LE PETIT FORTIFF’SERE Le petit journal annuel de Fortiff’Séré L’association Séré de Rivières

N°3 Janvier 2019

Retour sur le canon-revolver Hotchkiss de 37 mm Par Jean-Pierre ZEDET

4 août 1914, les bombardements de Bône et de Philippeville Par Jean-Jacques MOULINS

Les forts de la Bouzaréah et de Kouba dans la défense terrestre d’Alger, en 1913 Par Jean-Jacques MOULINS

Communications optiques de forteresses dans la place de

Par Jean-Pierre Zedet

Le Petit Fortiff’Séré n°1

Le mot du Président

Chères adhérentes, chers adhérents,

En ce début d’année, je tenais à vous souhaiter une bonne et heureuse année 2019. Je vous remercie pour le soutien que vous portez à l’association car vos adhésions et vos dons permettent de réaliser depuis 2014 de grands projets pour promouvoir ce patrimoine.

Comme l’an dernier, le Petit Fortiff'Séré a un bon mois de retard, car je souhaitais vous faire partager la finalisation de certains projets de l’association

Revenons en 2018, avec une année encore bien remplie pour l’association. Nous avons vendu une exposition à la DGA (Direction Générale de l’Armement) et le Conseil Départemental des Alpes-Maritimes a acheté de nouveaux panneaux pour compléter ceux déjà existants au fort de la Drette. Nous avons aussi participé à des manifestations organisées en collaboration avec les villes de Corcieux dans les Vosges et de Meroux près de Belfort.

Au fort de la Grande Haye, comme vous pourrez le voir dans la suite du journal, l’ouvrage poursuit sa métamorphose. Il a été mis en valeur grâce à la petite équipe de bénévoles très motivée qui a travaillé en 2018 pas moins de 2800 heures. Nous avons ouvert le fort pour plus de 1200 visiteurs et nous travaillons en collaboration avec d’autres associations afin de faire vivre ce patrimoine lors des journées du patrimoine Golbéen et de futures manifestations à venir.

En septembre 2018, l’inscription du fort sur le site Patrimoine 13h a permis sa diffusion lors du journal télévisé de 13h de TF1. Ce succès nous a permis de récupérer de nouveaux membres, quelques fonds et une belle publicité pour les visites qui ont suivies.

L’année 2019 sera une année riche en activité avec en projet la vente de panneaux au fort de Bourlémont pour illustrer chacune des parties du fort et le projet d’une nouvelle visite guidée de la citadelle de Montmédy.

Au fort, il nous reste à dynamiser la souscription de la Fondation du Patrimoine qui est lancée depuis mai 2018. Cette dernière nous a permis de collecter 2540 € de don et 1500 € apportés par la Fondation du Patrimoine. Je remercie toutes les personnes qui ont apporté leur pierre à l’édifice en participant à la souscription. Si vous avez la possibilité et que vous souhaitez soutenir ce projet, vous pouvez faire un don directement sur le site de la Fondation du Patrimoine depuis la page d’accueil de Fortiff'Séré et vous bénéficiez d’une déduction fiscale.

Courant ce mois de février, les grands travaux d’électricité réalisés depuis 2018, vont se terminer avec l’illumination de l’entrée du fort pour de futures manifestations de nuit. Il ne restera plus que les caponnières à illuminer afin de faciliter les futures visites nocturnes.

Les principaux chantiers, en dehors de l’entretien du fort, se concentreront sur la fermeture des différentes pièces en réalisant des portes à l’intérieur du fort. Pendant cet hiver, nous avons déjà réalisé une dizaine de portes qui changent l’intérieur de l’ouvrage et limitent l’intrusion du froid à l’intérieur du bâtiment. Enfin, nous sommes en ce moment à l’étude d’une nouvelle manifestation de nuit gérée par Éric Thockler qui se déroulera début septembre pour compléter les différentes animations de 2018 qui sont reconduites en 2019.

Si vous avez du temps libre, nous avons toujours besoin d’aide pour les travaux et l’organisation des manifestations ou des visites, n’hésitez pas à consulter l’agenda des manifestations et à nous rejoindre.

Enfin, je vous invite le 23 mars 2018 pour l’Assemblée Générale de l’association afin de partager un moment tous ensemble. En vous remerciant pour votre soutien, je vous souhaite une bonne année et une très bonne lecture du petit Fortiff'Séré. Je remercie toutes les personnes qui ont participé à la vie de l’association et à la réalisation de ce journal.

Vaubourg Cédric

Le Petit Fortiff’Séré n°2

Agenda prévisionnel de l’année 2019

Samedi 9 mars - samedi 23 mars à partir de 9h - Mise en place de lourdes barrières à différents endroits du fort de la GH

Samedi 23 mars à 17 h - Assemblée générale de l’association au fort de la Grande Haye .

Courant mai ou juillet - 1ère sortie de l’année.

Dimanche 12 mai à 10h30 - Visite de la citadelle de Montmédy organisée en collaboration avec l’OT de Montmédy.

Samedi 8 juin à partir de 9h - Journée tonte du fort de la Grande Haye

Dimanche 9 juin à 15h - Première ouverture de l’année du fort de la Grande Haye.

Samedi 29 juin à 14h - Animations pour les enfants au Fort de la Grande Haye en collaboration avec la ville de Golbey.

Samedi 13 et dimanche 14 juillet - Ouverture au public du fort de la Grande Haye.

Samedi 17 et dimanche 18 août - Ouverture au public du fort de la Grande Haye.

Samedi 7 septembre - Animation nocturne au fort de la Grande Haye

Samedi 21 Septembre à partir de 9h- Préparation du fort pour les journées du patrimoine Golbéen.

Samedi 28 et dimanche 29 Septembre - Journées du Patrimoine Golbéen et repas au fort le 29 septembre.

Courant Octobre ou novembre - 2ème sortie avec les membres.

Dimanche 27 octobre - Ouverture au public du fort de la Grande Haye.

Pendant toute l’année, il y a des journées de travaux au fort de la Grande Haye. Pour tous renseignements, n’hésitez pas à nous contacter ou consulter l’agenda de l’association.

Si vous avez des idées de manifestation pour les années à venir, n’hésitez pas à nous les communiquer. D’autres manifestions peuvent se rajouter dans l’année, nous ne manquerons pas de vous en informer.

La locomotive Péchot au musée des Invalides (VAUBOURG Cédric)

Le Petit Fortiff’Séré n°3

Sommaire I. Actualités de l’association en 2018 et projets pour 2019 par Julie VAUBOURG page 5 II. Actualités 2018 et projets 2019 au fort de la Grande Haye par Julie VAUBOURG page 8 III. La colline dite de La Côte d'Essert, lieu stratégique par Jean-Pierre ZEDET page 11 IV. Communications optiques de forteresses dans la place de Belfort Emplacements, appareils, expérimentations, inspections par Jean-Pierre ZEDET page 50 V. Retour sur le canon-revolver Hotchkiss de 37 mm par Jean-Pierre ZEDET

page 93

VI. Les forts de la Bouzaréah et de Kouba dans la défense terrestre d’Alger, en 1913 par Jean-Jacques MOULINS page 99 VII. 4 août 1914, les bombardements de Bône et de Philippeville par Jean-Jacques MOULINS page 103 VIII. Bibliographie page 115

IX. Devenir membre de Fortiff’Séré– L’association Séré de Rivières Unsoldat au fort d’Arches Coll. Lionel PRACHT page 117 X. Bulletin d’adhésion 2019 page 118 XI. Souscription à la Fondation du Patrimoine page 119

Fortiff’Séré - Association Séré de Rivières Siège social : 2 rue Pierre Mendès - Appartement 912 88190 GOLBEY Tél : 06-35-79-44-19 E-mail : [email protected] Site internet : http://www.fortiffsere.fr/index_fichiers/Page1044.htm Toute reproduction, même partielle du journal est interdite sans autorisation de l’association et de ses auteurs

Le Petit Fortiff’Séré n°4

Actualité de l’association en 2018 et projets pour 2019

Par Julie VAUBOURG

L’année 2018 marque la fin du Centenaire de la Grande Guerre. L’association Fortiff’Séré a donc voulu mettre en avant cette date si importante pour l’histoire de la France en réalisant différentes manifestations dans l’année en rapport avec cet événement marquant.

Quelles sont les différentes manifestations que nous avons organisées en cette année 2018?

Les expositions et les conférences

Dans le cadre de la commémoration du Centenaire de la Grande Guerre à Corcieux dans les Vosges, l’exposition était visible du 30 mai au 6 juillet 2018 au sein de la salle des fêtes de Corcieux. Suite à notre partenariat avec le fort de la Drette à Nice, nous y sommes retournés afin de leur prêter mains fortes pour les visites guidées lors des Journées Européennes du Patrimoine qui ont vu défiler pas moins de 500 visiteurs sur deux jours. Ils ont pu découvrir ou redécouvrir l’exposition sur les fortifications Séré de Rivières de Nice réalisées par notre association en 2017 ainsi que différentes animations qui avaient lieu tout le weekend (tir au canon, scénettes sur la guerre,…).

Les membres de l’association Alain Fine dans la cour du fort L’exposition sur les fortifications Séré de Rivières des Alpes Maritimes de la Drette (VAUBOURG Cédric) dans le magasin à poudre au fort de la Drette (VAUBOURG Cédric)

En parallèle, l’association a encore vendu une exposition sur les fortifications Séré de Rivières à la DGA (Direction Générale de l’Armement) pour les journées du patrimoine au fort de Villeras à côté de . Enfin, pour finir l’année, nous avons installé l’exposition, en la commune de Meroux, à côté de Belfort, de septembreà novembre 2018. Une conférence sur les fortifications Séré de Rivières et la place de Belfort a eu lieu le vendredi 16 novembre à 20h30 à la médiathèque de Meroux.

L’exposition sur les fortifications Séré de Rivières à la Mairie de Meroux (VAUBOURG Cédric)

Le Petit Fortiff’Séré n°5

Les sorties avec les membres

L’association a organisé deux sorties cette année pour ces membres. La première a eu lieu à Epinal pendant le weekend de pâques du 31 mars au 2 avril 2018. Lors de ce weekend, nous avons réunis une vingtaine de membre afin de leur faire découvrir des fortifications méconnues de la place forte d’Epinal. Le samedi, nous avons commencé par la visite du magasin central de Beau Désir (appartenant à CITEOS) et du magasin de secteur de la Louvroie (appartenant à la ville de Golbey). Puis, nous nous sommes retrouvés au fort de la Grande Haye afin de pique-niquer tous ensemble et continuer par l’assemblée générale de l’association.

Pique nique au fort de la Grande Haye (Eric BARDOCHAN) Assemblée générale au fort de la Grande Haye (Bruno HOUILLON)

La journée s’est clôturée par la visite du musée des sapeurs pompiers des Vosges (SPSP88) commentée par Patrick Aimé, passionné et passionnant.

Le dimanche, nous avons arpenté à travers des fortifications méconnaissables du grand public, les forts de la Mouche et de Razimont. Ces visites n’auraient pas pu avoir lieu sans l’autorisation de l’armée.

Le groupe au fort de la Mouche (Lucas AMMANN)

Enfin, le lundi, nous sommes partis à la découverte de petits ouvrages situés dans la forêt de Razimont ; les ouvrages d’infanterie de Préfoisse, Ste Barbe, Cumay et Vorpaille. Le samedi soir et le dimanche soir, le groupe de passionnés de fortification a bien sûr eu le plaisir de se retrouver devant un bon repas organisé au sein du fort de la Grande Haye.

Le groupe à l’ouvrage D de Cumay (Eric BARDOCHAN)

Le Petit Fortiff’Séré n°6

La deuxième sortie s’est déroulée au fort de Pagny la Blanche Côte et au fort du St Michel à Toul les 3 et 4 novembre 2018. Le samedi, nous avons été accueillis chaleureusement par le propriétaire du fort de Pagny la Blanche Côte afin de faire découvrir cette fortification importante à nos membres. Le dimanche, nous nous sommes retrouvés sur les hauteurs de Toul, pour découvrir un monstre de la fortification, le fort du St Michel et tout son massif rempli d’abris et de magasins.

Le groupe au fort du St Michel à Toul (Michel TRUTTMANN)

Le Petit Fortiff’Séré n°7

Actualités 2018 et projets 2019 au fort de la Grande Haye

Par Julie VAUBOURG

En cette année 2018, le fort de la Grande Haye a encore bien changé. Commençons par les travaux. Nous avons commencé fin 2017 l’électrification du fort. Nous avions pour but de finir ces travaux pour les journées du patrimoine golbéen 2018 et c’est chose faite. Le fort est entièrement électrifié. Ainsi, avec l’électrification de l’ouvrage, la sécurité des visiteurs et des bénévoles est assurée. Hormis la sécurité, qui est très importante à nos yeux, nous avons voulu créer un éclairage qui met en valeur cette fortification. La lumière n’est pas simplement présente pour guider les différents visiteurs à travers des galeries mais elle est aussi présente pour les mettre en valeur avec des jeux de lumière redonnant vie à cette vieille bâtisse pour qu’elle dévoile ses secrets. L’éclairage de certains murs nous a révélé des inscriptions bénéfiques pour la visite du fort, écrites pas nos ancêtres il y a plus de 100 ans. Grâce à ces révélations, nous avons donc eu l’idée de réaliser des panneaux supplémentaires qui relatent ces inscriptions et d’autres informations importantes pour la visite du fort. Pour compléter ces panneaux, à visé historique, nous avons rajouté des plans d’évacuation dans tout le fort, ainsi que des extincteurs supplémentaires dans le cadre de la sécurité de tous.

Un croisement de galerie et le magasin à poudre électrifiés (Cédric VAUBOURG)

En dehors de l’électrification du fort, de nombreux autres travaux ont été réalisés. Ainsi, le magasin à poudre a retrouvé ces volets et un encadrement de créneau à lampe, différentes portes métalliques ont été mises en place, des gonds ont été restaurés pour faciliter l’installation de nouvelles portes, le bois sur les dessus du fort a été évacué, des travaux de terrassement ont été fait dans la cour et dans les fossés par la ville de Golbey, l’entrée du fort a été mise en valeur, des murs en maçonnerie ont été remontés, la rampe d’accès du fort s’est embellie, le fossé a été dégagé des différents gravats qui l’encombrait, des toilettes ont été mise en place, des cheminées d’aération ont été débouchées,….

Mise en valeur de l’entrée du fort (Bruno HOUILLON) Nettoyage des fossés (Julie VAUBOURG)

Le Petit Fortiff’Séré n°8

Ce dernier point nous amène à un des projets que l’association a réalisé en partenariat avec le Lycée de Somme Suippe à Reims. En effet, cette collaboration a permis au fort de retrouver son aspect d’antan, ainsi 17 cheminées ont repris leur place sur les dessus du fort. Elles ont été soudées et repeintes afin de garder une certaine étanchéité à l’intérieur du fort. Nous remercions vivement les élèves du Lycée pour leur aide bénéfique.

Réalisation des cheminées par les élèves du Lycée de SOMME-SUIPPE Les cheminées remises en place sur les dessus du fort (Maxence LASSERRE) (Julie VAUBOURG) Autre projet important de l’association, la restauration de la façade des casernements du fort de la Grande Haye. En avril 2018, le lancement de la souscription auprès de la fondation du patrimoine a été lancé. Cette initiative a pour but de récolter des fonds afin de restaurer cette façade. Si vous souhaitez nous aider dans ce projet en faisant un don et avoir des renseignements supplémentaires, rendez-vous sur la page de la fondation du patrimoine : https://www.fondation-patrimoine.org/les-projets/fort-de-la-grande-haye-a-golbey Votre don ouvre droit à une réduction d’impôt. Tous ces différents travaux ont pour but de restaurer cet ouvrage afin de le faire découvrir et d’y effectuer différentes animations. De mai à novembre 2018, l’association a réalisé des visites guidées qui ont intéressés pas moins de 1200 visiteurs. Dans les plus importantes, il ne faut pas oublier les journées du patrimoine golbéen qui ont rassemblé différentes associations autour de deux journées consacrées à la mémoire et au patrimoine. Lors de ces deux jours, environ 400 personnes ont arpentés les galeries du fort, visités les différents exposants dont la Mémoire collective, la Belle Epoque, SPSP88 ou encore des particuliers venus montrer leur collection personnelle. Sans compter sur la participation de la société des fêtes de Golbey qui a permis de réaliser le rata du poilu qui a émerveillé les papilles de pas moins de 122 convives. Ces journées fut exceptionnelles et nous espérons les renouveler avec encore plus de nouveautés l’an prochain.

Le rata du poilu dans la cour du fort Des véhicules militaires (Hélène THOCKLER) dans la cour du fort (Hélène THOCKLER)

Une visite guidée (Hélène THOCKLER)

Le Petit Fortiff’Séré n°9

Parmi les autres manifestations importantes, il y a la journée « Fort Aventure » réalisée en collaboration avec la commune de Golbey, qui a réunis 80 enfant autour d’activités ludiques et sportives, la visite du 11 novembre 2018 marquant la findu Centenaire de la Grande Guerre et réunissant pas moins de 160 visiteurs émus par la cérémonie sons et lumières réalisée par Eric THOCKLER, et le 10 novembre 2018, « la Ronde des forts », marche populaire réalisée en collaboration avec la commune d’Uxegney et l’ARFUPE (fort d’Uxegney et Bois l’Abbé).

L’épreuve du ski sur herbe pendant le Fort Aventure La ronde des forts (Bruno HOUILLON) (Bruno HOUILLON)

La cérémonie du 11 novembre 2018 Une des visites guidées du 11 novembre 2018 (Bruno HOUILLON) L’association a donc eu une année 2018 pleine d’aventures et de rebondissements. Nous espérons que l’année 2019 sera aussi fructueuse.

Le Petit Fortiff’Séré n°10

La colline dite de la Côte d’Essert, lieu stratégique

Par Jean-Pierre ZEDET

A l'altitude de 460 m, se trouve un petit massif calcaire bathonien qui domine le village d'Essert à l'Est, d'où il tire son nom. Situé à l'ouest de la Place, à environ 4700 m du Château, il commande la plaine entre Chalonvillars et Échenans et voit le débouché de la route de Paris à hauteur du Moulin Rougeot (altitude 435 m), ainsi que la forêt des Ordons, la Brisée (altitude 498 m) et finalement la route arrivant de Lure vers Chagey. En retrait de la ligne joignant les nouveaux forts du Salbert et du Mont Vaudois sa position ne pouvait qu'intéresser les militaires. Une tradition locale tenace voudrait que les Prussiens y aient installé des canons en 1870. Même si l'accès à travers bois eut pu être surmonté par l'artillerie, la distance au Château (4700 m), au fort des Barres (3600 m) était trop grande pour la portée de leurs canons (canon de 4, 2500 m - canons de 7 et 12, 3500 m) ; les batteries placées au village d'Essert étaient déjà en limite de portée pour le Château (3400 m environ), mais leurs objectifs étaient les Barres et Bellevue (environ 2400 et 2000 m), entre autres. Revoir pour cela les cartes des opérations tant françaises que prussiennes qui répertorient les emplacements de ces batteries.

Première occupation militaire.

Dès 1875, alors qu'en prévision d'une guerre prochaine on construisait des ouvrages et des batteries avancées sur le pourtour de la place, on s'était empressé d'occuper le sommet de cette falaise circulaire par l'installation de deux ouvrages armés de pièces d'artillerie, l'un sur la Côte d'Essert, l'autre sur la côte d'Urcerey. L'étude d'une occupation de la position de la Côte a été prescrite par décision Ministérielle du 10 mars 1875. Le lever a été fait par la Brigade topographique. Le projet n'est pas encore étudié au 25 juillet 1875. Ordre d'étude est donné le 2 décembre 1875 et approuvé par le Ministre. Un projet est fourni et approuvé le 21 février 1876 à la fois par le Ministre et par le Directeur Supérieur. Les travaux commencent dans l'année et l'ouvrage est déclaré achevé le 31 décembre 1877.

C'est une batterie en terre, avec 3 traverses pleines, 4 plateformes avec une hauteur de genouillère de 1,40 mètre, un abri à la gorge, laquelle est protégée par une palissade. Le Petit Fortiff’Séré n°11

Le sommet de la Côte s'inclinant vers le Sud, la batterie est placée au point le plus élevé, au plus près du rebord assez abrupt côté Nord-ouest.

Le Petit Fortiff’Séré n°12

Une fois installée cette batterie ne va jouer aucun rôle, au point que son entretien semble avoir été négligé pendant dix ans, comme on va le voir. Il faut dire que depuis 1881, il est question de la remplacer par un ouvrage plus conséquent. Seul événement marquant, un incendie en 1887: Dans un rapport, le Chef du Génie par intérim Couchet, rend compte qu'un incendie s'est déclaré à la batterie de la Côte dans la nuit du 19 au 20 mai 1887. Le blockhaus flanquant la gorge a été complètement brulé, la palissade a été brulée de chaque coté du blockhaus sur une longueur de 14 m environ. Ce blockhaus de 6 m sur 4 m, construit en bois, était recouvert d'une toiture en tuiles. Il était, ainsi que la palissade, en assez mauvais état selon le rapport. Les causes de l'incendie ne sont pas connues, la gendarmerie de Belfort fait une enquête, le Chef du Génie en transmettra les résultats dès qu'ils seront parvenus à sa connaissance. Orage, malveillance, imprudence des militaires en manœuvre, il n'y a aucune trace d'éventuelles suites dans les archives consultées.

Premier projet de modernisation.

Un Rapport du Chef de bataillon Capperon, Chef du Génie de Belfort est écrit le 2 février 1883 au sujet de l'état d'avancement des projets des nouveaux ouvrages: "Ouvrage de la Côte. Le travail n'est pas commencé et, à moins d'augmentation de personnel, sa rédaction ne pourra être entreprise qu'à l'automne prochain. Il y aura lieu de se préparer une adjudication spéciale."

Dans une apostille du 1er avril 1884, le Chef du Génie et le Capitaine du Génie Pelletier demandent pour 1884, 450.000,00 F pour construire l'ouvrage de la Côte d'Essert:

"Afin de se conformer aux dernières instructions reçues au sujet de la rédaction du projet de l'ouvrage à exécuter à la Côte d'Essert (Instructions complémentaires adressées par le Général Inspecteur en 1882), on a eu égard dans l'établissement du projet, aux considérations suivantes: 1° Au sujet de l'emplacement, il a été admis que l'emplacement occupé actuellement par une batterie semi-permanente est à adopter comme répondant le mieux aux conditions de vues et de commandement. On s'est cependant imposé la condition de tirer autant que possible parti des ouvrages de terrassement qui constituent actuellement la batterie de la Côte. 2° Les dispositions et le développement des crêtes résultent du rôle que l'on attribue à cet ouvrage, rôle qui a été compris ainsi qu'il suit: Placé à égale distance du Salbert et du Mont Vaudois dans un rentrant assez prononcé par rapport à ces deux forts, il a peu à craindre de devenir l'objectif principal des attaques de l'ennemi. Il devra au contraire surveiller les attaques dirigées contre ces deux forts en les prenant de flanc par les feux qu'il dirigera dans la direction de Chalonvillars et de Genéchier. Le but secondaire qu'on lui fera atteindre sera de battre les pentes siyuées soit au pied du petit Salbert, soit à l'origine du ravin d'Urcerey et par lesquelles l'ennemi pourrait se glisser à l'abri des vues des forts dont nous avons parlé. Quand à son action sur l'Ordon brisée, on n'a pas jugé nécessaire de la rendre importante, vu le nombre de feux du Salbert et du Mont Vaudois dirigés dans cette direction. L'ouvrage devrait tomber nécessairement peu après la prise par l'ennemi, soit du Salbert, soit du Vaudois, on n'a pas placé de feux d'artillerie sur sa gorge dirigée du coté de Bavilliers. En résumé, l'armement se compose de: 1 pièce de 120, tirant sur l'Ordon brisée 4 pièces de 120, tirant sur Chalonvillars 2 de 120 et de 2 de 95, tirant sur Genéchier-Vaudois 2 de 95, tirant du coté du Petit Salbert 2 de 95, tirant du coté de Buc. La gorge n'aura qu'un parapet pour l'infanterie. La garnison serait de 150 hommes. Le Petit Fortiff’Séré n°13

3° Dispositions de détail. Les dispositions des crêtes qui résultent des conditions précédentes conduisent à donner à la forme générale de l'ouvrage celle d'une lunette aplatie dont le saillant coté 464 m est de beaucoup le point le plus haut des différentes crêtes. Les faces suivent à droite et à gauche par ressauts la déclivité du terrain, en dessous. Cette disposition permet de ne traverser les pièces que de deux en deux, grâce à la hauteur relativement considérable des différentes traverses. Le flanquement sera assuré par une caponnière double au saillant avec 4 pièces, par deux ailerons pour les deux flancs avec feux d'infanterie. La gorge sera flanquée par les feux d'infanterie. Les fossés seront creusés dans le roc. Ils mesurent 10 mètres de largeur et 7 mètres de profondeur en moyenne. 4° Locaux. Les locaux pour les hommes comprendront quatre casemates de 6,00 m de portée et de 14,00 m de longueur (garnison 150 hommes), Petit magasin pour les vivres, 1 casemate semblable; Four et paneterie, 1 casemate semblable; Infirmerie, 1 casemate de 20 m². Les locaux de l'artillerie seront: 1° magasin à cartouches de 6,00 m sur 6,00 m et 3 mètres de haut; 2° magasin à poudre pour 4540 kg, de 6,00 m de largeur, 4,00 m de hauteur et 15,50 m de longueur ".

(Documents repris d'un dossier 6V 4674 du SHD) Les études avaient été menées avec l'Intendance comme on le voit dans une Minute jointe au mémoire sur les projets du service extraordinaire pour 1885. 2e mémoire du 6 mai 1886. Bien que non adoptée l'étude est intéressante concernant l'alimentation dans un ouvrage.

"Procès-verbal de conférence au sujet des locaux à réserver aux services administratifs dans l'ouvrage projeté à la Côte d'Essert. L'an mille huit cent quatre-vingt quinze, le dix huit mars, En exécution des prescriptions de la dépêche Mlle du 6 juin 1884 approuvant l'Avis du Comité des Fortifications en date du 16 mai précédent, au sujet des conditions dans lesquelles devra être présenté le nouveau projet d'un ouvrage à construire à la Côte d'Essert. M.M. Boué, Sous-intendant militaire de 1ère classe à Belfort Et Ripert, Chef de Bataillon, Chef du Génie dans la dite place, se sont réunis en conférence pour examiner les locaux à réserver aux services administratifs dans l'ouvrage dont il s'agit. Le Chef du Génie rappelle qu'un premier projet, présenté pour l'ouvrage de la Côte, avait donné lieu à un procès-verbal de conférence entre le service du Génie et celui de l'Intendance militaire, à la date du 3 août 1882. Ce procès-verbal admettait pour base une garnison de 150 hommes et une durée d'approvisionnements de six mois. Le Petit Fortiff’Séré n°14

Mais, d'après l'avis du Comité des Fortifications en date du 16 mai 1884, le nouveau projet à présenter doit prévoir une garnison de 250 hommes, en outre, la circulaire ministérielle du 7 juin 1883 à réduit à trois mois (au lieu de six) les approvisionnements en vivres de siège à emmagasiner dans les forts dépendant d'une place à ceinture de forts détachés. Dans ces conditions, le Sous-intendant militaire estime que les approvisionnements à prévoir et les locaux nécessaires aux services administratifs sont ceux résumés dans le tableau ci-après.

Durée Quotité Proportion Désignation des Effectif présumée du de la relative à la totaux observations denrées siège ration durée du siège

Farine Pain, Siège entier 162,0 kg Emplacements nécessaires 1 kg 39,15 m² pour les denrées sèches Biscuit 0,725 kg 4 jours 7,35 kg 6,00 m² pour les denrées humides Conserves 0,200 kg 7/12 du siège 26,25 kg 30,00 m² pour 1 four de 180 rations avec la boulangerie. Lard salé 0,240 kg 2/12 id 9,00 kg Nota - Il importe en outre qu'il soit prévu Riz 0,060 kg 1/2 id 6,75 kg les citernes ou puits pour assurer les besoins en eau tant pour la troupe que Haricots 0,060 kg 1/2 id 6,75 kg 250 90 pour la fabrication. Il y a lieu de prévoir Sel 0,030 kg Siège entier 7,95 kg de plus un emplacement pour recevoir Sucre 0,021 kg id 4,73 kg les approvisionnements en combustible. Cet emplacement, qui peut être à Café 0,019 kg id 0,28 kg l'extérieur du fort, devra avoir Vin 0,25 litre 1/4 du siège 14hl 07 l environ 100 m² de surface.

Eau de vie 0,0625 3/4 du siège 10 hl 55 l litre

Le projet d'ouvrage est vivement critiqué, et repris ainsi qu'on peut le lire dans une apostille du 18 mars 1885.

Un premier projet présenté pour 1884 a été ajourné en 1885 par l'Avis du Comité des Fortifications en date du 16 mai 1884 avec les observations ci-après: "L'amélioration dont il s'agit est présentée conformément aux ordres des Inspecteurs généraux de 1882 à 1883, et elle a pour objet de créer sur le front nord du fort, des emplacements pour des pièces d'artillerie destinées à battre la plaine en avant d'Essert et à croiser leurs feux sur cette plaine avec les pièces du Salbert qui seraient dirigées de ce coté (amélioration exécutée en 1884). Le projet du Chef du Génie donnerait deux emplacements de pièces respectivement à l'Est et à l'Ouest du front nord. Le contreprojet, plus coûteux, du Directeur en donnait quatre, mais dont trois ne verraient que des points déjà battus par les pièces de la face nord de l'ouvrage. Les dispositions du projet seraient donc à préférer sauf à ce que l'on améliorât au point de vue des moyens d'accès à la plateforme de l'Est, en ménageant des passages, soit au Nord soit au Sud du magasin du temps de paix de l'artillerie. Toutefois, avant de s'arrêter à ce projet, il y aurait lieu d'étudier la solution indiquée par le Général Commandant le Génie et consistant à mettre les pièces extérieurement au fort, aux abords du saillant 4. L'examen de la question serait à reprendre de concert avec le service local de l'artillerie, lequel aurait en particulier à se prononcer sur le point de savoir si les emplacements que l'on prépareraient au dehors devraient ou non être dotés d'abris". Il résulte du procès verbal de conférence ci-inclus rapporté à la date du 5 avril 1885 que le service de l'artillerie renonce à placer les pièces en dehors du fort. On s'est attaché en conséquence dans la rédaction du présent projet à satisfaire aux désidératas exprimés par ce service tout en apportant le plus d'économie possible. Dans la création d'un emplacement pour une pièce de canon adossée au magasin à poudre Est en réduisant la longueur de la plateforme à 7,00 m on a pu ménager un passage suffisamment large entre le pied du talus et le magasin voisin d'artillerie, et réduire en même temps en quantité notable les maçonneries prévues au projet pour 1884. La dépense à prévoir de ce fait est de 23500 f y compris la somme nécessaire pour l'organisation de la rue du rempart qui serait rajoutée plus à l'ouest et plus près de l'escarpement. En ce qui concerne la transformation de la direction du tir de la pièce près du magasin aux cartouches, on a conservé sa disposition du précédent projet dont la dépense était évaluée à 200 F.

Le Petit Fortiff’Séré n°15

3e Pour l'emplacement de la place à donner au magasin à poudre les dispositions sont sensiblement les mêmes qu'au projet précédent. Toutefois, grâce à la réduction de la longueur de la plateforme on a pu diminuer les terrassements et donner plus de largeur à la rue du rempart tout en prévoyant une dépense de 22000 F. 4e La construction d'une traverse perpendiculaire au mur à bahut de la gorge reprenant la disposition du précédent projet évalué à 1800 F. En résumé Le projet répond aux avis exprimés par le Comité des Fortifications et aux désidératas émis dans la conférence faite au premier degré entre les services de l'Artillerie et du Génie tout en réalisant une économie de 14000 F sur le projet précédent. L'économie, dans le projet et l'élargissement des accès résulte comme on l'a dit d'une réduction apportée dans la longueur des plateformes par suite de la mise en service d'un frein. En conséquence le Chef du Génie propose l'adoption de principe du dit projet dont l'estimation totale s'élève à 47500 F tout en ne demandant l'allocation de cette somme que sur l'année 1886, époque à laquelle un officier aura terminé un chantier de la Place et pourra entreprendre ce travail en même temps que la batterie d'Essert.

Finalement ce projet ne verra pas le jour, remplacé par le suivant, avec les explications que l'on trouve dans une apostille du Chef du Génie, en date du 6 mai 1885 (cote 6V4675):

Deuxième projet.

