Mission d’information et de contact de l’Organisation internationale de la Francophonie

Election présidentielle 2018 –

Antananarivo, MADAGASCAR, 2 au 10 novembre et 14 au 22 décembre 2018

Rapport final

Soumis par Alexandra Hovelacque, Experte électorale senior et rapporteure de la Mission

Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 Sommaire

Sommaire ...... 2 I. Contexte de la Mission ...... 3 1. Mandat et composition de la Mission ...... 3 2. Accompagnement du processus électoral malgache par l’OIF ...... 4 II. Contexte politique ...... 5 1. Panorama de la situation politique avant le 1er tour de l’élection présidentielle ...... 5 2. Evolution de la situation politique entre les deux tours ...... 6 Rappel des résultats du premier tour de l’élection présidentielle ...... 6 Enjeux politiques du second tour...... 7 3. Observations générales ...... 8 4. Préparatifs des opérations électorales ...... 9 III. Environnement juridique et institutionnel ...... 10 IV. Environnement médiatique ...... 12 1. Paysage et enjeux médiatiques ...... 12 2. Analyse du paysage médiatique ...... 13 3. Cadre juridique et institutionnel de la régulation ...... 14 V. Déroulement de la mission ...... 16 1. Rencontres avec les acteurs ...... 16 2. Observation des scrutins ...... 18 V. Constats ...... 18 1. Préparatifs des scrutins et campagnes électorales ...... 18 2. Déroulement des scrutins ...... 20 3. Transmission et compilation des résultats ...... 22 4. Contentieux ...... 23 5. Rôle de la société civile et participation des femmes et des jeunes ...... 24 VI. Conclusions et recommandations ...... 25 ANNEXE 1 : Calendrier des réunions et rencontres de la MIC: ...... 27 ANNEXE 2 : Communique de presse de la MIC de l’OIF à l’issue du 1er tour de l’élection présidentielle à Madagascar ...... 30 ANNEXE 3 : Communiqué de presse de la MIC de l’OIF à l’issue du 2ème tour de l’élection présidentielle à Madagascar ...... 32

2 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 I. Contexte de la Mission

1. Mandat et composition de la Mission

Dans le cadre de l’accompagnement que l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) déploie, aux côtés d’autres partenaires internationaux, en faveur du processus électoral de Madagascar, et en réponse à la demande des autorités nationales de ce pays, Madame Michaëlle JEAN, Secrétaire générale de la Francophonie, a dépêché une Mission d’information et de contact (MIC), à l’occasion des deux tours de l’élection présidentielle qui se sont tenus respectivement le 7 novembre et le 19 décembre 2018. La MIC a séjourné du 2 au 10 novembre 2018 à l’occasion du 1er tour et du 14 au 22 décembre 2018 à l’occasion du second tour. Œuvrant conformément aux Principes directeurs de la Francophonie en la matière et aux engagements consignés dans la Déclaration de Bamako, notamment en son volet « élections », la Mission a été amenée à prendre contact avec les autorités nationales, les principaux acteurs nationaux impliqués dans le processus électoral, notamment le Président de la République par intérim, des membres du gouvernement, la Commission électorale nationale indépendante (CENI), la Haute Cour constitutionnelle (HCC), des candidats à l’élection présidentielle, des organisations de la société civile, ainsi qu’avec les partenaires internationaux présents sur le terrain, afin de recueillir les informations pertinentes sur le contexte général du scrutin et l’état de préparation et d’organisation de cette élection. Le jour du scrutin, pour chacun des deux tours, les membres de la mission se sont déployés à Antananarivo et ses environs et ont couvert une centaine de bureaux de vote à chaque fois. Conduite par Monsieur Philippe Courard, Président du Parlement de la Fédération Wallonie Bruxelles, la Mission a réuni des experts de haut niveau venant de plusieurs pays de l’espace francophone ainsi que de la Direction « Affaires politiques et gouvernance démocratique » de l’OIF. Pour le 1er tour, la Mission était composée de : M. Georges NAKSEU NGUEFANG, Directeur « Affaires politiques et gouvernance démocratique » ; Mme Nadjahe ALLAOUI, Vice-présidente de la CENI des Comores ; Mme Eline MOSES, Présidente de “Citizen Democracy Watch (CDWS)” des Seychelles ; M. Norlis Nicholas ROSE-HOAREAU, Commissaire électoral des Seychelles ; Mme Sitti Chadia SOILIHI épouse MOHAMED, Membre de la Fédération Comorienne des Organisations de la Société Civile (FECOSC) (Comores) ; M. Mohammad Irfan ABDOOL RAHMAN, Chef de la commission électorale de Maurice ; M. Siaka SANGARE, Délégué général aux élections du Mali, Président du RECEF ; Mme Alexandra HOVELACQUE, Consultante sénior, Experte électorale et rapporteure (Tunisie/France); M. Tidiane DIOH, Spécialiste de programme à la Direction « Affaires politiques et gouvernance démocratique » (Sénégal) ; Mme Zahra KAMIL ALI, Spécialiste de programme, Coordinatrice de mission, Direction « Affaires politiques et gouvernance démocratique » (Djibouti).

3 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 Pour le second tour, la composition de la Mission était la suivante : Mme Nadjahe ALLAOUI, Vice-présidente de la CENI des Comores ; Mme Eline MOSES, Présidente de “Citizen Democracy Watch (CDWS)” des Seychelles ; M. Norlis Nicholas ROSE-HOAREAU, Commissaire électoral des Seychelles ; Mme Sitti Chadia SOILIHI épouse MOHAMED, Membre de la Fédération Comorienne des Organisations de la Société Civile (FECOSC) (Comores) ; M. Mohammad Irfan ABDOOL RAHMAN, Chef de la commission électorale de Maurice ; Mme Alexandra HOVELACQUE, Consultante sénior, Experte électorale et rapporteure (Tunisie/France); − Mme Amina DIALLO DJIBO, Ambassadeur, Secrétaire Générale de la Commission Nationale de la Francophonie du Niger ; − M. Jérôme WANDJI K., expert électoral, Cameroun ; − M. Saidou KANE, Spécialiste de programme, Coordinateur de la mission, Direction «Affaires politiques et gouvernance démocratique » (Mauritanie).

La Mission a en outre bénéficié, lors des deux tours, de la collaboration de M. Abdourahamane OUSMANE, expert en régulation des médias (Niger), détaché par l’OIF auprès de la CENI, ainsi que de Mmes Béatrice Mahasahy et Robertine Raonimahary du Bureau régional de l’OIF pour l’Océan indien, basé à Madagascar. Celui-ci a en outre fourni tout l’appui matériel et logistique nécessaire à la MIC et doit en être remercié ici.

Cette mission s’inscrit dans le prolongement des actions d’accompagnement du processus électoral à Madagascar par l’OIF, notamment dans les domaines de l’appui à la Commission électorale nationale indépendante CENI, à la Haute Cour constitutionnelle HCC et aux médias.

2. Accompagnement du processus électoral malgache par l’OIF

Dans le cadre de son accompagnement du processus électoral en cours à Madagascar, l’OIF a mené une mission d’évaluation électorale en juin 2017, une autre en octobre 2017, ainsi que deux missions d’information et de contact en janvier et juillet 2018 en vue d’évaluer les besoins liés à l’organisation de la prochaine élection présidentielle à Madagascar. A la demande des autorités malgaches, l’OIF a organisé, du 10 au 21 septembre, l’audit du fichier électoral de Madagascar dans une démarche inclusive et transparente. Les experts de l’OIF ont travaillé dans le cadre d’un comité ad hoc d’audit du fichier électoral, avec les représentants de la CENI, les représentants des trente-six (36) candidats à la présidentielle, de la société civile malgache et des partenaires internationaux. Ils ont conclu que le fichier électoral était suffisamment fiable pour permettre la tenue d’élections crédibles. En partenariat avec la HCC et la CENI, l’OIF a en outre organisé, du 24 au 26 septembre 2018, à Antananarivo, un séminaire sur l’appropriation des textes électoraux suivi, les 27 et 28 septembre, d’un échange d’expériences et de bonnes pratiques en matière de gestion du contentieux électoral avec la HCC.

4 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 L’OIF a également apporté un appui aux médias en période électorale à travers, notamment, la mise à disposition d’un expert en régulation des médias auprès de la CENI. Cet appui est une contribution de l’Organisation au projet SACEM (Soutien au cycle électoral de Madagascar). Elle a aussi mis à la disposition des journalistes et professionnels des médias, le Guide du journaliste en période électorale, en version française et malgache.

II. Contexte politique

1. Panorama de la situation politique avant le 1er tour de l’élection présidentielle La situation politique à Madagascar a été marquée par des tensions politiques au cours du premier semestre 2018. Les dissensions portaient sur les lois organiques relatives aux élections générales, présidentielles et législatives, et ont failli conduire le pays à renouer avec les crises cycliques. Ces tensions ont donné lieu à des manifestations contre le Gouvernement, du 21 avril au 6 juin 2018 à Antananarivo, et de manière sporadique, dans certaines villes de province. Conduites par des parlementaires de l’opposition, lesdites manifestations ont été les plus importantes depuis 2009. Celle du 21 avril a précisément débouché sur des violences causant la mort d’au moins deux personnes. Sur le champ institutionnel, les députés de l’opposition dits « du changement » ont saisi la HCC sur la non-conformité de certaines dispositions des lois organiques précitées, notamment dans des articles relatifs à la durée des campagnes électorales, au recours au bulletin unique au premier tour seulement, à la révision des listes électorales et aux conditions d’éligibilité à l’élection présidentielle. Ils ont également déposé une demande de déchéance du Président de la République . En réponse à ces demandes, la Haute Cour constitutionnelle, le 3 mai, a jugé non conformes à la Constitution plusieurs des dispositions incriminées, à l’origine des contestations. Lors de la promulgation desdites lois le 11 mai, le Président de la République a tenu compte des avis émis par la HCC. A la requête de déchéance du Président, la Haute Cour a en revanche répondu négativement, mais prescrit à ce dernier de mettre fin « aux fonctions du gouvernement » et de nommer un nouveau Premier ministre « de consensus » proportionnellement aux résultats des dernières élections législatives tenues en 2013. La Haute Cour a également requis « l’organisation d’une élection anticipée [entre mai et septembre] 2018, sous réserve des possibilités techniques, matérielles et financières réelles, assurant des élections libres, honnêtes et transparentes ». La CENI avait au préalable proposé trois dates au regard du contexte politique. Le 5 juin, M. , alors Représentant de l’OIT à Madagascar, a été nommé Premier ministre sur proposition du MAPAR (parti d’, ancien Président de la Transition), majoritaire à l’Assemblée nationale, et a mis en place le 11 juin un gouvernement de consensus ayant pour principale mission d’organiser des élections crédibles, transparentes et inclusives dans les délais prescrits par la Constitution. Après concertation avec la CENI, le nouveau gouvernement qui a déclaré sa volonté et sa détermination à mener à bien sa mission, a annoncé les dates de l’élection présidentielle : un 1er tour prévu le 7 novembre et un second tour, le cas échéant, le 19 décembre 2018. En ce qui concerne les candidatures au scrutin présidentiel, 36 candidatures ont été validées

