Le Flambeurflambeur
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a garanti sans 3D Ciném 5 place Camille Jullian 33000 Bordeaux • www.cinemas-utopia.org • 05 56 52 00 03 • [email protected] LELE FLAMBEURFLAMBEUR (The Gambler) Attention, découverte à ne pas rater ! On Il aurait pu avoir une vie plaisante, Alex, vous refait le coup de Breaking away l'an tant il semble doué de toutes les qua- Karel REISZ dernier : un film américain sorti de nulle lités. Mieux que beau, séduisant, gâté USA 1974 1h51 VOSTF part, ici un chef d'œuvre dostoïevskien par la vie, dernier héritier d'un grand- avec James Caan, Lauren Hutton, d'une intensité renversante signé Karel père étonnant, venu de l'est de l'Eu- Paul Sorvino, Morris Carnovsky, Reisz. Le Flambeur comme son réali- rope pour émigrer aux USA armé de sa Burt Young… sateur sont aujourd'hui un peu tombés culture, de sa rage de gagner, fondateur Scénario de James Toback (le réalisa- dans l'oubli, mais font l'objet de la fer- d'une grande famille profondément at- teur du génial Fingers / Mélodie pour veur d'un petit cercle d'admirateurs que tachée à ses origines mais qui a trouvé un tueur). Musique splendide de Jerry vous allez sans aucun doute rejoindre son biotope au sein de New York. Il est Fielding, d'après la Symphonie N°1 de quand vous aurez vu le film. Bienvenue aimé de tous et sa mère, une personne Gustav Malher au club. superbe, médecin brillante et dévouée, No 201 du 12 juin au 23 juillet 2019 / Entrée: 7€ / La 1re séance: 4,50€ / Abonnement: 50€ les 10 places LE FLAMBEUR est beaucoup trop indulgente pour ce fils cours devant ses élèves, au sortir d'une devenu orphelin très jeune, douloureuse nuit blanche passée à jouer, Alex définit quand il souffre, capable de se dépouil- avec un brio magistral cette jouissance ler pour lui… Excellent prof, Alex fascine, mêlée de douleur qui le pousse à une charme ses élèves en enseignant la litté- forme de recherche folle et suicidaire de rature avec une passion communicative toujours plus d'intensité : « la raison ne imprégnée de ses tourments secrets. satisfait en l'homme que le rationnel, le Alex plait, Alex capte l'attention, ac- désir en revanche englobe tout ». Il ira croche les cœurs durablement. Mais l'ai- très loin, Alex, dans le questionnement de mer c'est être confronté à une mise à ses limites et des limites de ceux qui l'ai- l'épreuve constante : Alex joue et ne sait ment ou qui le croisent. Sensible, animé pas s'arrêter de jouer. Il joue à tous les de pulsions contradictoires, il « flambe jeux, accro à une surenchère constante. », constamment porté par la certitude Il joue ses salaires, ses amours, ses qu'il va gagner, malgré la conscience des amis, sa vie… dans une sorte de poker risques qu'il ne cesse de prendre à se constant où la jouissance procurée par la frotter à un milieu de bookmakers sans prise de risque lui est devenue si néces- pitié, où seul l'argent compte : « pour 10 saire qu'une vie sans cette constante re- 000 dollars, ils vous brisent les mains, mise en jeu devient fade et dénuée d'in- pour 20 000, ils vous défigurent » dit-il lui térêt. Pourtant, qu'ils sont amer les petits même à sa mère, entraînant ses proches matins où, après l'ivresse excitante d'une vers ses propres abîmes. nuit passée à remettre ses gains sans cesse sur le tapis, il se retrouve dans les Karel Reisz est un réalisateur anglais, né rues blêmes de New York, ayant perdu en Tchécoslovaquie, un des plus grands bien au-delà de ce qu'il aurait dû risquer : de ceux qui firent le « free cinema » bri- « 44 000 dollars, tu te rends compte de tannique, cette période de foisonne- ce que c'est ? lui dit son bookmaker, ment formidable dans les années 60 où « 6 Cadillac ! »… Alors que son traite- le cinéma se libérait de toute contrainte, ment de prof n'excède pas 1500 dollars osant les sujets les moins balisés, s'af- par mois. Ce type-là l'aime aussi, tente franchissant des formats académiques. de le raisonner, de l'aider à rester dans Samedi soir, dimanche matin, le film qui ses limites. Mais Alex ne s'avoue jamais l'a révélé, marqua cette époque, ouvrant battu, et il y a toujours un coup qui suit le sur une tradition de cinéma social dont coup de trop… Ken Loach prit si bien la suite… Reisz Sa petite amie est magnifique, elle a signe avec Le Flambeur, sur un scénario un charme qui vient de ses petites par- de James Toback – expert en addictions ticularités qui la distinguent de toutes en tous genres ! –, sa première réalisation les autres. On sent vibrer dans son re- américaine. Quel coup de maître ! Le rap- gard comme une souffrance enfouie : port avec Le Joueur de Dostoïevski est re- elle le comprend plus que n'importe qui vendiqué jusque dans le nom de son hé- d'autre, non qu'elle aime souffrir, mais ros, Alexeï Ivanovitch devenant ici Alex… c'est avec lui qu'elle se sent le plus in- Un Alex incarné par un extraordinaire Mettez votre PUB tensément vivre, en symbiose avec sa James Caan, subtil, charmeur, intense propre quête d'absolu. jusqu'à la souffrance, emportant dans dans la gazette Quand il évoque Dostoïevski lors d'un la même fièvre les autres personnages. 