debatida asimismo la expresión “Nación Aents” entre maestros bilingües, con la idea de que fuera un modelo de integración y desarrollo binacional en Latinoamérica18. Sin embargo, esta proposición no tuvo mayor repercusión.

7 Más recientemente, el involucramiento en la producción de trabajos de lingüística y de antropología por parte de estudiosos e investigadores oriundos de esas regiones ha dado lugar al cuestionamiento del uso de “jívaro” así como a proposiciones de una nueva nomenclatura. Así, en los años 2000, el licenciado Santiago Utitiaj Paati propuso “Aénts Chicham”19 luego de una investigación en Ecuador y Perú (“chicham”, término polisémico, aquí usado como “idioma”); y estudiantes awajun han sugerido “Shuar Aents” para el conjunto étnico y “Jutí aentstí chichatâi” (traducido como “idioma de nuestra gente”) para la familia lingüística20, mientras que otros licenciados shuar abogaron por “Chicham”21 (por ejemplo Katan Jua 2011), alternativa que fue recientemente escogida por los lingüistas Simon Overall y Martin Kohlberger en la próxima edición del Handbook of Amazonian languages22. Estas propuestas dieron finalmente lugar a otras iniciativas individuales por parte de investigadores, tal como Maurizio Gnerre, que usa “Aents” en algunas de sus publicaciones23, o “pueblo Chicham”, que aparece en ciertos informes de investigación.

8 En vista de la recurrencia de propuestas cuya lista no es exhaustiva, la Declaración Yápankam surge como un intento colectivo de establecer una nomenclatura común que esté idealmente en adecuación con todos los actores involucrados. No es necesario hacer aquí explicar la fórmula “Aénts chicham”, puesto que la propia Declaración explicita su sentido. Por cierto, no se trata del único sustituto de “jívaro” discutido en el congreso. Entre otros, para el conjunto sociocultural, hubo propuestas de “Shuártikia” (“Nosotros las personas - restringido)”, “Aéntstikia” (“Nosotros las personas - genérico)”, “Tarimiat shuar” (en el que el sentido de “tarimiat” se acerca al

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de “autóctono” incluyendo una cierta idea de autonomía territorial y económica) y “Tarimiat aénts iruntramu”, que puede traducirse como “Organización de las personas (genérico) autóctonas”. A la vez, para el continuum dialectal se propuso “Shuar chicham” e “Iiniu chicham” (“Idioma nuestro”). Entre las personas presentes en la mesa de elaboración de las resoluciones, “Aénts Chicham” tenía la doble ventaja, sobre las otras propuestas, de combinar dos términos cuyo primer sentido es idéntico en todas las variantes dialectales y de no implicar a ningún etnónimo en particular24, a diferencia de “Tarimiat shuar” o “Shuar chicham”, percibidos como problemáticos por suponer eventualmente la prominencia de los shuar del Ecuador por sobre los otros grupos.

9 En todo caso, parece clara la dificultad de elegir un solo término endógeno con el fin de aplicarlo a un concepto de aparición relativamente reciente (el de etnia, nación o conjunto lingüístico y sociocultural), aun cuando lo que abarcan esos términos (shuar y aénts) se refiera usualmente a un sistema de clasificación social egocentrado, en el cual cada término adquiere sentido contextualmente por oposición a aquello de lo cual es implícitamente contrario –algo que tienden a ocultar la tribalización de divisiones dialectales del conjunto sociocultural así como la presente etnicización del mismo.

10 El futuro nos dirá si la denominación “Aénts Chicham” (o en su versión abreviada “Chicham”) prevalecerá para el continuum dialectal, y si los investigadores adoptarán “Aénts” para un conjunto sociocultural, puesto que se trata del término que sugiere la Declaración Yápankam; o si se seguirá más bien la convención implícita entre los amazonistas de usar el nombre de la familia lingüística para referirse al conjunto de sus componentes sociológicos. En los dos casos queda pendiente la integración o no de los kandozi-chapra. Como bien precisó el educador bilingüe Santiago Utitiaj en una charla posterior al congreso, este proceso de renombrar es necesariamente político y, por lo tanto, históricamente contingente: es político porque los hablantes mismos deben tomar una decisión. Pero somos muchos y diferentes; existe un cierto celo también. Aquí [Amazonía ecuatoriana] los mismos que no fueron los primeros en decir “Aénts Chicham” les cuesta valorar un trabajo que otro dijo. Tal vez igual van a decir los otros, ¿no? Además, hay la cuestión que los misioneros cuando llegaron impusieron una autoridad en el tema de la lengua. Después están los lingüistas y antropólogos de todas partes. Tal vez todos esos lo ven cada uno diferente, ¿no? Entonces, sin duda, estamos en un conflicto de poderes.

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ANEXOS

Apéndices Kara atirar chichaman tuakú naari unúkar “Jíbaro” timia yapájiamua

Ekuatur tura Piruán nunkanam ayámach, Kanusan pakarín pujúsar chicham ejéramu,

Mashi nunkanam aénts eákmak aakmau, tuakaru, yuusan enentaimtin nuyá chikich aénts unuímiakaru, jú kara atirma ujáiniaji: Ii, kanáruti, unuímiaruti/umpúmatrauti nuyá tarímiat Shuar nuyá Achuar iruntraruti, tura yajayá aénts unuímiakarujai nuyá mash iruntraru ii nunkén ii pujutairin iis pénker unuímiatainiajai nekaska tuarkar irúnma Yápankam, Ekuarturnumia Uunt Kanusa tserérini ichípsar unuímiattai chichame tama 19, 20 nuyá 21-tin tuntiák nantutin uwí 2018-tin tuárkarmaji. Juka, Sevilla Don Bosco-nam, Muruna Santiaknum, Ekuaturnum irunturarmaji, nui mash tuakar jú chicham kara atírmaji: Nekaska, Achuar (Achual), Awajun (Aguaruna), Shiwiar (Maina Achuar), Shuar (Uuntsuri Shuar) nuyá Wampis (Huambisa), nii chichame nuyá pujutairi aújmatkur anaíyakur imiankaska “jíbaro” turutskesh “jivaro” pénkesha tunashtí tiarmaji. Chicham “Jíbaro-nka” auka apách/wiakach yaúnchu kaúnkar iinia kajék tukúmpramainiak katsékmashim anaítiampra aíniawai, iikia ii chichamenka tura naarinkia juní anaíya pujúchuitji; Nekaska, ju enentai yapájiakur Aénts Chicham tiartai timiaji. Juní asamtai pénkesh atákka “jivaroana o jibaroana chicham tuakma” tunashtí antsuka “chicham tuakma” tunatí, “jivarofonos” tunashtí antsu “chichamofonos” tunatí, nach.;

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Nekas enentai Chicham taman nantujenka chichá-, tamanumia winiawai, nuyá juka “chichakman” tawai, “chichat” jusha nunisketi turá nútiksan “enémarma” nusha nuke ainiawai, nuí “chicham-ka” ii enentaijiaikia chichamketi; enentai aénts tamaka tii uuntaiti, juka “shuar”, “aénts” nuyá “imiátkin” tamaiti, nunká mash irunniuka aénts aíniawai warí chichamanjai aujmatin asar –arak míkiut/maikiua (Brugmansia arborea) juka aéntsuiti; chinki auju (Nyctibius grandis) jusha aíntsank aéntsuiti. Nuní asamtai, tuakma Aénts Chicham-ka aéntsun unuímiatniun tura chichaman unuímiatniunash juna chicharás nekaska chichamka aénts iwiákman iniánkas yajá jeawai tusa jintiawai.

Declaración para el cambio de nombre del conjunto lingüístico erróneamente llamado “Jíbaro”

Desde la orilla del río Upano, cerca de la frontera entre Ecuador y Perú,

A todos los investigadores, colectivos, misioneros y otros académicos del mundo, les comunicamos: Nosotros, líderes, estudiosos y organizaciones de las nacionalidades shuar y achuar, aliados con los científicos e instituciones que investigan en nuestros territorios, fuimos reunidos en el congreso “Yápankam. Las voces de la investigación en la Alta Amazonía Ecuatoriana”, durante los días 19, 20 y 21 de abril 2018, en el Irutkamu Sevilla Don Bosco (cantón Morona, provincia de Morona Santiago, Ecuador). En el congreso Yápankam hemos tomado la siguiente resolución: Que la palabra “jíbaro” o “jivaro” no se utilice más para definir el conjunto lingüístico y cultural que reúne los idiomas achuar (Achual), awajun (Aguaruna), shiwiar (Maina Achuar), shuar (Uuntsuri Shuar) y wampis (Huambisa). “Jíbaro” es un exónimo peyorativo nacido de la confrontación colonial, que nunca hemos utilizado para denominar a nuestros idiomas o identidades colectivas. Que se utilice en su reemplazo el término Aénts Chicham. De esa forma no se dice más “familia lingüística jivaroana o jibaroana” sino “familia lingüística chicham”, “jivarofonos” sino “chichamofonos”, etc. Chicham deriva de la raíz chichá-, “hablar”, y se traduce como “lo hablado”, “palabra”, “discurso” y por ende “idioma”; aénts tiene un sentido amplio, traducido como “persona”, “gente” o “seres”, pero son personas o gente todos los seres capaces de comunicar o ser susceptibles de ser afectados por nuestra comunicación –así, la planta maíkiua (Brugmansia arborea) es aénts; el ave auju (Nyctibius grandis) es aénts. De esta forma, la familia Aénts Chicham plantea al corazón de los lingüistas y antropólogos que la comunicación va más allá de lo humano.

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Declaration for the change of name of the linguistic group wrongly called “Jivaro”

From the bank of the Upano river, at the frontier between Ecuador and Peru

To all researchers, collectives, missionaries and other academics of the world, we communicate: We, leaders, scholars and organizations of the Shuar and Achuar nationalities, allied with the researchers and collectives that are conducting research in our territories, were gathered in the Congress “Yápankam. The voices of the investigation in the Upper Ecuadorian Amazon”, during the 19th, 20th and 21th, April 2018, at the Irutkamu Sevilla Don Bosco (Morona Santiago province, Ecuador). During the Yapánkam congress, we have taken the following resolution: That the word “jíbaro” or “jivaro” must no longer be used to define the linguistic and cultural group that brings together the Achuar (Achual), Awajun (Aguaruna), Shiwiar (Maina Achuar), Shuar (Uuntsuri Shuar) and Wampis (Huambisa) languages. “Jíbaro” is a pejorative exonym born from the colonial confrontations, which we have never used to name our languages nor our collective identities. That the term Aénts Chicham must be used instead. In this way, no more “Jivaroan or Jibaroan linguistic family” but “Chicham linguistic family”, no more “Jivarophone or Jivaro speaking”, but “Chichamphone or Chicham speaking”, etc. Chicham derives from the root chichá-, “to speak”, and is translated as “what is spoken”, “word”, “discourse” and also as “language”; aénts has a broad meaning, translated as “person”, “people” or “beings”, but this term refers to all beings capable of communicating or susceptible to being affected by our communication—the maíkiua plant (Brugmansia arborea) is aénts; the bird auju (Nyctibius grandis) is aénts. Therefore, the Aénts Chicham family resonates deeply in the hearts of linguists and anthropologists to remind them that communication goes beyond the humans.

Primeros firmantes / First signatories / Premiers signataires

Delegación de las nacionalidades Shuar y Achuar: Santiago Utitiaj Paati (Juakmaru Uuntri), Marcelino Chumpi (Juakmaru, Prefecto), Luís Vargas Canelos (Juunt Waimiakau), Miguel Jempékat (Juakmaru), Raquel Antún (Juakmaru), Rafael Mashinkiash (Juakmaru), Teresa Guarderas (Juakmaru), Miguel Vargas (Kanúru), Hernán Pujupat (Juakmaru), Manuel Mashinkiash (Juakmaru), Milton Callera (Kanúru), Kar Atamain (Juakmaru), Isabel Wisum (Kanúru), Domingo Ankuash (Kanáru), Serafín Paati (Juakmaru), Luis Kawarim (Unuíkiartin), Rosa Shacay (Juakmaru), Roberto Mashinkiash (Juakmaru), Marcelo Shakai (Juakmaru), Washington Tiwi (Juakmaru), Manuel Maiche (Kakáram), Mariela Mashinkiash (Juakmaru), Edgar Rogerón (Juakmaru), Jaime Pujupat (Juakmaru), Diana Atamaint (Juakmaru), Marianela Jintiach (Juakmaru), Sonia Yampis (Juakmaru), Claudio Ujukam (Kanúru), Pedro Vargas (Kanúru), Gladys Tsamaraint (Unuikiartin), Etsa Franklin Sharupi (Juakmaru), Gonzalo Nawech (Anaikamu),

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Mercedes Marian (Unuikiartin), Claudio Ujukam (Kanaru), Piedad Wampash (Juakmaru), Adriana Santiak, Raoul Ankuash, Ernesto Jeencham (Waimiakau). Delegación nacional e internacional: Anne-Christine Taylor ‘Anchumir’ (Antropóloga, CNRS), Philippe Descola ‘Yakum’ (Antropólogo, Collège de France), Maurizio Gnerre (Lingüista, Univ. Sapienza), José Juncosa (UPS-Quito), Elke Mader (Antropóloga, Univ. Viena), Grégory Deshoullière ‘Tsentsak’ (Antropólogo, EHESS/LSE), Anne Gaël Bilhaut (Antropóloga, IFEA), Natalia Buitrón Arias ‘Kukuj’ (Antropóloga, LSE), Andrea-Luz Gutierrez-Choquevilca (Antropóloga, EPHE), Ana Meiser (Antropóloga, Univ. Vienna), Carmen Martínez Novo (Antropóloga, Univ. de Kentucky), María Eugenia Tamariz (Antropóloga), Victor Cova ‘Jempe’ (Antropólogo, Univ. Aarhus), Fernando Garcés (Antropólogo, UPS-Quito), Tania Laurini (Lluvia Comunicación), Verenice Benitez (Cámara Shuar), Rosa Elena Yépez (Antropóloga), Luis Corral (Minka Urbana).

Firmantes de apoyo / Signatures de soutien / Signatures of support

Noé Kiyak Pujupat (GAA-PUCP), Liseth Yanua Atamain, Alexandre Surrallés (EHESS París), Simon Overall (Univ. de Otago), Martin Kohlberger (Univ. de Leiden), Connie Dickinson (Univ. Oregon), Paul Codja (EHESS París), Sebastián Vacas-Olea (Univ. de Oxford), Erik Pozo-Buleje ‘Susu’ (GAA-PUCP/EHESS).

NOTAS

1. El congreso fue auspiciado por el Gobierno Autónomo Descentralizado Provincial de Morona Santiago, la Universidad Politécnica Salesiana del Ecuador, el Instituto Francés de Estudios Andinos, la Embajada de Francia en Ecuador y la Comisión de Lengua y Saberes de la Nacionalidad Shuar. Su organización, además, involucró numerosas instituciones locales (municipio de Sevilla Don Bosco, Confederación de Nacionalidades Indígenas de la Amazonia Ecuatoriana-CONFENIAE, Confederación de Nacionalidades Indígenas del Ecuador-CONAIE, Grupo de jóvenes de la comunidad Kuamar, colectivo Lluvia Comunicación, Lanceros digitales, etc.). Puede consultarse el programa del congreso Yápankam en línea: https://yapankam.wordpress.com/. Los autores agradecen el financiamiento del programa de investigación Horizon 2020 de la Unión Europea (acuerdo de subvención n.o 715725). 2. El término “Xívaro” aparece por primera vez en un informe de Hernando de Benavente fechado en Tomebamba el 25 de marzo de 1550. 3. Consultar Taylor (1987). 4. Utilizamos a propósito la expresión de “conjunto sociocultural” en este texto: por insatisfactoria que sea, esta expresión nos parece por el momento menos restrictiva que “nación”, “conjunto étnico” o “área cultural”. 5. También, al parecer, el término “jíbaro” fue utilizado durante un periodo como traducción autóctona del etnónimo local “Shiwiar” por un grupo establecido en el río Corrientes del Perú, que Seymour-Smith llama “jíbaro-shiwiar” en su monografía (1988). Véase Fast (1976, p. 2) y Bolla (2018, p. 39) versus Ribeiro y Wise (1978, p. 134). 6. Ver Kohlberger (en preparación) inspirado por Gnerre (1973). También es interesante notar que, referiéndose al relato de Benavente, Stirling afirma que el

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conquistador español “gave the Jivaros the name which they have since been known; this being the name applied to them by the Paltas” (1938, p. 8). En los trabajos de antropología histórica los “Paltas” aparecen como un grupo de la sierra de Loja y de Piura, emparentado con el continuo lingüístico de los achuar, awajun, shuar, shiwiar y wampis (Taylor 1991). Como bien fue notado por Gnerre (1976), “palta” puede constituir una metátesis de “patal”, forma derivada de “patan”, término utilizado para referirse a unidades ego-centradas de parentesco bilateral. 7. Cabe precisar que el término “ paata-” también existe en las otras variantes dialectales: es común entre los wampis del Perú pero es poco usado entre los shuar del Ecuador, refiriendo generalmente a los hermano(s) o hermana(s) menores y de misma madre y/o padre. 8. También a veces como “shuwiar” entre los achuar. 9. Hemos expuesto aquí una versión muy resumida de las diferentes formas de clasificación del universo social, que no hace justicia a los múltiples niveles de significación de cada término. Para más precisión consultar Brown (1984, p. 70-86), Uriarte (1984), Taylor (1985, p. 162-170), Seymour-Smith (1988, p. 217-220), Mader (1999, p. 301-307), Descola (2005, p. 219-221), Greene (2009, p. 52-59) y Surrallés (2008 y 2009, p. 176-180). 10. El uso de “jívaro” a veces es cuestionado por los antropólogos en las notas de páginas. Así, en una de sus publicaciones, Steve Rubenstein propone explícitamente su abandono: “[…] [achuar, awajun, shiwiar, shuar, wampis] have a different experience of colonialism and consequently a different understanding of its own identity. After over a century of colonialism, it no longer makes sense to collapse these groups into one ‘academic taxonomic ideal’.” (2007, p. 384). Rubenstein desarrolla parte de esta idea en el artículo Colonialism, the Shuar Federation, and the Ecuadorian state (2001), en el cual demuestra el papel de la experiencia colonial en cambiar las “fronteras socio- espaciales”, tomando el caso de la etnogénesis Shuar. 11. La citación se encuentra en Bolla (2003, p. 11). 12. Germani (1977). 13. Bolla y Kantásh Ishtik (1991). 14. Es posible también que, en esa época, dichas consideraciones por parte de esos líderes shuar se fundaran en la afirmación, formulada al principio por Stirling (1938, p. 2) y luego repetida por Steward, Métraux y Harner entre otros, que los shuar de Ecuador son los “jivaro proper”, de los cuales los demás “subgrupos” serían tan solo una versión débil (Taylor 1994, p. 95-97; Greene 2008, p. 243). 15. En diciembre de 1998, luego de la firma de los Acuerdos de paz entre Ecuador y Perú, los líderes se reunieron en San Juan de Morona (Perú) durante el primero de varios “Encuentros Binacionales” (calificado de “Reencuentro familiar” por los involucrados). A partir de ese evento se formó por un tiempo el Consejo de Pueblos Wampis, Awajun y Shuar (COPWASH) con el apoyo del Fondo Indígena promocionado por la Cooperación Alemana – GTZ. En el periodo posguerra, los líderes compartían la apreciación de que los gobiernos nacionales de Perú y Ecuador habían entretenido el belicismo entre las poblaciones fronterizas para sostener intereses estatales y económicos ajenos a los de los pueblos indígenas fronterizos. 16. En Ecuador, nombrar “jíbaro” a la Asociación de Desarrollo Jíbaro del Oriente Ecuatoriano (ADJOE, 1962) fue iniciativa de los misioneros, y la misma luego se

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renombró Asociación Independiente del Pueblo Shuar del Ecuador (AIPSE, 1976); tal como sucedió con la Convención Provincial de Dirigentes Jíbaros, que se ha vuelto la Federación de Centros Shuar (FCS, 1964). 17. Greene (2008, p. 246). 18. Consultar Utitiaj Paati (2019). 19. Ver en Álvarez Palomeque (2002). “Aents Chicham” fue empleado por un tiempo en las publicaciones de la Dirección Nacional de Educación Intercultural Bilingüe (DINEIB) del Ecuador bajo el mandato de Luis Montaluisa. 20. Consultar por ejemplo Taish Maanchi (2001). 21. El cambio a “Chicham” se ha recientemente estabilizado entre los lingüistas que trabajan con estos idiomas (por ejemplo Valeš 2013; Overall 2017; Kohlberger 2018; Peña 2018, 2019). Estos trabajos incluyen una nota breve explicando el cambio de “Jivaro” por “Chicham” con una referencia al texto de Katan Jua (2011). 22. Overall y Kohlberger (en preparación). 23. Por ejemplo Gnerre (2012). 24. Varios líderes y académicos awajun del Perú consideran desde hace tiempo la idea de cambiar oficialmente “awajun” por “aents” (o “Ii aents”, “aentstí”, “Nosotros la gente” o “Tâjîmat âents”), mientras que algunos wampis no descartan adoptar “shuar” como autodenominación (ver, por ejemplo, Peña 2015, p. 22). a. Versión escrita en Shuar chicham.

ÍNDICE

Keywords: ethnicity, ethnonyms, , Ecuador, Peru Mots-clés: ethnicité, ethnonymes, famille linguistique, Équateur, Pérou Palabras claves: Etnicidad, etnónimos, familia lingüística, Ecuador, Perú

AUTORES

GRÉGORY DESHOULLIÈRE

LSE/EHESS/Laboratoire d’anthropologie sociale, París, Francia

SANTIAGO UTITIAJ PAATI

Shuar Juakmaru Uuntri, Shimpis, Logroño, Ecuador

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Hommage à Dominique Buchillet

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In memoriam Dominique Buchillet : un engagement scientifique et politique

Laure Emperaire

Remerciements à Catherine Buchillet, Marie-José Buchillet, Alba Figueroa et Sabrina Milani pour leurs compléments et leurs relectures.

1 C’est par le Brésil que la nouvelle de la disparition de Dominique, le 9 juin 2018, est arrivée. Décédée à Brest, après de nombreuses années passées au Brésil suivies de plusieurs séjours en Asie, sa retraite bretonne a été trop courte pour réaliser son nouveau projet de vie qui mêlait poursuite de ses recherches, publications et écoute de l’océan. Son dernier article paraît quelques mois avant sa disparition.

2 Le parcours universitaire de Dominique s’ancre à Nanterre : un Diplôme d’études universitaires générales en psychologie en 1973, une licence dans la même discipline, puis le master et le doctorat en Ethnologie. Sa trajectoire scientifique dans le haut Rio Negro, en Amazonie brésilienne, a pour point de départ son mémoire de maîtrise intitulé Analyse comparée du chamanisme dans le nord-ouest amazonien, effectué sous la direction de Patrick Menget. Son doctorat, Maladie et mémoire des origines chez les Desana du Uaupés brésilien. Conceptions de la maladie et de la thérapeutique d’une société amazonienne, est dirigé par Henri Lavondès, alors professeur au département d’ethnologie de Paris X. Il est soutenu en 1983. Ses recherches sont alors vivement appuyées par Berta Ribeiro qui travaillait à cette époque aussi dans le haut Rio Negro.

3 Aborder l’univers de la connaissance chamanique, soit un univers masculin, requerrait pour le moins courage et ténacité, qualités qui ne lui firent jamais défaut. Passionnée par ses recherches, elle s’y est totalement investie et a travaillé pendant plus de vingt ans dans le haut Rio Negro, en Amazonie brésilienne. Toujours attachée à comprendre les réajustements et les réinterprétations matérielles et immatérielles qui modèlent les relations interculturelles et à saisir comment les identités se redéfinissent au cours de l’histoire, ses travaux sont devenus une référence pour une jeune génération de chercheurs.