5 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 par la HCC, dont celles de quatre anciens Présidents de la République, de trois anciens Premier ministres et du Président de l’Assemblée nationale. Toutefois, la stabilité observable dans le pays depuis la mise en place de la nouvelle équipe gouvernementale est demeurée fragile. En effet, la tenue de l’élection présidentielle a été contestée par une myriade de partis politiques et d'organisations de la société civile regroupés au sein d'une nouvelle plateforme politique dénommée HFI (Mouvement pour la refondation). Ils revendiquaient un autre agenda, notamment une nouvelle transition devant permettre une refondation de l’Etat qui déboucherait sur une réconciliation nationale avec l'adoption d'une nouvelle Constitution, avant toute élection. Aux côtés de l’ancien Président et Amiral Didier Ratsiraka, 16 autres candidats dont certains confirmés par la HCC et d’autres dont la candidature a été rejetée, ont prôné le report du scrutin présidentiel. Ils ont ainsi signé le 4 septembre 2018 une résolution comportant des arguments au soutien de leur volonté de report. A cette contestation politique se sont ajoutées des protestations d’ordre social (grève des enseignants, manifestation des étudiants, ...). Les rangs des protestataires ont grossi après le 19 octobre, avec la signature, par vingt-six candidats, d’un « accord politique » demandant la réouverture de la liste électorale, jugée incomplète et non fiable, la mise en place d’une Cour électorale spéciale pour remplacer la HCC et la tenue d’une Conférence souveraine pour un nouveau cadre politique. Toutefois, plusieurs voix se sont élevées contre ce mouvement tendant à replonger le pays dans une nouvelle transition à l’issue incertaine. Le Premier ministre comme le Président de la République par intérim ont martelé que la Constitution sera respectée et que l’élection présidentielle devra se tenir aux dates prévues. Les anciens Présidents de la République Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, ainsi que le Conseil pour la réconciliation nationale se sont également opposés à cette tentative de report, qualifié d’anticonstitutionnel, rejoints en cela par plusieurs associations de la société civile. Les critiques exprimées portant sur la liste électorale, sur l’opacité des comptes de campagne ainsi que la méfiance affichée et orchestrée envers la CENI et la HCC, ont néanmoins retenu toute l’attention car si leurs chances d’aboutir à un report de l’élection étaient faibles, elles semblaient préparer le terrain pour une contestation au cours de la période post-électorale.

2. Evolution de la situation politique entre les deux tours

Rappel des résultats du premier tour de l’élection présidentielle

Les résultats du premier tour de l’élection présidentielle, proclamés par la Haute Cour constitutionnelle de Madagascar dans son arrêt n°11-HCC/AR du 28 novembre 2018, font apparaître 5.367.550 votants sur 9.949.083 inscrits, soit un taux de participation de 53,95% et indiquent que les candidats habilités à se présenter au second tour de ladite élection sont : Andry Rajoelina, ancien Président de la Transition (2009 – 2014), qui obtient 39,23% des suffrages valablement exprimés et Marc Ravalomànàna, également ancien Président de 2002 à 2009, crédité de 35,35% des voix.

6 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 Pour les autres candidats, on note que le Président sortant, M. Hery Rajaonarimampiànina, a obtenu 8,82% des voix, trois candidats ont fait des scores se situant entre 1% et 2%, et trente autres ont eu des scores inférieurs à 1%. Ces résultats appellent un certain nombre d’observations :

• d’aucuns avaient avancé le fait que les candidatures de certains candidats, méconnus par la population et sans véritable base politique, avaient été favorisées par le régime sortant, pour créer un éparpillement de voix destiné à affaiblir les « grands » candidats, et s’inscriraient dans une stratégie de report de voix au second tour. Les résultats montrent que le nombre pléthorique des candidats a contribué à un certain éparpillement des voix, mais celui-ci n’a finalement été favorable ni au régime en place ni aux autres personnalités qui se sont présentées, et interrogent sur l’impact des reports des voix, numériquement limitées. • Le faible pourcentage obtenu par le Président sortant relève, entre autres, du manque d’ancrage sur l’ensemble du territoire du parti de la majorité présidentielle (HVM), créé en 2014, du déficit de communication du pouvoir qui a peiné à faire connaître ses réalisations, et des effets de nuisance générés par des faits de corruption attribués à l’entourage présidentiel. • Un nombre important d’électeurs n’a pas voté, laissant ainsi un champ relativement large de mobilisation aux candidats en lice au second tour.

Enjeux politiques du second tour

Parmi les enjeux politiques du second tour figuraient :

• la mobilisation des électeurs abstentionnistes du premier tour ; à cet effet, les candidats ont sillonné le pays à un rythme soutenu, imposé par ailleurs par la courte période de propagande de l’entre-deux tours ; • les nouveaux ralliements politiques aux deux candidats, dont l’ancrage régional1 est mis en avant afin de renforcer leur légitimité nationale2 en jouant, sans le nommer, le régionalisme comme argument politique : - M. Andry Rajoelina a obtenu les ralliements de M. , ancien Premier ministre, originaire du Nord-Est, de M. , également ancien Premier ministre, originaire du Sud-Est, et de M. Roland Ratsiraka, ancien Ministre et originaire de l’Est du pays ; - M. Marc Ravalomànàna a bénéficié du ralliement de personnalités proches de l’ancien Président de la République Albert Zafy, originaire du Nord et de l’ancien Premier ministre Olivier Solonandrasàna, également du Nord ; - Pour sa part, le Président sortant n’a pas donné de consigne de vote ;

1 Personnalités issues des régions côtières 2 MM. Rajoelina et Ravalomànàna sont issus des Hauts Plateaux

7 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 • le poids des églises : M. Rajoelina a multiplié les références à la religion catholique tandis que M. Ravalomànàna, figure de la religion protestante malgache, a bénéficié du ralliement de l’église protestante. • Respect du verdict des urnes : bien que les deux candidats aient affirmé dans leurs déclarations respectives, vouloir respecter le verdict des urnes, et si le climat pré- électoral est demeuré relativement calme, la crainte d’une crise post-électorale, du fait du refus du perdant de reconnaitre sa défaite, a été une préoccupation largement partagée. Celle-ci a été alimentée par l’animosité personnelle entre les deux candidats, les sommes très élevées dépensées par l’un et l’autre pendant la campagne mais aussi par les allégations répétées de fraudes et les attaques contre la crédibilité du processus électoral et des institutions chargées de sa gestion, qui ont été perçues comme préparant le terrain à des contestations post-électorales. A cet égard, la communauté internationale3 est restée mobilisée et s’est accordée sur la nécessité de parler d’une même voix pour porter un message d’apaisement et de respect de la légalité, soulignant l’opportunité historique de ces élections pour faire sortir Madagascar du cycle des crises politiques à répétition.

3. Observations générales L’analyse de la situation socio-politique à Madagascar appelle les observations ci-après, non exhaustives, qui affectent nécessairement le processus électoral : - une fragilité politique et la difficile consolidation de la démocratie dans un pays où la majorité de la population est très pauvre, politiquement vulnérable et facilement instrumentalisée, où les richesses sont aux mains d’une minorité et où la corruption, comme une gangrène, est observée à tous les niveaux ; - la relative faiblesse des institutions dont certaines, dans leur actuelle configuration, sont à leur première expérience électorale et la défiance à la fois des acteurs politiques et de la population à leur égard, malgré des efforts conséquents de transparence et de restauration de crédibilité ; - la concentration du jeu politique entre les mains des politiciens et dans les grandes agglomérations et la non - appropriation des décisions politiques par la majorité de la population, en raison de leur éloignement, de leur non-accès en temps réel aux informations, de leur niveau d’éducation, de la pauvreté, etc., - la rupture des liens entre l’élite et la population ; - la perte de crédibilité et partant, d’influence, de certains interlocuteurs/médiateurs politiques telle que les Eglises et les royautés locales ;

3 La Commission de l’océan Indien, absente durant le premier tour, était présente pour le second tour, aux côtés des missions d’observation de l’Union africaine (UA), de l’Union européenne (UE), de la Communauté des Etats de l’Afrique australe et de la MIC de la Francophonie. Un certain nombre d’Etats représentés à Madagascar ont également déployé des missions d’observation d’ampleur variée lors des scrutins (Etats-Unis, Japon, Corée du Sud, notamment). Les Nations Unies et la SADEC ont en outre dépêché leurs envoyés spéciaux pour Madagascar à l’occasion des deux tours.

8 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 - mais aussi, sur une note plus positive, une présence de plus en plus marquée et agissante de la société civile.

