Larhyss Journal, ISSN 1112-3680, n°37, Mars 2019, pp. 151-174 © 2019 All rights reserved, Legal Deposit 1266-2002

ESSAIS D’OPTIMISATION DES PROCEDES DE CLARIFICATION ET DE DESINFECTION D’EAUX DE BARRAGE DE LA REGION DE (EST ALGERIEN)

OPTIMIZATION TESTS OF CLARIFICATION AND DISINFECTION PROCESSES OF WATER DAM OF KHENCHELA AREA (EASTERN )

ACHOUR S., MODJAD H., HELLAL H., KELILI H.

Laboratoire de recherche en hydraulique souterraine et de surface -LARHYSS Faculté des Sciences et de la Technologie - Université de Biskra – B.P. 145 R.P, 07000, Algérie

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RESUME

L’objectif de l’étude est l’optimisation de procédés physico-chimiques visant le traitement de l’eau du barrage de Babar, situé dans la wilaya de Khenchela (Nord Est algérien). Au préalable, quelques données sont présentées sur ce barrage et le bassin versant dont les caractéristiques peuvent avoir une incidence sur la qualité de l’eau. L’étude est axée plus particulièrement sur la détermination des conditions optimales d’application de la coagulation-floculation au sulfate d’aluminium et de la chloration qui sont des étapes indispensables au cours des phases de clarification et de désinfection d’une eau potable. Des échantillons d’eaux brutes du barrage ont été testés en laboratoire et ont montré que leur qualité était globalement moyenne mais néanmoins caractéristique d’une eau de surface. Les essais de chloration des eaux brutes ont abouti à des potentiels de consommation en chlore importants qui peuvent être reliés à la présence d’éléments minéraux et organiques parmi les plus réactifs en présence de chlore. L’abattement de l’absorbance en ultra-violet indique qu’une partie de la matière organique a pu être dégradée en structures

© 2019 Achour S. and al.; This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License (http://creativecommons.org/licenses/by/4.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited. Achour S. & al. / Larhyss Journal, 37 (2019), 151-174

aliphatiques pouvant mener à la formation de trihalométhanes potentiellement toxiques. Les essais de coagulation-floculation et de décantation, effectués selon le protocole de Jar Test, ont mis en évidence que cette étape optimisée aboutissait à de bons rendements d’élimination de la pollution et à des valeurs des paramètres de qualité conformes aux normes de potabilité. La combinaison entre la clarification et la post-chloration a abouti à une diminution notable de la demande en chlore et de ce fait à une réactivité moindre vis-à-vis du chlore, réduisant ainsi la possibilité de formation de composés organohalogénés toxiques. Mots-clés : Barrage Babar, qualité d’eau, consommation en chlore, jar test,clarification, optimisation.

ABSTRACT

The objective of the study is the optimization of physico-chemical processes in order to treat water of Babar dam, located in the Wilaya of Khenchela (Northeast Algeria). Beforehand, some data are presented on the Babar dam and the characteristics of the watershed that may affect the quality of the water. The study is particularly focused on determining optimum conditions of application of the coagulation-flocculation with aluminum sulphate and chlorination steps that are essential in the clarification phase and disinfection of drinking water. Samples of raw water from the dam have been laboratory tested and have shown that their quality was average overall but nevertheless characteristic of surface water. The chlorination tests of raw water resulted in significant chlorine consumption potentials that could be related to the presence of inorganic and organic elements among the most reactive with respect to chlorine. The reduction of the ultra-violet absorbance indicates a fraction of the organic material could be degraded in aliphatic structures that may lead to potentially toxic trihalomethanes formation. The coagulation-flocculation and settling tests, carried out according to the Jar Test protocol, demonstrated that this optimized step resulted in good pollution removal efficiencies and values of quality parameters in accordance with the potability standards. The combination of clarification and post-chlorination has resulted in a significant decrease in chlorine demand and therefore a lower reactivity to chlorine. The combination of clarification and post-chlorination resulted in a significant decrease in the chlorine demand and therefore a lower reactivity vis-à-vis the chlorine, which

152 Essais d’optimisation des procédés de clarification et de désinfection d’eaux de barrage de la région de Khenchela (Est algérien) can reduce the possibility of formation of toxic halogenated organic compounds. Key words: Babar Dam, water quality, chlorine consumption, clarification, jar test, optimization.