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4 Jamais publié en tant que tel, son doctorat sera le ferment de nombreuses publications. En fin de thèse, en 1982, elle est recrutée à l’Office de la recherche scientifique et technique outre-mer (Orstom), ce qui lui permet de partir en 1984 au Brésil dans le cadre de la coopération bilatérale avec le Conselho Nacional de Desenvolvimento Científico e Tecnológico (CNPq) en tant que chercheure invitée, d’abord au Museu Paraense Emílio Goeldi à Belém puis à l´Institut Socioambiental, à l’université de São Paulo, à São Paulo même et au département d’Anthropologie de l’université de Brasília. C’est à cette période que se forgent amitiés et collaborations au Brésil. Son engagement est total aux côtés des Amérindiens du haut Rio Negro, tant sur le plan scientifique que politique.

5 La presque totalité des grands thèmes de recherche que Dominique abordera et enrichira par la suite sont présents dans sa thèse : l’analyse des conditions de l’efficacité de la cure, la légitimité de la personne qui détient les incantations thérapeutiques et les conditions de transmission de celles-ci (Buchillet 1987a, 1990b, 1992a), les liens entre mythes et maladies (Buchillet 2013 ; Garnelo et Buchillet 2006a), les rapports à l’environnement (Buchillet 1988a) et, en arrière-plan, la colonisation et l’impact des missions salésiennes (Buchillet 2008). Les recherches de Dominique se situent au début d’une période clé de la vie politique brésilienne, celle de l’émergence politique du mouvement amérindien à quelques années de la fin du régime militaire en 1985 et de la promulgation en 1988 de la nouvelle constitution. Elle publie entre 1986 et 2002 de nombreuses notes pour la « Chronique du groupe d’information sur les Amérindiens » du Journal de la Société des américanistes sur des thèmes qui sont toujours, si ce n’est plus que jamais, d’actualité : la politique indigéniste au Brésil (Buchillet 1988b, 1987b, 1994a, 1995a, 1997a, 1998a, 1999a), les luttes des mouvements indigénistes pour la démarcation des terres indigènes (Buchillet 1986a, 1987c, 1993, 1996a), les visées des entreprises minières en zone indigène (Buchillet 1986b), les commémorations des « 500 ans » (Buchillet 2000a). Dominique retrace ainsi, à partir d’une analyse systématique des sources historiques, les stratégies, les politiques et les législations de la colonisation à la nouvelle constitution de 1988 qui enfin « reconnaît [aux Indiens] le droit d’être et de rester Indien » (Buchillet 1997b, p. 88 ; 2002a).

6 Sur place, au Brésil, Dominique renforce ses collaborations avec la Federação das Organizações Indígenas do Rio Negro (Fédération des organisations indigènes du Rio Negro, FOIRN) et l’Instituto Socioambiental (ISA), avec lequel elle développera plusieurs projets de coopération. Dans ce cadre, elle assure l’organisation, la révision, les notes de six des ouvrages de la série Narradores Indígenas (Umusĩ et al. 1995 ; Diakuru, Kisibi et Buchillet 1996, 2006 ; Wright 1999 ; Barbosa et al. 2000 ; Galvão, Galvão et Buchillet 2004, partenariat FOIRN-ISA). Elle poursuit en cela la démarche initiée en 1980 par Berta Ribeiro pour qui les mythes amérindiens devaient être publiés par leurs détenteurs. Elle s’investira dans la lutte pour les droits territoriaux des populations du Rio Negro, avec une expertise anthropologique pour le procureur général de la République (1990-1997), lutte qui, entre autres éléments, sera concrétisée en 1998 par l’homologation de la Terre indigène du haut Rio Negro à la frontière du Venezuela et de la Colombie.

7 Issu d’un colloque réalisé à Belém en 1989, l’ouvrage qu’elle coordonne Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia (Buchillet [dir.] 1991) contribue à renforcer dans le monde académique et surtout parmi les organisations indigènes la visibilité de la question de la santé des populations amérindiennes et de ses interfaces, et

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complémentarités comme elle le défend, avec les systèmes de santé officiels (Buchillet 1991d, 1991b, p. 245). Dans ce même ouvrage, Dominique aborde les représentations indigènes sur l’origine des maladies apportées par les colonisateurs en s’attachant à analyser, dans plusieurs contextes amérindiens, comment la figure du Blanc et celle des objets manufacturés qui lui sont attachés se reconfigurent dans le système thérapeutique indigène (Buchillet 1991c, p. 167). Sa conclusion est un appel aux décideurs pour une vision élargie des conceptions de la santé indigène qui prenne en compte la diversité des contextes socio-culturels, territoriaux, écologiques et économiques des groupes amérindiens, ce qui est aussi mis en évidence par la diversité des contributions de ses collègues aux différentes parties de l’ouvrage (Dominique Gallois, Jean Langdon, Cibele Verani entre autres). Cet ouvrage contribue à divulguer au Brésil le courant de l’anthropologie médicale française selon ses propres termes (Buchillet 1991a).

8 Le contexte politique de cette publication est celui de la construction du nouveau système unique de santé, le SUS, issu de la Constitution de 1988. Les années 1990 sont en effet celles d’une intense réflexion partagée entre divers acteurs pour la démocratisation des services publics. La conceptualisation et l’opérationnalisation d’un système de santé indigène se traduira par la création en 1999 des Distritos sanitários especiais indígenas (DSEI) placés sous la responsabilité de la Fundação Nacional de Saúde (Fondation nationale de santé, Funasa). Dominique prendra appui sur celui du Rio Negro pour insister sur la nécessaire prise en compte du caractère processuel de la culture amérindienne et des ajustements qui en découlent entre acteurs, patients ou personnels de santé (Buchillet 2004a, p. 65).

9 À partir des années 1995, Dominique poursuit ses recherches sur les représentations de maladies infectieuses dites « maladies des Blancs », la variole, la rougeole, la grippe et le paludisme. Elle met en regard caractéristiques épidémiologiques de ces maladies et étiologies selon la perspective desana (Buchillet 1995b, 2002b). À cette même période, la tuberculose devient un sujet de préoccupation croissant dans le haut Rio Negro avec une incidence de cinq à dix fois supérieure à la moyenne nationale (Buchillet et Gazin 1998, en collaboration avec Pierre Gazin, épidémiologiste à l’IRD). À partir du cas de la tuberculose, c’est la question de la vulnérabilité des populations amérindiennes face à l’émergence (ou la réémergence) de nouvelles pathologies qui constituera le thème central de ses réflexions dans un contexte de forts bouleversements socio- culturels marqués par des contacts et migrations accrues vers la ville et des politiques de santé qui ne tiennent toujours pas suffisamment compte des contextes socio- culturels amérindiens (Buchillet 2001a). Ce pan de recherche sur les épidémies, prises aussi dans leur dimension historique, la mènera à reconsidérer l’origine multifactorielle du dépeuplement qui a suivi la colonisation, trop souvent interprété à la seule aune d’une vision biologisante des populations amérindiennes (Buchillet 2003a, 2011, 2016). Son dernier article (Buchillet 2018) retrace l’histoire des épidémies qui ont dévasté la région du Rio Negro au cours des deux derniers siècles.

10 Toujours préoccupée par la portée sociale de ses recherches, Dominique entreprend une colossale Bibliographie critique de la santé indigène au Brésil (3 222 références de 1840 à 2006) publiée en 2007 et disponible en ligne (Buchillet 2007). Puis, marquée par la disparition progressive de ses interlocuteurs desana, elle repart dans les années 2010 vers un projet d’anthropologie historique sur les épidémies en Asie du Sud-Est. Après une formation en médecine chinoise, elle aborde l’émergence et la diffusion des fièvres

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épidémiques en Thaïlande et en Chine du Sud sur la période 1860-1940 ainsi que les modalités de contrôle mises en œuvre. Son projet visait à retracer l’évolution des idées sur les maladies infectieuses telles qu’elles sont transcrites dans les traités de médecine traditionnelle (Buchillet 2010, 2012, 2015 ; Buchillet et Lamballerie 2010b). Dominique, tel qu’elle le consigne sur la page internet où est déposée la plupart de ses publications1, avait pour ambition de mettre en regard les médecines traditionnelles amérindiennes et orientales, en particulier dans leurs interprétations des phénomènes épidémiques. Elle s’est aussi investie dans la formation accompagnant les parcours de nombre d’étudiants en master et en doctorat.

11 Cette guerrière, libre et généreuse, gardait aussi de multiples jardins secrets. Comme l’écrit Aloísio Cabalzar, un de ses collègues proches du Rio Negro, elle a dû rejoindre les grands kumua, les guérisseurs du monde qu’elle admirait tant.

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NOTES

1. Pour une consultation des textes de Dominique Buchillet, voir http:// horizon.documentation.ird.fr et http://www.academia.edu.

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AUTEUR

LAURE EMPERAIRE

Directrice de recherche, IRD

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Two anthropologists recall Dominique Buchillet

Janet Chernela and Jaime Diakara Dessano Dihpotiro

Dominique Buchillet (Janet CHERNELA)

1 Dominique Buchillet, the anthropologist who pioneered medical anthropology in the Upper Rio Negro of Brazil, passed away on June 9, 2018 in Brest, France. She was recognized for her tireless research and publication in the field of indigenous health practices as well as her dedication to the people with whom she worked. In 1975 Buchillet received an undergraduate degree in psychology from the Université Paris X, Nanterre, remaining at the same institution to receive a Master’s Degree in Ethnography in 1978 and a Doctoral Degree in 1983. In 1982 she joined ORSTOM, today known as IRD1. Although the bulk of her career focused on Amazonia, in 2010 her research interests turned to Southeast Asia, where she studied the history of contagious disease in Thailand and South China.

Scholarly production

2 A meticulous researcher and prolific author, Buchillet published widely in French, Portuguese, and English. Her significant publications include: “‘Personne n’est là pour écouter’: les conditions de mise en forme des incantations thérapeutiques chez les Desana du Uaupes brésilien” (Buchillet 1987) and “Sorcery beliefs, transmission of shamanic knowledge, and therapeutic practice of the Desana of the Upper Rio Negro” (Buchillet 2004). She was an active participant in the 1st International Congress of Ethnobiology, held in Belém, Brazil, in 1988, and organized the book, Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia, published by the Museu Goeldi in 1991. In 2007 she compiled the Bibliografia crítica da saúde indígena no Brasil (1944-2006), a comprehensive registry of indigenous health in Brazil, with 3,222 references from scientific proceedings, reports, pamphlets, dissertations, archives, and the internet.

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The work has become a fundamental reference for researchers and practitioners in the anthropology of health.

A new, indigenous, anthropology

3 But Professor Buchillet didn’t limit herself to academic pursuits. She was deeply committed to the rights and well-being of the communities with whom she worked. In 1997, for example, she played a fundamental role in finalizing the process of demarcating indigenous lands in the Upper Rio Negro, Brazil. Indeed, some of Buchillet’s most important contributions may be those that are the least visible—most notably, her encouragement and mentorship of indigenous authors and scholars. Among her most enduring legacies may be the books of Desana and Tariana narratives, written in collaboration with indigenous authors in the series “Coleção Narradores Indígenas do Rio Negro”, published by the Federation of Indigenous Organizations of the Rio Negro (FOIRN) and its partners.2 The series had its origins in 1980 when the Desana authors, Firmiano Lana (Umusi Pãrõkumu) and Luiz Lana (Tõrãmu Kehirí), recorded the mythology of their Desana clan3, the Kehíripõrã. (The contribution by Jaime Diakara, which follows, will further comment on this collection.) Their book, Mitologia dos antigos Desana-Kehíripõrã, was first published in 1980 by Livraria Cultura Editora, and republished in 1995 by the indigenous association, FOIRN, and the NGO, ISA,4 as the inaugural volume in the series. 5 This pioneering new series drew sponsorship from local indigenous associations and was winner of the 2007 Prêmio Cultura. Professor Buchillet was one of the principal organizers and major contributors to the series, editing five of the eight volumes that currently make up the collection. Through this effort, the contributions of Dominique Buchillet have and will continue to influence generations of future indigenous men and women to become documentarians and interpreters of, as she phrased it, a “new, indigenous, ethnology.”

4 Dominique Buchillet’s edited volumes reflect her sojourn in the Uaupés basin, a subregion of the Rio Negro basin that delineates the frontier between Colombia and Brazil. Between 1981 and 2006 she worked with elders in four Desana communities (São João Batista, Rio Umari, Igarapé Urucú, and Igarapé Cucura), to record ritual practices and cosmologies. At the same time, she involved young people at every stage of recording and transcribing. She encouraged them to preserve their language and culture, cautioning that Desana, with fewer than 4,000 speakers, was, according to Unesco criteria, “definitively endangered.”

Remembering Dominique Buchillet

5 I learned about Dominique’s arrival in the Uaupés basin long before I met her. Rumors circulated rapidly along the rivers of the basin in the late 1970s, despite the vastness of the area and the absence of overland transportation or communication technologies. And we, the anthropologists, were a frequent topic of commentary. I had traveled to the area in 1978 with Berta Ribeiro, a senior anthropologist whose many publications were part of the university canon. Her work among the Desana would become another achievement in that corpus. After some months Berta and I parted for separate field sites—mine to the Upper Uaupés among the Kotiria (then known as Wanano), and Berta to the Tiquié and Papurí Rivers to work among the Desana. The two groups spoke different, but related, Eastern Tukanoan languages and considered one another to be

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in-laws. It was by means of the network of rumors that I was first introduced to Dominique Buchillet. Dominique, the villagers remarked, with obvious approval, possessed both strength and stamina. She worked with the women each morning and the elderly men each evening. After storing her hammock at dawn, she trekked to the gardens with the women. She weeded, harvested the heavy manioc tubers, and returned with full basketloads, balancing the heavy weight (some 40 kilos in my experience) by means of a tump-line across her forehead. Afternoons, along with the other women, she peeled, grated, and cooked the tubers. Late afternoons and evenings she worked with elders, painstakingly reviewing and re-reviewing transcriptions and translations. When, at day’s end, she climbed into her hammock, she lay awake, recording fieldnotes by flashlight or firelight.

6 I came to know and admire Dominique over the next twenty years. We shared values and goals. We were deeply committed to indigenous rights. We worked together, with Darrel Posey, Paiakan, and Kubein, in organizing the 1st International Ethnobiology Conference. It was a tense time as the three had been arrested not long prior. We watched as the mission centers of the river basin receded to give way to secular institutions. We watched as the children we knew grew into parents of their own offspring. We watched as a vibrant new generation of native intellectuals arose.

7 Those best positioned to enumerate the lifetime contributions of Dominique Buchillet are those whose lives she impacted most. One of these is the Desana anthropologist and author, Jaime Moura Fernandes (Diakara Dessano Dihpotiro).6 In 1993, when Jaime was 19, Dominique Buchillet was hosted by his family in Cucura Village. Jaime’s older brother, Kissibi (Durvalino Fernandes), had recorded, by hand, the mythology of the Desana Wari Dihputiro Põrã clan, recounted by their shaman father, Diakuru (Américo). Over the next three years, Dominique Buchillet worked with father and son to facilitate the publication of two books. In 1996 the first project came to fruition with the publication of Volume Two of the Narrators series, A mitologia sagrada dos antigos Desana do grupo Wari dihputiro põrã. After ten years this was followed with the 2006 publication of Bueri Kãdiri Marĩriye. Os ensinamentos que não se esquecem. It is the eighth and, at present, final volume in the collection. Jaime followed in Buchillet’s footsteps, entering a graduate program in anthropology and obtaining a Master’s Degree in 2016. I invited Jaime to contribute to this remembrance. Here is what he said:

An anthropologist among the Dihputiro Porã Desana of the Cucura River (Jaime DIAKARA DESSANO DIHPOTIRO)7

8 These words pass on a memory of a history without end, a memory of one who was deeply concerned about the loss of indigenous Desana knowledge, who needed to register it so that it might be read and lived by generation after generation of the Desana clan, the Wari Dihputiro Porã.

9 Cucura River Village is a site named by the Desana Wari Dihputiro Porã clan. Village life there was punctuated by ceremonies whose timing was ordered by the movement of the constellations. In those days, no one worried about recording or writing spoken mythologies. At that time, oral narratives were only heard, lived, and practiced; it was a contextualized form of indigenous education.

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10 With changes to our culture—our civilization, that is—my older brother Kissibi was the one who went to study. When he was a student in the Salesian boarding school he was selected to become a local school teacher. Then, in 1991, he participated in a training program for indigenous teachers to develop a unified orthography for transcribing the Tukano language. It was led by the French linguist, Odile Lescure.

11 The experience in the program inspired my brother to write a book on the mythology of our clan, the Wari Dihputiro Porã. His urgency in recording the mythology in writing was due, in part, to his awareness that a great Desana elder, a holder of sacred knowledge, was dying, taking with him a vast amount of traditional indigenous knowledge. What’s more, Desana youths no longer valued their culture or their cosmopolitics. This prompted him to write down the sacred mythology and to publish it as a book that young people could read. But the publication would have to await the arrival of someone, an outsider, with an interest in Desana knowledge. So Kissibi decided to write down the mythology that had, until this time, been only spoken. Every day, at the end of afternoon, at a time we call “the mouth of night,” my brother Kissibi stayed up very late talking to my father, the shaman Diakuru Kumu. As they sat in front of our house, my brother, with his little composition notebook and pen in hand, plied him with questions. As my father Diakuru gestured and spoke, my brother jotted down his every word.

12 After some time, they completed the documentation of A mitologia sagrada dos antigos Desana do grupo Wari dihputiro põrã. When it was finished my brother didn’t know who or where to turn to get it published. So he wrapped the text for safekeeping inside a package of Papaguara crackers and stashed it high up in the house rafters.

13 Between 1990 until 1992 the renowned anthropologist and researcher, Dominique Buchillet of ORSTOM, contacted the Desana of three villages: São João Batista, Rio Umari and Igarapé Urucú. She was conducting research on the mythology of the Desana clan called the Kehíripõrã or, “Sons of the Dream Drawings.” The narrators of the Kehirípõrã clan versions of Desana mythology began making a written record of them in 1968 after meeting with the anthropologist Berta Ribeiro, in the village of São João Batista, along the Rio Tiquié.

14 When she read this work, Dominique became interested in investigating Desana mythology in greater depth and she sought more information. According to my brother Kissibi and my father Diakuru, Dominique said that each of the narrators she had recorded until then told a different version, and she was confused. She felt that she was never going to get as clear and solid a version as she had hoped for. Unable to complete her work, she sought another means of researching Desana myth. She discovered that, according to the Desana hierarchy, the group [those who had published their version] were not one of the leading groups. As a result, she began a new line of inquiry, asking, “Who are the leaders of the Desana hierarchy?” She soon discovered that there was another Desana clan, the Wari Dihputiro Porã, of Cucura Igarapé, that could recount the correct version of the sacred mythology of the Desana people.

Dominique Buchillet in Cucura

15 In 1993, therefore, Dominique decided to continue her adventurous journey into Desana mythology. I often think of the time she arrived in Cucura Igarapé. I remember her walking down the path with her rucksack on her back, exhausted and soaked with

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sweat. She asked, “Is Mr. Américo or Mr. Durvalino in the village?” At that time any White that came to the village would have been a missionary—a priest or a nun. All the residents gathered around to meet her, to satisfy their curiosity, and to offer her a gourd of xibé [water with manioc flour].

16 A few minutes later, she introduced herself as an anthropologist whose goal was to study Desana mythology. She said she was going to spend a few days in the village. Since my brother had been waiting for someone who was interested in publishing his work on Desana myth, the arrival of an anthropologist in Cucura delighted him.

17 Seeing my brother’s excitement, my father said, “Son, a person has arrived who is going to help you. Take good care of her—bring her to your house and give her a place to sleep.” And also, my brother lived alone with his wife and spoke Portuguese. He could both host her in the village and also serve as the translator in her work.

18 To be absolutely accurate, I asked my brother how long she stayed in the village. He said: In her first visit she spent thirty days in the village. During these thirty days she lived according to our customs—she ate the way we do, bathed in the river, hiked to the garden to harvest manioc, grated it, and participated in drinking ceremonies. She slept by the fire so she could read and write her notes on Desana mythology. (Kissibi, pers. com., October 2018)

19 In order to describe her living and working with us in greater detail, I asked my brother to recount a little about the work on myth during those thirty days. He told me: She arrived knowing some Desana mythology. When she asked us about it, I simply gave her my handwritten version, A mitologia sagrada dos antigos Desana do grupo Wari dihputiro põrã. She liked it very much and was going to look for a publisher for the book that I wrote with my father Diakuru on cures for certain kinds of diseases. (Kissibi, pers. com., October 2018)

20 After producing one study, she returned to ORSTOM to find a publisher and at the same time to edit the text into proper anthropological and ethnographic language.

21 According to my brother, Dominique returned again to the community in 1993, bringing with her the good news. He recounts: Our work with her would be published with the support of UNIRT,8 FOIRN, ISA, and IIZ.9 She spent thirty more days working with us to revise, improve wording, and organize the text. The myths that were written in the book weren’t complete. She translated the Desana so that she could understand it better and rewrote it in proper anthropological language. In 1996 the book was published in São Paulo through ISA. Besides this he had other writings that she took with her, Bueri Kãdiri Marĩriye. Os ensinamentos que não se esquecem. (Kissibi, pers. com., October 2018)

22 That’s how Dominique helped my brother achieve his dream. She returned to ORSTOM to continue re-reading and editing the draft of Teachings that ought not be forgotten: Desana stories for children. He never lost hope and confidence in Dominique Buchillet. He reports: In 2005 Dominique told me that she had finished editing one of the Teachings that ought not be forgotten. In 2006 another book was published with support from FOIRN, ISA, and Horizon 202010 of the European Commission, all due to the efforts of Dominique. After the release of the narratives, Dr. Dominique Buchillet disappeared from our lives. In 2018 we learned that she had died. These partial, fragmented, accounts are from me, Kissibi (Durvalino Moura Fernandes). There are many things to be said about the work that Dominique Buchillet did. I considered her to be a sister, a

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member of my family. Even today my father Diakuru (Américo Castro Fernandes), at ninety-three, remembers her and says that she helped us re-remember our Desana mythology. For those of us who sat at her side talking about Desana mythology, it will be hard to forget her. She remains in the memories of our family and in the memory of the Desana people. (Kissibi, pers. com., October 2018)

23 The account from my brother is a living memorial. It is like a sacred book full of mystery, it offers us a remembrance of Dr. Dominique Buchillet as one of the anthropologists that studied Desana mythology.

24 For my own part, I had contact with Dominique in 2016, when I entered the anthropology program. I wrote to let her know that I completed my Master’s Degree. She sent her congratulations, saying that I would continue on the path of anthropology, in indigenous anthropology, as an indigenous anthropologist, recording the knowledge of my own people to create a Desana body of theory and ideas. And she said it was up to me to make an anthropology built on an imaginative reading of A mitologia sagrada dos antigos Desana do grupo Wari dihputiro põrã.

25 These moving words remain in my memory, and today inspire me to remember all that she did with the Desana nation and especially with my family, the Wari Dihputiro Porã.

26 She will forever be remembered as someone who is always present among us.

BIBLIOGRAPHY

BUCHILLET Dominique 1987 “ ‘Personne n’est là pour écouter.’ Les conditions de mise en forme des incantations thérapeutiques chez les Desana du Uaupès brésilien”, Amerindia, 12, p. 7-32.

2004 “Sorcery beliefs, transmission of shamanic knowledge and therapeutic practice among the Desana of the Upper Rio Negro region (Brazil)”, in Neil L. Whitehead and Robin B. Wright (eds.), In darkness and secrecy. The anthropology of assault sorcery in Amazônia, Duke University Press, Durham (NC), p. 109-131.

2007 Bibliografia crítica da saúde indígena no Brasil 1844-2006, Abya Yala, Quito (http:// horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers14-09/010041779.pdf, consulté le 10/12/19).

BUCHILLET Dominique (ed.) 1991 Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia [contribuições científicas apresentadas no Encontro de Belém – 17/novembro a 1°/ dezembro de 1989], MPEG/CNPq/SCT/CEJUP/UEP, Belém.

DIAKURU, KISIBI (narrateurs) et Dominique BUCHILLET

1996 A mitologia sagrada dos antigos Desana do grupo Wari dihputiro põrã, narrateurs A. Castro Fernandes (Diakuru) et D. Moura Fernandes (Kisibi), UNIRT, Cucura do Igarapé Cucura (Amazonas, Brasil)/FOIRN (Coleção Narradores indígenas do Rio Negro, 2), São Gabriel da Cachoeira (Amazonas, Brasil)/ORSTOM, Paris, 196 p.

