CULTURES DE CONSOMMATION MASTER 1 MC2 Mme Dabadie et Mr Welté 2019 - 2020 VEGANISME U N E C U L T U R E D E C O N S O M M A T I O N ? s n i t r a M

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e i n a l é M SITE WEB http://www.projetveganisme.sitew.fr/ Sommaire

INTRODUCTION

PARTIE 1 : VÉGANISME ET VÉGÉTARISME,

NOUVELLES PRATIQUES DE CONSOMMATION

A) Les principales motivations des interviewés

B) Du changement alimentaire au mode de vie

PARTIE 2 : LES FORMES DE L’ENGAGEMENT DU VÉGÉTALISME ET DU VÉGANISME

A) Des pratiques individuelles aux pratiques collectives

B) Un mouvement vegan international

C) De la communauté à l’exclusion Internet et les réseaux sociaux, espaces de partage La pratique végane comme stigmate

PARTIE 3 : L’ESSOR DU MARCHÉ DU VÉGANISME

A) Le développement de nouvelles marques spécialisées

B) Le marché vegan : une opportunité saisie par les grands groupes

C) Les ambassadeurs du véganisme : les influenceurs

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE La consommation carnée occupe une place centrale dans l’alimentation et la culture occidentale. Cependant, depuis quelques années, les problématiques liées au réchauffement climatique, aux conditions d’élevage intensif et les divers scandales sanitaires remettent en question la grande importance sociale de la viande et laissent place à de nouveaux modes de consommation « alternatifs », à l’image du véganisme. En vue de définir le “véganisme” nous nous sommes appuyées sur la définition de , co-fondateur de la Vegan Society1 : “Une philosophie et façon de vivre qui cherchent à exclure – autant que faire se peut – toute forme d’exploitation et de cruauté envers les animaux, que ce soit pour se nourrir, s’habiller, ou pour tout autre but, et par extension, faire la promotion du développement et l’usage d’alternatives sans exploitation animale, pour le bénéfice des humains, des animaux et de l’environnement.“ En outre, le véganisme se distingue du végétalisme, parce qu'il va au-delà de l'alimentation et concerne l'habillement mais également le divertissement. Au cours de notre étude, nous emploierons le terme « végétalisme » au sens large, pour désigner tous les autres régimes alimentaires rejetant les produits d’origine animale (flexitarien, végétarien, végétalien…).

En France, l’année 2015 est un moment décisif pour le mouvement. Le mot « véganisme » entre dans le dictionnaire et la première vidéo de l'association L214, tournée dans l’abattoir d'Alès est publiée sur internet. Les images, insoutenables, ont été vues plus de deux millions de fois sur YouTube. Brigitte Gothière, cofondatrice et porte-parole de l’association déclarait : « Il y a un avant et un après Alès ». Depuis, une commission d'enquête parlementaire a été créée et les abattoirs sont sous contrôle : 80% présentent des non-conformités, dont 12% des défauts d'étourdissement. La question de « la légitimité de continuer à faire tuer des animaux pour les manger s'installe dans le débat public », s'enthousiasme la militante. Par ailleurs, la consommation de viande a baissé de 12% ces dix dernières années dans l’hexagone, alors que le marché du véganisme s'est multiplié par quatre en l'espace de deux ans. Progressivement, nous assistons à une structuration du marché vegan. Les boutiques et restaurants 100% vegans se multiplient dans les grandes villes. De nombreuses gammes vegans font également leur apparition dans les rayons des supermarchés et hypermarchés. Le marché de l’alimentation

1 La Vegan Society est une association caritative fondée en Angleterre, le 1ᵉʳ novembre 1944, par Donald Watson et Elsie Shrigley. Site web de la Vegan Society : https://www.vegansociety.com

1 végane et végétarienne enregistre un chiffre d’affaires en hausse de 24% en 2019 dans les super et hypermarchés pour culminer à 380 millions d’euros. Selon les experts, cette croissance, devrait atteindre d’ici deux ans, les 600 millions de chiffre d’affaires (soit 17% d’augmentation). Enfin, sur internet, les comptes d’influenceurs vegans ou végétaliens proposant des recettes healthy ou encore des programmes d'initiation pour devenir vegan en trois semaines sont de plus en plus nombreux.

Concernant notre méthodologie d’enquête, nous avons réalisé une dizaine d’entretiens d’une durée moyenne de trente minutes. Au vue des circonstances actuelles de crise sanitaire, ils ont tous été réalisés à distance à travers des outils de visioconférence tels que zoom, FaceTime… Nous avons employé un guide d’entretien faiblement directif, mais qui abordait systématiquement la dimension biographique de l’entrée dans le véganisme, avec pour objectif de mettre en lumière les différentes facettes de ce choix en lien avec les diverses instances de socialisation de l’individu : famille, amis, université, profession, pays, voyages… Il demandait également aux enquêtés de décrire en détail leurs pratiques de consommation actuelles, mais aussi de rendre compte de leur sociabilité et de leur degré d’engagement. Afin de recueillir des informations plus personnelles telles que les réactions et les opinions des individus face à une situation, les entretiens semi-directifs ont été privilégiés. L'entretien semi-directif comprend deux types de questions : des questions ouvertes, qui permettent au répondant de s’exprimer plus librement sur un sujet et des questions fermées (directes), utiles pour recueillir des informations factuelles, et ainsi accéder plus facilement aux pratiques. Ce type d’entretien nous a d’ailleurs permis d’accéder à des pistes de réflexion et de compréhension inconnues, tout en nous faisant prendre conscience de certains détails pertinents qui nous avaient échappés au moment de l’élaboration de notre guide d’entretien.

Afin d’alimenter notre enquête, nous avons mobilisé différents concepts sociologiques, tels que la notion d’habitus de Pierre Bourdieu et sa remise en question par l’anthropologue Laurence Ossipow, la notion de stigmatisation de Erving Goffman ou encore de déviance de Howard Becker. Nous nous sommes également appuyées sur les travaux du sociologue américain Paul Lazarsfeld, et notamment sur l’influence des leaders d’opinion. En outre, de nombreux journalistes tels que Audrey Garric y ont consacré des articles de presse et des publications ont été mises en ligne sur Internet à ce sujet.

2 À travers cette étude, nous allons tenter de comprendre comment le véganisme se structure pour devenir une culture de consommation, à l’intérieur de laquelle, les individus échangent du sens au travers des biens qu’ils consomment.

Nous nous attacherons à l’étude de ce mouvement en France, afin de comprendre l’origine et les changements que cela entraîne dans les habitudes de consommation des Français. Puis, nous étudierons les conditions qui déterminent l’engagement et les variations de pratiques auxquelles ce régime donne lieu. Enfin, nous analyserons comment les industriels tentent de s’adapter à cette nouvelle demande.

3 PARTIE 1 : VÉGANISME ET VÉGÉTARISME, NOUVELLES PRATIQUES DE CONSOMMATION

A) Les principales motivations des interviewés

« Demain, vous serez tous végétaliens », annonçait le philosophe dans La Révolution végétarienne (2013). D’après lui, l’exploitation animale finira par être abolie « comme l’a jadis été l’esclavage ». Aujourd’hui, 3 % des Français sont végétariens et 10 % des Français aspirent à le devenir, selon un sondage réalisé en janvier 2016 par Opinion Way pour « Terra eco », sur un échantillon représentatif de 1 052 personnes. Nous avons enquêté pour comprendre quelles étaient les motivations qui poussaient les consommateurs à adopter ce nouveau mode de consommation, le végétarisme ou le véganisme.

Les motivations des végétariens sont multiples, s’additionnent et sont rarement univoques. D’après la même enquête pour « Terra eco », 75% des végétariens interrogés sont contre la souffrance animale, 67% veulent également « consommer de façon responsable et protéger l’environnement » et enfin 53% mettent en avant des questions de santé. Des résultats, que nous avons retrouvé au cours de nos interviews.

En effet, une partie de nos interviewés fait référence à des raisons éthiques en lien avec le bien-être animal. C’est notamment le cas de Sonia Duryn, militante L214 et végane depuis près de quinze ans : « La raison principale c’est les animaux parce que j'adore les animaux et je ne me voyais pas les manger ». De même pour Florine Rolland, qui déclarait avoir « eu le déclic qu'on mangeait des êtres vivants ». La mise en place d'une alimentation excluant les produits d’origine animale, permettrait notamment aux individus de se sentir mieux moralement. En effet, Samy-Vicente Lacerda nous expliquait ne plus vouloir participer « à la souffrance que les hommes font subir aux animaux. [ … ] dans ma tête en tout cas, ça me permet de me distancier de cette souffrance et je me sens plus en accord avec mes convictions. »

D’autres, ont déclaré avoir adopté ce type d'alimentation pour éviter d'éventuelles maladies ou encore pour diminuer un inconfort physique. C’est notamment le cas du coach sportif Mehdi el Mabrouk : « Alors moi, vraiment ma démarche première, c’était le côté santé qui m’intéressait dans cette alimentation végétale [ … ] Ce n’est

4 pas parce que tu es végétalien que tu vas pas tomber malade, tu sais c’est un peu comme un fumeur qui n’aura jamais un cancer du poumon, mais c’est mettre toutes les chances de son côté. » En effet, dès 2017, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) présentait le Programme National Nutrition Santé (PNNS), dans lequel elle recommandait fortement de réduire notre consommation de viande, augmentant le risque de cancer et maladies chroniques.

Enfin, l’aspect environnemental ne semble pas être le plus déterminant mais il est régulièrement cité par les interviewés comme aspect secondaire à prendre en compte. La majorité se sent concernée, à l’image de Guillaume Feelgood, qui déclarait être devenu végétarien « pour l’environnement [ … ] et c’était un moyen pour contester les pratiques d'élevage intensif ». En effet, selon une étude menée en 2013 par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’élevage contribuerait à hauteur de 14,5 % (dont 9,3 % pour l’élevage bovin) dans l’émission des gaz à effet de serre, soit plus que les transports. Le projet végétarien et éco-responsable, Les Nouveaux Fermiers, est d’ailleurs naît de ce constat. « De plus en plus de personnes essayent de réduire leur consommation de viande pour différentes raisons, que ce soit pour des raisons environnementales, pour la santé, ou même pour le bien-être animal » nous expliquait Florian Tellitocci, le Chef des ventes. « Notre positionnement, ça va d’abord être l’environnement puisqu’on source nos produits en France et on les fabrique en France, donc le circuit- court est assez important pour nous. [ … ] Effectivement produire un steak à base de protéines de plantes, ça génère 10 fois moins de CO2, ça utilise 11 fois moins d’eau, 50% d’énergie en moins...» poursuivait-il.

Au-delà de toutes ces motivations rationnelles, nous avons cherché à comprendre quel a été le déclic, qui avait poussé nos enquêtés à sauter le pas et à changer plus ou moins radicalement leurs habitudes de consommation. De nombreuses interviews font référence à la culture cinématographique et audiovisuelle. En effet, les images auraient joué un rôle-clé dans la prise de décision de nos interviewés. Samy-Vicente Lacerda, étudiant en journalisme nous expliquait avoir franchi le pas après le visionnage du film Okja de Bong Joon Ho : « Le film c’est une critique assez explicite finalement de l’industrie de la viande, à l’échelle mondiale, l’élevage intensif, les pratiques barbares d’élevage… C’est tout ça, qui m’a poussé à arrêter la viande. J’avais déjà essayé par le passé d’arrêter la viande, ça avait duré que quelques mois mais je voulais retenter et donc là, ce film c’était

5 vraiment ce qu'il me fallait pour me décider. » Ainsi, la prise de conscience, généralement brutale, des conditions de vie et de la souffrance des animaux entraîne un arrêt brusque de la consommation de produits d’origine animale. De même pour Guillaume Feelgood : « J’ai regardé par exemple, le documentaire sur Netflix, “” qui traite de la viande, de la protéine et de la force. Le documentaire montre qu’on peut très bien être sportif de haut niveau en abandonnant la viande, le lait, les œufs.. bref les protéines animales, et être en bonne santé. Le film pousse à arrêter de croire à tout ce qu’on dit et à aller se faire sa propre expérience et c’est ce que j’ai fait ! ». Florian Tellitocci, lui aussi interpellé par ce documentaire, nous racontait : « j’avais vu un reportage sur Netflix, The Games Changer, c’est un documentaire sur la viande [ … ] Il m’a fait un peu tilter sur le sujet ». Il expliqua par la suite que sa réflexion continua de mûrir, lorsqu’il a intégré l’équipe de Les Nouveaux Fermiers.2

Les principales motivations apportées par les interviewés ayant entrepris ce mode d’alimentation sont donc l’éthique, la santé et l’environnement. Nous allons, désormais, voir dans une seconde sous-partie les différentes pratiques du véganisme selon les motivations principales.

B) Du changement alimentaire au mode de vie

Au cours de nos entretiens, nous avons identifié une gradation entre les régimes alimentaires. En effet, que l’on soit flexitarien, végétarien, végétalien ou vegan, les pratiques varient.

Tout d’abord, le flexitarisme n’est pas un régime alimentaire au sens strict mais davantage un mode d’alimentation visant à limiter sa consommation de viande et de poisson. Florine Rolland, devenue flexitarienne depuis dix ans, nous précisait : « Les flexitariens, c’est ceux qui cherchent à mieux manger, en réduisant leur consommation carnée ». Étape supérieure, le végétarisme, qui concerne exclusivement l'alimentation. Le végétarien ne consomme ni viande, ni poisson. Certains végétariens excluent uniquement la viande, à l’image de Samy-Vicente Lacerda, végétarien depuis deux ans : « Moi, c’est juste la viande que j’ai complètement retirée de mon alimentation. »

2 La marque Les Nouveaux Fermiers propose une alternative à la viande qui reprend ses codes et son goût mais uniquement à base des plantes. Site web : https://lesnouveauxfermiers.com

6 Ensuite, le « végétalien ça concerne uniquement l’alimentation » déclarait Mehdi el Mabrouk, qui ne consomme ni chair animale, ni produits d'origine animale (oeufs, produits laitiers, miel...). Enfin, le véganisme désigne un mode de vie excluant toute forme d'exploitation animale. Le vegan ne porte pas de matières animales (fourrure, cuir, laine, soie...), n'utilise pas de produits testés sur les animaux et condamne les divertissements exploitant les animaux (cirque, corrida, zoo...). Bien plus qu’un choix alimentaire, c’est une véritable prise de position morale et politique. C’est notamment le cas d’Elise Desaulniers qui « milite pour le droit des animaux et pour le véganisme depuis une douzaine d’années ». Les vegans s'opposent au « carnisme », concept développé par la psychologue militante américaine pour qualifier « l'idéologie invisible qui nous conditionne à trouver normal, naturel et nécessaire de consommer des produits animaux ».

Cette gradation des pratiques est notamment mise en avant par les interviewés, eux-mêmes. En effet, Mehdi el Mabrouk nous expliquait : « Végétalien c’est l’alimentation, vegan c’est un lifestyle, tu ne portes pas de cuir, tu ne portes pas de laine… c’est tout un art de vivre on va dire. » Idée partagée par Cheyma Bourguiba qui déclarait : « Les flexitariens c’est ceux qui cherchent à « mieux manger », en réduisant leur consommation carnée. Alors que le véganisme, c’est un mode de vie dans son ensemble qui exclut toute utilisation de produit d’origine animale, dans l’alimentation, mais aussi dans tous les aspects de la vie courante. Quand tu deviens vegan tu t’impliques complètement. »

Le véganisme est donc une philosophie de vie, une conviction profonde qui implique un changement radical des modes de consommation. Ceci explique que la majorité des vegans interviewés, nous a révélé avoir pratiqué un mode alimentaire végétarien avant de devenir végan. C’est notamment le cas de Sonia Duryn : « Ça s’est fait au fur et à mesure, en fait, ça me paraissait la suite logique ». De même, pour Cheyma Bourguiba qui s’est dans un premier temps convertie au végétarisme dans le cadre d’un régime, puis s’est impliquée dans le véganisme : « Au départ, c’était principalement mes habitudes alimentaires qui ont été modifiées... Puis, c’est l’ensemble de ma consommation qui est devenue vegan : vêtements, sacs, cosmétiques, produits d’entretien… parce que je me suis aussi découvert une passion pour le monde vegan donc j’ai cherché des substituts à tout ! » Ainsi, devenir vegan impliquerait une appétence pour le « Do It yourself ». Sonia Duryn nous expliquait : « Je fais tout moi-même. Moi c’est une passion, autant j’ai la passion de la cuisine, j’ai la passion de la nature, de faire mes produits

7 ménagers, d'entretien, des cosmétiques ! ». De même pour Dya Touffier qui nous racontait : « Tous les produits, tout ce qui est produit de beauté, les crèmes, je les fabrique moi-même. […] Pour les vêtements, il y a des trucs que j’ai depuis 100 ans là (rires), que j’ai depuis très longtemps et après j’ai beaucoup de seconde-main aussi, que les copines donnent. J’ai plus envie de surconsommer. » En effet, la seconde-main semble également être une pratique répandue chez les vegans puisque Florine Rolland nous confiait elle-aussi acheter des vêtements d'occasion sur l’application Vinted : « Je favorise la seconde main, avec Vinted. Dès que je veux quelque chose j’essaye de le trouver sur Vinted et si je trouve pas, j’achète neuf mais sinon seconde main toujours ». Ainsi, le véganisme s’inscrirait dans de nouveaux comportements d’achat et de consommation plus responsables et durables, allant même jusqu’à une forme de « déconsommation ».

Enfin, la pratique vegan ne serait pas une pratique accessible à tous. En effet, nous avons identifié des barrières en termes de financement, de temps et d’accessibilité rendant le mode de vie vegan compliqué à adopter pour certains. En effet, cette pratique ne serait pas sans coût, Florine Rolland témoignait à ce propos : « On est loin d’avoir autant de choix qu’au rayon viande et c’est plus cher comme les faux-mages, laits végétaux mais ça remet en question ta façon de manger et c’est bien. [ … ] Ça reste cher et ça peut rebuter. Le prix du caddie, grimpe vite. » Même ressenti pour Sonia Duryn qui déclarait : « Moi je trouve ça cher, pour faire régulièrement mes produits moi-même quand je vois ce que ça coûte des haricots rouges, ou du riz… ». Enfin, la pratique vegane demanderait du temps, temps que les jeunes actifs n’ont pas toujours à consacrer à leur consommation. C’est notamment, ce qu’Étienne, jeune étudiant ex-vegan, déplorait : « Elle ne correspondait pas à ma situation de jeune actif citadin, car l’offre n’était pas assez développée : acheter un simple sandwich avant de prendre un train, ça devenait un casse-tête. »

La pratique végane apparaîtrait ainsi, comme une pratique réservée à une élite. Constat partagé par Élise Desaulniers, qui nous expliquait : « Je suis hyper privilégiée, j’ai un boulot, j’ai de l’argent, j’ai toujours eu un peu d’argent, j’habite en plein centre-ville où j’ai un accès à pleins de produits, je suis éduquée donc j’ai pu avoir accès à des livres. J’ai une super cuisine donc pour cuisiner c’est parfait. Je n’ai pas d’enfants et ça rend la transition alimentaire beaucoup plus facile parce que je

8 n’avais personne à convaincre à part moi et mon copain. Donc c’est clair que j’avais tous les trucs idéaux pour me transformer. »

Nous avons vu au cours de cette première partie que le véganisme impacte les modes de consommation de manière plus ou moins importante, nous verrons que cette pratique peut également affecter les individus socialement.

9 PARTIE 2 : LES FORMES DE L’ENGAGEMENT DU VÉGÉTALISME ET DU VÉGANISME

Le véganisme s’étend des infiltrés de la L214 dans les abattoirs, dénonçant des situations de maltraitances, aux « vegans silencieux » qui se contentent de ne pas consommer de produits d’origine animale. Ceci nous a amené à nous interroger autour de la notion de « communauté » : Les vegans et végétaliens forment-ils une communauté à part entière, au sens du maître de conférences en marketing à l'université Panthéon-Assas, Jean-Baptiste Welté ?

Nous considérons que les vegans forment une communauté en ce qu’ils partagent des pratiques, croyances et valeurs communes, tels que l’antispécisme qui vise à défendre les droits des animaux. De plus, les vegans disposent d’espaces de partage tant physique (association, manifestation…) que virtuel (sites, blogs, réseaux sociaux...), dans lesquels ils se retrouvent pour échanger et partager sur leurs pratiques de consommation, notamment. Enfin, les frontières de la communauté se dessinent dans la mesure où les omnivores critiquent une forme de sectarisme de la part de la communauté vegan. Tandis que cette dernière met en avant son identité vegan, importante puisqu’elle permet de se différencier du reste de la société.

Cependant, nous apportons une nuance à nos propos car même si beaucoup envisagent la pratique végane avec une appétence collective, pour d’autres, elle suppose un engagement et une croyance uniquement individuelle.

Dans une première sous partie, nous analyserons les différentes pratiques que le véganisme peut impliquer, notamment à l’échelle internationale. Puis nous étudierons le rôle-clé que joue l’entourage pour les végans.

A) Des pratiques individuelles aux pratiques collectives

L’anthropologue Laurence Ossipow, auteure du livre La cuisine du corps et de l’âme, dans lequel elle mène une enquête sur les modes alternatifs d’alimentation et notamment du végétarisme, place au coeur de son enquête, le concept bourdieusien de l’habitus. D’après Pierre Bourdieu, nous sommes

10 socialement fortement déterminés, car nous avons incorporé dans notre façon d’être et d’agir, un système de signification et comportement propre au groupe social auquel nous appartenons. Dans la socialisation que nous recevons, nous acquérons des gestes et des façons de parler qui sont celles de notre milieu, marquant ainsi notre appartenance à ce milieu. De cette manière, il est donc difficile de sortir de cette condition sociale car nous l’avons incorporée sous forme d’habitus (Bourdieu, 1979). Laurence Ossipow a tenté de remettre en question le concept, en se demandant si toute modification du style de vie conduisait nécessairement à une modification de l’habitus (Ossipow, 1997).

Elle démontre que « les enquêtés adoptent le végétarisme pour une raison ou pour une autre, puis ils et elles y ajoutent des pratiques qui au final façonnent un nouveau « style de vie » relativement similaire d’un enquêté à l’autre. » Ces pratiques peuvent être communautaires et collectives, en se retrouvant par exemple au sein d’une association à lutter pour une même cause, mais ces dernières peuvent également être individuelles. C’est notamment le cas de Samy-Vicente Lacerda, qui nous expliquait : « le fait de devenir végétarien ça a vraiment influencé mes pratiques individuelles, à une échelle vraiment individuelle. Je considère pas forcément faire partie d’un collectif du coup… »

Par ailleurs, la position des végétariens a évolué au sein de la société avec l’apparition du mouvement vegan. Ceci peut avoir pour conséquence, une individualisation de la pratique par les individus qui ne se reconnaissent pas dans cette nouvelle pratique et qui préfèrent s’isoler. En effet, Mehdi el Mabrouk nous expliquait : « je n’aime pas ce côté de il faut absolument catégoriser les choses, j’aime pas du tout ce côté communautaire, ça finit par nous mettre dans des cases. » Dans ce sens, l'esprit communautaire peut avoir pour conséquence de freiner les adeptes du végétarisme en raison de cette stigmatisation trop forte. C’est également le cas de Guillaume Feelgood qui déclarait « J’ai aussi décidé d’arrêter de me présenter en tant que vegan parce que j’avais l’impression de m’imposer une étiquette [ … ] Quand on décide de se poser une étiquette, il est difficile de ne pas s'y identifier. Et encore plus, quand on représente une minorité, je pense que le sentiment de communauté est renforcé. Donc oui, j’avais l'impression de faire partie d'une communauté, sans pour autant le partager directement avec qui que ce soit. C'est un sentiment communautaire, pas une réalité observable. »

11 Laurence Ossipow soulignait dans son ouvrage, le fait que le véganisme se pense et se présente comme un mouvement politique. Il s’agit de défendre, en action, l’antispécisme. Il semblerait donc à travers cette dimension qu’il soit contradictoire que la pratique soit seulement individuelle et cette idée est parfois même réfutée. En effet, certains défendent l’idée qu’il ne s’agit pas tant de se changer soi, mais bien de changer la société, d’obtenir des droits pour les animaux et la nature.

En effet, le véganisme peut également être entendu comme un engagement éthique et politique visant l’abolition de l’exploitation animale. Ces dernières années ont vu naître nombre d’associations véganes vouées à proposer des alternatives de consommation par le biais de recettes, guides de sorties et brochures de sensibilisation. Elles se réunissent autour de l’envie d’éveiller la conscience du public en vantant les bienfaits d’un mode de vie vegan. Par ailleurs, quelques associations, à l’image de L214 ou encore 269 Life se sont données comme objectif de relayer l’information et de sensibiliser les populations. Cependant, nous verrons, que celles-ci se distinguent de par leurs modes d’action.

Avec plus de 36 000 adhérents et 823 000 fans sur Facebook, l’association L214, joue aujourd'hui un rôle pivot du mouvement. L214 est « une association de défense des animaux. Le principal but est de montrer les conditions d’élevage et d'abattage aussi [ … ] ils cherchent à montrer au monde la réalité des abattoirs. Chose qu’on ne sait pas parce qu’on ne montre pas forcément la différence entre l’assiette et la réalité. » nous présentait Sonia Duryn, militante L214 depuis 2015.

L214 est l’association qui est parvenue à mettre le débat sur la place publique, suscitant de nombreux soutiens. Très régulièrement, les militants L214 se confrontent au terrain et donc, à cette opinion publique qu’ils souhaitent voir basculer de leur côté, celui des défenseurs des animaux.

Tous les mois, des événements coordonnés sont imaginés par le bureau parisien de l'association, qui envoie consignes et matériels aux antennes locales. Chacune de ces antennes dispose de sa propre page Facebook privée sur laquelle sont postés les événements à venir, et ceux qui souhaitent y participer, s'inscrivent.

12 Dans l’Aisne, par exemple, Sonia Duryn s’investit pleinement dans la vie de l’association : « régulièrement je vais aller distribuer des flyers sur des thèmes précis dans la rue aux gens et leur expliquer nos démarches, ou faire la marche pour la fermeture des abattoirs. »

Les militants ne veulent pas « convaincre », mais bien « informer » et, si possible, amener les personnes à ouvrir les yeux sur la réalité de l'exploitation animale. « L214 c’est pour moi, l’association qui va pas pousser à devenir vegan, c’est à travers les images que les gens vont faire leur choix, c’est pas violent. Alors ça peut paraître violent par rapport aux images mais ils montrent la réalité [ … ] Au final, ils ne font rien de plus que de montrer les images et si ça choque, c’est la réalité qui est choquante et pas L214 » nous expliquait Sonia Duryn dans un vocabulaire choisi pour ne pas braquer, ni culpabiliser.

Sonia Duryn défend une image « correcte, sympa et accessible » du militantisme au sein de L214, bien loin de l'approche « culpabilisante » des précurseurs des années 1980 : « Les extrémistes ne vont pas adhérer à L214, ils vont être avec « 269 Life » ou c’est un petit peu plus extrémiste, « Boucherie abolition » qui sont plus connues pour être extrémistes. L214, non, on va dire que c’est « gentillet » […] L214 c’est plus faire déguster des gâteaux où il n’y a pas d’œufs, pas de lait et montrer que finalement c’est aussi bon, […] il faut y aller en douceur. »

Cependant, pour les plus radicaux du mouvement, cette perception complaisante du véganisme, ne fait pas avancer la cause. L'association 269 Life, gagne du terrain en prônant la désobéissance civile et en revendiquant des « actions violentes », comme le blocage de chaînes d'abattoirs ou le vandalisme de boucherie en centre-ville.

Tiphaine Lagarde, la présidente de 269 Life, regrette dans une interview3 que le mot « vegan » soit devenu « un label, une marque, une mode, une com­mu­nau­té, un hash­tag bran­ché, une iden­ti­té sociale, une marque de noblesse pour stars, un enro­bage gen­ti­ment idéo­lo­gique à une socié­té inchan­gée. Pourquoi ça marche ? Parce que cela pro­met une garan­tie de rébel­lion sans pour autant terrifier l’opinion publique, un sen­ti­ment d’engagement sans perdre ses repères consom­ma­toires nor­més… ».

3 « 269 Libération animale : L’antispécisme et le socialisme sont liés », Ballast, 27 décembre 2017

13 L'association 269 Life tend donc à se distancier des formes de militantisme individuelles et des modes d’actions jugés trop courtois. En effet, Sonia Duryn déclarait : « On nous appelle « Les bisounours » parce qu’on ne fait pas des actions très provocantes. » Cette hiérarchie des pratiques au sein même du mouvement vegan est également évoquée par Élise Desaulniers : « Il y a plein de vegans qui me détestent parce que je suis pas assez radicale pour eux. Il y a une espèce de police vegan dans le milieu, il y a plein de gens avec qui je me sens pas très à l’aise. »

À travers notre étude, nous avons pu identifier, selon le taux d’engagement des militants, une gradation des pratiques. Désormais, nous allons voir que les pratiques varient également en fonction des pays.

B) Un mouvement vegan international

Le mouvement vegan continue de s’étendre dans l’Hexagone, cependant son implantation est bien plus répandue dans les pays anglo-saxons et asiatiques. En témoigne, l’entrée en vigueur du décret pris par le tribunal de Norwich en janvier dernier, au Royaume-Uni, reconnaissant le véganisme comme une caractéristique protégée contre les discriminations par l’Equality Act de 2010, au même titre que les croyances religieuses. Ce passage, dans les textes de Loi, marque une forte prise de conscience de l’importance de la pratique au sein de la société anglaise.

Dans le cadre de notre enquête, nous avons décidé d’interviewer des vegans vivant dans différents pays en vue de comparer la pratique végane et son acceptation à l’échelle internationale. Nous avons eu l’opportunité de recueillir des témoignages en provenance de la Belgique, du Canada mais également de la Thaïlande.

Dya Touffier, résidant près de Phuket en Thaïlande, déclarait que le véganisme était une pratique très répandue. En Thaïlande, le véganisme est bien plus qu’une simple nouvelle pratique de consommation, il est inscrit dans les moeurs et comporte même une dimension sacrée, respectée par l’ensemble de la société.

14 « En Thaïlande, les bouddhistes en général sont vegans, dans la religion bouddhiste, Bouddha ne consommait pas tout ce qui était produits comme de la viande, lait, oeufs [ … ] Nous avons un festival vegan, une fête végane pendant 10 jours, durant laquelle les bouddhistes se purifient, en Thaïlande ça se célèbre et donc tout devient vegan. [ … ] C’est très très bien vu d’être vegan, là-bas quand on leur dit, tout le monde dit “Ah, c’est super bien !”. » nous expliquait Dya Touffier.

De même pour la ville d’Amsterdam, où habite sa meilleure amie : « Tout est veganisé. [ … ] Et je pense aussi que pour les gens qui veulent devenir vegan c’est plus simple, ils ne se sentent pas jugés. Il n’y a pas cette pression sociale que l’on peut avoir par exemple, en France. »

Au Canada, la pratique végane occupe également une place importante au sein de la société. Elise Desaulniers, résidente au Québec, déclarait : « J’ai rencontré plein d’amis dans le milieu vegan au Québec et ailleurs dans la francophonie dans le monde. Il y'a quelque chose qui nous unis je pense. Il y a quelque chose de beau. Il y a comme une espèce de dénominateur commun qui est très très chouette. »

Par ailleurs, dans certains pays européens, le marché vegan ne semble pas assez développé pour les partisans. En effet, Alen Tariq résidant en Belgique nous expliquait : « Je trouve que ce n’est pas très développé ou pas assez. Moi qui suis parti à Berlin pour découvrir un autre mode de vie… C’est super développé, le système de consommation végétarien et vegan sont méga-développés ! Et je trouve qu’à Bruxelles, on est hyper en arrière dans le véganisme et que ça ne va pas assez vite. Par exemple, à Berlin il y avait vraiment des snacks végétariens et vegans, tu peux tout retrouver en vegan. Tu vas dans un centre commercial, la grande majorité des commerces sont végétariens, au Lidl pareil, la grande majorité des rayons sont végétariens. C’est impressionnant ! »

Après avoir étudié les différentes formes de l’engagement vegan, avec une dimension internationale, nous allons désormais voir que le passage à un mode d'alimentation alternatif peut avoir pour conséquence une rupture des liens avec l’entourage omnivore et une entrée dans de nouveaux réseaux de sociabilité.

