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UNIVERSITEUNIVERSITE D’ANTANANARIVO D’ANTANANARIVO

FACULTEFACULTE DE DROIT, DE D’ECONOMIE, DROIT, D’ECONOMIE, DE GESTIONDE GESTION ET DE SOCIOLOGIE ET DE SOCIOLOGIE

DEPARTEMENTDEPARTEMENT DE SOCIOLOGIEDE SOCIOLOGIE

Mémoire de Master II

ETUDE D’IMPACT DU PHENOMENE DE MIGRATION : CAS DE LA REGION DE , COMMUNE D’.

Présenté par :ANDRIANTSIFERANA RADO

Membres du jury : Président: Monsieur RAMANDIMBIARISON Jean Claude, Professeur Titulaire Emérite. Juge: Monsieur STEFANO Etienne Raherimalala, Maître de conférences.

Encadreur : Madame RAMANDIMBIARISON Noëline, Professeur Titulaire.

Année universitaire : 2013-2014

Date de soutenance : 08 Avril 2015

ETUDE D’IMPACT DU PHENOMENE DE MIGRATION : CAS DE LA REGION DE BONGOLAVA, COMMUNE D’ANKADINONDRY SAKAY.

REMERCIEMENTS

Nous tenons à exprimer notre profonde gratitude et nos vifs remerciements à tous ceux qui; de près et de loin, ont pris part à la réalisation de cet ouvrage. En particulier, nous adressons notre sincère reconnaissance : A Monsieur RAMANDIMBIARISON Jean Claude, Professeur Titulaire Emérite d’avoir accepté de présider ce travail ; A Monsieur STEFANO Etienne Raherimalala, Maître de conférences d’avoir accepté de juger notre travail ; A Madame RAMANDIMBIARISON Noëline, Professeur Titulaire pour les conseils, directives et corrections qu’elle nous a prodigués avec la plus grande bienveillance dans l’élaboration de ce travail de mémoire ; Mes remerciements vont notamment à l’endroit des personnes ressources d’Ankadinondry Sakay et de la Région Bongolava.

SOMMAIRE

PARTIE INTRODUCTIVE

PARTIE I : PRESENTATION DU CADRE DE LA RECHERCHE Chapitre I : Etat des lieux et présentation de la commune rurale d’Ankadinondry Sakay Chapitre II : Ankadinondry Sakay, historique du peuplement Chapitre III : cadrage théorique et historique de la migration

PARTIE II : CAUSES ET REALITES DE LA MIGRATION

Chapitre IV : Les acteurs de la migration et motivation de l’implantation des migrants

Chapitre V : Caractéristiques des circuits migratoires

Chapitre VI : Mode de vie des migrants

PARTIE III : ANALYSE SOCIOLOGIQUE DE LA MIGRATION

Chapitre VII : Volets économique, social, culturel dans la zone d’arrivée

Chapitre VIII : Circuit relationnel avec la zone de départ

Chapitre IX : Suggestions et prospectives

CONCLUSION GENERALE

BIBLIOGRAPHIE TABLE DES MATIERES LISTES : abréviations, tableaux, figures, schémas. ANNEXES INFORMATIONS SUR L’IMPETRANT ET RESUME.

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INTRODUCTION GENERALE

Généralités Le phénomène de migration est présent dans n’importe quel territoire malgache et dans n’importe quel pays du monde. C’est l’importance de l’impact qu’il apporte qui la différencie d’un territoire à un autre ou d’un pays à un autre. La migration est qualifiée ici comme étant un déplacement à partir d’un point de départ donné vers un point d’arrivée pour un temps définitif ou temporaire. Les points de départ et d’arrivée peuvent être des villages, des villes, des régions, des pays. Bien que la migration puisse s’appliquer sur des animaux (oiseaux migratoires), dans notre cas, elle s’applique sur un individu, une famille, une communauté. Elle est souvent motivée par une volonté manifeste de changement de la part des concernés, mais elle peut aussi résulter d’une décision politique à l’insu des migrants. La migration suppose une dynamique sociale, culturelle économique et politique. Le besoin de changement déclenché par les migrants se transmet dans les lieux de destination et engendre une dynamique dans l’espace et dans le temps. L’arrivée des migrants dans un endroit donné entraîne des réactions de la part des résidents du lieu. Cette confrontation contribue aussi aux dynamiques. Les migrants sont considérés comme des étrangers par la communauté d’accueil et apportent avec eux des changements conséquents. Une obligation d’adaptation aux nouveaux cadres de vie, suivie de certaines mutations s’impose pour les deux entités. Les deux principales terminologies utilisées en termes de migration sont « l’immigration » et « l’émigration ». Quand on se place dans un lieu donné, les immigrés sont les personnes qui viennent de l’extérieur pour rejoindre ce lieu. Par contre, les émigrés sont ceux qui quittent ce lieu pour d’autres destinations.

Motif du choix du thème et du terrain Le phénomène de migration est un élément inséparable des réalités sociales. De ce fait, la migration est l’une des bases fondamentales des études sociologiques et offre la plus grande perspective de changements sociaux. Lors de nos fréquents déplacements à et à Ankadinondry Sakay, nous avons constaté que les bouleversements sociaux enclenchés par le phénomène de migration et l’évolution historique sont très apparents dans la région de Bongolava, particulièrement dans la commune rurale d’Ankadinondry Sakay, d’où le choix de notre terrain.

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Problématique Au vu des phénomènes migratoires, nous nous sommes posé la question suivante : « Quelles sont les causes de ces mouvements migratoires en direction d’Ankadinondry Sakay et de la région Bongolava » ?

Objectifs Face à la problématique énoncée supra, notre objectif général consiste en : les impacts du phénomène de migration sur la vie sociale de la région Moyen-Ouest/Région Bongolava. Nous avons fixé les objectifs spécifiques suivants : - mettre en exergue les causes des mouvements migratoires dans la commune d’Ankadinondry Sakay - souligner les dynamiques apportées par ce phénomène de migration avec leurs conséquences positives et négatives.

Hypothèse Dans le domaine sociogéographique sur la population, il existe différentes formes de migration dont entre autres la recherche d’emploi, l’activité commerciale, la raison familiale. Par ailleurs, la migration est qualifiée comme étant une dynamique spatiale qui contribue au développement.

Méthodologie Cette partie renferme les méthodes utilisées, les différents axes théoriques auxquels nous nous sommes référés ainsi que les techniques d’enquêtes. Deux méthodes ont été utilisées : la méthode dialectique et la méthode comparative.  La Méthode dialectique Elle est la constatation simple des contradictions qui nous entourent. C’est une attitude vis-à- vis de l’objet d’études. Elle est à la fois empirique et déductive et exige le recueil des données concrètes. Par la suite, elle permet de faire une tentative d’explication des faits sociaux. Il s’agit de trouver ce qui est essentiel dans chaque phénomène observé, c'est-à-dire ce qui caractérise et permet d’expliquer ce phénomène. Le choix de cette méthode nous est dicté par le souci de mieux expliquer les raisons qui ont poussé les migrants à quitter leur territoire d’origine pour rejoindre Ankadinondry Sakay.  La méthode comparative Elle consiste à faire des comparaisons entre les faits concrets et les connaissances cognitives et n’exige pas de procédure particulière. Elle est utilisée dans les domaines des sciences 3 sociales: Psychologie, sociologie, science politique, ethnologie, géographie. Cette méthode est pratiquée dans le cas d’Ankadinondry Sakay dans le but de faire une étude qualitative et une observation quantitative. Elle fait partie de l’observation et permet aussi d’émettre des suggestions et des hypothèses.

Les axes théoriques Nous avons eu recours à deux grands axes tels le « fonctionnalisme » et le « structuralisme ».  Le fonctionnalisme Parmi les auteurs du fonctionnalisme, on peut citer B Malinowski (1884-1942) et A. R Radcliffe Brown(1881-1955). B Malinowski s’est penché sur les études des institutions (économiques, politiques, juridiques) et sur les relations entre ces dernières et le système culturel global dans lequel elles s’inscrivent. Dans ses études, il démontre que l’existence d’une institution est conditionnée par des fonctions spécifiques ajustées à des besoins particuliers. Par ailleurs, il est à l’origine d’une méthode ethnographique spécifique qui privilégie le travail de terrain. D’après lui, pour observer les phénomènes de la vie quotidienne d’une population, y compris les plus anodins, il est indispensable de partager son existence. Nous nous sommes donc référés à cette approche dans le but de comprendre les interactions qui existent entre les phénomènes observés. A. R Radcliffe Brown, s’est préoccupé des analogies entre le fonctionnement de la société et celui du corps humain. Cependant, il met en garde l’’usage de cette analogie qui doit être prise avec précaution en prenant deux exemples : Le premier exemple est tiré à partir de l’examen du corps d’un animal ou d’un être humain où le biologiste peut distinguer :- L’observation de la structure du corps - L’observation du fonctionnement des membres et des organes. Tandis que l’ethnologue ne peut pas distinguer ces deux types d’observations. Le fonctionnement des liens entre les parents et leurs enfants ne peut être observé par exemple s’ils n’entrent pas en relation. Le deuxième exemple est basé sur la structure d’un animal ou d’un être humain. Ces deux êtres ne peuvent changer de structure durant leur vie (un chien ne pourra jamais changer en lapin). Cependant, la structure sociale peut changer. La société peut toujours exister même si le régime politique (gouvernance) change (exemple l’existence des Serfs malgré la succession des différents régimes politiques).

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 Le structuralisme C’est une approche proposée par Claude Lévi-Strauss. Elle consiste, pour un anthropologue, de constituer des typologies à partir des pratiques sociales observées, entre autres la généalogie, les us et coutumes, les mythes, afin d’élaborer des «structures élémentaires». Ces dernières permettent d’expliquer l’interdépendance entre chaque élément constituant la communauté. Bien que cette approche soit utilisée dans le domaine de l’Anthropologie, elle est aussi valable pour les études sociologiques. Dans notre cas nous avons noté des interdépendances entre la population migrante et la communauté d’accueil. Ce qui nous a motivé à opter également pour cette approche. Selon Lévi-Strauss, la structure est une sorte de théorie (moule/modèle). L’ethnologue observe la société et analyse les lois, les us et coutumes, les modes de production et le régime politique. En effet, les règles sociales, les modes de production, les migrations et autres sont régis par le « Fihavanana » (1). Pour mieux connaitre l’agencement d’une société donnée, il faut s’enquérir des liens qui existent entre les différentes parties. A cet effet, on peut prendre comme exemple le cas de Rakoto qui travaille la rizière de Ranaivo dans les Hautes terres. Pour connaitre sa place dans la société il faut identifier les liens sociaux qui existent entre eux :- Si Rakoto est le gendre de Ranaivo, il accomplit des devoirs envers son beau-père et travaille gratuitement (Mandrafozana) (2)- s’il est le voisin de Ranaivo, il s’agit peut-être d’une entraide (Valin-tanana) (3). - S’il est migrant, il est certainement un travailleur rémunéré (Mpikarama) (4) par Ranaivo. Le choix du « fonctionnalisme » et du « structuralisme », est dicté par leur complémentarité pour mieux analyser les phénomènes de migration.

(1) Fihavanana : Liens sociaux entre les différentes parties de la communauté. La société traditionnelle malgache repose sur le « fihavanana ». Ce terme traduit aussi les liens de parenté en ascendance ou en descendance (filiation, liens consanguins). Il s’étend sur les parentés horizontales (arbre généalogique). (2) Mandrafozana : Dans la société malgache le gendre et la bru ont une obligation d’aide envers leurs beaux parents. Cette obligation prend souvent la forme de travail de champ qui revêt un caractère absolument bénévole pour le gendre. Pour la bru parfois elle prend la forme de visite auprès des beaux parents pour un temps relativement limité ; dans ce dernier cas, elle survient généralement après la célébration de l’union matrimoniale. (3) Vali-tanana : L’entraide agricole ou le valin-tànana, littéralement « rendre la main », est un mode de production agricole qui consiste à mutualiser le travail entre plusieurs paysans. Économie d’échelle et durée très courte de certaines étapes techniques pour une bonne pousse du riz sont sans doute à l’origine de cette pratique. Concrètement, un paysan A va travailler une journée chez un paysan B et le paysan B va travailler ensuite une journée chez le paysan A. (4) Mpikarama : désigne les travailleurs temporaires qui sont rémunérés en fonction de la durée de leur travail. Il désigne aussi des travailleurs journaliers ; Ce terme est surtout usité dans le domaine des travaux de champ.

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Les techniques d’enquêtes Afin d’entamer nos recherches, les techniques de pré-enquête, d’enquête proprement dite et de l’échantillonnage ont été utilisées.  La pré-enquête Il s’agissait de s’informer au préalable sur la région de Bongolava et la commune d’Ankadinondry Sakay. Des investigations ont été faites aussi bien auprès de nos connaissances et des personnes présumées ressources lors de nos déplacements antérieurs dans les lieux. Des recherches documentaires ont été également entreprises avec des web graphie/Infographie. Nous nous sommes également procuré la carte géographique de la commune. Avant d’entamer la descente sur terrain, il nous a fallu dresser une liste des personnes à contacter sur le site de recherche, et de rédiger des questionnaires aux fins des enquêtes. La date de descente sur terrain a été également fixée avec le Maire et les chefs fokontany disponibles. Certains chefs d’institutions ont été aussi avisés de notre prochaine arrivée sur les lieux.  L’enquête A partir des questionnaires élaborés, nous avons pratiqué des enquêtes libres, semi-directives et directives selon les cas, tout en menant des entretiens par observation simple. Les enquêtes s’effectuaient en premier lieu auprès du Maire qui nous a fourni la monographie de la commune avec la situation démographique. Comme convenu lors de la pré-enquête, les chefs des7fokontany ont été contactés et enquêtés à leurs tours. Vient ensuite le tour de la population des7fokontanyqui sont disponibles Ankadinondry I, Ankadinondry II, Firaisantsoa Mahatsinjo, Tsarafiraisana, Antsahatanteraka, Ihazomay Atsimo, Bonara. Il est toutefois à noter que l’enquête de la population s’effectuait par échantillonnage. Par ailleurs, en tenant compte de la prépondérance de l’histoire de migration de la commune, les « Zokyolona »(5) et ex présidents de Fokontany ont été aussi enquêtés. Ces derniers nous ont d’ailleurs fourni beaucoup de données et d’information sur le phénomène de migration et particulièrement sur l’historique de la commune.  Les techniques d’échantillonnage Notre technique d’échantillonnage est basée sur la méthode probabiliste qui est partie en premier lieu par le choix des fonkontany à enquêter d’où le nombre de 7fokontany sur les 22 existants. Dans ce cas, l’échantillonnage a été dicté par les fokontany ayant le plus grand nombre de population et dont les chefs ont été disponibles (Ankadinondry I avec 6533 habitants,

(5) Zokyolona : L’aîné de la famille ou le notable dans une communauté. 6

Ankadinondry II avec 5986 habitants, Firaisantsoa Mahatsinjo avec 3092 habitants, Tsarafiraisana avec 5514 habitants, Antsahatanteraka avec 2231 habitants Ihazomay Atsimo avec 2096 habitants, Bonara avec 3114 habitants. Les enquêtes auprès des chefs d’institution se faisaient en fonction de la disponibilité des responsables qui n’ont pas toujours été joignables. Cette méthode probabiliste a été appliquée sur 72 individus issus des 7fokontany choisi préalablement. Le sondage a été appliqué sur 72 individus. Les différents points pris en compte comportent :- la question du genre,- le niveau d’instruction - l’origine territoriale - l’âge - la situation matrimoniale. L’enquête portait sur le genre masculin et le genre féminin, la fourchette d’âge est comprise entre 15 à 64 ans et plus ; le niveau d’instruction va du CEPE au Baccalauréat et plus ; tandis que le territoire d’origine n’a pas été délimité préalablement mais il découlait du résultat de l’enquête.

Problèmes rencontrés et limites Les données existantes sur la région Bongolava et au niveau de la Mairie d’Ankadinondry Sakay ne sont pas actualisées. Les dernières mises à jour les plus récentes dataient de l’année 2012. Cette lacune marque les limites de notre recherche.

Dépouillement des travaux de terrain Après le terrain, nous avons procédé au dépouillement des données. Après l’analyse des informations nous avons revu les connaissances bibliographiques liées à notre thème.

Plan Notre plan se divise en trois parties. La première partie s’intitule « présentation du cadre de la recherche ». Cette partie comporte trois chapitres dont : - état des lieux et présentation de la commune rurale d’Ankadinondry Sakay- historique du peuplement - le cadrage théorique et historique de la migration. La deuxième partie du plan est intitulée « les causes et réalités de la migration ».On retrouve la même subdivision en trois chapitres dont : - les acteurs de la migration et motivation de l’implantation des migrants - caractéristiques des circuits migratoires - mode de vie des migrants. La troisième partie a pour titre : « l’analyse sociologique de la migration ». Trois chapitres y sont également traités :- les volets économique, social, culturel dans la zone d’arrivée - le circuit relationnel avec la zone de départ - les suggestions.

PARTIE I :

PRESENTATION DU CADRE DE LA RECHERCHE

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PRESENTATION DU CADRE DE LA RECHERCHE Cette partie nous offre l’opportunité de présenter la région de Bongolava en général et la commune rurale d’Ankadinondry Sakay en particulier, ce dernier étant notre terrain de recherche. Pour mieux situer et analyser la place de la migration, son rôle et son impact dans la vie sociale de la communauté, il faut en effet partir de l’existant au moment de la recherche. Dans ce même but, la connaissance de l’histoire du peuplement est indispensable ainsi que la compréhension des grandes théories de la migration dans le domaine de la sociologie. Ces trois points fondamentaux constituent en conséquence les trois chapitres de cette première partie.

Chapitre I : ETAT DES LIEUX ET PRESENTATION DE LA COMMUNE RURALE D’ANKADINONDRY SAKAY. Les données qui figurent dans ce chapitre sont d’un côté le résultat de notre enquête personnelle menée en fonction des échantillonnages et de l’autre côté, les informations recueillies concernant la commune d’Ankadinondry Sakay et de sa population dans sa globalité. On y trouve ainsi la situation géographique, la monographie et la démographie, ainsi que l’environnement physique de la commune rurale de Sakay qui est située dans la région de Bongolava. Pour commencer, nous avons pris les résultats de notre enquête sur les 72 individus ciblés dans le cadre de la technique d’échantillonnage. A cet effet, la question genre est le premier aspect observé. L’égalité de chance entre l’homme et la femme est d’actualité et le rôle de chacun et de chacune dans les décisions à prendre sur la vie économique et sociale du ménage et de l’individu méritent d’être observé. Le critère basé sur le genre a d’ailleurs permis à certains auteurs de déterminer le type de migration adopté et type de travail exercé selon le genre. Le tableau suivant présente alors la classification des 72 individus enquêtés selon l’aspect genre dans la commune d’Ankadinondry Sakay.

Tableau n°01: Répartition de l’échantillon selon le genre, Décembre 2014. Genre Nombre des enquêtés Pourcentage Masculin 42 58,3% Féminin 30 41,7% TOTAL 72 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014. 8

Sur les 72 personnes sur lesquelles nos enquêtes ont porté, les hommes (58,3%) sont en nombre supérieur par rapport aux femmes (41,7%). La migration des femmes est surtout dictée, soit par un motif d’ordre familial, soit à la suite d’une décision unilatérale du conjoint ou des parents. Dans le premier scénario, la femme est supposée participer à la décision de migration. Par contre, dans le second cas, elle est assujettie à la décision de ses proches, indépendamment de sa volonté. Les femmes migrent en fonction de la place qu’elles occupent dans un ménage donné. Les motifs varient de l’ordre sexuel à l’ordre familial et/ou social. Les femmes ont dans la plupart des cas un rôle accompagnateur dans des décisions de migration qui ne sont pas initialement les leurs. En général, les femmes migrantes ont moins d’opportunité de trouver d’emploi (surtout temporaire). Leurs activités sont focalisées, soit sur le commerce, soit sur les travaux domestiques. La migration des hommes par contre revêt souvent un caractère économique et survient, dans la majorité des cas, à la suite d’une décision unilatérale. Ils disposent beaucoup plus d’indépendance vis-à-vis des membres de la famille. Pour exercer des travaux temporaires surtout, ils quittent seuls leur territoire d’origine en y laissant leur famille. Dans notre échantillonnage, les hommes sont plus présents que les femmes dans le territoire d’accueil. Quant à l’âge des migrants pris en échantillon lors de notre terrain, les hommes migrent à un âge beaucoup plus élevé que celui des femmes. Après le genre, notre enquête portait sur l’âge des migrants. Tout genre confondu, les personnes enquêtées ont été classées par tranche d’âge. D’où le tableau ci-après.

Tableau n°02: Répartition de l’échantillon selon l’âge, Décembre 2014. Age Nombre des enquêtés Pourcentage 15-20 10 13,9% 21-25 13 18,1% 26-30 15 20,8% 31-35 13 18,1% 36-40 7 9,7% 41-45 4 5,6% 46-64 4 5,6% 64 et plus 6 8,3% TOTAL 72 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014. 9

Les tranches d’âge prises en compte varient de 15 à 64 ans et plus. Le choix de la limite d’âge inférieure (15 ans) est dicté par le souci de fiabilité des réponses aux questionnaires. Quant à la limite supérieure (64 ans et plus), elle est inspiré par la volonté d’avoir des données auprès des aînés (Zoky olona) qui représentent le mémoire historique de son fokontany ou même de la commune. Pour revenir au tableau de répartition selon l’âge, il nous montre que les taux dominants se trouvent au niveau de 3 classes d’âge : 18,1% pour les personnes ayant respectivement 21 à 25 ans et 31 à 35 ans ; 20,8% pour les personne entre 26 et 30 ans. C’est la population active qui rentre dans ces catégories d’âge. La migration la plus poussée concerne les individus ayant atteint l’âge adulte en quête de travail. Par ailleurs, le niveau d’instruction de l’échantillon a été considéré dans cette enquête. Les différents niveaux sont fixés en fonction des diplômes officiels. Toutefois, les diplômes au delà du Baccalauréat n’ont pas été précisés. Le caractère rural de la commune d’Ankadinondry Sakay limite l’accès au niveau supérieur de l’enseignement. Chaque diplôme caractérise le niveau d’enseignement correspondant. Le C.E.P.E traduit un niveau d’enseignement primaire, le B.E.P.C équivaut à un niveau d’enseignement secondaire du premier cycle, le Baccalauréat correspond à un niveau d’enseignement secondaire du second cycle. Tandis que le niveau « aucun » a deux significations : soit la personne en question a fréquenté l’école primaire mais n’a pas pu obtenir le diplôme correspondant, soit elle n’a jamais fréquenté d’écoles et est illettrée.

Tableau n°03: Répartition selon le niveau d’instruction, Décembre 2014. Diplôme Nombre des enquêtés Pourcentage AUCUN 20 27,8% CEPE 21 29,2% BEPC 18 25,0% BACC 6 8,3% Bacc+ 7 9,7% TOTAL 72 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Les seuils du niveau d’instruction le plus important des migrants se situent dans les 3 premières catégories : AUCUN (27,8%), CEPE (29,2%), BEPC (25,0%). Le niveau d’instruction de la majorité des migrants varie entre l’analphabétisme, le primaire et le 10 secondaire du premier cycle, avec la prédominance du niveau primaire. Le niveau secondaire du second cycle (8,3%) et celui de l’enseignement supérieur (9,7%)s’équivalent avec des taux qui sont très proches. Pour le besoin de notre étude, la connaissance des territoires d’origine des migrants s’avère nécessaire. Ce qui nous a conduits à orienter également notre enquête vers des échantillons fixés dans ce sens.

Tableau n°04: Répartition des échantillons selon leur origine territorial, Décembre 2014. Origine territorial Nombre des enquêtés Pourcentage Manakara 3 4,2% Farafangana 3 4,2% Diego 1 1,4% Fianarantsoa/Fandriana/Ambositra 9 12,5% Mahajanga 4 5,6% Antananarivo/Antsirabe 46 63,9% Toamasina 2 2,8% Toliary/Ambovombe 4 5,6% TOTAL 72 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Ce tableau nous montre que certaines localités de sont beaucoup plus concernées que d’autres par la migration à Ankadinondry Sakay. Les trois origines territoriaux les plus touchés sont : Antananarivo (63,9%), Fianarantsoa et particulièrement Fandriana et Ambositra (12,5%), Toliary y compris Ambovombe (5,6%). En termes de régions, les populations migrantes de l’échantillon sont issues de : - , - ,- - Amoron’i Mania - Sud Ouest - Sud Est – - Antsinanana – DIANA. Les 72 individus enquêtés proviennent des 10 régions sur les 22, soit 45,4% des régions de Madagascar. Toujours aux fins des analyses, nous avons inséré dans notre questionnaire la rubrique matrimoniale. Avec les autres aspects à observer, cette rubrique matrimoniale permet de mieux cerner les types de migrants et leurs motivations respectives. L’enquête de l’échantillon portait sur quatre situations : – célibataire – marié – veuf – divorcé.

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Tableau n°05: Répartition de l’échantillon selon la situation matrimoniale, Décembre 2014. Situation matrimoniale Nombre des enquêtés Pourcentage Célibataire 21 29,2% Marié(e) 44 61,1% Veuf (ve) 3 4,2% Divorcé(e) 4 5,6% TOTAL 72 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

L’interprétation des différentes situations peut nous amener à déterminer les types de migration (temporaire ou définitive) et les décisions y afférentes (individuelles ou collectives). Les enquêtes menées nous ont conduites aux résultats suivants : les catégories des migrants les plus nombreux sont les marié(e)s (61,1%) et les célibataires (29,2%). Les veuf(ve)s et les divorcé(e)s occupent un taux largement inférieur aux deux premiers points.

1.1 Situation géographique La carte ci-après montre la situation géographique d’Ankadinondry Sakay Carte n° 01 : Situation géographique d’Ankadinondry Sakay, en 2008.

Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Décembre 2014. 12

La commune d’Ankadinondry Sakay est située dans la région du Moyen-Ouest/Bongolava. Desservie par la RN1, elle se trouve à 150 km de la capitale et s’étend sur une superficie de 376 km2. Elle est délimitée, au Nord, par les communes rurales d’Ambalaniriana et d’, au Sud, par les communes rurales de et Mahavelona, à l’Est par les communes rurales d’Alatsinainikely, Ankaranana et à l’Ouest, par la commune rurale de Imanga. Elle est aussi située en bordure de la région volcanique de l’Itasy. 1.2 Monographie et démographie La monographie et la situation démographique permettent d’étudier et d’analyser l’évolution de la population. Elles sont les effets directs ou indirects des autres paramètres sociaux, économiques et politiques. Dans le cadre des phénomènes de migrations, elles ont en conséquence une place importante. Selon les données disponibles auprès de la Mairie d’Ankadinondry Sakay, le nombre total des habitants en 2008 est de 47 697. Ce qui donne une densité de la population au Km2 de 126. La population des 22 Fokontany de la commune est répartie comme suit. Tableau n°06 : Répartition de la population par Fokontany, année 2008. N° FOKONTANY NOMBRE SUPERFICIE EN DENSITE PAR D’HABITANTS KM2 KM2 1 Ankadinondry1 6 498 10 649.8 2 Ankadinondry 2 5 907 09 175.55 3 FiraisantsoaMahatsinjo 3 185 17 187.35 4 Soanierana 1 896 20 94.8 5 SoavimbahoakaMarohazo 1 239 16 77.43 6 Tsarafiraisana 4325 36 120.13 7 Diavolana 3 115 35 89 8 Anosibe 1 388 26 53.38 9 Fanjakamandroso 1 614 22 73.36 10 Antsahatanteraka 2 028 19 106.73 11 Tsaramandroso 863 07 123.28 12 Andohanakivoka 1 578 15 105.2 13 Ihazomayambony 1 951 28 69.67 14 Ambohitromby 1 713 18 95.16 15 1 166 13 89.69 16 Manarintsoa 959 15 63.93 17 Soamihary 1 437 12 119.75 18 Bonara 2 745 21 130.71 19 Tsisoahoanireny 1 916 15 127.73 20 Manjakamiadana 805 08 100.62 21 Ambohimahasoa 843 08 105.37 22 Ankadinondrykely 526 06 87.66 Total 47 697 376 126.85 Source : Monographie officielle de la Commune rurale d’Ankadinondry Sakay(Année 2008, collectée en décembre 2014). 13

Ce tableau nous montre la répartition inégale de la population dans les 22Fokontany. La plus forte densité démographique est de 130 habitants au km2 alors que la plus faible densité est de 53 habitants au km2. Le nombre de la population et la densité par km2 évoluent suivant les données actualisées par la commune en 2012.

Tableau n°07 : Répartition de la population par Fokontany, année 2012. N° FOKONTANY NOMBRE SUPERFICIE EN DENSITE PAR D’HABITANTS KM2 KM2 1 Ankadinondry1 6533 10 649.8 2 Ankadinondry 2 5986 09 175.55 3 FiraisantsoaMahatsinjo 3092 17 187.35 4 Soanierana 1956 20 94.8 5 SoavimbahoakaMarohazo 1325 16 77.43 6 Tsarafiraisana 5714 36 120.13 7 Diavolana 2967 35 89 8 Anosibe 1523 26 53.38 9 Fanjakamandroso 1475 22 73.36 10 Antsahatanteraka 2231 19 106.73 11 Tsaramandroso 940 07 123.28 12 Andohanakivoka 1696 15 105.2 13 Ihazomayambony 2096 28 69.67 14 Ambohitromby 1862 18 95.16 15 Ambalanirana 1788 13 89.69 16 Manarintsoa 1171 15 63.93 17 Soamihary 953 12 119.75 18 Bonara 3114 21 130.71 19 Tsisoahoanireny 1976 15 127.73 20 Manjakamiadana 894 08 100.62 21 Ambohimahasoa 1085 08 105.37 22 Ankadinondrykely 624 06 87.66 TOTAL 50971 376 126.85 Source : Monographie officielle de la Commune rurale d’Ankadinondry Sakay (Année 2012, collectée en décembre 2014).

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Tableau n°08 : Répartition de la population par âge et par sexe, année 2008. AGE SEXE TOTAL MASCULIN FEMININ 1 à 4 3589 4226 7815 5 à 14 6855 7270 14125 15 à 24 6995 7470 14465 25 à 64 5455 5298 10753 65 et plus 275 264 539 Total 23169 24528 47697 Source : Monographie officielle de la Commune rurale d’Ankadinondry Sakay (Année 2008, collectée en décembre 2014).

Figure 01 : Répartition de la population par âge et par sexe, année 2008.

Total

65 et plus

25 à 64 TOTAL FEMININ 15 à24 MASCULIN 5 à14

1 à 4

- 10 000 20 000 30 000 40 000 50 000 60 000

Source : Enquête personnelle, décembre 2014. Cette répartition nous montre l’équilibre de la population selon le genre masculin et féminin. On assiste remarquablement à un effectif plus ou moins égal en genre pour toutes les classes d’âges. Par ailleurs, on constate que le nombre de la population le plus élevé se situe dans la classe d’âge de 5 à 14 et celle de 15 à 24 ans. Vient ensuite celle de 25 à 64 ans. Ce qui nous montre que la commune dispose non seulement d’une population jeune mais aussi d’une population active. Pour avoir un aperçu sur l’évolution démographique de la commune, nous avons comparé les données de 2012 et de 2008. En deux ans, le nombre de la population a augmenté de 3274, ce qui donne une croissance démographique de 0,068%. L’évolution de la population par fokontany et les taux respectifs y afférents sont visibles dans le tableau suivant.

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Tableau n°09 : Evolution démographique de la commune (de 2008 à 2012). N° FOKONTANY Superficie Evolution (2012- en km2 Population 2008 Population 2012 2008) Nombre Densité Nombre Densité Nombre Densité d'habitants au km2 d'habitants au km2 1 Ankadinondry1 10 6 498 650 6533 653 35 4 2 Ankadinondry 2 9 5 907 656 5986 665 79 9 3 FiraisantsoaMahatsinjo 17 3 185 187 3092 182 -93 - 5 4 Soanierana 20 1 896 95 1956 98 60 3 5 SoavimbahoakaMarohazo 16 1 239 77 1325 83 86 5 6 Tsarafiraisana 36 4325 120 5714 159 1 389 39 7 Diavolana 35 3 115 89 2 967 85 -148 - 4 8 Anosibe 26 1 388 53 1 523 59 135 5 9 Fanjakamandroso 22 1 614 73 1 475 67 -139 - 6 10 Antsahatanteraka 19 2 028 107 2 231 117 203 11 11 Tsaramandroso 7 863 123 940 134 77 11 12 Andohanakivoka 15 1 578 105 1 696 113 118 8 13 Ihazomayambony 28 1 951 70 2 096 75 145 5 14 Ambohitromby 18 1 713 95 1 862 103 149 8 15 Ambalanirana 13 1 166 90 1 788 138 622 48 16 Manarintsoa 15 959 64 1 171 78 212 14 17 Soamihary 12 1 437 120 953 79 -484 - 40 18 Bonara 21 2 745 131 3 114 148 369 18 19 Tsisoahoanireny 15 1 916 128 1 976 132 60 4 20 Manjakamiadana 8 805 101 894 112 89 11 21 Ambohimahasoa 8 843 105 1 085 136 242 30 22 Ankadinondrykely 6 526 88 624 104 98 16 Total 376 47 697 127 50 971 136 3 274 9 Source : Monographie officielle de la Commune rurale d’Ankadinondry Sakay (Année 2012, collectée en 2014).

1.3 Environnement physique Le paysage cultural actuel est composé principalement de rizières et de cultures sur « tanety »(6). L’élevage y tient aussi une grande part. Ankadinondry Sakay est traversée par deux grandes rivières, Ihazonay et ses affluents d’une part et la Sakay à qui elle doit son nom d’autre part. Le sol a une structure ferralitique avec une végétation à formation herbeuse.

(6) Tanety : plateaux dont les sols sont caractérisés par des couches fertiles et hydriques.

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Son climat est divisé en deux: saison sèche et fraîche du mois de mai au mois d’octobre, saison chaude et humide du mois de novembre au mois d’avril. Sa pluviométrie moyenne annuelle est de 1000 mm, avec une température moyenne de 22°C. Durant la saison de pluies (novembre en avril) les variations du climat peuvent parfois entraîner des variations considérables de la hauteur des précipitations et engendrer des perturbations au niveau de l’agriculture. Trop de pluies en début de saison provoquent des inondations des rizières. Il arrive aussi parfois que cette saison se prolonge au-delà de ses limites, entraînant la détérioration des plantes. Auquel cas, de grosses pertes de production de riz sont constatées.

Tableau n°10 : Superficie cultivable et irrigable (riz), année 2014 Superficie de la commune Superficie cultivable Superficie irrigable 376 km2 26 200 ha 9 640 ha Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Décembre 2014.

En conclusion, Ankadinondry Sakay doit son nom à la rivière Sakay qui la traverse. C’est une commune rurale de 376km2, avec 47697 habitants (recensement 2008) et une densité démographique de 126 au km2. Se trouvant à 150km de la capitale et desservie par la route goudronnée de la RN1 bis, elle est localisée dans le district de Tsiroanomandidy. Située en bordure de la région volcanique de l’Itasy, facile d’accès et disposant des vastes terres fertiles, Ankadinondry Sakay, est une terre de migration par excellence.

Chapitre II : ANKADINONDRY SAKAY, HISTORIQUE DU PEUPLEMENT

2 .1 Peuplement A l’origine, Ankadinondry Sakay fut habité par des Sakalava qui y pratiquaient un élevage bovin extensif. De ce fait le lieu fut nommé « Ankadinomby ». Durant la période coloniale, précisément à partir de 1952, des Réunionnais s’installèrent dans la localité et baptisèrent le lieu en « Babet-ville » ou ville de Babet. Babet étant le nom du premier Réunionnais venu exploiter les lieux. Depuis lors, les activités changèrent complètement. Les nouveaux venus pratiquaient divers élevages à grande échelle comme l’élevage porcin, ovin, et des vaches laitières. Parmi les autres activités économiques exercées se trouvaient la fromagerie, la provenderie. L’apparition phénoménale des moutons dans les lieux a modifié alors « Ankadinomby » en « Ankadinondry ». Tandis que « Sakay » est le nom de la rivière qui la 17 traverse. D’où l’appellation jusqu’à maintenant du lieu en « Ankadinondry Sakay ». Depuis 1952, (arrivée des Réunionnais), elle devenait le chef lieu de la commune au lieu de « Fanjakamandroso ». Cette zone formait d’ailleurs une vaste frontière entre les anciens royaumes merina de l’Itasy et les plus récentes avancées des Sakalava de la partie Nord- Ouest de l’île vers la zone Moyen-Ouest. Après 1920, dans le but de disposer plus d’espace et de terre à cultiver, un mouvement migratoire a constitué le peuplement du Moyen-Ouest, particulièrement à la limite frontalière des Hautes terres. Les migrants de cette époque se mettaient à cultiver des « Tanety ». En outre, l’aménagement de la commune d’Ankadinondry Sakay durant la colonisation a favorisé son expansion et lui attribuait un caractère attractif pour la migration. Elle devenait alors une destination de prédilection et son peuplement s’est agrandi en conséquence. Par ailleurs, nous nous sommes référé aux données statistiques recueillies dans le rapport intitulé « Densification rurale et structures spatiales du peuplement à Madagascar: quelle place pour les migrations? », présenté par Andonirina RAKOTONARIVO, Cécile MARTIGNAC, Bénédicte GASTINEAU, Zo Lalaina RAMIALISON, dans le cadre de « Madagascar face au défi des Objectifs du Millénaire pour le Développement » (OMD). Ces données montrent un accroissement progressif de la population rurale et agricole de la région de Bongolava entre 1993 et 2004.

Tableau n°11 : Effectif de la population rurale et de la population agricole dans la région de Bongolava, année 2004. REGION DE BONGOLAVA RNA 1984-1985 RGPH 1993 RNA 2004-2005

Effectif de la population rurale 122 200 204 266 401 794 Effectif de la population agricole 120 600 161 443 395 729 Source : « Densification rurale et structures spatiales du peuplement à Madagascar: quelle place pour les migrations? » par Andonirina RAKOTONARIVO, Cécile MARTIGNAC, Bénédicte GASTINEAU, Zo Lalaina RAMIALISON (2004).

D’après cette même source, la moyenne de la croissance annuelle des effectifs de la population rurale est de 6,3%, tandis que celle de la population agricole est de 8,5%. C’est un taux de croissance jugé supérieur au naturel. Ce qui permet de déduire que cette croissance est le résultat d’une migration dans les zones rurales de Bongolava y compris la commune rurale d’Ankadinondry Sakay. Ce taux de croissance va de pair avec le nombre d’exploitations 18 agricoles qui a augmenté de 23 257 à 72 840, soit un triplement des effectifs en vingt ans. La superficie exploitée a augmenté pour autant de 55 355 ha à 93 413 en 2004 (MAEP, 2006). Tous ces éléments démontrent un grand flux migratoire vers le milieu rural de Bongolava.

2.2 Modes de Production. Cette partie traite en général des activités pratiquées par la population. De ce fait, elle met en exergue la production proprement dite et les moyens de productions, les situations foncières et les différents aménagements réalisés dans la commune. Bien que basées en général sur la culture et l’élevage, des différenciations au niveau des activités sont observées dans les modes de production de la population d’Ankadinondry Sakay. L’historique du peuplement est également à l’origine de cette différence. Ce qui nous conduit à souligner l’historique des modes de production dans cette localité.

Durant l’installation de Réunionnais (1952 à 1975), dans la zone d’Ankadinondry Sakay, diverses sociétés ont été implantées, suivies de plusieurs opérations. On peut citer entre autres : - la SPAS, créée en 1952 (Société Professionnelle de l’Agriculture de Sakay), classée parmi les meilleurs sociétés Africaines dans le domaine de l’élevage porcin - La SOMASAK, créée en 1960(Société Malgache d’Aménagement de Sakay) dans le domaine de l’agriculture- L’ODEMO, créée en 1969 (Opération Malgache de Développement de Moyen-Ouest) - Le PAMO (Projet d’Appui de Moyen-Ouest). Durant cette période et avec l’apparition de ces diverses actions de développement, des rizeries, des laiteries et des provenderies formaient le paysage industriel du chef- lieu de la commune. L’exploitation se faisait avec des matériels agricoles motorisés sur des vastes étendues. Après le départ des Réunionnais, les activités dominantes de la population se basaient toujours sur la culture et l’élevage. Les terres abandonnées par les partants ont été mises en valeur par les migrants. Par contre les industries implantées n’ont pas eu de relève mais de nouvelles formes en petites dimensions sont apparues. Les grands engins motorisés (tracteurs, pulvérisateurs…) ont laissé la place à des matériels beaucoup plus rudimentaires comme la charrue. La main-d’œuvre et les travaux manuels de champs prennent plus de place. Les types de cultures pratiqués par la population sont à la fois : - la riziculture irriguée- la riziculture pluviale – la culture sur « tanety ». Les principales cultures de la commune sont le riz et le manioc. D’autres types de culture prennent aussi des places importantes comme le manioc, la patate douce, le maïs, le voanjobory et l’arachide. Plus de 65 % des ménages font l’exploitation rizicole sur rizière et 35 % pratiquent la culture pluviale et sur « tanety ». 19

Les productions issues de ces cultures ont des caractères d’autosubsistance. En effet, presque la moitié du riz récolté est destinée à l’autoconsommation des ménages jusqu’à la prochaine récolte. L’autre moitié est destinée à la vente pour assurer la prochaine saison et le revenu des ménages. La commune produit 18 148 tonnes de riz, avec un rendement de 3,13 tonnes à l’hectare pour le riz irrigué et 1,50 tonnes à l’hectare pour le riz pluvial. Le tableau ci-après illustre les productions rizicoles. Dans le cadre des différents appuis au développement rural, la population locale a bénéficié d’une aide du gouvernement japonais .Cette dernière consistait à transmettre la technique du « système de riziculture intensif » (SRI) et la protection de l’environnement par le biais de la vulgarisation du « fatana mitsitsy » (7).

Tableau n°12 : Production de rizicole d’Ankadinondry Sakay. Riz irrigué Riz pluvial 1ère saison 2ème saison Ha T Ha T Ha T 2214 8756 2825 7064 1551 2328 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay (données 2008 collectées en 2014). Outre la culture de riz, la population pratique aussi d’autres cultures vivrières comme les légumineuses, les céréales, les racines et les tubercules. Pour la commune entière, la production de légumes et céréales est de 1095 tonnes tandis que la production des racines et tubercules atteint 4042 tonnes.

Tableau n°13 : Production de céréales, racines et tubercules, année 2008. céréales racines et tubercules arachide voanjobory maïs manioc patate douce autres Ha T Ha T Ha T Ha T Ha T Ha T 108 85 158 247 454 763 505 2367 180 1421 13 254 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay(données 2008 collectées en 2014).

La production de légumes couvre les besoins locaux de la population. Elle est commercialisée localement.

(7) Fatana mitsitsy : C’est une cuisinière fabriquée avec de l’argile qui consomme moins de charbons que les cuisinières usuelles fabriquées avec du fer. Elles permettent d’économiser jusqu’à 50% de charbon que d’usage.

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Tableau n°14: Production de Légumes, année 2008. Tomates Carottes Oignons Choux Haricots Autres Ha T Ha T Ha T Ha T Ha T Ha T 5,45 8,35 0,6 5,2 05 28 10 35 14 22 13 07 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay (données 2008 collectées en 2014). Dans le domaine de la culture, les arbres fruitiers occupent aussi une place non négligeable avec une production de 1 006 tonnes pour une superficie totale de 133,4ha, tous fruits confondus (avocats, bananes, canne à sucre, mangues, oranges, ananas et autres). Toutefois, la commune d’Ankadinondry Sakay a ses spécificités dans le domaine de la culture. Elle possède un centre semencier qui ravitaille presque tout Madagascar avec plusieurs variétés particulièrement en matière rizicole. Dans le domaine de l’élevage, trois grands volets prédominent : le bovin, le porcin et les volailles. L’élevage bovin est limité généralement au nombre nécessaire à la pratique de l’agriculture. Ce nombre va de deux à quatre têtes par famille d’éleveurs. Cet effectif est dicté par la crainte des vols de bœufs qui sévissent dans la région de Bongolava. Les éleveurs, démotivés par ce fléau, ont abandonné la reproduction des bovidés. Les soins apportés aux bétails varient selon le niveau de connaissance et le niveau d’enclavement de chacun. Toutefois, pour pallier les diverses maladies, les produits prescrits par les vétérinaires sont de plus en plus d’usage. Pour les porcins, il constitue l’une des principales ressources de la famille. Avec un renouvellement du parc en 6 mois au maximum, le capital investi rapporte assez rapidement. De ce fait bon nombre de gens ont adopté l’élevage porcin. Cependant certaines maladies comme les pestes porcines ont découragé des éleveurs et le nombre des bêtes ont été réduits en conséquence. Les porcs sont généralement destinés à la vente, l’autoconsommation est quasiment rare et elle occasionnée par des festivités (mariage, nouvel an, fête de l’indépendance, …).Quant aux volailles, son élevage est pratiqué en petite et en grande échelle. Presque chaque ménage possède des volailles. A petite échelle, l’élevage de volaille sert surtout d’autoconsommation. A grande échelle, il renfloue les revenus des grands fermiers. Tableau n°15: Produits d’élevage de la commune d’Ankadinondry Sakay, année 2008. Elevage Nombre de têtes Bovin 14 861 Porcin 11 029 Volaille 54 913 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay (données 2008 collectées en 2014). 21

Il faut noter toutefois que l’exploitation actuelle des terres a été facilitée par les aménagements faits auparavant. Cependant, la situation foncière est inséparable de cette exploitation. Les aménagements réalisés dans la commune dataient du temps de l’installation des Réunionnais dans la localité. A ce titre, des courbes de niveau ont été construits pour protéger le sol contre l’érosion. Quand à la situation foncière actuelle, la population locale, en majorité migrants, ont occupé les terres exploitées par ces Réunionnais. Les propriétaires de ces terres ont été ensuite les diverses sociétés d’Etat du temps de la privatisation qui s’y sont succédé et dont la dernière, était la « Ferme d’Etat de la Sakay » (FESA). De ces faits, ces terres n’ont pas été titrées et bornées au nom des occupants actuels et nécessitaient alors une régularisation foncière. La commune a alors décidé d’intervenir auprès du service foncier pour une dotation foncière en son nom. Ce dans le but de pouvoir aménager et agencer le terrain communal, mais également de permettre la dotation des terres par la suite à la population locale qui les ont mises en valeur. Actuellement, une partie seulement de ces terres est régularisée et la négociation foncière continue.

2.3 Environnement social et éducatif Cet environnement a beaucoup hérité des infrastructures réalisées par les Réunionnais. En effet, les différents bâtiments actuels à usage administratif sont des anciennes constructions de type colonial. Certaines écoles et services de santé à caractère public sont installés dans ces infrastructures. Plus tard, avec l’accroissement de la population dont la majorité sont des jeunes, divers centres socioculturels, d’activités éducatifs et sanitaires ont été créés à l’initiative de la commune et des différentes associations ou ONG locaux. La vie sociale de la commune tourne effectivement autour de l’éducation, la communication, le divertissement et loisir, le culturel, l’économique et financier, le cultuel. Sont inclus aussi dans ce domaine, les différents regroupements de la population dans une association à but lucratif ou non pour des motifs liés à la dynamique sociale de la localité ou de la zone en général. C’est le fonctionnement de tous ces éléments et leur interaction qui forment la vie sociale de la communauté. Le tableau ci-après donne les différents services administratifs de la commune.

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Tableau n°16: Les services administratifs, année 2014. Dénomination Nombre Poste gendarmerie nationale 01 Vétérinaire 03 CSB II 01 Dentisterie 02 Détachement militaire 01 Poste et télécommunication 01 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Décembre 2014. Le niveau d’instruction des établissements scolaires locaux s’arrête au niveau II de l’enseignement secondaire. Les infrastructures afférentes à l’éducation sont au nombre de 53, avec une prédominance de l’enseignement primaire : 43 de ces établissements sont des écoles primaires, 5 des écoles secondaires niveau I et 5 des écoles secondaires niveau II. Le nombre des écoles privées est supérieur à celui des publiques. La majorité des parents d’élèves sont donc assujettis à plus de frais de scolarisation.

Tableau n°17:Les établissements scolaires de la commune, année 2014. Enseignement primaire Nombre d’établissements Nombre de maîtres Nombre de salles Privés publics Privés publics Privés publics 23 20 71 76 60 45

Enseignement secondaire Niveau I Nombre d’établissements Nombre d’enseignants Nombre de salles Privés publics Privés publics Privés publics 4 1 14 22 8 10

Enseignement secondaire Niveau II Nombre d’établissements Nombre d’enseignants Nombre de salles Privés publics Privés publics Privés publics 4 1 5 10 10 15 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Décembre 2014.

Diverses activités culturelles, sportives et, récréatives sont pratiquées dans la commune. Dans le domaine du sport, elle dispose également de 21 infrastructures pour presque toutes les disciplines sportives. C’est ainsi que l’on voit 12 terrains pour le foot, 2 pour le volley, 6 pour le basket, 1 pour le Hand. En terme éducatif, culturel, récréatif, la commune a dans son actif 1 bibliothèque, 2 salles de spectacle, 2 « Kianja hiragasy»(8).

(8) Kianja hiragasy : terrain réservé pour les spectacles des champs folkloriques malgaches. Le hira gasy se passe toujours en plein air mais au fil des temps, certains spectacles se font en salle. 23

Tableau n°18: Infrastructures socioculturelles, année 2014. Terrains de sport Nombre de Nombre de Salle Kianja hiragasy Bibliothèque despectacle Foot Volley Basket Hand 01 02 02 12 02 06 01 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Décembre 2014.

La communication est le vecteur de circulation des différentes actions d’information, d’éducation et de sensibilisation. Dans ce domaine, la commune est également bien fournie. Elle dispose de 2 ondes de Radio Fm et de chaînes de télévision obtenues par Canal satellite.

Tableau n°19: Les médias locaux, année 2014. Radio FM Télévision locale Dénomination Nombre Dénomination Nombre Radio TantsahaSakay (RTS) 01 Canal par satellite 01 Bongolava 01 Feon’Itasy 01 Don Bosco 01 R.N.M 01 Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Décembre 2014.

Comme la religion est quasi inséparable de la vie sociale de la population, la commune d’Ankadinondry n’en fait pas exception. Quatre types de religion sont présents dans la commune : le catholicisme, le protestantisme, l’adventiste, le luthérien. Ces religions disposent de 37églises dont 14 appartenant au FJKM, 14 à l’ECAR, 3 à l’Adventiste et 3au Luthérien. Les diverses organisations non étatiques et associations professionnelles implantées dans la commune œuvrent dans les domaines de l’économie et de la santé publique.

Tableau n°20:Les Associations dans la commune d’Ankadinondry Sakay, année 2014. Dénomination Activités TSIRO Lutte contre le VIHSIDA CECAM Crédit mutuel ASSOCIATION PAYSANNE Agriculture/Élevage/Artisanat TSAB’ROSE Poivre rouge Source : Commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Décembre 2014. 24

En conclusion, la zone « d’Ankadinomby »fut habitée à l’origine par des Sakalava qui pratiquaient un élevage bovin extensif. Elle est constituée d’une vaste frontière entre les anciens royaumes merina de l’Itasy et la partie Nord-Ouest de l’île vers la zone Moyen-Ouest. A partir de 1952, l’appellation de l’endroit changeait en « Babet-ville », « Babet » étant le nom du premier Réunionnais qui exploitait le lieu. Les activités changèrent complètement et prenaient des dimensions énormes. L’élevage bovin s’est transformé en élevage porcin, ovin et de vaches laitières. Du fait de la nouveauté de l’élevage ovin dans les lieux, l’appellation de l’endroit changeait à nouveau en « Ankadinondry ». Il est à noter toutefois que bien avant l’arrivée des Réunionnais, plus précisément après 1920, Les sakalava n’étaient plus les seuls habitants du lieu car un mouvement migratoire à partir des Hautes terres est venu conquérir les vastes espaces disponibles et constituer le peuplement du Moyen-Ouest. L’attrait migratoire de la commune d’Ankadinondry Sakay fut renforcé par les divers aménagements réalisés lors de la colonisation, et sa population a augmenté en conséquence. Si tels sont les traits historiques de la migration dans la commune rurale d’Ankadinondry Sakay. Comment les divers chercheurs en sciences sociales ont-ils expliqué et formulé leurs théories sur la migration ?

Chapitre III: CADRAGE THEORIQUE ET HISTORIQUE DE LA MIGRATION Plusieurs chercheurs en sciences sociales ont avancé des théories en matière de migration. On peut citer à cet effet, les historiens Raymond DECARY et Hubert DESCHAMPS, les sociologues Raymond BOUDON, Vilfredo PARETO et Alexis de TOCQUEVILLE, le psychanalyste Robert CASTEL, le philosophe Karl MARX.