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2006 Bueri Kãdiri Marĩriye. Os ensinamentos que não se esquecem, FOIRN (Coleção Narradores Indígenas do Rio Negro, 8), São Gabriel da Cachoeira (Amazonas, Brasil)/UNIRT, Santo Antonio (Amazonas, Brasil), 168 p.

NOTES

1. ORSTOM is the acronym of the Office de la recherche scientifique et technique Outre- Mer (Eng: Overseas Office of Scientific and Technical Research), today known as IRD, Institut de recherche pour le développement (Eng: Research Institute for Development [a French research institute under the joint supervision of the French Ministries of Higher Education and Research and of Foreign Affairs]). 2. FOIRN is the acronym for the Federação das Organizações Indígenas do Rio Negro. Founded in 1987, it represents speakers of twenty-two different languages of the Arawakan, Eastern Tukanoan, and Nadahup linguistic families throughout the Upper Rio Negro basin in Brazil. 3. I have used the term “clan” in keeping with Dominique Buchillet’s own choice. It refers to a named descent group of imprecise genealogy. Wari Dihputiro Porã can be glossed as “Grandchildren of Wari Dihputiro,” where Wari Diputiro is the name of a putative Desana ancestor. The construction of the clan name is universal among member groups of the Eastern Tukanoan family, regardless of language. 4. ISA, Instituto Socioambiental, is a Brazilian not-for-profit, civil society organization founded in 1994. With bases in eight cities and offices in São Paulo, it coordinates projects in indigenous areas throughout Brazil. 5. The initial recording of Desana myth by authors Firmiano Lana (Umusi Pãrõkumu) and Luiz Lana (Tõrãmu Kehirí) emerged in the late 1960s in conversations between the authors and Pe. Casimiro Beksta, Salesian missionary stationed in the Uaupés River basin approximately three decades. In the early 1970s the playwright Marcio Souza and the poet Aldisio Filgueiras interpreted and adapted the myths for a stage production, Desana, Desana, which was performed in the famous Teatro Amazonas in 1975. When Marcio encouraged his friend, Berta Ribeiro, to review the project, she carried it to fruition, meeting with the authors in the village of São João Batista, editing the work, providing an introduction, and seeing it to publication in 1980 with Livraria Cultura Editora. Fifteen years later, it became the inaugural volume of the pioneering series, “Coleção Narradores Indígenas do Rio Negro,” published by FOIRN and ISA. 6. In 2018 I invited Jaime Diakara, friend and colleague, to contribute to a remembrance of Dominique Buchillet. He agreed, and, in a series of emails, sent the text published here, with the invitation to translate it into English and into “proper anthropological language.” I have taken certain liberties in doing so, while always maintaining fidelity to the original. Any errors in the English text are mine. 7. Diakara Dessano Dihpotiro (Desana name given prior to birth), also known as Jaime Moura Fernandes (Portuguese), and the abbreviated Jaime Diakara, is a writer and illustrator of children’s books and lecturer on Desana cosmology. He holds a degree in pedagogy from the Universidade do Estado do Amazonas (UEA) and a Master’s in anthropology from the Universidade Federal do Amazonas (UFAM).

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8. UNIRT is the acronym for União das Nações Indígenas do Rio Tiquié, an indigenous association of the Tiqué River. 9. IIZ is the acronym for Institut für Internationale Zusammenarbeit and stands for the Climate Alliance, Austria. 10. Horizon 2020 is the name given to the major Research and Innovation program of the European Commission.

AUTHORS

JANET CHERNELA

University of Maryland, College Park, USA

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Dominique Buchillet: caminhos e trilhas no rio Negro e em outros lugares

Lúcia Hussak van Velthem e Marcio Meira

1 Conhecemos Dominique Buchillet há longo tempo. Mais precisamente desde a sua chegada, em 1984, a Belém e ao Museu Paraense Emilio Goeldi (MPEG). Assim como o antropólogo Bruce Albert, Dominique esteve ligada a esta instituição durante alguns anos, atuando no Programa de Pesquisa sobre Ocupação Humana da Amazônia, vinculado a um convênio de cooperação científica que unia o então Office de la recherche scientifique et technique outre-mer (ORSTOM)1 ao Conselho Nacional de Desenvolvimento Científico e Tecnológico (CNPq). Na Amazônia, programas de cooperação internacional envolvendo o Orstom foram desenvolvidos em instituições de Belém e também de Manaus, entre as quais o Instituto Nacional de Pesquisas da Amazônia (INPA)2, e muito contribuíram para o fortalecimento dos programas científicos dessas instituições.

2 No torvelinho das lembranças, recordo-me3 que compartilhamos a mesma sala de trabalho durante todo o período em que Dominique esteve em Belém, sala esta que ela perfumava, todas as manhãs, com requintadas essências francesas. Eu não era a sua “responsável” brasileira4, mas logo nos tornamos próximas e amigas, tanto por questões de entendimento linguístico em francês como por afinidades intelectuais e interesses culturais. Esse período foi marcado como de intensas trocas minhas com Dominique, trocas estas que se prolongaram durante anos, bem depois de sua partida do Brasil. Permutávamos notícias, ideias, livros de literatura e de antropologia, de artefatos, que incluíam os de procedência indígena, os de arte popular brasileira, os africanos e, mais recentemente, de pinturas e tecidos tailandeses.

3 Os diferentes apartamentos em que Dominique viveu, em Belém, Brasília, Paris, revelavam o seu interesse pela coleção, ou melhor, pelas coleções de livros e objetos de várias procedências, cuja reunião tinha um sentido museológico, porque haviam sido reunidos e eram dispostos de acordo com uma certa ordem. Por outro lado, a minha morada, em Belém, apresenta muitos objetos e livros que remetem à sua lembrança, ao

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seu gosto refinado e à sua generosidade e, também, ao seu vasto conhecimento antropológico.

4 As lembranças trazem à mente a grande determinação de Dominique, a sua capacidade de trabalho, em que se revelava incansável. Como esquecer o profundo interesse e a dedicação que tinha ao trabalho de campo, que nesse período se concentrava no rio Negro, onde pesquisou por mais de 20 anos. Dominique gostava sobretudo de estar nas comunidades localizadas nos afluentes do seu alto curso, porque não apreciava trabalhar em São Gabriel da Cachoeira, a sede do município. Os seus intensos e rigorosos trabalhos no alto rio Negro lhe permitiram reunir uma grande soma de informações, tanto etnográfica como também sobre as fontes históricas, que revelam a sua atenção constante a todos os detalhes e a uma grande diversidade de fontes.

5 Quando Dominique se mudou para Brasília em 1987, a longa distância ocasionou certo afastamento, e assim nos perdemos um pouco de vista, mas não o intercâmbio. Estive visitando-a uma vez e pude, então, conhecer e desfrutar, passeando pelas longas avenidas de Brasília, de sua última aquisição, um Karmann Ghia bicolor. Retrospectivamente, creio que o período brasiliense de Dominique foi o mais interessante e completo de sua estada no Brasil, para o qual contribuiu o fato de morar bem próximo ao Cine Brasília e assim poder assistir aos filmes de arte que tanto apreciava.

6 De Brasília, Dominique retornou à França e ao seu trabalho no Institut de recherche pour le développement (IRD). Nesse período, voltou-se para o estudo da medicina chinesa, tendo se dedicado com afinco ao aprendizado da escrita ideográfica que lhe permitiria a leitura de documentos sobre as terapêuticas chinesas. Não pôde, contudo, trabalhar na China e, por este motivo, instalou-se durante vários anos na Tailândia, país fronteiriço que lhe permitiu o acesso a uma vasta documentação. De volta à França, aposentou-se há alguns anos.

7 Visitando-a em 2012 em Paris, pude constatar que o seu interesse pela Amazônia e os povos indígenas do rio Negro não havia arrefecido, pois mantinha a atenção voltada para a pesquisa nesta região. Lembro-me que na ocasião mencionou a possibilidade de realizar um trabalho de síntese sobre assuntos relacionados com a antropologia da doença na região do rio Negro. Este perene interesse pode ser comprovado através de publicações recentes, entre as quais se destaca “Colonization and epidemic diseases in the upper Rio Negro region, Brazilian Amazon (Eighteenth-Nineteenth centuries)”, de 2018, o ano de sua morte. Nessa mesma visita ao seu amplo apartamento, apresentou-me um belíssimo armário chinês lavrado, adquirido na estadia asiática, e destinado ao armazenamento de remédios, de poções e, portanto, dotado de múltiplas pequenas gavetas. O que continham não me recordo mais, mas me lembro muito bem do entusiasmo e do orgulho de Dominique pela compra desse gaveteiro.

Os caminhos do rio Negro

8 Dominique Buchillet chegou ao rio Negro conduzida pela antropóloga Berta Ribeiro, que realizava, desde 1978, pesquisas entre os Desana, povo indígena de língua tukano oriental, habitantes da comunidade de São João no rio Tiquié, afluente do rio Uaupés. Assim como Berta Ribeiro, Dominique trabalhou com os Desana desta mesma comunidade e também com aqueles que viviam nos igarapés Umari, Urucu e Cucura,

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onde estava estabelecido um de seus principais interlocutores, Dorvalino Fernandez. Realizou ainda pesquisas entre os Tariana de Iauareté5.

9 Suas pesquisas sobre concepções de doença enveredaram pelo universo dos conhecimentos xamânicos e masculinos dos Desana, mas sem se limitar a este tema. Esses trabalhos resultaram na produção de sua tese de doutorado, “Maladie et mémoire des origines chez les Desana du Uaupés brésilien. Conceptions de la maladie et de la thérapeutique d’une société amazonienne”, que foi defendida em 1983 na Université Paris X (Nanterre). Trata-se de um trabalho seminal, infelizmente ainda não publicado, e que é indubitavelmente a sua obra mais referida.

10 A partir de seu doutorado, Dominique se impôs a compreensão profunda da medicina tradicional, na qual as curas xamânicas têm um papel fundamental e a recitação de encantações terapêuticas, altamente formalizadas, são percebidas como capazes de interferir diretamente no corpo da pessoa doente. Como destaca na introdução de “Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia”, que editou e publicou em 1991, a concepção indígena da eficácia terapêutica de um tratamento xamânico inclui dois polos de extensão variável: o do sentido comum universal e o do tratamento simbólico dos eventos que escapam ao primeiro. Desta forma, seria impossível diferenciar o empírico, o natural ou o objetivamente eficaz do mágico religioso, natural ou simbólico, porque os resultados se inseririam na lógica simbólica e esta nunca contradiz a experiência e, mesmo, se fundamenta parcialmente nela.

11 A antropologia da doença representa, portanto, a sua principal linha de pesquisa e através dela buscou compreender, entre os povos indígenas do rio Negro, os sistemas de saúde tradicional e o ocidental e a questão de sua articulação. Os seus estudos contribuem de modo decisivo para a renovação da antropologia da doença, através de ramificações intelectuais que se ancoram no rigor de suas pesquisas, cujas inferências conduzem a novas direções. Sobre esta temática abordou assuntos variados, traçando novas vias de entendimento, algumas das quais de modo pioneiro.

12 Dessa forma, naquele momento, as preocupações com a grave situação sanitária e com as ameaças aos direitos territoriais dos povos indígenas do rio Negro constituíram as duas vertentes, ambas de natureza ética e política, que podem ser identificadas como as razões que moveram Dominique a relacionar, nos seus escritos posteriores, a antropologia e a história. Ela também teve a influência dos estudos de história indígena que despontavam no Brasil desde 1988 e que culminaram com a publicação da histórica coletânea organizada por Manuela Carneiro da Cunha em 1992, “História dos Índios no Brasil”.

13 Neste sentido, pode-se afirmar que seu trabalho se apoia largamente no uso de uma rígida metodologia de pesquisa e de técnicas de documentação próprias. Entretanto, soube de modo magistral colocar o campo das suas pesquisas americanistas na interface da antropologia e da história, o que lhe permitiu desenvolver conexões e apresentar inferências complexas, mas sempre originais, que se abriram para uma dimensão teórica mais global. Dominique contribuiu, assim, de forma relevante com os estudos de história indígena no rio Negro. Em 2016 estava trabalhando com os inúmeros documentos históricos sobre aquela região, que ela havia coletado no Brasil entre 1984 e 2004, em vários arquivos e bibliotecas, inclusive nos arquivos dos Salesianos em São Gabriel da Cachoeira, retomando seus trabalhos publicados nos anos 1990 e 2000.

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14 Deve ser ressaltado que, nos trabalhos publicados, uma característica marcante de Dominique é a economia na citação de seus trabalhos, no que pode ser chamado de autorreferenciamento. Quando se consultam as referências em seus trabalhos, encontram-se apenas uma, duas ou no máximo três indicações de artigos seus produzidos anteriormente. Por outro lado, é quase sempre exaustiva a lista de obras que tratam do assunto em pauta.

Outros caminhos trilhados

15 As andanças e as pesquisas de Dominique no rio Negro tiveram outros efeitos, além dos acadêmicos, e assim se destaca o fato de que ela foi muito atuante no campo da antropologia médica. Contribuiu com artigos científicos e também com políticas adaptadas aos povos indígenas e sistematizou os conhecimentos nessa área. Produziu ainda diversos relatórios de avaliação de projetos de saúde, culturalmente sensíveis, em áreas indígenas na Amazônia. Suas preocupações acadêmicas, nesse sentido, se vinculavam com as suas perplexidades sobre a precária situação sanitária em que viviam os povos indígenas do rio Negro, que a antropóloga pôde vivenciar em suas pesquisas de campo, desde o final dos anos 1970, sobretudo em relação aos inúmeros casos de tuberculose. Esta preocupação se evidencia nos relatórios que Dominique elaborou em 1998 sobre a situação epidemiológica mais geral e a tuberculose em particular na região do rio Negro6.

16 Entretanto, a partir de 1985, durante a chamada “transição democrática”, iniciou-se a implantação do Projeto Calha Norte. Dominique, que encontrava então dificuldades burocráticas na Fundação Nacional do Índio (Funai) para realizar suas pesquisas de campo, dedicou-se tenazmente à efetivação dos direitos dos povos indígenas, denunciando o Projeto Calha Norte e sua atuação no alto rio Negro nos anos 1980. Neste campo, sua primeira análise data de 1986, quando publicou “Droits territoriaux, raisons de sécurité nationale et politique indigéniste au Brésil”. Entretanto, o mais conhecido e completo de seus escritos sobre o tema está consignado em “Pari-Cachoeira: le laboratoire Tukano du Projet Calha Norte”, publicado em 1990, inicialmente em francês, e um ano depois em português.

17 Os povos indígenas do rio Negro reivindicavam a demarcação integral de seus territórios tradicionais, o que gerou uma forte controvérsia político-jurídica sobre a forma em que se dariam as demarcações, pois o governo federal não aceitava reconhecer um território único e contínuo. Esta querela só foi resolvida em favor dos povos indígenas após 1988, com a promulgação da nova Constituição brasileira. Nessa linha, a atuação indigenista mais relevante de Dominique foi a elaboração do laudo antropológico que escreveu a pedido do Ministério Público Federal (MPF), entregue em 1990, e depois atualizado e ampliado em 1997: “Os Índios da Região do Alto Rio Negro: História, Etnografia e Situação das Terras”, que embasou o relatório circunstanciado da Funai para a delimitação e posterior demarcação da Terra Indígena Alto Rio Negro, homologada em 1998, uma significativa conquista do movimento indígena rionegrino. Nesses textos, Dominique se engajou ativamente na análise crítica do indigenismo oficial que ainda vigorava na Funai, mesmo após a ditadura militar, e na formulação dos argumentos antropológicos e históricos que embasavam as reivindicações indígenas em função de um novo contexto político no Brasil.

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18 O livro “Antes o mundo não existia”, a respeito da mitologia desana, foi escrito e assinado por protagonistas indígenas e coordenado por Berta Ribeiro, tendo sido publicado em 1980. Dominique colaborou na reedição deste livro, o primeiro volume da série “Narradores Indígenas do Rio Negro. Memória, Identidade, Patrimônio cultural e Perspectivas para o Futuro”, editada pela Federação das Organizações Indígenas do Rio Negro (Foirn) e o Instituto Socioambiental (ISA), a partir de 1995. Particularmente interessada por este projeto, Dominique coordenou a edição de quatro dos oito volumes que integram até o presente esta coleção, tendo ainda contribuído para a revisão técnica de outros três livros que apresentam a mitologia sagrada dos Desana. Nesta coleção, o primeiro volume (1996) é dedicado à mitologia sagrada dos Desana-Wari Dihputiro Põrã, o segundo (2000) enfoca as narrativas míticas dos Tariana e inclui importante depoimento sobre a chegada dos brancos nesta mesma região. Um terceiro livro (2004) é referente aos Desana-Guahari Diputiro Porã, e o quarto (2006) aborda os “ensinamentos que não se esquecem” e apresenta a história das constelações e diferentes tipos de rituais e festividades. O primeiro e o quarto volumes narram a formação do mundo, a transformação da humanidade e a chegada dos ancestrais dos povos indígenas atuais ao rio Negro.

Os caminhos das miçangas e das doenças

19 Na impossibilidade de comentar de forma detalhada o conjunto da obra de Dominique Buchillet, escolhemos destacar, entre todos os seus escritos, um que apreciamos especialmente. Trata-se do artigo que enfoca aspectos relacionados com as mercadorias que advêm através do contato e que se associam às epidemias: “Contas de vidro, enfeites de branco e ‘potes de malária’. Epidemiologia e representações de doenças infecciosas entre os Desana no Rio Negro”, publicado em 2002 em uma coletânea organizada por Bruce Albert e Alcida Rita Ramos e intitulada “Pacificando o branco. Cosmologia do contato no Norte-Amazônico”. Anteriormente, em 1995, dois artigos de títulos análogos: “Perles de verre, parures de Blancs et ‘pots de paludisme’. Épidémiologie et représentations Desana des maladies infectieuses” (Haut Rio Negro, Brésil) e “Contas de vidro, enfeites de branco e ‘potes de malária’: epidemiologia e representações de doenças infecciosas entre os Desana” foram publicados, o primeiro no Journal de la Société des américanistes, periódico pelo qual Dominique devotava certa predileção, como comprova o levantamento de sua produção acadêmica, e o outro na Universidade de Brasília, “Série Antropologia”.

20 A coletânea “Pacificando o branco”, segundo seus organizadores, visava ampliar o foco da observação etnográfica tanto em relação à diversidade de regimes expressivos e dimensões sociais pelos quais as sociedades indígenas do norte da Amazônia constroem sua articulação com a fronteira envolvente quanto da descrição do pensamento indígena sobre os fatos e os efeitos das “situações de contato”. Destacaram ainda que a penetração dos objetos manufaturados e os germes patológicos nas culturas indígenas constituem aspectos fundamentais do contato entre brancos e índios desde os primeiros encontros. No plano histórico, as doenças infecciosas e os brancos tornam-se indissolúveis, as primeiras assumindo um papel determinante na conquista e na colonização do Novo Mundo, causando grande impacto sobre as populações indígenas das Américas.

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21 Em seu artigo, Dominique traça um painel da epidemiologia do contato entre os Desana, buscando interpretar à luz das representações xamânicas certos aspectos das doenças infecciosas que resultaram do encontro desses povos indígenas com os brancos. Neste sentido, Bruce Albert (2002, p. 13) destaca que o texto de Dominique demonstra como a teoria etiológica dos Desana, ao cruzar características das situações de contato (trocas e contaminações, patogenia seletiva) e propriedades epidemiológicas das novas doenças, vai interpretar a potência de contágio como manifestações do exorbitante poder (re)produtivo dos brancos, cuja proliferação autossuficiente leva à aniquilação do Outro.

22 A argumentação do artigo de Dominique indica que as representações das doenças dependem da história específica do contato das sociedades afetadas, bem como de características do ecossistema que favoreceram a sua emergência e propagação. A análise se baseia em certo contexto colonial e na virulenta contaminação ocorrida através de epidemias de sarampo, varíola, gripe e malária, que desde o século XVIII afligem os Desana. No artigo, Dominique indica que a simbolização xamânica deste povo indígena a respeito dessas quatro doenças se baseia em considerações sobre a experiência histórica do contato interétnico e também sobre a principal característica das patologias associadas especificamente aos brancos – sarampo, varíola e gripe – e que vem a ser o seu grande poder de contágio e a maneira seletiva com que essas doenças atacam índios e brancos. Esses aspectos remetem a uma diferença radical entre as duas sociedades, e que está inscrita no mito de origem dos Desana. Segundo a narrativa mítica, os brancos adquiriram extrema capacidade de reprodução de si mesmos, de seus objetos manufaturados e também de suas doenças. Uma versão7 descreve como as primeiras mulheres brancas recolheram de uma árvore as contas de vidro para fabricar colares que em seguida ofereceram às mulheres indígenas, as quais pouco depois ficaram doentes.

23 Como Dominique destaca – de forma pioneira – em seu artigo, as experiências vividas com a introdução dos bens dos brancos, como é caso das contas de vidro, levaram os Desana a associá-las aos exantemas do sarampo e da varíola. Uma variante do mito indica que as miçangas pequenas são responsáveis pelas manifestações cutâneas do sarampo, e as maiores, pelos exantemas da varíola. O paralelismo entre doenças e contas de vidro é igualmente determinado pelos Mamaindê, que explicam os estados mórbidos como ocasionados pelo rompimento dos colares de contas que as pessoas possuem no interior de seus corpos (Miller 2018, p. 110).

24 As contas de vidro ou miçangas desempenharam um papel relevante em muitas esferas das trocas operadas entre os povos indígenas e os brancos nas primeiras fases do contato. O interesse por essas contas se perpetua até os dias atuais e se reveste de variado sentido. Entre os povos indígenas, a utilização de miçangas se manifesta em diversos registros culturais, efetivados por meio de construções simbólicas, geralmente integradas à dinâmica mitológica, que explicam a sua procedência e as características relevantes, tais como a durabilidade, a abundância e também os seus poderes deletérios (Velthem 2010). Nos dias atuais e nas arenas políticas das grandes cidades, as miçangas, enquanto significativos elementos de ornamentação corporal, revestem-se de uma nova eficácia na afirmação de identidades indígenas.

25 Em seu artigo, Dominique especifica que apenas os indígenas foram atingidos pelos surtos de sarampo e varíola, o que tem um fundamento histórico e epidemiológico. Os brancos (militares, missionários, colonos) que invadiram a região do rio Negro no

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século XVIII aparentavam uma vitalidade que contrastava com a alta mortalidade dos indígenas, o que teve um profundo impacto na conceituação de suas doenças, constituindo uma dimensão fundamental da percepção histórica dos brancos e de seus objetos manufaturados.

26 As questões acadêmicas de Dominique Buchillet, como vimos acima, estiveram sempre balizadas pela articulação entre os problemas indigenistas, marcadamente a situação sanitária e fundiária dos povos indígenas do alto rio Negro, com os temas relacionados à história do contato e da antropologia médica, sendo esta combinação de agências que definiu melhor o caráter da sua atuação rigorosa e ética. Há poucos registros fotográficos de Dominique, mas a sua imagem está profundamente gravada no coração de todos aqueles que tiveram a oportunidade de conviver com uma pessoa profundamente dedicada aos estudos antropológicos e à causa indígena.

BIBLIOGRAFIA

ALBERT Bruce 2002 “Introdução: cosmologias do contato no Norte-Amazônico”, in Bruce Albert e Alcida Rita Ramos (orgs), Pacificando o branco. Cosmologias do contato no Norte-Amazônico, Editora UNESP/ Imprensa Oficial do Estado/IRD, São Paulo.

CABALZAR Aloisio 2018 “Morre a antropóloga Dominique Buchillet”, Blog do Rio Negro, ISA, São Paulo, https:// www.socioambiental.org/pt-br/blog/blog-do-rio-negro/morre-a-antropologa-dominique- buchillet, consultado em 02/12/19.

CARNEIRO DA CUNHA Manuela (org.) 1992 História dos índios no Brasil, Companhia das Letras, Secretaria Municipal de Cultura, FAPESP, São Paulo.