15 C) De la communauté à l’exclusion

o Internet et les réseaux sociaux, espaces de partage

Internet a joué un rôle crucial dans le combat des vegans. Il a notamment assuré la diffusion massive des vidéos sur la maltraitance animale de L214, vues plusieurs millions de fois. Grâce à internet, l’association L214 est parvenue à déplacer le débat de la sphère intime à la place publique, suscitant de nombreux soutiens. , professeur à l'université de Californie, explique dans son livre Végétarisme et ses ennemis, qu’« internet a joué un rôle décisif parce qu'il a permis de casser la parole unique de l'industrie à propos de la nécessité de manger de la viande et des produits laitiers ». C’est d’ailleurs ce que met en avant Cheyma Bourguiba : « Je considérais que les produits d’origine animale occupaient une place légitime dans l’équilibre de mon alimentation... Et c’est ce qu’on nous apprend à l’école et dans les médias. […] En devenant vegan, j’ai pris du recul vis-à-vis de la société de consommation et des messages publicitaires qui nous incitent à consommer d’une certaine manière pour être en “bonne santé”. »

Les écrivains et les universitaires ont eux aussi participé à rendre la cause visible et légitime, à l’image d’Elise Desaulniers qui a créé son blog Penser avant d’ouvrir4 la bouche, pour partager ses lectures : « Je sentais quand même qu’il y avait un manque d’information en français sur ces enjeux d’éthique alimentaire, donc je voulais partager », nous expliquait-elle.

Internet a également permis d’apporter quotidiennement, un soutien aux membres de cette communauté marginalisée au sein de la société, à travers la création de blogs et de pages véganes sur les réseaux sociaux. En effet, les réseaux sociaux fédèrent et, comme pour toute minorité, créent un sentiment d'appartenance. Cheyma Bourguiba persuadée d'être seule à l’époque, s’est rendue compte qu’ils étaient en réalité des milliers : « Lorsque je suis devenue vegan, je m’étais rapprochée de pas mal d’associations comme l’Association Végétarienne de France et la Société Végane Française qui apportent un grand soutien moral. Puis, je trainais pas mal sur internet, c’est un bon moyen de se faire

4 Blog d’Élise Desaulniers, Penser avant d’ouvrir la bouche : https://penseravantdouvrirlabouche.com

16 des contacts vegans. […] Je me suis tout de suite sentie moins seule grâce à la découverte des blogs vegans, lifestyle de filles qui me ressemblaient. »

La militante Sonia Duryn renforce cette idée d’entraide au sein de la communauté : « Quand j’ai commencé Instagram, c’était pour aider les non-vegan, les non- végétarien à démarrer ! »

Cheyma Bourguiba et Raphaël Francisco sont notamment parvenus à créer leur propre communauté en les fédérant autour d’un projet commun, créer un lieu qui réponde aux besoins divers des végans. « Notre concept est né de la force de notre communauté. Tout au long du projet, on s’est beaucoup appuyés sur notre communauté et c’est grâce à leur soutien qu’on a pu concrétiser le projet. […] Elle a permis à Aujourd’hui Demain d’exister, elle nous a apporté un tremplin de communication, elle nous a trouvé des investissements, elle nous a permis de vivre tout de suite à l’ouverture… Si on n’avait pas eu les réseaux sociaux comme moteur de partage pour diffuser l’information, on n’aurait pas réussi à créer notre projet, je pense. Notre communauté Instagram, Facebook… nous a vraiment aidé et permis de convaincre les banques en démontrant qu’il y avait un réel public qui avait un intérêt concret pour notre projet. » affirmait Cheyma Bourguiba. Ce concept store représente la nouvelle génération de végan, illustrant la volonté de sortir de l'entre-soi, et se distinguer de l'image sectaire collant aux végans. Renouveler l’image associée au véganisme, faire découvrir le mode de vie vegan à un maximum de gens, et « montrer que le mode de vie vegan n’est pas si compliqué et qu’il peut même être un plaisir au quotidien. » telle est la volonté de Cheyma Bourguiba.

Dans le même objectif, la plateforme collaborative Hoomoos5, a été créée pour faciliter la vie de la communauté vegan. Elle propose un répertoire de l’ensemble des professionnels proposant des produits ou services vegan-friendly, dans tous les domaines, et dans toute la France : restaurants, vêtements, médecins, petites annonces, sorties… Encore, une fois l’implication de la communauté est au coeur du concept.

5 Site web Hoomoos : https://hoomoos.fr

17 Ainsi, nous avons pu constater l’importance de la communauté au sein du véganisme. Elle naît essentiellement sur les réseaux sociaux et constitue un soutien considérable, au cours de la transition alimentaire mais aussi lors de la création de projet vegan.

o La pratique végane comme stigmate

De nos jours, nous nous construisons socialement par l’alimentation, qui est au fondement des identités collectives. Dans ce sens, la non-consommation de viande dans une société où celle-ci occupe une place importante dans les repas, fait du végétarien/vegan, un « déviant » autour de la table. D’après le sociologue Howard Becker, « sont qualifiés de déviants les comportements qui transgressent des normes acceptées par tel groupe social ou par telle institution » (Becker, 1985). Dans ce sens, la pratique vegane peut être considérée comme une déviance de par sa marginalisation au sein de la société française. En effet, selon Becker un acte ou un trait n'est jamais intrinsèquement déviant, mais est plutôt étiqueté comme tel.

La notion de stigmatisation introduite par le sociologue Erving Goffman nous semble également pertinente pour appréhender les relations qui unissent les omnivores et les vegans. Dans son livre Stigmate. Les usages sociaux des handicaps, Goffman analyse une relation de stigmatisation liant une personne dite « normale » et un « handicapé » physiquement ou socialement. D’après le sociologue, l’existence du stigmate relève du regard d’autrui, c’est-à-dire que le stigmate devient stigmate parce qu’on le désigne comme stigmate. Cette stigmatisation encourage donc, les jeunes vegans à la discrétion, et rares sont ceux qui parlent de leur régime en guise de présentation. Le vegan cherche à masquer sa déviance pour paraître « conforme » vis-à-vis de la norme et met donc en place une stratégie de faux-semblant devant l’omnivore. Selon Goffman, la stratégie du faux-semblant concerne les stigmates qui ne sont pas directement visibles, comme la religion, le régime alimentaire... Il s’agit de dissimuler le stigmate en contrôlant les informations que nous donnons à l’autre. C’est notamment la stratégie mise en place par l’étudiant Samy-Vicente Lacerda qui nous disait présenter sa caractéristique végétarienne, seulement quand le moment du partage du repas arrivait, autrement dit jusqu’au moment fatidique où il se sentait obligé de la mentionner : « Je pense qu’il y a de la pudeur dans mon choix de régime alimentaire, je ne le crie pas sur tous les toits. Je le dis juste quand on me propose de la viande ou quand on me

18 demande ce que je vais manger mais en gros je l’écris pas sur ma tête et j’en fais pas une fierté. » Pudeur partagée par Mehdi el Mabrouk qui nous expliquait : « Moi dire “Oui je suis végétalien” bah non je le revendique pas, je fais juste attention à ce que je mange et je fais en fonction de ce qui me correspond et de ce qui me convient. »

Guillaume Feelgood a notamment décidé d’arrêter sa pratique végétarienne pour justement « ne plus avoir l’impression de s’imposer une étiquette. » Cette décision lui permet de ne plus afficher sa « déviance » et ainsi de fuir les préjugés que la société lui imposait.

Le stigmate relève donc d’une construction sociale et dépend ainsi, des normes propres à chaque société. Cette stigmatisation serait commune aux pays européens où la viande occupe une place importante et peut notamment avoir pour conséquence un rejet du stigmatisé au sein de la société. En effet, un changement alimentaire peut également impacter les relations sociales. D’après Frédéric Dupont et Estiva Reus « La difficulté du végétarisme chez ceux qui en ont l’expérience n’est pas d’ordre gustatif ou sanitaire mais bien social. Elle tient au fait qu’ils vivent dans un environnement carnivore. Les actes de consommation les plus ordinaires peuvent devenir compliqués, surtout lors des repas pris à l’extérieur ou lorsque les autres membres de la famille ne sont pas végétariens. » (Dupont et Reus, 2012). Deux des personnes interviewées ont arrêté la pratique végane en raison de la pression trop forte qu’exerçait leur entourage.

Nous avons identifié le repas comme une situation stigmatisante pour la plupart des vegans. En effet, ne pas manger de produits issus de l’exploitation animale constitue un reniement des traditions familiales. Cela suppose également que les proches, les amis, les hôtes, préparent un menu spécial vegan. Il y a donc une crainte de déranger qui se fait ressentir, additionnée au fait que le vegan devient souvent le sujet de raillerie lorsqu’il est en minorité dans son groupe d’amis, comme nous l’a confié Étienne : « Je trouvais que socialement c’était parfois un peu pesant : c’est une pratique encore marginale, donc pour chaque dîner qu’on fait chez quelqu’un, il faut prévenir les hôtes, demander si on peut avoir quelque chose à part, puis forcément le sujet reviendra sur le tapis pendant le repas, à base de “Ah, tu es vegan ? Pourquoi ?” avec bien entendu des blagues, toutes très drôles et originales... T’as vite l’impression d’être l’animation du repas. Puis, on va se retrouver à une raclette ou un barbecue à devoir “défendre la cause”, ça devient lourd. Bref, pour

19 une pratique personnelle à la base, ça demandait beaucoup d’implication auprès des autres, et ça me plaisait pas. »

De même pour Alen Tariq, pour qui les repas étaient devenus synonymes d’angoisses : « Ça a complètement ruiné ma vie sociale [ … ] À tous les repas, j’avais le droit à une réflexion ou bien on me disait “Bah écoutes, manges l’apéritif qui est à base de tzatziki, je te fais que des pâtes sans sauce… “ J’étais vraiment dévalorisé, on essayait de me mettre mal à l’aise à chaque repas. J’étais vraiment mis de côté. Et puis même au niveau social, je subissais beaucoup de critiques, d’insultes c’était vraiment dur… » nous racontait-il.

Ainsi, le véganisme peut également mener à l’isolement en causant la rupture des liens avec les omnivores. Sans soutien moral, il apparaît difficile de poursuivre la pratique végane. Nous notons cependant, une certaine gradation des détériorations sociales, entre les végétariens et les vegans. Les relations sociales avec les omnivores se dégraderaient davantage pour les vegans que les végétariens. Par conséquent, être vegan peut s’avérer difficile d’un point de vue social en raison d’une compréhension encore fragile de la part de l’entourage. Comme l’ont mis en avant plusieurs interviewés, les végans se sentent souvent incompris quant à l’adoption de cette pratique et sont sujets à de nombreux stéréotypes pouvant parfois conduire jusqu’à une forme d’exclusion. Paradoxalement, nous assistons au développement d’une accessibilité plus grande du véganisme, notamment dans le secteur de la restauration et de l’industrie agro-alimentaire.

20 PARTIE 3 : L’ESSOR DU MARCHÉ DU VÉGANISME

Depuis quelques années, nous assistons à une véritable structuration du marché du véganisme. Ce marché est de plus en plus investi par de nombreux producteurs d’offres véganes : restaurants, marques, géants de l’agroalimentaires et influenceurs.

A) Le développement de nouvelles marques spécialisées

Longtemps considéré comme un régime alimentaire austère, voir sectaire, le véganisme a, depuis peu, vu son influence progresser rapidement au sein de l’hexagone. Les magasins spécialisés dans l’alimentation végane se multiplient, notamment dans les grandes métropoles à l’image de Paris où nous pouvons nous balader dans le Veggie Town, surnom que donne l’Association Végétarienne de France à un végé-quartier. Émergent en pleine effervescence dans le 10ème arrondissement de la capitale, nous retrouvons au sein de ce quartier de nombreux restaurants et magasins spécialisés dans le véganisme et le végétalisme.

Le marché vegan a notamment conquis et inspiré une nouvelle génération d’entrepreneurs passionnés et engagés dans la cause vegane, à l’image de Cheyma Bourguiba et son associé Raphaël Francisco. En 2017, ces deux entrepreneurs ont ouvert un concept-store 100% vegan au centre de Paris, avec pour objectif de rendre la culture végane plus accessible. Au cours d’une interview, Cheyma Bourguiba nous expliquait le projet : « On a décidé d’ouvrir un concept-store parce que c’était le seul modèle qui nous permettait de proposer une gamme de produits aussi large, une boutique, un coffee shop, une épicerie… Et aussi parce qu’un concept-store, c’est un lieu de vente avec un concept derrière, et pas juste un magasin pour faire ses achats. Avec Aujourd'hui Demain, on voulait permettre aux adeptes du véganisme, et surtout à ceux qui souhaitent se lancer, de trouver dans un même endroit tout ce dont ils ont besoin, sans se prendre la tête, en confiance et sécurité sur le choix des produits. » En effet, le concept-store est un lieu hybride qui propose dans 150 mètres carrés, une grande variété de produits, tous garantis 100% vegan : « Par exemple, nos produits alimentaires et cosmétiques ne contiennent pas d’huile de palme. Et pour la mode, nous sélectionnons des produits qui sont conçus en Europe, par des enseignes engagées dans la préservation de

21 l’environnement et qui garantissent des bonnes conditions de travail aux ouvriers. » nous expliquait la fondatrice. Le concept-store repose en effet, sur une véritable idéologie avec des principes écologiques mais aussi éthiques, ce que de plus en plus de clients recherchent. Ce concept-store est d’ailleurs né d’une étude de marché réalisée par le biais d’un questionnaire auquel ont répondu la communauté d’Aujourd’hui Demain, « sur leurs habitudes de consommation, leurs attentes sur les produits qu’elles aimeraient trouver dans un concept store vegan… Et c’est ça, qui nous a permis très vite de poser les fondations de notre concept store » nous expliquait Cheyma Bourguiba. Ainsi le succès de ce projet, repose principalement sur sa capacité à répondre à un besoin, soit proposer une large offre de produits, en adéquation avec les valeurs éthiques, écologiques des consommateurs.

Ceci fait notamment référence au concept de « consom’acteur » développé par la sociologue Sophie Dubuisson-Quellier, qui illustre la prise de pouvoir du consommateur sur le marché, à travers ses modes de consommation. Consommer autrement serait une manière de vivre autrement en promouvant, ou au contraire, en boycottant des pratiques, des produits, des filières ou encore des marques. Ainsi, les consommateurs auraient conscience d’être des acteurs déterminants dans ce lieu d’expression et d’espace politique que représente la consommation. La sociologue théorise l’idée que la dimension politique de l'engagement à travers l'acte d'achat peut apparaître lorsque « le consommateur a accès à un espace de choix qui ne porte pas simplement sur les propriétés des produits [ les labels par exemple ] mais sur celles de systèmes de production » (Dubuisson-Quellier, 2011). Comme vu dans la partie précédente, les scandales révélés par l’association L214 ont scandalisé les consommateurs et altéré certains modes de production. En effet, l’ex-végétarien Guillaume Feelgood nous expliquait porter une attention particulière à la provenance des produits qu’il consomme et notamment bannir les systèmes de production d’élevage intensif : « Occasionnellement, je mange de la viande blanche et rouge, issues de filières locales et dont je peux identifier l'origine. Je fais très attention à cela, par exemple pour les oeufs t’as un petit numéro qui est sur l’oeuf qui te permet de savoir si les poules ont été élevées en plein air, si les oeufs sont bio ou si les poules ont été élevées en cage et donc là, il faut surtout pas y toucher. »

22 Par conséquent, nous pouvons considérer que l’individu par son acte de consommation possède un pouvoir et peut exercer une influence sur le système alimentaire. La consommation est donc de plus en plus réflexive et informée puisque les individus sont davantage éduqués à la consommation. En illustre également, les propos d’Elise Desaulniers : « Je fais aussi attention de plus en plus à moins consommer [ … ] des jeans H&M, produits dans des conditions de merde par des employés qui sont super mal traités et puis l’impact sur l’environnement c’est pas super non plus. Donc, j’ai beaucoup moins de plaisir à consommer qu’avant. Avant, j’aimais bien aller chez H&M ou n’importe où et acheter de super trucs. Quand le printemps arrive, on a tous envie d’avoir de petites robes fleuries, mais plus ça va et moins j’ai envie de ça. Ça me fait un peu comme les produits d’origine animale, ça me dégoûte presque, donc j’essaie de consommer le moins de vêtements possible, d’acheter des trucs d’un peu de meilleure qualité. » De même pour Florine Rolland, qui a fait un grand tri dans sa consommation et se refuse désormais d’acheter des produits ne correspondant pas à ses valeurs : « Toutes les marques du type L’Oréal, j’utilise plus du tout, en fait les gros groupes industriels où je sais que ça les intéresse pas de faire des efforts pour les tests sur les animaux, j’ai banni. » nous confiait-elle.

Au cours de notre enquête, nous avons également eu l'opportunité d’interviewer Florian Tellitocci, le Chef des ventes de Les Nouveaux Fermiers, une marque française avec un principe simple : réinventer la viande animale à partir d’ingrédients végétaux naturels et locaux. L’objectif est de proposer « une viande végétale indifférenciable de la viande animale », que ce soit « pour le goût, la texture ou encore l’odeur. » Ils proposent à la vente trois types de produit : « On a du steak, on a du poulet et des nuggets. Le poulet, si je vous le fais manger demain, il y a peu de chances que vous réalisiez que ce n’est pas du poulet, si je vous le dis pas. […] Voilà, donc en ça, c’est quelque chose de très innovant.» nous expliquait Florian Tellitocci.

Tout comme le concept-store Aujourd’hui Demain, Les Nouveaux Fermiers sont sensibles aux causes écologique et animale. Ils ont notamment à coeur de promouvoir les circuits-courts français à travers leur concept. Soutenue par une progressive prise de conscience collective, ils sont persuadés que dans un futur proche les pratiques de consommation carnée évolueront fortement et que leurs produits seront dès lors, une bonne alternative.

23 En effet, Florian Tellitocci, nous expliquait : « Les gens sont assez passionnés par nos produits, et ont attendu avec impatience notre sortie », ce qui est une source d’encouragement pour chaque projet. Par ailleurs, leurs produits seront bientôt commercialisés dans de nombreux restaurants vegans branchés de la capitale tels que : « PNY Burger, Paris-New-York burger par exemple », mais également au sein de « Carrefour et Monoprix à partir de Juin ». Ceci démontre bien la place de plus en plus importante qu’occupe le marché vegan au sein de la société. Cependant, l’aspect éthique du projet peut être remis en question. D’autant plus que, Florian Tellitocci nous avait confié fièrement, l’investissement de partenaires influents dans le projet : « On a fait goûter à pas mal de personnes et notamment à Xavier Niel, et au patron de l’enseigne Sushi Shop, qui ont tous les deux investis dans notre société avec plusieurs autres personnes, nous venons de lever 2 millions d’euros ». Ainsi, l’idéologie ne résistera sûrement pas à l’envie du business, puisque Florian Tellitocci, nous avait expliqué que pour développer leur business ils devraient peut- être faire quelques concessions éthiques, en déclarant qu’une collaboration avec l’enseigne McDonald’s faisait actuellement « débat dans les bureaux ! » Il est en effet, incontestable qu’une collaboration avec McDonald’s, acteur international de la restauration rapide, remettrait en cause tous les principes sur lesquels la marque s’est construite et a communiqué.

Par conséquent, nous pouvons considérer que l’impact de ces commerçants vegans, en développement, reste encore relativement modeste en France, et se cantonne généralement à la capitale. Les interviewés vivants en province ont largement déploré le manque d’accès à ces offres alternatives, ce qui les poussaient à se tourner vers les grandes surfaces.

B) Le marché vegan : une opportunité saisie par les grands groupes

Les grands groupes se développent et se mettent eux aussi à la tendance du véganisme. Pour ne pas perdre de part de ce marché en pleine expansion, ils multiplient leurs moyens d’actions et investissent progressivement l’espace publicitaire.

24 Les ventes de produits végétariens et vegans ont généré en 2019 un chiffre d’affaires en hausse de 24 %, (soit environ 380 millions d’euros), dans les grandes et moyennes surfaces françaises, selon des données publiées par l’institut d’études privé Xerfi. Cet institut anticipe pour la période 2019-2021 une progression annuelle moyenne de 17 % du marché de l’alimentation végétarienne et végane dans les grandes et moyennes surfaces, avec un chiffre d’affaires qui dépassera ainsi les 600 millions d’euros d’ici trois ans. L’institut souligne également, que si le « tout végétal » se heurte encore à des « barrières culturelles de taille », le flexitarisme sera l’un des principaux moteurs du marché.

Les distributeurs et les industriels croient en ce nouveau marché. Les supermarchés ont en effet, vu leurs rayons évoluer ces dernières années, pour consacrer aujourd’hui, des étalages entiers aux produits végétariens, gluten free ou même vegan. Le distributeur Carrefour avec sa gamme “Veggie” a été le premier à se lancer dans le marché vegan, en 2015, à la suite d’un sondage sur le « bien manger » auprès de ses clients, source de propositions. Puis, ont suivi diverses enseignes telles que Auchan avec « Envie de Veggie », Système U avec « Bon et Végétarien », Les Mousquetaires avec « Veggie Marché », ou encore plus récemment Picard avec sa gamme « Tout bon tout veggie ». L'enseigne de magasins bio du groupe Monoprix, Naturalia, a même ouvert trois magasins bio, tous 100 % vegan en Île- de-France.

Les enseignes de distribution n’étant pas les seules à réaliser le potentiel du marché, certaines grandes marques ont elles aussi fait évoluer leurs gammes de produits, proposant des alternatives végétales. En 18 mois, Nestlé est devenu avec Herta, le leader du traiteur végétal, avec une part de marché de 28 % selon l’institut Xerfi. Les acteurs historiques, tels que Triballat avec Sojasun, ou Nutrition et Santé avec , ont brusquement été rétrogradés à « des positions d'outsiders tout en ayant augmenté leurs ventes ».

La tendance végane dépasse l’alimentaire et touche donc également le marché des cosmétiques et du textile. Le géant Unilever a créé sa marque beauté Love Beauty and Planet en 2017 aux Etats-Unis, lancée sur le marché français en 2019 au sein de l’enseigne Sephora. Du côté textile, les initiatives ne sont pas très nombreuses mais prometteuses. La maison de haute couture Stella Mc Cartney, bannie désormais tous les produits issus des animaux et devient la première marque de luxe vegane.

25 Quant au célèbre scellier Hermès, il pense actuellement à proposer une alternative en cuir végétal pour son iconique sac Birkin.

Cette tendance vegane est si forte, au point qu’aujourd’hui nous parlons même de « vegan marketing ». En effet depuis quelques années de nombreux labels vegans fleurissent : « Cruelty free », « Vegan society », « Expertise Vegan Europe » et bien d’autres. La multiplication de ces labels et des mentions véganes noient les consommateurs au point d’en devenir même irritant pour certains, comme en témoignait Florine Rolland, notamment interpellée par la publicité Fructis Hair Food, un soin pour les cheveux de la marque Garnier « dans la publicité à la télévision, c’était limite si le mot vegan était écrit plus gros que la marque, ils en usent et en abusent ».

Nous pouvons citer, l’enseigne Leclerc, qui a créé en février 2020 avec l’agence BETC, un film publicitaire avec pour objectif de célébrer et aider tous les Français qui ont décidé de consommer autrement. Selon Leclerc, « Ils sont des millions à changer leurs habitudes., en faisant davantage par eux-mêmes, en achetant plus local, plus bio, en réduisant leur consommation de produits animales, en triant, en lisant les étiquettes, ils ont pour objectif de bien manger au quotidien, de préserver leur santé et protéger l’environnement. Mais consommer autrement ce n’est pas si facile au quotidien, Leclerc s’engage à rendre toutes ces nouvelles consommations accessibles ». Ce film publicitaire nous plonge aux côtés de tous ceux qui s’efforcent non sans mal, à changer leurs habitudes pour une consommation plus citoyenne, raisonnable et éthique, favorisant les circuits courts et le Do It Yourself à travers la fabrication de leurs propres produits cosmétiques et ménagers... autant d’arguments qui résonnent chez les personnes que nous avons interrogées. Ces nouvelles formes de consommation sont désormais prônées dans les messages corporate des grands groupes, qui cherchent à toucher cette clientèle avertie et exigeante.

Cette adaptation de la communication n’est pas passée inaperçue. En effet, Étienne a remarqué « en cinq ans une vraie évolution dans les messages des marques ». Toutefois, le reste de notre échantillon interrogé, déclare ne pas être sensibles à ces publicités. Nous pouvons cependant nuancer cette insensibilité aux messages publicitaires. En effet, lors de l’entretien avec la flexitarienne Florine Rolland, celle- ci nous a inconsciemment cité le slogan de la pub Naturellement Flexitarien : « Aimez la viande, mangez-en mieux. », lorsque nous lui avons posé la question

26 « As-tu déjà été sensible à une publicité vegan ? ». Ceci démontre bien que l’impact inconscient de la publicité.

La publicité vidéo de Naturellement Flexitarien, actuellement sur nos petits écrans, met en scène Thomas, un flexitarien, qui essaye de s'adapter aux moeurs et problématiques actuelles. Florine Rolland nous a confié ne pas apprécier cette publicité. Elle trouve que même si le but est d’adopter une alimentation plus raisonnée ça ne la « déculpabilisera pas de manger des êtres vivants. »

La majorité des personnes interrogées considère l’adaptation des grandes surfaces et des groupes agroalimentaires au véganisme comme de l’opportunisme. Mehdi El Mabrouk déclarait à ce propos : « C’est un business comme un autre, ils sont là pour faire de l’argent ». Avis partagé par Cheyma Bourguiba : « C’est pas toujours très éthique. C’est plus du business, que du militantisme. Pour moi, il ne sont pas vraiment engagés. »

Cependant, pour Florine Rolland, l’adaptation des supermarchés a l’avantage de faciliter la pratique : « Maintenant, on trouve de tout, même en grande surface, après de manière générale je trouve que pour les vêtements, cosmétiques, alimentation y a des alternatives partout. » De même, pour Sonia Duryn, l'adaptation des grands groupes industriels aux pratiques véganes est une bonne chose, qu’il ne faut pas négliger puisque cela peut, à terme, déboucher sur une industrie 100% végane : « Moi je trouve ça bien parce qu’ils se mettent dans le mouvement […] mais après je trouve ça bien parce que tout le monde n’a pas forcément la possibilité de pouvoir se déplacer dans des enseignes spécialisées […] donc le fait que les supermarchés le fassent, bon c’est beaucoup du végétarien, mais je trouve ça bien notamment de mettre du Alpro, du lait végétal... » Cependant, la militante regrette l’arrivée tardive de ces pratiques : « C’est justement ce que j’aurais aimé, à l’époque où j’ai arrêté la viande. À l’époque, il n’y avait aucun produit végétal dans le commerce, à part du nature et encore, et c’est ça qui manquait à mon époque. Parce que j’avais 16 ans, j’habitais chez mes parents, c’est ma mère qui me faisait plus ou moins à manger et quand j’ai arrêté la viande, elle savait pas quoi faire en fait et même moi je ne savais pas par quoi remplacer au départ. »

27 Par ailleurs, nous avons relevé quelques paradoxes de consommation, au cours de notre enquête, à l’image de Dya Touffier qui déclarait à propos de la marque Doc Martens : « J’ai acheté des chaussures vegans, alors que eux leur business c’est clairement le cuir quoi. Donc bon, on essaye de faire au mieux mais c’est pas toujours facile, on tend à être parfait mais on ne le sera jamais ». D’autres exemples sont également flagrants, telle que la marque Alpro, spécialisée dans les produits laitiers végétaux alors même qu’elle fait partie du groupe Danone ou encore la marque Herta, qui tire son business de l’exploitation animale, tout en commercialisant une étroite gamme de produits végétaux. Nous pouvons d’ailleurs, en ce moment retrouver sur nos écrans, la publicité de Herta pour les « Bons steaks végétaux ». Cependant, d’après la militante Sonia Duryn cette communication et plus généralement, l’adaptation de la marque Herta ne fonctionne pas. Elle déclarait à ce sujet :« Herta qui va faire le “Bon Végétal”, pour moi ce n’est pas forcément vegan, c’est juste montrer qu’on peut manger autrement parce que c’est “tendance” à l’heure actuelle. Pour moi ce n’est pas vegan ! Parce qu’à côté de ça, Herta dans l’esprit des gens c’est le jambon, et je ne sais pas ce qu’ils font d’autres comme viandes mais voilà, moi Herta j’ai aussi l’image du jambon dans la tête donc, faut changer les mentalités, mais pour moi non c’est pas vegan. »

Ainsi, la majorité des interviewés s’accordent sur le fait que l’adaptation des marques, dans un objectif plus ou moins éthique, permet à des personnes non vegans de faciliter l’évolution des pratiques de consommation du plus grand nombr et donc, par extension, de servir leur cause. Selon Mehdi El Mabrouk, « ça permet quand même à des personnes qui veulent changer d'alimentation de savoir quoi acheter sans connaître les bases sur l'alimentation et les nutriments ». Samy-Vicente Lacerda, quant à lui, pense que l’adaptation des marques : « c’est voué à être durable, dans le sens où avec tout ce que notre planète a face à elle comme défis à relever, je pense que ça va devenir un problème public… donc mode peut-être, business peut-être mais dans tous les cas, l’effet de mode va aider, voire favoriser la durabilité de la cause. »

Par conséquent, les avis divergent quant à l’adaptation des marques au véganisme, et la communication qui en résulte. À travers, les nouveaux moyens de communication digitaux, les influenceurs ont eux aussi participé au développement du véganisme.

28 C) Les ambassadeurs du véganisme : les influenceurs

Sur le réseau Instagram les comptes d’influenceurs vegans et végétariens se multiplient. Le hashtag #vegan a dépassé les 87 millions de posts sur Instagram en 2020. Sur ce réseau où le beau prime, les plus engagés sont les femmes qui publient près de 62% des posts à ce sujet, en France. 6

Le sociologue Paul Lazarsfeld, connu pour ses travaux sur les effets des médias sur la société, a introduit le concept de « leader d’opinion » qui stipule qu’un individu, contrairement à ce qu’il pense, ne contrôle pas ses actes de manière autonome en raison de l’influence plus ou moins forte de ce qui l'entoure (Lazarsfeld, 1944). Les leaders d’opinions, peuvent être rapprochés de ce que l’on appelle aujourd’hui les « influenceurs », qui, de par leur éloquence et connaissance sur un sujet, sont très exposés médiatiquement et bouleversent ainsi, les codes du marketing. Perçu comme un canal médiatique entre le consommateur et une marque, le leader d’opinion du XXIème, soit l’influenceur est en mesure, grâce à sa proximité, de convaincre les hésitants, et de vendre non pas ici un produit, mais bien un style de vie. L’étudiant Samy-Vicente Lacerda déclarait, avoir découvert la pratique végane à travers ce biais : « Il y avait des personnages dans les séries que je regardais qui l’étaient et des célébrités qui en parlaient beaucoup ». L’image du vegan sur les réseaux sociaux impacterait davantage les millenials comme nous le révèle l’enquête réalisée par , 42% des adeptes ont entre 15 et 34 ans, contre seulement 14 % chez les plus de 65 ans. Elise Desaulniers, nous confiait à ce propos, qu’une fille de 14 ans était plus susceptible de suivre des comptes d’influenceurs et que son influence passe davantage par les livres et donc toucherait des personnes plus âgées : « Moi c’est un livre d’un philosophe, mais je pense pas que ça va pas toucher la jeune fille de 14 ans qui passe ses journées sur Tik Tok. »

De nombreuses célébrités, à l’effigie de Nathalie Portman, Miley Cyrus, Beyoncé ou bien encore Novak Djokovic, profitent de leur notoriété pour participer à la communication autour de ce sujet. En effet, leur influence sur les réseaux sociaux est importante et par l'effet d'imitation, touche un large public. L’objectif étant

6 « Végans et végétariens à l'épreuve des réseaux sociaux », Snacking, 11 avril 2018

29 d’être source d’inspiration et potentiellement d’être à l’origine d’une transition alimentaire.