INTRODUCTION

Diverses formes de pollution contribuent de façon considérable à la dégradation de la qualité des eaux de surface et l’augmentation de certains micropolluants, qu’ils soient minéraux ou organiques. Si des progrès notables ont été enregistrés en vue de réduire les pollutions d'origine industrielle et urbaine, il reste encore beaucoup à faire pour lutter contre les pollutions diffuses en grande partie liées à l’agriculture et pour améliorer l’évaluation des risques sanitaires liés aux micropolluants (Hartemann, 2011). Cette dégradation de la qualité d’eaux souvent destinées à la consommation a différents impacts directs ou indirects sur la santé des populations. Il est donc indispensable de surveiller la qualité de tout ce qui a une influence sur la production de l’eau, depuis son lieu de son captage jusqu’au réseau de distribution et au robinet du consommateur. De ce fait, ces eaux de surface doivent, avant toute utilisation subir un traitement de potabilisation dans des filières où se combinent différents procédés mécaniques et physico-chimiques. L’objectif final est de produire une eau dont la qualité satisfait à des normes biologiques et physico-chimiques de potabilité (Achour et al, 2002). En Algérie, la demande en eau pour les besoins de la consommation humaine (Alimentation en eau potable ou AEP), pour le secteur agricole ou l’industrie ne cesse de croître. Ceci oblige à faire appel aux eaux mobilisées par les barrages et retenues (Achour, 2015). Les eaux algériennes superficielles, notamment celles destinées à la consommation sont caractérisées par une minéralisation variée et parfois des charges organiques importantes. La pollution physico-chimique et bactériologique par les rejets d’eaux usées urbaines, l’industrie et les engrais est souvent présente dans les eaux de barrages (Achour et al, 2009). Les caractéristiques minérales apparaissent ainsi globalement médiocres avec des valeurs élevées et dépassant souvent les normes de potabilité. Quant aux charges organiques, elles semblent indiquer que les composés d’origine

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naturelle tels que les substances humiques constituent encore une fraction appréciable. La chloration de ce type d’eau peut cependant aboutir à la formation de sous produits organohalogénés présentant un risque pour la santé (Achour et Guergazi, 2002 ; Achour et al, 2014). La détermination et la vérification de la présence de germes indicateurs de contamination fécale permet de déduire que les eaux de barrage sont parfois polluées par des eaux usées urbaines et ne devraient être utilisées qu’après un traitement de désinfection adapté à leur qualité (Achour et Chabbi, 2014 ; Chabbi et Achour, 2017). Dans le cas du barrage Babar, en exploitation dans la wilaya de Khenchela (Nord Est Algérien), les eaux sont essentiellement utilisées pour l’irrigation des grands périmètres. Mais une station de potabilisation de ces eaux a été récemment mise en service et dont le projet a été d’alimenter plusieurs agglomérations de la wilaya de Khenchela. Ainsi, dans la perspective de l’utilisation d’eaux du barrage Babar pour les besoins en eau potable, nous nous sommes particulièrement intéressés à la qualité de ces eaux et aux possibilités de leur traitement par des procédés physico-chimiques conventionnels, omniprésents dans la chaine de traitement de potabilisation d’une eau de surface. En nous appuyant sur nos déterminations de la qualité des eaux brutes du barrage Babar, l’objectif de ce travail est donc de déterminer les conditions optimales pour traiter ces eaux au cours des phases de clarification et de désinfection.

QUELQUES DONNEES SUR LE BARRAGE BABAR DE LA REGION DE KHENCHELA ET LA STATION DE TRAITEMENT DES EAUX

Aperçu sur la région de Khenchela

La wilaya de Khenchela s’étend sur une superficie de 9715,6 Km2. Elle est composée de 21 communes et 08 daïras (ANDI, 2013). La région de Khenchela est située au Nord de l’Algérie, au Sud-Est du constantinois, et en contrefort du mont des Aurès entre 34° 06’ 36’’et 35° 41’ 21’’ latitude Nord et entre 06° 34’ 12’’ et 07° 35’ 56 ‘’ de longitude Est (Khabtane et Rahmoune, 2012).

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Elle se distingue par ses milieux physiques et naturels très hétérogènes avec trois régions naturelles distinctes : les hautes plaines du Nord, la zone montagneuse à l’Ouest de la wilaya et les paysages steppiques et sahariens dans le Sud (Khabtane et Rahmoune, 2012). La zone d’étude est caractérisée par un climat aride à semi-aride avec un hiver froid, et un été chaud et sec. Les formations géologiques les plus anciennes sont celles du Trias mais les formations prédominantes sont celles du Quaternaire avec une épaisseur assez limitée; ce qui explique que la zone d’étude a une perméabilité moyenne mais l’action de l’érosion reste importante sur la majorité de la surface du bassin. Cette action est surtout active sur les fortes pentes dépourvues de végétation (Gaagai, 2009).

Quelques caractéristiques de la retenue du barrage Babar

La cuvette de la retenue de Babar (Figure 1) se trouve dans la vallée amont de l’oued El Arab qui s’y appelle l’oued El Abiod. D’un point de vue administratif, elle se trouve sur le territoire de la wilaya de Khenchela.