05 56 52 00 15 il ? Où va-t-il ? Que veut-il ? Patience, fil en aiguille il lui faut fissa se réinventer les choses vont se décanter. une vie en même temps qu’un moyen Le premier indice est livré dans les toi- de la gagner. Georges improvise. Se dé- lettes d’un restoroute, dans la cuvette clare cinéaste sans rien y connaître, sur desquelles le gars s’évertue à noyer sa la foi du caméscope que le vieux lui a LE DAIM veste en velours bronze. Repartant ipso concédé en bonus du blouson. Puis sé- Écrit, filmé, monté et réalisé facto en chemise, il fait ensuite halte, sur duit, en la personne d’Adèle Haenel, la par Quentin DUPIEUX fond de paysage montagneux, dans une serveuse doucement frappée du bar de France 2019 1h17 maison où l’attend un vieux bonhomme la ville, laquelle a justement de son côté avec Jean Dujardin, Adèle Haenel, Albert avec lequel il a visiblement rendez-vous. la passion des films et du montage. Le type sort d’un placard, avec un luxe Delpy, Pierre Gommé, Marie Bunel… rare de précautions, un vieux blouson L’affaire est aussitôt enlevée et permet en daim couleur cognac, avec franges à à Georges, qui délire sur une histoire de On sait – ou on ne sait pas – qui hauteur de la poitrine, d’un modèle dont est Quentin Dupieux. Soit un artiste à gros producteurs coincés à l’autre bout on n’envisage pas qu’il ait pu être un du monde, de soulager Denise de ses double visage, musical et cinématogra- jour fabriqué. phique, mais à visée unique, venue de économies et de l’embaucher comme monteuse de son film, en l’espèce des la lointaine galaxie dada. Distorsion pa- Le deuxième indice, qui nous met défini- rodique de l’art officiel, fantaisie brico- rushes informes qu’il enregistre avec tivement sur la voie, c’est que Georges/ son caméscope. Plus confidentielle- leuse, éloge du dérisoire, de l’aléatoire, Dujardin l’enfile aussi sec, se regarde ment, Georges entame avec son blou- de la monomanie. L’aventure, d’inten- dans la glace et se met à rayonner de sité variable, comprend au cinéma huit l’intérieur, alors même que le vêtement, son un dialogue intime et quotidien en longs-métrages réalisés depuis 2001, importable par quiconque, l’engonce même temps que le daim envahit, petit entre France et Californie, soutenue le tout particulièrement. Georges éprouve à petit, toute sa garde-robe. Sous sa vo- cas échéant par quelques grands noms alors ce que Blaise Pascal vécut durant cation usurpée de cinéaste, un vrai pro- de la comédie (Eric Judor, Alain Chabat, sa « nuit de feu » du 23 novembre 1654 : jet existentiel se précise en revanche : Benoit Poelvoorde…). une révélation mystique. Désormais être le seul homme sur terre à porter un converti à son blouson suédé, Georges blouson, au besoin en délestant plus ou C’est aujourd’hui Jean Dujardin qu’on non seulement décide qu’il n’en sera moins violemment ses semblables du retrouve au centre de la sombre, étrange plus jamais séparé, mais tend à penser leur… On conçoit bien ce que ce projet et méchamment drôle affaire figurée que le seul vrai blouson est le blouson obsessionnel peut avoir d'inquiétant… par Le Daim. Un long et mystérieux par- qu’il porte et que partant les autres blou- Arrêtons là le déroulé narratif de cette cours en voiture sur nos belles routes sons ne sont que de vils imposteurs. fantaisie horrifique… pour dire à quel de France le révèle à notre attention. À cela s’ajoute que la somme démen- point Jean Dujardin et Adèle Haenel, en La bagnole a un passé, le personnage tielle qu’il a dépensée pour payer la pe- illuminés qui se sont trouvés, sont bons aussi. Chemise fripée, pantalon fatigué, lure mythique a rincé son compte en dans ce film… à ce jour le plus réussi de œil terne, air hagard. L’air d’un gars qui banque, que l’hôtel pyrénéen old style Quentin Dupieux. vient de tout plaquer, pas nécessaire- dans lequel il a élu domicile n’entend ment pour aller vers le mieux.