Cependant, il ne faut pas nécessairement être une célébrité pour se revendiquer « influenceur », un expert sur le sujet ou même un consommateur peut endosser ce rôle. Dya Touffier (@popcorndouce - 19,5K followers), Sonia Duryn (@sonia_duryn - 10,8K followers), Mehdi El Mabrouk (7 278 followers), ou même Élise Desaulniers (@edesaulniers - 3 442 followers) sont tous considérés comme influenceurs au regard du nombre de followers et pour autant ils ne se revendiquent pas comme tel.

En effet, sans vouloir influencer les comportements, ils souhaitent aider leurs lecteurs et créer une intimité, en produisant du contenu visible par tous. Dès lors, des échanges et des relations s’établissent et ainsi se créée une communauté, partageant les mêmes valeurs. Selon Lazarsfeld, cette communication interpersonnelle, les leaders d’opinion sont perçus comme un membre proche, dans lequel nous avons confiance et ainsi la transmission de leurs messages n’est pas perçue comme de l’influence directe.

C’est notamment le cas de Mehdi El Mabrouk, qui à travers son compte Instagram tente d’éduquer sur les bienfaits et sensibiliser les personnes au véganisme : « De par mon rôle de coach sportif, je suis dans l’éducation donc j’apprends aux gens comment faire du bien à leur corps donc je fais la même chose pour l’alimentation. […] Je préfère sensibiliser les gens et après tu fais le choix que tu as envie de faire à partir du moment que tu es informé que tu sais ce que tu manges, c’est à toi de faire ton choix » nous expliquait Mehdi El Mabrouk à propos de sa démarche. Même approche pour Sonia Duryn, qui souhaitait avant tout aider à travers son compte Instagram : « À la base, quand j’ai commencé Instagram, c’était pour aider les non- vegan, les non-végétarien à démarrer, parce que lorsqu’on débute on sait pas par où commencer, comment cuisiner, on pense que c’est compliqué, qu’il faut pleins d’ingrédients mais non en fait, il n’y a aucune difficulté et il y a pleins d’alternatives. J’essaye de faire au plus simple, bon après il y a aussi quelques plats compliqués mais ce n’est pas le but de ma page ! » nous racontait-elle. Enfin, Élise Desaulniers, de par la création de son blog « Penser avant d’ouvrir la bouche », la rédaction de livres tels que Le défi végane : 21 jours (2016) ou Tables Véganes : Menus D'ici et D'ailleurs (2019) et ses apparitions médiatiques, souhaite également partager ses

30 connaissances avec le public pour pallier au « manque d’informations en français sur ces enjeux d’éthique alimentaire. »

Ainsi, ils sont vegans, pour certains influenceurs, et pour autant d’après nos interviews, il n’y a pas, de « réels ambassadeurs » du véganisme connus, ou du moins reconnus comme tel. Pour eux, l’objectif est simplement de créer un contenu inspirationnel pour contrebalancer les discours extrémistes décrédibilisant la cause et contraire à leurs valeurs. Mehdi El Mabrouk nous confiait : « Je t’avoue je n’en suis pas trop parce qu’ils ont tendance à avoir des discours extrémistes et j’aime pas trop ce truc de jugement sachant que moi c’est pas du tout dans mes valeurs. » De même, pour Samy-Vicente Lacerda : « J’ai pas envie que les ambassadeurs des causes vegan, animales, végétariennes... soient radicaux au point d’avoir pour effet néfaste de décrédibiliser la cause. » clamait-il.

Pour ainsi dire, chacun est libre de communiquer et de s’exprimer sur le véganisme, et comme nous l’évoque Élise Desaulniers, « il y a des gens qui parle de véganisme à leur communauté, une politicienne parle aussi de véganisme à sa communauté, une vedette vegane aussi, une intellectuelle aussi. » Par conséquent, les représentations du véganisme, les causes pour lesquelles nous devenons vegan, sont propre à chacun : « Le véganisme est pour tout le monde, il n’y a pas un véganisme mais des véganismes comme d’autres mouvements sociaux. »

31 Pour conclure, à l'heure de l'urgence climatique, le mouvement vegan se nourrit de nombreuses idées convergeant vers un refus de normaliser la consommation de produits animaliers. Exclure la consommation de chair animale de son régime alimentaire peut être liée à de nombreuses motivations : santé, environnemental, éthique vis-à-vis du bien-être animal… Ainsi, nous pouvons affirmer que les contextes culturel et sociétal remettent en cause les modes de consommation actuels et participent à leurs évolutions.

Par ailleurs, nous avons pu observer au cours de notre étude que ce mouvement s'incarne dans de multiples réseaux et différents types d’actions, allant des comportements alimentaires individuels à l’action militante directe et parfois virulente, à l’image des actions de l’association 269 LIfe. Ainsi, cette coexistence d'actions collectives et individuelles constitue un paramètre fondamental du mouvement vegan.

Ces prises de conscience s’accompagnent également de nouvelles pratiques de consommation mais aussi, et par conséquent, de nouvelles pratiques de production. En effet, nous avons constaté que les formes de résistance deviennent de plus en plus prégnantes, au point que les marques, distributeurs agroalimentaires, industriels et restaurateurs, eux-mêmes s’y adaptent en proposant de nouvelles offres, adaptées aux préoccupations socio-culturelles de ces individus. Les « professionnels du véganisme » entendus, s’accordent à dire que le marché de la restauration végane est l’avenir de ce secteur. Vue comme de l’opportunisme pour de nombreux vegans, ce développement représente toutefois, une vraie évolution dans le secteur de la grande distribution, adaptée au futur et à la diminution des ressources disponibles sur la planète. Par conséquent, une recomposition et une fragmentation des comportements et des habitudes alimentaires est donc en cours.

Par ailleurs, les réseaux sociaux ont également permis une multiplication des discours sur le véganisme. Perçu à l’origine comme dangereux pour la santé d’après les médias traditionnels, les influenceurs ont renouvelé l’image du véganisme et ont ainsi favorisé son développement. Nous avons constaté que les comptes d’influenceurs ont pour objectifs principaux d’aider des personnes dans leur transition ou encore d’éduquer sur la pratique vegane et ses bienfaits.

32 Ainsi, nous pouvons considérer le véganisme comme une culture de consommation à part entière, au sens qu’il impacte les modes de consommation actuels et participe à la construction d’un nouveau marché.

Nous avons par ailleurs, été confrontées à plusieurs difficultés au cours de notre étude. Tout d’abord, la situation sanitaire actuelle nous a poussé à revoir la façon dont nous allions réaliser nos entretiens. Au lieu d'aller directement sur le terrain à la rencontre des personnes dont le profil nous intéressait, nous avons dû déployer nos réseaux personnels pour entrer en contact avec ces derniers. Pour la plupart, il s’agissait d’approches via les réseaux sociaux Instagram, Twitter ou encore LinkedIn, qui après quelques messages débouchaient sur une interview en visioconférence ou en appel. Nous avons aussi été confrontées à des refus, ou parfois même à des réponses positives pour lesquelles aucune suite n’a été donnée et ce, malgré plusieurs relances. La deuxième difficulté rencontrée fut lors de la problématisation du sujet. Celui-ci pouvant être abordé sous différents angles, il nous a été difficile de déterminer un angle d’approche singulier et pertinent.

Enfin, nous avons également rencontré quelques limites notamment liées aux circonstances exceptionnelles. En effet, la crise sanitaire a impacté et réduit le choix de notre échantillon. Le confinement nous a contraint et nous n’avons pu nous rendre dans les restaurants, magasins, concept stores ou encore événements vegans comme prévu au départ, pour réaliser un reportage. Il s’agissait pour nous, de confronter les différentes offres véganes au sein de ses différentes structures. Enfin, il aurait été intéressant de continuer cette étude post covid-19 en allant sur le terrain, afin de recueillir d’autres témoignages et notamment d’observer la tendance du retour à la consommation, malheureusement, nous avons manqué de temps, pour cela.

Ainsi, la pratique florissante du véganisme accompagnée de l’émergence d’un marché vegan qui ne cesse de croître laissent entendre un avenir prometteur pour ce secteur. En effet, même si les Français ne se convertissent pas massivement à des régimes alimentaires spécifiques, ils sont nombreux à faire évoluer progressivement leur alimentation. Une recomposition et une fragmentation des comportements et des habitudes alimentaires est donc en cours.

33 BIBLIOGRAPHIE

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Bourdieu Pierre, La distinction. Critique sociale du jugement, Les Éditions de Minuit, 1979

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Gerber, P.J., Steinfeld, H., Henderson, B., Mottet, A., Opio, C., Dijkman, J., Falcucci, A. et Tempio, G., Lutter contre le changement climatique grâce à l’élevage, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Rome, 2014. Disponible sur : http://www.fao.org/3/a-i3437f.pdf

Goffman Erving, Stigmate. Les usages sociaux des handicaps, Les Éditions de Minuit, 1975

Joy Melanie, Introduction au carnisme : pourquoi aimer les chiens, manger les cochons et se vêtir de vaches, Éditions l’Âge d’Homme, 26 mai 2016

Larue Renan, Le végétarisme et ses ennemis, Vingt-cinq siècles de débats, Presses universitaires de France, 14 janvier 2015

Lazarsfeld Paul, Berelson Bernard, The people's choice; How the voter makes up his mind in a presidential campaign, 1944

Lepeltier Thomas, La Révolution végétarienne, Broché, 14 novembre 2013

Ossipow Laurence, La cuisine du corps et de l’âme, Éditions de la Maison des sciences de l'homme, Paris, décembre 1997

Véron Ophélie, Planète vegan, Penser autrement et agir autrement, Marabout, Paris, 24 mai 2017

35 Dubuisson-Quellier Sophie, « Le consommateur d’hier à aujourd’hui », Les Grands Dossiers des Sciences Humaines, 2011/3 (N°22)

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« Qui sont les végétariens ? », Enquête réalisée par Opinion Way pour « Terra eco », 29 février 2016 Disponible sur : https://www.terraeco.net/Sondage-qui-sont-les-vegetariens,64594.html

Berthereau Jessica, « Demain, tous véganes ? », Les Echos, 2 mars 2018 Disponible sur : https://www.lesechos.fr/2018/03/demain-tous-veganes-1019941

Du Guerny Stanislas, « Triballat Noyal se diversifie dans les céréales bio », Les Echos, 11 août 2017 Disponible sur : https://www.lesechos.fr/2017/08/triballat-noyal-se-diversifie-dans-les-cereales- bio-154747

Frants Anna, « Le véganisme est une «croyance» protégée par la loi, estime un tribunal britannique », Le Figaro, 3 janvier 2020 Disponible sur : https://www.lefigaro.fr/international/le-veganisme-est-une-croyance-protegee- par-la-loi-estime-un-tribunal-britannique-20200103

Renard Alexia, « Le véganisme, de la conviction personnelle au mouvement social”, slate.fr, 14 février 2020 Disponible sur : http://www.slate.fr/story/187491/veganisme-antispecisme-defense-animaux- actions-abattoirs-boucheries-militantisme-conviction-personnelle-mouvement- social

36 Santi Pascale, « Moins de viande, de sel, de sucre… les recommandations de l’agence sanitaire », Le Monde, 24 janvier 2017 Disponible sur : https://www.lemonde.fr/sante/article/2017/01/24/moins-de-viande-et-de- charcuteries-moins-de-sucre-les-recommandations-de-l-agence- sanitaire_5068115_1651302.html

Parigi Jérôme,« Pour l’observatoire E.Leclerc, les prix restent la priorité des Français », LSA-Conso, 6 mai 2020, Disponible sur : https://www.lsa-conso.fr/pour-l-observatoire-e-leclerc-les-prix-restent-la-priorite- des-francais,348359

« Végétarisme et véganisme : deux tendances qui pèsent de plus en plus en restauration »,Observatoiredelafranchise, 21 janvier 2019 Disponible sur : https://www.observatoiredelafranchise.fr/dossier-franchise/vegetarisme-et- veganisme-deux-tendances-qui-pesent-de-plus-en-plus-en-restauration-1750.htm

« 269 Libération animale : L’antispécisme et le socialisme sont liés », Ballast, 27 décembre 2017 Disponible sur : https://www.revue-ballast.fr/269-liberation-animale-lantispecisme-socialisme-lies- 1-2/?pdf=30745

« Végans et végétariens à l'épreuve des réseaux sociaux », Snacking.fr, 11 avril 2018 Disponible sur : https://www.snacking.fr/actualites/tendances/3803-Vegans-et-vegetariens-a-l- epreuve-des-reseaux-sociaux/

Jean-Baptiste Welté, Isabelle Dabadie, Cours de sociologie et culture de consommation, année universitaire 2019-2020

37 WEBOGRAPHIE

Site web de la Vegan Society : https://www.vegansociety.com

Site web L214 Éthique & Animaux : https://www.l214.com

Site web 269 Life France : https://www.269life-france.com

Site web Hoomoos : https://hoomoos.fr

Site web Les Nouveaux Fermiers : https://lesnouveauxfermiers.com

Blog d’Élise Desaulniers, Penser avant d’ouvrir la bouche : https://penseravantdouvrirlabouche.com

RESSOURCES AUDIOVISUELLES

Enquête sur le phénomène vegan pour les 25 ans de l’émission, Zone interdite (M6), 5 novembre 2018

Psihoyos Louie, Bong Joon Ho, Okja, Netflix, 28 juin 2017 Disponible sur : http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=241477.html

The Game Changers, Netflix, 16 octobre 2019 Disponible sur : http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=261119.html

Publicité Leclerc, “Ce n’est pas si facile de changer sa façon de consommer” Disponible sur : https://www.youtube.com/watch?v=_mgtLdqzEsA

Publicité Naturellement Flexitarien, “Aimez la viande, mangez-en mieux” Disponible sur : phttps://www.youtube.com/watch?v=u2lizGnqhTE

38 Retranscription des entretiens

Florian Tellitocci, Head of Sales "Les Nouveaux Fermiers"

Cheyma Bourguiba, Cofondatrice du concept-store vegan

Mehdi el Mabrouk, Coach sportif et influenceur vegan

Dya Touffier, Psychologue et influenceuse vegan (@popcorndouce)

Samy-Vicente Lacerda, Étudiant végétarien en journalisme

Florine Rolland, Flexitarienne et monteuse Vidéo

Sonia Duryn, Conseillère en assurance et militante L214

Elise Desaulniers, Journaliste, écrivaine et directrice générale de la SPCA (Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux) de Montréal

Guillaume Feelgood, Ex-végétarien, Naturopathe, blogueur et youtubeur en santé naturelle (@GuillaumeFeelgood)

Alen Tariq, Ex-vegan, Créateur de contenus et influenceur (Youtube, Instagram)

Etienne Pastor, Ex-vegan, étudiant en Sciences Politiques

Florian Tellitocci

Head of Sales "Les Nouveaux Fermiers". 30 ans, Parisien

As-tu adopté le mode alimentaire vegan, depuis que tu fais partie de l’équipe des “Nouveaux Fermiers” ? Eh ben un peu, ouais ! Un peu ouais, ouais, j’ai réduit ma consommation de viande, ouais, ouais, ouais, j’y pense pas mal.

Peux-tu nous expliquer le concept des “Nouveaux fermiers”, l’histoire et le positionnement que vous adoptez ? Ok ! Alors du coup, les « Nouveaux Fermiers », c’est à la base Cédric et Guillaume, donc les 2 fondateurs, euh qui se sont rendu compte que de plus en plus de personnes essayaient de réduire leur consommation de viande pour différentes raisons, que ce soit pour des raisons environnementales, pour la santé, ou même pour le bien-être animal. Le deuxième constat qu’ils ont fait, c’est que l’option végétarienne, les options végétariennes aujourd’hui en France en tout cas ne marche pas, ou pas bien puisque qu’elles ne ciblent qu’une très faible part de la population : les végétariens. Et ça, c’est une part de la population qui est plutôt stable, euh autour de 2%. Mais aujourd’hui, pour les personnes qui mangent de la viande, c’est beaucoup plus compliqué. Du coup, ils ont décidé de créer “Les Nouveaux Fermiers” et après quelques années de recherches, on a réussi à développer un produit : une viande végétale qui est indifférenciable de la viande animale. Et donc là, le but ca va être d’aller chercher justement ces flexitariens, ces mangeurs de viandes, pour les motiver à réduire leur consommation de viande avec une offre pouvant justement répondre à leurs besoins.

Du coup, la viande végétale c’est vraiment que des protéines végétales, mais qui imitent un petit peu la texture ou le goût de la viande animale ? Exactement, le goût, la texture, l’odeur. Nous, on a trois produits : on a du steak,on a du poulet et des nuggets. Le poulet, si je vous le fais manger demain, il y a peu de chances que vous réalisez que ce n’est pas du poulet, si je vous le dis pas.Voilà, donc en ça, c’est quelque chose de très innovant puisque ce n’est pas quelque chose qui existait avant. Parce qu’on retrouve souvent des galettes de soja, des haricots, … mais ça ne se substituent pas, fin ça n’a pas le goût de viande, et ça n’a pas non plus vocation à l’avoir. Et après, pour finir la présentation, après plusieurs années de recherches, on a sorti nos produits, on les a fait goûter à pas mal de personnes et notamment à Xavier Niel, et au patron du Sushi Shop, qui ont tous les deux investis dans notre société avec plusieurs autres personnes et on vient de lever 2 millions d’euros (heureux dans le son de sa voix).

Comment définiriez-vous la cible potentielle de vos produits ? Je dirais que notre cible ce sont les flexitariens. Donc ceux qui mangent de la viande mais qui souhaitent néanmoins réduire leur consommation, et aujourd’hui ça représente 39% de la population française.

Et quel est votre positionnement ? C’est plutôt en faveur de l’environnement, ou plutôt pour la cause animale voire même les deux ? Euh, bah c’est vrai que ça coche un peu toutes ces cases. Notre positionnement, ça va d’abord être l’environnement puisque en faite, on source nos produits en France et on les fabrique en France, donc le circuit-court est assez important pour nous. Euh, et après, bah pour tout ce que cela implique puisqu’effectivement produire un steak à base de protéines de plantes, ça génère 10 fois moins de CO2, ça utilise 11 fois moins d’eau, 50% d’énergie en moins enfin voilà.Et du coup, ça protège davantage aussi l’espèce animale.

Est-ce que vous pensez que ces viandes végétales seront bénéfiques pour l’environnement et pourront remplacer à terme les viandes animales ou pas du tout ? (Réflexion) Je ne pense pas que ça pourrait les remplacer totalement mais je pense que ça pourra en substituer une bonne partie. Je pense que le mangeur de viande continuera à manger de la viande de temps en temps, mais le but c’est simplement qu’il en mange de manière plus exceptionnelle et le reste du temps qu’il mange des protéines végétales.

D’accord. Et, est-ce que vous avez une explication sur le fait que ceux qui ont un régime plutôt végétal cherchent quand même à reproduire, retrouver le visuel et la texture de la viande ? Pourquoi avoir pris ce parti pris finalement ? Euh, bah du coup encore une fois parce que ce n’est pas forcément notre cible principale, puisqu’un végétarien, il a déjà fait l’effort d’arrêter la viande et de manger autre chose à la place, donc il a déjà trouvé des substituts, et il a trouvé ce qu’il aimait. Ce qu’il y a de plus difficile à déloger, c’est la personne qui mange de la viande et qui aime la manger. Cette personne-là, pour le coup, pour lui donner envie justement de faire un pas vers le végétal, on a fait un produit avec cette texture, et ce goût, qui ressemble très fortement à de la viande animale. De cette manière, la transition se fera “en douceur” et ce sera plus aisé.

D’accord. Ça donne envie de tester. Mais c’est possible ! On est en vente.

C’est très prometteur comme projet. Mais du coup, vous ne vendez qu’en grosse quantité, c’est ça ? Alors, on va être, en gros, nous on va être distribué en Grande Surface, donc commercialisé chez Carrefour et Monoprix à partir de Juin, et on va être aussi disponible dans les restaurants. Voilà c’est la partie dont moi je suis en charge notamment, et euh, voilà donc en grosse quantité, pour l’instant sur notre e-commerce, c’est à partir de 15 steaks. Parce que par rapport aux frais de livraison, commander moins de 15 steaks ne serait pas intéressant pour nous.

Et est-ce que ça va apparaître dans les restaurants bientôt ? Alors, vous êtes … euh oui vous êtes parisiennes, chez PNY Burger, Paris-New-York burger par exemple ? Voilà, c’est un restaurant de burger, qui a déjà une option de viande végétale parce qu’ils travaillent avec Beyond Meat et ça cartonne, ils en vendent des tas, ils remplacent Beyond Meat par Les Nouveaux Fermiers. Donc ils feront partie de nos premiers clients. Il y a Hank aussi, la chaîne de burger végétal. Donc voilà, après nous sommes en discussion avec d’autres comme Big Fernand, Blend etc.

Donc pour vous, on se dirige vers l’alimentation du futur ? En tout cas, c’est beaucoup plus valable que de la viande animale. Donc c’est une option viable effectivement pour le futur, alors que la viande ça ne l’est pas.

Vous êtes assez actif, sur Instagram notamment, est ce que vous avez créé une communauté en France ou avec vos pages sur les réseaux sociaux etc ? Ouais, bah ça a en effet grossi très vite d’ailleurs, on est tous un peu agréablement surpris mais oui effectivement, il y a une communauté qui est très forte derrière nous, avec des gens qui sont assez passionnés par nos produits, et qui ont attendu avec impatience notre sortie. On reçoit énormément de messages, donc effectivement ouais il y a pas mal de gens qui sont assez passionnés par le sujet, notre projet et c’est plutôt cool et encourageant (rire).

Et la tranche d’âge de votre communauté, vous savez un petit peu où est-ce qu’elle se situe ? Non. Je peux pas vous dire. On a vraiment tous les profils et tous les âges, donc je ne pourrais pas vous donner une tranche d’âge précise.

Est-ce que vous envisagez de vous internationaliser par la suite ? Oui, tout à fait. En Europe pour commencer, et d’ailleurs ça commence, parce qu’on a déjà des distributeurs qui nous approchent pour distribuer nos produits à Londres notamment, en Allemagne aussi, en Belgique…

Ce mode alimentaire explose sur les réseaux sociaux, est-ce que ce n’est pas finalement un “effet de mode” ? Est-ce que ça ne va pas disparaître, selon vous et vos collègues ? Alors selon moi, je peux, enfin … moi je pense que ce qui est sûr c’est qu’on pourra pas continuer à consommer de la viande comme on le fait parce que ça ne marchera pas. Donc ce qui est sûr, c’est qu’on a besoin d’une solution ! Et celle-ci elle semble parfaite si on est capable de remplacer un steak haché de bœuf par un steak haché de plante, et que le client ne s’en rends pas compte de la différence et prend plaisir à le manger, moi je pense que ce n’est pas tellement un effet de mode et que ça à un véritable avenir.

Vos concurrents sont-ils les grands industriels de l’agro-alimentaire, qui ne propose pas forcements des produits avec le goût de la viande ? Non, pour le coup, on est pas du tout sur le même positionnement du moins pas tout à fait. Donc on ne peut pas véritablement se considérer comme concurrent.

Pourriez-vous collaborer avec McDonald ou Burger King, qui ne partage pas forcément les mêmes valeurs environnementales que vous mais qui propose de plus en plus d’alternatives veggie par exemple ? Alors, ça fait débat dans les bureaux justement !

Et qu’est-ce qui a donc changé dans vos habitudes de consommation, depuis que vous avez intégré les Nouveaux Fermiers ? D’ailleurs, je vais revenir un peu là-dessus. Parce qu'en fait ça a commencé un peu avant, parce que je suis en train de réaliser que j’avais vu un reportage sur Netflix... The Games Changer, c’est un documentaire sur la viande, et beaucoup de mes amis l’ont vu aussi. Et, il m’a mis, enfin il m’a fait un peu tilté sur le sujet, donc ça a commencé un petit peu avant que je rejoigne Les “Nouveaux Fermiers”. C’est peut-être pas pour rien que j’ai rejoint les Nouveaux Fermiers aussi. Mais donc, pour répondre à ta question, concrètement ce qui change, c’est que bah moi déjà je prends les options végétales quand je vais faire mes courses donc avant j’aurai sans doute acheté un steak haché alors qu’aujourd’hui j’achète quelque chose à base de plante, mais qui n’a pas forcément vocation à ressembler à de la viande non plus. Et ça c’est quelque chose que je n’avais jamais goûté avant, qui ne m'avait jamais attiré.

Pourquoi justement ça ne t’a jamais attiré avant ? C’est peut-être bête, mais je dirais l’avis et les préjugés qu’on porte justement sur ces aliments. Et il y aussi l’aspect visuel, et j’avais peur d’être déçu du goût. Mais comme quoi on peut évoluer sur le sujet, aujourd’hui j’en achète et mange 2 à 3 fois par semaine et je n’achète plus du tout de steak haché.

Tu as peut-être une expérience à nous raconter justement ? Oui, il y a peu, je suis allé chez PNY pour manger un burger la dernière fois, et j’ai pris l’option viande Beyond Meat donc un steak à base de légumineuse et j’ai pris autant de plaisir que mon pote, qui lui a pris une version normale. Donc je pense que maintenant je prendrais le Beyond Meat, enfin “Les Nouveaux Fermiers”. C’est même sur.

Et, ces habitudes de consommation, elles ont seulement changé dans ce qui est alimentaire ou elles ont aussi changé dans, par exemple ce qui est textile, je sais pas les soins, les cosmétiques ? Alors non pas du tout, c’est uniquement alimentaire.

Cheyma Bourguiba

Co-fondatrice d'Aujourd'hui Demain, le premier concept store vegan de Paris qui propose tous les produits nécessaires au quotidien des vegans. 29 ans, Parisienne

Êtes-vous vegan ? Oui.

Depuis combien de temps ? Je suis devenue végane il y a sept ans, en 2013.

Où habitiez-vous lorsque vous êtes devenu vegan ? J’habitais en région parisienne, tout comme aujourd’hui.

Dans quel contexte avez-vous découvert cette pratique ? Alors je connaissais quelques personnes vegan, je pouvais les compter sur les doigts d’une main donc c’est pas vraiment elles qui m’ont influencé, c’est plus lorsque j’ai voulu faire un régime et changer d’alimentation, je me suis beaucoup documenté sur l’alimentation végétale et ses bienfaits.

Pourquoi avez-vous décidé de devenir vegan ? Est-ce par choix ? Développez les raisons (personnes, déclic, causes expériences …) Avant de devenir vegan, j’étais une viandarde assumée, j’aimais vraiment cela, j’en mangeais beaucoup. Je considérais que les produits d’origine animale occupaient une place légitime dans l’équilibre de mon alimentation... Et c’est ce qu’on nous apprend à l’école et dans les médias.Et puis, il faut dire aussi que je ne m’étais jamais considérée comme une « amie des bêtes », j’étais plutôt indifférente vis à vis d’eux. Du coup, le fait de les manger m’impactait pas vraiment, on va dire que c’était un dommage collatéral, c’était dans l’ordre des choses, enfin dans l’ordre de la “chaîne alimentaire” qu’on nous avait appris. Puis vers mes 17-18 ans, j’ai fait une dépression et j’ai commencé à me réfugier dans l’alimentation. J’ai beaucoup grossi, jusqu’à être en surpoids et vraiment pas bien dans ma peau. Mon rapport à la nourriture était devenu très émotionnel et impulsif. Je ne prenais plus aucun plaisir à manger, je ne m’arrêtais que lorsque j’étais écœurée.

Votre surpoids et le mal-être que cela a engendré, sont donc la cause de votre véganisme ? Bah… on va dire que j’ai eu un vrai déclic après cette prise de poids, et il fallait que les choses changent, que je me reprenne en main. J’ai donc au début cherché à changer d’alimentation. Ça a été difficile ça aussi, parce que je pensais connaître les bases d’une alimentation « équilibrée » enfin du moins ce que la société m’avait appris à ce sujet, mais je me suis rendue compte assez rapidement que je n’avais aucune idée de comment composer mes menus pour adopter une alimentation plus saine.

Oui c’est compliqué d’entreprendre un changement alimentaire toute seule, du coup, comment vous-êtes vous renseignée ? Mais grave… du coup j’ai fait des recherches sur la nutrition sur internet, Tumblr, Youtube et les blogs. Puis très rapidement je suis tombée sur des influenceurs, qui parlaient de « plant- based » et « vegan ». Les assiettes avaient l’air aussi saines, qu’appétissantes et sans aucun produit d’origine animale. Du coup, progressivement j’ai commencé à supprimer les produits laitiers de mon alimentation, la viande puis le poisson, pour les remplacer par du quinoa et pleins de légumes. Bref j’ai fait un gros « ménage » dans mon frigo et la dimension la plus importante c’est qu’il m’est apparu évident que je n’avais pas besoin de manger des animaux ou ce qu’ils produisent pour vivre en bonne santé.

C’est donc à partir de ce moment-là, que vous êtes devenue végane ? Non pas vraiment, je me considérais pas encore comme végane à cette époque. Même si j’avais pris conscience de certaines choses, je n’envisageais pas de devenir à 100% végane, cela me paraissait trop compliqué socialement, je voulais pas me prendre la tête. Je voulais simplement « mieux manger », donc je rentrais plus dans le “flexitarisme” au début.

Oui, donc ça a vraiment été très progressif ! Oui voilà et c’est vraiment au fil de mes lectures que ma vision a évolué ! Un soir j’ai regardé une interview, dans laquelle le journaliste interrogeait l’auteur Jonathan Safran Foer sur le problème sanitaire de l’élevage industriel qui rend les animaux malades... Et, c’est ... sa réponse qui a été mon électrochoc. Toutes ces images très violentes sur l’industrie de la viande m’ont littéralement écœurée. C’est donc à ce moment-là, que j’ai compris ce à quoi je participais. Après ça, je n’ai plus jamais été tentée de manger un steak de ma vie, je te jure !

Le fait de devenir vegan a-t-il changé vos habitudes de consommation ? Si oui, lesquelles ? Utilisez-vous des produits vegan ? Au départ, c’était principalement mes habitudes alimentaires qui ont été modifiées... Puis, c’est l’ensemble de ma consommation qui est devenue vegan : vêtements, sacs, cosmétiques, produits d’entretien… parce que je me suis aussi découvert une passion pour le monde végane donc j’ai cherché des substituts à tout !

Et comment vous est venue l’idée de ce concept store ? Alors j’ai rencontré mon associé, Raphaël, pendant mes études en marketing digital, et lui aussi était vegan. C’est en 2015 qu’on a commencé à réfléchir à un concept store vegan en plein Paris, au moment où le véganisme commençait à prendre beaucoup d’ampleur en France ! En fait, on s’est rendu compte qu’on rencontrait le même problème : on ne trouvait aucun lieu que ça soit en boutique ou sur internet qui réponde à nos besoins à savoir, pouvoir trouver tout type de produits vegan, dans un seul et même endroit. L’alimentation vegan c’est assez simple à trouver, mais dès qu'on veut trouver des chaussures sans cuir ou des marques de vêtements éthiques c’est plus compliqué. On s’est dit qu’on devait pas être les seuls à rencontrer ce problème. Et du coup, plutôt que d’attendre que ça arrive sur le marché, on s’est dit qu’on allait créer cet endroit.