Figure 1 : Retenue du barrage Babar (Kenchela, Algérie) Source : ANBT(Agence Nationale des Barrages et Transferts, Algérie) Le barrage a été construit sur Oued El Arab et son bassin versant a une surface de 567 km2 environ, inclus dans le vaste bassin versant de Chott Melghir. Il est délimité par les montagnes des Aurès au Nord-Ouest, à l’Est et Sud-Est et la plaine de Khenchela au Nord et au Nord-Est. Entre les deux ensembles physiques des montagnes s’intercale une vaste plaine appelée haute plaine de Djahfa, qui est drainée par des Oueds secondaires (Tamagra et El Htiba) qui se

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rejoignent pour former Oued El-Arab juste avant le site du barrage (Gaagai, 2009). D’une capacité initiale de 41 millions de m3, le barrage Babar (Wilaya de Khenchela) joue un rôle essentiel dans l’alimentation en eau potable des populations des zones avoisinantes (Ouldja, , , ) à hauteur de 60% des besoins, ainsi que pour l’irrigation des terres agricoles. La longueur maximale de la retenue est 5 km, la largeur est 2 km. Le barrage prend son nom à celui de l’agglomération de Babar qui se trouve sur le versant droit de la vallée en amont du barrage. L’ouvrage de prise d’eau du barrage de Babar est implanté sur la rive droite. La ville de Babar est à 10 km du site du barrage, le chef-lieu de la wilaya de Khenchela est à 50 km. La figure 2 présente la situation géographique du barrage Babar.

Figure 2 : Image satellite de la situation géographique du barrage de Babar (Google Earth)

Station de traitement des eaux du barrage Babar de Khenchela

De nombreuses stations de traitement d’eaux de barrages ont été conçues ces dernières années et desservent de grandes agglomérations à travers tout le territoire algérien. Le schéma est généralement classique, avec différentes phases de prétraitement, clarification et désinfection. Les filières de potabilisation comportent invariablement un procédé de chloration en

156 Essais d’optimisation des procédés de clarification et de désinfection d’eaux de barrage de la région de Khenchela (Est algérien) prétraitement et en post-chloration (Achour et Chabbi, 2017), en plus des étapes de coagulation-floculation, décantation et filtration rapide. C’est sur ce schéma conventionnel qu’a été conçue la station de production d’eau potable Babar, wilaya de Khenchela. Elle a une capacité nominale de traitement de 200 l/s à partir de l’eau brute du barrage de Babar. Du point de vue administratif, le site de la station de traitement d’eau se trouve dans la wilaya de Khenchela, à 2 km de la ville de (DRE Khenchela, 2014).

MATERIEL ET METHODES

Echantillonnage des eaux du barrage Babar

Les essais ont été effectués sur des prélèvements d’eaux brutes au cours de la période allant de novembre 2014 à février 2015. Les prélèvements ont été effectués au niveau du barrage de Babar. Les prélèvements ont été réalisés à une profondeur de 20cm de la surface de l’eau.

Méthodes d’analyse physico-chimique de l’eau

Tous les essais d’analyse physico-chimique ont été réalisés au niveau du laboratoire LARHYSS, à l’université de Biskra. Les méthodes analytiques utilisées sont décrites par Rodier et al (2009) ou les catalogues des appareillages utilisés. Le tableau 1 récapitule les principales méthodes utilisées. Tableau 1 : Méthodes analytiques des paramètres de qualité des eaux

Paramètres Méthodes pH Potentiomètrie Conductivité Electrique Dureté (TH) , Ca2+, Mg2+ Complexométrie à l’EDTA Alcalinité (TAC, TA) Volumétrie. Turbidité Néphélométrie

Cl2 résiduel Iodométrie Cl- Potentiométrie ; Electrode combinée Na+, K+ Photomètre à flamme 2- 2+ 2+ + -- SO4 ,Fe , Mn ,NH4 /NH3, Br Photocolorimétrie Substances humiques Spectrophotométrie UV ; λ = 254 nm

Oxydabilité au KMnO4 Volumétrie. Milieu acide à chaud

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Description des essais de chloration

La chloration des échantillons d’eau du barrage Babar se fait par ajout de microquantités d’eau de javel diluée au 1/10. Le chlore consommé est déterminé par la différence entre le chlore introduit et le chlore résiduel mesuré par iodométrie. Les potentiels de consommation en chlore ou demandes en chlore, exprimés par PCCl2 (mg chlore consommé/l), sont déterminés pour une dose de chlore introduit de 20 mg/l et après un temps de contact égal à 24 heures. L’évolution de l’aromaticité des substances organiques de l’eau de barrage a été suivie par la mesure de l’absorbance en ultra-violet à 254 nm.

Description des essais de Jar Test

Les essais de la coagulation-floculation par le sulfate d’aluminium ont été réalisés selon le protocole de Jar-test sur un floculateur à 06 agitateurs (Floculateur Fisher 1198), appareil qui permet d’agiter simultanément les échantillons d’eau contenus dans une série des béchers de 500ml. Pour la détermination des doses optimales de coagulant, les conditions de l’essai sont comme suit :  phase d’agitation rapide à la vitesse de 200 tr/min pendant 3 minutes  phase d’agitation lente à la vitesse de 60 tr/min pendant 17 minutes  phase de décantation de 30 minutes. Des essais de jar test ont été également réalisés pour tester l’influence du temps de décantation sur l’efficacité du traitement. L’essai de combinaison entre la clarification et la chloration a consisté à procéder à la chloration en introduisant des doses croissantes de chlore (0,2 à 5 mg/l) dans les eaux préalablement floculées et décantées.

