LE SYSTEME D’EXPLOITATION DES PRODUITS TOURISTIQUES EN FAVEUR DE LA POPULATION AUTOCHTONE DANS LA COMMUNE RURALE D’ (Zafimaniry)

Par

Mbaloniaina Harijohn ANDRIAMAMPIONONARIVELO*, Docteur en Géographie de l’Université d’Antananarivo

Résumé Abstract Le pays zafimaniry est une destination riche en The Zafimaniry country is a destination rich in produits touristiques facilement exploitables. easily exploitable tourism products. However, the Cependant, la stratégie d’exploitation du tourisme operating strategy of cultural tourism at the site culturel au niveau du site ne favorise pas la mise en does not promote the establishment of a fair place d’un système de gestion équitable au profit management system to benefit the poor rural de la communauté rurale pauvre. La valorisation community. The valuation of this region requires a de ce site requiert une stratégie de promotion du strategy to promote community tourism that will tourisme communautaire qui va assurer la ensure the sustainability of the development pérennité du projet de développement au profit de project for the benefit of the indigenous la population autochtone. Cette stratégie insiste population. This strategy emphasizes the sur la structure de gouvernance favorisant la governance structure promoting the effective participation effective des acteurs locaux et le participation of local stakeholders and the partage équitable de bénéfice. Elle va changer en equitable sharing of benefits. It will change partly partie le système économique rural qui s’est rural economic system that is usually based on habituellement basé sur la subsistance, en créant subsistence, creating a new market approach une nouvelle approche du marché grâce au through sustainable funding system and promoting système de financement durable et la promotion farmers' activities. des activités paysannes. Keywords: zafimaniry, cultural tourism, Mots clés : zafimaniry, tourisme culturel, community ecotourism, governance structure écotourisme communautaire, structure de gouvernance

* :Publication à titre posthume

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INTRODUCTION développement de l’écotourisme serait un moyen Le Zafimaniry se distingue par le développement pour la réduction de la pauvreté dans le pays de l’artisanat, la beauté du paysage rural et les Zafimaniry, une la plus convoitées par les touristes cases en bois soigneusement sculptées. Ce pays sur le circuit ancien du grand sud, grâce à symbolise la sculpture géométrique habilement l’exploitation des ses richesses culturelles. confectionnée par la population. Il est réputé, par l’authenticité de la valeur culturelle de la sculpture. Problématique : Par conséquent, l’art zafimaniry est classé Le développement des activités touristiques n’a patrimoine immatériel mondial par l’UNESCO pas eu des conséquences significatives sur la vie depuis le 31 décembre 2003. Ce site fait référence économique de la communauté locale. Cette à l’image du village rustique d’Antoetra, un petit question constitue la problématique de cette hameau de jadis et qui se développe actuellement étude. En fait, comment mettre en place un dans le respect de la tradition. système participatif de promotion de l’écotourisme en faveur de la communauté pauvre ? Choix du sujet : Le tourisme suscite parfois une discussion Présentation de la zone d’étude : relativement ambivalente à cause du fait que La commune d’Antoetra est la porte d’entrée du cette étude intéresse tant de disciplines et de pays Zafimaniry. Elle se trouve à 36km au Sud-Est chercheurs. Plusieurs secteurs ont convergé pour de la ville d’. Elle est limitée au Nord par déterminer le développement du tourisme. En la commune d’, au Nord-Est par dépit de cette situation, tout le monde s’accorde Ivato-Alakamisy, au sud par la commune de sur le fait que le tourisme va effectivement être le Fiadanana, de Vohiposa, du district moteur de développement et une mesure d’Ambohimahasoa , au Sud-Est par la commune alternative adéquate pouvant favoriser la lutte d’Ambohimihimiera du district d’Ifanadiana et à contre la pauvreté dans les pays du sud. En effet, le l’Est par Ambohimanga du Sud.