Un premier projet présenté d'après les instructions de l'Inspecteur Général dès 1881 en supposant un armement de 13 pièces dont 7 de 120 mm et 6 de 95 mm et une garnison de 150 hommes a été ajournée en 1885 par l'Avis du Comité des Fortifications du 16 mars 1884, pour l'étude d'un nouveau projet. Le projet du 1er avril 1884 avait donné lieu aux critiques ci-après : - 1° l'assiette de l'ouvrage est à déplacer, de façon que le flanc droit ne dépasse pas la courbe 460, et, d'autre part, pour mieux défiler l'intérieur de l'ouvrage, il conviendrait de se reporter un peu en arrière de manière à tracer la gorge tangentiellement à la même courbe; - 2° les dispositions de l'entrée ainsi que l'organisation des locaux du saillant ne sont pas satisfaisants. En outre, les locaux destinés au logement des hommes n'auraient pas un développement suffisant, le service des 13 pièces de rempart et celui des pièces de flanquement même supposée réduite à 2, exigent déjà un effectif de 174 canonniers ou auxiliaires, auxquels il faudrait ajouter une garnison d'infanterie qu'on ne peut évaluer à moins d'une demi section (66 h), soit 240 hommes environ pour le tout; les locaux de manipulation manquent pour l'artillerie; par contre, l'infirmerie, la manutention et le magasin aux vivres ont des dimensions exagérées; la caponnière du saillant est beaucoup trop vaste; les communications à l'intérieur du fort sont impraticables aux voitures; enfin, il y aurait lieu de prévoir les revêtements d'escarpes et contrescarpes. L'avis du Comité ajoute : "Le projet est donc à refaire et on aurait soin de reporter l'ouvrage à gauche et plus en arrière, comme il a été dit ci-dessus……Ce qu'il faut à la Côte, c'est une batterie déployée en longueur et faisant face aux points à battre et que, par suite, il y a avantage à faire aussi peu profonde que possible. Dans le nouveau projet, on ouvrirait l'angle du saillant, on augmenterait l'importance du pan coupé et on laisserait aux flancs une faible longueur; on mettrait une traverse en capitale pour couvrir le débouché du passage central, passage que l'on prolongerait à travers le talus du parados; on supprimerait la plateforme du fossé de la gorge et on munirait l'entrée d'un pont-levis; enfin on réduirait l'importance des dispositifs de flanquement. Pour l'organisation des locaux, il paraitrait bon de compter sur un effectif de 250 hommes environ à loger, ce qui conduirait peut être à faire des casemates avec étages. Le projet serait d'ailleurs accompagné de procès verbaux délibérés avec le service de l'artillerie, et avec les services de l'intendance". On a rédigé le projet ci-joint en prenant pour base l'avis précité et les précisions exprimées dans les procès verbaux du 18 mars rédigé avec l'intendance et du 5 avril rédigé avec le service d'artillerie. L'ouvrage de la Côte a pour objectif, 1° de fermer l'intervalle de 8 km compris entre le Salbert et le Mont Vaudois; 2° de protéger les abords de ces ouvrages en battant surtout les zones privées de feux directs situées sous les escarpements des dits ouvrages. L'armement comprend 13 pièces d'artillerie dont sept de 120 mm et six de 95 mm répartis comme il st dit au procès verbal ci-dessus. Les pièces traversées de deux en deux sont protégées par un parapet de 8,00 m d'épaisseur, leur plateforme a 7,00 de longueur. Deux bonnettes ont été ménagées sur le front de tête pour fournir des feux d'infanterie, on y accède au moyen d'un escalier partant de la descente de caponnière.

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Les fossés sont flanqués au moyen de caponnière à deux étages pour feu d'infanterie, les parapets de gorge sont organisés seulement pour la fusillade. Ces deux dispositions tiennent à la position même de l'ouvrage, placé dans un rentrant accentué par rapport à la ligne des forts voisins. Le développement de la crête d'infanterie est de 190 mètres. Les fossés ont 7,00 m de largeur au fond. La nature du roc dans lequel ils sont creusés et qu'on a pu constater dans les fossés de la batterie existante, permet d'ajourner pendant 15 à 20 ans les revêtements à faire. A cet effet on a laissé une large berme d'escarpe et tenu les talus d'escarpe et de contrescarpe à 7/1. Les locaux du casernement peuvent contenir 250 hommes sans compter les officiers. Les locaux affectés à l'artillerie et à l'Intendance sont conformes aux avis exprimés dans les conférences du 1er degré. Les glacis du fort ont été réduits autant que possible. La construction des bonnettes d'infanterie a été organisée dans ce but, on n'a pas prévu de chemin couvert. On demande à l'article acquisition la somme nécessaire pour l'achat du terrain, les parcelles placées en avant de la gorge de l'ouvrage doivent fournir toute la terre dont on recouvrira les parapets. La dépense a prévoir s'élève à la somme de 850.000 F d'après l'état estimatif ci-joint.

On demande cette somme que pour l'exercice 1886, pour les mêmes raisons que pour l'organisation du Mont Vaudois, en ajoutant que les travaux à entreprendre en 1885 et à continuer sur les exercices suivants chevaucheraient sur deux marchés différents, ce qui est à éviter.

Section C- Acheter les terrains nécessaires pour la construction de l'ouvrage de la Côte. Dessin n°6. 11.500 F. On a figuré sur le croquis spécial n°6 les limites du terrain à acquérir en se tenant au strict nécessaire sur les fronts de tête. Du coté de la gorge, entre celle-ci et la route d'accès, on a du étendre la superficie à acheter pour y trouver la terre nécessaire à la couverture du noyau de rocaille qui constituera les parapets du fort. On demande que cette acquisition soit faite en 1885 et les formalités remplies pendant cette année afin que le travail soit vivement entamé et terminé pendant l'exercice 1886. La superficie totale de l'ouvrage est de 9 ha 10 a 12 ca dont il faut diminuer la surface de la batterie à l'État, de 95 a 50 ca, reste à acheter 8 ha 48 a 92 ca, en chiffres ronds 8 ha 15 ca. Les terrains à acheter appartiennent à la commune d'Essert. Si on se reporte aux actes de vente relatifs à l'acquisition des terrains nécessaires à l'emplacement de l'ancienne batterie et à la route stratégique, on peut estimer que l'hectare coûtera 1400,00 francs, ce qui conduit à une dépense de 11410 francs pour tout le terrain à acquérir, soit en chiffres ronds 11.500 francs.

A la même époque un mémoire précise les choix:

Minute jointe au mémoire sur les projets du service extraordinaire pour 1885. 2e mémoire du 5 mai 1885. Procès verbal de conférence au sujet du projet de construction d'un ouvrage à la Côte d'Essert.

L'an mil huit cent quatre vingt cinq, le 5 avril.

En exécution des prescriptions de la dépêche Mlle du 6 juin 1884 approuvant l'avis du Comité des Fortifications en date du 16 mai précédent, au sujet des conditions dans lesquelles devra être présenté le nouveau projet d'un ouvrage à construire à la Côte d'Essert. M.M. Papuchon, Chef de Bataillon, Chef du Génie de la place de Belfort, Ruhlmann, Chef d'Escadron, Commandant l'Artillerie dans la même place, Se sont réunis en conférence pour examiner au point de vue du service de l'Artillerie, le projet dont il s'agit. L'ouvrage permanent à établir à la Côte d'Essert en remplacement de la batterie demi-permanente qui s'y trouve est destiné: 1° à fermer l'intervalle (8000 m) qui existe entre le fort du Mont Vaudois et celui du Salbert, 2° à appuyer la défense de ces deux forts en flanquant efficacement leurs abords et battant les pentes qui échappent aux vues de ces forts. Une première étude sommaire de l'ouvrage avait été faite en 1882 et avait donné lieu à un procès verbal de conférence entre les services de l'Artillerie et du Génie en date du 3 août 1882. Un projet a été présenté d'après ces bases en 1884, mais il n'a pas été admis par l'Avis du Comité des Fortifications en date du 16 mai 1884 qui a prescrit d'étudier un nouveau projet en maintenant le même armement (13 pièces de rempart) et se basant sur un effectif de garnison de 250 hommes (au lieu de 150) Le Petit Fortiff’Séré n°17

1° Armement

La direction des crêtes d'artillerie a été établie conformément à l'objectif de l'ouvrage rappelé ci-dessus. Les conférents proposent de les armer ainsi qu'il suit; Au centre de la face ouest, on placerait une pièce de 120 mm pour surveiller les hauteurs de l'Ordon Brisée, A gauche (coté sud): deux pièces de 120 mm et deux pièces de 95 mm, tirant dans le secteur compris entre Généchier et le M t Vaudois, et deux pièces de 95 mm pour battre le secteur compris entre le Mont Vaudois et Urcerey et prendre des vues sur le ravin du même nom. A droite (coté nord): quatre pièces de 120 mm battant la route de Frahier à Essert et les pentes ouest du Salbert, et deux pièces de 95 mm tirant entre le Petit Salbert et Essert. Le flanquement des fossés de l'ouvrage est assuré par la fusillade et ne comporte pas de feux d'artillerie. En raison du rôle secondaire de l'ouvrage et de sa position rentrée par rapport au front déterminé par le Mont Vaudois et le Salbert, il n'y a pas lieu de constituer un approvisionnement de réserve en fait d'armement. En résumé, l'armement comprendrait 13 pièces de rempart ainsi réparties: Face nord: 4 canons de 120 et 2 canons de 95. Face ouest: 3 canons de 120. Face sud: 4 canons de 95. Une largeur de 8,00 m de plongée et de 7,00 m de banquette d'artillerie a été admise.

2° Locaux à réserver

Magasin à poudre. La quantité de poudre correspondant à l'armement projeté est calculée ci-dessous d'après les bases fixées dans les instructions sur les places à ceinture de forts: Canons de 120 7 à 4840 kg 33880 kg Canons de 95: 6 à 1930 kg 11580 kg Total 45460 kg Les poudres seront contenues dans un magasin de 6,00 m de largeur, 4,50 m de hauteur sous clef et 15,00 m de longueur.

Magasin aux cartouches et aux artifices. La garnison du fort étant de 250 hommes, l'approvisionnement, à raison de 700 cartouches par homme, devra être de 175.000 cartouches, soit 117 caisses de 1512 cartouches. Elles seront logées, ainsi que les artifices, dans un magasin de 5,00 m de largeur, 3,00 m de hauteur sous clef et 12,00 m de longueur.

Projectiles vides. Les projectiles vides seront réunis dans les traverses abris, suffisamment grandes.

Magasin au matériel. Le matériel sera remisé dans un abri du rempart.

Abris sur le rempart. Les abris de rempart seront tous réservés aux munitions. Les hommes trouveront à s'abriter dans les couloirs et les descentes de caponnières.

Locaux de manipulation. Deux ateliers de chargement ayant chacun 28 mètres carrés de superficie et destinés, l'un aux gargousses, l'autre aux projectiles, sont prévus au projet.

Dépôt de poudre de consommation. Un dépôt de poudre de consommation, d'une superficie de 24,00 m² a été prévu au projet.

Dépôt de gargousses. Un dépôt de gargousses confectionnées d'une superficie de 28,00 m² a été prévu au projet.

Ateliers de réparation. Enfin, on a prévu deux ateliers de réparations, d'une superficie de 25,00 m² chacun, ce sont une forge et un atelier de menuisier.

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Plan des dessus avec désignation des calibres des bouches à feu

Coupes transversales montrant l'organisation des profils

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Légende

a Caponnière p Chambre de 48 hommes b Corps de garde q Chambre de 10 sous-officiers c Locaux disciplinaires des caporaux et soldats r Ateliers de chargement d Infirmerie s Magasin à poudre (43.000 kg) e Locaux disciplinaires des sous-officiers t Latrines de la troupe f Ligaments d'officiers u Abris à munitions g Latrines des officiers, de l'infirmerie et du poste v Descente de caponnière h Citerne w Forge i Cuisine de la troupe x Magasin à cartouches j Magasin d'ordinaire a' Magasin du matériel k Magasin du génie b' Dépôt de gargousses confectionnées l Vivres humides c' Dépôt de poudre de consommation m Fours d' Escalier n Vivres secs e' Cuisine des officiers et de l'infirmerie o Atelier des ouvriers en bois

Troisième projet.

Le 31 octobre 1885 sort un Procès verbal de conférence au sujet du projet de construction d'un ouvrage à la Côte d'Essert qui propose un autre type d'ouvrage en reprenant des points déjà vus.

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En exécution des prescriptions de la Dépêche Mlle du 3 août 1885 N° 30958 (Artillerie. 9e bureau), les soussignés Papuchon, Chef de Bataillon, Chef du Génie à Belfort et Ruhlmann, Chef d'Escadron, commandant l'artillerie de la place se sont réunis à l'effet d'examiner les locaux à attribuer au service de l'artillerie dans le projet d'ouvrage à construire sur la Côte d'Essert. Le Chef du Génie expose: que le projet soumis à l'examen est dressé d'après l'avis du Comité des fortifications en date du 16 mai 1883, et suivant l'avis donné par l'Inspecteur Général du Génie de 1885 qui a prescrit de réduire la dépense à 550.000 francs ; que cette étude diffère fort peu comme tracé et comme armement du projet pour 1885 qui a fait l'objet d'une conférence avec l'Artillerie en date du 5 avril 1885. La légende très détaillée jointe au projet donne du reste toutes les indications nécessaires. Le Commandant de l'Artillerie propose d'établir ainsi qu'il suit l'armement du fort et en conséquence les locaux à réserver au Service de l'Artillerie, savoir : Armement. Le front de tête qui aura à lutter contre l'artillerie que l'assiégeant installera sur les hauteurs des Ordons depuis Chalonvillars jusqu'à Genéchier devra être armé de 6 pièces de 120. Le flanc droit et le flanc gauche qui battent, le premier les pentes du Salbert, et le second celles du Mont Vaudois et les pentes ouest des hauteurs d'Urcerey, seront armés chacun de 2 pièces de 95. Il sera indispensable d'avoir une autre pièce de 95 à l'angle sud-est de l'ouvrage pour donner des feux sur Urcerey, le chemin de Bavilliers à Buc et les pentes sud de la Côte qui ne sont vues qu'imparfaitement et de très loin du Mont Vaudois. Chaque caponnière ou coffre flanquant sera armé d'un canon-revolver. L'armement total de l'ouvrage comprend ainsi: Pièces de rempart 6 canons de 120 5 canons de 95 Pièces de flanquement 5 canons-revolvers. Total 16 bouches à feu. Le projet établi au commencement de cette année, comprenait 13 pièces de rempart et pas de canons de flanquement. Locaux à réserver au Service de l'Artillerie. Magasin à poudre. La quantité de poudre correspond à l'armement projeté est calculée ci-dessous d'aprè les bases adoptées pour l'approvisionnement des bouches à feu des Places à ceinture de forts. 6 canons de 120 à 4840 kg par pièce soit: 29040 kg 6 canons de 95 à 1930 kg par pièce soit: 9650 kg Total 38690 kg En comptant 1/20 en sus pour les déchets et manipulations diverses, on arrive au total de 40.625 kg. Ces poudres seront contenues dans un magasin de 6 mètres de largeur, 4,10 m de hauteur sous clef et 14 m de longueur. Magasin aux cartouches et aux artifices. La garnison du fort étant de 250 hommes, l'approvisionnement à raison de 700 cartouches par homme devra être de 175000 cartouches, soit 116 caisses de 1512 cartouches. Le magasin aux cartouches devra renfermer en outre les cartouches pour canons-revolvers, soit 2500 cartouches renfermées dans 50 caisses, les étoupilles, les fusées des projectiles et les gargousses vides. Comme il n'est pas prévu au projet de local spécial pour les artifices incendiaires et ceux d'éclairage, de signaux et de rupture, on les conservera également dans le magasin aux cartouches qui devra, pour contenir tout ce matériel, avoir une superficie de 25 m² et une hauteur de 3 m sous clef. Projectiles vides. Les projectiles vides seront empilés dans les traverses-abris qui ont 3 m de largeur, 12 m de long et 3 m de hauteur sous clef. Magasin au matériel. Les pièces seront en permanence en batterie. Les rechanges, les agrès, les armements et les quelques avant-trains et voitures devant servir aux mouvements journaliers nécessitent un magasin de 100 m² de superficie. Ce local qui est absolument indispensable à l'Artillerie n'a pas été prévu dans le projet du Génie et doit être ajouté. Abris sur le rempart. Les 5 traverses-abris de rempart seront réservés aux munitions, et ne sont donc que strictement suffisants pour les contenir. Il n'est pas prévu d'abris pour les hommes contrairement aux Dispositions de l'Instruction Mlle du 21 avril 1879. Locaux de manipulation et dépôts de Munitions. Le projet comprend: 1° deux ateliers de chargement ayant chacun 18 m² de superficie et destinés l'un aux gargousses et l'autre aux projectiles. Ces locaux sont trop exigus, leur superficie devrait être portée à 24 m². 2° un dépôt de poudre de consommation de 10 m² de superficie. 3° un dépôt de projectiles chargés de 16 m²

Le Petit Fortiff’Séré n°21

Le dépôt de poudre de consommation est porte à porte avec l'atelier de chargement des projectiles ce qui est défec- tueux parce qu'une explosion peut se propager d'un local à l'autre. Les Dépôts de gargousses et de projectiles chargés sont un peu éloignés des ateliers de chargement et la communication entre ces locaux a lieu en partie à ciel ouvert, ce qui peut présenter des inconvénients. Atelier de réparations. On a prévu 2 ateliers de réparations, d'une superficie de 20 m² chacun, ce sont: une forge et un atelier d'ouvrier en bois. La forge devrait avoir 30 m² de superficie. Bureau télégraphique. Il y avait lieu de prévoir, dans le projet un bureau télégraphique pouvant servir en même temps de bureau pour l'Artillerie. Superficie 16 m². En ce qui concerne les locaux du service de l'Artillerie le Chef du Génie présente les observations suivantes: 1° Exigüité des locaux. Malgré l'exigüité des locaux, l'état estimatif du projet dépasse encore de 100.000 francs la somme fixée par l'Inspecteur Général du Génie. 2° Magasin aux cartouches et aux artifices. On dispose d'un magasin à cartouches de 20 m² et d'un magasin à gargousses de 14 m². Ces 2 locaux doivent suffire à la rigueur à l'emmagasinement des artifices. 3° Magasin au matériel. Il est fort difficile de trouver un magasin casematé au matériel de 100 m². Dans un ouvrage exigu où on a déjà de la peine à loger les hommes ; or cette surface représente le logement de 50 hommes, et coûterait de 90 à 100 francs par mètre carré tandis qu'un hangar à matériel coute de 20 à 25 francs le mètre carré. 4° Abris sur le rempart. Une Instruction Mlle du 5 mars 1880 concernant l'exécution des travaux de défense a prescrit de réduire les traverse-abris à une par deux pièces, vu que la multiplicité des abris donne aux hommes trop de moyen de se dérober au combat. Du reste l'Instruction de 1879 visait des fort dans lesquels les ressources du casernement étaient insuffisantes. Ce n'est pas le cas de l'ouvrage projeté de la Côte où on s'est astreint à loger toute la garnison en casemate, dans la conviction que cette mesure est la plus impérieuse à satisfaire. 5° Dépôt de projectiles chargés. Dans l'étude de détails du projet, on pourra donner satisfaction à la demande consistantà modifier l'emplacement. 6° Poste télégraphique. On peut installer sans grand surcroit de dépense un poste télégraphique au lieu et place du poste de fusiliers coté G et construit ad hoc pour le bureau télégraphique du temps de guerre.

On a tracé en rouge l'emprise du terrain militaire et en bleu le tracé de la batterie primitive.

Le Petit Fortiff’Séré n°22

Contenance N° destination S.-officiers Officiers Superficie ou contenance et hommes 1 Tisanerie et salle de visite 18 m² 2 Infirmerie 25 m² 2 Forge 20 m² 4 Atelier de réparation 20 m² 5 Manutention et four 30 m² 6 Magasin des services administratifs 27 m² 7 Magasin du Génie 20 m² 8 Casemate de 24 hommes 24 9 Casemate pour sous-officiers 12 10,1 Casemate de 44 hommes 88 1 12 Logement du Commandant du fort 1 13 Casemate de 24 hommes 24 14 Atelier de confection des gargousses 18 m² 15 Vestibule 16 Chambre aux lampes 17 Atelier de chargement des projectiles 18 m² 18 Dépôt de poudre de consommation 10 m² 19 Casemate de 24 hommes 24 20 Poste 30 m² 21,2 Casemate de 44 hommes 88 2 23 Magasin des services administratifs 18 m² 24 Casemate pour officiers 4 25 Cuisine de la troupe 35 m² 26 Magasin aux vivres 14 m² 27 Cuisine des sous-officiers 8 m² 28 Cuisine des officiers 8 m² 29 Dépôt des gargousses confectionnées 14 m² 30 Dépôt des projectiles chargés 16 m² 31 Latrine de la troupe 32 Latrine des sous-officiers 33 Latrine des officiers 34 Puits " Citerne sous les locaux 4 et 5 210 m3 Totaux 5 260 a,b,c Traverses abri ,d,e " Casemate à canon (Flanc gauche du front 4-1) f Poste des fusiliers g Poste des fusiliers (au dessous des 2 locaux ci -dessus) " Casemate à canon (Flanc droit du front 4-1) h Poste de fusiliers " Caponnière double du saillant 2 i Magasin aux munitions " Aileron du saillant 3 k Magasin aux munitions M Magasin à poudre 41000 kg N Magasin à cartouches 20,00 m²

Le Petit Fortiff’Séré n°23

Fossé de gorge à escarpe semi-détachée et créneaux de fusillade, contrescarpes non revêtues.

Mais l'époque n'est plus à la fortification type Séré de Rivières telle que définie depuis 1874. La crise dite de l'obus allongé ou plus couramment de l'obus torpille rend caduc la maçonnerie de moellons. On sait qu'il a fallu adapter la fortification à de nouvelles exigences. Ceci s'est fait plutôt rapidement avec l'utilisation des abris en béton spécial, l'enfouissement, le remplacement des caponnières par des coffres de contrescarpe et les cuirassements… Pour l'ouvrage de la Côte une solution n'apparait qu'en 1890.

Réalisation définitive.

Construire l'ouvrage intermédiaire d'infanterie de la Côte d'Essert. Projet pour 1890. Approuvé par dépêche Mlle n° 12529 du 17 juin 1890 moyennant quelques modifications de détail. Le croquis pour le passage de droite Allocation du 1er avril 1890 demandée: 200.000 francs. Demande d'allocation de 30.000 du 27 janvier 1892. Nota. Faire au moment du besoin une demande supplémentaire de fonds pour le passage de droite imposé par le Ministre, approuvé par le Général et le Génie le 16 juillet.

Dans une apostille du Chef du Génie en date du 20 avril 1890 est exposé tout l'historique de cette longue gestation.

Ce projet a été présenté en vertu de la dépêche ministérielle du 25 février 1890 autorisant la présentation des projets du service extraordinaire pour 1890.

Considérations générales.

Entre le et le fort du Mont-Vaudois se développe une falaise de forme circulaire dont les pentes sont fortement accentuées. Les sommets principaux de cet arc de cercle dont la ligne des deux forts est la corde sont les deux hauteurs dites d'Urcerey et de la Côte d'Essert. Au bas de cette falaise, à l'ouest de sa pente, se déroule une longue plaine dans laquelle sont situés les villages de Chalonvillars, Buc, Mandrevillars et Échenans. La possession de ces villages comme cantonnement est de la plus haute importance pour la défense qui doit également attacher un grand prix à ce que ces villages, même après leur évacuation, soient exposés aux feux des ouvrages en arrière de façon à en empêcher l'occupation par l'ennemi qui y trouverait des ressources de toute sorte. Aussi dès 1875 alors qu'en prévision d'une guerre prochaine on construisait des ouvrages et des batteries avancées sur le pourtour de la place, on s'était empressé d'occuper le sommet de cette falaise circulaire par l'installation de deux ouvrages ar- més de pièces d'artillerie, l'un sur la Côte d'Essert, l'autre sur la côte d'Urcerey.

Le Petit Fortiff’Séré n°24

En 1882, lors des propositions faites pour compléter la défense de Belfort à l'est par la construction de nouveaux forts, et à l'ouest par la construction d'ouvrages plus importants sur les positions occupées en 1875, l'installation d'un ouvrage solide à la Côte fait partie du programme. Le projet de 1882 qui comportait un ouvrage fermé armé de plusieurs pièces de canons fut renvoyé par le Comité des fortifications pour une nouvelle étude avec cette mention "Ce qu'il faut à la Côte c'est une batterie déployée en longueur faisant face aux points à battre et que par suite, il y a avantage à faire aussi peu profond que possible." Le projet de 1885 rédigé d'après les prescriptions ci-dessus n'a pas eu de suite, car dès cette année l'invention de nouveaux projectiles explosifs, imposait des modifications profondes dans la disposition des ouvrages à créer. Le programme du 22 juillet 1887 suivi de l'instruction du 18 janvier 1887 indique les nouvelles bases à adopter pour l'organisation des lignes de défense, et les dispositions à prendre pour l'établissement des nouveaux ouvrages intermédiaires qui devaient constituer la ligne principale de défense. Dans les projets de 1882 et de 1885 les procès verbaux de conférence avec l'artillerie admettaient pour l'ouvrage de la Côte un armement composé de pièces de 95 et de 120 et constitué par un ensemble de 13 à 15 bouches à feu. Il ressort de cet historique aussi succinct que possible que le sommet de la Côte d'Essert a toujours été considéré comme une position intermédiaire indispensable à occuper et que l'on a toujours estimé que l'ouvrage à établir dans cette position devait comporter de l'artillerie de fort calibre. En jetant les yeux sur une carte on est convaincu de l'importance de cette position et cette conclusion est confirmée par l'examen des lieux. t Le sommet de la Côte d'Essert est situé à 4300 m du M Vaudois, à 3700 m du Salbert et à 1800 m environ en arrière de la ligne qui unit ces deux forts. Du site élevé on domine la plaine qui s'étend de Chalonvillars à Buc, et on peut interdire à l'ennemi l'accès aux villages et la possession de la plaine dans laquelle ils sont situés. Les crêtes qui s'étendent de la position de la Côte d'Essert à celle de la côte d'Urcerey présentent un développement comparable à celle de la ligne que voudrait tenir l'ennemi sur les hauteurs des Ordons. Dans ces conditions, l'occupation de ces crêtes rend la lutte d'artillerie fort avantageuse pour la défense et empêche d'une façon absolue l'assaillant de déboucher dans la plaine aussi bien que de traverser l'intervalle compris entre les forts du Salbert et du Mont Vaudois. Enfin, et c'est là un des caractères essentiels de cette position, un ouvrage établi en ce point flanque d'une façon très efficace au moyen de ses feux d'artillerie les abords du Salbert et du Mont Vaudois qui échappent aux feux des forts par suite de la raideur des pentes. On doit ajouter que grâce à la position rentrée par rapport à la ligne des deux forts voisins, l'ouvrage de la Côte est peu exposé aux attaques de toute sorte qui doivent se développer sous les feux convergents des deux forts latéraux. L'instruction du 22 juillet 1887 et celle du 10 juin 1888 admettent, il est vrai que les ouvrages intermédiaires destinés à renforcer la ligne de défense principale jalonnée par les forts actuels doivent comprendre seulement des feux d'infanterie et quelques pièces de campagne destinées au flanquement de la ligne. Ces prescriptions ont été jusqu'alors rigoureusement appliquées dans l'organisation des quatre gros ouvrages secondaires en voie d'exécution autour de la Place de Belfort. Mais comme on l'a dit plus haut la position de la Côte est exceptionnelle car indépendamment de l'action de flanquement à exercer sur la ligne principale de défense il y a lieu de donner à cet ouvrage une action d'artillerie efficace sur les bois des Ordons où l'ennemi peut accumuler une grande quantité d'artillerie et se masser en très grand nombre pour forcer l'intervalle de la ligne principale compris entre les forts du Salbert et du Mont Vaudois. Si on objectait que l'artillerie de la défense peut s'échelonner à gauche et à droite de l'ouvrage de la Côte, il y aurait lieu de faire remarquer que ces batterie intermédiaires peuvent seulement s'établir à la gauche de l'ouvrage par suite de la configuration du terrain, et que les batteries qui s'étendront jusqu'à la position d'Urcerey trouveront un appui très solide dans l'ouvrage de la Côte. Si d'autre part l'artillerie est proscrite en principe des ouvrages intermédiaires d'Infanterie c'est qu'on craint qu'elle n'attire d'une manière intensive les coups de l'artillerie ennemie qui ruinerait les abris de la garnison; or dans l'espèce cette crainte n'est pas fondée puisque l'on propose dans l'ouvrage de la Côte des abris sous roc qui doivent résister aux explosifs les plus puissants. En résumé : La position de la Côte d'Essert a toujours été considérée comme une position intermédiaire indispensable à occuper avec de l'artillerie. Grâce à la nature rocheuse du terrain on peut disposer sur ce point un ouvrage intermédiaire fermé, entouré de fossés taillés dans le roc, avec une garnison d'infanterie logée dans des abris sous roc et protégeant l'artillerie de l'ouvrage. L'existence de quelques pièces dans l'ouvrage ne dispensera en aucune façon de l'établissement des batteries intermédiaires à échelonner sur la gauche de l'ouvrage. Ces batteries soutiendront la lutte autant que possible, ce qui permettra à l'artillerie de l'ouvrage de n'entrer en ligne que dans les moments critiques. Pour atteindre le but qu'on vient d'indiquer on propose un ouvrage dont le tracé et le profil se rapprochent beaucoup du Le Petit Fortiff’Séré n°25

type n° 2 joint à l'instruction Mlle du 11 juin 1888. ______

Disposition d'ensemble de l'ouvrage.

PV du Lieutenant-colonel du Génie Papuchon, en date du 26 mars 1890. L'ouvrage affecte la forme d'un quadrilatère irrégulier assez aplati dont la ligne de gorge est légèrement bastionnée. Les parapets forts épais sont ceinturés d'un fossé taillé dans le roc. En raison du peu de largeur du plateau et des pentes excessives du versant nord de la hauteur, l'ouvrage a du être reporté en partie sur les pentes sud. La crête du flanc sud se trouve par suite à une cote plus basse que la partie nord de la cour. Pour couvrir cette portion de la cour et conserver aux crêtes des pentes admissibles une grande traverse coupe cette cour en deux parties communiquant entre elles par un passage voûté en béton et accolé à une des traverses dont il est question ci-dessous. Le fossé de tête et les fossés latéraux sont flanqués par des coffres de contrescarpe auxquels on peut accéder sans craindre l'inondation, vu le site de l'ouvrage et la nature du sol, au moyen de galeries souterraines passant au dessous des fossés. Le fossé de gorge légèrement bastionné est flanqué par des coffres de flanc avec piédroits en roc, voûte et masque en béton de ciment. Tous les locaux sont souterrains et recouvert d'une voûte en roc nature de 6,00 m d'épaisseur au minimum. L'entrée offre des particularités spéciales à l'effet d'être soustraite aux coups de l'assaillant. On descend tout d'abord de l'intérieur dans le fossé de gorge en passant souterrainement sous une place d'armes, de là on pénètre dans la galerie souterraine qui conduit aux locaux en franchissant un haha muni d'un pont levis. Pour protéger plus efficacement le pont levis on a reporté le haha à 3,00 m de l'escarpe dans la galerie même. La sécurité de l'entrée est donc absolue ce qui n'aurait pas été obtenu dans le type joint à l'instruction. Crêtes d'infanterie et d'artillerie. Le front faisant face aux attaques suivant la direction N.S, présente un développement de crête de 90 m et bat l'espace compris entre le Salbert et le Mont Vaudois. Le rempart est constitué en principe par un parapet d'infanterie muni de deux traverses abris en béton de ciment dans l'intervalle desquels on peut établir des plateformes pour 4 pièces d'artillerie bien abritées, qu'on pourra opposer avec les batteries intermédiaires à l'artillerie ennemie des Ordons. Cet armement a été arrêté suivant procès verbal ci-annexé rapporté à la date du 20 mars courant avec le service de l'artillerie. Les traverses abris en béton de ciment avec voûte de 2,50 m d'épaisseur seront d'escellents abris pour les hommes et les projectiles chargés. Le flanc nord est constitué par un parapet d'infanterie de 30 m de développement et d'une plateforme pour deux pièces de flanquement abritées par une traverse en béton. Les 2 pièces battent les abords de la ligne principale de défense et les environs du Salbert. Le flanc sud comprend une crête d'infanterie d'environ 50 m de développement et une plateforme pour 2 pièces d'artillerie abritées par une traverse abri. Ces 2 pièces battent les abords de la ligne principale de défense en avant du Mt Vaudois. Le front de gorge a été bastionné à l'effet de permettre un flanquement économique et sûr du fossé de gorge comme il sera dit ci-dessous au sujet du flanquement des fossés. En avant de la gorge se trouve un ravelin constituant une place d'armes qui permettra de rallier les défenseurs de l'enveloppe et des environs et d'exercer la surveillance sur l'entrée. Chemin couvert. Comme il était impossible de battre directement de l'ouvrage même les pentes trop raides situées en avant, même avec la fusillade, on a établi au sommet des pentes un avant chemin couvert. Les branches de ce chemin couvert ont été prolongées en avant de la gorge pour utiliser les déblais sortant des galeries souterraines. Deux escaliers placés à la gorge permettent aux défenseurs de l'avant chemin couvert d'effectuer leur retraite et de rentrer dans l'ouvrage même en cas de surprise. Des grilles placées entre le fossé et le ravelin facilitent une retraite même précipitée. Profil du parapet. La crête a un relief variant de 4,50 m à 6,00 m au dessus du terrain naturel. Le parapet de tête a une épaisseur considérable de 10 m pour rentrer dans les prescriptions de l'Instruction Mlle du 11 juin 1888. Cette épaisseur s'obtient du reste facilement avec les déblais provenant des fossés et des abris cavernes. Le parapet de flanc de 10 a 12,00 m d'épaisseur et le parapet de gorge 6,00 m.

Le Petit Fortiff’Séré n°26

Fossés. Comme les fossés sont taillés dans un roc très sain, les escarpes et contrescarpes sont complètement à l'abri de la destruction que peuvent produire les projectiles explosifs. Les fossés devant constituer un obstacle sérieux on leur a donné en conséquence les dimensions ci-dessous :

Désignation du fossé Largeur minima au bord Profondeur minima Fossé de tête 4,50 m 6,00 Fossés latéraux 4,00 5,00 Fossé de gorge 4,00 5,00

Ces dimensions permettent d'équilibrer les quantités de déblais et de remblais de l'ouvrage.