3.1 Concept sociologique de la migration La migration étant des phénomènes courants de par le monde, les chercheurs en cette matière se sont préoccupés surtout des formes qu’elle revêt et des divers facteurs qui la motivent. Parallèlement, ils ont étudié également les points d’impact de celle-ci tant au niveau des migrants qu’au niveau des pays d’accueil et des pays d’origine. Selon Raymond DECARY et Robert CASTEL(1941), la migration peut être temporaire ou définitive. Elle est provoquée soit par des contraintes obligatoires, soit par des volontés manifestes de changement. Les cas suivants illustrent entre autres les motifs de la migration : – pour échapper à des sanctions et préjudices causées par un changement de régime politique 25

– pour obéir à un ordre administratif – pour un besoin fondamental de changement, soit de niveau de vie social et économique, soit de climat. Hubert DESCHAMPS(1959), a souligné des points fondamentaux pour expliquer la migration. Ses recherches sont focalisées sur Madagascar juste à la veille de l’indépendance. Selon lui, la migration a été le résultat entre autres de: - l’ouverture des nouvelles routes qui permettent d’accéder à des nouveaux sites - l’attrait des lieux industriels et agricoles requérant de la main-d’œuvre- l’attrait de nouveaux espaces. Quant à Raymond BOUDON(1970),à partir de son concept « Individualisme méthodologique », il met l'accent sur la corrélation entre la décision individuelle ou communautaire de se migrer et les conséquences de celle ci dans la vie sociale des lieux d’accueil. Le phénomène observé concerne particulièrement l’exode rural qui a déclenché la création des nouveaux quartiers pauvres sous l’appellation de « bidonvilles ». La décision jugée rationnelle par les migrants au niveau microsocial produit alors dans ce cas, des effets pervers au niveau macro social. Dans son œuvre« Les méthodes en sociologie »,il souligne également que la migration est le résultat de déséquilibre économique entre les pays à faible revenu et les pays riches. L’existence des immigrés qui acceptent les petits emplois est une aubaine pour les sociétés industrielles à haute intensité de main-d’œuvre. La forte demande de main-d’œuvre étrangère va alors de pair avec une hausse de chômage dans le pays d’accueil. Les types de travail acceptés par les immigrés sont généralement des travaux temporaires à faible rémunération et n’intéressent pas les autochtones qui cherchent des emplois stables avec des salaires conséquents. Certains chercheurs ont focalisé leurs études sur les sociétés industrialisées et classent la migration dans la « mobilité sociale ». Cette dernière touche les indices de changements dans la vie d’un individu ou d’une collectivité au fil des temps. Ces indices pouvant être des éléments à caractères sociaux, culturels ou économiques. Parmi eux on peut citer Alexis de TOQUEVILLE, Karl MARX et Vilfredo PARETO (1993 et 1999), A. de TOQUEVILLE souligne que la mobilité sociale, au même titre que la démocratie, est la base même de l’ordre social américain. Cette mobilité concerne non seulement le changement de lieu mais également le changement de statut social. Karl MARX, lui (1848-1850) a orienté ses études vers le système capitaliste. D’après lui, la mobilité sociale se situe au cœur de deux classes sociales existantes : la bourgeoisie et le prolétariat. 26

Quant à Vilfredo PARETO dans « Traité de sociologie générale »(1917), il a observé le mouvement des élites. Selon lui, c’est la mobilité des élites, surtout dans les sociétés industrialisées, qui assure la stabilité sociale de ces sociétés.

3.2 Interprétation historique de la migration Les fouilles archéologiques réalisées en Afrique ont permis de remonter la première apparition de l’homme (Homo Sapiens) sur la planète terre il y a environ un million d’années. Comment expliquer alors l’existence humaine dans divers endroits terrestres sinon à partir des phénomènes migratoires depuis cette ère ? Il reste donc à savoir quels ont été les grands circuits migratoires de l’histoire humaine. Il semble que le déplacement de l’Homo sapiens en dehors de l’Afrique date de 80 000 ans. Les premières destinations de ce mouvement migratoire furent l’Eurasie et l’Australie. Ce qui permet de déduire l’existence des aborigènes en Australie il y a 40 000 ans plus tard. Au point de vue zoologique, les hommes actuels appartiennent donc à une seule espèce, l’Homo sapiens, qui fait partie de l’ordre des primates. C’est un point sur lequel les zoologistes, les anatomistes modernes se mettent d’accord. De cette unité spécifique des divers types humains découlent les difficultés présentées par toute tentative d’études à différencier les grandes unités raciales du globe. Dans le domaine de l’anthropologie, aucune caractéristique ne peut isolément suffire à définir une race.Il s’agit ici des caractères de la morphologie crânienne, ou squelettique, de la musculature, de la couleur de la peau ou du caractère du système pileux. C’est la notion de groupement territorial qui se précise de plus en plus à la place de la notion raciale. C’est dans ce même ordre d’idée que M. HOVELAQUE disait que : « En définitive les classifications n’ont point de réalité et ne répondent pas à des catégories précises ; sans doute il est commode de parler de race blanche, de race jaune, de race noire, - de race à tête allongée, à tête courte, - à cheveux lisses, à cheveux crépus : il existe des races présentant tels ou tels de ces caractères, mais prétendre systématiser un ensemble de caractères ; cela est le chimère ou un jeu puéril ». (Dictionnaire des sciences Anthropologiques, p. 949). Parmi les dates importantes de la migration se situe l’ère de grandes explorations (le XVème siècle et le Moyen Age) avec l’ouverture des voies maritimes. Cette époque, riche en découverte des terres nouvelles, favorise également l’ouverture des circuits historiques de migration. Au début du XVème siècle, la passion du Portugais Don Enrique, fils du roi, pour la navigation a occasionné le financement de plusieurs expéditions à travers le monde. Le Portugal commença alors à explorer la côte occidentale de l’Afrique. A la suite de ces 27 expéditions le cap de Bonne Espérance fut découvert par le portugais Bartolomeu Dias en 1488. Ces explorations se poursuivaient à la fin du Moyen Age. Le Portugal et l’Espagne, deux royaumes de la péninsule ibérique ont été les pionniers. La découverte de l’Amérique centrale et de l’Amérique du Sud et l’exploration des côtes occidentales de l’Afrique, de l’Asie du Sud Est, déclenchaient des échanges commerciaux au départ pour aboutir à certaines colonisations par la suite, entraînant à leur tour des migrations. Parmi les grands pays explorateurs, on peut citer le Portugal, l’Espagne ; la France et l’Angleterre. La plus célèbre découverte fut celle de l’Amérique qui est attribuée à Christophe COLOMB. Les colonisations faites par ces pays explorateurs ont déclenché le phénomène d’esclavage. Les autochtones ont été soumis à l’esclavage pour servir les intérêts des envahisseurs tant au sein des pays colonisés qu’au niveau des pays des colons. Le commerce d’esclaves figure alors parmi les grands circuits migratoires dans le monde. On assiste dans de tels cas à des migrations forcées dont l’Amérique en est l’exemple renommé. Des esclaves noirs africains ont été déportés en Amérique pour travailler les immenses plantations et pour exécuter des services domestiques. L’occupation des terres de découverte par les étrangers a été également à l’origine des dominations religieuses et de l’expansion du christianisme. Dans le cadre de ces diverses explorations, différentes dates peuvent être retenues : - En 1492,une expédition maritime financée par les Espagnols, et menée par Christophe COLOMB se dirigeait vers l’Ouest et se terminait par la découverte d’un nouveau continent, c’est l’Amérique. - En 1497, sous le règne du roi d’Angleterre Henri VII, Jean CABOT découvrit les côtes du Canada - En1499, Amerigo Vespucci explora les côtes de l’Amérique du Sud, pour le compte de l’Espagne. Son prénom « Amerigo » est à l’origine du choix de l’appellation du nouveau monde « l’Amérique » - En 1500, le portugais Pedro Alvarez Cabral découvrit à son tour le Brésil - En 1520, les différents périples de découvertes et de conquêtes donnèrent lieu à la traversée de l’Océan pacifique par Fernand de MAGELLAN pour le compte de l’Espagne. L’histoire est l’une des matières qui permettent d’expliquer la répartition de la population mondiale. D’après elle, les phénomènes migratoires ont été présents depuis la genèse de l’humanité. La traite des esclaves a contribué par exemple à dépeupler certaines régions littorales de l'Afrique. Les migrations les plus marquantes et les plus visibles ont été d’ordre international, c’est-à- dire d’un pays à d’autres. Toutefois la migration peut être interne et touche les déplacements d’un individu ou d’un groupe de personnes d’un endroit à d’autres à l’intérieur d’un pays. 28

Pour le cas de Madagascar, le peuplement est le résultat des flux migratoires, tant externe qu’interne. Outre les « Vazimba », la présence de la population d’origine asiatique, arabe, africaine a été soulignée au début du XVIIIe siècle. La répartition spatiale du peuplement se faisait primordialement sur trois principales espaces : - le centre (Hautes terres), à haute densité démographique - le littoral Est et Ouest avec une population relativement élevée-les espaces intermédiaires, « vides d’hommes » ou très faiblement peuplés. L’histoire, avec les politiques d’expansion de la monarchie merina a accentué cette structure spatiale du peuplement. Cette politique datait du temps d’Andrianampoinimerina (1787-1810) qui souhaitait élargir son royaume jusqu’à la mer et qui avait pour devise : «Ny ranomasina no valam-parihiko» (la mer est la limite de mon royaume). Il a réalisé d’importants travaux d’aménagements des plaines rizicoles permettant d’améliorer la production en riz (Betsimitatatra). La population sur les Hautes terres s’est accrue en conséquence. Sous le règne du roi Radama I (1810-1828) puis de la reine Ranavalona I (1828-1861), des voies de communication sont construites dans le but de contrôler le territoire sur le plan économique et politique. Des migrations importantes ont été soulignées vers les territoires conquis par le pouvoir royal. Le flux migratoire continuait progressivement vers les lieux à forte productivité soit des cultures de rente, soit des cultures vivrières à travers les différents règnes, la colonisation, les différentes républiques qui se sont succédés. RAISON (J) (1984). C’est dans ce sens que la région Bongolava fut également devenue un lieu de migration par excellence pour son immense espace avec une population quasi inexistante. Son chef lieu de district, Tsiroanomandidy fut créé sous le règne de Radama I (1810-1828) à cause de sa position qui présente un aspect politique et stratégique. Cette région située à la frontière des Hautes terres et du Moyen-Ouest permet non seulement le contrôle de l’Ouest mais également l’élevage et la commercialisation des bovidés.

3.3 Explication géographique de la migration La migration est associée à la géographie ici car l’un ne peut exister sans l’autre. Différents auteurs font d’ailleurs référence à la géographie pour expliquer les phénomènes de la migration. La géographie étant une science qui a pour a objet la description et l'explication de l'aspect actuel, naturel et humain, de la surface de la terre. Elle est également un ensemble des caractères qui constituent la réalité physique et humaine de telle ou telle région. Elle englobe le sol, le climat, la population. Ce qui explique le concept de la géographie humaine qui est basée sur les études des réalités de la population : - localisation - évolution démographique et spatiale. Il peut à la fois s’intéresser à la géographie économique. Toutefois, c’est l’étude de la 29 population qui y prédomine. Les principaux aspects de l’étude sont axés sur la distribution de la population à la surface du globe et les variations de cette répartition. Cette étude fait d’ailleurs appel à l’histoire, l’économie, la culture, la sociologie pour expliquer le peuplement d’une région et les mouvements de celui-ci. Sa portée atteint alors la migration. C’est ainsi que le géographe Ernest George Ravenstein s’est penché sur l’étude des phénomènes migratoires dans sa carte intitulée « Courants migratoires » publiée pour la première fois en 1885. Il a basé ses théories à partir des observations des flux migratoires tant local qu’international dans plusieurs pays du monde. D’après lui, et selon les réalités observées à l’époque, sept points fondamentaux qu’il a baptisés « lois » régissent la migration. Ces lois se présentent comme suit : 1- Le nombre des migrants de courte distance dépasse largement celui des migrants de longue distance. La migration de longue distance concerne particulièrement les grands centres industriels et commerciaux. 2- La population se déplace progressivement vers le centre. 3- Le flux migratoire génère un flux compensatoire inverse. 4- La migration touche beaucoup plus la population rurale que la population urbaine. 5- Les femmes sont concernées particulièrement par la migration de courte durée. 6- Le développement de la technologie contribue à l’accroissement de la migration. 7- La migration est motivée par un besoin de réussite matérielle et sociale. Par ailleurs, la répartition de la population mondiale s’explique par des éléments naturels : les régions froides, les montagnes, les déserts, les grandes forêts sont en général très peu peuplées. Au contraire les littoraux, les vallées, les plaines, les régions tempérées, ou chaudes, et humides, les régions fertiles, sont en général peuplées. Les zones volcaniques, malgré le risque, sont le plus souvent peuplées en raison de leur fertilité. En outre, Camille ARAMBOURG dans « la genèse de l’humanité »(1943) décrit les origines historiques et géographiques de l’humanité. Les climats, les faunes et les flores, ont joué un rôle primordial dans l’évolution de la race humaine. L’homme est apparu avec les climats et les faunes quaternaires. Il se déplaçait au gré des variations climatiques auxquels il a été soumis. Ce qui justifiait sa répartition géographique. L’installation définitive de l’homme ne datait qu’à la période postglaciaire. C’est d’ailleurs l’époque à laquelle le climat tempéré s’est installé dans les parties moyennes de l’hémisphère, remplaçant le climat tropical. Par ailleurs, les phénomènes glaciaires ont provoqué des fluctuations au niveau de la transformation du climat, empêchant celui-ci de suivre une évolution progressive. La composition et la répartition des faunes et des flores en subissaient la conséquence. Cette 30 transformation se manifestait différemment selon les différentes époques. Pour le cas de l’Europe, les trois premières glaciations ont été surtout locales et ne semble pas avoir exercé d’influence profonde sur le climat général et sur l’évolution des faunes. Cette dernière, au contraire, a coïncidé avec un abaissement général de la température moyenne qui a provoqué la migration de nombreuses formes boréales vers les contrés méridionales.

En effet, l’apparition des premiers représentants authentiques de l’homo sapiens remonte à une antiquité. Dès la fin du retrait des derniers glaciers, l’humanité comprenait déjà une variété considérable de types parmi lesquels les caractères des grandes unités raciales modernes étaient indiqués. Il faut remonter jusqu’ à la période glaciaire pour trouver les plus anciens fossiles humains qui appartiennent au groupe de l’Homo sapiens. Ils forment déjà un ensemble complexe de types distincts, mais dont les différences sont moins tranchées que celles des diverses races modernes. Aucun d’entre eux ne subsiste aujourd’hui dans son intégralité, mais certains de leurs traits se retrouvent disséminés et variablement associés parmi les diverses races humaines actuelles, tandis que d’autres caractères, qui leur étaient propres, ont disparu avec eux. Les caractéristiques géographiques du globe terrestre tiennent une place prépondérante non seulement dans la formation de la race humaine mais également dans la répartition de celle-ci à travers ce globe. Pour le cas de Madagascar, outre l’existence des « Vazimba », des pistes d’études sur la géographie humaine ont fait l’objet du rapport dans le cadre de « Madagascar face au défi des Objectifs du Millénaire pour le Développement » (O.M.D), (2004). D’après l’histoire de son emplacement et sa formation géographique, la Grande île est un bloc détaché de l'ancien continent Gondwana. Son peuplement résulte principalement de vagues de migration qui se sont succédé probablement depuis le début de notre ère. Le Nord et le Nord-Ouest servirent de porte d’entrée aux premiers habitants qui peuplaient les zones côtières. La distribution spatiale de son peuplement est dictée par les flux migratoires tant de l’extérieur qu’à l’intérieur du pays. La présence des populations d’origine asiatique, arabe, africaine a été signalée au début du XVIIIe siècle. Actuellement, la structure géographique, accompagnée de l’accroissement de densité démographique de certaines régions a favorisé la migration interne. Des groupes territoriaux se sont déplacés dans d’autres zones ayant plus de potentiel économique et plus d’espace. Ce qui explique la migration vers la région du Moyen-Ouest qui répond à ces critères économiques et spatiaux. A partir de 1950, cette région est devenue une destination 31 migratoire pour les populations des Hautes Terres. Les populations des autres régions ont suivi ce flux. Le climat et le sol de la région étant par ailleurs favorables aussi bien à la culture qu’à l’élevage. Après les Merina, la présence des Betsileo est aussi signalée en tant que travailleurs temporaires au début (ouvriers agricoles) et finissent par s’installer définitivement au vu des vastes espaces disponibles. D’autres migrants provenant du Sud et du Sud- Est viennent par la suite augmenter l’effectif de la population du Moyen-Ouest. Et le flux migratoire continue jusqu’à ce jour. Les types de migrations de cette zone peuvent être classés en deux grandes catégories : les migrations liées à la conquête des nouveaux espaces d’une part et les migrations favorisées par le commerce de bovidés d’autre part.

Pour conclure, les différentes théories avancées par divers chercheurs sur la migration, traitent les causes et effets de la migration aussi bien sur le social, l’économie que sur l’environnement et la géographie. Parmi les effets de la migration figure l’histoire du peuplement d’un lieu. Pour notre part, le peuplement du district de Tsiroanomandidy, dans lequel se trouve la commune d’Ankadinondry Sakay, est constitué de migrants issus de toutes les régions de Madagascar. Quelles sont donc les causes de ce phénomène migratoire dans la région Bongolava et particulièrement dans la commune rurale d’Ankadinondry Sakay et comment les migrants vivent réellement leur migration ?

PARTIE II :

CAUSES ET REALITES DE LA MIGRATION

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CAUSES ET REALITES DE LA MIGRATION

Toute migration est dictée par une ou des motivations bien déterminées. Les différents auteurs qui se sont penchés sur l’étude de la migration ont avancé des motifs différents selon que les déplacements soient temporaires ou définitifs, selon qu’ils soient de courtes ou de longues distances, selon qu’ils soient le résultat de décisions individuelles ou collectives et enfin selon qu’ils concernent des individus ou des groupes d’individus. Par rapport à ces théories, qui d’ailleurs sont tirées des observations des faits, cette deuxième partie met en exergue les causes essentielles de migration dans la commune d’Ankadinondry Sakay et les vécus des migrants dans cette localité d’accueil. Cette migration est constituée par quel type et/ou quel genre de population ? De quelles localités sont issus les migrants ? Comment vivent-ils leur migration ? Les réponses à ces questionnements sont traitées dans les trois chapitres constituant cette deuxième partie où l’on retrouve : - les acteurs de la migration et les motivations de l’implantation des migrants - les caractéristiques des circuits migratoires - les modes de vie des migrants.

Chapitre IV : LES ACTEURS DE LA MIGRATION ET MOTIVATION DE L’IMPLANTATION DES MIGRANTS Lors de notre descente sur terrain, nous avons pu observer que toutes les régions de Madagascar sont représentées parmi les habitants d’Ankadinondry Sakay. Bien que notre étude porte essentiellement sur les échantillons pris en observation, elle tient compte en même temps des informations et données recueillies concernant la commune d’Ankadinondry Sakay. Des données sur le District de Tsiroanomandidy et la région Bongolava ont été également collectées dans la mesure où elles concernent en même temps la commune d’Ankadinondry Sakay. Le terme « acteurs » dans le domaine de la migration ne se limite pas à désigner une ou des personnes ayant effectué des déplacements spatiaux pour un temps limité ou définitif. Cette terminologie suppose en effet différentes formes d’actions menées par les populations migrantes depuis leurs territoires d’origine jusqu’à leur territoire d’accueil. Ces actions sont à l’origine des causes et des effets de la migration au niveau des migrants. A l’issue des enquêtes que nous avons menées, les causes principales observées gravitent autour de trois motivations essentielles : - activités d’ordre salarial et agricole - activités commerciales - raison familiale.

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4.1 Activités d’ordre salarial et agricole Les motivations évoquées par les migrants sont d’origine salariale, d’une part, et d’ordre agricole, d’autre part. Ces formes d’activités génèrent des ressources et des revenus aussi bien pour les migrants individuels que les migrants en groupe ou famille. Le produit de ces activités leur permet de faire face à la vie quotidienne et aux perspectives d’avenir. Les différents acteurs qui entrent en ligne de compte dans le cadre de notre étude sont : - les salariés- Les agriculteurs (cultivateurs et éleveurs). Les populations cibles permettant la classification des acteurs sont issues de notre échantillon de 72 individus.

Tableau n°21: Motifs de migration des populations prises en échantillon, année 2014. Motifs de migration Effectif des individus Pourcentage Activités salariales 21 29,2% Agriculture 26 36,1% Activités commerciales 18 25% Raison familiale 7 9,7% TOTAL 72 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Figure 02: Motifs de migration

80 70 60 50 40 30 20 Effectif des individus 10 Pourcentage 0

Source : Enquête personnelle, Décembre 2014. 34

D’après ce tableau, les deux motivations dominantes de la migration dans la commune d’Ankadinondry Sakay sont d’ordre salarial. (29,2%), et agricole (36,1%).Viennent ensuite les migrants exerçant des activités commerciales. La motivation d’ordre familial occupe la dernière place. Prenons en premier lieu les migrants qui se sont déplacés pour des activités salariales et des activités agricoles.

 Activités d’ordre salarial La notion de salaire est appliquée pour les migrants effectuant des activités à rémunération mensuelle ;ceux exerçant des activités saisonnières et rémunérés en fonction de la durée de leur contrat, et enfin les travailleurs journaliers. Dans la catégorie des salariés mensuels, on retrouve les employés des établissements publics et privés. Au niveau des établissements publics, on peut citer entre autres : La Poste et Télécommunication, la Gendarmerie, les Centres de Santé, les Ecoles primaires (EPP), les collèges d’enseignement général (CEG) et le Lycée. Ces établissements publics sont les apanages des fonctionnaires. Pour les salariés des établissements privés, il s’avère plus intéressant de se focaliser sur leurs emplois. A ce titre nous avons les employés de bureau, les gardiens, les chauffeurs de taxi-brousse. Parmi les travailleurs saisonniers, figurent les travailleurs des champs « Mpikarama » qui concluent des contrats tacites de travail pour une durée déterminée et sont rémunérés en fonction de cette durée. La rémunération varie selon les contractants et suivant les pratiques locales. Au sein des travailleurs journaliers se situent les tireurs de pousse, les travailleurs de champs qui touchent des salaires journaliers. Ils perçoivent leurs dus à la fin de chaque journée de travail. Les barèmes salariaux dans ce domaine se font selon l’usage. Pour les travailleurs de champs, ils sont de l’ordre de 2500 Ariary la journée. Le salaire journalier des tireurs de pousse varie aux environs de 2500 à 3000 Ariary. Ils louent les pousses pour une journée, leurs salaires sont donc l’équivalent du solde entre ce qu’ils gagnent et les frais de location. La présence dans le milieu d’accueil est dictée différemment selon les activités des migrants : - les travailleurs de bureau sont tenus de rejoindre le milieu par obligation d’affectation professionnelle, sinon ils perdent leurs emplois - les tireurs de pousse sont motivés par l’existence de l’emploi - les travailleurs journaliers de champs sont déjà implantés dans le milieu mais exercent des travaux journaliers à l’occasion des saisons culturales - les travailleurs saisonniers sont des migrants temporaires pour les saisons culturales.

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 Activités agricoles Sont regroupés dans cette rubrique les migrants pratiquant la culture et l’élevage. Les cultures les plus pratiquées sont celles du riz, du manioc et du maïs. La culture du riz est accompagnée par celle du maïs et/ou du manioc. Le riz, dans la majorité des cas, sert d’autoconsommation, mais en cours de disette ou d’aléas climatiques, le maïs et le manioc servent de substitut et de complément d’aliment. C’est la raison pour laquelle ces trois cultures sont quasi inséparables car ils sont la base de l’alimentation. Trois sortes de cultivateurs sont observés parmi les migrants : - les cultivateurs propriétaires des terrains, - les cultivateurs locataires – les métayers. Les migrants qui sont implantés dans la localité depuis le départ des Réunionnais disposent des terrains qui leur appartiennent, tandis que les nouveaux venus louent des espaces aux anciens. Pour l’élevage, il est axé essentiellement sur le bovin, le porcin et les volailles. Le bovin est jumelé avec la culture (surtout du riz) pour les engrais et les travaux de champs. Les familles qui arrivent à s’en procurer les achètent toujours en paire. Le prix d’une tête de zébu varie de 300 000 Ariary à 1 000 000 Ariary selon l’âge et l’engraissement. Les bovins servent en même temps de matériels agricoles et d’épargne pour les familles. Certains foyers possèdent une dizaine de têtes de zébus. Mais par crainte de l’insécurité qui sévit dans la région et dans la commune même, le nombre de têtes de zébus est limité au minimum, juste le nécessaire pour la culture. Quant à l’élevage porcin, il sert surtout à alimenter le revenu de la famille. Le vol des porcs est moins fréquent que celui des bœufs. De ce fait, le parc porcin est plus élargi que celui du bovidé. Pour l’élevage des volailles, nous avons pris en compte l’élevage à caractère commercial uniquement. Il s’agit de l’élevage avicole. Il joue un rôle complémentaire au revenu familial. Aucun des migrants ne pratique exclusivement de l’élevage de volailles. Celui-ci est associé à d’autres activités. La culture et l’élevage sont souvent pratiqués en même temps (cas de la culture du riz et de l’élevage de zébus), mais pour certaines familles migrantes, ils sont exercés séparément faute de moyens pour se procurer des bétails. La rubrique « agriculture » nous a conduites vers des migrants qui exercent d’autres métiers. Le secteur agricole n’est pas uniquement l’apanage des agriculteurs. D’autres catégories de migrants comme les salariés à haute rémunération et les grands commerçants s’y intègrent aussi. La délimitation précise entre les deux activités présente parfois des difficultés. Dans tous les cas, c’est à partir des activités principales des migrants que nous avons défini les classements auxquels ils appartiennent. 36

4.2 Les activités commerciales Les migrants motivés par les activités commerciales occupent la troisième place pour un taux de 25 %après les salariaux et les agriculteurs. Cette catégorie regroupe les migrants dont les ressources proviennent de la vente des produits commerciaux. Nous avons classé dans cette catégorie les grossistes en produits de première nécessité (PPN), les quincailleries, les épiciers, les gargotiers, et les personnes pratiquant les petits commerces de rue. Les individus que l’on retrouve dans cette classification disposent de fonds de commerce qui varient en fonction de la dimension de l’activité. Toutefois, pour des raisons de sécurité, les personnes enquêtées n’ont pas voulu dévoiler le montant de leurs investissements même à titre indicatif. Toutes les réponses obtenues ont été évasives, donc n’ont pas de caractères fiables. A l’exception des petits commerçants de rue, une partie des commerçants disposent de locaux en dur qui leur sont propres. Les grossistes et les quincailleries en font partie en majorité. Une autre partie loue les infrastructures que la commune met à leur disposition sur la place du marché. La location est mensuelle pour les locaux en dur. Les occupants de ces locaux sont principalement des gargotiers. Pour les étals, la location est journalière et joue également un rôle d’impôt. Le jour d’affluence est le samedi, jour du marché hebdomadaire. C’est au cours de ce marché hebdomadaire que les commerçants réalisent leurs ventes les plus élevées de la semaine.

4.3 Raison familiale Les déplacements pour des motifs familiaux concernent 9,7% des migrants. A l’intérieur de cette catégorie, deux typologies sont apparues : les regroupements familiaux et les déplacements en famille. Pour les cas des regroupements familiaux, les pères de famille migrent les premiers, en vue de tester le milieu d’accueil pendant un temps limité de 3à 6 mois. Le test concerne la rentabilité, l’intégrité sociale, la scolarisation des enfants, l’habitation. Après ces périodes, les membres de la famille sont conviés et l’implantation se concrétise par les regroupements familiaux. Les premiers déplacements sont déclenchés par des travaux saisonniers (pour les agriculteurs), par des commerces ambulants, par simple curiosité suite aux dires des gens (pour les commerçants). Quant aux déplacements en famille, tous les membres de la famille se déplacent en même temps après la prise de décision de migration. Pour certains, le déplacement est précédé de divers éléments facilitateurs dans le milieu d’accueil comme l’existence des proches et des amis. Ces derniers rassurent à partir de leurs exemples de réussite. Pour d’autres, la 37 découverte du milieu est occasionnée par des événements familiaux (mariage, décès) et des séjours pendant les périodes des vacances. Ils sont hébergés par les familles ou les amis proches au début de leur déplacement en attendant le déménagement définitif.