RESULTATS ET DISCUSSION

Qualité physico-chimique des eaux brutes du barrage Babar

Les résultats d'analyse physico-chimique des eaux brutes testées sont présentés dans le tableau 2 et sont comparés aux normes de l'Organisation Mondiale de la santé (WHO/OMS,2008) ainsi qu’aux normes algériennes (JORADP,2011)

158 Essais d’optimisation des procédés de clarification et de désinfection d’eaux de barrage de la région de Khenchela (Est algérien) relatives à la qualité des eaux brutes utilisées pour la production de l'eau destinée à la consommation. La température des eaux de surface dépend du climat et des conditions atmosphériques. Ceci explique la gamme assez large des valeurs en fonction de la date de prélèvement. Le pH est proche de la neutralité avec un léger caractère alcalin. Ceci influera sans nul doute sur l’efficacité de certains procédés de traitements (coagulation, adoucissement et chloration) (Tardat-Henry et Beaudry, 1992). L’eau du barrage de Babar est caractérisée par une assez faible turbidité. Cela pourrait être dû au fait que ce barrage est situé dans une zone transitoire, entre le désert et le Tell et qui est située dans une zone assez faiblement boisée. Les valeurs de la conductivité, de la dureté calcique et magnésienne ainsi que des teneurs en chlorures et sulfates correspondent à une minéralisation plutôt élevée et doivent être mises en relation avec la nature des terrains géologiques traversés et les temps de contact. La différence entre les différents échantillons peut être due à la période de prélèvement ou à la présence d'éléments minéraux indésirables dans les eaux de barrage résultant d'une pollution exogène. Le barrage de Babar est caractérisé par une faible teneur en composés azotés minéraux (nitrate, nitrites, azote ammoniacal) par rapport à la limite exigée par les normes de potabilité. Il en est de même pour les phosphates. Ce qui peut laisser supposer que l’eutrophisation des eaux de ce barrage ne constitue pas à l’heure actuelle un risque majeur. Les oligoéléments comme le fer et le manganèse restent également à de très faibles teneurs. Trois méthodes différentes nous ont permis d’évaluer la quantité en matière organique présente dans les eaux de surface testées : l’absorbance en ultra-violet (UV) à 254 nm, l’oxydabilité au permanganate de potassium et la concentration en substances humiques (SH). Pour chaque paramètre, les valeurs sont assez voisines pour les différents échantillons. La quantité de matière organique globale peut être considérée comme moyenne et tout à fait acceptable pour une eau de surface brute, avant tout traitement. Les valeurs de l’absorbance UV restent assez faibles et montrent qu’une faible proportion de la matière organique est sous forme aromatique. Ceci rejoint les valeurs des substances humiques qui sont de l’ordre de 2 à 3mg/l.

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Tableau 2 : Caractéristiques physico-chimiques des échantillons testés de l’eau du barrage Babar. Paramètres Gamme des Paramètres Gamme des Valeurs Valeurs Température (°C) 15,8-26 K+ (mg/l) 2,98-3,08 Turbidité (NTU) 3,3-4.3 Fe²+ (mg/l) 0,05-0,07 Conductivité (µS/cm) 747-1195 Mn2+ (mg/l) 0,09-0,1 pH 7,64-7,98 Br- (mg/l) 0,06-0,11 3‾ TAC (°F) 9,5 -9.6 PO4 (mg/l) 0,7-1,2 + TH (°F) 42,8-48,5 NH4 (mg/l) 0,026-0,3 2+ - Mg (mg/l) 56,51-76,2 NO3 (mg /l) 10,29-12,47 ²+ - Ca (mg/l) 67,05-77,01 NO2 (mg/l) 0,13-0,16 Cl‾ (mg/l) 80,43-112,5 Absorbance U.V λ = 254 nm 0,056-0,062 SO4²‾ (mg/l) 490-520 SH (mg/l) 2,57-3,27 Na+ (mg/l) 15,2-17,5 Oxydabilité au 4,1-5,2 KMnO4 (mg O2/l)

La charge organique dans les eaux de surface testées pourrait ainsi être due à une pollution naturelle (due à la végétation en décomposition) mais aussi à une pollution d’origine exogène provoquée par les rejets urbains, industriels et les pratiques agricoles. Bien que la pollution des eaux brutes du barrage ne paraisse pas excessive, cette eau ne pourra être considérée comme potable qu’après traitement. Nous allons donc nous intéresser à deux principaux procédés de traitement d’une chaine de potabilisation conventionnelle, à savoir la chloration de l’eau et l’étape de clarification et notamment la coagulation-floculation au sulfate d’aluminium. La qualité de l’eau traitée d’une usine de traitement de l’eau potable dépendra ainsi principalement de la qualité de l’eau brute ainsi que de l’efficacité des procédés mis en place dans la filière de traitement.

