Ces Suisses qui ont créé la France. Partie 13, L'opposition intellectuelle suisse à la Révolution française

Autor(en): Czouz-Tornare, Alain-Jacques

Objekttyp: Article

Zeitschrift: Suisse magazine = Swiss magazine

Band (Jahr): - (2007)

Heft 215-216

PDF erstellt am: 24.09.2021

Persistenter Link: http://doi.org/10.5169/seals-849572

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http://www.e-periodica.ch / Ces Swisses cjiti ont ci"éé la Franœ (XIII) L'opposition intellectuelle suisse à la Révolution française a

On dit les Suisses neutres dans les affaires du monde. Il n'en fut en tout cas pas ainsi durant l'époque révolutionnaire. Aux Suisses partisans des idées nouvelles que nous avons déjà eu l'occasion d'aborder dans cette chronique1, viennent s'ajouter des penseurs aux orientations politiques totalement opposées, comme nous le relate ici l'historien Alain-Jacques Czouz-Tornare dans cette chronique qu'il anime pour nous en partenariat avec les archives de la Ville de Fribourg/CH et le Musée franco-suisse de Rueil-Malmaison.

la chute de la monarchie et pagande contre-révolutionnaire. À tel Louis Fauche-Borel : de l'avènement du régime de la point que grâce à son activité, Après l'Encyclopédie à Pichegru Terreur, l'essentiel de la production Neuchâtel « a été près de dix ans l'un intellectuelle suisse de l'époque Dès la fin du XVIIIe siècle, l'élite cultivée des principaux foyers de diffusion de s'effectue désormais dans le camp de la Suisse se soustrait à la pensée contre-révolutionnaire en opposé à la Révolution. l'influence intellectuelle de la France. Dès Europe. »" Imprimeur en titre du roi de Le il Corps helvétique traumatisé par le lors, il ne faut pas s'étonner de voir le Prusse, fut surtout ici « imprimeur sort réservé à ses soldats en France et Neuchâtelois Samuel Fauche (1732- des émigrés avant même de devenir se sentant incapable de subsister sans 1803) prêter son nom aux éditeurs de leur agent »5. Il imprime par exemple, l'appui de la France, redoute l'avenir l'Encyclopédie de Paris pour détourner en 1796, les fameuses Considérations avec ces déroutants autant que redoutables les soupçons du pouvoir3, avant sur la Révolution française6. Joseph de qui régnent en maîtres que son fils Louis Fauche-Borel (1762- Maistre (1753-1821) reste l'un des à contre-révolutionnaire Paris. La plupart des Suisses sont 1829) n'imprime la « Déclaration de pères de la philosophie Il révolution alors tétanisés, paralysés au milieu des Pillnitz » durant l'été 1791, qui rendit française. voit en la événements qui se précipitent. C'est encore plus inconfortable la situation un événement catastrophique et de Londres que quelques Suisses de Louis XVI, ou ne répande dans providentiel qui déborde toutes les publient, dès 1796, la Bibliothèque toute l'Europe des brochures de pro- perspectives humaines. Selon lui, la britannique qui rejette les principes de révolution est une transgression de 1789. Ces fins observateurs de l'actualité l'ordre divin et à ce titre, elle ne peut tiennent une bonne place dans la qu'être vouée à l'échec. Le manuscrit contre-révolution intellectuelle. Dans qui portait d'abord le titre de l'ouvrage que Jean-Jacques Considérations religieuses sur la Langendorf consacre aux pamphlétaires France et qui était dédié à l'avoyer du et aux théoriciens de la contre- canton de Berne ne semble pas révolution, trois notices sont initialement avoir été destiné à la publication. consacrées à des Suisses : Jacques Le publiciste Jacques Mallet du Mallet du Pan, ancien rédacteur au Pan le publie à Neuchâtel, chez Louis Mercure de France dont la correspondance Fauche-Borel, pour servir la propagande politique débute en 1794, monarchiste en France. Cette Francis d'Ivernois, futur représentant publication à laquelle le public a accès de Genève au Congrès de Vienne en en 1797, remarquée par le futur Louis 1814, Johann Caspar Lavater (1741- XVIII et par Bonaparte est jugée 1801), dont l'action se déroulera inopportune par le gouvernement sarde essentiellement sur territoire suisse2. signataire d'un traité de paix (avril 1796) Louis Fauche-Borel avec la France.