Figure 1 : Localisation de la zone d’étude

Vers

Vers

AMBOSITRA

Vers

Ambohimitombo Antoetra Limite Commune rurale Antoetra Limite du District d’Ambositra Vers Fianarantsoa Forêts naturelles Voie de communication 0 15 30 Chef lieu de district Kilomètres Auteur, BD 500, FTM Chef lieu de commune

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Démarche adoptée biologiques parfois spécifiques et endémiques. Il « La méthodologie désigne un ensemble de règles, se trouve à 36 kilomètres au sud-est de la ville étapes et procédures auxquelles on a recours dans d’Ambositra, le chef lieu de la région d’Amoron’i une science pour choisir l’objet étudié »1. L’étude Mania. Depuis plus d’une décennie cette ville est scientifique doit en effet se baser sur une approche baptisée « capitale de l’artisanat ». C’est une ville méthodique laquelle découle de l’idéologie touristique en voie de s’épanouir grâce à la positiviste véhiculée par Auguste Comte qui avait présence de quelques centres d’hébergement et à mis en relief l’étude épistémologique des Sciences l’effort relativement enthousiaste de l’office Humaines. Dans cette optique, l’Homme cherche à régional du tourisme d’Amoron’i Mania. découvrir à démontrer par l’usage bien structuré de raisonnement et de l’observation, les lois I.A. La nature : une source de matière première effectives qui gouvernent les phénomènes étudiés. pour l’écotourisme (DEPELTEAU, 2010). Ce raisonnement constitue le fondement de la démarche scientifique. « Les principales constantes dans les approches de l'écotourisme reposent sur les ressources Cette démarche est ainsi basée sur l’observation et naturelles. Ainsi, l'écotourisme ne doit pas l’analyse spatiale de la réalité. Elle comprend trois déprécier la ressource ni nuire à son intégrité, mais grandes étapes : la recherche documentaire, les plutôt participer à sa protection » (CODART MF., travaux de recherche sur terrain et les traitements 20102). La nature, la biodiversité, le paysage des données. C’est une démarche structuralo- naturel contribuent ensemble à déterminer la dialectiques dont l’objectif est de faire une analyse beauté et le pouvoir attrayant d’un site comparative de la réalité sur terrain par rapport écotouristique. aux différents modèles et dispositions d’exploitation des sites écotouristiques. Après I.A.1. Le relief granitique d’Antoetra : un cette analyse nous pouvons avancer une stratégie contrefort du pays Zafimaniry : de gouvernance partagée d’un espace touristique Pour le pays Zafimaniry, la structure du relief offre au profit de la communauté pauvre. un paysage d’alvéole où l’on trouve des vallées encaissées dans une série de montagnes Pendant la recherche bibliographique nous avons relativement élevée caractérisée par le massif particulièrement feuilleté trois types d’ouvrages : d’Ivohibe qui culmine à 1875m d’altitude, de les études générales concernant le tourisme et Vohitsokina à 1822m. l’écotourisme, l’histoire et l’étude monographique Ces reliefs sont également imprégnés d’histoire et de la communauté Zafimaniry et enfin les études de mœurs. Ainsi les ancêtres ont cru que c’était spécifiques relatives au système d’exploitation et dans ces zones rocheuses que reposent les de gouvernance d’un espace touristique. La ancêtres d’Antoetra. Ces sont en effet des sites recherche sur terrain est essentiellement focalisée sacrés. On aperçoit cette sacralité en observant le sur l’observation direct et les travaux d’enquête silence sur ces montagnes. Cela offre un paysage auprès des villageois, prestataires locaux, les typique au charme particulier caractérisé par une responsables administratifs et des organismes certaine tranquillité. œuvrant pour la promotion de l’écotourisme et enfin les clients. I.A.2. Les conditions climatiques du rebord oriental du pays Betsileo : I- ZAFIMANIRY, UN PAYS FAVORABLE Sur la station d’Ambositra où l’on constate encore AU TOURISME l’effet de l’altitude, une différence est nettement affichée entre la saison humide et sèche. La Ce site est favorable au fameux trekking grâce à la première saison qui va de Novembre à Avril est présence des vallées ingénieusement aménagées, marquée par une forte précipitation de 1274mm qui se faufilent à l’intérieur des montagnes en janvier, et une température relativement rocheuses abritant selon la croyance de la élevée de l’ordre de 20°C. L’autre saison est population l’âme de ses ancêtres ; et les forêts relativement sèche puisque le niveau moyen de tropicales humides d’altitude jusqu’à 1500mètres, précipitation saisonnière est de 36 mm. Pendant dans lesquelles se trouvent des variétés cette saison le ciel est généralement dégagé. Cette saison est caractérisée par la température moyenne ne dépassant pas 15°C. 1 DEPELTEAU F., Janvier 2010 La démarche d’une recherche en sciences humaines, Méthodes en sciences 2 humaines, Edition De BOEK, 430p GODART MF, 2010, Problématique de l’écotourisme

