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Harpes du I ARPA LLANERA & CANTO RECIO Musique et chant des États de Barinas et Apure

Harps from Venezuela I ARPA LLANERA & CANTO RECIO Music and songs from the States of Barinas and Apure MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 2

José Gregorio Lopez, harpe/harp - Carlos Alvarado, chant/singing José Manuel Aguilar, - Yilberto Rivero, maracas 1. Pajarillo de mi tierra (joropo corrido) - Francisco Montoya/trad...... 2’31” 2. Los Mamonales (pasaje) - instrumental - Trad...... 3’04” 3. La Chipola (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’35” 4. Seis por derecho (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’53” 5. Yo aprendí con Florentino (Seis por derecho con chipola/joropo) - C. Alvarado/trad. ... 3’36” 6. Los Caracoles (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 2’39” 7. Nuevo Callao (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’08” 8. Quirpa (joropo) - instrumental - Trad...... 3’39” 9. Tierra mía (pasaje) - Trad...... 2’24” 10. La periquera (joropo) - instrumental - Trad...... 3’11” 11. Zumba que zumba (joropo) - instrumental - Trad...... 3’11” 12. Galopa potro (zumba que zumba/joropo) - Jesus P. Lara/trad...... 1’51” 13. Carnaval (golpe) - instrumental - Trad...... 3’20” 14. Grito de joropo recio (Seis numerado/ joropo) - Carlos Alvarado/trad...... 3’57” 15. Gabán (joropo/golpe) - instrumental - Ignacio “Indio” Figueredo ...... 5’47” 16. Catira (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’56” 17. Pajarillo chipoleado (joropo) - instrumental - Trad...... 5’33”

Collection fondée par Françoise Gründ et dirigée par Pierre Bois Enregistrements réalisés à Barinas, Venezuela, en 1999. Enregistrements, notice, traduction des paroles, photos, Michel Plisson. Traduction anglaise, Frank Kane. Prémastérisation, réalisation, Pierre Bois. © et OP 2007 Maison des Cultures du Monde. Remerciements de l’auteur : ce disque n’aurait pas été possible sans l’aide et l’amitié des musiciens et cher- cheurs Cristóbal Soto, et Gabriel Castillo à Paris ; au Venezuela : l’Institut d’Ethnomusicologie FUNDEF, les Ateliers de musique populaire de la Fundación Bigott, l’Ambassade de et l’Alliance française de Caracas. Il remercie également les musiciens et personnalités de Barinas, Hilbrando Rosas et tout particulièrement la Señora Aurora Diaz de Sanchez pour son action infatigable en faveur de la musique llanera ainsi que pour sa grande générosité sans laquelle cette production n'aurait pu se réaliser. L’auteur exprime sa reconnaissance à la compagnie AIR FRANCE pour son soutien matériel.

INEDIT est une marque déposée de la Maison des Cultures du Monde (direction, Chérif Khaznadar). MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 3

Harpes du Venezuela I ARPA LLANERA & CANTO RECIO Musique et chant des États de Barinas et Apure

Il persiste aujourd’hui deux traditions de vions de sable vers d’autres cours d’eau for- harpe au Venezuela. L’une est appelée harpe mant lagunes, marécages et terres inondées des llanos, ou arpa llanera, du nom des grandes au sein desquelles prolifèrent anacondas et plaines du sud du pays, l’autre est appelée crocodiles (caimanes). Les rapides et l’ensa- arpa tuyera du nom de la rivière Tuy, région blement constant des trois fleuves princi- centrale du Venezuela. Ce CD est consacré à la paux des llanos les río Arauca, Meta et Apure arpa llanera. La arpa tuyera fait l’objet d’un qui peuvent parfois monter de plusieurs deuxième CD dans la même collection 1. mètres ont longtemps laissé cette région dans un relatif isolement dont bénéficient Les llanos flore et faune qui, dans cette zone, sont Les llanos, ce sont ces grandes plaines d’une richesse exceptionnelle. humides situées au sud-est de la Colombie et Peu d’hommes dans cette immense étendue au sud du Venezuela sur une longueur de plus humide. Quelques villes toutefois que les de 1000 km, bordées d’un côté par les Andes Espagnols mirent longtemps à implanter qui commencent alors à s’incliner pour chu- comme Barinas et San Fernando de Apure. ter brutalement dans la mer caraïbe, et de Cette dernière, située sur le río éponyme est l’autre par l’immense delta de l’Orénoque, ce considérée comme le cœur des llanos. dernier constituant un univers géo-politique Toutefois, les llanos débordent largement la et environnemental à lui tout seul. région des grandes plaines humides. En tant Sur cette immense plaine, qui s’incline dou- que zone géopolitique, les llanos touchent cement des Andes à l’Atlantique, l’eau est plusieurs Etats. D’une part les llanos ociden- partout présente, tout spécialement durant tales s’étendent sur les Etats de Cojedes, la saison des pluies, entre mai et décembre. Portuguesa, Guárico, Apure et Barinas ainsi C’est alors que les fleuves débordent, chan- que plusieurs départements de Colombie geant de cours, refluant leurs énormes allu- dont celui d’Arauca. D’autre part, vers l’est,

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du côté de l’embouchure de l’Orénoque, les territoire. Harpes et vihuelas sont en effet très llanos orientales touchent les Etats de populaires en Espagne au moment de la Anzoátegui, Monagas et Bolivar. conquête. Traités et méthodes pour “tecla, Dans le champ symbolique, les llanos ont arpa y vihuelas” abondent au XVIe et XVIIe joué un rôle important dans la construction siècle. On peut citer parmi d’autres le “Luz y identitaire du Venezuela notamment à Norte”2 de Ruiz de Ribayaz, contenant à la fois l’époque des guerres d’indépendance en se des tablatures pour harpe et vihuela ainsi que ralliant à la lutte de Simón Bolivar et des des considérations musicales concernant l’in- créoles blancs contre la Couronne espagnole. terprétation. Ce traité nous donne des clés Aujourd’hui, à l’intérieur comme à l’exté- d’interprétation qui s’appliquent également à rieur du pays, la musique llanera est celle qui la musique vénézuélienne pour harpe d’au- identifie le mieux le Venezuela. jourd’hui. Au Venezuela, la harpe est mentionnée dans La harpe au Venezuela plusieurs testamentarías3 de Caracas dès le Les Espagnols arrivèrent très tôt sur les côtes XVIIe siècle. Assez tôt on fabrique des harpes vénézuéliennes. Dès 1499, Alonso de Hojeda, au Venezuela de tailles différentes. Certaines compagnon de Christophe Colomb, explore sont de dimension assez modeste comme les îles proches de la côte puis la terre ferme. celle que mentionne Alberto Calzavara4 Voyant une petite cité lacustre sur la lagune ayant appartenu à une certaine Doña María de Maracaibo, ils appelleront cette région Lopés Regañon, datant de 1747 et dont la Venezuela, la petite Venise. Les archives colo- hauteur ne dépassait pas 1,10 m (presque niales attestent que, dès 1529, arrivent 15 identique à la hauteur de la harpe tuyera), vihuelas en provenance de Séville. Par la suite d’autres sont plus hautes. Dans tous les cas, arriveront flûtes, chirimías, violons, violon- ces instruments ont 32 clés correspondant à celles, guitarra baroca et harpes, tant à 32 cordes, nombre que conservent en géné- Cumaná, alors port d’entrée des Espagnols, ral les harpes traditionnelles du Venezuela qu’à Caracas, et qui se diffuseront sur tout le aujourd’hui.

2. Ruiz De Ribayaz, Lucas, Luz y norte musical para caminar por las cifras de la guitarra española y arpa, y tañer y cantar a compás por canto de órgano, Melchior Alvarez impresor, Madrid, 1677, réédité en fac-simile par Minkoff reprint, Genève, 1976. Parmi les versions les plus notables, citons celle du harpiste anglais Andew Lawrence-King/The Harp Consort Luz y Norte / Lucas Ruiz de Ribayaz, BMG, 1995. 3. Inventaire de succession testamentaire. 4. Calzavara Alberto, Historia de la música en Venezuela/Periodo hispánico con referencias al teatro y la danza, Fundación Pampero, 1986. p. 58.