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France. Parallèlement, il fait répandre ports essentiels de la Révolution dans l'intérieur de la France la déclaration réside bien dans la place qu'elle accorda du frère de Louis XVI du 10 mars à l'éducation. Très vite, l'Assemblée 1797, dans laquelle ce prince parle de nationale insiste sur la formation du la constitution de l'État et des améliorations citoyen. Saisissant l'opportunité d'une qu'il désire y introduire en forte demande sociale pour les interrogeant le vœu public à cet égard. ouvrages pédagogiques pour les enfants, En 1799, l'infatigable et irréductible Perlet publie dès 1791 les Charmes de Fauche-Borel reçoit de celui qui se l'enfance, un recueil de contes et faisait appeler Louis XVIII des lettres d'idylles destiné aux mères de familles patentes destinées à Barras, à qui la pour l'éducation des jeunes enfants journée du 18 brumaire ne laisse pas « qui reçoit un accueil favorable de la le temps d'effectuer le complot de part du public et dont les cinq rééditions restauration auquel il donnait la main. entre 1791 et 1796 marquent la Lors des préliminaires de la paix pérennité »". L'air de rien, son apport Jean-Charles Pichegru d'Amiens, c'est cette fois auprès de à la Révolution est important puisque Ce « grand espion » employé par les Moreau qu'il joue les intermédiaires. « à l'instar des fêtes révolutionnaires Britanniques7 devient l'agent des En 1801, il tente en effet de réconcilier », relève Jean-Luc Chappey, Bourbon auprès du Jurassien Jean- les généraux Jean-Victor Marie « les ouvrages pédagogiques destinés Charles Pichegru (1761-1804) en 1795- Moreau et Pichegru et de les amener à aux plus jeunes enfants, construits 1796, un des principaux animateurs servir la cause royaliste. Malgré des d'un « réseau d'espionnage et de activités désordonnées de toutes les débauchage à l'armée du Rhin-et- personnes compromises dans ces Moselle. »". C'est au quartier général différents complots, il fut bien le seul à d'Altkirch, le 14 août 1795, que en sortir indemne. C'est l'occasion de l'intermédiaire du prince de Condé noua les rappeler ici que la Suisse abrita nombre premières intelligences de l'intrigue d'imprimeries contre-révolutionnaires, qui gagna le brillant général Pichegru comme celle qui imprima au parti royaliste. Sous l'influence de plusieurs brochures émanant du Fauche-Borel, Pichegru s'attarda à réseau d'espionnage d'Antraigues (1753- Mannheim et par son inertie délibérée, 1812)9. Ces imprimeries pouvaient laissa Clerfayt menacer Jourdan, servir le cas échéant à imprimer des commandant l'armée de Sambre-et- faux assignats afin de ruiner l'économie Meuse, qui fut contraint de se retirer française, ce qui fut tenté en 1793- en deçà du Rhin. 1794'°. Dès le mois de juin 1796, le futur Louis Jean-Victor Marie Moreau le XVIII charge fidèle Neufchâtelois Le Genevois Perlet de autour de thèmes moralisateurs d'une nouvelle mission auprès et son retour en arrière Pichegru retiré à Arbois. C'est là supportés par un naturalisme de décor, qu'aurait été définitivement entendue Durant la Révolution, des Suisses se font partie de l'outillage idéologique entre eux la question de la constitution sont violemment opposés à d'autres construit à partir de 1789 pour à donner par le prétendant à la Suisses, comme l'imprimeur genevois instruire la Nation ». Et d'ajouter : « La Charles-Frédéric Perrelet ou Perlet pédagogie constitue le fondement de (1759-1828) qui se paya le luxe d'appartenir l'art d'améliorer et de régénérer la successivement à tous les camps Nation et justifie l'intérêt que lui portent en présence. Celui qui imprimait sans les acteurs révolutionnaires de l'écrire le Journal de Perlet, l'avait créé 1789 au Consulat. Cet intérêt peut sous le titre : Versailles et Paris ou être illustré par la valorisation dans rapport très exact des séances de l'espace public de certaines grandes l'Assemblée nationale. Cette gazette, figures de la pédagogie comme le parmi les plus lues pendant les Zurichois Jean-Henri Pestalozzi (1746- premières années de la Révolution, prend 1827) qui reçoit, avec dix-sept autres le nom de Journal de Perlet le 23 « bienfaiteurs de l'humanité », le titre thermidor an 11/10 août 1794. Le libraire- de « Citoyen français » décerné par imprimeur suisse installé rue l'Assemblée législative dans sa séance Saint-André-des Arts entre, en 1791, du 24 août 1792 »n. Perlet était devenu dans le comité de rédaction de la ce que G. Lenôtre appelle un « bon Gazette des tribunaux. Un des ap- royaliste » qui se vanta d'avoir contri- Louis xvill

