UNIVERSITE PARIS I PANTHEON SORBONNE MINISTERE DE L'AGRICULTURE, DESS Développement, Coopération internationale DE L'ELEVAGE ET DE LA PECHE et Action Humanitaire Département de Sciences Politique

REPOBLIKAN’I MADAGASIKARA Tanindrazana - Fahafahana - Fandrosoana ------Projet de mise en valeur et de protection des Bassins versants du Lac Alaotra ------

CONTRIBUTION A L'ETUDE DE FAISABILITE POUR LA MISE EN PLACE DE DEUX GUICHETS FONCIERS INTERCOMMUNAUX

Communes : suburbaine, , Feramanga Nord, , ,

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STAGE DE FIN DE FORMATION Rahel HERMANN Promotion 2003-2004

Avec l'appui de : CELLULE DE MAITRISE D’œuvre DELEGUEE CIRAD Ambatondrazaka

Juillet - Octobre 2004

Financements : AFD CMG 1158 – Etat malgache - Bénéficiaires

AGENCE FRANÇAISE DE DEVELOPPEMENT

Projet BV Lac Alaotra Université Paris I Panthéon Sorbonne CIRAD, AFD, MAEP DESS Développement, Coopération internationale et Action Humanitaire Département de Sciences Politiques Promotion 2003-2004

Contribution à l’étude de faisabilité Pour la mise en place de deux guichets fonciers intercommunaux

Communes : Ambatondrazaka suburbaine, Ampitatsimo, Feramanga Nord Amparafaravola, Sahamamy, Ambohimandroso

Auteur : Rahel Hermann Etude de juillet à octobre 2004

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Avertissement

Ce rapport a été réalisé suite à une étude menée avec l’appui de Andriherisoa Rarivoharison, étudiant au Département de Sociologie de l’Université d’Ankatso. Ce rapport ne reflète pas essentiellement les idées du projet BV Lac, il n’engage que son auteur.

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Remerciements

Je tiens d’abord à remercier toute l’équipe du projet BV Lac, et notamment M. Grandjean, pour son accueil et son immense professionnalisme. Toute ma reconnaissance à MM Rochegude et Teyssier pour l’accompagnement, le conseil et le suivi qu’ils m’ont apportés. Je remercie toutes les personnes qui ont participé à la réalisation de cette étude, d’une façon ou d’une autre. Enfin, un immense merci à mon collègue, Andriherisoa Rarivoharison, qui m’a apporté sa compétence et m’a soutenu tout au long de ce travail.

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Table des matières

Table des matières ______5 Introduction ______7 Première partie : La décentralisation à ______11 I- Historique du processus de décentralisation ______11 1- La IIème République : décentralisation et centralisme démocratique ______11 2- L’aménagement de la transition : la mise en place des « délégations spéciales »______14 3- Les institutions de la IIIème République ______14 4- La mise en place de ces institutions ______15 II- La situation actuelle et les innovations institutionnelles ______16 A- La situation actuelle______16 1- Etat des lieux ______16 2- Questions liées au fonctionnement des « délégations spéciales »______18 B- Les innovations institutionnelles______18 1- La région ______18 2- Questions liées à la mise en place des régions______19 3- Le fokontany, collectivité de base______20 4- La répartition de l’autorité exercée sur le fokontany ______20 5- Le nouveau statut du fokontany______21 Deuxième partie : Situation administrative et moyens des communes dans la région du Lac ______23 I- La situation administrative au Lac Alaotra ______23 1. La région ______23 2. Les fivondronampokontany et les sous-préfectures ______23 3. Les communes______24 4. Les fokontany ______25 II- Les moyens techniques et humains des communes et fokontany dans la zone du projet 26 A- Etat des lieux comparatif des six communes______26 B- La situation à Ambatondrazaka suburbaine, Ampitatsimo et Feramanga Nord ______26 1. Les locaux ______27 2. Le manque de moyens matériels ______27 3. Les conséquences sur les fonctions des employés communaux ______28 4. Les conséquences sur le rôle du Chef Fokontany ______28 C- La situation à Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso______30 1- Le statut d’Amparafaravola ______30 2- Les locaux ______31 3- Les employés ______31 4- Les communes d’Ambohimandroso et Sahamamy ______32 III- L’exercice des compétences des communes et des fokontany en matière domaniale et foncière______33 A- La gestion domaniale et foncière des acteurs locaux ______34 1- Les compétences légales des acteurs locaux ______34 2- Les associations ______35 3- Le fokontany ______35 4- La commune ______36 B- Le règlement des litiges fonciers______37 1- Types de litiges et acteurs impliqués dans leur règlement ______37

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2- Les modes de règlement des litiges______38 3- Les associations ______38 4- Le fokontany ______38 5- La commune ______39 6- Le Tribunal de Première Instance ______39 Troisième partie : Le fonctionnement communal dans la zone du projet ______41 I- Le fonctionnement financier des communes ______41 A- La gestion budgétaire communale______41 1. Le cadre légal ______41 2. Le vote du budget communal ______43 3. Les dépenses d’investissement et de fonctionnement ______43 4. Les subventions et dotations de l’Etat ______44 B- La gestion de la fiscalité communale : les impôts directs ______45 1. L’Impôt Foncier sur les Terrains (IFT) : émission du rôle et recouvrement ______45 2. La situation actuelle ______47 3. Le cas des communes d’Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso ______47 4. Recensement fiscal et comportements des usagers du foncier ______48 C- Les ristournes communales ______49 1. Personnes soumises au paiement de la ristourne ______49 2. La perception communale des ristournes ______50 3. Perception effectuée par le fivondronampokontany ______51 4. Les autres taxes communales ______52 II- La mise en oeuvre du développement économique et social communal______54 1. Les compétences légales des communes ______54 2. Les Plans Communaux de Développement (PCD) ______54 3. Les aspects financiers des PCD ______55 4. Une prise en charge inégale du développement économique et social ______56 5. Les modes de financement du développement local______56 III- Le fonctionnement démocratique des communes ______59 1. Le dispositif légal ______59 2. La perception de leur rôle par les élus communaux ______59 3. Diffusion des informations et relations personnelles ______60 4. Le degré de confiance de la population ______61 Conclusion ______64 Annexes______67 Annexe 1 : Cartes de la région étudiée ______68 Annexe 2 : Liste des textes de loi régissant les communes ______69 Annexe 3 : La situation administrative au Lac Alaotra ______70 Annexe 4 : Liste des communes et des arrondissements administratifs par sous-préfecture ______71 Annexe 5 : Certificat de décès sur feuille volante, commune suburbaine d’Ambatondrazaka ______75 Annexe 6 : Exemples de documents conservés par les fokontany ______76 Annexe 7 : Affichage d’un avis de reconnaissance domaniale, commune d’Ampitatsimo ______78 Annexe 8 : Budget de la commune d’Amparafaravola, compte administratif 2003______79 Annexe 9 : Parts des dépenses d’investissement et de fonctionnement sur les dépenses totales pour Amparafaravola, Ampitatsimo et Ambatondrazaka suburbaine ______81 Annexe 10 : Part des subventions et dotations de l’Etat par rapport aux fonds propres sur le montant total des recettes pour Amparafaravola, Ampitatsimo et Ambatondrazaka suburbaine ______82 Annexe 11 : Part de l’IFT, des ristournes et des autres droits et taxes dans les ressources propres d’Amparafaravola, Ampitatsimo et Ambatondrazaka suburbaine ______83 Annexe 12 : Arrêté provincial fixant les taux des ristournes par produit, barrière de ristourne de la commune de Feramanga Nord ______85 Annexe 13 : Barrière de ristourne du fivondronampokontany d’Amparafaravola, fokontany d’Ambodrirano ______86

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Introduction

Ce rapport a été réalisé dans le cadre d’un stage de fin d’études. Une convention a été passée entre le DESS Développement, Coopération internationale et Action Humanitaire (DCAH) du Département de Sciences Politiques de l’Université Paris I, Panthéon Sorbonne et le Projet mise en valeur et protection des Bassins Versants du Lac Alaotra (BV Lac Alaotra) dont la maîtrise d’œuvre est déléguée au Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), initié par le Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche (MAEP) sur un financement de l’Agence Française de Développement (AFD) et du MAEP.

Il s’agit d’une contribution à l’étude de faisabilité de la mise en place d’un guichet foncier communal ou intercommunal. Cette étude relève du volet sécurisation foncière et gestion de l’espace du projet BV Lac Alaotra. Ce projet et la mise en place de guichets fonciers communaux et intercommunaux, elle-même, sont des aspects du Programme National Foncier, lancé par le Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche.

Le projet de guichet foncier a pour but de décentraliser une partie de la gestion domaniale et foncière au niveau des communes tout en s’appuyant sur le cadre juridique et légal existant. Ce projet est né du constat d’une crise domaniale, caractérisée notamment par une crise de l’immatriculation foncière individuelle et collective. En effet, dans la région du Lac Alaotra, par exemple, seuls 1% des terres environ sont immatriculées et la plupart de ces titres sont obsolètes car ils n’ont pas été mis à jour par leurs détenteurs. Par ailleurs, les Services Fonciers ont de plus en plus de difficultés à remplir leurs fonctions. D’une part, ils manquent cruellement de moyens et de personnels, d’autre part, la demande de titres individuels de propriété ne concerne pas toute la population. Pour illustrer la paralysie créée par le manque de moyens des Services Fonciers, disons simplement ceci, aux Services Fonciers d’Ambatondrazaka, la plus ancienne demande de titre de propriété date de 1948. Actuellement, la Loi N° 2003-029 du 27 août 2003 permet de transférer une part de la gestion domaniale aux communes. Dans le cadre d’une dotation foncière faite à la commune ou à un groupement d’usagers du foncier, ou dans celui d’une immatriculation collective de terres sises sur le territoire de la commune, celle-ci a la charge de la conservation et de l’inscription « sur

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un registre ad hoc des modifications ultérieures affectant une parcelle déterminée. » (Art. 157, Loi N° 2003-029, op. cit.). Ce transfert n’intervient que dans la mesure où la demande ne vise que la constatation des occupations. Il s’agit d’une reconnaissance des droits de jouissance existant sur un ou des terrains. Le projet BV Lac a pour but de prendre en charge l’installation de deux guichets fonciers intercommunaux. Ces deux guichets constituent un des projets pilotes destinés à étudier la faisabilité de l’installation de cette structure et à observer son fonctionnement sur le terrain.

Notre contribution à l’étude de faisabilité a porté sur deux groupes de trois communes : Ambatondrazaka suburbaine, Ampitatsimo et Feramanga Nord sur la rive est du Lac Alaotra et Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso sur la rive ouest1. Initialement, ce rapport devait porter essentiellement sur l’analyse de la structure et du fonctionnement communal, aussi bien administratif que démocratique. Nous devions aussi analyser le rôle effectif des communes dans la gestion domaniale et foncière locale. Mais très vite, les termes de référence de l’analyse se sont élargis. En effet, nous avons réalisé la nécessité de replacer la commune dans le dispositif institutionnel afin de mieux cerner ses compétences et son rôle. Nous avons aussi resserré notre analyse sur le fokontany, celui-ci étant le premier niveau d’organisation des fokonolona. Nous avons donc tenté de mener une étude à la fois précise et globale du rôle des communes précitées dans le dispositif institutionnel et au niveau local.

L’analyse de l’état des lieux de la décentralisation à Madagascar nous a amené à en retracer l’évolution. En effet, certaines structures et les relations qu’elles entretiennent avec les niveaux inférieurs et supérieurs, déconcentrés et décentralisés2 ne prennent sens qu’au regard de l’histoire institutionnelle générale. Ainsi, nous avons tenté d’analyser la place des communes tout au long de ce processus afin de mieux cerner son rôle au sein du dispositif institutionnel. Nous avons aussi essayé de mettre en évidence les transitions et les permanences de ce dispositif. La position du fokontany a fait l’objet d’une attention particulière.

1 Cf. Annexe 1 2 Rappelons rapidement les définitions de ces deux notions : « Au sens juridique, la décentralisation suppose l’existence d’une pluralité de centres autonomes de décision, exige que des « organes locaux » aient le maîtrise juridique de leur activité, c'est-à-dire qu’ils soient libres de prendre, dans le respect des lois et règlements, la décision qu’ils veulent. » J. Baguenard, La décentralisation, Que sais-je, PUF, Paris, 1980 (1ère éd.), 2004, p. 12. « …la déconcentration, procédé consistant à confier certains pouvoirs de décision à des autorité non centrales reliées au pouvoir central par le principe de la subordination hiérarchique. » Ibid. p. 15.

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Nous avons ensuite centré l’étude sur la situation dans la région qui nous concerne, c’est à dire la région Alaotra-Mangoro, et sur les communes du projet. Le but de cette analyse a été de comprendre les moyens avec lesquels fonctionnent les communes, quelles sont les ressources en termes humains et techniques dont elles disposent. Par ailleurs, nous avons cherché à analyser les pratiques communales, notamment en matière de gestion domaniale et foncière locale, et de les articuler avec celles des autres structures impliquées dans cette gestion, en particulier le fokontany. Nous avons systématiquement adopté une démarche consistant à faire le point sur le dispositif existant et sur les compétences légales des communes et des fokontany dans ce domaine avant de les analyser au regard des pratiques observées.

Enfin, nous nous sommes penchés sur le fonctionnement général des communes, aussi bien financier que démocratique et sur leurs capacités de mise en œuvre du développement économique et social dans leur localité. Nous avons tenté de mesurer le degré d’autonomie financière dont jouissent les communes et le niveau de dépendance à l’égard des subventions de l’Etat. Leur capacité éventuelle d’investissement a aussi fait l’objet d’observations particulières, ceci dans le but d’estimer les capacités de prise en charge de la structure du guichet foncier par les communes du projet. Nous avons aussi désiré apporter un éclairage sur le fonctionnement de la démocratie communale et sa perception par les administrés. L’objectif a été d’analyser les relations qu’entretiennent les communes avec la population, et la façon dont cette dernière perçoit le rôle de la commune. Là aussi, nous avons fait le point sur les cadres légaux avant d’examiner les pratiques existantes. L’étude de chacun de ces thèmes est suivie d’une conclusion comprenant des propositions et des recommandations en vue de l’installation des guichets fonciers intercommunaux dans ces deux groupes de communes.

La méthodologie de l’étude a été essentiellement basée sur la réalisation d’entretiens semi directifs, l’analyse des textes de loi, des budgets communaux et des plans communaux de développement.

Aux niveaux administratifs, nous avons interviewé : des fonctionnaires du Secrétariat d’Etat chargé de la Décentralisation du Développement Régional et des Communes, les Sous- préfets de la zone du projet, le Chef du Centre Fiscal Régional d’Ambatondrazaka et un des agents d’assiette, les comptables publics et responsables des trésoreries principales, les Délégués Administratifs d’Arrondissement.

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Au niveau des communes, nous avons rencontré à plusieurs reprises et interviewé : les Maires, les adjoints aux Maires, les Présidents des Conseils communaux, les Conseillers communaux, les trésoriers/percepteurs, les gardes barrières (communaux et du fivondronampokontany).

Au niveau des fokontany, nous avons interviewé : les Chefs de Fokontany, certains responsables d’associations paysannes, les raiamandreny (littéralement, « les pères et mères » : les habitants dont l’âge leur confère une légitimité), et toutes les personnes se sentant concernées par le projet et désireuses de prendre part aux réunions.

Nous avons systématiquement commencé nos entretiens par une explication détaillée du projet afin de permettre aux personnes interrogées de répondre plus précisément aux questions. L’obtention des documents communaux n’a pas posé de problèmes et nous avons pu baser notre analyse directement sur les budgets.

Ces documents et ces entretiens seront cités tout au long du document, ainsi divisé en trois parties : - la décentralisation à Madagascar, état des lieux et évolution institutionnelle depuis 1976 ; - la situation au Lac Alaotra et dans la région, état des lieux des communes du projet, notamment en matière de gestion domaniale et foncière locale ; - le fonctionnement communal et la mise en œuvre du développement économique et social.

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Première partie : La décentralisation à Madagascar

La mise en place d’un guichet foncier communal ou intercommunal implique de laisser aux communes une plus grande place dans la gestion domaniale et foncière, tout en restant dans le cadre juridique et légal existant. Il s’agit en fait de mettre en œuvre une décentralisation de la gestion domaniale et foncière selon le dispositif légal prévu à cet effet. Afin de comprendre la structure institutionnelle actuelle, dans laquelle se situent les communes, il est nécessaire de l’analyser au regard des divers héritages des vagues antérieures de décentralisation.

I- Historique du processus de décentralisation

1- La IIème République : décentralisation et centralisme démocratique

En 1976, le gouvernement révolutionnaire met en œuvre un processus de décentralisation dans lequel chaque collectivité décentralisée exerce une tutelle sur la collectivité de niveau inférieur. De plus, l’Etat qui a la tutelle du faritany peut exercer son contrôle directement sur chacune des collectivités décentralisées. Ces dernières disposent tout de même de la personnalité morale et de l’autonomie financière (Art. premier, Ordonnance 76-044 du 27 décembre 1976). Leurs attributions sont les mêmes à chaque niveau, « sur son territoire, le Fokonolona d’une Collectivité décentralisée détient le pouvoir révolutionnaire : administratif, législatif, juridictionnel, défense, sécurité, économique, politique et social » (Art. 15, Ordonnance 76-057 du 17 septembre 1977). En fait, le principe du centralisme démocratique se caractérise par un pouvoir de contrôle en cascade d’une collectivité sur l’autre et de l’Etat sur le tout. Par ailleurs, les conseils populaires ou l’assemblée générale pour le fokontany peuvent destituer les membres du comité exécutif (Art. 38, Ordonnance 77-008 du 15 mars 1977). Ainsi, le contrôle sur les actes et les dirigeants des collectivités décentralisées s’exerce par le haut et par le bas. Les différents niveaux de collectivités décentralisées s’emboîtent les uns dans les autres, « le conseil populaire d’une Collectivité décentralisée est le collège formé par l’ensemble des représentants des Collectivités décentralisées qui le composent » (Art. 6, Ordonnance 76-044 du 27 décembre 1976).