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Ces instruments, d’abord confinés dans le espagnole du XVIIIe siècle qui nous frappe cercle étroit des églises et des palais des gou- dans la musique de harpe traditionnelle du verneurs se répandront rapidement dans Venezuela et la grande facilité avec laquelle d’autres lieux de la société civile, pour s’accli- les musiciens des llanos peuvent élaborer de mater dans les milieux ruraux modestes à multiples variations à partir d’une grille partir du XVIIe siècle. d’accords simple dont certaines étaient déjà On atteste dès cette époque qu’elle est jouée employées à l’époque baroque. par les métis et les esclaves noirs un peu par- Après la dissolution de l’Ordre en 1767 et le tout dans le pays comme l’indique cet avis de départ des Jésuites, les populations indiennes recherche rétribuant la capture d’esclaves en continuèrent à pratiquer les instruments fuite, ayant comme caractéristiques, entre européens et bien sûr à les fabriquer. autres, de “savoir jouer de la harpe”5. Ces ins- Descendue dans le peuple, la harpe persista truments sont joués notamment dans les néanmoins dans l’aristocratie et les salons. misiones où les religieux tentent de christiani- Doña Concepción, la propre mère du ser les Indiens. Alberto Calzavara indique que Libertador Simón Bolivar, en jouait, dit-on, “les témoignages sur l’enseignement musical fort joliment. Les salons de l’aristocratie aban- que dispensaient les prêtres jésuites (mais donneront peu à peu cet instrument au profit aussi d’autres ordres religieux) durant le des nouvelles modes issues d’Allemagne, de XVIIIe siècle à différents groupes indigènes France, d’Angleterre et d’Italie. dans les missions des llanos, sur les deux rives Toutefois, cette musique de salon pour harpe de l’Orénoque comme celles de San Ignacio était déjà fort éloignée de celle qui continuait de Cabruta et San Miguel de Macuco, mon- à être jouée par les habitants des llanos. Dans trent clairement que la harpe faisait partie de le peuple, on restait fidèle à cette musique cet enseignement”6 à côté d’autres instru- qui avait été longtemps celle des maîtres ments comme le violon, le violoncelle, les blancs mais que les couches populaires métis- flûtes à bec, la guitare, la vihuela et le triangle. sées s’étaient appropriées. La tradition est La harpe, à l’époque, sera utilisée dans bien devenue orale et les instruments sont fabri- des cas pour construire l’accompagnement qués à la maison avec des matériaux locaux de continuo sur lequel s’appuie le chant. De ou de fortune. Lorsqu’au XIXe siècle la là sans doute ces réminiscences de musique musique européenne de salon envahira les

5. Calzavara Alberto, ibidem p. 59. 6. “Los vestigios sobre la enseñanza musical que impartían los sacerdotes jesuitas (y otras congragaciones) durante el siglo XVIII a diferentes grupos indígenas en las misiones de los llanos, en ambas riberas del Orínoco, ponen en claro que el arpa formaba parte de casi toda esa ensañanza” in A. Calzavara, ibidem.

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pratiques musicales en Amérique du sud, les On sait par ailleurs que ces musiques colo- llanos absorberont quelques-unes de ces niales métissées influencent en retour les influences comme la valse – ce qui est sen- pratiques de musique populaire en Espagne sible dans le pasaje et la tonada – mais reste- comme on peut s’en rendre compte dans ront fidèles aux vieilles pratiques de musique l’ouvrage de Ruiz de Ribayaz 7. et de danse issues de l’époque coloniale. En définitive, à partir de ce substrat musical Música llanera et conjunto llanero européen écrit et en quelque sorte venu d’en La musique des llanos est une construction haut, la tradition orale populaire vénézué- sociale et culturelle dont la profondeur histo- lienne recompose une musique indépen- rique est vieille de plusieurs siècles et qui tire sa dante, formée d’un corpus mélodique original force de ses nombreux apports et métissages. sous-tendu par une rythmique nettement C’est un univers musical, chorégraphique et influencée par les cultures africaines et/ou poétique chanté et/ou instrumental structuré afro-américaines. Cuatro, harpes, guitares et par des instruments, une pratique sociale très maracas (instrument amérindien et africain) stable et un corpus mélodique traditionnel prolifèrent et adoptent des métissages musi- riche de plusieurs centaines de thèmes. caux, recevant de nombreuses influences dont Traditionnellement, le rôle de la musique lla- celle des Noirs qui, pendant une certaine nera est d’accompagner la danse. Elle est période, constituent plus de la moitié de la aujourd’hui très souvent instrumentale. population coloniale. Ce processus de recom- La música llanera ne connaît aucun dépérisse- position syncrétique se retrouve un peu par- ment. Bien au contraire, son aire de diffusion tout dans les musiques latino-américaines de et son corpus n’ont cessé de s’étendre depuis tradition orale. Mais la particularité des llanos les années soixante, période où la harpe et sa et de leur musique réside dans la préservation musique suscita un regain d’intérêt considé- de ces pratiques anciennes dans la musique rable, tant du côté colombien que du côté comme dans la danse. Tombée en désuétude vénézuélien, pour acquérir un statut quasi dans maintes régions d’Amérique latine au national. À cette époque, beaucoup de jeunes cours du XIXe siècle, la harpe continuera à ser- compositeurs enrichirent cette musique d’un vir les pratiques musicales des llaneros, accom- instrumentarium plus varié, d’une harmonie pagnée du cuatro et des maracas. parfois plus moderne et d’un nouveau corpus

7. Ruiz De Ribayaz accompagna le vice-roi du Pérou et c’est à son retour d’Amérique, en 1677, qu’il publia son ouvrage de musique et de danse d’inspiration populaire : Luz y norte musical dans lequel se font sentir les influences populaires américaines notamment des danses comme zarambeque, réputée danse de Noirs et zarabanda.

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mélodique. Toutefois, ni les instruments tradi- de cordes. On note au passage que tous ces tionnels ni le corpus ancien ne furent évincés termes musicaux et d’autres encore, utilisés par ce modernisme. Jouée aujourd’hui un peu au XVIIe siècle en Espagne et disparus depuis, partout dans le pays, elle garde une forte pré- perdurent de nos jours au Venezuela dans la férence pour sa région d’origine, les llanos, où musique de tradition orale. elle reste de très loin la musique traditionnelle Cette configuration instrumentale est très la plus populaire et poursuit imperturbable- stable particulièrement dans les llanos. Alors ment sa longue histoire pluricentenaire. que le Venezuela connaît tous sortes d’instru- Aujourd’hui comme hier, ce sont des cen- ments et les musiques les plus diverses selon taines de harpistes qui pratiquent, entretien- les régions, cette musique continue à se jouer nent et enrichissent ce genre musical tant du dans les llanos avec les mêmes instruments côté colombien que vénézuélien des llanos depuis longtemps. tout en conservant à leur répertoire des cen- La danse participe également de cet ensemble taines de “standards” uniquement transmis llanero. Elle sollicite tout le groupe social, tant par tradition orale et imprégnation familiale au village que dans l’espace privé de l’ha- ou sociale. Mais qu’ils restent au village où cienda ou de la maison. qu’ils migrent à Caracas ou ailleurs dans le monde, pour suivre une vie de musicien pro- Joropo, golpe et pasaje fessionnel, les harpistes llaneros restent liés à Le joropo représente dans les llanos vénézué- leur tradition de manière indéfectible. liens et colombiens un ensemble complexe. L’instrumentarium standard du conjunto lla- C’est un genre musical-chorégraphique com- nero comprend arpa, cuatro et maracas, la ban- prenant la danse, le chant semi-improvisé, la dola (cordophone à plectre) se substituant manifestation festive, le rythme, les instru- parfois à la harpe ou se surajoutant à l’en- ments et les tournures mélodiques. Dans les semble. La harpe est généralement l’instru- llanos, le joropo est partout présent dans les ment soliste. Si le chanteur intervient, la manifestations festives : mariage, fête de saint harpe reprend alors son rôle d’accompagne- patron, plutôt dans l’espace semi-privé mais ment, à côté du cuatro et des maracas. aussi dans l’espace public. La stabilité de ce La arpa llanera est l’instrument incontour- genre musico-chorégraphique et de son cor- nable de la música llanera. Elle possède en pus mélodique comme sa grande vitalité sont général 32 à 36 cordes en nylon. Ces cordes exemplaires en Amérique hispanophone. sont réparties en 12 bordones, 10 tenoretes et À l’époque de la colonie, le terme joropo ren- 10 primas o tiples. C’est la harpe espagnole voie à des pratiques festives de danse, la plu- diatonique (sans pédales) à une seule rangée part du temps associées aux Noirs et à leurs