4. Préparatifs des opérations électorales La Commission électorale malgache a déployé d’intenses efforts pour respecter le calendrier électoral. Selon l’article 46 de la Constitution, le Président de la République qui se porte candidat est tenu de démissionner 60 jours avec la date du scrutin soit le 7 septembre. Le Président en exercice s’est plié à cette disposition et une passation de service est intervenue le 12 septembre avec le Président du Sénat. La HCC a validé, le 22 août 2018, 36 candidats pour le scrutin présidentiel. Le 08 octobre 2018 a marqué le début de la campagne électorale pour le 1er tour de la présidentielle qui s’est tenu le 7 novembre. La publication des résultats provisoires par la CENI est intervenue le 17 novembre et la proclamation des résultats définitifs par la HCC, le 28 novembre. La campagne du second tour s’est ouverte le 4 décembre et s’est achevée la veille du scrutin. Les résultats provisoires ont été annoncés par la CENI le 27 décembre et la HCC a proclamé les résultats définitifs, après s’être prononcée sur les recours, le 8 janvier 2019. Pour les deux tours, la CENI a publié les résultats provisoires avant l’expiration du délai légal. Concernant les listes électorales, le fichier audité par l’OIF comprend 9 913 599 électeurs qui ont été répartis au sein de 24.852 bureaux de vote. Parmi ceux-ci, 20.001 bureaux de vote existaient déjà en 2013, auxquels se sont ajoutés, d’une part, des bureaux créés en application de la nouvelle loi électorale qui fixe un maximum de 700 électeurs inscrits par bureau de vote et, d’autre part, 729 nouveaux bureaux de vote mis en place à la demande de certaines communes. Les spécimens du bulletin unique, imprimés en Afrique du Sud, ont été reçus en amont du scrutin et ont été utilisés par les candidats dans le cadre de la campagne électorale, par la société civile pour la sensibilisation et l’éducation des électeurs, ainsi que par la CENI pour la formation de ses démembrements et des membres des bureaux de vote. Les bulletins uniques pour le scrutin, conditionnés en Afrique du Sud pour chaque bureau de vote, ont été acheminés dans les différents districts selon le calendrier prévu. La CENI a subi un certain nombre de critiques durant le premier tour de l’élection présidentielle, mettant en doute sa transparence et sa crédibilité. Ces critiques portaient notamment sur le logiciel de traitement des résultats électoraux utilisé durant le scrutin et sur les capacités des démembrements de la CENI sur le terrain. Pour y répondre, la CENI a fait procéder entre les deux tours, à un audit international dudit logiciel, en y associant les représentants des deux candidats ; elle a en outre pris un certain nombre de dispositions pour le renforcement de ses capacités internes et a grandement amélioré sa stratégie de communication. En coopération avec les services publics concernés, la CENI s’est aussi engagée dans la distribution des cartes d’électeurs non retirées, estimées à 600 000, ainsi que pour la mobilisation desdits électeurs. Par ailleurs, une charte de bonne conduite et d’intégrité des candidats pour les élections a été élaborée par un comité paritaire nouvellement mis en place et constitué du CFM (Conseil pour le Fampihavanana Malagasy), de la CENI, de la CNIDH (Commission nationale pour la défense des Droits humains), du HCDDED (Haut Conseil pour la Défense de la Démocratie et de l’Etat

9 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 de Droit), du CSI (Comité pour la Sauvegarde de l’Intégrité), du Bianco (Bureau indépendant anticorruption), du Samifin (Organe de lutte contre le blanchiment d’argent) ainsi que d’associations de la société civile telles que le Projet FANDIO ou Transparency International - initiative Madagascar. Préconisant un comportement exemplaire de la part des candidats, avant, pendant et après les élections afin de prévenir une autre crise postélectorale, cette charte n’a cependant pas reçu l’accueil escompté. Certains candidats ont estimé que son caractère non contraignant en faisait un texte voué à l’échec ; d’autres ont tout simplement rejeté le principe même d’une charte qui les lierait. L’inégalité des moyens entre les candidats, donnant lieu à l’appellation « petits et grands candidats », l’utilisation des biens publics durant la campagne, le non-respect du principe de neutralité par l’Administration, le financement de la propagande, sont autant de défis qui entouraient le scrutin présidentiel. La neutralité de la HCC et les capacités de la CENI sont des arguments développés par ceux qui prônaient le report de l’élection mais aussi par des organisations de la société civile, comme le SEFAFI ou l’observatoire de la vie publique malgache et le KMF-CNOE, qui œuvrent dans l’observation des élections et l’éducation citoyenne.

III. Environnement juridique et institutionnel

Le cadre juridique de l’élection présidentielle de 2018 a fait l’objet de modifications adoptées aux forceps dans un climat de troubles et de contestation, le 11 mai 2018, avec la promulgation des lois organiques 2018-008 (relative au régime général des élections et référendums) et 2018-009 (relative à l’élection du Président de la République) 4 . Il est également régi par la Constitution de la IVème République ainsi que par la loi 2015-020 du 19 octobre 2015, relative à la création de la CENI et la loi 2011-012 du 9 septembre 2011, encadrant les activités des partis politiques, notamment. Le cadre juridique a connu des améliorations notables dans le sens de la tenue d’élection libres et crédibles, notamment avec l’introduction de dispositions relatives à la transparence et au contrôle du financement des campagnes électorale 5 , à la neutralité de l’administration publique et à l’interdiction d’utiliser les ressources publiques à des fins de propagande électorale6 ou encore l’obligation faite au Président de la République en exercice se portant candidat, de démissionner 60 jours avant la date du scrutin7. Il est généralement considéré comme permettant la tenue d’élections conformes aux normes et obligations internationales auxquelles Madagascar a souscrit8.

4 Une troisième loi organique, 2018-010, relative à l’élection des députés a également été promulguée à cette date. 5 Cf. Chapitre II, Section 2, art.64-91, loi organique n°2018-008. 6 Cf. Chapitre II, Section 1, art.60-63, loi organique n°2018-008. 7 Cf. Art.2, loi organique n°2018-009. 8 La République de Madagascar est partie à plusieurs accords internationaux et régionaux contraignants pour l’organisation d’élections périodiques, libres et transparentes, notamment : la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) du 10 décembre 1948 (art.21), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) du 16 décembre 19966 (art.25) ; la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (art.7) (CEDEF) du 18 décembre 1979 ; la Convention internationale sur l'élimination de toutes formes de discrimination raciale (CIEDR) ; la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 26 juin 1981 et son protocole sur les droits des femmes en Afrique du 7 novembre 2003 ; la

10 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 Cependant, un certain nombre de lacunes demeurent, en particulier le vide juridique relatif aux activités de la période précédant l’ouverture de la campagne officielle (« pré-campagne ») et la non réglementation des médias privés ou des réseaux sociaux, l’absence de plafonnement des dépenses de campagne électorale, l’absence d’obligation de déclarer l’origine des fonds de campagne (pourtant prévue aux art.73-87) ainsi que l’absence de sanctions en cas de financements illicites. L’éparpillement des textes régissant les élections et surtout leur adoption tardive, font également l’objet de critiques. Sur le plan institutionnel, plusieurs autorités interviennent dans l’organisation et la gestion du processus électoral à différents niveaux : la CENI, le ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation, le pouvoir exécutif, la HCC, la Commission de contrôle du financement de la vie politique l’Autorité nationale de régulation de la communication médiatisée. Si la CENI « est chargée de l’organisation et de la gestion de toutes les opérations électorales et référendaires »9, ainsi que de l’établissement des résultats provisoires, certains aspect du processus électoral, tels que l’inscription des électeurs au niveau des Fonkontany, la régulation des activités de campagne dans l’espace publique ou la sécurisation du processus électoral, relèvent toujours du Ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation ou de la Primature. La CENI a en outre perdu la prérogative de fixer la date des élections au profit de l’Exécutif dont elle dépend également pour la mise à disposition des fonds nécessaires au financement des opérations électorales10. D’autres aspects du processus électoral sont confiés à des instances nouvellement créées ou à créer, telles que la Commission de contrôle du financement de la vie politique, mise en place par le décret 2018-795 du 17 juillet 2018, et chargée de contrôler le respect des dispositions liées à la transparence et au financement des campagnes électorales, ou encore l’Autorité nationale de régulation de la communication médiatisée, prévue par le Code de la Communication de 2016, mais dont les attributions sont assumées de manière transitoire par la CENI, en attendant sa mise en place effective. La proclamation des résultats définitifs et la gestion du contentieux pour les élections présidentielles sont quant à eux confiés à la Haute Cour constitutionnelle. Constituée de deux collèges dont l’un permanent (de 9 membres) et l’autre non permanent11, la CENI actuelle a été mise en place fin 2015 et se trouve pour la première fois confrontée à l’organisation d’un scrutin de cette ampleur12. Ayant perdu certaines prérogatives par rapport à la Commission qui l’a précédée, notamment s’agissant de la détermination de la date des scrutins, la CENI pâtissait depuis sa mise en place d’un déficit de crédibilité et de confiance. Consciente de ce handicap, la CENI, avec l’appui des partenaires internationaux, a déployé des efforts soutenus et notables pour, d’une part, développer les capacités de ses membres et de

Déclaration de l’Union africaine sur les principes régissant les élections démocratiques de 2002 ou bien la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance du 30 janvier 2007 ;; ;; la Déclaration de Bamako du 3 novembre 2000 pour les Etats et gouvernements appartenant à l’espace francophone; le Protocole de la SADC sur le Genre et le Développement de 2008 ainsi que les Principes de Gestion, de Surveillance et d’Observation des élections dans les pays de la SADC (PEMMO) du 6 novembre 2003. 9 Art. 2 de la loi précitée. 10 Il faut noter qu’à quelques jours du scrutin, certains fonds n’étaient toujours pas débloqués, notamment pour le paiement des membres des bureaux de vote (entretien du 8 novembre avec le Président de la CENI). 11 Art. 12-14, loi n°2015-20 précitée 12 La CENI a organisé les élections sénatoriales de la fin 2015 mais ce scrutin est la 1ère élection nationale qu’elle organise depuis sa création.

11 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 son personnel aux différents échelons, mais surtout, pour promouvoir la transparence et la concertation avec les différentes parties prenantes au processus électoral. Des cadres de concertation ont ainsi été mis en place depuis 2016 avec les différents acteurs de la vie politique et une stratégie de communication proactive a été adoptée. Qui plus est, depuis la validation des candidatures, la formation non permanente de la CENI associe les représentants des candidats à toutes les activités et à tous les niveaux de l’institution. La Haute Cour constitutionnelle, mise en place dans sa composition actuelle en 2015, a retrouvé ses prérogatives constitutionnelles relatives à l’établissement des résultats définitifs et au règlement du contentieux des élections présidentielles13, notamment ; elle se trouve elle aussi confrontée à son premier scrutin d’une telle ampleur. A l’instar de la CENI (et souvent en partenariat avec celle-ci), la HCC a déployé d’importants efforts pour vulgariser le nouveau cadre juridique, faire connaître et comprendre ses prérogatives ainsi que la procédure de saisine dans le cadre du contentieux de ces élections. Elle a également publié une série de communiqués dans le courant du mois d’octobre afin d’informer le public et de clarifier un certain nombre de questions, mais elle a déclaré irrecevable en la forme une requête visant la réouverture de la liste électorale. La HCC a par ailleurs mis en place des mécanismes de communication et de collaboration avec la CENI afin d’accélérer l’établissement des résultats définitifs et d’être capable de répondre au volume potentiellement important de requêtes susceptibles de lui être adressées, et ce, dans les délais très courts prévus par la loi. Tout comme la CENI, la HCC est tout autant louée que vilipendée, selon les interlocuteurs rencontrés ; son indépendance et son impartialité faisant toujours l’objet de suspicions. La Commission de contrôle du financement de la vie politique (CCFVP), mise en place par le décret 2018-795 du 17 juillet 2018, est chargée de recevoir et contrôler les comptes de campagne retraçant les recettes et les dépenses relatives à ladite campagne. Principale innovation du nouveau cadre juridique des élections, la mise en place tardive et l’incertitude sur les moyens de cette nouvelle institution fait peser des doutes quant à sa capacité à assumer son mandat.