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1976 1992 1994 1998 2002 2004 Ordonnances 76-044 ; 77-008 ; Ordonnance 92-003 Constitution du Constitution du 15/03/1998 Application de l’article 129 Loi N° 2004-001 77-013 ; 77-014 ; 77-050 ; 77- 18/09/1992 Lois N° 2000-016 ; 2000-017 de la constitution du Décret : 2004-299 057 ; 78-008 ; 79-006 ; 79-007 ; Lois N° 93-005 ; 94-007 ; 18/09/1992 83-004 94-008 ; 94-039 Décrets : 2002-1170 ; 2003- Décret : 77-413 Décrets : 95-041 ; 96-248 ; 436 96-249 ; 96-250 ; 96-251 ; 96-834 ; 96-898 ; 97-1257 FARITANY Délégation spéciale Délégation spéciale Délégué Général du Délégué Général du Délégué Général du -Comité exécutif : -Président de la Délégation Abrogée et remise en place Gouvernement : représentant Gouvernement Gouvernement : contrôle représentant du pouvoir central Spéciale (PDS) : représentant par la Loi N° 94-039 de l’Etat , contrôle de légalité de légalité des actes des -Comité administratif : du pouvoir central et de constitutionnalité des régions ? contrôle fonctionnement administratif - D.S : 9 membres nommés actes de la province hiérarchique du chef de de la CTD et contrôle de la par décret pris en conseil du région ? CTD sous tutelle gouvernement Provinces autonomes Délégation spéciale auprès Délégation spéciale auprès -Conseil populaire : organe (élections en 2000) des provinces autonomes des provinces autonomes délibérant -Gouverneur : chef de l’exécutif -PDS : nommé par Décret -PDS : contrôle de légalité et de l’administration pris en Conseil du des actes des régions ? -Conseil provincial : organe gouvernement contrôle hiérarchique du délibérant et législatif chef de région ? -Cours d’appel, tribunaux et autres juridictions : fonction juridictionnelle Préfecture Préfecture Préfecture Préfecture -Préfet de région : contrôle de -Chef de région : disparition légalité pour la région et du Préfet de région Délégué Général du Gouvernement pour les fivondronampokonatny

Région (non mise en place) Région (non mise en place) Région (non mise en place) Région (phase de transition) -Président de région : chef de -Chef de région (nommé) : l’exécutif chef de l’exécutif régional et -Conseil régional : organe de l’administration délibérant -Conseil régional (non mis en place) : organe délibérant -Comité régional : organe délibérant durant la période de transition

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1976 1992 1994 1998 2002 2004 FIVONDRONAMPOKONT Sous- préfecture Sous-préfecture Sous-préfecture Sous-préfecture ? ANY -Sous-préfet : contrôle de -Comité exécutif légalité pour le département -Comité administratif et la commune -Conseil populaire Délégation spéciale Délégation spéciale du Délégation spéciale du Délégation spéciale du Délégation spéciale du -PDS fivondronampokontany fivondronampokontany fivondronampokontany fivondronampokontany ? -D.S : 7 membres -PDS : Sous-préfet Département (non mis en place) -Président du Département : chef de l’exécutif -Conseil départemental : organe délibérant

Arrondissement Arrondissement administratif Arrondissement Arrondissement administratif administratif administratif -Délégué administratif d’arrondissement (DAA) FIRAISAMPOKONTANY Délégation spéciale Commune Commune Commune Commune -Comité exécutif -PDS -Maire : chef de l’exécutif -Comité administratif -D.S : 5 membres nommés -Conseil communal ou -Conseil populaire par arrêté du Ministre de municipal : organe délibérant l’Intérieur FOKONTANY Fokontany Fokontany Fokontany Fokontany Fokontany -Comité exécutif -Président du Comité Local de -Président de fokontany : Chef de quartier : nommé par -Chef de Fokontany : nommé -Comité administratif : Sécurité (PCLS) : nommé par nommé par le sous-préfet le sous-préfet par le Maire sur une liste de fonctionnement administratif de la le PDS du -Comité du fokontany : élu en Président de fokonolona : élu en 5 noms proposée par l’A.G CTD uniquement fivondronampokontany A.G du fokontany A.G du fokonolona, sous du fokontany -Assemblée générale -CLS : membres élus par l’autorité du chef quartier l’A.G du fokontany

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2- L’aménagement de la transition : la mise en place des « délégations spéciales »

Le système de 1976, caractéristique des pouvoirs révolutionnaires socialistes, prend fin en 1992 par l’instauration de délégations spéciales à tous les niveaux de collectivités décentralisées. L’Ordonnance 92-003 aménage les organes de la transition des collectivités territoriales décentralisées jusqu’au passage à la Troisième République. « Pendant la période de transition vers la Troisième République, toutes les attributions des élus dans les Faritany, Fivondronampokontany et Firaisampokontany sont exercées par des délégations spéciales… Dans chaque Fokontany, un comité local de sécurité est mis en place pour la gestion des affaires propres du Fokontany. » (Art. premier, 2, Ordonnance 92-003 du 26 février 1992) Le président de la délégation spéciale (PDS) exerce les attributions des élus, est le représentant du Pouvoir central dans sa circonscription et le chef du comité administratif. Il est chargé de l’exécution des décisions des membres de la délégation spéciale (Art. 4, Ordonnance 92-003 du 26 février 1992). Cette attribution fait perdurer l’existence de deux organes distincts, une délégation spéciale compétente pour prendre des décisions et un président de délégation spéciale, exécutant de ces décisions.

3- Les institutions de la IIIème République

La Constitution du 18 septembre 1992 et la Loi N° 93-005 du 26 janvier 1994, déterminent les principes et l’orientation générale de la politique de décentralisation. La Loi de 1994 prévoit une décentralisation à trois niveaux, la région, le département et la commune avec une mise en place progressive de ces structures. « La mise en place des Collectivités territoriales décentralisées à trois (3) niveaux prévus à l’article de la présente loi sera progressive en commençant par les communes. Les communes seront mises en place avant la fin de l’année 1995 et les autres Collectivités territoriales décentralisées avant la fin de l’année 1996. » (Art. 23, Loi N° 93-005, J.O. 2241 du 2 mai 1994) Finalement, seules les communes sont mises en place et les délégations spéciales aux niveaux du faritany et du fivondronampokontany sont abrogées puis restaurées au début de l’année 1995 par la Loi N° 94-039.

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4- La mise en place de ces institutions

Concernant la commune, les décrets d’application se succèdent et en font une collectivité décentralisée de plus en plus opérationnelle en déterminant précisément ses domaines de compétences et ses ressources3. Parallèlement, l’organisation de l’administration territoriale se met en place, ce qui permet à la commune d’être située dans un cadre institutionnel plus clair, notamment concernant les contrôles administratif et de légalité de ses actes. Ce dispositif une fois en place, les évolutions, ou les non évolutions, des structures de niveau territorial supérieur n’ont plus d’incidence importante sur cette collectivité décentralisée.

Le département disparaît des textes avec la Constitution du 15 mars 1998, sans avoir été mis en place. A ce niveau, la délégation spéciale du fivondronampokontany demeure fonctionnelle. La Constitution prévoit la mise en place des provinces autonomes, qui sont opérationnelles après les élections provinciales de 2000. Mais elles sont remplacées par des délégations spéciales à la suite des évènements de 2002, en application de l’article 129 de la Constitution. Ainsi, en 2002, la délégation spéciale du fivondronampokontany est héritée de la période de transition de 1992, la province autonome est à nouveau remplacée par une délégation spéciale, et la région n’a pas été mise en place.

Au niveau des provinces et des fivondronampokontany, l’aménagement de la transition est, en quelque sorte, devenu le droit commun dans la mesure où tous les lois et décrets envisagent implicitement ou explicitement l’existence de ces structures. Si la Loi N° 2004- 001 transfère les ressources des ex-fivondronampokontany à la région, elle prévoit aussi, dans ses dispositions transitoires et finales, leur fonctionnement jusqu’à la mise en place de la structure régionale. La région étant elle-même en transition jusqu’à l’élection des chefs de région, la seule collectivité territoriale décentralisée opérationnelle est la commune. Ainsi, depuis 1994, soit dix ans aujourd’hui, on observe deux permanences dans le processus de décentralisation, la permanence de la transition et la permanence de la structure communale, qui demeure la seule dont les statuts n’ont pas changé durant cette période.

Le fokontany est par contre l’objet d’une prolifération de textes. Entre 1994 et 2004, six décrets au moins ont été pris pour réglementer son statut. Ce point sera développé plus loin.

3 Cf. Annexe 2 pour les textes de loi régissant les communes

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II- La situation actuelle et les innovations institutionnelles

A- La situation actuelle

1- Etat des lieux

L’état des lieux de la décentralisation à Madagascar fait apparaître trois niveaux de collectivités territoriales décentralisées, composantes des Provinces autonomes. Parallèlement, il existe quatre niveaux de déconcentration. En fait, parmi les structures décentralisées, deux ne sont plus opérationnelles en termes politiques, la Province et le fivondronampokontany, mais continuent d’avoir des pouvoirs économiques, une est en transition, la région, et une seule est opérationnelle, la commune.

Selon la définition donnée dans les textes de loi malgaches4, la seule Collectivité territoriale décentralisée est actuellement la commune. Elle est, en effet, la seule à remplir tous les critères déterminés par la loi d’orientation générale de la politique de décentralisation.

4 « La création et la délimitation des Collectivités territoriales sont décidées par la loi. Elles sont dotées de la personnalité morale, de l’autonomie financière et garantissent, en tant que cadre institutionnel de participation effective des citoyens à la gestion des affaires publiques, l’expression de leur diversité et de leur spécificité. Elles s’administrent librement par des conseils élus au suffrage universel direct dans les conditions fixées par les lois et les règlements. » (Art. 4, Loi N° 93-005, J.O. 2241 du 2 mai 1994)

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Décentralisé Déconcentré

Province autonome Délégué Général du Délégation Spéciale Gouvernement - Président de délégation spéciale

Région (Loi 2004-001) Préfecture de région ? - Chef de Région

Fivondronampokontany ? Sous-préfecture ? Délégation spéciale - Sous-préfet : Chef de district - P.DS : Sous- préfet (Loi 2004-001)

Arrondissement administratif - Délégué d’arrondissement administratif Communes -Maire - Président du Conseil communal ou municipal

Fokontany -Chefs de Fokontany (Décret 2004-299)

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2- Questions liées au fonctionnement des « délégations spéciales »

Les Provinces et les fivondronampokontany sont dirigés par des délégations spéciales. Le Président de la délégation spéciale du Faritany (Province) est nommé par le gouvernement, tandis que pour le fivondronampokontany cette fonction est assurée par le sous-préfet, ou le préfet lorsque le fivondronampokontany est un chef lieu de préfecture. Il existe, au niveau de la Province, un Délégué Général du Gouvernement, mis en place par la Loi N° 2000-017. Il est nommé par décret pris en conseil des Ministres et a des fonctions de contrôle et d’administration (Art. premier, Art. 3, Loi N° 2000-017, J.O. 2659 du 4 septembre 2000). Par ailleurs, « dans la Province Autonome, le Délégué Général du Gouvernement anime et coordonne les services déconcentrés de l’Etat. » (Art. 15, Loi N° 2000-017, J.O. 2659 du 4 septembre 2000). Actuellement, la Province étant dirigée par un Président de Délégation Spéciale, le rôle du Délégué Général du Gouvernement est difficile à déterminer. En effet, ses fonctions de contrôle de légalité des actes émis par les gouverneurs et les conseils provinciaux n’ont plus lieu d’être exercées. En outre, le Président de la Délégation Spéciale et le Délégué Général du Gouvernement sont tous deux nommés par le gouvernement. L’on se demande alors sous quelle autorité sont placés les services déconcentrés de l’Etat.

Au niveau de la commune le contrôle de légalité des actes pris par le Maire et/ou le Conseil communal est exercé a posteriori par le sous-préfet. Le Délégué administratif d’arrondissement est un fonctionnaire de la sous-préfecture, détaché au niveau de deux ou plusieurs communes, pour exécuter les directives émanant du Représentant de l’Etat, en l’occurrence le sous-préfet.

B- Les innovations institutionnelles

1- La région

La région, prévue par la Loi N° 93-005, mais récemment mise en place par la Loi N° 2004-001 est en phase de transition. « Jusqu’à la mise en place effective des structures prévues par la présente loi : les attributions du Conseil régional, organe délibérant de la Région, sont exercées par le Comité régional, composé de parlementaires issus de la Région, des représentants des Maires, de

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représentants des opérateurs économiques ainsi que de représentants des Sociétés civiles de la Région concernée ; (…) ; l’Exécutif régional est composé du chef de Région et de trois membres, nommés tous par décret du Président de la République, pris en conseil des Ministres sur proposition conjointe du Ministre chargé de l’Intérieur et du Ministre chargé de la Décentralisation. » (Art. 15, Loi N° 2004-001, J.O. 2915 du 12 juillet 2004) Durant cette période, toutes les structures existantes continuent de fonctionner selon la législation en vigueur (Art. 17, Loi N° 2004-001, J.O. 2915 du 12 juillet 2004). En fait, les Préfets de Région ont d’ores et déjà laissé leur place aux chefs de Région qui se sont installés au chef lieu de la Préfecture. A l’expiration de cette phase de transition, les Régions seront à la fois des collectivités décentralisées et des circonscriptions administratives (Art. 4, Loi N° 2004-001, J.O. 2915 du 12 juillet 2004). Le chef de Région cumulera alors les fonctions de premier responsable de l’exécutif régional et de représentant de l’Etat, du Chef du gouvernement et de tous les membres du gouvernement (Art. 5 et 6, Loi N° 2004-001). En tant que chef de l’exécutif régional, le chef de Région sera soumis au contrôle de légalité du Représentant de l’Etat au niveau de la Province (Art. 11, Loi N° 2004-001) et en tant qu’autorité administrative déconcentrée, il sera soumis au contrôle hiérarchique. Dans la situation actuelle, on ne sait pas si ces contrôles de légalité et hiérarchique seront exercés par le Président de la Délégation Spéciale du Faritany ou par le Délégué Général du Gouvernement, ou répartis entre les deux.

2- Questions liées à la mise en place des régions

Par ailleurs, « les moyens humains, matériels ainsi que les ressources des ex- fivondronampokontany, des Préfectures et des Sous-Préfectures correspondant à leurs limites territoriales feront l’objet de transferts au profit des Régions… » (Art. 9, Loi N° 2004-001). D’une part, cela signifie que les taxes perçues par les fivondronampokontany seront transférées aux budgets des régions. Et d’autre part, cela pose la question du devenir de ces structures, et notamment de la délégation spéciale du fivondronampokontany. En outre, l’on peut se demander de quelle façon et par qui le contrôle de légalité des actes des communes sera effectué. Cette compétence va-t-elle rester une attribution du sous- préfet, sera t-elle exercée sous l’autorité du chef de Région ou par lui en tant qu’autorité administrative déconcentrée ? De la même manière, les Délégués administratifs d’arrondissement seront-ils placés sous l’autorité directe du chef de Région ou demeureront-ils sous l’autorité du

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sous-préfet, lui-même placé sous celle du chef de Région ? Dans l’attente de la promulgation des décrets d’application de la Loi N° 2004-001, ces questions demeurent posées.

A un autre niveau, l’on peut tenter un parallèle entre la nouvelle loi sur les régions et le Décret 2004-299 faisant des fokontany des démembrements des communes. En fait, sans ce changement, les ex-Chefs quartiers, devenus Chefs de Fokontany, auraient été placés sous l’autorité du Chef de région.

3- Le fokontany, collectivité de base

Le fokontany est toujours défini comme la collectivité de base, qu’il soit circonscription administrative ou collectivité décentralisée (Ordonnance 76-044 du 27 décembre 1976). En fait, dès 1992 et l’installation d’un président du comité local de sécurité nommé par le président de la délégation spéciale du fivondronampokontany, le fokontany cesse d’être une collectivité décentralisée pour devenir la circonscription administrative de base avec le Décret 96-250. Il est alors défini comme « servant de relais entre les pouvoirs publics et la population » (Art. premier, Décret 96-250 du 27 mars 1996). A cette époque, les convocations de l’assemblée générale du fokontany relèvent exclusivement des compétences du sous-préfet. Les statuts du fokontany ne prévoient pas de relations particulières entre l’assemblée générale et/ou ses représentants et la commune. Cela change avec le Décret 97-1257.

4- La répartition de l’autorité exercée sur le fokontany

Le Décret 97-1257 instaure l’exercice d’une double autorité sur le fokontany, celle du Maire et celle du sous-préfet, et lui octroie des compétences pour l’exécution des directives émanant du Maire et du représentant de l’Etat territorialement compétent.

« Le Fokontany est une subdivision du territoire de la Commune. Le Fokontany est administré par un Comité comprenant cinq à dix membres suivant la taille démographique du fokontany. Le nombre des membres du comité de Fokontany est fixé par décision du Maire… Le mandat des membres du comité du Fokontany expire avec l’élection d’un nouveau Maire… Le Maire transmet la liste des membres du comité du Fokontany au Sous-Préfet. Celui-ci constate par arrêté la désignation du président et du vice-président du comité du Fokontany parmi les membres de ce comité…Le comité du Fokontany dirigé par son président est l’auxiliaire du Chef

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d’Arrondissement…Le comité du Fokontany dirigé par son président est l’agent d’exécution du Maire… » (Art. 4 à 8, Décret 97-1257 du 30 octobre 1997).

En fait, tout l’objet des textes qui se succèdent semble être de répartir l’autorité sur le chef ou président de fokontany entre la collectivité décentralisée et l’administration territoriale. En effet, le fokontany étant l’organisation de base et jouissant d’une légitimité historique et traditionnelle, le chef ou président de fokontany devient le canal de communication entre les pouvoirs publics et la population. Le principe de l’élection/nomination du chef ou président de fokontany permet à la fois de garantir sa légitimité aux yeux des habitants des villages, hameaux ou quartiers que le fokontany regroupe et de le placer sous l’autorité des pouvoirs publics, déconcentrés et décentralisés. Ainsi, l’objet des Décrets réglementant le statut du fokontany semble être la recherche de l’équilibre entre les pouvoirs sous l’autorité desquels il est placé et dont le chef ou président de fokontany est l’exécutant.