IML2 Suisse Magazine n" 215/216 1 « Histoire. Ces Suisses qui ont créé la France » (III) : « La Révolution française pensée par des Suisses » in Suisse Magazine, no 195-196, novembre-décembre 2005, p. 7-11. 2 LANCENDORF )ean-Jacques, Pamphletisten und Theoretiker der Gegenrevolution (1789-1799), München, Matthes & Seitz, 1989, p. 149-152,159-163,190-210. 3 Cf. Jean CHAGNIOT, Paris au XVIII' siècle, Paris, 2001, chap. III, p. 443. 4 CANDAUX Jean-Daniel,"Louis Fauche-Borel, imprimeur de la Contre-Révolution (1791-1798)", in: Aspects du Livre Neuchâtelois. Neuchâtel, BPU, 1986, p. 381. 5 CANDAUX Jean-Daniel, "Les "Fruits de l'arbre de la liberté françoise" ou la triple supercherie" in: Musées de Genève, 226, juin 1982, p. 19. 6 Voir Joseph de Maistre, Considérations sur la France, édition critique par Jean-Louis Darcel, Genève, Slatkine, 1980, pp. 44-56. 7 BLANC 0., Les espions de la Révolution et de l'Empire, Paris, Perrin, 1995, p. 11, 73. 8 GODECHOT J„ in : La Contre-révolution, sous la dir. de Jean TULARD, Paris, PUF, 1961, p. 179. 9 FAYARD J.-F., Dictionnaire..., p. 527. NORA Pierre, article "République" in : Dictionnaire critique.., .p. 840-841. Voir aussi Marcel GAUCHET, ibid., p. 951-960,1053-1060. Voir également: Marie-Claude JE- QUIER, " Frédéric-César Laharpe, et Madame de Staël face à la Suisse, 1797- 1814 ", in: Revue Historique Vaudoise 86/1978, p. 39-56. 10 Voir notre texte avec Evelyne Maradan : « Le trafic de faux assignats depuis le canton de Fribourg en Suisse », in La Gazette des Amis du Musée Franco-Suisse, no 5, année 2004, p. 28-31. 11 Jean-Luc CHAPPEY, La Société des observateurs de l'homme (1799-1804), Société des études ro- bespierristes, Paris, 2002, p. 89. 12 Jean-Luc CHAPPEY, La Société des observateurs de l'homme..., p. 90 et note p. 90. 13 LENOTRE G., L'affaire Perlet, p. 89. Sur Perlet voir le DHBS, 1930, vol. V, p. 248. 14 Emile DUCOUDRAY, Article « Perlet » in Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, P.U.F., 1989, 834. Jean-Henri Pestalozzi p. 15 Cf. M. FAVRE, article Mallet du Pan in Albert Soboul, Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris 1989, p. 704. retentissant bué, en 1795, par un article 16 POITRINEAU Abel, Les mythologies révolutionnaires, Histoires, Paris, 1987, p. 179-180. à la libération de Madame 17 BLANC 0., Les espions de la Révolution et de l'Empire, Paris, Perrin, 1995, p. 82, 94. 