Pourquoi un « concept store » ? On a décidé d’ouvrir un concept-store parce que c’était le seul modèle qui nous permettait de proposer une gamme de produits aussi large, une boutique, un coffee shop… Et aussi parce qu’un concept store, c’est un lieu de vente avec un concept derrière, et pas juste un magasin pour faire ses achats. Avec Aujourd'hui Demain, on voulait permettre aux adeptes du véganisme, et surtout à ceux qui souhaitent se lancer, de trouver dans un même endroit tout ce dont ils ont besoin, sans se prendre la tête, en confiance et sécurité sur le choix des produits.

Que peut-on trouver au sein du concept store ? Beaucoup de choses... Le concept store est un lieu hybride qui regroupe dans 150 mètres carrés : Une cantine/coffee shop, avec un petit coin détente pour se restaurer, prendre un café, déguster des petits gâteaux vegans. On voulait montrer qu'on peut manger gourmand tout en étant vegan. Une boutique lifestyle avec de la mode, des cosmétiques, des livres, des produits d'entretien ménagers... Pour l’habillement, on peut y trouver des chaussures en cuir d’ananas, par exemple. Et une épicerie avec des produits alimentaires. Le rayon est bien garni : granolas au chocolat, gâteaux, pâtes mais aussi des simili-carnés comme le « faux-mage » sans lait animal. Et on a pas oublié les petits animaux non plus, puisqu’on propose aussi des croquettes véganes pour chiens et chats.

Ah oui, y en a vraiment pour tous les goûts ! Oui voilà, on trouve pleins de produits alimentaires qu’on ne retrouve nulle part ailleurs, et tout est vegan, tout est bio, tout est éthique !

Quel était votre objectif à travers ce concept store ? Avec Aujourd'hui Demain, on voulait vraiment montrer que le mode de vie végan n’est pas si compliqué et qu’il peut même être un plaisir au quotidien. Bannir les produits d’origine animale ou impliquant l’exploitation animale n’est pas synonyme de restrictions, bien au contraire.

Existe-t-il selon vous des publicités vegan ? Avez-vous déjà été sensible à une publicité vegan ? Alors je sais pas vraiment pour les publicités vegan, je regarde plus trop la télé… Mais ce qui est sûr c’est qu’en devenant vegan j’ai pris du recul vis-à-vis de la société de consommation et des messages publicitaires qui nous incitent à consommer d’une certaine manière pour être en “bonne santé”. Progressivement, on va dire que j’ai déconstruit l’ensemble des mythes autour des produits d’origine animale. Parce que faut être lucide, on nous assène de messages publicitaires pour nous faire consommer de la viande sans jamais nous dire que les sources de protéines et de calcium suffisent. Les discours marketing des marques agro me soulaient de plus en plus, je savais décrypter sous les lignes et j’appréciais pas être prise pour une idiote par leurs discours trompeurs, du coup, c’est vrai que je porte plus trop d’intérêt à tout ça.

Avez-vous le sentiment de faire partie d'une communauté à travers cette pratique ? Absolument, notre concept est né de la force de notre communauté. Tout au long du projet, on s’est beaucoup appuyés sur notre communauté et c’est grâce à leur soutien qu’on a pu concrétiser le projet.

Comment êtes-vous parvenus à créer une communauté autour du projet ? Alors déjà avant même que le projet se concrétise, on a commencé à travailler sur la communauté à travers une page Facebook et un site internet avec une « landing page ». On a lancé un questionnaire qui était en fait, notre étude de marché. Au total, plus de mille personnes ont répondu sur leurs habitudes de consommation, leurs attentes sur les produits qu’elles aimeraient trouver dans un concept store vegan… Et c’est ça qui nous a permis très vite de poser les fondations de notre concept store. Puis, on a fait un crowdfunding, et la force de notre communauté a été un gros coup de pouce à ce moment-là.

Donc finalement votre projet réside dans la force de votre communauté ? Complètement ! La force de communauté a été clé, elle a permis à Aujourd’hui Demain d’exister, elle nous a apporté un tremplin de communication, elle nous a trouvé des investissements, elle nous a permis de vivre tout de suite à l’ouverture… Si on n’avait pas eu les réseaux sociaux comme moteurs de partage pour diffuser l’information on n'aurait pas réussi à créer notre projet, je pense. Notre communauté Instagram, Facebook… nous a vraiment aidé et permis de convaincre les banques en démontrant qu’il y avait un réel public qui avait un intérêt concret pour notre projet.

Et au-delà de votre projet, faites-vous partie d'une association ou d’une autre organisation liée au véganisme ? Actuellement plus vraiment par manque de temps, mais lorsque je suis devenue vegan je m’étais rapprochée de pas mal d’associations comme l’Association Végétarienne de France et la Société Végane française qui apportent un grand soutien moral. Puis, je trainais pas mal sur internet, c’est un bon moyen de se faire des contacts vegans. J’allais sur des forums comme forum Vegeweb, des groupes Facebook, je me détendais avec le blog de Insolente Veggie… Je me suis tout de suite sentie moins seule grâce à la découverte des blogs véganes/lifestyle de filles qui me ressemblaient. Ça a été un réel soutien pour commencer !

Participez-vous à des évènements en lien avec la communauté végane ? Oui, on participe au Smmmile Festival, un vegan pop festival ou on propose un stand bien gourmand. C’est un festival vraiment sympa avec de la super musique et c’est l’occasion pour les gens de tester des choses différentes. Et avec le concept-store, on organise régulièrement de petits événements pour la communauté comme : des afterworks, des karaokés, des ateliers broderies, des dégustations de fromage vegandes rencontres et dédicaces de livres vegan avec des auteurs qui partagent leurs astuces autour de la cuisine végane. Et c’est aussi tous ces événements qui font d'Aujourd’hui Demain, un vrai lieu de vie.

Et considérez-vous que le fait d'être végan constitue une forme de militantisme? Complètement, à mon échelle individuelle, je milite pour la défense des animaux et contre l’industrie de la viande et avec Aujourd’hui Demain, on milite également pour une consommation éco-responsable globale. Par exemple, nos produits alimentaires et cosmétiques ne contiennent pas d’huile de palme. Et pour la mode, nous sélectionnons des produits qui sont conçus en Europe, par des enseignes engagées dans la préservation de l’environnement et qui garantissent des bonnes conditions de travail aux ouvriers.

En tant que vegan, vous sentez-vous différent des autres consommateurs ? En quoi ? Je sais pas vraiment comment me positionner vis-à-vis des autres consommateurs, je dirais juste que je suis plus en accord avec mes propres convictions et c’est ça qui compte.

Quelle est la différence entre vegan, flexitarien, végétarien ? Les flexitariens c’est ceux qui cherchent à « mieux manger », en réduisant leur consommation carnée. Alors que le véganisme c’est un mode de vie dans son ensemble qui exclut toute utilisation de produit d’origine animale, dans l’alimentation, mais aussi dans tous les aspects de la vie courante. Quand tu deviens végane tu t’impliques complètement.

Et d'après vous, le véganisme est-il un effet de mode ? L’engouement des marques autour du véganisme est-il durable selon vous ?Non je pense pas, le véganisme prend de plus en plus de place dans notre société. Tu sais, la majorité de nos clients sont des non-vegan, intrigués par notre concept store, qui se prête au jeu de découvrir le véganisme donc je pense vraiment que sur le long terme, ça peut toucher une part de plus en plus importante de la population.

Et que pensez-vous de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques aux modes d'alimentation vegan ? Et de leur communication ? C’est pas toujours très éthique. C’est plus du business, que du militantisme. Pour moi, ils ne sont pas vraiment engagés.

Mehdi El Mabrouk

Coach sportif et influenceur sur les réseaux sociaux. 26 ans - Parisien

Êtes-vous vegan ? Euh ouais alors moi je ne suis pas vegan en fait petite rectification, moi je suis végétalien. Vegan c’est plus un lifestyle, végétalien ça concerne uniquement l’alimentation en fait donc faut bien différencier. Bon après, c’est le terme anglais donc beaucoup ne font pas trop la différence dans les détails et vegan c’est l’appellation que tout le monde reconnaît mais c’est la différence. Végétalien c’est l’alimentation, vegan c’est un lifestyle, tu ne portes pas cuir, tu ne portes pas de laine… enfin tu sais c’est tout un art de vivre on va dire.

Depuis combien de temps ? Moi ça fait deux ans maintenant quasiment grosso modo.

Où habitiez-vous lorsque vous êtes devenu végétalien ? À ce moment-là quand j’ai commencé à être végétalien j’étais en Australie donc voilà ça fait 2 ans.

Est-ce qu’en Australie c’était plus développé qu’en France ? Non du tout au contraire, contrairement à ce que j’aurais pu penser y a beaucoup de végétarien mais ils n’ont pas forcément développé ce côté-là végétalien. Tu sais, par exemple si tu vas dans la chaîne Holly Belli, c’est une chaine de resto qui marche super bien à Paris, ils font beaucoup de brunch, et en fait c’est typique Australien, ça vient de là-bas et ça représente bien parce qu'il y a plein d’option animale, c’est assez dur d’aller là-bas et de manger végétalien. Dans l’alimentation Australienne, tu as quand même pas mal de produit animal pas forcément de la viande mais beaucoup d’œuf, beaucoup de lait, beaucoup de choses comme ça quoi. Donc ce n’était pas forcément plus facile que en étant en France enfin du moins à Paris quoi.

Dans quel contexte avez-vous découvert cette pratique ? Euh alors comment c’est arrivé. Euh en fait si tu veux c’est arrivé vraiment par hasard. J’étais en coloc avec plusieurs personnes et il y a un ami à moi qui m’a dit bah vas-y faut manger, ensuite à l’époque faut bien comprendre que j’avais une alimentation très occidentale, je mangeais de la viande à tous les repas, des plats industriels... et en fait il m’a dit bah tiens faut manger ce qu’il reste au frigo et il se trouvait que c’était de la viande je crois que c’était du kangourou, et cette viande était passé donc je suis tombé malade et c’est à ce moment-là que j’ai commencé à m’intéresser à différentes alternatives et voilà de lecture en lecture je suis tombée sur l’alimentation végétale.

Pourquoi avez-vous décidé de devenir végétalien ? Est-ce par choix ? Alors moi, vraiment ma démarche première c’était le côté santé qui m’intéressait dans cette alimentation végétale donc surtout ça, puis de lecture en lecture tu es plus sensible à tout ce qui entoure ce mode alimentaire, le côté éthique, le côté environnemental...

Qu’est-ce qu’être végétalien pour vous ? Pour moi c’est un régime qui me permet de pouvoir rester en bonne santé, c’est ce pour quoi je l’ai fait puis après ça peut vraiment être différent pour chacun y'en a c’est sur un plan éthique, donc tu vas te sentir un peu plus concerné par la maltraitance animale mais pour d’autres c’est mettre l’accent sur le côté santé, et pour moi c’est vraiment ça. Un bon végétalien on va dire il est sensible à sa santé mais comme je l’ai dit vraiment suivant les personnes ça dépend. Après moi je suis coach tu vois donc l’alimentation ça a une partie importante et avec la santé c’est primordial. Donc voilà pour moi c’est essayé de mettre toutes les cartes de son côté pour pouvoir perdurer et rester en bonne santé jusqu’à la fin de ses jours et limiter justement le risque de maladies dégénératives, le diabète, … Ce n’est pas parce que tu es végétalien que tu vas pas tomber malade, tu sais c’est un peu comme un fumeur qui n'aura jamais de cancer du poumon, mais c’est mettre toutes les chances de son côté.

Le fait de devenir végétalien a-t-il changé vos habitudes de consommation ? Si oui, lesquelles ? Utilisez-vous des produits vegans (textiles, alimentaires, soins …) ? Bah du coup après forcément je suis devenue plus sensible à l’aspect écologique, quand tu commences à regarder pas mal de reportages et d’études le parallèle est rapidement fait, au contraire ça m’a ouvert l'esprit et permis de voir certaines choses auxquelles je n’étais pas sensible auparavant. Euh donc voilà sur le plan écologique, éthique, c’est les grands axes de ce mode alimentaires, et ça m’a permis de m’ouvrir sur ça donc maintenant je différencie bien le truc. Je ne suis pas vegan je suis végétalien, mais je suis plus sensible à ce que je vais porter, j’achète pas de cuir, j’essaye de faire attention, au tri à la provenance de mes aliments à pas mal de trucs. Je suis vachement plus sensible après je ne suis pas non plus vegan, donc eux c’est les extrémistes du truc quand tu te renfermes sur le plan social ça devient plus dur et moi je voulais pas mettre de côté cette partie-là et être celui qui vit tout seul reclus de la société c’est pas aussi mon but donc voilà mais je suis quand même plus sensible à ça.

Vois-tu les vegans comme moins tolérants des choix des autres ? On va dire pour moi que tout est une question de lifestyle, tu es censé faire ça pour toi dans un premier temps après tu essayes comme je le fais-moi de mettre un peu en lumière cette pratique là et la développer. Mais le vegan va être plus extrémiste dans ce lifestyle, tous les produits qu’il va utiliser pour se laver, pour les soins, il va vraiment faire attention, il va tout faire lui-même et moi je trouve ça plus compliqué dans le quotidien.

Et toi, quelle est l’utilisation que tu fais des soins et cosmétiques ? Je t’avoue que moi c’est pas du tout mon domaine, après tu vois il y a Amélie ma copine qui est influenceuse mode et beauté elle reçoit des soins, des produits tous les jours et donc elle fait attention donc moi j’utilise ce qu’elle utilise elle. Moi comme tous les mecs un savon reste un savon (rires). Je ne fais pas trop attention surtout que là en ce moment j’ai plus de cheveux donc je suis pas obligé de faire de shampoing donc voilà c’est vrai que ce côté là esthétique je fais pas trop attention, mais parce que c’est pas moi qui le gère avec tout ce qu’elle reçoit, on fait avec ça.

Admettons que tu doives acheter un produit soin en grande surface, vers quoi te tournerais-tu ? Je vais faire attention tu vois à acheter quelque chose d’assez naturel mais bon franchement (temps de réflexion)... Si en fait, si j’étais amené à l’acheter je ferais attention quand même à que ce soit vegan, pas testé sur les animaux ...

Avez-vous le sentiment de faire partie d'une communauté à travers cette pratique ? Non du tout, je n’aime pas ce côté de il faut absolument catégoriser les choses, j’aime pas du tout ce côté communautaire ça finit par nous mettre dans des cases et moi j’aime pas ça. Même moi dire oui je suis végétalien bah je le revendique pas, je fais juste attention à ce que je mange et je fais en fonction de ce qui me correspond et de ce qui me convient donc non je ne fais pas partie d’une communauté.

Participez-vous à des évènements en lien avec la communauté végane ? Non non du tout, je le fais à mon échelle seul et je trouve ça bien mais après de là à m’enfermer et rentrer dans une case c’est pas mon délire.

Donc par exemple, tu ne participes pas à des évènements comme le vegan festival à Paris ? Ouais bah par curiosité j’irai car ça peut m’apporter un contenu que j’ai pas et c’est toujours intéressant de voir les nouveautés qui se font. Mais euh faut voir la démarche de l’évènement si ce n’est pas trop sectorisé ça m’intéresserait …. carrément.

Considérez-vous que le fait d'être vegan constitue une forme de militantisme ? Non du tout, après comme je te dis, de par mon rôle de coach sportif, je suis dans l’éducation donc j’apprends aux gens comment faire du bien à leur corps donc je fais la même chose à l’alimentation. Donc sur mes réseaux sociaux, sur Instagram j’ai fait un live avec Maxime pour discuter du sujet et tu vois ça c’est ce genre de truc qui est cool parce qu’on parle à des gens qui sont intéressés, si tu te connectes c’est que tu veux en apprendre plus et si tu ne veux pas bah on va pas aller te chercher. Après, je pense que dans la situation dans laquelle on est actuellement on prend du temps pour soi et on prend conscience des choses et on essaye de tester d’autres alternatives et c’est intéressant pour ça. Après non, je ne milite pas pour ça je vais pas aller brûler des boucheries tu vois.

Est-ce que, comme tu es coach sportif, tes clients te choisissent par ton régime alimentaire ou ça n’a pas d’impact ? Alors pas forcément c’est plutôt par rapport à moi, la manière dont j’enseigne dans un premier temps donc il va y avoir vraiment cet aspect sportif au début, après on aborde la question de l’alimentation euh à partir du moment où ils ont des attentes esthétiques. Après moi comme je te dis, je ne suis pas militant mais si une personne vient me voir et me demande un programme alimentaire, je mettrai pas enfin ce sera une alimentation végétale, pas une alimentation …. Moi tu vois pour être en accord avec ce que je suis, je ne peux pas mettre des produits animaux dans un régime alimentaire.

Que pensez-vous des ambassadeurs vegans sur les réseaux sociaux ? Alors moi, je suis mon pote maxime (@maxime1) qui est influenceur sport et vegan et un autre mec qui s’appelle @Marcopoischiche, c’est un mec vegan aussi. Mais après, je t’avoue je n’en suis pas trop parce qu’ils ont tendance à avoir des discours extrémistes et j’aime pas trop ce truc de jugement sachant que moi c’est pas du tout dans mes valeurs. J’ai pas de jugement, ce que je veux, bon c’est un grand terme hein, mais c’est d’éduquer sur les bienfaits que ça a mais j’aime pas tu vois euh dire que c’est mieux d’être vegan que omnivore tu vois j’aime pas trop ce discours-là. Je préfère sensibiliser les gens et après tu fais le choix que tu as envie de faire à partir du moment que tu es informé que tu sais ce que tu manges, c’est à toi de faire ton choix je peux pas le faire pour les autres et euh du coup c’est vrai que je ne suis pas trop d’influenceur végétalien sur les réseaux. Par contre je suis des sportifs qui le sont, parce qu'il y a pas mal de sportifs de haut niveau qui sont végétaliens et là c’est intéressant parce ça a un peu de, ça met l’accent sur le côté tu peux être végétalien et sportif de haut niveau sans avoir de carences, et là c’est intéressant. Mais après ceux qui prônent le véganisme je n’en suis pas.

En tant que vegan, vous sentez vous différent des autres consommateurs ? Bah tu vois je prends l’exemple de mes parents, j’ai grandi en campagne tu vois et si jamais je dois voir une différence c’est que je suis plus informé je pense tu vois et plus conscient de ce que je mets dans mon assiette. Forcément ma famille, tu vois moi c’est comme je te disais c’était consommation de viande et de produits industriels et comment dire viande à tous les repas donc au début ils ont eu des incompréhensions, des questions, c’est normal après il n’y a pas eu de jugement, on est pas comme ça dans ma famille ou avec les personnes qui m’entourent. Bon après je t’avoue que dans mon entourage amical, on est presque tous végétarien ou végétalien ou vegan et sportif, au final tu t’entoures des gens qui te ressemblent. Mais par exemple, ma copine Amélie mange de la viande de temps en temps, c’est même moi qui lui cuisine parfois. Après moi je suis dans l’acceptation totale, tu manges de la viande je m'en fou je te la cuisine même si ce n’est pas moi qui la mange, c’est pas un problème. Ça ne m’a pas mis de barrière sociale mais après j’ai eu pas mal de questions par rapport à ça : par exemple oui mais moi mon mari il veut pas manger végétalien, comment je fais, est-ce que ça t’a mis des barrières ? Moi non, mais c’est mon expérience personnelle. Quelle est la différence entre vegan, flexitarien, végétarien ? Est-elle seulement liée aux différences de régimes alimentaires ? Non comme je te disais ça dépend du lifestyle, alors oui il y a un contexte alimentaire mais pas seulement.

Existe-t-il selon vous des publicités vegans ? Avez-vous déjà été sensible à une publicité vegan ? Euh publicité … Bah tu vois je ne regarde pas trop la TV donc je n’y fais pas trop attention, après sur internet ou autre bah je pense que c’est en fonction de ce que je regarde et de ce que moi je recherche. J’ai de temps en temps des pubs mais ça reste moins développé mais je pense que l’on va y venir car ça reste un gros business autant que l’alimentation bio, ça commence d’ailleurs à se développer pas mal autant que l’alimentation bio. Il y a des nouvelles alternatives qui se développent aussi, que ce soit les steak vegan ou d’autres trucs comme ça, ça s’est bien développé et ça rapporte pas mal d’argent mais la pub à la TV j’en ai pas encore vu.

Considérez-vous que le véganisme soit un effet de mode ? L’engouement des marques autour du véganisme est-il durable selon vous ? Bah tu sais, tu vas essayer de toucher un peu de tout pour faire du business. Si jamais le véganisme perdure et c’est en pleine expansion on le voit, tu as de plus en plus de restaurants, de plus en plus de personnes sensibles à ce mode de vie peu importe les raisons, donc je pense que ça va être amené à se développer de plus en plus et qu’il y aura de plus en plus d’alternatives.

Qu’est-ce que tu recherches dans ces alternatives ? Je ne recherche pas le goût de la viande comme certaines marques le font. En fait, je pense que quand tu es vegan faut pas trop vouloir aller chercher ce genre d’alternatives car sinon tu ne le fais pas pour la bonne raison dans le sens ou dans toutes ces alternatives, tu vois pour être végétalien je dis à mes clients d’enlever ces produits de leur alimentation qui sont ultras transformés c’est typiquement ça. Après par exemple, la marque Beyond Meat c’est une qualité qui est plus mais euh quand tu vas voir des grandes marques comme Herta qui fait de l’alimentation classique et qu’ils lancent de l’alimentation végétale, ça reste des produits ultra-transformés et industriels que je ne consomme pas et moi personnellement je ne recherche pas le goût de la viande.

L’appellation steak végétal, merguez végétal … Est-ce que c’est quelque chose qui va t’attirer ? Je pense que l’appellation est purement marketing ça va pouvoir accompagner un hamburger, des légumes, des féculents donc forcément dans le mode alimentaire occidental c’est une viande plus quelque chose donc tu vois là c’est le même principe c’est un steak végétal plus quelque chose. Après moi je te dis, je suis allé au resto PNY qui fait des burgers et je trouve ça cool d’avoir une alternative végétale quand tu y vas, ça contribue au côté, euh, social d’un végétalien. Ça t’évite de demander aux serveurs est ce que tu peux me faire ça, ça, ça et ça ou est-ce que tu peux me faire un plat spécial sans viande pour moi au moins tu arrives tu as ça boum tu commandes et ça je trouve ça cool parce que voilà ça te permet de pas être exclu de la société donc c’est intéressant tu vois.

Est-ce que niveau social, ça t’a pesé d’adopter ce régime-là ? Non, après je t’avoue que quand j’ai commencé j’étais en Australie et je travaillais beaucoup et donc on allait peu souvent manger à l’extérieur, donc ça ne m’a pas posé de problèmes. Au début, c’est surtout dur de savoir ce qu’il faut manger mais à Paris à part dans un bistro français dans le 15ème c’est facile de trouver quelque chose qui convient à tout le monde, c’est assez simple. Mais, en voyage en Italie cet hiver c’était une galère de ouf.

Que pensez-vous de l’adaptation progressive des grandes surfaces et des groupes agroalimentaires au véganisme ? Et de leur communication ? Bah comme je disais ça reste du business, ils sont là pour faire de l’argent. Je n’ai pas d’aprioris particuliers mais c’est un business comme un autre je me dis actuellement. C’est bien qu’il le fasse, ça permet de faire une transition plus simple si tu as pas de notion en alimentation ça te permet de passer un premier step euh tu te dis j’arrête de manger du steak classique je prends du végétal sur le plan végétal c’est mieux, y'a pas de maltraitance animale, donc c’est cool d’avoir cette alternative-là pour un premier step mais euh donc voilà j’ai pas de préjugés dessus je me dis c’est bien pour un premier step après on sait que c’est pas fait pour le bien d’autrui et que c’est pour faire de l’argent mais c’est bien quand même. C’est comme le bio en vrai.

Dya Touffier @Popcorndouce

Psychologue et influenceuse 31 ans - Française habitant en Thaïlande

Depuis combien de temps es-tu végane ? Ça fait 5 ans.

Où habitais-tu lorsque tu es devenue vegan ? Alors enfaite, ça allait faire 6 mois que j’habitais en Thaïlande.

Donc c’est quand tu es arrivée en Thaïlande ? Oui, enfaite je suis arrivée à Bangkok, euh et puis ensuite, après 6 mois, bon après les habitudes alimentaires elles changent beaucoup là-bas parce qu’on n’a plus tout ce qui est pâtisserie, saucisson, fromage, donc forcément on mange un peu plus de légumes. Il faut savoir aussi que les conditions pour les animaux, c’est assez spécial, parce qu’en fait le gros déclic que j’ai eu c’est quand j’étais en train de conduire ma voiture, et j’ai vu pleins de porcs dans des cages, dans un camion, et en fait ça on ne le cache pas comme on pourrait le faire en France, je pense. En fait, il s’en tape je pense, complètement, ce sont de pratiques locales, par exemple si on va dans des marchés, vous allez voir des porcs complètement éventrés en deux dans des pick-up et prêts à être vendus.

Oui, ce n'est pas comme en France où c’est un peu plus caché. Voilà, c’est transformé ... et je pense que moi ça m'a fait vite prendre conscience de tout ça.

Et, est-ce que tu as été directement végane ? Alors non, je n’ai pas été végane directe, j’ai d’abord été végétarienne, j’ai un peu continué le fromage, mais sans plus, parce que bon finalement le fromage là-bas au lieu de coûter, je sais pas 2-3 euros, il va te coûter entre 5 et 10 euros, donc c’est déjà un gros budget, c’est cher. Donc, à la maison je mangeais un peu plus végane, mais effectivement quand j’allais dehors, dans des restaurants italiens, par exemple, oui sur une pizza il y avait du fromage, et j’allais en manger. Mais au fur et à mesure, j’ai éliminé tout ce qui était lait, oeufs, et fromages.

Et du coup, dans quel contexte tu as découvert cette pratique ? C’était vraiment là-bas en Thaïlande ou déjà, je ne sais pas si tu as vécu en France, un peu avant ? Euh, j’avais déjà des amis qui étaient végétariens ou vegans, mais comme ils sont assez loin, on en parlait rapidement, et puis bon… après je vous avouerez c’était aussi plus simple, parce que je n’aimais pas forcément la viande, je ne mangeais que de la charcuterie, bon le fromage j’aimais beaucoup donc ça, c’était un peu plus compliqué. Il y a aussi autre chose, c’est qu'en Thaïlande, les bouddhistes en général sont véganes de base, parce que dans la religion bouddhiste, Bouddha ne consommait pas, bah tout ce qui était produit comme de la viande, lait, oeufs …

Et, en fait, on a un festival vegan, je savais qu’on avait une fête végane pendant 10 jours, durant laquelle les bouddhistes se purifient, sauf qu’en fait en Thaïlande ça se célèbre et donc tout devient vegan. Même au seven eleven, les gâteaux, … on met en avant tous les produits vegans.

Et donc tu as découvert ça à ton arrivée en Thaïlande ? Découvert ça, je dirais pas ça, mais ça été le déclic. Je pense que je l’ai quand même connu en France, plus par mon entourage.

Parce que du coup tu as des personnes de ton entourage qui sont véganes ? Oui, par exemple, ma meilleure amie vit à Amsterdam et je ne sais pas si vous connaissez un peu là-bas, mais tout est veganisé. C’est très simple de trouver de la bouffe partout, que ce soit les restos, je pense qu’ils sont un peu avancés sur le plan alimentaire, ils se sont adaptés plus facilement. Et je pense aussi que pour les gens qui veulent devenir véganes c’est plus simple, ils ne se sentant pas jugées. Il n’y a pas cette pression sociale que l’on peut avoir par exemple en France.

Qu’est-ce qu’être vegan pour toi, si tu le devais nous le définir ? Je pense que c’est plus une façon de vivre, toute une philosophie, effectivement protéger, en faite je vois pas pourquoi j’aurais des chats, ou des poules, parce que j’en ai acheté y’a pas longtemps (rire), je leur ferais des câlins et qu’à côté de ça je participerai à leurs morts en fait. Je vois pas pourquoi choisir un animal et pas un autre. Sachant que, un petit cochon c’est super mignon, et je pense que ça a les mêmes capacités d’attachement qu’un chat, un chien, et que nous finalement, parce qu’ils nous reconnaissent etc. Et pareil, je pense que ce n’est pas juste l’alimentation, c’est ce qu’on consomme autour, que ce soit du tissu, … Je pense que ça va aussi avec l’écologie, l’environnement, vu que l’industrie de la viande participe énormément à la pollution, beaucoup plus que les voitures, les transports.

Et donc est-ce que tu as décidé de devenir vegan pour soutenir la cause animale, ou il y a plusieurs facteurs ? Alors, ça a d’abord été la cause animale, ensuite effectivement, on a bien été renseigné enfin il y a beaucoup de films, documentaires qui ont été fait sur Netflix qui explique que l’écologie a été gravement touchée, et clairement pour la santé, je me sens bien, je n’ai jamais été autant en forme.

Donc c’est un peu un mythe, quand on entend que ce régime alimentaire peut causer des problèmes de santé ? Alors après je ne sais pas si c’est parce que j’ai été, euh, chanceuse, au niveau de mon organisme, de ce fonctionnement-là. Par exemple je sais que, alors moi ma mère est thaï, donc elle vivait dans un village, et je sais qu’ils ne mangeaient pas de viande, ils n’en mangeaient pas du tout ou du moins pas autant, ils ne mangeaient pas de la viande mais du poisson une fois par semaine. Et je ne sais pas si génétiquement, il a des prédispositions ou pas. Je sais que que les Inuits, eux, ne vont manger que de la viande et si les générations d’après, ne mangent plus de viande, je ne sais pas comment ça fonctionne. Vous voyez ? Je pense que c’est un peu comme les allergies, ça dépend des personnes. Après, moi je sais que je fais super attention à ce que je mange, je cuisine beaucoup, euh je fais en sorte qu’il y ait tout le temps une bonne ration de protéines, je mange énormément de féculents, de légumes, de légumineuses, de frais. Moi, je pense qu’en France on ne mange pas toujours très bien, et même dans le véganisme il y a énormément de junk food, tous les nuggets, les produits transformés, ici moi j’en ai pas. En tout cas, je ne suis jamais malade.

Et dans ton entourage proche, il y a des personnes qui ont aussi adopté ce mode alimentaire ? Non, il y a mon copain qui mange vegan à la maison parce que je cuisine vegan, mais sinon il est végétarien, il continue à manger des oeufs, du fromage. Quand on va au resto, il mange tout ça. Mais à la maison, il est vegan.

Le fait de devenir vegan, ça a dû changer tes habitudes de consommation, du coup est-ce que ça ressens aussi bien dans les shampoings, les draps, est ce que tu fais attention dans tous les aspects de la vie quotidienne ou uniquement sur le plan alimentaire ? Non, tous les produits que j’achète sont bios et vegans. Après bon j’ai des potes, parfois, qui oublient parce que par exemple, j’avais demandé à une pote en revenant de France, de m’acheter un shampoing bio et vegan et en faite il y a du miel dedans. Alors je vais l’utiliser et pas le jeter parce que ça n’aurait pas de sens. Mais sinon, tous les produits, tout ce qui est produit de beauté, les crèmes, je les fabrique moi-même.

Et pour les vêtements par exemple ? Pour les vêtements, il y a des trucs que j’ai depuis 100 ans là (rires), que j’ai depuis très longtemps et après j’ai beaucoup de seconde main aussi, que les copines donnent. J’ai plus envie de sur-consommer.

Mais, est-ce que tu vas te tourner vers des produits comme du cuir, de la laine … ? Non, je ne rachèterai pas, complètement banni, je n’achète plus. Alors en France, il y a quand même pas mal d’endroits spécialisés vegan, j’imagine qu’en Thaïlande c’est moins répandu, mais est-ce-que tu fréquentes ces lieux-là ? Les restaurants oui, on en a quand même beaucoup ici parce qu’il y a beaucoup de Thaï vegan. Avant j’habitais à Phuket et maintenant un peu au-dessus. À Phuket comme c’est une île, alors déjà ils sont très tournés vers le healthy, le sport et donc il y a énormément de restaurant vegans, même peut être plus qu’à Paris. Et en fait dans ces restaurants-là, parfois ils ont, un petit coin shopping avec effectivement des bouquins, du savon vegan, etc, des trucs un peu organiques et bios. Et après le reste, si tu peux faire, aussi un truc génial, c’est des retraites chez les moines, et en fait tu manges vegan, tu te purifies, donc c’est-à-dire que tu as le droit juste de manger à 5h et à 12h, et tout est vegan. Pendant une, deux semaines, ou un mois, tu fais une retraite silencieuse et tu manges vegan.