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fêtes, tout comme les termes de fandango, Pour la musique, ce n’est que vers 1880 que le sarao, tango-fandango, zarambeque, danza de los terme joropo est associé à une musique, ce qui monos, merengue. La référence à la danse est n’est sans doute pas étranger au mouvement constante. Certains auteurs suggèrent que le musical nationaliste qui se développe à ce nom de joropo seis por derecho viendrait de moment, utilisant ou s’inspirant d’aires criol- l’époque coloniale où six ou huit danseurs los. La popularisation du thème “Alma lla- sortaient de l’église. Mais pas plus les figures nera” dû au directeur de la fanfare munici- de danse que le rythme ou la musique ne sont pale de Caracas Pedro Elias Guttierrez décrits dans ces textes anciens. On peut tou- (1870-1954) fera beaucoup pour le joropo, tefois avancer que même si elle n’a pas été la bien que formellement plus proche d’une zar- seule, l’influence hispanique a joué indiscuta- zuela espagnole que d’un joropo traditionnel. blement un rôle majeur dans la formation du Ainsi, danse et musique d’origines et époques joropo, notamment à l’époque coloniale. diverses se retrouveront définitivement sou- Pour la danse, on retrouve des figures simi- dées sous le label commun de joropo. laires dans nombre de pays d’Amérique hispa- Si tous les joropos ont en commun un pattern nophe aussi éloignés les uns des autres que le rythmique générique de type sesquialtère 3/4 Pérou, le Chili, l’Argentine, le Paraguay, la 6/8 (alternance de mesures ou de séquences à Colombie, le Mexique… qui ne constituaient 3/4 et 6/8 et de leurs multiples : 3 x 2, 3 x 4, à l’époque que les régions d’un vaste empire, mais jamais de 2 x 2 ou 4 x 4) les joropos se telles la tenue de main et l’usage du mouchoir déclinent en différentes pratiques régionales dans le jeu de séduction, l’escobillao (“brosser” : comme le joropo oriental et le joropo central 8 va-et-vient rapide des pieds en dansant), le ainsi qu’en une infinité de formes, de zarandeo (tournoiement), resbaloso (pas glissé), variantes, d’entrelacements, de rythmes, selon etc… et surtout la figure du zapateo (claque- des progressions mélodico-harmoniques très ment des talons), quoique différent de celui diverses. Comme nous l’avons déjà montré du Mexique, de l’Argentine ou du Pérou... dans d’autres écrits 9, chaque joropo – par Plus tard, les figures de danses ont aussi subi exemple seis por derecho, chipola, quirpa, per- l’influence des danses de salon comme la iquera, gabán, San Rafael, etc. – est structuré valse, la scottish, la mazurka et la valse, deve- sur un enchaînement précis d’accords à l’ins- nues très à la mode au cours du XIXe siècle. tar de certains thèmes du XVIe siècle espagnol

8. Voir CD Harpes du Venezuela II, ARPA TUYERA & BUCHE, un CD INEDIT/Terrains W 260129. 9. Voir CD Venezuela. Musique de l’Orénoque : Cheo Hurtado, cuatro et bandola, Ocora/Radio France, C 560119, 1997.

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tel le célèbre Guardame las vacas sur lequel On peut penser que sa construction est plus “glosaient” les vihuelistes-compositeurs. récente car plus proche de l’harmonie tonale. Comme pour la musique espagnole de cette Joué sur un tempo plus lent que le golpe, il se époque, le musicien élabore plutôt des varia- compose de trois parties ininterrompues tions sur la mélodie qu’une improvisation pro- (pasaje corrido) et sans refrain (estribillo). prement dite, car le schéma harmonique reste inchangé, sauf à inventer de nouveaux joropos. Le llanero et le canto recio De cette manière, chaque interprète/composi- Qu’il soit gardien de troupeau, pêcheur ou teur apporte à la tradition autant qu’il la pro- braconnier, l’image du llanero constitue un longe. L’équilibre entre groupe et individu, archétype dans l’imaginaire populaire véné- entre tradition collective et personnalité indi- zuélien. L’homme des llanos, c’est ce person- viduelle est ainsi clairement établi : la grille nage endurant et sauvage, issu de multiples d’accords et la structure rythmique identifiant métissages, blanc, indien et noir, confronté à chaque joropo appartient au groupe et à la tra- la nature hostile et imprévisible et dont la sur- dition, les variations sur ces accords, les vie ne dépend que de son courage et de son contours mélodiques, le style, le swing, l’émer- expérience. L’imaginaire populaire vénézué- gence de nouveaux thèmes, appartiennent à lien se nourrit de cette relation “telúrica” entre l’individuel, au musicien. d’une part, la puissance de la nature et d’autre Le joropo se décline ensuite en de nombreux part, la précarité du mode de vie de ces styles appelés golpe, certains simples et hommes qui, sur leurs fragiles barques à fond d’autres harmoniquement et rythmiquement plat, s’enfoncent dans les marais, d’où peut plus complexes, se composant de plusieurs sortir à chaque instant le tigre (jaguar) l’ana- parties comme l’a très bien analysé la musi- conda ou le crocodile (caiman). C’est peut-être cienne et musicologue Claudia Calderón10. de cet environnement hostile et instable que Si pour l’oreille non avertie il n’est pas toujours le llanero a acquis sa réputation de méfiance, aisé de distinguer entre golpes, joropos et leurs de ruse (bellaco, recelo) et de superstition s’il déclinaisons complexes, on ne se trompe faut en croire l’écrivain vénézuélien Rómulo jamais au Venezuela sur la reconnaissance d’un Gallegos dans son célèbre Cantaclaro (1934). genre musical, que l’on soit musicien ou non, Entre cette nature sauvage et peu domesti- tant cette musique fait véritablement langage quée et l’homme qui lui est soumis et dont il pour ceux qui participent de cette culture. dépend largement, s’établit un rapport désé- Le pasaje fait aussi partie de la musique llanera. quilibré. De là peut-être, cette tension angoissée qui se retrouve dans la musique des llanos, 10. Voir bibliographie p. 15.. dans le jeu de la harpe, dans celui des maracas,

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dans cette voix nasale propre aux llaneros, ce l’extérieur la fête s’organisait. Les cofradías canto recio, comme dans les paroles des chan- d’esclaves noirs y tenaient une place impor- sons et de la poésie chantée improvisée. tante avec leurs chants et leurs danses, Le canto recio, que l’on peut traduire par notamment lors des fêtes de “corpus christi”. “chant rude” est la manière de chanter Comme pour les instruments de musique, propre aux llaneros. Voix de gorge et non voix beaucoup d’indices tendent à établir une filia- de tête et parfois entre les deux (mitad de tion entre cette voix si particulière des llaneros cabeza y mitad de pecho), une grande tension et la tradition liturgique et para-liturgique est en même temps donnée à cette voz llanera européenne. Pour le musicologue vénézuélien qui tend toujours vers les aigus et jamais vers Jose Peñin11, on en trouve des traces dans le les graves. Cette association de voix à la fois chant appelé “Tonos de Velorio de Cruz de nasale et sur-timbrée alimentée par une puis- Mayo” qui se pratique dans les llanos de la sante énergie constitue un style chanté assu- province d’Arauca en Colombie, chant à trois rément original. Le timbre particulièrement voix organisé de manière polyphonique et qui nasal de cette voix ne se retrouve pas dans la s’appellent chacune : tenol, contrato et falsa. Le langue quotidienne parlée. Il ne s’entend que terme tono est ici utilisé dans son sens espa- dans le chant et semble être la caractéristique gnol de l’époque de la colonie, c’est-à-dire : stylistique du canto llanero. Nous ne la tonalité, ou plus exactement : mode. connaissons, en effet, que dans les llanos Le terme falsa renvoie aussi à l’époque colo- colombiens et vénézuéliens. niale. Les falsetistas chantaient dans les églises Comme pour les instruments, il semble qu’il en voix de gorge (et non en voix de tête). “Ils y ait dans cette manière de chanter des rémi- pouvaient interpréter la voix de dessus en niscences du chant européen des XVIe et plus de leur voix naturelle de basse, baryton XVIIe siècle. En effet, dans les llanos la pro- ou ténor” affirme Jose Peñin. C’est cette tech- fondeur historique est aussi notable pour le nique de “cantar con voz de garganta” qui a per- chant que pour les instruments. Les sources duré dans les llanos vénézuéliens. Dans le documentaires sont nombreuses qui signa- canto recio, la voix de gorge est poussée certes, lent fêtes liturgiques et para-liturgiques. Ainsi mais reste dans le premier registre. le jésuite autrichien Miguel Alejo Schabel auteur d’un testament rédigé en 1705 parle L’origine de la harpe selon Gregorio Lopez des festivités importantes pour les fêtes À la question qui lui est posée sur l’origine de la annuelles de Santa Lucía et de l’Immaculée harpe, le harpiste José Gregorio Lopez répond : Conception à Barinas, capitale des llanos. À l’intérieur de l’église il y avait des chants et à 11. Voir bibliographie p. 15.