Demandes en chlore des eaux du barrage Babar

Dans les stations de traitement, l’étape d’oxydation peut se situer à deux niveaux : en préoxydation avant l’étape de clarification et en désinfection finale, avant distribution des eaux aux consommateurs. A l’échelle nationale, l'utilisation des procédés d’oxydation chimique tels que la chloration, l'ozonation ou permanganate de potassium sont essentiels et varient d’une station à l’autre selon les besoins, soit pour viser la destruction des germes pathogènes ou pour permettre des actions complémentaires dans la destruction d'un grand nombre de micropolluants et dans l'amélioration des

160 Essais d’optimisation des procédés de clarification et de désinfection d’eaux de barrage de la région de Khenchela (Est algérien) goûts, des odeurs et dans la destruction des couleurs (Achour et Chabbi, 2014 ; 2017). Au niveau des stations de traitements algériennes, la désinfection finale est réalisée dans tous les cas par injection de chlore dans un canal de contact situé à la sortie ou en aval des filtres et en amont des réservoirs d’eau traitée. Les conditions de traitement, et en particulier le dosage, sont différentes d’une station à l’autre (Achour et Chabbi, 2014).

Potentiels de consommation en chlore

Le potentiel de consommation en chlore (PCCl2) est la capacité maximale de réactivité des eaux vis-à-vis du chlore. Le tableau 3 présente la gamme des valeurs de tous les potentiels obtenus dans le cas des différents échantillons d’eau de barrage. Les abattements U.V, représentatifs de la dégradation de la matière organique, sont présentés en % en comparant l’absorbance UV de l’eau brute (avant chloration) et celle de l’eau chlorée après 24 heures de temps de contact. Les résultats obtenus montrent des valeurs élevées des potentiels de consommations en chlore par les eaux du barrage de Babar et suffisamment proches pour toute la gamme d’échantillons. Cela met en évidence une demande assez importante en chlore, soit de 54 à 56 % du chlore introduit. De plus, il faut remarquer que les absorbances UV diminuent après chloration mais avec un abattement assez moyen, voire faible. L’importance de la demande en chlore dans ce cas est liée directement aux caractéristiques physico-chimiques de l’eau du barrage et notamment les constituants minéraux (ammoniaque, fer, manganèse, bromures, nitrites,..) et organiques qui peuvent présenter une réactivité appréciable en présence du chlore. La légère différence dans les valeurs des potentiels de consommation en chlore entre les divers échantillons peut être facilement liée à la faible variation dans certains paramètres de qualité de l’eau (Cf Tableau 2). Tableau 3 : Potentiels de consommation en chlore pour l’eau de barrage Babar et abattements absorbance UV Cl2introduit=20 mg/l ; temps de contact =24 h ; λ= 254nm.

PCCl2 (mgCl2/l) % d’abattement en UV 10,77-11,23 17, 05-33,87

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Enfin, notons que les résultats que nous avons obtenus pour les échantillons des eaux du barrage Babar sont en accord avec les résultats lors de travaux de certains chercheurs (Legube et al., 1990 ; Gang et al, 2003 ; Scott et al, 2014 ; Harrat et Achour, 2010 ; Achour et al, 2014 ; Chabbi et Achour, 2017), sur la chloration de différentes eaux de surface à travers le monde et en particulier en Algérie ; ces eaux étant caractérisées par des teneurs en matière organiques voisines de celles que nous avons étudiées. D’une façon générale, les demandes en chlore sont souvent corrélées à la nature et à la quantité de matière organique présente dans ces eaux. Par ailleurs, le suivi de l’évolution de l’absorbance en U.V (tableau 3), caractéristique de l’aromaticité, indique qu’une fraction de la matière organique des eaux de surface a pu être dégradée en structures aliphatiques après chloration. Parmi ces sous-produits organiques aliphatiques, il pourrait se former des trihalométhanes connus pour être potentiellement toxiques (Santé Canada, 2006). Les potentiels de formation en trihalométhanes (PFTHM) les plus élevés sont généralement observés pour les eaux les plus riches en composés organiques (Doré, 1989 ; Legube et al, 1990 ; Achour et al, 2009). Ainsi, pour des eaux de barrages de l’Est algérien, des valeurs des PFTHM comprises entre 39 et 112 µg/l ont été mesurées après chloration (Achour et al, 2009 ; Achour et Chabbi, 2014). Pour des eaux du centre du pays, des teneurs assez voisines ont également été détectées, de l’ordre de 80 à 146 µg/l (Achour et Guergazi, 2002 ; Achour et al, 2014). Il faut cependant noter que, dans le cadre de cette étude, les pourcentages d’abattement de l’absorbance UV restent assez peu élevés malgré une demande en chlore importante par les eaux testées. Ce qui laisse penser que la réaction de chloration pour ces eaux peut aboutir aussi à des composés organochlorés sous forme aromatique. De ce fait, la spéciation, les caractéristiques et les concentrations des sous- produits de cette chloration (SPC) seront conditionnées par la composition de cette matrice organique mais aussi par la force ionique de l’eau et la composition minérale. Il faut ainsi signaler que la présence d’ions bromures dans les échantillons d’eaux testées peut induire la formation de THM bromés nettement plus toxiques et plus mutagènes que les sous-produits chlorés (Richardson et al, 2007 ; WHO, 2005).