18 GODECHOT Notes de Mme de Staël, Considérations la Révolution Royale13. Le voilà engagé résolument Jacques, pour l'ouvrage sur française, Tallandier, Paris, 1983, p. 636. Cf. J. GODECHOT, La Contre-Révolution 1789-1804, P.U.F., dans le camp anti-républicain au Paris, 1961, pp. 75-85 et 176-178. début du Directoire. Beau-frère du célèbre publiciste contre-révolutionnaire tres anglais pendant les guerres de la publieraient au moment où leurs Joseph Fiévée, Perlet est Révolution »17, fut, selon A. Poitrineau, armées entreraient en France. Mallet du lui-même membre du Club de Clichy l'un des rares esprits lucides de cette Pan ne rédigea pas le manifeste mais qui travaille activement au rétablissement époque et selon Taine, l'un des quatre fit part des intentions de Louis XVI au de la monarchie et se retrouve observateurs les plus attentifs de la duc de Brunswick. »n Tout comme la directement touché le d'Etat par coup Révolution française. Il déplore avec démarche de Du Roveray relative à la républicain du 18 fructidor an V". On tristesse, à la fin 1789, la défaite du séance royale de juin 1789, la le retrouve ensuite sous l'Empire, dans parti anglophile favorable à une démarche de Mallet du Pan avait abouti la police secrète, manipulant le monarchie à l'anglaise. J. Godechot a bien au résultat inverse de celui escompté. Neuchâtelois Fauche-Borel. montré le rôle que le publiciste joua Loin de participer à la sauvegarde de la en 1792 : « C'est Louis XVI qui avait monarchie, leurs actions respectives demandé au journaliste Mallet du Pan, le contribuèrent accidentellement à sa Mallet du Pan, un modéré 21 mai, avant celui-ci émigré, de destruction. Il n'avait servi à rien au cœur de la contre-révolution que pour rédiger un manifeste que les Alliés Mallet du Pan d'aller prêcher la modération D'un tout autre gabarit est l'éternel auprès des émigrés de réfugié genevois Jacques Mallet du Pan Coblence, du roi de Prusse et de En (1749-1800), la fameuse plume royaliste. l'empereur d'Autriche. août 1793, il Partisan d'une monarchie rédige ses Considérations sur la nature constitutionnelle, opposé à la violence au de la Révolution de France, fort appréciées nom de la justice, il travaille jusqu'en de Kant et Fichte. De Berne où il 1792 avec Panckoucke l'éditeur du s'établit après la chute de la monarchie, Mercure de France au journal historique il est régulièrement consulté par et politique de Genève, qui est les principales cours de l'Europe à qui l'annexe politique du Mercure'5. il prodigue ses informations Clairvoyant, ne déclarait-il pas déjà en politiques. En 1795, son pamphlet intitulé janvier 1789 : « Il ne s'agit plus que très Correspondance politique pour servir secondairement du roi, du despotisme à l'histoire du républicanisme français et de la Constitution ; c'est une irrite le Directoire dont il dénonce les guerre entre le Tiers État et les deux orientations. Exilé en Angleterre, il autres ordres. »u D'une haute élévation fonde un nouveau journal le Mercure d'esprit et de tenue morale, ce britannique ou notices historiques et « correspondant privilégié des minis¬ critiques sur les affaires du temps, à j%

