LA MÉDIUMNITÉ POLYGLOTTE Xénoglossie
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Ernest BOZZANO LA MÉDIUMNITÉ POLYGLOTTE xénoglossie 1 Introduction Le terme xénoglossie a été proposé par le professeur Charles Richet dans le but de distinguer nettement la médiumnité polyglotte proprement dite, dans laquelle les médiums parlent ou écrivent en des langues qu’ils ignorent totalement, et qui sont parfois inconnues même aux assistants, des cas radicalement différents (malgré une ressemblance purement apparente) de glossolalie, dans lesquels les sujets somnambuliques parlent ou écrivent en de pseudo-langues inexistantes, élaborées dans les tréfonds de leurs subconsciences : pseudo- langues qui sont quelquefois organiques, en ce sens qu’elles sont composées conformément à des règles grammaticales. Inutile de nous occuper de cette dernière catégorie de phénomènes, qui sont de nature somnambulique et hypnotique, et n’ont rien de commun avec la médiumnité polyglotte, pas plus qu’avec les manifestations métapsychiques en général, quoique des incidents de glossolalie puissent parfois s’intercaler en des manifestations supra normales authentiques. Ce qui ne doit pas nous étonner, puisque les interpolations subconscientes ne sauraient être évitées dans aucune branche de la métapsychique, tant que l’on ne connaîtra pas mieux les lois psychophysiques qui différencient les états médiumniques de ceux somnambuliques. Au point de vue théorique, la médiumnité polyglotte constitue une des manifestations métapsychiques les plus importantes, parce qu’elle élimine d’un coup toutes les hypothèses qui sont à la disposition de ceux qui se proposeraient de les expliquer sans s’écarter des pouvoirs supranormaux inhérents à la subconscience humaine. L’interprétation des faits s’impose ainsi, dans cette circonstance, d’une manière rationnellement inévitable ; c’est-à-dire que, grâce aux phénomènes de xénoglossie, on doit considérer comme démontrée l’intervention dans les expériences médiumniques d’entités spirituelles étrangères aux médiums et aux assistants. Je n’ignore point que les défenseurs à outrance de l’origine subconsciente de tout phénomène métapsychique, ne parvenant pas à expliquer les manifestations dont il s’agit par les hypothèses dont ils disposent, en ont formulé timidement une autre, que l’on appelle la mémoire ancestrale. Selon celle-ci, les médiums seraient à même de parler en une langue qu’ils ignorent complètement parce que l’un de leurs ancêtres aurait appartenu au peuple dont ils parlent la langue. Il faudrait alors supposer que les conditions médiumniques fassent émerger des couches d’une mémoire ancestrale subconsciente, d’ailleurs purement hypothétique, la pleine connaissance de la langue parlée par l’ancêtre du médium. Pour l’histoire, il n’est peut-être pas inutile de rappeler que l’hypothèse de la « mémoire ancestrale » a été tout d’abord proposée par la doctoresse russe Marie Manacéine, mais dans le but beaucoup plus circonscrit de rendre compte d’un autre phénomène mnémonique fort discuté : celui de l’émergence de souvenirs d’événements qui, en réalité, ne se sont pas produits au cours de la vie du sujet qui croit s’en souvenir. Mme Manacéine, après le docteur Letourneau, a essayé d’expliquer ces cas en étendant l’influence de la loi de l’hérédité aussi aux phénomènes de la mémoire, mais uniquement en ce qui concerne l’émergence d’événements fragmentaires arrivés aux ancêtres. Comme on peut voir, la conception originaire de la Doctoresse Manacéine, tout en étant audacieuse, était cependant légitime et pouvait être discutée. Il n’en est pas de même relativement à l’extension absurde et fantaisiste que l’on voudrait maintenant octroyer à l’hypothèse en question : extension qui a toutefois été présentée avec une circonspection inaccoutumée ; ce qui démontre bien que celui qui la proposait dans le but de se débarrasser à tout prix de la menace importune de l’hypothèse spirite se rendait compte, au fond, qu’il lançait une hypothèse impossible. En ces conditions, il me semble que ce n’est guère le cas de la prendre au sérieux. Tout de même, je remarque 2 qu’elle ne tiendrait pas en face d’exemples très récents de médiums qui, à ce jour, ont déjà causé en une douzaine de langages différents : ce qui permet de supposer que, pour peu que les expériences continuent et que des personnalités de défunts d’autres races se manifestent, les médiums dont il s’agit feront preuve encore de la connaissance d’autres langues. Le professeur Charles Richet est d’avis que le fait de parler des langues qu’on ignore constitue « un vrai miracle », et il ne cherche pas à diminuer l’immense portée théorique qu’il présente du point de vue spiritualiste. Cependant il pense que l’existence des phénomènes de xénoglossie est loin encore d’être démontrée et, après avoir donné une courte énumération des cas