journal des Débats

Le jeudi 3 mai 1979 Vol. 21 — No 23 Table des matières Rapports de commissions élues Etude du projet de loi no 119 — Loi constituant certaines municipalités dans l'Outaouais 1041 Rapports du greffier en loi sur des projets de loi privés Projet de loi no 245 — Loi concernant la cité de la Pointe-aux-Trembles 1041 Projet de loi no 213— Loi concernant la compagnie Centre de rénovation La Tuque Inc 1041 Projet de loi no 21 — Loi concernant le rôle de la valeur locative de la Ville de Montréal et de Ville Saint-Pierre ainsi que des cités de Côté Saint-Luc, Outremont et Westmount Première lecture 1041 M. 1041 Projet de loi no 213 Première lecture 1042 Renvoi à la commission des consommateurs 1042 Projet de loi no 245 Première lecture 1042 Renvoi à la commission des affaires municipales 1042 Questions orales des députés Election prochaine dans deux comtés 1042 Expropriation de l'Asbestos Corporation 1045 Recherche sur l'extraction du magnésium 1046 Modernisation des usines de pâtes et papiers 1048 Conflit dans des centres hospitaliers 1049 Subvention aux chantiers maritimes de Lauzon 1051 Rapport sur l'administration des centres d'accueil Lanaudière 1051 Enquête sur la vente de navires à un armateur grec 1052 Avis à la Chambre 1052 Projet de loi no 2 — Loi constituant l'Institut québécois de recherche sur la culture Deuxième lecture — Motion de report (suite) 1052 M. 1052 M. Robert Lamontagne 1055 M. Victor Goldbloom 1056 Rejet de la motion de report 1059 M. John Ciaccia 1059 M. 1062 M. Fernand Lalonde 1065 M. 1067 Renvoi à la commission des affaires culturelles 1072 Projet de loi no 19 — Loi modifiant la Loi des associations coopératives Deuxième lecture 1072 Mme Lise Payette 1072 M. Noël Saint-Germain 1074 M. Bertrand Goulet 1075 M. Claude Dubois 1076 Mme Lise Payette 1077 Renvoi à la commission des consommateurs 1078 Ajournement 1078 1041

(Quatorze heures treize minutes) Projet de loi no 213 Le Président: A l'ordre, mesdames, mes- M. Charron: De même, M. le Président, le pro- sieurs! jet de loi qui portera le numéro 213 qui concerne Un moment de recueillement. la compagnie Centre de rénovation La Tuque Inc. Veuillez vous asseoir. On me dit que le projet est conforme à l'avis et que l'avis est suffisant en nombre. La seule déro- Affaires courantes. gation que, par motion, je devrais solliciter de Déclarations ministérielles. cette Assemblée, c'est que, dans ce cas-ci aussi, Dépôt de documents. plus de six mois se sont écoulés depuis la paru- Dépôt de rapports de commissions élues. tion des avis. Je fais motion pour que cette déro- gation soit permise, M. le Président. M. le député de Deux-Montagnes. Le Président: Cette motion sera-t-elle adop- Rapports de commissions élues tée? Etude du projet de loi no 119 M. de Bellefeuille: M. le Président, qu'il me M. Levesque (Bonaventure): Adopté. soit permis de déposer le rapport de la commis- sion élue permanente des affaires municipales qui Le Président: Adopté. Les deux rapports sont a étudié, article par article, le projet de loi 119, Loi déposés. constituant certaines municipalités dans l'Ou- taouais, qu'elle a adopté avec des amendements. Présentation de projets de loi au nom du gou- vernement. Le Président: Rapport déposé. Merci, M. le M. le leader parlementaire du gouvernement. député. M. Charron: II n'y en a qu'un aujourd'hui. Dépôt de rapports du greffier en loi sur des C'est celui qui figure à l'article c) du feuilleton projets de loi privés. d'aujourd'hui. M. le leader parlementaire du gouvernement. Projet de loi no 21 Rapports du greffier en loi sur des projets de loi privés Première lecture

M. Charron: M. le Président, j'ai l'intention de Le Président: M. le ministre des Affaires muni- déposer aujourd'hui deux projets de loi privés au cipales propose la première lecture du projet de nom des députés. Je vais donc, à ce moment-ci, loi no 21, Loi concernant le rôle de la valeur loca- faire rapport des notes que le greffier en loi m'a tive de la Ville de Montréal et de Ville Saint-Pierre adressées sur chacun des projets de loi que je ainsi que des cités de Côte Saint-Luc, Outremont sollicite de présenter aujourd'hui. et Westmount. M. le ministre des Affaires municipales. Projet de loi no 245 Pour ce qui est du projet de loi no 245 qui M. Guy Tardif concerne la cité de Pointe-aux-Trembles, je fais lecture aux membres de la Chambre du rapport du M. Tardif: M. le Président, le projet de loi 21 greffier. On nous dit que le projet est conforme à autorise la ville de Montréal, ville Saint-Pierre et l'avis et que l'avis est suffisant en nombre. Toute- les cités de Côte Saint-Luc, d'Outremont et de fois, les avis ont été publiés après le jour du dépôt Westmount à utiliser, pour leur exercice financier du projet de loi au secrétariat des commissions, et respectif qui commence en 1979, le rôle de la plus de six mois se sont écoulés depuis la paru- valeur locative en vigueur pour l'exercice financier tion des avis. Je fais donc motion, M. le Président, précédent. Cette autorisation ne vaut que pour les pour qu'une dérogation aux règles pratiques des fins de la taxe de l'eau. projets de loi privés soit permise à cette occasion. Le Président: Est-ce que cette motion de Le Président: Cette motion sera-t-elle adop- première lecture sera adoptée? tée? Des Voix: Adopté. Des Voix: Adopté. Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce Le Président: Adopté. projet de loi. 1042

Le Président: Deuxième lecture, prochaine loi privé 213, Loi concernant la compagnie Centre séance ou séance subséquente. de rénovation La Tuque Inc., et cela a été déféré. Présentation de projets de loi au nom des Projet de loi no 245 députés. M. le leader parlementaire du gouvernement. Première lecture M. Charron: Pardon, je m'excuse. Maintenant, l'article g). M. le député de Viau propose la première lecture du projet de loi privé Le Président: Présentation de projets de loi no 245, Loi concernant la cité de la Pointe-aux- au nom des députés. Trembles. Est-ce que cette motion de première L'article f). lecture sera adoptée? M. Charron: Oui, l'article f). Des Voix: Adopté. Projet de loi no 213 Le Président: Adopté. Première lecture M. le leader parlementaire du gouvernement. Le Président: M. le député de Laviolette Renvoi à la commission propose la première lecture du projet de loi privé des affaires municipales no 213, Loi concernant la compagnie Centre de rénovation La Tuque Inc. Est-ce que cette motion M. Charron: Celle-ci, M. le Président, je fais de première lecture sera adoptée? motion pour qu'elle soit déférée à la commission des affaires municipales. Des Voix: Adopté. Le Président: Est-ce que cette motion sera Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce adoptée? projet de loi. Des Voix: Adopté. Le Président: Puis-je vous suggérer une mo- tion de déférence, M. le leader parlementaire? Le Président: Adopté. M. Charron: Si vous me permettez, M. le Pré- Période des questions orales. sident, comme les deux projets de loi... Non, ils ne M. le chef parlementaire de l'Opposition offi- sont pas de même nature. Je voudrais proposer... cielle. A quelle commission peut-on déférer cela, M. le Président? Il faudrait que... QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS M. Levesque (Bonaventure): Institutions fi- nancières. Election prochaine dans deux comtés Renvoi à la commission des consommateurs M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, tout en rappelant au leader parlementaire du M. Charron: Je crois que oui. Pour faire plaisir gouvernement que j'aurai d'autres voeux à expri- au chef de l'Opposition, un de ses derniers voeux mer avant la fin de mon mandat, je voudrais officiels, je fais motion pour déférer à la commis- adresser cette question à l'honorable premier sion des consommateurs, coopératives et institu- ministre. Il s'agit encore là d'un voeu. tions financières le projet de loi qui vient d'être (14 h 20) adopté en première lecture. Etant donné que le comté de Prévost n'est pas représenté à cette Assemblée depuis le 16 mars Le Président: Est-ce que cette motion sera dernier et que le comté de Beauce-Sud ne l'est adoptée? pas non plus depuis le 5 avril dernier, étant donné Adopté. la diligence du premier ministre dans le cas de Il s'agissait vraiment, cette fois, d'une vérita- Notre-Dame-de-Grâce, étant donné le piétinement ble question de privilège, M. le chef de l'Opposi- ou la lenteur du premier ministre dans le cas de tion. M. le ministre des Affaires municipales pro- Jean-Talon et d'Argenteuil, puis-je demander au pose la première lecture du projet de loi no 21, Loi premier ministre d'informer cette Chambre de la concernant le rôle de la valeur locative de la ville date qu'il prévoit pour la tenue des élections dans de Montréal et de ville Saint-Pierre ainsi que des les deux comtés de Prévost et de Beauce-Sud? cités de Côte Saint-Luc, Outremont et Westmount. Le Président: M. le premier ministre. M. Charron: L'article f), comme vous l'avez dit vous-même. M. Lévesque (Taillon): Oui, je comprends que le chef de l'Opposition s'intéresse à cette ques- Le Président: Excusez-moi. M. le député de tion. Je crois que le piétinement dont il parle, tout Laviolette propose la première lecture du projet de compris, nos amis d'en face n'ont pas eu trop à 1043 s'en plaindre. Cela s'est quand même fait à un contexte très difficile s'est à peu près mainte- l'intérieur de la limite qui, je crois, est reconnue nu. Tout cela représente, comme chaque élection, comme étant la limite décente — tant mieux d'une certaine façon une réaction des électeurs, quand on peut aller un peu plus vite — à l'intérieur des citoyens qui demandent à un gouvernement, à d'une limite, donc, qui n'a pas dépassé six mois et moins d'avoir perdu les pédales, de réfléchir. Mais qui, en fait, était plus proche de quatre mois. cela n'affecte en rien les décisions qu'on aura à Tout ce que je peux dire au chef de l'Oppo- prendre à l'intérieur des paramètres qui sont au sition, c'est que d'ici bientôt on avisera là-dessus maximum six mois en ce qui concerne Beauce- et aussitôt que la date pourra être fixée, on en fera Sud et Prévost. Je ne peux pas pour l'instant — l'annonce, mais la décision n'a pas encore été peut-être le pourrai-je d'ici quelques jours — dire prise. au chef de l'Opposition quelles sont les limites de temps les plus courtes comme les plus longues Le Président: M. le chef de l'Opposition. dans lesquelles cela va se présenter. Aujourd'hui, je ne pourrais pas le dire. Tout ce que j'ajouterai, M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, c'est que, chose certaine, on ne dépassera pas est-ce que c'est une période de réflexion que encore une fois des limites qui sont à l'intérieur de demande le premier ministre? Est-ce que c'est la décence démocratique pour les citoyens de ces parce qu'il a l'intention de modifier son option deux comtés. constitutionnelle ou, encore, qu'il a l'intention de modifier la politique de son gouvernement? Est-ce Le Président: M. le chef parlementaire de que c'est à la suite de ce qu'il disait lui-même dans l'Opposition. Jean-Talon, alors qu'il parcourait les rues de ce comté en disant que si le jugement des électeurs M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, devait être sévère, si son parti devait perdre du une dernière question additionnelle. Si je com- terrain, ce dont il doutait fort à l'époque, le prends bien, le premier ministre pourrait faire gouvernement allait prendre la chose comme un cette déclaration d'ici une semaine? Non, j'ai mal avertissement? Alors, M. le Président, est-ce que compris. le premier ministre pourrait préciser, comme il l'a déjà fait, d'ailleurs? Dans le passé, à un moment M. Lévesque (Taillon): J'ai dit possiblement donné, il m'a dit, quant aux élections de Jean- d'ici quelques jours. Talon et d'Argenteuil: Ce ne sera pas avant Pâques ou ce ne sera pas non plus après le M. Levesque (Bonaventure): C'est parce que printemps. le premier ministre a dit qu'il me répondrait. Donc, on savait que cela se situait entre le 15 avril et le 21 juin. Alors, tout en tenant compte M. Lévesque (Taillon): Je pense qu'on ne fera de mon préambule que j'ai voulu le moins agressif pas vite. possible, le moins douloureux pour le premier ministre et son équipe, puis-je demander simple- M. Levesque (Bonaventure): A ce moment-là, ment au premier ministre, afin que la population je pensais que c'était à l'intérieur de mon mandat. en soit prévenue, s'il peut nous donner, d'abord, une réponse à la question relativement à l'aver- M. Lévesque (Taillon): Ah! Je comprends tissement qu'il a reçu et qu'il avait lui-même maintenant le mot "voeu" que le chef de l'Oppo- prévu; deuxièmement, est-ce qu'il pourrait situer sition a employé au début de son intervention. Je cette élection dans un ordre de grandeur quel- ne peux pas lui donner de garantie que d'ici à conque? mercredi prochain — c'est mercredi pro- chain? — la décision sera prise. Mais, si on le Le Président: M. le premier ministre. peut, cela me ferait le plus grand plaisir de le faire. M. Lévesque (Taillon): M. le Président, pour M. Levesque (Bonaventure): Alors, simple- ce qui est de la réflexion et de la qualité relative ment pour continuer cette question additionnelle, d'avertissement qu'en démocratie les citoyens si vous le voulez bien, la dernière, et étant donné donnent parfois au gouvernement, il est évident, la présence maintenant du ministre aux Affaires d'après les résultats des élections partielles beau- intergouvernementales, il a eu l'occasion, comme coup plus peut-être dans Jean-Talon, pour toutes l'a annoncé le premier ministre, de prendre un sortes de raisons qu'on est en train d'essayer repos bien mérité, j'imagine. C'est tout simple- d'évaluer le mieux possible, que dans Argenteuil, ment pour clarifier une chose. Dans cet avertis- en dépit de toute une... sement qu'a reçu le premier ministre dans l'élec- tion du comté de Jean-Talon, il y avait peut-être un M. Levesque (Bonaventure): Du ministre double aspect. Il y avait celui qui avait été présenté d'Etat à la réforme électorale? Non? par le ministre des Finances qui disait que cette élection serait importante quant à l'option consti- M. Lévesque (Taillon): ... organisation qui, tutionnelle et de la façon dont elle serait perçue normalement, suit évidemment la personnalité qui par la population. Quant au ministre des Affaires occupe la chefferie que le vote de notre parti dans intergouvernementales, il a dit qu'il s'agissait 1044 d'une élection pour juger si on avait un bon gou- Le Président: Le député de Roberval. vernement. Entre les deux, relativement à l'aver- tissement que le premier ministre a reçu, pourrait- M. Lamontagne: Je pense que le premier il nous dire comment il interprète ces déclarations ministre doit à son rang de nommer un député ou qui semblent contradictoires de ses collègues? de se rétracter. Qu'il soit déçu ou frustré du résultat de Jean-Talon, on le comprend, mais qu'il Le Président: M. le premier ministre. ne fasse pas passer sa frustration sur les autres.