Entrée et communications On a déjà dit dans l'exposition d'ensemble que l'entrée présentait une disposition particulière au moyen de laquelle aucun point n'était en prise aux feux de l'ennemi. On arrive de l'extérieur au fond du fossé de gorge de l'ouvrage en passant souterrainement sous la place d'armes. Du fond du fossé on pénètre dans une galerie souterraine dans laquelle on rencontre un pont levis placé sur un haha. La galerie souterraine dessert à gauche et à droite les organes de flanquement du fossé de gorge, elle continue suivant l'axe du fort jusqu'à un carrefour d'où on monte sur le terre-plein de l'ouvrage par une rampe au 1/10 doublement coudée jusque dans l'abri sud du front de tête puis par un escalier qui débouche sous cet abri près du passage qui fait communiquer les deux parties de l'ouvrage. Du carrefour souterrain partent deux grandes galeries qui donnent accès dans les coffres flanquants du front de tête. Flanquement. Pour le flanquement des fossés on s'est rapproché des indications données sur le type n° 2 annexé à l'Instruction Mlle du 11 juin 1888. Le flanquement du fossé de face et des fossés latéraux est obtenu au moyen de coffres flanquants de contrescarpe placés aux saillants nord et sud du fossé de tête, ces caves de flanquement pour 1 pièce chacune sont taillées dans le roc (voir la feuille n°2) et recouverts d'une voûte en béton de 2,50 m d'épaisseur, elles sont fermées du coté du fossé par un mur en béton de 2,00 m d'épaisseur lorsque le masque est exposé à recevoir des coups qui prendraient d'enfilade le fossé de tête dans toute sa longueur, ou de 1,50 m d'épaisseur lorsque le mur fait face à la place. On accède à ces coffres de flanquement par une galerie souterraine passant sous le fossé et protégée au moyen d'une voûte de béton de 2,80 m d'épaisseur dans la traversée même du fossé. Les eaux d'infiltration qui peuvent pénétrer dans les galeries sont facilement conduites au dehors au moyen d'égouts qui débouchent sur les pentes du mamelon. Le flanquement du fossé de gorge est réalisé au moyen de deux coffres flanquants creusés dans l'escarpe des petits flancs du front de gorge légèrement bastionné à cet effet. Les murs de masque de ces organes sont en béton de 1,50 m d'épaisseur. Locaux et magasins. Tous les locaux sont souterrains. En entrant par la galerie souterraine on trouve tout d'abord les galeries qui permettent l'accès aux coffres flanquants du fossé de gorge et desservent en même temps les locaux occupés par le poste, les officiers et les sous-officiers. En poursuivant sa route ? sur l'axe de symétrie de l'ouvrage on atteint un carrefour d'où partent les galeries destinées à desservir les coffres flanquants de contrescarpe. La galerie nord dessert en même temps les locaux du casernement (hommes couchés) qui se trouvent compris entre cette galerie et celle qui longe les locaux de gorge. Un élargissement pratiqué dans la portion voisine de la caponnière est destiné à recevoir des bancs pour 30 hommes.

Le Petit Fortiff’Séré n°27

La partie sud qui a dans ses parties supérieures une pente de 1/5 environ, ne dessert que la cuisine et les latrines qui se trouvent aussi éloignées que possible des locaux habités. De la galerie nord et un peu au-delà de la dernière casemate caverne se détache une autre galerie qui donne accès dans une autre sensiblement parallèle à la première. Celle-ci dessert tous les locaux du service de l'artillerie, savoir : le magasin à poudre, le magasin aux projectiles, la niche aux détonateurs et le monte charge. Ce dernier se trouve au fond de la traverse nord du front de tête. La galerie est prolongée de quelques mètres et vient déboucher par un escalier de quelques marches au V coude de la rampe d'accès à la cour de l'ouvrage. Les locaux du service de l'artillerie se trouvent de cette façon complétements indépendants. Les casemates cavernes de 6 m de largeur peuvent contenir deux rangs de lits de camp et abriter 54 hommes chacune. Les bancs se trouveront répartis dans la galerie centrale qui prolonge l'entrée, dans de petits prolongements des casemates cavernes et enfin dans l'élargissement de la galerie nord. Les surfaces des locaux de l'artillerie ont été arrêtées par le procès verbal qui a déterminé l'armement de l'ouvrage. Un local de 50 m² de superficie a été réservé aux vivres. Les différents locaux sont du reste indiqués dans le tableau ci-dessous.

Désignation Contenance en hommes Longueur Largeur Surface Officiers Accessoires des locaux Par lits Par bancs a 8,00 3,30 26,40 magasin b 7,00 3,30 23,10 poste c 6,00 3,30 19,80 5 id

d 19,00 3,30 36,30 10 Sous-officiers

e 18,00 6,00 108,00 54 10 hommes e' 18,00 6,00 108,00 54 10 id f 10,00 5,00 50,00 vivres g 4,00 2,00 8,00 Magasin à poudre h 1,20 0,70 0,84 détonateurs i 4,00 3,00 12,00 Maga. projectiles l 5,00 4,00 20,00 cuisine m 4,00 1,00 4,00 latrines

Couloir central 54 Descente nord 30 118 104 5 Les locaux qui servent d'abri de garnison sont munis intérieurement d'une enveloppe analogue à celle des abris cavernes à l'effet de les isoler des parois et de les garantir contre les eaux d'infiltration. Égouts. Des égouts partant des passages sous fossés des galeries d'accès aux coffres flanquants du front de tête conduisent au dehors les eaux de ruissèlement qui peuvent pénétrer dans les galeries et les locaux. Prix de revient et demande de fonds. Pour se mettre à l'abri de gros aléas provenant de la nécessité où on pourrait se trouver de faire des revêtements en maçonnerie sur une certaine longueur des galeries et locaux souterrains, on a prévu à l'état estimatif ci-joint un revêtement en maçonnerie de 0,50 m d'épaisseur sur toute la longueur des locaux de gorge et des casemates cavernes. Le prix de revient d'après l'état estimatif ci-joint, pour les travaux: Évaluation de la dépense totale 570.000,00 f On demande pour exécuter en 1890 les travaux à l'exception de ceux en béton de ciment une allocation de: Somme demandée pour 1890 : 330.000,00 f Acquisitions La surface à acquérir pour la construction de l'ouvrage comprend 3 ha 34 a 50 ca de terrains de pâturage évalué à 2000,00 f l'hectare et 3 ha 07 a de terrain boisé évalué 3000 f l'hectare ce qui porte à 15900 f le montant des acquisitions que l'on espère pouvoir liquider sur 1890. Évaluation de la dépense totale: 15900,00 f Somme demandée pour 1890: 15900,00 f Totaux 585.900,00 f, pour 1890 : 345900,00 f Le Petit Fortiff’Séré n°28

Amende spéciale pour sondages.

Afin d'éviter les récriminations des entrepreneurs qui se produisent régulièrement lorsque les travaux à exécuter dans le roc ne sont pas précédés de sondages, le Chef du Génie demande à être autorisé le plus tôt possible à faire éxécuter par l'entrepreneur de la place un puits de sondage dont on peut estimer la dépense à 1000 f; le puits serait terminé lors de l'adjudication et soumis à l'examen des candidats.

Dans ce premier aménagement, on a pratiquement l'ouvrage actuel, à quelques détails près que j'ai cerclés en rouge. Les latrines m sont à l'emplacement de l'actuelle cuisine qui aurait été en l. La niche aux détonateurs sera mise de l'autre coté du couloir. Les archives ne précisent pas quand on transfère ces locaux à leur emplacement actuel. Très vite le Ministre demande une sortie supplémentaire dans la casemate nord. Cette communication est établie comme on le voit ci-contre.

En ce même 26 mars on s'occupe de l'armement de l'ouvrage.

Le Petit Fortiff’Séré n°29

Procès-verbal de conférence concernant l'armement de l'ouvrage Intermédiaire de la Côte.

Papuchon, Lieutenant Colonel, Chef du Génie, et Héberlé, Chef d'Escadron, commandant l'Artillerie, se sont réunis conformément à la dépêche Mlle du 25 février 1890 à l'effet d'arrêter l'armement de l'ouvrage de la Côte et fixer les dimensions des magasins du service de l'Artillerie. Dans les projets présentés jusqu'à ce jour pour l'occupation de la Côte d'Essert, on a toujours admis que l'ouvrage à y établir devrait comporter de l'Artillerie de gros calibre. Dans l'impossibilité d'établir simultanément, en raison de la forme du terrain, un ouvrage et des batteries sans faire perdre à celles-ci l'avantage que procure le commandement de la position, les conférents estiment que l'on doit établir sur le front de tête de l'ouvrage une batterie de 4 pièces de 120 mm destinées à battre les pentes du Mont Vaudois, du coté de Luze, le débouché de la Lizaine vers Chagey, les monts Ordons et la route de Paris dans la direction de Chalonvillars. Les pièces de flanc destinées à battre les lignes principales de défense, comme la chose est admise dans les ouvrages similaires, sont constituées ici, vu l'importance de la position par 4 pièces de 120 mm placées, deux sur chacun des flancs et donnant au Nord des feux dans les directions du fort du Salbert et du village d'Essert, au Sud dans celles du fort du Bois d'Oye, de la batterie d'Urcerey et des pentes du Mont Vaudois du coté d'Héricourt. Le flanquement des fossés est assuré au moyen de cinq coffres flanquants renfermant chacun une mitrailleuse. Soit un total de 13 bouches à feu constituant l'armement de l'ouvrage, savoir 8 pièces de 120 mm, 5 mitrailleuses Hotchkiss.

Le Petit Fortiff’Séré n°30

Conformément à l'instruction du 29 février 1888, il y a lieu de constituer les magasins du dit ouvrage comme des magasins de batterie, sans atelier de chargement, calculés à raison de 200 coups par pièce, ces magasins étant alimentés par le magasin de secteur ou les magasins centraux. On prévoit donc comme approvisionnements des poudres renfermées dans l'ouvrage, 8000 kg de poudre pour les 8 canons de 120 mm, soit une moyenne de 200 coups par pièce à la charge de 5 kg. La poudre étant contenue dans des caisses de 75 kg, modèle 1887, que l'on peut empiler sur 5 de hauteur, la surface nécessaire est, dans ces conditions de 8 m², en don- nant au magasin une longueur de 4 m, une largeur de 2 m et une hauteur de 3 m. L'approvisionnement de projectiles serait constitué par 1600 obus de 120 mm nécessitant une superficie de 6 m² et 50 caisses de cartouches pour canons-revolvers avec une surface de 4 m², soit 10 m² de superficie. Les dimensions de ce magasin seront donc de 4 m de longueur, 3 m de largeur et 3 m de hauteur. Il faudrait en plus une niche pour les fusées et les détonateurs de 1,20 m de largeur, 0,70 m de profondeur et 0,80 de hauteur (type admis par le Procès-verbal du 31 janvier 1889).

En résumé les conférents sont d'avis que l'armement de l'ouvrage devra comprendre : 8 pièces de 120 mm 5 mitrailleuses Hotchkiss et que les locaux à réserver dans l'ouvrage pour les besoins du service de l'Artillerie devront avoir les dimensions suivantes :

Dimensions Longueur Largeur hauteur Magasin à poudre 4,00 m 2,00 m 3,00 m Magasin à projectiles 4,00 m 3,00 m 3,00 m Niche aux détonateurs 1,20 m 0,70 m 0,80 m

Les mitrailleuses Hotchkiss citées sont à cette époque des canons- revolvers sis dans des coffres.

Le Petit Fortiff’Séré n°31

Apostilles du Directeur.

Avis donné le 31 mars 1890.

Les ouvrages intermédiaires entrepris à Belfort en 1888 et1890 sont tous les quatre destinés exclusivement à l'infanterie et analogues au type N° 1 du 11 juin 1888. L'ouvrage de la Côte conformément aux diverses études faites successivement et rapportées par le Chef du Génie comportera un armement puissant d'artillerie. Son tracé se rapproche beaucoup du type N° 2 du 11 juin 1888. La présence d'un roc de bonne qualité permet de loger la garnison dans des conditions de sécurité aussi satisfaisantes que celles que présentent nos meilleurs abris. La garnison abritée dans l'ouvrage même, gagnera sans retard ni difficultés ses postes de combat. Il est intéressant de constater qu'au point de vue de la dépense la présence du roc ne diminue ni le prix de revient de l'ou- vrage, ni même l'importance des travaux en béton de ciment. Le fort de la Côte coûtera aussi cher que les autres ouvrages intermédiaires. Il leur sera bien supérieur au point de vue de la résistance, de la sécurité, de l'importance des moyens de flanquement et de l'action extérieure que lui assure un armement de 8 canons de 120 mm. Le Directeur ne croit pas excéder ses pouvoirs en autorisant dès à présent le Chef du Génie à faire entreprendre les sondages nécessaires sur différents points de l'assiette du fort. On demande à compte sur l'exercice 1890 pour travaux de roctage et de terrassements une somme de 330.00,00 francs. Les acquisitions feront l'objet de propositions spéciales.

Réalisation.

Sur les bases exposées ci-dessus, l'ouvrage est commencé et livré en 1892. Le budget demandé est donc de 570000,00 francs pour l'ouvrage et 15900,00 francs pour les acquisitions.

Le Petit Fortiff’Séré n°32

La légende des locaux est celle vue ci-dessus. Toutefois, du fait des changements ultimes dans les emplacements de quelques locaux, les superficies sont à confirmer.

Éclairage des locaux souterrains de l'Ouvrage de la Côte d'Essert

Le 24 mai 1893, en exécution de l'instruction du 27 mai 1892, se sont réunis M.M Constantin, Sous-intendant Militaire et Martin, Chef de Bataillon, Chef du Génie, à l'effet de déterminer la nature et le nombre des appareils d'éclairage indispensables à l'ouvrage intermédiaire d'infanterie de la Côte, ainsi que l'approvisionnement d'huile, de mèches et de bougies nécessaires. Lisons leur procès verbal.

Exposé du Chef du Génie:

Conformément à l'instruction du 27 mai 1892, pour l'éclairage des chambres de troupe, bureaux et chambres d'officiers installés dans des locaux bétonnés on fera usage d'un quinquet à réflecteur et éjecteur pourvu d'un bec du diamètre de 7 lignes modèle dit bec Faucon consommant en moyenne 15 grammes d'huile à l'heure, nécessitant une mèche toutes les 8 heures. Les gaines seront éclairées au moyen de lampes de 11 lignes placées dans des cages appliques à serrures, consommant 25 grammes d'huile à l'heure et nécessitant une mèche toutes les 8 heures. L'éclairage extérieur sera assuré au moyen de lampes de 11 lignes placées dans des cages appliques sans serrures, consommant 25 grammes d'huile à l'heure et nécessitant une mèche toutes les 8 heures. Les locaux accessoires seront éclairés au moyen de becs de 7 lignes sans réflecteur ni éjecteur consommant 15 grammes d'huile à l'heure et nécessitant une mèche toutes les 8 heures. Pour l'éclairage momentané de certains locaux, pour le service de ronde, pour l'éclairage des latrines, on emploiera des lanternes portatives munies d'une lampe de 7 lignes. Des chandeliers en cuivre munis de bougies seront mis à la disposition des officiers pour le cas où leurs chambres ou bureaux n'auraient besoin que d'un éclairage momentané. Deux chandeliers par chambre sont suffisants, l'approvisionnement en bougies devra s'élever par jour à deux bougies d'un diamètre de 21 mm et d'une longueur de 180 mm. Les pièces de rechange et les accessoires à approvisionner seront conformes à la nomenclature donnée dans l'article 13 de l'instruction du 13 septembre 1884.

Le Petit Fortiff’Séré n°33

Dans ces conditions, les appareils à approvisionner par le Service du Génie seront les suivants: Quinquet de 7 lignes avec suspension et éjecteur 8 ¼ en réserve 2 Lampes complètes de 11 lignes avec cages appliques à serrure 30 1/5 en réserve 6 Lampes complètes de 11 lignes avec cages appliques sans serrures 4 1/5 en réserve 1 Lampes de 7 lignes avec cages appliques sans serrures 4 1/5 en réserve 1 Chandeliers en cuivre 2 Lanternes portatives avec becs de 7 lignes 7 Porte-mèches de rechange de 11 lignes 17 Porte-mèches de rechange de 7 lignes 11 Porte-verres de rechange 5 Verres de rechange 275 Montures de cage en verre 2 Grands bidons de 20 litres 2 Burettes de 1 kg 6 Entonnoirs 6 Petites boites à mèches 3 Goupillons 10 Ciseaux droits 2 Calibres à couper les mèches 4 Poignées porte-cages 12 Panier de lampiste avec ingrédients 2 Boites en fer blanc pour brillant Bühler 2 Brillant Bühler 10 kg

Le combustible et les mèches à approvisionner par le service de l'Intendance s'élèveraient pour 4800 heures d'éclairage : Huile de colza 13920 kg Mèches cirées et coupées de longueur de 11 lignes 21400 mèches Mèches cirées et coupées de longueur de 7 lignes 13200 mèches Bougies 400 Les emplacements des appareils sont figurés sur le croquis annexé au Procès-verbal.

Avis du Sous Intendant Militaire

Le Sous Intendant Militaire partage entièrement l'avis du Chef du Génie en ce qui concerne le choix et le nombre des appareils d'éclairage à employer, le matériel, le combustible et les divers approvisionnements à entretenir. L'avis de l'Intendant Militaire Directeur du Service de l'Intendance Militaire de la 7e Région, en date du 31 mai est conforme à celui des conférents au 1er degré, de même que celui du Colonel Directeur du Génie daté du 6 juin 1893.

Le Petit Fortiff’Séré n°34

Il est temps de voir la réalisation effective par une ballade virtuelle.

Une visite virtuelle.

En réponse aux menaces des obus allongés, le Génie propose un schéma type pour un ouvrage d’infanterie. Les fossés n’ont plus que la contrescarpe maçonnée et d’une hauteur réduite, l’escarpe est remplacée par un talus en terre coulante censé mieux amortir les effets des projectiles. Une grille en fond de fossé, dont les expériences ont démontré qu’elle resteun obstacle sérieux à l’avance des fantassins, même après un bombardement, est établie au milieu du fossé. L’ouvrage a une forme semi-circulaire et les organes de combat et de vie sont protégés par un béton de ciment non armé.

A Belfort, le génie profite de la présence de la Savoureuse pour créer à l’ouvrage du Monceau un fossé inondé, rappelant les douves moyenâgeuses, cas rare dans la fortification Séré de Rivières.

A la Côte d’Essert, c’est la présence du rocher calcaire qui inspire les militaires : l’ouvrage sera enterré, sauf les organes nécessaires aux canons.

C’est donc plus qu’un ouvrage intermédiaire d’infanterie. Il conserve une forme polygonale avec fossés profonds, escarpe et contrescarpe maçonnés et pour la défense des premiers, deux coffres de contrescarpes qui sont la réponse à la vulnérabilité des caponnières, ainsi que deux coffres de gorge. Tous ces organes sont conçus pour être armés du tout nouveau canon-révolver Hotchkiss Modèle 1879 et non pas de pièces de récupération comme dans d’autres ouvrages. Pour le flanquement des intervalles il est doté de quatre canons de 90 mm. Tous les canons sont du modèle de Bange, le meilleur matériel de l’époque. S’il n’est pas envisagé de cuirassements c’est qu’ils sont très coûteux et que leur mise au point est en cours.

Ouvrage de transition, bien doté, il reste un cas particulier difficilement transposable ailleurs, mais du coup un témoin très intéressant.

Le Petit Fortiff’Séré n°35

Ce que l’on voit en arrivant

Si l’on se place du coté d’un adversaire montant à l’assaut de l’ouvrage depuis la ferme Schrameck, la première chose vue serait un parapet d’infanterie surplombant le flanc raide de la colline coté ouest. Ce parapet est situé assez en avant de la batterie, dégageant une place de manœuvre assez vaste. Il fait le tour de l’ouvrage, permettant de retarder l’investissement par des tirs de mousqueterie.

Passé cet obstacle l’ennemi ne voit plus qu’un mamelon engazonné et en y regardant mieux il distinguera la présence de quatre embrèvements où se situent les canons de 120, derrière leur parapet. Car la crête de feu est à l’altitude de 464,20 m alors que le sommet de la traverse centrale du monte-charge culmine à 463,60 m. Puis il butera sur le profond fossé de tête. Si l’on fait le tour du fort par les fossés latéraux, on entrevoit des massifs bétonnés qui font le dos rond et qui sont les traverses-abris de l’artillerie. Difficile de faire plus discret.

Si l’on arrive du coté de la place de Belfort, par le chemin d’accès naturel, on ne voit d’abord rien d’autre qu’un ravelin surmonté lui aussi d’un parapet d’infanterie et qui par un passage, d’abord en tranchée puis souterrain, nous amène au fond du fossé.

Au débouché se révèle enfin l’entrée dans la façade de gorge, avec sa voute en plein cintre.

Entrée du ravelin, descente dans le ravelin et débouché dans le fossé de gorge

Le Génie a donc protégé au mieux cette entrée des coups plongeants. Il a conservé un pont-levis, ici du système à bascule en dessous avec contrepoids central, mais en le rentrant sous le tunnel vouté, ainsi que le haha. Deux petites meurtrières latérales permettent d’en défendre l’accès. L’ouvrage conserve ainsi cette protection sous les plus forts bombardements. Car au dessus il y a environ huit mètres de roche. Pour empêcher l’ennemi de vouloir abattre cet obstacle, deux coffres sont situés dans les rentrants de la gorge semi-bastionnée. A la construction un placage de ciment, avec tracé de faux moellons, ne permettait pas d’en connaitre la construction. Ce crépi ayant en partie disparu, on voit que l’organe de flanquement est un seul bloc de béton spécial avec la voûte extérieure cylindrique. L’ensemble noyé sous une bonne épaisseur de terre. Ce principe de construction est aussi utilisé pour les coffres double et simple. Front de gorge, entrée, coffre d'escarpe

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Dans l’ensemble le fort est construit en creusant le rocher et en coulant une voute de béton d’épaisseur moyenne de 0,80 m au dessus de chaque local. Ce qui, pour l’époque, représente une protection plus que satisfaisante, même supérieure à celle des ouvrages postérieurs où l’on utilise le béton armé mais rarement sous une telle épaisseur de rocher.

Le casernement et les locaux de vie.

En entrant on trouve un premier couloir qui dessert à gauche le poste de garde, un magasin et l'accès au coffre de gorge gauche. Symétriquement, à droite un autre poste de garde, la chambrée des officiers et la montée au coffre de droite. Au fond se trouve le magasin aux vivres. Dans ce même couloir on trouve sur la gauche deux chambrées pour 54 hommes chacun. Un mur de doublage en briques surmonté d'une structure métallique avec couvertures en tôle de zinc isole de l'humidité. Les façades donnant sur les couloirs qui desservent ces casemates de chaque coté présentent l'aspect d'une caserne aérienne avec des fenêtres et une porte centrale. Le couloir sis de l'autre coté de ces casemates fait voir des traces d'aération par gaines métalliques au plafond et deux cheminées en briques censées chauffer un peu, mais surtout entretenir un appel d'air assainissant ces locaux humides.

Couloir de gauche, logement des officiers avec cheminée, couloir de droite

Montée au coffre nord, chambrée, couloir arrière avec cheminée

Une casemate pour hommes, vue opposée du couloir arrière, magasin aux vivres

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Le couloir de l’artillerie

Situé dans la partie nord du fort, il est isolé du casernement auquel il est parallèle par une bonne épaisseur de rocher. A chaque extrémité se trouve une grille, isolant cet endroit stratégique du passage des hommes. En le parcourant d’est en ouest on trouve successivement, le local des poudres et son vestibule. Là étaient chargées les gargousses pour tirer les obus. Lesquels à l’époque, chargés avec la nouvelle mélinite dans les magasins centraux de la Place pour des raisons de sécurité, sont stockés dans le local suivant, sans vestibule. Assez curieusement, si l’éclairage de ce local se fait grâce à une cage-applique accrochée contre le mur du couloir, face à l’entrée du local, le premier local ne pouvait être éclairé que par des lanternes portatives. Puis on trouve une niche pour les détonateurs (ou étoupilles). Enfin le puits du monte-charge qui permet de remonter obus et gargousses à l’étage, sous le couvert de la traverse centrale bétonnée par un système de palan aujourd’hui disparu.

Le couloir avec les divers stockages. L'entrée qui avait une grille et à droite le couloir vers l'abri de piquet

L'autre entrée du couloir, à gauche sortie en capitale le magasin aux gargousses et le magasin à poudre

La descente au coffre double

Un long couloir en pente nous permet de passer d’abord devant le puits. Chose rare sur une colline calcaire, les militaires ont pu trouver, à 33 mètres de profondeur une nappe phréatique dont le débit était suffisant pour assurer l’autonomie en eau du fort. Cela s’explique par l’alternance de couches calcaires et d’argile. Il reste la commande la pompe et un morceau d’une échelle. Le puits, organe primordial pour tenir un siège, est judicieusement placé sous la grande traverse qui coupe la cour supérieure en deux et de ce fait particulièrement bien protégé.

La descente vers le coffre double, le puits de 33 mètres et la cuisine

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Ensuite se trouve un local exigu, avec une cheminée débouchant à mi-hauteur du parapet de la cour ouest. C’est la cuisine. Elle est à l’opposé du magasin aux vivres.

Arrivé au point le plus bas du couloir on remarque que les murs, jusque là en moellons, sont remplacés par du béton sur quelques mètres. Nous sommes sous le fossé, où la protection du roc est de fait bien moins épaisse. Avant de remonter au coffre, l’égout qui occupe la partie médiane du sol du couloir depuis le puits, rentre dans une galerie creusée à même la roche. Au bout de quelques mètres elle est tubée et débouche dans un puits vertical d’environ trois mètres. Cela permet de sortir de l’ouvrage discrètement. Là aussi on est en présence d’une curiosité rare dans les forts de l’époque, il faudra attendre les combats de 1914-1918 pour que les militaires creusent des sorties de secours, en général bien plus loin du fort, pendant l’époque dite des travaux 17. L’eau sort plus Intérieur de l'égout visitable bas dans le bois par une canalisation plus petite. et sortie extérieure à l'ouvrage

L’abri de piquet et l’accès au coffre simple

Du carrefour du couloir qui provient des casernements et qui dessert la montée Est sur les dessus, l’accès aux locaux d’artillerie se trouve un long couloir qui assure le passage vers le coffre simple. Il s’élargit pour permettre de loger une partie de la garnison sur des bancs rabattables. A cette époque on n’assure plus le couchage de la totalité de la garnison. On travaille par tiers. Un qui est de service, un qui dort ou vaque à ses occupations personnelles et un qui est en alerte ou de piquet(Face au casernement que l’on trouve en entrant à gauche, se trouvent également des bancs rabattables). Au bout de ce couloir il y a les latrines ou toilettes à la turque. Deux emplacements c’est peu pour l’effectif du fort. Couloir vers les latrines, casernement sur bancs rabattables (disparus), gaine d'aérage

Dans le prolongement du couloir il y a un égout creusé en galerie, très vite terminé par un tuyau non pénétrable débouchant dans la pente de la colline. L’accès à la galerie était initialement muré. Le fait que les deux égouts commencent par une partie taillée en pleine roche, accessibles à l’homme et au droit des coffres de contrescarpes, laisse à penser que le Génie militaire prévoyait la réalisation de galeries de contremines pour défendre ces organes vulnérables contre les travaux éventuels de sape entrepris par l’ennemi.

Les sorties aux postes de combat

Il existe deux débouchés d’infanterie, un partant du coté Est du casernement et qui arrive sous une casemate en béton pouvant à la fois servir d’abri pour les projectiles et les canons de 90 mm assurant le flanquement de l’ouvrage. Ici les canons pouvaient être mis en batterie en direction du massif du Salbert.

L’autre passage, le plus important, débouche depuis le couloir venant de l’entrée sous la grande traverse centrale, qui est censée protéger la cour du fort des coups d’enfilade. C’est le passage obligé des artilleurs qui servent les canons à longue portée placés sur quatre plateformes à l’air libre deux de chaque coté de la casemate centrale, débouché du monte charge.

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Casemate nord, traverse centrale, casemate centrale avec débouché du monte charge

Pour tenter d’assurer une certaine protection aux pourvoyeurs, ceux-ci passent les munitions aux servants par l’intermédiaire de petites baies au débouché d’un escalier latéral. Il n’y a plus de bras de traverses pour que les servants trouvent refuge sous la casemate. Ces bras étaient déjà abandonnés dans les derniers forts maçonnés. C’est également par l’accès ouest que les servants des pièces de 90 mm se rendent aux plateformes du flanc visant le Mont vaudois et la batterie d’Urcerey. Une casemate en béton protège les pièces et possède, comme toutes les traverses bétonnées de l’ouvrage, un passage à munitions à l’abri. Cette traverse possède en plus un sous-sol nommé « cave » sur les plans. Il parait probable, vu l’éloignement du monte-charge et du débouché d’infanterie, qu’on y stockait une réserve de projectiles. C’est une hypothèse en attendant de trouver aux archives un document explicite.

Le flanquement.

Deux coffres de gorge, un coffre de contrescarpe simple et un double, armés de cinq canons-revolvers Hotchkiss de 40 mm modèle 1879 assurent la sécurité du fossé.

Les accès des coffres de contrescarpe sont bien entendus établis sous les fossés.

Montée au coffre simple, au coffre double, coffre double

Dans ces coffres on a les traces de l'usine à acétylène, la fixation de la bouteille à oxygène et le créneau pour l'éclairage de nuit des fossés. Ce dernier était carrelé blanc pour plus de luminosité. Au mur on a les fameuses croix en arrière des pièces servant à les placer dans l'axe du fossé, marques typiques de la Chefferie belfortaine.

On peut remarquer que les murs de façade ont été entaillés grossièrement après leur construction pour laisser place aux roues du canon-revolver. Cette modification a vraisemblablement été faite après les essais sur l'enfumement des casemates de tir. Ces essais prescrivent d'avancer d'une certaine distance à l'extérieur le faisceau des canons. Il està remarquer qu'une seule petite embrasure est située à la voute de la casemate sans autre ventilation. On plaint les servants s'ils avaient du faire usage de leurs armes.

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Les façades du coffre double avec le béton traité en fausses pierres de taille et le fossé diamant.

NB. Les photos ci-dessus sont en majorité de Julie Vaubourg ou de l'auteur

Et après ?

Le fort est terminé mais comme on a voulu travailler à moindre coût, une catastrophe va arriver très vite.

Le 29 avril 1895, on apprend, sans que les archives consultées ne donnent la date exacte, qu'un effondrement de l'escarpe s'est produit. Les causes, en dehors de la nature du terrain, ne sont pas précisées, fortes pluies, dégel Pour arriver à résoudre ces dégâts, il faudra de nombreux échanges, comme on va le voir.

Minute de rapport Rendant compte d'un éboulement survenu à l'ouvrage de la Côte d'Essert.

Le Chef du Génie a l'honneur de rendre compte que la contrescarpe du front de tête 3-4 de l'ouvrage de la Côte d'Essert s'est effondrée sur toute sa longueur (130 mètres) dans le fossé. Celui-ci est creusé dans le roc, et a une largeur de 5,25 m et une profondeur moyenne de 10,00 m. Le roc est stratifié suivant une forte inclinaison dont la ligne de plus grande pente est sensiblement perpendiculaire à l'axe du fossé. L'éboulement s'est produit par glissement et n'est pas encore complétement arrêté car les failles a, b,c sont dans un état d'équilibre évidemment instable.

Il n'est pas possible, dans l'état actuel des lieux, de préciser ce qu'il conviendrait de faire pour rétablir la contrescarpe détruite. Mais il sera indispensable, quelle que soit la solution définitive qui s'imposera par la suite, de déblayer le fossé pour dégager l'escarpe, démasquer les coffres flanquants et reconnaitre les limites du terrain non encore éboulé. Le cube à déblayer est d'environ 50 m3 par mètre courant, soit 6500 mètres cubes. Il s'y trouve des quartiers de roc qui devront être débités à la mine, la distance moyenne de transport des déblais ne saurait être de moins de 10 relais dont 6 verticaux et 4 horizontaux. On peut donc évaluer approximativement la dépense nécessaire pour enlever l'éboulement et les terres dans le fossé à 20.000 francs, savoir:

Terre meuble, sur brouette, transportée à 10 relais 3000 mètres cubes à 2,75 7590 Rocaille sur brouette, transportée à 10 relais 3500 mètres cubes à 2,75 9625 e Déblai de roc de 3 classe 1000 mètres cubes à 2,45 2450 Total 19665 francs

L'escarpe du front de gorge qui est à peu près située comme la contrescarpe du front de tête tient encore, cependant celle de la face gauche 5-6 présente de nombreuses cavités auxquelles correspondent des quantités de roc qui gisent dans le fossé. C'est une indication qu'il serait imprudent de négliger.

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Aussi le chef du Génie tient-il à rappeler qu'il a présenté le 14 février 1894 un projet d'achèvement d'ouvrage de la Côte dont l'estimation totale (97000 F) comprenait 59500 f pour l'amélioration des escarpes et contrescarpes. Ce projet n'a été l'objet d'aucune décision. Il est bien clair qu'aujourd'hui, la somme de 59500 francs est devenue absolument insuffisante.

Une photo des dégâts et un relevé d'un des 14 profils étudiés le long de la contrescarpe.