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Cette condition climatique offre une large habitat naturel abrite les Papilionidés, les Piéridés, opportunité au développement du tourisme dans les Nymphalidés et les Noctuidés. la mesure où la haute saison se déroule pendant la saison sèche. Par ailleurs, c’est une saison festive La vie de ces animaux est favorisée par la dans le betsileo Nord. Car c’est la période des présence de ce pont forestier lequel assure la moissons ou « le volambetohaka », pendant communication avec quelques écosystèmes. Les laquelle les gens organisent toutes les fêtes oiseaux, les reptiles, les crustacées et les traditionnelles et familiales en particulier le amphibiens en particulier Mantella cowani retournement des morts, le fameux famadihana, (NOROSON, 20084), sont aussi présents dans ce les « foires agricoles », le tournoi de « savika » site, et font l’objet d’une attraction écotouristique. inter village. La présence de la vie faunistique dans ces terroirs forestiers favorise et justifie l’initiative de quelques I.A.3. La forêt de Zafimaniry : une forêt tropicale associations villageoises en particulier le VOI d’altitude : AMSM (Antoetra Miaro ny Sahona Mena) pour la La forêt de zafimaniry fait partie du corridor mise en place d’une gestion durable en faveur de forestier du Betsileo Nord. Cette portion du l’environnement et l’écotourisme. corridor « est formée en général de forêt dense humide sempervirente et de forêt claire I.B. La richesse culturelle : l’attraction la plus sclérophylle, parfois associées à la savane et à la connue de la destination Zafimaniry steppe » (RAVALISON,20123). Dans la forêt de basse altitude de l’Est, le terroir zafimaniry est Le Zafimaniry est « un peuple relativement composé essentiellement de forêt primaire typique » grâce à la civilisation de sculpture en sempervirente où l’on trouve encore quelques bois, des œuvres artisanales transmises de espèces autochtone entre autres le voamboana génération en génération depuis quelques siècles. (dalbergia sp), le nato (faucherea sp) le ramy Cette richesse culturelle est étroitement liée à (canarium sp), Le Lalona (weinmania sp), et l’histoire du peuplement. l’Ambora (tambourissa sp), habituellement utilisées pour la sculpture en bois, l’activité qui fait I.B.1.la richesse culturelle zafimaniry, favorisée la réputation et constitue le fondement de la par l’histoire du peuplement culture locale. Selon la tradition orale, ce peuple de forêt venait Cependant, les pressions anthropiques en du Nord. Cette tradition orale avait confirmé particulier les feux de culture ont progressivement l’ascendance merina et betsileo de la population favorisé l’apparition de forêt secondaire à zafimaniry. « Ces gens se sont installés au XVIIIe prédominance des espèces en particulier le siècle dans cette région boisée et reculée pour harongana (Harungana madagascariensis). La échapper aux guerres intestines entre royautés. La disparition de la couverture forestière primaire va forêt leur offrait alors sécurité et moyens de en quelque sorte menacer l’intégrité de la culture subsistance ». La condition morphologique locale locale dans la mesure où cette situation pourrait n’avait généralement pas permis à ces gens de diminuer la quantité de la matière première. pratiquer ce type de culture. Ainsi le riz leur manquait. La deuxième génération, ou le petit fils I.A.4. Zafimaniry, des populations animales (zafy) n’arriva plus à satisfaire ses besoins en riz. menacées d’extinction. Cette situation était l’origine du nom zafimaniry La forêt de l’Est est aussi favorable à la vie des qui signifie littéralement descendants qui désirent lémuriens. Les inventaires biologiques ont ainsi du riz. confirmé la présence de 15 espèces de Le dialecte zafimaniry est étroitement lié à celui mammifères, 68 espèces d’amphibiens, 61 espèces du Betsileo Nord. Ces deux dialectes se de reptiles, 64 espèces d’oiseaux. La forêt orientale rapprochent à 90%. Cette situation résulte du fait de Zafimaniry est d’ailleurs caractérisée par les que les origines de Zafimaniry étaient passées par lépidoptères, lesquels constituent un produit les betsileo nord. Certains chercheurs en touristique le plus prisé par les opérateurs particulier Mattei et Linton ont cependant avancé touristiques. L’inventaire a découvert que cet les origines tanala de la population zafimaniry. Cette hypothèse s’appuie sur la pratique