C’est dans les moeurs en faite le véganisme en Thaïlande ? C’est très bien vu ici. Quand je dis que je suis vegan, ils me disent “ah depuis combien de temps ?” ou sinon ils me demandent “ah, tu fais ça pendant une ou deux semaines ?” ou “ah, tu fais ça quel jour de la semaine ?” parce qu’en faite ce qui est très intéressant ici, c’est qu’on a énormément de restaurant Thaï vegan ici, et les étrangers ne s’en rendent pas compte. On a un mot pour ça, et je pense d’ailleurs que ce mot existait bien avant le mot vegan. Parce que par exemple, si toi tu es né le mercredi, tu devras manger vegan tous les mercredis, et il y a des gens qui font ça.

Et quel est ce mot Thaï ? Alors ça veut dire vegan hein, mais c’est “Tje”.

Et ça a aussi un rapport avec la religion ? Oui c’est bouddhiste. En fait, le premier précepte de Bouddha c’est “tu ne tueras point”, et c’est pour ça qu’on a un festival, que certaines personnes mangent vegan le jour où ils sont nés. Et c’est très très bien vu d’être vegan, là-bas quand on leur dit tout le monde dit “ah, c’est super bien !”.

Et du coup, est-ce que tu as le sentiment de faire partie d’une communauté à travers cette pratique ? (Réflexion) C’est un peu compliqué, parce que moi ici, alors quand j’étais à Phuket oui je connaissais quelques personnes, mais on ne parle pas que de ça, alors effectivement oui on va se faire des bouffes ensemble, et ça va être chouette parce qu’on va trop bien manger mais après on ne l’évoque pas plus que ça, on n’a pas forcément débat. En tout cas pas en Thaïlande.

Fais-tu partie d’une association liée au véganisme ? Non, pas spécialement.

Participes-tu à des événements en lien avec la communauté comme par exemple, tu nous parlais du festival, donc j’imagine que tu y participes ? Oui, mais alors tout le monde le fait, c’est d’ailleurs impressionnant et je vous invite à aller regarder parce que c’est quand même assez spécial. Alors ici, ils disent “vegetarian” mais c’est plus vegan, et ça s'appelle “Vegetarian Festival Phuket”. Alors c’est un mélange de bouddhisme et de croyances chinoises, où il y a un dieu ou des anges qui vont s’incarner dans des humains en question et qui vont les protéger. Et, pour prouver qu’ils ont été possédés par ses anges là ils se mettent des aiguilles à travers les joues, et ça ne leur fait pas mal. Cette technique ça prouve qu’ils ont été purs et ont mangé vegan, et qu’ils n’ont pas ingéré de viande, ou de lait etc. Donc, tout le monde participe à cet événement-là et il y a pleins de bouddhistes qui pendant cette période seront vegans.

Parce qu’en France, on a de plus en plus de festivals vegans, mais ce n’est pas du tout la même chose, c’est plutôt par rapport à la consommation où l’on va présenter des nouveaux produits, ou il va y avoir des restaurants vegans qui vont créer des petits stands où l’on peut goûter leurs produits, mais donc c’est assez différent de ce qu’on peut retrouver en Thaïlande du coup ? Alors on a aussi ça, il y a des gens qui vendent leurs plats veganisés, justement pendant cet événement-là, pendant 10 jours. Et je sais que pleins de gens participent, même des touristes et je sais que c’est super bon. Mais oui, je pense que le véganisme n’est pas du tout appréhendé de la même manière ici, qu’en France.

Donc la-bàs, le fait d’être vegan ne constitue pas du tout une forme de militantisme ? Je n’ai pas l’impression, ils ne le voient pas comme ça. Pour eux, ça leur fait tilt dans la tête en mode “ah, elle est bouddhiste, donc elle est à fond dans la religion.”

Et pour toi, c’est une forme de militantisme ? Oui, complètement, pour les animaux et pour l’écologie.

Et que penses-tu des ambassadeurs vegans sur les réseaux ? Pfff, qu’est ce que j’en sais, je ne sais même pas si j’en suis. Il y a une nana, elle est vegan, mais elle montre plus des recettes, vous parlez de ça ?

Oui, j’ai vu que tu suivais Alice Esmeralda ? Oui, Alice mais j’ai pas l’impression non plus qu’elle soit : “ah il faut absolument manger vegan, vous voyez ?” Moi, je trouve que c’est bien que les gens renseignent et c’est pas forcément moralisateur, mais je pense aussi qu’il y a des gens qui le font mal. Mais oui, Alice c’est pour sa douceur, on se parle de temps en temps, et puis elle a un beau contenu que ce soit sur Youtube, sur son blog. Moi, à la base je ne savais pas du tout qu’elle faisait ça, c’est parce qu’elle m’a suivi, je l’ai suivi et donc j’ai regardé ce qu’elle faisait.

Et j’avais une copine justement à Phuket, qui est flexitarienne mais mange plus vegan, enfin maintenant elle est complètement vegan à la suite d’une retraite, et elle avait son livre en fait. Mais les ambassadeurs vegans (Réflexion) …, il y en a beaucoup maintenant ?

Oui, de plus en plus quand même. C’est marrant, parce que moi quand j’habitais encore en France, et que je mangeais encore de la viande, du fromage … ça m'intéressait aussi et je me disais mais c’est quoi ces trucs de fou où on peut manger des pâtes sans beurre, etc. Et je m’éclatais à faire des menus vegans alors que je ne l’étais pas, et je proposais ça à mes potes, mon copain et ils étaient chauds. Après, de manière générale, je pense que j’ai toujours été plus au moins végétarienne, parce que je sais qu’avant quand je mangeais de la viande, je la mâchais et je la recrachais parce que j’arrivais pas à avaler, je trouvais ça dégueulasse. J’ai toujours bien aimé mes légumes, donc je pense que j’ai des facilités. Mais des ambassadeurs, en tout cas je suis des personnes qui sont vegans mais je sais pas si je dirais que ce sont des ambassadeurs.

Si tu revenais en France, est-ce tu garderais ce régime vegan, même si c’est plus difficile de l’assumer ? Oui je pense, façon quand je reviens pendant un ou deux mois je garde, en fait ce qui est trop bien dans tous vos magasins bios ..., que l’on a pas nous, vous avez quand même des supers bons gâteaux, des bonbons, vous avez des trucs de ouf. À chaque fois je me prends 2-3 kilos en un mois (rires), parce qu’on mange quand même de la merde en France. Mais non, je ne changerais pas. Enfaite, manger vegan en Thaïlande c’est moins cher qu’en France, mais je pense qu’en France on se dit que c’est cher, mais c’est pas si cher. En France, les gens aiment bien acheter des nuggets vegans et ça coûte 3€ donc c’est cher au bout d’un moment.

Est-ce qu’en tant que vegan, tu te sens différente des autres consommateurs, qui ne le sont pas ? Oui complètement, parfois j’ai l’impression d’être déconnecté de leur manière de penser. Par exemple, j’ai mon voisin qui est français et qui est avec une meuf thai, et parfois il veut pas forcément manger de la viande et il adore les animaux, il a des poules chez lui, il va avoir un chien … et hier quand je l’ai vu, et qu’il voulait manger une pizza un peu fusion, du “lapinou” ça s’appelle, c’est une sorte de porc épicé, bah je l’ai regardé et je pense qu’on vit dans 2 mondes, on ne se comprend pas.

C’est une prise de conscience qui est nécessaire ? Oui, c’est ça ! J’ai l’impression que les gens, je pense qu’ils entendent ce que je veux dire, mais ils ne comprennent pas que moi ça peut me faire profondément de la peine. Et ça ne veut pas dire qu’il ne peut pas manger de la viande devant moi, mes parents continuent à en manger, voilà c’est tout, je vais pas imposer, crier au scandale parce que moi-même j’en ai mangé pendant un long moment. Si on peut en parler, et que les gens veulent, j’en parle mais sinon non. S’ils me demandent gentiment sans me pointer du doigt, parce que j’ai eu un mec il y a pas longtemps qui m’a agressé en disant “Non, mais de toute façon c’est qu’une mode”, donc je lui ai dit oui bien sûr (rires).

Justement, on se demandait si toi, tu considérais ça comme un effet de mode ou vraiment une tendance, qui va rester dans les moeurs ? Parce que c’est vrai qu’en France, il y a un engouement des grandes marques autour de ça, et donc on se demande si ça va être durable ou est-ce que c’est un simple effet de mode actuel ? Mais, moi je pense vraiment que ça va être durable. Alors, il y a des gens, je pense qui ont essayé et ça n’a pas fonctionnait pour faire comme un tel ou un autre, mais je pense que si tu n’as pas les convictions et le déclic, ça ne peut pas fonctionner. Moi ce qui m’a fait flipper c’est de voir 40 porcs enfermés dans un camion, il fait 40 degrés en Thaïlande, sur une autoroute, ils ont la peau brûlé, mais je trouve ça horrible en fait. C’est dur, et le truc c’est qu’on est sur une autoroute et on les entend crier, c’est horrible. Et je pense que si on faisait ça en France, les gens deviendraient peut-être un peu plus végétariens. Parce qu’ici, on te met face à une réalité qu’on te cache en France. Concernant l’effet de mode, je pense qu’à un moment ça l’a peut-être été, avec des vrais gens autour qui ont essayé de répandre la bonne parole, mais je pense qu'encore plus avec le coronavirus, ou en tout cas avec toutes les maladies qui ont été liées avec les animaux, parce qu’on a eu la vache folle, on a eu la grippe aviaire, … Parce qu’aujourd’hui, tout est transformé, et on fait en sorte que ce soit beau, et de ne pas montrer ce qu’il y a derrière, alors que la bouffe est dégueulasse. Et alors, il me semble que c’est dans je crois, qui disait qu’à un moment, on aura plus de viande, ce serait plus possible. On ne peut plus trop continuer comme ça je pense, donc pour moi c’est pas un effet de mode en tout cas pour le long terme. Après, il y aura d'autres méthodes qui vont peut-être évoluer et on pourra manger de la viande sans faire de mal à un animal.

Tu en connais ? Oui, alors en faite c’est un labo, aux Etats-Unis, qui à partir de souches, alors je ne connais pas du tout les termes scientifiques, arrive à reproduire de la viande à partir, en faite c’est de la vraie viande mais il n’y pas eu de souffrance.

Et ça tu pourrais le consommer, si tu étais sure à 100% qu’il n’y a pas eu de souffrance ? Non, je trouverais ça déguelasse, je pense (rires). Je pense que le goût des oeufs, du fromage, de la viande … je pourrais plus. Je pense qu’une fois que tu as passé la barrière …

C’est dur de re consommer de nouveau de la viande, … ? Alors il y en a certainement, parce que j’ai des copines enceintes, qui ont fait un petit retour en arrière et après elles sont re-devenues véganes ou végétariennes. Mais effectivement, rien que l’odeur des oeufs, je peux pas moi (rire).

Et de ton point de vue personnel d’avoir quelqu’un qui est vegan mais qui pendant une période va modifier son alimentation, comment tu le perçois, tu le comprends ? Je juge un peu, mais je ne suis toujours pas tombée enceinte donc on verra le jour où ça m’arrive et les répercussions sur ma santé. Je pense que moi ça ira, mais je vais peut-être retourner sur du végétarisme plutôt.

Et pour revenir aux grandes marques, surtout en France, quand tu vois les bonbons vegans, qu’est-ce que tu penses de leur adaptation progressive à ce régime alimentaire ? Bah, je trouve ça cool, parce que je me dis qu’il y a d’autres personnes qui peuvent se dire, au lieu de rentrer dans toutes les petites boutiques bios, bobos, … Alors, je comprends qu’il y ait des gens qui sont totalement contre parce qu’ils se disent oui, non, ils font aussi du jambon et d’un autre côté des produits vegans, mais du coup on expose aussi ça et ça permet aux gens de se dire : “ah bah pourquoi pas, je vais essayer, peut-être que ça me plaira”. Donc franchement pourquoi pas. Mais je l’ai vu hein, avec les nuggets, parce que ça j’en ai beaucoup mangé (rires).

Oui, par exemple Herta, qui fait les nuggets, alors que bon à la base eux leur produit phare c’est le jambon et qui aujourd’hui fait aussi des steak végétaux … Alors je t’avoue que Herta je n’achèterai pas, quand c’était Carrefour, Leclerc, je le faisais pas quand c’était Herta, non, parce que je me suis dit là c’est un peu l’hôpital qui se fout de la charité. Après je dis ça, mais je sais que Dr. Martens, ils font, j’en ai acheté des chaussures vegans, alors que eux leur business c’est clairement le cuir quoi. Donc bon, on essaye de faire au mieux mais c’est pas toujours facile, on tend à être parfait mais on ne le sera jamais. Mais là c’est bon, pour les vêtements je ne consomme plus rien, je pense qu’on a tout ce qu’il faut dans les placards, et puis perso ici je suis tout le temps en tong. Mais par rapport à votre question, les grands supermarchés qui s’adaptent ouais c’est cool, mais Herta, soit tu tues des cochons soit tu fais tout vegan, là c’est un peu tiré par les cheveux.Mais ici on a quand même des trucs, par exemple Tesco, fait des bonbons vegans.

Donc progressivement, les marques s’y mettent ? Oui, en tout cas les grandes marques comme ça, pour les produits un peu étrangers, ils le font et c’est chouette de pouvoir manger des bonbons sans gélatine de porc ou de boeuf. D'ailleurs je pense qu’ils ont totalement éliminé la gélatine de porc, et ne mettent que de la gélatine halal.

Est-ce que tu as déjà été sensible à une publicité végane, est-ce qu’une pub t’a marqué ? En Europe, je n’ai pas été suffisamment exposé. Et j’avoue que je ne suis pas très sensible aux publicités. (réflexion) Ah mais par contre, en Thaïlande, à l'aéroport de Bangkok, il n’y a pas longtemps, où il montrait des cochons dans un état … dans des cages, encore des cochons, et j’avais pris une vidéo, parce que je m’étais dit “ah mais en Thaïlande, ils mettent un truc comme ça c’est incroyable”, et malgré le bouddhisme et tout, parce qu’ils ne sont pas encore sur la cause animale, c’est plus la purification du corps. Mais ce n’était pas une publicité.

Une campagne de sensibilisation ? Oui, c’est ça ! J’étais très étonnée qu’ils mettent ça. Mais en Thaïlande, on est plus dans du greenwashing, avec tous les produits pour la peau, la lavande, et il y a un côté un peu hasbeen. Mais je pense qu’ils commencent à s'intéresser à la publicité, et à tous les produits nécessaires pour faire ses produits soi-même mais on est un peu à la bourre. Je trouve ça formidable qu’en France, les gens se mettent aussi à la slow cosmétique, s’ils finissent leur produit, bien entendu (rires).

Samy-Vicente Lacerda

Étudiant Végétarien en journalisme 25 ans - Parisien

Es-tu vegan ? végétarien ? flexitarien ? Alors je me considère comme végétarien. Mais il y a des histoires, du genre pour être végétarien, tu dois pas manger de viande et pas de poisson. Moi, c’est juste la viande que j’ai complètement retirée de mon alimentation.

Pourquoi t’as décidé de retirer la viande de ton alimentation ? Parce que, déjà, j’en ai jamais consommé de façon très importante alors que le poisson j’en consomme beaucoup plus. Ce serait plus difficile d’arrêter le poisson que la viande du coup, j’ai déjà franchi une étape en arrêtant de manger de la viande et on verra si plus tard j’arrêterai aussi le poisson.

Depuis combien de temps ? Depuis 2 ans maintenant.

Où habitais-tu lorsque tu es devenu vegan ? J’habitais à Paris, dans le 20ème arrondissement, comme aujourd’hui.

Dans quel contexte as-tu découvert cette pratique ? Ça a toujours été quelque chose avec lequel j’étais familier, après il y avait des personnages dans les séries que je regardais qui l’étaient et des célébrités qui en parlaient beaucoup, donc j’en entendais plus parler mais dans mon entourage je connaissais pas grand monde qui l’était.

On peut dire que tu t’es un peu inspiré du régime alimentaire de célébrités que tu suivaient ? Au-delà de l’inspiration de personnalités, il y a eu aussi le fait que j’ai regardé des documentaires, je me suis un peu documenté sur les conditions d’élevage, d'abattage et c’est tout ça qui m’a fait prendre cette décision. Par contre le déclic vraiment et c’est pas des conneries, ça a été un vrai déclic : c’est l'été 2018, quand j’ai regardé un film, qui s’appelle Okja de Bong Joon Ho. Et tu vois c’est après ce film, que je me suis dit c’est terminé. Et le lendemain c’est bon c’était mon premier jour de végétarisme.

Et pourquoi, c’est ce film qui t’a fait avoir un déclic ? Le film c’est une critique assez explicite finalement de l’industrie de la viande, à l’échelle mondiale, l’élevage intensif, les pratiques barbares d’élevage, (rires) y a pas d’autres mots… C’est tout ça qui m’a poussé à arrêter la viande. J’avais déjà essayé par le passé d’arrêter la viande, ça avait duré que quelques mois mais je voulais retenter et donc là ce film c’était vraiment ce qu'il me fallait pour me décider.

Qu’est-ce qu’être végétarien pour toi ? Végétarien ça serait adopter un régime alimentaire qui bannit tout aliment à base de viande au sens chaire animale.

Le fait de devenir végétarien a t-il changé tes habitudes de consommation ? Si oui, lesquelles ? Utilises-tu des produits vegan ? Oui, par exemple j’ai acheté un bouquin qui se pose la question directement dans son titre « Faut-il manger des animaux ?». J’ai commencé à m’intéresser à la littérature « végétarienne/vegan » avec des livres sur l’initiation au végétarisme… Puis aussi parce que je vis pas tout seul, je suis dans un foyer où on est 4 au total, dans ce foyer, il n’y a qu’une personne qui ne mange pas de viande, c’est moi et donc forcément ça a obligé à préparer à chaque fois deux plats.

Le fait que tu sois le seul à pratiquer ce régime alimentaire dans ton entourage, ça n’a jamais posé problème ? Non aucun vraiment pas du tout, juste il a fallu réorganiser certaines choses.

Oui, tu as dû découvrir comment préparer des plats pour que ça convienne à ton nouveau régime alimentaire ? Exactement, avant je cuisinais pas du tout. J’ai commencé à lire des livres et articles qui proposaient des recettes végétariennes. Puis, je savais pas vraiment vers quelles marques me tourner. Et maintenant je fais très attention, alors qu’avant j’y prêtais pas du tout attention, aux protéines de ce que je mange pour éviter les carences.

Tu penses que ce régime alimentaire peut causer des problèmes de santé ? Certains vegans disent que ça ne pose aucun problème de retirer la viande de notre alimentation puisqu’ils retrouvent dans le monde végétal (fruits, légumes, plantes…) une quantité de protéines suffisante. T’en penses quoi toi ? Je suis d’accord que ça ne pose aucun problème en soit mais ça ne m’empêche pas de porter un regard un peu plus pointu sur ce que j’ingère en terme de protéines. Pour moi, c’était le deal !

Du coup, tu m’as dit que ça avait aussi influencé ton choix de marque, quel type de marques tu consommes ? Herta a toute une gamme végétale donc ce n’est pas mal et y a aussi Bjorg qui propose des alternatives végétales pour le matin, le petit-déjeuner, les repas... C’est les deux marques que j’aime vraiment consommer depuis que je suis devenu végétarien.

Du coup, ça a principalement impacté ton régime alimentaire ? Les vegans ont également changé leurs pratiques en terme de drap, shampoing, cosmétique.. toi ça te concerne moins ? Ouais non non j’en ai entendu parlé… mais je me sens moins concerné. Les vegans pour moi c’est vraiment un mode de vie alors que les végétariens c’est vraiment un régime alimentaire, c’est différent.

As-tu le sentiment de faire partie d'une communauté à travers cette pratique ? Franchement non…

Fais-tu partie d'une association ou autre organisation liée au véganisme ? Non plus…

Participes-tu à des évènements en lien avec la communauté végane ? Pas vraiment non et je me renseigne pas non plus sur les événements qu’ils font. Pour moi, le fait de devenir végétarien ça a vraiment influencé mes pratiques individuelles à une échelle vraiment individuelle. Je considère pas forcément faire partie d’un collectif du coup…

Considères-tu que le fait d'être végétarien constitue une forme de militantisme ? Oui parce que c’est du militantisme dans le sens où j’arrête, indirectement dans mon cas, de financer et de contribuer à l’enrichissement de toute une économie qui repose sur la souffrance des animaux. Et militantisme parce que je me sens investi, en fait, je voulais plus participer à la souffrance que les hommes font subir aux animaux. C’est une forme de militantisme de ne plus manger de viande parce dans ma tête en tout cas, ça me permet de me distancier de cette souffrance et je me sens plus en accord avec mes convictions.

Que penses-tu des ambassadeurs végétariens sur les réseaux sociaux ? Sur les réseaux sociaux, j’y fais pas trop attention. J’utilise pas mes réseaux sociaux pour suivre des comptes végétariens ou vegans. Mais une fois, y en avait un qui était invité sur un plateau télé, sur le plateau de C8 chez Cyril Hanouna, il y avait un débat sur le fois-gras. Un activiste vegan contre la souffrance animale était invité sur le plateau et je l’ai trouvé hyper agressif et pour moi son agressivité avait pour conséquence de le décrédibiliser mais également de décrédibiliser la cause. Je n’ai pas envie de faire des généralités sur les activistes de la cause vegan parce que c’est un des seuls que j’ai vu à la télé, mais je n’ai pas envie que les ambassadeurs des causes vegan, animales, végétariennes.. soient radicaux au point d’avoir pour effet néfaste de décrédibiliser la cause. Je pense qu’il y a de la pudeur dans mon choix de régime alimentaire, je ne le crie pas sur tous les toits. Je le dis juste quand on me propose de la viande ou quand on me demande ce que je vais manger mais en gros je l’écris pas sur ma tête et j’en fais pas une fierté, après je sais pas, il faudrait peut-être en faire plus ? Mais des fois j’ai peur justement que le fait d’être un peu trop radicale et d’en faire trop ça décrédibilise la cause.

Existe-t-il selon toi des publicités vegans/végétariennes ? As-tu déjà été sensible à une publicité vegan ? Il doit en exister mais non j’ai jamais été sensible à une pub vegan mais par contre j’ai vu des campagnes de sensibilisation, de L214 notamment, qui sont hyper difficiles à regarder…

Oui c’est le but d’ailleurs et la communication de L214 d’utiliser des images choquantes pour dénoncer, tu penses que c’est une bonne stratégie ? Bah je suis pas sûr que tout le monde les regarde à cause de leur extrême dureté. C’est super difficile à regarder. Même moi je peux pas, j’en ai déjà vu mais j’ai du mal et pourtant je suis déjà un peu sensibilisé à la souffrance des animaux dans les abattoirs… mais ça me donne pas pour autant l’envie de les montrer, de les partager…En plus, les vidéos de L214 c’est pas des videos que tu pourrais passer à la télé par exemple donc ça réduit forcément leur impact. Je pense que le grand public n’est pas prêt à faire face à cette réalité en regardant ces vidéos. Donc, je sais pas vraiment si c’est la bonne stratégie. Après j’ai envie de te dire : qu’est ce qui serait la bonne stratégie ? Moi j’ai jamais essayé de convaincre les gens de plus manger de viande ou à part ma famille, un peu sur le ton humoristique, mais si je devais convaincre quelqu’un de ne plus manger de la viande je ne commencerais pas par une vidéo à la manière de L214.

Tu commencerais par quoi, toi ? (Rires) Je sais pas, je pense que ça doit venir de soi, une volonté individuelle du coup je dirais : « Essaye ! Essaye de te passer de viande pendant une semaine et tu verras que tu n’auras pas perdu de poids, ni d’énergie et que tout va bien. »

Oui ça serait plus une stratégie pédagogue que par le choc ? Oui exactement après ça fait partie de ma personnalité.

En tant que vegan te sens-tu différent des autres consommateurs ? En quoi ? Différent dans mon régime alimentaire, c’est tout ! Je fais un peu plus attention à la carte quand je vais au restaurant mais à part ça non.

Quelle est la différence entre vegan, flexitarien, végétarien ? Pour moi, être flexitarien c’est simplement « mieux manger ». Alors que le véganisme c’est un mode de vie dans son ensemble qui exclut toute utilisation de produit d’origine animale, dans l’alimentation, mais aussi dans tous les aspects de la vie courante.

Considères-tu que le véganisme est un effet de mode ? L’engouement des marques autour du véganisme est-il durable selon vous ?Hmmm (petit rire gêné)… Je peux pas dire oui ! Pour l’engouement des marques, je dirais que ça commence en étant un effet de mode mais j’ai bon espoir pour que ça soit durable. Puis c’est pas une mode, dans le sens où c’était quelque chose dont on ne parlait pas trop et aujourd’hui on en parle beaucoup plus donc ça a les traits d’une mode mais ça ne veut pas dire que ça l’est.

C’est juste que depuis quelques années on en parle beaucoup avec les réseaux sociaux et tout. Parce qu’après on pourrait se poser la même question sur d’autres sujets : Est-ce que le féminisme, c’est un effet de mode ? Il y a plein de problématiques comme ça, mais je pense que c’est voué à être durable, dans le sens où avec tout ce que notre planète a face à elle comme défis à relever, je pense que ça va devenir un problème public… donc mode peut-être, business peut-être mais dans tous les cas, l’effet de mode va aider, voire favoriser la durabilité de la cause.

Que penses-tu de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques aux modes d'alimentation vegan ? Et de leur communication ? Alors moi, je trouve les produits vegans facilement dans les rayons, je n’ai pas à chercher des heures pour avoir accès à ces produits. Leur prix, je trouve que ça reste raisonnable… Et je trouve que c’est bien et plus que bien, c’est nécessaire, donc oui satisfait de cette adaptation.

C’est pas que pour des raisons économiques du coup pour toi ? Les supermarchés s’engagent à proposer d’autres produits pour satisfaire l’ensemble de la population ? Oui je pense, puis il saute sur l’occasion et si c’est pas eux qui le font maintenant il y aura d’autres marques et enseignes qui le feront de toute façon. Puis maintenant, McDonalds a aussi sorti son sandwich vegan et ça pose des questions sur l’importance que prend le véganisme, le végétarisme au sein de la société.

Et tu fais attention à leur communication qui est de plus en plus tournée vers les nouveaux modes de consommation ? Non, je fais pas plus attention que ça aux publicités, pour moi leur communication vegan s’arrête aux packagings. Florine Rolland

Flexitarienne - Monteuse vidéo 28 ans - Saint-Étienne - Flexitarienne

Es-tu vegan ? végétarienne ? flexitarienne ? Alors oui, je suis flexitarienne. Moi je ne me reconnais pas trop dans ce mouvement là mais on va dire que ce qui se rapproche le plus c’est ouais, fin ouais flexitarien je pense. Je n’aime pas trop le terme de dire que … pour moi c’est omnivore, c’est un peu une façon de se donner bonne conscience d’être omnivore, même si on allège, enfin le principe d’être flexitarien c’est d’avoir une grosse tendance à être vegan ou végétarien au quotidien tout en s’accordant quand même de temps en temps des plats omnivores. Je préfère dire que je suis omnivore je trouve ça plus honnête. Je vais plutôt me tourner sur les produits laitiers, la viande je peux m’en passer mais c’est plus compliqué de s’en passer genre quand tu es invité chez du monde, la viande c’est euh systématique dans les plats. Puis quand tu vas manger à l’extérieur, c’est un peu chaud de trouver des alternatives bonnes maintenant, on en trouve mais c’est toujours les mêmes choses, mais c’est un peu une solution de facilité la viande mais sinon le fromage j’ai trop du mal à m’en passer, c’est purement égoïste mais le fromage les œufs ouais….

Depuis combien de temps es-tu flexitarienne ? Je fais attention à ça depuis un peu plus de 10 ans, j’avais essayé il y a 10 ans de devenir complètement vegan mais j’ai fait ça n’importe comment et j’ai eu des grosses carences du coup bah depuis je n’ai pas réessayé de faire les choses de manière plus stricte.

Où habitais-tu lorsque tu es devenu flexitarienne ? Alors c’était chaud, j’habitais encore chez ma mère à la campagne, donc pareil tendance à mettre de la viande dans tous les plats, donc difficile de mettre ça en place quand on vit avec d’autres personnes, de devoir faire des alternatives végétariennes tout le temps.

Dans quel contexte as-tu découvert cette pratique ? Pourquoi as-tu décidé de devenir flexitarienne ? Est-ce par choix ? Développez les raisons (personnes, déclic, causes expériences …). A la base, c’est parti de mon entourage. À un moment, j’étais vachement entourée de personnes vegans et végétariennes, et euh je ne comprenais pas trop l’intérêt puis j’ai eu le déclic qu'on mangeait des êtres-vivants et que bouffer des animaux morts ça m’a pas mise bien, au final quand tu te rends vraiment compte. J’ai été élevée dans une famille de campagne qui est habituée à élever et tuer des bêtes, eux ils n’ont aucuns soucis à manger des animaux morts. Pour eux, c’est clair l’animal il est déjà mort et moi je n’ai pas ce rapport-là.

Le fait d’avoir l’animal mort sous les yeux tu te rends compte de ce que tu manges et ça ne m’a pas mise bien et à un moment je me suis dit que je me voilais la face et qu’il fallait que je comprenne ce que je mange et ce que je mangeais me dégoutait et j’avais quelque chose à changer dans mon alimentation. Forcément, les œufs et le fromage même si ça parait moins violent, ça enchaîne toute cette traite de l’animal derrière. J’essaye de réduire aussi mais euh je n’arrive pas à m’en détacher totalement pour l’instant.Donc mon premier déclic ça a été la cause animale puis aussi l’environnement je pense à la planète, l’impact de la production massive de viande.

Es-tu la seule de ton entourage à avoir adopté ce mode alimentaire ? Non, bah mon copain c’est pareil. À la base, lui, c’est le stéréotype du mec où s’il n’a pas son bout de viande, il se sent carencé et va tomber. Au début, j’essayais de faire des alternatives végétariennes et ça tirait la gueule à la maison, puis il s’est laissé convaincre et euh au final même sans trouver de substitut de viande, on s’est rendu compte qu'on était tellement addicts qu'on était pas capable de concevoir un repas sans viande, donc ça a remis en question notre manière de se nourrir. On essaye de tout faire en version végétarienne. Lorsque l’on mange de la viande ça dépend de si on sort à l’extérieur ou pas, mais ça va représenter que deux repas dans le mois, trois maximum.

Le fait de devenir flexitarienne a-t-il changé tes habitudes de consommation ? Si oui, lesquelles ? Utilises-tu des produits spécifiques ? Utilises-tu des produits différents pour les shampoings, draps, serviettes, cosmétiques... depuis que tu as changé tes habitudes de consommation. Le fait de devenir végé ça pousse à revoir notre alimentation de A à Z. Avant même de faire attention à mon alimentation, la première chose que j’ai mis en place, c’est de supprimer de tous mes cosmétiques, les marques testées sur les animaux. Ensuite, j’essaye d’avoir le plus de produits vegans dans les cosmétiques, soins, produits ménagers, j’ai une forte tendance à fabriquer un peu tout ce que j’utilise, je sais ce qu’il y a dedans et ce n’est pas testé sur les animaux comme les matières premières ne le sont pas. Pour les habits, c’est un réflexe que j’ai pas trop, j’essaye de ne plus acheter de cuir mais je ne me sépare pas pour autant de ce que j’ai en cuir chez moi mais j’essaye de faire attention d’acheter moins de soie, laine, cuir … Je favorise la seconde main, avec vinted c’est con mais dès que je veux quelque chose j’essaye de le trouver sur vinted et si je trouve pas, j’achète neuf mais sinon seconde main toujours.