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qui il donne ses dernières forces. saire de la France, il rédige de violents chien. Resté fidèle à son opinion Selon Jean-François Fayard, il discerna écrits contre le gouvernement contre-révolutionnaire, le « restaurateur « un des premiers l'étoile montante révolutionnaire et impérial. De Londres, le » fut I'« un des maîtres de l'idéologie de Bonaparte » et interpréta « 15 juin 1800, devenu Sir Francis contre-révolutionnaire de la remarquablement ce qu'allait être le régime d'Ivernois, il publie Des causes qui Restauration. »^ En préconisant une imposé par lui Il meurt à Richmond ont amené l'usurpation du général science politique « expérimentale » en Angleterre le 10 mai 18002". Bonaparte et qui préparent sa chute. fondée sur la loi naturelle, Haller tente Preuve que l'ouvrage du Genevois énergiquement, dans les années 1816- avait marqué les esprits, Barère est 1820, de contrer toute forme de Francis d'Ivernois, ou l'économie au aussitôt chargé par le Premier consul modernisation de l'État. Haut et fort, il secoumle la contre-révolution de rédiger une réplique à ces assura que l'Église catholique était critiques. Dans sa réponse d'un républicain seule en mesure de restaurer le pouvoir Mallet du Pan disparaît en 1800 mais français au libelle de Sir Francis sacré de l'État après les horreurs Napoléon Bonaparte n'en a pas pour d'Ivernois, naturalisé anglais, il d'une révolution blasphématoire. Rien autant fini avec les exilés genevois qui déclare : « Cet odieux libellé a été créé n'est plus faux, rétorqua le philosophe lui sont hostiles. Publiciste, avocat, par le mensonge et la perfidie pour Hegel, pour qui précisément la constitution économiste et homme politique, libé- continuer d'agiter l'Europe et pour de l'Église catholique installe rallumer la guerre civile... Sir Francis aux côtés de l'État une souveraineté d'Ivernois ne voit le principe de la rivale qui ne cesse de miner l'œuvre de révolution que dans le déficit des l'État. Au fond, Haller représente finances. Pour le philosophe et le l'anti-laïcisme à l'état brut. Converti au moraliste, le principe de la révolution catholicisme afin de se faire mieux est dans le progrès des lumières, dans entendre en France, il quitte Berne et ses le besoin d'une civilisation fonctions politiques pour s'établir à meilleure... Votre grand mot est « usurpation Paris, puis revient en Suisse, mais cette de Bonaparte », comme si l'on fois à Soleure24. usurpait le vœu d'une nation ; comme D'autres auteurs suisses plus mesurés si une constitution acceptée n'en garderont pas moins une n'excluait pas toute idée d'usurpation... certaine distance à l'égard de la toute- Avec le consentement général, avec le puissance française, anticipant en cela vœu du peuple, Bonaparte exerce le déclin de la France. l'autorité la plus légitime ». Revenu à Charles-Louis de Haller Genève en 1814, D'Ivernois est député la Suisse au Congrès de Vienne, ral mais adversaire de la Révolution pour où il contribue au rattachement de Alain-Jacques Czouz-Tornare française, Francis d'Ivernois (1757- Genève à la Confédération helvétique. 1842) doit se réfugier en Angleterre où il s'établit en 1792. Cet « héritier de la pensée politique de Rousseau et Charles-Louis de Haller, 19 J.TULARD, J.-F. FAYARD, A. FIERRO, l'éditeur de ses œuvres » qui, après le Restaurateur Histoire et dictionnaire de la Révolution avoir, tout comme Mallet du Pan, joué brillamment D'autres Suisses s'illustreront 1789-1799, Robert dans le démocratique française Bouquins, un rôle mouvement les la contre-révolution, dans rangs de Laffont, Paris 1987, 967. à Genève lutte l'aristocratie p. en contre tel le Bernois Karl-Ludwig von 20 Cf. K.-A. Mac Gregor Carpenter : Les en 1782, finit par préconiser Haller selon les ou préférences émigrés à Londres;1993, Thèse 3e cycle, « l'intervention armée de l'Angleterre Charles-Louis de Haller linguistiques Paris 1, IV, 26., chap. IV, 26. contre la Révolution française ». chap. p. p. (1768-1854), patricien de Berne, petit- de 21 KARMIN 0., Sir Francis d'Ivernois 1757- Auteur plusieurs ouvrages contre- fils du savant bernois de renommée 1842 sa vie, son oeuvre et son temps, révolutionnaires en 1794-1795, ce mondiale Albert de Haller. Comme collaborateur du Mercure Genève, 1920, p. 242, 244. D.H.B.S., II, 1924, britannique secrétaire de différentes délégations adhère à la doctrine de l'expiation, si p. 690. Cf. Jacques GODECHOT, art. bernoises, il a pu étudier la chère à Joseph de Maistre. D'Ivernois, "Idéologie de la Restauration", in : L'état de Révolution, Bonaparte et la France en ami d'Etienne « l'un des la France.... Dumont, fut 1797 et 1798. Hubert Foerster dit de économistes de la période, qui sut 22 BLANC 0., Les espions de la Révolution celui que l'on surnomma le restaurateur les crises et de l'Empire, Paris, Perrin, 1995, p. 92. analyser en profondeur qui qu'il fut le seul Suisse qui ait secouèrent la France entre 1789 et 23 Fayard Jean-F., Dictionnaire..., p. 895. donné un nom à une période de 1815 »21 et accessoirement, « un 24 Voir à son sujet Michel de Preux, 1996, agent l'histoire européenne. Publiciste fécond, il d'influence du Charles-Louis de Haller : un légitimiste appointé gouvernement fut engagé en 1802 comme secrétaire britannique ».~2 Constant adver¬ suisse ou L'Epée de St Michel. 1976,176 p. auprès du ministre de la guerre autri¬ il4 Suisse Magazine n° 215/216