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“Je pense que c’est un instrument céleste. Le pre- versions sur l’origine de la harpe. J’aime celle- mier instrument qui a existé sur la terre. Il y a là. Je l’aime d’autant plus que c’est moi qui l’ai beaucoup de théories sur la harpe. J’ai aussi une inventée…!”. théorie sur l’origine de la harpe…, comment vint la harpe... : Arrive un jour un primate Les musiciens sont originaires de Barinas. fuyant un dinosaure. Le primate se dirige vers la José Gregorio Lopez, harpe, a une cinquan- forêt car le dinosaure ne peut entrer dans la forêt taine d’années et vit de sa musique. Il a été car c’est un animal immense. Il reste dans la très influencé par des harpistes de la première plaine. Sur le chemin, le primate trébuche et se moitié du XXe siècle comme Ignacio “El heurte le menton sur une liane. Cela lui donna Indio” Figueredo, Juan Vicente Torrealba et un son. Il poursuivit son chemin. Cinquante Joseito Romero. mètres plus loin, il se rendit compte qu’il s’était Carlos Alvarado est un des meilleurs chanteurs passé quelque chose. Il attrapa la liane, la tendit de canto recio de Barinas. Né en 1965, il est auto- puis la lâcha. Il se produisit de nouveau un son. didacte. Il a appris à chanter dans les fêtes popu- Alors il en prit une autre liane. Puis une autre et laires et familiales. Il vit lui aussi de la musique. ainsi de suite et chaque fois se produisait un José Manuel Aguilar, cuatro. son. Ainsi vint la harpe. Il y a beaucoup de Yilberto Rivero, maracas.

LES PIÈCES

Les pièces présentées dans cet album ont été 1. Pajarillo de mi tierra (joropo corrido) sélectionnées à partir d’enregistrements Paroles : Francisco Montoya, musique : tradi- effectués au Venezuela en 1999 avec un tionnel. matériel numérique portable. Les enregistre- Harpe, maracas et voix. Tonalité : Ré mineur. ments ont été effectués à Barinas, dans des Le pajarillo est un oiseau des llanos. La pièce lieux naturels, en cherchant à utiliser au est construite sur les trois notes : Ré Sol La maximum l’acoustique des matériaux selon une progression I - IV - V7 soit Ré comme le bois et la pierre qui abondent au mineur - Sol mineur - La 7. Sur cette struc- Venezuela. Le patio intérieur de ses nom- ture harmonique le chanteur improvise des breuses maisons coloniales permet sur quatrains octosyllabiques (cuartetas). Le quatre côtés la concentration des sons pajarillo est devenu un des joropos les plus harmoniques. emblématiques de la musique llanera et per- Des extraits des poèmes chantés avec leur met à de nombreux musiciens d’exercer leur traduction sont réunis pages 14 à 19. virtuosité et leurs qualités musicales.

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2. Los Mamonales (pasaje) 6. Los Caracoles (joropo/golpe) Traditionnel. Traditionnel. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré majeur. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré majeur. La mélodie de ce beau pasaje comprend deux Ce golpe composé de deux phrases de huit phrases distinctes qui se répètent plusieurs mesures est utilisé notamment pour la fois sans interruptions. danse.

3. La Chipola (joropo/golpe) 7. Nuevo Callao (joropo/golpe) Traditionnel. Traditionnel. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : La majeur. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré majeur. La tonalité majeur est une des caractéris- Ce golpe très traditionnel est parfois appelé tiques de la chipola. On note aussi l’ostinato Sabana Blanca dans la région des llanos. mélodico-rythmique et le bordoneo des basses de la harpe. 8. Quirpa (joropo) Traditionnel. 4. Seis por derecho (joropo/golpe) Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré mineur. Traditionnel. Selon la légende, la mort violente d’un Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré majeur. chanteur llanero aurait inspiré un harpiste à Un des golpes les plus traditionnels. Basé sur composer ce joropo. trois accords, il se caractérise entre autres par l’insistance du couple quarte et tierce 9. Tierra mía (pasaje) dans la mélodie et un jeu de basses très mar- Traditionnel. qué. Il en existe de multiples versions y Harpe, cuatro, maracas et voix. compris orchestrales. Tonalité : Do majeur. La harpe est accordée en Do majeur et en La 5. Yo aprendí con Florentino (Seis por dere- mineur. cho con chipola/joropo) Paroles : Carlos Alvarado, musique : traditionnel. 10. La periquera (joropo). Harpe, maracas, cuatro et voix. Traditionnel. Tonalité : Ré majeur. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré majeur. Le harpiste intègre dans cette pièce chantée Ce joropo emblématique des llanos aurait été deux golpes distincts, le Seis por derecho et La composé et dansé pour la première fois en Chipola. On peut comparer avec les deux 1928 dans un village nommé Periquera. thèmes des plages 3 et 4. Progression harmonique : I – IV – V 7.

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11. Zumba que zumba (joropo) 15. Gabán (joropo/golpe) Traditionnel. Attribué à Ignacio “Indio” Figueredo. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré mineur. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré mineur. Autre joropo emblématique des llanos. On y Le gabán est un oiseau des llanos. La tradi- retrouve les mêmes accords que dans La peri- tion veut que ce magnifique golpe ait été quera mais en mode mineur. À noter le jeu composé par le grand harpiste Ignacio de basse golpeao. “Indio” Figueredo. Sur cette structure simple de deux accords (tonique et dominante) le 12. Galopa potro (zumba que zumba/joropo) musicien peut laisser libre cours à des varia- Paroles : Jesus P. Lara, musique : traditionnel. tions mélodiques originales. Harpe, cuatro, maracas et voix. Tonalité : Si mineur. 16. Catira (joropo/golpe) Traditionnel. 13. Carnaval (golpe) Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré mineur. Traditionnel. Ce golpe très traditionnel est proche du paja- Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré majeur. rillo mais avec des variantes dans la mélodie. Ce golpe est construit sur trois suites d’ac- cords différentes, soit trois parties attachées 17. Pajarillo chipoleado (joropo) les unes aux autres. Traditionnel. Harpe, cuatro, maracas. Tonalité : Ré mineur. 14. Grito de joropo recio (Seis numerado/ Le musicien fait plusieurs allers et retours joropo) entre pajarillo et chipola avant de terminer Paroles : Carlos Alvarado, musique : traditionnel. sur un accord brusque de dominante de Harpe, cuatro, maracas et voix. pajarillo. Tonalité : Ré majeur. Le harpiste reste deux mesures sur chaque accord : Ré M Ré 7 et Sol M. MICHEL PLISSON

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Pajarillo de mi tierra (plage 1 / track 1) Petit oiseau de mon pays Pajarillo de mi tierra Petit oiseau de mon pays Que vuelos por todo el llano Qui vole sur tout le llano Canta como canto yo Il chante comme moi je chante Si eres buen venezolano Si tu es un bon Vénézuélien Por toda mi noble patria Pour ma noble patrie (…) (…) Yo soy el verso baquiano Je suis l’expert des cours d’eau Divulgador del folklor Divulgateur du folklore Y coplero veterano Et déclameur d’expérience Y mi misión fue contar Mon rôle fut de raconter Desde que estaba mediano Depuis que je suis jeune Por eso nunca me calla Aussi jamais je ne me tais Otro cantor mano a mano Quand j’affronte un autre poète-chanteur De como aprendí a coplero Comment suis-je devenu chanteur Yo les voy a contar algo Je vais vous raconter Y así podrán darse cuenta Ainsi vous pourrez vous rendre compte Por qué soy el verso amargo Pourquoi je suis le côté amer En la costa Apure seco De la région sèche de Apure Montaba un caballo zaino Je montais un cheval zain Salvá con rumbo a Atamaica Je courais à Atamaica Seguro de una parranda Dans une fête, pour sûr Al llegar al pie del arpa En arrivant près de la harpe Del diapasón me agarraba L’envie de chanter me prit Soltaba un grito altanero Je lançai un cri altier Que hacía estremecer la sala Qui fit tressaillir l’assistance Hasta él que estaba bailando Même celui qui dansait A escucharme se paraba En m’écoutant s’arrêta Daba un reto a los copleros Je lançai un défi aux chanteurs de couplets Y ninguno me aguantaba. Et aucun ne pouvait me vaincre.