M. Lévesque (Taillon): Sans vouloir jouer au M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je pseudo-Salomon, M. le Président, j'ai bien l'im- n'étais pas là à ce moment-là, mais ç'a été pression que les deux avaient quelque peu raison. rapporté dans un journal. Au besoin, parce qu'il y Il y a un jugement des électeurs dans chaque élec- avait des témoins assez nombreux, si cela inté- tion. Il y a le jugement des électeurs sur, forcé- resse nos amis d'en face, parce qu'ils semblent ment, la performance du gouvernement au pou- tout à coup s'indigner de propos pareils... S'ils ont voir comme sur les qualités des candidats, c'est été prononcés, ce serait peut-être bon qu'on fasse évident. Il y a aussi, dans le contexte actuel, une les vérifications. Est-ce ce que demandent le chef tension qui augmente et qui est normale. On s'est de l'Opposition et le député de Roberval? rendu compte qu'elle était très forte d'ailleurs. C'est une tension qui augmente en ce qui concer- M. Levesque (Bonaventure): Pour répondre à ne l'avenir politique constitutionnel du Québec. la question du premier ministre, M. le Président, si Je ferai remarquer de nouveau — on essaie de on fait les vérifications, je voudrais bien qu'elles tirer les enseignements à partir de ces deux fac- soient complètes, que cela comporte également teurs et de tous les autres qu'on peut essayer une vérification sur ceux qui ont coupé les fils d'analyser, ce qui est normal — au chef de l'Oppo- téléphoniques pour empêcher les communica- sition, ce que j'ai fait déjà dès le lendemain de tions, le jour du vote, entre la centrale du Parti l'élection, que nos amis d'en face ont fait une libéral et les organisateurs du parti. Il faudrait campagne référendaire. J'ai même entendu dire également faire une vérification pour savoir s'il est que le candidat du Parti québécois, suivant vrai que la candidate du Parti québécois disait: Si l'exemple — pas particulièrement, à mon avis, vous ne pouvez pas voter pour moi, au moins recommandable — d'un des députés — je ne me votez pour l'Union Nationale. On pourrait faire souviens plus lequel — du Parti libéral récemment, énormément de vérifications... est allé dans un coin du comté de Jean-Talon pour leur dire, en particulier à des religieuses qui Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! Je ne revenaient de l'Afrique: Vous avez peut-être vu voudrais pas qu'on refasse la campagne électorale d'assez près ce qui se passe en Ouganda, alors qui est, de toute manière, terminée. faites attention! C'est cela que j'appelle se servir d'arguments... M. Lévesque (Taillon): M. le Président, pour ce qui est des fils téléphoniques, je sais qu'il y a Des Voix: Oh! un titre qui a paru à propos de cet incident dans un des journaux du matin, du genre: On ne peut M. Lévesque (Taillon): Oui. Ecoutez! pas parler de crime, mais à qui le délit profite? Je me demande si ça ne fait pas partie des res- Des Voix: ... sources de l'imagination qu'on trouve souvent chez nos amis d'en face. Je connais un peu les M. Lévesque (Taillon): M. le Président... traditions. Pour ce qui est d'une chose... (14 h 30) Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! M. Lamontagne: M. le Président, je ne sais pas comment ça marche dans le Parti québécois, M. Lévesque (Taillon): M. le Président... mais dans une campagne électorale, lorsqu'à 8 heures du matin toutes vos structures téléphoni- Le Président: A l'ordre s'il vous plaît! ques sont coupées, je pense qu'on n'a pas besoin de l'ironie du premier ministre... M. Lévesque (Taillon):... tous les piaillements possibles ne changeront pas le fait que ce qui Le Président: M. le député de Roberval. M. le s'est passé dans le comté de Jean-Talon, ici à député de Roberval. Je pense qu'on est très loin deux pas de la salle où nous sommes, a quand des élections de Beauce-Sud et de Prévost. J'avais même été constaté par des témoins. Alors, bon. été un peu large à l'égard du premier ministre et du chef de l'Opposition, dans les deux cas; on Des Voix: Qui? avait étiré la question principale peut-être un peu trop parce que la question principale portait sur la M. Lévesque (Taillon): Sauf erreur... date des élections dans Prévost et dans Beauce- Sud. Nous voilà de retour dans Jean-Talon et dans M. Lamontagne: Question de privilège, M. le Argenteuil. Je voudrais reconnaître le plus rapide- Président. ment possible le député de Gatineau. 1045

M. Gratton: Quant à moi, M. le Président, je domaine minier du Québec entre les mains de ses nous ramène dans Prévost et dans Jean-Talon. Je vrais propriétaires, c'est-à-dire les Québécois, et m'excuse, dans Prévost et dans Beauce-Sud. Je compléter une politique de l'amiante qui va nous m'en excuse auprès du premier ministre. J'accep- permettre demain, même si elle est à peine en te volontiers que le premier ministre nous dise, la marche, d'inaugurer au Cap-de-la-Madeleine, à semaine prochaine ou dans quelques jours, le l'emplacement de l'ancienne usine Wayagamack, délai, minimal et maximal, dans lequel il entend une deuxième industrie qui, celle-là, est basée sur déclencher ces élections partielles. la transformation de l'amiante, qui s'appelle Par contre, il donnerait une certaine satis- LUPEL-Amiante. faction à l'Opposition officielle s'il pouvait, dès Très bientôt, des développements survien- maintenant, dès aujourd'hui, nous assurer qu'il dront dans le domaine du magnésium dans la ré- fera en sorte que les campagnes dans Prévost et gion de Thetford, sans compter une série d'autres dans Beauce-Sud, soient conçues, pensées et projets qui sont déjà à l'étude, mais qui exigent menées par le ministre des Affaires intergouverne- deux choses, dont la première est ce levier de la mentales et le ministre de la réforme électorale. disponibilité de la ressource, de la fibre, chez nous. LUPEL-Amiante va fabriquer du linoléum Le Président: Question principale, s'il vous pour lequel l'amiante s'en allait en Angleterre sur- plaît! tout et revenait sous forme de linoléum. Désor- M. le député de Saint-Laurent. mais, il sera fait ici, au Québec, par des entrepri- ses en jonction qui sont toutes des entreprises M. Forget: M. le Président, ma question... québécoises. La disponibilité de la fibre, la connaissance Des Voix: II n'y a pas de réponse? des marchés, c'est relié à l'achat de quelque façon que ce soit pourvu qu'elle soit légitime de la Le Président: M. le député de Saint-Laurent, société Asbestos. C'est elle qui a de la fibre libre je suppose que vos collègues vont vous laisser sur les marchés. Ce qu'il y a eu jusqu'ici, depuis poser votre question. des mois et des mois où, je pense, conformément aux processus les plus normaux, des deux côtés Expropriation de l'Asbestos Corporation on a fait des évaluations, c'est que des firmes ont été retenues. Pendant des mois, elles ont fait ces M. Forget: Je le suppose, M. le Président. Ma évaluations sur tous les facteurs normaux des question s'adresse au premier ministre et elle est transactions de ce genre-là. Elles sont arrivées relative à l'affaire de la société Asbestos. Hier, le avec un décalage invraisemblable, soit une centai- ministre des Finances faisait quelques annonces ne de dollars l'action, d'après les propriétaires, relativement à cette question. Je voudrais savoir c'est-à-dire ceux qui ont les actions de contrôle, du premier ministre, à défaut de poser la même General Dynamics, et autour de $40 avec des question au ministre des Finances, s'il ne trouve marges possibles, mais des marges raisonnables pas anormal et même antidémocratique, alors que de négociation, d'après l'évaluation qui a été faite le gouvernement se propose de dépenser des pour le gouvernement du Québec. sommes considérables de deniers publics, au Là-dessus, il y a eu des appels téléphoniques, minimum $100 millions et probablement davanta- des rencontres. La négociation, elle était là. A quel ge, qu'au cours des derniers mois il ait fallu point pourrait-on rapprocher les $100 théoriques littéralement tirer les vers du nez du ministre des de l'évaluation de General Dynamics des $40, ni Finances, qui est responsable de cette négocia- plancher, ni plafond, mais enfin d'évaluation rai- tion, alors qu'il n'a voulu dire ni si, effectivement, sonnable dont nous disposions? Il y a eu un cer- il y avait des négociations, ni si le gouvernement tain rapprochement. Il n'y en a pas eu assez pour faisait ou ferait une offre, ni finalement, même qu'on considère qu'il est possible d'arriver à une hier, si, effectivement, il y aurait ou non expropria- solution raisonnable en continuant comme cela à tion. piétiner. Il fallait rappeler à ce moment-là — c'est ce qu'a annoncé hier le ministre des Finances — Le Président: M. le premier ministre. le projet de loi d'expropriation. Ce projet de loi d'expropriation, c'est l'instrument nécessaire. Si, M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je suis en cours de route, il rend plus raisonnables nos obligé de réitérer brièvement — parce qu'il y a eu interlocuteurs de General Dynamics, tant mieux, d'assez longs échanges hier, je pense que c'était on ne tient pas à s'en servir, mais on croit abso- la moitié de la période des questions, sur cette lument essentiel, pour réaliser et compléter une question de l'amiante — je vais me contenter de politique de l'amiante pour le Québec, de disposer réitérer brièvement, pour l'essentiel, ce que le de cet instrument-là. Le jour où l'Assemblée natio- ministre des Finances a dit. Je pense qu'il est bon nale aura consenti, on l'aura l'instrument et l'on que les citoyens le sachent. C'est vrai, cela va s'en servira au besoin. coûter un certain nombre de millions de dollars. C'est vrai que cela va compléter aussi, je pense, Le Président: M. le député de Saint-Laurent. une politique de l'amiante qui est basée sur la disponibilité des ressources — au moins partielle- M. Forget: M. le Président, d'ici quelques ment — de ce secteur absolument stratégique du jours, l'Assemblée nationale sera apparemment 1046 saisie du projet de loi. Est-ce que le premier mi- Le Président: M. le premier ministre. nistre se rend compte qu'en refusant d'indiquer de façon claire les intentions gouvernementales, à la M. Lévesque (Taillon): Si j'ai bonne mémoire fois quant au prix et quant à la décision effective — je peux bien me référer à ce chapitre dont je ne d'exproprier, ce débat-là va se dérouler dans l'obs- repasse pas le détail tous les jours, ni chaque curité la plus complète? Il sera impossible de sa- semaine, parce que c'est une chose accomplie; je voir où on s'en va avec cette loi d'expropriation, ni pense que le député de Saint-Laurent doit s'en quelles sont les conditions préalables à l'expro- souvenir aussi, je peux vérifier un peu plus — priation, quel est l'état de la négociation ou de la il y avait une dissémination absolument interconti- non-négociation, puisqu'il y a toutes sortes d'affir- nentale, d'ailleurs, en grande partie, non seule- mations qu'on retrouve dans les journaux mêmes ment nord-américaine, mais