Jean-Philippe Billarant Président Du Conseil D'administration Brigitte Marger Directeur Général
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
Jean-Philippe Billarant président du conseil d’administration Brigitte Marger directeur général sommaire Après la Tchaikovsky experience menée en mars 1998, Sir Roger Norrington revient à la cité de la musique pour interpréter le Gustav Mahler de la première période dans son contexte historique (influences, effectifs, tempos, facture des ins- truments…) et tenter de retrouver la saveur de l’original. Au cours du même samedi 29 septembre - 16h30 p. 7 week-end, l’éminent biographe de Mahler, Henry-Louis de la Grange, donne une concert-atelier conférence sur « les paradoxes de Mahler » (dimanche à 15h). œuvres de Gustav Mahler Bernarda Fink, mezzo-soprano solistes de l’Orchestra of the Age of Enlightenment samedi 29 septembre - 20h p. 14 concert œuvres de Richard Wagner et Anton Bruckner Sir Roger Norrington, direction Orchestra of the Age of Enlightenment dimanche 30 septembre - 15h p. 20 conférence les paradoxes de Mahler Henry-Louis de La Grange, conférencier dimanche 30 septembre - 16h30 p. 21 concert œuvres de Gustav Mahler Sir Roger Norrington, direction Christopher Maltman, baryton Orchestra of the Age of Enlightenment biographies p. 27 Mahler experience Mahler experience Mahler experience Comme j’ai désormais l’habitude de le faire, le principe Pour retrouver l’esprit original de la musique de Gustav de l’« experience » consiste à réévaluer l’interprétation Mahler, d’autres aspects méritent d’être discutés. J’ai que nous avons des chefs-d’œuvre romantiques pour choisi de renouer, pour ces concerts, avec la dispo- tenter de les faire sonner en fonction de leur époque sition que la plupart des grandes formations prati- d’origine. Ma démarche se distingue donc fondamen- quaient à la fin du XIXe siècle (sur le modèle de Vienne), talement de celle qui voudrait que, sous prétexte de ne avec les cordes (en nombre réduit) placées dans un pas remettre en cause la tradition héritée de nos pré- autre ordre autour du chef (de gauche à droite : vio- décesseurs, nous ne nous posions aucune question. lons I, violoncelles, altos, violons II), les contrebasses Je crois au contraire que l’idée de tradition mérite d’être rangées en ligne au fond et les cors séparés des trom- rediscutée : nous considérons souvent comme « fidèles » pettes (de part et d’autre de la petite harmonie). Le des pratiques en fait très récentes. Je songe par modèle des instruments que nous utiliserons corres- exemple à l’usage du vibrato que l’on associe habi- pondra à ceux utilisés en Europe centrale il y a un tuellement à la musique romantique, alors que les témoi- siècle, c’est-à-dire des instruments assez proches gnages historiques concordent pour affirmer que, même des nôtres, avec cependant certains différences du temps de Gustav Mahler, ce mode de jeu n’était uti- essentielles : les cordes sont encore en boyau et la lisé qu’occasionnellement, pour souligner l’importance petite harmonie se compose d’instruments construits de certains éléments du phrasé. J’en veux pour preuve majoritairement en bois (ce qui tend à la différenciation les enregistrements de 1928 du violoniste Arnold Rosé des timbres). – Konzertmeister des Wiener Philharmoniker (1888- Les tempi indiqués dans les partitions de Mahler méri- 1938) et beau-frère de Mahler – dont l’interprétation du tent également d’être reconsidérés. Après 1910, la Concerto pour deux violons de Bach avec sa fille reste… notion de romantisme a changé au profit d’une cer- sans aucun vibrato. Dans les différentes formations taine hypertrophie et d’un ralentissement des mou- symphoniques, ce mode de jeu ne se généralisera qu’à vements. Les traces dont nous disposons la fin des années 1920 ; et avant cette période, le vibrato actuellement pour évaluer quels pouvaient être les n’était utilisé qu’à certains moments, comme l’attes- tempos voulus par Mahler (des rouleaux sur piano tent encore les indications manuscrites d’Arnold Rosé mécanique ou sur pianola réalisés à New York, notam- portées sur ses partitions de chef de pupitre. ment des passages chantés de la Symphonie n° 4 Je suis bien conscient que cette lecture de Mahler et de la version pour piano de la Symphonie n° 1) heurtera peut-être certains « puristes » ; ce n’est pas ce nous montrent que Mahler souhaitait quelquefois – que je recherche. J’aspire seulement à tendre vers une en particulier pour les mouvements lents – des tempi plus grande authenticité historique, non pour prendre plus allants que ceux que nous connaissons aujour- le contre-pied des autres interprétations, mais pour d’hui, sans chercher à rendre extrême l’opposition faire sonner la musique comme elle a été écrite. On a entre les mouvements lents et rapides, le tout dans un souvent un peu trop « parfumé » la musique de Mahler, certain « classicisme ». Quand il écrit « un peu plus sans