FAULHABER Priscila 2005 “A história dos institutos de pesquisa na Amazônia”, Estudos Avançados, 19 (54), p. 241-257.

MILLER Joana 2018 As coisas. Os enfeites corporais e a noção de pessoa entre os Mamaindê (Nambiquara), Mauad, FAPERJ, Rio de Janeiro.

RIBEIRO Berta G. (org.) 1980 Antes o mundo não existia. A mitologia heroica dos índios Desana, Umúsin Panlõn Kumu, Tolamã Kenhíri (narradores), Livraria Cultura Editora, São Paulo.

TONI Fabiano e Léa VELHO 1996 “A presença francesa no Instituto Nacional de Pesquisas da Amazônia – INPA”, Interciência, 21 (1), p. 25-30.

VELTHEM Lúcia Hussak van 2010 “Os ‘originais’ e os ‘importados’: referências sobre a apreensão wayana dos bens materiais”, Indiana, 27, p. 141-159.

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NOTAS

1. Em 1998 passou a ser denominado de Institut de recherche pour le développement (IRD). 2. Ver a respeito Toni e Velho (1996), Faulhaber (2005). 3. Os dois autores conheciam Dominique Buchillet, mas a rememoração da introdução se deve exclusivamente a Lúcia van Velthem. 4. O responsável formal pela contrapartida brasileira era Antônio Maria de Souza Santos. 5. Ver o texto rememorativo de Cabalzar (2018) para mais detalhes. 6. Ver, por exemplo, “Levantamento e avaliação de projetos de saúde em áreas indígenas da Amazônia legal. Suporte a projetos de saúde culturalmente sensíveis” (Relatório de consultoria para o PPTAL/GTZ/ Banco Mundial, 71 p.); e “Fatores socioculturais e econômicos de risco para HIV e Tuberculose na região do alto Rio Negro (Amazônia Brasileira)” (Relatório n. 1 CNPq/ORSTOM n. 910213/97-6). 7. Trata-se da versão de Luis Lanna do sib Kehiri-poda do rio Tiquié.

AUTORES

LÚCIA HUSSAK VAN VELTHEM

Museu Paraense Emilio Goeldi (MPEG) – Ministério da Ciência, Tecnologia, Inovações e Comunicações (MCTIC)

MARCIO MEIRA

Museu Paraense Emilio Goeldi (MPEG) – Ministério da Ciência, Tecnologia, Inovações e Comunicações (MCTIC)

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Bibliographie de Dominique Buchillet

Laure Emperaire et Lúcia Hussak van Velthem

Thèse et livres édités

1 BUCHILLET Dominique 1983 Maladie et mémoire des origines chez les Desana du Uaupés (Brésil), thèse de doctorat en ethnologie, université Paris X, Nanterre.

2 2007 Bibliografia crítica da saúde indígena no Brasil 1844-2006, Abya Yala, Quito (http:// horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers14-09/010041779.pdf, consulté le 10/12/19).

3 BUCHILLET Dominique (dir.) 1991 Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia[contribuições científicas apresentadas no Encontro de Belém – 17/novembro a 1°/ dezembro de 1989], MPEG/ CNPq/SCT/CEJUP/UEP, Belém.

Organisation et édition commentée de recueils de récits amérindiens

4 BARBOSA Manuel Marcos, Adriano Manuel GARCIA, Pedro GARCIA, Benjamin GARCIA et Dominique BUCHILLET 2000 Upíperi kalísi. Histórias de antigamente: histórias dos antigos Taliaseri-Phukurana (versão do clã Kabana-idakena-yanapere), UNIRVA, Iauareté/FOIRN, São Gabriel da Cachoeira, 288 p.

5 DIAKURU, KISIBI (narrateurs) et Dominique BUCHILLET 1996 A mitologia sagrada dos antigos Desana do grupo Wari dihputiro põrã, narrateurs Américo Castro Fernandes (Diakuru) et Durvalino Moura Fernandes (Kisibi), UNIRT,

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Cucura do Igarapé Cucura (Amazonas, Brasil)/FOIRN (Coleção Narradores indígenas do Rio Negro, 2), São Gabriel da Cachoeira (Amazonas, Brasil)/ORSTOM, Paris, 196 p.

6 2006 Bueri Kãdiri Marĩriye. Os ensinamentos que não se esquecem, FOIRN (Coleção Narradores Indígenas do Rio Negro, 8), São Gabriel da Cachoeira (Amazonas, Brasil)/ UNIRT, Santo Antonio (Amazonas, Brasil), 168 p.

7 GALVÃO Wenceslau Sampaio, Raimondo Castro GALVÃO (narrateurs) et Dominique BUCHILLET 2004 Livro dos antigos Desana-Guahari Diputiro Porã, FOIRN (Coleção Narradores Indígenas do Rio Negro, 7), São Gabriel da Cachoeira (Amazonas, Brasil)/ONIMRP, Comunidade do Pato no médio rio Papuri (Amazonas, Brasil), 687 p.

Articles et chapitres de livres

8 BUCHILLET Dominique 1986a « Droits territoriaux, raisons de sécurité nationale et politique indigéniste au Brésil », Journal de la Société des américanistes, 72, p. 230-236.

9 1986b « Entreprises minières et Indiens dans le haut Rio Negro », Journal de la Société des américanistes, 72, p. 236-240.

10 1987a « La politique indigéniste de la Nouvelle République » Journal de la Société des américanistes, 73, p. 264-277.

11 1987b « Les Indiens Tukano et l’exploitation minière de leur territoire », Journal de la Société des américaniste, 73, p. 277-280.

12 1987c « “Personne n’est là pour écouter.” Les conditions de mise en forme des incantations thérapeutiques chez les Desana du Uaupès brésilien », Amerindia, 12, p. 7-32.

13 1988a « Interpretação da doença e simbolismo ecológico entre os índios Desana », Boletim do Museu Parense Emílio Goeldi, 4 (1), p. 27-42.

14 1988b « La question des droits indigènes au Brésil », Journal de la Société des américanistes, 74, p. 195-205.

15 1988c « Les Indiens Tukano et les colonies indigènes », Journal de la Société des américanistes, 74, p. 206-207.

16 1990a « Los poderes del hablar. Terapia y agresión entre los índios Desana del Vaupés brasileiro », in Ellen Basso et Joel Sherzer (dir.), Las culturas nativas latino-americanas a través de su discurso, Abya Yala, Quito/MLAL (500 Años, 24), Roma, p. 319-354.

17 1990b « Agressão aos índios Tukano », Informativo INESC, 4 (15 jun.), p. 7-7.

18 1990c « Os povos Tukano orientais e a questão da saúde », Amazonas em Tempo, Caderno Cultura, Manaus, 29 jan., p. 4-5.

19 1990d « Situación de los Tukano », Boletin del IWGIA, 6, p. 52-61.

20 1990e « Pari-Cachoeira : le laboratoire Tukano du Projet Calha Norte », Ethnies. Droits de l’Homme et peuples autochtones, 11-12, p. 128-135.

21 1991a « A antropologia da doença e os sistemas oficiais de saúde », in Dominique Buchillet (dir.), Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia [contribuições científicas apresentadas no Encontro de Belém – 17/novembro a 1°/ dezembro de 1989], MPEG/CNPq/SCT/CEJUP/UEP, Belém, p. 21-44.

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22 1991b « Introdução » de « Representações e práticas das medicinas tradicionais », in Dominique Buchillet (dir.), Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia [contribuições científicas apresentadas no Encontro de Belém – 17/novembro a 1°/ dezembro de 1989], MPEG/CNPq/SCT/CEJUP/UEP, Belém, p. 63-64.

23 1991c « Introdução » de « Impacto do contato sobre as representações tradicionais da doença e de seu tratamento », in Dominique Buchillet (dir.), Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazonia [contribuições científicas apresentadas no Encontro de Belém – 17/novembro a 1°/ dezembro de 1989], MPEG/CNPq/SCT/CEJUP/UEP, Belém, p. 161-173.

24 1991d « Introdução » de « A questão da integração dos sistemas médicos, problema e perspectivas », in Dominique Buchillet (dir.), Medicinas tradicionais e medicina ocidental na Amazônia [contribuições científicas apresentadas no Encontro de Belém – 17/novembro a 1°/ dezembro de 1989], MPEG/CNPq/SCT/CEJUP/UEP, Belém, p. 243-246.

25 1991e « Pari Cachoeira: o laboratório tukano do projeto Calha Norte », in Carlos A. Ricardo (dir.), Povos indígenas no Brasil. 1987/88/89/90, Centro Ecumênico de Documentação e Informação (Aconteceu especial, 18), São Paulo, p. 107-115 (https:// horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/pleins_textes_6/ b_fdi_33-34/38979.pdf, consulté le 10/12/19).

26 1992 « Nobody is there to hear. Desana therapeutic incantations », in E. Jean Langdon et Gerhard Baer (dir.), Portals of power: shamanism in South America, University of New Mexico Press, Albuquerque, p. 211-230.

27 1993 « Droits constitutionnels et démarcation des terres au Brésil », Journal de la Société des américanistes, 79, p. 225-231.

28 1994a « Droits indigènes, militarisation et violence contre les Indiens au Brésil », Journal de la Société des américanistes, 80, p. 243-250.

29 1994b « Prefácio », in Alcionílio Brüzzi Alves da Silva, Crenças e lendas do Uaupés, presentación de Walter Ivan de Azevedo, Abya Yala, Quito/CEDEM, Manaus, p. 5-19 (https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/ divers11-10/010020940.pdf, consulté le 10/12/19).

30 1995a « Perles de verre, parures de blancs et “pots de paludisme”, épidémiologie et représentations Desana des maladies infectieuses (haut Rio Negro, Brésil) », Journal de la Société des américanistes, 81, p. 181-206.

31 1995b « Contas de vidro, enfeites de branco e “potes de malária”: epidemiologia e representações de doenças infecciosas entre os Desana », documents d’archives, Departamento de Antropologia, Universidade de Brasília (Série Antropologia, 187), Brasília, p. 1-24 (https://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/ pleins_textes_7/b_fdi_51-52/010019241.pdf, consulté le 10/12/19).

32 1995c « Les vieux démons de la politique indigéniste au Brésil », Journal de la Société des américanistes, 81, p. 267-274.

33 1996a « Épidémies et médecines traditionnelles en Amazonie brésilienne », Orstom Actualités, 50, p. 2-8.

34 1996b « Le décret 1775/96 : une nouvelle forme de spoliation des territoires indigènes ? », Journal de la Société des américanistes, 82, p. 341-347.

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35 1997a « De la colonie à la République : images de l’Indien, politique et législation indigénistes au Brésil », Cahiers des Amériques latines, 23, p. 73-93.

36 1997b « Les conséquences du décret présidentiel 1775/96 pour les droits territoriaux des Indiens », Journal de la Société des américanistes, 83, p. 295-300.

37 1997c « Tuberculose, busca de assistência médica e observância terapêutica na Amazônia brasileira », França-Flash Saúde, 11, p. 1-8.

38 1997d « Tuberculose no alto Rio Negro », Parabólicas, 27 (4), p. 9.

39 1998 « Les nouvelles menaces contre les droits indigènes au Brésil », Journal de la Société des américanistes, 84-1, p. 237-248.

40 1999 « Une lueur d’espoir à l’aube des commémorations de l’an 2000 ? », Journal de la Société des américanistes, 85, p. 399-409.

41 2000a « Tuberculose, cultura e saúde pública », documents d’archives, Departamento de Antropologia, Universidade de Brasília (Série Antropologia, 273), Brasília, p. 1-17 (http://dan.unb.br/images/doc/Serie273empdf.pdf, consulté le 10/12/19).

42 2000b « Apresentação », in Manuel Marcos Barbosa, Adriano Manuel Garcia, Pedro Garcia, Benjamin Garcia et Dominique Buchillet, Upíperi kalísi. Histórias de antigamente: histórias dos antigos Taliaseri-Phukurana (versão do clã Kabana-idakena-yanapere), Unirva, Iauareté/FOIRN, São Gabriel da Cachoeira, p. 9-15.

43 2001a « Tuberculose et santé publique : les multiples facteurs impliqués dans l’adhésion au traitement », Autrepart, 19, p. 71-90.

44 2001b « Desafios para a implantação do DSEI-RN », in Carlos A. Ricardo (dir.), Povos indígenas no Brasil 1996-2000, Instituto Socioambiental, São Paulo, p. 255-257.

45 2001c « Tuberculose, antropologia e saúde pública », in Anais do seminário sobre alcoolismo e vulnerabilidade às DST/AIDS entre os povos indígenas da Macrorregião Sul, Sudeste e Mato Grosso do Sul [Londrina, 1999], Ministério da Saúde/Secretaria de Políticas de Saúde/Coordenação de DST e AIDS, Brasília, p. 61-76.

46 2002a « Droits constitutionnels, ressources génétiques, protection du patrimoine génétique et des savoirs traditionnels des populations indigènes », Journal de la Société des américanistes, 88, p. 245-260.

47 2002b « Contas de vidro, enfeites de branco e “potes de malaria”: epidemiologia e representações de doenças infecciosas entre os Desana do alto Rio Negro », in Bruce Albert et Alcida R. Ramos (dir.), Pacificando o branco: cosmologias do contato no norte- Amazônico, IRD/UNESP, São Paulo, p. 113-142.

48 2003 « Contact interethnique et épidémies au Brésil », Journal international de bioéthique, 14 (1-2), p. 83-99.

49 2004 « Sorcery beliefs, transmission of shamanic knowledge and therapeutic practice among the Desana of the upper Rio Negro region (Brazil) », in Neil L. Whitehead and Robin B. Wright (dir.), In darkness and secrecy. The anthropology of assault sorcery in Amazônia, Duke University Press, Durham (NC), p. 109-131.

50 2013 « Mythology, shamanism and epidemic diseases: a view from the upper Rio Negro region », in Patience Epps et Kristine Stenzel (dir.), Upper Rio Negro. Cultural and linguistic interaction in northwestern Amazonia, Museu do Índio/Funai/Museu Nacional, Rio de Janeiro, p. 441-474.

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51 2016 « Épidémies, guerres et esclavage : les causes de la dépopulation indigène au Brésil », in Philippe Erikson (dir.), Trophées : études ethnologiques, indigénistes et amazonistes offertes à Patrick Menget, vol. 2. Guerre, chamanisme et rencontres interethniques, Société d’Ethnologie, Nanterre, p. 39-55.

52 2018 « Colonization and epidemic diseases in the upper Rio Negro region, Brazilian Amazon (Eighteenth-Nineteenth centuries) », Boletin de Antropologia, 33 (55), p. 102-122.

Articles et chapitres collectifs

53 BUCHILLET Dominique et Pierre GAZIN 1998 « A situação da tuberculose na população indígena do alto Rio Negro (Estado do Amazonas, Brasil) », Cadernos de Saúde Pública, 14 (1), p. 181-185.

54 BUCHILLET Dominique, Robin WRIGHT, Márcio MEIRA, Carlos A. RICARDO et Aloisio CABALZAR FILHO 1998 Contribution au chapitre « A história a partir da chegada dos europeus », in Aloisio Cabalzar Filho et Carlos A. Ricardo (dir.), Povos indígenas do alto e médio rio Negro: uma introdução à diversidade cultural e ambiental do noroeste da Amazônia brasileira, ISA, São Paulo/FOIRN, São Gabriel da Cachoeira, p. 73-124.

55 BUCHILLET Dominique, Geraldo ANDRELLO et Eduardo NEVES 1998 Contribution au chapitre « O ambiente natural e a ocupação tradicional dos povos indígenas », in Aloisio Cabalzar Filho et Carlos A. Ricardo (dir.), Povos indígenas do alto e médio rio Negro: uma introdução à diversidade cultural e ambiental do noroeste da Amazônia brasileira, ISA, São Paulo/FOIRN, São Gabriel da Cachoeira, p. 55-72.

56 GARNELO Luiza et Dominique BUCHILLET 2006 « Taxonomias das doenças entre os índios Baniwa (arawak) e Desana (tukano oriental) do alto rio Negro (Brasil) », Horizontes Antropológicos, 12, p. 231-260.

57 GOMEZ Elsa et Dominique BUCHILLET 1986 « Propuesta para una grafia Tukano normalizada », Chantiers Amerindia, 11, p. 1-36 ; trad. « Proposta para uma grafia Tukano normalizada », Chantiers Amerindia, 11 (suppl. 3b), p. 1-10.

Rapports techniques

58 BUCHILLET Dominique 1990 Os índios da região do Alto Rio Negro: história, etnografia e situação das terras, Laudo antropológico redigido para a Procuradoria Geral da República na ação visando a demarcação sob forma única da região do Alto Rio Negro, Brasília (revisado e ampliado em 1997), 90 p.

59 1992 Território, ecologia, sistema produtivo indígena e organização social no alto Rio Negro, Brasília, ms, 10 p.

60 1998a As medicinas tradicionais e sua articulação com os sistemas oficiais de saúde, IRD/ISA, São Paulo, 11 p.

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AUTEURS

LAURE EMPERAIRE

Directrice de recherche, IRD

LÚCIA HUSSAK VAN VELTHEM

Museu Paraense Emilio Goeldi (MPEG) – Ministério da Ciência, Tecnologia, Inovações e Comunicações (MCTIC)

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Comptes rendus

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WEBSTER David, The population of Tikal. Implications for Maya demography

Julien Hiquet

RÉFÉRENCE

WEBSTER David, The population of Tikal. Implications for Maya demography, Archaeopress Publishing Ltd (Paris monographs in American Archaeology, Access Archaeology, 49), Oxford, 2018, 152 p., bibliogr., ill. en coul., cartes.

1 Relativement discret depuis la synthèse de référence publiée par Culbert et Rice (1990), ce serpent de mer qu’est le débat sur la taille et la densité de la population dans les Basses Terres mayas a refait surface à grand fracas il y a peu, à l’occasion de la divulgation des premiers résultats du programme de couverture LiDAR d’un échantillon de secteurs choisis du Petén (Canuto et al. 2018). Devant l’omniprésence des monticules résidentiels qui parsèment les Basses Terres centrales1, certains archéologues attribuent à cette région une population exceptionnellement haute, pratiquement unique dans le monde préindustriel. La voix de David Webster s’élève, depuis plusieurs dizaines d’années, à contre-courant de ces tendances. À Copán, dès le début des années 1990, Webster prônait, de manière parfois provocatrice, une modestie à rebours d’un enthousiasme général confinant, selon lui, au délire. The population of Tikal. Implications for Maya demography est le résultat de l’enrichissement progressif d’un manuscrit préparé au départ pour une communication sur l’occupation de Tikal. Il en résulte aujourd’hui un volume riche et dense sur l’occupation humaine des Basses Terres à la période classique, dans lequel Webster propose une synthèse de ses points de vue et de son scepticisme à l’égard d’une certaine doxa mayaniste. Sa cible principale est la prétendue « exception démographique » maya, qu’il traite dans la première et la majeure partie de l’ouvrage. Sont aussi évoqués par la suite, en lien avec cette problématique, d’autres combats historiques de l’auteur, comme la question de la main-

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d’œuvre impliquée dans la construction monumentale ou celle de l’État et de son absence chez les Mayas.

2 L’hypothèse défendue par Webster est fort simple : il considère que les estimations de population proposées et acceptées par la majorité des chercheurs (par exemple, dans plusieurs contributions du volume de Culbert et Rice [1990]) sont très largement surestimées2. Il s’ensuit logiquement que les problématiques de la démographie – notamment dans ses rapports avec les modes de subsistance –qui ressurgissent régulièrement dans l’archéologie mayaniste depuis maintenant plus d’un demi-siècle, ne seraient finalement que des artefacts de cette surestimation. Des questions telles que celle de l’inadéquation des faibles rendements de l’agriculture traditionnelle avec la présence de populations importantes ou encore celles liées à l’énormité du déclin démographique accompagnant le collapse du Classique terminal, découleraient en réalité d’une erreur primitive d’appréciation. Elles n’auraient donc pas lieu de se poser, ou du moins ne supposeraient pas les changements drastiques imaginés. Plutôt que de focaliser la recherche sur ces faux problèmes, Webster propose d’évaluer de manière rigoureuse les fondations, trop fragiles à ses yeux, des estimations de population, en commençant par celles de Tikal, site extraordinaire qui a paradoxalement servi de point de départ à bien des extrapolations à l’échelle des Basses Terres.

3 Pour prendre la mesure de la surestimation, l’auteur propose une sélection de densités dans un certain nombre de sociétés, aussi variées que peuvent l’être Haïti à l’époque contemporaine, l’Égypte ancienne ou le Bassin de Mexico au XVIe siècle. Il compte ainsi montrer à quel point les estimations hautes pour les Basses Terres mayas (jusqu’à plusieurs centaines d’habitants au km2, voir sa table 1, p. 11) sortent – très largement – des ordres de grandeur généralement admis dans le cadre d’approches comparées. On parle de 20 à 60 habitants par km2 pour l’Égypte en 2500 av. J.-C., la Mésopotamie en 2100 av. J.-C., Hawaii au XVIIIe siècle et l’Europe occidentale à la même période. Le Bassin de Mexico au début du XVIe siècle, réputé pour sa densité extrêmement élevée (mais il s’agissait d’un territoire d’extension réduite), présentait une overall density inférieure à 150 habitants par km2 et Haïti, avant le séisme dévastateur de 2010, atteignait 324 habitants par km2, ce qui en faisait l’un des États les plus densément occupés au monde. On pourrait critiquer le choix des sociétés entrant dans la comparaison en considérant que Webster oriente le débat à sa convenance en ne sélectionnant que des sociétés à faible densité générale. Il se justifie ainsi (p. 11, 15) : dans chacune des sociétés prises en compte, les conditions environnementales, économiques et culturelles étaient plus favorables à une densité élevée que chez les Mayas, et pourtant celles consensuellement calculées (au contraire du cas maya) pour ces sociétés sont souvent inférieures aux estimations hautes acceptées par beaucoup de mayanistes. On pourrait tout de même déplorer l’absence d’une comparaison avec l’Asie du Sud-Est3, surtout lorsque l’on sait que Rice et Culbert (1990, p. 26) revendiquaient pour les Basses Terres mayas des densités « in the range of those in areas such as Java and China […] that is, among the most densely populated regions of the preindustrial world ». Peut-être aussi qu’une rapide discussion des systèmes sociaux et agricoles de ces secteurs asiatiques particulièrement peuplés aurait permis de démontrer en quoi il est particulièrement improbable, aux yeux de Webster, que les densités en pays maya aient été équivalentes. Cela aurait également constitué une bonne illustration de la différence (explicitée dans l’« Appendice A », p. 60-62) qui existe entre la densité générale d’une région et celle de certaines de ses parties

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particulièrement favorables à l’agriculture. Alors que la riziculture inondée est associée aux densités de peuplement rural les plus importantes du monde préindustriel, la densité globale moyenne de l’Asie du Sud-Est autour de 1600 apr. J.-C. n’était que de 5,8 habitants au km2 ; celle-ci incluait, en outre, des pics de population pour les îles indonésiennes de Java et de Bali, avec des densités respectives de 30,3 et 79,7 habitants par km2 (Reid 1993, p. 463).

4 Au-delà de cet argument comparatif, un autre élément semble suspect à Webster (p. 17) : il s’agit de l’ampleur et de la brutalité des changements démographiques qui seraient advenus au Classique récent-terminal, avec une véritable explosion suivie d’une diminution tout aussi brutale et irrémédiable de la population, dynamiques extrêmes sans parallèle dans d’autres sociétés anciennes. On peut cependant objecter à Webster que ces dynamiques pourraient avoir été liées à des phénomènes de mobilités internes aux Basses Terres, sans reposer seulement sur une croissance ou une décroissance « naturelle », extravagante et donc bien improbable.