Yo aprendí con Florentino (pl. 5 / tr. 5) J’ai appris avec Florentino Arpa de mi tierra llana Harpe de ma terre llanera Aqui me tienes presente Je suis là Cuando oigo sonar tu cuerda Lorsque j’entends sonner tes cordes – 14 – MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 15

Little bird of my land Little bird of my land Who flies over the whole llano He sings as I sing If you are a good Venezuelan For my noble homeland (…) I am the expert of the streams The one who spreads the folklore An old hand at poetry My mission has been to tell the tales Since I was young BIBLIOGRAPHIE / BIBLIOGRAPHY So I am never silent CALDERON SAENZ Claudia When I meet another singer-storyteller “Estudio analítico ty comparativo sobre la How did I become a singer? música del joropo, espresión tradicional de I will tell you Venezuela y ”, in Revista Musical de That way you will be able to realize Venezuela n°39, Caracas, 1999. Why I am somewhat bitter CALZAVARA Alberto From the dry region of Apure Historia de la música en Venezuela/Periodo I mounted a solid black horse I rode hard to Atamaica hispánico con referencias al teatro y la danza, To a celebration, of course Fundación Pampero, 1986. When I came near the harp GUERRERO Fernando The desire to sing overcame me El arpa en Venezuela, Fundarte, 1999. I let out a disdainful cry PEÑIN Jose Which made everyone shudder “En los llanos resuena el eco de los castrati”, Even the person dancing in Revista Bigott n°25, Caracas, 1993. Stopped when he heard me Enciclopedia de la música en Venezuela, sous I dared the singers of songs la direction de José Peñin et Walter Guido, 2 And no one was able to defeat me. volumes, Fundación Bigott, Caracas, 1998. PLISSON Michel I learned from Florentino “Systèmes rythmiques, métissages et enjeux Harp of my llanera land symboliques des musiques d’Amérique latine”, I am here in Cahiers de musiques traditionnelles n°13, When I hear your strings played Ateliers d’ethnomusicologie, 2001, Genève. – 15 – MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 16

Rápido aclaro la mente J’éclaircis mes idées Yo soy nacido en Barinas Je suis né à Barinas Tengo la sangre caliente J’ai le sang chaud Y la garganta clarita Et la gorge claire Pa’ improvisar libremente Pour improviser librement Ya son muchos los copleros Nombreux sont les chanteurs de couplets Que he tenido frente a frente Que j’ai affrontés Con mi verso relancino Avec mes vers improvisés Entre tiple y tenorete Entre soprano et ténor Me gusta que sople duro J’aime que mon souffle soit fort Pa’ que la plaga se aullente Pour que ma plainte soit criée Soy general de la copla Je suis le général des couplets Y no le temo a la muerte Et je n’ai pas peur de la mort En el arpa soy cantante Avec la harpe je suis bon chanteur En la guerra combatiente Et combattif à la guerre Soy el Arauca en invierno Je suis la rivière Arauca en hiver Peligroso en su corriente Dangereuse en son courant Desde que estaba chiquito Depuis tout petit Siempre he sido hombre valiente J’ai toujours été vaillant La sabana fué mi escuela La savane a été mon école Y una soga mi juguete Et un lasso mon jouet Del contrapunteo llanero De la poésie des llanos Puedo ser el presidente Je peux être le Président Pa’ fajarme con cualquiera Pour me battre avec n’importe qui Yo me encuentro competente Je me trouve compétent Pa’ defender a mi patria Pour défendre ma patrie Y hacerla que la respeten Et faire qu’ils la respectent No me pueden derrotar Ils ne peuvent me battre Porque yo tengo la suerte Car j’ai la chance Que aprendí con Florentino D’avoir appris avec Florentino À enfrentarmele al más fuerte. À affronter le plus fort.

Tierra mía (pl. 9 / tr. 9) Ma terre Voy a cantarle a mi tierra Je vais chanter ma terre Anda mi tierra con sentimiento y cariño Avec sentiment et affection – 16 – MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 17

My mind becomes clear I was born in Barinas I am hot-blooded And my throat is open To improvise freely Many a singer of songs Have I confronted With my improvised songs Between soprano and tenor I like my breath to be strong So that my affliction can be heard loudly I am the general of songs And I do not fear death With the harp I am a good singer And combative in war I am the Arauca River in winter Dangerous because of its current From the time I was very little I have always been valiant The prairies were my school A lasso was my toy The poetry of the llanos I could be its President To fight with anyone I think I am competent To defend my homeland And to make them respect it They can’t defeat me Because luck is on my side Having learned from Florentino To confront the strongest ones.

My land I will sing to my land With feeling and affection – 17 – MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 18

Porque Barinas es señores Parce que Barinas est mon peuple Anda señores el terruño de mis hijos Allez Barinas, terre de mes enfants Nací entre tiple y bordón Je suis né entre les aigus et les basses de la harpe Tiple, bordón y copleros relancinos Aigus, basses et chanteurs de couplets La tierra que pare machos La terre qui retient les mâles Que pare machos y machos bien recono- Qui retient les mâles et des mâles bien cidos. connus.

Galopa potro (pl. 12 / tr. 12) Galope, mon poulain Galopa, potro, galopa Galope, mon poulain, galope Por los caminos del llano Par les chemins des llanos Como galopa la copla Comme galope le couplet Entre pensamiento y labio De la pensée vers les lèvres Con el compás de la glosa Au rythme de la poésie Se escucha el trueno lejano On écoute le tonnerre lointain Y con el sudor retosa Et avec la sueur de l’excitation La silla y el freno en mano. La selle et le mors en main.

Grito de joropo recio (pl. 14 / tr. 14) Le cri du rude joropo Ay… la la la la la Ay… la la la la la Grito de la libertad Cri de la liberté De aquel valiente guerrero De ce vaillant guerrier Que en las sabanas de Arauca Qui dans les savanes d’Arauca Demostró ser el primero Se montra le premier Es grito de Florentino C’est le cri de Florentino Cantados y pendenciero Chanteur et querelleur Que por defender a su tierra Qui pour défendre sa terre Puso en juego su pellejo Mit sa peau en jeu Derrotando con la copla Battit avec ses couplets Al jefe de los infiernos. Le maître des Enfers. Al jefe de los infiernos, Le maître des Enfers, Así mismo le hago yo Moi-même je le vaincs Porque también soy llanero Car je suis moi aussi llanero Y cargo el joropo recio Et je charge le joropo rude Como el juncal del estero. Comme du jonc du marais. – 18 – MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 19

Because Barinas is my people Go on Barinas, land of my children I was born between the treble and the bass of the harp Treble, bass, and singers of songs The land that holds the men That holds the men and well-known men.

Gallop, my foal Gallop, my foal, gallop Over the paths of the llanos As the song gallops From thoughts to lips By the rhythm of poetry The thunder is heard from afar And with the sweat of excitement The saddle and the bit in hand.

