Jean Cottereau, Dit Jean Chouan, Visiblement Interprété Et Fait Longtemps Après Coup, Et La Photographie De La Ferme Des Poiriers
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JEAN COTTEREAU. JEAN COTTEREAU dit JEAN CHOUAN DU MÊME AUTEUR (Nouveautés et réimpressions) LE SOLDAT CHAPUZOT (30 mille), Gautier-Languereau. CHAPUZOT EST DE LA CLASSE (32 mille), Gautier-Languereau. SIX CENT MILLE FRANCS PAR MOIS (46e mille), Bonne Presse. GALUPIN EN AMÉRIQUE SÈCHE (39 mille), Bonne Presse. LE SOUS-PRÉFET DE RIGOMAS (vient de paraître), Bonne Presse. LES EXPLOITS DE JEAN CHOUAN (50 mille), Baudinière. MONSIEUR L'ESPION ET SA FILLE (40e mille), Marne. BERLINGOT ET RADINGOIS, CONTRE-ESPIONS (38e mille), Marne. LES TRIBULATIONS DE STANISLAS GOBICHON, PETIT PROPRIÉ- TAIRE (5 mille), Delalain. LE WAGON DE 3e CLASSE (28e mille), Mame. HISTOIRE ANECDOTIQUE DES ROTHSCHILD (15 mille), Aux publications de « l'Argent », rue de la Bourse, 10. LA FIANCÉE DE BRUMAIRE (21 mille), Marne. L'IDYLLE DANS LA VILLE ROUGE (19 mille), Marne. LE CHATEAU D'UN NOUVEAU RICHE (12e mille), France-Edition. A paraître : L'HEURE DU NOUVEAU PAUVRE (roman). GALUPIN FAIT DU TOURISME (roman d'aventures gaies). LA MAISON SOUS SCELLÉS (roman). LES DESSOUS DE WATERLOO (Histoire des Rothschild, suite). DRUMONT ET SON CYCLE (scènes et portraits). FRANÇOISE L'EXILÉE (roman). JEAN DRAULT Jean Cottereau dit Jean Chouan ... ce fameux bois de Misedon où le premier des Chouans, un Condé de broussailles, Jean Cotte- reau, avait toute sa vie combattu... BARBET D'AUREVILLY. (Le Chevalier des Touches). " 17, Rue Soufflot, Paris (Ve) 19 27 JEAN COTTEREAU DIT JEAN CHOUAN 1 UN REPORTAGE EN 1820 Voici Jean Chouan devenu héros de cinéma. Raconté dans un ciné-roman de M. Bernède, in- titulé Jean Chouan, le chef légendaire de la Chouannerie a été « projeté sur l'écran » — c'est le terme — cent trente et un ans après sa mort qui eut lieu le lendemain de celle de Robespierre. Sans exiger, dans un roman, « toute » la vé- rité historique, il est permis d'estimer trop fan- taisiste la façon dont un partisan du Roi a été présenté par un romancier de talent, mais un peu trop admirateur des « grands ancêtres. » Nous avons essayé de fixer les traits, de retra- cer les gestes du vrai Jean Chouan dans notre roman Les Exploits de Jean Chouan, publié en fé- vrier 1926. Un troisième roman avait paru sur Jean Chouan à la fin de 1925 (1). Le lecteur finissait par être dérouté. Une monographie de Jean Chouan s'imposait. La voici avec des documents sur ses parents et sur la postérité du dernier survivant de cette fa- mille décimée par la guerre et l'échafaud. Ce n'est pas dans les pièces officielles des Ar- chives qu'il faut chercher la vérité sur lui et sur la Chouannerie. Je ne prétends pas blâmer M. Jean Morvan d'avoir, il y a quelque dix ans, publié Les Chouans de la Mayenne, d'après les Archives de Laval. Son livre révèle ce que pensaient des chouans la Convention et l'administration républicaine, c'est-à-dire leurs adversaires, et cela était curieux à connaître. Mais, depuis 1789. les pièces officielles qui ont été recueillies par les Archives sont nécessaire- ment des pièces de parti, puisque c'est un parti qui est toujours au pouvoir et que ce pouvoir lutte contre une opposition. M. G. Lenôtre a écrit dans La Mirlitantouille, titre de son livre sur les Chouans de Bretagne : « Il faut bien avouer que l'histoire des Chouans n'est connue, à proprement parler, que par les documents émanés de leurs adversaires. » (1) Il y a cinq ans, un roman déjà intitulé Jean Chouan, de R. Duguet et J. Rochebonne avait été édité à la Bonne Presse. Les chouans étaient une opposition, et une op- position sans journaux, sans archives, sans ora- teurs pour répondre aux accusateurs de la Con- vention. Leurs chefs étaient des paysans illettrés, sur- tout dans la première période, celle qui précède de six ans l'époque où Balzac a situé son roman célèbre : Les Chouans. Comment connut-on la vérité sur eux ? Des curés, des bourgeois, des nobles de l'Ouest racontèrent leurs conversations avec d'anciens chouans devenus ou redevenus cultivateurs, her- bagers, tisserands ou marchands de bestiaux. A partir de 1815, il y eut une floraison de bro- chures publiées à Laval, à Rennes, à Nantes, au Mans, à Caen. L'histoire de mille petits mouve- ments disséminés, reliés seulement par un même idéal, fut ainsi racontée par des centaines de re- portages et d'interviews. Ce n'est pas à notre époque qu'il conviendrait de faire fi du reportage ni de l'interview, autre- ment vivants que les pièces officielles et pour le moins tout aussi sincères et souvent moins