Conclusion

Le Chef du Génie demande une première allocation de 20000 francs pour déblayer les fossés de l'ouvrage de la Côte d'Essert. Avis du Directeur. Le 29 avril 1895 : À allouer une somme de 20.000 f. Le Directeur a constaté sur place que dans l'état actuel des lieux, il était impossible de prévoir exactement ce qu'il conviendrait de faire pour rétablir la contrescarpe du front 3-4 et qu'il faut avant tout, déblayer les fossés de l'ouvrage. ______

Un rapport du 17 août 1895 demande sur l'exercice 1895 une allocation provisionnelle de 30.000 f pour rétablir l'obstacle de l'ouvrage de la Côte d'Essert. (Dépêches Mlles N° 10.173 du 14 mai 1895 et 15.835 du 31 juillet 1895) État estimatif 1° Travaux et fournitures dont le prix figure à la série : Entreprise générale 63.898,84 ; Entreprise des ciments 359,29 2° Travaux et fournitures non prévus à la série; 3720,00. Total 67978,15 ; Frais imprévus 6021,87; somme totale 74.000,00 F

Dans le même rapport du 17 août 1895 est joint ce texte:

Cette partie de contrescarpe serait constituée par un mur de 2,10 de base et 0,60 à la partie supérieure, consolidé au milieu de son développement par un contrefort de 1,50 m de largeur et d'épaisseur. Les vides des arceaux seraient fermés par un mur de 0,40. Le déblai donnerait une certaine quantité de bons moellons qui pourraient être utilisés dans les maçonneries et de la rocaille qui triée à la main et jetée derrière les maçonneries formerait matelas. On ne laisserait que 1 m de terre végétale à la surface. Une partie de la maçonnerie figure donc à l'état estimatif annexé comme maçonnerie avec moellons à l'État. Le parement serait fait en grès, le calcaire résistant mal aux intempéries à Belfort. L'état estimatif ci-annexé fait ressortir la dépense à 74000 F. En en déduisant les 8000 déjà alloués pour commencer le travail de déblaiement, il reste une somme de 66000 F qui serait nécessaire pour assurer la reconstitution de l'obstacle du fossé du front 3-4. Mais vu la saison déjà avancée, on ne pourra faire que pour 30.000 F de travaux sur l'exercice 1895. Ces travaux consisteraient dans le déblaiement et la construction des voûtes dans les parties qui pourraient continuer le glissement pendant l'hiver. Conclusion Le Chef du Génie a l'honneur de demander 1° une allocation prévisionnelle de 30000 F sur le chapitre 22 de la 2e section du budget de 1895 pour commencer les travaux de réfection de la contrescarpe du fossé du front 3-4 de l'ouvrage de la Côte d'Essert

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2° La mise en réserve d'une somme de 36000 F pour l'achèvement des travaux en 1896.

Enfin le 3 septembre 1895, le Ministre de la Guerre écrit à M. le Général de Division, Président du Comité Technique du Génie pour avoir son avis. La réponse arrive le 14 septembre:

Analyse sur le rétablissement de la contrescarpe de l'ouvrage de la Côte d'Essert à Belfort ______

Par dépêche n° 17943 en date du 3 septembre courant, le Ministre de la Guerre a adressé à M. le Général Président du Comité Technique du Génie, pour examen par la Section technique, un dossier relatif au rétablissement de l'obstacle de la Côte d'Essert à Belfort, obstacle compromis sur un développement de 130 mètres, par l'éboulement du rocher dans lequel est taillée en déblai la contrescarpe du front 3-4. Du rapport établi par le Chef du Génie à la date du 17 août, rapport qui en complète deux autres adressés antérieurement, il résulte que l'éboulement s'est produit par voie de glissement, sur un banc d'argile d'une vingtaine de centimètres d'épaisseur, et dont la pente de 30/100 environ est dirigée sur le fossé. Cette pente est commune à toutes les couches rocheuses dans lesquelles l'ouvrage est assis, couches qui sont séparées par d'autres bancs d'argile d'épaisseur variable. Pour remédier à cet accident, les services locaux s'accordent à proposer un revêtement à parement très raide, mais ils diffèrent d'avis en ce qui concerne le type à adopter. Le Chef du Génie, se conformant en cela aux indications laissées par l'Inspecteur Général sur ? à la place de Belfort, propose de construire une contrescarpe évidée, en arceaux en plein cintre de 1 m d'épaisseur et 6 m de portée, des piédroits d'une épaisseur de 2 m mais d'une longueur variable et proportionnée à la hauteur du roc à soutenir, et à la hauteur du plan de glissement actuel au dessus du fond du fossé. Le fruit serait de ¼. Le Colonel Directeur propose dans ses apostilles de raidir ce parement jusqu'à 1/6, de réduire à 3 m l'épaisseur des piédroits et à 5 m la portée des arceaux qui seraient surbaissés à ¼ avec une épaisseur de 0,70 m, et enfin d'établir un mur de masque de 0,40 m d'épaisseur. Le Général Commandant le Génie reproche aux deux dispositifs ci-dessus indiqués leur faible résistance aux coups verticaux, et les remplace par des blocs de butée massifs, en moellons et surmontés de ciment, (profil 13), mais indépendants. On se dispenserait d'ailleurs de construire en gros blocs de butée le tiers environ du développement du fossé c'est-à-dire sur la portion où les éboulements se sont produits vers la partie supérieure de la contrescarpe*. Enfin cet officier Général propose d'assurer l'évacuation des eaux d'infiltration du glacis, lesquelles pourraient favoriser des glissements ultérieurs et à cet effet d'établir des drains aboutissant aussi directement que possible au parement extérieurs de la contrescarpe. Examen fait des propositions ci-dessus développées, à l'appui desquelles le dossier ne renferme d'ailleurs aucun calcul de stabilité, la Section technique ne croit pas pouvoir déroger à la manière de voir de M. Le Général Commandant le Génie. En ce qui concerne les drains, il serait à craindre qu'ils ne puissent servir qu'à la condition de les établir à une très petite profondeur au dessous de la surface du glacis de manière à interdire à l'eau l'accès de la plus grande partie de la surface des lits d'argile. Mais comme ceux-ci sont très multipliés, ainsi qu'il résulte des pièces du dossier, on serait conduit à tapisser tout le glacis de ces drains, sans avoir la garantie absolue de la suppression des infiltrations. D'autre part les blocs de butée proposés ne pourraient retenir les roches disloquées se trouvant dans les intervalles, à moins de diminuer beaucoup l'espacement des blocs ce qui conduirait sans doute à un cube de maçonnerie supérieur à celui qu'exigeraient les arceaux en décharge. Enfin quant à la proposition de limiter le dispositif de soutènement à une partie du fossé, elle semble dangereuse, en raison des éboulements qui peuvent encore se produire : il convient dans l'intérêt de la sécurité de l'ouvrage, de prévenir tout accident de la nature de celui que l'on vient de constater. La Section technique se trouve donc conduite au système présenté par le Chef du Génie et par le Directeur, c'est-à-dire à l'établissement d'arceaux dans tout le développement de la contrescarpe menacée. D'autre part la proposition d'établir un mur de masque dont l'utilité ne parait pas suffisamment justifiée, les contre propositions du Directeur pourraient être admis s'il n'imposait pas aux maçonneries une trop grande fatigue par suite de la réduction des épaisseurs. Il est à craindre que l'économie ainsi réalisée ne soit au-delà payée par l'obligation de prendre au loin les matériaux de choix. Au contraire la proposition du Chef du Génie, grâce aux épaisseurs plus considérables données aux piédroits, permet d'employer dans une mesure plus large que dans le projet du Directeur les moellons trouvés sur place. C'est donc à ce projet que la section technique croit devoir se ranger. Le Petit Fortiff’Séré n°43

La section technique est arrivée à cette conclusion en se rendant compte par des épures des pressions transmises à la partie inférieure du parement des piédroits, avec le profil proposé par le Chef du Génie et le Directeur. * les épures ont été faites en supposant le coefficient de glissement du roc sur l'argile réduit à 0,1. Il serait utile que le service local refasse ces épures en s'assurant que le coefficient de glissement ne peut descendre au dessous de 0,1 sur l'argile très humide. ** Elle ajoute qu'il y aurait lieu d'appeler l'attention du service local 1° sur la nécessité d'assurer le mieux qu'on pourra l'écoulement des eaux sur le glacis et d'empêcher autant que possible celle-ci de séjourner entre les affleurements du roc. 2° sur la convenance de donner dans chaque profil au mur d'attique un profil largement suffisant pour résister à la poussée des terres au dessus des voûtes.

Par décision du 26 septembre 1895, le Ministre a approuvé les conclusions de l'avis de la section technique en date du 14 septembre..

Tous ces échanges sont contenus au SHD Vincennes dans le carton 6V4681.

On y trouve un dessin de la façade de la contrescarpe et plusieurs coupes des arceaux de décharge. Comme évoqué dans les documents vus plus haut, le Directeur a modifié le projet pour quelque chose de plus efficace, arceaux plus épais, remplissage de moellons en opus incertum. C'est ce qui a été réalisé et que nous voyons sur la photographie. Sur le terrain, par suite de vandalisme, un des murs de masque est partiellement ouvert permettant de voir les terres de remplissage inclinées vers le fond. En 2018 ce travail de maçonnerie tient bon, la contrescarpe est remarquablement reconstruite, contrairement aux escarpes et contrescarpes des fronts 2-3 et surtout 4-5. Sur ce front latéral nord, une reprise en béton postérieure à ce dossier a été effectuée sur l'escarpe, mais ce parement insuffisamment lié à la façade rocheuse s'est décollé. Dans quelques décennies les fossés latéraux seront en grande partie comblés. Enfin voici en profil les solutions proposées, celle du Directeur ayant été adoptée.

Exemple d'un des 14 profils dessinés dans le rapport. La réalisation avec très belles clefs de voûte

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L'ouvrage souterrain est forcément humide. Pas d'archives trouvées sur les restes de gaines cylindriques que l'on trouve au plafond et la date de l'installation de cette aération. Mais dès 1895 un problème se pose:

Assainissement du magasin aux vivres

Apostilles du Chef du Génie du 8 février 1895. Considérations générales

A l'exception de trois traverses bétonnées qui couvrent les débouchés des dessous sur la cour, tous les locaux de l'ouvrage de la Côte d'Essert ont été creusés dans et sous le roc. Partout, sauf dans le magasin aux vivres I, dans la cuisine J, dans la latrine Q et dans la niche du puits I, des parapluies en zinc ou des enduits étanches avec ou sans cloisons isolatrices ont été installés en vue de garantir ces locaux contre les eaux d'infiltration. Le 6 novembre dernier, M. le Général Commandant le 7e Corps d'Armée, en visitant l'ouvrage, a constaté de fortes infiltrations dans la voûte et dans les piédroits du revêtement en maçonnerie du magasin I. Les infiltrations de la voûte se manifestent par des stalactites formées aux dépens du mortier et auxquelles correspondent des rudiments de stalagmites bossuant le dallage. Les murs sont aussi zébrés verticalement de concrétions luisantes ayant la même origine. A la suite de cette constatation, le Ministre par dépêche N° 23901 du 16 novembre 1894, a prescrit de joindre des propositions, afin de remédier à la situation dont il s'agit, au dossier des projets du service ordinaire pour 1895.

Avant d'entrer dans le détail des dispositions proposées, le soussigné croit devoir rendre compte qu'il existe, dans le même ouvrage, un autre magasin aux vivres coté C, plus vaste, mieux aéré et garanti contre les infiltrations par un parapluie en zinc et une cloison isolatrice. Dans l'esprit des constructeurs, le local I n'est destiné qu'à recevoir des liquides en fûts : vin, eau de vie, huile d'éclairage, ce qui explique comment ils n'ont pas jugé nécessaire de prendre les mêmes précautions. Traces dans le magasin C Travaux Conformément aux indications données sur place par M. le Général Commandant le 7e Corps d'Armée, on propose de protéger le magasin I au moyen d'une voûte et de cloisons isola- trices. Seulement pour éviter que l'explosion d'un projectile dans le voisinage ne disloque le disposi- tif, il serait construit sur le dallage, sans aucun point de contact avec les autres parois, ce qui exige une carcasse métallique et conduit à profiler le toit en forme de chevron, avec tirants pour détruire la poussée. La maçonnerie en briques d'Altkirch (les seules qui ne soient pas gélives) hourdées en mortier de chaux hydraulique et cimentées en mortier de ciment sur un parement revient à 6,99 F le mètre carré rabais déduit ; pour la même épaisseur de dix centimètres la pierre factice en béton de ciment ne revient qu'à 6,38 F, enduite sur les deux faces. Outre cette légère différence de prix, la pierre factice aurait l'avantage de pouvoir se préparer sous forme de carreaux de dimensions appropriées aux mailles de la carcasse métallique, ce qui permettra une construction plus soignée dans l'espace resserré dont on dispose. Ces motifs ont inspiré l'établissement de l'état estimatif ci-joint. Somme demandée 1100 F. Le Petit Fortiff’Séré n°45

(Contre-projet du Chef du Génie) Ce projet, présenté le 23 février 1895, est évalué à 1000,00 F Officiers ayant pris part à la rédaction du projet M.M. Émile Martin, Chef du Génie, Vigniane, Capitaine Minute faite par le Capitaine du Génie sous la direction du Lieutenant-colonel Chef du Génie

(Ce contre-projet non retrouvé dans les archives consultées a donné lieu à une apostille). Ce contre projet de 1000 francs aurait en outre, l'avantage de diminuer un peu moins la capacité intérieure de la cave. Enfin, il serait intéressant d'en faire l'essai à Belfort où des travaux d'assainissement sont à prévoir, soit à des casemates chargées de forts remblais, soit à des locaux creusés sous roc.

Apostille du Directeur

Le Directeur doit rectifier tout d'abord une légère erreur qui a été commise par le Chef du Génie. Contrairement à l'assertion de cet officier supérieur, M. le Général Commandant Supérieur de la place n'est pas intervenu dans la transmission de la dépêche du 26 novembre 1894 laquelle a été envoyée directement par le Ministre au destinataire et a été reçue le 27 du même mois, à la Direction de Belfort. Une copie de la dite dépêche a été envoyée plus tard au Directeur, le 2 décembre dernier, par M. le Général Commandant le Génie de la région. La dépense du contre-projet du Chef du Génie n'est que de 100 F inférieure à celle prévue dans le projet et parait encore bien considérable pour le but à atteindre. D'ailleurs, il semble que s'il y a intérêt et économie finale à bloquer contre les parois du roc où est creusé un abri souterrain une maçonnerie en béton maigre de ciment, qui, tout en maintenant les fragments de roche qui seraient susceptibles de se détacher, se prête également à l'écoulement et à la sortie des eaux qui filtrent dans le rocher, on doit par contre laisser à découvert - sans rien appliquer par-dessus - les parements intérieurs du mur en maçonnerie de moellons, déjà appliqué et bloqué contre le rocher. Pour être même conviendrait-il … (manque la suite) ______

Le 23 févier on trouve une dernière apostille, présentant le contre-projet définitif :

Apostille du Directeur.

La somme de 1100 F à laquelle est évaluée la dépense dans le projet du Chef du Génie parait un peu élevée, eu égard à la destination de l'ouvrage ainsi qu'à l'affectation et aux dimensions du magasin à assainir. D'ailleurs, il est douteux qu'une voûte isolatrice en briques reliée de distance en distance avec le mur de revêtement du local soit plus aisément disloquée par les explosions des projectiles que le dispositif proposé avec ossature métallique.

Aussi le Directeur doit-il devoir adopter comme l'a indiqué aussi M. le Général Commandant le 7e Corps d'Armée une voûte en briques de champ placé à 0,05 du mur et prolongée jusqu'au sol du local par une cloison également en briques de champ. La voûte et la cloison construites en béton de ciment seraient reliées selon les règles en usage avec le mur de revêtement qui est bloqué contre le rocher et recouverte à l'extérieur - c'est-à-dire du coté du mur - par un enduit en ciment de 0,015 m d'épais- seur. Une rigole cimentée assurerait l'écoulement des eaux entre la cloison et le mur. La dépense serait environ de 550 francs dont 387 pour la voûte et la cloison, 50 pour les scellements à faire et 113 pour la rigole, "divers" et frais imprévus: soit cette somme, dont le Directeur demande l'allocation en 1895. ______

Dans d'autres archives en ma possession sans source connue de moi, on voit ressurgir cette question le 26 juin 1895: Le Ministre de la Guerre demande au Général de Division Président du Comité Technique du Génie, de vouloir bien soumettre à l'examen de la Section Technique du Génie, un dossier concernant l'assainissement du magasin aux vivres I de l'Ouvrage de la Côte d'Essert.

Le Petit Fortiff’Séré n°46

Ce dossier (transmis le 6 mars dernier par le Général Commandant le 7e Corps d'Armée) comprend un projet et un contre-projet comportant chacun un rapport du Chef du Génie avec un état estimatif et un dessin y annexés. Une note résumant l'avis qu'aura émis la Section Technique doit lui être adressée le plus tôt possible.

La réponse arrive en date du 8 août: Section Technique. Ce projet est évalué à 1100 F. Alloué 900 F ______

Les dispositions proposées par la Section Technique, dans un avis du 11 mai et 8 juillet 1895, pour l'amélioration des magasins à poudre des places de Gap et Toulon semblent encore applicables au magasin aux vivres de la Côte d'Essert.

Elles consistent à adopter pour toiture intérieure une voûte en brique de 0,11 m surbaissée à 1/6; hourdée en mortier de ciment, revêtue de tuiles mécaniques posées à bain de mortier, au fur et à mesure de la construction de la voûte, et établir des cloisons en brique de 0,05 d'épaisseur hourdées en ciment et distantes d'environ 0,50 des parois existantes de façon à créer autour du magasin une gaine continue permettant la visite et la réfection des maçonneries ainsi que l'enlèvement des glaces, s'il y a lieu. La voûte en briques est appuyée sur les parois maçonnées de manière à placer la ligne de faite de la toiture à 0,50 environ au dessous de l'intrados de la voûte en moellons et à obtenir pour les deux plans de chape l'inclinaison générale de 1/3. Les eaux sont recueillies dans des chéneaux en poterie et conduites au dehors du magasin dans le couloir d'accès au moyen de tuyaux à large section également en poterie La gaine enveloppe de semblables magasins doit être mise en communication directe avec le couloir par deux ouvertures de grande hauteur permettant une large circulation de l'air et dont l'issue parait assez large pour donner accès à cette gaine. L'ensemble de ces améliorations ne parait pas devoir entrainer une dépense supérieure à la somme de 900 F. ______

On ne peut pas louer cet ultime projet qui réduit par trop la surface et le volume de stockage.

Actuellement, on constate que la solution finale pour assainir le magasin semble être celle du Directeur, datée du 23 février, répondant aux exigences d'économie et conservant le maximum de surface utile. ______

Avec le regain d'intérêt pour la fortification permanente, l'ouvrage de la Côte ne pouvait qu'être concerné par la protection efficace des bouches à feu.

Procès-verbal de conférence au sujet de la protection de l'Artillerie installée dans les ouvrages. (Note du 30 mars 1912 des Sections Techniques de l'Artillerie et du Génie et Note de Service transmissive N° 1304-E de M. le général de Division, Gouverneur de Belfort du 15 août 1912).

L'an 1912, le 14 novembre, les soussignés :M.M. PAILLA, Chef de Bataillon, Chef du Génie à Belfort, BASTIEN, Chef d'Escadron, Adjoint au Commandant du Parc d'Artillerie de Place de Belfort,se sont réunis en Conférence, conformément aux prescriptions des Notes susvisées, à l'effet d'étudier les mesures à prendre pour augmenter la protection de l'Artillerie installée dans les différents ouvrages dépendant de la place. Le résultat de cette étude a été le suivant : Secteur du Salbert. Ouvrage de la Côte d'Essert. Cet ouvrage comporte une batterie de 4 pièces de 120 long. Ces 4 pièces sont protégées actuellement à l'avant par un parapet d'une hauteur moyenne de 1,70 (profil N°5) ; de chaque côté par des traverses en terre ou abris recouverts de terre, sauf la première pièce qui n'est pas couverte à sa droite. Si l'on considère le village de Chalonvillars comme objectif le plus rapproché, un tir de bombardement sur ce village exécuté avec la charge 1 nécessiterait :

Le Petit Fortiff’Séré n°47

- avec un parapet de 2,40 m : une embrasure de 0,65, très visible des observatoires ennemis des Ordons; - avec un parapet de 2,00 m : une embrasure de 0,20 à 0,25 de profondeur seulement. Les Conférents proposent, en conséquence, la protection de 2 m par enfoncement des terre-pleins de 0,30 m. La protection sera bien plus grande que celle qui est fournie par l'organisation actuelle. Il ne serait pas possible d'ailleurs de porter les canons en arrière, la cour de l'ouvrage ne le permettant pas. Les terres provenant de l'enfoncement des terre-pleins pourraient être utilisées : parie à élargir les traverses, partie à construire à la droite de la première pièce une traverse qui la protégerait des coups d'enfilade arrivant par la droite de la batterie. Ce dernier travail aurait toutefois l'inconvénient de diminuer la banquette d'infanterie d'une longueur égale àla largeur de cette dernière traverse. La longueur des terre-pleins de cette batterie est de 6,70 m et pourrait à la rigueur être réduite de 0,70 m ; mais si l'on remarque d'une part qu'il en résulterait des travaux de terrassements considérables par suite de la nécessité de déplacer les rampes d'armement, d'autre part que cette batterie doit être évacuée de l'ouvrage pour constituer la batterie de renforcement R2 située …(Manque page 5) …serait pas nécessaire. Avec celle de 2,40 il suffirait d'établir une embrasure de 0,10 ou 0,15 qui, se projetant sur le cavalier, serait à peu près invisible des positions ennemies. Ce serait, à tous égards, la meilleure solution, car il est matériellement impossible de reporter les canons en arrière, le talus du cavalier se trouvant à moins de 10 m. Enfin il parait possible de diminuer d'environ 2 mètres, conformément aux prescriptions du $3 de la note ministérielle, la longueur des terre-pleins qui est de 9 mètres. Si la réduction de cette longueur a 7 mètres n'est pas proposée d'une façon ferme, c'est afin de ne pas déchausser les murs en retour qui limitent les talus latéraux des traverses. b & c) Batteries de 2 x 90 S.P. du cavalier et du rempart. Pour ces 2 batteries, la hauteur de la crête au-dessus du terre-plein est de 2 m. (Profils N°7 pour le cavalier et 8 pour le rempart). La grande différence d'altitude entre ces batteries et leurs objectifs probables, à savoir: - batteries du cavalier: objectifs d'artillerie de campagne et d'infanterie entre la gare de Bas-Evette et Errevet; - batteries du rempart: objectifs de même nature dans la région Frahier-Chalonvillars, ne permet pas de leur donner la couverture de 2,40 qui obligerait à creuser des embrasures très profondes, visibles de très loin. La longueur des terre-pleins de la batterie du cavalier n'est que de 6 mètres : elle n'est donc pas susceptible de réduction. Pour la batterie du rempart elle est de 8 mètres et pourrait sans inconvénient être réduite à 6. d) Batteries de 3 mortiers de 22 du front nord. La protection est assurée par un parapet de 1,60 à 1,70 de hauteur (profil N°9) que l'on peut facilement porter à 2,40 m en enfonçant les terre-pleins de 0,70 à 0,80. La longueur des terre-pleins peut sans inconvénient être réduite à 1 mètre. L'exécution des différents mouvements de terre indiqués ci-dessus entrainerait une dépense d'environ 800 francs susceptibles d'être réduite de moitié par l'emploi de la main d'œuvre militaire. ______

Il reste à vérifier sur site ce qu'il en est résulté.

Batteries d'évacuation ______

En 1891 il est envisagé de construire deux batteries de chaque coté du fort d'Essert. Elles porteraient les numéros 12 et 13 et seraient dotées de magasin. Le projet avorte.

Dans les JMO de 1914 on parle des travaux effectués à la mobilisation par la 25e batterie du 9e Régiment d'Artillerie à Pied. Il s'agit de créer la batterie d'évacuation 12. Les pelotons 6 et 7 de cette batterie sont affectés à la Côte d'Essert. Les travaux démarrent le 16 août 1914 et se prolongent jusqu'à la fin du mois. 16 août : déboisement, 17 août : continuation des travaux, 18 août : tracé de la batterie, dessouchement et déboisement très importants, 19 août : jusqu'à la fin du mois : continuation des travaux. Il n'est pas dit si les travaux sont achevés ou en continuation (voir la suite). Le Petit Fortiff’Séré n°48

Par contre ce qu'indiquent les JMO pour septembre 1914 ne semble pas avoir eu d'effet sur la batterie12. Il est écrit "Les batteries d'Infanterie sont refaites d'après une nouvelle conception venue de l'expérience des combats. Elles deviennent de véritables batteries de siège. Des observatoires sont construits pour chaque groupe et pour chaque batterie. Des pare-éclats d'un type très robuste et destinés à abriter les servants des éclatements qui se produisent en arrière de la pla- teforme, sont établis dans toutes les batteries". Octobre 1914 : on étudie de nouvelles batteries en avant de celles déjà existantes. Les batteries d'infanterie sont terminées. En 2018 cette batterie ignorée existe toujours au fond d'un chemin d'accès, ruinée et envahie par la végétation. Quand aux observatoires il en existe deux à l'ouvrage, un au Nord sur le chemin couvert, un second au Sud sur le parapet d'infanterie. Construits en pierres sèches avec un toit fait de sacs de ciment pris dans la masse, ils ne sont guère crédibles et semblent dater de la même époque, comme dans d'autres ouvrages d'infanterie de la Place, comme ceux autour du Salbert (ouvrages de la Forêt, du Haut d'Evette, du Salbert). ______

Annexes. Acquisition des terrains.

- Acquisition du terrain nécessaire à la batterie de la Côte et à sa route d’accès, le 15 septembre 1875. Signé par le maire d’Essert pour 1 ha 12 a et 62 ca de forêt et pâturage communaux. Acquisition des terrains nécessaires à la route d’accès le 17 août 1876. Signé du maire de Bavilliers pour trois parcelles, une de 31 a 20 ca, l’autre de 20 ares 80 ca, la dernière de 33 a 20 ca toutes de forêt communale. Le total est de 85 a et 20 ca. Treize propriétaires privés de Bavilliers sont indemnisés. - Acquisition des terrains nécessaires à la construction de l’ouvrage de la Côte d’Essert le 23 décembre 1890. Déclaration d’utilité publique et d’urgence le 11 juillet 1890. Décisions du Ministre de la Guerre les 17 juillet 1890 et 18 novembre 1890. Vente de 7 ha 14 a 45 ca. La commune est autorisée à utiliser les pâturages au dessus des deux égouts, coté Sud. Elle auto- rise le Génie à déverser les eaux de ces égouts dans le fossé en limite communale, coté Urcerey.

Batteries d'évacuation En 1891 il est envisagé de construire deux batteries de chaque coté du fort d'Essert. Elles porteraient les numéros 12 et 13 et seraient dotées de magasin. Le projet avorte. Dans les JMO de 1914 on parle des travaux effectués à la mobilisation par la 25e batterie du 9e Régiment d'Artillerie à Pied. Il s'agit de créer la batterie d'évacuation 12. Les pelotons 6 et 7 de cette batterie sont affectés à la Côte d'Essert. Les travaux démarrent le 16 août 1914 et se prolongent jusqu'à la fin du mois. 16 août : déboisement, 17 août : continuation des travaux, 18 août : tracé de la batterie, dessouchement et déboisement très importants, 19 août : jusqu'à la fin du mois : continuation des travaux. Il n'est pas dit si les travaux sont achevés ou en continuation (voir la suite). Par contre ce qu'indiquent les JMO pour septembre 1914 ne semble pas avoir eu d'effet sur la batterie12. Il est écrit "Les batteries d'Infanterie sont refaites d'après une nouvelle conception venue de l'expérience des combats. Elles deviennent de véritables batteries de siège. Des observatoires sont construits pour chaque groupe et pour chaque batterie. Des pare-éclats d'un type très robuste et destinés à abriter les servants des éclatements qui se produisent en arrière de la pla- teforme, sont établis dans toutes les batteries". Octobre 1914 : on étudie de nouvelles batteries en avant de celles déjà existantes. Les batteries d'infanterie sont terminées. En 2018 cette batterie ignorée existe toujours au fond d'un chemin d'accès, ruinée et envahie par la végétation. Quand aux observatoires il en existe deux à l'ouvrage, un au Nord sur le chemin couvert, un second au Sud sur le parapet d'infanterie. Construits en pierres sèches avec un toit fait de sacs de ciment pris dans la masse, ils ne sont guère crédibles et semblent dater de la même époque, comme dans d'autres ouvrages d'infanterie de la Place, comme ceux autour du Salbert

(ouvrages de la Forêt, du Haut d'Evette, du Salbert). Il y aurait encore à raconter, mais cela demanderait de rédiger un livre complet. Le but était ici d'exhumer des textes peu connus sur l'histoire d'un ouvrage intermédiaire d'infanterie plutôt atypique. Jean-Pierre ZEDET - 2018

Le Petit Fortiff’Séré n°49

Communications optiques de forteresses dans la place de Belfort Emplacements, appareils, expérimentations, inspections

Par Jean-Pierre ZEDET

Vers les années 1880 se met en place dans les forts un réseau de communications optiques.

Emplacements.

Les premiers forts choisis sont ceux du Salbert, de Giromagny et du Mont Vaudois. S'y ajoutent le Ballon de Servance et le fort de la Chaux (Lachaux). Site incontournable par sa situation privilégiée, le Salbert est le centre du maillage. Il sera doté de deux casemates optiques. De son sommet à 650 mètres d'altitude, on a des vues remarquables sur le versant sud des Vosges, sur la plaine de Haute Alsace, puis sur l'ensemble du massif du Jura, de la frontière suisse à la Haute Saône. Grâce à lui la Place peut communiquer avec le (distance 8 km) extrémité sud-est du rideau de Haute Moselle à sa construction puis rattaché à Belfort ; elle communique avec le fort de Servance (distance 18 km) et par lui avec le rideau de Haute Moselle et Épinal. Par l'intermédiaire des forts du Mont Vaudois, de Lachaux, du Mont Bart et du Lomont, le Salbert est relié au demi-rideau qui joint la frontière suisse. Enfin il communique avec la place de Besançon grâce à sa liaison avec le fort de Chailluz.

Technique.

Étudiée dès le siège de Paris en 1870, les liaisons optiques intéressent chercheurs et militaires. C'est le Capitaine, futur Colonel Mangin qui met au point les premiers appareils. Le principe est simple, une source lumineuse émet un faisceau concentré par un ensemble de lentilles en direction d'un correspondant doté d'un appareil similaire appelé héliographe. Ce correspondant observe le faisceau au travers d'une longue vue. Il peut faire de même en réponse en direction de l'émetteur. Pour dialoguer il suffit d'interrompre le faisceau plus ou moins longtemps selon le codage Morse utilisé en télégraphie électrique. Sauf quela vitesse de transmission est forcément plus lente, la persistance rétinienne des opérateurs obligeant une certaine latence. Dans les forts les héliographes sont placés sous casemate, et le faisceau canalisé dans des gaines a peu de chance d'être intercepté par l'ennemi.

Appareils et accessoires.

Il existe deux classes d'appareils selon leur construction, ceux à lentilles (de une à 3) repérés par la lettre L et le diamètre de la lentille principale en centimètres (exemple L24) et ceux dits télescopiques (exemple T60) de par leur ressemblance avec le télescope Cassegrain. Ils utilisent des miroirs concaves. Le Commandant Mangin les développa pour leur plus forte puissance lumineuse. Mais ils étaient délicats à régler et les correspondants pouvaient passer des heures à se trouver. Ils furent donc progressivement abandonnés.

Il existait au long des années les appareils suivants (Exposition universelle internationale de 1900) :

Types à lentille De 10 De 14, type de la Télégraphie militaire De 14, type du Génie

Le Petit Fortiff’Séré n°50

De 24, 30, 40 De 50 non démontable De 50 démontable De 60 (modèles 1885 et 1890) démontable Appareils télescopiques De 35, de 45, de 60 Ces appareils se divisent en deux catégories, de campagne et de forteresse. Le premiers s'installent sur des pieds mobiles à 3 branches et sont portatifs. Les autres sont destinés uniquement aux postes fixes. Ceux de 40, 50 et 60 sont portés par un socle en fonte, installé sur un massif en maçonnerie. A un autre point de vue, ces derniers appareils se divisent en appareils non démontables, dans lesquels la lunette de réception et l'appareil d'émission sont réunis dans une même caisse en tôle, qui contient aussi la lampe, et en appareils démontables dans lesquels l'objectif d'émission, la lunette de réception et la cage de la lampe peuvent être séparés pour le transport. Les appareils de campagne sont évidemment plus légers que ceux de forteresses Appareil de 14 : 43 kg Appareil de 24. L'appareil complet pèse 55 kg. 6oo. Appareil de 30 59,250 kg Appareil de 40 104 kg à 150 kg avec accessoires Appareil de 50 démontable 280 kg Appareil de 60 démontable (modèle 1890) 268 kg à 350 kg avec socle en fonte.

Sources lumineuses.

On utilise soit la lampe à pétrole, soit la lumière solaire soit plus tardivement la lumière électrique (lampes à arc) et la lumière oxyacétylénique. Les portées dépendent étroitement de ces sources. L'Instruction ministérielle du 5 juillet 1891 relative au fonctionnement des appareils de la télégraphie optique, on trouve les portées admises: De nuit au pétrole Appareils à lentilles Appareils télescopiques De 10 15 à 20 km De 35 40 à 50 km 14 20 à 30 km 45 50 à 60 km 24 30 à 40 km 60 60 à 80 km 30 40 à 50 km 40 50 à 60 km 50 80 km 60 90 km De jour avec le pétrole ces portées sont réduites à la moitié et même au tiers de ces valeurs.