Tableau n°22 : Effectif selon la durée d’essai de migration, année 2014. Durée Effectif des migrants Pourcentage 3 mois 10 13,9% 5 mois 22 30,5% 6 mois 40 55,6% Total 72 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Figure 03: Effectif selon la durée d’essai de migration, année 2014.

Effectif des migrants

Total 6 mois 5 mois Effectif des migrants 3 mois

0 20 40 60 80

Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

D’après le tableau et le graphe que nous avons obtenus à partir des réponses des migrants, la majorité, soit plus de la moitié des migrants (55,5%) opte pour la limite maximum de délai (6mois). Très peu de migrants (13,9%) décident de s’installer pour la limite minimum de 3 mois. Pour la limite intermédiaire de 5 mois, 30,6% des migrants sont concernés. Nous avons pu déceler que les motivations qui dictent les déplacements spatiaux vers Ankadinondry Sakay sont d’ordre agricole, salarial, commercial et familial. Les migrants passent par une étape intermédiaire avant de se fixer définitivement dans la localité. Cette étape leur permet de faire une analyse sur la rentabilité de la migration du point de vue social et économique. Mais avant l’implantation définitive à Ankadinondry Sakay, les migrants sont passés par divers itinéraires.

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Chapitre V : CARACTERISTIQUES DES CIRCUITS MIGRATOIRES Nous avons pu distinguer deux types de migrants : - ceux qui ont effectué divers parcours avant de se fixer sur le choix du lieu - ceux qui ne se sont pas hasardés de faire d’autres trajets que ceux qui mènent directement à Ankadinondry Sakay. Les itinéraires suivis dictent les différentes étapes vécues par les migrants depuis le milieu d’origine jusqu’ à Ankadinondry Sakay. Ce sont ces trajectoires qui constituent les circuits migratoires. Ce chapitre met alors l’accent sur les éléments qui caractérisent ces parcours. Trois types de parcours ont été identifiés : – Les zones de départ – Les zones intermédiaires – Les zones d’arrivée.

5.1 Zones de départ. Plusieurs zones ont été évoquées par les migrants de notre échantillon. La réponse à notre questionnaire nous a permis de dresser le tableau n° 04 à la page 10 de la première partie qui donne les différents territoires d’origine des migrants. Les éléments recueillis lors de cette enquête ont permis de présenter le graphe ci-après :

Figure 04: Pourcentage des migrants selon leur territoire d’origine, année 2014.

Pourcentage des migrants 120,00% 100,00% 80,00% 60,00% 40,00% 20,00% Pourcentage des 0,00% migrants

Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Si l’on prend les pourcentages des migrants, les 63,9 % sont venus respectivement d’Antananarivo et d’Antsirabe, soit plus de la moitié de l’échantillon. Viennent ensuite les originaires de Fianarantsoa, Fandriana et Ambositra pour 12,5%. Ceux qui sont issus de Mahajanga occupent les mêmes taux de 5,6% que ceux qui proviennent de Toliary et Ambovombe. Le nombre de migrants en provenance de Manakara et de Farafangana est à 39

égalité avec un taux de 4,2% pour chaque origine. Les derniers de la liste sont les originaires de Toamasina pour un taux de 2,8% et ceux d’Antsiranana pour 1,4%. Pour les originaires d’Antananarivo, d’Antsirabe, de Fianarantsoa, d’Ambositra et de Fandriana, les motifs qui les ont incités à quitter leur milieu de départ sont d’ordre économique lié aux facteurs géographiques. Ils ont évoqué la médiocrité de leur quotidien à partir de la détérioration du sol qui a des impacts sur le rendement. Les productions diminuent incessamment. Le recours aux engrais et aux variations de semences n’apporte plus les rendements escomptés. Le coût de la culture surpasse les productions obtenues. La culture ne peut plus assurer le revenu de la famille, elle est pratiquée seulement par habitude et routine dans un objectif d’’auto consommation. Le recours à l’acquisition des terres nouvelles n’est plus possibles faute de disponibilité. Pour les migrants en provenance des zones côtières comme Manakara, Farafangana, Antsiranana, Mahajanga, Toamasina, ce sont des zones fertiles en termes de culture. Toutefois, elles sont périodiquement frappées par les intempéries et présentent des risques énormes qui vont jusqu’à la perte de production de toute une saison en cas de passage cyclonique dans les localités. Les activités liées à la proximité de la mer (la pêche) exigent pourtant une certaine spécialité et ne sont pas accessibles à tous. Quant aux originaires de Toliary et de l’ (9), le climat subdésertique et le sol semi aride sont aggravés par le problème crucial de manque d’eau. Toute forme de culture et d’élevage se trouve ainsi conditionnée. Seules les plantes épineuses peuvent subsister aux conditions climatiques de l’Androy.

5.2 Zones intermédiaires Les zones intermédiaires sont les endroits par lesquels sont passés les migrants avant d’atterrir à Ankadinondry Sakay. D’après notre enquête, une partie minoritaire seulement (18 migrants sur l’échantillon de 72 individus) est passée par ces zones intermédiaires. Elle est au nombre de 18 et représente 25% de l’échantillon.

(9) Androy : La région Androy, située à l’extrême Sud-ouest de Magagascar, est la zone la plus sèche de l’île. A l’irrégularité des pluies s’ajoute la fréquence du vent et de l’insolation qui aggrave la sècheresse. Les pluies font quelquefois défaut, et rendent encore plus difficile toute forme de culture Une partie du sol au Sud a une structure calcaire, relativement fertile mais dépourvue d’eau. L’autre partie au Nord, a une structure cristalline, riche en eau mais stérile à la culture. Sa végétation est caractérisée par une brousse épineuse. L’Androy est réputé pour ses ronces. Les moindres ressources d’eau y sont utilisées au maximum (mares, puits, …) 40

Pour ceux qui sont concernés par ces zones intermédiaires, il leur a fallu se déplacer dans d’autres endroits en vue de comparaison et d’analyse. Les cinq zones évoquées se situent sur l’axe de la RN1 et ses environnements. Les endroits de passage intermédiaire se trouvent respectivement dans les régions de Bongolava et d’Itasy. Le tableau et graphe ci-après retracent ces lieux.

Tableau n° 23 : zones de passage intermédiaire des migrants, année 2014.

Zones Intermédiaires Nombre des migrants Pourcentage Tsiroanomandidy 7 38,9% Analavory 5 27,8% Miarinarivo 1 5,6% Soavianandrina 4 22,2% Fenoarivo-Be 1 5,6% TOTAL 18 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Figure 05 : zones de passage intermédiaire des migrants, année 2014.

18 16 14 12 10 8 6 Nombre des migrants 4 Pourcentage 2 0

Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Les villes de Tsiroanomandidy et d’Analavory sont les lieux intermédiaires les plus fréquentés. Elles sont aisément accessibles par la RN1. Tsiroanomandidy est en même temps le chef- lieu du District et de la région dans laquelle se situe d’ailleurs Ankadinondry Sakay. Quant à Analavory, c’est la limitrophe entre la région Itasy et la région Bongolava. C’est la ville voisine d’Ankadinondry Sakay par rapport aux zones des Hautes terres. 38,9% des 41 migrants d’Ankadinondry sont passés provisoirement à Tsiroanomandidy, tandis que 27,8% ont transité par Analavory. Le troisième endroit de transit est la ville de Soavinandriana pour un pourcentage de 22,2%. C’est une zone volcanique, située dans la région de l’Itasy. La ville de Miarinarivo se situe aussi dans cette même zone et 5,6% seulement des migrants temporaires ont choisi cet endroit. Le même pourcentage de 5,6 % se retrouve pour la ville de Fenoarivo Be qui est ancrée dans la région Bongolava. Le choix de la région de la région d’Itasy est motivé par la renommée de la fertilité du sol et des rendements agricoles de ses localités. Il s’agit ici de Soavinandriana, Miarinarivo et Analavory. Cependant, l’accès aux terres s’avérait difficile.et les migrants ont changé de cap vers Ankadinondry Sakay qui dispose encore de terres disponibles à haute fertilité. Concernant la région Bongolava, c’est l’attrait des vastes horizons disponibles qui motivaient les premiers choix vers Tsiroanomandidy, d’une part, et vers Fenoarivo Be d’autre part. Les migrants temporaires ont quitté Tsiroanomandidy pour Ankadinondry Sakay pace qu’ils ont été attirés par les aménagements réalisés du temps des colons. Quant à celui (01 migrant) qui a transité à Fenoarivo Be, c’est la présence d’un parent qui a dicté le choix de cet endroit. Se rendant compte de l’enclavement et de l’insécurité qui sévit dans la région, il a décidé de s’en éloigner pour atterrir à Ankadinondry Sakay.

5.3 Zones d’arrivée Les facteurs géographiques dominants qui sont liés aux motifs de la migration sont souvent le climat et la structure du sol. Toutefois, la disponibilité des espaces non exploités joue aussi un rôle décisif dans la motivation. Pour le cas de la migration dans la commune d’Ankadinondry Sakay, ce phénomène est-il vérifié ? C’est le résultat de notre enquête qui nous le dira. Il s’avère alors nécessaire de retracer ces éléments fondamentaux qui caractérisent les facteurs géographiques de la localité d’accueil. Pour le cas de la commune d’Ankadinondry Sakay, deux éléments caractérisent la fertilité du sol : premièrement elle est traversée par deux grandes rivières (Ihazomay et ses affluents d’un côté et la Sakay d’une autre) ; deuxièmement, elle est située en bordure de la région volcanique de l’Itasy. En conséquence, elle dispose d’un sol ferralitique favorable à l’agriculture. La division de son climat en deux saisons relativement clémentes est favorable également à tout type de culture et d’élevage. La première moitié du climat se présente en saison chaude et humide (qui dure 6 mois allant du mois de novembre au mois d’avril), tandis 42 que la seconde moitié (de six mois allant du mois de mai au mois d’octobre) est plutôt sèche et fraiche. Outre ces diverses caractéristiques, la commune d’Ankadinondry Sakay qui est la porte d’accès à la région de Bongolava à partir des Hautes terres, ouvre une perspective de vastes horizons disponibles. Ces principaux facteurs ont été soulignés séparément ou conjointement par les migrants lors de notre enquête comme étant des éléments décisifs dans leurs mobilités spatiales. A coté des différentes opportunités offertes par Ankadinondry Sakay sur le plan économique, les migrants ont noté l’insécurité qui règne non seulement dans la commune mais également dans toute la région. Toutefois, en comparaison des avantages qu’ils peuvent tirer dans la localité, ils n’ont pas fait grand cas de l’insécurité. En conséquence, leurs motivations de rester à Ankadinondry Sakay ne s’en trouvaient pas amoindries. La commune dispose d’ailleurs d’un détachement militaire et d’un poste de Gendarmerie. L’explication des motivations de l’implantation des migrants dans la zone d’arrivée fait référence au classement des migrants par type de motivation. Pour cela, nous avons distingué quatre catégories de migrants : - les salariés - les agriculteurs - les commerçants - les migrants pour des raisons familiales. Le graphique ci-après illustre ce classement.

Figure 06: Motifs de migration à Ankadinondry Sakay, année 2014.

Effectifs des individus 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Effectifs des individus

Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

Les agriculteurs se situent au premier du classement au nombre de 26 sur les 72 individus de l’échantillon. Les caractéristiques géographiques d’Ankadinondry Sakay figurent parmi leurs motivations d’implantation dans la localité. Ils ont pu expérimenter leurs techniques habituelles sur des terres nouvellement ou louées selon le cas. La comparaison des 43 rendements par rapport à ce qu’ils ont obtenus dans leurs territoires d’origine leur permettait de constater un surplus de production qui se traduit par un surplus de ressources et de revenus familiaux. Aucun chiffre n’a été avancé par les migrants mais ils ont déclaré que les ressources qui proviennent de l’agriculture leur permettent de dégager un surplus par rapport aux charges fixes et variables de l’année (frais de scolarisation des enfants, les diverses charges locatives et agricoles comme les semences, les engrais, …). Quant aux salariés qui sont au nombre de 21 sur les 72 migrants de l’échantillon, ils occupent la seconde place. Les motivations divergent selon la catégorie des salariés. Pour les travailleurs de bureau qui sont rémunérés mensuellement, ils habitent Ankadinondry Sakay par obligation. Les fonctionnaires sont obligés de rejoindre leurs postes d’affectation sous peine de sanction. Le même cas de figure, et même pire, se retrouve chez les employés des organismes privés. Pour les travailleurs saisonniers, les motivations se situent au niveau des rémunérations et des perspectives de trouver d’autres opportunités comme l’acquisition ou la location éventuelle des terrains. Le fait de choisir les mêmes endroits pour travailler signifie pour eux de meilleures rémunérations et de meilleures conditions de travail qu’ailleurs. Avec les opportunités qui se présentent et l’habitude du lieu, ils finissent par s’installer à Ankadinondry Sakay. Quant aux travailleurs journaliers aux champs, les motivations d’implantation à Ankadinondry Sakay n’ont pratiquement rien à voir avec leurs salaires journaliers. Ce sont des migrants définitifs qui ont été motivés par d’autres facteurs mais qui pratiquent ce genre de métier pour compléter leurs revenus dès que les occasions se présentent. Ils sont classés dans la rubrique des agriculteurs, mais ils figurent dans cette catégorie des travailleurs journaliers car ils en font également partie mais ils ne sont pas décomptés dans l’effectif des salariés. Cependant le fait de pouvoir effectuer ce genre de travail en complément de leurs activités principales rentre dans leurs grilles de motivations. Pour les tireurs de pousse, par contre, ils disent qu’ils gagnent mieux que ce qu’ils ont gagné dans leurs territoires d’origine et qu’il vaut mieux avoir un emploi que n’avoir rien du tout. Ce métier est pour eux une étape obligatoire à passer pour accéder à un meilleur niveau de vie avec les opportunités qu’offre Ankadinondry Sakay. Quant aux commerçants, ils sont en perpétuelle quête de points de vente profitables. Certains d’entre eux ont commencé par le commerce ambulant. En se rendant compte de la prospérité du commerce, ils ont décidé de se fixer à Ankadinondry Sakay. Aucun d’entres eux n’a suivi 44 des études en matière de commerce, mais ils se sont engagés dans ce domaine à partir d’un simple aperçu des besoins locaux. Les gargotiers pullulent aux alentours de la gare routière. Cet endroit regorge toujours de voyageurs qui se restaurent dans les gargotes, surtout le jour du marché. L’existence des gargotes arrange aussi certains travailleurs résidant dans la commune qui ne disposent pas de temps pour se préparer à manger. C’est l’affluence de la fréquentation des lieux qui a motivé les gargotiers dans leurs métiers et à s’implanter à Ankadinondry Sakay. Pour les déplacements d’ordre familial, aucune étape intermédiaire n’a été soulevée car le motif est juste dicté par un choix de regroupement des membres de la famille. La destination est déjà connue initialement.

Pour conclure et compte tenu des itinéraires effectués par les migrants avant de s’implanter à Ankadinondry Sakay, le circuit migratoire est un circuit ouvert qui offre un libre mouvement aux acteurs de la migration. Il permet à tout migrant de changer de lieux en fonction de leurs besoins et de leurs objectifs en tout moment. Mais une fois installé dans un endroit, le migrant doit faire face aux exigences vitales qui font partie de son mode de vie et qui lui permet de réaliser ses activités.

Chapitre VI : MODE DE VIE DES MIGRANTS Après une longue durée d’installation au milieu d’accueil, les migrants font partie intégrante de la population de ce milieu. Toutefois, avant d’y arriver, ils sont passés par diverses étapes. L’accommodation aux nouveaux habitats, aux climats, aux us et coutumes, aux relations sociales. L’intégration des migrants dans cette société nouvelle est aussi un des critères fondamentaux qui justifient leur implantation. L’accueil des nouveaux venus à Ankadinondry Sakay est-il prévu par la commune et leur installation est-elle facilitée ? Trois points essentiels pourraient contribuer à la réponse de ces questionnements : - La résidence et l’habitat des migrants - La vie quotidienne des migrants - La relation interactionnelle des migrants.

6.1 La résidence et l’habitat des migrants La résidence représente l’un des besoins vitaux de l’être humain, au titre de l’habillement et de la nourriture. Dans le cadre des exodes ruraux par exemple, l’habitat des migrants créent souvent des problèmes à l’urbanisation. L’accumulation des logements médiocres dans des quartiers qui ne disposent d’aucun réseau d’assainissement appauvrit de plus en plus ces 45 quartiers et engendre des problèmes cruciaux pour l’agencement et l’aménagement des communes urbaines. Pour le cas d’Ankadinondry Sakay qui est une commune rurale, l’arrivée des migrants de toute part pose-t-elle des problèmes à la commune ? Pour le cas d’Ankadinondry Sakay, comme d’autres communes rurales d’ailleurs, aucune structure ne prévoit l’accueil des migrants. Au début, certains louent des pièces aux résidents propriétaires, d’autres sont hébergés par des parents ou des amis en attendant de trouver une habitation. Divers types d’habitations ont été observés en fonction des revenus des nouveaux venus : des constructions en dur, des constructions précaires en terre battue avec des toits de paille, des constructions en bois avec des toits en tôle. L’enquête concernant l’habitation a été effectuée à partir des différents classements par motivation de l’échantillon. Le résultat de l’enquête a donné le tableau et la figure ci-après. Tableau n° 24:Types d’habitat de l’échantillon d’Ankadinondry Sakay, année 2014.

Types Construction Construction Construction Migrants en dur en terre battue en bois Location TOTAL Salariés Effectif 3 3 4 11 21 Pourcentage 14% 14% 19% 52% 100% Agriculteurs Effectif 13 6 4 3 26 Pourcentage 50% 23% 15% 12% 100% Commerçants Effectif 7 1 3 7 18 Pourcentage 39% 6% 17% 39% 100% Familiale Effectif 3 2 1 1 7 Pourcentage 43% 29% 14% 14% 100% Source : Enquête personnelle, Décembre 2014. Figure 07 : Types d’habitat de l’échantillon d’Ankadinondry Sakay, année 2014.

30 25 20 15 Construction en dur 10 Construction en terre battue 5 Construction en bois 0 Location

TOTAL

Effectif Effectif Effectif Effectif

Pourcentage Pourcentage Pourcentage Pourcentage Salariés AgriculteursCommerçants Familiale

Source : Enquête personnelle, Décembre 2014. 46

Les types d’habitat reflètent les revenus et les niveaux de vie des acteurs concernés. Ils sont aussi liés aux volontés de s’implanter définitivement ou temporairement. Ces volontés sont confirmées par les données du tableau et de la figure ci-dessus. Les agriculteurs (50%) et les commerçants (39%) sont concernés plus par les constructions en dur. Une partie des salariés (52%) à haute rémunération mensuelle choisit plutôt de louer et de construire en dur, tandis que l’autre partie beaucoup plus démunie s’oriente vers les habitats précaires en terre battue et en bois. Les salariés propriétaires des habitats en dur construisent pour échapper aux charges locatives, d’un côté, et pour donner une partie de leur maison en location, d’un autre. Les loyers servent à renflouer le revenu familial et à investir dans le domaine de l’agriculture généralement. Les migrants venant pour des regroupements familiaux s’intègrent immédiatement à leur famille d’origine. 43% d’entre eux logent dans des maisons en dur, 29% dans des maisons en terre battue. Ceux qui occupent des maisons en bois ont le même taux de 14% que ceux qui louent des logements. Quelle que soit la nature des logements occupés par les migrants, ils sont disséminés dans toute la ville et sont insérés dans les quartiers des anciens résidents sans distinction d’origine.

6.2 La vie quotidienne des migrants La vie quotidienne des migrants commence toujours par la régularisation de leur présence dans les milieux d’accueil.  Régularisation administrative Selon les formalités administratives, les nouveaux venus qui séjournent pour un temps déterminé ou indéterminé dans une localité doivent d’abord se munir d’un « Fifindra- monina » (10) et se présenter au bureau du Fokontany pour déclarer leur présence. La commune d’Ankadinondry Sakay est sujette de l’insécurité et à des attaques des « Dahalo » (11). En cas d’attaques ou de vols dans la commune et ses alentours, toute personne étrangère non déclarée au bureau des Fokontany est suspectée. A cet effet, le bureau de Fokontany tient un tableau qui enregistre les mouvements de la population sortante et entrante dans sa circonscription. Dans le Fokontany d’Ankadinondry II, ce tableau prend la forme suivante.

(10) Fifindra-monina : Passeport local délivré par le Fokontany d’Origine à présenter au Fokontany de destination. (11) Dahalo : Au début, ce mot est utilisé pour désigner particulièrement les voleurs de bœufs, plus tard il désigne les « bandits » au sens élargi. 47

Tableau n° 25 : Déplacement spatial du Fokontany Ankadinondry II, année 2014. Daty (Date) Niditra(Entrant) Nivoaka(Sortant) Niaviana(Origine) Toerana haleha (Destination) 03-janv-14 1 Analavory 22-janv-14 1 Itaosy Tanà 07-févr-14 1 Miarinarivo 31-mars-14 1 Imeritsiatosika 02-juin-14 1 Soavinandriana 27-juin-14 1 Mahasolo 07-juil-14 1 Analavory 12-sept-14 1 Antsirabe II 15-oct-14 1 Antananarivo 25-oct-14 1 Ankazondandy 06-déc-14 1 Morombe Source : Fokontany Ankadinondry II, Décembre 2014.

Dans le tableau des entrées et sorties des individus dans le Fokontany d’Ankadinondry II, 11 mouvements spatiaux ont été enregistrés dont 2 sorties et 9 entrées. Les sorties de la commune représentent 18% des mouvements spatiaux, tandis que les entrées dans la commune sont de l’ordre de 82%. Les régions de destination des 2 sorties sont Itasy et Analamanga. Quant aux 9 entrées, elles sont en provenance de 5 régions qui sont respectivement : Bongolava, Analamanga, Itasy, Vakin’Ankaratra, AtsimoAndrefana.

Figure 08 : Déplacement spatial du Fokontany Ankadinondry II.

12

10

8

6 Nombre Pourcentage 4

2

0 Niditra (Entrant) Nivoaka (Sortant) Total

Source : Enquête personnelle, Décembre 2014.

A partir de ce tableau, chaque fokontany peut identifier aisément les données exactes sur la population sortante et entrante : date d’arrivée ou de départ, lieu de destination ou d’origine. 48

Les sorties et les entrées doivent être justifiées par des « Fifindra-monina ». Les personnes désirant résider ou séjourner dans la commune mais ne possédant pas de « Fifindra-monina » ne peuvent être enregistrées au Fokontany et sont sujettes à des malveillances.

 Scolarisation des enfants Après cette étape commence la scolarisation des enfants. La prospection des écoles se fait en fonction des capacités financières de chaque famille et de la proximité des établissements scolaires. Les élèves issus des établissements publics doivent se munir des documents de transfert de leur établissement d’origine. Ils sont acceptés dans l’établissement d’accueil sous réserve de disponibilité de place. Le cas échéant, les parents doivent les scolariser dans des établissements privés qui sont couteux. Ce problème ne touche pas les élèves issus des écoles privées. Ils s’inscrivent facilement aux établissements d’accueil sous réserve de présentation des bulletins de notes de l’école précédente. La possibilité de scolarisation des enfants tient une place non négligeable dans les critères de migration de notre échantillon bien que ce critère n’ait jamais été explicite dans les réponses des migrants. La solarisation des enfants est souvent liée à l’appartenance cultuelle. Les familles chrétiennes souhaitent inscrire leurs enfants dans des écoles confessionnelles.

 Occupation professionnelle La principale occupation des migrants consiste à vaquer aux activités rémunératrices de revenu. Comme décrit auparavant, ces activités ont été classées en 3 catégories :- salariales - agricoles - commerciales. Pour les salariés, il s’agit d’honorer les clauses des contrats conclus avec les différents employeurs et commanditaires. Pour les éleveurs porcins, ils engraissent les porcs pendant 6 mois. Certains éleveurs achètent des provendes porcines instantanées en sac de 60 kg vendu par des sociétés de production agricole, d’autres pratiquent le mélange ou formule simple à partir des sons, des poudres de maïs et de manioc. A coté persiste encore une infime partie d’élevage traditionnel qui consiste à alimenter les porcs à partir des restes des nourritures quotidiennes collectées à chaque porte des voisins. A terme, les éleveurs vendent une partie des porcs aux bouchers locaux, mais la grande partie du parc porcin approvisionne la capitale (Antananarivo) et la ville de Tsiroanomandidy par le biais des collecteurs. Quant aux éleveurs bovins, certains se procurent des zébus pour faire de l’épargne et pour disposer d’un matériel agricole. Ils engraissent les bêtes tout en les utilisant aux champs. 49

D’autres disposent d’un parc (de cinquantaine à des centaines de têtes) réservé uniquement à l’engraissement en vue de commercialisation : « Dabok’andro » (12). Il n’y a pas de délai précis pour l’engraissement. Divers facteurs dictent la vente et l’autoconsommation des bovidés: - Les « Dabok’andro » qui sont en même temps signes extérieurs de richesses sont commercialisés en une seule fois, pour être renouvelés. - Les petits éleveurs de 2 à 4 têtes de bovidés se libèrent de leurs bétails qui ont servi pendant 2 à 3 ans, par crainte des « dahalo ».Les bœufs sont remplacés par des bêtes de plus petite taille. Les vaches sont rarement commercialisées. Elles servent de génitrices pour renflouer le parc. Leurs prix de vente sont d’ailleurs largement inférieurs à ceux des bœufs. - D’autres éleveurs vendent les zébus en fonction des nécessités évènementielles (opportunité d’acquisition de terres, exhumation,…) et certains les consomment en cas d’inhumation selon les rites funéraires. Quant aux cultivateurs, ils cultivent principalement du riz, les autres cultures viennent en accompagnement. Les rizières irriguées peuvent accueillir 2 cultures dans l’année, et les « tanety » accueillent la culture du riz pluvial une fois par an. En bref, ceux qui font les trois types de cultures, récoltent trois fois dans l’année et obtiennent trois fois plus de production. Durant l’année, les cultivateurs s’occupent à préparer les terres, à labourer et à fertiliser le sol, à faire du semis, à récolter, à nettoyer de nouveau pour les prochaines saisons et le cycle de production recommence. Après les moissons, les cultivateurs sèchent le riz, le mettent en sac et le gardent dans des greniers individuels ou le mettent en stockage dans des greniers communautaires villageois (G.C.V) tenus par des institutions financières de micro crédit (CECAM, MICROCRED,….) en guise de garanties et/ou de remboursement pour les crédits contractés ou à contracter, selon le cas. Outre l’autoconsommation, une partie de la récolte du riz est mise en vente. La commercialisation s’effectue selon différents cas : -Vente de paddy aux collecteurs qui font le tour des villages en camion et munis de balance de pesage et des pécules ; - Vente de riz blanc au « kapoka » (13) dans les fokontany ; - Vente de paddy et/ou riz blanc à l’échéance du stockage auprès des GCV. Ce circuit du produit rizicole est illustré par le schéma ci-après.