The cry of the rough joropo Ay… La la la la la The cry of freedom Of this valiant warrior Who in the fields of Arauca Demonstrated that he was the first It is the cry of Florentino Singer and quarrelsome Who to defend his earth Risked his skin Defeating with his songs The lord of Hell. The lord of Hell, I do the same Because I am also a Llanero And I take on the rough joropo Like a bulrush from a swamp. – 19 – MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 20

José Gregorio Lopez MCM W260128 livret 30/01/07 10:27 Page 21

Harps from Venezuela I ARPA LLANERA & CANTO RECIO Music and songs from the States of Barinas and Apure

Two harp traditions have remained in course, sending their enormous sandy Venezuela. The first is called the harp of the deposits towards other rivers, forming llanos, or arpa llanera, from the name of the lagoons, swamps and inundated land in great plains in the southern part of the coun- which anacondas and crocodiles (caimanes) try, the other is called arpa tuyera from the proliferate. The rapids and the constant silt- name of the River Tuy, in the central region of ing-up of the three main rivers of the llanos, Venezuela. This CD is devoted to the arpa the Arauca, Meta and Apure Rivers, which llanera. A second CD in this collection covers can sometimes rise by several meters, have the arpa tuyera1. long kept this region relatively isolated, benefiting the flora and fauna, which are The llanos exceptionally diverse in this area. The llanos are the great moist plains located There are few people in this immense, in the southeastern part of Colombia and humid land. There are a few cities that the the south of Venezuela over a distance of Spanish took a long time establishing, such more than 1000 km, bordered on one side by as Barinas and San Fernando de Apure. The the Andes, which begin to slope down and latter, located on the river of the same then suddenly fall into the Caribbean Sea, name, is considered the heart of the llanos. and on the other by the immense delta of The llanos go beyond the region of the great the Orinoco, which constitutes a geopolitical moist plains however. As a geopolitical and environmental universe unto itself. zone, the llanos cover several States. First, On this immense plain, which slopes down the llanos ocidentales include the States of gently from the Andes toward the Atlantic, Cojedes, Portuguesa, Guárico, Apure and water is everywhere, especially during the Barinas as well as several departments of rainy season, between May and December. Colombia including Arauca. To the East, That is when rivers overflow, changing towards the delta of the Orinoco, the llanos

1. Harps from Venezuela II, ARPA TUYERA & BUCHE, a CD INEDIT/Terrains W 260129.

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orientales cover the States of Anzoátegui, vihuelas were very popular in at the Monagas and Bolivar. time of the conquest. There were many trea- In symbolic terms, the llanos played an tises and methods for “tecla, arpa y vihuelas” important role in building the identity of in the 16th and 17th centuries, including “Luz Venezuela, particularly at the time of the y Norte” 2 by Ruiz de Ribayaz, which contains wars of independence, by rallying to the tablatures for harp and vihuela and also struggle of Simón Bolivar and the white musical considerations concerning interpre- Creoles against the Spanish Crown. tation. This treatise gives us keys to the Today, both within and outside the country, interpretation that also apply to Venezuelan llanera music is that which best identifies music for harp today. Venezuela. In Venezuela, the harp is mentioned in sev- eral testamentarías3 from Caracas as of the The harp in Venezuela 17th century. People started making harps of The Spanish arrived on the coasts of different sizes very early on in Venezuela. Venezuela very early on. In 1499, Alonso de Some are quite small, such as the one men- Hojeda, a companion of Christopher tioned by Alberto Calzavara 4 that had Columbus, explored the islands off the coast belonged to a certain Doña María Lopés and then the mainland. As they saw a small Regañon, dating from 1747 and which was town along the lagoon of Maracaibo, they no more than 1.10 m high (almost identical called this region Venezuela, the little to the height of the tuyera harp), while oth- Venice. The colonial archives attest that 15 ers were larger. In all cases, these instruments vihuelas arrived from Seville in 1529. Then have 32 keys corresponding to 32 strings, came flutes, chirimías, violins, cellos, gui- which is still generally the number of strings tarra baroca and harps, both in Cumaná, on traditional harps in Venezuela today. which was then the port of entry for the These instruments were initially confined to Spanish, and in Caracas, spreading from the narrow circles of churches and governors’ there throughout the territory. Harps and palaces but quickly spread to other places in

2. Ruiz De Ribayaz, Lucas, Luz y norte musical para caminar por las cifras de la guitarra española y arpa, y tañer y can- tar a compás por canto de órgano, Melchior Alvarez impresor, Madrid 1677, republished as a facsimile by Minkoff, reprint, Geneva, 1976. Among the most notable versions, we can cite that of English harpist Andrew Lawrence- King/The Harp Consort Luz y Norte / Lucas Ruiz de Ribayaz, BMG, 1995. 3. Inventory of succession by the terms of a will. 4. Calzavara Alberto, Historia de la música en Venezuela/Periodo hispánico con referencias al teatro y la danza, Fundación Pampero, 1986. p. 58.

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civil society, becoming entrenched in modest from a set of simple chords, some of which rural milieus as of the 17th century. were already used during the Baroque era. At this time it was played by meztisos and After the dissolution of the Jesuit Order in Black slaves throughout the country as indi- 1767 and the departure of the Jesuits, the cated by a wanted poster offering a reward Indian populations continued to play for the capture of runaway slaves that men- European instruments and also to make them. tioned, among other characteristics, that The harp came to be used by the common they knew how to “play the harp”5. These people, but was still present among the aris- instruments were played in particular in the tocracy and in salons. It is said that Doña misiones where the priests tried to christian- Concepción, the mother of the Libertador ize the Indians. Alberto Calzavara mentions Simón Bolivar, played the harp very well. that “the reports of the musical teaching The salons of the aristocracy gradually aban- given by the Jesuit priests (but also priests of doned the harp in favor of new fashions other religious orders) in the 18th century to from , France, and Italy. various indigenous groups in the missions However, this salon music for harp was of the llanos, on both banks of the Orinoco already far removed from that which the in places such as San Ignacio de Cabruta and inhabitants of the llanos continued to play. San Miguel de Macuco, clearly show that the The common people remained loyal to the harp was part of this teaching” 6 alongside music which had long been that of the other instruments such as the violin, the white masters but which the mixed race cello, recorders, the , the vihuela and populations had adopted. The tradition the triangle. became oral and the instruments were then At the time, the harp was often used to build made in homes with local or found materi- a continuo accompaniment on which the als. When European salon music invaded singing was based. This is probably what South American musical practices the 19th gives the reminiscences of Spanish music of century, the llanos absorbed some of these the 18th century that strike us in the tradi- influences, such as the waltz – which can be tional harp music of Venezuela along with heard in the pasaje and the tonada – but the great ease with which the musicians of remained faithful to the old music and the llanos can develop multiple variations dance practices from the colonial era.

5. Calzavara Alberto, ibidem p. 59. 6. “Los vestigios sobre la enseñanza musical que impartían los sacerdotes jesuitas (y otras congragaciones) durante el siglo XVIII a diferentes grupos indígenas en las misiones de los llanos, en ambas riberas del Orínoco, ponen en claro que el arpa formaba parte de casi toda esa ensañanza” in A. Calzavara, ibidem.

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From this European written musical substrate tural construction with a historical depth of which can be said to have come from the several centuries that draws its force from upper classes, the Venezuelan popular oral the many contributions and blendings. tradition recomposed an independent music, It is a musical, choreographic and poetic formed of an original body of melodies with sung and/or instrumental universe struc- underlying rhythms clearly influenced by tured by instruments, a very stable social African and/or Afro-American cultures. practice and a traditional body of melodies Cuatro, harps, and maracas (Amer- including several hundred themes. indian and African instrument) proliferated Traditionally, the role of the llanera music and took on mixed musical forms, receiving was to accompany dancing. It is now very many influences, including those of the often instrumental. Blacks who, for a certain period, constituted Música llanera is not in decline. On the con- more than half of the colonial population. trary, the area where it is found and the This process of syncretic recomposition can body of music have been expanding con- be found throughout Latin American oral stantly since the 1960’s, when the harp and tradition music. But the particular feature of its music enjoyed something of a revival, the llanos and their music lies in the preser- both in Colombia and in Venezuela, reach- vation of these ancient practices, in music as ing an almost national status. At that time, in dancing. The harp fell into disuse in many young composers enriched this music many regions of Latin America during the with a varied set of instruments, sometimes 19th century, but continued to be used in the more modern harmonies and a new set of musical practices of the llaneros, accompa- melodies. Neither the traditional instru- nied by the cuatro and the maracas. ments nor the old body of melodies were We also know that this mixed colonial supplanted by this modernism however. music had a backlash influence on folk While it is played throughout the country music practices in Spain, as we learn from today, it is still strongly attached to its the works of Ruiz de Ribayaz7. region of origin, the llanos, where it remains by far the most popular traditional Música llanera and conjunto llanero music and continues its multi-century The music of the llanos is a social and cul- development.

7. Ruiz De Ribayaz accompanied the Viceroy of Peru and upon his return from America in 1677 published his music and dance work inspired by folk traditions: Luz y norte musical in which we feel American folk influences, particularly dances such as the zarambeque, said to be the dance of the Blacks, and zarabanda.