Dans le cours de l'École des transmissions, 1926-1930 (ce qui permet de voir qu'on n'avait pas renoncé à ces transmissions dans l'entre-deux guerres) il est donné : Portées moyennes de nuit * éclairage au pétrole portée égale au nombre qui exprime en cm le diamètre de la lentille * éclairage à l'acétylène portée égale à 1 fois ½ celle obtenue avec l'éclairage au pétrole * éclairage électrique portée sensiblement égale à celle obtenue avec l'éclairage à l'acétylène de jour - environ le tiers de la portée correspondante de nuit -lumière solaire: extrêmement variable, dépend de la limpidité de l'atmosphère. Au minimum la portée est égale au nombre qui exprime en cm le diamètre de la lentille. Le Petit Fortiff’Séré n°51

On rejoint là Plessix- Legrand qui dans leur cours de 1909 écrivent "On admet que la portée moyenne, de nuit, est, en kilomètres, d'une fois et demie le calibre. Pour un appareil de 24, elle est d'environ 36 kilomètres". Comme on va le voir lors des expériences de Belfort, le gros problème de ces communications est l'état de l'atmosphère, la moindre pluie, brume ou même fumée gêne énormément. On utilisait au départ comme sources lumineuses soit la lumière d'une lampe à pétrole, soit la lumière solaire. Puis on utilisa la lumière de lampes à arc et celle de lampes à acétylène. Dans les archives actuellement dépouillées on ne trouve pas mention de l'utilisation à Belfort de l'acétylène, sauf pour l'éclairage des fossés. A titre d'exemple citons les portées pour l'appareil très répandu L24: Pétrole de nuit, de jour: 24 et 8 km ; acétylène de nuit, de jour: 40 et 14 km ; lumière solaire 24 km selon l'Aide-mémoire de l'Officier du Génie. Les portées avec la lampe Cance manquent.

Quelques uns des appareils utilisés à Belfort

Appareils à lentilles

L'appareil à une seul lentille est représenté utilisant la lumière solaire issue d'un héliostat.

L'héliostat qui suit les rayons solaires, est placé sur la casemate optique.

Appareil L24 à 2 lentilles avec lampe à pétrole

Appareil type L40 sur socle en fonte

Le Petit Fortiff’Séré n°52

Le jour, toutes les fois qu'on le peut, on utilise la lumière du soleil afin d'augmenter la portée. Pour cela on se sert des objets ci-après qui se trouvent dans la boîte d'accessoires ; l'oculaire solaire, le miroir d'oculaire solaire, le miroir rectangle auxiliaire. Pour disposer l'appareil en vue de la transmission avec la lumière solaire, on enlève la lampe et on dévisse le miroir concave. On introduit l'oculaire solaire à la place du miroir concave ; on y enfonce à refus le tube portant le miroir d'oculaire solaire ; l'ensemble de ces deux tubes est dit tube solaire. On oriente ensuite le miroir de façon que le cône lumineux produit par la concentration des rayons solaires disparaisse dans l'ouverture de la cloison masquée par le disque obturateur. Si l'orientation de l'appareil ne permet pas que le miroir d'oculaire solaire reçoive directement les rayons du soleil, on se sert du miroir rectangle auxiliaire dont la tige se visse au-dessus ou sur le côté droit de l'appareil. On tourne vers ce miroir la face mate du miroir d'oculaire solaire et on amène les rayons réfléchis par le miroir auxiliaire à tomber sur cette face. Quand le rectangle lumineux occupe la partie médiane du miroir, on retourne celui-ci et on agit comme précédemment.

Appareils télescopiques

Destinés au service en forteresse, leur poids ne les rend guère maniable, ils sont placés sur socle permettant un réglage fin en direction. Car s'ils sont plus lumineux, ils sont délicats à orienter, le faisceau étant moins large.

Appareil T45 avec usage de l'héliostat

Le Petit Fortiff’Séré n°53

Appareil T45 avec lampe à pétrole

Le même vu de l'arrière

Socle en fonte pour appareil télescopique

Le Petit Fortiff’Séré n°54

Dans l'instruction ministérielle du 5 juillet 1891 relative au fonctionnement des appareils se trouvent les données suivantes:

Boite d'accessoires de L14 (Modèle 1884) et L24 Un tube de réglage Un oculaire de réglage à verre dépoli Un oculaire de réglage à fils Un oculaire solaire Un miroir rectangle d'oculaire solaire Un miroir rectangle auxiliaire sur tige Une clef de glissière pour la lunette, dans un compartiment spécial Une peau de chamois De la mèche pour la lampe Des verres pour la cheminée Des ressorts et des caoutchoucs pour le manipulateur, au fond de la boite Une paire de ciseaux Une pince plate Un tournevis Une lime plate Une lime triangulaire Une lime ronde Un poinçon Un torchon

Le Petit Fortiff’Séré n°55

Pour le L30, la boite contient en plus un héliostat complet et une boussole avec étui. Pour le L40, se trouve le bidon à pétrole carré de 8 litres et le socle en fonte. Pour le L50 démontable la boite contient:

Un tube de réglage muni d'un oculaire de réglage à verre dépoli Un oculaire solaire Un miroir d'oculaire solaire Un miroir auxiliaire rond monté sur tige dit miroir psyché Un héliostat et sa clef Un torchon Une lime plate Une lime ronde Une lime tiers-point Un poinçon Deux tournevis Une pince plate Une paire de ciseaux Dans un compartiment spécial: Deux clefs à écrou Une boussole Des verres Des mèches Des ressorts Des caoutchoucs Des boulons Une peau de chamois Des vis diverses

On trouve des accessoires similaires pour les appareils télescopiques

Boîte d'accessoires d'appareil télescopique de 50 démontable.

La boîte d'accessoires renferme : — un tube de réglage muni d'un oculaire à verre dépoli — un oculaire de réglage à fils — un tube solaire —.un miroir d'oculaire solaire — un miroir auxiliaire rond monté sur tige, dit miroir psyché — un héliostat et sa clef — un torchon — une lime plate — une lime ronde — une lime tiers-point — un poinçon — deux tournevis — une pince plate — une paire de ciseaux. Dans un compartiment spécial : — deux clefs à écrou — une boussole — un jeu de verres — 0,50 m de mèche — trois ressorts Le Petit Fortiff’Séré n°56

— quatre caoutchoucs pour manipulateur — douze boulons — une peau de chamois — vingt vis diverses.

Les appareils à Belfort

On ne dispose pas, en dehors de certaines années, des états d'inventaire des appareils mais à partir de données parcellaires j'obtiens le tableau suivant qui donne une idée de l'évolution des dotations. Les quantités sont celles citées dans les sources disponibles, elles ne disent pas toujours le nombre total de chaque type, ni d'autres types en réserve. On peut se rendre compte que l'on espérait beaucoup des appareils télescopiques, remplacés progressivement par ceux à lentilles.

Forts Année Appareils en place Quantités En réserve T35 1 1882 T45 1 L60 1 L24 3 1xL14 1887 L40 1 2xT35 T35 2 1xT45 L14 1 1897 T35 1 T45 1 Fort du Salbert L14 nombre de L24 chaque 1898 T35 type incon- T45 nu L14 1 1902 L24 1 T35 1 L24 2 1913 L30 2 L60 1 T35 1 1882 T45 2 L60 1 L16 1 1887 L24 1 3xT35 L40 1 Fort du Ballon de T35 1 Servance 1897 L60 1 1898 L24 1902 L60 1 1913 ? L16 1 1887 1xL16 L24 2 L14 1 1898 Fort du Mont L24 1 Vaudois 1902 L14 1 L14 4 1913 L24 1

1897 : appareils cités en réparation suite à visite d'inspection. 1898 : appareils utilisés lors des expériences de communication optique. 1902 : inspection de 1902

Le Petit Fortiff’Séré n°57

Mise en place des appareils optiques Pour des raisons à la fois de sécurité des transmissions et des opérateurs, les appareils sont placés dans des casemates dites optiques. On utilise une traverse abri existante, modifiée en conséquence, ou un organe construit spécialement. On trouve dans certaines publications l'organisation d'un poste de forteresse blindé, colorisé ici par mes soins:

Vue en plan, avec le mobilier, chaises, bureaux, lit, fourneau, et les héliographes

Ces deux coupes montrent l'organisation du travail

Le Petit Fortiff’Séré n°58

Mise en place des postes optiques à Belfort

Fort du Salbert Un projet rédigé par M. Capperon, Chef du Génie de la place et Chevalier, Capitaine du Génie est proposé au Ministre le 5 février 1882.

Le poste est placé au milieu de la cour de la batterie annexe Est. La dépêche ministérielle du 7 avril 1882 précise que cet observatoire communique avec les forts de Chailluz (place de Besançon), du Mont Bard (place de Montbéliard), du Lomont (place de Montbéliard) et du Ballon de Servance (place d'Épinal). Un second est à installer dans une traverse située à l'extrémité de cette même batterie. Muni de 3 gaines il peut communiquer avec les forts de Giromagny (place d'Épinal), du Mont Vaudois et du Ballon de Servance. Sur le plan de réalisation on lui ajoutera le Château de Belfort ainsi que le qui n'aura de poste qu'en période de guerre.

État actuel de l'observatoire 2, à gauche gaine vers le Mont Vaudois, à droite vers Servance et Giromagny.

Le Petit Fortiff’Séré n°59

Juin 1973, on voyait encore la soute à pétrole et l'escalier (Photo M. Roth) État actuel…

On a sur le dessus de l'observatoire n°1 un appareil télescopique de 60 à lampe Cance, sa boite d'accessoires, à droite un L24 (ou L40), en haut une lunette d'observation. En bas la soute à pétrole. (Coll. A. Brolli)

Fort de Giromagny

Le poste est installé dans une casemate du casernement de gorge, face au Salbert avec lequel il communique exclusivement.

Emplacement du poste optique, disparu suite au dynamitage allemand

de 1944

(Coll. L. Pracht)

Le Petit Fortiff’Séré n°60

Fort du Mont Vaudois

L'idée d'utiliser une traverse pour abriter le poste est très vite abandonnée, faute de vue vers le fort de La Chaux. On envisage alors un emplacement vers le magasin à poudre O en février 1882.

Ce projet ne verra pas le jour.

L'accès grâce à une échelle en plein milieu du passage menant du magasin à poudre aux plateformes n'est pas très bien pensé. De plus le poste n'a que deux correspondants

Le Petit Fortiff’Séré n°61

Dans un rapport en date du 26 avril 1883 le chef de bataillon Capperon, Chef du Génie à Belfort, fait état d'une demande de fonds pour la construction de l'observatoire de Télégraphie optique au fort du Mont-Vaudois. "Dans l'état des fonds restant disponibles sur l'exercice 1882 et dont on demandait le report sur l'exercice 1883 figurait au titre du budget sur ressources extraordinaires Ch. 2 Art. 6 Télégraphie, une somme de 5000 f destinée à la construction de l'observatoire de télégraphie optique au fort du Mont-Vaudois. Cette construction n'a pu être exécutée en 1882 et le Chef du Génie l'a rappelée à l'état sommaire des projets pour 1883 Art. 15. Cette somme n'a pas été demandée dans le rapport spécial du Chef du Génie en réponse à la dépêche ministérielle N° 998 du 22 janvier 1883, parce qu'elle ne figurait pas dans l'énoncé des ouvrages pour lesquels les fonds étaient définitivement activés. Le Chef du Génie demande que cette allocation de 5000 f soit faite en 1883 à la place de Belfort pour la construction de l'observatoire de télégraphie optique au fort du Mont-Vaudois." On n'a pas actuellement dans les archives la décision de changer l'emplacement final. La casemate est finalement mise en place vers le saillant 3 au Sud-est au dessus du passage descendant à la caponnière simple. Les travaux commencés en 1883 ne sont pas terminés à la fin de l'année.

On en sait plus dans le Rapport du 29 février 1884 du Chef de Bataillon Capperon, Chef du Génie de Belfort, relatif à une demande de fonds pour terminer l'observatoire de télégraphie optique du Mont Vaudois.

L'observatoire n'a pu être terminé en 1883 avec les fonds alloués.. il reste à faire: 1° les chapes, 2° les gaines, 3° les terrassements.

Les causes qui amènent l'augmentation de dépense pour laquelle est demandé une nouvelle allocation sont les suivantes: On avait pensé que sous la traverse existante, on trouverait immédiatement le roc pour asseoir les fondations ; il n'en a pas été ainsi, on a du descendre à 3,00 m pour trouver le terrain solide. En outre, pour bien voir, on a du relever le sol de l'observatoire, et pour ces deux motifs, le cube des fondations a augmenté dans des proportions importantes représentant une somme de 1200,00 F. Par suite du relèvement de tout l'observatoire, les terrassements se trouvent également notablement augmentés. On peut évaluer cette augmentation à 700,00 F. Enfin, pour permettre d'apporter au projet primitif quelques améliorations indispensables et pour organiser d'une façon complète l'installation des appareils, une somme de 800,00 F serait nécessaire. Dans cette somme se trouve comprise la réinstallation d'une plateforme de l'artillerie qui a du être momentanément retirée, ainsi que la remise en état des parapets voisins qui ont été fouillés pour prendre de la terre végétale.

En conséquence le Chef du Génie demande que soit allouée une somme de 2700,00 F selon cet état :

Le Petit Fortiff’Séré n°62

Refaire les murettes en Fort manœuvre et garçon 40 j à 3,45 pierres sèches et remettre maçon 138,00 F en état les parapets e A la confection et à la pose Charpentier de 2 classe 12 j à 5,40 F 64,80 F des gaines Terrassements Terre à 2 hommes à la 160 m3 à 1,24 fouille élevée à 3,20 m et Terre végétale du remblai damée par couche de 0,15 198,40 F m à 0,25 m de hauteur

Rocaille chargée avec une 310 m3 à 2,49 brouette transportée à 2 Le remblai de l'observatoire relais et élevée à 6,30 m de 771,90 F hauteur

Surface de remblai dressée 370 m² à 0,008 Le talus au cordeau, râtelée et se- 28,00 F mée

Charpente Planches de chêne de 0,05 72 m3 à 7,23 Les gaines m d'épaisseur rendues à 520,56 F pied d'oeuvre Charpente pour pont de 1,400 m3 à 24,44 Passerelle sur le fossé pour service et pour le 1er 34,16 F le transport des remblais exercice de sa mise en place

Plancher pour pont de ser- 22 m3 à 2,25 er vice pour le 1 exercice de 27,50 F sa mise en place

Report 1783,32 F Surenchère de 5% 89,17 F 1872,49 F Plus value de 12% 224,70 F 2097,19 F Chape en mortier composé 130 m3 à 3,65 F de une partie en volume de Surenchère de 20% ciment N¨1 et deux parties 474,50 F Travaux en ciment en volume de sable de 94,90 F Bourogne ou de la Saône de 569,40 F 0,04 m d'épaisseur repassé jusqu'à siccité

Report 2666,59 F Frais imprévus 33,41 F Total 2700,00 F

Le Petit Fortiff’Séré n°63

Coupe avec l'escalier d'accès.

Plan avec les 5 gaines. Le Génie utilisera ultérieurement la gaine vers le pour communiquer avec la Batterie des Roches présentant un azimut très proche.

Le débouché de la casemate optique de la Batterie des Roches

Les cinq gaines du fort du Mont Vaudois (photo J. et C.Vaubourg)

Brassard de sapeur télégraphiste (couleurs arbitraires)

Le Petit Fortiff’Séré n°64

Mise en place des réseaux et incidents d'utilisation.

État des appareils de télégraphie optique qui ont été reçus jusqu'à ce jour dans la place de Belfort

Noms et nature des appareils Quantités Désignations des emplacements Appareils télescopiques de 0,45 à éclairage Un au Salbert 2 postérieur Un au Ballon de Servance Appareils à lentille de 0,6 avec pied Deux au fort du Salbert Un au fort du Ballon de Servance 6 Deux dans la place de Montbéliard Deux dans la place de Besançon appareils télescopiques de 0,35 Un au fort du Salbert 3 Un au fort du Ballon de Servance Un en réserve en magasin de Belfort Lunettes terrestre 4 Magasin de Belfort Héliostats 9 Avec les appareils

Les postes secondaires du Salbert et du Mont Vaudois seront prêts à recevoir leur matériel à la fin du mois de novembre 1882, et celui de Giromagny au 15 juillet 1882.

Note au sujet de ce matériel (Belfort, le 1er juillet 1882. Le Chef de bataillon Chef du Génie : Capperon) :

Par lettre du 17 septembre 1879, l'Adjoint du Génie comptable de la commission a fait connaitre à l'Adjoint de Belfort qu'il avait reçu un ordre d'expédier aux places de Belfort et de Montbéliard les tables à pivots des appareils de la télégraphie optique en remplacement de celles envoyées par ces deux places au sieur Bardoux, pour être modifiées. Jusqu'à ce jour la place n'a rien reçu. La place de Montbéliard étant comptable, les chefs du Génie de Belfort et de Montbéliard demandent la remise de ces tables ou un ordre pour établir des pièces d'entrée et de sorties comme objets expédiés de ces places à la Commission des communications aériennes, ce serait le plus simple, car aujourd'hui les appareils sont en place et les dites tables ne seraient d'aucune utilité. La place de Montbéliard possède dans les forts qui en dépendent, deux appareils de 0,16 avec pied et deux héliostats ; ces appareils y sont à demeure et comptent dans les écritures de la place de Belfort. Il faudrait donc aussi un ordre pour passer ces objets par pièces comptables de la place de Belfort à celle de Montbéliard. En résumé pour qu'il y ait concordance entre les écritures et l'existant dans les magasins, il faut provoquer un ordre pour autoriser la place de Belfort à céder à celle de Montbéliard, deux appareils de 0,16 avec pied et deux héliostats, et un ordre pour établir des pièces d'entrée et de sorties pour verser ou expédier au Dépôt des communications aériennes: 1° Place de Belfort. - Une table à lunette pour télégraphie optique 2° Place de Montbéliard. - Une table à lunette pour télégraphie optique Enfin donner l'ordre à la place de Besançon d'expédier à celle de Belfort, un appareil de 0,6 avec pied et un héliostat qui ont été laissés en dépôt dans cette place par Monsieur l'Adjoint principal Frison en 1878.

Liaison défaillante au fort de Servance

Suite à une dépêche ministérielle du 22 avril 1885 le Commandant Papuchon, Chef du Génie sur le fonctionnement de la télégraphie optique en octobre 1884 fait rapport le 28 avril 1885. L'appareil de Servance sur la Mouche a eu une lentille cassée au mois d'août 1884. Cet appareil envoyé à Paris est revenu avec ses lentilles mal disposées et fonctionnant fort mal, le 19 septembre 1884 il est renvoyé à Paris d'où il revient en octobre à Belfort muni d'une lentille de 0,35 et d'une autre lentille de 0,45. L'appareil essayé en vain à Servance est renvoyé une 3e fois à Paris d'où on a renvoyé un appareil neuf expédié de Paris le 27 janvier 1885. La situation du 1er de chacun des mois de septembre, octobre, novembre, décembre et de janvier dernier ont rendu compte de la suppression des communications et de leur cause. On doit ajouter que l'officier chargé de la télégraphie optique a du aller trois fois à Servance pour chercher la causedu mauvais fonctionnement de l'appareil et pour essayer d'y remédier, tandis qu'il eut fallu quelques jours à l'opticien de Paris pour renvoyer la première fois un appareil restauré. Le caporal Adam (nom présumé lisible) détaché au Ballon de Servance est du reste signalé depuis longtemps comme peu soigneux et absolument indiscipliné. On a demandé depuis quelque temps son changement qui s'impose

Le Petit Fortiff’Séré n°65

Si du reste la présente détérioration de l'appareil peut lui être imputée, on voit par ce qui précède que les interruptions subies et signalées dans les communications de Servance avec La Mouche ont eu une autre cause que le manque de savoir faire du sapeur télégraphiste et ne sont nullement imputables à l'installation matérielle du poste.

Il semble que le personnel affecté dans les forts n'était pas toujours à la hauteur, en voici une preuve.

Lors de l'Inspection de mai 1908 du Réseau du Commandement, l'Inspecteur signale en passant le défaut de soins apportés dans le choix des sapeurs du service auxiliaire envoyés à Belfort pour le service de la télégraphie. Le tableau suivant indique la situation de cinq de ces hommes.

Nom Profession Bureau de recrutement Observations Pique chaînetier Valenciennes inintelligent - illettré Cassou charbonnier Bordeaux inintelligent - illettré Vannier domestique agricole Blois sait à peine lire et écrire Bizieux berger Blois manque 3 doigts - sait à peine lire et écrire Renard facteur !?) Châtellerault lit et écrit très imparfaitement

Le Général de Division De Lacroix, Vice Président du Conseil de la Guerre, Président de la Haute Commission des Places Fortes, Inspecteur Général des Fortifications.

Septembre 1887. Réseaux télégraphiques du Commandement. Commandement supérieur de la défense du groupe de Belfort.

Nombre d'appareils Manipulants Postes avec lesquels ils sont mis en communica- Postes à desservir Mis en tion par le réseau du En réserve de l'Administration auxiliaires place Commandement.

fort Kirgener (Chailluz) de Besançon fort Broussier (Mt- L14 Vaudois) fort Lefebvre (Salbert) 2xL16 Fort du Montbart 2xT45 3 5 fort Razout (de Lachaux) L24 fort Baraguey d'Hilliers L40 (Lomont) batterie Sanson (des Roches) Observations. Il ne sera fait usage qu'éventuellement des communications optiques Mont-Bart _ Salbert et Mont-Bart _ Batterie des Roches, la communication avec Belfort par le Mont-Vaudois étant plus facile et la Batterie des Roches, annexe du Lomont, étant reliée à ce fort par une ligne électrique.

Les télégraphistes affectés au poste électrique de cet ouvrage seront employés au réseau optique quand les communications électriques seront coupées. fort Broussier (Mt- Vaudois) L16 L16 Fort de Lachaux fort du Mont-Bart 2 4 L14 T45 fort Baraguey d'Hilliers (Lomont) Observations. Les télégraphistes affectés au poste électrique de cet ouvrage seront employés au réseau optique quand les communications électriques seront coupées.

Le Petit Fortiff’Séré n°66

fort Lefebvre (Salbert) L16

Fort du Lomont fort du Mont-Bart T35 T35 2 3 fort Razout (de Lachaux) T45 fort du Mont-Bart fort Broussier (Mt- Batterie des Roches L14 L14 1 2 Vaudois) fort Lefebvre (Salbert)

Observations. Il ne sera fait usage qu'éventuellement de la communication optique Batterie des Roches - fort du Salbert, la ligne Batteries des Roches - fort du Mont Vaudois étant plus courte. Il n'y a en conséquence que deux directions optiques à desservir d'une façon normale à la Batterie des Roches.

Les télégraphistes affectés aux poste électriques seront employés au réseau optique quand les communications électriques seront coupées. fort Scherrer (Ballon de L24 Servance) fort Dorsner (Giromagny) L24 Place de Belfort 2x T35 fort Kirgener (Chailluz) L40 Fort du Salbert T45 4 6 fort Broussier (Mt- L24 Observatoires N° 1 et 2 Vaudois) L14 fort du Mont-Bart T35 fort du Lomont T35 fort Razout (de Lachaux) L16 Place de Belfort fort du Mont-Bart L24 L16 2 4 Fort du Mt Vaudois fort Lefebvre (Salbert) L24 En réserve dans la place T45, L16 Place de Belfort 4xL14 à ac-

quérir fort Bruat (de la Mouche) L40 Épinal fort Caulaincourt (de Fort de Servance Rupt) 3x T35 2 5 L16 fort Boufflers (Château Lambert) fort Lefebvre (Salbert) L24 Observations. Les télégraphistes affectés au poste électrique du fort de Servance seront employés au réseau optique quand les communications électriques seront coupées. Fort de Giromagny fort Lefebvre (Salbert) L14 1 1 Observations. Les télégraphistes affectés au poste électrique du fort de Giromagny seront employés au réseau optique quand les communications électriques seront coupées Totaux 17 30

Observations.

Le Petit Fortiff’Séré n°67

La Place sera munie de quatre appareils à lentilles de 0,14 pour l'organisation de communications éventuelles à l'intérieur du camp retranché. Les deux appareils de campagne tenus en réserve dans les forts Lefebvre et Broussier pourront être utilisés pour le même objet. Il ne sera fait usage qu'éventuellement des communications optiques existantes Salbert - Mt Vaudois et Salbert -Mont Bart, aussi n'a-t-il pas été tenu compte de ces lignes pour la détermination des effectifs à attribuer aux forts du Salbert et du Mont Vaudois.

Expériences de communications aériennes par télégraphie optique.

Rapport du 24 décembre 1890 du Lt-Colonel Papuchon, Chef du Génie, faisant connaitre les résultats des expériences faites en vue de déterminer les heures les plus favorables pour la correspondance entre les postes optiques de la région. (Note du 14 mars 1890 du général commandant le Génie de la 7e région)

Les observations qui ont été faites pendant les mois d'avril à décembre 1890 en vue de déterminer les heures les plus favorables à la correspondance entre les postes optiques de la région sont les suivants : Pendant la journée, on a fait des observations à la lunette dans chaque direction de correspondance et on a noté tous les jours dans un carnet les périodes pendant lesquelles la communication était possible, du lever au coucher du soleil. On a fait de semblables observations pendant la nuit du mardi au mercredi de chaque semaine. Il avait été convenu entre les Chefs du Génie de Belfort, Besançon et Montbéliard que cette nuit là, les feux resteraient allumés jusqu'au jour. Communication de jour. De toutes les observations, il résulte que pour aucune direction de correspondance, il ne s'est révelé de périodes diurnes nettement plus favorables que d'autres à la correspondance. Ces observations montrent toutefois que pendant les mois d'août et de septembre, on aurait communiqué un peu plus souvent entre Salbert et Chailluz de 6h à 8h du matin qu'à toute autre heure de la journée. Dans toutes les autres directions et à toutes les saisons, on aurait pu communiquer un peu plus souvent, dans l'après-midi que dans la matinée. Cette année, il y aurait eu avantage à ce que la séance de jour de midi à 3 heures, qui a lieu pendant la période du 1er avril au 1er octobre, eut été fixée de 2 à 5 heures de l'après-midi pendant cette période. C'est du coucher du soleil à minuit que l'on peut communiquer le plus facilement la nuit. La communication serait beaucoup moins fréquente le matin, avant le lever du soleil que le soir après le coucher. La correspondance entre Salbert et Chailluz est très rare surtout de jour. On pourrait la rendre un peu plus fréquente en hiver, en faisant commencer au coucher du soleil, la communication qui durerait comme actuellement jusqu'à 10 heures du soir. Vu et transmis sans observations, Belfort le 26 décembre 1890, le Colonel Directeur du Génie

Tableaux indiquant la répartition du personnel et du matériel affecté aux postes optiques de la Chefferie de Belfort, ainsi que le rendement de chaque ligne. Rapport selon l'instruction ministérielle du 29 avril 1893.

- 1ère période, du 16 février au 30 avril 1898

Le Petit Fortiff’Séré n°68

/ / / /

83

nuit

séance où la la où séance

/

pu être établie être pu

128 106 128 106

jour

communication a a communication

nombre moyen de de moyen nombre

mots échangés par par échangés mots

/ / / /

495

nuit

/

des mots mots des

échangés

jour

746 746

2445 2445

nombre total total nombre

/ / / /

6

nuit

renseignements sur le rendement le sur renseignements

nombre de de nombre

/

7 7

séances où la la où séances

19 19

jour

pu être établie être pu

communication a a communication

22 28 16 28 16

de jours jours de

pendant pendant

lesquels le le lesquels

ouvert à la la à ouvert

poste a été été a poste

transmission

nombre total total nombre

/ / / /

nuit

source source

pétrole

employée employée

lumineuse lumineuse

pendant la la pendant

matériel

L24 L14 L14 L14

T45

appareils

nature et et nature

calibre des calibre

1 1 1 1

aides

s

2 1 1 1 1

sa-

peur

personnel

raux

capo-

nombre de de nombre

télégraphistes

ser-

gents

8 8 8 8

33

postes postes

distance distance

correspondants

kilométrique des des kilométrique

3

2

1

4 5

postes postes

Salbert Salbert

Lomont

Giromagny

Mont Vaudois Mont

correspondants

id id

Salbert

des postes des

Giromagny

emplacement emplacement

Mont Vaudois Mont désignation et et désignation

Le Petit Fortiff’Séré n°69

1) communication ouverte du 9 mars au 2 avril, ouverte à nouveau le 21 avril. Par suite du manque de repérage au fort du Lomont, la recherche du correspondant a retardé l'établissement de la communication. 2) communication ouverte le 21 mars. 3) communication ouverte du 21 mars au 2 avril, ouverte à nouveau le 21 avril. Le mauvais état de la gaine et le manque de feu dans le poste ont arrêté souvent la communication. 4) communication ouverte le 21 mars. 5) voir observations ligne Salbert - Mont Vaudois.

- 2e période, du 1er mai au 30 juin 1898

/ / / / / / /

nuit

établie

gés par par gés

nombre nombre

/

moyen de de moyen

85 85

séance où la la où séance 100 100 209 133

mots échan- mots communica-

jour

tion a pu être être pu a tion

/ / / / / / /

nuit

des mots mots des

échangés

/

jour

932

nombre total total nombre

1018 2391 1018 2391 3349

/ / / / / / /

nuit

établie

/

7

nombre de de nombre

12 24 12 24 16

jour

communica-

séances où la la où séances

tion a pu être être pu a tion

renseignements sur le rendement le sur renseignements

/

25 35 25 35 33 31

sion

jours jours

total de de total

nombre nombre

pendant pendant

transmis-

lesquels le le lesquels

ouvert à la la à ouvert

poste a été été a poste

/ / / / / / /

nuit

source source

employée employée

lumineuse lumineuse

pendant la la pendant

matériel

L14 L24 L14 L14 L24 L24

T35

appareils

nature et et nature

calibre des calibre

1 1 1 1 1 1 1

aides

1 1 1 1 1 1

rs

sa-

peu

personnel

1

ux

ca-

pora

phistes

s

nombre de télégra- de nombre

ser-

gent

8 8 8 8 5

19 21

dants

distance distance

des postes postes des

correspon-

kilométrique kilométrique

3

1

2

4

Rupt

postes postes

Salbert Salbert

Giromagny Montbard

Mont Vaudois Mont

Chât. Lambert Chât.

correspondants

id id id

Salbert

Servance

des postes des

Giromagny

emplacement emplacement

Mont Vaudois Mont désignation et et désignation

Le Petit Fortiff’Séré n°70

1) communication suspendue du 7 mai au 3 juin. 2) communication suspendue du 7 mai au 3 juin. Cette ligne n'a pas fonctionné par suite du manque d'entretien du télégraphe. 3) communication suspendue du 18 au 28 juin. 4) communication suspendue du 1er au 10 juin.

- 3e période, du 1er juillet au 16 septembre 1898

/ / / / /

81

nuit

120 104 172 172

de mots mots de

séance où la la où séance

échangés par par échangés

/ / /

pu être établie être pu

nombre moyen moyen nombre 97 97

124 130 124 139 163

jour

communication a a communication

/ / / / /

812

nuit

1316 1381 2913 2913

des mots mots des

échangés

/ / /

jour

581 581 979

nombre total total nombre

2472 1432 2472 3752

/ / / / /

9

11 13 17 17

nuit

établie

/ / /

6 6 6

renseignements sur le rendement le sur renseignements

nombre de de nombre

20 11 20 27

jour

communica-

séances où la la où séances

tion a pu être être pu a tion

30 52 31 37 35 25 31 29 37 37

sion

jours jours

total de de total

nombre nombre

pendant pendant

transmis-

lesquels le le lesquels

ouvert à la la à ouvert

poste a été été a poste

/ / / / / /

nuit

neuse neuse

pétrole pétrole

L Cancé L

L. Cancé L.

employée employée

pendant la la pendant

source lumi- source

matériel

des des

L14 L24 L14 L14 L24 L60 L14 L24 L24

T35

calibre calibre

appareils

nature et et nature

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

aides

1 1 1 1 1 1 1

rs

sa-

peu

personnel

1 1 1

ux

ca-

pora

nombre de de nombre

télégraphistes

s

ser-

gent

8 8

67 33 19 19 19 55 10 12

dants

distance distance

des postes postes des

correspon-

kilométrique kilométrique

4

2

2 6

2

5

1

3 5

postes postes

Lomont

Salbert Salbert

Chailluz

Lachaux

Servance

Montbard Montbard

Giromagny

Cense Billot Cense

correspondants

id id id id id id

Salbert

Servance

des postes des

Giromagny

emplacement emplacement

Mont Vaudois Mont désignation et et désignation

Le Petit Fortiff’Séré n°71

1) à Chailluz, le mauvais état du moteur et l'incapacité des télégraphistes ont arrêté souvent la communication. 2) communication suspendue le 1er septembre par suite de la libération du télégraphiste. 3) communication suspendue le 1er septembre. 4) le mauvais fonctionnement du moteur a arrêté souvent la communication. Communication suspendue le 6 août. 5) communication suspendue le 1er septembre. 6) communication suspendue le 26 juillet.

- Personnel Les sapeurs télégraphistes sont en général bien exercés à la transmission optique. Toutes les dépêches d'exercice étaient chiffrées et ont été avec une vitesse à l'heure de 50 à 100 mots de 5 lettres en moyenne, collationnement compris. Tous les télégraphistes pourront assister dans le courant de l'exercice 1898 au nombre de séances réglementaires prévu par la dépêche ministérielle de 17 décembre 1897.

- Observations générales Installer une communication acoustique au fort de Servance entre le poste optique et la salle des machines. Doter les postes de Servance et du Salbert d'un matériel de réparation et de divers objets de rechange. (voir procès verbal de visite ci-joint) A Belfort, le 25 septembre 1898

- État du matériel Servance Réparer le porte-mèche de l'appareil de 0,60 BL N° 10. Manque la peau de chamois de l'appareil de 0,35 T N° 58. Giromagny Remplacer un poinçon cassé. Mont-Vaudois Remplacer les charnières de la boite d'accessoires de l'appareil de 0,24. Réparer le pas de vis de la lunette.