Vas-tu dans des lieux spécialisés ? Pas forcément, car maintenant on trouve de tout même en grande surface, après de manière générale je trouve que pour les vêtements, cosmétiques, alimentation il y a des alternatives partout. Après, il y a des trucs spécifiques que tu es obligé d’aller chercher dans les magasins type bio genre tofu, ceux en grande surface sont pas bons. Mais j’ai pas besoin car tu peux être vegan avec des aliments de tous les jours.

Et dans ton choix de marques, y-a-t’il eu des changements ? Toutes les marques type L’Oréal j’utilise plus du tout, en fait les gros groupes industriels où je sais que ça les intéresse pas de faire des efforts pour les tests sur les animaux, j’ai banni.

Qu’est-ce qu’une marque vegan pour toi ? Pour certain le produit il est végan si la composition est clean même s’il est testé sur les animaux et d’autres disent que le produit est cruelty free alors qu’il y a du miel ou des œufs dedans. Pour moi c’est un tout, la composition et que ce soit pas testé sur les animaux et qu’au niveau de l’emballage ce soit un minimum respectueux de l’environnement, parce que ça a forcément un impact sur les animaux aussi.

As-tu le sentiment de faire partie d'une communauté à travers cette pratique ? Au début oui, c’était super gratifiant d’ailleurs mais au final non car j’ai l’impression que maintenant c’est plus rentré dans les mœurs. Au début, je faisais partie d’association et j’étais vachement jeune quand j’ai commencé et j’aimais ce côté politique engagé tu vois, c’était important pour moi, j’avais le sentiment de me démarquer des autres, d’avoir une cause à défendre, tu vois j’étais idéaliste et jeune (rire) et ça fait plaisir d’être tous ensemble et de se dire que l’on fait quelque chose de bien.

Fais-tu partie d'une association, d'une communauté ? Participes-tu à des évènements en lien avec cette communauté ? Aujourd’hui pas du tout. Si j’allais dans des évènements, ce serait plus pour découvrir et apprendre des choses sur comment cuisiner.

Considères-tu que le fait d'être flexitarienne constitue une forme de militantisme ? Oui bien sur, après je ne pense pas être la mieux placée pour pouvoir dire que je suis militante végane mais ça a quand même une dimension politique.

Que penses-tu des ambassadeurs sur les réseaux sociaux ? Ouais, je suis des comptes de recettes comme @aliceesmeralda, @marielaforêt et @LloydLang, ce qu’elles font ça à l’air trop bon, c’est les seules que je suis mais juste pour les recettes, pour avoir des idées, mais pas pour leurs vies.

En tant que flexitarienne te sens-tu différente des autres consommateurs ? En quoi ? Oui ça c’est sûr, c’est con mais de se pousser à revisiter des recettes je me suis rendue compte que je pouvais varier ce que je mangeais, j’étais dans une routine culinaire, je fais plus attention à ce que je mange, à la composition, à ce que soit plus équilibré : trouver du fer, manger des légumineuses … Je fais plus attention et surtout je vais plus loin que ce que je connais déjà.

Quelle est la différence, pour toi, entre vegan, flexitarien, végétarien ? Pour moi, ça part d’une cause commune, moi je suis ce qu’on appelle les flexitariens mais on ne peut pas me mettre dans le même panier que les vegans car ça va pas leur faire plaisir et ils ont raison. Après c’est toujours ça je pense, mais je ne suis pas sûre que ce soit équitable et il y a des degrés différents.

Considères-tu que le flexitarisme soit un effet de mode ? L’engouement des marques autour du véganisme est-il durable selon toi ? Oui mais peu importe c’est pour la bonne cause, peu importe ce qui motive. Être flexitarien c’est toujours ça de pris, ça fait moins de viande consommée, en espérant qu’une demande plus faible apporte en retour une production plus faible. Mais forcément, c’est un effet de mode, on est dans la tendance healthy, faire attention à son corps donc je pense que ouais mais ce n’est pas très important.

Que penses-tu de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques aux modes d'alimentation vegan ? Et de leur communication ? Je pense que c’est un effet de mode qui peut durer car on est dans une réalité où c’est chaud pour l’environnement, notre alimentation est remise en question par les emballages ou les compositions et certaines choses vont être bannies, genre les repas préparés y’a trop de cochonneries et de sucre dedans, ça c’est des trucs qui vont disparaître de nos habitudes alimentaires ou alors qui vont évoluer vers du plus sain ! Et je trouve cool que les grandes marques s’y mettent, bon après c’est un peu du foutage de gueule, pour certaines genre pour les cosmétiques Garnier qui propose les masques cheveux hair food fructis et c’était limite si le mot vegan était écrit plus gros que la marque (rire). Parfois ils en usent et en abusent, mais par exemple Andros qui propose des yaourts végétaux je trouve ça cool c’est des alternatives faciles pour les gens. Même les protéines de soja qui sont des substituts à la viande, genre faux nuggets, je trouve ça cool même si faut pas que manger de ça. Mais c’est vrai que ces produits là sont plus adaptés aux flexitariens car ils sont dans un entre- deux, où ils n’arrivent pas à se séparer de la viande du coup c’est un compromis, ça ressemble un peu mais tu as bonne conscience de le manger tu vois. Après on est loin d’avoir autant de choix qu’au rayon viande et c’est plus cher comme les fauxmages, laits végétaux mais ça remet en question ta façon de manger et c’est bien. Avant, j’étais dans l’excès en fait, j’avais faim tac je mangeais du fromage et là ça me pousse à moins en manger et limiter ma consommation et c’est pas plus mal mais ça reste cher et ça peut rebuter. Le prix du caddie grimpe vite.

Existe-t-il selon-toi des publicités vegan ? As-tu déjà été sensible à une publicité vegan ? J’y suis pas trop sensible j’avoue, moi c’est par pur égoïsme j’ai des petits caprices et j’ai du mal à m’en passer, mais je suis pas sensible aux pubs ils te montrent un gros pavé moralisateur genre “flexitarien, mangez moins mais mieux”. Mais bon, ça me donne pas bonne conscience de savoir que la viande que je mange a été bien traité avant d’être tué, tu tues pas une bête avec respect ça ne change rien au niveau de l’engagement qu’il y a derrière (rire).

Sonia Duryn

Conseillère en assurance / MILITANTE L214 30 ans - Picardie

Depuis combien de temps es-tu végane ? Alors moi j’ai commencé en étant végétarienne, j’ai arrêté la viande il y a 14 ans, donc ça ne date pas d’aujourd’hui c’était bien avant… à l’époque j’étais une aliène (rires) on me regardait bizarre en me disant "oui ça va lui passer ", " tu vas avoir des soucis de santé..." donc j’ai arrêté la viande j’avais 16 ans . Après vegan, te donner une date c’est compliqué parce que ça s’est fait au fur et à mesure en fait ça me paraissait la suite logique des choses quand t’arrêtes la viande, le poisson bah après le lait, les œufs tu te rends compte qu’il y a aussi une souffrance, alors certes, qui n’est pas la même parce qu’on ne tue pas l’animal à proprement parlé comme pour la viande et le poisson mais voilà pour moi c’était la suite logique des choses. Et si je devais te donner une date, ça serait depuis 5/6 ans que je suis végane mais ça s’est fait progressivement

Du coup c’était assez progressif, mais depuis 5/6 ans tu es complètement végane ? Ouais, c’est ça, pas de consommation de viande, poisson, lait, œufs, mais à côté il y a aussi le mode de vie, donc pas de produits testés sur les animaux, pas de cuir, pas de laine… Bon ça à la rigueur, cuir, laine, tout ça, je n’en portais pas avant parce que pour moi c’est de la matière animale. C’est pour ça que « Depuis quand je suis végane ? » c’est difficile à dire parce que, par exemple j’ai arrêté de porter du cuir avant d’arrêter les œufs. Donc, c’est vraiment progressif. Autant la viande ça a été net, j’ai vu une vidéo d’un abattoir, à l’époque, sur MSN. Un ami qui m’avait envoyé ça, qui me dit : « Tiens, toi qui aime les animaux, regardes », j’ai vu ça et direct j’ai stoppé net.

D’accord et alors tu habitais où lorsque tu es devenue végane du coup ? Euh dans l’Aisne, c’est en Picardie, je n’ai pas bougé.

J’aimerais savoir dans quel contexte tu as découvert cette pratique ? Euh principalement par internet. En faite, c’était surtout avec L214 après il y avait peut-être d’autres associations à l’époque mais je ne me souviens plus des noms donc surtout L214 qui montrait un peu le broyage des poussins. Aussi bah le lait, justement on sépare le veau à la naissance de sa mère, le veau finit dans l’assiette et euh voilà le lait au lieu que ça soit pour le veau bah c’est pour les humains donc quand tu réfléchis ça te paraît pas logique en faite. Nous, en tant qu’humain, on n’est pas censé consommer du lait réservé à un animal. Fin voilà ça c’est mon point de vue.

Les vidéos de L214 c’est toi qui allait les chercher ou on te les a envoyé ? Oui oui, j’ai fait mes recherches par moi-même.

Et du coup qu’est-ce qu’être végane pour toi ? C’est avoir un mode de vie qui n’exploite pas les animaux au final, c’est faire au mieux parce que 100% vegan ça serait compliqué. Euh quand je dis 100% végan, c’est par exemple, on va dans les toilettes publiques on se lave les mains avec du savon, le savon a peut-être été testé sur les animaux ça on le sait pas mais voilà pour moi c’est faire au mieux dans son quotidien de façon à ne pas exploiter les animaux, donc c’est à dire pas de cirques, pas de zoo, pas de produits testés sur les animaux, pas de maltraitance animale, fin voilà c’est tout ce qui va concerner la maltraitance animale.

D’accord, alors juste pour rebondir comme c’est un peu dans la continuité, toi si tu as décidé de devenir végane tu me dirais que c’est pour quelles raisons ? Principalement au départ pour les animaux et je me rends compte au fur et à mesure du temps que c’est bon aussi pour la planète et pour la santé. On en parle de plus en plus comme quoi la consommation de viande a un impact négatif sur la planète donc voila, la raison principale par contre c’est les animaux parce que j'adore les animaux et je ne me voyais pas les manger.

D’accord donc toi c’est vraiment par choix ? Oui vraiment par choix, j’ai pas été influencée parce que de toute façon quand j’ai commencé j’étais au lycée à l’époque j’étais la seule à la cantine à pas manger de viande, à pas manger de poissons, même dans ma famille, dans mon entourage, fin, il n’y avait pas beaucoup de personnes qui ne mangeaient pas de viande et c’est pour ça qu’ils disaient que j’étais une aliene parce qu’on est censé manger de la viande, mais non.

Et du coup le fait de devenir végane, est-ce ça t’a changé tes habitudes de consommation ? Et si oui, lesquelles ? Euh pas forcément, c’est juste que fin j’ai une vie sociale comme tout le monde, je vais au resto, je fais des soirées entre amis, je fais des repas en famille. Par exemple, si on fait raclette bah moi je vais faire raclette avec des légumes, je vais apporter mon fromage fin pour moi y’a pas d’impact au niveau de ma vie. Je sais que certains vegans ont tendance à se dé- sociabiliser, ils ne font plus de sorties tout ça parce qu’ils pensent qu’ils ne vont pas pouvoir manger comme tout le monde, mais en faite c’est faux c’est juste qu’il faut s’adapter.

D’accord et du coup au niveau des produits cosmétiques, tout ce qui est shampoing ? Bah je fais tout moi même. Moi c’est une passion, autant j’ai la passion de la cuisine, j’ai la passion de la nature, de faire mes produits ménagers, d'entretiens, des cosmétiques donc pour moi y’a pas vraiment de changement fin je pense que quand on devient vegan on fait attention à tout le reste aussi. Aussi bien à la nature, à l’environnement, à soi, à sa santé.

D’accord et vu que tu fais tout toi même, ça t’arrives quand même de te rendre dans des lieux spécialisés type concept store vegan ? Oui oui, salon vegan ça je le loupe pas je le fais deux fois par an, je fais tout ce qui est salon bio euh ouais parce que j’aime bien découvrir même si je fais tout moi-même ça m’arrive aussi d'acheter des produits tout fait mais j’aime bien découvrir aussi des entreprises. Puis, aller à la rencontre des producteurs fin moi j’aime bien échanger avec les gens donc je trouve ça intéressant.

Et au niveau du choix des marques, tu te tournes vers lesquelles ? Hum alors au niveau simili viande j’aime bien Wheaty, parce que je trouve ça bon et ça a été les premiers que j'ai connu pour remplacer la viande notamment les fameuses “merguez” que je vais utiliser pour le barbecue. Et c’est pour ça qu’au niveau vie sociale ça ne change rien à partir du moment où on ramène ses produits et ça permet de faire découvrir à l'entourage. J’ai même des amis qui sont devenus végétariens par rapport à mes plats. Et quand je vois ça, ça me fait super plaisir parce que je me dis qu'au final j’ai jamais influencé en disant “il ne faut pas manger de viande” et ça s’est fait progressivement pour eux. Et même ma famille, notamment mes parents qui se sont rendus compte que la viande, ils peuvent s’en passer et qu’on peut aussi se régaler avec des similis. Parce que pour eux c'était pas bon en faite et le fait de faire goûter ça leur montre que c’est bon ce qu’on mange aussi.

Et au niveau du visuel est-ce que cela change quelque chose ? Oui, ça ressemble. Alors en terme de goût ça fait longtemps que j’ai arrêté la viande donc je ne me rends pas forcément compte mais ouais visuellement il y a des produits... Et justement, c’est ce que je cherche avec la page instagram c’est montrer qu'on peut exactement cuisiner la même chose, des bourguignons ou tout ce qu’il y a de plus classique, en version végétale.

Justement, pourquoi as-tu créé cette page Instagram ? À la base, quand j’ai commencé Instagram, c’était pour aider les non-vegan, les non- végétarien à démarrer, parce que lorsqu’on débute on sait pas par où commencer, comment cuisiner, on pense que c’est compliqué, qu’il faut pleins d’ingrédients mais non en fait, il n’y a aucune difficulté et il y a pleins d’alternatives. J’essaye de faire au plus simple, bon après il y a aussi quelques plats compliqués mais ce n’est pas le but de ma page ! Je me dis : Si je peux aider à travers des petites recettes simples, objectif atteint !

Et qu’est-ce qu’une marque végan pour toi ? Bah ça sera une marque qui n’utilisera pas de produits animaliers et qui sera respectueuse des animaux et de l’environnement. Après une marque que j’aime bien et c’est assez polémique c’est la marque Alpro, parce que Alpro c’est Danone aussi et Danone va commercialiser du lait de vache. Mais moi j’aime bien les produits Alpro, alors il va y avoir des vegans je n’aime pas dire ça mais “extrémistes”, qui eux vont dire “moi je consomme pas Alpro parce que c’est Danone.

Mais moi, je trouve justement que c’est bien que des marques qui utilisent en temps normal des animaux, des choses comme ça, se mettent aussi à une tendance végétale. Alors soit c’est un effet de mode, est-ce qu’ils font ça pour que ça soit vendeur ou parce qu’il y a une prise de conscience ? Bon après, il y a une demande donc ils se font de l’argent mais je ne vais pas critiquer ça. Je me dis que si au fur et à mesure les gens consomment plus de végétal peut- être qu’ils arrêteront l’animal et qu’ils feront du 100% végétal. Moi je trouve ça bien comme démarche.

Pourquoi et comment as-tu adhéré à l’association L214 ? Alors comment, ça a été sur une page Facebook. Donc je faisais déjà des dons au niveau de l’association donc j’étais adhérente dans ce cas là et je me suis inscrite pour être militante et ça c’est à travers une page Facebook de la région donc c’était zone Picardie. Et pourquoi ? Parce que L214 c’est pour moi l’association qui va pas pousser à devenir vegan, c’est à travers les images que les gens vont faire leur choix, c’est pas violent. Alors ça peut paraître violent par rapport aux images mais ils montrent la réalité et c’est ça que j’ai apprécié. Après, on adhère ou pas, mais ça permet aux gens d’y adhérer ou pas. Pour moi c’est pas extrémiste comme certaines associations où ils vont déverser du sang dans des boucheries. Fin je trouve que c’est pas comme ça qu’on change les mentalités, en provoquant. Pour moi c’est la plus correcte.

Peux-tu nous présenter L214 un peu plus ? L214 c’est une association de défense des animaux. Le principal but est de montrer les conditions d’élevage et d'abattage aussi. Donc, c’est surtout des caméras cachées dans les abattoirs et ils cherchent à montrer au monde la réalité des abattoirs. Chose qu’on ne sait pas parce qu’on montre pas forcément la différence entre l’assiette et la réalité.

Et pour toi qu’est-ce qu’être militante ? Parce que tu nous as dis qu’il y avait une partie adhérent et militant, qu’est-ce que ça implique d’être militant pour L214 ? Bah c’est qu’on va participer à des manifs, à la distribution de flyers, on va s’investir, c’est-à- dire faire vivre l’association. Euh adhérer, c'est juste faire des dons sans pour autant faire des actions alors que là, ça va être faire des actions. Par exemple, moi régulièrement je vais aller distribuer des flyers sur des thèmes précis dans la rue aux gens et leur expliquer nos démarches, ou faire la marche pour la fermeture des abattoirs, qu’on fait une fois par an donc c’est une marche militante. Ça va être aussi tenir des stands, par exemple à la chandeleur on peut faire des crêpes vegans et faire déguster en expliquant en même temps l’impact du lait de vache sur les animaux et sur l’humain aussi parce que c’est pas forcément bon. Et donc montrer qu’on peut manger exactement la même chose en remplaçant le lait.

Et que penses-tu des ex-vegan qui disent que c'est dangereux de ne pas consommer de viande au sens large c’est-à-dire poisson, viande ? Je pense qu’ils ont pas remplacé correctement parce que moi ça fait 14 ans et je suis une preuve qu’on peut être en bonne santé sans manger de viande. Je fais du sport, je cours, enfin j’ai pas de problèmes de santé. Donc je pense que ce sont des gens qui se sont un peu laissé aller, qui n’ont pas forcément bien remplacé, et qui ne se sont pas assez informés car on peut très bien remplacer des protéines animales par des protéines végétales. Je pense qu’ils n’ont pas bien fait les choses.

Est-ce qu’on peut associer le véganisme à l’anti-spécisme, ou est-ce que ce sont 2 pratiques différentes ? Non pour moi c’est la même chose, comme quoi l’humain est au même niveau que l’animal, qu’il n’y a pas de supériorité. Donc à partir du moment où on ne mange pas les animaux et qu’on ne les exploite pas, bah pour moi c’est la même chose. On n’est pas supérieur aux animaux et les animaux ne sont pas supérieurs à nous, donc on ne les exploite pas.

En tant que militante L214, comment manifestes-tu ton engagement au quotidien ? La marche une fois par an pour la fermeture des abattoirs, distribution de flyers avec d’autres militants. Après sur les réseaux sociaux, bon ma page instagram c’est principalement des recettes mais indirectement c’est aussi pour démontrer qu’on peut manger sans produits animaliers de la même façon. Sur Facebook aussi c’est ma page L214, en ce moment j’ai le temps avec le confinement (rires), je poste des citations, des images… Sans choquer, mais plutôt faire dans la douceur et c’est ça qui je pense va plus amadouer les gens et se rendre compte que si on n’est pas violent ça passe plus facilement.

Je vais rebondir sur ce que tu dis, je trouve que c’est un peu en contradiction avec L214 qui met en avant des images choquantes pour dénoncer .Alors qu’est-ce qui vous choque dans L214 ?

J’ai eu l’occasion de regarder une vidéo de L214 tournée dans un abattoir, qui dénonçait les pratiques d'abattage et j’ai trouvé ça vraiment difficile à regarder. Alors je vais répondre, ce que je réponds souvent aux gens : « comment on peut ne pas cautionner ce genre d’images, mais qu’on peut cautionner de manger de la viande ». Comment on peut ne pas accepter de regarder les images mais qu’on peut accepter de l’avoir dans l’assiette ?

Peut-être parce que dans notre imaginaire ça ne se passe pas comme ça... En fait, le problème c’est que la publicité elle nous montre des petites images où la petite brebis elle court dans le pré, la vache est caressée… mais ce n’est pas ça la réalité. Parce que si on montre la réalité, bah y a plus personne qui mangerait de la viande. C’est pour ça je trouve ça intéressant de savoir ce que vous trouvez de choquant chez L214 parce qu’au final ils ne font rien de plus que de montrer les images et si ça choque, c’est la réalité qui est choquante et pas L214...

Oui, je suis d’accord mais je me demandais si la stratégie de communication de L214 était la bonne, parce que ce sont des images qui sont très difficiles à regarder, qu’on n’est pas tous prêt à recevoir et que même à l’échelle de la télévision, on ne peut pas les montrer comme une publicité basique à heure de grande écoute. En fait, ils floutent et aussi parfois L214 propose des vidéos en version « animée », c’est-à-dire c’est des vidéos qui ne vont pas choquer pour faire de «l’éducation» aux enfants. Moi, c’est sûr que quand j’ai arrêté la viande y a 14 ans, je suis tombée sur ce genre d’images, ça m’a choqué, j’ai fondu en larmes et c’est pareil je ne savais pas que c’était comme ça. Bon… moi après l’avantage aussi que j’ai eu pour arrêter plus facilement, c’est que je n’étais pas trop viande, j’en mangeais pas forcément. Je pense que pour un viandard, c’est plus compliqué. Mais ouais j’ai vu les images ça m’a choqué, je me suis dit “Mais non, je ne veux pas que les animaux aient à vivre ça”, donc pour pas qu’ils aient à vivre ça, faut pas en manger. Je sais très bien qu’il y aura jamais de 100% vegan et qu’il y aura toujours des consommateurs de viande mais je me dis que si ce genre d’images a eu un impact sur moi positif, et c’est pour ça que je pense que ça peut avoir un impact positif sur d’autres personnes parce qu’il y en a pleins qui refusent de regarder mais quand je leur dit « On refuse de regarder, mais on cautionne de l’avoir dans l’assiette », sans le dire méchamment, parce qu’il y a rien de méchant dans mes propos, bah les gens ils se disent « Bah ouais, en fait c’est pas bête ». Moi je ne trouve pas ça choquant, mais ça peut choquer les plus jeunes. Vous avez quel âge vous ?

22 ans, mais parfois quand on tombe sur des vidéos d'abattoirs sur les réseaux sociaux je trouve que c’est difficile à regarder. Après L214, ça peut passer de temps en temps aux infos et encore ça ne montre pas des images trop dures parce qu’il peut y avoir des enfants. Mais L214, ils ne vont pas balancer des vidéos partout, on décide de regarder ou pas. Moi j’avoue je ne les regarde pas les vidéos (rires). Je sais comment ça se passe, ça apparaît sur mon fil, le fait d’être adhérente et militante, nous on a toutes les infos en avant-première par mail, je ne les regarde pas, je vais signer les pétitions mais je vais pas regarder et me faire du mal volontairement et il y a assez de souffrance comme ça autour de nous, j’ai pas envie de les regarder. Donc, je peux comprendre que ça puisse choquer notamment les plus jeunes, maintenant s’il faut passer par-là pour que les gens aient un déclic, comme moi je l’ai eu, je me dis oui, pourquoi pas.

Oui et puis c’est aussi une façon de dénoncer. Oui et puis y en a d’autres qui vont être plus choquantes, PETA (Pour une Ethique dans le Traitement des Animaux) ils vont faire des actions un peu plus chocs, où il va y avoir des gens tout de sang vêtus dans la rue ou alors qui vont faire semblant de se couper. Ça, pour moi ça peut être trop choquant, à l’inverse de L214. Parce que là justement, bon alors c’est la réalité aussi, mais « on se force » à faire des actions comme ça, alors que L214 c’est plus faire déguster des gâteaux où il n’y a pas d’œufs, pas de lait et montrer que finalement c’est aussi bon, je trouve que finalement c’est pas plus mal, il faut y aller en douceur.

Tout à l’heure j’ai cru comprendre que tu ne cautionne pas les attaques de boucheries ? Non, non.

C’est trop extrémiste comme actions ? Ouais, moi déjà à titre perso je cautionne pas et L214 ne cautionne pas non plus. Ce n’est pas en allant casser des boucheries ou en allant verser du sang dans les boucheries que ça va changer les mentalités, au contraire on va passer plutôt pour des « neu-neu », des extrémistes alors que ce n’est pas du tout ce que l’on cherche à montrer. Alors en plus, je travaille dans les assurances donc ce qui va se passer c’est que la vitrine elle va être réparée et puis c’est tout (rires). Mais en soit, moi je suis pas pour la provocation.

Et lors de vos manifestations/actions, as-tu déjà rencontré des problèmes comme des interventions de la police ou des représailles ? Non, non, la marche c’est vraiment une marche comme une manifestation de personnes quelconques mais en fait, on fait ça avec des chants et des affiches dénonçant la maltraitance animale. C’est ça aussi que j’apprécie dans le fait d’être militante chez L214, c’est que ça ne va pas être des extrémistes. Les extrémistes, ils ne vont pas adhérer à L214, ils vont être avec « 269 Life » ou c’est un petit peu plus extrémiste, « Boucherie abolition » qui sont plus connus pour être extrémistes. L214, non, on va dire que c’est « gentillet » et c’est pour ça aussi qu’on nous appelle « Les bisounours » parce qu’on ne fait pas des actions très provocantes. On va marcher dans Paris et puis c’est tout, et il y a des stands aussi. C’est ça aussi qui se passe pendant la marche, c’est qu’après il y a tous les stands de rassemblement, c’est principalement de la nourriture mais il y a aussi des associations, des flyers, des choses comme ça.

D’accord, et du coup par rapport à ton militantisme, est-ce que ça a impacté tes relations avec ton entourage : familiale, amicale, professionnelle ? Non, non, je distingue bien les deux, quand je suis en famille bon ça peut m’arriver de parler des actions qu’on a fait, tout ça, mais je n’ai jamais cherché à les influencer. Ils ont respecté mon choix, je respecte le leur.

En tant que militante L214 te sens-tu différente de ceux qui se revendiquent simplement vegan ? Non, il n’y a pas de différence. Déjà, même être végétarien c’est déjà très bien, vegan c’est encore mieux parce que c’est aucune exploitation animale. Maintenant non, pas de différence. Moi ça a été un choix parce que j’ai voulu encore plus poussé et ouvrir les yeux aux gens et puis les informer aussi, parce qu’il y en a beaucoup qui aimeraient le devenir mais qui ne savent pas par où commencer, ou comment faire. Donc, moi c’est principalement dans le but d’informer donc non il n’y a pas à être au-dessus ou en-dessous parce qu’on est militant ou pas.

Existe-t-il selon toi des publicités véganes ? As-tu déjà été sensible à une publicité végane ? Publicité, alors, point de vue télé, non. Alors après oui, il va y avoir Herta qui va faire le « Bon Végétal » euuh maintenant, pour moi ce n’est pas forcément vegan, c’est juste montrer qu’on peut manger autrement parce que c’est « tendance » à l’heure actuelle.

Hmmm pour moi ce n’est pas végan ! Parce qu’à côté de ça, Herta dans l’esprit des gens c’est le jambon, et je ne sais pas ce qu’ils font d’autres comme viandes mais voilà moi Herta j’ai aussi l’image du jambon dans la tête donc voilà, faut changer les mentalités, mais pour moi non c’est pas vegan.

Et justement, par rapport à Herta qui propose son steak végétal. Qu’est-ce-que tu penses de cette appellation « steak » ? Oui alors moi ça ne me choque pas. Je sais que c’est pareil, il y en a beaucoup qui disent « Oui il ne faut pas utiliser le mot steak ». Mais justement, c’est pour montrer qu’on peut manger exactement la même chose, avoir la même ressemblance, le même nom, mais qu’il n’y a pas de souffrance derrière.

Considères-tu que le véganisme est un effet de mode ? L’engouement des marques autour du véganisme est-il durable selon toi ou faut-il qu’elles aillent plus loin dans leurs actions ? Alors, je pense qu’il y a un petit côté effet de mode, d’un point de vue industriel. Maintenant, ce côté effet de mode, je pense aussi qu’il y a quand même une prise de conscience chez les gens. Alors y en a qui vont se proclamer vegan, sans savoir vraiment ce que c’est, sans faire attention à l’environnement, sans faire attention à leur mode de consommation, mais juste parce que c’est tendance de dire qu’on est vegan. Mais ça, c’est peut-être plus vraiment les très jeunes, les 16-17-18 ans, parce que c’est ceux qui suivent la mode. Maintenant je pense avant tout que c’est une prise de conscience, je pense que les gens à l’avenir vont quand même consommer différemment sans être forcément 100% vegan, 100% végétarien, mais plus flexitarien c’est-à-dire manger moins de viande, mais de meilleure qualité et moins souvent et en contrepartie compenser avec des produits plus végétaux. Moi je pense qu’il y a l’effet de mode, mais que c’est avant tout une prise de conscience et je pense notamment grâce aux associations et grâce aux images… Après oui, c’est purement marketing pour les entreprises, mais parce qu’ils répondent aussi à une demande mais ils se font quand même du blé sur notre dos, parce quand je vois le prix des produits… (rires)

Ah oui ? C’est intéressant ça, justement le prix des produits il est comment? Alors après n’ayant jamais acheté de viande, je me rends pas trop compte mais moi je trouve ça cher, pour faire régulièrement mes produits moi-même quand je vois ce que ça coûte des haricots rouges, ou du riz… je trouve ça cher pour ce que c’est.

Que penses-tu de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques aux modes d'alimentation vegan ? Et de leur communication ? Moi je trouve ça bien parce qu’ils se mettent dans le mouvement alors même si on sait que derrière c’est purement commercial et pour l’argent, parce qu’au final qu’on mange de la viande ou des végétaux, je pense que les marques s’en foutent un petit peu, ils répondent juste à une demande mais après je trouve ça bien parce que tout le monde n’a pas forcément la possibilité d’aller dans des magasins bio, d’acheter du bio, de pouvoir se déplacer dans des enseignes spécialisées dans le bio…

Et notamment, je vois dans l’Aisne, même la ville où j’habite, il y a un magasin bio qui propose pas grand chose du point de vue vegan, donc le fait que les supermarchés le fassent, bon c’est beaucoup du végétarien, mais je trouve ça bien notamment de mettre du Alpro, du lait végétal... Ils répondent à la demande et je trouve ça positif, parce que s’il n’y a pas de propositions, les gens n’en achèteraient pas et n'iraient pas dans les magasins bios pour en acheter. Et c’est justement ce que j’aurais aimé, à l’époque où j’ai arrêté la viande. À l’époque, il n’y avait aucun produit végétal dans le commerce, à part du tofu nature et encore, et c’est ça qui manquait à mon époque. Parce que j’avais 16 ans, j’habitais chez mes parents, c’est ma mère qui me faisait plus ou moins à manger et quand j’ai arrêté la viande, elle savait pas quoi faire en fait et même moi je ne savais pas par quoi remplacer au départ.

Ouais, ce n’était pas simple ! Non, non et puis il n’y avait pas autant d’offres et puis maintenant j’ai envie de dire que devenir vegan c’est simple, avec tout ce qu’il y a sur internet.

Ah oui carrément ! Et puis même sur Paris ! Ah oui, Paris c’est génial et puis mêmes les restaurants, on a envie d’un resto vegan y en a tous les coins de rues maintenant.