IV. Environnement médiatique

1. Paysage et enjeux médiatiques

A l’instar de plusieurs pays africains, à Madagascar, le paysage médiatique est pluriel et compte actuellement au moins cinq cent (500) organes de presse, tous secteurs confondus14. Le pôle public, incarné par l’ORTM, comprend la Radio Nationale Malagasy (RNM) et la Télévision Malagasy (TVM). Ces deux médias publics ont un taux de couverture quasi- nationale, grâce à leurs stations implantées dans toutes les provinces. L’ORTM dispose d’équipements modernes et d’un personnel qualifié, lui permettant de diffuser certains

13 Article 116 de la Constitution ; lors des élections de 2013, le contentieux avait été confié à une cour spéciale. 14 En l’absence d’un répertoire actualisé, il est difficile de donner un chiffre précis sur le nombre de médias.

12 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 événements en direct. La RNM et la TVM ont démontré leurs performances techniques pendant les campagnes électorales et la proclamation des résultats provisoires des deux tours de l’élection présidentielle. Les programmes de ces médias audiovisuels sont également diffusés sur Internet, via leurs sites Web et les réseaux sociaux – Facebook et YouTube. Il n’existe pas à Madagascar de presse écrite publique. Ce secteur est, jusqu’ici, exclusivement dominé par le privé. Le pôle privé est très foisonnant. Il comprend des journaux de différente périodicité15, des radios et télévisions privées16 à zones de couverture variées et des médias en ligne17. Presque tous les organes de presse privée sont basés à Antananarivo, la capitale. Mais certains, par leurs canaux de distribution ou de diffusion, desservent les provinces. Dans le paysage médiatique malgache, la pièce manquante du puzzle est l’instance de régulation. En effet, l’Autorité Nationale de Régulation de la Communication Médiatisée (ANRCM) a été créée par la loi 2016 – 029 portant Code de la Communication médiatisée. Deux ans plus tard, elle n’est pas encore mise en place et l’autorégulation des médias n’est pas très effective, dans la mesure où l’Ordre des Journalismes Malgaches (OJM) est plus une organisation corporatiste. Dès lors, comment garantir l’égal accès des trente-six candidats aux médias publics, soupçonnés à tort ou à raison, d’être à la solde du pouvoir en place ? Comment garantir le pluralisme des opinions et l’équilibre de l’information dans les médias privés, dont certains appartiennent à des candidats18 et d’autres en ont des accointances avérées19 ? Comment faire respecter l’éthique et la déontologie par les journalistes, en l’absence de l’autorité morale de l’autorégulation ? Bref, comment assurer une régulation indépendante, transparente et équitable dans un paysage médiatique traditionnellement non régulé du moins, institutionnellement ? Ces interrogations résument les enjeux médiatiques de l’élection présidentielle malgache de 2018. Elles traduisent également les défis que la CENI a dû relever dans l’accomplissement de sa mission transitoire de Régulateur des médias.

2. Analyse du paysage médiatique

L’analyse du paysage et des enjeux médiatiques ne peut occulter trois aspects importants, du fait de leurs impacts sur la régulation des médias : - La volonté de mainmise du Ministère de la Communication sur les médias publics (TVM et la RNM), qui peut entraver l’accomplissement de leur mission en période électorale en matière d’accès égal et équitable des candidats ;

15 Les principaux journaux quotidiens sont : L’Express de Madagascar, Midi Madagasikara, La Gazette de la Grande île, La Vérité, Les Nouvelles, La Ligne de Mire, Free News, Madagascar Laza, Tia Tanindrazana, Inono no Vaova. Ces journaux sont édités en français et/ou en malgache, avec des tirages variés. 16 Parmi les stations de radios et télévisions privées installées dans la capitale, on peut citer : TV Plus, IBC TV, Kolo TV, Viva TV, M3 TV, MA TV, Radio Plus, Free FM, Antsiva FM, Kolo FM, Viva Radio, RDJ, RDB Radio TANA, RFM, M3FM etc. 17 Dans le grand lot, deux sites d’information se distinguent : Madagate.org et Madagascar-tribune.com. 18 Le rapport de « l’étude sur la propriété des médias » publié par PEV-Madagascar est très édifiant. 19 Pour plus de précision, voir les revues de presse quotidiennes et les notes hebdomadaires publiées par PEV.

13 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 - La concentration des médias privés entre les mains de quelques politiciens ou de leurs soutiens - opérateurs économiques,20 qui peut porter gravement préjudice au principe du pluralisme, à l’indépendance et au professionnalisme des journalistes ; - L’absence d’un cadre fédérateur des professionnels de la presse, Maison ou Centre de Presse, qui aurait servi d’intermédiaire à la CENI dans l’opérationnalisation de sa mission de régulateur ad hoc. Dans un tel contexte, la régulation des médias est un enjeu politique majeur. En effet, en confiant à la CENI la double mission d’organiser les élections et de réguler les médias pendant la période électorale, le législateur malgache a placé, pour ainsi dire, cette institution dans « l’œil du cyclone » politique. De ce fait, la CENI est attendue à deux tournants décisifs du parcours de combattant électoral : la bonne organisation matérielle des élections et la régulation indépendante des médias. En outre, la CENI peut faire face à deux types de résistances voire d’obstacles. D’abord, de la part du Ministère de la Communication, qui verrait d’un mauvais œil son « intrusion » dans sa zone d’influence. Ensuite, de la part de « la classe politico-médiatique21 » qui pourrait être réfractaire à l’application par la CENI des principes de pluralisme et d’équilibre de l’information auxquels elle n’est guère habituée. Ces résistances peuvent entraver l’accomplissement de la mission de régulateur ad hoc conférée à la CENI. La collusion entre politiciens et journalistes peut aussi expliquer les critiques parfois infondées dont la CENI a été l’objet de la part de certains médias privés, propriétés ou à la solde de certains candidats.

3. Cadre juridique et institutionnel de la régulation

Deux textes, de par leur importance dans le paysage médiatique, méritent une attention particulière : la loi n° 2016-029 du 24 août 2016 portant Code de la communication médiatisée et la loi organique 2018-008 du 11 mai 2018 relative au régime général des élections et des référendums. La loi n° 2016-029 portant Code de la communication médiatisée a consacré deux avancées significatives : - La dépénalisation des « infractions classiques22 » commises par voie médiatique ; - La création de l’Autorité Nationale de Régulation de la Communication Médiatisée (ANRCM), en tant qu’autorité administrative indépendante, chargée de « réguler l’exercice des activités de la communication médiatisée », définie, à l’article 2, comme celle « qui se fait par l’intermédiaire des médias écrits ou audiovisuels ou électroniques ou des discours, des communications dans les lieux publics et par voie d’affiches et d’annonces exposées au public, que cette communication soit sous la forme d’une diffusion de proximité ou de masse. » Le fonctionnement et l’organisation de l’ANRCM seront ultérieurement fixés par décret pris en Conseil des Ministres.

20 Pour plus de détails voir le rapport d’étude sur la propriété des médias réalisée par PEV-Madagascar et ECEC. 21 Cette expression est utilisée pour illustrer la collusion entre les politiciens et les médias privés. 22 Les infractions dépénalisées sont : outrage, injure et diffamation. Les crimes ou délits de droit commun, commis par voie de presse, relèvent du Code Pénal. En termes clairs, il s’agit d’une dépénalisation partielle.

14 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 En attendant la mise en place effective de l’instance de régulation, la CENI a pour mission d’exercer la plénitude de ses attributions, conformément à l’article 240 de la loi organique 2018 – 008 relative au régime général des élections et des référendums. Celle-ci détermine les règles de bases relatives à l’accès des candidats et des partis politiques aux médias audiovisuels publics. Durant la période de précampagne, elle édicte le principe d’équité. Durant la période officielle de campagne électorale, les principes d’égalité et de gratuité s’appliquent, conformément à l’article 112. S’agissant de la presse écrite, l’article 116 impose les principes d’équité, d’équilibre et de pluralisme entre les candidats et les partis politiques. Ces principes s’appliquent également aux nouvelles technologies de l’information et de la communication, ainsi qu’aux réseaux sociaux. Quant à l’article 118, il interdit « durant la campagne électorale ou référendaire officielle et pendant la période du silence électoral, la veille du jour de scrutin, de diffuser et de publier à travers les différents médias les résultats de sondages d’opinion directement ou indirectement liés aux élections et aux référendums, ainsi que les études et commentaires journalistiques qui s’y rapportent. » L’analyse de la loi n° 2016 -029 portant Code de la communication médiatisée fait ressortir les points forts suivants : - Le Code englobe toutes les composantes de la communication médiatisée : exercice de la profession, entreprises de presse, services médiatiques, publicité et Internet ; - Il garantit aussi les libertés fondamentales de la presse, de la communication audiovisuelle, d’expression, d’opinion, d’accès à l’information, conformément à la Constitution et aux instruments juridiques internationaux et régionaux relatifs aux droits humains ratifiés par Madagascar23 ; - Le nouveau Code a supprimé les peines privatives de liberté pour les infractions classiques, pour les remplacer par des peines d’amende ; - Enfin, le Code a consacré la création d’une instance de régulation des médias sous la forme d’une autorité administrative indépendante. S’agissant précisément de la régulation des médias, certains points faibles de la loi 2016 - 029 méritent d’être soulignés, notamment : - Le retard de deux ans accusé dans la mise en place de l’ANRCM, qui devrait intervenir douze (12) mois après la promulgation du Code, selon l’article 205 ; - La durée du mandat des membres de l’ANRCM n’a pas été expressément précisée par la loi 2016-029 portant Code de la communication médiatisée ; - L’épée de Damoclès suspendue à la tête de l’ANRCM, en laissant à la discrétion du Gouvernement de fixer, par décret, l’organisation et le fonctionnement de cette autorité administrative indépendante ; - L’ANRCM n’a pas d’attribution claire en matière d’accès des candidats et des partis aux médias publics et privés en période électorale ;

23 Notamment : Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ; Accord de Florence de 1950 sur l’importation d’objets à caractère éducatif, scientifique et culturel ; Accord de Nairobi du 26/11/1976 ; Déclaration de principes sur la liberté d’expression en Afrique inspirée de la Charte Africaine des droits de l’Homme et des Peuples.