5- Le nouveau statut du fokontany

Depuis le Décret 2004-299, le fokontany est un démembrement communal. « Le fokontany est une sudivision administrative de base au niveau de la commune. » (Art. 2, Décret 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril 2004) Les Chefs de Fokontany sont aujourd’hui sous l’autorité du maire et continuent d’être des exécutants des directives émanant du Représentant de l’Etat territorialement compétent. Dans le cadre de l’installation des régions, ces directives peuvent émaner du Chef de région ou du sous-préfet ou des deux. Le fokontany est placé sous l’autorité directe du Maire et de la collectivité décentralisée dans la mesure où il exécute les délibérations du Conseil communal ou municipal sur ordre du chef de l’exécutif. Mais les statuts du fokontany prévoient aussi que le Chef de Fokontany « concourt aux activités relevant du domaine de compétences de l’Etat » (Art. 16, Décret 2004- 299). Le Chef de Fokontany est, par ailleurs, responsable devant le Représentant de l’Etat de l’exécution des instructions et directives que ce dernier lui a donné. Ainsi, le Chef de Fokontany est la dernière instance capable de faire exécuter les directives émanant des autorités supérieures par la population. La complexité du système actuel de décentralisation et de déconcentration des pouvoirs que nous avons tenté de mettre en exergue est liée à l’histoire du processus de décentralisation. En effet, plusieurs vagues se sont succédées, et les phases et organes de transition sont parfois

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devenus le droit commun. Mais on observe aussi des permanences dans ce processus, notamment au niveau de la structure communale.

Cette analyse rapide de l’évolution du processus de décentralisation et de la situation institutionnelle actuelle nous amène à plusieurs conclusions. D’abord, la commune est aujourd’hui la seule collectivité territoriale décentralisée à ne pas être administrée par des organes de transition. Elle est, de plus, opérationnelle et stable depuis dix ans d’après les textes de loi. Par ailleurs, l’autorité qu’elle exerce sur son territoire a été consolidée par le Décret 2004-299. Ainsi, le choix de l’installation du guichet foncier à ce niveau de décentralisation semble être justifié et légitimé à la fois par l’évolution du processus de décentralisation et par les dernières innovations institutionnelles.

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Deuxième partie : Situation administrative et moyens des communes dans la région du Lac

I- La situation administrative au Lac Alaotra5

1. La région

La région Alaotra Mangoro, avec celles d’Antsinanana et d’Analanjirofo fait partie de la province de Toamasina. Le Chef de Région, Mr Robinson David, récemment nommé et installé par le gouvernement, est à la fois le Chef de la collectivité décentralisée et chef de la circonscription administrative. Comme premier responsable de l’exécutif régional (Art. 5, Loi N° 2004-001, J.O. 2915 du 12 juillet 2004), le chef de Région s’occupe de la mise en œuvre et de la coordination de toutes les actions de développement économique et social de sa région (Art. 11, Loi N° 2004-001, J.O.2915 du 12 juillet 2004). Sa nomination porte sur une période de deux ans, définie comme phase de transition jusqu’à l’élection du chef de Région par la population (Art. 15, Loi N° 2004-001, J.O. 2915 du 12 juillet 2004). Ainsi, « jusqu’à la mise en place effective des structures prévues par la présente loi, les structures existantes au moment de la promulgation de la présente continuent de fonctionner selon la réglementation et la législation en vigueur » (Art. 17, Loi N° 2004-001, J.O 2915 du 12 juillet 2004). De fait, les services déconcentrés de l’Etat situés dans les limites territoriales de la Région tels que les services fonciers (regroupement des circonscriptions domaniale et topographique), ou le Centre Fiscal Régional (regroupement des contributions directe, indirecte et du service d’enregistrement et timbres) d’Ambatondrazaka continuent d’être sous l’autorité de la Préfecture de région, située à Ambatondrazaka commune urbaine. La région demeure ainsi composée d’une préfecture couvrant les mêmes limites territoriales et de cinq sous- préfectures, , Amparafaravola, Ambatondrazaka (qui est à la fois préfecture et sous- préfecture), Anosibe An’ala et Moramanga6.

2. Les fivondronampokontany et les sous-préfectures

5 Cf. Annexe 3 6 Ce qui est fortement contesté par les édiles de .

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Chacune de ces cinq sous-préfectures est aussi le siège d’une Délégation Spéciale du fivondronampokontany, ex-collectivité décentralisée, héritée de la succession des politiques de décentralisation et des périodes de transition. Le Président de la Délégation Spéciale du fivondronampokontany est le sous-préfet. Si ces ex-collectivités décentralisées sont devenues inopérantes dans bien des domaines et notamment en termes de pouvoir politique, elles continuent néanmoins à percevoir des taxes sur les produits agricoles, les ristournes. La région est elle-même composée de communes, démembrées en fokontany (Art. 2, Décret 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril 2004). Les communes sont groupées par deux ou plus en arrondissements administratifs dont le chef, le Délégué Administratif d’Arrondissement (DAA) est l’exécutant au niveau des communes rurales des directives émanant du Représentant départemental de l’Etat (Article premier, Décret 96-250 du 27 mars 1996). En pratique, il effectue surtout le recouvrement des impôts directs ou la perception des droits liés à l’émission des cartes d’identité nationale.

3. Les communes7

Les communes sont composées d’un bureau exécutif dont le Président (le Maire) élu au suffrage universel direct nomme les membres parmi la population (Art. 8, Décret N° 96-898 du 25 septembre 1996). « Le nombre de membres du bureau exécutif est fixé par décision du Maire ou de son Président » (Art. 51, Loi N° 94-008 du 28 mars 1994). Dans la majorité des communes de la zone du projet, ce bureau est constitué du Maire et d’un ou deux adjoints. L’organe délibérant de ces communes est le conseil communal (les conseillers communaux sont aussi élus au suffrage universel direct, sur scrutin de liste) dont le nombre des membres varie selon la population. Le chef de cet organe est le Président du Conseil, élu en son sein par les membres le composant (Art. 5, Loi N° 94-008 du 28 mars 1994). « En matière de développement économique et social, les compétences de la commune tiennent essentiellement des principes de proximité et d’appartenance » (Loi N° 94-007 J.O 2304 du 5 juin 1995). Ainsi, la Commune est responsable de l’élaboration du plan local de développement, en concertation avec la population. En tant que chef de l’exécutif, le Maire est le coordonnateur du développement de sa localité. Il peut faire entreprendre des travaux par la population en vue de l’exécution du plan de développement et après avis du conseil (Art. 17, Décret N° 96-898 J.O 2392 du 21 octobre 1996).

7 Cf. Annexe 4 pour la liste des arrondissements administratifs et des communes de la région Alaotra Mangoro

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En tant que commune rurale de première catégorie (Art. 2, Décret N° 96-170 du 6 mars 1996), Amparafaravola est dotée de plus de moyens que les autres communes de la zone du projet, et d’une gestion budgétaire effectuée par un percepteur principal, fonctionnaire du Ministère de l’Economie, des Finances et du Budget. Son bureau exécutif comprend sept membres (le Maire, deux adjoints et des conseillers de l’exécutif).

4. Les fokontany

Le Chef de Fokontany, dit « Chef Fokontany », et son ou ses adjoint(s) sont désignés par le Maire parmi une liste de cinq noms proposée par les membres du fokonolona âgés de 18 ans et plus réunis en assemblée générale (Art. 5, Décret N° 2004-299, J.O.2898 du 12 avril 2004). Dans la zone du projet, les Maires et les membres des fokonolona ont organisé des élections pour déterminer la liste des cinq membres parmi lesquels les Maires ont choisi les Chefs Fokontany et les adjoints (d’après les témoignages recueillis, ce vote a pu avoir lieu à bulletin secret ou à main levée). A Ambatondrazaka suburbaine, Ampitatsimo et Feramanga Nord, les nouveaux Chefs Fokontany ont pris leur fonction depuis le mois de juillet 2004. A Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso, les Maires n’ont pas encore choisi les nouveaux Chefs Fokontany, mais les élections au niveau des fokonolona ont déjà eu lieu. « Le fokontany débat, décide ou délibère en Assemblée Générale » (Art. 9, Décret N° 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril 2004), cette dernière est composée de tous les membres du fokonolona âgés de 18 ans révolus et plus. Le Chef et le Comité du Fokontany ont leurs propres attributions, définies par le décret susmentionné. « Le Comité de Fokontany participe et contribue de manière permanente et effective, sous l’autorité du Chef de Fokontany aux activités de développement du fokontany, aux activités socio-économiques du fokontany[…], à la mise en œuvre du plan d’urbanisme de la localité. »

Par ailleurs, le Chef Fokontany est l’auxiliaire du DAA et concourt aux activités relevant du domaine de compétences de l’Etat (Art. 16, Décret N° 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril 2004). Le Chef Fokontany est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont dévolues devant le représentant de l’Etat et devant le Maire, selon les domaines de compétences (Art. 16, Décret N° 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril 2004). Par ailleurs, en cas de manquement du Chef Fokontany dans l’exécution des instructions et directives du Représentant de l’Etat, ce dernier peut demander au Maire de le révoquer (Art. 25, Décret N° 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril

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2004). Le Maire devient alors le garant de l’exécution des tâches confiées au Chef Fokontany par le Représentant de l’Etat. En fait, d’après les commentaires et témoignages recueillis auprès de nombreux chefs fokontany dans la zone du projet, cette modification de statut ne représente en rien un véritable changement dans les attributions, les fonctions ou le rôle des ex chefs quartiers. En effet, tous considèrent qu’ils sont avant tout au service de la communauté, quelle que soit la situation juridique du fokontany. De la même manière, les entretiens effectués auprès des habitants des fokontany révèlent qu’ils considèrent et perçoivent le Chef Fokontany comme le premier relais des pouvoirs publics.

II- Les moyens techniques et humains des communes et fokontany dans la zone du projet

Les deux groupes de communes étudiés disposent de peu de moyens techniques et humains. Néanmoins, nous avons observé que les communes d’Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso sont relativement privilégiées.

A- Etat des lieux comparatif des six communes

Communes Nombre Pièces Ordi- Machines Armoires Bicyclettes Electricité Groupes d’employés nateurs à écrire dans les électrogènes locaux communaux CSA* 5 4 2 2 4 oui

Ampitatsimo 6 3 2 2 oui Feramanga Nord 5 3 3 1 1 oui Amparafaravola 24 9 3 2 6 1 oui Ambohimandroso 7 2 2 2 non 1 Sahamamy 5 2 2 2 non *Commune Suburbaine d’Ambatondrazaka B- La situation à Ambatondrazaka suburbaine, Ampitatsimo et Feramanga Nord

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1. Les locaux

Les locaux communaux d’Ambatondrazaka suburbaine, de Feramanga Nord et d’Ampitatsimo sont situés sur le même terrain. Dans un premier temps, on ne peut que signaler la vétusté et l’étroitesse des bureaux. Il n’existe aucune salle suffisamment vaste pour accueillir les usagers et des services très différents tels que l’Etat civil, la trésorerie ou la médiation8 s’entassent parfois dans une seule et même pièce. Cette situation provoque notamment un amoncellement de documents divers et variés rendant le classement difficile. Notons tout de même que si la situation est semblable dans ces trois communes, certains employés communaux et notamment les secrétaires trésoriers de la CSA et d’Ampitatsimo se retrouvent parfaitement dans leur espace aussi petit soit-il. Par ailleurs, ce qui peut sembler être une anarchie organisée favorise le contact avec les usagers. En effet, d’après les témoignages recueillis, l’apparence non bureaucratique des communes ainsi que la proximité physique entre la population et l’administration communale permet à certains usagers que la froideur administrative aurait repoussé de se sentir à l’aise dans un environnement qui ne leur est pas familier.

2. Le manque de moyens matériels

Le manque de moyens matériels rend l’archivage difficile, voire impossible. Pour des raisons pratiques évidentes, priorité est donnée aux documents récents dont regorgent les quelques armoires fermant à clef. Ainsi, les derniers documents budgétaires et financiers, les livres de légalisation de signature et autres documents communaux sont effectivement gardés et rangés, tandis que les anciens registres s’amoncellent sur le sol devant des étagères pleines, sous les bureaux ou encore dans les combles. Par ailleurs, le manque de moyens techniques se traduit aussi par une insuffisance de documents officiels. Par exemple, à la commune suburbaine d’Ambatondrazaka, les actes de naissance et de décès ne sont plus consignés dans le registre d’Etat Civil depuis longtemps au regard du nombre de feuilles volantes qui y sont annexées. Cependant, il faut noter les efforts des agents d’Etat Civil pour conférer à ces documents une valeur légale au moins dans leur forme, notamment par la reproduction systématique du modèle du registre.

8 Selon la loi N° 94-008 (Chap. VIII, Art. 129, J.O.2304 du 5 juin 1995) « Le Président du Conseil fait fonction de conciliateur et d’arbitre dans les litiges d’ordre individuel ou collectif susceptibles d’être réglés par de tels procédés en tant que raiamandreny. » En fait, dans les trois communes étudiées ici, le Maire ou ses adjoints exercent cette fonction de conciliateur. Les trois communes fournissent ce service de médiation.

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3. Les conséquences sur les fonctions des employés communaux

Une des conséquences de la vétusté du matériel communal et notamment des machines à écrire est la multiplication des tâches de secrétariat consistant principalement en la reproduction en de multiples exemplaires de simples formulaires. Ainsi, les employés censés se déplacer pour effectuer le recouvrement de certaines taxes communales passent le plus clair de leur temps dans les locaux. Pourtant, la multitude des tâches administratives n’est pas la seule cause de cette sédentarité des employés communaux. En effet, le manque et parfois l’absence de moyens de déplacement, se limitant d’ailleurs à des bicyclettes, ne favorisent pas la mobilité des agents de la commune. Notons que ces derniers parcourent souvent plus de 10 km pour se rendre chaque jour sur leur lieu de travail, que les fokontany sont assez éloignés, relativement aux moyens de locomotion et que les pistes, même réhabilitées, sont peu praticables. Une des conséquences de cette situation est l’accroissement du rôle du Chef Fokontany dans la gestion des affaires de la communauté. En effet, d’une part le Chef Fokontany occupe une place centrale en tant que relais entre la communauté et les pouvoirs publics, qu’ils soient déconcentrés ou décentralisés, et d’autre part en tant que dernier maillon de la chaîne des autorités publiques, il devient l’exécutant de toutes les tâches que ses supérieurs ne peuvent assumer pour diverses raisons.

4. Les conséquences sur le rôle du Chef Fokontany

Si la proximité du Chef Fokontany avec la population facilite son travail, les moyens techniques et humains dont il dispose sont particulièrement réduits. Parmi les fokontany des communes d’Ambatondrazaka suburbaine, d’Ampitatsimo et de Feramanga Nord, rares sont ceux qui disposent d’un bureau distinct du lieu d’habitation du Chef Fokontany. La conservation des documents se fait alors au domicile de ce dernier dans la majorité des cas. Signalons que, d’une manière générale, les Chefs Fokontany consignent et conservent tout ce qui concerne la communauté dans son ensemble et/ou ses membres individuellement avec beaucoup de rigueur et d’efficacité au regard des moyens dont ils disposent9. Les naissances et décès, les recensements de population, les discussions et les décisions prises en assemblée générale de fokontany, les visites et les propositions d’ONG ou de projets de développement sont enregistrés

9 Cf. Annexe 6

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dans des cahiers ou registres. Cette conservation est particulièrement importante dans un contexte où de nombreuses personnes ne se déplacent pas à la Commune pour officialiser ou régulariser leur situation.

Par ailleurs, les Chefs Fokontany disposent de peu de ressources humaines. Lorsqu’ils ne sont pas seuls à assumer leurs fonctions, ils sont assistés d’un adjoint. Celui-ci est plus un remplaçant du Chef Fokontany en son absence qu’un véritable assistant dans ses fonctions. Dans les fokontany les plus étendus et les plus peuplés (certains comprennent une population de plus de 1000 habitants), cette situation pose un véritable problème d’administration dans la mesure où, en tant que relais des pouvoirs publics, le Chef Fokontany doit assurer la sécurité et la diffusion des informations auprès de la communauté. Conscients de cette situation, certains Maires, notamment celui de la commune Suburbaine d’Ambatondrazaka, ont choisi de diviser les fokontany les plus vastes afin de « faciliter le travail des Chefs Fokontany et d’alléger leur tâche. »10 Cependant, cette subdivision entraîne aussi la disparition des adjoints puisque ces derniers sont nommés Chefs des nouveaux fokontany par le Maire11.

En outre, si le Chef Fokontany est la pierre angulaire du système, il est aussi le seul à ne bénéficier d’aucune rémunération provenant des pouvoirs publics. Certes, les droits perçus sur les actes qu’il délivre lui permettent d’équiper le fokontany en cahiers, stylos et autres fournitures de fonctionnement12, cependant, cela ne représente en rien une véritable rémunération de ses fonctions. Selon les différents témoignages recueillis auprès des Chefs Fokontany, les trois Conseils Communaux de la zone ont délibéré et voté pour évaluer et attribuer leurs indemnités. Pourtant, d’une part, ils n’ont rien perçu depuis leur nouveau mandat, c’est à dire depuis la loi 2004-299 faisant des fokontany des démembrements des Communes, et d’autre part, ils n’ont pas été rémunérés sous leur ancien statut. En effet, les décrets 2002-1170 et 2003-436 plaçaient les Chefs

10 Entretien avec le Maire de la commune suburbaine d’Ambatondrazaka, le 20 juillet 2004. 11 L’exemple du fokontany d’Ambohimandroso est significatif. Le Maire a fait élire cinq candidats par le fokonolona, puis en a désigné trois pour être Chef fokontany, Adjoint et Trésorier. Le fokontany a ensuite été subdivisé en trois et l’Adjoint et le Trésorier sont devenus les Chefs des nouveaux fokontany sur décision du Maire. 12 Selon la loi 2004-299, « La commune prévoit et affecte annuellement à chaque Fokontany, un crédit de fonctionnement dont le montant est fixé par délibération du Conseil municipal ou communal, selon le cas, et autant que possible, il sera tenu compte dans la répartition, de l’importance de l’apport de chaque Fokontany aux recettes. » (Art. 20, Loi 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril 2004.) Or, d’après les témoignages recueillis, les Fokontany n’ont pas de budget de fonctionnement. Les Chefs Fokontany tiennent une caisse dont les entrées sont constituées par les droits perçus.

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Fokontany sous l’autorité directe du sous préfet et prévoyaient leur indemnisation par le budget général de l’Etat.

Les entretiens effectués auprès des acteurs concernés, c’est à dire, les employés de la commune, les conseillers communaux, les maires, les Chefs Fokontany et les usagers convergent sur l’aspect essentiel et fondamental du rôle du Chef Fokontany, à la fois au service de la communauté et des pouvoirs publics. Il « travaille pour la communauté » et sous son contrôle direct. Il représente une autorité à la fois symbolique et fonctionnelle : il est le chef historique du (des) fokonolona13 et vise tous actes avant qu’ils ne soient transmis à la Commune (dans les cas où ils le sont).