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L’intervention d’ions chlorures et sulfates, en provoquant une diminution des potentiels de consommation en chlore, peut rendre plus complexe le schéma réactionnel de consommation du chlore (Achour et Guergazi, 2002). Les nitrites, de par leur réactivité particulière vis-à-vis du chlore peuvent aussi interférer sur la réaction de désinfection de l’eau (Hellal et Achour, 2016). La présence de fer et de manganèse peut aussi induire des variations dans les demandes en chlore et dans l’évolution de l’aromaticité des composés organiques. Elle peut également favoriser des schémas réactionnels compétitifs et complexes au cours de la chloration des substances humiques (Achour et Guergazi, 2003).

Consommations en chlore et break-point

La détermination de la dose de chlore à ajouter à l’eau nécessite la détermination du break-point dans le cas d’une eau de surface contenant des composés azotés minéraux et organiques (Doré, 1989). Pour étudier l’influence du taux de chloration pour les échantillons d’eau du barrage Babar, nous avons ajouté à un même volume d’eau à examiner des doses croissantes du chlore. Après un temps de contact d’une demi-heure et 24h, on contrôle le chlore résiduel. L’évolution du chlore résiduel en fonction du chlore introduit lors de la chloration des eaux testées a abouti aux résultats dont nous présentons un exemple sur la figure 3.

12

10

8

6

4

Chlorerésiduel (mg/l) 2

0 0 4 5 6 7 8 9 10 Chlore introduit (mg/l)

Figure 3 : Courbes de Break-Point pour un échantillon d’eau du barrage Babar (Khenchela)

■ : Cl2 résiduel après 30mns de temps de contact ▲ : Cl2 résiduel après 24 h de temps de contact

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Ces courbes sont connues en traitement des eaux sous la dénomination de courbes de break point. Nous remarquons que, sur ces courbes, le chlore résiduel passe par un maximum puis décroît, passe par un minimum et croit en suite régulièrement. Pour l’exemple de la figure 3, la courbe de break point présente 3 zones caractéristiques d’une réactivité importante vis-à-vis du chlore : -Zone I : pour les doses les plus faibles en chlore introduit, le chlore est consommé instantanément par les éléments réducteurs organiques et minéraux dans l’eau. C’est le cas de l’eau chlorée aussi bien après 30 minutes que 24 heures de temps de contact. Dans cette zone, le chlore introduit se combine particulièrement à l’ammoniac et à certaines matières organiques azotées, la plus grande partie du chlore résiduel que l’on trouve est sous forme de chloramines (notamment les monochloramines). - Zone II : les doses de chlore assurent la destruction des composés formés par réaction avec le chlore (en particulier la dégradation des chloramines). La formation des chloramines est très rapide, par contre les réactions de leur destruction sont très lentes. -Zone III : Il y’a apparition de chlore libre, ce qui signifie que la demande en chlore est satisfaite après le point de rupture de la courbe ou Break-point. Il correspond théoriquement à l’oxydation complète de l’azote ammoniacal. Pour les eaux chlorées du barrage Babar, l’écart entre la droite des abscisses et le point de rupture (B.P) est important. Cela pourrait correspondre à la présence de trichloramines non réductibles par le chlore ou bien celle de chloramines organiques difficilement dégradables au cours de l’oxydation. Les composés organochlorés peuvent aussi se former. Notons également que la présence de l’azote ammoniacal en milieu aqueux contenant de la matière organique et du chlore entraîne des réactions compétitives chlore/ammoniac et chlore/matières organiques (Achour et al, 2018). La formation des chloramines (réaction chlore/ammoniac) peut se faire parallèlement à celle de sous-produits organohalogénés (réaction chlore/matières organiques), notamment la formation de trihalométhanes (THM) (Achour et Guergazi, 2002).

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Le chlore, en réagissant avec certains composés organiques naturels tels que les substances humiques, crée des sous-produits toxiques ou écotoxiques-dont les THM et l'acide haloacétique (AHA)- qui sont cancérogènes (Vandontorren et al, 2004 ; Xing-Fang et Mitch, 2018) et doivent donc être surveillés dans les réseaux d'eau potable. Dans le cas de l’exemple présenté en figure 3, l’essai de break-point pour l’échantillon d’eau testée permet de constater que la dose de chlore nécessaire à l’obtention du break-point est de 7 mg Cl2/l. Si nous rapportons cette valeur à celle de la teneur en azote ammoniacal, nous aboutissons à un rapport massique de l’ordre de 23, bien supérieur au break- point théorique de 7,6. Les résultats de la figure 3 des eaux du barrage Babar indiquent ainsi une forte réactivité du chlore avec les matières organiques et minérales, et un déplacement du break point vers les forts taux massiques. Ceci peut s’expliquer par la compétitivité des réactions chlore/ammoniac et chlore/composés organiques. La diminution du chlore résiduel est observée pour les échantillons après 24 heures ; ce qui indique que l’eau contient à la fois des composés qui consomment rapidement le chlore (éléments minéraux réducteurs) mais aussi différentes structures organiques qui consomment le chlore plus lentement. La consommation en chlore et la production de sous-produits potentiellement toxiques pourraient ainsi continuer jusqu’à 24 heures, voire plus, notamment dans les réseaux de distribution avec un long temps de séjour.