Procès verbal de visite du matériel de télégraphie optique aux postes de la Chefferie de Belfort (notes ministérielles du 13 mars 1891 et 25 février 1897)

1) Locaux où est entreposé le matériel. Salbert Le matériel est entreposé partie dans les observatoires 1 et 2 (appareils en service), partie dans la casemate n° 7 de la gorge du fort (appareils de rechange) Ces locaux sont ventilés et assez secs. Le moteur et la dynamo sont dans une baraque en bois. Servance Le matériel est entreposé partie dans l'observatoire (appareils en service), partie dans la casemate 13, magasin du Génie (matériels de rechange) Mont Vaudois Le matériel est entreposé dans le magasin du Génie du fort, local suffisamment sec et ventilé. On ne peut laisser les appareils dans l'observatoire où ils se détérioreraient très rapidement. Giromagny L'unique appareil est installé dans le poste optique, local n°14bis très sec. 2) Postes optiques Salbert Les observatoires sont assez secs. La gaine de la direction du Mont Vaudois a subi un léger affaissement qui ne gêne pas les communications. Il n'existe pas de gaine pour la direction des Roches. Les repérages sont faits. Servance L'observatoire est humide ; les appareils doivent être visités fréquemment. L'appareil de la direction Salbert est dans une position incommode. De plus le rayon lumineux de cette direction ne passe qu'à 1,20 m au dessus du plateau en avant et peut être intercepté en hiver par la neige. Il n'est possible de remédier à cet inconvénient qu'en surélevant l'observatoire. Les repérages sont faits ; les gaines sont en bon état.

Le Petit Fortiff’Séré n°72

Giromagny Poste très sec. L'appareil est installé et repéré. Pas de gaine. Mont Vaudois Aucun appareil ne séjourne dans l'observatoire qui est très humide. La gaine du Montbard s'est affaissée et doit être refaite ; il n'existe pas de gaine pour la direction des Roches. Les repérages sont établis. 3) Matériel technique de poste Le matériel est en assez bon état ; pour assurer sa conservation d'une façon suffisamment satisfaisante, il conviendrait de mettre en permanence à la disposition de l'officier chargé du service de la télégraphie un sapeur télégraphiste quiserait employé au nettoyage périodique des appareils, aux réparations à faire sur place et autres menus travaux d'entretien. 4) Approvisionnements de pétrole et de mèches Le pétrole approvisionné dans les postes est inutilisable. Un rapport du Chef du Génie en date du 31 mai 1895, établi à la suite de la dépêche ministérielle N° 4629 du 7 mai 1895, fait ressortir les quantités de pétrole à réformer et à réapprovisionner. Le Ministre n'a pas encore statué. 5) Réparations à faire sur place Salbert L14 n°57 remplacer le torchon T45 n°1 remplacer les verres de la lampe. Dim. 65x70 et 65x50 T35 n°41 remplacer les 4 vis de support de lampe et le torchon Servance T35 n°59 remplacer la clef de l'héliostat L60 n°59 réparer la lampe dont la mèche monte difficilement Giromagny Néant Mont Vaudois Néant 6) Observations diverses Le moteur Tenting du poste de Servance a très mal fonctionné pendant les deux mois de mise en service des réseaux optiques. Son remplacement par un moteur moins capricieux et moins dangereux s'impose.

État annexé au procès-verbal de visite du matériel de télégraphie optique (Belfort, le 19 octobre 1897)

Salbert

matériel en mauvais état désignation des nombre excé- déficits a réparer sur a réparer au a proposer pour la observations objets réglementaire dents place Dépôt Central réforme sur place Appareils système N°41 Mangin dits : Remplacer les 4 vis 4 / / 1 Télescopiques de support de lampe complets de 0,35 et le torchon N° 1 Idem………de 0,45 2 / / 1 Remplacer les verres de lampe Remplacer le Idem………de 0,14 1 / / 1 torchon Appareils Mangin dits à lentilles 1 complets de 0,14

Idem………de 0,60 1 Appareils système Remplacer les bou- Baille-Lemaire dits à lons qui font partie 1 1 lentilles complet de de la boite 0,60 d'accessoires Longue-vue F 1 objectif de 0,50 Lampe à pétrole 1 pour app. petite

Le Petit Fortiff’Séré n°73

Servance

matériel en mauvais état

a réparer a proposer désignation des objets nombre réglementaire excédents déficits a réparer observations au Dépôt pour la sur place Central réforme sur

Appareils système N°59 Mangin dits : 3 / / 1 / / Remplacer la clef Télescopiques complets de l'héliostat

Idem………de 0,14 1 / / / / /

Idem………de 0,24 1 / / / / /

Appareils Mangin dits à 1 lentilles complets de

Appareils système Baille Réparer la lampe. -Lemaire dits à lentilles 1 1 Remplacer les complet de 0,60 ressorts du

Longue-vue F objectif 1

Lampe à pétrole pour 1

Mont-Vaudois

matériel en mauvais état a proposer a réparer au désignation des objets nombre réglementaire excédents déficits a réparer pour la observations Dépôt sur place réforme sur Central place A remplacer par des 0,24 N° 60 Appareils système Man- Réparer le miroir gin dits : d'oculaire 2 / / / 2 à lentilles complets de solaire. Les 0,14 boites d'accessoires sont fort incomplètes. Réparer les couvercles des 2 Idem………de 0,24 2 / / / 2 boites d'accessoires cassés

Giromagny

matériel en mauvais état

a proposer désignation des objets nombre réglementaire excédents déficits a réparer a réparer au observations pour la sur place Dépôt Central réforme sur

Appareils système Mangin dits : 1 / / / / /. à lentilles complets de

Le Petit Fortiff’Séré n°74

Place

matériel en mauvais état

nombre a réparer au a proposer désignation des objets excédents déficits a réparer sur observations réglementaire Dépôt pour la place Central réforme sur

Appareils système Man- gin dits : 1 / / / / / . à lentilles complets de

Idem………de 0,14 4 / / / / /

Appareils complets divers 1 / / / / /

Appareils système Mangin dits : 3 / / / / / à lentilles complets de

Longue-vue F objectif de 4 / / / / /

Lampe à pétrole pour 1 / / / / /

Rapport du Lt-Colonel MAIROT, Chef du Génie au sujet du fonctionnement des réseaux optiques en 1902, fait à Belfort le 25 avril 1903 suite à la dépêche Ministérielle du 25 mars 1903 N° 6503.

En exécution des prescriptions de cette dépêche, le Chef du Génie a l'honneur de rendre compte que certains appareils figu- rant sur l'état annexé à cette dépêche comme devant être renvoyés au Dépôt Central de la Télégraphie Militaire pour y être réparés, appartiennent au Fort de Servance. Ces appareils sont les suivants : 1° Héliostat pour appareil de 0,60 à lentilles, 2° Oculaire à fils pour appareil de 0,60 BL, 3° lampe Cance. Le fort de Servance étant rattaché à la Chefferie de Remiremont, l'envoi de ces objets doit être effectué par les soins de cette Chefferie, le Chef du Génie demande que des instructions en conséquence soient adressées au Chef du Génie de Remiremont. Les autres appareils mentionnés sur l'état visé ci-dessus sont expédiés à la date de ce jour au Dépôt Central de la Télé- graphie Militaire. Le rapport modèle A de l'Officier chargé du Service de la Télégraphie optique indique: 1° que la direction Salbert-Lachaux est desservie au Salbert par un appareil de 0,35 T et au Lachaux par un appareil de 0,14. 2° que la direction Salbert-Mont Vaudois est desservie au Salbert par un appareil de 0,24 et au Mont-Vaudois par un appareil de 0,14. Le Chef du Génie rend compte que la différence constatée entre les calibres des appareils du Salbert et des postes correspondants de Lachaux et du Mont-Vaudois, provient de ce que le Fort du Salbert ne possède qu'un appareil de 14 qui est affecté à la direction de Giromagny, les appareils de 0,35 T et de 0,24 sont affectés respectivement aux directions de La- chaux et du Mont-Vaudois, celui de 35 est affecté aussi à la direction Salbert-Les Roches …ne? étant la même. Le Chef du Génie ajoute que les états joints à la demande ministérielle N° 9628 du 7 mai 1895, ne donnent d'ailleurs aucune indication sur la répartition des appareils entre les postes optiques.

Commission optique de 1913 Paragraphe I. Communications existantes dès le temps de paix avec l'extérieur

Postes avec Nombre et nature des appareils de transmissions Lieux de Emplacement Distance lesquels ils dépôt du observations des Postes En réserve À recevoir en kilométrique communiquent Mis en place matériel dans la Place temps de guerre F. de Servance L24 18 km a) F. du Lomont L30 33 km Fort du Salbert F. du Montbart L24 19 km F. du Salbert F. de Chailluz L60 67 km Bat. des Roches L30 31 km F. du Mt Vaudois F. du Montbart L14 12 km F. du Mt Bat. des Roches L24 24,5 km Vaudois F. du Montbart L14 6 km F. de Lachaux F. de Lachaux F. du Lomont L24 18 km Le Petit Fortiff’Séré n°75

a) - la communication Salbert-Servance permet de communiquer avec les forts de : Château Lambert Rupt La place d'Épinal Cense-Billot et par intermédiaire de celle-ci avec : 1° Pont Saint Vincent, d'où Toul, Forts de la Meuse, Verdun (d'où Longwy et Reims) 2° Langres (Fort Dampierre)

- la communication Salbert-Chailluz permet de communiquer avec : Dijon (Fort du Mont Affrique) Langres (Cognelot)

- les communications Salbert-Montbard ou Lachaux-Montbart et Salbert-Lomont ou Lachaux-Lomont permettent de communiquer avec Besançon (F. de Montfaucon) et par son intermédiaire avec Pontarlier (Larmont)

Paragraphe II. Communications des ouvrages avec la Place et entre eux. a) Communications existantes

Nombre et nature des appareils de Postes avec transmissions Emplacement Distance kilo- Lieux de dépôt lesquels ils En réserve À recevoir en observations des Postes Mis en métrique du matériel communiquent dans la temps de place Place guerre F.de Giromagny F. du Salbert L14 8 km F. de Giromagny F. du Mt Vau- L14 8 km dois F. du Salbert F. du Salbert F.de Giromagny L14 8 km

F. du Salbert L14 8 km F. du Mt Vaudois F. du Mt Vaudois F. de Lachaux L14 10 km F. du Mt Vau- F. de Lachaux L14 10 km F. de Lachaux dois b) communications à établir à la mobilisation

Nombre et nature des appareils de transmissions Emplacement Postes avec lesquels Distance En réserve À recevoir Lieux de dépôt du matériel des Postes ils communiquent Mis en kilométrique dans la en temps place Place de guerre Château de Belfort L14 1 8,800 km F. du Mt Vaudois F. du Bois d'Oye L14 1 7 km Magasins de l'Hôtel du Gouverneur F. du Bois d'Oye F. Lachaux L14 1 6,400 km et Bâtiment 84

F. Lachaux F. du Bois d'Oye L14 1 6,400 km

Matériel en réserve dans la Place : 3 L14, 16 L14, 16 L24 dans les magasins de l'Hôtel du Gouverneur et Bâtiment 84.

Paragraphe III. Personnel appelé à mettre en œuvre ces communications

Caporaux, sapeurs affectés à l'optique Désignation des observations postes optiques active réserves total

Fort du Salbert 4 11 15

Fort de Giromagny 1 2 3 Pour les communications à établir à la mobilisation le personnel nécessaire sera prélevé sur la réserve des 61 sapeurs mobilisés à Belfort Fort du Mont Vaudois 1 7 8

Fort de Lachaux 1 5 6

Le Petit Fortiff’Séré n°76

Évolutions et améliorations

Belfort le 16 avril 1885

Rapport du Chef de Bataillon Papuchon, Chef du Génie de Belfort concernant l'installation de soutes à pétrole dans les forts munis d'observatoires (Dépêche Melle du 23 mars 1885)

Les prescriptions de la dépêche Melle du 23 mars 1885, au sujet de l'organisation d'approvisionnements d'huile de pétrole dans les forts pour la télégraphie optique donnent lieu dans l'étendue de la Chefferie du Génie de Belfort aux propositions suivantes : Il existe des observatoires de télégraphie optique dans les forts suivants : Salbert, Mont Vaudois, Servance et Giromagny. En outre, on prévoit qu'en cas de siège un poste sera placé au Château de Belfort. Ce dernier poste dont l'emplacement sera choisi au moment du besoin, contiendra sans doute deux appareils de campagne. Il importe d'assurer dans les forts précités, ainsi d'au Château de Belfort, l'approvisionnement d'huile de pétrole nécessaire à alimenter les lampes des appareils, en prenant pour base les indications du Ministre. C'est ainsi qu'il y aura lieu de créer des soutes à pétrole : 1° Au fort du Salbert pour une contenance de 6 hectolitres; 2° Au fort du Ballon de Servance pour une contenance de 4 hectolitres; 3° Au fort du Mont Vaudois pour une contenance de 5 hectolitres; 4° Au fort de Giromagny pour une contenance de 1 hectolitre; 5° Au Château de Belfort pour une contenance de 2 hectolitres. Ces soutes à pétrole seront constituées dans les forts, ainsi qu'il suit: 1° Fort du Salbert …non exposée aux projectiles. La dépense est évaluée à 450,00 F. 2° Fort du Ballon de Servance La soute à pétrole sera constituée au Ballon de Servance comme au Salbert au moyen d'une petite voûte placée dans la traverse pleine du front 2-3. Les dimensions seront les mêmes qu'au Salbert. La dépense est évaluée à 420,00F. 3° Fort du Mont Vaudois On creusera une excavation dans la descente de caponnière N-E au dessus de laquelle se trouve placé l'observatoire. Les parois de cette descente sont taillées dans le rocher. On fermera cette excavation par une porte en tôle. Les dimensions intérieures seront celles qui ont été indiquées pour la soute à pétrole du Salbert et du Ballon de Servance. La dépense est évaluée à 170 F. 4° Fort de Giromagny Une petite niche en maçonnerie dont les dimensions seront en rapport avec celle du récipient de forme inconnue qui doit contenir le pétrole, et fermée par une porte en tôle, sera placée à droite du passage qui mène à l'observatoire. - concernant le Mont Vaudois, une simple niche au sommet de l'escalier de l'observatoire sera faite (voir le plan du Registre d'attachement).

Améliorations de l'existant

Fort du Salbert

La liaison avec le fort de Chailluz (Place de Besançon) pose des problèmes liés à la distance (80 km). A l'époque où l'Armée réalise courant 1890 des campagnes de communications sur plusieurs mois, on envisage un poste spécifique pour cette liaison, blindé pour résister aux projectiles, ce qui n'est pas le cas de l'observatoire n°1.

Regardons le contenu de l'Apostille du Lt-Colonel Papuchon Chef du Génie, datée du 18 novembre 1890. "Considérations générales Par dépêche en date du 13 octobre 1890, le Ministre a prescrit de rechercher sur les pentes Ouest du Salbert un emplacement pour l'installation d'un appareil de télégraphie optique pour desservir la ligne Salbert-Chailluz, et de lui fournir avant le 1er décembre 1890 le projet définitif et l'état estimatif du poste optique à créer. Le Petit Fortiff’Séré n°77

Le temps ayant été très défavorable, on n'a pu depuis le 15 octobre apercevoir du Salbert qu'une seule fois la montagne de Chailluz le 1er novembre, ce jour là, on a déterminé approximativement l'emplacement qui paraissait le mieux convenir ; cet emplacement est au pied de la batterie Ouest enveloppe, à la limite du terrain militaire. Il restait, avant d'adopter définitivement cet emplacement, à faire des expériences de correspondance de ce point avec l'emplacement choisi à Chailluz pour l'installation du nouveau poste. Il a été convenu avec le service du Génie de Besançon qu'on installerait immédiatement sur les emplacements choisis un appareil optique dans une baraque en bois pour faire les expériences en question, tout en conservant la ligne de correspondance actuelle. Depuis il n'y a pas eu de communication possible, le temps ayant été très mauvais, ni entre les postes actuels, ni entre ceux mis en essai. Il en résulte que l'emplacement indiqué au plan ci-joint n'est pas définitif. L'emplacement définitif ne pourra toutefois être plus bas que celui indiqué, le calcul de la visibilité du nouveau poste de Chailluz montrant qu'au Salbert, il ne faut pas descendre au dessous de la cote 580 ; cet emplacement pourrait être reporté dans la même direction jusqu'au pied du talus de la batterie Ouest enveloppe, sans que le projet ci-joint subisse de modifications autrement que dans les fondations et le chemin d'accès, ces modifications seraient de peu d'importance. La dépêche Mlle du 13 octobre prescrivant d'installer dans des abris-cavernes ou des abris bétonnés les postes exposés aux coups de l'ennemi, on a été conduit à faire un projet d'abri bétonné, le terrain ne permettant pas la construction d'un abri-caverne. On a placé les trois locaux nécessaires dans le même abri pour réduire les dépenses et faciliter le service, tout en rendant la soute à pétrole indépendante du local de la machine. Les locaux pourront être fortement aérés par les gaines d'aération et celle de l'appareil solaire qui pourront servir au besoin à cet effet. Les dimensions de ces locaux sont conformes à celles prescrites par la notice jointe à la dépêche Mlle du 13 octobre. Il n'y a pas d'eau sur place, mais on pourrait disposer de 5 à 600 litres d'eau par jour de fonctionnement de l'appareil à condition d'aller la chercher dans le fort, ou à une fontaine située sur les pentes Sud-ouest.

(la source en question - Coll. A. Brolli)

L'emplacement figuré sur le projet a été recherché en dehors du fort, conformément à la dépêche Mlle, mais le Chef du Génie fait remarquer que vu cette nécessité d'installer le poste dans un abri bétonné, il y aurait moins d'inconvénients à placer ce poste dans un ouvrage annexe du fort. Son installation en un point de la batterie Ouest enveloppe donnerait de grands avantages au point de vue de la visibilité et de la facilité d'accès."

Les travaux sont donnés dans l'état estimatif et s'élèvent à la somme de 39.600,00 F, à laquelle ajouter les terrainsà acquérir, soit 10 ares à 40,00 F soit 400,00 F. Le total est donc de 40.000,00 F Les délais nécessaires pour terminer les expériences de visibilité ne permettent pas d'espérer qu'on puisse commencer les travaux sur l'exercice 1890.

On voit que cette liaison était problématique et donc peu fiable. Pour obtenir plus de lumière c'est l'époque où l'on se tourne vers l'éclairage électrique avec des lampes à arc. Ceci va imposer la présence d'un moteur et d'une dynamo et de locaux pour les abriter ainsi que le carburant du moteur. L'Armée adopte comme lampe le régulateur Cance qui est renommé pour sa stabilité. Le moteur est de la marque Tenting à gazoline et la dynamo bipolaire type Manchester. (voir plus loin)

Le Petit Fortiff’Séré n°78

Cet ambitieux projet ne verra pas le jour, par manque vraisemblable des crédits.

Il sera remplacé par le suivant : pour la liaison lointaine (67 km) avec le fort de Chailluz (Besançon) il est prévu en février 1891 d'établir un éclairage électrique. Pour cela il est nécessaire de construire une baraque.. Baraque en bois, placée dans la cour à l'Est de l'observatoire n°1, à l'intérieur se trouvent le moteur, la dynamo et le tableau distributeur. Cette installation se voulait provisoire, en attente d'un observatoire bétonné? Sur un plan ultérieur on voit que la baraque est finalement crée mais placée de l'autre coté de l'observatoire. L'héliographe est le modèle L60 à lentilles, démontable, représenté auparavant La gazoline nécessaire au moteur sera stockée dans un magasin du Génie.

Le Petit Fortiff’Séré n°79

Utilisation de l'électricité à Belfort. (Salbert, Servance…)

Pour l'éclairage à l'électricité on utilise un moteur Tenting à gazoline développé de 1887 à 1889.

Sur l'illustration jointe on voit un moteur Salomon-Tenting ; il n'est pas assuré que ce soit celui utilisé par le Génie, qui semblait avoir un seul cylindre horizontal, celui-ci en a deux pour une meilleure régularité de fonctionnement. Un gros volant moteur participe à la même tâche. Un régulateur à boules limite la vitesse du moteur. Il existe peu de documentation en ligne sur le moteur Tenting. Son utilisation ne semble pas avoir donné toute satisfaction. En effet dans le Cours de Télégraphie militaire du Capitaine Dumon, École d'Application de l'Artillerie et du Génie, de 1898, est évoqué le moteur à gazoline.

"Ces moteurs, qu'on cherche à employer pour les projecteurs électriques à la suite des expériences auxquelles on a dû se livrer pour les appareils de télégraphie optique, sont encore capricieux et délicats : ils exigent de grandes précautions pour la mise en marche, pendant la marche, voire même pendant le repos, précautions qu'on peut négliger dans les moteurs à vapeur. Le montage et l'entretien des piles, la circulation d'eau destinée au refroidissement du cylindre demandent encore certains soins qui exigent un apprentissage. Les places qui sont dotées de ce matériel doivent envoyer leur personnel, de ce fait, accomplir un stage spécial à l'école temporaire du Mont Valérien." La dynamo était un appareil Gramme du commerce qui existait en plusieurs puissances.

On voit ici une dynamo Gramme et un tableau pour l'installation des lampes Cance ici pour 8 lampes. Un ampèremètre donne l'intensité du courant ; un voltmètre fait connaître la différence de potentiel aux bornes lorsqu'on appuie sur le bouton placé au-dessous. Le rhéostat est placé dans le circuit d'excitation. Des coupe-circuits et des interrupteurs complètent ce tableau.

Ces remarquables photos viennent du fort du Saint Eynard (place de Grenoble). Elles datent des années 1880. La dynamo Gramme est une 3 kW. Les militaires sont du 4e Régiment du Génie. (clichés aimablement transmis par le propriétaire, droits réservés)

Le Petit Fortiff’Séré n°80

Sur la seconde, que j'ai reprise, on voit à gauche un héliostat, entre les deux sapeurs un appareil de fort diamètre avec sa lampe Cance, similaire à celui du Salbert. Enfin derrière le soldat de droite le tableau de distribution Cance et à sa gauche un second appareil optique du même type. Les liaisons se faisaient avec la batterie du Col Bas (Place de Saint Vincent) à 106 km et avec le Mont Verdun (Place de Lyon) à 102 km.

La baraque et la modification de l'observatoire N° 1

Dans le BO du Ministère de la Guerre. Génie. Télégraphie militaire. Volume arrêté à la date du 1er novembre 1912, on peut lire : A chaque poste optique employant la lumière électrique est affecté, ainsi qu'il a été dit, un sapeur mécanicien qui a reçu, au régiment de sapeurs télégraphistes, une instruction spéciale sur la conduite des moteurs à pétrole. Les adjudants d'administration des ouvrages où se trouve un poste optique employant la lumière électrique sont appelés à faire un stage d'instruction au régiment de sapeurs télégraphistes, de façon à être à même d'exercer en toute connaissance de cause une surveillance effective sur le poste optique employant la lumière électrique, tant sur le matériel de poste que sur le personnel chargé d'exploitation et en particulier, sur le sapeur-mécanicien chargé du fonctionnement et de l'entretien du moteur. Le courant continu fourni par une génératrice actionnée par le moteur sert à alimenter une lampe à arc. Le modèle choisi pour sa régularité de fonctionnement et la qualité de la lumière émise est de la maison Cance.

Le Petit Fortiff’Séré n°81

Le régulateur Cance

Le problème des lampes à arc était de maintenir l'arc constant malgré l'usure des charbons. De nombreux inventeurs proposaient des "régulateurs" plus ou moins sophistiqués mais complexes. La lampe à régulateur Cance, du nom de l'ingénieur-inventeur, présentée à l'Exposition d'électricité en 1881, fut très répandue, en raison de sa simplicité et de la régularité de son éclairage.

Une vis centrale V est emprisonnée entre les deux platines fixes M et N du régulateur et peut très librement tourner autour de son axe. La marche des charbons est réglée par cette vis V qui, en tournant dans un sens ou dans l'autre, détermine leur éloignement ou leur rapprochement. La solidarité entre les deux porte-charbon et la différence de mouvement qui doit exister entre eux est obtenue par un jeu de poulies reliées par une corde de transmission. L'écrou A supporte le porte-charbon positif par l'intermédiaire des deux tringles CC' qui traversent la platine M ; celle-ci leur sert de guide et empêche l'écrou A de tourner. Le porte-charbon négatif est soutenu, dans des conditions analogues, par les tringles KK'; ces dernières portent à leur partie supérieure de petites poulies b1-b2 dans la gorge desquelles passe un cordage dont le point fixe est en a1-a2 sur la platine N. Après avoir passé sur la poulie b1-b2, chacun des cordages s'appuie sur les poulies a1-a2 et vient s'accrocher en c1-c2 sur l'écrou A. Les poulies a1-a2 ayant un diamètre double de celui des poulies b1-b2, il est facile de voir qu'à tout déplacement vertical de l'écrou A, et par conséquent du porte-charbon positif, correspondra un déplacement moitié moindre, et de sens inverse, du porte-charbon négatif ; c'est bien là le but que l'on voulait atteindre puisque en courant continu l'électrode positive s'use deux fois plus vite que l'électrode négative. Comment donc obtient-on ce déplacement vertical de l'écrou A dans les deux sens? Les électro-aimants H sont embrochés sur le circuit général ; ils reçoivent le courant de la machine qui, entrant par la borne +, va du charbon positif au négatif, traverse les deux électro-aimants et sort par la borne -. La forme de ces électro-aimants est particulière. Les noyaux sont coupés en deux; la partie supérieure est fixe et formée par un tube de fer doux; la partie inférieure G est mobile; c'est un cylindre plein, également en fer doux, surmonté par une tige de laiton G' ; un ressort antagoniste R, commandé par un écrou de réglage s'oppose au rapprochement des deux pièces du noyau, rapprochement qui n'a lieu que lorsque le courant traverse l'électro-aimant. A ce moment, les pièces GG' soulèvent la plaque F, mobile autour de la vis V, et l'appuient contre l'écrou D dont, d'ailleurs, une rondelle fixe limite la course vers le bas. Ainsi, la chute de l'écrou A fait tourner la vis V de droite à gauche ; l'ascension de l'écrou D lui imprime un mouvement de gauche à droite. Pour éviter les frottements dans la mesure du possible, les écrous D et A ne sont pas taraudés à leur intérieur mais portent seulement trois goujons qui pénètrent entre les filets de la vis. Dès que les charbons sont mis en place, l'écrou A descend le long de la vis par son propre poids en faisant tourner celle-ci de droite à gauche, jusqu'à ce que la pointe du charbon positif s'appuie sur celle du charbon négatif. A ce moment, il y a arrêt, et les choses restent en cet état jusqu'à ce que le courant intervienne. Lorsque le courant, pénétrant dans le régulateur par la borne +, marche dans le sens des flèches, les noyaux G attirés, s'enfoncent dans la cavité des électro-aimants et soulèvent la plaque F qui, s'appuyant sur l'écrou D, fait remonter celui-ci. Le Petit Fortiff’Séré n°82

La vis tourne alors de gauche à droite et, dans ce mouvement, entraîne l'écrou A, le porte charbon positif s'élève, le porte-charbon négatif s'abaisse, l'arc s'établit entre les deux charbons. A mesure que les pointes de charbon s'émoussent et s'usent, l'arc s'allonge, sa résistance électrique augmente, le courant qui traverse l'électro-aimant s'affaiblit, les pièces G, moins attirées, obéissent aux ressorts antagonistes R, la plaque F suit ce mouvement, ainsi que l'écrou D, la vis V tourne de droite à gauche sous le poids de l'écrou A et les charbons se rapprochent. Comme ce double mouvement se répète à chaque fluctuation du courant, on obtient une sorte d'équilibre vibratoire qui donne au foyer sa stabilité. Pour l'éclairage public un globe diffusant enveloppe les charbons et contribue à donner à la lumière les qualités qui lui sont reconnues. En télégraphie optique l'arc est à nu. Les régulateurs Cance se montent généralement en dérivation, ce qui assure leur indépendance ; ils fournissent, sous un globe diffusant, une intensité lumineuse de 40 à 45 carcels. La durée des charbons est de huit à neuf heures. La dépense horaire est de 9 à 10 centimes selon le Bulletin de la Société d'encouragement pour l'Industrie Nationale de 1887. Il existait des puissances de 25, 40 ou 250 carcels. Le modèle décrit ici fournit 40 à 45 carcels(1) avec une intensité du courant de 7 à 8 ampères sous 40 à 50 Volts continus.

En 1892 l'ingénieur présente ce nouveau modèle, qui est peut être celui adopté par l'Armée pour les communications optiques.. Dans l'ancien modèle, l'organe de l'embrayage, composé d'une roue fixée à la vis, d'un pignon satellite à crans d'arrêt, d'un ressort d'arrêt, etc., était un peu compliqué.

Stockage de la gasoline.

Le 28 décembre 1890 une dépêche ministérielle (n° 26057) demande à connaitre les conditions dans lesquelles les réserves de gazoline sont emmagasinées aux forts de Servance et du Salbert. Ce document permet donc de savoir que Servance avait un poste électrifié. Il faudra 4 et même 5 ans pour avoir un projet que voici : " Par la dépêche rappelée ci-dessus, le Ministre demande un rapport faisant connaitre les conditions dans lesquelles sont actuellement conservés les approvisionnements de gazoline affectés aux postes optiques du Salbert et de Servance et, le cas échéant, des propositions en vue d'apporter aux installations existantes les modifications nécessaires Poste du Salbert. La gazoline est déposée dans la casemate 7 du bâtiment a du fort, affectée à deux officiers en temps de guerre. Cette situation ne doit être conservée que comme un expédient provisoire, à peine tolérable en temps de paix est inadmissible en temps de guerre. La nécessité de créer des locaux spéciaux s'impose. L'observatoire n°1 de télégraphie optique fonctionnant à la lampe électrique et correspondant avec Chailluz est installé au Nord-est du fort, et dans la cour de la batterie annexe, sur un massif de terrassements insuffisant maintenant pour mettre le poste à l'épreuve. Les rayons lumineux suivent des gaines, en maçonnerie. L'observatoire n°2 situé à environ 80 m à l'Est du n° 1, communique avec la batterie de Servance, est installé dans les mêmes conditions, mais avec gaines coffrées en bois et il fonctionne à la lumière solaire ou au pétrole. Le moteur et la dynamo fournissent la lumière électrique à l'observatoire n°1 est installé dans une baraque en bois située entre le fort et l'observatoire, près de la contrescarpe. Le Chef du Génie propose d'installer les approvisionnements de gazoline dans deux niches qui s'ouvriraient dans la contrescarpe, laquelle est avec voûtes de décharge. On laisserait trois arceaux entre les deux à aménager de manière à se réserver la possibilité d'établir ultérieurement, à égale distance des deux magasins une casemate de contrescarpe pour abriter le moteur et la dynamo, dont l'abri actuel est à la merci d'un projectile du plus petit calibre.

(1) Le carcel est une des premières mesures d'intensité lumineuse. Son origine vient de la lampe Carcel (du nom de son inventeur) qui avait un bec de 12 mm de diamètre brulant 42 g d'huile de colza par heure. Le carcel vaut 9,71 candelas, autre unité de mesure. Le candela (cd) est l'Intensité lumineuse, dans une direction donnée, d'une source qui émet un rayonnement monochromatique de fréquence 540.1012 Hz, et dont l'intensité énergétique dans cette direction est de 1/683 watt par stéradian. Une unité plus récente que le carcel est la bougie décimale (MTS) qui équivaut à 1/10e du carcel. Le carcel-mètre est l'éclairement produit par un carcel sur un écran placé à un mètre de distance. Une salle brillamment éclairée offre en ses divers points des éclairements de 1 à 4 carcels-mètre. La même salle éclairée par la lumière du jour avec des ouvertures moyennes a des éclairements pouvant atteindre 25 carcels-mètre.

Le Petit Fortiff’Séré n°83

Chacune des deux niches aurait 4 m de profondeur sur 2 de largeur. La porte d'entrée serait munie à l'extérieur d'un vantail en tôle pleine et à l'intérieur d'un vantail en tôle vitré à la partie supérieure. Une cheminée surmontée d'un lanterneau assurerait la ventilation. La toiture du lanterneau serait cadenassée. La voûte devant se trouver au niveau de la séparation du roc franc et de la terre ou du roc feuilleté, on sera forcé d'exécuter les déblais à ciel ouvert, ce qui accroit la dépense dans une notable proportion. La pierraille provenant des déblais de roc sera placée à la main autour des maçonneries de manière à les protéger à la fois contre les projectiles et contre les eaux d'infiltration. Poste de Servance. Conformément aux prescriptions contenues dans la dépêche ministérielle n° 24952 du 11 décembre 1894, le Chef du Génie présente un projet complet d'installation pour le moteur et la dynamo du poste de Servance. Les propositions contenues dans ce projet répondent, en ce qui concerne ledit poste, à la dépêche n°26052 précédente. Les approvisionnements de gazoline sont actuellement conservés à Belfort, faute de local dans le fort. État estimatif annexe montant à la somme de 9700,00 F. le 19 janvier 1895."

Là aussi, ce projet intéressant restera lettre morte.