C- La situation à Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso

Il est nécessaire d’apporter un éclairage sur le fonctionnement de ces communes au regard de leurs moyens techniques et humains, et ce d’autant plus que, par certains aspects, leurs conditions générales sont très différentes de celles des communes suscitées.

1- Le statut d’Amparafaravola

Amparafaravola est une commune rurale 1ère catégorie. Ce classement est effectué par l’administration centrale en fonction du nombre d’habitants et de la situation de la commune par rapport à la sous-préfecture. Toutes les communes rurales chef lieu de sous-préfecture sont ainsi classées communes rurales de 1ère catégorie (Art. 2, Décret N° 96-170 du 6 mars 1996). Ceci implique des indices de rémunération plus élevés pour le Maire et les Conseillers Communaux que dans les autres communes rurales (Art. 3 à 9, Décret N° 96-170 du 6 mars 1996), mais aussi des dotations de fonctionnement plus importantes et une gestion budgétaire effectuée par un comptable public, fonctionnaire du Ministère de l’Economie, des Finances et du Budget (MEFB). Par ailleurs, Amparafaravola ayant été une des 12 communes cibles (deux par Provinces) du projet PAIGEP14 visant à renforcer la fiscalité locale en transférant l’émission des rôles pour l’IFT et l’IFPB aux communes pilotes, elle a été dotée d’ordinateurs et certains de ses agents ont

13 J. Comte, Les Communes Malgaches, Les Codes Bleus Malgaches, Editions de la Librairie de Madagascar, 1963, pp. 7-8. 14 Projet mis en place par le Secrétariat d’Etat à la Décentralisation et aux Communes et la Coopération française en 1998.

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bénéficié de formations en fiscalité et en informatique, notamment pour le maniement du logiciel permettant l’émission du rôle.

2- Les locaux

Sur le plan technique, signalons que les locaux de la Commune sont plus vastes, en meilleur état et que la capacité de conservation de documents et d’archives communales est nettement plus importante que dans les trois communes étudiées précédemment. Par ailleurs, le grand nombre de pièces permet une meilleure organisation de la commune. Seuls les employés exerçant des fonctions dans le même domaine partagent des bureaux, les autres ont un espace clairement délimité et une possibilité de stockage des documents plus importante. Les services d’Etat Civil et de renseignements sont situés à l’entrée de la Commune et constituent une sorte de lieu d’accueil des usagers, ce qui permet d’une part de les rendre aisément accessibles à tous et d’autre part de faciliter le contact des usagers avec l’administration communale en évitant la création d’une atmosphère bureaucratique ayant tendance à intimider la population.

3- Les employés

Le grand nombre d’employés communaux d’Amparafaravola favorise une répartition claire des fonctions de chacun. En matière de recouvrement des taxes et impôts et de gestion financière par exemple, la commune emploie un régisseur chargé de tenir la caisse, un agent fiscal responsable de l’émission des rôles, un percepteur des tickets de marché et un secrétaire comptable. Chacun de ces agents a une vision très précise de ses fonctions et une connaissance relative de celles des autres tandis que le Secrétaire Général coordonne les actions de chacun. En outre, la mise à disposition d’un percepteur principal par le Ministère de l’Economie des Finances et du Budget permet une meilleure gestion budgétaire. Les moyens techniques et humains de la commune d’Amparafaravola lui permettent de remplir ses fonctions et d’après les témoignages recueillis auprès des habitants des fokontany composant la commune, le Maire « descend régulièrement sur le terrain et cela le rend proche de la population. »15

15 Entretien réalisé auprès du Chef fokontany et des Raiamandreny du fokontany d’Ampasimbola, le 4 septembre 2004.

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4- Les communes d’Ambohimandroso et Sahamamy

Les communes d’Ambohimandroso et Sahamamy sont nées de la subdivision d’Amparafaravola à la fin de l’année 2003. Si, pour l’instant, elles sont dotées de peu de moyens humains et installées dans des bureaux provisoires, elles ne rencontrent aucun des problèmes de conservation de documents ou de vétusté du matériel communal. Ces communes commencent tout juste à fonctionner. Elles ont reçu leurs dotations de fonctionnement et les subventions de l’Etat aux nouvelles communes aux alentours du mois de mars 2004 et les deux Maires ont choisi de donner la priorité à la promotion de l’enregistrement à l’Etat Civil des moins de 18 ans16. Les fokontany composant ces trois communes ne sont pas mieux équipés que ceux de la zone précédemment décrite. Les Chefs Fokontany constituent là aussi le véritable relais entre les pouvoirs publics et la population, certifient les divers actes administratifs et assurent la sécurité et le développement local. Les maires des communes d’Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso envisagent eux aussi la division des fokontany dans le but de faciliter la prise en charge de la population par les Chefs Fokontany17 qui, là non plus, ne perçoivent aucune rémunération.

16 Entretiens réalisés auprès du Maire d’Ambohimandroso le 19 août et le 1er septembre 2004, auprès des adjoints au Maire de Sahamamy le 17 septembre 2004. 17 « Nous avons six fokontany dans la commune, mais comme il y en a où la population est nombreuse, nous allons en diviser un. Pour l’instant, les Chefs Fokontany n’ont pas encore de salaire. » Entretien réalisé auprès du Maire de la commune d’Ambohimandroso, le 19 août 2004.

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Dans la mise en place du guichet foncier communal ou intercommunal, il serait nécessaire de considérer le rôle essentiel des Chefs Fokontany aux yeux de la collectivité et des pouvoirs publics. Malgré leur manque de moyens humains et techniques, ils continuent d’être la référence en termes d’autorité, ils demeurent les seuls à détenir une connaissance précise de la situation des membres des fokonolona qui considèrent la certification des divers actes par le fokontany préalablement à celle de la Commune comme la voie hiérarchique naturelle de tous documents. De l’autre côté, aucun Maire ni employé communal n’accepte de légaliser une signature ou d’enregistrer une naissance ou un décès si le visa du fokontany ou la présence de témoins n’atteste pas de la véracité des renseignements.

III- L’exercice des compétences des communes et des fokontany en matière domaniale et foncière

Les textes de loi définissent peu les compétences des communes et des fokontany en matière domaniale et foncière. L’analyse de ces textes demeure indispensable à la compréhension de leurs rôles respectifs, néanmoins elle ne prend sens qu’au regard des questions et litiges fonciers vécus par la population et des pratiques mises en œuvre pour les régler. Ici, nous présentons deux aspects de la répartition des compétences locales en matière domaniale et foncière : la gestion domaniale effectuée par les acteurs locaux, c’est à dire, l’enregistrement et la légalisation des divers actes et contrats passés sur les terres par les usagers, et les modes de règlement des conflits fonciers mis en oeuvre par ces acteurs locaux, soit, la médiation et l’arbitrage des conflits.

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A- La gestion domaniale et foncière des acteurs locaux

D’après les entretiens effectués sur la zone du projet, on recense trois types d’acteurs dans la gestion domaniale locale : les communes, les fokontany et les organisations paysannes, principalement les associations d’usagers de l’eau18.

1- Les compétences légales des acteurs locaux

D’un point de vue juridique et légal, ces trois acteurs n’ont pas de compétences en matière domaniale. Cependant, d’une part certaines attributions des maires et présidents des conseils communaux peuvent s’exercer dans le cadre de la gestion domaniale, et d’autre part, les Chef Fokontany exercent des compétences qui leur sont dévolues par les maires. Concernant la commune, le Maire et/ou ses adjoints participent aux opérations de reconnaissance domaniale, aux côtés des Services Fonciers19. Par ailleurs, ils ont le pouvoir de légalisation de signature (Art. 7, Décret N° 96-898 du 25 septembre 1996). Le Chef Fokontany, quant à lui « exerce les attributions d’ordre particulier qui lui sont confiées par le Maire et procède à l’exécution et à la finalisation des instructions et directives du Maire. » (Art 15, Loi N° 2004-299, J.O. 2898 du 12 avril 2004). Les associations sont régies par l’Ordonnance 60-133 du 5 octobre 1960 portant régime général des associations et par le Décret N° 60-383 du 5 octobre 1960 portant application de l’ordonnance suscitée. Ces deux textes ne donnent aucune compétence en matière domaniale et foncière aux associations. Les Associations d’Usagers de l’Eau (AUE) disposent d’un statut particulier : elles sont régies par la Loi N° 90-016 du 20 juillet 1990 relative à la gestion, l'entretien et la police des réseaux hydroagricoles, le Décret N° 90-642 du 19 décembre 1990 portant application de la Loi N° 90-016 et le Cahier des Charges de Prescriptions Générales publié par l'Arrêté N° 290- 91 du 18 janvier 1991 du Ministre de la Production Agricole et du Patrimoine foncier. Pour autant, ces dispositions particulières ne leur confèrent pas de compétences en matière de gestion domaniale et foncière.

18 Ces Associations d’Usagers de l’Eau (AUE) sont situées principalement sur les Périmètres de Colonisation, héritage des aménagements de la Somalac, entreprise nationale qui a fermé ses portes en 1991. Lorsque la Somalac a cessé ses activités, la gestion des canaux et réseaux d’irrigation a été reprise par ces associations soutenues par diverses ONG et projets de développement rural. Elles s’occupent aujourd’hui, entre autres, de l’entretien des réseaux d’irrigation et du recouvrement des redevances dues par les exploitants de parcelles situés sur les Périmètres de Colonisation. 19 Cf. Annexe 7

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Les statuts de quelques associations, comme les Zones de Gestion Concertée, incluent l’objectif de sécurisation foncière. Mais cela est lié à l’histoire de leur création20. En fait, elles garantissent la reconnaissance des droits de jouissance de leurs membres par leur existence même. Cette reconnaissance permet une sécurité foncière toute relative. En effet, les droits sont reconnus au sein de l’association et protégés contre d’éventuelles tentatives d’accaparement, mais cette reconnaissance n’a aucune valeur juridique et légale. Malgré le cadre juridique très restreint, voire inexistant, dans lequel peuvent opérer les acteurs mentionnés en matière de gestion domaniale et foncière, dans la pratique ils sont les éléments clefs de cette gestion.

2- Les associations

Certaines associations paysannes tiennent à jour de façon très précise l’état de l’occupation des terres dans leurs limites territoriales. En effet, celles qui perçoivent des redevances, pour l’alimentation en eau notamment, sont directement concernées par les contrats passés sur les terrains des membres de l’association. Afin de savoir auprès de qui exiger les redevances annuelles, ces organisations paysannes doivent connaître l’état de l’occupation des terres. Elles enregistrent alors les contrats de location, de métayage et toutes autres transactions passées par les membres. Ajoutons qu’au sein de la majorité des associations paysannes, un droit de préemption existe quant à l’achat des terres d’un des membres.

3- Le fokontany

Bien que le Chef Fokontany n’ait aucune compétence en matière domaniale et foncière au regard de la loi, dans la pratique, il prend en charge les questions foncières des membres du (des) fokonolona qu’il administre. Il enregistre les mutations et transactions faites sur les terres des habitants du fokontany, vise et signe tous actes concernant leurs terres. Ainsi, de nombreux actes de vente passés entre deux usagers sont simplement visés par le Chef Fokontany, en présence de témoins. Il arrive souvent que les signatures ne soient pas légalisées au niveau de la commune. « Pour la légalisation des actes de vente de terrains, les papiers sont

20 Ces associations ont été mises en pace par le projet Imamba Ivakaka dans le but d’améliorer la protection des Bassins Versants du même nom et de faciliter l’accès des groupements à la sécurisation foncière, notamment par l’obtention d’un titre collectif.

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d’abord visés par le Fokontany avant de passer à la Commune, mais certaines personne se contentent de ce visa et ne vont pas à la Commune. Le visa est payant, cela est prévu par la Dina21. »22 Cette dernière remarque explique en partie cette situation. En effet, les droits de visa varient entre 1000 FMG et 2000 FMG, alors que l’enregistrement et la légalisation d’un acte de vente par la Commune sont taxés environ 10% du montant de la vente. Si l’on ajoute à cela l’isolement de certains fokontany par rapport à la commune et le manque de moyens de locomotion de nombreux paysans, l’on comprend mieux pourquoi la plupart des transactions faites sur les terres le sont uniquement sous l’autorité du Chef Fokontany. Mais ces aspects purement pratiques ne suffisent pas à expliquer ce phénomène.

Au cours des entretiens réalisés, les acteurs concernés ont très souvent évoqué le degré de confiance de la population vis à vis du Chef Fokontany. En fait, ce dernier étant le chef de la communauté et ayant une connaissance parfois extrêmement précise de la situation de chacun des habitants, son visa est considéré comme une reconnaissance par la collectivité des droits d’un individu sur une terre. « Le Chef Fokontany est le représentant de la commune et même de l’Etat, il est aussi le chef de la communauté. Tous les papiers concernant le fokontany sont pris en charge par le Président de Fokontany. Pour les actes de vente concernant les terres, la Commune ne sait pas aussi bien que moi ce qui se passe ici, et on doit suivre la voie hiérarchique. »23

Dans la mesure où le visa du fokontany est la consécration de la reconnaissance par tous des droits de jouissance d’un individu sur une terre, celui-ci est protégé du groupe et par le groupe. Ainsi, les droits d’un usager n’existent qu’au regard de leur légitimation par le fokonolona, mais la jouissance d’une terre demeure strictement individuelle, sauf dans les cas de terrains communautaires bien entendu. Il semble par ailleurs que les usagers évaluent la nécessité de faire légaliser un acte par le Maire ou ses adjoints en fonction de son importance et du degré de sécurité auquel ils désirent accéder.

4- La commune

21 Le Dina est une convention passée entre les membres du fokonolona et visant à faire respecter les règles de vie adoptées par la communauté. Le système des Dina est très ancien. Il a été institutionnalisé par les successeurs du roi Andrianampoinimerina (1787-1810) pour en faire un instrument de gestion et d’autogestion des fokonolona, puis par l’administration coloniale. Actuellement, des Dina sont encore adoptées par des fokonolona, des fokontany ou des associations et la commune veille à leur application. Cette dernière peut aussi en promouvoir l’adoption. 22 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany et des Raiamandreny de Morarano, le 7 septembre 2004. 23 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany d’Ambohibotavo, le 14 août 2004.

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Aux yeux des usagers, des Maires et de leurs adjoints, des présidents des Conseils communaux et des Chefs Fokontany, « la commune est secondaire par rapport au fokontany en matière de gestion foncière... Elle ne prend pas vraiment en charge la gestion foncière. »24 Concernant les opérations de reconnaissance domaniale, les Maires et/ou leurs adjoints s’appuient sur le Chef Fokontany car ils ne connaissent pas les limites des terrains des usagers. Finalement, les usagers perçoivent et utilisent la commune comme un recours lorsque le fokontany ne peut plus remplir certaines fonctions. Il en est de même pour le règlement des litiges fonciers. On observe, en effet, le même cheminement dans le recherche de la médiation, avec un acteur supplémentaire, le Tribunal de Première Instance.

B- Le règlement des litiges fonciers

1- Types de litiges et acteurs impliqués dans leur règlement

D’après les entretiens effectués auprès des usagers, des Chefs Fokontany, des Raiamandreny, des Maires et de leurs adjoints, et des Présidents des Conseils communaux, les types de conflits rencontrés le plus souvent peuvent être classés en 5 groupes : Les litiges entre héritiers, les double (triple ou quadruple) ventes ou locations, les conflits de limites ou tentatives d’accaparement, les litiges liés à la concurrence pour la culture d’une terre (tsindrifafy) et les conflits entre locataires et propriétaires. Les acteurs intervenant dans le règlement des litiges fonciers sont : les associations paysannes, le fokontany, la commune et le Tribunal de Première Instance, situé à Ambatondrazaka. Il n’existe pas de cadre juridique dans lequel les associations ont un rôle de médiation, il est d’ailleurs rarement inscrit dans leurs statuts. Le Président du Conseil communal, quant à lui, « fait fonction de conciliateur et d’arbitre dans les litiges d’ordre individuel ou collectif susceptibles d’être réglés par de tels procédés en tant que raiamandreny. » (Art. 129, Loi N°94- 008, J.O. 2304 du 5 juin 1995). Dans les faits, cette compétence est souvent exercée par les Maires et/ou leurs adjoints. Enfin, le Tribunal de Première Instance a évidemment toutes compétences pour juger un litige lorsqu’il relève de sa juridiction.

24 Entretien réalisé auprès du second adjoint au Maire de la Commune d’Ambatondrazaka Suburbaine, le 7 juillet 2004.

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2- Les modes de règlement des litiges

Quelle que soit l’instance devant laquelle le litige est porté, le mode de règlement reste le même : les associations, les fokontany, les communes et le tribunal font appel à des témoins et/ou des membres des familles des protagonistes, à des propriétaires de parcelles voisines et/ou à des Raiamandreny. Ceci implique que les droits d’un individu sur une terre n’existent et ne sont considérés que dans la mesure où ils sont reconnus et légitimés par la communauté. Actuellement, le seul moyen de confirmer ou d’infirmer les droits d’un individu sur une terre, dans le cadre d’un règlement de litige, est le recours aux témoignages des membres du fokonolona auquel il appartient. Ainsi, les droits de jouissance sur les terres sont collectifs puisqu’ils n’existent que s’ils sont reconnus par la collectivité. Mais ils sont profondément individuels car ce sont les droits de jouissance d’une personne que le fokonolona reconnaît et légitime.

3- Les associations

Certaines associations paysannes ont été créées dans le but même de pacifier les rapports liés à la terre. « La raison d’être de l’association est de régler les conflits, on est ensemble pour régler les litiges de l’intérieur. On est toujours là en tant que témoins de la propriété des uns et des autres dans l’association. »25 Dans la mesure où les membres d’une association se connaissent et identifient leurs terres, les conflits sont rares et souvent peu graves. Il s’agit le plus souvent de conflits de limites. Hors de ce contexte ou lorsque la médiation au sein de l’association n’a pas abouti, les conflits sont gérés par le fokontany. Et tant qu’ils peuvent être réglés à ce niveau, les protagonistes ne font pas appel à l’arbitrage communal. « La plupart des litiges ont lieu sur des terrains limitrophes ou entre héritiers. Certains conflits ne sont pas réglés ici, comme par exemple la question des héritages, mais les problèmes de délimitation sont souvent réglés au niveau du fokontany. Quand ce n’est pas le cas, on envoie l’affaire à la commune, puis au Tribunal. »26

4- Le fokontany

25 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany et des Raiamandreny d’Ampasimbola, le 4 septembre 2004. 26 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany et des Raiamandreny de Morarano, le 7 septembre 2004.