considérer ce qu’elle pouvait receler de beauté lent », il ne faut pas l’interpréter « totalement station- « en elle-même ». C’est un peu comme une jeune fille naire »… Quand il écrit « lentement changeant » pen- qui serait trop maquillée : vous avez moins tendance à dant vingt ou trente mesures, il serait souhaitable de écouter ses paroles… Pour ma part, les paroles m’in- s’en tenir à cette indication d’échelle… Même chose téressent... tout comme le sens des choses. Le son avec les danses qui doivent conserver leur caractère est là au service du sens, et non l’inverse. rustique, dansant… D’une manière générale, en 4| cité de la musique notes de programme | 5 Mahler experience repensant les tempi, on aboutit à un phrasé plus par- samedi lant, plus « naturel », moins écrasant, à l’image du 29 septembre - 16h30 Sir Roger Norrington, présentation toilettage de Parsifal et de la Tétralogie que Pierre amphithéâtre du musée Boulez avait effectué à Bayreuth en leur redonnant de l’élan. Pour autant, je ne prétends pas fixer les concert-atelier règles de l’interprétation de Mahler ; je ne cherche Gustav Mahler qu’à rétablir un meilleur équilibre entre classicisme et Klavierquartettsatz - Mouvement pour quatuor à expressionnisme. Il n’existe pas « une » manière d’in- cordes avec piano, en la mineur terpréter sa musique, mais bien plusieurs. Mahler lui- durée : 15 minutes même souhaitait que l’on prît quelques initiatives, comme lorsqu’il criait à Mengelberg : « S’il vous plaît, Michael Dussek, piano continuez à changer après ma mort. » Toute la ques- Solistes de l’Orchestra of the Age of tion est de savoir dans quelle mesure nos interpré- Enlightenment : tations s’inscrivent ou non dans l’esprit de sa musique, Marieke Blankestijn, violon sans s’arrêter à la lettre. Martin Kelly, alto Sebastian Comberti, violoncelle Sir Roger Norrington propos recueillis par Emmanuel Hondré Gustav Mahler Des Knaben Wunderhorn (extraits) (voir trad. p. 11) Wer hat dies Liedlen erdacht ? (n° 4) Das irdische Leben (n° 5) Rheinlegendchen (n° 7) Wo die schönen Trompeten blasen (n° 9) durée : 20 minutes Bernarda Fink, mezzo-soprano Michael Dussek, piano 6| cité de la musique Mahler experience Mahler experience Gustav Mahler Mis à part quelques Lieder, le Klavierquartettsatz truments sur l’intervalle de sixte. C’est d’ailleurs cet Klavierquartettsatz (Mouvement de quatuor avec piano) constitue tout intervalle ascendant qui servira à unifier le mouvement, ce qu’il reste de la production de jeunesse de Gustav d’abord en se répandant entre les voix du contre- Mahler (1860-1911). On sait pourtant qu’il avait com- chant mélodique, puis en structurant les autres idées posé entre 1875 et 1883 deux symphonies, un quin- musicales (thème pointé, puis thème lyrique descen- tette avec piano, un nocturne pour violoncelle, une dant). Le développement central s’inspire des tech- sonate pour violon et piano, une suite pour piano, niques schubertiennes en modulant chacun des motifs des extraits d’un opéra (Ernst von Schwaben) et un et en les répétant à l’envi. La réexposition ramène le quatuor à cordes. Ces œuvres, malgré leur succès, tonalité principale de la mineur, agrémentée par une ont été détruites par leur auteur. Comme l’indique le cadence du violon solo. manuscrit qu’Alma Mahler avait conservé, le Klavierquartettsatz semble avoir été composé en Emmanuel Hondré 1876. L’auteur a plus tard évoqué cette œuvre au cours de conversations avec Nathalie Bauer-Lechner Gustav Mahler La publication en 1805 puis en 1808 des deux (Erinnerungen an Gustav Mahler). « Le meilleurs Des Knaben Wunderhorn volumes du Cor merveilleux de l’enfant (Des Knaben d’entre ces premiers essais, lui confie-t-il, est certai- Wunderhorn) constitue l’un des événements majeurs nement ce quatuor avec piano composé à la fin des de l’histoire de la nation allemande au moment où quatre années [en fait trois] passées au Conservatoire celle-ci cherchait à se constituer après les victoires de Vienne et qui avait suscité un grand enthousiasme. de Napoléon. Les poèmes et chansons qu’on y Graedener l’a gardé avec lui quatre mois tant il l’aimait. trouve, recueillis ou inventés par Achim von Arnim et Il l’a d’ailleurs rejoué à Billroth. Finalement, je l’ai expé- Clemens Brentano et dont beaucoup se souviennent dié à Moscou dans le cadre d’un concours, et il s’est des guerres de Trente et de Sept ans, ont profondé- malheureusement perdu à ce moment. » Ces conver- ment marqué l’imaginaire d’outre-Rhin et particuliè- sations éclaireront aussi le point commun de ces rement le courant romantique. compositions de jeunesse : leur inachèvement. « Ce Ces deux volumes exercèrent une indéniable fasci- n’est pas que j’étais impatient de composer un nou- nation sur Mahler. À vrai dire, les chansons du Cor veau morceau, relate Mahler, mais plutôt qu’avant merveilleux de l’enfant ont nourri l’œuvre entier du même de terminer mon travail, celui-ci ne me suffi- compositeur.