Lui Le Magazine De L'homme Moderne.Wps
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L'objectif de l'ex-photographe de Paris Match devenu éditeur de presse (Salut les copains) avec Jazz Magazine racheté à Eddie Barclay était de réaliser un mensuel de charme de qualité, « à la française ». Ce magazine, fortement inspiré de Playboy eut énormément de succès de 1963 au début des années 1980, avec les photographies de nombreuses starlettes 1 françaises dénudées, mais aussi de quelques actrices de premier plan, telles que Brigitte Bardot, Mireille Darc, Jane Birkin ou Marlène Jobert (la première fille à poser en couverture fut Valérie Lagrange (le numéro 1 parut le 01/11/63)) photographiées par Francis Giacobetti, futur réalisateur de Emmanuelle 2. 2 Son slogan était « Lui, le magazine de l'homme moderne ». On peut aussi noter la parution dans le magazine d'une bande dessinée de Lauzier : Les Sextraordinaires Aventures de Zizi et Peter Panpan. Dans les premiers collaborateurs, on retrouve Jean-Louis Bory, René Chateau, Philippe Labro, Francis Dumoulin, Francis Giacobetti, Siné, Michel Mardore, Aslan, Gilles Sandier, et bien d'autres. À ses débuts, Lui s'était doté d'une mascotte, une tête de chat, l'équivalent 3 pour le magazine du lapin de Playboy. Elle disparut au début des années 1970. Le premier âge d'or de la revue coïncida avec l'arrivée au poste de rédacteur en chef de Marcel Duhamel, fondateur de la Série noire. Les pages de charme se firent plus explicites, mais il n'y eut pas d'escalade véritable. Montrer la pilosité 4 pubienne d'une star aux seins nus, dans une revue grand public, passait alors pour audacieux. Marcel Duhamel reprit dans les titres de présentation des pages de charme le type de jeux de mots qu'il utilisait dans le cadre de la Noire (des exemples entre cent : «Marie ravie au lit » « Pascale, une penchée émue », « Bons baisers de Lucie » voire «Maud de Paris »). Jacques Lanzmann contribua à faire du magazine « osé » (où les filles nues gardaient jambes serrées) un journal aux vulgarités malicieuses, de bonne tenue 5 rédactionnelle. Vers la fin de cette époque, plusieurs tentatives eurent lieu pour changer la formule de Lui et relancer le titre, efforts qui aboutirent à la seconde série et la parution en deux cahiers à partir de fin 1987. On peut citer le changement du slogan, devenu « Lui, la défonce de 6 l'homme moderne » pour quelques numéros et des apparitions de pilosités pubiennes sur la photo de couverture. Le dernier numéro de la première série, le numéro 285, fut publié en novembre 1987. La revue avait une excellente rubrique cinéma, d'abord tenue par François Truffaut, puis par Michel Mardore dont le style élégant et la justesse d'analyse fit merveille. Des interview atypiques ont été alors réalisées par René Chateau: Sugar Ray Robinson, Alain Delon, Jean-Pierre 7 Melville, Jean-Luc Godard et Jean-Paul Belmondo. La revue publia également des textes inédits, dont un de Boris Vian, intitulé "le cinéma assassiné" (dans le numéro 11, de novembre 1964) sur la sclérose de la création cinématographique, présenté par Michel Mardore. 8 Le mensuel, très diffusé, réputé polisson bon chic - bon genre, connut un grand succès au cours des années 1960-70, sous l'égide de Régis Pagniez, directeur artistique et créateur de Salut les Copains, de Jean Demachy et de Jean- Pierre Binchet. Les nus, qui parurent vite fort sages, en raison de l'avènement du porno, étaient réalisés en studio à Paris, rue des Acacias, avec des modèles de l'Agence Catherine Arley. Ces modèles pouvaient être très jeunes, Anaïs Jeanneret fut Fille du mois à quinze ans. 9 Le magazine, qui cultivait volontiers le second degré, publiait de longues interviews d'hommes politiques et de personnalités « sérieuses » (Michel Durafour, Valéry Giscard d'Estaing, Michel Rocard...). Il faisait la part belle à la gastronomie et au vin (chroniques de Jacques-Louis 10 Delpal) et publia des photos de chefs et de viticulteurs demeurées célèbres : très mises en scène, en studio à Paris, mais aussi en extérieurs (Alsace, Champagne, Bordeaux et dans le Gers), elles étaient le fait du photographe Francis Giacobetti qui signait ses sujet "charme" du nom de Frank Gitty. Outre la fille nue au centre du magazine (la Fille du mois), il comportait une très populaire pin-up d'Aslan (rubrique Les filles qu'on épingle, traduction libre de pin up). 11 Le célèbre verbicruciste (à l'époque) Roger La Ferté y proposait chaque mois une grille de mots croisés aux définitions coquines, sous le titre "Les mots croisérotiques". Exemple de définition : "On y voit la lune dans l'eau"....pour le mot "bidet". Une autre rubrique, la Défonce du 12 Consommateur d'Éric Colmet-Daage, futur directeur de Photo, présentait chaque mois des objets insolites et originaux. Il y eut plusieurs hors-série de Lui consacré à ces objets. C'est aussi dans ce cadre que Francis Dumoulin imagina la Renault Le Car Van, garçonnière roulante dérivée de la Renault 5 et produite (1979 - 1983) à 450 exemplaires par Heuliez. 