des actions, entre d'aujourd'hui. On ne saura même pas si la loi va autres, Shawinigan Water & Power et de son un jour être appliquée. Est-ce que c'est normal de ensemble. refuser d'informer l'Assemblée nationale au mo- (14 h 40) ment où une décision de cette envergure se A ce moment-là, il fallait bien fixer un prix prend? d'offre, un peu de la même façon qu'on voit ac- tuellement sur les marchés, des "bids", comme on Le Président: M. le premier ministre. dit dans le jargon, des espèces de tentatives de prise de contrôle basées sur un prix qui est offert M. Lévesque (Taillon): Pour ce qui est du à des actionnaires qui ne sont pas en bloc. Là, il prix, il serait complètement aberrant de commen- s'agit d'au-delà de 50% des actions qui sont cer à donner des chiffres précis ici. Je pense que contrôlées par une grande entreprise multinatio- n'importe quelle expérience dans le secteur public nale. ou dans le secteur privé, ayant en face de nous Quand on essaie de négocier, on négocie; des gens qui ont eu une longue expérience dans donc, par définition, on ne fixe pas le prix définitif le secteur public, un minimum d'expérience fait tant qu'on négocie, parce qu'il s'agit de négocier comprendre tout de suite, et je suis sûr que le au-delà de 50% d'un coup. Si on va à l'expropria- député lui-même le comprend, l'absurdité d'une tion, il y aura un prix de fixé, que le tribunal réponse qui serait donnée précisément à cette d'arbitrage aura, lui, à évaluer, à maintenir. Il est question. Il est évident que le prix que le gouver- évident que ça ne pourra pas aller plus bas. Donc, nement du Québec veut payer tourne autour de il faut faire bien attention au prix qu'on serait prêt $40 ou $42 de l'évaluation qu'on considère raison- à offrir quand on arrivera là. Mais il est évident nable. Il y a des marges là-dedans, toujours. Elles qu'un tribunal d'arbitrage pourrait aussi hausser ne se rapprochent ni de près, ni de loin du prix quelque peu, mais ça, ça lui appartiendra le cas absolument aberrant auquel General Dynamics a échéant. Mais on n'est pas du tout dans le même établi la valeur de ses actions. Donc, si le député contexte de l'émiettement, de l'éparpillement gé- de Saint-Laurent veut savoir le prix que le gouver- néralisé des actions. nement est prêt à payer, il n'a qu'à regarder autour et alentour de $40 ou $42, mais il y a encore des Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. tractations possibles. On n'est pas pour commen- cer à se couler dans le ciment tout de suite, cela Recherches sur l'extraction du magnésium ne se fait pas. Chose certaine, c'est que cela ne s'y rapprochera ni de près, ni de loin, quel que soit le M. Biron: Ma question s'adresse au ministre prix final qui ira devant un tribunal d'arbitrage, des Richesses naturelles et fait suite à une ques- comme l'offre du gouvernement du Québec, parce tion que je lui ai posée l'an dernier, au mois de que si on doit aller à l'expropriation, il y a des arbi- juin, à propos des réserves importantes de magné- trages qui sont prévus. Il sera en fonction, aussi sium dans les résidus de minerai d'amiante au serré que possible, d'un prix équitable, mais équi- Québec. table non seulement pour les actionnaires étran- Or, le ministre, à l'époque, nous avait dit qu'il gers, mais pour les citoyens du Québec. y avait un contrat qui avait été octroyé à l'Uni- versité de Sherbrooke pour extraire, par voie Le Président: M. le député de Saint-Laurent, chimique, le magnésium de ces résidus. Nous dernière question. savons que, depuis ce temps-là, on a pu produire des concentrés très purs de carbonates de magné- M. Forget: Le premier ministre a beau dire sium, de même que des oxydes de magnésium. Je que ce serait stupide de parler de chiffres précis, voudrais savoir où en est rendu ce contrat ou ces ne se souvient-il pas que lors de la nationalisation recherches et a-t-on prouvé pouvoir réussir à pro- des compagnies d'électricité, à laquelle il a été duire des quantités importantes de magnésium à intimement mêlé, ainsi que le ministre des Finan- même ces résidus à des prix abordables? ces à l'époque dans une autre capacité, il y a eu, dès l'origine, une déclaration d'intention ferme du Le Président: M. le ministre des Richesses gouvernement sur deux choses: la décision naturelles. d'acheter d'une façon ou d'une autre ces actifs, et le prix approximatif que l'on voulait payer, de M. Bérubé: Oui, M. le Président, c'est avec façon beaucoup plus précise que le gouvernement énormément de fierté, d'ailleurs, que je répondrai n'a fait cette fois. à cette question puisque c'est signe de la vitalité 1047 absolument exceptionnelle des Québécois lors- Cependant, il existe des marchés particulière- qu'ils se mettent à la recherche scientifique. Pen- ment intéressants dans le domaine de certains dant trop longtemps, on a négligé l'ingéniosité, produits chimiques spécialisés pour utilisation l'inventivité de nos chercheurs québécois et je dans les peintures, pour utilisation comme charge dois dire qu'aujourd'hui il faut la saluer. minérale dans les plastiques, pour différentes Effectivement, grâce à de l'aide gouvernemen- utilisations dans les produits pharmaceutiques en tale, qui a été votée, d'ailleurs, à l'Assemblée particulier. Je ne voudrais pas m'avancer pour nationale ici, il y a deux ans, en 1977 — notre l'instant dans l'identification exactement du volu- premier budget — nous avons pu entreprendre me du marché en fonction du prix qu'on peut des recherches portant spécifiquement sur l'ex- envisager pour ces produits, étant donné que ce traction du magnésium. Nous vivons, depuis main- serait peut-être désavantager notre future Société tenant plus d'un siècle, en présence d'amas im- nationale de l'amiante dans un projet qu'elle envi- menses qui polluent totalement l'environnement, sage avec énormément de sérieux actuellement. qui n'ont aucune utilité pratique, industrielle, et on Donc, il existe effectivement des marchés qui vivait finalement à côté d'une richesse. Cette ont été identifiés, des marchés facilement péné- richesse est un réservoir absolument phénoménal trables, d'autant plus que nos coûts de production de magnésium, un des plus vastes réservoirs de présentement sont ce qu'il y a de plus modeste. magnésium au monde. C'est un amas qui est déjà sorti de la terre, qui est déjà broyé, dans un état où Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. on peut en extraire le magnésium. Seulement, il faut faire preuve d'imagination. Il faut faire preuve M. Biron: On sait que le magnésium peut d'ingéniosité et, effectivement, des chercheurs aussi être employé avec l'aluminium. Est-ce qu'il y a québécois de l'Université de Sherbrooke ont dé- eu des démarches de faites ou des discussions couvert le secret de son extraction. avec la compagnie Aluminium du Canada pour Il me fait plaisir de dire qu'aujourd'hui nous employer une partie de ce magnésium? Est-ce sommes en mesure d'extraire du magnésium de qu'il y a eu des pourparlers avec certaines entre- nos résidus d'amiante à un prix extrêmement prises dans le domaine de l'automobile pour avantageux, je dois dire. Pour l'instant, nous ne employer le magnésium dans les moteurs d'auto- pensons qu'à des carbonates, qu'à des oxydes, mobile? On a parlé même éventuellement d'un mais je pense que d'ici peu nous serons en investissement qui pourrait venir au Québec et mesure d'annoncer une application concrète, sur qu'on attend toujours. le plan industriel, du génie, de l'inventivité des Est-ce que le ministre peut également nous Québécois quand on leur fait confiance. dire quels seront à peu près les montants investis Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. au cours de la prochaine année dans ce domaine- là et si on peut créer des emplois? Est-ce qu'il y M. Biron: II y avait un contrat ou des négo- aura une participation de la Société nationale de ciations en cours avec une société américaine l'amiante du Québec ou de SOQUEM ou de pour développer encore plus l'expertise et surtout quelques autres organismes gouvernementaux? la mise en marché du magnésium québécois extrait à partir des résidus d'amiante. Est-ce que le Le Président: M. le ministre des Richesses ministre peut nous informer du potentiel possible naturelles. de tonnes de magnésium ou de milliers de tonnes de magnésium qu'on aurait dans ces résidus? Est- M. Bérubé: II ne faut pas vendre la peau de ce qu'il peut aussi nous donner le nom de cette l'ours avant de l'avoir tué, M. le Président. Dans la société et nous dire, si on en est venu à un accord mesure où nos recherches portant sur l'extraction à la suite de cette négociation avec la société du magnésium métallique n'en sont — je ne américaine? devrais pas dire à leur tout début — peut-être qu'à mi-chemin, il est peut-être dangereux de s'avan- Le Président: M. le ministre des Richesses na- cer. Cependant, on devait me livrer récemment un turelles. premier lingot de magnésium métallique fabriqué au Québec. Il va sans dire que je n'ai pas inondé le M. Bérubé: Effectivement, M. le Président, marché avec mes 500 milligrammes. Néanmoins, il nous avons fait appel à une société américaine s'agit donc d'un premier effort qui indique qu'une spécialisée dans les études de mise en marché et deuxième idée d'un autre groupe de chercheurs connaissant bien le problème des produits chi- du Québec semble effectivement devenir de plus miques. Malheureusement, le nom m'échappe au en plus concrète et peut-être, d'ici quelque temps, moment où je vous parle; par conséquent, je ferai serai-je en mesure de vous dire qu'effectivement le tout simplement la demande à mon ministère et je Québec pourrait devenir un des grands produc- devrais, avant la fin de la période des questions, teurs de magnésium au monde. Mais ne vendons vous obtenir la réponse. Nous avons effectivement pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Si vous fait une étude. Les marchés du magnésium me le permettez, je tuerai l'ours quant à l'oxyde de — vous n'êtes pas sans le savoir — sont évi- magnésium, au carbonate demain matin, à Trois- demment assez limités encore, d'une part parce Rivières. que le prix du magnésium a été trop élevé dans le passé. Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. 1048