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Tous les acteurs concernés rencontrés perçoivent le chef fokontany comme un médiateur, en aucun cas son rôle n’est de trancher. Il favorise le consensus, fait appel à des témoins et/ou des Raiamandreny. Sa fonction est de créer l’opportunité de la réconciliation, mais jamais de prendre une décision. « Pour le règlement des litiges fonciers, le Chef fokontany fait appel aux Raiamandreny et à des témoins choisis par les protagonistes, si ça ne marche pas, il descend sur le terrain pour attester des limites. Les litiges sont réglés au niveau du fokontany si le Chef fokontany fait bien son travail. »27 En fait, nous avons relevé que le règlement des conflits au niveau du fokontany dépend plus de leur nature que de l’efficacité du Chef Fokontany.

Parmi les litiges les plus fréquents dans la zone du projet, les tsindrifafy ou concurrence pour la mise en culture d’une terre et les conflits entre héritiers font l’objet d’un arbitrage par la Commune ou d’un jugement du Tribunal de Première Instance (TPI) presque systématiquement.

5- La commune

Lors de l’arbitrage communal ou de la procédure judiciaire, les témoins, voisins et/ou familles des protagonistes demeurent les éléments clefs du règlement du litige. La principale différence avec la médiation par le Chef fokontany est la possibilité de prendre une décision, ce qui est vrai surtout pour le TPI dans la mesure où les responsables communaux répugnent à trancher, même si cela fait partie de leurs attributions ; ils peuvent avoir fonction d’arbitre en cas de nécessité. Ainsi, les usagers ne sollicitent cet arbitrage que dans les cas les plus complexes et notamment les conflits entre héritiers, pour lesquels il peut arriver à la Commune de trancher, mais de façon exceptionnelle.28

6- Le Tribunal de Première Instance

Outre les arguments évoqués plus haut concernant le rôle central du Chef Fokontany dans la communauté, les raisons pour lesquelles les usagers évitent au maximum de pousser un litige jusqu’au TPI sont liées au coût de la médiation communale ou de la procédure judiciaire. En effet, d’une part le service de médiation communale est payant, et d’autre part les protagonistes doivent dédommager leurs témoins quand ceux-ci se déplacent à la Commune ou

27 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany et des Raiamandreny de Maritampona, le 16 septembre 2004. 28 Nous n’avons rencontré qu’un seul cas lors de nôtre enquête : « Parfois nous [les adjoints au Maire] descendons sur le terrain et nous divisons la terre entre héritiers. » Entretien réalisé auprès du 2ème Adjoint au Maire de la Commune Suburbaine d’Ambatondrazaka, le 7 juillet 2004.

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au Tribunal. Par ailleurs, les usagers possèdent peu de pièces justificatives et elles n’ont souvent aucune valeur au regard de la loi, le recours en justice devient alors très risqué, car le jugement est un acte définitif après lequel il est difficile de reprendre une négociation, mais surtout parce que la méconnaissance de la situation par les magistrats a pu amener certaines personnes jouissant légitimement de la terre à être entièrement expropriées.

En recoupant les nombreux entretiens réalisés, l’on s’aperçoit que les usagers ne désirent pas voir une quelconque instance s’immiscer dans leur gestion des conflits. Effectivement, la demande de sécurisation foncière de la part des paysans est forte. Mais elle est surtout perçue comme un moyen de faciliter les négociations entre membres du fokonolona et le règlement des litiges au niveau du Fokontany ou des diverses associations d’usagers. Dans l’éventualité de la création d’un guichet foncier communal ou intercommunal, de nombreux usagers insistent sur l’importance de laisser une grande part de la gestion des terres aux associations ou organisations paysannes. « [le guichet foncier] est vital pour les paysans car ils n’ont pas de papiers. Et c’est très important de régler les litiges fonciers. Mais il vaut mieux que l’association ait une grande place dans la gestion car on n’a pas assez de recul sur le fonctionnement de la commune. »29

Mais la demande de sécurisation foncière de la part des usagers émane aussi de la peur de l’accaparement de leur terre par des personnes étrangères. La crainte du « parachutage » d’un individu qui aurait fait immatriculer aux Domaines un terrain non titré mais déjà exploité est récurrente. « Entre les propriétaires, il n’y a pas vraiment de problèmes, mais comme on n’a pas de titres, on a peur de l’accaparement éventuel des terres par les étrangers. »30 « Il faut faire progresser coûte que coûte cette question foncière car c’est la source de grands problèmes pour nous les paysans. Car les gens les plus instruits exploitent les autres. S’ils savent qu’un terrain n’est pas titré, ils pourront se l’accaparer. »31

Ainsi, deux éléments essentiels au moins sont à prendre en compte dans l’offre de sécurisation foncière faite aux usagers : d’abord, il existe une volonté et un besoin de protection contre les tentatives d’accaparement émanant de personnes étrangères à la communauté, ensuite les usagers présentent une forte revendication d’autogestion des relations foncières au sein de la communauté.

29 Entretien réalisé auprès d’un Conseiller communal de la commune suburbaine d’Ambatondrazaka (Fokontany d’Antanambehivavy be), le 15 juillet 2004. 30 Entretien réalisé auprès d’un Raiamandreny du Fokontany d’Ambohimandroso, le 20 juillet 2004. 31 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany d’Ambohimandroso, le 16 juillet 2004.

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Troisième partie : Le fonctionnement communal dans la zone du projet

Le projet de guichet foncier s’appuie essentiellement sur la structure communale et sur les fonctions des communes et des fokontany en matière de gestion domaniale et foncière, qu’elles soient légitimes ou légales. Afin de mieux comprendre dans quel contexte ces guichets fonciers vont être mis en place, nous analysons trois points : - le fonctionnement financier des communes de la zone du projet, - leur capacité de prise en charge du développement économique et social - et leur fonctionnement démocratique, tel qu’il est perçu par les élus et les administrés.

I- Le fonctionnement financier des communes

Nous présentons ici deux aspects du fonctionnement administratif des communes : - la gestion budgétaire, - et la gestion de la fiscalité, c’est à dire la mise en œuvre de la perception et du recouvrement des impôts et taxes communales.

A- La gestion budgétaire communale32

1. Le cadre légal

En tant que collectivités territoriales décentralisées, les communes sont dotées de la personnalité morale et jouissent de l’autonomie financière (Art. 1, Loi N° 94-008, J.O. 2304 du 5 juin 1995). Dans le cadre prévu par la loi, elles gèrent elles-mêmes leurs finances et établissent leur budget. Celui-ci est bien entendu composé en deux parties, celle des recettes et celle des dépenses, comportant chacune une section fonctionnement et une section investissement. Les dépenses obligatoires sont fixées par la loi et comprennent notamment, les dettes exigibles et la couverture des déficits antérieurs, les salaires des personnels (Art. 17, Loi N° 95-005, J.O. 2306 du 3 juillet 1995). « Les dépenses obligatoires doivent faire l’objet d’inscription des crédits suffisants pour assurer, soit le fonctionnement des services, soit l’accomplissement des obligations auxquelles elles s’appliquent. » (Art. 17, Loi N° 95-005, J.O. 2306 du 3 juillet 1995).

32 Cf. Annexe 8 pour un exemple de budget communal : compte administratif 2003 de la commune d’Amparafaravola

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La structure d’un budget communal se présente comme suit :

Recettes Dépenses

Fonctionnement Investissement Fonctionnement Investissement

Chapitre I : impôts directs Chapitre X : Chapitre I : Bureaux de la Chapitre X : Dettes Investissements sur fonds commune et des services exigibles propres de la collectivité percepteurs Chapitre II : impôts Chapitre XI : Subventions Chapitre II : Service Chapitre XI : Acquisitions indirects d’équipement d’hygiène, d’assistance et d’enseignement Chapitre III : Revenus du Chapitre XII : Participation Chapitre III : Voirie et Chapitre XII : Construction domaine et des services à des travaux d’équipement services industriels d’immeubles Chapitre IV : Produits Chapitre XIII : Emprunts Chapitre IV : Chapitre XIII : Travaux divers et accidentels Fonctionnement du garage d’infrastructures de la commune Chapitre V : Produits des Chapitre XIV : Aliénations Chapitre V : Chapitre XIV : Acquisition ristournes des prélèvements Fonctionnement des autres de gros matériels et des contributions services de la commune Chapitre VI : Subventions, Chapitre XV : Chapitre VI : Dépenses dons et legs, contribution et Immobilisations pour communes participation fonds de sinistres concours Chapitre VII : Avances Chapitre XVI : Chapitre VII : Dépenses Recouvrement de prêts et diverses et imprévues avances terme Chapitre VIII : Produits de Chapitre XVII : Divers et Chapitre VIII : réalisation des biens avances à terme Contributions et immobiliers et des valeurs subventions mobilières Chapitre IX : Recettes Chapitre IX : Fonds de additionnelles concours, prêts, dons, allocations

En matière d’investissement, les communes doivent disposer d’un plan triennal ou quinquennal programmant leurs investissements (Art. 6, Loi N° 95-005, J.O. 2308 du 3 juillet 1995). Les budgets présentés doivent être équilibrés entre les dépenses et les recettes. Les budgets primitifs et les comptes administratifs communaux sont soumis au contrôle de légalité du représentant de l’Etat territorialement compétent, en l’occurrence, le sous-préfet.

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« Les Présidents des Bureaux Exécutifs des Collectivités Territoriales Décentralisées préparent les budgets de leur collectivité respective et les présentent à leur Conseil respectif. » (Art. 7, Loi N°95-005, J.O. 2308 du 3 juillet 1995.) « Le vote du budget primitif et additionnel est effectué par délibération de chaque conseil au cours, respectivement de la 2ème session de l’année en cours et de la première session de l’année suivante » (Art. 8, Loi N° 95-005, J.O. 2306 du 3 juillet 1995).

2. Le vote du budget communal

D’après les témoignages recueillis auprès des Maires et des Conseillers communaux, le vote du budget est conforme aux modalités prévues par la loi. Cependant, dans toutes les communes étudiées, il semble que cette délibération soit considérée comme une formalité dans la mesure où les Conseillers se contentent d’approuver le budget proposé par le Maire. Ceci se comprend aisément lorsque l’on observe la structure des budgets communaux. En effet, la part des dépenses de fonctionnement, comprenant principalement les salaires et indemnités des personnels et élus et l’entretien du patrimoine communal, est largement supérieure à celle des dépenses d’investissement.

3. Les dépenses d’investissement et de fonctionnement

A titre d’exemple, citons la commune d’Amparafaravola où les dépenses de fonctionnement représentent 95% du montant total des dépenses pour l’exercice 2003. A l’examen du compte administratif 2003 de la commune d’Ampitatsimo, la tendance semble s’équilibrer : les dépenses de fonctionnement ne représentent que 60% des dépenses totales33. Cependant, les dépenses d’investissement sont essentiellement composées des dettes et arriérés de salaires de l’exercice précédent34. En effet, la nomenclature budgétaire ne permettant pas l’inscription de dettes de fonctionnement, celles-ci sont assimilées aux dettes exigibles d’investissement.

Par ailleurs, une analyse en détail des comptes administratifs et des budgets communaux s’avère très difficile pour plusieurs raisons. D’abord, la volonté de respecter l’équilibre et la nomenclature budgétaires pousse les élus et les trésoriers communaux à inscrire des

33 Cf. Annexe 9 34 Les arriérés de salaire représentent 80% des dépenses d’investissement de la commune d’Ampitatsimo.

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chiffres ne recouvrant aucune réalité35. Ensuite, certaines dépenses de même nature, telles que les dépenses de personnel, sont inscrites dans des chapitres différents, sans observation36.

Ces commentaires nous amènent à conclure à un manque de formation des employés communaux et des élus en matière d’administration financière. Ceci explique notamment le désintérêt des conseillers communaux pour les délibérations sur les finances communales. La commune d’Amparafaravola est la seule à bénéficier d’une gestion budgétaire claire et rigoureuse, effectuée par un comptable public responsable devant la Cour des comptes. L’examen des comptes des communes d’Ambohimandroso et de Sahamamy ne relève d’aucun intérêt dans la mesure où elles ne disposent que d’un budget prévisionnel élaboré à partir de celui de la commune d’Amparafaravola37.

4. Les subventions et dotations de l’Etat

Rappelons que les communes d’Ambohimandroso et de Sahamamy étant nouvelles, elles fonctionnent essentiellement sur les dotations de l’Etat et les subventions à l’installation des nouvelles communes. Toutes les communes rurales de deuxième catégorie bénéficient d’une dotation annuelle de l’Etat d’un montant de 30 millions de FMG (Loi N° 96-035 du 30 décembre 1996 portant loi de finance pour 1997). La commune d’Amparafaravola, en tant que commune rurale de première catégorie, bénéficie d’une dotation de l’Etat de 64 millions de FMG. Elles peuvent faire la demande de subventions supplémentaires, notamment pour la réalisation de programmes d’investissements. En fait, les communes étudiées vivent essentiellement de ces dotations et subventions de l’Etat, elles peuvent représenter jusqu’à 70% des recettes totales. C’est le cas d’Ampitatsimo par exemple. A Amparafaravola, ces dotations et subventions couvrent 45% du montant des recettes totales38. Selon les textes (Loi N° 96-035 du 30 décembre 1996, Circulaire 001-97 du 5 mars 1997), ces aides étaient allouées aux communes par l’Etat pour les aider à s’installer, à réhabiliter ou à construire des bureaux, et à entretenir des Centres de Santé de Base (CSB) et des Ecoles Primaires Publiques (EPP). Or, d’une part ces dotations et

35 La nomenclature budgétaire prévoit une part de crédits affectés aux investissements de 15% sur le budget en cours. Ainsi, dans le compte administratif de la commune d’Ampitatsimo par exemple, un montant de 10 millions de FMG est inscrit dans ce chapitre sans autre observation. 36 L’examen du compte administratif de la commune suburbaine d’Ambatondrazaka par exemple, révèle une confusion évidente entre les salaires des employés communaux et les indemnités de session des élus. On trouve des dépenses d’indemnités à la fois dans le chapitre correspondant et dans celui des dépenses de personnel. 37 « On a fait le budget à partir de celui d’Amparafaravola. On s’est servi de leur budget comme budget de référence, comme modèle. On a divisé les chiffres du budget d’Amparafaravola en trois pour établir le nôtre. » Entretien réalisé auprès du Maire de la commune d’Ambohimandroso le 1er septembre 2004. 38 Cf. Annexe 10

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subventions sont devenues permanentes et d’autre part, elles sont attribuées aux dépenses de fonctionnement des communes.

Ainsi, on observe que les communes étudiées vivent principalement des fonds attribués par l’Etat. Elles ont peu de ressources propres et donc peu d’autonomie financière. Cette situation est due notamment à la faiblesse des ressources fiscales communales. « Le budget est insuffisant car les subventions de l’Etat sont faibles. La perception et le recouvrement des impôts doivent être améliorés. »39

B- La gestion de la fiscalité communale : les impôts directs

Nous nous sommes principalement intéressés aux impôts et taxes en lien avec l’exploitation ou la jouissance de la terre, soit l’Impôt Foncier sur les Terrains et les ristournes. Cependant, nous ferons un point sur les autres taxes communales.

1. L’Impôt Foncier sur les Terrains (IFT) : émission du rôle et recouvrement

La faiblesse des rentrées fiscales des communes est d’abord due aux difficultés de perception et de recouvrement des impôts directs, liées à une paralysie du système administratif. Ici, nous nous penchons surtout sur le cas de l’IFT (Impôt Foncier sur les Terrains) et de l’IFPB (Impôt Foncier sur la Propriété Bâtie)40, impôts attribués à 100% aux communes par la loi de finances de 1998. Pour le calcul de l’impôt, les terrains sont répartis en six (6) catégories. « L’impôt est obtenu par application d’un tarif exprimé en Ariary par ha de la première à la cinquième catégorie voté pour quatre ans par le Conseil municipal pour chaque catégorie et

39 Entretien réalisé auprès du Maire de la commune de Feramanga Nord, le 8 juillet 2004. 40 En fait, l’IFPB ne touchant que les chefs lieux de communes rurales, nous nous intéressons surtout ici à l’IFT.

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un pourcentage de la valeur vénale pour la sixième. A défaut d’un vote de tarif et taux, sont reconduits ceux de la période antérieure. »41 (Art. 10.02.07, CGI 2004).

Selon le Code Général des Impôts 2004, la préparation des rôles pour l’IFT et l’IFPB revient à la commune alors que leur émission et leur validation reviennent à l’administration fiscale, soit, pour les communes qui nous intéressent, le Centre Fiscal Régional (CFR) d’Ambatondrazaka. Dans la pratique, et selon les entretiens effectués auprès du Chef du Centre Fiscal Régional et des trésoriers/percepteurs des communes d’Ambatondrazaka suburbaine, Ampitatsimo et Feramanga Nord, on observe un malentendu quant à ces fonctions. En effet, les trésoriers des communes précitées déclarent attendre les avis d’imposition ou avertissements émis par le Centre Fiscal qui devraient leur parvenir sous peu42, alors que le Chef du Centre Fiscal affirme ne plus être compétent pour l’émission des rôles pour l’IFT et l’IFPB43. Cette paralysie semble due à un manque d’information de part et d’autre sur la répartition des compétences entre les communes et l’administration fiscale pour la préparation et l’émission des rôles.

