La Dépêche Du Midi, Le Monde Et Libération Face Au Scandale : Le Traitement Médiatique De « L'affaire Alègre »
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Université Lyon 2 Institut d'Etudes Politiques de Lyon La Dépêche du Midi, Le Monde et Libération face au scandale : le traitement médiatique de « l’affaire Alègre ». Curtet Pauline Séminaire : Violence et médias Mémoire soutenu le 06/09/10 Sous la direction d'Isabelle Garcin Marrou Table des matières Remerciements . 5 Introduction . 6 Rappel des faits . 6 La première affaire Alègre . 6 Apparition de « la nouvelle affaire Alègre » . 7 Des accusations de plus en plus lourdes . 8 L’effondrement du soupçon . 8 Considérations théoriques . 8 Choix du corpus et grille d’analyse . 11 Chapitre I : Baudis-Baylet, un conflit aux graves conséquences ? . 13 I.1. Le milieu politique toulousain : des « clans » bouleversés par la communication moderne. 14 I.1. 1 . Définition du clan toulousain. 14 I.1. 2 . Implications du système médiatique toulousain. 16 I.2. Des articles inquisiteurs ont attiré l’attention de la presse « de référence ». 17 I.2.1. L’accusation . 17 I.2.2. La victimisation . 22 Conclusion du chapitre : la Dépêche du Midi , première alliée des accusatrices . 25 Chapitre II : Le scandale établit un clivage entre élites et victimes . 27 II.1. Elites vs. Victimes : la mécanique du « notable, donc coupable ». 28 II.1. 1 . L’affaire Allègre comme affaire « scandaleuse ». 28 II.1. 2 . Notables donc coupables : l’ordre social comme preuve. 30 II.2. « Patricia » et « Fanny », des victimes désignées d’office. 34 II.2. 1 . Une victimisation favorisée par l’empathie. 34 II.2. 2 . Le retournement de situation : les victimes deviennent coupables. 36 Conclusion du chapitre : le scandale, source d’erreurs pour le journaliste. 38 Chapitre III : La nécessité de faire vite, obstacle à l’investigation . 40 III.1. « L’ère du soupçon » s’installe : la presse écrite désarmée face à des rebondissements quotidiens. 40 III.1. 1 . Libération dans le doute . 42 III.1. 2 . Le Monde dans l’erreur . 44 III.2. La contre-enquête, un moyen de rétablir la vérité. 47 III.1. 1 . Mise en forme et en mots de la contre enquête. 48 III.2. 2. Un retour sur l’affaire avec plus d’objectivité. 49 Conclusion du chapitre : l’objectivité et l’investigation au secours de l’erreur . 53 Conclusion générale . 55 Retour sur l’hypothèse de départ . 55 Soyons subjectifs : les journalistes ne sont pas si méchants . 56 Affaire Alègre, Affaire oubliée ? . 56 Bibliographie . 58 Ouvrages . 58 Travaux universitaires . 58 Articles de presse . 59 Articles ayant fait l’objet d’une analyse . 59 Articles dont nous avons utilisé les informations . 60 Sites internet . 60 Annexes . 61 Résumé . 61 Mots clefs . 61 Remerciements Remerciements Réaliser un mémoire demande avant tout de trouver un thème intéressant, voire passionnant. Et je veux donc d’abord remercier Tania Charles, étudiante à l’IEP de Lyon et adepte de l’émission « Faites entrer l’accusé », qui a eu la bonne idée de me parler de « l’affaire Alègre ». Je remercie ensuite Isabelle Garcin-Marrou et Isabelle Hare, mes deux professeurs de séminaire « violence et médias », qui ont toujours été disponibles pour m’aider dans la réalisation de ce mémoire. Leur esprit critique et les cours qu’elles ont dispensés durant ce séminaire m’ont été très utiles. Je dois également remercier Olli Polo, professeur de médecine à l’université de Tampere (Finlande), qui a mis à ma disposition son bureau de professeur pour que je puisse travailler dans les meilleures conditions durant mon séjour en Finlande. Enfin, je remercie tous mes proches, qui ont su m’accompagner et m’encourager lorsque ma motivation se faisait timide. Mais ces remerciements ne concernent évidemment pas que le mémoire... 5 La Dépêche du Midi, Le Monde et Libération face au scandale : le traitement médiatique de « l’affaire Alègre ». Introduction Au milieu du XVIIe siècle, la ville de Toulouse est secouée par l’une des premières « affaires » judiciaires de son Histoire, « l’affaire Calas ». Jean Calas est en effet accusé d’avoir assassiné son fils Marc Antoine, alors que celui-ci a été retrouvé pendu en 1761. Jean Calas est condamné au supplice de la roue, et ne sera réhabilité que lorsque le 1 philosophe Voltaire s’emparera de l’affaire, en 1765 . Au XVIIIe siècle, les médias tels que nous les connaissons aujourd’hui n’existaient pas. Seules les discussions de la rue permettaient la propagation des rumeurs. Pourtant, l’affaire Calas et l’affaire Alègre, que nous allons étudier, ont des éléments en commun : les victimes et les coupables étaient désignés dès le départ. L’affaire Alègre commence véritablement le 18 mai 2003, lorsque la journaliste Claire Chazal reçoit sur son plateau du 20 heures un homme politique dont les tourments médiatiques et judiciaires ne font que commencer. Dominique Baudis, alors Président du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, révèle