5 Plus généralement Webster pose la question de savoir pourquoi la densité humaine des Basses Terres aurait été à ce point surestimée. L’influence (unanimement reconnue par les mayanistes [Culbert et al. 1990, p. 103]) du projet Tikal de l’université de Pennsylvanie est sans aucun doute à placer au premier rang. La discussion des méthodes et des résultats de ses différents sous-projets, en particulier, le Sustaining Area Project de Haviland et de Puleston, occupe logiquement une bonne partie du volume. Tout en reconnaissant l’apport immense du projet dans la compréhension de la culture maya, Webster s’attache à restituer la suite d’erreurs et d’approximations qui, selon lui, expliquent le basculement d’une vision raisonnable du peuplement des Basses Terres mayas à l’acceptation d’une population exceptionnellement dense. Ce changement de paradigme peut être précisément situé à la publication de la thèse de Puleston en 1973. Cette dernière a en effet privilégié l’approche qui part des structures visibles en surface (d’où l’assurance de Webster que le LiDAR ne fera qu’empirer la surestimation) au détriment de la question de la productivité agricole et de la capacité de charge. De fait, l’analyse des vestiges d’habitats telle qu’elle est généralement pratiquée – et ce fut le cas pour les archéologues du projet Tikal – donne des résultats très au-delà des estimations de capacité de charge pour une agriculture non irriguée du maïs, un problème accentué par la tendance à extrapoler les densités obtenues pour les zones résidentielles directement adjacentes aux épicentres, à des arrière-pays de plusieurs centaines, voire milliers de km2. Webster décrit ainsi (p. 30) la chaîne d’extrapolations successives qui aboutit à la généralisation à une région de 12 600 km² de données obtenues à partir d’une prospection de 41 km². Reconnaissons que, dans ce cas précis, l’apport du LiDAR doit constituer un garde-fou incontestable, même s’il est loin de régler la question. Pour les 147 km2 de la couverture LiDAR centrés sur Tikal, Canuto et al. (2018) proposent une population de 38 892 habitants au Classique récent, soit 265 habitants par km2, épicentre et bajos compris, une densité bien plus raisonnable que les exemples extrêmes dénoncés par Webster (p. 29), même si elle reste plus élevée que les chiffres qu’il privilégie. Il envisage en effet (p. 35) une densité globale de 100 à 133 habitants par km2 pour un territoire de 452 km 2 autour de Tikal, peuplé de 45 000 à 60 000 habitants à son apogée. Autres critiques adressées aux archéologues du projet Tikal : une application trop simpliste et systématique d’un indice d’habitants par structure, une maîtrise insuffisante de la chronologie, un échantillonnage inadapté, une sous-estimation des problèmes de non-contemporanéité. Certes, où que l’on fouille, une écrasante majorité des structures présente une occupation datable du Classique

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récent. Mais Webster a raison de souligner que même pour des occupations appartenant à une même phase, se pose la question épineuse de la réelle simultanéité de l’occupation, l’échelle temporelle archéologique étant plus ample que l’échelle des générations paysannes. Les conséquences de cette disparité sont cruciales et Webster affiche sur ce point un désaccord marqué avec les chercheurs de Tikal, qui considéraient généralement que toutes les structures datées d’une phase ou d’une sous- phase l’étaient de manière simultanée et sur toute la durée de l’intervalle, sans la moindre considération pour d’éventuelles mobilités sur des laps de temps très courts.

6 Webster demande plus de rigueur dans l’approche qui s’appuie sur le dénombrement des monticules. Au lieu d’envisager, comme l’avait fait Puleston (1973), de nouveaux modèles de subsistance peu réalistes pour coller avec une densité de monticules qu’il est en réalité impossible de dater avec la finesse nécessaire, il serait plus judicieux, pour Webster, de croiser les deux approches (p. 51), ce qui permettrait d’accepter la possibilité qu’un paysage parsemé de monticules renvoie à une réalité complexe et nuancée d’occupation clairsemée, compatible avec l’environnement de forêt tropicale qui était celui des Mayas. Ce qui constitue la clé de voûte du travail de Webster dans ce volume, c’est donc l’analyse de la subsistance. Fort de son expérience de terrain à Copán et à Tikal, il décrit les résultats de son projet mené de 2003 à 2006 sur le second site (p. 30). Son intérêt central pour les questions agraires lui vient des éminents spécialistes que furent Sanders et, plus récemment, Wingard et Murtha, et il perpétue une vision relativement conservatrice du système agricole et de subsistance des Mayas, considérant que le système principal était celui de la milpa, une culture du maïs sur brûlis, non irrigué, en zones légèrement élevées. La possibilité de cultures d’appoint est acceptée (tubercules, arboriculture, et même apport éventuel du ramón, mais certainement pas en tant que denrée de base comme le proposait Puleston). En tenant compte du fait que ce type d’agriculture exige des temps de jachère très longs pour le maintien des rendements, il est, selon l’auteur, peu probable que de fortes populations aient pu se maintenir sur le long terme. Il faut en effet non seulement s’intéresser à la densité de population au Classique récent, apogée humain incontestable dans les Basses Terres, mais aussi considérer la question de la conservation du milieu sur le long terme4 malgré sa forte exploitation (voir le travail de Wingard [2013] pour Copán).

7 Dans ce contexte, la présence d’aménagements du paysage révélant des pratiques d’intensification agraire est amplement discutée. Webster affirme à plusieurs reprises (p. 21, 30, 31 et note 80) que ces aménagements brillent surtout par leur absence dans les alentours de Tikal, même s’il accepte leur existence, voire leur omniprésence dans d’autres secteurs des Basses Terres. L’imagerie LiDAR a pourtant révélé que, parmi les grandes cités du Petén, Tikal était l’une de celles qui comptaient le plus d’aménagements agricoles, qu’il s’agisse de canaux et de drainages dans les bajos ou de terrasses le long des collines (Canuto et al. 2018, p. 5-7). Ces aménagements avaient d’ailleurs été détectés il y a bien longtemps par un relevé radar de la région (Adams, Brown et Culbert 1981). Fry (1990, p. 286), de son côté, mentionnait divers travaux démontrant que les bajos des alentours de Tikal avaient fait l’objet d’intensification agricole. L’exposé de Webster à propos de l’influence à prêter à ces aménagements sur la densité de l’occupation n’est pas le plus convaincant de son exposé. Il se borne à considérer que l’intensification de l’agriculture, non nécessairement corrélée à l’augmentation des rendements et de la population, peut être envisagée comme une stratégie visant à obtenir un peu de surplus pour pallier d’inévitables crises ponctuelles

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de la production. Significativement, Webster conclut son paragraphe par cet aveu : « I might have to rethink all this » (p. 55).

8 On aboutit (p. 48) aux estimations personnelles de Webster à une échelle régionale. Sur un espace de 150 000 km2 englobant les Basses Terres centrales et méridionales, il n’y aurait jamais eu, selon lui, plus de 1 200 000 habitants, soit une densité générale de 8 habitants au km2, et l’inclusion du Yucatan n’aurait pas permis de dépasser le chiffre de 2 000 000 d’habitants. Rappelons que pour une zone centrée sur le même territoire, mais un peu moins vaste (95 000 km2), Canuto et al. (2018, p. 3) avancent une population comprise entre 7 000 000 et 11 000 000 d’habitants, cela à partir de l’extrapolation des données obtenues sur 2 144 km2 par couverture LiDAR. Le débat soulevé par Webster est donc, plus que jamais, d’actualité.

9 De très substantielles annexes viennent compléter l’ouvrage. L’« Appendice A » définit les différents types de calcul de densité selon les différences entre agglomérations et hinterlands. Dans tous les cas, les précisions de l’auteur constituent un apport important, et permettent d’effectuer des comparaisons intersites.

10 L’« Appendice B » traite de l’architecture monumentale et de ses implications sur la densité de population. C’est un sujet qui lui tient à cœur de longue date : on se souviendra du polémique « Too many Mayas, too few buildings… » (Webster et Kirker 1995). L’auteur s’attaquait ici à la croyance, largement répandue chez les mayanistes, selon laquelle la monumentalité de l’architecture permettrait d’inférer l’existence de populations nombreuses, un argument souvent avancé sans que la moindre estimation du coût énergétique de la construction ne soit proposée. Sur ce thème, plus que l’échelle de l’architecture, c’est la durée estimée du temps de construction qui est l’élément décisif, même s’il est très difficile de la maîtriser avec le degré de précision chronologique qui est le nôtre. Ce que rappelle Webster, c’est que la seule présence d’une architecture très monumentale ne constitue pas une preuve de forte densité d’habitants. Signalons tout de même une erreur manifeste à la page 65, fragilisant le propos de l’auteur : la figure 15, censée permettre la comparaison à la même échelle de la Pyramide du Soleil de Teotihuacan et des acropoles Tigre et Danta d’El Mirador, représente en réalité les acropoles de Mirador à une échelle deux fois plus grande que celle de la Pyramide du Soleil. Il n’est donc pas étonnant que la pyramide de Teotihuacan semble alors beaucoup plus volumineuse.

11 L’« Appendice C » porte sur les implications de l’intensification agricole. Webster énumère les différents types d’intensification qui peuvent exister. Pour les Mayas, son argument est que l’intensification pratiquée n’avait pas forcément pour but, ni nécessairement pour effet, d’accroître la production agricole pour répondre à une quelconque pression démographique (ce qu’une interprétation dans la lignée des travaux de Boserup pourrait laisser croire). Pour Webster, il s’agissait plutôt d’obtenir une meilleure maîtrise de la production, et de réduire le risque de très mauvaises récoltes.

12 L’« Appendice D » traite des conséquences potentielles des crises agraires et des stratégies mises en place pour les surmonter. Différents scénarios sont évoqués mais, dans tous les cas, il est pour l’auteur peu probable que les populations soient sorties indemnes des crises majeures. On doit comprendre, de manière d’abord implicite – l’hypothèse sera assenée par la suite avec force, puisqu’elle conclut le volume –, que c’est – entre autres causes – une crise de subsistance qui a provoqué le collapse de la société maya classique.

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13 L’« Appendice E » porte sur les questions de gestion des terres : propriété, droits consécutifs à la mise en valeur, transmission : questions floues pour la période classique en l’absence de données épigraphiques. Quant aux informations ethnographiques et ethnohistoriques, elles ne sauraient réellement être appliquées au modèle classique. En somme, rien ne permet de conclure définitivement sur l’existence d’une propriété privée des terres agricoles, qu’elle ait été aux mains de la noblesse ou de groupes socialement inférieurs. La question est d’autant plus complexe que le système agricole était probablement fondé sur des cycles de jachère, impliquant une rotation continuelle dans l’exploitation des parcelles. Exception faite des secteurs de terrasses agricoles où les rendements étaient sans doute supérieurs et où la jachère n’était probablement pas nécessaire.

14 L’« Appendice F », de son côté, concerne la vaste question des organisations politiques et des institutions mayas, discutant le degré de complexité sociopolitique (stade de l’État, bureaucratie), ainsi que ses implications démographiques. On connaît l’inclination de Webster pour une vision non étatique des sociétés mayas, même si certaines cités puissantes ont pu, à certains moments, se rapprocher d’un modèle étatique.

15 L’« Appendice G » enfin traite des visions malthusienne et boserupienne du lien entre démographie et agriculture, ainsi que de l’apport que ces théories peuvent avoir dans l’interprétation des dynamiques démographiques mayas. Webster se revendique explicitement partisan de la tradition malthusienne.

16 Assez bref mais foisonnant et au contenu d’une grande richesse, cet ouvrage nous rappelle que la question de la taille et de la densité de la population dans les Basses Terres mayas à la période classique est loin d’être réglée. Les arguments de Webster frappent souvent juste, non pas toujours pour imposer des résultats, mais bien plutôt pour susciter l’approfondissement du débat. Aux tenants de la thèse des États puissants, voire des empires (p. 93), Webster oppose – non sans un malin plaisir – la vision d’une histoire politique maya qui ressemble plus à la fuite en avant de petits nobles locaux, à la tête de modestes populations et s’appuyant sur un décorum élaboré, mais en pratique rapidement dépassés dans leurs tentatives de maîtriser les événements contraires (p. 45, 88, 96-97). Il est très possible que les partisans des estimations démographiques les plus hautes soient un jour forcés de revoir leurs quantifications à la baisse, en tenant compte, par exemple, de l’appauvrissement des sols au cours du temps, et des questions de contemporanéité de l’occupation. Mais il est aussi fort possible que la vision « minimaliste » des sociétés mayas soutenue par Webster soit inversement remise en cause par les données nouvelles, notamment LiDAR. On ne peut que se réjouir de la quasi-coïncidence de la sortie du volume de Webster et de l’article de Canuto et al. (2018) dans Science, encore qu’il eût été préférable que le premier parût après le second. Gageons que des analyses aussi mesurées que possible émergeront de ce débat passionné, au sein duquel la synthèse générale de Webster constitue un apport détonant. The population of Tikal. Implications for Maya demography comporte assurément des points faibles, notamment à propos de l’intensification des pratiques agricoles. Mais l’auteur est indéniablement dans le vrai lorsqu’il souligne le fossé existant entre l’acquisition d’une masse énorme de données sur les vestiges d’habitat et les aménagements agraires, et la compréhension de leurs implications dans la quantification de la population.

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NOTES

1. Cela n’est toutefois pas une nouveauté : voir la citation mise en exergue par Turner II (1976, p. 73). 2. Notons bien que la critique de Webster porte sur la densité globale de l’occupation des Basses Terres (overall density) et non sur le fait que des cités mayas aient pu constituer, de manière spatialement limitée, des agglomérations de plusieurs milliers d’habitants. 3. En vérité, Webster évoque tangentiellement la question p. 30, mais sans le moindre développement, à propos de certaines quantifications proposées pour Tikal. 4. À ce titre, la tentative (p. 39-40) de traduction en chiffres absolus des pourcentages d’occupation des structures proposés par Culbert et al. (1990) pour le Classique ancien à Tikal, exercice redouté (et généralement évité) par les mayanistes, est remarquable, même si elle manque de précision, en particulier à cause de la trop longue durée de la phase Manik.

AUTEURS

JULIEN HIQUET

Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne

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LITTAIF Aldo, Mitologia guarani. A criação e a destrução da Terra

Joaquín Ruiz Zubizarreta

REFERENCIA

LITTAIF Aldo, Mitologia guarani. A criação e a destrução da Terra, Editora ufsc, Florianopolis, 2018, 206 p., bibliogr., apéndice con mapas, ilustraciones y fotos en blanco y negro.

1 Hace poco más de un siglo que aparecía la primera obra sobre la mitología guaraní (Nimuendajú 1978 [1914], 1987 [1914]), a cuyo título recuerda el de este nuevo libro. La tierra todavía no ha sido destruida y los guaraníes tampoco terminaron de librarnos sus secretos. La mitología guaraní sigue inspirando debates históricos y antropológicos, así como obras literarias y artísticas. Pero, sobre todo, como lo demuestra este libro –y este es su gran valor–, la mitología guaraní sigue inspirando la vida cotidiana de los guaraníes para quienes los mitos siguen siendo fuentes de creencias “capazes de gerar hábitos de ação entre os Guarani” (p. 176).

2 Aldo Litaiff propone que el mito sería una teoría oral de la práctica y por ende una importante vía de acceso a la realidad etnográfica. A través de las versiones de los diferentes mitos guaraníes que fueran colectadas durante treinta años de trayectoria, el autor trata de cada mito en un capítulo aparte en los que también presenta las versiones clásicas de cada mito: la recogida entre los tupinamba por Thevet en el siglo XVI, la de Nimuendajú y la de Cadogan. Así en el capítulo sobre el mito de la creación de la primera tierra el autor agrega a las clásicas una versión en portugués obtenida “a pesar da resistência em falar desse mito” (p. 34). Del mito del diluvio se publican tres versiones mbya. Dos de ellas sorprenden porque en una el incesto que motiva el diluvio no es causa sino consecuencia del diluvio y lo contrario en la segunda dada “sete anos depois” por el “mesmo interlocutor” (p. 45), lo que dice mucho de las circunstancias en las que el mito es relatado.

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3 Del mito de los hermanos son presentadas quince versiones mbya y dos chiripa. Este mito le permite al autor desarrollar su hipótesis según la que “as açoes dos heróis míticos são consideradas verdades [que] podem gerar ‘hábitos de ação’” (p. 95). Del robo del fuego da seis versiones mbya. Este mito es para el autor el que inaugura la cultura y establece el distanciamiento con la naturaleza, el paso de lo continuo de la primera tierra a lo discontinuo de la tierra postdiluviana. Esta discontinuidad es no obstante parcial, ya que no cancela definitivamente la triada tupi-guaraní “animal- homem-deus” que cita de la obra de Viveiros de Castro, según la que la condición humana está “intercalada entre o deus e a besta” (p. 142).

4 A continuación, la historia de las misiones jesuíticas se vuelve mito. Para los mbya, Kesuita es un héroe de las migraciones mbya en busca de la “tierra sin mal” y las ruinas jesuíticas “são documentos concretos que provan a veracidade de seus mitos” (p. 164). Según Timotéo Karai Mirim, uno de los interlocutores del autor, Kesuita es un “índio como nós” y como sabían lo que iba a pasar “eles construíram estas ruínas, para marcar o caminho e lembrar da nossa história”. Kesuita es un gran chamán, ya que él, siempre según Timotéo Karai Mirim, “conhece a língua dos outros índios, dos brancos, sabe até falar con o mestre do jaguar” (p. 154). Las creencias en la “tierra sin mal” así como los personajes como Kesuita, son vistos por el autor como “princípios que podem organizar teorias e práticas sociais e individuais” (p. 167).

5 En fin, el autor explica la teoría sobre la relación entre mito y acción recordando como la dicotomía entre pensamiento y mundo de la filosofía cartesiano-kantiana fue atenuándose hasta que con Durkheim se establece una continuidad entre sujeto y objeto “e a similaridade entre pensamento e mundo” (p. 172). Según el autor es Charles Peirce quien completa esta visión con “a definição de crença como hábito da ação” (p. 172). Igualmente, recuerda el autor, el aspecto social del lenguaje es el elemento esencial en el proceso de comunicación como en el modelo de “triangulación” que liga al locutor e interlocutor con los objetos y eventos del mundo (p. 175). Un caso de esta “triangulación” fue presentado en el análisis sobre el mito de los hermanos en el que “os interlocutores interrogan o locutor sobre a situação narrada na versão de un determinado mito” (p. 101). El autor sostiene como conclusión que un abordaje pragmático de la mitología es importante y necesario en este periodo de la antropología dominado por el perspectivismo y el animismo-naturalista, porque serían “abordagens distantes das prácticas concretas decorrentes dos mitos” (p. 179).

6 A pesar del título el libro trata sobre todo de la mitología mbya-guarani. Además de estas y las clásicas, hay solo dos versiones chiripa o ava-guarani. Nada de la mitología kaiowa-guarani o paĩ-tavyterã, ni la de guaraníes orientales. Pero las dos versiones chiripa no están ahí sin motivo. Fue Métraux (1932) quien bautizara el mito “de los mellizos”, también conocido como “mito de los gemelos” aunque de la imposible gemelitud se trate (Lévi-Strauss, 1991). El autor prefiere la designación de mito de “los hermanos” y no de “los gemelos” por otros motivos. Dice que así se atendería la visión mbya como chiripa (p. 54) ya que el libro sostiene que si para los mbya los hermanos no son gemelos en las “variantes chiripa os gêmeos são filhos do mesmo pai” (p. 124). Esto fundamentaría la diferenciación que propone entre chiripa o ava-guarani y mbya- guarani (p. 129). Pero olvida el autor que tampoco en todas las versiones chiripa los hermanos son gemelos del mismo padre. No lo son en la versión clásica de Nimuendajú en la que “os irmãos são também filhos de pais diferentes” (p. 123) como el mismo autor

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lo señala. Tampoco en la versión de Miguel Alberto Bartolomé en la que Sol crea a su hermano Luna con los huesos de su madre (Bartolomé 1991 [1977], p. 47).

7 El autor dice que en la versión del mito del robo del fuego de Cadogan “os senhores do fogo são os corvos” (p. 138), pero sin embargo este último traduce “uruvu” como “buitre” (Cadogan 1959, p. 65), nunca como “cuervo” como también se le llama comúnmente al Coragyps atratus. La confusión podría venir del hecho que uno de los interlocutores del autor narra el mismo mito en dos ocasiones distintas siendo en la primera el dueño del fuego un “urubu”, mientras que en la segunda versión siete años más tarde, el dueño del fuego es “o corvo” (p. 142).

8 Igualmente, en la referencia que cita para dar la etimología de Ñamandu (nota al pie de p. 165) Cadogan no da ninguna etimología ni entrada similar (Cadogan 1949). Además, la etimología de Ñamandu que Cadogan propuso más tarde (Cadogan 1959, p. 44) fue luego desechada (Cadogan 1992, p. 118) sin volver a proponer otra.

9 Lastimosamente casi todas las versiones presentadas son en portugués, y la única en lengua guaraní es muy fragmentaria. El mismo autor nos advierte de las propuestas teóricas que se abstraen los “contextos atuantes, incluindo o de enunciação das narrativas [siendo que] o entendimento dos mitos guarani debe necessariamente partir con contexto etnográfico e da exegese (comentarios) dos interlocutores nativos, entre eles e com o pesquisador” (p. 180). Sin embargo, describe muy poco (p. 101) los contextos de enunciación de las versiones presentadas, aunque abundan los ricos comentarios de los interlocutores. Publica fotos de niños y miembros de comunidad escuchando los relatos (p. 205) pero no sabemos, por ejemplo, si en esas ocasiones los mitos son narrados en portugués o en lengua indígena. Prueba de la pertinencia de la advertencia del autor sobre el contexto etnográfico, a los que podemos agregar el contexto lingüístico, es que, en la traducción al portugués de la versión en guaraní, no es literal como se puede imaginar. Así lo demuestra la traducción alternativa de algunos pasajes de la versión en guaraní del mito de los hermanos (p. 69), que proponemos a continuación:

Covam’em vaete tay kuery reta oim Chegam muitos mbae’ypy, que perguntam à vovó se ela havia tchejary embia oinym he’i caçado

Ova ẽ va’ete taykuery reta: “oime che Los que llegaron, los numerosos hijos: “mi abuela anda –oiny1– jarýi ñembia oiny” he’i cazando –ñembiara2–”, dijeron

O-vaẽ-va’ete/ tay-kuery/ reta/: 3-llegar-RELATIVO/ hijo-PLURAL-muchos/: “3-estar/ 1/ abuela/ “o-ime/ che/ jarýi/ embia/ o- cazar/ 3-estar.con.continuidad”/ 3.decir iny”/ he’i

Tche’e natche rembia’i aim riveiva’e “Não tenho mais idade para isso, como poderia caçar ?” katu vema

Che ndacherembiai, aime rive’íva’e Yo no he cazado, pues estoy ya sin hacer nada –rive3– katuvéma [ociosamente]

Che/ nda-che-rembia-i/ a-ime/ 1/ NEG-1-cazar-NEG/ 1-estar/ ociosamente-EXPLETIVO-RELATIVO/ rive-’i-va’e/ katu-ve-ma EXPLETIVO-más-ya

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Ova’e inha ka’a tamve va’e Chega o último mbae’ypy, descobre e come a mãe

Ova ẽ iñakãhatãveva’e Llega el más travieso

O-vaẽ/ iñ-akã-hatã-ve-va’e 3-llegar/ 3-cabeza-dura-más-RELATIVO

10 Visto el bilingüismo de los guaraníes del Brasil, las versiones bilingües serían interesantes no sólo para los lingüistas, sino para analizar las traducciones de los propios interlocutores indígenas que adaptándose a los hábitos de acción permitirán a los guaraníes seguir viviendo en esta tierra, cuya destrucción es inminente.

BIBLIOGRAFÍA

BARTOLOMÉ Miguel Alberto 1991 [1977] Chamanismo y religión entre los ava-katu-ete, Centro de Estudios Antropológicos, Universidad Católica, Asunción.

CADOGAN León 1949 “La lengua Mbyá-Guaraní”, Boletín de Filología, 5 (40-41-42), p. 649-670.

1959 Ayvu Rapyta. Textos míticos de los Mbyá-Guaraní del Guairá, Faculdade de Filosofía, Ciencias e Letras, Universidad de São Paulo, São Paulo.

1992 Diccionario mbyá-guaraní castellano, Fundación León Cadogan/CEADUC/CEPAG, Asunción.

DOOLEY Robert A. 2013 Léxico Guarani, Dialeto Mbyá com informações úteis para o ensino médio, a aprendizagem e a pesquisa lingüística, Sociedade Internacional de Lingüística, Brasil.