Si la préparation du rôle pour l’IFT revient aujourd’hui aux communes, il faut signaler que nombre d’entre elles ne disposent pas de leur code géographique (attribué par les Services Fonciers), permettant de lancer le recensement fiscal, matériau indispensable pour la détermination de l’assiette de l’impôt. Les communes d’Ambatondrazaka suburbaine, Ampitatsimo, Feramanga Nord et partagent le même code géographique. Par ailleurs, l’émission des états (caractéristiques des exploitations et des exploitants, catégories des terrains et montant à payer), préalable indispensable à la réalisation du rôle, requiert soit l’acquisition du matériel informatique nécessaire, soit la possibilité de mobiliser suffisamment

41 Ces six catégories sont : -Première catégorie : cacao, café, canne à sucre, cocotiers, coton, girofle, palmiers à huile, plantes à parfum, poivre, sisal, vanille. –Deuxième catégorie : bois, forêts, lacs, marécages. –Troisième catégorie : cultures maraîchères et vivrières, riz et autres plantations non dénommées au présent article. – Quatrième catégorie : pâturages naturels et artificiels, terrains non exploitables, terrains en jachère. - Cinquième catégorie : terrains exploitables non exploités. –Sixième catégorie : terrains à usage autre qu’agricole, terrains non bâtis situés dans le périmètre urbanisé de la commune fixé par arrêté du Maire en conformité, s’il existe, avec le schéma d’urbanisme ainsi que les terrains d’implantation d’une construction hors d’état d’usage et les terrains d’implantation d’une construction de caractéristique sans rapport avec la surface et la localisation du terrain, à l’exclusion des terrains destinés à la culture rizicole, maraîchère, vivrière et à la culture d’arbres fruitiers qui restent soumis au taux fixé pour leur catégorie : 1p100 de la valeur vénale du terrain. 42 « Le problème pour l’IFT ou l’IFPB est que le rôle arrive en retard. C’est le Centre Fiscal Régional qui doit nous envoie le rôle et les avertissements. Il doit arriver bientôt. » Entretien réalisé auprès de la Secrétaire Trésorière de la commune d’Ampitatsimo, le12 juillet 2004. 43 « L’IFT revient à la commune, l’édition du rôle revient à la commune et l’homologation au Centre Fisc l Régional. » Entretien réalisé auprès du Chef du Centre Fiscal Régional d’Ambatondrazaka, le 16 août 2004.

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d’employés pour faire ce travail manuellement. Etant donné l’état des moyens humains et techniques des communes étudiées, il est bien évident qu’aucune d’entre elles n’est aujourd’hui en mesure d’effectuer cette tâche.

2. La situation actuelle44

Actuellement, le dernier rôle émis date de 1997. Les communes étudiées continuent de percevoir les arriérés sur ce rôle alors qu’ils sont frappés par la prescription quadriennale inscrite dans le Code Général des Impôts. En fait, seuls les Délégués Administratifs d’Arrondissement sont autorisés à recouvrer l’IFT dans la mesure où c’est un impôt direct. Pour cela, ils s’appuient sur les Chefs Fokontany auprès de qui ils distribuent les avertissements. Lui- même les répartit entre les habitants et perçoit l’argent. Puis, le DAA se déplace pour recouvrer les sommes perçues par les Chefs Fokontany, ou, ces derniers les amènent eux-mêmes aux DAA ou directement au Trésor. Malgré cette situation, les budgets primitifs des communes étudiées prévoient de très fortes rentrées d’argent liées au recouvrement des impôts fonciers. Les Maires interrogés justifient l’importance de ces chiffres par l’imminence de l’arrivée du rôle et des avertissements en cours d’émission au Centre Fiscal Régional.

3. Le cas des communes d’Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso

Pour les communes d’Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso, la situation est différente. En effet, comme nous l’avons vu, Amparafaravola a été l’une des communes pilotes du projet PAIGEP visant à renforcer la fiscalité locale en attribuant l’émission des rôles pour les impôts directs aux communes. Actuellement, le rôle pour l’IFT pour les trois communes45 est en cours d’impression, sur la base d’un recensement effectué en 1999. Selon le Code Général des Impôts, le recensement fiscal est fait à partir des déclarations des propriétaires et/ou occupants des terrains. Dans le cas d’Amparafaravola, le recensement a été fait par une ONG employée par le projet PAIGEP. (Hors du cadre de ce projet, il est fait par les employés de la commune encadrés par les fonctionnaires du Centre Fiscal Régional.) Lors des entretiens réalisés dans différents fokontany de la commune, nous avons remarqué d’une part que certains d’entre eux n’ont pas fait l’objet de ce recensement et d’autre part que les terrains de l’ex-Somalac en ont été exclus.

44 Cf. Annexe 11 pour la part de l’IFT dans les ressources communales 45 Les communes d’Ambohimandroso et Sahamamy étant récentes, elles continuent d’être comprise dans le code géographique d’Amparafaravola et par conséquent dans les rôles pour l’IFT et l’IFPB.

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4. Recensement fiscal et comportements des usagers du foncier

Selon les témoignages recueillis auprès des Chefs Fokontany et des Raiamandreny, les occupants et/ou propriétaires46 de terrains déclarent rarement, voire jamais, la totalité de leurs parcelles. Certains locataires se disent propriétaires des terrains qu’ils exploitent tandis que des usagers fuient le recensement de peur de payer des impôts qu’ils considèrent démesurés au regard de leur niveau de vie47. L’on constate ainsi toutes sortes d’attitudes parfois très contradictoires devant l’impôt. Certains usagers demandent leur inscription sur le rôle car ils assimilent le paiement de l’impôt à une forme de reconnaissance de leurs droits sur la terre par l’administration. Ils considèrent parfois l’impôt comme une forme de sécurisation foncière48.

Ces comportements ainsi que l’impossibilité de vérifier les déclarations des usagers entraînent au moins deux conséquences. D’abord, un rôle central du Chef Fokontany dans la réalisation du recensement fiscal. Il est, en effet, le seul à connaître suffisamment la population pour confirmer ou infirmer les déclarations faites par les usagers. Ensuite, les rôles sont souvent incomplets, et l’impôt frappe alors la population de façon hasardeuse, voire arbitraire.

En fait, les impôts directs sont très peu et très mal recouvrés, pour toutes les raisons évoquées plus haut. Ainsi, les principales ressources des communes sont les taxes locales telles que les ristournes (taxe sur les produits agricoles sortant de la commune), les taxes sur les bicyclettes, sur les places de marchés ou encore sur les bovidés. La perception de ces taxes exige moins de préparatifs et, par conséquent, correspond plus aux moyens techniques et humains dont les communes disposent.

46 Nous employons le terme utilisé par les usagers, mais nous l’entendons au sens de propriétaires dont les droits sont reconnus par la communauté et non par l’administration. 47 « Il y a beaucoup de gens qui ont des parcelles non déclarées ou bien qui ont changé de propriétaire. Il y a un manque d’information pour la perception, pour le rôle, il y a des gens qui fuient l’impôt. » Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany de Feramanga Nord le 15 août 2004. 48 « Il y a beaucoup de gens qui ne sont pas inscrits sur le rôle, donc ils ne paient pas. Ils ont même demandé aux gens de la commune de faire le recensement. Les gens sont motivés pour payer car ça les rassure pour le droit de propriété. » Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany de Mangalaza, le 13 juillet 2004.

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C- Les ristournes communales

Ici, nous nous intéressons aux ristournes sur les produits agricoles et notamment sur le paddy pour deux raisons : cette taxe est liée à l’exploitation de la terre et constitue donc un enjeu particulier dans notre étude et, elle constitue une ressource conséquente pour les communes telles qu’Amparafaravola dont la production en paddy est largement excédentaire. Pour la commune d’Ampitatsimo, par exemple, les ristournes sur les produits agricoles représentent plus de 10% du montant total des recettes : pour l’année 2003, les recettes totales s’élèvent à 119 747 908 FMG et les ristournes sur les produits agricoles à 14 625 970 FMG49. Pour la commune d’Amparafaravola, la part de cette taxe dans le montant total des recettes est encore plus importante : pour l’année 2003, sur 386 819 636 FMG de recettes, les ristournes sur les produits agricoles s’élèvent à 70 418 750 FMG.

Les taux des ristournes sont fixés par Arrêté Provincial émanant du Président de la Délégation Spéciale du Faritany50. Concernant le paddy, la répartition est faite comme suit : dix FMG par kilo attribués au fivondronampokontany et vingt FMG par kilo attribués à la commune51. La perception de ces ristournes se fait au niveau des barrières économiques installées à la sortie des limites territoriales des communes ou de la préfecture d’Ambatondrazaka pour les fivondronampokontany d’Ambatondrazaka et d’Amparafaravola.

1. Personnes soumises au paiement de la ristourne

Il existe trois catégories de personnes soumises au paiement de la ristourne : les collecteurs indépendants, les collecteurs employés par les transporteurs et les transporteurs. Ces derniers sont en fait les seuls à exporter le paddy vers d’autres régions, ils sont donc les seuls à passer la barrière installée aux limites de la préfecture de région et à s’acquitter de la ristourne « sous-préfectorale »52. L’exportation de paddy est organisée, entre autres, par les grandes sociétés agricoles telles que SILAC ou la société Roger.

49 Cf. Annexe 11 50 Cf. Annexe 12 51 Selon les dispositions de l’article 78 de la Loi N° 94-007 (J.O. 2304 du 5 juin 1995), les ristournes profitent aux Régions. Ces dernières n’ayant été mises en place que très récemment, les pratiques répartissant ces ristournes entre les budgets des communes et des fivondronampokontany ont continué et ont été légalisées par la Circulaire interministérielle N° 7811-MIAT/SG/DGD/DELED du 14 novembre 1996. 52 Ici, nous considérons la région Alaotra, puisque l’organisation de la perception des ristournes au niveau régional ne correspond pas encore au nouveau découpage fusionnant les régions Alaotra et Mangoro.

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Les collecteurs indépendants se déplacent autour du Lac de commune en commune pour vendre les produits agricoles, ils tentent parfois d’écouler le paddy collecté auprès des sociétés agricoles. Les collecteurs employés par les transporteurs se déplacent eux aussi de commune en commune pour récupérer le paddy pour le compte des sociétés agricoles, ils disposent d’une attestation ou d’un certificat émanant de la société qui les emploie, les dispensant de payer les ristournes communales. Les paysans résidents d’une commune, disposant d’un certificat de résidence établi et visé par le Chef Fokontany, ont l’autorisation de sortir leur paddy de la commune sans payer la ristourne.

2. La perception communale des ristournes

Parmi les six communes étudiées, quatre disposent de barrières de ristournes, Amparafaravola, Ambohimandroso, Ampitatsimo et Feramanga Nord. La commune d’Ambatondrazaka suburbaine n’a jamais installé de barrière et la commune de Sahamamy dispose d’une barrière mais n’a pas encore recruté de garde barrière.

La perception de ces ristournes communales se fait de façon aléatoire. D’abord, les barrières communales ne fonctionnent que la journée, entre 6h et 18h. Elles restent ouvertes perpétuellement et les différents collecteurs ont tout le loisir de passer sans s’acquitter de la taxe. Ensuite, il n’y a que deux employés par barrière, un policier communal et un percepteur contractuel, souvent saisonnier53, rémunéré sur un pourcentage des recettes nettes. Enfin, au cours des entretiens effectués auprès des gardes barrières et des percepteurs/trésoriers des différentes communes, nous avons réalisé qu’il n’existe aucune information claire quant aux règles de perception des ristournes. Au sein d’une même commune, le garde barrière, le trésorier et le Maire peuvent donner trois informations divergentes sur les catégories de collecteurs soumis à la ristourne communale. Les seules règles de perception que l’on peut recouper sont celles concernant les personnes non soumises au paiement de la ristourne communale. C’est à dire les transporteurs munis d’une autorisation régionale de collecte, délivrée et signée par leur fivondronampokontany de rattachement et par le Préfet de région, et les paysans disposant d’un certificat de résidence visé par le Chef Fokontany.

53 En dehors de la période de campagne, c’est à dire la période durant laquelle on récolte le paddy, les communes emploient rarement des gardes barrières dans la mesure où les cultures de contre saison sont peu ou pas du tout taxées. Seules les communes où les cultures de contre saison représentent une part importante de la production agricole emploient des gardes barrières à l’année. Signalons que ces derniers ne sont pas des employés communaux pour autant et qu’ils demeurent rémunérés au pourcentage.

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Finalement, il n’existe pas réellement de règles de perception. Un collecteur de paddy exerçant dans la commune d’Amparafaravola peut s’acquitter de la ristourne auprès des gardes barrière d’Ambohimandroso. Ou encore, un collecteur ayant exercé et payé la taxe dans la commune d’Ampitatsimo et se déplaçant pour collecter dans la commune de Feramanga Nord, n’aura pas à payer une deuxième fois s’il dispose de la quittance délivrée par la première commune, les gardes barrière estimant qu’il s’est déjà acquitté de la ristourne.

La faiblesse des moyens techniques et humains des communes se manifeste là encore : les gardes barrière n’ont aucun moyen de contrôler le tonnage déclaré par les collecteurs, ils se contentent donc d’en faire une estimation. Par ailleurs, certains gardes barrière ne disposent pas de locaux. Le contrôle et la perception s’effectuent alors en extérieur. Le seul élément dont disposent tous les gardes barrière est le cahier de quittances à souche, confié par la commune concernée, sur lequel ils inscrivent les renseignements tels que le nom et l’origine du collecteur, le tonnage estimé transporté, la date de passage et parfois le numéro de plaque d’immatriculation du camion. Une quittance est ainsi délivrée au collecteur qui lui permettra de passer toutes les autres barrières communales sans avoir à payer à nouveau cette taxe, même s’il collecte du paddy dans ces communes.

Il n’existe pas non plus de règles précises quant au versement des sommes recouvrées. Les gardes barrière déposent l’argent à la Commune ou directement sur son compte bancaire, ils conservent le cahier de quittances jusqu’à ce qu’il soit épuisé, il revient ensuite à la commune. La fréquence des versements n’est pas non plus déterminée. Selon les entretiens effectués, lorsque les gardes barrière ont accumulé « suffisamment » d’argent, ils le déposent à la commune ou à la banque. Ainsi, la perception des ristournes manque d’organisation. Cela est lié, parfois, à la mauvaise volonté de certains collecteurs, pour qui la fraude est facile et peut-être tentante dans la mesure où il n’existe aucun moyen de rétorsion contre les mauvais payeurs.

3. Perception effectuée par le fivondronampokontany54

Au niveau de la barrière régionale de par contre, la perception est beaucoup mieux organisée, les collecteurs sont nombreux et se relaient pour être présents jours et nuits, ils disposent d’un service de police et de gendarmerie. Ils ont le matériel

54 Cf. Annexe 13

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nécessaire : un pont bascule, des cahiers de quittance, et une barrière fermée jour et nuit, permettant un contrôle efficace et rigoureux du passage des transporteurs. Ainsi, les fivondronampokontany d’Ambatondrazaka et d’Amparafaravola perçoivent des ristournes conséquentes leur permettant d’assurer leur fonctionnement, selon les témoignages recueillis auprès des Présidents des Délégations Spéciales.

La commune de , située à la sortie de la région Alaotra, profite des infrastructures des fivondronampokontany : elle récupère la part communale des ristournes non perçues par les communes lieux de collecte (ou la différence entre le montant perçu lors de l’estimation du tonnage par les gardes barrière communaux et le tonnage pesé par ceux des fivondronampokontany), selon un accord passé entre les communes de la région et celle de Manakambahiny ouest.

4. Les autres taxes communales55

L’analyse des budgets communaux révèle que les autres taxes communales, telles que les taxes sur les bicyclettes, les tickets de marché, les cérémonies coutumières ou les bovidés, rapportent peu. Cependant, d’après les entretiens réalisés auprès des Maires et des trésoriers/ percepteurs communaux, la perception de ces taxes est relativement bien organisée et le recouvrement satisfaisant. En effet, la perception et le contrôle sur le paiement de ces taxes est plus aisé dans la mesure où il s’effectue au chef lieu de la commune. Ainsi, les taxes communales les moins rentables sont les mieux recouvrées. « La gestion financière de la commune est encourageante car nous avons bien mené la perception et le recouvrement pour les droits et taxes comme les tickets de marché : on a recouvré les arriérés depuis 2002. Dans quelques chapitres, nous avons des excédents de recettes, comme les taxes sur les appareils vidéo ou les droits de réconciliation. »56

55 Cf. Annexe 11 56 Entretien réalisé auprès du Maire de la commune d’Amparafaravola, le 16 août 2004.

52

Dans l’éventualité de l’installation d’un guichet foncier communal ou intercommunal, il serait important de prendre en compte cette gestion aléatoire de la fiscalité communale. Il faudrait considérer en outre la faiblesse des ressources communales et envisager les moyens d’un autofinancement du guichet foncier à long terme puisque dans l’immédiat, aucune commune ne peut dégager les fonds nécessaires pour alimenter ce service, si son propre fonctionnement ne fournit pas les liquidités nécessaires.

Concernant l’impôt foncier sur les terrains, les parcellaires que fourniraient des opérations de reconnaissance des droits de jouissance ou de dotations à la commune permettraient de fonder le calcul de l’assiette sur une base moins incertaine. Par ailleurs, dans le cas des communes d’Ambatondrazaka suburbaine, d’Ampitatsimo et de Feramanga Nord, un des moyens de relancer la fiscalité communale serait la création d’un Organisme Public de Coopération Intercommunale (OPCI) destiné à la réalisation du recensement fiscal et aux préparatifs requis pour l’émission du rôle par le Centre Fiscal Régional. En fait, cet OPCI devient même indispensable dans la mesure où les communes ne disposent que d’un code géographique pour quatre. Par contre, cette proposition ne relèverait d’aucun intérêt dans le cas des communes d’Amparafaravola, Sahamamy et Ambohimandroso puisque l’émission du rôle en cours et le recouvrement des impôts qui s’ensuivra concernent déjà les trois communes, le projet ayant été lancé à l’époque où elles n’en formaient qu’une seule.

Dans le cas des ristournes, seuls une amélioration et un renforcement des moyens techniques et humains des communes permettraient le perfectionnement de la perception. Ceci n’est envisageable que dans la mesure où les communes acquièrent des moyens supplémentaires par ailleurs.

En conclusion, la prise en charge par le projet des dépenses liées à l’installation et au fonctionnement des guichets fonciers communaux ou intercommunaux est inévitable dans une première phase. A court terme et dans la mesure où le guichet foncier communal ou intercommunal est un des aspects du Programme National Foncier lancé par le Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche, une des solutions envisageable serait une subvention de l’Etat octroyée aux communes initiant ce projet.

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La faiblesse des ressources des communes entraîne bien évidemment des conséquences dans leurs capacités à prendre en charge et à mettre en œuvre le développement économique et social de leur localité. Des communes utilisant leurs fonds principalement pour leur fonctionnement et dépendant des dotations et subventions de l’Etat n’ont bien sûr pas les moyens d’initier des projets de développement. Dans ce contexte, comment ce rôle est-il assumé par les communes étudiées ?