à la journaliste et aux millions de téléspectateurs du journal télévisé sa mise en cause dans une sordide affaire de mœurs. Transpirant, les mots se bousculant à ses lèvres, Dominique Baudis veut se justifier et tente de dénoncer l’énormité des faits qui lui sont reprochés : viols, actes de barbarie, meurtre, participation à des soirées sado masochistes. Suite à cette intervention, la surenchère sera quotidienne, avec des témoignages de plus en plus choquants et considérés comme 2 crédibles incriminant de nombreux « notables toulousains » . Rappel des faits Avant de rentrer dans des observations théoriques, nous devons faire un rappel des faits nécessaire à la suite de notre travail. La première affaire Alègre « L’affaire Baudis » ou « nouvelle affaire Alègre » prend ses racines dans une autre affaire, qui a connu bien moins de retentissements. Il s’agit de la première « l’affaire Alègre ». Patrice Alègre est un tueur en série, il a été arrêté à Paris en septembre 1997 et a été condamné le 21 février 2002 à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de cinq femmes. Le premier des meurtres remonte au 30 novembre 1987, il a donc fallu plus de vingt ans pour arrêter et condamner Patrice Alègre. Cependant, malgré les meurtres sordides et la violence exceptionnelle dont a fait preuve cet homme, cette affaire ne fait pas les gros titres et ne reste pas longtemps sur l’agenda médiatique. L’affaire à proprement parler débutera 1 Pour un récit en détail de l’affaire, se plonger dans : L’affaire Calas : hérésie, persécution, tolérance à Toulouse au XVIIIe siècle, Bien David D., Toulouse : Eché, 1987. 2 L’intégralité de l’intervention télévisuelle de Dominique Baudis est disponible en annexe 14. 6 Introduction en mai 2003, lorsque des gendarmes toulousains, regroupés dans la cellule « Homicide 31 » et placés sous la direction du gendarme Michel Roussel, enquêteront sur des cas non élucidés de meurtres qui pourraient être liés aux agissements de Patrice Alègre. Apparition de « la nouvelle affaire Alègre » La première véritable incursion médiatique nationale dans l’affaire a lieu le 12 mai 2003. L’hebdomadaire national Marianne présente les premiers résultats des investigations de la cellule d’enquêteurs de la gendarmerie « Homicide 31 », qui s’appuient notamment sur les révélations troublantes d’anciennes prostituées toulousaines, « Fanny » et « Patricia » : elles mettent en cause des policiers, des magistrats et des notables toulousains dans l’organisation de soirée sadomasochistes, auxquelles aurait également participé Patrice Alègre. Ces premières révélations connaissent un écho national par l’intermédiaire de l’hebdomadaire Marianne, mais aussi dans les colonnes du quotidien régional La Dépêche du Midi. C’est alors toute une machine médiatique qui se met en place et s’intéresse de près à l’affaire. 3 Lorsque Dominique Baudis rentre dans le jeu, la machine s’emballe . Le président du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel, ancien maire centre droit de Toulouse et homme politique d’ampleur nationale, vient sur le plateau du journal télévisé de TF1, le 18 mai 2003. Il révèle que son nom est cité dans le dossier par les prostituées et dénonce une « effarante machination ». Il affirme : Je ne connais ni de près ni de loin Patrice Alègre, je n’ai jamais approché ni de près ni de loin les milieux du proxénétisme et de la drogue, je n’ai jamais participé ni de près ni de loin à des soirées sadomasochistes (...) Face à une calomnie comme celle-ci, il ne faut pas faire le gros dos, faire la sourde oreille, faire semblant de ne pas entendre. Au contraire, la calomnie, je vais l’affronter face-à-face, les yeux dans les yeux, et je vais la prendre à la gorge. (Face à la calomnie, Baudis Dominique, XO Editions, 2005, ISBN : 2-266-15639-X, p 48-p 51) L’ancien maire de Toulouse avance l’idée d’un complot de l’industrie pornographique à son égard, car il dit vouloir prendre des mesures contre celle-ci en tant que président du CSA (Comité Supérieur de l’Audiovisuel). Puis il dit : Il n’y a pas une once de vérité autour de laquelle elles (les ex prostituées, NDLR) auraient pu broder. Non, c’est faux, et l’on s’en apercevra vite. Mais je ne voulais pas que la rumeur se propage partout et c’est la raison pour laquelle je vous ai demandé de bien vouloir, je vous en remercie (Claire Chazal, NDLR), me recevoir dans votre journal pour pouvoir m’expliquer devant les téléspectateurs. (Face à la calomnie, Baudis Dominique, XO Editions, 2005, ISBN : 2-266-15639-X, p 48-p 51) L’air plus fatigué, il se rassoit dans son siège avant de lancer : Croyez-moi, je ne baisserai pas les bras tant que je ne saurai pas qui est à l’origine de cette saloperie, excusez moi du mot. Cette intervention dans le journal de 20 heures, sorte d’institution médiatique française s’il en est une, marque le début d’un déchainement médiatique qui va durer plusieurs mois.