LÉVI-STRAUSS Claude 1991 Histoire de Lynx, Plon, Paris.

MÉTRAUX Alfred 1932 “Mitos y cuentos de los indios chiriguano”, Revista del Museo de La Plata, 33, p. 119-184.

NIMUENDAJÚ Curt 1978 [1914] Los mitos de creación y de destrucción del mundo como fundamentos de la religión de los Apapokuva-Guarani, Jüergen Riester G. (ed.), Centro Amazónico de Antropología y Aplicación práctica, Lima.

1987 [1914] As lendas da criação e destruição do mundo como fundamentos da religião dos Apapocúva- Guarani, Ed. Hucitec, São Paulo.

NOTAS

1. “iny, se halla, está” (Cadogan 1992); “‘sentado’ ou ‘ação contínua’” (Dooley 2013). 2. “ñembiara, cazar, coger presa […]” (Cadogan 1992).

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3. “rive, ‘particula’; ‘adverbio’ que generalmente podría traducirse por sencillamente, ociosamente, sin malicia, sin motivo” (Cadogan 1992); “rive, ‘sem razão ou sem esforço’”; “‘debalde’” (Dooley 2013).

AUTORES

JOAQUÍN RUIZ ZUBIZARRETA

EHESS/LAS

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CHAMORRO Graciela y Isabelle COMBÈS (eds), Povos indígenas em Mato Grosso do Sul. História, cultura e tranformações sociais

Cecilia Martínez

REFERENCIA

CHAMORRO Graciela y Isabelle COMBÈS (eds), Povos indígenas em Mato Grosso do Sul. História, cultura e tranformações sociais, Ed. UFGD, Dourados, 2018, 930 p., bibliogr., índices, ilustraciones y fotos en blanco y negro, mapas.

1 Povos indígenas em Mato Grosso do Sul. História, cultura e tranformações sociais reúne las colaboraciones de cuarenta y siete investigadores en historia, antropología, historia, lingüística y otras disciplinas afines que dan a conocer la historia indígena del Estado de Mato Grosso do Sul (Brasil). Tal como señalan las organizadoras Graciela Chamorro e Isabelle Combès, la inspiración de tan ambicioso proyecto fue la Historia dos índios no Brasil, publicada en el Quinto Centenario, que reunía textos de su organizadora Manuela Carneiro da Cunha y de otros veintinueve autores que procuraban escribir el largamente olvidado capítulo indígena de la historia de Brasil. Veintiséis años después, el objetivo de esta réplica estadual de aquella historia indígena pionera va un poco más allá: deliberadamente se propone colaborar con la implementación de la ley 11.645, sancionada en 2008, que establece la obligatoriedad de la enseñanza de la historia y cultura indígenas en los establecimientos educativos de todo el país. Pretende así llegar al gran público para poner en valor el lugar de los indígenas en la historia de Mato Grosso do Sul, para ofrecer a su población indígena un compendio de su historia “olvidada, despreciada e ignorada” (p. 20), para mostrar a los no indígenas la otra cara de su propia historia y para poner a disposición de docentes y estudiantes un material que contribuya a su formación. De modo que, como compendio de lo más sustancial en

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materia de pueblos indígenas de la región de Mato Grosso do Sul, esta obra asume el papel de manual de consulta.

2 Once partes organizan el contenido del libro por temas y en orden cronológico. Hay un primer bloque arqueológico sobre la prehistoria de la región, un marco histórico sobre la ocupación blanca, luego un bloque étnico conformado por las tercera y cuarta partes, que ofrece estudios dedicados a cada uno de los grupos que habitaron o que viven actualmente en el Estado, y, por último, las partes cinco a once constituyen un bloque temático cuyos capítulos están agrupados por tema o problema historiográfico o antropológico (fuentes coloniales, misiones, bandeirantes y sertanistas, artes, lenguas, políticas indigenistas, testimonios indígenas). La correlatividad de los textos es cronológica, tanto entre las partes entre sí como asimismo en el interior de cada una.

3 Los primeros seis capítulos presentan el panorama arqueológico de la región. En ellos se reseña el incipiente desarrollo de las investigaciones sobre la materia, se expone la casuística local de problemáticas arqueológicas típicas como el arte rupestre o la antigüedad del poblamiento humano y se ilustran los distintos momentos de ocupación del territorio a partir de un estudio de caso. Junto al carácter prehispánico de los datos analizados, el análisis de la relación entre ambiente, artefactos, cambio climático o ambiental y su vinculación con la ocupación del espacio constituye una perspectiva de estudio de los pueblos indígenas y del pasado de la región que nos aporta una dimensión de análisis sensiblemente diversa y a la vez complementaria con la de los estudios etnográficos, etnohistóricos y también historiográficos. Así, la marginalidad atribuida a la región sur-matogrossense desde la colonia temprana hasta la actualidad se desdibuja a la luz de los criterios prehistóricos de uso del espacio: hace aproximadamente 11.000 años los primeros pobladores ocuparon los refugios rocosos del Cerrado, mientras que la condición de habitabilidad de los ríos Paraná y Paraguay se impuso sólo varios milenios después. Asimismo, la preponderancia prehispánica de los grupos arawak en el Pantanal y de los grupos guaraní-hablantes más orientales queda relativizada en el marco de una escala temporal mucho más profunda.

4 La segunda parte del libro resume la historia de la región desde la primera y efímera colonización con las reducciones de Itatín hasta mediados del siglo XX. Se destaca, aquí, el cambio de paradigma geopolítico que convirtió al territorio del actual Mato Grosso do Sul en “la esquina de los confines de América”. Si bien el único capítulo que compone esta segunda parte no hace prácticamente referencia a los pueblos indígenas, ciertamente permite comprender mejor el escenario sociopolítico y económico que habitaron.

5 La tercera parte está dedicada a antiguos y emblemáticos pueblos de la época colonial que, por haber migrado, cambiado de nombre o bien porque se los consideró extintos, no forman parte del conjunto de los actuales pueblos indígenas de Mato Grosso do Sul. Estos capítulos ofrecen un panorama sobre el poblamiento étnico de la región en el momento de la colonización temprana que, de manera similar al panorama arqueológico de la primera parte, contrasta con la idea moderna sobre la marginalidad del espacio matogrossense. Desde un punto de vista metodológico y heurístico, se destacan la importancia de los documentos de la época colonial y la sensibilidad etnológica para reconstruir la etnohistoria de estos antiguos pueblos. Así, los orejones del Pantanal, mencionados con recurrencia y con asombro por los cronistas españoles del siglo XVI, los temidos canoeros payaguá del río Paraguay, los bororó que supieron alternar entre la resistencia y la alianza con los portugueses y los cayapó que asediaban

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el tráfico monçoeiro del siglo XVIII encuentran su lugar en la historia indígena de Mato Grosso do Sul. Al mismo tiempo, el espacio reservado a ellos inscribe la historia indígena del actual Estado en la larga trayectoria interétnica de la región aledaña al Alto Paraguay y muestra su notable profundidad temporal.

6 La cuarta parte reúne los capítulos referidos a la historia de los actuales pueblos del Estado: guató, ofaié, terena, kinikinau, kadiwéu, chamacoco, ayoreo, guaraní, kaiowa, camba y atikum, agrupados, a su vez en grupos 1) “originarios”, 2) advenedizos del Chaco, 3) guaraní-hablantes y 4) recién llegados. Al igual que en el caso de los pueblos más antiguos, su historia trasciende largamente los límites geográficos e históricos del joven Estado creado en 1977 y requiere ser entendida en el marco de una territorialidad más amplia, que abarca Mato Grosso, Paraguay y . En este sentido, se destaca el capítulo dedicado a analizar las relaciones interétnicas del complejo altoparaguayense que nos permite conocer los antecedentes coloniales y chaqueños de los antiguos guaycurú, devenidos kadiwéu, y de sus guaná de antaño, los terena y los kinikinau. Más allá de la diversidad étnica que representan los grupos referidos en estos capítulos, no es en sus singularidades socioculturales, lingüísticas, rituales o religiosas donde radica el énfasis descriptivo y analítico de la mayoría de los autores. Hay, en cambio, una serie de puntos en común en la historia de estos indígenas que por su recurrencia merecen ser destacados.

7 El primero está relacionado con el despojo de sus tierras a lo largo de los siglos XIX y XX y con los consecuentes reclamos para recuperarlas: el capítulo sobre los guató procura aportar fundamento histórico y arqueológico a su reclamo actual de tierras; el tema ocupa un lugar central en el recorrido por la historia de los ofaié y de los kadiwéu, y también en el criterio aplicado en la definición de etnicidad de los kinikinau. En todos los casos la periodización es la misma: las dislocaciones comienzan en 1850, se aceleran con la Guerra del Paraguay, se expanden con la consolidación del modelo primario exportador, se profundizan con la colonización interna, se exacerban con el inicio del agronegocio y comienzan a recorrer el camino del resarcimiento a partir de 1970, cuando los reclamos de las organizaciones indígenas e indigenistas adquieren mayor visibilidad institucional. En segundo lugar, instituciones como el Serviço de Proteção aos Índios (SPI), las sucesivas experiencias misionales avaladas y promovidas por el Estado y por la Fundação Nacional do Índio (Funai) ocupan un lugar destacado en la historia de estos grupos. En tercer lugar, la Guerra del Paraguay constituye en casi todos los casos un hecho determinante para la pérdida de tierras y asimismo para la integración de los indígenas a la sociedad brasileña. Es, en efecto, un punto de inflexión en la relación de los terena con el Estado y la sociedad criolla, el causante de la caída demográfica de los guató, de la pérdida de las tierras de los kinikinau o de la integración a la sociedad nacional de los kadiwéu en virtud de su participación en el ejército brasileño. En suma, la recurrente mención a la Guerra del Paraguay demuestra la relevancia de ese proceso en la historia de los indígenas de la región –sin embargo, no parece haber todavía suficientes investigaciones que ameriten dedicar especialmente una parte de la obra a este tema: he ahí un área de vacancia de la cual tal vez podrán ocuparse los lectores especializados, los historiadores y los antropológos. En el caso de los guaraní y de los kaiowa, se complementan las interpretaciones que proponen la continuidad entre el período imperial previo a la guerra y el momento del conflicto con otras que destacan el carácter traumático de ese episodio, tanto como la explotación sufrida en los yerbatales desde finales del siglo XIX. De forma similar en el

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caso de estos dos pueblos, la política de colonización del Estado Novo en la década de 1930 y la creación de la Colônia Agrícola Nacional de Dourados (CAND) constituyó un hito en el avance del Estado y de los criollos sobre las tierras indígenas.

8 Estos temas relacionados con las tierras, la relación de los indígenas con el Estado y las políticas de integración a la sociedad brasileña son retomados en la décima parte del libro, que trata sobre las políticas indigenistas. Los cuatro capítulos que la componen analizan las estrategias del Estado y de otras instituciones ‒muchas de ellas religiosas‒ que trabajaron por la integración de los indígenas a la sociedad brasileña o que más recientemente colaboraron para que el reclamo de tierras por parte de los indígenas adquiera mayor efectividad.

9 Los restantes textos del bloque temático estudian problemas historiográficos como, por ejemplo, la representación de los indígenas en las fuentes históricas en dos momentos álgidos de exploración de la región: la temprana colonia y el siglo XIX. Hay un bloque sobre las experiencias misionales que reúne capítulos sobre el breve período jesuítico de Itatín, la de los antiguos indígenas del actual territorio de Mato Grosso do Sul reducidos por las misiones de Chiquitos, la experiencia pionera de religiosos protestantes en la Missão Evangélica Caiuá en Dourados durante las primeras décadas del siglo XX, las apropiaciones terena del “ser cristiano” y su coexistencia con prácticas chamánicas, la interfaz entre las formas tradicionales de religiosidad indígena y el impacto del pentecostalismo entre kaiowa, guaraní y terena de la Reserva Indígena de Dourados y, por último, la relación de los indígenas kaiowa y guaraní con el Conselho Indigenista Missionário (CIMI) en las últimas décadas del siglo XX. Detrás del contenido misional que agrupa situaciones distantes en el tiempo y disímiles entre sí, se perfila un factor heurístico común: la participación activa de los indígenas en esas experiencias de colonización, o lo que se conoce en la jerga antropológica como la “agencia indígena” manifiesta en tensiones, lecturas oportunistas de las situaciones y colaboraciones del mismo carácter, rechazos, aprovechamientos, apropiaciones y trastocamientos más o menos explícitos de las propuestas de los religiosos. De forma similar, se rescata el protagonismo de los indígenas y su resistencia a la colonización en los dos capítulos que componen la séptima parte del libro, “Bandeirantes e sertanistas”. Las dos partes que siguen y anteceden a la ya referida sobre las políticas indigenistas, “Arte” y “Línguas”, ofrecen, por un lado, un análisis de las producciones artísticas kaiowa, guaraní, kadiwéu, terena y kinikinau, que subraya su carácter polisémico y abarca desde aspectos simbólicos y rituales hasta formas de apropiación de nuevas realidades, y se detiene en los soportes, los contextos de uso y las formas de circulación de las expresiones artísticas. Por su parte, el capítulo sobre las lenguas sintetiza con eficiencia el panorama pasado y actual de la cuestión lingüística indígena en los pueblos que viven actualmente en el Estado. Los autores aportan un marco teórico para la comprensión de las clasificaciones y las transformaciones de las lenguas, se refieren al estado actual de vitalidad de las mismas, mencionan posibles estrategias de revitalización y resumen el estado del arte sobre el tema en el que enumeran las investigaciones sobre las lenguas indígenas de Mato Grosso y sus respectivos aportes a la materia.

10 La décimoprimera parte cierra el volumen con testimonios indígenas recogidos en diversas estancias de investigación de campo. Hay un testimonio “do massacre” ofaié que relata el destino aciago de ese pueblo con la llegada del hombre blanco, otro sobre la lucha de los terena por el territorio, otro kaiowá sobre la explotación sufrida a manos

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de la yerbatera Mate Laranjeira y otro sobre su dislocación grupal y la pérdida de tierras. También hay un testimonio en primera persona sobre la curiosa migración desde el Estado de Pernambuco hasta el de Mato Grosso que hizo del atikum un pueblo indígena recién llegado. Cierra la última parte del volumen una serie de testimonios de indígenas que viven actualmente en contextos urbanos.

11 Todas las contribuciones del libro son el resultado de las investigaciones de especialistas que conforman el Laboratório de Ensino e Pesquisa de História Indígena, provenientes del Programa de Pós-Graduaçao em História de la Universidade Federal da Grande Dourados (Mato Grosso do Sul). Por eso, esta obra, además de ofrecer material de consulta para el gran público tal como pretendieron sus organizadoras, es asimismo una bienvenida actualización del estado del arte de la investigación sobre los pueblos indígenas de la región. Si bien, a causa del objetivo explícito de contribuir a la implementación de políticas educativas, el libro se gesta en el Estado sur- matogrossense, su contenido trasciende ampliamente sus fronteras. La profundidad temporal que acusa la historia de los indígenas que lo habitaron y lo habitan desdibuja inmediatamente los límites estaduales y proyecta la mirada hacia espacios que actualmente forman parte de otros estados federales y nacionales. Una evaluación atenta del perfil de las compiladoras –una consagrada a las investigaciones con guaraní-hablantes y la otra reconocida por su trayectoria en el estudio de la historia indígena de pueblos chaqueños y de las tierras bajas bolivianas– permite advertirlo de inmediato.

12 En cuanto estado del arte y recurso de actualización bibliográfica, Povos indígenas de Mato Grosso do Sul… refleja la tendencia actual de las investigaciones en antropología e historia indígenas que ponderan el estudio de los efectos de la colonización blanca. En virtud de ellos, son centrales los problemas del despojo y del acceso a la tierra, por lo cual se privilegia el análisis de la relación de los indígenas con el Estado, con las organizaciones indigenistas y con los actores privados con quienes se disputa la tierra. Es así que, en procura de la reconstrucción de historias propiamente indígenas, se enfatiza su participación activa en los procesos sociohistóricos sucedidos desde la conquista hasta la actualidad y se reserva un lugar analítico preponderante a las transformaciones sociales. Lamentablemente, en la mayoría de los casos esto ocurre en detrimento de la descripción etnográfica y de los abordajes etnológicos que, de aparecer, lo hacen más en los estudios etnohistóricos que en aquellos dedicados a la historia indígena. En lo que a la historiografía respecta, el contenido de este libro ciertamente constituye un avance importante en el objetivo que se habían propuesto Carneiro da Cunha y los colaboradores de la obra que inspiró esta compilación. Tanto los capítulos del bloque étnico como los del bloque temático aportan miradas a escala que develan el revés indígena de la trama de procesos caros a la historiografía. La incorporación de la región al mercado internacional, el avance del liberalismo, la formación y consolidación del Estado nacional, el avance en la definición de los atributos del Estado tales como el territorio y el monopolio de la fuerza represiva, el imperialismo y su crisis, el varguismo y el Estado Novo, la emergencia y el auge de las ideologías y proyectos de izquierda encuentran micro-ejemplos, variaciones y peculiaridades en las historias indígenas aquí contadas, que matizan, cuestionan y enriquecen el conocimiento del pasado regional y nacional. Este es sin duda el aporte más importante de la obra, si de incluir a los indígenas en la Historia y de reclamar su lugar en el presente se trata.

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AUTORES

CECILIA MARTÍNEZ

Conicet-UBA, Argentina

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OSSIO ACUÑA Juan, Etnografía de la cultura andina

Pablo F. Sendón

REFERENCIA

OSSIO ACUÑA Juan, Etnografía de la cultura andina, Fondo Editorial del Congreso del Perú, Lima, 2018, 507 p., bibliogr., ill., mapas.

1 El volumen que nos toca reseñar –que hasta donde tenemos noticia ya ha sido objeto de dos comentarios oriundos de su país de origen, uno de ellos lamentable en su pereza, el segundo conmovedor en su genuflexión– es un buen libro. Es más, la mera comparación con publicaciones recientes dedicadas a temáticas similares hace de él incluso un muy buen libro, un libro casi imprescindible.

2 Lejos de tratarse, como se lo presenta, de un compendio de las cinco décadas de carrera docente del autor en la Pontificia Universidad Católica del Perú al frente de la asignatura “Etnología andina” o “Etnografía andina” (p. 17), el volumen es un libro de antropología escrito por un antropólogo que sabe de antropología y que conoce muy bien su materia; pero no se trata de un libro de antropología concebido bajo los preceptos del género etnográfico sino de una reflexión sintética aunque detallada de las investigaciones que el autor dedicó a aquello que José María Arguedas denominó “cultura india” (p. 23), a partir de una perspectiva que busca trascender las constricciones del estudio de caso y de la coyuntura histórica. En este sentido, estamos en presencia de una extensa reflexión –repleta de información de base de carácter etnográfico, histórico y etnohistórico– acerca de la “cultura andina” tal y como es concebida y expresada por los indios del Perú o, para ser fieles a la fraseología del autor, de un “paradigma [construido] sobre bases empíricas” de la cultura de las “comunidades campesinas de los valles interandinos” peruanos (p. 27-28). A la vez, el libro está exento del más mínimo coqueteo con pronunciamientos de moda que han venido abordando problemas similares en términos de una “ontología” irreductible al entendimiento y sensibilidad de, digámoslo así, el ethos occidental. No: fiel al método

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científico que la antropología diseñó durante décadas para comprender y explicar los usos y costumbres de diferentes sociedades y culturas del mundo, Juan Ossio lo ha hecho suyo para hacer lo propio en los Andes peruanos. Esto, a su vez, hace que el libro esté exento del chovinismo propio de supuestas “escuelas antropológicas” falsamente fundadas en preceptos nacionales, así como también de la mácula provinciana de otras igualmente atrapadas en los vericuetos regionales impuestos por sus respectivos estudios de caso. De esta manera, el libro está en diálogo con tradiciones antropológicas de otras latitudes, o de buena parte de ellas, no sólo por tratar temáticas afines sino por hablar un idioma común. No debería ser objeto de sorpresa, entonces, que al promediar el volumen el lector se tope con un largo resumen sobre la monarquía divina de los shilluk del Sudán nilótico (p. 262-270) en calidad de introducción a los rituales andinos o fenómenos afines –tales como el mesianismo– de la cual son “expresiones análogas” (p. 261). Junto con estas razones, el libro se encuentra emparentado con una extensa literatura académica dedicada al área andina que hace de él uno de los últimos, sino el último hasta hoy, libro “clásico” de antropología dedicado a las poblaciones indígenas del Perú contemporáneo y sus antepasados –que, junto con ellos, se perfila como un género en peligro de extinción.

3 De manera concienzuda y pausada, la exposición dedica el primer movimiento a identificar el desarrollo de una “orientación homogeneizadora” (p. 26 passim) que, desde los períodos colonial y republicano –e incluso desde el período incaico, pero con otros bemoles–, ha involucrado la “dominación” de ciertos grupos humanos sobre otros en el contexto de un “proceso colonizador” y por ende a la subsiguiente “exclusión” de los segundos al negárseles el derecho a su propia “identidad cultural” (p. 37). Esta orientación, que en la relación alcanzada entre los criollos republicanos y las poblaciones campesinas parece replicar aquella otra generada en el encuentro entre el conquistador español y la masa indígena, ha redundado en un fenómeno en virtud del cual el “sistema social andino”, basado en “el parentesco, la reciprocidad y la redistribución” (p. 50), se ha visto replegado al ámbito local, donde continúa funcionando por fuera de la órbita de los sucesivos sistemas estatales que se le han impuesto1. Frente a esta masa desconocedora e incluso descalificadora de los usos y costumbres de los indios peruanos, comienza a vislumbrarse, hacia la segunda mitad del siglo XIX –pero como resultado de procesos que la anteceden– una sensibilidad primero social, luego política, más tarde estética y más tarde aún académica que bajo diversas expresiones institucionales supo acuñar el rótulo de “indigenismo”, segundo movimiento de la obra. Expuesto en términos seculares, el indigenismo ideologizado y centralista de la primera mitad del siglo XX, estrechamente asociado con los nombres de José Carlos Mariátegui y Luis Eduardo Valcárcel, es introducido y contrastado con la versión liberal y descentralizada del siglo precedente a propósito de la figura de Juan Bustamante Dueñas, la organización que supo fundar (la “Sociedad Amiga de los Indios”) y su rol cuasi quijotesco en una insurrección emblemática de la segunda mitad del siglo XIX: el levantamiento indio de Huancané en Puno. El indigenismo y muchos de sus exponentes estuvieron cerca –algunos de ellos fueron incluso protagonistas– de un complejo proceso jurídico, institucional y político con consecuencias profundas para el segundo siglo de la historia republicana del Perú: el reconocimiento del “indio” –luego devenido “campesino”– como ciudadano con derechos en el ámbito nacional en virtud de su pertenencia a una unidad sociológica denominada “comunidad campesina”. Es preciso admitir que este último término aparece en el libro con numerosas variaciones no exentas de matices y problemas: “comunidades campesinas de los valles

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interandinos” (p. 27), “comunidades campesinas indígenas” (p. 103), “comunidades campesinas contemporáneas” (p. 103) o “comunidades indígenas” (p. 119). En todo caso, basta con señalar que el tercer movimiento de la obra se dedica a describir la formación e institucionalización de este tipo de “unidad social” (p. 128) cuyo número, de acuerdo con información censal del presente siglo, asciende a más de 6000. Desde una perspectiva que busca entender las formas de organización social de estas poblaciones, este capítulo es el más importante pues expone algunos de los hitos institucionales en la legislación de este tipo de organización, así como algunos de los criterios de los propios comuneros para acceder a ella: principalmente el ejercicio de adecuar o redefinir las unidades sociológicas vernáculas menos inclusivas al nivel del “distrito”2 –correspondientes a “agrupaciones de casas” designadas “anexo” y “caserío”– a la cartografía política propuesta por el damero estatal. Pero lo verdaderamente importante aquí es que expone de forma detenida la tesis principal que anima la obra: las “comunidades campesinas” en el Perú contemporáneo son “las unidades sociales más representativas y numerosas de las poblaciones indígenas andinas [que] tienen la virtud de actuar como fuentes recreadoras de su cohesión social y sus tradiciones culturales” (p. 103). Por su parte, “las bases que le dan continuidad a la cultura andina” (p. 137) son tres: los lazos de parentesco, matrimonio y compadrazgo que mantienen entre sí los miembros de la población indígena nucleados en comunidades. Cada una de estas bases es objeto de tratamiento pormenorizado en los siguientes tres movimientos de la obra. En el plano de la consanguinidad, se destaca la significativa orientación endogámica y el lugar que ocupa en estas poblaciones la forma de organización conocida bajo el término ayllu. Por su parte, las regulaciones matrimoniales son de carácter “proscriptivo” en lugar de “prescriptivo”, y sus características “positivas”, deducibles estadísticamente, están ligadas con la orientación endogámica indispensable para la reproducción del orden social y cultural. El parentesco ceremonial, y en particular el vínculo de compadrazgo resultado de la celebración del matrimonio religioso, presenta una dimensión doble (individual y colectiva) cuyos “rasgos estructurales” (p. 243) son reflejo del carácter bilateral y ego- centrado del sistema, de la terminología de parentesco y de la tendencia simétrica y endogámica de la alianza matrimonial –rasgos que, en su conjunto, parecen encontrar ecos en el pasado precolombino (p. 253).