M. Biron: Juste une simple question, car je Modernisation des usines de pâtes et papiers veux revenir sur une partie de ma troisième question. Est-ce qu'il y a eu des pourparlers avec M. Grenier: Ma question s'adresse au ministre la société Aluminium du Canada pour employer le des Richesses naturelles et a trait à la politique de magnésium avec l'aluminium produit au Québec? modernisation des usines de pâtes et papiers mise de l'avant par le gouvernement québécois et des Le Président: M. le ministre des Richesses difficultés qui ne finissent plus de surgir entre naturelles. Québec et Ottawa au sujet d'une entente entre les deux ordres de gouvernement à ce sujet. En com- M. Bérubé: Comme on ne produit pas de mission parlementaire, au cours de la semaine magnésium, nous n'avons pas abordé la société dernière, le ministre a laissé entendre qu'il serait Alcan à ce jour pour la fabrication d'alliages question de ce problème au Conseil des ministres aluminomagnésium. Effectivement, au cours de et que peut-être, le Québec ferait cavalier seul, mes recherches scientifiques au tout début, j'ai dans ce domaine. même travaillé sur des alliages spéciaux d'alumi- (14 h 50) nium et de magnésium, ce qu'on appelle des... Je voudrais savoir du ministre, compte tenu Non, je ne vous noierai pas sous les termes de l'importance de cette question pour des milliers techniques, mais ce sont des alliages superplas- de travailleurs dans ce domaine et dans la région tiques aux propriétés extraordinaires qu'on est en chez nous d'une façon particulière, si le gouver- train présentement de développer sur le plan nement a pris une décision finale dans ce dossier. commercial aux Etats-Unis et en Russie. Effecti- Est-ce qu'il est décidé à faire cavalier seul, et dans vement, il y a un marché très intéressant pour ces l'affirmative, combien d'argent sera-t-il débloqué alliages d'aluminium et de magnésium, mais je au cours de cette année pour que l'on procède à dois dire que les connaissances scientifiques du la modernisation de nos usines de pâtes et pa- chef de l'Union Nationale m'étonnent assez. Néan- piers? moins, je dois dire que c'est effectivement un marché potentiel intéressant. Cependant, com- Le Président: M. le ministre des Terres et mençons donc par faire tous les essais de labo- Forêts. ratoire nécessaires, les essais de pilotage néces- saires et, éventuellement, peut-être que, si Dieu M. Bérubé: C'est là un bel exemple, M. le nous guide, la chance nous sourira à nous aussi et Président, d'un de ces problèmes dont nous avons que, par conséquent, on aura plusieurs usines de discuté à fond lors de la défense de nos crédits au magnésium à annoncer. Cependant, je dois dire ministère des Terres et Forêts. Effectivement, nous que nous sommes beaucoup plus près d'une avons, en commission à tout le moins, approuvé décision concernant les produits chimiques du un montant de $17 millions pour la relance de magnésium; là, vraiment, on est à la porte de la notre industrie forestière. réponse. Ce qui est dramatique, dans un cas comme celui-là, c'est qu'il y a des travailleurs québécois Le Président: Une dernière question addition- qui payent pour les lenteurs gouvernementales et nelle, M. le député de Saint-Laurent. je pense que le député de Mégantic-Compton y est, plus que tout autre, sensible. Plus que tout M. Forget: Je ne veux pas intervenir dans une autre sensible parce que les citoyens de son comté conversation entre amis... attendent après une décision gouvernementale et savent que leur usine tient à un cheveu. Ils savent M. Grenier: Ce sont encore des sujets qui que la conjoncture économique est temporaire. Ils vous dépassent. savent que le dollar canadien pourrait très bien ne pas rester au niveau où il est. Ils savent très bien M. Forget: ... mais je voudrais demander au que leur usine pourrait fermer bientôt. Ils se deman- ministre des Richesses naturelles si ce dévelop- dent ce que les gouvernements attendent. pement, qui est fort intéressant effectivement, ne C'est vrai, M. le Président, que depuis deux démontre pas justement la non-nécessité de ans, nous avons élaboré un programme. C'est l'achat d'une mine pour créer des emplois dans le également vrai que nous avons contacté l'indus- domaine de la transformation ou de l'exploitation trie, que nous avons eu un appui unanime de l'in- des sous-produits de l'amiante. dustrie. J'ai même pu lire, à cette commission, une lettre du président de l'Association de l'industrie Le Président: Le ministre des Richesses natu- forestière québécoise à M. Lessard dans laquelle il relles. nous accordait un appui absolument sans équivo- que et où il condamnait l'attitude d'Ottawa. M. Bérubé: Non, M. le Président. Non, M. le Malheureusement, M. le Président, après neuf Président, parce que si les compagnies minières mois, nous attendons. Nous attendons et nous qui détiennent les rejets d'amiante décident de avons, je dois dire, décidé de cesser d'attendre. En nous les vendre $75 la tonne, on va faire faillite. effet, M. le Président, il nous faut un programme de relance de notre industrie forestière. Nous Le Président: M. le député de Mégantic- aurons un programme de relance de notre indus- Compton. trie forestière. Néanmoins, ce qu'il faut reprocher 1049 au gouvernement fédéral, ce sont deux choses: Le Président: Très bien, M. le ministre. D'abord, l'obligation d'accepter la tutelle totale du Mme le député de L'Acadie. gouvernement fédéral, qui contrôlerait chaque dé- cision impliquant chaque industrie du gouverne- Conflit dans des centres hospitaliers ment du Québec, dans une double bureaucratie, lourde, coûteuse, et que rejette absolument toute Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ma ques- l'industrie, d'autant plus que les critères du gou- tion s'adresse au ministre des Affaires sociales. Il y vernement fédéral n'ont jamais été définis et sont a quelque temps, le président de l'Association des purement discrétionnaires et, par conséquent, directeurs généraux des services de santé... sont rejetés entièrement par toute l'industrie fores- tière. M. Grenier: M. le Président, je m'excuse, je Deuxièmement, le gouvernement fédéral en- croyais que c'était une question additionnelle que tend nous imposer une tutelle sur le pouvoir de vous aviez l'habitude de laisser poser par l'une ou dépenser du Québec, alors que le Québec s'enga- l'autre des formations... ge unilatéralement, à ses propres frais, avec l'argent des contribuables québécois, qui l'ont Le Président: M. le député de Mégantic- payé en impôt au gouvernement du Québec. Le Compton, je crois que nous avons fait le tour du gouvernement fédéral veut mettre en tutelle tout sujet. Mme le député de L'Acadie. autre programme du gouvernement du Québec, nouveau, existant, passé, de quelque nature que M. Bérubé: Je m'étonne que chaque fois que ce soit, impliquant l'industrie forestière et il rend nous abordons... conditionnelle sa participation à tout programme bilatéral d'aide. Le Président: M. le ministre, à l'ordre, s'il Ceci est totalement inadmissible, M. le Prési- vous plaît! M. le ministre, s'il vous plaît! dent. Mme le député de L'Acadie.

Le Président: M. le député de Mégantic- Mme Lavoie-Roux: M. le Président, pour con- Compton. soler le député de Mégantic-Compton, la question que je m'apprête à poser, peut peut-être l'intéres- M. Grenier: Au-delà de la réponse du ministre, ser. A tout événement, ma question s'adresse au j'aimerais savoir s'il s'agit là d'une chicane de ministre des Affaires sociales. Il y a quelque fonctionnaires uniquement. S'il s'agit d'une chica- temps, le président de l'Association des directeurs ne de fonctionnaires entre les deux paliers de gou- généraux des services de santé et des services vernement, le ministre a-t-il l'intention de trancher sociaux du Québec avait demandé, en vertu de rapidement, pour enlever cette épée de Damoclès l'article 128 de la Loi sur les services de santé et qui pend au-dessus des travailleurs d'East Angus les services sociaux de faire enquête sur le Centre et des autres travailleurs des pâtes et papiers au hospitalier Frère-André du Lac-Mégantic où sévis- Québec? Est-ce que cela devra durer encore un sait un conflit entre l'administration du centre hos- an, deux ans, ou si cela devra se régler prochai- pitalier et, d'autre part, la directrice, conflit qui a nement? conduit finalement au congédiement, que l'Asso- ciation des directeurs généraux considère injusti- Le Président: Brièvement, s'il vous plaît, M. le fié, de la directrice... Les journaux rapportent ministre. même qu'il y avait dans cette lutte une certaine coloration politique à laquelle certains hommes M. Bérubé: Ce n'est pas une chicane de politiques n'auraient pas été étrangers. Ma pre- politiciens, M. le Président. Si vous saviez le mière question: Le ministre peut-il nous dire si son nombre de compromis que nous étions prêts à ac- ministère a donné suite à cette demande d'enquê- cepter et que nous avons acceptés. Je dois recon- te qui lui est parvenue de la part de l'Association naître cependant que c'est un problème, non pas des directeurs généraux des services de santé et de fonctionnaires, mais de lutte de pouvoirs. La des services sociaux du Québec? conception que se sont fait les fonctionnaires du ministère des Terres et Forêts, de concert avec Le Président: M. le ministre des Affaires so- ceux de l'Industrie et du Commerce et ceux de ciales. l'environnement, qui est une conception originale, proprement québécoise, qui a fait l'objet de con- M. Lazure: M. le Président, la réponse, c'est sultations — et vous y avez participé par le biais oui. Effectivement, les représentants de notre de la commission parlementaire — cette concep- ministère et ceux du Conseil régional de la santé tion doit-elle résister à la conception d'autres et des services sociaux de la région concernée, fonctionnaires d'un autre ministère à Ottawa, qui, c'est-à-dire les Cantons de l'Est, ont étudié les eux, ont d'autres vues sur cette industrie? Ils n'y problèmes qui découlaient de cette décision du ont jamais travaillé, ils n'ont jamais eu de pro- centre hospitalier. Je dois dire que l'étude n'est gramme, ils n'ont jamais engagé une activité de pas terminée. Je dois me rendre, dès demain, à recherche comme telle dans le domaine. C'est Sherbrooke et au Lac-Mégantic, aux deux en- vrai, cela peut être décrit comme une lutte de droits. Je passe la journée dans cette région pour fonctionnaires, mais les luttes fédérales-provincia- rencontrer, d'une part, les représentants du Con- les n'ont jamais... seil régional de la santé et des services sociaux, à 1050

Sherbrooke, et ensuite pour rencontrer les autori- Le Président: M. le ministre des Affaires tés des deux centres hospitaliers, celui de Saint- sociales. Joseph et celui de Frère-André. En résumé, M. le Président, nous sommes au M. Lazure: M. le Président... jour le jour en train d'examiner cette situation et nous prendrons les décisions appropriées en M. Gratton: Question de privilège! temps opportun. Le Président: M. le député de Gatineau. Le Président: Mme le député de L'Acadie. (15 heures) M. Gratton: Un instant! Le député de Mégan- Mme Lavoie-Roux: M. le Président, de son tic-Compton est en train de faire croire aux côté, la personne congédiée, Mme Lise Huard, membres de cette Assemblée qu'il s'agit de cho- avait fait appel au comité de recours des affaires ses qui relèvent du Parti libéral. Je fais simplement sociales pour qu'on examine la question de son remarquer aux membres de cette Chambre... congédiement. Est-ce que ce comité a fait rapport et, deuxièmement, dans le cas où ce comité M. Goulet: Question de règlement! jugerait le congédiement injustifié, serait-elle réin- tégrée à son poste ou à un poste équivalent? M. Gratton: Un instant!