3 RAVALISON J.S, 2012, «Vers la stabilisation du Corridor forestier de la partie orientale du BETSILEO- 4 NORD, dans la région d’Amoron’i MANIA »in NOROSON, 2008, La menace environnementale de – Revue de Géographie, volume 50, pp Juillet-Décembre grenouille, la Mantella Cowani, et ses impactssocio- 2012 économiques au détriment de Commune rurale d’Antoetra.

4 quotidienne. Mais cette hypothèse a été niée par toujours une la valeur culturelle particulière les personnes âgées du village. témoignant la spécificité de cette société. Ces J.P DOMENICHINI5 a étudié cette origine des objets sculptés dévoilent d’ailleurs, le quotidien de zafimaniry. Il a bien mis en relief que la confusion la population. venait d’un changement du pouvoir. Il y a trois siècles le pays Zafimaniry se rattachait au royaume Toutes les cases traditionnelles conservent cette tanala d’Ikongo, le Zafirambo de Vohitrarivo. A culture. Les gens construisent des maisons en bois cette époque la domination tanala avait laissé des selon un procédé d’assemblage si précis qu’il ne traces sur le mode de vie de la population l ocale. nécessite ni tenons, ni mortaises ni clous. En outre, Plus tard, ce pays était compris dans la principauté portes et fenêtres sont sculptées de superbes d’Andramasina à la suite du mariage motifs géométriques qui représentent l’univers des d’Andriamasinavalona avec Ralaniboahangy, fille Zafimaniry et leur vie quotidienne. Les rosaces ainée d’Andriandranonindanitramantany, roi de traduisent les relations avec leur environnement, Vohitrarivo. Cette histoire a confirmé la présence leurs ancêtres et donc, le monde de l’au-delà. des merina, le brassage ethnique dans le pays Certain message est transmis à travers ces motifs Zafimaniry quelques années avant l’arrivée de la géométriques. troupe expéditionnaire de Radama I. Les zafimaniry ont ainsi acquis les mœurs Merina, Ces œuvres ont fait l’objet d’une forte attraction Betsileo et tanala. La culture Zafimaniry figure touristique vers cette destination puisqu’elles actuellement parmi les produits les plus prisés par donnent une image originale d’une civilisation les clients sur le marché mondial du tourisme. relativement ancienne. Le passage dans ce pays Patrimoine immatériel mondial de l’UNESCO, cette permet d’ailleurs aux touristes de s’assurer qu’ils culture authentique fait l’objet d’une demande consomment des produits authentiques. Car des croissante en matière de tourisme culturel. objets d’art falsifiés envahissent actuellement des galeries à Ambositra et à Antananarivo. Cette I.B.2. L’artisanat : une des valeurs culturelles les situation pourrait effectivement favoriser la mise plus appréciées par les touristes : en œuvre du projet de valorisation de la culture La sculpture et le travail du bois figure parmi le locale au profit du développement socio- quotidien de la population zafimaniry. Cette économique de la population autochtone.

Photo 1 : Les œuvres authentiques Zafimaniry

Clichés de l’auteur technique s’est transmise de génération en génération et est devenue une tradition particulière de cette sous tribu betsileo. Le travail II- LE PROBLEME DE VALORISATION du bois devient une source de revenu de la D’UN SITE PAR LA COMMUNAUTE population. Cependant, avant la crise alimentaire PAUVRE qui remonte vers les années trente, les objets d’art n’étaient pas commercialisés. C’était une culture Généralement les communautés rurales malgaches qui s’était ancrée dans la vie quotidienne de cette vivent en dessous du seuil de la pauvreté. Ces gens tribu. En dépit de cette mutation, elle renferme n’arrivent généralement pas à s’investir dans le projet local de développement touristique.