4 Los últimos cuatro movimientos se consagran a exponer y discutir las fiestas cívico- religiosas, el mesianismo, el orden económico y las relaciones interétnicas andinas. Los rituales consagrados a los santos patrones –devenidos “clasificadores totémicos” (p. 271) que supieron reemplazar a las antiguas divinidades prehispánicas– constituyen mecanismos para “recrear la unidad [y la cohesión social] de los conglomerados más amplios a los cuales están adscritos” (p. 261). Así como “las comunidades […] devinieron las unidades sociales más representativas de las poblaciones indígenas después de la Conquista” (p. 273), se condensó en la figura de sus respectivos patrones las respectivas totalidades de los conjuntos sociales, cuyas respectivas configuraciones simbólicas remiten a aquello “que en antropología se conoce como organización dualista” (p. 274), encargada de recrear en última instancia la unidad en cuestión. Junto a uno de sus componentes, el monarca divino que lo anima “fusionado” (p. 352) a la figura del “Inca”, este modelo guarda estrecha correspondencia con la obra de Felipe Guaman Poma de Ayala, entendida como un “ruego de naturaleza mesiánica al rey de España para retornar al orden” (p. 352) perdido. La lógica que inspira este ruego de orden “metafísico” (p. 358) se aprecia en otros ejemplos afines de mesianismo andino tales

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como los levantamientos de Juan Santos Atahualpa y José Gabriel Condorcanqui, el mito de Inkarrí o bien el movimiento contemporáneo encabezado por el profético Ezequiel Ataucusi Gamonal: la Asociación Evangélica de la Misión Israelita del Nuevo Pacto Universal. El orden económico, por su parte, parece garantizarse por el papel protagónico de la comunidad en la toma de decisiones referida a la tenencia, usufructo y propiedad de la tierra, sujeta esta última a una dialéctica incesante de concentración y dispersión que se resuelve de manera equilibrada a través del juego recíproco entre los diversos mecanismos que posibilitan su circulación, dispersión y concentración: el parentesco, el matrimonio y las relaciones de compadrazgo. Cierra el volumen una reflexión en torno de las relaciones interétnicas en los Andes peruanos, en la que se propone “la existencia de una unidad andina que reposaría en una matriz sociocultural de origen prehispánico” (p. 468), garantizada a lo largo del tiempo por las “políticas tributarias” de los períodos inca y colonial, y luego las “leyes proteccionistas” republicanas que promovieron el “reconocimiento legal” de las comunidades campesinas que devinieron cada vez más “corporativas”, “localistas” y “alejadas” del conjunto nacional (p. 465-466).

5 Estamos ante un todo coherente, macerado, bien pensado en todas sus articulaciones; un “paradigma”, como se prometió al comienzo de la obra, o quizás un “tipo ideal”, tal como preferimos rotularlo en virtud de la lección de método que promueve: cotejarlo con cuantas instancias empíricas y etnográficas sea posible con miras a hacerlo, en caso de ser necesario, aún más perfectible. Esto mismo es lo que proponemos hacer a continuación a propósito de un fenómeno que el autor toma como hecho consumado pero nos coloca ante una serie de problemas etnográficos, etnohistóricos y antropológicos simultáneos: se trata, en efecto, de la tesis misma del libro.

6 Si las “comunidades campesinas” son las unidades sociales que posibilitan la “recreación de la cohesión social y la tradición cultural” de las “poblaciones indígenas andinas” (p. 103), y si “las bases que dan continuidad a la cultura andina” (p. 137) son las prácticas de parentesco, matrimonio y compadrazgo, las comunidades campesinas son las unidades que aseguran el funcionamiento de las prácticas de parentesco, matrimonio y compadrazgo. Es más: si las “comunidades campesinas” son las “colectividades donde se recrea la cultura andina” (p. 137), y si las “bases que dan continuidad a la cultura andina” son las mismas que “sustentan la integridad de las comunidades campesinas” (p. 185), las prácticas de parentesco, matrimonio y compadrazgo son el sustento de la integridad de las comunidades campesinas. Es precisamente esta identificación conceptual entre “comunidad” y “parentesco” –para resumir en dos palabras los pares de opuestos contrastados– la que encontramos problemática, si no equivocada, debido a las siguientes razones, introducidas mediante una anécdota personal.

7 Hacia el comienzo de mis investigaciones etnográficas en la comunidad campesina de Phinaya (Cuzco), fui invitado a presenciar una asamblea ordinaria en la que participaban los representantes de las 40 familias nucleares que la conforman. Al no estar todavía familiarizado con el establecimiento comunal donde se llevaría a cabo el encuentro, fui conducido hacia el mismo por un hombre del que apenas conservo recuerdo: lo que sí recuerdo, y muy bien, es que cuando este individuo abrió la puerta del recinto tuvo un gesto dubitativo a propósito de la mirada inquisidora de un segundo sujeto que, ubicado detrás de un precario escritorio, lo interpeló diciéndole que yo era bienvenido pero que no lo era él, debido a que no era miembro de la comunidad, y por

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lo tanto se vio obligado a retirarse. Con el tiempo me enteré de que ambos individuos, mi acompañante y el entonces presidente, no sólo eran miembros de uno de los dos ayllus en que se divide el territorio de Phinaya –y a los que pertenecen el total de 130 familias nucleares que los habitan–, sino que también eran hermanos.

8 Esta anécdota plantea un problema inmediato a la ecuación “parentesco = comunidad”, si no es que la invalida de cuajo: dos hermanos miembros de un mismo ayllu no pueden coincidir en una asamblea comunal, puesto que uno de ellos no pertenece a la misma. Es posible profundizar el dato a propósito de una segunda dificultad que encontramos en un aspecto derivado de la tesis de Ossio: el postulado de que “las comunidades campesinas hunden sus raíces en las concentraciones de indígenas llamadas ‘reducciones’ que el virrey Francisco de Toledo implementó durante su gobierno (1569-1581)” (p. 103)3.

9 Nuestro autor ilustra el punto con dos ejemplos. El primero corresponde al repartimiento4 de los rucanas antamarcas (Ayacucho), cuyo territorio, antes de ser sometido a la política toledana, estuvo dividido en cuatro ayllus –de los que no se cuentan con “mayores descripciones” (p. 104) pero de los que se sabe que el principal, “Antamarca”, dio nombre al repartimiento–, y en el que se ubicaron 15 reducciones que dieron origen “a las comunidades que se conservan hasta nuestros días” (p. 104). La prueba consiste en la coincidencia (8 en rigor) de algunos de los nombres de estas reducciones consignados en una lista de fines del siglo XVI con los topónimos registrados en un mapa contemporáneo. Esta coincidencia parcial vuelve a corroborarse en el segundo ejemplo. En efecto, otra fuente de fines del siglo XVI registra los nombres de las 39 reducciones –distribuidas en 5 repartimientos– a las que fueron sometidos los más de 200 pequeños pueblos de indios de la antigua provincia de Yauyos (sierra de Lima). Una vez más, 28 de las comunidades registradas para las provincias de Huarochirí y Yauyos en un censo agropecuario de 1972 llevan aún los nombres de las antiguas reducciones. El problema aquí es que el total de comunidades registradas en el censo asciende a 86, hecho que Ossio atribuye a que “las comunidades de esta región estuvieron expuestas a más cambios que las de la zona de los rucanas antamarcas” (p. 109). A diferencia de lo anotado para estos últimos, en Yauyos los cinco repartimientos consignados en la fuente no remiten a una organización social de carácter prehispánico. Una aproximación a este tipo de organización involucraría, según Ossio, “partir de los ayllus [prehispánicos] que fueron reducidos” (p. 113), los que no serían otros que aquellos pequeños pueblos de la antigua provincia cuyos nombres, si bien no están replicados en las 39 reducciones creadas a fines del siglo XVI, encuentran ecos en registros etnográficos y etnohistóricos del siglo XX. La conclusión de Ossio es categórica: “Hacer reconstrucciones históricas de esta naturaleza para las comunidades andinas contemporáneas ayudaría a determinar con mayor exactitud su grado de vinculación con el pasado prehispánico y, por ende, su cercanía a una condición de indianidad que ha venido siendo sistemáticamente negada por la orientación homogeneizadora” (p. 114 –subrayado en el original).

10 Aunque no debería ser objeto de sorpresa la perdurabilidad a lo largo de siglos de determinados topónimos en espacios relativamente circunscriptos y hasta no hace mucho tiempo de difícil acceso, lo cierto es que el hecho de que la prueba principal de que las comunidades campesinas contemporáneas hundan sus raíces en las reducciones del siglo XVI sea una mera coincidencia de nombres nos parece algo endeble. Unidades sociales que comparten un mismo nombre no tienen por qué ser las mismas. Así, para

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continuar con nuestro ejemplo, el término “Phinaya” designa una “comunidad campesina”, a uno de los ocho “sectores” en los que está dividida y al “centro poblado menor” que preside, y que incorpora a otras cuatro comunidades de la región. La homonimia, sin embargo, es el menor de los problemas. La inflación de comunidades sobre reducciones5 a lo largo del siglo XX remite de inmediato al aumento de un tipo de unidades sociales (“comunidades”) que no encuentran correspondencia –al menos en términos de nomenclaturas o toponimias– con aquellas otras de las cuales se predica su ascendencia (“reducciones”)6. Esto podría relacionarse con el hecho de que los nombres de las comunidades no registrados en las reducciones del siglo XVI podrían remitir a unidades sociales –o subunidades– no consignadas en las fuentes oficiales, tales como los pequeños 200 ayllus de los yauyos a los que ya se hizo referencia. Aunque algo alambicado, el argumento sigue siendo plausible, pero nos enfrenta a dos nuevos problemas: por un lado, muchos de los nombres de las comunidades del siglo XX no se repiten en los nombres de unidades sociales registradas en las provincias y repartimientos donde se instalaron las reducciones –ni tampoco en sus toponimias–; por el otro, desde esta última perspectiva las raíces de las comunidades contemporáneas parecerían atravesar el suelo de las reducciones coloniales hasta tocar las profundidades de los ayllus prehispánicos. Adicionalmente, así planteado, toda esta discusión omite un problema nuclear: el reconocimiento legal de comunidades al comienzo de la segunda década del siglo XX. Rápidamente diremos que la falta de repetición entre los nombres de unidades sociales contemporáneas (comunidades) y pretéritas (reducciones) no necesariamente obedece a una pendiente identificación de eventuales especímenes de las segundas que ayuden a confirmar la ecuación, sino simplemente a que los primeros fueron introducidos tardíamente en los escenarios locales; asimismo, es imposible que los ayllus prehispánicos sean las bases de las comunidades contemporáneas puesto que, en cualesquiera de sus circunstancias históricas, los primeros remiten a realidades sociológicas inconmensurables con las segundas; y esto es así porque, lejos de que las comunidades del siglo XX supongan el “reconocimiento” legal de realidades sociológicas pretéritas que fueron desatendidas durante la primera centuria de la historia republicana, fueron más bien “creaciones” que se impusieron sobre ellas, no sin ignorarlas, mutilarlas e incluso anularlas. Ilustraremos estos puntos con parte de la casuística procedente de la región donde realizamos nuestras propias investigaciones.

11 Hasta donde conocemos, la mayoría de las poblaciones rurales que habitan el macizo del Ausangate están organizadas en comunidades campesinas y ayllus. Mientras que las primeras son resultado de un proceso de incorporación y ordenamiento de las poblaciones “indígenas” (y luego “campesinas” con la reforma agraria de 1969) en el marco de los límites del territorio nacional, los segundos remiten a unidades sociales de otro orden que aparecen sistemáticamente consignadas en fuentes censales disponibles desde al menos fines del siglo XVIII. El estudio de este tipo de fuentes nos coloca ante el siguiente hecho significativo: mientras que desde la década de 1780 y hasta fines del siglo XIX las unidades mínimas que conformaban los repartimientos eran consignadas como “ayllus”, hacia comienzos del siglo XX las mismas comienzan a ser reemplazadas por esas pequeñas repúblicas creadas por el Estado, refrendadas en constituciones y administradas por un ejército de presidentes, vicepresidentes, secretarios, tesoreros, fiscales, jueces de paz y comisiones: las “comunidades”. Los nombres de muchas de estas comunidades no tienen correlato con el de los ayllus registrados para la región

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durante siglo XIX. Así, por ejemplo, el nombre de la comunidad de Phinaya del actual distrito Pitumarca (Canchis) no está registrado en ninguno de los ayllus del ex repartimiento homónimo; y lo mismo ocurre con cuatro de las ocho comunidades del actual distrito de Marcapata (Quispicanchi): Yanacocha-Inca Cancha, Socapata, Unión Arasa y Huaracone. Todos estos nombres están asociados con “comunidades indígenas” que, en calidad de tales, comienzan a ser registradas censalmente a comienzos del siglo pasado. Ahora bien, la encuesta etnográfica nos revela un hecho no menos significativo en términos sincrónicos: ellas están también organizadas en ayllus. Así, por ejemplo, el pueblo de Phinaya está dividido en dos ayllus y el distrito de Marcapta en cuatro, y todos ellos encuentran réplica desde fines del siglo XVIII en los nombres de dos y cuatro de los ayllus de, respectivamente, los ex repartimientos de Pitumarca y Marcapata. Los nombres de estos seis ayllus son también los de seis de las comunidades campesinas de la región, del tipo que Ossio asocia con aquellas que fueron reducidas en torno de las cabezas de reducción –hoy capitales de distrito– de sus respectivos repartimientos: Consachapi e Ilave en Pitumarca (junto con otras dos que también figuran como ayllus a lo largo del siglo XIX: Pampachiri y Capacchapi) y Collana, Sahuancay, Puiqa y Collasuyu en Marcapata. Esta serie de constataciones no está muy alejada del planteo general de Ossio –de hecho, no puede estarlo tratándose de fenómenos de la misma naturaleza–, pero observándola más de cerca no hace sino invertirlo.

12 Hacia fines del siglo XIX, antes de ser reconocido como “comunidad”, el pueblo de Phinaya era un anexo del ayllu Ilave del pueblo de Pitumarca dividido en las mitades mencionadas; y cada una de las primeras cuatro comunidades marcapateñas referidas, antes de ser reconocidas como tales, eran parte asimismo de cada uno de los cuatro ayllus en los que a su vez se dividía el repartimiento. Más allá de los motivos específicos que propiciaron la fragmentación jurídica de estas unidades –y más allá también de la incidencia que un sentido de pertenencia comunitario pueda imprimir en la realidad sociológica de la región–, lo cierto es que actualmente todas ellas continúan funcionando como ayllus e incluso, observándolas desde la perspectiva de estos últimos, parecerían aglutinar lo que desde la perspectiva de la comunidad aparece como separado o desunido. En este sentido, las ocho comunidades campesinas del distrito de Marcapata se traducen en cuatro ayllus del mismo modo en que los ocho sectores (comuneros y privados) del territorio de Phinaya lo hacen en dos, a los que pertenecen todas las familias que los componen. Y es aquí a dónde queríamos llegar para poner a prueba la tesis del libro: si las poblaciones rurales contemporáneas del Ausangate están organizadas en ayllus, y si los nombres de estos ayllus coinciden mayormente con el de aquellos otros ayllus que durante el largo siglo XIX conformaban los repartimientos de la región, ¿no sería más probable que esos primeros ayllus sean los que “hundan sus raíces” en los segundos en lugar de hacerlo las comunidades contemporáneas? No sólo creemos que éste es el caso sino que, además, buena parte de los resultados del análisis genealógico que hemos dedicado a las familias de los ayllus contemporáneos verifican que provienen de aquellos otros ayllus registrados en los censos del siglo XIX, permitiendo de este modo advertir la continuidad de estos últimos en los primeros7. En otras palabras, los ayllus de fines del siglo XVIII y los ayllus contemporáneos no son dos entidades inconmensurables; en uno y otro caso estamos en presencia de una misma forma de organización social que ha perdurado en el tiempo. Pero esta perdurabilidad se basa menos en una reconstrucción histórica –como la recomendada por Ossio a fin de tender puentes con el pasado prehispánico– que en la constatación etnográfica –y genealógica– de una suerte de bisagra: un tipo de organización social (el ayllu) que, sin

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dejar de nutrirse en el pasado, no necesita servirse de él –al menos no en términos historiográficos– para exhibir sus atributos contemporáneos. En resumen, mientras que Ossio propone una suerte de “evolución” en lo que respecta a las formas de organización social de las poblaciones indígenas del Perú contemporáneo –de los ayllus a las reducciones, y de estas últimas a las comunidades–, la casuística del Ausangate nos coloca ante un fenómeno alternativo: la existencia del ayllu como forma de organización social característica de las poblaciones de la región8.

13 Esta inversión es consecuencia de otra, más profunda y de orden conceptual. Tal y como ha sido formulada, la tesis del libro adolece de un problema generalizado en la antropología de los Andes peruanos: el empleo indistinto de los conceptos de “comunidad”, “ayllu”, “pueblo” y “andino”. En rigor, estos términos corresponden a órdenes de cosas o niveles de análisis distintos: instituciones, patrones de organización social, puntos geográficos y expresiones culturales que pueden coexistir e incluso solaparse pero que no se reducen necesariamente entre sí9. En el transcurso de tres páginas, Ossio presenta a “Andamarca” como un “distrito”, una “comunidad”, un “pueblo” y un “pueblo matriz” que, en calidad de tal, “constituye la expresión más tangible y permanente de la organización dualista con que, fieles a la tradición andina, sus moradores organizan el espacio, el tiempo y las relaciones sociales” (p. 286). Desde la realidad etnográfica del Ausangate, nosotros más bien diríamos que, planteado en estos términos, el conjunto de las provincias que compone la región está dividido en una serie de distritos administrados desde sus respectivas capitales distritales – eventualmente nacidas en el proceso reduccional–, cuyos respectivos territorios están compuestos por un número variable de comunidades y de ayllus, siendo las primeras reconocidas y los segundas ignorados por el Estado. Coexistiendo en un territorio común, todos estos elementos son los que conforman un pueblo. Aquellas características que Ossio predica del “pueblo matriz” –las “bases” de la cultura andina”– nosotros las encontramos al nivel de los ayllus; es más, las creemos sus características constitutivas. Si en Andamarca ello no ocurre, quizás sea porque el ayllu como forma de organización social ha dejado de existir allí, como parece haber sido el caso con los dos tipos de ayllu que Ossio identifica en la época contemporánea: “localizados” y “no localizados”10. Sin embargo, el asunto se torna más complejo puesto que en Andamarca se conservan “vestigios” (p. 176) de este tipo de organización, al tiempo que también “se reconoce una colectividad de base bilateral que recibe el nombre de ayllu” (p. 176), cuyo sentido más restringido se asocia con un “grupo de parentesco ego-centrado, grupo cognático o parentela” (ibid.). Aquí comenzamos a entrar en terreno resbaladizo. ¿Resulta ahora que el ayllu sí existe en Andamarca y que allí el término “ayllu” es sinónimo de parentesco? Sí, y ello es así porque no podría ser de otra forma. El problema reside en otra parte, que no es sino la otra cara de la moneda de la crítica que venimos realizando hasta aquí.

14 La discusión que nuestro autor propone sobre el ayllu es simétrica, pero inversa, a la desplegada en relación con la comunidad –y a la vez conducente al mismo resultado. En este caso partimos de modelos concebidos por el análisis antropológico acerca de la sociedad incaica antes de la conquista basados, a su vez, en modelos descubiertos en fuentes tempranas; estos modelos se elevan al estatus de “paradigma” y, a partir de ellos, se constata la perdurabilidad de algunas de sus premisas: ayllupanacacaru aylluaylluayllu

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15 Vemos entonces que el ayllu es una agrupación social prehispánica paradigmática basada en el parentesco. Asimismo, el término “ayllu” se empleó también en el pasado para designar un asentamiento en un mismo espacio jurisdiccional, como es el caso de una comunidad. En este sentido, el ayllu es expresión de “diferentes modalidades de agrupaciones sociales” (p. 157). Ahora bien, en la actualidad, y como resultado de la coexistencia dispar e incluso contradictoria de algunas o de todas las premisas referidas, “la mayor parte de estas [agrupaciones], a excepción de la misma comunidad, [aparecen] luciendo límites no muy definidos” (p. 185).

16 Desde la perspectiva que ofrece la casuística del Ausangate, la sintomatología es la misma, pero el diagnóstico es inverso. Aquí el ayllu no es sino una agrupación social basada en las relaciones de parentesco (descendencia y alianza matrimonial) entre sus miembros constitutivos11. Ahora bien, en el ayllu se conjugan una serie de principios o premisas discrepantes e incluso contradictorias entre sí que, en lugar de presentarse como retazos de eventuales agrupaciones sociales prístinas, dan cuenta más bien de su plasticidad y complejidad contemporánea y cuestionan seriamente, de este modo, la eficacia exegética de los modelos antropológicos diseñados para desentrañar sus misterios. Esto no significa que el ayllu sea expresión de diversas modalidades de agrupaciones sociales ni que, en virtud de ello, sus límites sean poco precisos. No: lo que esto significa es que el ayllu, en su complejidad interna, no puede reducirse a uno u otro de los modelos más o menos formales que fueron diseñados para explicarlo –sobre todo en su versión prehispánica–, ni que la falta de definición de sus límites surja del contraste con otras agrupaciones como la “comunidad”. Para expresarlo en términos positivos, el ayllu en la región del Ausangate es expresión de un tipo de organización social en el que se conjuga las bases que promueven la continuidad de la cultura andina –para emplear la fraseología de Ossio–, mientras que la comunidad no necesariamente promueve el reconocimiento de la cultura en cuestión ni descansa sobre las bases que la sustentan. Ello explica por qué dos hermanos que habitan un mismo pueblo pueden pertenecer a un mismo ayllu pero no así a una misma comunidad, tal como sucedía en la anécdota inicial de Phinaya.

17 Para concluir, esta serie de contrastes apuntan directamente a un aspecto central de la obra que también es de orden conceptual, e incluso teórico: el sesgo teleológico que la anima, y que se traduce en el postulado de la existencia y la perdurabilidad a través del tiempo de una “unidad andina” que reposa sobre una “matriz sociocultural de origen prehispánico”. Tal y como lo entendemos, el problema no radica tanto en la imposibilidad de identificar, en el presente o en el pasado, denominadores comunes a partir de los cuales establecer generalizaciones de calibre diverso con miras a promover la añorada unidad como, por el contrario, en que la matriz desde la cual se la concibe termina siendo, en lugar de un paradigma plausible de contrastación, una invención12 en la que, a lo largo de todas sus transformaciones, la identidad de un único modelo resulta inconfundible.