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Today as in the past, hundreds of harpists ments and types of music from region to practice, maintain and enrich this musical region, this music continues to be played in genre in both the Colombian and the llanos with the same instruments as it Venezuelan llanos while maintaining in has been for a long time. their repertoire hundreds of “standards” Dancing is also part of this llanero ensemble. transmitted solely by oral tradition and fam- It involves the whole social group, both in ily or social contact. But whether they the village and in the private space of the remain in the village or migrate to Caracas hacienda or the home. or elsewhere in the world to work as profes- sional musicians, the llaneros harpists Joropo, golpe and pasaje remain firmly linked to their tradition. The joropo represents a complex ensemble in The standard set of instruments for the con- the Venezuelan and Colombian llanos. It is a junto llanero includes the arpa, cuatro and musical-choreographic genre that includes maracas, the bandola (stringed instrument dancing, semi-improvised singing, festive played with a plectrum), which sometimes events, rhythm, instruments and melodic substitutes for the harp or is added along turns. In the llanos, the joropo is present at with it. The harp is generally a solo instru- all festive events: weddings, patron saints’ ment. When the singer comes in, the harp days, mostly in semi-private situations but switches to an accompanying role alongside also in public. The stability of the melodies the cuatro and the maracas. of this musical-choreographic genre as well The arpa llanera is the essential instrument as its great vitality is exemplary in Spanish- of música llanera. It generally has 32 to 36 speaking America. nylon strings. These strings are broken In the colonial period, the term joropo down into 12 bordones, 10 tenoretes and 10 referred to festive dance practices, mostly primas or tiples. It is the Spanish diatonic associated with Blacks and their festivities, harp (without pedals) with a single row of as did the terms fandango, sarao, tango-fan- strings. We note in passing that all of these dango, zarambeque, danza de los monos, musical terms and still others, used in the merengue. References to dance are constant. 17th century in Spain and which have since Some authors suggest that the name joropo disappeared, are still used in Venezuela in seis por derecho, comes from the colonial era, oral tradition music. when six or eight dancers would leave the This instrumental configuration is very sta- church. But neither the dance figures nor ble, particularly in the llanos. While the rhythm and music are described in these Venezuela has all sorts of diverse instru- ancient texts. We can however say that even

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if the Hispanic influence was not the only Guttierrez (1870-1954) did much for the one, it indisputably played a major role in joropo, although strictly speaking it was the formation of the joropo, especially dur- closer to a Spanish zarzuela than to a tradi- ing the colonial period. tional joropo. In this way, dances and music For the dancing, in many countries of from diverse origins and periods were Spanish-speaking America as widely sepa- welded together under the common label of rated as Peru, , , Paraguay, joropo. Colombia, , etc, - which, at the time, While all of the joropos have in common a were all regions of a vast empire - we find generic sesquialtera type rhythmic pattern similar figures such as hand holding and the 3/4 6/8 (alternation of measures or use of a handkerchief in the game of seduc- sequences in 3/4 et 6/8 and their multiples: tion, the escobillao (“brushing”: rapid back 3 x 2, 3 x 4, but never 2 x 2 or 4 x 4) there and forth movement of feet while dancing), are different regional practices such as the the zarandeo (whirling), resbaloso (sliding joropo oriental and the joropo central 8 as well step), etc… and especially the figure of the as an infinite variety of forms, variants, zapateo (striking of heels), although it is dif- interweaving, and rhythms, according to ferent from that of Mexico, Argentina and very diverse melodic-harmonic progres- Peru... Later on, dance figures were also sions. As we have already demonstrated in influenced by salon dances such as the other works9, each joropo – for example seis waltz, the Scottish, and the mazurka, which por derecho, chipola, quirpa, periquera, gabán, were very much in fashion during the 19th San Rafael, etc. – is structured on a precise century. chord progression like certain themes from As for the music, it was only in about 1880 16th century Spain such as the famous that the term joropo became associated with Guardame las vacas from which the vihuela music, which is probably connected to the players-composers constructed variations. nationalist musical movement that devel- As in Spanish music of the time, the musi- oped at that time, using or inspired by aires cians tend to develop variations on the criollos. The popularization of the tune melody rather than improvising in the strict “Alma llanera” due to the director of the sense, because the harmonic framework municipal brass band of Caracas, Pedro Elias remains unchanged, unless new joropos are

8. See CD Harps from Venezuela II, ARPA TUYERA & BUCHE, a CD INEDIT/Terrains W 260129. 9. See CD Venezuela. Musique de l’Orénoque : Cheo Hurtado, cuatro et bandola, Ocora/Radio France, C 560119, 1997.

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invented. In this way, each musician/com- Llanero and canto recio poser adds to the tradition as much as he Herder, fisherman or poacher, the image of perpetuates it. The equilibrium between the llanero is a well-known archetype in group and individual, between collective Venezuelan folk consciousness. The man of tradition and individual personality is thus the llanos is a hardy and untamed figure, the clearly established: the chord chart and the result of multiple mixings, white, Indian rhythmic structure that identify each joropo and black, facing a hostile and unpre- belong to the group and to the tradition, the dictable natural environment. His survival variations on these chords, the melodic con- depends on his courage and experience. tours, the style, the swing, the emergence of Venezuelan folk traditions draw on this new themes, belong to the individual, to the “telúrica” relationship between the power of musician. nature and the precariousness of the way of The joropo is then broken down into many life of these men who venture on their frag- styles called golpe, some simple, others har- ile flat-bottom boats into the swamps, from monically and rhythmically more complex, which a tigre (jaguar), anaconda or crocodile composed of several parts as analyzed very (caiman) may emerge at any moment. It is clearly by the musician and musicologist perhaps this hostile and unstable environ- Claudia Calderón10. ment that has given the llanero his reputa- While for the unfamiliar listener it is not tion for being suspicious, sly (bellaco, recelo) always easy to distinguish between golpes, and superstitious, if we are to believe joropos and their complex variants, people Venezuelan author Rómulo Gallegos writing in Venezuela never confuse musical genres, in his famous Cantaclaro (1934). regardless of whether they are musicians, Between this wild and untamed natural because this music is a real language for environment and the men who are sub- those who are part of this culture. jected to it and largely dependent on it, The pasaje is also part of the llanera music. there is an unbalanced relationship. This is One might think that its construction is more perhaps the source of the anguished tension recent, because it is closer to tonal harmony. found in the music of the llanos, in the harp It is played in a slower tempo than the golpe playing, in that of the maracas, in the nasal and is composed of three uninterrupted parts voice specific to the llaneros, the canto recio, (pasaje corrido) with no refrain (estribillo). and in the lyrics of the songs and the impro- vised sung poetry. The canto recio, which can be translated as 10. See bibliography, page 15. “rough singing,” is the way of singing that is

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specific to the llaneros. Chest voice and not very specific voice of the llaneros and the head voice and sometimes in between the European liturgical and para-liturgical tradi- two (mitad de cabeza y mitad de pecho), there tion. For the Venezuelan musicologist Jose is also much tension in this voz llanera Peñin11, traces of it are to be found in the which always tends towards the high notes, song called “Tonos de Velorio de Cruz de never the low ones. This association of a Mayo,” which is sung in the llanos of the voice that is nasal with a saturated timbre province of Arauca in Colombia, a three- fed by a powerful energy, constitutes quite part song organized polyphonically with an unusual style. The particularly nasal tim- parts called: tenol, contrato and falsa. The bre of this voice is not found in the every- term tono is used here in its Spanish mean- day spoken language. It is only heard in the ing during the colonial period, i.e. key, or singing and seems to be the stylistic charac- more precisely, mode. teristic of canto llanero. We only find it in The term falsa also refers to the colonial the Colombian and Venezuelan llanos. period. The falsetistas sang in churches in As with the instruments, it seems that in chest voice (not head voice). “They could this manner of singing there are reminis- sing the upper part in addition to their nat- cences of European singing of the 16th and ural bass, baritone or tenor voice,” says Jose 17th centuries. In the llanos, the historical Peñin. This “cantar con voz de garganta” tech- depth is as notable for the singing as for the nique has perdured in the Venezuelan instruments. Numerous documentary llanos. In canto recio, the chest voice is sources mention liturgical and para-liturgi- indeed pushed, but remains in this register. cal festivals. The Austrian Jesuit Miguel Alejo Schabel, author of a testament written The origin of the harp in 1705, speaks of the large-scale celebra- according to Gregorio Lopez tions for the annual feasts of Santa Lucía Asked about the origins of the harp, the and the Immaculate Conception in Barinas, llanos harpist José Gregorio Lopez answers: the capital of the llanos. There was singing “I think that it is a celestial instrument. The within the church and the celebration was first instrument that existed on earth. There organized outside. The cofradías of black are many theories about the harp. I also have slaves played an important role with their a theory about the origin of the harp…, how songs and dances, particularly during the the harp came into being...: One day a primate “corpus christi” celebrations. was fleeing a dinosaur. The primate ran As with the musical instruments, many indi- cators suggest a relationship between this 11. See bibliography, page 15.