15 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 - L’article 49 « confisque » au profit du Ministère de la communication une prérogative « régalienne » des instances de régulation des médias : l’octroi et le retrait des licences d’exploitation des services audiovisuels ; L’analyse de la loi relative au régime général des élections et des référendums, dans ses dispositions consacrées à la régulation, laisse également entrevoir des forces et des faiblesses. Parmi les forces, on peut citer : - La détermination précise des périodes de précampagne et de campagne électorale, ainsi que les principes qui doivent s’appliquer au cours de celles-ci ; - Les modalités de mise en œuvre des principes d’équité et d’égalité entre les candidats et les partis politiques ont été détaillées ; - La redevabilité des médias audiovisuels publics vis-à-vis de la CENI a été bien établie pendant la précampagne et la campagne électorale, ce qui renforce l’autorité morale de celle- ci ainsi que son pouvoir de régulation. Parmi les faiblesses de la loi organique relatives à la régulation, il faut relever : - La CENI n’a pas de moyens légaux pour exécuter sa mission de régulation sur les médias privés. Ce qui explique les multiples manquements aux principes du pluralisme et d’équilibre de l’information constatés dans les revues de la presse écrite et les notes sur les médias audiovisuels de l’unité de monitoring du PEV24 ; - L’absence de mécanismes de traitement de plaintes et de prise de sanctions par la CENI, en cas de constatations de violation de la loi par les médias publics et privés.

V. Déroulement de la mission

1. Rencontres avec les acteurs Lors de ses deux séjours à Antananarivo, la Mission a été reçue par les hautes autorités de l’Etat, notamment le Président de la République, le Premier ministre et le Ministre des affaires étrangères. Elle s’est entretenue avec les Présidents de la CENI et de la HCC ainsi qu’avec des candidats, des acteurs politiques et de la société civile25. Elle a également rencontré les partenaires internationaux et les missions d’observation électorales présentes sur place. Au cours de ces entretiens, la Mission a expliqué son mandat qui, différent d’une mission d’observation classique, s’inscrit dans le cadre de l’accompagnement de long terme apporté par la Francophonie à Madagascar et vise à s’informer et à recueillir l’appréciation des acteurs sur les différents aspects du processus électoral, dans l’optique de dégager des recommandations d’amélioration et des pistes d’appui futur. Elle a saisi cette occasion pour rappeler les différentes actions menées par l’OIF dans l’accompagnement du processus électoral à Madagascar depuis de 2009, mais plus particulièrement pour appuyer le processus en cours, qu’il s’agisse de l’audit du fichier électoral ou de l’appui fourni à la CENI et à la HCC

24 Les revues de la presse écrites et le notes sur la communication audiovisuelle sont disponibles à l’adresse suivante : www.alerte.pevmadagascar.eu 25 Bien que des demandes d’entrevues aient été adressées à l’ensemble des candidats et à plusieurs organisations de la société civile, la Mission n’a pu rencontrer que ceux qui ont bien voulu y répondre. Voir la liste des personnes rencontrées en Annexe.

16 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 concernant l’appropriation du nouveau cadre juridique, la gestion du contentieux électoral ou encore la régulation des médias. La plupart de ses interlocuteurs se sont félicités de sa présence et ont exprimé leur reconnaissance pour l’appui soutenu et fidèle apporté par l’OIF à la République de Madagascar. Si les autorités rencontrées se sont montrées rassurantes sur l’état des préparatifs et le déroulement des opérations électorales conformément au chronogramme établi, ainsi que sur le climat dans lequel s’est déroulé la campagne, les candidats ont pour leur part mis en avant un certain nombre de préoccupations voire de griefs. Parmi les préoccupations relevées par la plupart des candidats rencontrés avant le 1er tour, celles qui sont revenues avec le plus d’acuité portaient sur la liste électorale et les nombreuses anomalies qu’elle comporterait. Malgré l’audit effectué par l’OIF, dont la démarche inclusive et les principales conclusions ont été rappelées, notamment que le fichier était suffisamment fiable pour permettre la tenue d’élections crédibles, les critiques ont porté notamment, sur l’exclusion des nouveaux majeurs depuis l’arrêtage des listes, sur les omis ainsi que sur des cas de personnes qui bien que précédemment inscrites, ne se sont pas retrouvées sur les nouvelles listes. La présence de personnes décédées ainsi que de doublons a également été mise en avant, de même que l’augmentation jugée anormale du taux d’inscrits dans certaines régions, alimentant des suspicions de gonflement artificiel des listes et de « faux électeurs ». En outre, la question de l’augmentation du nombre des bureaux de vote et la suspicion de bureaux fictifs ou encore la circulation de bulletins pré-cochés ont fait partie des inquiétudes exprimées par plusieurs interlocuteurs qui craignaient que ces éléments n’entachent le processus et n’ouvrent la voie à des contestations voire à des violences post-électorales. L’inégalité des moyens de campagne entre les candidats et les sommes extravagantes dépensées par certains dans le cadre de leur campagne, sont un autre grief et la source d’allégations de financement illicite et d’achat de voix. Certain ont par ailleurs dénoncé le fait que l’élection ne se passe pas pendant la saison sèche comme le prévoit la loi électorale. Plusieurs interlocuteurs ont mis en cause la crédibilité, l’indépendance et l’impartialité tant de la CENI que de la HCC, certains demandant même que certaines prérogatives de la CENI soient confiées à d’autres entités étatiques et qu’une cour électorale spéciale soit désignée pour connaitre du contentieux des élections (comme en 2013). Pour le second tour, les griefs relatifs à la liste électorale étaient moins prégnants, même si la présence de doublons et de personnes décédées a été critiquée par plusieurs interlocuteurs. Les critiques et les craintes se sont focalisées d’abord sur le logiciel de traitement des résultats de la CENI et le manque de transparence allégué de celle-ci et ce, malgré l’audit international qui a été effectué sur le système entre les deux tours. Autres sujets d’inquiétude exprimés par les candidats : la circulation de fausses cartes d’électeur et de fausses cartes d’identité ainsi que de bulletins pré-cochés. Il est à noter que la distribution des cartes d’électeur au niveau des Fonkontany a été chaotique avant le 1er tour et les efforts déployés pour distribuer les quelques 600.000 cartes restantes entre les deux tours n’ont pas toujours été très rigoureux,

17 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 ni couronnés de succès26. Cependant, les autorités ont réagi avec célérité et fermeté et publiquement aux cas portés27 à leur attention, en ouvrant des enquêtes et en prenant les mesures correctives nécessaires. Les sanctions pénales encourues par tout auteur de fraude ont en outre été rappelées et des poursuites engagées auprès des autorités compétentes. Les partenaires internationaux et les missions d’observation électorales ont partagé leurs informations et constats, avant et après chacun des 2 tours. Ils ont pour leur part souligné le travail remarquable effectué par la CENI et la HCC et se sont félicités du climat généralement calme et apaisé qui a caractérisé la campagne électorale et les opérations de vote lors des deux tours. Soulignant le caractère historique de ces élections et l’opportunité qu’elles offrent à Madagascar de rompre avec le cycle des crises politiques, ils se sont accordés sur la nécessité de parler d’une même voix et de délivrer des messages favorisant l’apaisement et appelant au respect de la légalité, notamment s’agissant de l’annonce des résultats ou du recours exclusif aux voies légales pour toute contestation. Des communiqués conjoints ont été publiés dans ce sens avant et après chacun des deux tours de l’élection.

2. Observation des scrutins Le mercredi 7 novembre 2018, jour du scrutin du 1er tour de l’élection présidentielle à Madagascar, la MIC de l’OIF s’est déployée en 5 équipes dans la ville d’Antananarivo et ses alentours, afin d’observer le déroulement des opérations de vote, de l’ouverture à la clôture des bureaux de vote, de dépouillement et d’acheminement des résultats vers les Section de recensement matériel des votes (SRMV). La Mission a ainsi couvert plus d’une centaine de bureaux de vote répartis dans 5 districts de la région d’Antananarivo. La Mission a fait part de ses constats dans un communiqué de presse28 présenté lors d’une conférence de presse organisée conjointement avec la Mission d’observation électorale de la SADC, le 9 novembre à l’hôtel Colbert. Pour le second tour, le mercredi 19 décembre 2018, 5 équipes se sont également déployées dans la région d’Antananarivo mais aussi dans les zones d’Ambatolampy (70 km de la capitale) et de Mantasoa. Une centaine de bureaux de vote en zone urbaine et rurale a également pu être observée lors du 2nd tour et les principaux constats de la mission ont été publiés dans un communiqué de presse diffusé par le BROI (cf. Annexe 3).

V. Constats

1. Préparatifs des scrutins et campagnes électorales

26 Environ 400.000 cartes supplémentaires auraient été distribuées entre les deux tours, les 200.000 restantes pouvant appartenir notamment à des personnes décédées, absentes ou n’ayant pas d’intérêt pour l’élection (Président de la CENI, entretien avec la MIC le 18/12/18). 27 En particulier concernant des bulletins qui auraient été trouvés par un des candidats ou encore dans le cas des fausses cartes d’identité et d’électeurs. 28 Cf. Annexe 2.

