LES CONGRES DE VERSAILLES ATRAVERS TROIS REPUBLIQUES En Septembre 1870, Le Secondempire S'effondre Sous Le Coup De La Défaite
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ETUDES et REFLEXIONS Edouard Bonnefous LES CONGRES DE VERSAILLES ATRAVERS TROIS REPUBLIQUES En septembre 1870, lesecondEmpire s'effondre sous le coup de la défaite. La lutte est ouverte pour savoir quel régime lui succédera. Gambetta plaidepour une République, mais les républicains sont divisés entre radicaux et modérés, parmi lesquels les quatre jules : Ferry, Grévy, Favre et Simon. L'Assemblée nationale élue le 8 février 1871 siège à Bordeauxavantde s'installer à Versailles. Elle estprésidée parjules Grévy, etAdolphe Thiers devient lechefdu pouvoir exécutifjusqu'au 24 mai 1873. Le maréchal de Mac-Mahon lui succède le jour même, mettant fin à la confusion des pouvoirs exécutifs, puisque Thiers étaità lafois chefde l'Etat et du gouvernement. Edouard Bonnefous, ancien ministre d'Etat, nous raconte la vie politique nationale qui a eu, jusqu'à aujourd'hui, Versailles pour cadre. 1 Lia III' République n'est pas encore vraiment née. C'est l'amendement Wallon du 30 janvier 1875 qui la porte sur les fonts baptismaux : « Le président de la République est élu par le Sénat et la Chambre. » L'amendement passe à une voix 96 REVUE DES DEUX MONDES JUIN 1994 ETUDES et REFLEXIONS Les Congrès de Versailles à travers trois Républiques de majorité. Et les lois des 24 et 25 février relatives à l'organisation des pouvoirs publics précisent : (( Le siège du pouvoir exécutif et des deux Chambres est à Versailles. ii LePrésident sera désormais élu pour sept ans par l'Assemblée nationale réunie à Versailles. Ses prérogatives sont importantes, mais ses pouvoirs seront limités en raison de la crise du 16 mai 1877. Dans le conflit qui est survenu entre Mac-Mahon et la Chambre des députés, il est apparu que l'irresponsabilité politique du Président limitaitsa légitimité.Aussile droit de dissolution dont il dispose dans les textes va-t-il tomber en désuétude dans la pratique. Ce qui ne signifie pas qu'il n'ait pas de pouvoirs. Il surveille et guide de très près la politique étrangère. Il la dirige même, quand il en a la volonté. Présidant le Conseil des ministres, il exerce un magistère moral important. Et en choisissant le président du Conseil, il a la possibilité d'orienter les majorités. Malgré tout cela, la pierre angulaire de la Ille République est constituée par la Chambre des députés et le Sénat - qui a finalement acquis une égalité de fait avec la Chambre. Le régime est parlementaire, à tel point que les élus ont été laissés seuls juges de la constitutionnalité des lois. Quand la Chambre des députés et le Sénat se réunissent, ils forment à l'époque ce que l'on appelle l'Assemblée nationale. Ils se retrouvent ensemble à Versailles en deux occasions: soit pour réviser la Constitution, soit pour élire le président de la République. Les élections présidentielles. - DeJules Grévy au maréchal Pétain, il y eut quinze élections par l'Assemblée nationale à Versailles pour treize présidents, deux ayant été réélus. Quatre avaient été précédemment présidents de la Chambre des députés: Jules Grévy, Jean Casimir-Perier, Paul Deschanel et Paul Doumer, ce dernier présidant le Sénat au moment de son élection, comme trois autres élus à la magistrature suprême: Armand Fallières, Gaston Doumergue et Albert Lebrun. Sur treize présidents de la République, sept avaient donc présidé une Assemblée. En revanche, une deuxième élection n'a pas réussi aux candidats. - Jules Grévy dut quitter le pouvoir le 2 décembre 1887, moins de deux ans après avoir entamé le début de son second mandat, 97 ETUDES et REFLEXIONS Les Congrès de Versailles à travers trois Républiques éclaboussé par le boulangisme et, surtout, par le trafic d'influence de Légion d'honneur auquel se livrait son gendre Wilson. La candidature de son successeur Sadi Carnot, ancien ministre des Finances, avait été suscitée par Clemenceau et d'autres, qui voulaient absolument barrer la route à Jules Ferry et choisir une personnalité plus effacée. - Albert Lebrun, élu le 10 mai 1932, réélu le 5 avril 1939, dut se retirer le 10 juillet 1940, à la suite des pleins pouvoirs qui furent accordés au maréchal Pétain par l'Assemblée nationale par cinq cent soixante-neuf voix contre quatre-vingt et vingt abstentions. Quatre présidents moururent avant le terme de leur premier mandat. SadiCarnot fut assassiné à Lyonle 24juin 1894par l'anarchiste Caserio. Félix Faure succomba en pleine affaire Dreyfus, le 16 février 1899,d'un accident cardiaque. Paul Deschanel, élu le 17 janvier 1920, fut rapidement amené à démissionner, le 21 septembre de la même année, à la suite de troubles psychiques graves. En mai, il était descendu d'untrain en marche, en septembre, on le retrouvait nu dans un bassin du parc de Rambouillet,puis ilrecevait un ambassadeuravec le grand cordon de la Légion d'honneur pour seul vêtement! Quant à Paul