Elise Desaulniers

Journaliste, écrivaine et directrice générale de la SPCA (Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux) de Montréal 45 ans - Montréal, Canada

Et j’ai vu que tu étais directrice générale de la SCPA de Montréal, pourquoi avoir choisi de rejoindre cette organisation ? En fait, ça s’est fait un petit peu par hasard. Je milite pour le droit des animaux et pour le véganisme depuis une douzaine d’années. J’avais jamais vraiment rêvé de rejoindre une organisation de protection animale. Je travaillais à mon compte, j’étais indépendante, j’écrivais des bouquins et je faisais du consulting mais j’étais aussi membre du conseil d’administration de cette organisation. C’est la plus ancienne organisation de protection animale au Canada et la plus importante au Québec. Le directeur général est parti et on avait besoin de quelqu’un pour le remplacer un peu en urgence, en intérim alors j’ai proposé parce que je pouvais aménager mes horaires pour le faire. Et puis ça s’est super bien passé, j’ai réalisé que j’aimais bien ce rôle de gestionnaire. C’est une très très grosse équipe, on est 135 salariés, 500 bénévoles, on voit 15 000 animaux par année, donc c’est vraiment une structure énorme. Je pensais jamais que j’allais aimé gérer une structure comme ça, je pensais préférer le travail un peu plus militant indépendant mais j’ai réalisé que j’aimais ça, que les employés aimaient ça aussi et que peut-être que c’était à cet endroit-là que j’allais être la plus efficace. Donc voilà, je suis restée.

Quelles sont tes missions là-bas, quel est ton rôle au quotidien ? C’est essentiellement d’être la chef d’orchestre de cette grosse machine. Mon travail, c’est de m’assurer que tout le monde sache ce qu’il y a à faire. Mon rôle c’est d’impulser les grandes orientations qui viennent de moi évidemment mais aussi de toute l’équipe et de m’assurer que tout ce que l’on fait est aligné avec ces grandes orientations. C’est une façon très très théorique. Chaque année, on fait un plan d’action pour l’année. On consulte tout le monde, je m’assure que le conseil d’administration est d’accord avec ce plan d’action, le budget et tout ça. Mais après au quotidien, je vais être appelé à prendre des décisions sur des embauches, sur des mises à pieds, sur des priorités. Et en ce moment en temps de pandémie, on a un appel chaque matin où l’on regarde les demandes d’animaux qui nous ont été faites. Généralement, on accepte tous les animaux qui nous sont amenés au refuge. On joue un rôle notamment de refuge. On a pleins d’autres rôles à jouer, politique, de lobbyiste, tout ça mais on est d’abord un refuge. Et habituellement on prend tous les animaux que la population nous amène, dont les abandons, les animaux trouvés et là on doit prendre que les cas très urgents. On a un personnel réduit pour des questions de distanciation sociale. Donc chaque matin, il y a un appel. On est quatre sur cet appel, il y a le directeur du service client, la vétérinaire en chef, la directrice du bien-être animal et moi.

Et on regarde chacun de ces cas là, on décide en fonction de l’espace qu’on a, du cas de l’animal, lesquels on prend, lesquels on ne prend pas. Par exemple, un chat de 5 ans qui a des problèmes de comportement, on s’est dit ce matin qu’on va peut-être essayer d’appeler la personne qui veut l’abandonner et lui offrir du soutien par téléphone, de la litière différente, des conseils pour pas qu’elle soit obligée de l’abandonner. Alors qu’un monsieur qui a une place dans un hébergement pour personne âgé et qui doit abandonner son chien parce qu’ils sont interdits, dans ce cas là, on prend le chien et on a une famille d’accueil qui est prête à accueillir le chien. On a un peu ce genre de logistique là. Ça c’est mon rôle en temps de pandémie. J’ai aussi dirigé l’élaboration des plans d’urgences. C’est vraiment un rôle de chef d’orchestre. Je règle les conflits, j’écoute les gens, je veille à ce que tout le monde ait tout ce qu’il faut pour bien faire son travail et j’essaie de me rendre la plus efficace possible en donnant des petites poussées. En parallèle, je fais les relations avec les médias, avec les donateurs aussi et tous ces trucs là.

Donc, depuis combien de temps es-tu végan ? Je suis devenue végane, il y a 12 ans en 2008. Je me rappelle même du jour, j’étais tombée par hasard sur le livre d’éthique animale de Jeangène Vilmer, qui est probablement un des premiers bouquins qui est paru en français sur ce sujet-là. Mon copain qui est prof de philo avait commandé ce livre-là pour enseigner l’introduction à l’éthique pour des étudiants en médecine dentaire. Ils connaissent absolument rien sur le sujet mais il s’est dit que les animaux c’est un peu sexy donc les jeunes vont aimer. Et moi, j’avais reçu sa commande Amazon au travail. Et, il y avait pleins de livres qui m’intéressaient pas mais il y avait ce truc éthique animal. J’étais dans un café, j’attendais un ami qui était super en retard et j’ai commencé à lire ce bouquin-là parce qu’il me semblait être le moins chiant de la pile. Mais aussi, parce que j’aime les chats, j’ai toujours aimé les animaux et j’ai vraiment vraiment eu un choc. J’avais jamais entendu parlé de ma vie des élevages industriels, j’avais jamais pris conscience que les conditions dans lesquels les animaux que je mangeais étaient élevées et comment c’était possible que j’aime autant mes chats et manger des animaux élevés dans ces conditions-là. Je suis rentrée à la maison et j’ai dit à mon copain qu’on allait être végétariens. Il était un peu choqué et pas tout à fait d’accord de cette décision radicale pour notre famille. J’ai quand même dû convaincre un philosophe qu’on allait devenir végétarien et rapidement végan parce que j’ai compris qu’évidemment le lait et les oeufs, c’est pas mieux. Pour convaincre un philosophe, il a fallu que je lise pleins d’autres bouquins. C’est un peu comme ça que je suis devenue militante. Mon premier cobaye, ça a été de convaincre un philosophe. J’ai eu de l’aide parce qu’il faisait son doctorat avec Valérie Giroux, elle a vraiment fait un travail de fond. Mais j’ai quand même eu un rôle à jouer là- dedans. Et puis, lui aussi écrit des bouquins sur le sujet. On est végan depuis tout ce temps-là.

Donc c’est ce bouquin qui a été le début de tout ? Oui, il a ouvert la porte à la réflexion. Je dirais aussi mes chats. Cette relation que j’ai avec ces personnes qui partagent ma vie m’ont amené à voir les animaux différemment. Toutes les fois où je voyais des descriptions de conditions d’élevages de poules, de vaches, de cochons, tout me ramenait à mes chats. Donc c’est clair que ces personnes là ont joué un rôle fondamental pour moi.

Les discussions avec des gens comme Valérie Giroux qui étaient importantes, mon amie aussi qui était végane juste un tout petit peu avant moi avec qui j’ai fait mes premières courses véganes. Je savais vraiment pas quoi prendre, quoi manger. On est allées au supermarché ensemble et elle m’a montré un peu quoi acheter. Des auteurs de livres de cuisines aussi comme Marie Laforêt en France. On est assez vite devenue amie sur Facebook, sur Instagram et ça m’a aussi aidé. Sur le côté intellectuel, j’étais convaincue mais je suis gourmande, un peu comme tout le monde et puis au début c’était un peu difficile. Je perdais tout mon répertoire culinaire et pendant quelques semaines, manger des trucs un peu chiants ça va mais j’aime bien manger des trucs supers bons et cuisinés. Et m’inspirer d’elle, ça m’a quand même aidé et permis de voir que je pouvais être en super santé, aller super bien et aligner mes valeurs avec mes pratiques. Ça pouvait se faire facilement avec des arguments intellectuels et de la bonne bouffe.

C’est juste une question de réadaptation. Et vous habitiez où quand vous êtes devenue végane ? C’était plus à la campagne, en milieu urbain ? C’était à Montréal, exactement dans le même appartement où je suis en ce moment même. Moi j’ai changé, mais l’appartement est toujours le même. Je suis en plein centre ville de Montréal. Donc évidemment, je suis hyper privilégiée, j’ai un boulot, j’ai de l’argent, j’ai toujours eu un peu d’argent, j’habite en plein centre-ville où j’ai un accès à pleins de produits, je suis éduquée donc j’ai pu avoir accès à des livres. J’ai une super cuisine donc pour cuisiner c’est parfait. J’ai pas d’enfants et c’est con mais ça rend la transition alimentaire beaucoup plus facile parce que j’avais personne à convaincre à part moi et mon copain. Donc c’est clair que j’avais tous les trucs idéaux pour me transformer. Et on en parle pas souvent, mais la santé mentale, dans les années qui ont suivi, j’ai fait une dépression et j’aurais jamais pu devenir végane en dépression. Manger, c’était sans intérêt. Rien n’avait d’intérêt dans ma vie. Donc c’est clair aussi qu’être en bonne santé physique et mentale, ça aide dans la transition. C’est pas tout le monde qui a ce privilège-là.

Et vous parlez de l’aspect financier, est-ce que là-bas le fait d’être végan c’est accessible à tous ou ça reste une pratique réservée à une certaine catégorie de personne ? En théorie, c’est accessible à tout le monde. Quand on regarde certaines communautés, ce qu’elles mangent comme plat traditionnel, en Asie, en Afrique, même en Amérique du Sud, c’est essentiellement végan ou très peu d’animaux. La légumineuse ça coûte pas cher, ça coûte vraiment pas cher. Mais par contre être riche ça permet pleins de trucs, ça permet d’accéder à ce qu’on veut, quand on veut. Ça permet d’avoir du super matos de cuisine, ça permet de s’acheter des livres, ça permet d’avoir de l’espace et d’avoir le choix.Faire une transition ça veut aussi dire qu’on va essayer un nouveau plat et qu’on va se tromper et ça va être dégueu. Quand on est riche on peut dire bon ben tant pis, je commander une pizza ou je vais aller au resto ce soir. Quand on a pas les moyens financiers là, quand on a 3 enfants qui sont affamés, je pense pas que prendre les risques de changer c’est pas aussi facile. Je pense que l’alimentation végane est relativement abordable mais n’empêche que ces dernières semaines, j’ai beaucoup travaillé avec des banques alimentaires pour leur fournir de la nourriture pour animaux.

Il y a beaucoup de monde qui a perdu leur boulot au Québec comme partout ailleurs sur la planète. Si on se nourrit dans les banques alimentaires c’est pas sûr qu’il va y avoir du tofu. Même si le tofu c’est pas cher, c’est pas certain qu’il va y en avoir et c’est pas certain qu’il va y avoir les bons pois chiches que tu veux pour suivre ta recette non plus. Si on a pas les moyens, parfois on va prendre ce que l’on connaît. Même si en théorie, l’alimentation végane est accessible, je pense que c’est pas le cas pour tout le monde. Je m’imagine mal, par exemple en ce moment où pleins de gens ont leur vie bouleversée, leur dire « hey guys, c’est une bonne occasion pour devenir végan ». Pour moi c’est génial, je découvre de nouvelles techniques pour faire du camembert et du pain Végan, j’ai du temps c’est super, c’est magnifique et c’est une belle occasion pour certaines personnes d’expérimenter de nouveaux trucs. Donc peut-être d’apprendre de nouvelles recettes, de découvrir le véganisme mais si on est confiné avec 3 enfants et qu’on a perdu son boulot, c’est peut être pas le meilleur temps pour devenir végan.

Et qu’est-ce qu’être végane pour vous ? Pour moi, être végane c’est d’abord une question politique. C’est considérer que tous les animaux méritent une égale considération Animaux-Humains, ce qui implique de ne pas exploiter d’animaux. En pratique ça veut dire s’abstenir de tout ce qui provient d’un animal. Au niveau de l’alimentation c’est évident, au niveau des cosmétiques, au niveau de la vie aussi, ne pas aller voir des zoos. Mais après c’est pas non plus une question de pureté personnelle, je ne cherche pas à être parfaite non plus. Probablement, qu’il peut y avoir des sous entrants de produit animal dans les pneus du vélo que j’utilise pour me déplacer. Peut-être aussi que quand je prends des médicaments quand j’ai mal à la tête ça a déjà pu être testé sur un animal. Si il y a un vaccin contre le Covid-19, je vais le prendre et probablement que ce vaccin aura été testé sur un animal. Et c’est malheureux mais à un moment donné, c’est pas une question de pureté personnelle, ce qu’on cherche surtout en tant que végan c’est que politiquement, les animaux soient considérés dans la société, dans le droits fondamentaux. Tant qu’on ne sera pas à ce stade là, il y aura forcément un peu d’exploitation. Est-ce qu’on peut efficacement tester un médicament sans modèle animaux ? Il y a pleins de chercheurs, chercheuses qui essaient de le faire mais c’est pas si simple que ça. Je pense qu’on va y arriver à un moment donné mais je pense qu’il faut aussi chercher à arriver à un statut politique pour les animaux et y aller par étape. On ne peut pas s’arrêter à des détails qui sont presque secondaires.

Le fait de devenir végan a changé vos habitudes de consommation, vous utilisez des produits cosmétiques véganes c’est ça ? Oui, c’est super facile. Encore une fois, c’est peut-être une question de privilège mais je suis une super fan de Sephora. En ligne c’est super facile d’identifier ce qui est végan. Je porte pas beaucoup de cosmétique mais pour moi ça m’aide à faire des choix parce que je connais rien dans les cosmétiques, je comprends pas trop comment ça marche donc je fais un tri sur ce qui est végane et après je me cherche une crème hydratante et un mascara là dedans. Pour moi ça demande pas beaucoup d’efforts, même chose pour mon dentifrice, mes shampoings. J’ai l’impression que ça me simplifie la vie parce que quand je suis devant un rayon et que je ne sais pas trop quoi choisir parmi tous ces produits, j’essaie d’aller chercher celui qui est végan, il y en a deux et mon choix est fait.

Et au niveau textile, vêtements, draps, ça aussi vous faites attention ? Oui. Dans les premières semaines, mois, années, j’ai continué de porter ce que j’avais déjà ou j’ai donné parce qu’à un moment donné je portais des trucs en cuir… Les premières semaines, les premiers mois on s’en rend pas trop compte mais à un moment donné on trouve ça dégueu. Donc j’ai tout donné. Maintenant je fais attention. Je fais aussi attention de plus en plus à moins consommer parce qu’en parallèle l’exploitation des animaux, humains, consommer des jeans H&M produits dans des conditions de merde par des employés qui sont super mal traités et puis l’impact sur l’environnement c’est pas super non plus. Donc j’ai beaucoup moins de plaisir à consommer qu’avant. Avant j’aimais bien aller chez H&M ou n’importe où et acheter de super trucs. Quand le printemps arrive, on a tous envie d’avoir de petites robes fleuries, mais plus ça va puis moins j’ai envie de ça. Ça me fait un peu comme les produits d’origine animale. Ça me dégoûte presque donc j’essaie de consommer le moins de vêtements possible, d’acheter des trucs d’un peu de meilleure qualité. Ça me laisse le choix de faire attention, pas de laine ni de cuir évidemment.

Et vous fréquentez des restaurants végans, c’est un critère obligatoire ? Il n’y en a plus tellement en ce moment, le choix est très limité - rire. J’aime bien encourager les restaurants végans. Et puis j’ai de la chance, à Montréal on en a pleins. C’est super bon et on peut se permettre de pas aller au même restaurant végan toutes les semaines. J’aime bien aussi encourager les restaurants qui proposent des options végans. Il y en a de plus en plus et c’est vraiment chouette. Ça envoie un message positif, il y a de la demande pour le produits végans. Les gens qui sont pas végans se tournent vers des plats végans 1 fois, 2 fois, 5 fois par semaine. Je cherche aussi de temps en temps à encourager les restos omni qui ont des options végans. J’essaie de me faire plaisir une fois par semaine en commandant via Uber Eats ou d’autres applications comme ça, donc le mercredi soir, c’est mon soir de commande de resto et le reste du temps je cuisine. Il y a un resto asiatique qui a une carte avec des faux poulets végans et tout ça donc j’étais super fière pour ma dernière commande d’aller sur ce resto là et de prendre la peine d’écrire « merci d’avoir ces options végans ». Je pense que pour les personnes non véganes, elles peuvent avoir l’impression qu’elles doivent mettre de côté tous leurs restos préférés, ça peut faire peur. Plus les conditions matérielles semblent accessibles et sexy, plus les gens vont être intéressés à essayer le véganisme. Je pense qu’avoir des options vegans dans les restos c’est une super bonne chose. Les encourager c’est bien, mais encourager les restos qui font des efforts pour avoir des options vegans c’est tout aussi important.

Est-ce qu’il y a des marques que vous avez bannis depuis que vous êtes vegan ? Réflexion - Je sais pas, je ne fais pas trop attention aux marques.

Vous parliez d’H&M, vous n’y allez plus ? Non. C’est facile de mettre de côté le fast fashion mais par exemple, je continue de commander sur Amazon et je sais que c’est pas vraiment mieux donc je suis vraiment pas parfaite. La différence entre Elise aujourd’hui et Elise il y a deux ou trois ans, c’est peut-être que je me sens plus coupable quand je commande sur Amazon, mais je continue de le faire quand même. Je fais de plus en plus attention mais je suis vraiment vraiment loin d’être parfaite. On peut aussi penser à nos déchets, au gaspillage. J’étais presque arrivée au stade où je pouvais faire mes courses avec mes pots et tout acheter en vrac et puis maintenant ils les acceptent plus donc je suis un peu découragée mais là je me suis achetée des chiffons en microfibre que je peux laver plutôt que d’utiliser des papiers sopalins. Je me dis qu’il y a un petit progrès mais je suis pas la personne la plus disciplinée au monde non plus.

C’est pas toujours évident de s’adapter à tout ! Non et puis se sont de fausses excuses mais je travaille vraiment beaucoup. J’ai pas beaucoup de temps à consacrer aux tâches ménagères. Évidemment, j’ai toute la charge mentale de tous ces trucs. Je me dis que j’ai pas besoin d’être parfaite. Si je continue de faire des efforts… la règle d’aucun produits d’origine animale c’est facile pour moi. Je l’ai assimilé et ça me va mais les autres questions notamment environnementales… Tout est lié, ne pas prendre l’avion c’est super difficile pour moi. Maintenant c’est facile pour moi, il n’y a plus d’avions - rires- mais j’aime bien partir une semaine l’hiver pour fuir la neige. C’est une tonne de CO2 si je vais dans le sud et qu’une tonne de CO2 c’est ce que j’économise en étant végane par année mais j’ai vraiment du mal à m’en passer. Maintenant que je suis forcée de le faire, je vois bien que je peux adapter mes loisirs. Cette pandémie m’aide à voir que ce que je croyais absolument nécessaire ne l’est pas tant que ça non plus.

Est-ce que vous avez le sentiment de faire partie d’une communauté à travers cette pratique ? Oui, oui, oui. J’ai rencontré pleins d’amis dans le milieu végan au Québec et ailleurs dans la francophonie dans le monde. Il y'a quelque chose qui nous unis je pense. Il y a quelque chose de beau. Il y a comme un espèce de dénominateur commun qui est très très chouette. En même temps, il y a pleins de végans qui me détestent parce que je suis pas assez radicale pour eux. Il y a une espèce de police végan dans le milieu, il y a pleins de gens avec qui je me sens pas très à l’aise. Mais il y a quand même quelque chose de beau dans la communauté végan, dans l’entraide. J’aime bien aussi avoir des amis qui sont pas végans et qui s’intéressent à d’autre choses que le véganisme. Je suis avant tout militante qui convainc les gens et je trouve ça vraiment riche d’avoir des amis qui ne sont pas végans. Je pense par exemple à des amis d’anciens boulots, ce qui nous unissait c’est qu’on a travaillé ensemble et qui sont pas du tout du tout végans. Mes livres ça a pas marché avec eux mais quand même, ce sont des gens qui prennent au sérieux ce que je fais, qui ont de l’admiration. J’aime bien les entendre, être ouverte à ce qui les passionne. J’aime bien manger chez des amis et ne pas demander si il y a du porc ou si le yaourt est végan c’est vraiment super.

Est-ce que vous participez à des événements de la communauté végan ? Je suis pas super à l’aise dans les marches autour des abattoirs par exemple. J’en fais de temps en temps mais c’est vraiment pas le truc que je préfère. Les festivals végans j’en ai fait pleins et j’aime beaucoup, ça permet de voir pleins de petits commerçants. J’ai souvent eu le privilège de parler dans ce genre d’évènements. C’est quand même super.

Les potluck j’en ai fait mais j’en ai marre. Assez rapidement ça devient du travail pour moi parce que les gens me connaissent et savent que je connais super bien ces questions, que j’écris pleins de livres. Ils me posent pleins de questions et c’est super mais j’essaie de séparer ma vie professionnelle de ma vie privée. Les vendredi soir quand j’ai congé, j’ai peut-être envie de regarder Netflix ou d’aller au resto plutôt que d’aller dans des évènements végans parce que j’en ai marre de voir des gens, parler. C’est super important, je pense que ça joue un rôle fondamental. J’ai eu la chance d’avoir pleins d’amis végans autour de moi mais il y'a des gens qui deviennent végans un peu tout seul et c’est vraiment chouette pour eux de pouvoir trouver une communauté. Quand on déménage dans une nouvelle ville, avec les végans on rencontre soudainement pleins d’amis. Il y a quelque chose de chouette là dedans.

Vous considérez le véganisme comme une forme de militantisme ? Oui, oui. Ça a pas besoin d’être militant pour tout le monde mais pour moi c’est quelque chose de militant. J’aspire à ce que le monde devienne végan. Peut-être pas pendant ma vie mais un jour.

Et vous pensez quoi des influenceurs végans sur les réseaux sociaux ? Il y a pleins de façons de militer pour le véganisme. On est touché par des arguments et par des gens différents. Moi c’est un livre d’un philosophe, mais je pense pas que ça va pas toucher la jeune fille de 14 ans qui passe ses journées sur Tik Tok. Je pense que ça prend pleins pleins de gens végans avec pleins de discours différents. Il y a des gens qui parle de véganisme à leur communauté, une politicienne parle aussi de véganisme à sa communauté, une vedette végan aussi, une intellectuelle aussi. Le véganisme est pour tout le monde, il y a pas un véganisme mais des véganismes comme d’autres mouvements sociaux. Tant mieux si des influenceurs végans en parlent à leur communauté. Est-ce qu’ils vont avoir toujours le même discours que je souhaite que les gens aient ? Peut-être pas mais je m’en fou. J’ai pas le dernier mot, le véganisme ne m’appartient pas.

Et justement, est-ce que selon vous on peut associer le véganisme et l’antispécisme ou est-ce que ce sont deux pratiques différentes ? Oui ce sont des trucs très très proches. Il va y avoir pleins de définitions et comment les gens se mettent des étiquettes. On a ça dans tous les mouvements sociaux, dans le mouvement féministe on l’a eu longtemps, il y a eu des scissions dans le mouvement féministe, dans le mouvement antiraciste aussi. Mais on pourrait quand même dire que l’antispécisme est la philosophie et que le véganisme en est l’application concrète. Certaines personnes vont voir des limites à ça, que le véganisme est peut-être un peu consumériste. Et puis ils ont raison. Est-ce qu’on peut être antispéciste sans être végan ? Peut-être. Est-ce qu’on peut être végan sans être antispéciste ? Sans doute. Mais c’est quand mêmes des trucs super proches. Et plus ces mouvements vont progresser et plus on va avancer dans l’égale considération des animaux.

Pourquoi avez-vous décidé de créer le site Penser avant d’ouvrir la bouche ? C’était il y a vraiment longtemps. C’était l’époque où on faisait des blogs.

C’était vraiment au tout début de mes réflexions sur le véganisme et puis de mon militantisme. C’est tout con, je lisais beaucoup, j’apprenais beaucoup et c’était intéressant de pouvoir partager ça avec des gens. C’était la mode à l’époque de faire un blog. Aujourd’hui on va faire des chaines Youtube ou on va développer des profils Instagram ou Tik Tok. C’était vraiment pour partager ce que je lisais, c’était con de perdre tout ce temps à lire alors que personne n’en profitait à part moi. Je sentais quand même qu’il y avait un manque d’information en français sur ces enjeux d’éthique alimentaire donc je voulais partager. Ça m’amuse et ça permet de militer d’une façon assez confortable pour moi. J’ai eu beaucoup de plaisir là dedans. Je continue à écrire même si j’ai plus beaucoup de temps. Beaucoup moins sur le blog. De temps en temps, il y'a une après-midi qui passe et j’écris. Maintenant, je collabore avec la revue La Morse, j’ai fait pleins de textes, j’ai fait des livres. C’est un peu tout dans la même lignée.

Et vous vous considérez comme une ambassadrice du véganisme à travers vos contenus ? Je sais pas si c’est à moi de me considérer comme une ambassadrice ou si c’est les autres. Je sais que j’ai influencé pleins de personnes. On me le dit, ils sont devenus végans grâce à moi. Tant mieux. Le terme ambassadeur me dérange un peu parce que c’est un terme officiel, il ouvre la voie d’une certaine pensée. Si on est ambassadeur de la France au Canada, on représente la France au Canada. Je suis pas certaine que je veux être la voix du mouvement végan et antispéciste. C’est quelque chose de très large, il y a des véganismes, des antispécistes. Si je peux influencer des gens et que ma voix soit entendue tant mieux.

Et est-ce que vous considérez que votre création de contenu, votre présence dans les médias, est-ce que ça consiste un réel acte de militantisme ? Oui, si c’était pas pour faire avancer la cause je le ferais pas. J’ai aucun plaisir à me mettre en valeur. Il y a pleins d’influenceurs qui peuvent avoir du plaisir à faire des lives sur Instagram pour être vu et avoir des likes. Moi, je déteste fondamentalement ça. Donc si je le fais, c’est vraiment parce que je sais que c’est efficace et c’est probablement ce dans quoi je suis la meilleure. Je le fais parce que ça aide et puis parce que j’acquiers de l’expérience. Plus j’acquiers de l’expérience, plus je suis meilleure et plus je suis meilleure, plus je suis efficace. Mais c’est militant. C’est drôle parce que je me suis demandée si le rôle que je joue, sers vraiment à quelque chose. est-ce que je suis à la bonne place ? Et là je réalise que le fait d’être connue, fait que tout peut être plus efficace et plus rapide. C’est un tout petit exemple mais dans les dernières semaines j’ai appelé les grandes marques de produits pour animaux pour qu’ils fassent des dons aux banques alimentaires et c’est fou, ils ont vidé des entrepôts pour donner à des banques alimentaires juste parce que j’ai demandé. Pour moi, ça c’est militant. Ça envoie un message que les animaux ont aussi besoin de soutien dans cette période de pandémie. Et puis le fait que j’ai de l’influence a aidé parce que si c’était une jeune femme de 17 ans que personne ne connaît et qui lance un appel, ça n’aurait pas marché. Je sais que quand je parle dans les médias, et que quand les gens m’écoutent, ça change un peu leur façon de faire et puis tant mieux. J’essaie d’être guidée par de bonnes valeurs, je me remets tout le temps en question. C’est cool si il y a pas que des opportunistes mais aussi de gens comme moi qui essaient d’avoir un monde un petit peu plus juste.

Comment définiriez-vous les gens que vous avez pu influencer ? La tranche d’âge, le sexe ? J’ai l’impression qu’il y a deux gros groupes. Il y'a les gens qui me ressemblent : donc des femmes, 35 ans et plus, jeune professionnelle qui peut-être quelque part s’identifient un petit peu à moi. Et puis c’est sûr que les gens qui vont m’influencer ce sont aussi des gens qui me ressemblent un peu. La militante chinoise qui est dans sa culture chinoise, ça me touche moins qu’une fille qui me ressemble. Et les filles très très jeunes. Et souvent c’est les enfants de mes amis ou les enfants des gens de mon âge. La jeune femme de 15,16,17 ans. Il y en a pleins pleins pleins qui ont dit que j’avais changé leur vie. Donc je dirais les femmes 35-50 ans et les très jeunes femmes.

Donc plutôt des femmes ? Oui. Je pense que les arguments qui vont toucher les hommes sur le véganisme vont être beaucoup sur la santé, le fitness et tout ça. Moi je suis 0 fitness. Et puis je pense que tous les enjeux qui touchent l’alimentation, la masculinité, moi je suis pas très bonne pour dire à un garçon qu’il peut continuer à être un super homme en étant vegan. Je suis pas là dedans donc c’est sûr que je les touche un peu moins. Et au début c’était aussi 90% de femmes qui étaient véganes.

Est-ce que en tant que militante vous vous sentez différente de ceux qui se revendiquent comme simplement vegan ? Réflexion et soupir - Je sais pas. Je pense qu’on est tous et toutes différents. Je vais avoir des points communs avec ma voisine végane qui est pas du tout militante mais je vais aussi avoir de points communs avec une autre militante qui est pas du tout végane. On est tous différents. J’ai jamais trouvé mon double nulle part non plus. On a chacun un rôle à jouer. Je pense que si on est vraiment sincères avec nous-même, notre façon d’être dans le monde est assez propre à nous. Enfin, je sais pas trop.

Avez-vous déjà été sensible à une publicité végan ? Réflexion - Hmm, peut-être que oui inconsciemment mais j’ai un petit peu l’impression que non. Je vais peut-être être sensible, si c’est un nouveau fromage végan, c’est sûr que je vais sauter dessus mais la pub végan… à part des pub pour des conférences ou des trucs comme ça, pas vraiment.

Donc pour vous, elle n’existe pas vraiment la publicité végan ? En tout cas au Québec, il y en a presque pas. Il y a eu des pubs pour qu’on considère les animaux, des campagnes militantes mais elles ne m’ont pas touché parce que je suis déjà convaincue. Mais par exemple des pubs pour des produits végans, je ne me rappelle pas en avoir vu.

Et est-ce que vous considérez le végansime comme une effet de mode ? Non, non. Il y a sans doute un effet de mode comme dans tous les mouvements. Il y eu un effet de mode sur le mouvement féministe. mais je pense qu’il y a quelque chose de fond qui se produit. Il y'a une réelle transformation de la relation des humains avec les autres animaux qui va au-delà de l’effet de mode. Il y a peut-être des produits qui vont apparaître et disparaître. Il y a des façons de parler du végansime qui vont disparaître également. Mais sur le fond, sur la transformation de notre rapport avec les animaux, il y a quelque chose qui n’est pas un effet de mode mais qui est de l’ordre de la transformation sociale.

Et pour revenir aux marques, on remarque un engouement autour du véganisme hyper important. Est-ce que pour vous c’est durable ou éphémère ? Je pense qu’il y'a des Mais il y'a quelque chose de fond qui va rester. Je pense que la façon dont on présente le véganisme comme argument ça peut se transformer. Mais au-delà de ça, il y a quand même quelque chose qui va rester.

Qu’est-ce que vous pensez de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques au mode d’alimentation végan et de leur communication ? Les grandes chaînes se sont toujours adaptées à un environnement qui change. Quand j’allais à l’épicerie avec mes parents quand j’avais 4 ans, les supermarchés ne ressemblent plus du tout à ça aujourd’hui. On s’est adapté à un monde qui change. Il y a plus de prêt à manger. Il y a plus de produits importés que quand j’étais petite. Qu’on s’adapte au véganisme c’est une super bonne chose. Évidemment, il y a une opportunité de marché et c’est pour ça qu’ils le font. Je pense que le nombre de personne qui consomme des produits végan va continuer d’augmenter. Ça va pas diminuer. Il y a peut-être de gens qui en consomme aujourd’hui, qui n’en consommeront plus dans 1 an ou dans 2 ans parce qu’ils ont juste essayé, pour perdre du poids par exemple. Je pense qu’il y a vraiment quelque chose de fond qui se produit. Est-ce qu’on va continuer à avoir ces produits avec écrit végan en gros avec des petites feuilles vertes ? Ou il va simplement y avoir pleins de produits végans dans les supermarchés ? Je ne sais pas trop. Je ne sais pas trop à quoi nos supermarchés vont ressembler dans 10 ans ou même si on va tous commander en ligne. Les produits végans c’est clair qu’ils vont prendre de plus en plus de place dans les supermarchés ça j’en suis certaine.