Détermination des conditions optimales de la clarification des eaux du barrage Babar

Le sulfate d’aluminium est utilisé comme coagulant dans la station de traitement d’eau du barrage Babar dans un bassin de mélange rapide qui est suivi par un floculateur pour le mélange lent puis par des décanteurs (DRE, 2014). L’objectif de cette étape de l’étude est de réaliser des essais de jar test en laboratoire afin de déterminer les conditions optimales de coagulation- floculation et de décantation des échantillons d’eau que nous avions prélevés.

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Essais pour la détermination des doses optimales de sulfate d’aluminium

Nous avons réalisé les essais de jar-test sur plusieurs échantillons d’eau de barrage en introduisant des doses croissantes de sulfate d’aluminium (SA). Plusieurs paramètres de qualité susceptibles d’être affectés par cette étape de traitement ont été mesurés à la fin de l’essai. Les résultats sont présentés d’une part sur la figure 4 et d’autre part dans le tableau 4. La figure 4 est relative à un exemple parmi les échantillons d’eau traitée de Babar et montre l’évolution d’une part de la turbidité de l’eau et d’autre part l’abattement en UV, caractéristique de la matière organique aromatique de l’eau.

Figure 4 : Evolution de la turbidité et de l’abattement en absorbance UV en fonction de la dose de sulfate d’aluminium introduit. Le tableau 4 récapitule les résultats optima obtenus à la fin des essais de jar-test pour deux échantillons différents d’eau du barrage. Tableau 4 : Résultats optima pour les essais de jar test des échantillons d’eau du barrage Babar.

% Eau Dose % TAC final Abattement pH final Al Barrage opt SA Elimination opt Abs UV à opt résiduel Babar (mg/l) turbidité (°F) 254nm Ech 01 20 89,77 48,39 7,20 8,5 0 Ech 02 20 60,40 53,94 7,58 8,7 0,003

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Au cours des essais de détermination de la dose optimale pour le barrage de Babar, nous constatons que, pour les deux échantillons pris pour exemple, la dose optimale de sulfate d’aluminium est assez peu élevée. Elle est de 20 mg/l, compte tenu des valeurs peu importantes de la turbidité ou de la matière organique caractérisée par l’absorbance en UV (Cf Tableau 2). Cependant, pour tous les échantillons que nous avons considérés, et selon les figures ci-dessus, la turbidité décroit jusqu'à un minimum qui correspond à la dose optimale. Ce minimum correspond théoriquement à un potentiel zêta nul pour les particules floculées. En pratique et dans notre cas, il serait très voisin de zéro et indiquerait que la neutralisation des colloïdes et leur floculation a pu être optimale pour une dose de sulfate d’aluminium de 20mg/l. L’allure de la courbe est expliquée par le fait que si la dose de coagulant est insuffisante, la charge n’étant pas nulle, il demeure une certaine partie de colloïdes en suspension. Si la dose est excessive il se produit une restabilisation des colloïdes (Bottero et Lartiges, 1992). Concernant l’évolution de la matière organique, l’optimum est obtenu pour la même dose de sulfate d’aluminium mais la restabilisation ne semble se produire que pour des doses beaucoup plus importantes. Ceci peut correspondre à la présence d’une fraction de la matière organique sous forme dissoute et pas seulement sous forme colloïdale. Cette matière organique pourrait être en grande partie sous forme humique, matière organique aromatique et provenant de la décomposition naturelle de végétaux ou d’animaux dans l’eau de surface. Très logiquement, le pH est abaissé du fait de la réaction d’hydrolyse du coagulant. L’espèce la plus probable de la forme hydrolysée de l’aluminium serait la forme prédominante du précipité d’hydroxyde d’aluminium Al(OH)3 compte tenu du pH initial proche de la neutralité. Le mécanisme prédominant correspondrait alors à une adsorption des colloïdes sur les flocs formés. Cette hypothèse est confortée par les valeurs très faibles, voire nulles de l’aluminium résiduel en solution après les essais, à l’optimum de la coagulation. Le TAC baisse du fait que, lors de l’utilisation du sulfate d’aluminium, chaque + - Al3 nécessite pour passer à l’état Al(OH)3 ,3OH provenant des bicarbonates et de l’eau elle-même, des protons H+ sont libérés et le pH s’abaisse également. Dans notre cas, nous pouvons conclure que les pH finaux à l’optimum sont voisins de 7 et le TAC final conserve des valeurs conformes aux normes pour la dose optimale de coagulant.

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Vérification du temps optimal de décantation au cours des essais de Jar test

Tout en conservant les mêmes conditions d’agitation du Jar Test, nous avons comparé deux temps de décantation (30minutes et 1 heure) pour différentes doses de coagulant. Nous présentons les résultats obtenus pour un des échantillons testés (Figure 5).