(12)Dabok’andro : signifie littéralement « se coucher au soleil » Les bœufs réservés au « dabok’andro » ne travaillent pas les champs. Ils sont gardés dans un parc le soir et le jour, ils sont envoyés en pâturage. (13)Kapoaka : unité de mesure utilisée pour le commerce en détail des produits agricoles (3,5 Kapoaka équivalent à 1 Kg de riz blanc), et sert de doseur pour l’usage ménager. 50

Schéma n° 01: Circuit du produit rizicole, année 2014.

Moisson Séchage et mis en sac Transport en charrette Grenier Individuel G.C.V

Commercialisation

Vente de Préparation pour la prochaine saison Vente locale paddy aux de riz blanc collecteurs enkapoaka Source: Enquête personnelle, Décembre 2014.

 Occupation cultuelle L’appartenance à un groupe confessionnel contribue à la facilité d’intégration sociale des migrants. L’activité cultuelle prend beaucoup de place dans les communautés villageoises. Presque chaque foyer est affilié à une religion chrétienne sans pour autant négliger les pratiques traditionnelles. Les populations migrantes adhèrent respectivement aux quatre formes de religion existant dans la commune, à savoir : le catholicisme, le protestantisme, l’Adventiste, le Luthérien. Au titre de ces différentes adhésions, des activités communautaires agricoles sont effectuées par les pratiquants au bénéfice des églises, outre les participations financières périodiques en dehors des quêtes hebdomadaires lors des séances de culte. Les participations financières servent à compléter le revenu des leaders confessionnels (prêtres, pasteurs, …) et le fonctionnement des églises. Très souvent, cette participation se résume à 01 « daba » (14) de paddy par ménage.

6.3 La relation interactionnelle La relation interactionnelle suppose les différents types de relations qui existent en fonction des types d’activités exercées par les populations au sein d’une communauté. Les relations que nous avons observées au niveau de notre échantillon relèvent particulièrement des relations socioculturelles et économiques.

(14) Daba : unité de mesure rurale utilisée pour les produits agricoles.

51

L’existence des infrastructures sportives, des édifices confessionnels, de la bibliothèque, des salles de spectacles et du « Kianja Hiragasy » ont contribué à l’intégration des migrants à la vie sociale et économique d’Ankadinondry Sakay. En effet, les personnes habitant les mêmes Fokontany, exerçant les mêmes activités sportives, pratiquant les mêmes religions, de même provenance, se tissent rapidement et spontanément des relations entre elles.

 Relations au niveau des Fokontany Dans leur Fokontany d’accueil, les migrants sont obligés de communiquer entre eux, avec leurs voisins et les anciens résidents pour des raisons de nécessité et des raisons pratiques de bon voisinage. Réciproquement, les anciens résidents entrent en relation avec eux. La communication qui commence souvent par les petits achats effectués aux épiciers, ouvre un espace d’échange entre les migrants et les anciens résidents du même Fokontany. D’autant plus que les règlements intérieurs qui gèrent chaque Fokontany et qui obligent les habitants à se réunir (information administratives, activités communautaires, …) et à cotiser pour des activités sociales (décès, …), engendrent une obligation de se côtoyer.

 Relations au niveau des infrastructures sportives et de lecture Selon l’âge, les tendances culturelles et les niveaux d’instruction, les migrants fréquentent les infrastructures de lecture, de sports et de loisirs. Les jeunes migrants jouent au foot, au volley et au basket tandis que les plus âgés s’y rendent en tant que spectateurs. C’est autour de ces activités sportives que les nouveaux venus lient des relations d’amitié avec les anciens résidents. Le flux de communication s’établit et se renforce encore plus autour des associations sportives auxquelles adhèrent les habitants épris de sport. Les relations occasionnées par la fréquentation de la bibliothèque sont beaucoup plus rares par rapport à celles créés aux endroits de divertissement et de loisir. Ce sont surtout les jeunes collégiens et lycéens et quelques adultes enseignants et/ou ayant un niveau minimum équivalent au BEPC qui fréquentent la bibliothèque. Néanmoins, c’est un endroit non négligeable qui est porteur d’intégration sociale des migrants.

 Relation au niveau des infrastructures de loisir Ankadinondry Sakay dispose d’une sale de spectacle et d’un « Kianja Hira Gasy ». Ces deux endroits attirent de nombreux individus lors des spectacles organisés dans la localité. Comme les spectacles n’ont lieu qu’occasionnellement pour les festivités (foire, fin d’année et nouvel an, ...) et que la population est en manque de loisirs, ces endroits sont toujours bondés de 52 spectateurs. Le sujet de communication tourne autour des spectacles. C’est de là que débutent certaines relations. Selon les résultats de nos enquêtes, la fréquentation de ces endroits dépend quand même du prix d’entrée affiché.

 Relation interprofessionnelle La profession est également un facteur important de communication noté par les migrants. Les personnes exerçant les mêmes professions se contactent facilement. Nous avons pris en observation les commerçants. Ils prennent presque les mêmes marges bénéficiaires sur les mêmes marchandises. Celui ou ceux qui affichent des prix plus élevés sont désertés par les acheteurs. Aussi étrange que cela puisse paraître, ils se communiquent des adresses des fournisseurs, de la fluctuation des prix sur le marché.

 Relation au niveau des origines territoriales Les origines communes créent une attirance et une alliance tacite au niveau des migrants. C’est ainsi que nous avons observé la présence d’une association des originaires de Fianarantsoa. Parmi les membres de cette association se trouvent les anciens migrants qui facilitent l’intégration des nouveaux venus. Une sorte d’entraide mutuelle et de solidarité est établie à l’intérieur de cette association. La cohésion sociale ainsi engendrée est surtout visible lors des évènements familiaux. Lors des décès ou mariage par exemple, les membres de l’association sont toujours présents pour aider la famille concernée dans les divers travaux de ménage ou d’aménagement. En cas d’intempéries qui dévastent les cultures d’un des membres, les formes d’entraide se présentent sous forme de soutien moral, d’appui en matériel qui va même jusqu’à des prêts financiers. C’est au sein d’une telle organisation qu’évolue l’intégration des migrants. Pour conclure, les causes de la migration sont liées aux réalités des migrants. Les motifs essentiels qui ont dicté la migration des acteurs d’Ankadinondry Sakay sont respectivement d’ordre salarial, agricole, commercial et familial. Au fil des temps, certains migrants ont trouvé des activités complémentaires, mais leurs activités principales restent les mêmes. Quant aux réalités des migrants, aucun aménagement particulier n’a été réalisé. Les habitats de ces derniers s’insèrent au milieu des résidences habituelles de la population. L’intégration des migrants dans la société d’accueil est relativement facilitée par leur adhésion aux diverses activités sportives, culturelles, sociales, économiques. Ankadinondry Sakay n’a pas été cependant la destination initiale de tous les migrants. Certains d’entre eux ont déjà effectué d’autres parcours, espérant y trouver leurs objectifs. Ces 53 parcours constituent le circuit migratoire qui commence par les zones de départ, qui passe par les zones intermédiaires et qui se termine par les zones d’arrivée. Les zones de départ sont souvent désertées à cause de leur stérilité par rapport aux activités escomptées. Les zones intermédiaires qui ont servi particulièrement d’observation se situent aux environs d’Ankadinondry Sakay. Quant aux zones d’arrivée, elles offrent des caractéristiques favorables pour la réalisation des activités prévues, comme les aspects climatiques, géographiques et économiques. L’observation de telles réalités nous conduit à faire une analyse sociologique de la migration au niveau d’Ankadinondry Sakay. Quel est l’apport de la migration dans le milieu d’accueil ? Les migrants qui choisissent de s’implanter définitivement se réservent-ils encore le droit et l’obligation d’entrer en relation avec leurs zones de départ ? Ces questionnements nous emmène à faire une analyse globale de la migration et à formuler notre suggestion.

PARTIE III :

ANALYSE SOCIOLOGIQUE DE LA MIGRATION

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ANALYSE SOCIOLOGIQUE DE LA MIGRATION La phase analytique de notre travail figure dans cette partie. Elle est basée sur deux éléments essentiels observés dans le milieu d’accueil : - le volet économique, le volet social et le volet culturel - le circuit relationnel avec le milieu d’origine. L’analyse des faits nous oriente dans notre suggestion et prospective de la migration à Ankadinondry Sakay et dans la région Bongolava. Comme le microcosme reflète toujours le macrocosme, l’étude de la migration dans ces zones nous donne un aperçu du déplacement spatial en général.

Chapitre VII : VOLETS ECONOMIQUE, SOCIAL, CULTUREL DANS LA ZONE D’ARRIVEE L’introduction d’un nouvel élément dans la vie sociale de la communauté est toujours porteuse de changement. Notre analyse porte alors sur les changements apportés par les migrants du point de vue économique, environnemental, et psychosociologique.

7.1 Dynamique économique de la migration Les typologies de migration observées répondent à deux critères fondamentaux : l’un est répulsif et l’autre est attractif. La répulsion se rattache au milieu de départ qui oblige d’une manière ou d’une autre à prospecter des issues et/ou des échappatoires par rapport à une indisposition, tandis que le caractère attractif est lié au milieu d’accueil qui reflète l’espoir d’une vie meilleure. Les migrants ont des obligations de réussite par rapport à leur vie précédente. Dans le but de réussir socialement et économiquement, ils ne s’accordent plus de répits et cherchent tous les moyens les plus rapides de s’enrichir dans leurs métiers, contrairement aux résidents qui se complaisent dans leur situation quotidienne. Pour les agriculteurs, par exemple, ils n’omettent pas une seule saison de culture de riz et à chaque saison ils utilisent tous les moyens qui leur sont possibles afin d’avoir le meilleur rendement (engrais, semences, matériels agricoles). Ils adoptent des cultures variées (maïs, manioc, patate douce, …). Leur mode de production leur permet d’avoir une autosuffisance alimentaire et de bénéficier en même temps des surplus de production destinés à la commercialisation. Les marges bénéficiaires réalisées sont destinées à l’extension des champs par l’acquisition de nouvelles terres. Le renouvellement d’un tel cycle leur permet au fil des temps de multiplier leurs activités. Les migrants cultivateurs sont devenus à la fois éleveurs et commerçants. Leur niveau de vie se trouve amélioré et ils tiennent une place notoire dans le milieu d’accueil. 55

Si l’on prend le domaine de l’élevage, les migrants qui sont venus pour échapper à une pauvreté certaine dans leur territoire d’origine ont pour objectif principal d’avoir une place notoire dans le milieu d’accueil. Pour cela, ils ont une visée plus large du marché. L’élevage porcine est destiné à la fois à approvisionner le marché local de boucherie et surtout à ravitailler les grandes villes comme Antananarivo et Tsiroanomandidy, tandis que les bovidés sont acheminés vers Antananarivo. Tout en gardant leurs activités, certains éleveurs se procurent des camions et deviennent en même temps des collecteurs. Les commerçants quant à eux assurent l’écoulement des produits agricoles. Ces derniers ne prospectent également des débouchés auprès des grossistes de la capitale avec des prix compétitifs. Ce qui justifie la prospérité de l’agriculture à Ankadinondry Sakay. Quant aux salariés qui sont contraints de rejoindre Ankadinondry Sakay pour des affectations professionnelles, ils finissent par s’y complaire. En effet, ils économisent en matière de déplacement, de location d’habitat, et bien d’autres. Le déplacement n’occasionne pas des frais de transport et les loyers sont largement inférieurs à ceux des grandes villes. Les épargnes qu’ils ont pu constituer sont investies, soit dans des épiceries tenues par leurs conjointes, soit dans l’agriculture. L’ascension sociale et économique des migrants est prise en exemple par les résidents. Ankadinondry Sakay se trouve alors plus développé et plus prospère sur le plan économique.

7.2 Conséquence environnementale de la migration Dans le cadre du développement économique, nous avons pu observer des changements positifs apportés par la migration bien qu’aucune politique claire d’accueil n’ait été formulée à cet endroit. Et qu’en est-il des questions environnementales ? La migration est source de changement dans les lieux où elle s’effectue. Ces changements peuvent être négatifs comme ils peuvent aussi être positifs. Ils opèrent dans les deux sens : - changement environnemental dû à la migration - conséquence de l’environnement sur les migrants.  changement environnemental dû à la migration La structure rurale de la commune et la vaste étendue des terrains dont elle dispose lui évite pour le moment des problèmes environnementaux. Les migrants s’intègrent parmi des résidents sans difficultés. L’aisance de l’intégration est due à l’arrivée presque inaperçue des migrants. Leur arrivée en petit nombre est échelonnée dans le temps. Par contre au niveau des champs, des changements marquants ont été constatés. Les terres non exploitées auparavant et ayant appartenu aux Réunionnais le sont actuellement. Une partie de ces terres n’est pas 56 encore régularisée. De ce côté, la migration a quand même entraîné des problèmes fonciers latents qui risquent d’exploser au fil des temps avec l’arrivée d’autres migrants. Par ailleurs, la croissance démographique provoquée par la migration entraîne inévitablement des besoins incessamment croissant d’espaces et de ressources telles l’eau et l’énergie (bois de chauffage). - L’eau devient particulièrement une source de dissidence au niveau de la population. L’accès à l’eau potable pour toute la population n’est plus assuré. Quant à l’eau d’irrigation, elle n’arrive plus à suivre l’augmentation des superficies cultivées et engendre des conflits de répartition entre les cultivateurs voisins. Certains profitent de la nuit pour boucher les canaux qui mènent vers les autres afin de mieux irriguer leurs terres. - Le besoin croissant en bois de chauffage entraîne la déforestation et engendre la stérilité du sol. L’érosion du sol et la disparition des forêts réduisent la capacité des sols à retenir l’eau et entraînent la disparition des couches qui renferment les matières organiques. Une telle dégradation du sol traduit une baisse de rendement agricole à long et/ou moyen terme. Le besoin incessant d’espaces pour l’extension agricole se heurte à ces problèmes de ressources et à terme, une restriction des allocations foncières s’avère nécessaire. Le problème environnemental d’Ankadinondry Sakay et de la région Bongolava n’a pas encore atteint un niveau crucial mais il est encore temps pour les dirigeants d’y prêter attention et pour la population d’en prendre conscience. Par ailleurs, dans le cadre du concept « Kaizen » (15) et pour éviter la déforestation, Ankadinondry Sakay a déjà bénéficié d’une aide japonaise afin de sensibiliser la population à utiliser des « fatana mitsitsy ».

 Conséquence de l’environnement sur les migrants Le climat et la structure géographique des zones de départ ont été à l’origine de certains cas de déplacement spatial. Leur présence même dans ce milieu traduit l’adéquation de l’environnement à leurs motivations de migration. Pour les migrants, les conséquences environnementales ne peuvent être que favorables. Le choix d’implantation à Ankadinondry Sakay est justifié par l’effet positif des conditions environnementales sur leurs activités.

(15) kaizen : C’est un concept japonais qui a pour objectif d’améliorer les conditions de vie des paysans. A la suite des expériences vécus au Japon, il a été appliqué à AnkadinondrySakay dans le cadre du développement rural. Ce concept a été véhiculé par des sensibilisations qui ont duré deux ans. Les sensibilisations ont été axées sur la formation de la technique du SRI et la protection de l’environnement par le biais de la vulgarisation du « fatana mitsitsy ». 57

Toutefois, la croissance démographique du milieu d’accueil risque d’engendrer des effets pervers sur l’environnement. Tout changement environnemental entraînerait des bouleversements dans les modes de production. En résumé, aucun déplacement massif n’a eu lieu à Ankadinondry Sakay après les Réunionnais. Ce qui justifie l’absence des problèmes cruciaux liés à la migration. Les éventuelles complications environnementales proviendraient de l’urbanisation dont les aménagements devraient être prévus et mis en place dès maintenant. Les conséquences environnementales de la migration à Ankadinondry Sakay sont d’ordre démographique. En effet, le flux migratoire est un des facteurs d’accroissement de la population et des mesures d’accompagnement devraient être mises en études pour accueillir la croissance démographique ainsi engendrée. La réalisation des barrages d’irrigation par exemple, devrait être envisagée afin de maîtriser l’eau face aux extensions agricoles. L’accès à l’eau potable devrait suivre l’accroissement de la population et avoir également une place prépondérante dans les futurs aménagements. Pour prévoir la future urbanisation, la mise en place des réseaux d’assainissement s’avère nécessaire avant l’agglomération du milieu. Ces divers aménagements anticipés éviteraient par la suite des problèmes sociaux causés par des destructions éventuelles des maisons ou d’autres infrastructures. Les migrations en groupes des sans-abris d’Antananarivo s’effectuaient dans la commune rurale de Maroharona (16) mais non à Ankadinondry Sakay. Elles ont été organisées par l’ASA(17) et appuyées par l’administration publique dans la mesure où elles contribuent à réduire la pauvreté et à insérer socialement les familles de rue.

7.3 Effets psychosociologiques de la migration D’après certains psychologues, l’instinct migratoire est inné chez l’homme. Selon Raymond. D. (1941), cet instinct s’est transformé en manie chez les Malgaches. Pour notre part, il convient de mettre en exergue les liens entre les causes et les effets du déplacement spatial pour mieux expliciter les effets psychosociologiques de la migration tant au niveau des migrants qu’au niveau des résidents du milieu d’accueil.

(16)Maroharona : C’est une commune rurale, située au Sud d’Ankadinondry Sakay. (17) ASA: « Ankohonana Sahirana Arenina » signifie littéralement « foyer en difficulté à réhabiliter ». Elle a été créée en 1991 et a pour objectif la réinsertion des familles sans abris d’Antananarivo. Pour cela, elle a pu bénéficier d’une attribution gratuite de terrain d’une grande envergure. L’ASA a réalisé une migration des sans- abris d’Antananarivo vers le Moyen-Ouest de Madagascar. Elle régularise leur situation administrative tout en mettant gratuitement des terrains à leur disposition pour leurs activités. 58

Les impacts de la migration concernent en même temps les migrants et les résidents de la zone d’arrivée.

 Effets sur les résidents A partir de leur arrivée jusqu’à leur intégration, les migrants sont qualifiés de « mpihavy »(18). C’est une terminologie qui a une connotation ségrégationniste. Les résidents d’Ankadinondry Sakay ne considèrent donc pas les nouveaux venus comme des leurs. Chaque mouvement de ces derniers est alors scruté dans un but de critique et parfois même de malveillance. Ils sont sujets à des méfiances. Cette attitude méfiante est dictée par l’insécurité qui règne dans le milieu à cause des « dahalo ». Toute personne étrangère éveille la curiosité et les doutes. Les migrants sont mis en observation par les résidents pendant une certaine période. Durant cette période ils observent le comportement des nouveaux venus et essaient de connaitre les motifs qui les ont animés à venir à Ankadinondry Sakay tout en exhibant leur méfiance et leur antipathie. C’est une attitude manifeste qui est dictée par un sentiment d’exclusion et d’appropriation du lieu de la part des résidents et qui dénote une certaine domination à l’endroit des migrants. Elle vise à créer des malaises qui pousseraient les migrants à quitter les lieux. L’arrivée des migrants sert souvent d’alibi aux malfaiteurs du milieu. Ces derniers profitent de la présence récente des migrants pour agir et ils accusent les nouveaux venus d’être les auteurs des actes de banditisme qu’ils ont réalisés. Les résidents, quant à eux, animés d’un sentiment d’animosité envers les nouveaux arrivants appuient les malfaiteurs dans leur accusation et redoublent de méfiance et de vigilance envers les migrants. Dans des cas pareils, les migrants sont accusés d’être des fauteurs de troubles. Les accusations sont souvent liées aux ouïes dires mal fondées mais qui arrangent les résidents. Tout élément nouveau est d’ailleurs porteur de trouble dans la société où il s’insère. C’est un trouble passager jusqu’à l’acceptation ou le refus catégorique du nouvel élément. Pour le cas des migrants, ce trouble est l’équivalent de la période d’observation des résidents à leur encontre. Il cesse momentanément dès qu’ils sont intégrés dans la vie sociale du milieu. Mais lors des cérémonies mortuaires et matrimoniales au cours desquels les migrants pratiquent leurs us et coutumes d’origine, ils attirent à nouveau la curiosité des résidents.

(18) Mpihavy : Nouveaux venus. 59

 Effets sur les migrants Les effets psychosociologiques des migrants sont liés à ceux des résidents et aux motifs qui les ont poussés à quitter leur territoire d’origine. Ils s’accordent aussi des périodes d’observation avant l’implantation. Cette période leur permet de juger la possibilité de réalisation des activités qu’ils ont prévues en fonction des opportunités climatiques, géographiques et sociales. Très souvent les migrants sont informés au préalable des caractéristiques climatiques et géographiques, tandis que le comportement social des résidents leur est méconnu. C’est à partir de leur arrivée sur place seulement qu’ils peuvent en prendre connaissance. La période d’observation leur permet alors de juger s’il leur est possible de rester dans le milieu ou non. Les sentiments d’hostilité des résidents envers eux sont ressentis par les migrants. Ils se sentent comme des intrus et prennent également conscience des accusations mal fondées portées sur eux, ainsi que les méfiances non justifiées des résidents. Comme les accusations ne sont pas généralement formelles mais basées sur des ouïes dires, les migrants adoptent deux attitudes : l’indifférence et l’effort de se justifier. L’indifférence les conduit à vaquer à leurs activités sans tenir compte des commérages qui se passent derrière leur dos. Durant ce temps, les résidents ne cessent de les observer et quand ils se rendent compte que la présence de ces migrants ne porte pas atteinte à leurs intérêts, ils diluent eux-mêmes leur hostilité. L’indifférence présente quand même un effet pervers à l’endroit des migrants. Les résidents considèrent cette attitude comme une suffisance à l’endroit de la population du milieu. Ce qui risque encore d’aggraver la situation sociale des migrants qui se sentiront en conséquence de plus en plus isolés. Cette position d’isolement n’est levée que lorsque des résidents entrent en communication avec eux et se rendent compte de l’erreur de jugement portée sur eux. En adoptant l’indifférence, les migrants choisissent alors de justifier par le mutisme leur innocence face aux accusations malveillantes. Pour le cas de ceux qui font des efforts de se justifier, ils essaient d’entrer en contact avec plus de résidents possible. La communication leur permet d’informer ainsi les gens des motivations qui les animent en se rendant à Ankadinondry Sakay. Compte tenu du caractère rural du milieu, les informations circulent rapidement de bouche à oreille. Ceux qui n’y trouvent pas d’inconvénient commencent à les accepter, tandis que ceux qui sentent leurs intérêts menacés continuent de les harceler par des propos et des actes malveillants.

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Schéma n° 02: Formes psychosociologiques véhiculées par la migration.

Zones de AMBITION Zones FRUSTRATION A départ Intermédiaire M F R B I U S T I T R O N A T I INTEGRATION INTRUSION Zones d’Arrivée O N HOSTILITE Source: Enquête personnelle, Décembre 2014. Les tendances psychosociologiques de la migration ont été aussi soulignées par Robert E. Park (1864-1944) dans un exemple de l’école de Chicago: « La théorie du cycle des relations interethniques » Il a mis en exergue les étapes obligées par lesquelles doivent passer tous les migrants pour accéder à l’intégration au sein des milieux d’accueil. Ces étapes constituent un cycle invariable et inaltérable qui est indépendant des volontés des migrants, des résidents et du pouvoir public du milieu d’accueil. Ce cycle traduit l’évolution naturelle de la migration qui conduit à l’intégration des migrants. Selon Robert E. Park, ce cycle est composé de quatre grandes étapes dont : – la compétition – le conflit – l’accommodation – l’assimilation.  La compétition L’arrivée des nouveaux migrants entraîne une compétition entre ceux-ci et les anciens occupants. Divers mobiles peuvent motiver la compétition mais elle est basée essentiellement sur des facteurs économiques : compétition pour le travail, pour la reconnaissance sociale, pour le statut, la disposition des ressources disponibles. Sans entrer en communication et en contact direct ou indirect, les deux groupes entrent en compétition. La compétition relève alors d’un processus inconscient qui débouche sur le conflit.  Le conflit Le conflit, quant à lui est déclaré ouvertement et consciemment. Il est le reflet de la dynamique du groupe et résulte des différences entre les groupes existantes. Il structure les relations entre ces groupes et développe des structures de solidarité. Le conflit dépasse la compétition car il permet au groupe dominé d’organiser une réaction. Le conflit est par conséquent positif. C’est par le biais de ce conflit que les groupes de migrants affirment leur présence qui leur permettra par la suite d’accéder à la vie politique et sociale du milieu d’accueil. C’est à ce niveau qu’apparaît un dispositif de sortie conflictuelle. 61

 L’accommodation L’accommodation est un dispositif qui permet aux uns et aux autres de s’adapter et de s’ajuster aux nouvelles conditions ayant déclenché le conflit. C’est une étape fragile et instable car rien n’est encore résolu à ce stade. L’accommodation peut déboucher sur un nouveau conflit ou sur l’assimilation. L’accommodation conduit toutefois vers une organisation sociale  L’assimilation A partir de sa théorie des relations entre groupes sociaux dans «Introduction à la science de la sociologie», Park (1921) boucle le cycle psychosociologique de la migration par l’assimilation. D’après lui, la dernière étape du processus de migration est l’assimilation des migrants dans la société d’accueil. Cette assimilation est le résultat d’un compromis culturel. L’assimilation ne traduit pas une conversion à la culture du groupe dominant. Elle est le signe d’un compromis culturel. Ce compromis permet aux migrants de conserver leur culture en y apportant des modifications et de participer en même temps à la culture de la société d’accueil. L’assimilation suppose un processus d’interaction qui donne une ouverture sur une vie culturelle commune et un partage d’un univers commun. Les migrants et les résidents sont plus ou moins condamnés à vivre ensemble. Même si un compromis a été trouvé entre les deux camps, les uns et les autres doivent s’y habituer et un apprentissage progressif s’impose. De ce fait, l’assimilation s’effectue progressivement à long terme. Le schéma du cycle psychosociologique de migration de Park (1921) prend la forme suivante.

Schéma n° 03: Cycle de migration par Robert E. Park (1921).

COMPETITION CONFLIT ACCOMMODATION

ASSIMILATION

Source: Robert E. Park «Introduction à la science de la sociologie » (1921).

En conclusion, les migrants et les résidents se trouvent souvent devant une confrontation d’intérêts sociaux, culturels et économiques. Les attitudes psychosociales sont d’ailleurs dictées par des intérêts cachés. Les caractères hostiles et malveillants des résidents sont justifiés par la crainte d’une perturbation quelconque apportée par les migrants. L’arrivée des migrants engendre une inquiétude plus ou moins latente de la population résidente. 62

Toutefois, une grande partie de cette population a commencé par cette étape de migration et une certaine compréhension finit par s’établir. Quant aux migrants, qui se placent en tant que victimes face à l’hostilité des résidents, ils doivent être munis d’endurance et de persévérance car leur intégration en dépend. Le sentiment de frustration qui anime les migrants n’est pas seulement le résultat des attitudes hostiles des résidents. Ils ont quitté leur territoire d’origine avec ce même sentiment. Il leur faut donc dépasser cette étape de frustration par le biais de leur réussite. Aucune réussite n’est pourtant pas possible sans l’acceptation de la population d’accueil. Ils s’apprêtent déjà à subir les hostilités temporaires des résidents. C’est une étape à franchir pour accéder à l’intégration et parvenir à une acceptation réciproque avec les résidents qui débouche sur des mesures de compromis.