Interventions au cours du temps

Communication acoustique

Fort du Salbert

Dans une note de service, le 19 avril 1898 le Colonel Mousnier, Directeur du Génie écrit à Monsieur le Lieutenant- colonel Chef du Génie à Belfort :

Le Petit Fortiff’Séré n°84

État estimatif des travaux à exécuter pour l'amélioration des postes optiques. Installer une communication acoustique avec la salle des machines du poste optique du fort du Mont Salbert. Travaux et fournitures prévus aux marchés : Plomb neuf en sable ou tuyaux Pour le tuyau acoustique souterrain 74,100 kg à 0,60 le kg, 44,40 F, rabais 5,35 F, reste 39,11 F Travaux et fournitures non prévus au marché Tuyau en caoutchouc et porte-voix en bois, deux à 5,00 F soit 10,00 F Récapitulation de la 1ère partie, total 49,11 F Frais imprévus 0,89 F, montant total 50,00 F

Les gaines

Fort du Mont-Vaudois

Dans une note du Capitaine du Génie, du 25 avril 1898 on peut lire :

État des lieux Les gaines sont placées dans une traverse en remblai ; le jour est à 3 m au dessus du terrain naturel ; le ciel est surmonté de 4 m de terre. Le coffrage est formé de planches de chêne de 54 mm d'épaisseur, posées sur un lit de pierres sèches. 1ère solution On a prévu la réfection des gaines dans les mêmes conditions, en utilisant les planches qui seraient reconnues en bon état, et en plaçant sur les pierres sèches des madriers de chêne longitudinaux, de manière à éviter tout nouveau tassement. 2ème solution Si on employait du béton de ciment de 0,20 m d'épaisseur, appuyé sur des fers I soutenus eux-mêmes par une maçonnerie de pierres sèches, la dépense prévue serait augmentée de 350 F (soit 800 F pour la 1ère partie de l'État Estimatif) L'épaisseur de 0,20 semble d'ailleurs non minima étant donnée la surcharge de terre. La gaine en béton ne pouvant d'ailleurs affecter la forme d'un tube. Le 13 juin 1898, Le Capitaine chargé de la télégraphie demande des précisions au sujet des gaines. Le 16 juin 1898, le Commandant Sibre, Chef du Génie à Montbéliard écrit à Monsieur le Capitaine chargé du Service télégraphique, sous le couvert de Monsieur le Chef du Génie: Mon cher Camarade, J'ai l'honneur de vous adresser une note donnant les renseignements que vous désirez connaitre, au sujet de l'emploi au fort de Lachaux de tuyaux en ciment pour la construction des gaines du poste optique. On a employé les mêmes tuyaux en 1897 au fort du Montbart. Les conditions de prix ont été les mêmes à peu près que pour le fort de Lachaux. Voici les questions et les réponses de la note évoquée.

1° Diamètre intérieur de la gaine en béton, sa forme (circulaire ou carrée), épaisseur du béton ? - Tuyaux à section circulaire, de 0,70 m de diamètre intérieur, et de 0,07 m d'épaisseur à emboitement. 2° La gaine est-elle placée dans un terrain en remblai, et dans le cas de l'affirmative, comment a-t'on soutenu les divers tronçons des tubes? - Les gaines sont posées dans le massif des parapets. On a déblayé les terres jusqu'au niveau où devaient être posés les tuyaux. Ceux-ci ont été simplement juxtaposés bord à bord, les joints faits au ciment. 3° Calibre de l'appareil auquel s'applique la gaine? - Les tuyaux de 0,70 m conviennent aux appareils les plus considérables, tels ceux de 0,45. 4° Prix de revient approximatif de la gaine en béton, par mètre courant? - On a acheté 25 m de longueur de tuyaux pour les gaines du poste optique de Lachaux ; l'entrepreneur les a fait venir de l'usine de Danjeux (Haute Marne) société anonyme des ciments de laitier de Danjeux. Prix de revient à pied d'œuvre (c'est à dire dans la cour ou la place d'armes du fort) est 11 à 16 F le mètre. J'indique 11 F chiffre minimum ; par suite d'un défaut d'entente nous avons payé 16 F. Prix de transport des tuyaux sur le parapet, pose, terrassement, etc. 14 F le mètre. Prix total, par mètre 25 à 30 F Le Petit Fortiff’Séré n°85

Dans la même note de service du 19 avril 1898 on lit : Avant de transmettre le rapport concernant la réfection des gaines du poste optique du Mont Vaudois, j'ai l'honneur de prier M. le Lt Colonel Chef du Génie de me faire connaitre à quelle dépense devait s'élever la réfection des dites gaines en béton de ciment. Un petit croquis serait utile.

Ci-joint en communication la minute (l'original est peu lisible) du rapport avec état estimatif daté du 18 avril 1898 2e partie Réfections des gaines du poste optique du fort du Mont-Vaudois Travaux et fournitures prévus au marché 1er Lot Terrassier A enlever les anciens coffres et au damage des nouveaux terrassements 70 f 0,36 25,20 F Déblai de terre ordinaire (jeté à 4 m horizontalement) reprise et jetée à un relais et régalé L'enlèvement et la remise en place des terrassements 90 m3 0,77 69,30 F Talutage (à la dame) 95 m3 0,4 38,00 F Maçonnerie en pierres sèches pour drainage 3 m3 8,85 25,55 F Total 158,15 F Rabais 25,30 F, reste 132,85 F 2e Lot Charpentier Remplacer les anciens coffrages 60 h 0,69 41,4 Charpente de chêne équarri (à vives arêtes) avec assemblages Le nouveau coffrage 1,5 m3 169,00 304,20 F Total 345,60 F Rabais 63,95 F Reste 281,65 F Récapitulation de la 2e partie 1er Lot 132,85 2e Lot 281,65 Total 414,50 F Frais imprévus 35,50 F Total 450,00 F Une des gaines au Mont Vaudois

Liaison Lomont-Montfaucon

En date du 24 juin 1905 est présenté un projet de poste optique pour l'installation définitive au fort du Lomont de l'appareil à lentilles de 0,50 desservant la direction de Montfaucon.

Avis du Général de Division Gouverneur, Commandant supérieur de la défense :

Comme le font remarquer le Chef et le Directeur du Génie, la partie antérieure de l'abri h de la batterie Sud du Lomont, convient très bien pour installer l'appareil optique destiné à assurer la communication avec le Fort de Montfaucon. Le service de l'artillerie peut parfaitement se passer de ce local, l'armement de la batterie Sud ayant été réduit. Ce service a reconnu qu'il pouvait finalement céder plusieurs abris de l'ouvrage. Une conférence préalable n'est donc pas nécessaire, ainsi le croit le Directeur du Génie. Ultérieurement, une révision de la répartition des différents locaux pourra être prescrite, si on le juge utile. Mais pour le moment, on peut donner suite au projet tel qu'il est présenté. Il est désirable qu'il soit mis à exécution cette année. Belfort, le 29 juin 1905 Décision du Ministre, Paris, le 26 juillet 1905 Les conclusions de M. le Gouverneur de Belfort sont approuvées Le Petit Fortiff’Séré n°86

Communiqué à M. le Général Commandant le 7e Corps d'Armée, avec prière d'inviter le service local du Génie à adresser sans retard une demande d'allocation de fonds pour l'exécution du travail.

Le fort de Roppe

Il existe sur le flanc Sud-ouest du magasin à poudre une construction bétonnée de 1,60 m de large sur 1,85 m de profondeur dont l'axe est orienté exactement vers l'observatoire n°2 du fort du Salbert. Il semble bien que ce soit l'organe qui était prévu à la mobilisation pour assurer les communications optiques avec le Salbert et dont la direction est en pointillés sur le plan de ce dernier, vu au début. Dans sa casemate il n'y a aucune gaine en direction de Roppe. Les deux postes communiqueraient donc à façade ouverte.

(Date de construction et mise en place de l'héliographe non définies dans les archives consultées)

Le Petit Fortiff’Séré n°87

Carte des réseaux optiques de forteresse vus ci-dessus

Les liaisons à établir au moment de la guerre sont tracées en pointillés. (Fond de carte d'après Mappy)

Le Petit Fortiff’Séré n°88

Communications optiques à la frontière belfortaine de l'Est

Organisation d'un réseau optique à la frontière de l'Est. (Note de service du Général de division, Gouverneur de Belfort du 17 septembre 1890).

En octobre 1890, l'Armée envisage d'établir des postes de campagne autour de Belfort, pour vraisemblablement être avertie de mouvements ennemis. Quatre postes de premier ordre sont choisis sur des points hauts, le Ballon d'Alsace à la Vierge du Ballon, Les Plaines au nord de Riervescemont (Tremontkopf, altitude 1087,4 m), Les Errues vers Bethonvilliers (altitude 406 m), Le Fahy en forêt de Florimont (altitude 510,4 m) Trois postes de second ordre sont placés au fort de Roppe (altitude 511 m), à Étueffont-Haut au Mont Bonnet (altitude 566,5 m), à Petit-Croix (altitude 376 m).

L'emplacement du poste du fort de Roppe est sur la plongée de la batterie supérieure, à l'Est du fort. Il pourrait aussi être placé sur le coté Est du massif central. La commission préconise des héliostats L24, des tentes pour mettre les appareils à l'abri de la pluie et des héliostats pour les postes de 1er ordre. Il serait bon d'avoir dans chaque poste un télégraphiste gradé pour remplir les fonctions de chef de poste. Aux Plaines notamment celui-ci aura à s'occuper des communications optiques mais encore de faire vivre son détachement. Il est demandé un mulet pour chaque poste pour l'installation et au départ du poste. Ce mulet aidera au ravitaillement aux Plaines, au Ballon d'Alsace et aux Errues pendant le fonctionnement. Il pourra être logé à la ferme du Ballon, à la maison des Plaines et aux Errues pour chacun de ces postes et à la ferme du Fahy pour la station du Fahy (ou Fays).

Ferme des Plaines, à la frontière (détruite aujourd'hui)

Le Petit Fortiff’Séré n°89

Ferme du Fahy qui fut un temps café-restaurant

L'Instruction ministérielle communiquée sous le titre "Documents du poste" prescrit que les militaires des stations optiques éloignées de toute habitation soient pourvus d'un sac tente abri avec accessoires. Ils sont nécessaires pour les hommes de tous les postes de 1er ordre, excepté ceux du Fahy qui ont les ressources suffisantes pour se loger à la ferme du même nom. Il y a lieu d'ajouter par poste un bidon de 5 litres de pétrole. Transmis le 23 octobre 1890 par le Lieutenant-colonel du Génie

Le chef du Génie s'est rendu sur place. Voici ses conclusions.

"Par temps clair toutes les stations communiquent bien.

Stations de premier ordre.

Ces stations conviennent bien au rôle pour lequel elles sont proposées. Elles ont des vues très étendues. Aux Errues, quoique la station soit peu élevée on aperçoit très bien la région frontière. Au centre de la trouée, et du Fahy on aperçoit très bien cette région et celle au-delà de la frontière allemande dans le voisinage de la Suisse (région d'Altkirch) Il est probable que le Ballon d'Alsace et des Plaines seront de temps en temps dans la brume. En automne cela arrivera souvent, mais il en serait de même en tout autre point de la chaîne des Ballons. La station des Plaines ne peut pas communiquer avec celle des Errues, mais la communication entre les deux points extrêmes du réseau de la 7e Région pourra se faire néanmoins, soit par l'intermédiaire des Plaines, soit par l'intermédiaire des Errues. La distance des Plaines au Fahy étant de 34 kilomètres, distance un peu supérieure à celle indiquée comme limite par l'Instruction Ministérielle, on propose d'équiper chacun de ces postes d'un appareil de 24 à lentilles. Le Capitaine propose également de relier ainsi les stations :

Ballon d'Alsace. Relier cette station au bureau téléphonique de l'Hôtel du Ballon, au moyen de deux plantons pris parmi les aides désignés. Les Plaines. Comme on ne peut mettre cette station avec les bureaux télégraphiques les plus voisins, ni par plantons, ni par voie optique, on propose de la relier avec le téléphone de l'Hôtel du Ballon, par une communication téléphonique, ou bien avec le fort de Roppe qui possède un bureau télégraphique par voie optique ; dans ce dernier cas, Roppe deviendrait une station de 1er ordre. Les Errues. Relier la station avec le bureau télégraphique de Fontaine, par une ligne téléphonique. Le Fahy. Relier la station avec le bureau télégraphique de Delle par une ligne téléphonique.

Station de 2e ordre.

Les stations de Roppe et Étueffont-Haut conviennent bien au but pour lequel elles sont proposées, celle de Petit-Croix a un horizon assez restreint, mais l'emplacement indiqué est de tous les points du voisinage, celui qui convient le mieux pour être rattaché au réseau des postes de 1er ordre, cette station communique bien avec celle du Fahy. L'occupation du poste de 2e ordre prévu au fort de Roppe présenterait l'avantage de relier les stations de 1er ordre des Plaines et des Errues et d'avoir un bureau télégraphique sous la main."

Ce texte est repris des archives du SHD - cote 6V 4678. On ne sait pas, en l'état, si ces demandes furent suivies d'effet.

Le Petit Fortiff’Séré n°90

Ci-dessus est restitué le tracé entre les stations à partir d'un plan original, assez délicat à reproduiresans distorsion.

Le Petit Fortiff’Séré n°91

Organisation du service.

Dans un rapport daté du 16 mai 1891, le Chef du Génie, Lt-Colonel Papuchon, suite à la note du 4 mai du Général commandant le 7e Corps, précise l'organisation du service de télégraphie optique et donc la constitution dans les plus brefs délais des approvisionnements. Car en vertu du §4 de l'Instruction confidentielle du 5 février 1891 pour l'organisation etle fonctionnement du réseau optique de la frontière du N.E. l'achat et l'entretien du matériel incombent à son service. Le Chef du Génie fait remarquer que d'après l'article 6 de cette même Instruction, ce serait plutôt au service de la Télégraphie militaire de fournir ces approvisionnements. On n'a pas encore bien déterminé l'organisation générale. (sic)

Un tableau détaillé est joint, chiffrant la dépense. Le 15 juin 1891 le 151e Régiment d'Infanterie fait en ce sens une demande de matériel nécessaire pour l'organisation du Réseau optique de la frontière du Nord-est, demande qui remplace celle faite précédemment par la compagnie 7/11 du Génie. Le matériel est fourni par le service du Génie. Bien qu'il s'agisse des postes de 1ère série à équiper, à Servance, aux Plaines, aux Errues, le Fay et au fort de Roppe, la liste peut s'appliquer à d'autres postes : 1 Instruction III sur la télégraphie optique ; 4 carnets de dépêches de départ ; 4 carnets de dépêches d'arrivée et de transit ; 200 enveloppes (8 f le 1000) ; 1 papier d'écolier (main) (0,30 f pièce) ; 2 porteplumes (0,10 f pièce) ; 20 plumes (2 f le cent) ; 2 crayons noirs (0,10 f pièce) ; 2 crayons gras bleus (0,40 f pièce) ; 1 canif (2 f pièce) ; 1 petite bouteille d'encre noire (0,60 f pièce) ; 40 litres de pétrole (0,50 f le litre) ; 0,60 mètres de mèches (0,30 f le mètre); 2 paquets de bougies (1,20 f le paquet) ; 2 boites d'allumettes (0,10 f la boite). Dans la demande du 20 mai, on dit qu'il y aurait lieu d'ajouter 4 bidons de 10 litres (4 f le bidon) dans la caisse prévue à l'Instruction III, caisse qui contiendrait les 4 bidons de pétrole dans un compartiment et les articles de bureau dans un autre. (Caisse à 10,00 f) La dépense par poste serait ainsi de 54,88 f. Demande signée et contresignée par pas moins de 5 personnes, le Sous-officier d'Habillement, le Trésorier, le Capitaine, le Major et le Colonel !

Annexe

Qu'est devenue cette maison des plaines? Une recherche de cartes postales d'époque sur Internet montre 2 fermes, une dite du Wissgruth (orthographe changeante) l'autre dite des Plaines. Mais les légendes mélangent abusivement l'une et l'autre. Si la première existe encore, reconstruite à l'identique suite à un incendie, l'autre a disparu au XXe siècle. Il existait 2 fermes avant la défaite de 1870 sur le chaume du Wissgrut. À la création de la nouvelle frontière, ces deux fermes, à 300 m l'une de l'autre sont ennemies. Celle du Wissgrut au Nord-est est allemande, celle des Plaines au Sud-ouest reste française. Sur le plan militaire de l'emplacement du poste des Plaines vu ci-dessus, la ferme allemande n'est pas visible. Sur le site Geoportail on retrouve les traces de la maison des Plaines. Sur place il ne reste que quelques cailloux. On peut alors avec ces deux documents placer approximativement le poste optique sur la carte IGN. Quant à la ferme ex-allemande du Wissgrutt, elle existe toujours, c'est une auberge de montagne.

La limite de commune de Sewen, en trait mixte, suit l'ancienne frontière. Même si les postes aux frontières furent installés, les structures prévues n'ont guère du laisser de traces.

Jean-Pierre ZEDET - 2018 Le Petit Fortiff’Séré n°92

Retour sur le canon-revolver Hotchkiss de 37 mm.

Par Jean-Pierre ZEDET

Dans mon livre sur le canon-revolver de 40 mm, j'ai évoqué l'utilisation de cette autre pièce de 37 pour le flanquement des fossés des forts. Si les allemands, qui étudiaient ce canon dès 1881, l'ont l'adopté dans leurs forts dès les années 1884-85, les français ne semblaient avoir fait de même qu'à partir de 1910 pour utiliser ceux de la Marine déclassés. Exhumés des archives du SHD par Julie et Cédric Vaubourg, un dossier apporte un éclairage nouveau. Un rapport d'essais effectués à Belfort de deux canons-revolvers, dans un fort non cité, montre que dès 1882, l'armée avait des CR37 propres à l'utilisation en fortification. Ceci en parallèle avec des CR40, testés aussi à Belfort, au fort de Roppe, àla même époque. On n'en sait pas plus, pour l'instant, sur le but poursuivi et sur les suites données. Moins puissant, mais aussi moins coûteux, aisément déplaçable, le calibre 37 pouvait être envisageable pour des petits ouvrages. Avait t'on même mis en concurrence les deux calibres, les archives sont pour l'instant muettes. S'il y avait eu fabrication de masse de 37 mm dès cette époque pour en armer des forts, on en aurait trace dans les états d'armement. Les capacités balistiques très supérieures du calibre 40 adopté dès 1879 ont du forcer le choix des artilleurs.

Voyons donc ce que dit ce rapport du Chef d'Escadron Roger, Directeur de l'Atelier de Construction de Puteaux, qu'il adresse au Ministre de la Guerre, conformément à la dépêche N° 30298 du 20 juillet 1882. Les essais portent sur deux canons, l'un sort des ateliers de M. Hotchkiss et porte le N°257, l'autre a été usiné à Puteaux et est classé sous le N°103.

Canon N°257.

Au terme d'essais de tir, il est constaté des détériorations qui ne sont pas anodines sur le canon Hotchkiss: 1° Gonflement très prononcé à 340 mm de la bouche dans le tube N°1 (pas 1,00m) en arrière du disque de volée en bronze. 2° Gonflement très prononcé à 235 mm de la bouche dans le tube N°2 (pas 1,34m) en avant du disque en bronze.

Ces gonflements, dont le Chef Roger a fait relever les empreintes à la gutta-percha, ne présentent ni strie, ni rayage, ni bague sur la surface intérieure du tube. Il tente de trouver une explication: "Dans les canons de M. Hotchkiss le gonflement me parait dû au gonflement même du projectile qui s'est manifesté soit dans des tubes de matériel inférieur, soit dans des tubes de rayures à pas raccourci, soit dans des tubes obstrués en partie par la présence accidentelle d'un corps étranger dans l'âme, comme cela se produit dans les armes portatives. Il est à remarquer, en effet, que la pression des gaz de la poudre s'exerce sur le culot de la boite à mitraille. Les premières balles du coté de la bouche du canon, ne reçoivent leur mouvement que par l'intermédiaire des balles du centre.

En vertu de leur inertie, ces balles résistent à la mise en mouvement et à l'augmentation de vitesse qui se fait sentir depuis le départ jusqu'à la sortie de la bouche des canons. Cette inertie engendre une pression entre les premières et les dernières balles. Il y a donc formation de facettes, comme cela se constate sur les balles ramassées, et glissement des balles les unes sur les autres. Il en résulte un raccourcissement de la boite, en même temps qu'un gonflement. Le Petit Fortiff’Séré n°93

On peut vérifier en effet que les enveloppes des balles sont plissées transversalement, et qu'elles prennent la rayure.

4 photos tirées de mon livre, restes trouvés dans les fossés du fort de Giromagny (CR40)

Ce gonflement se produit du reste progressivement et à peu près, suivant la même loi que l'augmentation de vitesse imprimée par la poudre, tant que le glissement de la boite se fait régulièrement. Mais si pour une raison quelconque ce glissement éprouve une résistance un peu brusque, il se produit un véritable coup de bélier d'où il résulte : 1° gonflement de la boite, augmentation de pression des gaz. 2° La pression des gaz augmentant, la vitesse de combustion du reste de la charge augmente dans de grandes proportions. La pression acquiert par suite de ce dégagement brusque de gaz une valeur considérable qui suffit pour expliquer le gonflement constaté. Ce gonflement se produit sous un aspect identique dans les fusils, quand on laisse dans le canon le bouchon en bois destinéà le préserver, ou bien quand on découpe dans le sol, en y appuyant le bout du canon un disque de boue. Mais cette hypothèse me parait devoir être écartée, étant donné le soin particulier avec lequel les expériences ont été dirigées, et la vérification préalable des tubes au moyen d'un refouloir. Il me parait d'ailleurs évident qu'un gonflement initial si petit qu'il soit, doit prendre une importance nouvelle à chaque coup, par suite de la tendance permanente du projectile à l'extension. Dès lors il n'est pas impossible, bien que l'arrêt dans le fonctionnement n'ait été constaté qu'au 40e coup tiré, c'est-à-dire au 8e coup par tube, que la dégradation n'ait produit qu'un élargissement restreint, imputable seulement à la résistance opposée au glissement, par les rayures des deux premiers tubes. Il est à remarquer en effet que ce sont les tubes N°1 et 2 qui ont été dégradés, c'est-à-dire ceux pour lesquels le pas de la rayure est le plus court (1,00 m pour le tube N°1 et 1,30 m pour le tube N°2). On peut constater également que le tube N°2 à rayure plus allongé, a été gonflé plus près de la bouche que le tube N°1. Il semblerait donc que le gonflement progressif de la boite à balles, atteigne certaines limites par suite de l'empreinte de plus en plus profonde dans les rayures, d'où nait un ralentissement du projectile qui engendre à son tour un gonflement nouveau. C'est la répétition de ces influences réciproques du tube sur la boite à balles, et de la boite à balles sur le tube, qui se traduit à un moment donné par des gonflements, dans la partie la moins épaisse du tube, à des distances de plus en plus rapprochées de la bouche, à mesure que le pas des rayures s'allonge. Si cette hypothèse n'était pas admise, il faudrait supposer que les tubes N°1 et N°2 se trouvent par rapport aux autres tubes du faisceau dans des conditions inférieures de constitution moléculaire ou de fabrication. 3° Le disque antérieur en bronze du faisceau présente des traces de rupture, dues aux gonflements que nous venons de signaler, à hauteur du tube N°2. On peut admettre que l'étranglement produit par ce collier dans les tubes dont le gonflement a commencé à se manifester, ait eu une certaine influence dans l'agrandissement de cette déformation. Mais on ne peut en déduire aucune modification pour le serrage de ce disque, qui a été calculé de manière à déterminer la position respective des différents tubes entre eux, et à en assurer leur parallélisme."

Le gonflement impacte donc, d'une manière difficilement supportable la durée de vie et l'efficacité du canon.

Le rapport conclut donc:

Le Petit Fortiff’Séré n°94

"La seule observation qu'on puisse formuler à cet égard, est l'importance qu'on doit attacher au choix sévère d'un acier très résistant pour la fabrication des tubes." On peut ajouter qu'avec des charges de poudre de respectivement 80 et 53 grammes, l'épaisseur supérieure des tubes du 40 par rapport au 37, fait qu'aucun incident de ce type ne semble signalé sur cette première pièce.

"4° La plaque de tir qui n'était pas trempée, comme celle du canon N°103, présente de nombreuses détériorations près du passage du percuteur, qui sont dues aux projections de gaz autour de l'amorce, projections dont l'effet s'est fait sentir jusque sur le fond du plateau de fermeture."

Canon N° 103.

Le Canon-revolver de Puteaux a donné lieu aux observations suivantes :

- 1° On a observé des stries nombreuses perpendiculaires à l'axe du canon, le long d'une des génératrices supérieure AB du piston-chargeur. Cette dégradation est produite par le choc du culot des étuis contre le piston-chargeur, avec la disposition spéciale du couloir de chargement proposé par le Dépôt Central. D'après les tables de construction, l'inclinaison du couloir de chargement C a été déterminée de manière à parer cet inconvénient. Les cartouches M sont maintenues tangentiellement au fond du couloir C d'une part et d'autre part au volet de chargement V, dont le but est d'assurer la répartition des munitions et aussi de préserver le piston-chargeur contre les atteintes des culots. Dans l'affût proposé par le Dépôt Central, l'inclinaison du fond du couloir a été complètement modifiée. Les dimensions de cet accessoire ont été considérablement augmentées afin de permettre la disposition préalable d'un plus grand nombre de cartouches ; et le fond a été tenu beaucoup plus rapproché de l'horizontale que celui du modèle des tables. Il s'ensuit que les deux faces de l'angle dièdre formé par le couloir et par le volet de chargement faisant entre elle un angle plus grand, les cartouches M' placées sur le couloir sont venues porter directement par leur culot sur le piston-chargeur sans être arrêtées par le contact du volet. Bien que cette mutilation soit moins à craindre avec le culot en laiton de la cartouche proposée par l'Atelier de Puteaux, qu'avec le culot en acier rapporté de la cartouche primitivement adoptée, le Chef d'escadron crois néanmoins devoir revenir dans la suite du présent rapport, sur les mesures à prendre pour éviter toute espèce de dégradation de ce genre. - 2° L'angle trièdre A supérieur et antérieur gauche du bec du crochet du percuteur se trouve assez fortement sollicité. Cette usure prématurée est due au peu de résistance que présente un seul point A tel que le sommet d'un angle, aux efforts souvent violents qui se produisent contre la face droite du galet, dans le mouvement de déclanchement du percuteur P. on sait que ce déclanchement résulte du mouvement de rotation rétrograde (le mouvement rétrograde de la manivelle est le mouvement de rotation inverse du mouvement des aiguilles d'une montre) de la manivelle, destiné à dégager après leur extraction les cartouches ayant donné lieu à des ratés. Indépendamment de ce cas d'extraction où il est nécessaire de ramener en arrière la manivelle de manœuvre, on peut être exposé à une rotation brusque et irréfléchie de cette manivelle en sens inverse, par le seul fait de l'ignorance ou dela maladresse. La tranche arrière de la came de percussion C venant alors frapper avec brusquerie sur le bec du crochet du percuteur, il en résulte un écrasement progressif du sommet en question. - 3° La cloison avant de l'ouverture d'éjection se trouve légèrement échancrée et bosselée en plusieurs points de l'arête supérieure. Cette mutilation peut être attribuée au choc contre cette arête, des cartouches vérificatrices maxima et minima en acier, quand elles viennent buter par leur tranche antérieure contre la cloison, au moment de leur extraction.

Le Petit Fortiff’Séré n°95

Pour éviter cet inconvénient on pourrait limiter l'emploi des cartouches de réception, à la vérification du faisceau et dela culasse montés sur châssis, avant la mise en place des différentes pièces du mécanisme. L'extraction de ces calibres se ferait alors au moyen du refouloir, par le logement du piston-chargeur dans la culasse. On déterminerait facilement à la main la rotation du faisceau correspondant à l'introduction ou au refoulement de la cartouche employée. - 4° Une des 4 vis qui servent à relier l'S en acier à la crémaillère d'extraction, s'est dévissée pendant le tir, de sorte que la tête de cette vis venant buter contre la tranche de la manivelle d'extraction, a entravé le fonctionnement du mécanisme. On a été obligé de la remettre à fond. Je propose plus loin un moyen simple de remédier à cet inconvénient.

Propositions du Chef d'Escadron.

En comparant le fonctionnement des deux appareils, il reconnait que l'épreuve de tir subie par le canon N°103, a révélé certaines imperfections de détail auxquelles il propose de remédier de la manière suivante : 1° Afin d'éviter les atteintes relevées sur le piston-chargeur, dans le cas où l'inclinaison du couloir ne serait pas conforme aux indications des tables, comme cela a lieu dans le nouvel affût du Dépôt Central, et même dans le cas où par suite de la suppression du couloir on serait obligé d'effectuer à la main le chargement des cartouches, il est proposé d'augmenter les dimensions du bec du piston dans les proportions suivantes : (contour a, b, c, d, e)

Le volet de chargement N se trouverait ainsi soulevé à une hauteur telle, que la cartouche C mise à la main dans la culasse, sera arrêtée par son contact, ou par le contact de la joue gauche de l'auget, avant que son culot ne soit porté sur le bronze du piston P. 2° Le changement des dimensions du bec du piston-chargeur entrainerait forcément l'élargissement de son passage dans la culasse, pour lequel nous proposons le tracé ci-contre. Les modifications indiquées à l'encre rouge correspondent aux augmentations du bec en tenant compte du jeu de 1 mm que l'on peut conserver.

______

1° Afin d'éviter l'écrasement de l'angle supérieur antérieur du crochet du percuteur contre la face droite du galet, dans le mouvement arrière de la manivelle de manœuvre, par suite de la pression exercée sur le crochet par la tranche postérieure de la came de percussion, le Chef propose d'adapter pour le percuteur le tracé ci-dessous.

On voit que la face gauche ab du bec supérieur vient prendre appui toute entière contre le galet G, et présente à la pression dont il s'agit, une résistance infiniment supérieure à la résistance actuelle. Ce contact du percuteur contre le galet, dans le cas qui nous occupe, est d'ailleurs de première nécessité, afin de répartir sur la face droite de ce galet, l'effort exercé par la came de percussion C, dans le mouvement de rotation rétrograde. C'est le meilleur moyen d'empêcher que cette pression ne soit transmise par l'intermédiaire du crochet contre le bord supérieur de l'oreille O du logement E du talon du percuteur, qui est en fonte, ce qui amènerait certainement la rupture de cette oreille. 2° Comme conséquence de la transformation précédente, il est proposé de déterminer la tranche de la came du percuteur, de la façon suivante : (fig1)

En supprimant ainsi le congé de raccordement du bec du crochet du percuteur avec le galet (fig2), le contact de la came avec le percuteur se fera par suite suivant un plan, au lieu de se faire suivant une droite, et la pression sera répartie sur toute cette surface.

Le Petit Fortiff’Séré n°96

3° Pour éviter les dégradations qui se sont produites sur la plaque d'appui de tir du canon N°257, est proposé une trempe légère de cette plaque à l'huile. L'expérience qui a été faite de cet essai avec le canon N°103 a pleinement réussi et suffit à déterminer la résistance du métal aux projections des gaz, dont l'effet s'est fait sentir jusque sur le fond du plateau de fermeture. 4° Les vis qui servent à relier l'S en acier à la crémaillère d'extraction, ne sont pas fixées suffisamment. De leur dévissage pendant le tir, peut résulter un arrêt dans le fonctionnement du mécanisme, ainsi que cela a eu lieu. Je propose d'assurer leur stabilité au moyen d'une goutte d'étain pour en déterminer la soudure. On étamera par exemple chaque vis et son logement dans l'S, puis on chauffera la pièce toute montée jusqu'à la température de fusion de l'étain, constatée par une goutte de ce métal placée sur la tête de chaque vis. Observation

Il serait indispensable que ces diverses modifications fussent étendues à toutes celles des pièces énumérées dans le présent chapitre qui ont été déjà fabriquées. Les modifications à apporter à ces pièces sont faciles à effectuer au point de vue du travail mécanique. L'allongement du bec du percuteur pourrait se faire aisément au moyen d'une pièce rapportée, ajustée dans le bec actuel préalablement entaillé, brasée et maintenue à l'aide de deux rivets. L'élargissement du logement de ce bec dans la came du galet, se ferait sans rien changer à l'outillage actuel ; le congé de raccordement serait seulement terminé à la lime, après le travail de fraise, afin d'obtenir une arête vive d'intersection avec la douille du logement de l'arbre du mécanisme. Quand à la soudure des vis à l'étain, les dispositions nouvelles prises à cet égard n'entraînent aucun changement d'aucune sorte dans l'usinage de l'S en acier. On voit en somme que l'adoption des modifications à apporter aux pièces déjà terminées n'entrainerait aucune complication ni aucune dépense et que la résistance ainsi obtenue dans le fonctionnement des organes est tout à fait comparable à celle des pièces nouvellement construites.

Conclusions

A la suite de l'examen attentif des deux canons-revolvers tirés à Belfort, le Chef d'Escadron Roger propose de modifier la construction actuelle de certains organes : 1° Allonger le bras supérieur dans le crochet du percuteur et changer l'inclinaison de la face latérale gauche de ce bras. 2° Supprimer le congé de raccordement dans la tranche de la came du percuteur, et élargir le dégagement pratiqué dans cette partie du galet. 3° Fixer les vis d'assemblage dans l'S en acier par une soudure à l'étain. 4° Tremper légèrement à l'huile la plaque d'appui de tir. 5° Raccourcir la broche d'assemblage de l'écrou à tenons. 6° Arrondir les petites faces du bras de la manivelle motrice 7° abattre et arrondir fortement les angles que présente encore l'auget de chargement et le volet de chargement 8° Augmenter le jeu de la rainure du bras du piston chargeur ______

Ainsi s'achève le rapport transmis au Ministre. Il serait bon d'en connaitre l'issue. D'ores et déjà on voit que le canon-revolver de 37 possède quelques défauts structurels et de réalisation qui sont dommageables. Le Petit Fortiff’Séré n°97

Ceci explique t'il qu'il ne fut pas adopté de suite en parallèle au canon de 40 Modèle 1879 ? Les illustrations dans le texte sont soit des dessins repris en tout ou partie du rapport, soit des vues virtuelles du canon-revolver de 40 mm, dont l'architecture est similaire. N'ayant pas les tables de construction du CR 37, je ne peux mieux faire. Jean-Pierre ZEDET 2018

Le Petit Fortiff’Séré n°98

Les forts de la Bouzaréah et de Kouba dans la défense terrestre d’Alger, en 1913

Par Jean-Jacques MOULINS

A la veille de la Première Guerre mondiale, le front de terre d’Alger compte trois secteurs de défense, constitués de centres de résistance appuyés par une artillerie disposée dans des forts et des batteries : - le premier secteur, articulé autour du fort de la Bouzaréah, compte trois batteries extérieures : A, B, C et a. Ces dernières alignent, au total, quatre canons de 120 L Mle 1878, six canons de 95 Mle 1888 sur affût de campagne, et quatre canons de 80 Mle 1877 - le deuxième ne comprend pas d’ouvrage fortifié, mais seulement huit batteries : D, E, F, b, c, d, e et f. Celles-ci sont armées, au total, de quatre canons de 120 L Mle 1877, de quatre canons de 120 C Mle 1890, de huit canons de 95 Mle 1888 sur affût de siège et place, et de seize canons de 90 Mle 1877 sur affût de campagne. - le troisième secteur est articulé autour du fort de Kouba, et compte, outre ce dernier, quatre batteries extérieures : G, H, I, J. Seules les deux dernières sont armées, en 1913, de quatre canons de 120 Mle 1878 chacune. L’organisation ressemble beaucoup à celle existant entre Nice et la frontière italienne, et pour la même raison : le manque de profondeur. Moins de deux kilomètres séparant le cordon littoral, la ville, le port et ses batteries de côte, de la ligne de défense terrestre.