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towards the forest because the dinosaur was The musicians are from Barinas. too big to enter it. It remained in the plain. On José Gregorio Lopez, harp, is in his fifties the way, the primate stumbled and his chin hit and makes a living from his music. He was a vine. This produced a sound. He continued strongly influenced by the harpists of the on his way. Fifty meters on, he realized that first half of the 20th century such as Ignacio something had happened. He picked up a vine, “El Indio” Figueredo, Juan Vicente held it, and let it go. It again made a sound. Torrealba, and Joseito Romero. Then he picked up another vine. Then another Carlos Alvarado is one of the best canto one, and so on, and each time a sound was recio singers of Barinas. He was born in 1965, made. And so the harp was born. There are and is self-taught. He learned to sing at fam- many stories of the origin of the harp. I like ily gatherings and celebrations. He earns that one. I like it all the more because I’m the also his living from singing. one who made it up!”. José Manuel Aguilar, cuatro. Yilberto Rivero, maracas.

THE PIECES

The pieces presented on this CD were The pajarillo is a bird of the llanos. The piece selected from recordings made in Vene- is built from three notes: D G A according zuela in 1999 with a portable digital recor- to a progression I - IV - V 7 or D min - der. The recordings were made in Barinas, G minor - A 7. The singer improvises octo- in natural settings, with the idea of using syllabic quatrains (cuartetas) on this har- the acoustics of materials such as wood and monic structure. The pajarillo has become stone, which are abundant in Venezuela, as one of the most emblematic joropos of llan- much as possible. The interior patios of its era music, allowing many musicians to many colonial houses allow for the con- demonstrate their virtuosity and their musi- centration of harmonic sounds on four cal qualities. sides. Excerpts from the sung poetry with trans- 2. Los Mamonales (pasaje) lations are included in pages 14 to 19. Traditional. Harp, cuatro, maracas. Key: D major. 1. Pajarillo de mi tierra (joropo corrido) The melody of this beautiful pasaje includes Lyrics: Francisco Montoya, music: traditional. two distinct phrases that are repeated sev- Harp, maracas and singing. Key: D minor. eral times without interruption.

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3. La Chipola (joropo/golpe) 7. Nuevo Callao (joropo/golpe) Traditional. Traditional. Harp, cuatro, maracas. Key: A major. Harp, cuatro, maracas. Key: D major. The major key is one of the characteristics of This very traditional golpe is sometimes called the chipola. We also hear the melodic-rhyth- Sabana Blanca in the region of the llanos. mic ostinato and the bordoneo of the base strings of the harp. 8. Quirpa (joropo) Traditional. 4. Seis por derecho (joropo/golpe) Harp, cuatro, maracas. Key: D minor. Traditional. According to legend, the violent death of a Harp, cuatro, maracas. Key: D major. llanero singer inspired a harpist to compose One of the most traditional golpes. It is this joropo. based on three chords and is characterized by the emphasis on the fourth-third pair in 9. Tierra mía (pasaje) the melody and sharply marked bass string Traditional. playing. There are many versions including Harp, cuatro, maracas and singing. some for orchestra. Key: C major. The harp is tuned in C major and A minor. 5. Yo aprendí con Florentino (Seis por dere- cho con chipola/joropo) 10. La periquera (joropo) Lyrics: Carlos Alvarado, music: traditional. Traditional. Harp, maracas, cuatro and singing. Harp, cuatro, maracas. Key: D major. Key: D major. This emblematic joropo of the llanos is said to The harpist includes two distinct golpes in have been composed and danced for the first this sung piece, Seis por derecho and La time in 1928 in a village called Periquera. Chipola. We can compare it with the two Harmonic progression: I – IV – V 7. themes of tracks 4 and 3. 11. Zumba que zumba (joropo) 6. Los Caracoles (joropo/golpe) Traditional. Traditional. Harp, cuatro, maracas. Key: D minor. Harp, cuatro, maracas. Key: D major. Another emblematic joropo of the llanos. We This golpe composed of two phrases of eight find the same chords as in La periquera but in measures is used for dancing in particular. minor. Notice the golpeao bass string playing.

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12. Galopa potro (zumba que zumba/joropo) 16. Catira (joropo/golpe) Lyrics: Jesus P. Lara, music: traditional. Traditional. Harp, cuatro, maracas and singing. Harp, cuatro, maracas. Key: D minor. Key: B minor. The very traditional golpe is close to the pajarillo but with variants in the melody. 13. Carnaval (golpe) Traditional. 17. Pajarillo chipoleado (joropo) Harp, cuatro, maracas. Key: D major. Traditional. This golpe is built on three suites of different Harp, cuatro, maracas. Key: D minor. chords or three parts attached to each other. The musician moves back and forth several times between the pajarillo and chipola 14. Grito de joropo recio (Seis numerado/ before ending on a brusque dominant chord joropo) of pajarillo. Lyrics: Carlos Alvarado, music: traditional. Harp, cuatro, maracas and singing. MICHEL PLISSON Key: D major. The harpist stays on each chord for two measures: D Major D 7 and G major.

15. Gabán (joropo/golpe) Composition attributed to Ignacio “Indio” Figueredo Harp, cuatro, maracas. Key: D minor. The gabán is a bird of the llanos. Tradition says that this magnificent golpe was com- posed by the great harpist Ignacio “Indio” Figueredo. The musician can freely impro- vise original melodic variations on this sim- ple two-chord structure (tonic and domi- nant).

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Localisaton de la arpa llanera (zone hachurée) Localisation of the arpa llanera (hachured area)

W 260128 INEDIT/Maison des Cultures du Monde • 101, Bd Raspail 75006 Paris France • tél. 01 45 44 72 30 • fax 01 45 44 76 60 • www.mcm.asso.fr MCM W260128 Jaquette 24/01/07 15:52 Page 1 I N O Harpes du Venezuela I Harps from Venezuela I I E C D

E INEDIT ARPA LLANERA & CANTO RECIO I T R Maison des Cultures du Monde des États from the States W O 2

T de Barinas et Apure of Barinas and Apure 6 N 0 1 A 2 C

1. Pajarillo de mi tierra (joropo corrido) - Francisco Montoya/trad...... 2’31” 8

& dirigée par / headed by 2. Los Mamonales (pasaje) - instrumental - Trad...... 3’04” V

A Pierre Bois 3. La Chipola (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’35” E R

4. Seis por derecho (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’53” N E E

N 5. Yo aprendí con Florentino (Seis por derecho con chipola/joropo) - Z A

Carlos Alvarado/trad...... 3’36” U L E L 6. Los Caracoles (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 2’39” L A A 7. Nuevo Callao (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’08” P I

R 8. Quirpa (joropo) - instrumental - Trad...... 3’39” • A 9. Tierra mía (pasaje) - Trad...... 2’24” A • Enregistr. / Recordings

10. La periquera (joropo) - instrumental - Trad...... 3’11” R I Michel Plisson 11. Zumba que zumba (joropo) - instrumental - Trad...... 3’11” P A A Barinas, Venezuela, 1999 L 12. Galopa potro (zumba que zumba/joropo) - Jesus P. Lara/trad...... 1’51” L E L

U 13. Carnaval (golpe) - instrumental - Trad...... 3’20” A Z

14. Grito de joropo recio (Seis numerado/ joropo) - Carlos Alvarado/trad. 3’57” N

E W 260128 NT093 E

N 15. Gabán (joropo/golpe) - instrumental - Ignacio “Indio” Figueredo .... 5’47” R E

16. Catira (joropo/golpe) - instrumental - Trad...... 3’56” A

V distribution

17. Pajarillo chipoleado (joropo) - instrumental - Trad...... 5’33” & 8 P 60’11” C 2 O 2007 INEDIT / MCM A

1 José Gregorio Lopez, harpe/harp - Carlos Alvarado, chant/singing 0 Made in France N 6 José Manuel Aguilar, cuatro - Yilberto Rivero, maracas. T 2 O W R

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