5 Cependant ce secteur est relativement capricieux DOMENICHINI J.P, 2010, Des populations régionales mais un et exige un minimum de qualité d’hygiène et de seul peuple, in Ny Marina, le 15 septembre 2010

5 respect de la norme internationale. Dans ce cas il L’année 2015, le niveau moyen d’instruction des 28 semble absurde de penser à une activité guides locaux qui ont suivi la formation financée touristique à gestion communautaire à par l’UNESCO est généralement bas puisque plus Madagascar. Par conséquent, le système de 20% de ces prétendus n’ont pas eu le BEPC, d’exploitation des produits écotouristiques au 70% n’ont pas pu décrocher le Baccalauréat. niveau du site n’intègre généralement pas la Cependant, le niveau d’implication de la population autochtone. population autochtone est largement fonction de la qualité de ses prestations. De plus l’importance II.A. L’absence d’une implication effective de la du niveau d’implication de ce comité pourrait communauté locale assurer la pérennité du projet de promotion de l’écotourisme communautaire et contribue à la Face à l’offre culturelle d’Antoetra, la demande mise en place d’un système de partage équitable touristique connait une certaine affluence depuis de bénéfice. plus d’une dizaine d’années. Cependant, cette situation n’a pas eu d’impact significatif sur le II.A.3 Le problème d’encadrement financier des développement local faute d’un système paysans pauvres d’implication de la population autochtone. Les paysans peuvent gagner une modique somme grâce à la vente des produits agricoles, artisanaux II.A.1. Le problème de la gestion communale à et aux prestations touristiques, mais faute d’un Antoetra système financier approprié, le fruit du Dans le pays zafimaniry, la structure de gestion des développement de l’écotourisme communautaire activités touristiques connait une certaine n’a pas eu des répercussions sur le développement spécificité faute d’une organisation particulière en local et la pérennisation des activités. Par faveur du tourisme. Dans cette contrée, le conséquent, la situation financière et économique tourisme est géré essentiellement par la commune est de plus en plus catastrophique. Les paysans rurale d’Antoetra. Cette structure publique assure n’ont pratiquement pas accès au système de entièrement la perception du droit d’entrée à microfinance. Leur système de production affiche hauteur de 5.000 Ariary par personne. Aucune un déficit chronique pendant toute l’année. Même véritable organisation n’est constatée au niveau les artisans qui se sont déjà groupés dans une des guides locaux. Ces derniers n’arrivent pas association n’ont pas encore eu le moyen de saisir encore à créer une association légale. Il n’ont pas l’opportunité offerte par les agences de ainsi de bureau d’accueil ou de liaison avec les microfinance à Ambositra faute d’une stabilité clients. Cette situation se répercute sur la qualité structurelle de leurs activités. Cette région a de service d’accueil. A l’arrivée des touristes une également subi un problème d’enclavement relatif dizaine de guides se réunissent autour de la par rapport à la relation ville-campagne. La valeur voiture. Cette scène peut éventuellement gêner ou marchande des produits artisanaux venant de ce perturber, voire effrayer les clients. Malgré cette pays connaît une réduction de l’ordre de 25% à situation la promotion du tourisme est appuyée 50% par rapport à celle de la ville d’Amboritra. par plusieurs organismes nationaux et Cependant le prix des produits de premières internationaux, entre autres l’UNESCO, nécessité connait une augmentation moyenne de l’association Babakoto France. l’ordre de 20% à 40% sur le marché d’Antoetra.( Source : Enquête 2014). II.A.2. La capacité des acteurs locaux : La capacité des acteurs locaux dépend de leur II.B. L’absence d’une véritable intégration à niveau d’instruction. Les guides, les porteurs l’économie locale : locaux devront alors avoir un minimum de connaissance linguistique leur permettant de L’intégration du tourisme à l’économie locale laisse communiquer avec les clients. Cela va donner une encore à désirer puisqu’il est difficile de changer ambiance conviviale pendant le trekking. du jour au lendemain le système économique de Dans les zones les plus reculées de Madagascar le subsistance vers un système orienté vers le secteur éducatif reste moins développé. La marché. Le dictionnaire libre wikipédia a confirmé desserte scolaire est largement insuffisante pour cette hypothèse en disant que « l’économie de satisfaire la demande locale. Actuellement le taux subsistance est une économie relativement ou d’analphabétisme va jusqu’à plus de 40%. La totalement à l’écart des flux économiques ; elle est déperdition scolaire peut atteindre 90% dans le essentiellement basée sur l’autoconsommation 6». cycle primaire. Moins de 2% de la population ont atteint le niveau universitaire. 6 https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Economie_de_subsistance.