Le Président: M. le ministre des Affaires Le Président: M. le député de Bellechasse, je sociales. vous reconnaîtrai après. Vous savez — vous connaissez la règle, cela fait déjà suffisamment M. Lazure: Le comité, effectivement, a été longtemps que vous êtes là — que quand quel- saisi du cas de cette madame. Le comité fait son qu'un se lève sur une question de privilège, il a travail de façon normale. A ma connaissance, aux d'abord le droit d'être entendu avant qu'on puisse dernières nouvelles ce matin, le comité n'avait pas soulever une question de règlement. Je vous encore complété son rapport. reconnaîtrai après pour votre question de règle- ment. M. le député de Gatineau, je vous demande, Mme Lavoie-Roux: Qu'arrive-t-il dans le cas quant à vous, de ne pas abuser de la question de où une personne est congédiée injustement? Est- privilège. Je vous rappelle la règle: un député, un elle réintégrée? membre de l'Assemblée nationale peut soulever une question de privilège quand il est brimé dans Le Président: M. le ministre des Affaires ses droits. Je vais vous entendre là-dessus, briè- sociales. vement. M. Lazure: Je vais d'abord attendre le rapport M. Gratton: M. le Président, c'est en tant que du comité en question avant de prendre une membre du Parti libéral que je considère... décision. Le Président: M. le député de Gatineau, vous Le Président: M. le député de Mégantic- venez de faire une affirmation. Il y a une règle en Compton. droit qui dit: Quand on fait son lit, il faut coucher dedans. Vous venez de dire que c'est en tant que M. Grenier: Une question additionnelle sur la membre du Parti libéral. Je crois qu'en tant que question du député de L'Acadie. Bien sûr que membre d'une formation politique, il n'y a pas de cette question m'intéresse au plus haut point, privilège à l'intérieur de l'Assemblée nationale. Les puisque je mène ce dossier depuis un an et demi privilèges qui sont conférés aux membres de l'As- chez nous. Le ministre sera chez nous demain et semblée nationale leur sont conférés en tant que cela me fera plaisir de l'accueillir pour régler une membres et je ne voudrais pas que vous abusiez fois pour toutes ce problème qui sévit dans nos puisque votre collègue, le député de Bellechasse, centres hospitaliers. Je serai là pour le recevoir, à voudrait intervenir sur une question principale. ce moment, avec le comité des citoyens, de même que les trois centres de santé. Je pense que cette question qui est soulevée... M. Gratton: M. le Président, tout simplement, ce n'est pas en tant que membre du Parti libéral, mais en tant que membre de cette Assemblée Le Président: M. le député de Mégantic- représentant le Parti libéral. Compton, puis-je vous demander, s'il vous plaît, de formuler une question, si vous en avez une à formuler? Le Président: Si je comprends bien, M. le député de Gatineau, vous voulez revenir sur la pre- M. Grenier: J'aimerais savoir du ministre, si, mière affirmation que vous avez faite. Je dois vous pour sauvegarder la "job" de la libérale, Mme rappeler que le jour où tout le monde abusera des Huard, il passera par-dessus la volonté du comité questions de privilège, tous les droits de tous les des citoyens et par-dessus le conseil d'adminis- parlementaires seront brimés. Je vous demande tration de l'hôpital Frère-André. de ne pas en abuser, M. le député de Gatineau. 1051

M. Gratton: M. le Président, peut-être pour- Le Président: M. le ministre de l'Industrie et du riez-vous m'accorder une question additionnelle Commerce, brièvement, parce que le temps est déjà très courte qui réglerait le problème? expiré.

Le Président: M. le député de Gatineau, si M. Tremblay: Oui, M. le Président. Il s'agit de vous l'aviez soulevé comme cela tout à l'heure, je quelques questions en une. Le chantier maritime de vous aurais sans doute accordé la parole. J'espère Davie est le deuxième plus gros au Canada après que cela pourra porter fruit pour l'avenir. Mais M. celui de Marine Industrie. Le gouvernement du le député de Bellechasse voudrait poser une ques- Québec lui a accordé une subvention de $5 mil- tion principale. C'est ce qu'il m'a demandé avant lions pour l'aider à consolider ses exportations, qui d'entrer et il ne reste qu'une minute. seront de l'ordre de $43 millions par année, au cours des cinq prochaines années. M. Goulet: M. le Président, j'avais été recon- Mais en réponse précise à la question, je crois nu. qu'on me demandait s'il s'agissait d'un programme fédéral-provincial ; je dois dire que c'est une su bven- M. Lazure: M. le Président, il y a aussi une tion purement québécoise. Ce qui est peut-être un réponse à donner au député de Mégantic-Comp- peu plus irritant c'est que, juste avant le déclen- ton. Elle sera très brève. Le député de L'Acadie a chement des élections fédérales, le gouvernement introduit le mot "politique" tout à l'heure dans sa fédéral a annoncé une aide de $35 millions aux question, n'est-ce pas? chantiers maritimes de la Nouvelle-Ecosse, du Nouveau-Brunswick et de la Colombie-Britannique, Mme Lavoie-Roux: ... dans le journal, M. le mais aux deux plus gros chantiers maritimes du Président. Canada, ceux du Québec, il n'y avait rien d'accordé. En ce qui concerne la construction de brise- M. Lazure: Je veux tirer au clair, une fois pour glace ou de patrouilleurs, j'ai moi-même envoyé une toutes, que quant à nous, le gouvernement, il n'y a lettre, après l'annonce des subventions fédérales aucune coloration politique dans l'imbroglio, dans aux autres provinces, au ministre De Bané, au minis- les conflits qui sévissent actuellement dans ces tre Andras et au ministre Horner, en date du 30 mars, centres hospitaliers. En réponse au député de pour leur demander au moinsque, pour ces contrats Mégantic-Compton, je vais m'efforcer demain, non de brise-glace et de patrouilleurs, les deux plus gros pas comme membre du Parti québécois mais chantiers maritirnes du Canada, ceux de Marine et de comme ministre des Affaires sociales, d'apporter Davie, qui emploient au-delà de 5000 à 6000 tra- ma collaboration au règlement de cette situation. vailleurs, reçoivent une priorité dans l'octroi des contrats. Après six semaines, M. le Président, je M. Goulet: Question principale, M. le Prési- n'ai reçu aucune réponse des trois ministres. dent. Le Président: Fin de la période de questions. A Le Président: M. le député de Bellechasse. l'ordre, s'il vous plaît! Avant de mettre un terme à la période dequestions, j'aimerais inviter M. le ministre Subvention aux chantiers maritimes des Affaires sociales à apporter un complément de de Lauzon réponse à la question qui avait été posée par M. le député de Berthier. M. Goulet: Merci, M. le Président. Ma question Brièvement, s'il vous plaît, M. le ministre des s'adresse au ministre de l'Industrie et du Commer- Affaires sociales. ce concernant les chantiers maritimes Davie, de Lauzon. A la suite de l'annonce de la subvention Rapport sur l'administration du gouvernement du Québec aux chantiers de des centres d'accueil Lanaudière Lauzon, je voudrais savoir du ministre si, à l'inté- rieur de cette subvention, il y a de l'argent qui M. Lazure: M. le Président, en complément de vient du fédéral, et si oui, quel montant. Est-ce que réponseàlaquestion qui a été soulevée par le député c'est un programme conjoint, oui ou non? de Berthier, il y a une semaine, il me fait plaisir M. le Président, étant donné que nous sommes aujourd'hui de déposer le rapport d'un commissaire- très limités dans le temps, vous me permettrez cer- enquêteur sur l'administration des centres d'accueil tainement d'y aller avec le deuxième volet de ma Lanaudière, deux pavillons: l'un à Repentigny et question. On a entendu parler également, à maintes l'autre à Lavaltrie. reprises, de contrats de réparation et de construction Je veux en même temps informer cette Assem- de bateaux, de brise-glace ou de projet de tout autre blée que, conformément à l'une des recomman- ordre qui pourraient être accordés par le gouver- dations du commissaire-enquêteur, nous allons, nement fédéral. Je veuxsavoir,à ce jour,si le ministre d'une journée à l'autre, désigner, nommer un ad- de l'Industrie et du Commerce du Québec ou des ministrateur provisoire pour cette corporation, en membres de son ministère ont fait des représen- vertu de l'article 120 de la Loi sur les services de tationsauprèsdufédéralafinqueDavieobtienneune santé et les services sociaux. Une des principales partie de ces contrats et que les travailleurs de la rive raisons est qu'il est clair que l'administration de sud de Québec, des comtés de Lévis, Bellechasse, cette corporation a exercé de façon abusive cer- Dorchester et autres comtés avoisinants aient leur tains pouvoirs, des pouvoirs qui impliquent, dans juste part de ces contrats. certains cas, l'utilisation de biens publics. 1052

Le Président: Merci, M. le ministre des Af- histoire a commencé? Est-ce qu'on a réussi à le faires sociales. retracer, est-ce qu'on l'a interviewé, questionné et J'aimerais maintenant inviter M. le ministre de est-ce qu'on a établi pourquoi il était disparu du la Justice à apporter un complément de réponse Québec depuis ce temps? au chef de l'Union Nationale. Le Président: M. le ministre de la Justice. Enquête sur la vente de navires à un armateur grec. M. Bédard: M. le Président, je pense que le chef de l'Union Nationale comprendra que, pour M. Bédard: II s'agissait d'une question con- ne pas nuire à la bonne marche de l'enquête qui cernant Marine Industrie. Comme le sait le chef de est présentement en cours, je crois qu'il est de l'Union Nationale, le but de l'enquête est de déter- mon devoir de vous dire que dans l'intérêt public miner si les transactions intervenues entre l'arma- je dois limiter les informations à celles que j'ai teur grec et la compagnie Marine Industrie Limitée données tout à l'heure. ont pu donner lieu à la commission d'actes cri- minels. Pour ce faire, j'ai mandaté, au cours du Le Président: Fin de la période des questions. mois de décembre dernier, un procureur et un expert comptable du ministère afin d'examiner s'il Nous en sommes aux motions non annon- peut exister des éléments de preuve nécessaires cées, à l'enregistrement des noms sur les votes en pour porter des accusations et contre qui de telles suspens et aux avis à la Chambre. accusations pourraient être portées. Cette enquête M. le leader parlementaire du gouvernement. est compliquée par le fait que les événements visés s'échelonnent sur une longue période de Avis à la Chambre temps. En effet, les transactions ayant mené à la M. Charron: Merci, M. le Président. Comme il signature des contrats pour la construction des s'agit de la dernière journée de séance, je donne navires ont duré de l'automne 1972 au mois d'août immédiatement un aperçu du programme de la 1973 pour une première quantité de navires, et semaine prochaine et, en particulier, des commis- jusqu'à l'automne 1976 pour le reste des navires à sions qui devront se réunir mardi matin, le 7 mai construire. Toute cette affaire a connu un terme prochain, de 10 heures à 12 h 30. A cette occasion, final au mois d'août 1977. De plus, au niveau avant que la Chambre se réunisse à nouveau administratif, les vérificateurs de la compagnie mardi prochain, commencera au salon rouge Marine Industrie Limitée ont produit un volumi- l'étude par la commission de l'éducation des cré- neux rapport. Plusieurs avis juridiques ont été ob- dits de ce ministère; commencera également, à la tenus. Il est également nécessaire qu'une très salle 81-A, par une réunion de la commission des grande quantité de documents comptables et transports, l'étude des crédits de ce ministère et, à techniques soit examinée en même temps que le la salle 91-A, c'est votre commission, celle de rapport des vérificateurs et les avis juridiques. l'Assemblée nationale, qui se réunira afin de Actuellement, la majeure partie des docu- prendre connaissance d'un rapport de la sous- ments ont été