Figure 5 : Evolution de la turbidité et de la matière organique pour 2 temps de décantation et différentes doses de coagulant Ces résultats mettent en évidence que, dans nos conditions expérimentales et pour l’échantillon d’eau considéré, la variation du temps de décantation n’a pas eue d’influence observable sur l’élimination de la turbidité, quelle que soit la dose de sulfate d’aluminium utilisée. Par contre, l’augmentation du temps de décantation a semblé détériorer la décantation de la matière organique. Ce qui peut être mis en parallèle avec la nature de la matrice organique de cette eau et notamment la proportion de matières organiques dissoutes par rapport à celle de particules organiques en suspension et colloïdales. Pour nos essais et pour les échantillons d’eau prélevés, le temps de décantation de 30minutes aboutit donc au meilleur résultat en termes d’élimination de la turbidité et de la matière organique dont une partie appréciable serait sous forme humique.

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Essai de combinaison coagulation-floculation et chloration

L’essai de chloration a été réalisé en introduisant des doses croissantes de chlore (0,2 à 5 mg/l) dans les eaux préalablement floculées (20mg/l de sulfate d’aluminium) et décantées (Temps de décantation de 30mns). Le chlore résiduel a été contrôlé après un temps de contact de 30 minutes et 24 heures. La figure 6 présente les résultats de l’essai de chloration de l’eau floculée et décantée. La figure ci-dessous met bien en évidence une diminution notable de la demande en chlore au cours de la post chloration puisque la valeur de la dose au break-point (2mg/l) s’avère nettement inférieure à celle obtenue sur l’eau brute préchlorée (7mg/l).

Figure 6 : Evolution du chlore résiduel en fonction du chlore introduit dans l’eau du barrage de Babar floculée-décantée. Il parait également évident que la préchloration sur une eau chargée en composés organiques précurseurs de composés organohalogénés pourra générer des quantités notables de THM comme nous l’avions déjà noté pour d’autres eaux algériennes (Achour et al, 2009 ; Achour et Guergazi, 2002). Ainsi, une étude sur l’eau de barrage Ain Zada (Est algérien) avait déjà montré que la préoxydation au chlore ou au KMnO4 s'est avérée néfaste pour l'abattement de la matière organique au cours de l'étape de coagulation- floculation. Elle avait induit une diminution des rendements d'élimination de la matière organique suite à la formation de divers composés organochlorés tels

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que les THM, difficilement éliminables par coagulation-floculation (Afoufou et Achour, 2003). L’optimisation de la coagulation-floculation, et plus généralement la phase de clarification, avant la post-chloration permet en fait une élimination appréciable de la matière organique, notamment aromatique et surtout de type humique. Du fait de la diminution de la charge organique de l’eau de surface qui est fortement consommatrice du chlore, il s’ensuit une demande en chlore en chlore plus faible et donc une réactivité moindre vis-à-vis du chlore. Il est donc possible de conclure qu’une réduction possible des composés organohalogénés toxiques (dont les THM, composés indésirables), passerait d’une part par la limitation des doses de chlore en préchloration lorsque cette étape s’avère indispensable. D’autre part, un abattement optimal des précurseurs organiques devra se faire au cours de la phase de clarification.

CONCLUSION

Au cours de ce travail, l'étude réalisée en laboratoire a mis en évidence l'influence de plusieurs paramètres sur le processus de chloration des eaux du barrage Babar (Khenchela) mais aussi sur la phase de clarification et notamment l’étape de coagulation-floculation. Malgré les légères différences observées dans les échantillons prélevés de l’eau du barrage par rapport à certaines de leurs caractéristiques physico-chimiques (turbidité, teneurs en SH, minéralisation totale, dureté,…), les traitements effectués sur ces eaux ont abouti à des évolutions similaires des paramètres les plus touchés par la chloration et la floculation. Les essais de chloration sur les eaux brutes du barrage ont permis le suivi des consommations en chlore et de l’absorbance en UV à 254 nm, représentative de la fraction majoritaire de la matière organique dans les eaux de surface. Nos résultats ont montré des potentiels de consommation en chlore importants qui peuvent être reliés à la qualité des eaux testées et notamment à la proportion des éléments minéraux et organiques les plus réactifs vis-à-vis du chlore. D’une manière générale, nos résultats sont en accord avec ceux obtenus pour des eaux algériennes au cours d’études précédentes. Nous nous sommes intéressés dans un second temps à l’étape de coagulation floculation en ayant comme objectif de produire une eau avec une turbidité

170 Essais d’optimisation des procédés de clarification et de désinfection d’eaux de barrage de la région de Khenchela (Est algérien) résiduelle minimale mais aussi des teneurs en matières organiques les plus faibles possibles. Ainsi, de bons rendements d'élimination de la turbidité ont pu être obtenus, l'optimum correspondant souvent à celui de l'élimination de la matière organique. Le pH et le TAC finaux sont apparus comme paru conformes aux normes malgré une diminution progressive de ces paramètres au cours des essais. Un essai réalisé sur l'eau de barrage de Babar a permis également de montrer que la demande en chlore finale (en post-chloration) était diminuée et que la valeur du break point était nettement plus faible lorsque l'eau subissait préalablement une coagulation-floculation et décantation à des conditions optimales. Dans la perspective de l’utilisation des eaux du barrage pour l’alimentation en eau potable, il s’agit donc de tirer le meilleur parti des installations existantes dans la station de potabilisation mise en service en optimisant le fonctionnement de la station.

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