Les forts de la défense terrestre d’Alger (Google)

Le Petit Fortiff’Séré n°99

Le fort de la Bouzaréah est situé au nord-ouest de la ville, à 420 mètres d’altitude. C’est un ouvrage pentagonal, réalisé à partir de 1895. Il est doté d’une entrée monumentale, et son fossé, avec escarpe et contrescarpe maçonnées, est défendu par trois coffres, un double et deux simples. En 1913, il est armé de quatre canons de 120 L Mle 1878, de quatre canons de 95 Mle 1888 sur affût de campagne, de quatre canons de 80 Mle 1877 et de quatre mitrailleuses Mle 1907. Ses coffres et caponnières sont armés de quatre canons de 12 « culasse », de trois canons revolvers de 37, et de deux mitrailleuses Mle 1907.

Le fort de la Bouzaréah (Jean-Jacques MOULINS)

Le fort de Kouba est situé au sud-est de la ville, à l’altitude moyenne de 115 mètres. Construit à partir de 1895, cet ouvrage, plus petit et d’une conception différente de celui de la Bouzaréah, est destiné à interdire l’accès à Alger par lesroutes arrivant de l’est, en particulier la nationale 6. Il domine et bat les passages de l’oued Harrach, qui constitue un obstacle naturel remarquable.

Le fort de Kouba et l’oued Harrach (SHD) Le Petit Fortiff’Séré n°100

Son fossé, à contrescarpe maçonnée et escarpe en terre coulante, est défendu par une grille et deux coffres, un simple et un double. Sa gorge, pseudo-bastionnée, est défendue par deux caponnières. En 1913, son armement compte huit canons de 95 Mle 1888, dont quatre sur affût de campagne et quatre sur affût de siège et place, plus quatre canons de 80 Mle 1877 sur affût de campagne, et quatre mitrailleuses Mle 1907.

Le fort de Kouba (SHD)

Les coffres et caponnières sont armés de trois canons de 12 « culasse », de trois canons revolver de 37, et de deux mitrailleuses Mle 1907.

Le fort de Kouba (SHD)

Situé au nord-ouest, le Fortin Duperré, qui abrite essentiellement une batterie de côte, peut également contribuer à l’appui d’artillerie de la position. Le vieux fort turc, dit Fort l’Empereur, encore solide, peut aussi participer à la défense. Les forts d’Estrées, à l’est, et de Sidi-Ferruch, à l’ouest forment des centres de résistance indépendants. Mais, telle qu’elle se présente en 1914, la position est inachevée, car seuls les deux forts modernes peuvent être considérés comme vraiment solides, les centres de résistances et les batteries n’étant traités qu’en fortification de campagne.

En 1901, 1902 et 1903, le 26e bataillon du Génie se livre à des exercices de franchissement du fossé du fort de Kouba. Ils n’utilisent, pour réaliser l’exercice, que leur équipement et leur outillage organique, ainsi que des matériaux trouvés sur place et alentour. Un intéressant reportage photographique accompagne le compte rendu de ces manœuvres. C’est l’occasion pour nous d’admirer nos anciens, qu’on imagine plus volontiers engoncés dans leur capote et chargés de leur barda, se livrant à une véritable opération de commandos.

Le Petit Fortiff’Séré n°101

Les sapeurs du 26e bataillon du Génie en action (SHD)

Les embrasures des coffres ont été aveuglées par des fumigènes et des explosifs, procédés que les Allemands utiliseront plus tard sur les forts de Verdun. Le compte rendu souligne la faible valeur de la grille défensive, facile à sauter, à forcer, et même à ébranler et abattre avec des cordes. Quant au mur de contrescarpe, il est facilement franchi à l’aide de perches et d’échelles en bambou, ou de cordes commando, comme l’auteur le verra faire en juillet 1961, pour l’enceinte de Bizerte… Un astucieux pont « poisson » permet de franchir la totalité de l’obstacle d’un seul coup !

JJ Moulins

Le Petit Fortiff’Séré n°102

4 août 1914 Les bombardements de Bône et de Philippeville

Par Jean-Jacques MOULINS

Le 2 août 1914, deux croiseurs allemands sont mouillés dans le port italien de Messine. Le Gœben, qui porte la marque du contre-amiral Souchon, et le Breslau. Ces deux navires modernes, lancés en 1911, ont été envoyés en Méditerranée dès 1913 afin, dans l’hypothèse d’une guerre avec la France, de s’opposer au transport du 19e corps d’armée d’Algérie vers la Métropole. On espère également, par des actions de bombardement sur les ports algériens, amener les populations musulmanes à se soulever, obligeant ainsi le 19e corps à rester sur place pour réprimer l’insurrection.

Le croiseur de bataille Gœben (DR)

Le croiseur Breslau (DR)

Le Petit Fortiff’Séré n°103

Déplaçant 23 000 tonnes, le Gœben est un croiseur de bataille, c’est-à-dire un navire aussi bien armé qu’un cuirassé, mais moins protégé. Il est moins lourd, donc plus rapide. Armé de dix pièces de 28 cm, de douze de 15 cm, et de douze de 8,8 cm, il peut atteindre 28 nœuds. Son blindage est de 280 mm, à la ceinture. Le Breslau est un croiseur déplaçant 4 550 tonnes, armé de douze pièces de 10,5 cm. Il est protégé par un blindage de 100 mm à la flottaison. Il peut atteindre 27 nœuds. Le Gœben n’a pas d’équivalent dans l’armée navale française. Celle-ci, commandée par le vice-amiral Boué de Lapeyrère, a pour mission principale la protection des transports du 19e corps d’armée. Ses cuirassés les plus modernes, Courbet et Jean-Bart, armés de douze pièces de 305 mm, sont nettement moins rapides que le Gœben. Les cuirassés Courbet et Jean-Bart, amarrés dans le port d’Alger (collection auteur)

Heureusement, en cas de guerre avec l’Allemagne, il est probable que la Grande-Bretagne sera notre alliée. Dans ce cas, la Royal-Navy, en application des accords navals, apportera son appui à la marine française, responsable du bassin occidental de la Méditerranée. En prévision, les croiseurs de bataille britanniques Inflexible, Indomptable, Indefatigable et Invincible ont été envoyés à Malte, dès l’annonce de l’entrée en Méditerranée des bâtiments allemands. Ces navires, dont l’armement principal est de huit pièces de 305 mm, sont comparables au Gœben, mais ne peuvent atteindre que 25 nœuds.

Le croiseur de bataille HMS Inflexible (DR)

Le 3 août, à 1 heures du matin, les navires allemands, qui ont été ravitaillés en charbon et en vivres par le paquebot General, quittent le port de Messine, pour une destination inconnue. A 18 heures, la TSF apporte la nouvelle de la déclaration de guerre avec la France. Que va faire Souchon ? La situation a en effet évoluée, et l’état-major allemand n’ignore pas que l’application du plan "Schlieffen", qui vise l’invasion de la France en violation de la neutralité belge, amènera l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne. Souchon risque fort de se trouver rapidement face à un adversaire redoutable, l’escadre de l’Amiral Milne, basée à Malte. Ordre lui est donc donné de se réfugier à Istanbul, en abandonnant toute idée d’attaque sur l’Afrique du Nord. Mais Souchon, descendant d’une famille française réfugiée en Prusse à la révocation de l’Edit de Nantes, est un chef courageux, qui a la confiance totale de ses équipages. Il va essayer d’accomplir une partie de sa mission initiale, en allant bombarder les ports français d’Afrique du Nord les plus à sa portée, et qu’il sait être, ou qu’il croit être, sans défense. Le Breslau se chargera de Bône, le Gœben de Philippeville.

L’amiral Wilhelm Souchon (DR)

Le Petit Fortiff’Séré n°104

Les autorités françaises d’AFN sont, bien entendu, au courant de la présence des deux navires allemands à proximité des côtes algériennes. La défense des côtes d’Alger est en alerte, et ordre est donné à l’amiral commandant la Marine à Alger, le 3 août à 11 heures, de surseoir au départ des navires pour la Métropole. A Bône, la nouvelle de l’entrée en guerre de la France est tombée le 4 août, à 2 heures du matin. On n’ignore pas la présence des navires allemands, mais la ville ne dispose d’aucune défense, la mise en état de combattre des batteries de la place n’étant prévue que le quatrième jour de la mobilisation. En effet, c’est à Philippeville qu’est mise sur pied, le 1er août, la 12e batterie bis du 6e groupe d’artillerie à pied d’Afrique, chargée de la défense des ports de Philippeville, Bône et Bougie. C’est donc dans cette ville que les réservistes sont mobilisés, habillés, armés et équipés, avant d’être envoyés dans leur garnison respective. Le capitaine de réserve, désigné pour la commander la 12e batterie bis, est venu prendre ses ordres à Alger, dès le 1er août. Mais, par suite d’un changement d’horaire des trains, il ne pourra arriver à Philippeville que le 4 août dans la matinée. Les défenses du front de mer de Bône (SHD)

Le sémaphore du Cap de Garde (collection auteur)

A 3 heures, le guetteur du sémaphore du Cap de Garde prévient qu’un navire de guerre approche lentement de Bône, tous feux éteints. Comme on attend l’arrivée de bâtiments français, le pilote de garde se porte à sa rencontre quand, à 3 heures 40, le Breslau, car c’est lui, ouvre le feu. Environ cent quarante coups vont être tirés, sur la ville, le port, et le sémaphore. Le tir cesse à 4 heures 30, puis le bâtiment se dérobe vers le nord-ouest. Un homme est tué, André Gaglione, employé du port, et premier mort français de la guerre. Il y a cinq blessés. Quant aux dégâts, ils se limitent à un petit cargo, le Saint-Thomas, sévèrement endommagé, à quelques immeubles et au sémaphore, également endommagés. Une tentative de riposte a eu lieu, par deux officiers qui ont essayé de mettre en service une pièce de 24 cm de la batterie des Caroubiers.

Le Petit Fortiff’Séré n°105

Vestiges de la batterie des Caroubiers, en 2012 (DR) La batterie basse du Lion, à Bône (collection auteur)

Malgré le renfort de plusieurs hommes, montés de la batterie du Lion, ils n’ont pu ouvrir le feu avant le repli du Breslau. Les choses vont se passer différemment à Philippeville.

Outre la batterie d’El Kantara, les défenses du front de mer de Philippeville comptent les batteries d’El Mouader (quatre canons de 24 cm Mle 1876 sur affût G PC) et de Beni Meleck (quatre canons de 95 Mle 1888 sur affût C Mle 1904 G). Ces deux dernières ne sont pas mobilisées le 4 août. Le PC du front de mer est au Château vert, qui est doté d’un projecteur de 90 cm (SHD)

Le port de Philippeville en 1910 (collection auteur)

Le plan de mobilisation prévoit, en effet, que la batterie de 19 cm d’El-Kantara sera prête à ouvrir le feu dès le 3 août. Le lieutenant de réserve Cardot, avocat à Sétif, affecté au commandement de la batterie d’El-Kantara, se présente le 2 août au commandant d’armes de la place de Philippeville, pour prendre ses instructions. Il reçoit alors l’ordre de prendre les fonctions de commissaire de gare, le titulaire n’étant pas encore arrivé. Ce n’est que le 3, à midi, qu’il est libéré de cette tâche, l’officier en charge ayant rejoint. Il demande et obtient l’autorisation de rejoindre son poste. Il se rend au centre mobilisateur, rassemble ses réservistes, vérifie leur habillement, leur équipement et leur armement. Il forme ses pelotons de servants et de spécialistes. C’est une unité constituée qui prend le départ pour la batterie, à 21 heures 30. L’ouvrage est occupé à 23 heures. L’officier constate alors que deux des quatre pièces sont inutilisables. Leurs plateformes étant dénivelées, le pointageen direction s’avère très difficile. De plus, une de ces deux est démunie d’organes de visée. D’une façon générale, cette batterie, comme beaucoup d’autres sur le littoral français, est obsolète, et son désarmement définitif est d’ailleurs prévu pour les semaines à venir.

Le Petit Fortiff’Séré n°106

La batterie d’El Kantara est de conception très classique. Elle est protégée par une enceinte flanquée par des bastionnets, et est dotée d’un magasin caverne (SHD)

Il s’agit d’une batterie dite de bombardement, armée de quatre canons G de 19 cm Mle 1878 sur affût G PC, dont l’altitude moyenne est de 105 mètres. Elle tire son nom d’un ancien pont romain, situé en contrebas.

La batterie de l’Ilôt des Singes, et son réduit Mle 1846. Ces installations déclassées ne sont plus armées en 1914. Seul le phare de Stora est en service (DR) Construite dans les années 1890, elle dispose d’un magasin à poudre souterrain, accessible par une entrée de plain-pied, et doté d’un atelier de confection des charges propulsives. Les projectiles sont stockés dans un hangar situé près de l’entrée du souterrain. Obus et charges sont envoyés aux pièces à l’aide d’un monte-charge actionné à bras. Après les accords bilatéraux, dits "Entente cordiale", signé entre la France et le Royaume-Uni, en 1904, la défense des côtes a été négligée, puisque primitivement destinée à repousser une attaque britannique. En Afrique du Nord, seule Bizerte possède une défense moderne, avec ses canons de 240 mm Mle 1884 sur affût Mle 1901 TR, qui peuvent expédier un coup par minute.

Canon de 240 mm Mle 1884 sur affût 1901 TR d’une batterie de Bizerte (collection LP) Les défenses d’Alger et Oran peuvent être considérées comme acceptables, non par la modernité de leurs canons, mais par leur nombre. Seule la batterie moderne de Gambetta, à Oran, possède des canons de 240 mm Mle 1903, aux performances comparables à ceux de Bizerte. Cette très intéressante photo nous montre un des quatre canons G de 24 cm Mle 1876 sur affût G PC de la batterie des Arcades, à Alger. On remarque le nombre important de servants. Ceux-ci sont réglementairement au nombre de dix pour le tir avec l’appareil de pointage automatique, ce qui est le cas sur la photo, et de neuf pour le tir à la hausse. Mais plusieurs auxiliaires, à l’instruction à l’occasion de cette école de pièce, sont également présents. On peut voir un obus P sur sa civière de chargement. Un coup est prêt à partir, le 2e servant de droite à la main sur le cordon tire-feu, dans la position réglementaire. Le pointeur a enlevé l’appareil de pointage automatique « Deport », pour le soustraire au choc de départ, et le passe à son aide. Le premier servant de droite va déposer au sol son levier de manœuvre en direction de l’affût, avant de se diriger vers l’arrière de la pièce. L’effectif et la manœuvre, dite « de la charge en quatre temps », sont les mêmes pour le canon de 19 cm de la batterie d’El Kantara. Lors du tir sur le Gœben, l’effectif devait être de neuf servants, puisqu’il a été exécuté à la hausse (collection Lionel Pracht) Le Petit Fortiff’Séré n°107

Mais le lieutenant Cardot est un homme d’action. Il sait que les navires allemands rodent à proximité. Il va faire de son mieux avec ce qu’il a. Les obus et les charges propulsives sont hissés du magasin, les projectiles sont amorcés.

Les magasins de la batterie d’El Kantara (SHD)

Le télémètre à dépression Deport est sorti de son coffret. Il s’agit d’une lunette grossissante, fixée sur un support gradué, qui donne la distance par mesure de l’angle existant entre l’horizon et la ligne de flottaison du but, dit angle de dépression. C’est un appareil d’une grande simplicité, et d’une grande précision. Encore faut-il qu’il soit étalonné. Pour ce-faire, il faut viser un point éloigné, dont la distance et l’altitude sont connus, opération qui nécessite une bonne visibilité. Hors, il fait nuit. Le lieutenant Cardot remet donc cette opération au lever du jour. Tout le monde prend alors un peu de repos, en dormant couché à son poste. Un peu après 4 heures 30, alors que l’officier entreprend le réglage de son appareil, il aperçoit, sortant dela brume, un navire venant de l’est à grande vitesse, enveloppé par sa fumée. Le lieutenant, qui ignore les événements de Bône et ne sait pas que la guerre est déclarée, réveille son monde, fait charger les deux pièces disponibles, et, conformément aux instructions du carnet de mobilisation de l’ouvrage, téléphone au commandant du front de mer, au Château-Vert, pour deman- der des ordres. Il n’en obtiendra pas, car l’officier n’a pas encore rejoint son poste. Il essaie ensuite de joindre le commandant d’arme. Entretemps, le navire s’est rapproché et, à 5 heures, il ralenti, hisse le pavillon allemand, et ouvre le feu sur le port avec son artillerie secondaire (1). Il s’agit du Gœben, bien entendu. Le lieutenant Cardot réplique immédiatement avec ses deux pièces. Quelques précisions techniques sont nécessaires. Si la portée des canons G de 19 cm Mle 1878 est de 9 500 mètres, leur portée utile ne dépasse pas 6 000 mètres.

Canon G de 19 cm Mle 1878 sur affût G PC. Le dégrossissage du pointage en direction s’effectue à l’aide de deux leviers de manœuvre, situés à droite et à gauche, à l’avant du châssis. Le réglage fin s’effectue à l’aide de la manivelle de pointage en direction située sous la hausse. La pièce est ici équipée de la hausse Mle 1890, utilisée lors de l’engagement de la batterie d’El Kantara. La manivelle de pointage en hauteur est située de l’autre côté de l’affût (Album de côte, collection auteur) Le Petit Fortiff’Séré n°108

La cadence de tir est, en moyenne, de l’ordre de un coup toutes les trois minutes, soit vingt coups par heure. Avec des canonniers entraînés, cette cadence peut être doublée, pour un temps limité. Mais, même dans ce cas, le débit est de moins de trois coups par minute pour une batterie de quatre pièces. Ce faible débit pouvait être considéré comme convenable à l’époque de la réalisation de l’affût, car les navires étaient lents, et devaient stopper pour avoir un tir efficace contre la terre. En 1914, face aux progrès des navires et de l’artillerie de bord, il est devenu tout à fait insuffisant. Les projectiles sont des obus Mle 1898-10 à fusée percutante de côte Mle 1903, dit obus P, pour Perruchon, du nom de leur inventeur. Leur poids est de 86 kilos, dont 16 kilos d’explosif. Ils n’ont aucun pouvoir perforant et, sur un navire cuirassé comme le Gœben, ne peuvent avoir aucun effet sur la coque, et peu d’effet sur les superstructures. Mais, grâce à son ogive tronquée, qui lui évite de ricocher, l’obus P, après son impact sur l’eau, suit une trajectoire sous-marine, qui se redresse sous l’effet de la rotation. Il peut ainsi toucher le but sous sa ligne de flottaison, ou la coque n’est pas protégée, et provoquer une voie d’eau importante avec ses 16 kilos d’explosif. Si le tir est dirigé sur l’arrière du but, l’explosion peut occasionner des dégâts irréversibles au gouvernail et aux hélices. La règle est donc, en l’absence de télémétrie, de tirer court, vers la poupe, puis d’allonger le tir, en fonction du résultat. C’est ce que fait le lieutenant Cardot. Il a le temps de tirer quatre coups, le dernier étant bien près du but. Mais le Gœben, qui ne s’attendait pas à cette riposte, a mis en route et fait demi-tour dès le premier coup de la batterie, qu’il gratifie de quelques obus, qui passent au-dessus. Puis, il disparaît derrière l’île Srigina. Il n’a eu le temps de tirer que trente-six projectiles de 15 cm, dont quatre n’exploseront pas. Les dégâts sont négligeables, mais on compte quatorze tués et vingt-et-un blessés, pour la plupart des militaires du 3e régiment de Zouaves, atteints dans un hangar du port, où ils passaient la nuit en attendant leur départ pour la Métropole.

Projectile Mle 1898-10 à amorçage de côte, dit obus P, pour Perruchon (auteur)

La caserne des Zouaves, à Philippeville (collection auteur)

Le Petit Fortiff’Séré n°109

Fallait-il que Souchon soit persuadé du manque de défense de Philippeville, pour s’approcher à moins de 3 000 mètres du port, alors que ses canons pouvaient tirer à cinq fois cette distance. Il a failli le payer cher, car la moindre avarie à son navire lui aurait été fatale, comme vont le montrer les événements qui vont suivre. Leur mission accomplie, les deux navires se replient vers le nord-ouest, ce qui va faire penser qu’ils se dirigent vers Alger. Mais ce n’est qu’une feinte, destinée à leurrer les observateurs. Dès qu’ils sont hors de vue, ils mettent le cap sur la Turquie, conformément aux ordres. Mais, la présence de navires anglais les contraint à rester momentanément près des côtes algériennes. Malgré cette manœuvre, vers 11 heures, ils sont interceptés, au sud de la Sardaigne, par l’Invincible et l’Inflexible, accompagné du croiseur Weymouth, sous le commandement de l’amiral Milne. Comme l’Angleterre n’est pas encore en guerre avec l’Allemagne, elle ne le sera qu’à 23 heures, les bâtiments anglais se contentent de suivre les navires de Souchon. Ceux-ci s’échappent alors, en montant à près de 30 nœuds, dépassant les vitesses enregistrées aux essais. Le 5 août, à 7 heures, ils mouillent à Messine, ou ils se ravitaillent en charbon auprès du General. Dans le cas où l’Empire ottoman demeurait neutre, ce qui était le cas, les instructions de Souchon était de renoncer à s’engager dans les Dardanelles. Mais nous avons vu qu’il s’agit d’un homme déterminé, qui sait prendre ses risques. Il pense alors que, s’il se dirige vers l’ouest, il va se heurter à plus fort que lui, alors que s’il se dirige vers le cul de sac de l’Adriatique, il risque d’y être enfermé pour la durée de la guerre. Il prend donc le pari de se rendre à Istanbul, assuré qu’il est d’amener, par son arrivée, la Turquie à entrer en guerre. Le 5 août, à 17 heures, il quitte Messine, après avoir reçu un message de félicitation et d’encouragement du Kaiser. Le 6, vers 17 heures, les navires allemands sont aperçus par le croiseur Gloucester. L’amiral Souchon est alors à la portée de la 1e escadre de croiseurs de l’amiral Troubridge, forte de quatre croiseurs cuirassés, et de huit destroyers, qui surveille l’entrée de l’Adriatique. Mais celui-ci considère qu’il n’est pas en position de force, avec ses bâtiments plus lents et moins bien armés, et renonce à engager le combat. Cette décision lui vaudra de passer devant une cour martiale, qui l’acquittera. Le 7 août, vers 18 heures, la route des navires allemands croise celle du paquebot français Phrygie. Après lui avoir demandé de faire connaître sa nationalité, ils reprennent leur route.

Le Gœben et le Breslau font route vers la Turquie (DR)

Le 8, la Phrygie rencontre la flotte britannique, et lui fait part de sa rencontre avec les navires de Souchon. La chasse reprend. Le 9 août, au large du cap Matapan, le Breslau échange quelques bordées, sans résultat, avec le Gloucester, avant que ce dernier ne soit rappelé par l’amiral Milne. Après s’être ravitaillés en charbon près de Naxos, dans des conditions rocambolesques, les navires de Souchon entrent dans le détroit des Dardanelles le 10 août.

Le Petit Fortiff’Séré n°110

Malgré la neutralité affichée du gouvernement turc, Souchon est accueilli en vainqueur. C’est que la propagande allemande est déchaînée. A l’entendre, Bône et Philippeville ont été rasées. Et ses navires, même s’ils n’ont jamais affronté les croiseurs de bataille britanniques, ont remporté une victoire incontestable en leur échappant. Pour tourner les traités internationaux, qui obligeraient la Turquie à interner les navires allemands, ceux-ci sont "achetés", virtuellement. Le Gœben et le Breslau passent sous pavillon ottoman, et sont rebaptisés respectivement Yavuz Sultan Selim et Midilli. Les officiers et les marins se coiffent d’un fez, opportunément fournis par le General, et le tour est joué.

L’amiral Souchon, et ses officiers, arrivés à bon port, et coiffés du fez (DR)

Dès lors, l’amiral Souchon, aussi fin diplomate que bon marin, va pousser le gouvernement turc à la guerre, en multipliant les provocations envers la Russie. Le 27 septembre, il est nommé commandant en chef de la marine de l’Empire ottoman, et fait fermer les détroits, privant la Russie de toute sortie vers la Méditerranée. Le 27 octobre, il sort en Mer noire, au motif d’effectuer des exercices de tir. Le Yavuz coule le Pirich, qui, accompagné de trois contre-torpilleurs, "dérangeaient les exercices, et menaçaient de mouiller des mines à l’entrée du Bosphore". Faux-prétextes… Il va ensuite bombarder les ports russes de la mer noire. Le 2 novembre, la Russie se déclare en guerre contre la Turquie. Par le jeu des alliances, La France et la Grande-Bretagne aussi. Le contre-amiral Wilhelm Souchon a bien mérité de sa patrie. En entraînant la Turquie dans la guerre, il ouvre un nouveau front, qui ne comptera pas pour rien dans la durée et la sauvagerie de la Première Guerre mondiale. L’importance de l’événement est résumée par la déclaration de l’ambassadeur des Etats-Unis à Istanbul, Monsieur Henri Mongerthau : "Je doute que deux vaisseaux aient joué un rôle semblable dans l’histoire".

Le fort de Seddülbahir est l’un des gardiens du détroit des Une autre batterie des Dardanelles, celle des remparts de Dardanelles (auteur) Namazgah (auteur)

Le Petit Fortiff’Séré n°111

Le Yavuz, survivra à la guerre. Après plusieurs escarmouches contre les cuirassés russes en mer Noire, il coule les monitors anglais Reglan et M 28, le 20 janvier 1918, lors d’un raid audacieux mené au nord de l’île d’Imbros, au large de l’entrée des détroits. Il est endommagé par une mine. Au cours de l’action, un autre de ces engins cause la destruction du Midilli. Les navires se trouvent alors sous les ordres du vice-amiral Paschwitz, Souchon ayant regagné l’Allemagne en septembre 1917. Un moment attribué à la France, après l’armistice, l’ex-Gœben reçoit le nom de Roussillon. Mais il ne connaîtra jamais les ports français, car il est en définitive restitué à la Turquie, avant de l’avoir quitté, en 1923. Remis en état, il battra un record de longévité, puisqu’il ne sera ferraillé que dans les années 1970. Si le lieutenant Cardot n’avait pas été retenu pour une mission secondaire à la gare de Philippeville, l’histoire s’écrirait différemment ! Il aurait eu toute la journée du 3 pour régler son télémètre, et, à si courte distance, avec un instrument bien au point, il ne fait pas de doute que l’un des projectiles expédiés par ses canons aurait été au but. Peut-être plusieurs. Endommagé, le Gœben n’aurait pas été à même d’échapper aux navires britanniques. Il ne serait pas parvenu à Istanbul, et la Turquie ne serait pas entrée en guerre, et sans doute pas la Bulgarie, le 25 septembre 1915. Après les événements, le supérieur de Cardot tente de lui faire "porter le chapeau". La note "pour le commandant du front de mer de Philippeville", rédigée par le chef d’escadron Lebel, commandant le 6e groupe d’artillerie à pied d’Afrique, le 13 août 1914, est l’exemple type d’"ouverture de parapluie" d’un responsable qui sent venir l’orage… Après un exposé sommaire de l’affaire, Lebel poursuit, sur le ton un rien méprisant, souvent adopté par les officiers d’active envers les officiers de réserve : "Le lieutenant Cardot, qui a suivi le cours régional à Alger, en mars 1914, aurait dû se rappeler : - que l’occupation d’une batterie de gros calibre comporte la mise en place et le réglage des appareils de mesure des distances - qu’un service de veille doit fonctionner la nuit - qu’en l’absence d’un commandant du front de mer, le commandant de batterie, s’il a des doutes sur la nationalité ou les intentions du navire, doit employer les signaux ou la semonce, et, si le navire ne s’éloigne pas, peut faire ouvrir le feu. S’il avait été opéré ainsi : - le navire aurait été repéré à grande distance - il aurait été semoncé en temps utile, et obligé de dévoiler ses intentions - le feu aurait été ouvert sans attendre qu’il ait fait acte d’hostilité. Les coups, tirés après mesure de la distance, seraient vraisemblablement tombés dans la zone dangereuse, et auraient causés au navire, dépourvu de protection sérieuse, de graves avaries. Tout en rendant hommage à l’ardeur du personnel et reconnaissant les difficultés du moment, on ne peut que regretter que l’oubli des prescriptions essentielles du service d’une batterie de côte, et le manque de décision du commandant de l’ouvrage, aient permis au Gœben de procéder impunément à l’attaque". Il semble difficile d’être de plus mauvaise foi. Le lieutenant Cardot, encore civil 48 heures auparavant, était apparemment le seul officier éveillé à Philippeville, le 4 août 1914, à 4 heures 30, puisqu’il n’a pu joindre aucun de ses supérieurs au téléphone, et que même le veilleur du poste de reconnaissance de Srigina n’a rien vu.

L’îlot de Srigina, à Philippeville (DR)

Le Petit Fortiff’Séré n°112

J’essaie de me mettre à la place de ce jeune officier, apercevant le Gœben, avec son armement impressionnant. Le navire s’immobilise à quelques milliers de mètres de lui, et ouvre le feu. Il doit faire face, avec ses deux canons hors d’âge. Il ne faiblit pas. Pour ma part, je lui manifeste mon admiration sincère, post mortem, et lui adresse mes plus vives félicitations, ainsi qu’à ses hommes, pour son action. Ultérieurement, Lebel produira un rapport plus conforme à la réalité, et rendant justice à Cardot.

Le canon de 19 cm Mle 1878, baptisé Bourges F 1878 N° 21, exposé dans la cour d’Angoulême du musée des Invalides (auteur)

Le canon de 19 cm Mle 1878 baptisé "Bourges F 1878 N° 21", de la batterie d’El Kantara, a eu l’honneur de tirer le premier coup de canon français de la Première Guerre mondiale. Il est entré au musée de l’Armée, aux Invalides, à Paris, le 30 septembre 1919, malheureusement sans son affût. Il y est toujours.

La plaque en bronze, commémorant le bombardement, apposée à l’origine sur le port de Philippeville, est scellée aujourd’hui sur le soubassement du monument des rapatriés, au cimetière des Gonards, à Versailles (auteur)

Le Petit Fortiff’Séré n°113

Après la guerre, une plaque en bronze, commémorant l’événement du 4 août 1914, a été apposée près du port, à l’emplacement du point de chute du 1er obus tiré par le Gœben. Elle a été déposée, et ramenée en France après l’indépendance de l’Algérie.

Le port de Philippeville de nos jours, photographié depuis un point situé sous la batterie d’El Kantara (DR) Elle est actuellement scellée sur le soubassement du monument des rapatriés, au cimetière des Gonards, à Versailles. Philippeville s’appelle désormais Skikda. Le site de la batterie d’El Kantara est toujours parfaitement identifiable sur les vues satellitaires. Il semble avoir perdu tout caractère militaire.

La batterie d’El Kantara de nos jours (Google)

1) Il existe des contradictions sur ce point. Le journal de marche du 6e groupe d’artillerie nous dit que le bâtiment naviguait à faible vitesse lorsqu’il a ouvert le feu. Mais le commandant Lebel, commandant le 6e groupe, prétend, dans sa relation de l’événement, qu’il était stoppé. Nous sommes tentés de croire plutôt la première version, d’autant que Lebel, dans le même document, dit que le navire arrivait du nord-ouest, contrairement à tous les autres témoignages. Il existe également des contradictions sur le calibre des projectiles tirés sur Philippeville, certains témoins affirmant que quelques obus de 28 cm auraient également été employés, ce qui nous semble peu vraisemblable. Le Petit Fortiff’Séré n°114

Bibliographie

“Avec son amour du verbe et son regard affûté d’historien, Olivier Charrin donne une interprétation magistrale de ce carnet de guerre d’un combattant du 43e Régiment d’Infanterie Territoriale exhumé récemment d’un grenier lyonnais. Des Vosges au Beaujolais, entre Epinal et Villefranche, une plongée originale dans le quotidien extraordinaire d’un père de famille, devenu soldat pour le salut de la Patrie en 1914. L’ouvrage revêt d’abord une analyse historique précise et rigoureuse du carnet de guerre de ce soldat du 43e RIT. Il est ensuite construit comme une œuvre littéraire permettant de se glisser dans le quotidien des “pépères” combattants des Vosges, notamment dans l’un des forts de la célèbre « barrière de fer » à Razimont, mais aussi le long de la Vologne, du côté de la Schlucht, du col de Wettstein, et de la région des lacs. Il constitue enfin une réflexion sur la guerre vécue à hauteur d’homme, cataclysme abîmant l’adolescence du 20e siècle”.

« Une guerre de pépère », par Olivier Charrin

Editions du Poutan, 21€

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Le Petit Fortiff’Séré n°116

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