examinés et plusieurs personnes, commission qu'elle a elle-même créée devant tant de la compagnie que de l'extérieur de celle-ci, étudier les conditions de travail ou, si vous voulez, ont été rencontrées. Certains éléments du dossier les services techniques qui sont offerts aux dépu- justifient que l'étude se poursuive. Par consé- tés à l'Assemblée et dans leur bureau de comté. La quent, d'autres personnes seront rencontrées, au commission recevra donc, à ce moment-là, le rap- cours des semaines qui viennent, à l'extérieur du port qui sera présenté par un de ses membres qui pays. Il faudra ensuite analyser les versions des était également membre de la sous-commission et personnes rencontrées et les documents qui au- avec ou sans amendement l'adoptera à cette occa- ront été vus. A la suite de cette analyse, quelques sion. Réunion à 10 heures, mardi matin, à la personnes devront être interrogées. salle 91-A. (15 h 10) Demain matin... Ce n'est qu'une fois que ces dernières entre- vues seront terminées qu'il nous sera possible M. Lamontagne: M. le Président, au leader du d'émettre une opinion finale et je pense que le gouvernement: Ce rapport de la sous-commission chef de l'Opposition le comprendra très facile- dont je fais moi-même partie, est-ce que les ment. membres de cette sous-commission pourraient en prendre connaissance? On n'en a jamais entendu Le Président: M. le chef de l'Union Nationale, parler à ce jour. J'ai essayé de trouver ce rapport une question. et personne ne l'a. Je me demande comment on va pouvoir le déposer. M. Biron: Une très courte question addition- nelle, M. le Président. Est-ce qu'à travers les per- M. Charron: Bien, écoutez, j'en ai eu une sonnes interrogées à l'extérieur du pays on a pu copie, M. le Président. Je ne puis dire s'il s'agit réussir à retracer M. Yvon Simard qui était prési- d'un rapport officiel ou non. Il s'agit, à tout le dent-directeur général de Marine à l'occasion de moins, d'un procès-verbal des délibérations de la signature de ces contrats ou lorsque toute cette cette sous-commission. Appelons cela comme 1053 cela. Si le député y consent, nous discuterons M. Brochu: Je voulais simplement vous rappe- aussi de cette question mardi matin parce que je ler, étant donné que cela relève de la présidence, ne suis pas en mesure de fournir une autre qu'il était prévu, dans l'organisation de nos tra- réponse pour le moment. Tout ce que je sais, c'est vaux, que le vendredi, 18 mai, revenait à l'Union que les députés membres de cette sous-commis- Nationale pour la question avec débat. J'aimerais sion seront présents. Ils pourront donc nous que vous en teniez compte. expliquer leur travail à cette occasion. Demain matin — que je sache — devait avoir lieu une M. Charron: Cela demeure, M. le Président, réunion, ici même dans ce salon, aux fins d'une dans l'entente faite hier et dans l'avis fourni par le question avec débat émanant de l'Opposition leader de l'Opposition officielle qui est absent officielle. Je laisse au chef de l'Opposition le soin aujourd'hui. Le vendredi, 18 mai demeure celui de de confirmer ce qui m'a été indiqué hier, à savoir l'Union Nationale. Le vendredi, 25 mai reviendra à que cette question avec débat n'aurait pas lieu. l'Opposition officielle pour la dernière puisque immédiatement après, il s'agira du 1er juin et nous Le Président: M. le député de Roberval. entrons sur le nouveau calendrier. Pendant que j'y suis, pourquoi ne pas donner M. Charron: Ah! je m'excuse. C'est le député toutes les informations dont je dispose pour que de Roberval. chacun puisse s'en prévaloir? Le 1er juin, le règle- ment nous permettrait de réunir l'Assemblée natio- M. Lamontagne: M. le Président, j'ai, en fait, nale dès 10 heures le matin; c'est le règlement au- une note qui m'a été remise par le leader de quel tous les députés sont déjà habitués. Or, l'Opposition officielle, le député de Laval. La j'indique tout de suite qu'il n'en sera pas question commission des communications devait se réunir pour le 1er juin puisque c'est le début du septième demain pour la question avec débat du député de congrès national du Parti québécois et la tradition Gatineau portant sur la publicité payée à même les veut que, lorsqu'un parti politique reconnu tient fonds publics. Comme on le sait, il y a eu une son congrès national, la Chambre permette aux entente pour que ce soit reporté et, entre-temps, la députés membres de cette formation politique d'y motion présentée par l'Union Nationale porte à assister pleinement. Donc, le calendrier de fin de peu près sur le même sujet. Dans cet esprit, je session ne s'appliquera qu'à compter du lundi voudrais informer cette Chambre et plus particu- 4 juin, à 14 heures. Le 1er juin, chaque député lièrement le ministre de l'Industrie et du Commer- pourra se livrer aux occupations de son choix. ce que l'Opposition officielle entend débattre J'indique également, M. le Président, que le vendredi prochain la question suivante apparais- mardi 22 mai, jour des élections canadiennes, l'As- sant en appendice au feuilleton de ce jour et sembée nationale ne se réunira pas. Chaque inscrite au nom du député de Notre-Dame-de- député sera donc libre de voter dans sa circons- Grâce: "La situation économique désastreuse du cription. L'Assemblée se réunira plutôt mercredi secteur privé à Montréal". matin, le 23 mai prochain, pour cette semaine de session qui sera forcément écourtée. M. Charron: M. le Président, je confirme Demain, il n'y a rien, M. le Président. Je fais réception de cet avis. Il n'y aura donc pas de motion pour cet après-midi. La Chambre mettra question avec débat demain ici. La prochaine d'abord fin au débat en deuxième lecture du projet réunion pour une question avec débat dans ce de loi 2 inscrit au nom du ministre d'Etat au déve- salon aura lieu le vendredi, 11 mai. Elle est loppement culturel et, par la suite, si elle n'a pas adressée au ministre de l'Industrie et du Commer- terminé à 18 heures, elle se réunira à 20 heures ce. Comme le règlement nous le permet, j'indique pour étudier la deuxième lecture du projet de loi tout de suite que c'est le ministre d'Etat au déve- portant le no 19, je crois, au nom du ministre des loppement économique, vu la nature de la ques- Consommateurs, Coopératives et Institutions fi- tion, qui représentera le gouvernement à ce ren- nancières. Je fais motion pour que, pendant que la dez-vous du 11 mai prochain. Chambre étudiera successivement ces deux pro- jets de loi, se réunisse jusqu'à 18 heures et ce soir M. Brochu: Sur cette question... de 20 heures à 22 heures, au salon rouge, la com- mission des affaires culturelles pour l'étude des Le Président: M. le député de Richmond. crédits de ce ministère et, à la salle 91-A, pour que se poursuive l'étude des engagements financiers M. Brochu: ... je n'ai pas d'objection à ce que pour, je crois, le mois de mars — où on en était demain, il n'y ait pas la tenue de cette question rendu ce matin — cet après-midi et ce soir. avec débat. Cependant, je voudrais bien souligner J'allais faire un oubli important, M. le Prési- ceci. Je ne voudrais pas qu'on recule tout sim- dent, que je m'empresse de corriger par un avis plement dans le temps les deux vendredis alloués que j'exclus donc de ma motion. Si les crédits du au Parti libéral. Si le Parti libéral suspend... ministère des Affaires culturelles ne sont pas ter- minés ce soir, cette commission se réunira à nou- M. Charron: M. le Président... veau demain matin pour les poursuivre de 10 heures à 12 h 30. Je rappelle à cette commission Le Président: J'aviserai en conséquence. qu'elle est libre, par consentement unanime de ses C'est là une question qui relève de la présidence, membres ce soir, de poursuivre au-delà de 22 M. le député de Richmond. heures l'étude des crédits de ce ministère, ce qui 1054 lui éviterait de se réunir à nouveau demain matin. créant l'Institut du cinéma, sanctionnée le 19 juin Si cela n'est pas terminé, elle est appelée à se 1975. Là, je me suis mis à faire des comparaisons réunir à nouveau demain matin. puisque dans la loi 2 actuelle on peut lire à l'arti- Je répète ma motion: Salon rouge, cet après- cle 21, Mme la Présidente, tous les pouvoirs et les midi et ce soir, crédits des affaires culturelles, fonctions de l'institut. On reconnaît que le mandat donc, réunion de cette commission et, 91A, com- est clairement défini. Pourtant, les députés de mission des engagements financiers. l'Opposition, le député de Mont-Royal et le député de Marguerite-Bourgeoys, disent: Cela peut être Le Président: Est-ce que cette motion sera un instrument de propagande pour le Parti au adoptée? pouvoir. Je voudrais leur relire certains articles de la Des Voix: Adopté. Loi sur le cinéma sanctionnée le 19 juin 1975 pour montrer comment des individus, à l'intérieur de Le Président: Adopté. trois ou quatre ans à peine, peuvent oublier les propres lois qu'ils ont votées et tenter d'imputer à Les affaires du jour maintenant. un gouvernement des propos qu'eux-mêmes ont carrément inscrits dans leur loi, ce qu'on n'ose M. Charron: Je vous prierais d'appeler l'arti- même pas faire parce qu'on ne veut surtout pas cle 3) du feuilleton, M. le Président. les imiter. Je voudrais vous rappeler en particulier l'arti- Projet de loi no 2 cle 48 de cette loi, Mme la Présidente, que je vais lire au complet pour bien me faire comprendre. Deuxième lecture "L'institut exerce son mandat conformément à un contrat qu'il conclut avec le ministre". Avec le Le Président: J'appelle donc la reprise du ministre directement, pas de définition, dans la loi, débat sur l'amendement proposé par M. le député du mandat; il exerce son mandat conformément à de Saint-Laurent à la motion du ministre d'Etat au un contrat qu'il signe avec le ministre. "Ce contrat développement culturel, proposant que le projet établit les orientations que doit suivre l'institut de loi no 2, Loi constituant l'Institut québécois de pour la durée du contrat, ses champs d'activité, recherche sur la culture, soit maintenant lu la ses effectifs minima et maxima, les limites aux deuxième fois, lequel amendement se lit comme engagements financiers que l'institut peut prendre suit: Que la motion en discussion soit amendée en et les modalités d'exécution de ses fonctions." retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à Jusqu'aux modalités d'exécution des fonctions. la fin les mots "dans un mois". Imaginez-vous! On s'interroge jusque là-dessus à Je crois que l'ajournement du débat avait été l'intérieur d'un projet de loi sanctionné sous le réclamé par M. le député de Joliette-Montcalm à régime libéral. qui je cède la parole. On continue, Mme la Présidente — ce n'est (15 h 20) pas tout — pour montrer comment ces gens peu- Motion de report (suite) vent avoir une poutre dans l'oeil qu'ils n'osent pas enlever. A l'article 53 de ce même projet de loi, on M. Guy Chevrette dit que "l'institut est formé de sept membres nom- més par le lieutenant-gouverneur en conseil con- M. Chevrette: M. le Président, il faudrait peut- formément à la présente section." Exactement être rappeler, au début de l'intervention, qu'on a comme dans le projet de loi no 2. Ils ont dit, imagi- affaire à une motion de report de 30 jours. nez-vous: Cela va être le repaire des péquistes, Après avoir écouté l'argumentation des dépu- cela. C'est une formule usuelle employée pour la tés de l'Opposition libérale, en particulier du création de toute société, de tout institut. N'es- député de Mont-Royal et du député de Marguerite- sayez pas de faire croire, parce que la télévision Bourgeoys, concernant les motifs qu'ils invo- entre dans les foyers maintenant, que c'est quel- quaient à l'appui de leur motion de report, je dois que chose de neuf, que le lieutenant-gouverneur vous avouer que je me suis empressé de relire la en conseil ait à nommer des individus à même une loi très attentivement pour voir si, vraiment, le liste où il y a eu des demandes de