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Elle n’était devenue un moyen de survie de la population que depuis la moitié de 20ème siècle II.B.1. Ecotourisme et le moyen de subsistance pendant laquelle une grande crise qui avait frappé habituel tous les villages obligeait le peuple zafimaniry de Dans le pays zafimaniry, la situation de pauvreté vendre leurs œuvres. En effet, ils n’ont pas profité est généralisée. C’est la conséquence logique de du développement de ce secteur, ils se contentent l’étroitesse de la surface agricole utile. Par d’une petite somme d’argent qu’ils ont gagné en conséquent la production rizicole est largement échange de leurs œuvres brutes avec les insuffisante pour assurer la subsistance de la revendeurs dans les galeries d’art d’Ambositra. population. Avec une production moyenne de Cette attitude reste dans la pratique quotidienne l’ordre de 340kg de paddy sur les petites parcelles de la population. L’artisanat n’est pas du tout une améliorées, 120kg sur les rizières irriguées de activité proprement économique ; c’est une petite technique traditionnelle et 325kg sur les parcelles besogne supplémentaire pendant la période de de tavy, la rupture de stock se manifeste 3 mois soudure. Pour cette raison, les gens n’ont après la récolte. Les gens n’espèrent pas une généralement pas le souci d’une véritable surproduction leur permettant de les vendre sur le pérennisation à but proprement économique de marché ou d’assurer l’accueil des touristes dans le leur activité. petit restaurant villageois. Les gens pratiquent des autres cultures vivrières qui peuvent témoigner la II.B.3. La promotion timide de l’offre spécificité de la vie rustique de zafimaniry mais la communautaire : quantité de production est aussi insuffisante pour La vente des circuits culturels zafimaniry est permettre à cette communauté de satisfaire la relativement avancée par rapport à la situation demande des clients. actuelle du marché locale et national. Cependant cette situation n’a pas donné une opportunité à la II.B.2. Ecotourisme et la promotion de l’artisanat gestion communautaire du tourisme. La Pour la communauté la sculpture et la marqueterie destination vers ce site est limitée sur les deux n’était pas une activité lucrative, c’était une circuits habituels : la visite du village culturel de tradition transmise de génération en génération. Sakaivo et d’Ifasina.

Figure 2 : Circuits culturels Antoetra

Soaniherenana Ifasina

ANTOETRA

Faliarivo

Sakaivo

Route Forêts naturelles Circuit Sakaivo Zone de Cultures

0 2 6 Circuit Ifasina Savane herbeuse

Kilomètres Villages Savane arborée

Source : BD 500 FTM, Auteur

Par conséquent, la majorité de clients n’ont pas guides locaux puisque ces sites sont fortement consommé les offres proposées par les connus et suffisamment exploités par les guides communautés locales en particulier l’hébergement nationaux et régionaux. Le lancement d’un villageois. Certaines agences de voyages et tours tourisme à gestion communautaire laisse encore à opérateurs n’ont pas sollicité la prestation des désirer. Aucune campagne d’information n’est