sus- pects qu'elles. Un grand reportage, en 1820, domina tous les autres, essaya de ramasser l'ensemble des faits concernant la Chouannerie en deux volumes mo- destement intitulés Lettres sur l'origine de la Chouannerie. Un beau jour, un monsieur Duchemin-Desce- peaux, qui n'avait aucun lien de parenté avec le général de Scépeaux qui commanda les insurgés royalistes en Anjou, en Vendée et dans le Bas- Maine, résolut de dissiper les mensonges officiels relatifs à la Chouannerie. Une petite brochure signée Frain, parue en 1911 à Vitré, et que j'ai achetée à Laval, au cours de mes longues pérégrinations à pied dans les régions où battit le cœur de la Chouannerie, re- produit cet extrait de fragments des mémoires de M. Jacques Duchemin-Descepeaux publiés, long- temps après, dans le Bulletin de la Commission historique de la Mayenne, par M. de Courtilloles. Duchemin-Descepeaux avait quarante ans quand il entreprit cette vaste enquête. Il écrivait : « C'était une rude besogne que je m'étais don- née. Pour m'aider, aucun mémoire, aucune note écrite. Je ne suis arrivé à la connaissance des faits que par des espèces d'interrogatoires que j'ai fait subir à ceux qui ont été de la Chouan- nerie. Il fallait deviner le vrai à travers des dé- positions incohérentes, prolixes et quelquefois contradictoires. Je crois avoir réussi et c'est là le mérite de mon travail, s'il en a. Il est à remar- quer que ce sont presque les paysans seuls qui m'ont fourni les détails intéressants. Les gens bien élevés, les gens instruits ne m'ont presque jamais dit que des choses vagues et insigni- fiantes. » Il ne se rebuta jamais Il avait entrepris une œuvre de justice, un redressement de l'histoire. Dans l'Avertissement de ses deux volumes,il dit : « On a pensé que la publication de faits peu con- nus, et dont la vérité est attestée, pourrait être de quelque avantage pour les Chouans, si longtemps calomniés, et offrir quelque intérêt à ceux qui ne se laissent point aveugler par d'injustes préven- tions. » Je vois très bien ce brave bourgeois de Laval faisant atteler son cheval à sa voiture pour par- courir un pays qui n'était pas précisément sillonné de diligences. Il est dommage qu'il ait cédé à la mode de son temps, où les auteurs de romans, de récits de voyage, de chroniques historiques procédaient par lettres. On aurait voulu qu'il ra- contât son voyage jour par jour, exactement com- me fit notre confrère Jules Huret, il y a vingt- cinq ans, quand il enquêta aux Etats-Unis, au Canada, en Allemagne. Mais on peut essayer de reconstituer les premières journées de cette chas- se à l'épopée. Il est infiniment probable qu'il fit monter d'abord à son cheval la longue côte de la rue d'Ernée, prolongée par la route d'Ernée, — où Balzac a situé quelques scènes de ses Chouans, — et qu'il se dirigea vers le bourg de Saint-Ouen- des-Toits, à trois lieues de Laval, au nord-ouest, « vers les frontières de Bretagne. » Il y a aujourd'hui un autobus suivi d'une remorque pour les colis, qui fait deux fois par jour le trajet de Laval à Ernée et retour. Cette voiture me conduisit en vingt ou vingt-cinq minutes à Saint-Ouen-des-Toits. Le berceau de la Chouannerie est à deux kilo- mètres plus loin, à la Closerie des Poiriers. J'y allai à pied, de l'auberge du Lion d'Or tenue par Lucas, à Saint-Ouen-des-Toits. Sur la route, à droite, un chemin à ornières s'embran- che, zigzague à travers les champs clos d'épaisses haies. A six ou sept cents mètres de la route, on tombe dans la cour d'une vieille et très modeste petite ferme. Le chemin se poursuit dans les terres, laissant à gauche la maison d'habitation, et à droite, le poulailler et les communs. La maison d'habitation est percée de deux portes et de trois fenêtres à barreaux de fer, sans persiennes. La partie la plus voisine du chemin a été refaite et paraît neuve. C'est le logis du fer- mier ; l'autre bout est une étable ou la laiterie ; c'est là que vécurent la mère de Jean Chouan et ses six enfants ; c'est là qu'on vint, au début de Floréal, an II (avril 1794), arrêter ses deux sœurs; c'est là que les Chouans venaient prendre les mots d'ordre. Cette pauvre closerie fut un quartier général. La maison était muette quand je me présen- tai. La volaille picorait en liberté ; des chats ronronnaient au soleil. Dans un pâturage situé derrière les communs paissaient des vaches. Le fermier et la fermière étaient à une «Assemblée» des environs. Dans le Maine, on appelle assem- blées les fêtes patronales. Sur les murs de pierres aux joints de plâtre dont est faite la maison, quelques signatures et des inscriptions anciennes ou fraîches apparais- saient.