faites ou des ministre d'Etat au développement culturel avait noms suggérés. C'est tout à fait une tradition osé introduire dans le projet de loi 2 autant de normale. Il n'y a rien de nouveau dans cela, supercheries qu'on le laisse croire ou qu'on veut absolument rien de neuf, mais c'est scandaleux le laisser croire à la population. parce que cela va être des péquistes éventuelle- Je dois vous avouer que j'ai lu et relu le projet ment. Imaginez-vous. C'était quoi, dans le temps de loi no 2. Je me suis demandé, Mme la Prési- des libéraux? C'était quoi, Mme la Présidente? dente, avec quel type de loi je pourrais bien com- Un autre article qu'il vaut la peine de lire pour parer la loi du ministre d'Etat aux affaires cultu- montrer comment ces gens qui se permettent de relles, avec quelle loi qui aurait été sanctionnée traiter les autres de pharisiens, peuvent se con- sous le régime libéral. A ma grande surprise, ce fut duire aujourd'hui. Dans le temps, ils disaient: "Le passablement facile puisque la loi 2, Loi consti- ministre reconnaît aux conditions qu'il détermi- tuant l'Institut québécois de recherche sur la ne... Pour l'Institut du cinéma, Mme la Présidente, culture, peut facilement se comparer à la Loi c'est le ministre qui détermine les conditions; il se 1055 garde le pouvoir de dénoncer en tout temps ou de et de montrer un peu ce que vous avez fait. Je reconnaître en tout temps une association repré- comprends que les gens savent un peu ce que sentative, du jour au lendemain. Une association vous avez fait, ils vous l'ont prouvé le 16 novembre ne reflétait pas la pensée libérale, on choisissait 1976, mais cela nous donne l'occasion d'en dire un autre type d'institution. Ce qu'il y a de typique, un peu plus pour montrer une autre facette de c'est que c'était dans leur propre projet de loi, votre personnalité, celle de cacher même à la chose que le ministre ne se garde même pas dans population des contenus de lois qui font aujour- le projet de loi no 2, Mme la Présidente. Pourtant, d'hui l'objet de propos tout à fait inverses à ceux par une motion dilatoire, pour perdre du temps, ils que vous faisiez en 1975. veulent essayer de démontrer, depuis qu'on a des Là-dessus, je suis convaincu que la popula- caméras dans cette Chambre, à la population que tion n'est pas dupe, elle reconnaîtra que vous avez l'on adopte des projets de loi, qu'on vote une deux discours, un de pouvoir et un de l'Oppo- législation pour protéger certains amis et pour sition. faire de la propagande. On n'a pas craint nous, à l'article 21, Mme la Présidente, de définir claire- Des Voix: Bravo. ment les pouvoirs, les mandats et les fonctions de l'institut. Mais eux, c'est par contrat avec le minis- M. Lamontagne: Mme la Présidente. tre, même pas aux yeux et à la vue de l'Assemblée nationale. La Vice-Présidente: M. le député de Roberval. C'était le ministre qui passait son petit contrat seul avec l'institut. C'était le ministre qui nommait M. Robert Lamontagne son monde. C'était le ministre qui déterminait l'association avec laquelle il pouvait faire affaires. M. Lamontagne: J'ai été quelque peu surpris C'était le ministre qui décidait, du jour au lende- de cette intervention pour le moins mesquine du main, de dire: Telle association, elle ne fait pas député de Joliette-Montcalm. Mme la Présidente, mon affaire, j'en nomme une autre. Aujourd'hui, je pense qu'il est important, pour ceux qui nous on reproche au gouvernement actuel de faire regardent ou qui nous écoutent, de replacer un adopter une loi, le projet de loi no 2, qui risque peu le débat et de savoir de quoi on parle d'être un instrument de propagande. Un institut de actuellement, comme le député de Mont-Royal l'a recherche sur la culture, imaginez-vous! Le ciné- fait, la semaine passée. On nous accuse, comme le ma, par l'audio-visuel, qui entre quotidiennement député vient de le faire, de ne pas suspendre les dans les foyers, cela pouvait bien plus être un travaux, mais de tout mettre en oeuvre pour élément de propagande. Faites l'attristé, c'est bloquer un projet de loi. Loin de là, on va repasser dommage que la caméra ne soit pas sur vous, M. cela ensemble pour que tout le monde nous le député de Marguerite-Bourgeoys. comprenne bien. Vous savez, il y a peut-être une Mais il n'en demeure pas moins que quand formule qu'il va falloir changer ici à l'Assemblée votre chef intérimaire pour quelques jours se lève nationale. On dit qu'on vote en première lecture pour traiter les députés ce côté-ci de la Chambre un projet de loi. Je pense qu'on se comprendrait de pharisiens, il devrait regarder d'abord ce que beaucoup mieux si on enlevait le terme "première vous avez vous-même voté, il y a à peine quelques lecture" pour appeler cela "dépôt du projet de années. Vous devriez au moins avoir la mémoire loi." Ce n'est pas facile. suffisamment longue, et aussi, au moins, avoir le (15 h 30) respect de la cohérence. Vous ne l'avez même On est encore obligé de rappeler que lors- pas. Vous n'avez même pas de cohérence. Tâchez qu'un ministre dépose un projet de loi à l'Assem- donc de reconnaître que ce projet de loi, que vous blée nationale et qu'immédiatement après on est tentez de discréditer dans le moment, est plus appelé à voter en première lecture, au moment avant-gardiste, respecte beaucoup plus les bases même du vote qui est pris à l'Assemblée nationale, d'une démocratie saine que tous les projets de loi on n'a pas encore le texte de loi dans les mains. Je que vous avez adoptés sous votre régime. Je vous pense qu'il est bon de rappeler cela à la popula- réfère à la loi sanctionnée le 19 juin 1975, alors tion; on pourrait peut-être inviter la présidence à y que vous étiez au pouvoir, tous ceux qui, aujour- apporter une attention spéciale pour le bénéfice d'hui, sont en adulation devant leur chef, depuis de tous ceux qui suivent de près nos travaux. certains jours, et qui, le 13 novembre 1976, n'étiez Donc, au moment où nous votons, nous ne savons même pas aptes à siéger, aux dires d'un grand pas ce qu'il y a dedans. éditorialiste québécois. Rappelez-vous les lois que On regarde cela après, à travers d'autres vous avez votées. Rappelez-vous les clauses ex- projets de loi, lorsqu'on se réunit en commission. presses que vous avez notées dans vos propres On doit dire qu'au cours des derniers jours, plus lois vous donnant des pouvoirs excessifs, des particulièrement, notre attention a été attirée par pouvoirs discrétionnaires pouvant tasser du jour des collègues, et par d'autres personnes hors au lendemain une association qui ne reflétait pas l'Assemblée nationale, sur certains articles du votre idéologie. On ne se le permet même pas et projet de loi, en particulier les articles 24, 25 et vous avez le culot de demander 30 jours de délai même 26, qui parlent du financement au cours des pour le plaisir de faire perdre du temps à la prochaines années de l'Institut québécois de la re- Chambre. Cela nous donne l'occasion — là- cherche sur la culture. Le député de Saint-Lau- dessus, je vous en remercie — de vous démasquer rent, hier, a proposé une motion de report à un 1056 mois comme c'est prévu dans notre règlement. Si Mme la Présidente, comme vous le savez bien, c'est prévu, c'est tout simplement pour qu'on s'en comme vous le savez mieux que nous tous, une serve à bon escient en certaines circonstances. Il motion de cette nature peut avoir trois fonctions: ne s'agit pas pour nous, par périodes de dix Elle peut faire partie de ce qu'on appelle, en fran- minutes, de passer une semaine là-dessus, loin de çais comme en anglais, un "filibuster", mais tel là. Quelques députés interviennent alors pour n'est pas le cas. Vous avez entendu, il y a quel- essayer de faire sentir au gouvernement, et parti- ques instants, le député de Roberval indiquer culièrement au ministre responsable de ce projet que nous ne serons pas nombreux à parler sur de loi, notre position à nous, de l'Opposition offi- cette motion, mais que nous voulons quand même cielle, du Parti libéral du Québec. nous exprimer là-dessus pour expliquer à la Nous ne pouvons accepter que tout ne soit Chambre et à l'opinion publique la raison pour la- pas mis en oeuvre pour assurer l'indépendance de quelle nous avons cru nécessaire de la présenter. l'institut. Nous rappelons, à l'intention du gouver- La deuxième raison peut être celle du retard nement et du ministre concerné, que pour nous le tout simplement, un retard dans lequel l'Opposi- principe de l'indépendance de l'institut est aussi tion espérerait alerter l'opinion publique, faire important que le principe de la création de l'ins- mobiliser des pressions contre le gouvernement titut lui-même. Rien ne sert de créer un institut si, pour faire voir au gouvernement que son projet de en même temps, on ne s'assure pas de sa loi n'est pas bien vu dans certains secteurs de complète indépendance. C'est pour cela que ce l'opinion publique. C'est en partie pour cette midi, à nouveau, le caucus du Parti libéral, de raison que nous avons présenté cette motion, l'Opposition officielle, a analysé une dernière fois mais c'est surtout pour inviter le ministre à convo- sa position concernant cette situation afin de voir quer une commission parlementaire et permettre si nous étions fermement convaincus de la néces- ainsi que soit aéré le débat, que soient examinés sité de l'indépendance de l'institut. Unanimement par les intéressés le contenu et les modalités de ce et facilement, pour nous du Parti libéral du projet de loi. Québec — d'ailleurs, mes collègues avant moi Mme la Présidente, le ministre pourrait bien l'ont rappelé — l'indépendance de l'institut est me répondre que le gouvernement a tenu une aussi importante que la création de l'institut lui- conférence sur les industries culturelles. Il pour- même. C'est pour cela que dès à présent je vous rait même dire que des membres de l'Opposition y annonce que notre parti, en deuxième lecture, se ont été invités. Cela est vrai, mais les délégués à verra dans l'obligation de voter contre le principe cette conférence — entre parenthèses les députés de ce projet de loi, à moins que le ministre nous de l'Opposition n'y étaient pas des délégués, ils annonce, dès à présent, son intention de modifier, étaient des observateurs, donc ils n'ont pas été en comme nous le lui demandons, les articles 24 et mesure de participer aux discussions — n'ont pas 25 de ce projet de loi. été saisis du contenu de ce projet de loi; ils étaient C'est dans cet esprit que, évidemment, j'ap- saisis de l'intention du gouvernement de poser puis sans réserve la motion présentée par l'hono- des gestes, de créer un organisme quelconque rable député de Saint-Laurent. dans ce domaine. C'était normal que le gouvernement agisse de La Vice-Présidente: M. le député de D'Arcy la sorte. Un gouvernement n'est pas obligé, à cha- McGee. que fois qu'il convoque une conférence pour inviter les intéressés des milieux concernés à venir M. Victor Goldbloom dialoguer avec lui, d'avoir un projet de loi déjà prêt. On peut même offrir l'argument que si le M. Goldbloom: En vertu de l'article 94, para- gouvernement, en convoquant une telle conféren- graphe 2, de notre règlement, je voudrais vous ce, avait déjà pondu son projet de loi, la confé- informer, Mme la Présidente, que je parle comme rence n'aurait pas eu autant de valeur. Mais main- représentant officiel du Parti libéral du Québec. tenant que nous avons un projet de loi et que nous Nous avons présenté une motion proposant avons le sentiment que le milieu intéressé n'est que l'étude de ce projet de loi soit retardée pas heureux de voir le gouvernement étatiser pendant un mois. Je vous souligne le fait que, si l'éventuel Institut de recherche sur la culture, nous nous avions voulu faire obstruction à l'adoption de disons au gouvernement: Nonobstant le fait que ce projet de loi, nous aurions choisi une période vous avez invité le milieu à venir dialoguer avec plus longue, nous aurions