Chapitre VIII : CIRCUIT RELATIONNEL AVEC LA ZONE DE DEPART En quittant leur territoire d’origine, les migrants y ont laissé des familles et certains biens qui n’ont pas pu être transportés comme des patrimoines. Ces patrimoines peuvent revêtir la forme de parcelles ou lopins de terre, des maisons ou cases d’habitation, des caveaux familiaux…. Le résultat de notre enquête nous a conduits à étudier les relations que les migrants entretiennent avec leur milieu de départ. La migration les a-t-elle coupés totalement de leur origine ? Si oui, quelles en sont les raisons et sinon, comment s’effectue leur relation avec la zone de départ.

8.1 Fréquentation de la zone de départ des migrants. Les motifs de la migration expliquent généralement les liens qui lient les migrants à leur passé, c'est-à-dire à leur territoire d’origine. Les relations que les migrants entretiennent avec ce passé diffèrent selon les motifs (économique, familial, …) et les formes de leur migration (temporaires, définitives, …). Les migrants qui se sont déplacés pour des motifs économiques, par exemple, sont animés par le désir d’accumuler plus d’argent et de biens matériels possibles. Parmi eux se trouvent les migrants temporaires et les migrants définitifs.

 Les migrants temporaires Comme ce nom l’indique, les migrants temporaires ne restent pas définitivement dans le lieu de migration mais retournent chez eux après une période déterminée. Parmi ces migrants se trouvent les travailleurs saisonniers et les employés de bureau. 63

Les travailleurs saisonniers débarquent pendant les saisons de culture et de moisson. Ils logent dans des habitations précaires, dépensent le moins possible en nourriture et réservent la grande partie de leurs salaires en épargne. Leur objectif est de ramener de l’argent auprès de leurs familles respectives. Les lieux de résidence des travailleurs saisonniers sont donc leurs territoires d’origine. Pour eux, le lieu de travail peut changer selon les opportunités qui se présentent. Pendant une saison, ils travaillent à Ankadinondry et les saisons suivantes, ils exercent leurs fonctions dans les communes environnantes. Quant aux salariés de bureau ils habitent à Ankadinondry Sakay par obligation et déménagent souvent avec leurs proches. A leur arrivée, ils bénéficient de logement qui est mis à leur disposition par l’employeur, sinon, ils louent des locaux aux résidents. Certains de ces migrants ne proviennent pas directement de leur territoire d’origine. Ils ont déjà effectué des périples d’affectation. La fréquentation des territoires d’origine dépend de l’habitude de chacun. Les nouveaux venus ont encore la nostalgie du milieu d’origine et se déplacent périodiquement vers ces milieux pendant les périodes des vacances de leurs enfants. Pour les migrants temporaires, la fréquentation des zones de départ sont d’usage et une partie du budget familial est réservée pour les déplacements y afférents. Les déplacements sont toutefois limités en fonction du revenu familial. Les morts doivent être enterrés dans le territoire d’origine ou « Tanindrazana»(19). Malgré les déplacements coûteux, ils éprouvent toujours l’obligation de les faire même en s’endettant. La migration temporaire est souvent une étape vers la migration définitive.

 Les migrants définitifs Parmi les types de migrants définitifs, on rencontre les migrants récents avec un choix délibéré de s’implanter définitivement et les anciens migrants qui sont devenus des résidents. La situation des migrants récents est un peu mitigée par rapport aux migrants temporaires et aux anciens migrants. Les migrants récents ne sont plus considérés comme des « mpihavy » (étrangers) après une certaine période passée dans le milieu d’accueil. Ils ne s’apparentent pas pour autant aux originaires du milieu d’accueil. Ils éprouvent encore le besoin de s’identifier à leurs zones d’origine et se sentent obligés de se référer à ces zones. Les zones de départ revêtent des caractères identitaires pour eux. Les cérémonies de mariages par exemple sont célébrées dans les zones de départ.

(19) Tanindrazana : Pays natal .Pour les Malgaches, ce terme désigne aussi l’endroit où sont enterrés les ancêtres. 64

Les jeunes hommes et les jeunes filles accompagnent souvent les parents dans leur déplacement vers les territoires d’origine. Les déplacements en famille sont coûteux mais l’objectif de trouver un mari ou une femme de même origine pour ses enfants justifie les dépenses onéreuses. Quant aux anciens migrants qui sont devenus des résidents du milieu, la fréquentation des zones se réduit au fur et à mesure de leur ancienneté dans le milieu d’accueil. Cette fréquentation se fait en fonction de l’aisance et de la sécurité économique procurées par le milieu. Les différentes étapes plus ou moins difficiles de migration par lesquelles ils sont passés sont enfouies dans leurs souvenirs lointains pour donner place à des nouvelles visions. De nouvelles préoccupations viennent remplacer la volonté de s’identifier et de s’apparenter à leurs territoires d’origine. Ils redoublent d’efforts pour accroître les conforts matériels qu’ils ont acquis par l’acquisition des terres, l’extension des leurs activités, la construction des maisons en dur et de plus en plus modernes. L’intégration ne pose plus de problèmes, car elle est déjà acquise. Ils ne se considèrent plus et ne sont plus considérés comme des « Valovotaka » (20). Certains d’entre eux se sont même appropriés des us et coutumes du milieu et se sentent comme des « Zanatany » (21). A un tel point d’intégration, le sentiment d’identité aux milieux d’origines s’efface pour donner lieu à une volonté d’enracinement dans le milieu d’accueil. Certains construisent même des caveaux familiaux à Ankadinondry Sakay et n’envisagent plus d’enterrer leurs morts aux zones de départ. A ce stade d’enracinement, la fréquentation des territoires d’origine se présente comme une obligation et une contrainte par rapport aux familles qui y résident encore. Leurs déplacements dans ces milieux ne sont plus dictés que par des invitations festives (mariages, exhumations, …) ou des cérémonies funèbres de leurs familles. Par ailleurs, d’autres « Valovotaka » à forte identité territoriale ne se considèrent pas comme des originaires du milieu d’accueil malgré la longue période de leur résidence et de leur intégration sociale à Ankadinondry Sakay, Ils gardent leurs identités culturelles. En ce sens, ils ont un point commun avec les nouveaux migrants. Comme eux, ils éprouvent le besoin de fréquenter périodiquement les territoires d’origine afin d’entretenir des relations permanentes envers leurs familles et les ressortissants de ces zones. Quelle que soit la nature de fréquentation de la zone de départ par les migrants, elle est toujours déclenchée par des intérêts manifestes ou cachés.

(20) Valovotaka : des migrants qui ont résidé le milieu d’accueil pendant une longue période. (21) Zanatany : originaires d’un milieu donné. 65

8.2 Intérêts relationnels entre zone de départ et zone d’arrivée des migrants. La migration est souvent un facteur d’équilibre entre les zones de départ et les zones d’arrivé. Elle apporte un équilibre social, démographique, foncier, économique. Cet équilibre prouve l’interaction des intérêts qui existent au niveau des deux zones et qui sont véhiculés par les migrants.

 Intérêt social L’intégration des migrants dans les zones d’arrivée entraîne un mixage culturel entre les différents groupes en présence et attenue les divers clivages qui ont été à l’origine de certains conflits entre les groupes. Quant aux zones de départ, les migrants n’ont jamais été coupés définitivement de ces zones. Ceux qui ont des moyens suffisants et/ou ceux qui habitent dans des endroits rapprochés se déplacent périodiquement. D’autres moins nantis et/ou situés à des endroits très éloignés, se contentent de se communiquer par téléphone, par courrier électronique, par lettre envoyée au taxi-brousse ou par des personnes se rendant dans les lieux. Les migrants qui proviennent des régions environnantes rendent des visites fréquentes à leurs milieux d’origine. Ceux qui proviennent des régions éloignés comme Antsiranana par exemple limitent la fréquence de leurs visites au milieu d’accueil en fonction du budget familial. Bref, les migrants n’ont jamais perdu de vue leurs milieux d’origine et ils entretiennent des relations permanentes avec les membres de la famille restés dans ces endroits. Des motivations sociales renforcent les relations des migrants avec leurs zones de départ. Toutes les formes des relations entretenues ont pour but de maintenir les liens de parenté et d’amitié afin de faciliter l’accès à ces endroits. En effet, les migrants doivent revenir dans ces zones de départ à des moments cruciaux de leur vie : - les caveaux familiaux se trouvent dans les territoires d’origine. En cas de décès de leurs proches, les migrants les enterrent dans ces caveaux; - en cas de décès des membres de famille qui restent dans les territoires d’origine, les migrants effectuent des voyages pour assister aux cérémonies funéraires et à l’enterrement dans la mesure de leur possibilité. Sinon, ils envoient des « solon- drambon-damba » (22) ;

(22)Solon-drambon-damba : les morts sont enveloppés dans des linceuls avant d’être enterrés. Selon les us et coutumes malgaches, la présentation de condoléance est accompagnée d’enveloppe renfermant une somme d’argent qui symbolise le linceul. 66

- les migrants se déplacent dans les territoires d’origine afin de recevoir la bénédiction des aïeux en vue des grands évènements comme le mariage, le déplacement à l’étranger pour faire des études ou travailler, … - les exhumations qui se passent aux territoires d’origine regroupent tous les membres de la famille et les migrants s’y rendent. Dans le but d’être bien accueillis lors de ces divers évènements, les migrants font des visites anticipées. Les fréquentations et les communications entre les membres de famille se trouvant dans les deux zones renforcent les liens de parenté entre eux. D’où l’adage malgache « Izay mahavangivangy tian-kavana » (23).

 Intérêt démographique et foncier La démographie et le foncier sont liés étroitement et ils figurent parmi les principaux facteurs de migration. Dans ces domaines, la migration apparaît comme un élément régulateur. Elle établit l’équilibre entre les zones de départ et les zones d’arrivée. D’un côté, l’exiguïté des terres, la stérilité du sol, et le manque d’espaces vitaux des zones de départ sont à l’origine de la majorité des cas de migration de notre échantillon. D’un autre côté, la zone d’accueil est choisie pour la fertilité de son sol, la vaste étendue de ses terres disponibles. Dans ce sens la migration évite la surpopulation ou l’accroissement démesuré de la population dans les zones de départ et transfère cet accroissement dans un endroit où la densité démographique est encore minime. Nous avons constaté en effet que les 63,9% des migrants proviennent d’Antananarivo/Antsirabe. Ce sont des endroits à forte croissance démographique. Si ces endroits conservent leurs populations, ils connaitront des explosions démographiques qu’ils n’arriveront plus à maîtriser par la suite. Les explosions démographiques donnent lieu à des désordres sociaux dont entre autres : - l’insécurité provoquée par la délinquance, les vols, les criminalités, … - l’insuffisance du réseau d’évacuations des eaux usées ; - la déficience du réseau d’approvisionnement d’eau potable ; - la carence au niveau du réseau de distribution des énergies (JIRAMA). La migration (émigration) est une aubaine pour ces milieux à forte croissance démographique car non seulement, elle enlève un poids démographique mais permet d’éviter toutes les conséquences néfastes qui l’accompagnent.

(23) Izay mahavangivangy tian-kavana : Ceux qui rendent visitent fréquemment à leurs familles sont chéris de celles-ci. 67

Dans le domaine foncier, l’acquisition et/ou l’extension des terres cultivables s’avèrent complètement difficiles. Les terres disponibles n’existent pratiquement plus. Ce qui entraîne une exploitation maximale des terres et une détérioration des sols qui aboutissent à l’inadéquation des rendements obtenus par rapport aux efforts fournis. Par ailleurs, les activités rurales se heurtent à l’urbanisation avancée de ces zones. Les villes s’étendent incessamment et absorbent même les périphéries. L’agriculture et l’élevage perdent progressivement leur place dans ces endroits. Les terres antérieurement cultivables ne le sont plus et elles donnent lieu à des constructions des maisons ou du building qui ne cessent de se multiplier. Toutefois l’accueil des migrants engendre aussi un problème foncier à Ankadinondry Sakay. Le problème n’est pas dû à l’acquisition des terres mais à leur régularisation administrative qui reste encore dans le flou.

 Intérêt économique La migration crée des flux monétaires entre les zones de départ et les zones d’arrivée. Certains migrants, surtout les migrants définitifs possèdent encore des patrimoines comme des lopins de terre et/ou des maisons qu’ils ont laissés dans leurs territoires d’origine. Compte tenu de l’intérêt vital des terres dans ces endroits, les migrants donnent en location les maisons tandis qu’ils font cultiver les terres par des tiers ou des membres de la famille et reçoivent en contrepartie une partie de la production en nature ou bien l’équivalent en numéraire de cette production. Si les flux monétaires entre les deux zones sont parfois sporadiques dans le cas des migrants définitifs, ils sont visiblement marquants pour le cas des migrants temporaires. Les migrants temporaires quittent leurs territoires d’origine pour chercher uniquement de l’argent. Les zones d’accueil jouent le rôle de bailleur de fonds et de partenaires financiers. La partie essentielle du revenu de ces types de migrants proviennent des zones d’arrivée. Ils retournent par la suite chez eux (dans le territoire d’origine) pour réaliser leurs activités.

8.3 Conséquences de la migration dans les zones de départ. La migration ne coupe pas totalement les liens qui lient les migrants à leurs zones de départ. Des efforts de rapprochement se font de part et d’autre. L’intensité des efforts est différente en fonction des besoins des uns et des autres. Dans le cas des migrants d’Ankadinondry Sakay, les expressions des volontés de rapprochement sont plus ou moins les mêmes chez les familles restées dans les zones de départ que chez les migrants. Les migrants qui ont des 68 statuts économiques et sociaux notoires financent parfois les déplacements des membres de leurs familles d’origine, soit à l’occasion des vacances scolaires, soit à l’occasion des festivités familiales (première communion, baptême, ..). Les élans de rapprochement sont également déclenchés par des besoins financiers.

 Conséquences sociales Les visites réciproques qui se font entre les migrants et les familles d’origine renforcent les liens entre les deux. Elles permettent de connaître l’évolution des situations sociales et économiques de chacun. Généralement, les migrants sont bien lotis socialement et financièrement par rapport aux familles restés aux territoires d’origine. La venue des migrants dans les villages d’origine constitue en elle-même un évènement local. Elle occasionne des festoiements aux frais des migrants. Des bœufs ou des porcs sont abattus à ces occasions. C’est lors de leurs séjours dans les milieux d’origine que la population locale leur prête des attentions particulières car ils reflètent l’opulence et le bien-être qu’ils n’ont pas eus en quittant les lieux. Les modes de vie des migrants durant les courts séjours (habillement, alimentation, …) dans ces lieux sont évaluées par la population locale. Ils sont appréciés pour s’être souvenus de leur origine malgré leur réussite. La population locale les estime et les envie en même temps. Cette estime s’étend aux membres de leurs familles qui sont restés dans les lieux. La persistance des liens familiaux malgré les distances et les différences sociales entre les migrants et la famille de provenance créent la bipolarisation de la famille. Au lieu de se cantonner sur un seul endroit, la famille s’étend sur deux pôles. Les caractéristiques sociales de l’une agissent sur l’autre. La migration offre en conséquence une ouverture sociale pour la famille de provenance et un développement social pour la zone de départ.

 Conséquences économiques Le motif de départ des migrants est basé essentiellement sur la pauvreté quel que soit le facteur qui a déclenché cette pauvreté. Après avoir gagné et épargné de l’argent dans leurs zones d’accueil, certains migrants se sentent obligés d’envoyer une partie de leurs revenus dans les territoires d’origine. Les parents (ascendants et collatéraux) ne consentent pas à quitter les territoires d’origine pour diverses raisons : - vieillesse - enracinement aux terres ancestrales- veiller aux patrimoines familiales. 69

Lors de leurs visites aux zones de départ, les migrants apportent de nouveaux vêtements, des vivres (sac de riz, d’arachides, ..) et d’autres biens mobiliers à leurs parents afin de leur offrir un certain confort et de compenser leur absence. Par ailleurs, ils envoient périodiquement de l’argent (par mandat poste, « M-vola », « Airtel-money », « Orange-money ») pour subvenir aux besoins de ceux-ci (surtout pères et mères) et pour les aider dans leurs activités. Un flux économique s’établit en conséquence entre les zones de départ et les zones d’arrivée des migrants. Un flux de savoir faire s’enchaîne également par le transfert des techniques et des compétences nouvellement acquises à ceux qui sont restés aux villages d’origine. Les ressources des zones de départ proviennent donc en partie des zones d’accueil des migrants. Les appuis financiers et techniques apportés par la migration aux zones de départ contribuent en effet au développement économique de ces zones. Les flux engendrés par la migration peuvent être schématisés comme suit.

Schéma n° 04: Flux relationnel entre zones de départ et zones d’arrivée.

Z Flux démographique Z O O N Flux économique N E E

D Visite Périodique D’

E Inhumation A

D R E R Cérémonie matrimoniale P I

A V R Exhumation E T E

Source: Enquête personnelle, Décembre 2014.

En conclusion, le circuit relationnel des migrants avec les zones de départ véhicule des flux sociaux, économiques et démographiques. - Les flux sociaux se reflètent par la bipolarisation de la famille créée à partir des relations permanentes entretenues entre les deux zones (départ et accueil). Les deux pôles s’entraident mutuellement sur le plan social (cérémonies matrimoniales, inhumations, exhumations). 70

- Les flux économiques sont caractérisés par les circuits monétaires et les circuits des produits agricoles entre les deux zones. Les principales ressources techniques et financières des zones de départ proviennent des zones d’arrivée. - Quant aux flux démographiques, ils allègent les territoires d’origine en répartissant leurs ressortissants aux territoires d’accueil. La migration relie en permanence les zones de départ aux zones d’accueil. Les différents flux qui existent entre les deux zones contribuent à l’établissement d’un équilibre entre eux.

Chapitre IX : SUGGESTIONS ET PROSPECTIVES Nos suggestions et nos visions sont basées sur le rôle de la migration face à la situation actuelle de la commune Ankadinondry Sakay et de la région Bongolava en particulier pour déboucher sur Madagascar en général. 75% de la population de Madagascar vivent en effet dans la pauvreté et dans les milieux ruraux. Pour cela, nous nous sommes référés au premier Objectif du Millénaire pour le Développement (OMD) : « réduire la pauvreté ». Madagascar s’est fixé une fourchette d’années allant de 1990 au 2015 pour : – réduire de moitié la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour – assurer le plein emploi et la possibilité pour chacun, y compris les femmes et les jeunes, de trouver un travail décent et productif – réduire de moitié la proportion de la population qui souffre de faim. L’insuffisance/absence des données exactes sur l’évolution de situation sociale et économique des ménages ruraux malgaches, nous amène à cadrer nos études sur les appuis dans les milieux ruraux. Pour le cas d’Ankadinondry sakay et de la région Bongolava, les appuis tiennent compte des aspects agricoles, démographiques et fonciers. La migration interne comme celle qui se passe dans ces endroits mérite d’attirer l’attention par rapport à cette atteinte de l’Objectif du Millénaire pour le Développement. En effet, 63,9% des migrants de la commune rurale d’Ankadinondry Sakay, proviennent des régions à très forte densité de population. Ces régions se caractérisent par leur urbanisation qui est à l’origine de la pression démographique, de la réduction des espaces agricoles et par conséquent de la disparition progressive des emplois agricoles. Ces cas qui reflètent une occupation équilibrée de l’espace agricole pourraient-ils nous servir d’exemple dans un domaine plus élargi (lutte contre la pauvreté) et dans un territoire plus étendu (Madagascar) ? C’est par le biais de nos suggestions et prospectives que nous allons essayer d’y apporter les réponses en nous basant sur trois principaux points : –Vision de la migration dans la région de Bongolava et la commune rurale d’Ankadinondry Sakay– Les 71 avantages et les inconvénients de la migration interne à Madagascar – proposition sur la migration à Madagascar.

9.1 Vision de la migration dans la région de Bongolava et la commune rurale d’Ankadinondry Sakay. Selon l’Organisation des Nations Unies (1987), le développement durable est un «développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Un développement durable doit en effet répondre à un équilibre spatial, assurant le bien-être de la génération actuelle et la génération future. La région de Bongolava apparaît comme un territoire de migration par excellence par sa disposition de vastes terres neuves et inexploitées. On y rencontre en effet tous les types de migration : depuis la migration individuelle et spontanée jusqu’à la migration organisée et en groupe. Les données disponibles (M.A.E.P, 2006) sur la région Bongolava, et sur la commune d’Ankadinondry Sakay (2012) reflètent encore les réalités actuelles sur sa croissance démographique, l’augmentation incessante des exploitations agricoles et des superficies exploitées. Notre analyse a montré par ailleurs que la migration est à l’origine du développement de ces endroits. Le développement ne s’est pas arrêté uniquement à ces zones mais s’étend d’une manière directe ou indirecte aux zones de départ des migrants. La migration interne peut donc être retenue comme une source de développement qui répond au premier Objectif du Millénaire pour le Développement (O.M.D). Il nous reste toutefois à savoir comment faire durer le développement économique sans porter préjudice aux aspects sociaux, environnementaux, fonciers. Telle qu’elle nous est apparue, cette migration interne (Madagascar) ne repose sur aucune législation ou réglementation qui tend à rationaliser les exploitations agricoles et sauvegarder l’environnement et les droits humains. La migration nécessite alors des mesures d’accompagnements qui lui permettent de s’insérer dans les facteurs de développement durable. Ce qui nous amène à se pencher sur les règles fondamentales qui régissent une localité ou une ville donnée. Selon Philippe PINCHEMEL, la ville est « Une forme supérieure d’organisation humaine, une communauté d’hommes et de femmes liés les uns aux autres par la même résidence en un point de la surface du globe, rendus solidaires par les mêmes lois, par les mêmes besoins de travail, de logement, de détente ». Selon le même auteur, « La ville est tout à la fois, le symbole d’une maîtrise des données naturelles, d’une exploitation judicieuse des possibilités 72 du milieu et de l’existence d’une organisation sociale, donc d’une administration et d’un gouvernement » Transposée, à la migration, les préceptes de ce sociologue conduit aux conditions nécessaires et suffisantes qui devraient régir la vie des migrants à l’intérieur de la communauté ou milieu d’accueil. Les divers aspects qui doivent être retenus sont : – les juridictions – les emplois – l’habitat– l’environnement – l’exploitation agricole – le foncier –la sécurité. La prise en compte de ces divers aspects dans les divers appuis de la politique publique peut être envisagée pour espérer un meilleur impact de la migration sur le développement durable de la région Bongolava et de la commune rurale d’Ankadinondry Sakay.

 Les juridictions Les identifications des mobilités spatiales internes ont été concrétisées dans les tableaux n°4 et n° 25 tenus par les présidents de fokontany (cas d’Ankadinondry Sakay). Comme tout citoyen malgache est libre de circuler dans tout le territoire malgache, aucune législation spécifique ne régit les migrations internes. Tout Malgache résidant Madagascar, quel que soit son origine spatial est soumis aux mêmes lois.

 Les emplois La migration a créé des emplois à Ankadinondry Sakay. Les migrants temporaires y ont trouvé des travaux saisonniers. Les migrants définitifs ont créé des emplois dans tous les domaines qui touchent leurs activités. Il est à souligner cependant que la majorité de ces emplois sont informels. Les employés ne bénéficient d’aucune sécurité sociale, leurs salaires dépendent des pratiques usuelles dans le milieu, ils risquent de perdre leurs emplois à tout moment en fonction de l’humeur des employeurs. Les contrats saisonniers ne sont pas formalisés et aucun recours formel n’est possible en cas de rupture abusive de ces contrats. Les petits emplois comme aides domestiques, hommes et femmes à tout faire, etc, ainsi que les activités agricoles se trouvent aussi dans cette situation informelle. Seules les activités liées au commerce sont déclarées légalement et sont soumises aux obligations fiscales. Cette situation informelle généralisée entraîne un manque de sécurité de l’emploi dans le milieu rural et engendre un manque à gagner au niveau du budget de l’Etat. Comme plus de 75% des malgaches sont des ruraux, une organisation administrative des emplois ruraux mérite une attention particulière de la part de l’Administration locale. Tout contrat de travail devrait par exemple passer au niveau des fokontany en présence des contractants ou au niveau de la commune en fonction de leurs montants. Les femmes et 73 hommes exerçant des petits emplois doivent être déclarés par les employeurs ou se déclarer eux-mêmes au fokontany. Cette organisation limitera tout au moins les risques encourus par les deux parties (employés et employeurs).

 L’habitat Pour les cas de la région Bongolava et de la commune d’Ankadinondry Sakay, la migration n’a pas créé des problèmes particuliers dans le domaine de l’habitat. Les migrants construisent ou louent en fonction de leurs revenus. Les constructions se calquent sur les modèles locales ou selon des architectures plus ou moins modernes. Toutefois certaines constructions n’ont pas fait l’objet de « permis de construire ». Les problèmes se poseraient plus tard au niveau de l’aménagement de la ville en prévision de l’urbanisation. L’accroissement démographique engendré par la migration entrainera aussi la montée en flèche des constructions pour habitat. Des réseaux d’assainissement et d’évacuation des eaux usées doivent êtres mis en place avant la construction des maisons. Toute construction en dur doit aussi avoir l’aval des autorités communales. La délivrance des « permis de construire » doit se faire en fonction des plans d’aménagement des lieux. Ces mesures éviteront des problèmes sociaux engendrés par des démolitions futures éventuelles.

 L’environnement La pression démographique débouche inévitablement à la destruction de l’environnement. On a assisté à un début de déforestation causée par les besoins croissants en bois de chauffage et en charbon de bois. Le manque de matériels agricoles nécessaires occasionne aussi les cultures sur brûlis. Les besoins grandissants de pâturage pour les zébus entraînent les feux de brousse. Tous ces éléments nocifs coexistent et débouchent sur la destruction environnementale qui se caractérise également par l’appauvrissement du sol, par la destruction de sa structure fertile, d’un côté. De l’autre côté, le ravitaillement en eau potable et eau d’irrigation se trouve aussi menacé. Des campagnes de reboisement doivent être organisées à chaque saison de pluie par les autorités locales. Les exploitants forestiers doivent être obligés de faire du reboisement en fonction de la dimension de leurs exploitations. Des mesures d’accompagnement comme la mise en place des pare-feux, le suivi périodique assureront la protection des aires de reboisement. Les forêts et les terres sont des ressources naturelles qui contribuent indéniablement au développement durable d’une localité, d’une région, d’un pays. La sauvegarde de ces 74 ressources est cruciale pour éviter des catastrophes naturelles comme le changement climatique actuel par exemple, entraînant des inondations, des sècheresses, des invasions acridiennes. L’envergure des cette sauvegarde est trop importante face aux actions locales qui s’avèrent insuffisantes. Les législations sur la protection de l’environnement doivent être renforcées et leurs applications doivent être suivies de près. Aussi anodin que puisse paraitre le bienfait d’un environnement sain, il est le pilier fondamental de tout développement humain. L’Etat et la population locale doivent en conséquence redoubler de vigilance.