II- La mise en oeuvre du développement économique et social communal

1. Les compétences légales des communes

Selon les textes en vigueur, la commune a toutes compétences pour prendre en charge et mettre en œuvre le développement économique et social de sa localité. « Les domaines de compétences de la commune ont trait notamment à : l’identification des principaux besoins et problèmes sociaux rencontrés au niveau de la commune ; la mise en œuvre d’opérations qui sont liées à ces besoins et problèmes ; la définition et la réalisation de programmes d’habitat et des équipements publics à caractère urbain ; (…) ; la réalisation d’actions d’aide sociales ; les opérations de voirie, d’assainissement, d’hygiène et d’enlèvement des ordures ménagères ; (…) ; la gestion de son patrimoine propre ; la construction et la gestion des équipements et infrastructures socio-sportifs. » (Art. 15, Loi N° 94-007, J.O. 2304 du 5 juin 1995).

2. Les Plans Communaux de Développement (PCD)

Afin d’assumer ces compétences et de souscrire aux exigences légales, les Maires ont lancé l’élaboration des Plans Communaux de Développement (PCD). D’après les entretiens effectués dans les communes étudiées, ces PCD sont actuellement la référence en matière d’objectifs de développement. « Tous les projets de développement que nous entreprenons sont inscrits dans le PCD, donc nous ne faisons pas délibérer les conseillers communaux pour ces projets. »57

Ces plans de développement sont constitués d’un état des lieux de la situation démographique, géographique, économique et sociale des communes, d’un recensement des principaux problèmes à résoudre, des objectifs de développement et des moyens d’y

57 Entretien réalisé auprès du Maire d’Amparafaravola, le 16 août 2004.

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parvenir, c’est à dire les différents travaux et investissements à entreprendre et enfin d’une hiérarchisation de ces objectifs. Ils ont été réalisés avec l’aide technique et financière d’ONG et/ou du Groupe de Travail pour le Développement Rural (GTDR) et en concertation avec la population. Dans la majorité des cas, cette concertation s’est effectuée au niveau des fokontany, lors de réunions en assemblée générale, et des organisations paysannes. Le choix des organisations ou des fokontany consultés n’est pas explicité dans les PCD, mais il semble avoir été déterminé d’une part par les opportunités et d’autre part par les liens existants entre les fokontany et/ou les organisations paysannes et les communes.

3. Les aspects financiers des PCD

Si les PCD constituent un état des lieux précis et détaillé de la situation des communes, les programmes de développement qu’ils proposent ne prennent que très rarement en compte la dimension financière. Le PCD d’Amparafaravola par exemple, ne présente aucune estimation des coûts des travaux qu’il programme. Notons ici qu’étant donné l’état des ressources financières des communes, il aurait été impossible de budgétiser les travaux prévus dans les PCD. Ceci sous tend deux choses : une dépendance affichée des maires à l’égard des financements privés tels que ceux du FID ou du SAF FJKM et, un nécessaire ajustement des priorités définies afin de les adapter aux réalités des ressources communales. Ainsi, le Maire d’Amparafaravola déclare, « Nous avons des problèmes d’infrastructures, notamment l’approvisionnement en eau qui est difficile. Le problème de l’insalubrité est une priorité, il est inscrit au PCD, mais nous n’avons pas encore fait la demande de financement au FID. Je vais maintenant m’attaquer à des projets qui sont à la portée de la commune, comme la mise en place d’un bac à ordures. »58

Finalement, les PCD constituent effectivement des projets de développement. Mais ils sont avant tout destinés à lister les besoins et à attirer les financements privés par leur caractère programmatique. Ils sont déconnectés des réalités communales et n’ont pas de prise avec la situation réelle des fokontany qui ont encore tendance à prendre en charge eux-mêmes les travaux qui sont à leur portée, avec l’aide des mêmes financements privés.

58 Entretien réalisé auprès du Maire de la commune d’Amparafaravola, le16 août 2004.

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4. Une prise en charge inégale du développement économique et social

Lors de nos déplacements dans les différents fokontany composant les communes du projet, nous avons pu remarquer un décalage entre certaines zones où le leitmotiv du développement communal avait été pleinement assimilé par la population, et d’autres, où les habitants ne semblaient pas avoir le sentiment d’être intégrés dans un programme de développement à l’échelle communale.

Concernant la prise en charge du développement par la commune d’Ampitatsimo par exemple, nous avons recueilli des avis divergents selon les différents Chefs Fokontany : « La commune représente les demandes de la population. C’est elle la première responsable en matière de développement de la zone. La commune est la locomotive, si la commune ne marche pas, le fokontany ne marche pas non plus. »59 « En matière de développement, c’est le fokontany qui est le premier responsable, la commune peut participer, mais chaque fokontany a son propre programme de développement, il nous faut trouver des financements. »60

En fait, ces différentes perceptions du rôle de la commune en matière de développement local par les Chefs Fokontany et la population (certaines réunions ont eu lieu en présence des Raiamandreny et d’autres habitants du fokontany) semblent être liées, en partie, au récent changement de statut du fokontany. Nous développerons ce point plus amplement car il nous a semblé fondamental.

5. Les modes de financement du développement local

Les communes ont des difficultés à assumer les fonctions de coordination des actions de développement entreprises au niveau local. En fait, elles manquent d’expérience dans ce domaine dans la mesure où les Chefs Fokontany ne sont placés sous l’autorité directe des maires que depuis quelques mois. Les initiatives en matière de développement économique et social sont prises à différents niveaux : les organisations paysannes et les habitants des fokontany, sous l’autorité de leur représentant, entreprennent des travaux de réhabilitation de canaux d’irrigation, de digues, de pistes, d’écoles primaires etc.

Les modes de financements utilisés sont alors les mêmes que ceux employés par les communes : une participation de la population en main d’œuvre ou financière, un appel au FID pour les besoins en matériaux, ou à des ONG et/ou des projets de

59 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany d’Ampitatsimo, la 13 août 2004. 60 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany d’Ambohibotavo, le 14 août 2004.

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développement rural pour un soutien technique et/ou financier. Si ces initiatives peuvent être perçues comme des volets des PCD et sont parfois décrites comme telles, elles sont souvent prises sans concertation avec les communes. L’attitude de nombreux Chefs Fokontany à l’égard de la commune est à la fois une cause et une conséquence de cette situation. Selon les témoignages recueillis, l’évolution du statut légal du fokontany ne constitue pas réellement un changement de perception de leur rôle par les Chefs Fokontany. « Le changement de la législation sur le fokontany ne change rien à nôtre rôle, nous travaillons pour le développement de la communauté. On ne peut pas vraiment parler de l’importance du rôle de la commune car elle n’est pas très stable. La plupart des tâches reviennent au fokontany. Les gens s’adressent plus au fokontany qu’à la commune. »61

Par ailleurs, certains fokontany entreprennent des travaux dans le cadre des PCD et avec le soutien de la commune et des financeurs privés. « Pour la réhabilitation du Collège d’Enseignement Général, la commune a demandé un apport des bénéficiaires : 2500 FMG par personne de plus de 18 ans sur toute la commune. La perception est en cours et nous attendons les subventions qui doivent venir, mais on ne sait pas à qui la demande a été adressée. »62

En fait, on observe des inégalités importantes entre les différents fokontany d’une même commune, constatées par les Chefs Fokontany eux-mêmes. « Pour l’instant, la majorité des travaux de la commune de Feramanga Nord concerne les fokontany de Feramanga et d’Ambohimanarivo. »63

61 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany d’Ambalabako, le14 juillet 2004. 62 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany d’Ambohibotavo, le 14 août 2004. 63 Entretien réalisé auprès des conseillers communaux de Feramanga Nord, fokontany d’Ambohimanarivo, le 12 août 2004.

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Cette situation a plusieurs conséquences. D’abord, la multiplication des initiatives en matière de développement a tendance à créer une rivalité entre les organisations paysannes, les fokontany et les communes pour l’obtention des mêmes financements. Ensuite, la pratique communale consistant à demander une participation financière de toute la population pour des travaux dont un seul fokontany est bénéficiaire entraîne la création d’une rivalité entre fokontany. Enfin, les Maires ont parfois tendance à privilégier leur fokontany d’origine, le chef lieu de la commune ou celui où ils ont obtenu le plus de voix lors des élections communales.

Cependant, on ne peut nier l’effectivité de la mise en œuvre de ces initiatives. Nous avons pu constater lors de nos déplacements que les travaux entrepris sur décision des fokontany, de la commune ou des organisations paysannes ont été réalisés : des pistes, des ponts sont réhabilités, des écoles sont construites. La prise en charge du développement économique et social demeure confuse, elle émane d’instances diverses et reste peu coordonnée au niveau communal, mais la dynamique existante est indéniable.

Par ailleurs, cette multiplication des initiatives peut aussi être lue au regard des moyens limités dont disposent les communes. Dans ce cas, le Chef Fokontany devient un relais du Maire dans la prise en charge du développement économique et social de sa localité, que cette compétence lui ait été officiellement déléguée ou non.

En fait, on peut se demander si la commune a réellement les moyens d’assumer ces compétences et son rôle en matière de coordination du développement économique et social. Encore une fois, la faiblesse des moyens techniques et humains des communes étudiées rend difficile la prise en charge de leurs diverses fonctions et a tendance à accroître le rôle du Chef Fokontany.

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III- Le fonctionnement démocratique des communes

Nous avons cherché à répondre à la question suivante : quel est le degré de confiance des usagers vis à vis de l’autorité communale et comment vivent-ils cette autorité en termes politiques ?

1. Le dispositif légal

Le dispositif légal prévoit le fonctionnement des organes constituant toutes les collectivités décentralisées. Rappelons que les communes sont composées d’une assemblée délibérante et d’un bureau exécutif, dont les présidents sont élus au suffrage universel direct64. « Le Conseil se réunit, en session extraordinaire, chaque fois que les affaires de la collectivité territoriale l’exigent. A cet effet, le Président du Conseil est tenu de le convoquer quand une demande lui en est faite sur un ordre du jour bien déterminé par : le Bureau exécutif ; ou le tiers des conseillers, ou (…) le représentant de l’Etat dans le département pour le Conseil communal. » (Art. 8, Loi N° 94-008, J.O. 2304 du 5 juin 1995) « Le Président du Bureau exécutif participe, avec voix consultative, aux travaux et débats du Conseil. Ses interventions sont consignées dans les procès-verbaux des séances. » (Art. 11, Loi N° 94-008, J.O. 2304 du 5 juin 1995)

2. La perception de leur rôle par les élus communaux

D’une façon générale, les fonctions de chacun des organes sont bien connues des conseillers communaux et des maires. Dans la majorité des cas, les conseillers communaux décrivent les relations entre l’exécutif et le délibératif ainsi, « C’est l’exécutif qui propose les projets et c’est le délibératif qui décide. »65 D’après les témoignages recueillis, le Conseil est convoqué sur demande des maires et très rarement à l’initiative du Président ou du tiers des conseillers, qui

64 Cf. 2ème partie, « la situation administrative au Lac Alaotra ». 65 Entretien réalisé auprès du Président du Conseil de la commune de Feramanga Nord, fokontany de Feramanga, le 15 août 2004.

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ignorent souvent cette possibilité. « C’est le Maire qui demande au Président du conseil de nous convoquer, donc c’est le Président du conseil qui a autorité pour convoquer les Conseillers communaux. »66

En fait, le Maire est considéré comme le « patron de la commune », le Président du Conseil comme un intermédiaire entre le Maire et les Conseillers, et ces derniers se perçoivent comme des représentants de la population, intermédiaires entre les paysans et l’autorité communale. « Les Conseillers communaux représentent les intérêts de la population à la commune, nous combattons pour les intérêts de la population. »67 « On arrive à représenter les paysans car nous sommes des élus. Les paysans ne se sont pas encore plaints donc je crois que nous sommes représentatifs. Notre objectif est de répondre aux attentes de la population. Nous sommes représentatifs, car après chaque réunion nous faisons un rapport aux proches dans la population. »68 « En tant que Conseillers communaux, le Maire demande au Président du Conseil de nous convoquer chaque fois qu’il a besoin de nous. On est convoqué en réunion pour s’informer et ensuite bien sensibiliser la population par rapport aux projets comme pour le FID. »69

3. Diffusion des informations et relations personnelles

Les conseillers communaux sont proches de la population, à la fois car ils vivent avec elle et car ils exercent la même activité. En tant que paysans, lorsqu’ils représentent la population, ils font aussi valoir leurs intérêts. Les décisions prises au niveau communal sont diffusées dans la population par l’intermédiaire des relations personnelles qu’entretiennent les conseillers avec les habitants de leur fokontany. On observe une superposition entre les fonctions politiques des conseillers et leurs relations personnelles au sein du fokontany, devenant les canaux de diffusion des informations.

Au sein du Conseil communal, on assiste à cette même superposition. Les relations entre conseillers sont souvent assimilées à des relations familiales. « Dans le Conseil communal, nous sommes comme une famille, parfois, il y a des disputes, mais nous avons tous le même but : développer la commune,

66 Entretien réalisé auprès d’un Conseiller communal de la commune suburbaine d’Ambatondrazaka, fokontany d’Andigandingana, le 15 juillet 2004. 67 Entretien réalisé auprès des Conseillers communaux de la commune d’Ampitatsimo, fokontany d’Ampitatsimo, le 13 août 2004. 68 Entretien réalisé auprès des Conseillers communaux de la commune d’Ampitatsimo, fokontany d’Ambohibotavo, le 14 août 2004. 69 Entretien réalisé auprès d’un Conseiller communal de la commune suburbaine d’Ambatondrazaka, fokontany d’Andigandingana, le 15 juillet 2004.

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donc on s’en sort toujours. Les discussions sont vives parce que chaque conseiller a sa manière propre pour aboutir au développement. »70 Au cours des entretiens réalisés, nous avons remarqué que les conseillers se défendent systématiquement de « jouer le jeu politique ». Les relations entre les diverses tendances sont basées sur la recherche du consensus. « Entre conseillers, c’est le consensus, personne ne porte sa casquette politique. Les relations sont normales entre nous. On peut dire que les discussions sont vives, mais on aboutit toujours à un consensus. Lors des réunions, tout le monde sort ses idées, on discute et on vote à main levée, on écoute toujours la voix de la majorité. »71 En fait, le but des délibérations au sein du Conseil communal est de contenter chaque tendance. Lorsqu’il y a désaccord, les discussions ont fonction de médiation. Il est exceptionnel que des conseillers demeurent opposés à un projet à l’issue de la délibération. Les relations au sein du Conseil communal et entre ce dernier et l’exécutif sont marquées par une véritable culture de la négociation.

Par contre, nous avons pu relever au cours de nos différentes visites dans les communes que les informations circulent très mal au sein du Bureau exécutif et entre le Maire et les Conseillers en dehors des convocations des membres du Conseil. Là encore la diffusion des informations est fonction des relations personnelles existantes entre les élus et les employés communaux. Les renseignements circulent de façon très inégale et aléatoire dans les communes. Ils sont répercutés de la même façon au niveau de la population. Ainsi, si un fokontany n’est pas représenté par un conseiller communal, ses habitants ont peu de chances d’obtenir une information claire et rapide sur les motifs et les résultats des délibérations du Conseil.

4. Le degré de confiance de la population

Le degré de confiance des usagers de la commune est souvent fonction des relations individuelles existantes entre certains habitants du fokontany et des élus et/ou des employés communaux. « On a confiance dans la commune car on connaît les conseillers, ce sont des paysans comme nous et s’il y a un problème, on peut leur en parler ou aller voir directement le Maire. »72

70 Entretien réalisé auprès d’un Conseiller communal de la commune suburbaine d’Ambatondrazaka, fokontany d’Andigandingana, le 15 juillet 2004. 71 Ibid. 72 Entretien réalisé auprès d’un paysans du fokontany de Lohafasika, commune suburbaine d’Ambatondrazaka, le 21 juillet 2004.

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La perception du fonctionnement démocratique par les administrés est aussi liée au caractère représentatif des conseillers et du Maire. « On peut parler au Maire et aux Conseillers communaux car ce sont des paysans comme nous, donc on peut dire que la démocratie marche bien. »73 Dans la mesure où les représentants de l’autorité communale ressemblent aux administrés, ces derniers considèrent que leurs intérêts sont pris en compte. La possibilité pour les usagers de s’identifier aux représentants communaux semble être garante du bon fonctionnement démocratique. La commune est un lieu où ils peuvent se rendre facilement, ils ne sont pas face à une administration déconnectée de leurs réalités quotidiennes. Nous avons tout de même observé une certaine défiance dans les fokontany éloignés géographiquement ou « politiquement » de la commune. Mais cette défiance est toujours dirigée à l’encontre des Maires et non de l’institution communale, perçue comme étant, ou devant être, au service de la population.

Par ailleurs, les déplacements des usagers à la commune ne sont pas fonction de la distance qui les en sépare mais de l’intérêt et de l’utilité qu’ils voient dans ces déplacements. Tant que les problèmes ou les requêtes formulées par la population peuvent être réglés ou satisfaites par le Chef Fokontany, les membres des fokonolona ne se déplacent pas à la commune. On retrouve ainsi le même schéma que dans la gestion des questions domaniales et foncières. D’après les témoignages recueillis, les habitants se sentent plus proches des fokontany que de la commune, la première instance devant représenter leurs intérêts est le Chef Fokontany. Le recours à la commune vient ensuite, soit lorsque le fokontany n’est plus compétent, soit lorsqu’il s’agit de « faire remonter une requête aux instances supérieures ».

73 Entretien réalisé auprès du Chef Fokontany et des Raiamandreny d’Andilana, le 17 septembre 2004.

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Ainsi, la perception du fonctionnement démocratique et de l’autorité politique communaux par la population est liée à trois éléments : la proximité géographique entre les administrés et les représentants de l’autorité communale, le sentiment de ressembler aux membres de l’administration communale, et la capacité des élus à écouter et éventuellement satisfaire les requêtes des administrés lorsqu’ils se rendent à la commune. C’est l’articulation entre ces trois éléments qui permet à la population d’évaluer le fonctionnement démocratique communal et la représentativité des élus.

Dans l’optique de l’installation du guichet foncier communal ou intercommunal, il conviendrait de prendre en compte ces aspects, notamment en évitant d’en faire une structure d’apparence trop administrative et bureaucratique. Des campagnes d’information préalables semblent être nécessaires afin d’initier une relation étroite avec les usagers avant même les premières opérations de dotation ou de reconnaissance des droits de jouissance. Par ailleurs, les relations personnelles ayant une importance indéniable dans le degré de confiance des usagers vis à vis des représentants des différentes institutions, il faudrait considérer les possibilités de déplacement dans les fokontany des employés du guichet.