7 envisagée jusqu’à présent pour lancer cette des offres touristiques grâce à leur moyen de nouvelle formule. Le tourisme culturel dans le pays production des biens et services au niveau du site. zafimaniry intéresse tant de clients, mais l’impact L’attribution de la communauté locale requiert la du tourisme est loin d’atteindre l’objectif de mise en place d’une structure solide au profit de la réduire la pauvreté, de conserver le patrimoine gestion de proximité.Le tourisme culturel favorise naturel et culturel tant que la communauté locale déjà la prestation des travailleurs de bois, des ne soit pas impliquée dans la gestion des activités. hébergeurs locaux, des guides et porteurs. Ces différents prestataires doivent créer III- LA PARTICIPATION respectivement une association de bénéficiaires COMMUNAUTAIRE : UNE SOLUTION pour former une unité de gestion du site POUR LE DEVELOPPEMENT DURABLE touristique. Actuellement l’élargissement des offres par l’intégration du volet environnement Le concept et l’esprit de l’écotourisme peut par ailleurs intégrer toutes les communautés communautaire prévoit l’implication effective de la de base ou « VOI ». Au niveau de la commune, les population locale. Le niveau d’implication de cette différents ONGs en particulier le Babakoto France, communauté est fonction du système de l’UNESCO, la « Conservation International », gouvernance adopté par les différents acteurs. les opérateurs touristiques œuvrant pour la Cette situation va d’ailleurs assurer la mise en promotion du tourisme constituent un maillon place d’un véritable partage de responsabilité et de indispensable d’une fédération des acteurs au bénéfice. niveau de la commune en tant qu’organisme d’appui et promoteur. La commune joue ainsi le III.A. L’implication de la population autochtone : rôle de facilitateur et de tutelle administrative en tant que collectivité administrative décentralisée. Le partage équitable de bénéfice doit se baser sur la charte de responsabilité. En effet, la III.A.2. Renforcement de capacité des acteurs communauté autochtone doit être impliquée dans locaux la mise en œuvre du projet de promotion du La communauté autochtone est un maillon tourisme afin d’assurer l’impact du indispensable pour développement de développement de cette activité sur l’économie l’écotourisme. Cependant la faiblesse du niveau locale. d’instruction et de compétence des acteurs locaux est sérieusement préjudiciable à la promotion de III.A.1.La structure de gouvernance en faveur des cette activité. Par conséquent, la mise en œuvre acteurs locaux d’une stratégie locale de développement de La structure au niveau du site constitue la base l’écotourisme dans le pays Zafimaniry requiert une d’une organisation touristique à différentes série de formation en particulier le renforcement échelles. Son rôle et compétence s’attache de capacité des guides locaux, des porteurs, directement à la limite géographique de leur restaurateurs et hébergeurs. terroir respectif. Les acteurs locaux pourraient III.A.3. Le mécanisme de financement durable également garantir ou assurer la qualité du site et La facilitation d’accès au financement a été

Figure 3 : Structure de gouvernance locale

Commune

Services du ONG tourisme (administration Artisans Guides et service technique)

Hébergeurs Porteurs V.O.I

Fédération Collaboration 8 Appui technique et Tutelle administrative financier évoquée par le onzième engagement de la charte organismes non gouvernementaux et des de tourisme durable qui a pour objectif associations qui œuvrent pour la conservation de « d’encourager une coopération technique et l’environnement et la promotion de l’écotourisme, faciliter les aides financières dans les régions le représentant de la direction régionale du vulnérables…». Actuellement, la loi de finance tourisme de forêt et de l’environnement et de favorise la prolifération des micro-finances et fait l’office du tourisme, les responsable administratifs l’objet de plusieurs institutions mutualistes comme et les élus locaux et le cas échéant, le représentant le TIAVO. C’est une stratégie d’épargne et d’aide des autres services technique déconcentrés. mutuelle au profit du développement de Ensuite les membres du bureau d’exécution seront proximité. L’institution financière doit assurer non élus pendant la réunion du conseil d’administration seulement l’accès au crédit, mais aussi et surtout sur la liste de candidat présentée par toutes les l’encadrement financier dans le but justement entités concernées. d’éviter la mauvaise gestion, une cause principale qui compromet depuis des années ce système de financement. Cette stratégie permet à l’association III.B. La mise en place d’une stratégie de paysanne et aux acteurs particuliers de construi re développement locale un établissement touristique, d’acheter des outils jugés nécessaires pour l’amélioration la qualité Tant que les activités quotidiennes de la d’accueil et de la prestation touristique. population ne soient pas en phase avec le développement du tourisme, la répercussion III.A.4. Les caisses spéciales du tourisme économique de ce secteur ne sera pas effective. La caisse spéciale est une mesure de stabilisation Ainsi est-il nécessaire de mettre en place un d’un mécanisme de financement au profit d’une système de développement intégré stratégie de développement durable. Dans un pays où la majorité des acteurs de développement n’ont III.B.1. La promotion d’un système de pas eu des moyens nécessaires pour financer leurs développement intégré activités touristiques, le fonds local du tourisme est L’écotourisme doit avoir une relation de cause à une solution permettant la mise en place et la mise effet avec les autres facteurs sociaux, en œuvre d’un projet de promotion et économiques, culturels et environnementaux. La d’amélioration de la qualité de service, de la valorisation des activités rurales va non seulement diversification des offres locales. La mise en place épargner l’environnement contre les différentes d’un fonds local pour le développement de pressions sur les ressources naturelles, mais elle l’écotourisme vient de la contribution effective de participe activement à la mise en place d’un plusieurs parties prenantes dans le cadre d’un système de développement locale. La promotion système de partenariat public-privé grâce à de l’écotourisme peut d’ailleurs profiter du l’initiative du gouvernement. tourisme rural grâce aux offres relatives à l’art D’une manière générale cette structure comprend culinaire, au restaurant chez les paysans, et la