 L’exploitation agricole Les inégalités des occupations spatiales rurales malgaches ont créé des inégalités de ressources et d’accès aux terres agricoles fertiles, et ont engendré les exodes ruraux. La disponibilité des vastes terres dans le Moyen-Ouest malgache est occasion pour échapper à ces difficultés et pour accéder à un niveau élevé de développement rural. La région de Bongolava qui a déjà accueilli bon nombre de migrants tant spontanés qu’organisés dispose encore d’une vaste potentialité d’accueil de nouveaux migrants. En effet, les vastes étendues de terres neuves du Moyen-Ouest constituent un pôle d’attraction et des projets d’extension agricole pour les migrants. Ayant été habitués à des lopins de terres dont ils disposaient dans leurs territoires de départ, les migrants ont toujours tendance à exploiter au maximum les terres qui sont à leur disposition. Cette forme d’exploitation donne des productivités conséquentes au début, mais finira par appauvrir le sol et réduira les rendements. Les migrants s’inquiètent peu de cet appauvrissement mais se déplacent vers d’autres espaces disponibles. Ce système peut être valable si le flux des migrants est ponctuel, mais comme ce flux est perpétuellement actif, l’essor démographique qui en découle exige des exploitations rationnelles des terres. Les moyens financiers et techniques des agriculteurs ne sont pas toujours à la hauteur de leurs aspirations et des opportunités qu’offrent les vastes espaces disponibles. Les appuis de l’Etat et des projets qui œuvrent dans le développement rural sont vivement souhaités. Les appuis doivent contribuer à l’amélioration qualitative des productions, à la facilité d’évacuation et de commercialisation des produits. Les domaines pouvant être concernés par les appuis sont respectivement: l’aménagement des infrastructures hydro agricoles; les formations aux nouvelles techniques agricoles ;la mise à disposition des variétés de semences et des races nouvelles pour améliorer les productions; l’aménagement des routes de desserte qui relie les zones de production aux marchés publics environnants; la création des 75 infrastructures de proximité, relatives aux marchés publics ;la construction des Greniers Communautaires Villageois (G.C.V) ;la lutte antiacridienne ; la lutte contre les maladies bovines et porcines. Le secteur agricole se heurte à l’incapacité de mettre sur le marché des produits en quantité et en qualité suffisante pour assurer la sécurité alimentaire de la population tout au moins, et pour envisager une exportation par la suite. Madagascar importe encore du riz actuellement. Les efforts apportés pour améliorer l’augmentation de la production sont boiteux sans la prospection des marchés potentiels pour le surplus de l’autoconsommation. Plusieurs facteurs limitent toutefois cette vision comme: l’irrégularité foncière ; l’inadéquation des formations agricoles ; l’absence politique de qualité et d’organisation de filière. En effet, la précarité des situations foncières empêche la volonté d’investir ; l’absence d’orientations claires en matière de gestion d’exploitation des producteurs freine l’extension agricole. En outre, la déficience du système de conseils aux producteurs est couplée aux difficultés d’obtention de crédits (problèmes de garantie, taux d’intérêt relativement élevé, surendettement ou non remboursement). Les recherches de techniques innovantes et des systèmes de diffusion de ces techniques s’avèrent insuffisantes. L’offre de produits agricoles est limitée, irrégulière, atomisée, hétérogène, pour intéresser des industriels. L’appui aux initiatives d’exportation de produits agricoles bruts ou transformés est quasi inexistant. Pour faire un saut qualitatif et quantitatif, la prise de mesures palliatives et incitatives est d’une importance capitale et requiert : la faculté d’accéder à la terre et de l’exploiter en toute quiétude ;la possibilité d’accéder aux crédits appropriés pour la mise en valeur des terres ;la maitrise de techniques de production et de gestion pour accroître les performances des exploitants ;l’aptitude de répondre aux demandes du marché (local, régional, national, extérieur). Toutes ces mesures contribueront à aider le secteur productif à fournir des produits agricoles adaptés aux besoins des marchés intérieur et extérieur, d’une part. D’autre part, le développement simultané d’un secteur industriel permet d’offrir des débouchés aux producteurs et de payer des impôts à l’Etat et aux Collectivités Territoriales Décentralisées. L’adhésion aux politiques et programmes de développement rural, ainsi que l’application effective des mesures nécessaires contribueront à atteindre certains objectifs tels :assurer la sécurité alimentaire et le respect des normes qualitatives ;améliorer les revenus des producteurs ;procurer des emplois aux ruraux ;approvisionner une agro industrie prospère ;contribuer à l’amélioration de la balance commerciale par le biais de l’exportation. 76

Le développement agricole relève de la compétence du ministère de l’agriculture et du ministère de l’élevage. La Direction Régionale de Développement Rural (DRDR) au niveau de chaque région doit jouer le rôle de facilitateur et d’appui administratif aux projets de développement rural. Les caractères préventifs, curatifs des appuis dans le domaine agricole doivent être renforcés.

 Le foncier Jusqu’à nos jours, le développement rural est basé sur l’agriculture et l’élevage où l’accès aux terres joue un rôle primordial. Les actions de développement enclenchées par la migration sont fragilisées par les problèmes fonciers auxquels les migrants se heurtent souvent aux milieux d’accueil. La politique d’octroi de terrain à titre onéreux ou à titre gratuit est donc accueillie à bras ouverts dans ces milieux. Aussi contradictoire que cela puisse paraitre, les besoins de sécurisation foncière des ruraux se heurtent à leur réticence envers toute formalité administrative. Les « allers et retours » occasionnés par ces formalités provoquent, en plus des frais de déplacements, des pertes de temps. A la place des titres fonciers, les ruraux se contentent en général des reconnaissances de leur droit sur les terres en bonne et due forme délivrées par les services des domaines. Ces dernières demandent moins de temps et de moyens financiers. L’acquisition des titres fonciers doit être facilitée si l’on veut retenir les migrants en place afin de perdurer le développement qu’ils ont amorcé. Des exemples dans ce sens ont été d’ailleurs réalisés en janvier 2010 dans la commune rurale de , région de Bongolava : 430 titres fonciers ont été distribués aux migrants. En outre, les Malgaches en général et les ruraux en particulier ont des attachements excessifs aux terres. 80% des affaires traitées au tribunal portent sur les litiges fonciers. Ces cas litigieux peuvent provenir des caractères flous de la législation foncière malgache héritée de la législation française. En conséquence, des réformes concernant la législation foncière, adaptées à la réalité malgache, doivent être votées à l’Assemblée Nationale.

 La sécurité Le Moyen-Ouest est réputée par l’insécurité qui y règne. La ville de Tsiroanomandidy est très avancée économiquement, alors que la plupart des communes de la région sont encore enclavées et les dahalo y sévissent. Le plein essor de la population et de la production agricole dans ces zones mérite suffisamment d’intérêts pour donner lieu à un élargissement de la zone migratoire avec des 77 mesures d’accompagnement. La sécurisation des personnes et de leurs biens doit être priorisée pour éviter que les migrants désertent à nouveau ces lieux pour d’autres endroits. Les vols de bœufs sont très répandus, surtout dans les endroits reculés de la région. La multiplication des postes avancés de gendarmerie dans ces zones a dérouté les dahalo, mais dans les autres endroits qui n’ont pas été dotés de ces postes, les dahalo ne cessent de sévir. C’est à ce moment qu’apparaissent les divers « Dina »(24) qui impliquent la population locale dans le suivi des traces des bœufs volés et dans les communications d’informations concernant les vols. Jusqu’à maintenant, le couplage des « Dina » avec les actions de la gendarmerie apporte des résultats tangibles, mais les inquiétudes de la population ne sont pourtant pas levées. Les populations n’osent pas se hasarder dans les « Kizo » (25) où sont généralement cachés les zébus volés. En plus, les « dahalo » sont de mieux en mieux armés et de plus en plus nombreux. Pour compléter les actions menées par la gendarmerie et celles de la population par le biais des « Dina », l’amélioration des voies de desserte qui relient les villages entre eux apparait comme un des éléments qui réduisent l’insécurité dans les lieux. Il en est de même pour l’aisance des voies de communication reliant les communes au chef-lieu du District. L’amélioration des infrastructures dans ces endroits rend en effet plus facile et plus rapide les actions de poursuite des bandits et facilite également l’évacuation des produits agricoles et miniers. Il est à noter que la région Bongolava dispose aussi des ressources minières (l’or, les pierres précieuses telles les tourmalines). Ces ressources minières sont localisées dans la commune de Miandrarivo pour le District de Tsiroanimandidy et dans la commune de et celle de Tsinjoarivo pour District de Morafenobe. Par ailleurs, la réalisation du projet d’aménagement en goudron de la route reliant le District de Maintirano à celui de Tsiroanomandidy donne une opportunité de liaison de la région à celle de Bongolava et activera un développement rapide. Le renforcement de la politique de désenclavement de l’Etat apportera certainement la sécurité dans ces endroits et contribuera au développement de ces zones.

(24) Dina : règles qui régissent la vie sociale des communautés villageoises. Ces règles sont surtout mises en exergue pour les vols des bovidés. (25) Kizo : un endroit difficile d’accès et à issue difficile. Désigne un endroit dangereux qui prête à des embuscades. Les bœufs volés sont cachés dans des endroits pareils pour déjouer les poursuivants.

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9.2 Les avantages et les inconvénients de la migration interne à Madagascar En parlant de migration interne, 3 types de migrations peuvent être envisagés: - les migrations rurales - l’exode rural - l’exode urbain. L’analyse des avantages et inconvénients de la migration porteront donc sur ces 3 aspects de la migration.

 Les migrations rurales Il s’agit d’un déplacement spatial à partir d’un milieu rural vers un autre milieu rural. Le cas d’Ankadinondry Sakay peut nous servir d’exemple dans cette analyse. En effet, les migrants de notre échantillon proviennent en majorité des milieux ruraux. Les avantages apportés par la migration au niveau de ce milieu d’accueil sont d’ordre social, économique, culturel. Les différences qui ont causé des conflits au départ donnent lieu à des diversités qui favorisent les échanges et le développement des endroits concernés par la migration. La migration rurale présente toutefois des inconvénients comme la croissance démographique qui risque d’avoir une retombée conséquente sur l’environnement (déforestation, l’appauvrissement du sol à cause de pratiques nocives tels les cultures sur brûlis, feux de brousse, …). Ces inconvénients peuvent toutefois être évités ou atténués par des mesures adéquates et prises avant les dégradations éventuelles.

 L’exode rural Il s’agit du déplacement spatial à partir des milieux ruraux vers des milieux urbains. Selon le tableau de « déplacement spatial de la population » du fokontany Ankadinondry II, 11 mouvements spatiaux ont été enregistrés dont 9 entrées et 2 sorties. Sur les 2 sorties, une se rendait à Antananarivo. Ces faits nous démontrent que l’attrait de la vie urbaine n’intéresse pas les ruraux d’Ankadinondry Sakay. Diverses raisons motivent en effet les populations (résidents et migrants) d’Ankadinondry Sakay à s’enraciner dans ce milieu : la stabilité de la situation sociale et économique qui se traduit par la disponibilité et la mise en valeur des terres qui procurent des revenus stables et offrent des opportunités d’extension des activités ;la proximité des services publics et privés (écoles, CSB, marchés, bureaux administratifs, …;la capacité d’épargne à partir des surplus de production et permettant de développer les activités et d’agrandir les secteurs d’activité ;la solidarité villageoise qui est la clé de voute de l’intégrité sociale. Les caractères répulsifs qu’ils ont évoqués pour éviter les milieux urbains se résument en: cherté du coût de la vie urbaine, problème de logement, chômage et anonymat. En effet, leur 79 pouvoir d’achat n’arrive pas à assurer leur subsistance dans le milieu urbain. L’habitat dans les milieux urbains est synonyme de bidonville pour eux, c'est-à-dire précarité, insécurité, insalubrité, paupérisation en bref. Seuls les petits emplois informels qui ne présentent aucune assurance de continuité et de survie sont accessibles. Les grandes villes sont synonymes d’anonymat et d’individualisme pour les ruraux. Les solidarités communautaires auxquelles ils sont habitués n’existent pas dans ces milieux. Ils se perdent dans l’anonymat total. Cependant, les ruraux éprouvent quelquefois une certaine admiration pour les urbains et une attirance particulière à la vie urbaine. La ville urbaine de référence retenue pour notre étude est Tsiroanomandidy, C’est le capital administratif et commercial du Moyen-Ouest malgache. La commercialisation de zébus est le pilier des activités de la ville. Tsiroanomandidy est le second marché de zébus de Madagascar après Ambalavao. Les Mpandrato (26) acheminent à pied des zébus des régions du Sud et de l'Ouest, parcourant ainsi plusieurs centaines de kilomètres pour arriver jusqu'au marché de Tsiroanomandidy. Les zébus vendus sont acheminés vers des communes voisines, mais la grande partie est acheminée par camions vers Antananarivo. Ambatonapoaka (marchés de bovidés situés sur la RN1). Les acheteurs sont issus essentiellement des anciennes provinces d’Antananarivo et de Fianarantsoa. Le circuit commercial des bétails entraîne des déplacements spatiaux importants des personnes et génère également des circuits monétaires. Tout ce mouvement autour de la commercialisation débouche sur la création et le développement des activités connexes comme les gargotes, les épiceries, les hôtelleries, les locations de chambres chez les habitants, la prostitution, les transports, etc. Les jours du marché des bovidés commencent le mercredi pour se terminer le vendredi. Le marché hebdomadaire de la ville se passe le vendredi. Ce marché constitue un débouché important pour la commercialisation des produits agricoles de la zone. Les collecteurs viennent aussi au marché pour acheter. Vendredi est le jour d’affluence de la ville mais elle est animée à partir de l’arrivée des bétails, c'est-à-dire le mercredi et l’animation continue jusqu’au samedi. La productivité de cette zone est tellement élevée que Tsiroanomandidy n’arrive pas à consommer les produits issus des périphéries malgré l’affluence qui s’y trouve. Une grande partie des produits agricoles est acheminée vers Antananarivo.

(26)Mpandranto : Gardiens de zébus qui sont chargés d’acheminer le troupeau à partir d’un lieu donné jusqu’au marché de bovidés de Tsiroanomandidy. Equivalent des cow-boys des Etats Unis d’Amérique. 80

La ville joue aussi un rôle primordial dans le domaine agricole du District. Elle est le lieu d'approvisionnement en intrants, semences, petits matériels et outils agricoles (brouette, charrue, herse, angady, chapeau de masse pour les moissons,…). Les périodes de récolte, attirent dans cette zone les charretiers venant de Miarinarivo, d'Imerintsiatosika, de Manjakandriana. Parmi les migrations à Tsiroanomandidy, deux grands types peuvent être évoqués. Ils répondent à deux logiques bien distinctes : - les migrations à caractère agricole visant à conquérir de nouveaux espaces - les migrations liées directement ou indirectement à l'activité économique du commerce de bovidés. Quels sont donc les avantages que la ville de Tsiroanomandidy fait miroiter aux yeux des migrants ruraux qu’ils accueillent ? Pour le cas de Tsiroanomandidy, l’exode rural est caractérisé par l’enclavement des zones de départ des migrants, l’absence des services publics de base comme les centres de santé, les collèges et Lycées. Ces diverses défaillances et lacunes sont couplées à l’insécurité. Le marché de travail à Tsiroanomandidy surtout dans le secteur informel, offre encore des opportunités. Dans ce secteur, il y a encore plus de demande que d’offres. Les objectifs des ruraux pour l’exode rural sont généralement de: trouver du travail ; poursuivre des études ; s’enrichir ;avoir un statut social digne de prestige ;avoir une capacité d’accueil ou d’aide de ses familles d’origine. En effet, la mobilité spatiale occasionnée par l’exode rural n’est pas uniquement une mobilité physique d’un groupe de personnes ou d’un individu mais surtout une mobilité sociale. L’aspiration de chaque individu vivant dans une société est de réussir intellectuellement, socialement et économiquement au sein de la communauté à laquelle il fait partie. Les migrants ruraux pensent trouver cette réussite au niveau de Tsiroanomandidy. En outre, les migrants contribuent au développement de la ville dans les sens où ils répondent à l’important besoin de main-d’œuvre ;ils sont à l’origine des nouveaux emplois (tireurs de pousse, …) ;ils contribuent à la commercialisation des produits agricoles (notamment du riz).

 Exode urbain Cette forme de migration caractérise le déplacement spatial d’un individu ou d’un groupe de citadin vers les milieux ruraux. Pour le cas de Tsiroanomandidy ou d’Ankadinondry Sakay, les motivations qui dictent ce type de migration sont toujours d’ordre social et économique. Elle concerne surtout, les retraités, les jeunes diplômés chômeurs, les sans-abris.

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- Les retraités L’âge de retraite dans les fonctions publiques est généralement de 55 ans pour les femmes et 60 ans pour les hommes. A leur retraite, ces gens se trouvent subitement désœuvrés avec moins de revenu. Le manque d’activités commence à peser sur eux et ils préfèrent se retirer à la campagne pour tenir des petites fermes ou des petites exploitations agricoles. Certains d’entre eux s’engagent même dans l’exploitation des grandes concessions qu’ils ont eues avant la retraite mais qu’ils ont confiées à des salariés. L’exode urbain est synonyme de : repos dans le sens où il permet de se retirer des situations stressantes en ville causées par les tapages, la pollution, les embouteillages ;activités modérées qui évitent le désœuvrement et l’oisiveté aboutissant fatalement à l’inertie, à l’Alzheimer, à l’impuissance ; changement d’activités qui casse la routine professionnelle et redynamise les fonctions vitales comme le cerveau, les reflexes et même la tendance libidinale (Sigmund Freud).

- Les jeunes diplômés chômeurs Le nombre des jeunes diplômés sortis frais émoulus des Universités augmente sans cesse chaque année. Le marché de l’emploi présente de plus en plus de difficulté. En effet, la demande est d’une proportion négligeable par rapport à l’offre ; les emplois en adéquation avec les diplômes obtenus sont saturés et la réussite aux concours administratifs s’avère de plus en plus difficile à cause des phénomènes d’atavisme (juridique, sécurité publique, …). Les salaires subissent aussi les conséquences de la loi de l’offre et de la demande. Les jeunes diplômés acceptent parfois des salaires dérisoires afin de ne pas sombrer dans le chômage. C’est dans ce contexte que ces jeunes ont cherché une échappatoire dans les milieux ruraux en créant des activités libérales avec tous les risques que cela suppose. Les diplômés en médecine ouvrent des cabinets médicaux, les vétérinaires tiennent des boutiques spécialisées en santé animale, les juristes tiennent des cabinets de conseil juridique, les sortants des autres facultés ouvrent des écoles privées.

- Les sans-abris Cette appellation désigne les gens de rue qui vivent et qui dorment dans les rues, mais aussi ceux qui vivent dans des conditions misérables et pouilleux. Pour le cas d’Antananarivo par exemple, les gens de « La Réunion kely » sont classés dans cette catégorie des sans-abri. La migration de ces gens dans les milieux ruraux n’est jamais volontaire ni spontanée, ni individuelle. Ils savent très bien que la migration dans les milieux ruraux équivaut à fournir 82 des efforts pour travailler la terre ou tenir des petits élevages. Cette migration exige de leur part des disciplines auxquelles ils n’ont jamais adhéré. La migration des sans-abris vers les milieux ruraux a toujours été déclenchée par des organismes privés et publics qui œuvrent pour l’insertion sociale et l’assainissement de la ville. Elle se faisait toujours en groupe avec des pressions plus ou moins drastiques de la part des organisateurs et ne requiert aucun moyen de la part des sans-abris. Les coûts de déplacement et d’installation sont à la charge des organisateurs ou des partenaires financiers qui travaillent avec eux. Des familles défavorisées d’Antananarivo ont été par exemple migré en groupe dans la région Bongolava par l’A.S.A.

9.3 Propositions sur la migration à Madagascar. Notre étude nous a permis de constater que la migration est un des facteurs de développement des zones d’accueil. Ce développement fait tache d’huile sur les zones de départ et sur les localités environnantes. Il est indéniable que la migration est source de développement. Mais jusqu’ici la durabilité de ce développement n’est pas assurée. Le développement que l’on a vu est encore fragile car il repose sur plusieurs facteurs aléatoires comme le foncier, la sécurité, et bien d’autres. On peut donc conclure que le développement actuellement généré par la migration est un développement à court terme et non durable. En effet, la domination du caractère informel des activités exercées par les migrants est un obstacle à l’instauration d’un développement durable. Pour que le développement actuel ait un caractère durable, des mesures d’accompagnement et des soutiens au niveau de la région et de la nation maintiendraient et renforceraient les acquis. Les prises de mesure doivent être suivies d’application et d’évaluations participatives par les services territoriaux décentralisés, les services déconcentrés de l’Etat, les populations locales et éventuellement les organismes privés concernés. Les mesures à mettre en place dépendront des secteurs d’application. Dans le domaine du développement social par exemple, les politiques générales et sectorielles doivent être axées sur l’amélioration de la couverture, de la qualité et de l’accès équitable aux infrastructures et services sociaux de base. Il faut veiller à l’équilibre entre niveau de dépenses publiques affectées aux secteurs sociaux et les objectifs visés comme : - améliorer l’éducation et la formation et renforcer les capacités et les compétences techniques -améliorer le système de santé et de nutrition, éliminer la famine et la malnutrition, assurer une fourniture et une sécurité alimentaires suffisantes - intégrer les questions démographiques dans les 83 stratégies de développement en vue d’améliorer la santé génésique, les soins de santé primaire, la planification familiale - améliorer l’accès à l’eau potable et à l hygiène - améliorer l’accès à un habitat approprié aux besoins de tous par l’appui au programme de logements sociaux. Dans le cadre du développement économique sectoriel, les réformes politiques et institutionnelles ainsi que des investissements permettant l’accès équitable aux activités économiques et aux ressources productives s’avèrent nécessaires. Dans ce domaine, on peut évoquer particulièrement: - le développement du système de formation visant à accroître les activités dans le secteur formel et informel - l’accès au capital, au crédit et à la terre, notamment en ce qui concerne les droits de propriété et d’exploitation - l’élaboration de stratégie rurale visant à établir un cadre pour la planification décentralisée et la gestion des ressources selon une approche participative - la reformulation des stratégies de production agricole, des politiques nationales de sécurité alimentaire, de la gestion des ressources en eau - la réalisation des infrastructures économiques et technologiques et les services, y compris les transports, les services de communication. Les activités informelles prédominent dans les milieux ruraux, alors que les actions et projets de développement appliqués s’adressent toujours aux activités et associations légales, c'est-à- dire formelles. Les acteurs informels majoritaires restent donc dans l’omission. Aussi, pour qu’il y ait accès équitable aux aides et appuis offerts par l’Etat ou par des Organismes Non gouvernementales (ONG), il faut penser à :- formaliser les activités économiques (dans la mesure du possible car ceci requiert un effort progressif et durable). Cette mesure permettra d’allouer des redevances à la caisse locale, qui pourront par la suite, servir de financement à l’amélioration des conditions de vie des localités (constructions/réhabilitation des infrastructures publiques, l’amélioration des services publics) - mettre en place des dispositifs de sensibilisation dans le domaine du civisme pour une meilleure prise de conscience de l’importance du développement - prendre compte des processus de décentralisation du pouvoir politique et de déconcentration des services publics. L’assurance d’un développement effectif et durable ne peut avoir lieu sans l’application de la bonne gouvernance, de la décentralisation et de la déconcentration des services de l’Etat.

- La bonne gouvernance. La bonne gouvernance est plutôt un état d’esprit concrétisé par des mesures pratiques. C’est pourtant un élément essentiel pour assurer un développement effectif et durable. Elle est caractérisée par un ensemble de principes de gestion des ressources par les autorités en place, 84 en faveur du développement. Ces principes reposent sur le respect du droit et des droits humains ; la transparence et l’efficacité de la gestion des affaires ; la lutte contre la corruption ; la promotion de la démocratie et le développement participatif et durable. La bonne gouvernance est beaucoup plus visible dans les milieux ruraux que dans les milieux urbains. Plus le champ d’application est petit, plus la manière de gouverner et de gérer est apparente. La performance de la bonne gouvernance sur le développement d’une zone donnée aboutit à une prise de conscience plus ou moins généralisée de la population de ses droits et obligations en tant que citoyen.

- La décentralisation La décentralisation est caractérisée par un transfert de pouvoirs de l'État vers des personnes morales de droit public. Pour le cas de Madagascar, on assiste aux Collectivités Territoriales Décentralisées (CTD) comme les Communes et les Régions. Ces entités jouissent d’une certaine autonomie en fonction du degré de décentralisation dicté par les politiques de l’Etat. Elles disposent d'un budget propre mais les dépenses y afférentes restent sous la surveillance de l'État. La gestion des Collectivités Territoriales Décentralisées sont soumises au contrôle de légalité des autorités étatiques. L’autonomie des entités décentralisées est: - matérielle : dans le cadre de sa personnalité morale, elle dispose d'un patrimoine et d'affaires propres ou locales par opposition aux affaires nationales gérées par l'Etat ; - organique : la gestion des entités décentralisées est assurée par des organes qui leur sont propres ; - fonctionnelle : les entités décentralisées disposent d’une autonomie totale pour la gestion de leurs fonctions. Ces diverses autonomies ne traduisent pas pour autant l’effectivité de la décentralisation sans le transfert effectif des moyens. Les entités décentralisées doivent à cet effet bénéficier des transferts de compétence et des moyens financiers, matériels et techniques. Les collectivités locales ont le pouvoir de gérer les affaires locales tout comme elles ont aussi le devoir de rendre compte aux habitants de leurs localités. Si la décentralisation est appliquée dans les règles de l’art, les autorités dirigeantes des collectivités décentralisées doivent faire l’objet d’une élection de la population locale. La gestion de proximité est censée apporter des réponses rapides et efficaces aux besoins locaux. La décentralisation à elle toute seule n’arrive toutefois pas à répondre aux exigences de proximité. Elle doit être accompagnée de la déconcentration des services de l’Etat. 85

- La déconcentration des services de l’Etat. Elle a pour but de doter les collectivités locales des services publics et de faire bénéficier équitablement les populations locales de ces services. Dans ce domaine, il faut également y mettre le prix et veiller à à la mise à disposition du personnel ; des équipements adéquats aux services à offrir et à leur bon fonctionnement. Certains Centres de Santés de Base (C.S.B) ne disposent même pas d’eau potable, par exemple, alors que l’eau potable est le premier élément indispensable en matière de santé.

Les divers cas d’études sur la migration interne nous conduisent à déduire que la migration, qu’elle soit rurale ou urbaine, est un atout majeur pour le développement. Ce développement est cependant fragilisé par divers éléments aléatoires qui freinent son plein essor et qui limitent sa portée. La bonne gouvernance, la décentralisation, et la déconcentration des services de l’Etat qui sont d’un appui et de renfort considérables pour rendre durable ce développement ne semblent pas assurer pleinement leurs rôles.