18 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 Bien qu’arrivée quelques jours seulement avant la tenue des scrutins, la mission a pu dégager un certain nombre de constats sur les préparatifs de chacun des scrutins et la campagne électorale qui les a précédés. Concernant le 1er tour, les principaux constats sont les suivants : • Les demandes de report du scrutin se sont faites de plus en plus discrètes et une grande partie des candidats à l’origine de cette demande ont poursuivi leurs activités de campagne, ce qui tendait à lever toute hypothèque sur la tenue du 1er tour à la date fixée. • La campagne du premier tour s’est déroulée dans un climat globalement apaisé, avec un seul incident à déplorer, ayant entraîné la mort d’une personne ; • Un déséquilibre flagrant des moyens de campagne et de la visibilité des candidats a pu être relevé, sans parler des sommes extravagantes qu’auraient dépensées certains candidats, selon plusieurs interlocuteurs de la mission, avec comme corollaire des soupçons de financement illicite, de corruption et d’achats de voix; • Les médias publics ont scrupuleusement respecté le principe de l’égalité d’accès de tous les candidats, conformément à la loi ; en revanche, les médias privés n’étant pas soumis à de telles obligations, leur couverture a varié en fonction de leurs affinités à l’égard de l’un ou l’autre des candidats ; l’absence de régulation des médias sociaux peut en outre être déplorée ; • La liste électorale a fait l’objet d’un niveau de critique très élevé et constitue le principal argument utilisé pour remettre en cause la crédibilité du scrutin (ou pour en demander le report) ; • Le déroulement des opérations en vue du scrutin, est généralement conforme au chronogramme même si des retards dans le décaissement des fonds ont eu un impact sur certaines dispositions logistiques et sur la formation des agents des bureaux de vote ; • Des retards et une certaine confusion ont été notés dans la distribution des cartes d’électeur (jusqu’au jour du scrutin) ce qui a parfois affecté le bon déroulement du scrutin. S’agissant de l’entre-deux-tours et du 2nd tour, la Mission a particulièrement relevé : • La proclamation des résultats, tant provisoires que définitifs, et le traitement des contentieux dans les temps ; • Les efforts déployés par les autorités, en particulier la CENI, pour évaluer le processus et remédier aux lacunes du 1er tour, notamment s’agissant de la distribution des cartes d’électeurs, de l’acheminement du matériel électoral à temps, de la formation des agents électoraux et de la sensibilisation des électeurs, mais aussi pour renforcer la sécurisation du processus ; • Les efforts de transparence et de communication ainsi que les mesures exceptionnelles prises par la CENI, souvent bien au-delà des prescriptions légales, pour établir la confiance des candidats et du public dans le processus électoral, en particulier en procédant à un audit international de son système de transmission des résultats et en accordant l’accès aux représentants des candidats à tous les niveaux de la chaîne de

19 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 transmission, en acceptant toutes les demandes de confrontation des PV et en ouvrant des enquêtes, voire des poursuites sur les allégations de fraudes portées à son attention (par ex. bulletins volés...) ; • Malgré les discours de dénigrement et les accusations d’obstruction à leur campagne par les 2 candidats, la campagne électorale s’est déroulée de l’avis de tous dans le calme et sans incident majeur ; on peut néanmoins déplorer le fait qu’aucun des deux candidats n’a formellement adhéré à la Charte de bonne conduite élaborée sous l’égide du CFM ; • Comme pour le 1er tour, les médias publics, contrairement aux médias privés, ont scrupuleusement respecté le principe de l’égalité d’accès de tous les candidats et les 2 débats entre les candidats ont été bien organisés, même si le second s’est tenu à huis- clos ; • La gestion de la distribution des cartes d’électeur reste à améliorer et systématiser.

2. Déroulement des scrutins

Comme indiqué plus haut, la mission de la Francophonie a fait part de ses constats sur le déroulement de chacun des scrutins par le biais de communiqués de presse dans lesquels elle a salué la mobilisation des électeurs qui ont voté dans le calme et la discipline. Elle a félicité les autorités, les institutions malgaches chargées de l’organisation et de la gestion des élections, notamment la CENI ainsi que les autres acteurs, y compris la société civile, pour leur détermination qui a permis la tenue des scrutins dans de bonnes conditions. La Mission a souligné que les deux journées de vote se sont déroulées dans un climat serein et paisible et s’est félicitée qu’aucun incident majeur n’ait été à déplorer. Pour le 1er tour, la mission de la Francophonie a en particulier noté avec satisfaction les points suivants : • une atmosphère calme dans les bureaux de vote ; • l’engouement des électeurs à accomplir leur devoir ; • le professionnalisme et le dévouement des membres des bureaux de vote ; • une forte représentation des femmes dans les bureaux de vote ; • une maitrise généralement bonne des règles et procédures par les membres de bureaux de vote permettant de contribuer à garantir l’intégrité du processus ; • une forte participation des observateurs nationaux ; • un dépouillement public, effectué dans l’enthousiasme et dans la transparence ; • une présence permanente et discrète des forces de l’ordre. Toutefois, des difficultés ont été relevées dans certains bureaux de vote observés. Il s’agit notamment de problèmes liés: • à la distribution des cartes d’électeurs dont un grand nombre a dû être distribué le jour du scrutin, à proximité des bureaux de vote, selon des processus non systématiques et parfois chaotiques ;

20 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 • à la difficulté pour certains électeurs d’identifier leur bureau de vote et de retrouver leurs noms sur les listes (surtout sans leur carte d’électeur) ; • à des retards dans l’ouverture de certains bureaux de vote, notamment du fait de l’absence de certains membres, du retard à l’arrivée du matériel, à la difficulté d’organiser et disposer les bureaux de vote dans des locaux parfois très exigus et encombrés par les nombreux délégués ; • au manque, ou à la mauvaise utilisation, de certains matériels de vote (par ex. l’encre indélébile) ; • au défaut d’identification ou à l’identification parfois erronée des personnes habilitées à se trouver dans les bureaux de vote (par ex. membres de bureau de vote arborant des badges de couleur rose, réservée aux délégués) ; • au remplissage fastidieux et très long des procès-verbaux et des documents annexes (en particulier les feuilles de dépouillement sur lesquelles les noms des candidats n’étaient pas préinscrits et qui ont parfois été remplies a posteriori). A cet égard, la mission a relevé dans certains bureaux que le remplissage des documents et la constitution des plis a pris jusqu’à trois fois plus de temps que le dépouillement des bulletins de vote. Il a été en outre relevé dans certains bureaux que le PV avait été signé avant même d’être rempli et avant le décompte des votes. • à l’absence de moyens de transport mis à la disposition des bureaux de vote pour acheminer les plis vers les SRMV (les représentants des Fokontany devant recourir à des véhicules prêtés par leurs administrés pour acheminer le matériel). • à la présence de matériels de campagne proches des bureaux de vote. Pour le 2nd tour, les constats positifs restent les mêmes et certaines améliorations ont été notées, notamment en ce qui concerne la confiance et la maîtrise des procédures par les agents des bureaux de vote, sans doute grâce à la formation supplémentaire qu’ils ont reçue, mais aussi grâce à une gestion simplifiée du fait d’une compétition réduite à deux candidats au lieu de 36 (nombre des délégués, taille des bulletins, remplissage des PV et feuilles de dépouillement...) ainsi qu’à une affluence légèrement moindre. La MIC n’a cette fois pas observé de matériel de campagne à proximité des BV. Cependant des améliorations restent à apporter notamment concernant : • la distribution des cartes d’électeur et l’orientation des électeurs vers leurs bureaux de vote ainsi que leur identification sur la liste ; • une application plus systématique et uniforme des procédures, en particulier celles garantissant l’intégrité du processus électoral (vérification et application de l’encre indélébile, vérification de l’identité de l’électeur, pose et relevé des numéros de scellés ainsi que scellement des urnes avant acheminement aux SRMV...) ; • le choix de locaux adéquats et accessibles pour les bureaux de vote (beaucoup sont trop exigus ; une même salle abrite plusieurs BV ; les BV sont en étage ou inaccessibles aux personnes âgées ou handicapées ; manque de lumière...) ; • la conception des matériels et documents électoraux afin d’en faciliter la compréhension et le bon usage (isoloirs, scellés, PV, encre, feuilles de dépouillement...) ;

21 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 • l’identification adéquate des personnes présentes dans les BV ; • la mobilisation des électeurs dont la participation à été plus faible qu’au 1er tour ; • la formation des délégués des candidats.

3. Transmission et compilation des résultats

Concernant la transmission et la compilation des résultats du 1er tour, la MIC a relevé les points suivants : • Bien qu’un effort de transparence louable a été fait par la CENI pour publier en temps réel les résultats au fur et à mesure de leur arrivée depuis les SRMV, le processus a pris beaucoup de temps à l’issue du 1er tour, ce qui a alimenté toutes sortes de conjectures et de suspicions. • Malgré la présentation publique de son dispositif de transmission et de traitement des résultats, lors d’une séance portes-ouvertes le 31 octobre 2018 (une semaine avant le 1er tour), le système a fait l’objet d’accusations de trucage en vue de falsifier les résultats. • En réponse aux accusations de falsification des résultats, la CENI a ouvert la porte à une confrontation des procès-verbaux, à laquelle aucun des candidats qui avaient formulé ces accusations, ne s’est rendu. • Les résultats provisoires du scrutin ont été officiellement publiés le 17 novembre 2018, soit deux jours avant la date butoir fixée par la loi ; ils ont fait apparaître la nécessité d’un 2nd tour devant se tenir le 19 décembre 2018. • Les résultats définitifs ont été proclamés par la Haute Cour constitutionnelle le 28 novembre 2018 dans son arrêt n° 11-HCC/AR contenant également ses décisions relatives aux requêtes dont elle a été saisie. Les résultats définitifs ne sont pas substantiellement différents des résultats provisoires publiés par la CENI. Face aux critiques et suspicions dont son système de transmission des résultats a fait l’objet à l’issue du 1er tour, la CENI a commandité un audit international de son système informatique, mené par trois experts de la firme Moore Stephens et un expert du système des Nations Unies, avec la participation d’experts désignés par les deux candidats. Cet audit a conclu à la sécurité et la fiabilité du système utilisé tout en recommandant certaines améliorations. En outre, la CENI a accepté la présence des représentants des candidats à tous les niveaux de la chaîne de transmission et qu’ils aient copie de tous les procès verbaux. Elle a également apporté des améliorations à son système de publication des résultats provisoires et des tendances pour l’accélérer (en se basant sur les PV scannés avant l’arrivée des PV physiques) et le rendre plus transparent notamment en publiant les résultats BV par BV, en temps réel. Cela n’a toutefois pas empêché un des candidats de l’accuser de partialité et d’annoncer prioritairement les résultats des régions favorables à son adversaire « dans une tentative de préparer les esprits à la victoire de celui-ci ». La CENI a immédiatement démenti ces accusations et réexpliqué sa méthodologie de publication des résultats à mesure qu’ils lui parviennent.

22 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 Il est à noter que la publication des résultats du second tour a été plus rapide qu’au 1er tour et la CENI a annoncé officiellement les résultats provisoires lors d’une conférence de presse le 27 décembre 2018, soit 4 jours avant la date butoir fixée par les textes. Les résultats provisoires montrent un écart de voix de plus de 10 points entre les 2 candidats (55,66% des voix pour le candidat Andry Rajoelina et 44,34% pour le candidat Marc Ravalomanana) et un taux de participation s’établissant à 48,09%. Toutefois, dès le lendemain de l’élection, le camp de Marc Ravalomamana a dénoncé des fraudes et accusé les autorités de partialité. La CENI l’a exceptionnellement autorisé à procéder non seulement à la confrontation des PV, mais également à la vérification des bulletins, des listes d’émargement et de pointage et des souches de bulletins uniques. Nonobstant ces mesures, allant bien au-delà de ce qu’autorise la loi mais qui visaient à rétablir la confiance, le camp du candidat malheureux a appelé à des manifestations dès le lendemain de la publication des résultats provisoires, au nom de la « défense de la vérité des urnes ». Le 5 janvier, des heurts ont opposé les manifestants ayant investi le parvis de l’Hôtel de ville d’Anakely et la place du 13 mai, aux forces de l’ordre et plusieurs partisans de Marc Ravalomanana ont été arrêtés. Des appels à manifester autour de la HCC ont également été lancés auxquels a répondu un renforcement du dispositif de sécurisation de la zone. Des appels au calme et à l’apaisement ont été émis par différentes institutions et personnalités, notamment le Président de la République par interim, le Président de la HCC lui-même ou le CFM. Le candidat Marc Ravalomanana a également contribué à calmer le jeu en déclarant sa confiance dans le travail de la HCC.