de cette sorte, il conclut judicieusement en disant : En résumé, aucun de ces faits n’a une suffisante valeur probative. Nous ne pouvons donc pas leur donner droit définitif de cité dans le riche royaume de la métapsychique subjective. Je penche à croire qu’un jour, bientôt peut-être, on pourra en admettre quelques-uns comme authentiques. Mais, en attendant, il faut tâcher de trouver de meilleurs exemples, et de les donner dans une forme moins fragmentaire, moins imparfaite qu’elle ne l’est dans les rapports connus jusqu’à ce jour... (Traité de Métapsychique. p. 280 de la première édition.). Il est incontestable que le professeur Richet n’a pas tort en s’exprimant de la sorte relativement à presque tous les cas qu’il cite et qui ne représentent qu’une faible partie de ceux que l’on connaît ; ceux-ci sont malheureusement dispersés un peu partout, en des livres, opuscules, revues, ce qui fait que les chercheurs ne peuvent guère en prendre connaissance. En ces conditions, si l’on veut que les phénomènes de xénoglossie acquièrent droit de cité dans le riche royaume de la métapsychique, il est indispensable de commencer par en recueillir un certain nombre dans une classification spéciale. C’est justement ce que je me suis proposé de faire dans cette monographie. Il n’est pas moins vrai que, lorsqu’on entreprend le dépouillement des cas de cette sorte, on se rend compte que l’observation du professeur Charles Richet peut s’étendre bien au-delà des cas qu’il a cités. S’il est vrai que les phénomènes de xénoglossie ont toujours été relativement fréquents en métapsychique, et qu’ils se sont multipliés en ces dernières années, cependant, lorsqu’on se prend à les recueillir et à les analyser, on constate qu’ils sont, le plus souvent, rapportés dans une forme purement anecdotique, avec un tel défaut de détails complémentaires, qu’ils ne sauraient être utilisables dans un but scientifique. Cela est d’autant plus regrettable qu’il s’agit assez souvent d’épisodes très importants et manifestement authentiques. Il s’ensuit que la moisson de faits que je me dispose à présenter paraît bien peu de chose en face de l’imposante masse de matériel recueilli. Par bonheur, au milieu des cas qu’il m’a été donné de recueillir, on en rencontre en nombre assez élevé, qui sont relatés avec une précision scientifique suffisante ; en outre, ils sont d’une date plus ou moins récente. Il me faut signaler un autre sérieux embarras que j’ai rencontré en ordonnant cette classification. Il consiste en ceci : qu’un certain nombre de cas classiques de xénoglossie sont connus de tous ceux qui s’occupent de métapsychique ; j’ai eu moi-même l’occasion de les citer et de les commenter en d’autres ouvrages. Que faire à ce sujet ? Si je les supprimais, cette classification – qui est la première qu’on ait écrite sur le phénomène en question – aurait présenté des lacunes assez graves. Je me suis tiré d’affaire en adoptant un « parti moyen » : celui de les enregistrer, mais en les résumant. Au point de vue de la classification des faits, les phénomènes de xénoglossie se produisent en des modalités diverses, à savoir : par l’automatisme parlant (possession médiumnique) ; par la médiumnité auditive (clair-audience), lorsque le médium répète phonétiquement les mots perçus subjectivement ; par l’automatisme moteur (psychographie et typtologie) ; par la voix directe ; par l’écriture directe. En ce dernier cas, il s’agit généralement de mains matérialisées, visibles ou invisibles, qui écrivent directement leur message. On peut y ajouter les quelques cas de fantômes matérialisés qui ont écrit ou parlé en des langues ignorées du médium. Cela dit, j’entame sans plus mon sujet. 3 Catégorie I Cas de xénoglossie obtenus par l’automatisme parlant et la médiumnité auditive Ces deux modalités de réalisation des phénomènes xénoglossies, quoiqu’elles soient sensiblement différentes l’une de l’autre, présentent entre elles une certaine analogie à ce point de vue qu’elles proviennent toutes les deux d’un phénomène poussé plus ou moins loin, de possession médiumnique, et se déroulent parfois entremêlées l’une à l’autre. On ne peut donc pas les diviser en les classifiant. Ier cas. – Je commence par rappeler un cas classique par excellence : celui de la fille du juge Edmonds. Il s’agit d’un fait important et incontestablement authentique ; mais comme il est tellement connu de tous ceux qui s’occupent de métapsychique, je m’en tiens à ce que j’ai dit plus haut, et je me borne à le résumer. Ce que j’ai de mieux â faire est donc de reproduire le résumé qu'en a donné le professeur Richet dans son Traité de Métapsychique (p. 272) : « Le cas le plus frappant est celui de Laura Edmonds, la fille du juge Edmonds, qui fut Président du Sénat, et membre de la Cour Suprême de Justice de New York personnage d’une haute intelligence et d’une loyauté irrécusable.