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CONCLUSION GENERALE La migration est un phénomène courant et commun à tous les endroits de Madagascar. A croire que les populations malgaches sont en perpétuel mouvement à l’intérieur du pays. Les mouvements spatiaux véhiculent avec eux des changements dans la vie sociale, culturelle, et économique et créent des dynamiques dans les divers endroits où ils s’effectuent. C’est autour des facteurs de motivation et de changement déclenchés par la migration que nous avons porté nos études dans la région Bongolava et dans la commune rurale d’Ankadinondry Sakay. Aussi, pour répondre à notre problématique qui est axé sur les motivations des mouvements migratoires en direction d’Ankadinondry Sakay, région Bongolava, Les raisons des déplacements spatiaux que nous avons décelées se rapportent à des éléments vitaux d’un individu ou de groupes d’individus. Elles portent essentiellement sur les besoins de mener une vie décente avec une espérance d’accéder à plus de confort et de sécurité comme l’a annoncé R. DECARY (1941). Les motivations des migrants d’Ankadinondry Sakay reposent sur la recherche d’emploi et des terres disponibles à des fins agricoles ; le regroupement familial ; le débouché commercial. Le concept d’Hubert DESCHAMPS(1959) est vérifié pour les cas d’Ankadinondry Sakay et de la région Bongolava (Tsiroanomandidy, chef- lieu de la région). L’attrait de la migration se situe surtout au niveau des vastes étendues de terres neuves qu’elles peuvent offrir, face aux exigüités des espaces cultivables et habitables que les migrants ont quittés. Les routes goudronnées qui mènent à ces endroits traduisent la facilité d’accès qui justifie également le choix des lieux par les migrants. En tenant compte des divers concepts et théories de certains auteurs par rapport aux réalités de notre terrain, nous avons pu constater que la migration est porteuse de changements sociaux, économiques, culturels. Les différentes origines des migrants ont influé sur le comportement et pratiques sociaux, économiques, culturels dans les localités. Les différents clivages véhiculés par les migrants dans ces domaines ont causé des conflits au début mais se sont mixés avec ceux des résidents des lieux au fil des temps et ont donné lieu à une unité de point de vue. Le sentiment d’unité découle du processus psychosociologique de la migration décrit par Robert E. Park(1921). Les différentes étapes (la compétition, le conflit, l’accommodation, l’assimilation) par lesquelles sont passés les migrants et les résidents ont conduit à une forme finale d’acceptation réciproque. Ainsi, nous pouvons confirmer nos hypothèses selon lesquels la migration qui revêt diverses formes est une dynamique spatiale qui contribue au développement. 87

Les caractères spontanés, forcés, temporaires et définitifs de la migration, aboutissent aux diverses formes qu’elle revêt. Ces dernières sont justifiées par les motivations qui ont poussé les migrants à débarquer dans le milieu d’accueil (emploi, commerce, regroupement familial). C’est au cœur de ces motivations que se manifeste la dynamique spatiale. Elle tient compte des interactions spatiales (milieu d’accueil et milieu d’origine) et temporelles. La dynamique spatiale se reflète à travers les impacts de la migration dans les zones d’accueil et les zones de départ. Cette dynamique agit sur la vie sociale, l’économie, l’environnement. La pression démographique du milieu de départ se dilue dans les zones d’arrivée ; les espaces non exploités des zones d’accueil sont mises en valeur et se transforment en exploitation agricole grandissante ; l’utilisation des moyens à outrance (variété de semences, engrais, matériels agricoles, nouvelles races) favorise l’amélioration et l’augmentation de la productivité. L’interaction entre les diverses activités économiques entraîne également la rapidité de l’expansion dans le domaine du commerce, du transport, de la collecte des produits et des bétails. La migration a accéléré le rythme de développement dans le milieu d’accueil tout en favorisant les milieux d’origine par l’installation de flux entre les deux. Sur le plan social, le mixage des us et coutumes est parfois suivi et/ou précédé de celui des personnes par le biais du mariage entre origines différentes. L’apparition de la bipolarisation de la famille se trouve favorisée. Au lieu de se confiner dans un seul milieu, les membres de la famille se répartissent sur plusieurs endroits. Le renforcement des liens familiaux se manifeste par les entraides entre les pôles. D’où l’apparition des flux monétaires, des biens et des personnes entre les zones de départ et les milieux d’accueil. A travers les flux démographique, social, économique et culturel, la migration contribue au développement des zones concernées et établit en même temps l’équilibre entre celles-ci. Placée dans un contexte de lutte contre la pauvreté, la migration ne remplit pas toutefois les conditions requises pour atteindre le premier Objectif du Millénaire pour le Développement(O.M.D). Le développement apporté par la migration, tel qu’il apparaît au niveau d’Ankadinondry Sakay et de Tsiroanomandidy, est encore fragile et instable. C’est un développement à court terme qui repose sur plusieurs aléas. Cette amorce de développement risque d’être inhibée par l’absence et l’insuffisance de sécurité dans le domaine du foncier, de la protection des personnes et de leurs biens, de l’accès aux services publics de base. Jusqu’à maintenant, le développement repose essentiellement sur des initiatives privées et informelles, il est dicté par la volonté plus ou 88 moins unilatérale des acteurs désireux de réussir socialement et économiquement. C’est une volonté apparemment inébranlable mais qui se heurte à une insuffisance d’appuis et de soutiens techniques et financiers. L’accès au crédit est conditionné par des garanties. La culture de crédit n’est pas suffisamment inculquée aux acteurs ruraux de développement. Ceux qui ont eu la possibilité d’obtenir des crédits ont sombré soit dans le surendettement soit dans le non remboursement. Bon nombre de ces acteurs ne sont pas suffisamment armés pour la bonne gestion de leurs activités. La prédominance des activités informelles rend encore plus difficile les appuis étatiques et privés. La bonne gouvernance, la décentralisation et la déconcentration des services publics ont joué des rôles non négligeables dans l’appui de ces acteurs. La bonne gouvernance oblige une gestion saine et équitable des ressources par les autorités compétentes. Par sa proximité, les Collectivités Territoriales Décentralisées (Communes, Régions) ont permis l’identification des besoins locaux et la prévision des résolutions adéquates. La déconcentration des services publics de base (santé, sécurité, enseignement, …) est effectuée dans un souci d’offrir des services de proximité. Ces dispositifs ne semblent pourtant pas répondre aux exigences d’un développement durable. La migration interne apparaît comme un facteur d’équilibre social, culturel, économique entre les différents milieux et à l’intérieur d’un pays où elle s’effectue. La diversité des origines des acteurs de développement dans la migration interne constitue une richesse considérable dans le domaine du développement (social, culturel, économique). Etant donné que le développement issu de la migration ne couvre que le court terme avec un caractère micro-économique, quels seraient les dispositifs à mettre en place pour faire de cette migration un élément de développement durable de la localité et pouvant aboutir un caractère macro – économique ?

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BIBLIOGRAPHIE

I-Ouvrages de base:

1- AMIN (S) : 1974 Introduction in Modern Migration in Western Africa/ les migrations contemporaines en Afrique de l’Ouest AMIN (éd), Oxford, University Press : 65-124. 2- BOURDIEU (Pierre) : Esquisse d’une théorie de la pratique, Paris ; Droz, 1972, p 18. 3- COURGEAU (D) – Méthodes de mesure de la mobilité spatiale. Migration interne, temporaire, navettes, 1988 N° 4359-373. 4- Cohen R. (edited by), 1996. Theories of migration, Cheltenham, UK; Brookfield, US: Edward Elgar, 512 p. 5- DESCHAMPS (H), Migrations intérieures de Madagascar, PUF(1959). 6- DECARY (R) et CASTEL (R) : Modalités et conséquence des migrations intérieures récentes des populations Malgaches., Imprimerie officielle – TANA – 1941. 7- DOMENACH (H) ; et PICQUET (M), 1989, Typologie et réversibilité migratoire ; in APPLEYAD (éd), 1989 : 43-51p. 8- MARCHAL, J-Y.,s d , « Antanety Ambohidava : Terroir du Moyen-Ouest malgache: Une étude de colonisation agricole », ORSTOM, 160p. 9- ORSTOM, Rapport sur une prospection pédologique dans la région de la moyenne Sakay. 10- RAISON (J), Les Hautes terres de Madagascar, Tome I, ORSTOM Karthala, 1984. 11- ROY (G) et VERIN (P), 1965, « Etude sur les migrations intérieures de la population à Madagascar », in Revue de géographie n°6. 12- RAISON (J), Immigration in the Sakay District, ORSTOM, Madagascar, 1975. 13- ROUX (J-C), Caractères démographiques des migrations spontanées dans une zone de terre neuve dans le moyen Ouest malgache, ORSTOM in Seminar of africanhistoricaldemo-graphy, Edinburgh, 1981. 14- RAVENSTEIN E.G, Courants migratoires In Topographic Department of the British War Office (1985). II-Documents officiels : 15- Monographie de la commune rurale d’Ankadinondry Sakay. 16- Monographie de la commune urbaine de Tsiroanomandidy.

90

III-Journaux, revues : 17- Andonirina RAKOTONARIVO, Cécile MARTIGNAC, Bénédicte GASTINEAU, Zo Lalaina RAMIALISON ; Densification rurale et structures spatiales du peuplement à

Madagascar: quelle place pour les migrations? Éditions, Institut de Recherche pour le Développement(I.R.D) 2010. 18- LYNELLYN (D), RAFIDIARISOA (M) et al, « FARANGA », dynamique de la migration interne à Madagascar : étude politique de deux communautés, n° 113/ SADES, 2007, 87p. 19-Objectifs du Millénaire pour le Développement, (O.M.D) 2005. 20-RAMIALISOA (L), « les Migrations internes à Madagascar : que sait-on ? »in Bulletin d’Information sur la population de Madagascar n°36, mars 2008.

IV-Webliographie :

1- http://www.hommes-et-migrations.fr, « Les hommes et migrations », consulté au mois de décembre 2014. 2- http://www.ined.fr/fichier/t_publication/506/publi_pdf1_pop_et_soc_francais_382, consulté au mois de décembre 2014. 3- pdf« Les migrations internationales », Septembre 2002, consulté au mois de novembre 2014. 4- Max Weber ; Http : // w.w.w.denistouret.net / idéologues / Weber.htmt, consulté au mois de novembre 2014.

TABLE DES MATIERES

REMERCIEMENTS SOMMAIRE INTRODUCTION GENERALE ...... 1 Généralités ...... 1 Motif du choix du thème et du terrain ...... 1 Problématique ...... 2 Objectifs...... 2 Hypothèse ...... 2 Méthodologie ...... 2 Les axes théoriques ...... 3 Les techniques d’enquêtes……………………………………………………………………. ... 5 Problèmes rencontrés et limites……………………………………………………………….. .. 6 Dépouillement des travaux de terrain………………………………………………………… .. 6 Plan de rédaction……………………………………………………………………………… .. 6

Partie I : PRESENTATION DU CADRE DE LA RECHERCHE…………………………… ... 7 Chapitre I : Etat des lieux et présentation de la commune rurale d’Ankadinondry Sakay……. . 7 1.2 Situation géographique…………………………………………………………………...... 11 1.2 Monographie et démographie……………………………………………………………. .... 12 1.3 Environnement physique………………………………………………………………… .... 15 Chapitre II : Ankadinondry Sakay, historique du peuplement………………………………. .... 16 2 .1 Peuplement………………………………………………………………………………. ... 16 2.2 Modes de Production……………………………………………………………………...... 18 2.3 Environnement social et éducatif………………………………………………………… ... 21 Chapitre III : cadrage théorique et historique de la migration……………………………….. ... 24 3.1 Concept sociologique de la migration…………………………………………………… ... 24 3.2 Interprétation historique de la migration………………………………………………...... 26 3.3 Explication géographique de la migration……………………………………………… ..... 28 PARTIE II : CAUSES ET REALITES DE LA MIGRATION……………………………… ... 32

Chapitre IV : Les acteurs de la migration et motivation de l’implantation des migrants…...... 32

4.1 Activités d’ordre salarial et agricole…………………………………………………….. ... 33 4.4 Les activités commerciales …………………………………………………………… ...... 36 4.5 Raison familiale………………………………………………………………………...... 36 Chapitre V : Caractéristiques des circuits migratoires……………………………………...... 38

5.1 Zones de départ………………………………………………………………………… ...... 38

5.2 Zones intermédiaires…………………………………………………………………… ...... 39 5.3 Zones d’arrivée………………………………………………………………………… ...... 41 Chapitre VI : Mode de vie des migrants …………………………………………………...... 44

6.1 La résidence et l’habitat des migrants ………………………………………………… ...... 44 6.2 La vie quotidienne des migrants………………………………………………………...... 46 6.3 La relation interactionnelle…………………………………………………………… ...... 50 PARTIE III : ANALYSE SOCIOLOGIQUE DE LA MIGRATION…………………… ...... 54

Chapitre VII : Volets économique, social, culturel dans la zone d’arrivée………………...... 54

7.1 Dynamique économique de la migration……………………………………………… ...... 54 7.2 Conséquence environnementale de la migration……………………………………… ...... 55 7.3 Effets psychosociologiques de la migration…………………………………………… ...... 57 ChapitreVIII : Circuit relationnel avec la zone de départ………………………………… ...... 62

8.1 Fréquentation de la zone de départ des migrants……………………………………...... 62 8.2 Intérêts relationnels entre zone de départ et zone d’arrivée des migrants……………...... 65 8.3 Conséquences de la migration dans les zones de départ. …………………………… ...... 67 Chapitre IX : Suggestions et prospectives………………………………………………… ...... 70

9.1 Vision de la migration dans la région de Bongolava et la commune rurale d’Ankadinondry Sakay. …………………………………………………………………… ...... 71 9.4 Les avantages et les inconvénients de la migration interne à Madagascar……………...... 78 9.5 Propositions sur la migration à Madagascar…………………………………………… ...... 82 CONCLUSION GENERALE……………………………………………………………...... 86

BIBLIOGRAPHIE………………………………………………………………………… ...... 89

Liste des abréviations:

RN1 : Route Nationale 1 RNA : Recensement National Agricole RGPH :Recensement général de la population et de l'habitat MAEP : Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche SPAS : Société Professionnelle de l’Agriculture de Sakay SOMASAK : Société Malgache d’Aménagement de Sakay ODEMO : Opération Malgache de Développement de Moyen-Ouest PAMO : Projet d’Appui de Moyen-Ouest SRI : Système de Riziculture Intensif FESA :Ferme d’Etat de la Sakay ONG : Organisation Non Gouvernementale RTS : Radio Tantsaha Sakay

RNM:Radio Nationale Malagasy

FJKM: Fiangonan’i Jesosy Kristy eto Madagascar

ECAR : Eglise Catholique Romaine

CECAM :Caisse d’Épargne et de Crédit Mutuel de Madagascar

O.M.D :Objectifs du Millénaire pour le Développement

EPP : Ecole d’Enseignement Primaire Publique

CEG : Collège d’Enseignement Général

PPN :Produits de Première Nécessité

G.C.V : Grenier Communautaire Villageois

ASA : Ankohonana Sahirana Arenina (Foyer en difficulté à réhabiliter)

JIRAMA: Jiro sy Rano Malagasy

CTD: Collectivité Territoriale Décentralisée

DRDR :Direction Régionale de Développement Rural

C.S.B :Centres de Santé de Base

Liste des tableaux :

Tableau n°01: Répartition de l’échantillon selon le genre ………………………………… ..... 7

Tableau n°02: Répartition de l’échantillon selon l’âge ……………………………………...... 8

Tableau n°03: Répartition selon le niveau d’instruction …………………………………...... 9

Tableau n°04: Répartition des échantillons selon leur origine territorial ………………… ...... 10

Tableau n°05: Répartition de l’échantillon selon la situation matrimoniale ……………...... 11

Tableau n°06 : Répartition de la population par Fokontany………………………………...... 12

Tableau n°07 : Répartition de la population par Fokontany ………………………………...... 13

Tableau n°08 : Répartition de la population par âge et par sexe …………………………...... 14

Tableau n°09 : Evolution démographique de la commune ………………………………...... 15

Tableau n°10 : Superficie cultivable et irrigable (riz) …………………………………… ...... 16

Tableau n°11 : Effectif de la population rurale et de la population agricole dans la région de Bongolava ………………………………………………………………………………… ...... 17 Tableau n°12 : Production de rizicole d’Ankadinondry Sakay ...... 19

Tableau n°13 : Production de céréales, racines et tubercules ……………………………...... 19

Tableau n°14: Production de Légumes …………………………………………………… ...... 20

Tableau n°15: Produits d’élevage de la commune d’Ankadinondry Sakay ……………… ...... 20

Tableau n°16: Les services administratifs …………………………………………………...... 22

Tableau n°17: Les établissements scolaires de la commune ……………………………… ...... 22

Tableau n°18: Infrastructures socioculturelles ………………………………………… ...... 23

Tableau n°19: Les médias locaux …………………………………………………………...... 23

Tableau n°20: Les Associations dans la commune d’Ankadinondry Sakay ………………...... 23

Tableau n°21: Motifs de migration des populations prises en échantillon ………………… ..... 33

Tableau n°22 : Effectif selon la durée d’essai de migration ………………………………...... 37

Tableau n° 23 : zones de passage intermédiaire des migrants ……………………………...... 40

Tableau n° 24:Types d’habitat de l’échantillon d’Ankadinondry Sakay …………………...... 45

Tableau n° 25 : Déplacement spatial du Fokontany Ankadinondry II …………………… ...... 47 Liste des figures :

Figure 01 : Répartition de la population par âge et par sexe ……………………………...... 14

Figure 02: Motifs de migration …………………………………………………………...... 33 Figure 03: Effectif selon la durée d’essai de migration ………………………………… ...... 37 Figure 04: Pourcentage des migrants selon leur territoire d’origine …………………… ...... 38

Figure 05 : zones de passage intermédiaire des migrants ………………………………...... 40

Figure 06: Motifs de migration à Ankadinondry Sakay ………………………………...... 42

Figure 07 : Types d’habitat de l’échantillon d’Ankadinondry Sakay …………………… ...... 45

Figure 08 : Déplacement spatial du Fokontany Ankadinondry II. ……………………… ...... 47

Liste des schémas :

Schéma n° 01: Circuit du produit rizicole ………………………………………………...... 50 Schéma n° 02: Formes psychosociologiques véhiculées par la migration……………… ...... 60 Schéma n° 03: Cycle de migration par Robert E. Park…………………………………...... 63 Schéma n° 04: Flux relationnel entre zones de départ et zones d’arrivée………………...... 69

ANNEXES

QUESTIONNAIRE

Décembre 2014

1. Quel est votre âge?

○1. 15-20 ○2. 21-25 ○ 3. 26-30 ○4. 31-35 ○5. 36-40

○6. 41-45 ○7. 46-50 ○8. 50 et plus

2. Sexe

○1. Masculin ○2. Féminin

3. Quelle est votre situation matrimoniale ?

○1. Célibataire ○2. Marié(e) ○3. Veuf(ve) ○4. Divorcé(e)

4. Pouvez-vous indiquer votre territoire d'origine?

○1. À la périphérie d'Antananarivo ○2. Antsirabe

○3. Ambatolampy ○4. Andramasina

○5. Anjozorobe ○6. Carion

○7. Faratsiho ○8. Manjakandriana

○9. Vakinankaratra ○10. Ambositra

○11. Ambalavao ○12. Fianarantsoa

○13. Fandriana ○14. Farafangana

○15. Manakara ○16. Vangaindrano

○17. Ambatondrazaka ○18. Toamasina

○19. Toliary ○20. Mahajanga

○21. Antalaha ○22. Sambava

5. Diplôme

○1. Aucun ○2. CEPE ○3. BEPC ○4. BACC ○5. Bacc+

6. Quel est le statut de votre habitation?

○1. Propriétaire ○2. Locataire ○3. Hébergé

7. Au sujet de votre activité professionnelle ?

○1. Activité professionnelle ○2. A la recherche d'un emploi ○3. Etudiant(e)

○4. Retraité(e) ○5. Reste au foyer

8. Travail exercé

○1. Agriculteur ○2. Chauffeur de taxi

○3. Chauffeur d'autobus ○4. Commerce de rue

○5. Couturier(e) ○6. Cordonnier

○7. Coiffeur ○8. Cuisinier

○9. Epicier ○10. Fonctionnaire

○11. Gardien ○12. Gargotier

○13. Grand commerçant ○14. Maçon

○15. Magasinier ○16. Main d'œuvre occasionnelle

○17. Propriétaire d'une quincaillerie ○18. Taxiphone

○19. Travailleur dans une salle de jeu ○20. Tireur de pousse

○21. Vendeur de médicaments

9. Type de la migration

○1. Individuel ○2. Familial ○3. En groupe

10. Pouvez-vous décrire votre situation d'origine?

□1. Pauvre □2. Manque de terre □3. Manque d'infrastructure □4. Insuffisance d'emploi

□5. Inexistence d'une Université □6. En bonne état

□7. Existence d'insécurité □8. Autres

11. Si 'autres', précisez :

12. Quel est le motif de votre migration?

□1. Pour raison d'étude □2. Pour raison de travail

□3. Pour suivre le conjoint □4. Pour suivre la conjointe

□5. Pour suivre les parents □6. Pour fuir la vie paysanne

□7. Pour fuir le sabotage des autres □8. Pour éduquer les enfants

□9. Pour aider ses familles en ville □10. Chômage

□11. Choix personnel □12. Arrêt de l'étude

□13. Problème familial □14. Autre

13. Si 'autre', précisez :

14. Est ce que vous êtes satisfait de votre besoin primaire?

○1. Oui ○2. Non ○3. Plus ou moins

15. Si 'Non', qu'est ce qui manque?

16. Gagnez-vous plus d'argent : dans votre territoire d’origine ou à Ankadinondry Sakay?

○1. Territoire d’origine○2. A Ankadinondry Sakay

○3. Pas de différence

17. Etes vous satisfait de votre revenu à Ankadinondry Sakay? ○1. Oui ○2. Non ○3. Plus ou moins ○4. Ça dépend

18. Comment est votre dépense journalière ou mensuelle par rapport à votre revenu?

○1. Supérieure au revenu ○2. Normale

19. Pouvez-vous précisez s'il y a d'autres sources?

20. Rencontrez-vous de problèmes concernant votre migration?

○1. Non ○2. Oui

21. Si 'Oui', précisez :

□1. Problème de fonds □2. Ne trouve pas d'emploi

□3. Manque d'argents □4. Suspension du travail

□5. L'argent n’est pas assez pour louer le foyer

□6. L'argent n’est pas assez pour éduquer les enfants

□7. Coût de vie très cher en ville □8. Inflation

□9. Insuffisance de client □10. Problème de la santé

□11. Sabotage des autres □12. Salaire minimal

□13. Existence de concurrents □14. Délestage

□15. Faible pouvoir d'achat des clients □16. Endettement

□17. Poursuivi par l’Etat

22. Trouvez-vous votre mobilité sociale ascendante ou descendante?

○1. Ascendante ○2. Descendante ○3. Toujours constante

23. Comptez-vous rester définitivement à Ankadinondry Sakay?

○1. Oui ○2. Non ○3. Pas encore connu 24. Si 'Non', précisez pourquoi ?

25. Quelle est votre ambition?

□1. Avoir un emploi fixe □2. Etre professionnel

□3. Elargir le champ du travail □4. Gouverner l'Etat

□5. Réussite sociale □6. Avoir sa propre maison

□7. Avoir une terre

□8. Etre satisfait de ses besoins primaires □9. Faire réussir les enfants

□10. Retourner riche au territoire d’origine □11. Faire de l'élevage

□12. Réussir ses études □13. Avoir un bon emploi

□14. Faire une formation professionnelle

□15. Trouver un emploi correspondant à son diplôme □16. Trouver un emploi

□17. Avoir une vie stable comme les autres

GUIDE D’ENTRETIEN AUPRES DU MAIRE ET DES CHEFS FOKONTANY

- Fokontany/Mairie:

- Nombre de Fokontany :

- Nombre de secteurs :

- Nombre de la population :

- D’après votre constatation, qui sont les plus nombreux, les résidents ou les migrants:

- De tous les migrants, qui sont les plus nombreux ?

- Pouvez - vous les classer par ordre d’importance ?

- Existe-il des groupes prédominant par secteur ? Si oui qui sont-ils ?

- Sont-ils inscrits au fokontany ?

- Et participent-ils à la vie communautaire ?

- Si non, quel groupe est le plus actif ?

- Comment se comportent-ils dans la société ? Est-ce qu’ils s’entendent bien entre eux ? Avec

Les résidents ? Et envers vous ?

- Quels sont les principaux problèmes qu’ils ont évoqués à leur arrivée ?

- Est-ce-que les migrants continuent toujours à venir ?Si oui, comment envisagez-vous la capacité d’accueil du fokontany/de la commune?

- Les migrants construisent-ils légalement ou non dans votre fokontany/commune ?

- Est-ce que les divers infrastructures et équipements du fokontany/commune suffisent avec l’augmentation en nombre de la population et l’arrivée des migrants ?

- Si oui, les autorités ont-ils déjà considéré ces problèmes ?A votre avis, les migrants ont-ils apporté des changements et du développement dans ce fokontany ? Au niveau de la commune?

Carte de la région Bongolava

INFORMATIONS SUR L’IMPETRANT

Nom : ANDRIANTSIFERANA Prénom : RADO Année d’étude : 5 ème année Adresse: Lot MF 18/I Ambohitrimanjaka B.P 13089 G.S.M: 034 18 081 03/ 033 24 689 62/032 04 171 16 E. mail : andriantsiferanaaa@ yahoo.fr Faculté : DEGS Département : SOCIOLOGIE Année académique : 2013-2014 Intitulé du mémoire :PHENOMENE DE MIGRATION : CAS DE LA REGION BONGOLAVA, COMMUNE D’ANKADINONDY SAKAY. Rubrique épistémologique : Sociologie et Anthropologie de développement. Nombre de pages : 90 Nombre de tableaux : 25 Nombre de schémas : 04 Nombre de figures : 08 Nombre de cartes :03 RESUME : La lecture de plusieurs ouvrages sur la migration, l’histoire de migration interne de Madagascar et les travaux de terrain nous ont aidés à la réalisation de ce mémoire. La migration interne apparait comme un facteur de développement dans les milieux concernés. L’observation du phénomène de migration dans la commune rurale d’Ankadinondry Sakay, Région de Bongolava nous a permis de prendre connaissance des motivations sociales, économiques et culturelles des migrants vers ce milieu et dans la région en général. Le développement enclenché par la dynamique spatiale est cependant fragilisé par des facteurs aléatoires sur lesquels il repose, comme le foncier, l’environnement, l’enclavement. Cette étude nous a permis d’analyser la mobilité sociale des migrants et d’émettre des propositions pour qu’elle puisse avoir un caractère effectif et durable. Mots-clés : Migration, Dynamique spatiale, mobilité spatiale, zone de départ, zone d’arrivée, zone intermédiaire. Encadreur : Madame RAMANDIMBIARISON Noëline, Professeur Titulaire.