Doumer, élu le 13 mai 1931,il tomba un an plus tard sous les balles d'un dément, l'exilé russe Gorguloff. Six destins malheureux sur. treize, auquel il faudrait ajouter les deux échecs de Jean Casimir-Perier et d'Alexandre Millerand, qui n'achevèrent pas leur septennat. Jean Casimir-Perier, élu le 27 juin 1894, ne résista pas à cette loi non écrite de la IIIe République qui voulait que le Président n'appartînt pas aux « hautes classes ». Or, il était un héritier. Constamment harcelé par la gauche, dans l'incapacité d'exercer ses prérogatives, il se retira en expliquant aux Chambres qu'il ne se résignait pas (( à comparer le poids des responsabilités qui pèsent sur moi et l'impuissance à laquelle je suis condamné ». Quant à Alexandre Millerand, successeur de Paul Deschanel le 23 septembre 1920, il avait cherché à imposer une réforme constitutionnelle renforçant le pouvoir exécutif, à la veille des élections législatives de 1924. La gauche, majoritaire, ne pouvait lui pardonner son engagement et le contraignit à se retirer en refusant d'investir les candidats à la présidence du Conseil. Il démissionna le Il juin et fut remplacé le 13 par Doumergue, alors président du 98 ETUDES et REFLEXIONS Les Congrès de Versailles à travers trois Républiques Sénat. Son adversaire était le candidat des gauches, Paul Painlevé, illustre savant. Quatre présidents de la République jouirent d'un mandat sans encombre : Emile Loubet (18 février 1899-18 février 1906), et ses successeurs immédiats Armand Fallières (17 janvier 1906-18 février 1913)et Raymond Poincaré (17 janvier 1913-18 février 1920).Lesage Gaston Doumergue (13 juin 1924-7 mai 1932) clôt cette brève liste de présidents qui eurent la chance d'achever leur mandat sans anicroches. Il faut noter également une particularité du système d'élection des présidents de la République sous la Ille. Il ne s'est jamais écoulé plus de trois jours entre la fin d'un mandat et l'élection d'un successeur. Pour Fallières, Poincaré et Deschanel, l'élection eut même lieu un mois avant la fin du mandat de leur prédécesseur. Une telle situation doit être soulignée, car elle montre le souci de continuité des institutions de la Ille République. Les révisions constitutionnelles. - Il faut noter que la loi était très libérale en matière de révision et qu'il suffisaitde la majorité absolue pour modifier la Constitution. L'Assemblée nationale s'est réunie seulement à trois reprises, si l'on excepte le 10 juillet 1940, pour modifier la Constitution. - Le 21 juin 1879, l'Assemblée nationale supprima l'article 9 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 qui établissait le siège des pouvoirs publics à Versailles. - Du 4 au 13 août 1884, l'Assemblée examina une révision de la Constitution d'une plus grande portée sur l'organisation des élections et, surtout, sur la laïcité et la royauté. La loi du 14 août supprimait un passage de la loi du 16 juillet 1875 qui précisait: (( Le dimanche qui suivra la rentrée, des prières publiques seront adressées à Dieu dans les églises et dans les temples pour appeler son secourssur lestravaux des deux assemblées. » La loi du 25février 1875 était ainsi complétée : (( La forme républicaine du gouverne ment ne peut faire l'objet d'une proposition de révision. Les membres des familles ayant régné sur la France sont inéligibles à la présidence de la République. ii L'œuvre de républicanisation des textes constitutionnels était ainsi parachevée. 99 ETUDES et REFLEXIONS Les Congrès de Versailles à travers trois Républiques - La dernière Assemblée nationale constitutionnelle eut lieu en 1926 et se traduisit par la loi du 10 août 1926,signée par Raymond Poincaré et Louis Barthou, garde des Sceaux, ministre de la Justice. Elle stipulait : (( L'autonomie de la caisse de gestion des bons de la défense nationale et d'amortissement de la dette publique a le caractère constitutionnel. Seront affectés à cette caisse, jusqu'à l'amortissement complet des bons de la défense nationale et des titres crééspar la caisse: les recettes nettes de la vente des tabacs; le produit de la taxe complémentaire et exceptionnelle sur la première mutation, le produit des droits de succession et les contributions volontaires [...]. » La création de cette caisse correspondait à un des vœux de mon père, Georges Bonnefous, qui ne cessait de lutter au Parlement, depuis l'avènement du Cartel des gauches, contre un alourdissement de l'impôt et pour la création d'une loterie nationale, bientôt réalisée. La IVe République Après le vote des pleins pouvoirs au maréchal Pétain qui mit fin à la Ille République, le 10 juillet 1940, et la Seconde Guerre mondiale, la République fut rétablie. Mais après l'échec des négociations rela tives à un retour aux institutions de la Ille République, l'on rechercha à établir un nouveau système politique. La Constituante élue le 21 octobre 1945proposa un régime d'assemblée unique qui, présenté par référendum aux électeurs, fut rejeté enmai 1946par 56 %des voix.