4. Contentieux

La Haute Cour constitutionnelle est compétente pour connaître de toute requête ou contestation se rapportant aux actes qui constituent les préliminaires des opérations électorales, à ceux qui ont trait au déroulement du scrutin et à toute contestation des résultats. En outre, dans le cadre de ses attributions pour proclamer les résultats définitifs de l’élection, la HCC a annoncé, dans un communiqué publié le 21 novembre, qu’elle procèderait à une vérification systématique des procès-verbaux et des feuilles de dépouillement de tous les bureaux de vote sans exception. Les délais de saisine comme de traitement du contentieux, tels que prévus par la loi, sont jugés trop courts tant par la Cour elle-même que par beaucoup d’observateurs. Dans le délai de 2 jours ayant suivi la publication par la CENI des résultats provisoires du 1er tour, la HCC aurait reçu plus de 200 requêtes, émanant de candidats mais aussi d’organisations de la société civile, demandant l’annulation totale ou partielle du scrutin ; un sit-in s’est par ailleurs déroulé devant ses locaux pour réclamer l’annulation de l’ensemble du scrutin. Quelques jours avant l’expiration du délai de traitement des recours, un des candidats en tête du 1er tour a annoncé retirer toutes ses plaintes et s’en remettre aux résultats qui seront proclamés par la Cour. La HCC ne restait donc devoir se prononcer que sur 14 requêtes concernant des demandes d’annulation totale ou partielle du scrutin, de confrontation de tous les procès-verbaux et de disqualification d’un des candidats. Toutes les requêtes ont été rejetées soit parce qu’irrecevables, soit parce que recevables mais non fondées. La Cour a par ailleurs, dans le cadre de l’établissement des résultats définitifs,

23 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 procédé au recomptage des voix de 2 bureaux de vote, à la requalification des bulletins blancs et nuls de 133 BV et constaté l’absence de résultats (carence) de 11 BV. Les résultats définitifs du 1er tour ont été proclamés par la HCC dans son arrêt n°11-HCC/AR du 28 novembre 2018. Pour le second tour, la HCC a mis en place un dispositif pour accélérer le ramassage des plis et ses délais de traitement des résultats. A l’expiration du délai de recours le 31 décembre 2019, la Cour a reçu 305 requêtes 29 dont soixante-quinze (75) du candidat n°13 Andry Rajoelina, deux cent (200) du candidat n°25, Marc Ravalomanana et le reste de la société civile, la plupart demandant l’annulation des résultats dans certains bureaux de vote pour des motifs divers. On peut citer, entre autres, l’existence de bulletins pré-cochés en faveur d’un candidat (Andry Rajoelina), l’utilisation du feutre marqueur à la place d’un stylo à bille bleu pour exprimer son choix sur le bulletin unique, l’achat des voix des électeurs, le non-respect du silence électoral, l’incitation des membres du bureau de vote à voter pour un candidat le jour du scrutin, la violation de dispositions relatives à la composition du bureau de vote, la présence de l’empreinte digitale d’une personne apposée au moins une centaine de fois sur la liste électorale, l’insuffisance du nombre de scrutateurs dans certains bureaux, la non mention de l’heure de clôture du scrutin, le défaut de mention du nombre de suffrages, etc. Il ressort de l’arrêt n°01-HCC/AR du 8 janvier 2019 de la HCC que les contrôles des PV et des feuilles de dépouillement exercés à l’occasion de l’examen de ces requêtes, n’ont pas fait ressortir des irrégularités de grande ampleur, de nature à entrainer une annulation du scrutin. Les résultats définitifs proclamés par la HCC donnent le candidat Andry Rajoelina vainqueur avec 55,66% contre 44,34% à Marc Ravalomanana. Ce dernier a reconnu les résultats proclamés par la HCC et félicité son rival. Il faut noter que comme lors du 1er tour, les résultats de la HCC sont très similaires à ceux de la CENI.

5. Rôle de la société civile et participation des femmes et des jeunes

La société civile s’est beaucoup mobilisée et a joué un rôle actif dans le processus électoral de 2018, que ce soit par des activités de sensibilisation et d’éducation des électeurs ou à travers l’observation du scrutin. A cet égard, deux grande plateformes, l’Observatoire Safidy (regroupant quelques 700 organisations de la société civile et financé par l’UE), d’une part et le Comité national pour l’observation des élections (KMF/CNOE, associé à la Commission pontificale Justice et paix et à Liberty 32), d’autre part, ont déployé quelques 11.000 observateurs lors des deux tours de scrutin. Ces deux plateformes ont observé toutes les phases du processus, depuis la pré- campagne jusqu’à la proclamation des résultats et ont publié des déclarations sur chacun des scrutins. Elles ont également participé à l’évaluation du processus entre les deux tours et présenté des recommandations d’amélioration, en particulier en vue du 2nd tour, qui ont été prises en compte par la CENI (en particulier concernant le renforcement des formations des membres des bureaux de vote et une meilleure communication de la part de la CENI) . L’Observatoire Safidy a également présenté la concordance des résultats de la CENI avec ceux collectés par ses observateurs dans les 4200 BV où ils étaient présents.

29 Selon le directeur de cabinet du président de l’institution.

24 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 Si une participation accrue des femmes et des jeunes a été relevée, tant parmi les membres des bureaux de vote que des délégués des candidats, des observateurs nationaux et des électeurs, de fortes disparités demeurent selon les régions et les types de postes. Ainsi certaines régions, particulièrement dans le sud, n’ont vu la présence d’aucune femme ou d’aucun jeune comme membre de bureau de vote, selon Safidy. Les femmes et les jeunes restent très sous-représentés aux postes de décision (présidence de BV ou de SRMV). Les droits des personnes handicapées restent par ailleurs insuffisamment pris en compte avec en particulier des bureaux de vote peu ou pas accessibles aux personnes à mobilité réduite et pas de mesures spéciales pour les électeurs malvoyants ou sourds-muets.

VI. Conclusions et recommandations

La Mission d’information et de contacts de la Francophonie réitère ses félicitations à la fois au peuple malgache, aux autorités et institutions chargées de l’organisation et de la gestion du processus électoral, ainsi qu’aux autres acteurs, pour la tenue de l’élection dans de bonnes conditions, dans un climat apaisé et dans le respect de la légalité. Elle réitère son appel à tous à accepter les résultats définitifs proclamés le 8 janvier par la Haute Cour constitutionnelle et à continuer de favoriser un climat apaisé. Face aux difficultés constatées et dans la perspective d’une amélioration du processus à court ou plus long terme, la Mission souhaite soumettre les recommandations suivantes : • Introduire un plafonnement des dépenses électorales et un contrôle effectif du financement des campagnes électorales, assorti des moyens nécessaires et de sanctions dissuasives ; • Mettre en place une régulation des médias en période électorale et l’Autorité chargée d’y veiller, permettant d’assurer des conditions de campagne équitables entre tous les candidats, que ce soit avant ou pendant la période de campagne officielle, dans les médias publics ou privés ou encore sur les réseaux sociaux. • Mettre à disposition à temps les moyens et fonds destinés aux opérations électorales et au fonctionnement des institutions chargées de gérer les différents aspects du processus (CENI, HCC, CCFVP...). • Regrouper et codifier le cadre juridique relatif aux élections. • Allonger les délais de dépôt et de traitement des recours. • Mettre en œuvre les recommandations de l’audit du fichier électoral. • Mettre en place un dispositif pour enregistrer, prendre en compte et traiter prioritairement les cas des personnes qui auraient été omises ou indument radiées, lors de la prochaine Révision annuelle de la liste électorale (RALE),30 ainsi que pour « préinscrire » les personnes devant atteindre leur majorité au cours de toute l’année entre deux RALE.

30 Celle-ci s’est ouverte 1er décembre 2018, soit entre les deux tours.

25 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 • Prendre toutes les dispositions afin que toutes les cartes d’électeur soient distribuées bien en amont de l’élection selon une procédure systématisée assurant une traçabilité, et que les électeurs soient informés à l’avance de leurs bureaux de vote. • Améliorer l’accessibilité (y compris pour les personnes handicapées), la disposition et l’organisation des bureaux de vote notamment par la réquisition de locaux adaptés et en évitant le regroupement de plusieurs BV dans un même local exigu. • Améliorer la forme et la disposition des isoloirs et de leur équipement de sorte à garantir non seulement le secret du vote mais aussi un minimum de confort pour permettre le marquage du bulletin de façon régulière (table ou tablette pour poser le bulletin, lumière...). • Améliorer la conception des documents électoraux pour en faciliter l’usage ainsi que la formation des agents à l’utilisation des différents matériels et à l’application des procédures de façon homogène sur tout le territoire. • Mettre à disposition des moyens de transport et de sécurité pour l’acheminement des matériels électoraux des BV vers les SRMV. • Renforcer la présence des personnels féminins dans les bureaux de vote et les démembrements de la CENI, y compris à des postes de responsabilité. • Améliorer le processus de traitement, de validation et de transmission des plis par les SRMV pour accélérer leurs travaux et la transmission des résultats vers la CENI et la HCC. • Encourager les candidats à déléguer leurs représentants à tous les niveaux, y compris dans les SRMV. • Renforcer les capacités des délégués des candidats. • Encourager les candidats à participer à l’élaboration d’une charte de bonne conduite, dans le cadre d’une démarche participative et inclusive en amont des élections et à y adhérer. • Renforcer la communication et l’éducation des électeurs, notamment pour limiter le nombre des bulletins nuls et augmenter le taux de participation. • Poursuivre et intensifier les efforts de communication et de transparence des institutions chargées d’administrer le processus électoral. • Poursuivre l’accompagnement et l’appui de la communauté internationale au processus électoral ainsi qu’au dialogue politique et, plus largement à la consolidation de la démocratie et de l’Etat de droit. D’une façon générale, la Mission recommande qu’une évaluation approfondie du processus soit menée afin de tirer les enseignements de cette élection et de pallier les lacunes identifiées, en particulier en prévision des prochaines échéances électorales de 2019 et d’intensifier la mise en œuvre des recommandations déjà formulées.