Figure 4 : Institution financière spécialisée

Conseil d’administration

Bureau exécutif

Organe technique Organe financière

le conseil d’administration et le bureau filière artisanale. Dans le pays zafimaniry, la d’exécution. Le Conseil d’Administration est promotion de l’agriculture pose un problème dans composée du représentant des acteurs locaux le cadre d’une politique de développement faute (guides, VOI, association des artisans des justement de terrain agricole. La promotion de hébergeurs, des établissement touristique), des l’écotourisme encourage pourtant les paysans à

9 diversifier leurs produits agricoles. Actuellement ou le maintien de la richesse culturelle locale dans ces villages, l’on a déjà constaté le relève de ces résolutions puisque la promotion de développement de la culture maraichère. Cette l’écotourisme ouvre de vastes perspectives en dernière peut favoriser le développement des termes de préservation, de protection et restaurants chez les paysans. d’utilisation durable de la biodiversité en encourageant les populations locales et III.B.2. La mise en place d’un projet de promotion autochtones des pays d’accueil tout comme les de l’écotourisme communautaire touristes à préserver et respecter le patrimoine La valorisation des produits écotouristiques en naturel et culturel. milieu paysan ne va pas échapper aux processus de mise en place d’un projet de développement. Elle Le but de ce plan repose sur la promotion de comprend généralement cinq étapes après avoir l’écotourisme au service du développement local bien défini l’idée de projet : Etude de faisabilité ; et la conservation de la biodiversité. Selon la Elaboration de la stratégie ; Recherche et recommandation de l’OMT sur la nécessité de obtention de financement ; Programmation mettre en place des plans nationaux de tourisme opérationnelle de mise en œuvre et enfin tenant compte de la demande du marché et des évaluation finale qui se focalise généralement sur avantages concurrentiels existant localement, et l’appréciation des réalisations et des effets du après l’évaluation des réalités sur le processus de projet. Une attention particulière doit cependant mise en tourisme du pays Zafimaniry, ce plan va préoccuper toutes les parties prenantes pendant la s’appuyer sur cinq grands axes stratégiques : conception et la réalisation de toutes les étapes : la  L’identification des produits pour la mise conscientisation de la population locale pour que en tourisme du site celle-ci s’intègre volontairement au projet de mise  La mise en place de la structure de en tourisme du terroir où elle vit. gouvernance  La mise en place d’un fonds local et III.B.2. Le plan stratégique pour le amélioration du système de financement développement de l’écotourisme communautaire  La formation et le renforcement de La promotion de l’écotourisme communautaire capacité des acteurs locaux requiert une nouvelle orientation stratégique.  La mise en vente des produits Celle-ci constitue actuellement le fondement du projet de développement de l’écotourisme Conclusion : communautaire qui s’appuie sur la participation Le paysage naturel et la diversité culturelle effective des acteurs locaux. pourraient ensemble offrir des produits attrayants Ce plan s’inscrit dans la politique du ministère de et indispensables à la promotion des activités tutelle qui projette la promotion de destination écotouristiques dans le pays Zafimaniry. Le Madagascar, la promotion des investissements contexte socio économique du site ne permet touristiques, le développement intégré et cependant pas la mise en place d’une stratégie harmonieux du secteur tourisme. Il ressort participative ou de développement de proximité. également de l’objectif des résolutions adoptées Face à cette situation, l’écotourisme est une par les Nations Unies grâce à l’initiative de Maroc nouvelle facette qui doit favoriser l’implication sur la promotion de l’écotourisme aux fins de effective de la population locale ; une nouvelle l’élimination de la pauvreté, et de la protection de formule qui pourrait contribuer à la mise en place l’environnement. La mise en tourisme d’un terroir d’un système de développement durable au niveau communautaire où l’on associe la valorisation non du site. extractive des ressources naturelles et la recherche

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BIBLIOGRAPHIE

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