13 14 Né à Paris en 1928, Daniel Filipacchi était écolier au moment où la Seconde Guerre mondiale vint interrompre ses études. Autodidacte, il n’est jamais retourné à l’école et à l’âge de 13 ans il est devenu apprenti typographe dans une imprimerie spécialisée dans les publications clandestines. Il a travaillé, entre autres, 15 sur la composition de poèmes de Paul Éluard. À la fin de la guerre, s’intéressant à la photographie, il travaille comme pigiste pour des magazines et notamment Paris Match. Expert reconnu en jazz, on lui propose, le jour de la mort de Charlie Parker en 1955, d’animer une émission de radio en son honneur. Le succès est immédiat, et il animera, avec son ami Frank Ténot, une émission quotidienne de jazz, Pour ceux qui aiment le Jazz, sur Europe 1. Suite à 16 cette réussite, il décide de racheter Jazz Magazine, mettant la première pierre à ce qui deviendra un empire d’édition. Daniel Filipacchi et Frank Ténot organisent les tournées européennes de tous les grands musiciens de jazz comme Louis Armstrong, Duke Ellington, Charlie Parker, Ella Fitzgerald, Erroll Garner, Thelonious Monk et Mahalia Jackson. À cette époque, Filipacchi est producteur de disque pour RCA Records et Decca (Sylvie Vartan, Chantal Goya, Jean Ferrat, etc). Après avoir fondé Mood Records, il est 17 devenu fondateur et président de Warner France en 1970. En 1959, il décide de créer et d'animer une émission de radio consacrée au rock 'n' roll, Salut les Copains (1959-1968), inspiré d’une émission américaine. Son succès l'amène, en juillet 1962, à créer un magazine du même nom, dont le tirage atteint rapidement un million d’exemplaires. Daniel Filipacchi a par la suite lancé de nouveaux magazines (et en a acquis d’autres). Certains étaient destinés aux jeunes filles (comme Mademoiselle 18 Age Tendre), d’autres ciblaient les hommes (Lui, Newlook et les éditions françaises de Playboy et Penthouse), et d’autres encore étaient spécialisés tels que Ski, Son, Photo, Union, Mer et Moteur, Décoration, Cuisine. En 1976, Filipacchi rachète Paris Match, alors que le titre est en difficulté, et en fait l’un des magazines français les plus rentables et les plus influents. En tant qu’éditeur, sa passion pour le surréalisme l’a amené à publier des livres sur des artistes comme Salvador Dalí, 19 René Magritte, Max Ernst, Yves Tanguy, Dorothea Tanning, Joseph Cornell, Hans Bellmer, Wolfgang Paalen, Toyen, André Masson, Man Ray, Giorgio De Chirico et d’autres. Souvent, il s’agissait du premier livre paru sur l’artiste. Certains d'entre eux sont devenus ses amis. Il a acquis de nombreuses œuvres surréalistes, et a réuni la plus grande collection privée des œuvres de Joseph Cornell. En 1981, avec son ami Jean-Luc Lagardère, Daniel Filipacchi rachète le groupe Hachette Magazines, qui comprend 20 plusieurs titres comme Télé 7 Jours ou ELLE, à l’époque sur le déclin. Par la suite, ELLE a été lancé aux États-Unis, suivi par 25 éditions étrangères. Filipacchi et Lagardère ont poursuivi l’expansion de Hachette Filipacchi magazines aux Etats- Unis avec le rachat de Diamandis Communications, Inc. (anciennement CBS magazines), avec des titres tels que Woman’s Day, Car and Driver, Road and Track, Flying, Boating entre autres. Depuis de nombreuses années, Daniel Filipacchi figure sur la liste des plus 21 grands collectionneurs d’art dans le monde publiée par le journal ARTnews. Une exposition de sa collection et de celle de son ami Nesuhi Ertegün a été présentée en 1999 au musée Guggenheim à New York. Cet événement, intitulé « Surrealism: Two Private Eyes, the Nesuhi Ertegun and Daniel Filipacchi Collections », a été décrit par le New York Times comme « a gourmet banquet », suffisamment grand « pour remplir le musée Guggenheim du hall au plafond avec une formidable exposition. » Daniel Filipacchi a eu trois enfants, dont 22 l'écrivaine américaine Amanda Filipacchi. 23 Cet homme est une légende. Animateur, dans les années 1960, de l'émission Salut les copains - "Quel titre ridicule !" sourit- il aujourd'hui - et ex-patron du plus grand groupe de presse magazine du monde, Daniel Filipacchi, éternelles lunettes teintées sur le nez et faux air de Gregory Peck, est avant tout un esprit libre. Sur les murs de ses bureaux de Saint- Germain-des-Prés, où il nous reçoit, une infime partie de sa collection d'oeuvres surréalistes - Magritte, De Chirico, Miro... -, la plus importante du monde, dit-on, qui 24 a eu les honneurs d'une rétrospective au musée Guggenheim de New York. A 84 ans, "Citizen Dan" s'est enfin décidé à publier ses souvenirs, sous un titre malicieusement "magrittien" : Ceci n'est pas une autobiographie (Bernard Fixot).