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26 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 ANNEXE 1 : Calendrier des réunions et rencontres de la MIC:

Premier tour de l’élection présidentielle

Vendredi 2 novembre 2018 : Arrivée de la Mission.

Samedi 3 novembre 2018 : • Réunion de cadrage et briefing de l’équipe au Bureau régional pour l’Océan indien (BROI) de l’OIF. • Rencontre avec le candidat n°31, Jean-Max RAKOTOMAMAMJI, ancien Président de l’Assemblée nationale, parti « Leader FANILO ». • Rencontre avec le candidat n°27, Jean RAVELONARIVO, ancien Premier Ministre (2015- 2016).

Dimanche 4 novembre 2018 : • Briefing de sécurité par M. Abdoulaye BARRY, Officier de sécurité des Nations Unies. • Rencontre avec M. Abdoulaye BATHILI, Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies à Madagascar. • Rencontre avec le candidat n°25, Marc RAVALOMANANA, ancien Président de la République et chef du parti TIM, et son directeur de campagne. • Rencontre avec le Chef de la Mission d’observation électorale de l’Union africaine(MOEUA), M. Ramtane LAMAMRA.

Lundi 5 novembre 2018 : • Rencontre avec le Président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), M. Yves Herinirina RAKOTOMANANA. • Audience par le Président de la République par intérim, M. . • Réunion avec le groupe des Ambassadeurs francophones (avec les représentants de la Suisse, de la France, de la Belgique, du Mexique, des Comores et de Maurice). • Visite au Projet d’appui à la prévention et à la gestion de conflits et violences potentiels liés aux élections (PEV Madagascar)31. • Rencontre avec l’adjoint au Chef de la Mission d’observation électorale de la Communauté de développement des Etats d’Afrique australe (SADC), M. Katere KALUMBA et l’Envoyé spécial de la SADC à Madagascar, M. Joachim CHISSANO.

Mardi 6 novembre 2018 : • Audience par le Premier ministre, M. Christian NTSAY • Audience par le Ministre des Affaires étrangères, M. Eloi Alphonse Dovo. • Réunion des Chefs de missions électorales à l’initiative de la SADC • Rencontre avec le candidat n°12, M. Hery RAJAONARIMAMPIANINA, Président de la République sortant. • Rencontre avec le candidat n°13, M. Andry Nirina RAJOELINA, ancien Président de la République.

31 Projet mis en oeuvre par 5 organisations de la société civile malgache et financé par l’Union européenne.

27 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 • Rencontre avec M. Hajo Andrianainarivelo, fondateur du parti MMM (Malagasy Miara Miainga), ancien Vice-Premier ministre et ministre (2009-2013). • Réunion d’information de la Mission d’observation électorale de l’Union européenne (MOEUE) avec les autres missions électorales • Réunion de coordination de l’équipe en vue du déploiement le jour du scrutin.

Mercredi 7 novembre 2018 : Jour du scrutin, déploiement des équipes d’observation de la MIC.

Jeudi 8 novembre 2018 : • Rencontre avec le Président de la Haute Cour constitutionnelle, M. Jean Eric RAKOTOARISOA • Rencontre avec le Chef de la Mission d’observation électorale de l’Union Européenne (MOEUE), M. Cristian Preda. • Réunion de débriefing de l’équipe relative aux observations et constats du jour du scrutin. • Réunion du Groupe international de suivi – Madagascar (GISM).

Vendredi 9 novembre 2018 : • Conférence de presse de la MOEUE. • Conférence de presse de la MOE de la SADC et de la MIC de l’OIF. • Conférence de presse de la MOEUA. • Réunion finale de l’équipe de la MIC.

Samedi 10 novembre 2018 : Départ de la Mission.

Deuxième tour de l’élection présidentielle

Jeudi 13 décembre 2018 : Arrivé des premiers membres de la mission

Vendredi 14 décembre 2018 : • Rencontre avec le Président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), M. Yves Herinirina RAKOTOMANANA • Rencontre avec des représentants de l’organisation de la société civile ROHY • Arrivée du Chef de mission

Samedi 15 décembre 2018 : Réunion de cadrage et briefing de l’équipe

Lundi 17 décembre 2018 : • Rencontre avec l’Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations Unies à Madagascar, Pr. Abdoulaye BATHILI • Rencontre avec des représentants de la plateforme d’observation nationale KMF/CNOE • Audience auprès du Ministre des affaires étrangères

28 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 • Rencontre avec le Président du Conseil pour le Fampihavanana Malagasy (CFM), M. Alphonse MAKA

Mardi 18 décembre 2018 • Rencontre avec le Président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), M. Yves Herinirina RAKOTOMANANA • Rencontre avec le candidat n°25, Marc RAVALOMANANA • Rencontre avec les représentants de l’organisation de la société civile SEFAFI • Réunion des Chefs des missions d’observation internationales des élections à l’invitation de la SADC • Réunion d’échange avec la Mission d’observation électorale de l’Union européenne • Rencontre avec le candidat n°13, M. Andry Nirina RAJOELINA

Mercredi 19 décembre 2018 : Jour du scrutin, déploiement des équipes d’observation de la MIC ; Participation du Chef de Mission à la soirée électorale sur la TVM

Jeudi 20 décembre 2018 : • Rencontre avec le Chef de Mission de la MOE-UE, M. Cristian PREDA • Réunion du Groupe international de suivi – Madagascar (GISM) • Réunion de débriefing de l’équipe de la MIC

Vendredi 21 décembre 2018 : • Rencontre avec le Président de la Haute Cour constitutionnelle, M. Jean Eric RAKOTOARISOA • Conférence de presse de la MOEUE. • Conférence de presse de la MOE de la SADC • Conférence de presse de la MOEUA • Conférence de presse de l’Observatoire SAFIDY • Rencontre avec Madame la député Volatiana RANDRIANASOLO, Présidente de l’association de femmes MAHAVANGNO.

Samedi 22 décembre : Départ de la Mission

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29 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 ANNEXE 2 : Communique de presse de la MIC de l’OIF à l’issue du 1er tour de l’élection présidentielle à Madagascar

Communiqué de presse

Mission d’information et de contact de la Francophonie, à l’issue du premier tour de l’élection présidentielle du 7 novembre 2018 à Madagascar.

A l’invitation des autorités malgaches, SE Madame Michaëlle JEAN, Secrétaire générale de la Francophonie a dépêché une mission d’information et de contact à l’occasion du 1er tour de l’élection présidentielle à Madagascar qui s’est déroulée le 7 novembre 2018.

Conduite par Monsieur Philippe Courard, Président du parlement de la Fédération Wallonie Bruxelles, la mission a réuni des experts de haut niveau (dirigeants d’institutions électorales, experts électoraux et de la société civile) venant de plusieurs pays de l’espace francophone.

Cette mission s’inscrit dans le prolongement des actions d’accompagnement, par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), du processus électoral à Madagascar notamment dans les domaines de l’appui à la Commission électorale nationale indépendante (CENI), à la Haute Cour constitutionnelle (HCC) et aux medias. C’est dans ce cadre et à la demande de la CENI que l’OIF a procédé, du 10 au 21 septembre 2018, à l’audit du fichier électoral qui a été mené dans une démarche inclusive, transparente et exigeante. Le rapport de cet audit qui répond clairement à plusieurs préoccupations exprimées par certains acteurs est accessible sur le site de la CENI de Madagascar.

Dès son arrivée à Antananarivo, la mission d’information et de contact a œuvré conformément aux Principes directeurs de la Francophonie en matière électorale et aux engagements consignés dans la Déclaration de Bamako.

A Madagascar, la mission a rencontré les autorités nationales, les chefs d’institutions et acteurs impliqués dans le processus électoral. Par ailleurs, la mission a mené des concertations tant avec les Représentants sur place des partenaires internationaux qu’avec les missions internationales d’observation des élections.

Le jour du scrutin, les membres de la mission se sont déployés à Antananarivo et ses environs et ont couvert une centaine de bureaux de vote.

La mission de la Francophonie salue la mobilisation des électeurs qui ont voté dans le calme et la discipline. Elle félicite les autorités, les institutions malgaches chargées de l’organisation et de la gestion des élections, notamment la CENI ainsi que les autres acteurs y compris la société civile, pour leur détermination qui a permis la tenue de l’élection dans de bonnes conditions. La mission tient à

30 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018 souligner que la journée de vote s’est déroulée dans un climat serein et paisible. Aucun incident majeur n’est à déplorer.

La mission de la Francophonie a noté avec satisfaction les points suivants : - une atmosphère calme dans les bureaux de vote ;

- l’engouement des électeurs à accomplir leur devoir ;

- le professionnalisme et le dévouement des membres des bureaux de vote ;

- une forte représentation des femmes dans les bureaux de vote ;

- une maitrise des règles et procédures par les membres de bureaux de vote permettant de contribuer à garantir l’intégrité du processus ;

- une forte participation des observateurs nationaux ;

- un dépouillement effectué dans l’enthousiasme et dans la transparence ;

- une présence permanente et discrète des forces de l’ordre.

Toutefois, des difficultés ont été relevées dans certains bureaux de vote observés. Il s’agit notamment de problèmes liés à la distribution des cartes d’électeurs et au retard de l’ouverture de certains bureaux de vote.

Dans l’attente de la proclamation des résultats par les institutions compétentes, la mission de la Francophonie exhorte les candidats à la retenue et au calme. Elle les invite à contribuer, comme ils l’ont fait jusqu’ici, à préserver la paix sociale et les encourage à privilégier, en cas d’éventuelles contestations, les voies légales.

La mission de la Francophonie élaborera un rapport dans lequel seront consignées des recommandations dans la perspective de la tenue des prochaines élections.

La Francophonie réitère sa détermination à intensifier ses efforts en faveur du renforcement de la démocratie à Madagascar, aux côtés d’autres partenaires internationaux. La mission remercie les autorités et le peuple malgache de l’accueil qui lui a été réservé et de la confiance qui lui a toujours été manifestée.

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31 Mission d’information et de contacts de l’OIF Election présidentielle à Madagascar – 2018

ANNEXE 3 : Communiqué de presse de la MIC de l’OIF à l’issue du 2ème tour de l’élection présidentielle à Madagascar

(Saidou : merci d’insérer version finale validée)

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