Souvent on dit que quand on adopte le végansime, on a des carences, de petits problèmes de santé. Est-ce vrai pour vous ? Ou est-ce un mythe ? Les études nous montrent que les carences les plus fréquentes sont celles en fibre chez les omnivores qui ne consomment pas suffisamment de légumes. Les principales maladies en Amérique du Nord, les maladies cardiovasculaires, certains types de cancers sont aussi liés à l’alimentation et ce n’est pas l’alimentation végane. Il n’y a pas assez de végan en Amérique du Nord pour ça. Justement, être végan ça joue un rôle protecteur contre ces maladies. Et même quand on est un végan qui mange très très mal, qui mangerais que des aliments transformés, l’incidence du diabète de type 2, certains types de cancers, maladies cardio- vasculaires est limité. Donc je pense qu’il faut garder ça en tête. Après évidemment, ça dépend du type de véganisme.

Un végan qui mangerait que des chips ne serait sans doute pas en bonne santé mais il y pleins d’omnivores qui mangent très très mal. Il faut faire attention quand on analyse. C’est assez facile de manger végan de façon équilibré et de prendre des suppléments d’avoir un apport en B12, en oméga 3 et en vitamine D. Vous comprenez, quand on habite dans des climats nordiques comme le nôtre… Donc oui il y a un risque mais il est pas énorme. Quand on devient vegan, on se met à réfléchir à ce que l’on mange et du coup on voit un peu ce qui manque, ce qui manque pas. Moi ce que j’ai réalisé c’est que je calcule pas du tout du tout mes nutriments mais quand ça fait longtemps que j’ai pas mangé de légumes verts je le sens, quand je manque de protéines je le sens aussi et puis je prends mes suppléments. J’ai des tests sanguins tous les deux ans et mon bilan sanguin est vraiment excellent. Après c’est pas la même chose pour tout le monde, l’impression que j’ai c’est que les végans ont plus conscience de leur alimentation que l’omnivore de base.

Guillaume Feelgood

Ex-végétarien, Naturopathe, blogueur et youtubeur en santé naturelle (@GuillaumeFeelgood) 27 ans - Bordeaux

Quand êtes-vous devenu végétarien ? Quand avez-vous décidé d’arrêter cette pratique ? Je suis devenu végétarien en avril 2017 et j’ai décidé d’arrêter un peu plus d’un an après, en juillet 2018.

Où habitiez-vous lorsque vous êtes devenu végétarien ? J’habitais à Bordeaux dans les deux cas.

Dans quel contexte avez-vous découvert cette pratique ? En m'intéressant à la nutrition en 2014, j’ai lu beaucoup d’articles, livres et documentaires sur le sujet. J’ai regardé par exemple le documentaire sur Netflix, “The Game Changers” qui traite de la viande, de la protéine et de la force. Le documentaire démontre que vous pouvez très bien être sportif de haut niveau en abandonnant la viande, le lait et les œuf... bref les protéines animales, et être en bonne santé. On entend partout que la protéine animale, y a que ça qui va te permettre de prendre du muscle mais en faite, non, pas forcément. Le film nous pousse à arrêter de croire à tout ce qu’on dit et à aller se faire sa propre expérience et c’est ce que j’ai fais !

Pour vous, qu’est-ce que signifiait être végétarien ? Et aujourd’hui ? Lorsque j'étais végétarien, je le voyais comme un moyen d'optimiser sa santé en rejetant les pratiques d'élevage intensif. Aujourd'hui, pour moi c’est un moyen de rejeter les pratiques d'élevage intensif et de se définir par son alimentation.

Pourquoi avez-vous décidé de devenir végétarien ? Est-ce par choix ? Développez les raisons (personnes, déclic, causes expériences …) J’ai décidé de devenir végétarien pour optimiser ma santé. C'était un choix personnel. A la base, je m’étais fixé un objectif, c’était de faire 30 jours avec un régime alimentaire végétarien, pour voir qu’est ce que ça pouvait m’apporter niveau santé, performance, digestion, sensation dans mon corps, émotions, bien-être...

Du coup, uniquement pour des raisons liées à la santé ? Au départ, oui l’objectif était uniquement santé mais progressivement, j’ai eu une sorte de déclic en visionnant des vidéos sur le sujet de la nutrition, et des vidéos sur les conditions d'élevage intensif. Du coup le fait de devenir vegan c’était aussi un moyen pour moi, de contester les pratiques d'élevage intensif. Le fait de devenir végétarien a-t-il changé vos habitudes de consommation ? Si oui, lesquelles ? Oui. Étant sportif, cela signifiait reconsidérer mes repas notamment sur le plan macro- nutritionnel. Avant, j’avais une alimentation assez riche en viande et poisson, j’ai dû trouver comment compenser l'apport en protéines. J'ai découvert de nouveaux aliments que je n'achetais pas jusqu'alors comme du , seitan, etc..

Je connais pas du tout, c'est quoi le tempeh ? Le tempeh c’est des graines de soja fermenté avec un champignon, donc c'est une sorte de fromage, c’est super bon et c’est des protéines complètes donc très intéressant quand on devient végétarien, je le recommande !

Pourquoi avez-vous renoncé à la pratique ? Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ? Tout d'abord, pour des raisons de santé qui ont été prépondérantes dans mon changement initial. Le végétarisme n'est pas optimal sur le plan nutritionnel, principalement parce que : d'abord il est déficient sur le plan des oméga-3, dans les formes DHA et EPA trouvables uniquement dans les produits animaux et les poissons. Ensuite, il est déficient en rétinol, vitamine A qui n'est présente que sous forme de PRO-vitamine A dans les végétaux,Il est aussi trop riche en anti-nutriments qui ne permettent pas une absorption totale de certains micro- nutriments puis, il est déficient en vitamine B12,etc… Puis j’ai aussi décidé d’arrêter de me présenter en tant que vegan parce que j’avais l’impression de m’imposer une étiquette. Le fait de me dire végétarien me donnait l'impression de me restreindre dans mes possibilités, de ne pas être totalement libre, ce qui allait à l'encontre de mon bien-être. Je déteste me mettre des étiquettes, je me suis rendu compte que si un mode alimentaire me convenait je pouvais le mettre en pratique au quotidien sans pour autant me brider !

Aujourd’hui, à quoi ressemble votre consommation ? Consommez-vous des produits d’origine animale ? Aujourd'hui, j'ai décidé de réintégrer des produits animaux de qualité, pas d'élevage intensif, dans mon alimentation. Les produits animaux que je consomme sont essentiellement des oeufs, des produits laitiers et des poissons. Occasionnellement, je mange de la viande blanche et rouge, issues de filières locales et dont je peux identifier l'origine. Je fais très attention à cela, par exemple pour les oeufs t’as un petit numéro qui est sur l’oeuf qui te permet de savoir si les poules ont été élevées en plein air, si les oeufs sont bios ou si les poules ont été élevées en cage et donc là il faut surtout pas y toucher. Oui donc en gros, c’est pas parce que j’ai arrêté d'être végétarien que je vais commencer a manger de la viande à tous les repas.

Avez-vous ressenti la sensation de manque envers un aliment lorsque vous étiez végétarien ? Oui, il m'est déjà arrivé d'avoir envie de poisson mais le reste, non j’ai pas trop senti le manque. Aviez-vous le sentiment de faire partie d'une communauté à travers cette pratique ? Quand on décide de se poser une étiquette, il est difficile de ne pas s'y identifier. Et encore plus, quand on représente une minorité, je pense que le sentiment de communauté est renforcé. Donc oui, j’avais l'impression de faire partie d'une communauté, sans pour autant le partager directement avec qui que ce soit. C'est un sentiment communautaire, pas une réalité observable..

Faisiez-vous partie d'une association ou toute autre organisation, liée au végétarisme ? Non.

Considérez-vous que le fait d'être végétarien constitue une forme de militantisme ? Oui, cesser la consommation d'un aliment est forcément un acte militant. On milite pour sa santé, en affichant qu'il nous semble que les aliments qu'on exclut sont mauvais pour nous ; mais aussi pour l'environnement, en affichant que les aliments qu'on exclut sont mauvais pour la planète selon nous ; et bien sûr on milite pour les animaux et leur bien-être, en affichant que le traitement qu'ils subissent n'est pas en accord avec nos valeurs...

Selon vous, quelle est la différence entre végane, flexitarien, végétarien ? La différence se joue au contenu de l'assiette et sur le niveau d'engagement pour la cause environnementale, la cause animal ou sa santé.

Existe-t-il selon vous des publicités vegan/végétarienne ? Avez-vous déjà été sensible à une publicité de ce type ? Oui, le documentaire "The Game Changers" dont je t’ai parlé tout à l’heure et beaucoup d'autres documentaires de ce type ont bien évidemment guidé mon choix initial.

Considérez-vous que le véganisme/végétarisme est un effet de mode ? L’engouement des marques autour de ces nouvelles habitudes alimentaires est-il durable selon vous ? Il y a une part non-négligeable d'effet de mode dans le véganisme/végétarisme aujourd'hui. Une étiquette fait partie intégrante de la "carte d'identité sociale" que nous présentons partout avec nous. Mais pour moi ce n’est pas uniquement un effet de mode, c'est aussi révélateur d'un besoin profond de changement de nos modes de consommation. Concernant l'engouement des marques, il est durable tant qu'il y a de l'argent à faire dans le milieu. Il sera donc aussi durable que le courant véganisme/végétarisme est important.

Que pensez-vous de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques aux modes d'alimentation vegan/végétarien ? Et de leur communication ? Ils s'adaptent tout simplement à la demande. La demande croît, alors les rayons aussi et la communication qui va avec. Je ne vois pas forcément ça comme une bonne chose puisque c'est essentiellement des aliments transformés qui sont mis en avant et produits. Ces aliments ne sont pas meilleurs que les produits animaux de mauvaise qualité. En revanche, je suis heureux de voir des supermarchés qui mettent en avant des petits producteurs, des filières locales, etc. Ça c’est super ! Ce type d’offre et de communication est beaucoup plus vertueuse, que ce soit pour la santé des consommateurs que pour la planète.

Alen Tariq

Ex-vegan, Créateur de contenus et influenceur (Youtube, Instagram) 27 ans - Bordeaux

Quand êtes-vous devenu végane ? Quand avez-vous décidé d’arrêter cette pratique ? Je suis devenu vegan il y a 3-4 ans en 2017 et ça a duré un an, j’ai arrêté en 2018.

Où habitiez-vous lorsque vous êtes devenu végane ? Lorsque vous avez arrêté? Bruxelles, j’ai pas bougé. Je voyageais beaucoup mais c’est pas ce qui changeait mon habitude alimentaire.

Dans quel contexte avez-vous découvert cette pratique ? C’était simplement à l’école. On a vu des reportages. Notre professeur était végétarienne, mais elle nous a un peu inculqué un peu les notions de véganisme, de vegétarisme etc… à travers un documentaire qui m’a vraiment bouleversé et qui avait bouleversé beaucoup de personnes dans ma classe et on a tous décidé, enfin 2/3 a décidé de suivre une alimentation végétarienne et on était 2 à suivre une alimentation végane. Et donc du coup on s’est renseigné, on a regardé des vidéos sur Youtube, on a vraiment été autodidactes par rapport à ça et c’est comme ça qu’on s’est tous lancé dans le secteur du végétarisme et véganisme.

Tu faisais quelles études ? C’était un bachelor en tourisme et c’était dans un cours de communication.

Qu’est-ce qu’être végane signifiait pour vous ? et aujourd’hui ? Ça veut dire avoir un autre mode de vie, une autre alimentation pour pouvoir respecter plus la nature, toutes les personnes qui nous entourent, prendre conscience de plein de choses, se dire qu’un animal, une plante sont des êtres vivants qu’il faut respecter. C’est toutes ces choses la…

Ta perception du véganisme a-t-elle évolué depuis que tu as arrêté cette pratique ? Ma perception du véganisme, oui, elle a évolué, parce que j’ai compris qu’on pouvait être végan mais aussi fléxi-végan parce qu’on a très souvent tendance à se mettre dans des catégories, à se dire on est végan et on peut pas avoir de déviance, il faut tout respecter. On se catégorise trop. C’est comme un régime, on se restreint énormément. Or qu’on peut très bien être fléxi-végan et c’est ce qui permet d’avoir une source avec soi-même. Pourquoi avez-vous décidé de devenir végane ? Est-ce par choix ? Développez les raisons (personnes, déclic, causes expériences …) C’est à cause d’un documentaire qui est passé sur Arte, ma prof avait fait une diffusion en classe. De là, j’ai commencé à enchaîner les tutos, les vidéos sur Youtube qui parlaient justement du véganisme et de la torture animale et tout ce que cela infligeait à notre entourage.

Votre professeur a joué un rôle clé dans ta conversion au véganisme ? C’est vraiment le reportage qui m’a poussé à devenir végane, mais ma prof a vraiment été une porte ouverte au monde du véganisme.

Le fait de devenir végane a-t’il impacté vos habitudes de consommation ? Si oui, lesquelles (alimentation, cosmétique, habillement…) ? Au niveau de la cosmétique, par ma profession, vous le savez je suis dans le secteur de la beauté sur Youtube, du coup je reçois énormément de produits donc je choisis pas forcément tout ce que je consomme mais au niveau de l’alimentation je fais beaucoup plus attention, je suis beaucoup plus écoresponsables, j’essaye de respecter, j’essaye de voir si il y a un label. Je ne consomme plus de cuir non plus, ça a eu un gros impact même par rapport à mon mode de réflexion et je peux dire actuellement que ça a changé ma vie, un simple reportage a changé ma vie, ma perception des choses.

Pourquoi avez-vous renoncé à la pratique ? Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ? Simplement, j’étais en couple et cette personne voulait absolument lors d’un repas parce qu’il n’était pas végan, me forcer à manger de la viande, pour pouvoir faire bonne figure auprès des invités. Du coup ce qu'il s’est passé, c’est qu’il m’a imposé au restaurant de manger de la viande en me disant « soit tu manges de la viande soit tu rentres à pied » à savoir que j’étais à l’autre bout de la Belgique et j’étais vraiment confronté face à un gros dilemme de pression jusqu’à me dire « ok si maintenant je ne mange pas de viande, je suis obligé de rentrer à pied, je ne saurais pas où dormir, pour un simple bout de viande ».C’était clairement un chantage pour de la nourriture. Je me suis forcé et puis après le lendemain et les jours qui ont suivi, la pression à continuer. Il me disait « ouais écoutes t’as mangé un bout de viande, tu peux en manger encore un autre, c’est pas ça qui va changer ta journée. » Malgré tout ça, j’essayais tout de même de rester dans mes convictions mais après la pression a encore continué et du coup je me suis laissé influencé, j’ai commencé à manger un autre bout de viande et ainsi de suite et c’est comme ça que j’ai commencé à dévier de mon alimentation végane tout doucement. C’est vraiment le jugement de mes proches qui m’a fait dévier et j’ai pas eu la force de dire non à l’époque, malheureusement. Maintenant que c’est fini, avec cette personne-là, j’essaye de reprendre progressivement mes habitudes alimentaires. Mais c’est vrai que l’entourage ça a été un gros facteur qui a fait en sorte que je n’ai pas eu la force de continuer parce que j’ai eu une grosse pression ! Oui, le fait d’être devenu végane a complètement impacté vos relations familiales, amicales, professionnelles.. et c’est ça qui a fait que vous n'avez pas pu continuer. Oui c’est exactement ça, ça a complètement ruiné ma vie sociale. Je prône le véganisme, mais j’ai envie de dire que, ça a complètement gâché mes relations sociales, familiales parce que moi je fais partie d’une grande famille, ce sont des gros mangeurs de viande, de poisson et tout mon cercle social se base que sur ça. A tous les repas j’avais le droit à une réflexion ou bien on me disait « Bah écoutes manges l’apéritif qui est à base de tzatziki, je te fais que des pâtes sans sauce… ». J’étais vraiment dévalorisé, on essayait de me mettre mal à l’aise à chaque repas. J’étais vraiment mis de côté. Et puis même au niveau social, je subissais beaucoup de critiques, d’insultes c’était vraiment dure…

Mais qu’est-ce qui les dérangeaient ? En fait, pour mon couple quand j’ai rencontré mon conjoint, je mangeais de la viande et donc du coup j’ai changé mon mode d’alimentation pendant ma relation de couple. La personne n’a pas supporté le changement parce que ça a été radical. Du jour au lendemain je ne mangeais plus de la viande, ce qui est un gros soucis parce que dans la grande majorité des repas c’est toujours un petit morceau de viande qui doit accompagner de la patate, du riz, de la crudité… et du coup pour tout mon entourage, qui mange beaucoup de viande c’était choquant.

Mais dans votre cas, vous ne cherchiez pas à changer leur mode d’alimentation en leur disant « ne mangez plus de viande, n'achetez plus de cuir… » ? Non du tout, je voulais pas imposer aux autres mon mode d’alimentation. Non c’était pas mon cas, j’avais mes convictions mais je voulais pas imposer aux autres mes propres convictions. Et je déteste qu’on m’impose des choix donc je voulais pas faire ce que je voulais pas qu’on me fasse.

Selon vous, devenir vegan sans soutien est-ce possible ? Je trouve que c’est hyper-important d’avoir un soutien, surtout quand on habite dans une ville comme Bruxelles, une ville cosmopolite où on est confrontés à énormément de monde. Puis moi, j’ai beaucoup beaucoup de connaissances et la majorité de mes contacts mangent presque que de la viande et ont une consommation vraiment pas écoresponsables. Et à partir du moment où on fait partie de ce cercle, c’est vraiment dure d’être un peu la personne qui sort du lot. Puis moi je travaille dans un milieu, le milieu de l’influence où les relations sociales sont très importantes, je côtoie beaucoup de monde… donc forcément ça attire aussi les critiques donc je pense que ça demande énormément de soutien, vraiment.Moi j’avais pas de contact, je connaissait personne qui était vegan ou végétarien, donc c’était difficile et puis quand on a pas de soutien… On devient vite la bête noire du groupe... Donc pour moi le véganisme c’est un peu comme une sorte de grand régime à vie pas qu’alimentaire du coup mais aussi social. Avez-vous ressenti la sensation de manque envers un aliment lorsque vous étiez végan? Non pas du tout, pas du tout, je n’avais aucun manque ! Je me disais peut-être que je vais ressentir un manque d’œufs, de produits laitiers, un manque de protéines… Je faisais souvent des bilans sanguins et je n’avais absolument aucun problème. Et au niveau de la faim, y avait rien qui changeait ! Ma vie continuait tranquillement et même au contraire, ça a été une ouverture d’esprit et ça ouvert à un grand champ culinaire, j’ai appris à cuisiner et à consommer autrement.

Aujourd’hui, à quoi ressemble votre consommation ? Consommez-vous des produits d’origine animale ? Aujourd’hui je suis devenu fléxi-végétarien, ça veut dire qu’en société je mange ce qu’on me propose. Si maintenant, on me propose de la viande, donc bon voilà je vais la manger, je vais pas faire mon difficile (rires) parce que voilà je sais que sinon je vais encore me faire ramasser. J’ai déjà assez subi, je suis fatigué ! Mais quand c’est de moi-même, de mon propre gré, quand je vais inviter des personnes, je vais toujours proposer des repas qui sont sans viande, qui vont vraiment essayer de respecter au maximum la nature. Du coup ça va pas m’interdire d’avoir une vie sociale, de faire à manger et même de préparer des produits d’origine animale pour mes invités. J’essaye de faire attention à la provenance des produits mais comme je vis à Bruxelles, c’est pas toujours évident d’avoir des produits qui viennent de la ferme.

A Bruxelles le marché végan est bien développé ? Non je trouve que c’est pas très développé ou pas assez. Moi, qui suis parti à Berlin pour découvrir un autre mode de vie.. c’est super développé, le système de consommation végétarien et vegan sont méga-développés ! Et je trouve qu’à Bruxelles, on est hyper en arrière dans le véganisme et que ça va pas assez vite. Par exemple, à Berlin il y avait vraiment des snacks végétariens et vegans, tu peux tout retrouver en vegan. Tu vas dans un centre commercial, la grande majorité des commerces sont végétariens, au Lidl pareil, la grande majorité des rayons sont végétariens. C’est impressionnant !

Lorsque vous étiez végan, aviez-vous le sentiment de faire partie d'une communauté ? Ah non du tout j’étais vraiment seul face à tout le monde c’est pour cela que j’ai arrêté. Par rapport à la vidéo youtube que j’ai fais la dernière fois j’ai reçu du soutien etc, mais j’ai eu plus de mauvais avis… Et c’est pas mon genre d'aller trouver un groupe sur facebook ou instagram, je suis plus du genre à me lancer et voir les personnes qui sont derrière moi plutôt que l’inverse.

Et du coup faisiez-vous partie d'une association ou toute autre organisation, liée au véganisme ? Non non mais liée à l’écologie oui, je collabore avec Greenpeace par exemple fin je verse des dons et j’ai des partenariats avec eux pour pouvoir promouvoir à travers certaines vidéos… Mais bon c’est autre choses c’est pas forcément lié au véganisme. Et considérez-vous que le fait d'être végan constitue une forme de militantisme ? Pourquoi ? Ah oui tout à fait, totalement. Parce qu’on protège la nature, on protège… On dit non à un mode de consommation qui a été dicté depuis des années euh parce que maintenant on a plus besoin de tuer de torturer des animaux pour pouvoir vivre et je trouve ça hyper important de changer les mentalités. Ce sont de gros progrès et pour moi il ne faut pas lâcher c’est clairement une sorte de militantisme.

Selon vous, quelle est la différence entre végane, fléxitarien, végétarien ? Alors vegan c’est énormément de choses c’est beaucoup de privation. Flexitarien c’est pouvoir être, comme le nom l’indique, flexible au niveau de son alimentation donc on peut s’accorder des petites pauses dans le régime alimentaire comme moi par exemple quand je vais consommer de la viande lorsque je suis en société. Et végétarien c’est ma définition mais pour moi c’est arrêter la viande, le poisson mais continuer les oeufs et autres produits animaliers.

Existe-t-il selon vous des publicités véganes ? Avez-vous déjà été sensible à une publicité de ce type ? Oh oui oui oui récemment avec Gaia parce que il y avait une fête sur le sacrifice, c’est une chose qui sensibilise et qui nous met sur une piste de réflexion. Et sans ce genre de choses on ne se pose pas la question car on y est pas directement confronté. C’est une petite goutte d’eau qui vient s'imprégner dans notre conscience et on arrive à réfléchir, alors qu’à la base on en a pas pris conscience.

Considérez-vous que le véganisme est un effet de mode ? Oui et non. Oui parce que avec la mode des hipster qui est entrain de se balader ces temps ci je me dis que c’est à la mode. Mais je me dis non aussi car c’est le temps qui prend conscience des reel enjeux climatiques… Donc voila je suis tranché entre le oui et le nom car je me dis que quand même avec le temps ce sont des choses dont on prend conscience depuis 90.

Et pour vous l’engouement des marques autour de ces nouvelles habitudes alimentaires est-il durable selon vous ? Non ça je pense que c’est durable parce que même dans le milieu des cosmétiques dans lequel je travaille il y a de plus en plus de personnes sensible aux produits non testés sur les animaux et je pense que c’est une choses faite pour durer. Et d'ailleurs il y a des lois créent par rapport à ça et c’est positif quoi.

Que pensez-vous de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques aux modes d'alimentation végane ? Je trouve ça génial parce que l’industrie et la grande consommation s’adapte à l’envie des consommateurs et ça je trouve que c’est un grand pas pour l’humanité et je trouve ça excellent. Parce que pouvoir trouver des produits accessibles, rapidement et facilement je trouve ça super pour l’humanité et le mode animalier. Étienne Pastor

Ex-vegan, Étudiant en Master de Science Politqiue 23 ans - Paris

Quand êtes-vous devenu végane ? Quand avez-vous décidé d’arrêter cette pratique ? Je suis devenu végane en juillet 2015 et j’ai arrêté en janvier 2016.

Où habitiez-vous lorsque vous êtes devenu végane ? Lorsque vous avez arrêté? J’habitais à Paris, dans un appartement en colocation pour les deux.

Dans quel contexte avez-vous découvert cette pratique ? Je sais plus vraiment où j’ai découvert cette pratique, à l’époque j’avais pas de vegans dans mon entourage, à la limite quelques végétariens donc c’est pas vraiment ça... J’avais lu quelques articles en ligne, aussi parce que je suivais Adrien Menielle sur Twitter, et qu’il parlait du véganisme et de sa pratique. Ça m’a fait réfléchir sur la question éthique derrière la démarche. J’ai commencé à envisager le véganisme autrement. Oui parce qu’avant ça, je pense que je voyais ça comme quelque chose de réservé aux « extrémistes » (rires).

Qu’est-ce qu’être végane signifiait pour vous ? et aujourd’hui ? Être végan, ça signifiait pour moi, vivre en réduisant au maximum son impact négatif sur la planète et c’est toujours le cas.

Pourquoi avez-vous décidé de devenir végane ? Est-ce par choix ? Développez les raisons (personnes, déclic, causes expériences …) Au départ c’était une “expérience” que je m'étais lancé, je voulais tester ce nouveau mode de consommation pendant 6 mois. J’avais un peu de mal à me lancer au début mais le déclic a été rapide quand je suis tombé sur une vidéo du journal le Monde (https://www.youtube.com/watch?v=nVydgG2DFU0) sur l’impact écologique de la consommation de viande. Et pour moi, ces deux principes, éthique avec la notion de souffrance animale, et écologique avec la production de viande, étaient les piliers de mon envie d’arrêter les produits d’origine animale. Ils ont été la base de ma prise de décision.

Le fait de devenir végane a-t’il impacté vos habitudes de consommation ? Si oui, lesquelles (alimentation, cosmétique, habillement…) ? Quand j’ai commencé, j’ai vite dû changer mon alimentation qui à la base était riche en protéines animales. Je le voyais un peu comme une frustration alimentaire… mais pour la bonne cause quand même… Pourquoi avez-vous renoncé à la pratique ? Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ? J’avais énoncé dès le départ que j’essayais pendant 6 mois et que je voyais ensuite si je continuais ou non. Une fois cette période écoulée, j’ai décidé d’arrêter.

Avez-vous ressenti la sensation de manque envers un aliment lorsque vous étiez végan? Oui, le poulet et le fromage me manquaient c’est vrai, mais au départ je trouvais ça enthousiasmant et j’écumais les sites de recettes pour apprendre de nouveaux plats donc je trouvais ça cool en même temps.

Le fait d’être devenu végan a-t’il impacté vos relations (familiales, amicales, professionnelles) ? Oui, bah je trouvais que socialement c’était parfois un peu pesant : c’est une pratique encore marginale, donc pour chaque dîner qu’on fait chez quelqu’un, il faut prévenir les hôtes, demander si on peut avoir quelque chose à part, puis forcément le sujet reviendra sur le tapis pendant le repas, à base de « Ah, tu es végane ? Pourquoi ? » avec bien entendu des blagues, toutes très drôles et originales, t’s vite l’impression d’être l’animation du repas. Puis on se retrouve à une raclette ou un barbecue à devoir « défendre la cause » ça devient lourd. Bref, pour une pratique personnelle à la base, ça demandait beaucoup d’implication auprès des autres, et ça me plaisait moins. Puis, le côté enthousiasmant du début c’est estompé, parce que vivre en étant végane demande du temps : il faut aller dans des magasins spécialisés (biocop ou asiatiques) pour trouver certains produits et il n’y avait à l’époque quasiment aucun plat tout prêt en vente dans les supermarchés. Du côté des bars/restaurants, s’ils avaient régulièrement des offres végétariennes, il y avaient en revanche très peu de plats véganes. Bref, pour tenir un régime équilibré et avoir tous les nutriment nécessaires, il fallait passer du temps derrière les fourneaux tous les soirs, parce que je ne pouvais quasiment pas manger dehors. Je tournais sur 2-3 plats différents les midis (les rares plats véganes des restaurants près de mon travail), et le soir, je me suis vite retrouvé à manger une assiette de frite, du pain avec du houmous, des petites choses pour accompagner un verre mais pas des vrais plats donc au bout d’un moment c’était plus possible, j’ai dû dire stop !

Avez-vous eu des carences alimentaires ? Oui, j’ai commencé à faire des carences après 4-5 mois, donc j’ai décidé d’arrêter après ma limite des 6 mois. Mais je pense que c’est parce que je me nourrissais pas correctement par manque de temps, d’argent… Puis tous les vegans ne font pas de carences… Je reste convaincu que c’est une bonne pratique et qu’elle a un impact positif, mais elle ne correspondait pas à ma situation de jeune actif citadin, car l’offre n’était pas assez développée : acheter un simple sandwich avant de prendre un train, ça devenait un casse-tête. Je suis persuadé que j’y reviendrai un jour, peut-être plutôt en tant que végétarien, parce que ça me paraît plus simple à suivre.

Aujourd’hui, à quoi ressemble votre consommation ? Consommez-vous des produits d’origine animale ? Ce qui a changé depuis que j’ai arrêté, c’est que je mange beaucoup moins de viande et de poisson qu’avant, même si pour compenser je consomme plus d’œufs et de produits laitiers. Je regarde bien plus ce que j’achète en supermarché, et j’évite les produits trop transformés (nuggets, etc). Au final je pense que le véganisme a été surtout une découverte de nouveaux produits et de nouvelles façons de cuisiner. Et c’est un peu resté, il m’arrive encore de cuisiner 100% végétal.

Aviez-vous le sentiment de faire partie d'une communauté à travers cette pratique ? Non… Je n’ai pas du tout eu l’impression de faire partie d’une communauté, j’avais plus l’impression d’être un marginal dans ma famille/mon groupe d’amis. Sauf peut-être une communauté Internet si on peut dire, parce que je suivais de nombreux blogs et sites de recettes véganes.

Faisiez-vous partie d'une association ou toute autre organisation, liée au véganisme ? Non je ne communiquais pas avec d’autres véganes (ou en tous cas pas pour parler du fait d’être végane), et je n’étais non plus impliqué dans une association. Je ne participais à aucun événement

Considérez-vous que le fait d'être végane constitue une forme de militantisme ? Pourquoi ? Ne plus manger de produits animaux était pour moi un acte clairement militant, mais d’un militantisme personnel.

Selon vous, quelle est la différence entre végane, fléxitarien, végétarien ? Pour moi, cela donne : Végan : qui ne consomme pas de produits issus de l’exploitation animale au niveau alimentaire mais ça inclut aussi les vêtements en cuir... Végétarien: qui ne consomme pas d’animaux (viande, poissons, crustacés) Flexitarien: qui ne met pas les produits animaliers au centre de sa consommation, même si ça n’est pas interdit

Existe-t-il selon vous des publicités végane ? Avez-vous déjà été sensible à une publicité de ce type ? En près de 5 ans, j’ai vu de plus en plus de communication des marques sur le fait d’avoir une recette végétarienne ou végane, notamment sur les plats à emporter dans les supermarchés. J’avoue que c’est un argument auquel je suis sensible, et ça ne conditionne pas forcément l’achat, mais c’est toujours un plus pour moi, un peu comme le bio.

Considérez-vous que le véganisme est un effet de mode ? L’engouement des marques autour de ces nouvelles habitudes alimentaires est-il durable selon vous ?Je pense que c’est une prise de conscience profonde dans la société, mais qu’elle est encore assez lente. Ce n’est donc pas un effet de mode, mais les marques surfent bien entendu sur cette nouvelle demande pour élargir leur marché. Quant à savoir si ça sera durable, je pense que oui, un peu comme le rayon bio qui s’est fait une vraie place dans nos points de vente. Mais le chemin est encore très long pour en arriver là, et selon moi les grandes surfaces ne font pas vraiment d’effort pour accélérer la visibilité de la pratique végane dans les rayons.

Que pensez-vous de l’adaptation progressive des grands supermarchés et des marques aux modes d'alimentation végane ? Et de leur communication ? Les rares publicités que j’entends des hypermarché, ce sont celles qui passent à la radio quand je fais de la route en été : 90% du temps, ce sont des annonces pour une promo sur des saucisses/merguez/etc. vegan pour le barbecue. Mais je pense que la glorification viriliste de la consommation de viande a encore de beaux jours devant elle. CULTURES DE CONSOMMATION MASTER 1 MC2 Mme Dabadie et Mr Welté 2019 - 2020 merci ! s n i t r a M

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