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Conclusion

Au cours de cette étude, nous avons cherché à mettre en évidence la pertinence du choix de la commune comme niveau institutionnel pour la mise en place du guichet foncier. Nous avons aussi essayé de déterminer quels étaient les moyens et les compétences des communes pour mettre en œuvre une gestion foncière décentralisée dans les limites déterminées par la législation en vigueur. Les pratiques en matière de gestion domaniale locale que nous avons tenté de souligner et d’analyser, montrent qu’il existe un terrain favorable pour la réalisation de ce projet.

Il s’agit alors de créer un cadre légal pour des pratiques légitimes. Mais nous nous sommes aussi attachés à mettre en exergue les difficultés rencontrées par les communes dans l’exercice de leurs compétences. Elles sont liées notamment à la faiblesse de leurs moyens humains et techniques. Par ailleurs, l’analyse du fonctionnement et des budgets communaux nous a amené à conclure à une faiblesse des ressources communales et à considérer l’installation du guichet foncier à ce niveau dans un contexte de relative précarité. Enfin, nous avons cherché à comprendre quelles relations les communes entretiennent avec la population et comment cette dernière perçoit l’autorité communale.

Au terme de cette analyse, nous sommes arrivés aux conclusions suivantes : Au regard de l’évolution du processus de décentralisation et de la situation institutionnelle actuelle, la commune est le niveau jouissant de la plus grande stabilité et continuité, elle est par conséquent la structure la plus adéquate pour l’installation du guichet foncier.

Malgré la faiblesse de leurs moyens, les communes étudiées constituent un service de proximité pour la population et entretiennent une relation relativement étroite avec leurs administrés. Ces derniers la considèrent souvent comme une administration devant être à leur service.

Les communes, mais surtout les fokontany, exercent déjà des compétences en matière de gestion domaniale locale. En fait, cette gestion ainsi que le règlement des conflits fonciers sont principalement effectués par le Chef Fokontany.

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En conséquence, il semble fondamental de prendre en considération son rôle et de l’intégrer de façon opérationnelle au projet de guichet foncier communal ou intercommunal. Notamment en faisant perdurer ses fonctions de visa et de certification des divers actes passés sur les terrains par les usagers, et en lui laissant son rôle de médiateur dans le règlement des conflits fonciers. En effet, nous avons relevé une demande claire d’autogestion des questions et litiges fonciers émanant des usagers. Leur besoin de sécurisation foncière existe en parallèle d’une volonté d’auto administration au sein des fokontany ou des associations paysannes des relations et transactions liées à la terre.

Dans la mise en place du guichet foncier communal ou intercommunal, il serait important de considérer la faiblesse des ressources des communes et la difficulté d’améliorer la situation à court terme. Par conséquent, le projet devrait prévoir dans un premier temps le financement des matériels et du fonctionnement du guichet foncier. A moyen terme et dans la mesure où le guichet foncier est un des aspects du Programme National Foncier, on pourrait envisager l’octroi d’une subvention de l’Etat aux communes initiant ce projet. Les solutions pour l’autofinancement de cette structure ne sont envisageables qu’à long terme, par une amélioration du recouvrement et de la perception des impôts et des taxes attribués aux communes. Dans la mesure où les communes étudiées semblent avoir des difficultés à exercer leurs compétences en matière de coordination et d’initiation du développement économique et social sur leur territoire, les fokontany ont un rôle accru dans ce domaine. Ainsi, il faudrait envisager l’existence de relations directes entre les employés et la structure du guichet foncier et les Chefs Fokontany, sans pour autant faire de la commune un simple support institutionnel de cette structure.

Enfin, la perception du rôle de la commune et de son autorité politique est liée aux relations individuelles existant entre la population et les élus et/ou les employés communaux. Ces relations constituent aussi, en partie, les canaux de diffusion des informations au sein des organes communaux et entre la commune et ses administrés. Par conséquent, il serait important d’envisager les moyens de création de relations de proximité entre les employés du guichet foncier et les membres des fokonolona, notamment en favorisant leurs déplacements dans les fokontany. Il faudrait aussi prévoir des campagnes d’information sur le long terme afin de créer une relation de confiance entre la

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structure du guichet foncier et la population. Et ce, d’autant plus que les usagers du foncier sont en demande d’information. Il serait aussi fondamental de mettre à leur disposition des documents expliquant de façon claire les objectifs du guichet foncier, son rôle, celui des employés, et surtout les procédures liées à la dotation foncière et à l’immatriculation collective. Les campagnes d’information et la réalisation des documents pourraient être effectuées de concert avec les opérateurs du projet en charge du volet « organisations paysannes ».

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Annexes

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Annexe 1 : Cartes de la région étudiée

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Annexe 2 : Liste des textes de loi régissant les communes

Textes de loi Objets Loi N° 93-005 du 26 janvier 1994 Portant orientation générale de la politique de décentralisation Loi N° 94-001 du 26 avril 1995 Fixant le nombre, la délimitation, la dénomination et les chefs lieux des Collectivités territoriales décentralisées avec amendements Loi N° 94-007 du 26 avril 1995 Relative aux pouvoirs, compétences et ressources des Collectivités territoriales décentralisées Loi N° 94-008 du 26 avril 1995 Fixant les règles relatives à l’organisation, au fonctionnement et aux attributions des Collectivités territoriales décentralisées Loi N° 95-005 du 21 juin 1995 Relative aux budgets des Collectivités territoriales décentralisées Décret N° 95-381 du 26 mai 1995 Portant classement des Communes en Communes urbaines ou Communes rurales Décret 96-170 du 6 mars 1996 Fixant les taux des indemnités et les avantages alloués aux élus et aux membres de bureau exécutif ainsi qu’aux trésoriers des Collectivités territoriales décentralisées, au niveau des Communes Décret N° 96-248 du 27 mars 1996 Déterminant le titre des Représentants de l’Etat auprès des collectivités territoriales décentralisées Décret 96-249 du 27 mars 1996 Fixant les attributions de la représentation départementale de l’Etat au niveau des Communes Décret 96-898 du 25 septembre 1996 Fixant les attributions du Maire Décret 99-952 du 15 décembre 1999 Portant réglementation de la création, de l’organisation et du fonctionnement d’un Organisme Public de Coopération Intercommunale (OPCI) Circulaire N° 7811-MIAT/SG/DGD/DELED Perception de ristournes et institution de barrages économiques par des autorités municipales ou du 14 novembre 1996 communales Circulaire N° 8462- Suspension et/ou destitution d’un Maire ou d’un Adjoint au Maire MIAT/SG/DGD/DADSD/SCA Exclusion d’un conseiller du 11 décembre 1996 Note Circulaire N° 08923-MIAT Régime indemnitaire des Collectivités territoriales décentralisées du 27 décembre 1996 Circulaire N° 001-97-PM/MDB/SG/DASD Dotation d’équipement et fonctionnement de 30 millions par Commune du 5 mars 1997 Circulaire N° 31 MDB/SG/DGD Subvention aux Collectivités territoriales décentralisées (provision santé) du 13 juin 1997 Circulaire interministérielle N° 6568 MDB/MI Harmonisation des actions auprès des Collectivités territoriales décentralisées du 9 septembre 1997

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Annexe 3 : La situation administrative au Lac Alaotra

Décentralisé Déconcentré Province de Toamasina Régions Préfecture de région ? Alaotra-Mangoro Analanjirofo Antsinanana Fivondronampokontany de la Sous-préfectures de la région région Alaotra-Mangoro ? Alaotra-Mangoro :? Ambatondrazaka Ambatondrazaka Amparafaravola Amparafaravola Andilamena Andilamena Moramanga Moramanga Anosibe An’ala Anosibe An’ala Arrondissements administratifs Communes Etudiées : Ambatondrazaka suburbaine Ampitatsimo Feramanga Nord Amparafaravola Sahamamy Ambohimandroso Fokontany

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Annexe 4 : Liste des communes et des arrondissements administratifs par sous-préfecture

Sous-préfecture d’Ambatondrazaka

Arrondissements administratifs Communes Ambatondrazaka Commune urbaine d’Ambatondrazaka Ambatondrazaka suburbaine Ambatondrazaka suburbaine Ambatondrazaka II Feramanga Nord Ampitatsimo Ambatosoratra Ambohitsilaozana Ambandrika Andilanatoby Bejofo Didy Imerimandroso Antanandava Manakambahiny Ouest Manakambahiny Ouest Soalazaina Tanambo/ Besakay

71

Sous-préfecture d’Amparafaravola

Arrondissements administratifs Communes Amparafaravola Amparafaravola Sahamamy Ambohimandroso Ambatomainty Ambatomainty Andriabakely Morarano Chrome Ambohitrarivo Ambohijanahary Tanambe Amboavoary Amboavoary Ambodimanga Andilana Nord Vohimena Andriabakely Est

72

Sous-préfecture d’Andilamena

Arrondissements Communes administratifs Andilamena Andilamena Bekaitso Antaninanabaka Antaninanabaka Tanananifololany Miarinarivo Miarinarivo Maitsokely Maroadabo Marovato

Sous-préfecture de Moramanga

Arrondissements administratifs Communes Moramanga Commune urbaine de Moramanga Moramanga suburbaine Ampasimpotsy Gare Sabotsy Anjiro Anosibe Ifody Morarano Gare Andasibe Andasibe Ambatovola Beforona Amboasary Amboasary Fierenana Fierenana Lakato Andaingo

73

Arrondissements administratifs Communes Mandialaza Ampasimpotsy Antanadava Antanadava Beparasy Belavabary

Sous-préfecture d’Anosibe An’ala

Arrondissements administratifs Communes Anosibe An’ala Anosibe An’ala Ampandroantraka Ampandroantraka Antandrokomby Ambalanomby Miarovana Longozabe Longozabe Ambatoharanana

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Annexe 5 : Certificat de décès sur feuille volante, commune suburbaine d’Ambatondrazaka

75

Annexe 6 : Exemples de documents conservés par les fokontany a- Négociation

76

b- Réconciliation

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Annexe 7 : Affichage d’un avis de reconnaissance domaniale, commune d’Ampitatsimo

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Annexe 8 : Budget de la commune d’Amparafaravola, compte administratif 2003

(En FMG) Recettes Nomenclatures Prévision totale : Recouvrements effectués Prévision primitive 2003 et prévision additionnelle 2003 SECTION 1 : Fonctionnement 579 228 053 376 819 636 Chapitre I : impôts directs 247 310 000 7 490 460 Article 2 : impôts fonciers 238 700 000 1 808 661 Article 3 : impôts commerciaux 5 000 000 349 799 Article 4 : droits et taxes divers 3 610 000 5 332 000 Chapitre II : impôts indirects 8 000 000 13 573 600 Article 1 : licences 100 000 20 000 Article 2 : droits et taxes indirects divers 7 900 000 13 553 600 Chapitre III : revenus du domaine et des services 33 690 000 48 648 600 Article 1 : revenus du domaine privé immobilier 2 965 000 5 541 000 Article 2 : revenus du domaine privé mobilier 0 80 000 Article 3 : revenus du domaine public 22 600 000 29 068 600 Article 4 : recettes des exploitations des services 8 125 000 13 959 000 Chapitre IV : produits divers et accidentels 437 484 6 716 200 Article 3 : produit des amendes et confiscations 140 000 2 000 Article5 : recettes éventuelles et non classées 200 000 2 714 200 Article 6 : recettes accidentelles 97 484 4 000 000 Chapitre V : produits des ristournes et des prélèvements 59 818 523 70 418 730 Article 4 : ristournes sur les produits et prélèvements sur les extractions de terre, de pierre et de sable sur le 59 818 523 70 418 730 domaine privé national Chapitre VI : subventions- dons- legs- contributions et participations- 164 859 530 164 859 530 fonds de concours Article 1 : subventions 164 859 530 164 859 530 Chapitre IX : recettes additionnelles 65 112 516 65 112 516 Article 1 : excédent de la gestion précédente 65 112 516 65 112 516 SECTION II : Investissement 10 000 000 10 000 000 Chapitre XI : subventions- dons et 10 000 000 10 000 000 legs Article 2 : subventions 10 000 000 10 000 000 TOTAL DES RECETTES 589 228 053 386 819 636

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Dépenses Nomenclatures Prévision totale : Paiements effectués Prévision primitive et prévision additionnelle Section I : Fonctionnement 540 228 053 328 205 015 Chapitre I : bureaux de la commune 151 971 094 103 599 424 et des services percepteurs Article 2 : personnel permanent non 132 491 094 94 940 653 encadré non contractuel Article3 : personnel non permanent 8 880 000 8 658 771 Article 4 : matériel et entretien 10 600 000 0 Chapitre II : service d’hygiène, 65 515 285 54 057 854 d’assistance et d’enseignement Article 4 : matériel et entretien 65 515 285 54 057 854 Chapitre III : voirie et services 58 482 687 32 250 342 industriels Article 2 : personnel subalterne et 37 939 287 26 850 192 main d’œuvre permanents Article 3 : personnel non permanent 5 000 000 522 150 Article 4 : matériel et entretien 15 543 400 32 250 342 Chapitre IV : fonctionnement du 0 0 garage de la commune Article 4 : matériel et entretien 0 0 Chapitre V : fonctionnement des 1 282 530 994 886 autre services de la commune Article 3 : personnel non permanent 0 0 Article 4 : matériel et entretien 1 282 530 994 886 Chapitre VI : dépenses communes 177 162 746 102 965 689 Article 1 : dépenses communes de personnel 145 465 146 90 560 970 Article 2 : dépenses communes de fonctionnement et de matériel 31 697 600 12 404 719 Chapitre VII : dépenses diverses et 83 313 711 34 336 820 imprévues Article 1 : fêtes et foires 1 000 000 0 Article 3 : autres dépenses diverses 82 313 711 34 336 820 Chapitre VIII : contributions et 2 500 000 0 subventions Article 2 : subventions 2 500 000 0 Section II : Investissements 49 000 000 20 668 000 Chapitre XI : acquisitions 7 300 000 0 Article 1 : acquisition d’immeubles pour services publics 7 300 000 0 Chapitre XIII : infrastructures 31 700 000 19 960 000 Article 2 : travaux d’extension d’adduction d’eau 10 000 000 0 Article 4 : autres travaux d’infrastructures 21 700 000 19 960 000 Chapitre XIV : acquisition de gros 10 000 708 000 matériels Article 1 : matériel automobile 0 0 Article 2 : autres matériels 10 000 708 000 TOTAL DES DEPENSES 589 228 053 348 873 015

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Annexe 9 : Parts des dépenses d’investissement et de fonctionnement sur les dépenses totales pour Amparafaravola, Ampitatsimo et Ambatondrazaka suburbaine

Commune d’Ampitatsimo Commune d’Amparafaravola Investissement : 40% (48 368 829 FMG) Investissement : 5% (20 668 000 FMG) Fonctionnement : 60% (71 235 213 FMG) Fonctionnement : 95% (328 205 015 FMG) Dépenses totales : 119 604 042 FMG Dépenses totales : 348 873 015 FMG

investissement

investissement fonctionnement

fonctionnement

Commune suburbaine d’Ambatondrazaka Moyenne pour les trois communes Investissement : 30% (44 940 800 FMG) Investissement : 75% Fonctionnement : 70% (112 780 900 FMG) Fonctionnement : 25% Dépenses totales : 157 721 700 FMG

investissement investissement

fonctionnement fonctionnement

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Annexe 10 : Part des subventions et dotations de l’Etat par rapport aux fonds propres sur le montant total des recettes pour Amparafaravola, Ampitatsimo et Ambatondrazaka suburbaine

Commune d’Ampitatsimo Commune d’Amparafaravola Subventions/dotations : 70% (84 041 530 Subventions/dotations : 45% (174 859 530 FMG) FMG) Fonds propres : 30% (35 706 378 FMG) Fonds propres : 55% (211 960 106 FMG) Recettes totales : 119 747 908 FMG Recettes totales : 386 819 636 FMG

fonds propres

subventions subventions fonds propres

Commune d’Ambatondrazaka suburbaine Moyenne pour les trois communes Subventions/dotations : 80% (128 398 913 Subventions/dotations : 65% FMG) Fonds propres : 35% Fonds propres : 20% (29 371 164 FMG) Recettes totales : 157 769 357 FMG

fonds propres fonds propres

subventions

subventions

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Annexe 11 : Part de l’IFT, des ristournes et des autres droits et taxes dans les ressources propres d’Amparafaravola, Ampitatsimo et Ambatondrazaka suburbaine

Commune d’Ampitatsimo Commune d’Amparafaravola Fonds propres : 35 706 378 FMG Fonds propres : 211 960 106 FMG IFT : 0.03% (10 950 FMG) IFT : 0.3% (605 528 FMG) Ristournes : 41 % (14 625 970 FMG) Ristournes : 33% (70 418 730 FMG) Droits et taxes divers : 22% (8 009 250 FMG) Droits et taxes divers : 17% (35 598 800 FMG)

IFT IFT

ristournes autres ristournes autres

droits et taxes droits et taxes

Commune suburbaine d’Ambatondrazaka Moyenne pour les trois communes Fonds propres : 29 371 164 FMG IFT : 0% (0 FMG) IFT : 0.11% Ristournes : 6% (1 820 780 FMG) Ristournes : 27% Droits et taxes divers : 12% (3 421 070 FMG) Droits et taxes divers : 17%

IFTristournes IFT droits et taxes ristournes

autres

droits et taxes autres

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Droits et taxes divers : - droits et taxes directs divers (taxe sur les chiens, les véhicules à moteurs, les bicyclettes…) - droits et taxes divers indirects (taxe sur les postes T.V, sur les fêtes, les cérémonies coutumières…) - recettes des exploitations des services (droits de légalisation, de réconciliation…) - taxe additionnelle aux droits d’enregistrement

Autres : - impôts commerciaux - revenus du domaine privé mobilier et immobilier - revenus du domaine public - produits divers et accidentels - recettes additionnelles - recettes d’investissement

N.B : Etant donné l’ordre de grandeur de la part de l’IFT dans les budgets étudiés, ce pourcentage a été arrondi à la décimale la plus proche (par excès ou par défaut), alors que les autres valeurs ont été arrondies au nombre entier le plus proche (par excès ou par défaut).

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Annexe 12 : Arrêté provincial fixant les taux des ristournes par produit, barrière de ristourne de la commune de Feramanga Nord

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Annexe 13 : Barrière de ristourne du fivondronampokontany d’Amparafaravola, fokontany d’Ambodrirano

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