18 Un párrafo aparte merece un último aspecto del libro de Ossio sobre el que no quisiéramos dejar de pronunciarnos en relación con una segunda cuestión de método. Se trata de los pronunciamientos sobre el futuro de los campesinos indígenas del Perú contemporáneo ante la avasalladora “orientación homogeneizadora”. El esfuerzo de “destacar [las] peculiaridades que conservan los campesinos indígenas, que los vincula con el período prehispánico” (p. 57) no significa negar la existencia del cambio, sino la posibilidad de promover una cuota de realismo e insistir en que, ignorándolas,

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“difícilmente se les podrá ayudar para que accedan a los instrumentos que les permitirán marchar al ritmo de la globalización” (ibid.). Y esto es así porque los campesinos fueron privados “de su derecho a ser diferentes. Es decir, de su derecho a decidir sobre su propio desarrollo y a gozar de una cierta autonomía, ya que aunque diferentes, también tienen discernimiento, raciocinio y capacidad para dialogar” (p. 58); o, en otras palabras, “no por ser diferentes [tienen] menos capacidad racional o creativa que aquellos sectores poblacionales forjados en la cultura occidental o que han accedido a las tendencias modernas” (p. 59). Ahora bien, reconocer “que los pueblos indígenas tienen el mismo potencial que otros seres humanos no quiere decir que se admita que disponen de los mismos instrumentos y conocimientos que aquellos que marchan al ritmo de la historia y de las reglas de juego que viene imponiendo la globalización” (ibid.). Para ello resulta imperioso volver a propiciar al diálogo intercultural con miras a “generar una educación adecuada que permita abrir los horizontes de los pueblos que secularmente han vivido enclaustrados, a fin de que entiendan los requerimientos del mundo moderno y de que su creatividad encuentre cauces más apropiados para las actuales circunstancias” (ibid.). En última instancia, “mientras que el aislamiento [los] prive de poder comprender el comportamiento de los otros, el capitalismo por sí solo no será la única fuente de sus problemas, sino la falta de educación, que les impedirá manejar, como otros, las premisas en las que se funda dicho sistema económico y, en general, la economía de mercado” (p. 63). Para salir de este estado de cosas, Ossio tiene dos ideas en mente: el acceso a la educación formal y el fomento de las industrias extractivas: “siendo la educación el principal medio para alcanzar la modernidad, ella debe impartirse tratando de adecuarse a la realidad cultural de estos pueblos” (p. 447); mientras que “con una buena dosis de responsabilidad, las industrias extractivas pueden constituirse en magníficos polos de desarrollo que ayuden, por un lado, a sacar del aislamiento a muchos pueblos que viven sin medios de comunicación y sin servicios públicos y, por otro, a reafirmar las premisas culturales de estos pueblos, dándoles una nueva dimensión al servicio de un desarrollo sostenible” (p. 60).

19 Dejando de lado cualquier tipo de opinión sobre estos pronunciamientos, se trata de expresiones de un mismo fenómeno en virtud del cual la gimnasia de una ética de la responsabilidad cede terreno a la de una ética de la convicción o, en otros términos, la vocación científica se ve mancillada por la no menos noble, pero ajena al ámbito de la primera, vocación política.

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SENDÓN Pablo F. 2016 Ayllus del Ausangate. Parentesco y organización social en los Andes del sur peruano, Fondo Editorial de la Pontificia Universidad Católica del Perú/Instituto de Estudios Peruanos/Centro de Estudios Regionales Andinos Bartolomé de las Casas, Lima.

2018 “Ferreira Francisco y Billie Jean Isbell (eds), A return to the village: community ethnographies and the study of Andean culture in retrospective”, Journal de la Société des américanistes, 104 (1), p. 308-314.

2018 “Ferreira Francisco y Billie Jean Isbell (eds), A return to the village: community ethnographies and the study of Andean culture in retrospective”, Journal de la Société des américanistes, 104 (1), p. 308-314.

SALOMON Frank y Mercedes NIÑO-MURCIA 2011 The lettered Mountain. A Peruvian village’s way with writing, Duke University Press, Durham/ London.

NOTAS

1. Las ciencias sociales desempeñaron en el Perú un papel protagónico en la consolidación de este tipo de orientación, particular más no exclusivamente aquellas de sesgo de izquierda en sus variantes “marxista” y “funcionalista” –término empleado varias veces en la obra y que, sin haberse explicitado su sentido, no termina de entenderse del todo–, así como sus respectivos centros de desarrollo institucional, tales como la Universidad Nacional Mayor de San Marcos o el Instituto de Estudios Peruanos (p. 55). 2. Penúltima división político-administrativas en la cual se inserta la “comunidad” desde fines del siglo XIX. 3. Al inicio de la obra, Ossio adelanta este postulado con dos precisiones que haremos explícitas más adelante: “[las] reducciones fueron la base de las comunidades indígenas, hoy llamadas campesinas, cuyo reconocimiento legal […] se inició a principios del siglo XX” (p. 44). 4. Caracterizados como “unidades sociopolíticas originadas en el sistema de encomiendas […] que pasarían a formar parte de los corregimientos, los que, a su vez, con el tiempo, darían lugar a las provincias que se integraron en los departamentos” (p. 104). 5. En el caso de los rucanas antamarca casi el doble (15/8) y en el de los yauyos casi el triple (86/28). 6. El autor es consciente de ello, por lo que no puede dejar de admitir, con respecto a los yauyos, que “es muy probable que un estudio de las 58 [comunidades] restantes pueda ayudarnos a identificar las [reducciones] que nos faltan” (p. 109). Sin embargo, al terminar de escribir estas líneas, nos vimos necesariamente obligados a cotejar el ejemplo de los rucanas antamarcas con el análisis que el propio Ossio les dedicó oportunamente en su investigación sobre la comunidad de Andamarca. Tras examinar lo que entendemos es la misma información de base, entonces concluía lo siguiente: “Esto quiere decir que Andamarca no surge con las reducciones que por 1580 hace el Virrey Toledo” (Ossio Acuña 1992, p. 67).

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7. Sendón 2016. 8. Aunque en principio podría pensarse que esta es una característica peculiar de la zona de estudio, ello es dudoso. Refiriéndose brevemente a la organización social de la actual comunidad campesina de San Andrés de Tupicocha en la provincia de Huarochirí –coincidente con el segundo ejemplo de Ossio antes citado– Frank Salomon y Mercedes Niño-Murcia sostienen que ella está dividida en una serie de ayllus, que estos ayllus son grupos de parentesco, que estos grupos funcionan de manera paralela a la comunidad haciéndolo “por su propia voluntad, ya que el Estado reconoce a la comunidad como un todo y no tiene ningún interés en su segmentación interna” (2011, p. 62 –nuestra traducción). 9. Nos hemos referido específicamente a este problema en la última reseña que publicamos en este medio (Sendón 2018). 10. “En Andamarca, este tipo de ayllu ha desaparecido. Desafortunadamente, ignoramos cuándo sucedió y las circunstancias que influyeron en ello (p. 171). 11. Lo que no quiere decir que no se exprese asimismo en otros órdenes de cosas. 12. En el sentido específico otorgado por Adam Kuper (1988) al término.

AUTORES

PABLO F. SENDÓN

Conicet, Argentina

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MACLAREN WALSH Jane et Brett TOPPING, The man who invented Aztec crystal skulls. The adventures of Eugène Boban

Pascal Riviale

RÉFÉRENCE

MACLAREN WALSH Jane et Brett TOPPING, The man who invented Aztec crystal skulls. The adventures of Eugène Boban, Berghahn Books, New York/Oxford, 2018, 348 p., bibliogr., index, 81 ill. (en noir et blanc), photos (en noir et blanc).

1 Le nom d’Eugène Boban est aujourd’hui étroitement associé à ces fameux « crânes de cristal », qui attisent l’imagination et suscitent la production de tant de pages internet au contenu scientifico-mystique généralement peu crédible. Sa réputation paraît désormais aussi sulfureuse qu’elle fut autrefois excellente. Ces deux extrêmes sont sans doute tout autant discutables, et c’est le premier mérite de cette biographie que lui consacrent Jane MacLaren Walsh et Brett Topping que de proposer une vision du personnage d’autant plus crédible qu’elle est remarquablement bien documentée. Au- delà de la seule étude de la vie d’Eugène Boban, ce livre aborde plus largement la question du collectionnisme au XIXe siècle et nous éclaire sur les débuts de l’archéologie américaniste.

2 L’ouvrage est composé de vingt chapitres, qui suivent les grandes étapes de la vie d’Eugène Boban, tout en s’attachant plus particulièrement à l’étude détaillée de quelques objets majeurs passés entre les mains de l’antiquaire, ainsi que certaines contrefaçons – plus particulièrement les crânes de cristal de roche. C’est cette fine analyse qui permet aux auteures, comme le lecteur le verra, de mieux cerner les activités professionnelles de Boban, y compris dans leur part la plus trouble.

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3 Rappelons ici quelques jalons de la vie de cet intrigant personnage. Eugène Boban est né à Paris le 10 mars 1834. Issu d’une famille de petits artisans (son père était gainier, c’est-à-dire fabricant de gaines, d’étuis, d’écrins), rien ne le prédisposait à devenir un antiquaire unanimement reconnu par les milieux académiques et muséographiques pour ses connaissances en matière d’archéologie précolombienne. Dans le contexte de la fièvre de l’or qui attire tant d’aventuriers vers la Californie à partir de 1849, le jeune Eugène (il a alors 19 ans) émigre en 1853 dans cette partie du continent américain, avant de s’installer en 1857 à Mexico, où il dira avoir vécu ses plus belles années. Il rentre en France en 1869 afin de tenter de faire avancer ses affaires. Il ouvre à Paris une première boutique d’antiquités mexicaines. Peut-être désireux de donner un nouveau tour à ses activités commerciales, Boban repart en 1885 à Mexico, où il ouvre un magasin-musée. Empêtré dans un scandale archéologique, il quitte précipitamment le Mexique l’année suivante pour s’installer à New York. Il se réinstalle définitivement à Paris en 1887, où il poursuit ses activités d’antiquaire et d’américaniste reconnu, jusqu’à son décès en 1908.

4 Pour reconstituer la vie de Boban les auteures se sont appuyées sur deux principaux fonds d’archives : ses papiers personnels, aujourd’hui conservés à l’Hispanic Society à New York, et la correspondance reçue par Boban, conservée au département des manuscrits occidentaux à la Bibliothèque nationale de France (BNF). Le premier fonds comprend notamment des notes et des souvenirs manuscrits rédigés par Boban, ainsi que des pièces diverses relatives à ses activités commerciales ; ces papiers furent acquis à sa mort par un libraire allemand qui les revendit au collectionneur et bibliophile Hutington. Le second fonds compte plusieurs volumes de lettres reçues par Eugène Boban durant toute sa carrière de marchand ; on ignore dans quelles circonstances cette correspondance est entrée à la BNF, mais l’on pourrait supposer que cela ait un lien avec le désir de Boban d’assurer sa postérité. Il faudrait rajouter un troisième fonds (conservé aux Archives nationales) : celui de la Commission scientifique du Mexique établie en 1864, dans lequel le colonel Doutrelaine – le représentant à Mexico de cette commission – évoque les envois successifs faits par Boban dans la perspective de l’Exposition universelle de 1867 (Legoff et Prévost Urkidi 2011). Par ailleurs, les catalogues de vente successivement produits par Boban nous permettent d’avoir un bon aperçu du contenu de son magasin. Enfin, les données plus personnelles ont pu être reconstituées, notamment à partir des archives de Paris (déclaration de décès ; sommier foncier ; etc.) et des minutes des actes notariés conservées aux Archives nationales.

5 L’étude attentive des papiers d’Eugène Boban a permis à Jane Walsh et Brett Topping d’affirmer son intérêt précoce et sincère pour les cultures autochtones des Amériques : sa rencontre avec des groupes amérindiens vivant alors en marge des zones urbanisées de Californie semble avoir été déterminante. Ses notes de souvenirs montrent comment lui-même préfère très vite demeurer lui aussi à distance de ses congénères pionniers et orpailleurs pour vivre le plus souvent possible en compagnie des Amérindiens. Il semble d’ailleurs avoir commencé à collecter des artefacts auprès d’eux dès ses premières années américaines. Ce goût pour l’ethnographie puis l’archéologie américaniste n’a fait que se renforcer à partir de son installation au Mexique ; c’est aussi dans ce nouveau pays d’accueil qu’il en a fait progressivement une activité professionnelle à part entière, bénéficiant des circonstances favorables qui pouvaient se présenter : la politique des libéraux mexicains visant au démantèlement de

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nombreux monastères (ce qui lui permit sans doute de récupérer de nombreux objets d’art religieux de l’époque coloniale), puis l’intervention militaire française, l’arrivée de l’empereur Maximilien (dont il se targuait d’être « l’antiquaire ») et sa connexion avec la commission scientifique du Mexique. Les auteures ont su tirer le meilleur parti des notes de Boban (conservées, on l’a dit, à l’Hispanic Society) pour mettre en lumière ces premières années californiennes puis mexicaines dont on ne savait jusqu’alors absolument rien. Rentré en France en 1869, Boban a su mêler ses talents pour le commerce et son réel intérêt pour les cultures amérindiennes afin d’asseoir sa réussite professionnelle. Bien qu’ayant reçu une courte éducation scolaire, Boban a constitué seul son savoir américaniste, qui s’avère d’ailleurs plutôt solide et respecté par ses contemporains : l’analyse de sa correspondance montre l’étendue de son réseau au sein des cercles de l’archéologie américaniste et préhistorienne, de l’anthropologie et des musées ethnographiques (on citera par exemple les noms de Hamy, Mortillet, Quatrefages, Bastian, Uhle, Holmes, etc.). On sait d’ailleurs que la relation nouée sur le long terme avec Ernest-Théodore Hamy, directeur du musée d’ethnographie du Trocadéro, leur fut réciproquement profitable (Riviale 2018). À ce propos, une information donnée pages 227 et 246 est très intrigante : dans ses notes manuscrites Boban aurait écrit vers 1884 ou 1885 que Hamy escomptait acheter ses collections américanistes pour la somme de 25 000 francs. Cette affirmation est très surprenante dans la mesure où Hamy disposait d’un budget d’acquisition quasiment nul pour son musée. Il savait donc pertinemment qu’il n’aurait pas les moyens nécessaires pour cette acquisition, à moins qu’il n’ait espéré pouvoir disposer d’une partie du produit de la vente des bijoux de la Couronne de France, ressources sur lesquelles il aurait également compté pour acheter la collection péruvienne du docteur Macedo alors en vente à Paris1. Le processus engagé par le gouvernement au début des années 1880 pour faire autoriser cette grande vente aux enchères prit beaucoup plus de temps que prévu et finalement le musée d’ethnographie ne put bénéficier de cette manne exceptionnelle.

6 Boban était certainement soucieux d’affirmer sa réputation d’américaniste sérieux, d’où ses publications sur les cultures matérielles et l’iconographie du Mexique préhispanique ; certains de ses travaux (notamment sur les codex mexicains) faisaient même autorité de son vivant. Le livre de Walsh et Topping recense bien entendu l’intégralité de sa production scientifique. Cette réputation et son talent pour dénicher des pièces exceptionnelles ont assuré pendant des années le succès de son commerce de curiosités extra-européennes et d’archéologie préhistorique européenne. Après avoir démarré de manière très modeste à Mexico, ses contacts avec les officiers du corps expéditionnaire français et la commission du Mexique – par l’intermédiaire du colonel Doutrelaine –, lui ont permis de développer ses activités commerciales et surtout sa renommée. Le livre détaille ses entreprises successives : ses boutiques à Paris (d’abord rue de Sommerard, puis boulevard Saint-Michel et enfin avenue d’Orléans), sa tentative avortée de retour au Mexique en 1885, ses ventes – qu’il espérait spectaculaires mais en définitive assez décevantes – à New York entre 1886 et 1887, et finalement sa rencontre en 1889 avec le collectionneur Eugène Goupil, un industriel français nostalgique de sa vie antérieure au Mexique. Au travers de l’analyse attentive de ses diverses collections, les auteures soulignent le fait que finalement, hormis quelques exceptions, les plus belles pièces passées par ses mains furent des achats auprès d’autres collectionneurs (le comte de Peñasco, Melgar, Jupeaux, Labadie, Fuzier, Constantini, Waldeck), plus que ses propres collectes. Un autre indice de la place particulière prise par Boban sur le marché de la curiosité ethnographique réside dans la diversification rapide de son fonds de

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commerce. Quelques années après son retour en France, même si son magasin de la rue de Sommerard portait l’enseigne « Antiquités mexicaines », il y proposait des collections d’origine nettement plus diversifiée : Boban avait étendu largement et durablement son champ d’action aux artefacts du monde entier et aux vestiges de la préhistoire européenne. Pour preuve, les collections acquises par Alphonse Pinart en 1874, qui si elles sont surtout célèbres pour ses pièces mexicaines, provenaient également d’Amérique du Sud (Colombie, Équateur, Pérou, Brésil) ou des îles du Pacifique sud. Une étude plus poussée des diverses collections ayant transité par le magasin de Boban serait sans doute riche d’enseignement : par exemple, les objets péruviens offerts par Pinart à l’État (que l’on peut supposer avoir aussi été vendus par Boban) semblent avoir une certaine homogénéité d’origine (côte centrale et environs de Pascamayo) ; l’analyse détaillée des papiers de Boban conservés à New York permettrait peut-être d’en identifier le précédent propriétaire.

7 Si de son vivant Boban jouissait d’une grande estime de la part de ses contemporains du monde savant, de par sa réelle bonne connaissance des cultures matérielles précolombiennes et préhistoriques, on découvre aujourd’hui quelques zones d’ombre. Tout d’abord, ses méthodes pour accroître son fonds de commerce ne semblent pas avoir toujours été très claires. Les auteures nous en livrent un exemple en évoquant quelques objets probablement soustraits au Museo Nacional de Mexico que le marchand parvint à capter on ne sait comment (p. 133). Mais son image est surtout écornée par quelques grandes tromperies archéologiques auxquelles il est désormais associé (de près ou de loin, cela reste encore à déterminer, mais le fait est indéniable), même si en comparaison d’autres collections de son temps, celles passées entre les mains de Boban contenaient apparemment peu de pièces douteuses. Jane Walsh relève la présence d’une première contrefaçon dans les collections de l’antiquaire vers 1864, dans le catalogue qu’il rédigea à Mexico à la demande du colonel Doutrelaine : il s’agit d’une plaque d’obsidienne gravée, supposément trouvée à Teotihuacan. Or Boban, qui fréquentait souvent les lieux et aimait à fureter un peu partout, ne pouvait ignorer que plusieurs ateliers de contrefaçons y étaient établis. Les auteurs relèvent que l’histoire de cet objet d’obsidienne a varié selon les interlocuteurs de Boban, preuve selon elles qu’il était conscient d’avoir affaire à un faux ; on pourrait modérer la portée de cet argument en notant que, comme tant d’autres antiquaires, il livrait probablement l’histoire qui, selon les circonstances et les interlocuteurs, lui paraissait la plus séduisante. Néanmoins, l’on peut en effet considérer cet exemple (p. 154-157) comme une première faille dans la cuirasse de « Monsieur Boban ». La présence autour de Mexico de nombreux militaires français a dû contribuer notablement au développement du commerce archéologique et, corollairement, à la production croissante d’imitations frauduleuses ; il était sans doute difficile pour l’antiquaire de résister à la tentation de vendre à bon prix des contrefaçons à des clients qui, pour la plupart, n’y connaissaient strictement rien. Mais évidemment ce sont surtout les crânes de cristal qui ont fait couler le plus d’encre et qui ont contribué à ternir rétrospectivement sa réputation (ou à l’inverse à faire découvrir ce personnage par un plus large public avide de mystère et de science-fiction).

8 Si le crâne est très présent dans l’iconographie au Mexique, notamment dans les tzompantli, il l’est aussi dans celle de l’Europe catholique, depuis le Moyen Âge. Il n’est pas impossible que l’idée de cette tromperie ait émergé en voyant des œuvres ou des objets extraits des monastères mexicains démantelés dans le cadre de la politique libérale de la fin des années 18502. Grâce aux analyses et aux observations

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microscopiques réalisées sur certaines de ces pièces conservées par la Smithsonian Institution, le British Museum et le musée du quai Branly – Jacques-Chirac, Jane Walsh a démontré indubitablement et définitivement l’origine moderne de ces objets (qui jusqu’à une date récente étaient considérés comme de véritables « trésors muséographiques »). Les auteures recensent (p. 208-214) une dizaine de crânes de cristal de roche « mexicains » documentés au XIXe siècle (et probablement produits à cette époque) et démontrent leur lien indéniable avec Eugène Boban : quasiment tous sont en effet passés entre les mains de ce marchand ! En l’état actuel de la documentation, il est difficile d’établir jusqu’à quel point Boban a été compromis dans ces fabrications frauduleuses. N’en demeure pas moins qu’il en a clairement profité en les offrant à la vente dans son magasin ou bien par le biais de ses catalogues. Disons qu’au mieux, s’il n’a pas été à l’origine de leur fabrication, il devait subodorer la tromperie, mais n’en disait rien. Les auteures notent d’ailleurs que le plus souvent Boban prenait bien garde de ne pas écrire dans ses catalogues qu’il s’agissait de crânes précolombiens, mais la manière dont il les présentait laissait planer le doute : ainsi dans le catalogue de la grande vente aux enchères organisée par lui à New York en décembre 1886, le crâne de cristal (qui devait plus tard aboutir dans les collections du British Museum) n’était pas ouvertement présenté comme préhispanique, mais le marchand écrivait que l’objet venait du Mexique puis glissait à la suite un commentaire sur l’importance du crâne humain dans la production matérielle préhistorique, amenant nombre de ses lecteurs à établir un lien entre la notice sur le crâne de cristal et l’information « historique » (p. 204). Les auteures relèvent finalement une anecdote troublante : en 1900, soit quelques années avant sa mort, Eugène Boban donna une interview au cours de laquelle il déclara que la plupart des crânes de cristal étaient des contrefaçons, mais qu’il était l’un des seuls à pouvoir les reconnaître. Pourquoi cette sortie fracassante ? Il s’agissait peut-être d’un pied de nez adressé aux « spécialistes » et une manière provocatrice d’affirmer qu’il était encore le maître du jeu ; une sorte de revanche auprès du monde académique pour un homme qui s’était fait tout seul et avait constitué son savoir – indéniable – par lui-même. Après tout, sa réputation comme mexicaniste n’était plus à faire et, étant probablement retiré des affaires commerciales, il ne risquait plus grand-chose à lâcher cette information qui pouvait aussi bien le dédouaner que passer pour un aveu. Cette soif de reconnaissance l’avait sans doute animé durant toute sa carrière professionnelle ; au soir de sa vie, ce désir lui paraissait peut-être plus dérisoire.

9 Ce livre consacré à la personnalité complexe de l’antiquaire Eugène Boban peut donc être considéré comme une contribution majeure non seulement à la biographie de ce personnage étonnant, mais plus largement à l’histoire de l’américanisme naissant au XIXe siècle. Cet ouvrage très documenté offre en outre le plaisir d’être d’une lecture aisée et agréable. On ne peut que le recommander tant au spécialiste de l’histoire de l’archéologie qu’au néophyte qui souhaiterait s’initier à ce champ d’étude.

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BIBLIOGRAPHIE

LEGOFF Armelle et Nadia PRÉVOST URKIDI (éd.) 2011 Homme de guerre, homme de science ? Le colonel Doutrelaine au Mexique. Édition critique de ses dépêches (1864-1867), Comité des travaux historiques et scientifiques, Paris.

MONGNE Pascal 2010 « Du Golgotha au tzompantli. Les crânes “aztèques” en cristal de roche », Gradhiva, 11, p. 181-187.

RIVIALE Pascal 2018 « L’anthropologue et l’antiquaire : les relations entre Ernest Théodore Hamy et Eugène Boban », in José Contel et Jean-Philippe Priotti (dir.), Ernest Hamy, du Muséum à l’Amérique. Logiques d’une réussite intellectuelle, Presses universitaires du Septentrion, Villeneuve d’Ascq, p. 103-117.

NOTES

1. Information communiquée par Manuela Fischer, responsable des collections sud- américaines à l’Ethnologische Museum de Berlin (7 novembre 2017). 2. Sur cette ambivalence de l’iconographie mortuaire au Mexique voir l’hypothèse intéressante de Pascal Mongne (2010, même si l’auteur me semble pousser un peu trop loin ses conclusions).

AUTEURS

PASCAL RIVIALE

Archives nationales, chercheur associé au centre Erea du Lesc, membre associé de l’Institut français d’études andines

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