choisi une période d'au vous, il serait nécessaire que vous émettiez une moins deux mois pour dépasser la durée normale nouvelle invitation à ces mêmes personnes, et à de cette partie de la session de l'Assemblée natio- d'autres aussi, parce que quand une commission nale. Si nous avons choisi de proposer un délai parlementaire siège afin d'entendre les opinions d'un mois seulement, c'est justement pour permet- des citoyens, il y a une liberté qui existe qui tre à l'Assemblée nationale de revenir au débat sur permet à tout citoyen, à tout organisme, invité ou ce projet de loi et d'en disposer dans un délai non, de venir s'y exprimer. raisonnable. Il ne nous paraît pas, et il ne paraît C'est dans ce sens, Mme la Présidente, que sûrement pas à l'opinion publique que la création nous proposons au ministre une deuxième consul- de cet institut soit d'une urgence telle qu'un retard tation du milieu, cette deuxième consultation d'un mois change quoi que ce soit à l'avenir du devant précisément porter sur le projet de loi en Québec. question. Le ministre pourrait nous dire: Le milieu 1057 est d'accord, j'ai eu des rencontres, j'ai consulté nous discutons présentement, ont indiqué que des personnes représentatives du milieu. nous sommes à moitié d'accord avec ce que (15 h 40) propose le gouvernement. Nous sommes d'accord Mme la Présidente, c'est avec une certaine sur le principe de créer l'institut, mais là où nous émotion que je rejette cet argument parce que, ne sommes pas d'accord — je le répète encore quand j'ai été ministre des Affaires municipales, une fois — c'est quant à l'importance du rôle de j'attachais beaucoup d'importance à mes rencon- l'Etat, quant au fait, par exemple, que l'institut se- tres avec la clientèle du ministère et je consa- rait obligé de répondre par une action précise à crais beaucoup de temps à ce genre de rencontres toute demande formulée par le gouvernement, à — n'en déplaise à ceux qui, aujourd'hui, disent tout mandat qui lui serait confié par le gouverne- que le ministre ne devrait pas être appelé à rece- ment, et ne serait pas obligé de répondre de la voir la clientèle du ministère des Affaires munici- même façon à une demande émanant d'une autre pales et que les pèlerinages à Québec sont de source. mauvaises choses... Je ne suis pas de cet avis, Mme la Présidente, il me semble que la mais je me rappelle fort bien que, quand je disais culture est la chose de nous tous. Ce n'est pas la exactement cela, quand je disais aux membres de propriété du gouvernement. Il me semble que, si cette Chambre qu'à titre de ministre des Affaires l'institut est pour fonctionner d'une façon raison- municipales j'avais rencontré l'Union des munici- nablement autonome, s'il est pour avoir ses cou- palités du Québec, l'Union des conseils de comté dées franches, il faudrait qu'il ait la liberté d'ana- du Québec, des conseils municipaux et des orga- lyser chaque demande à sa juste valeur, qu'elle nismes comme l'Association des gérants munici- vienne du gouvernement ou d'un autre organisme paux, par exemple, on me disait, parce qu'on était ou d'un simple citoyen. Mais tel n'est pas le cas. Il dans l'Opposition à l'époque: On regrette, ce n'est me semble qu'il y a là matière à débat en commis- pas assez, les rencontres privées du ministre avec sion parlementaire. Il me semble que nous, de la clientèle de son ministère ne permettent pas l'Opposition, serions ainsi en mesure de juger si aux députés de l'Opposition de participer au dialo- nous devons finir par appuyer le gouvernement gue. Et c'est vrai. sur ce projet de loi ou finir par exercer notre droit, L'actuel ministre, député de Bourget, a été notre devoir démocratique et juger que nous député de Bourget dans l'Opposition et, avec ses devons voter contre. collègues d'alors, il s'est opposé à ce que les mi- Nous nous sommes réunis, et malgré le fait nistres du temps invoquent leurs contacts avec le qu'au début de notre analyse de ce projet de loi milieu, avec la clientèle de leur ministère pour jus- nous avions été tentés, à cause de notre appui au tifier la rédaction d'un projet de loi. J'invite donc principe de la création de l'institut, de voter en fa- le ministre à se rappeler ses antécédents dans veur de ce projet de loi en deuxième lecture, di- cette Chambre, à être conséquent avec lui-même sant en même temps au ministre que si, dans le et à reconnaître ce qu'il prétendait à l'époque, s'il processus de l'étude article par article en commis- le croit toujours. Est-ce que le fait d'être aujour- sion parlementaire ou le débat en troisième lectu- d'hui ministre change son avis? Je ne le sais pas. re qui permet, au début de ce débat, l'introduction Mais il serait bon que le ministre — je regrette de certains amendements qui peuvent être propo- qu'il ait déjà utilisé son droit de parole sur cette sés par les députés de cette Chambre et dont la motion de report — nous dise qu'il a changé d'avis Chambre doit disposer avant d'aborder le débat en et que, maintenant qu'il est ministre, les contacts troisième lecture, si le ministre était à l'écoute de privés qu'il a avec la clientèle sont suffisants et ceux qui n'étaient pas d'accord et acceptait donc qu'il peut maintenant aller de l'avant avec l'adop- un certain nombre d'amendements, nous pour- tion du projet de loi par la Chambre sans permet- rions voter en faveur du projet de loi en troisième tre aux députés de l'Opposition et à l'opinion lecture. Mais si le ministre opposait toujours sa publique et aux journalistes de participer à ce traditionnelle fin de non-recevoir, là nous vote- genre de dialogue. rions contre le projet de loi en troisième lecture Mme la Présidente, quand nous constatons pour manifester notre opposition. que l'institut qui serait créé par ce projet de loi Mais nous avons déjà eu un goût — j'allais serait un prolongement de l'appareil étatique, on dire un avant-goût, mais c'est vraiment un goût — doit se poser la question suivante: Qui devrait être de l'attitude du ministre. Dès la présentation de nommé à cet institut? Qui serait nommé à cet cette motion de report, le ministre s'est levé pour institut? Il me semble que justement sur un tel dire non, sans même écouter les arguments que point les organismes et les citoyens intéressés les députés de l'Opposition voulaient invoquer. pourraient vouloir faire des recommandations au C'est devant cette attitude malheureusement né- ministre. Je ne parle pas de recommandations gative que nous nous sommes réunis de nouveau, précises, nominales, mais je parle de recomman- Mme la Présidente, et nous en sommes venus à la dations quant au choix des gens qui devraient conclusion que nous devions dire déjà au minis- constituer l'éventuel institut. tre, pas de façon conditionnelle par rapport à Il est évident que la création d'un Institut de l'éventuelle troisième lecture mais de façon préci- recherche sur la culture est en principe, une chose se par rapport à la deuxième lecture, que nous que nous pouvons accepter. Mes collègues, qui nous sentons obligés de voter contre ce projet de ont pris la parole sur le projet de loi en deuxième loi. lecture comme sur cette motion de report que (15 h 50) 1058

Une des raisons, Mme la Présidente, est que La Vice-Présidente: C'est vrai, vous pouvez nous croyons que le gouvernement devrait prou- continuer; vous n'avez pas besoin de me faire de ver, au moins une fois au cours de son mandat, ce dessin, M. le député. dont il se vante depuis le début de ce mandat, sa transparence. Mais, la transparence, c'est quoi? M. Goldbloom: Merci. Mme la Présidente, je C'est au moins une ouverture d'esprit à des opi- reviens toujours à ma citation. C'est M. L'Allier qui nions qui diffèrent de la sienne. C'est au moins parle: "II s'agit plutôt, ici comme ailleurs, de une ouverture d'esprit qui permet aux citoyens de rendre un certain nombre de ressources publiques venir s'exprimer devant ce gouvernement, ce gou- disponibles à ceux qui, dans leur milieu respectif, vernement composé de personnes qui, quand sont encore susceptibles de faire valoir que la elles siégeaient dans l'Opposition, réclamaient connaissance scientifique, la réflexion, la connais- toujours la tenue de commissions parlementaires; sance de son histoire, le maintien de certaines autres temps, autres moeurs. valeurs intangibles sont encore, à côté de l'écono- Pendant le débat en deuxième lecture, j'ai fait mie et des exigences matérielles irrépressibles, allusion à certains documents: celui signé par des sources d'orientation et de développement l'ancien ministre des Affaires culturelles, M. collectif." Mme la Présidente, j'ai mis un accent Jean-Paul L'Allier et celui signé par le re- sur les mots "dans leur milieu respectif ". Ce n'est gretté Guy Frégault. Par des citations, j'ai essayé pas dans un milieu gouvernemental que la culture de mettre en évidence les divergences entre l'in- doit fleurir et s'épanouir. C'est le milieu habité par terprétation que nous donnons à cette notion de la les gens. Donc, nous croyons que l'institut devrait création au Québec d'un institut de recherche sur être l'émanation de la société. Oui, le gouverne- la culture et la façon dont le gouvernement ment est élu pour administrer au nom de la socié- procède par ce projet de loi. Il serait utile que je té. Mais un gouvernement, c'est en même temps reprenne quelques allusions à ces documents un parti politique. C'est la nature même de notre pour rappeler au ministre que sa façon de voir les système et, à cause de ce fait, un gouvernement choses... Je ne lui conteste pas le droit d'avoir sa n'est pas par définition désintéressé. propre façon de voir les choses, mais qu'il n'in- On sait, Mme la Présidente — c'est un point voque pas ces mêmes documents pour appuyer sa que je mentionne sans insister énormément là- propre thèse, les documents en question ayant dessus parce que je ne voudrais pas introduire exprimé une attitude différente. dans ce débat toute la question de la société Mme la Présidente, je cite la page 217 du majoritaire et des éléments minoritaires au sein de document de M. L'Allier: "Ce n'est évidemment cette société, mais je souligne tout simplement en pas la création de structures artificielles autour passant le fait — que nous avons plusieurs cultu- desquelles pourraient se regrouper quelques pen- res au Québec. Nous avons des gens qui sont seurs qui réglera ce problème". Un peu plus loin: venus vers nous, apportant avec eux des cultures "II ne s'agit pas pour le ministère de se substituer qui constituent pour nous des enrichissements. Il aux universités." C'est un point que nous avons ne faudrait pas que cet institut de recherche sur la voulu souligner dans le débat de deuxième lec- culture soit l'expression de la majorité seule- ture. Il me semble qu'il serait important que nos ment, comme le gouvernement est, par définition, universités, qui s'intéressent directement à la une majorité; au moins, une pluralité. chose culturelle, qui ont une action soutenue dans Mme la Présidente, il y a quelque chose que ce domaine, qui enseignent dans ce domaine, j'ai trouvé dans le texte de M. L'Allier qui me paraît viennent nous dire, elles qui sont toujours jalouses d'une importance fondamentale. Il a dit: "Dans de leur liberté, ce qu'elles pensent des modalités des sociétés occidentales, il ne semble pas y avoir de ce projet de loi. d'institut d'histoire et de civilisation créé par l'Etat Je continue la citation: "II ne s'agit pas de et relevant directement de lui. Ce n'est d'ailleurs remplacer les instituts, académies ou sociétés pas ce que nous recherchons." Mme la Présiden- savantes par des créatures administratives." Mme te, ces mots sont lapidaires. Nous avons constitué la Présidente, nous avons drôlement l'impression de ce côté de la Chambre pendant un certain que ce que nous propose le gouvernement est une temps, le gouvernement de cette province. Le créature administrative et sa propre créature. C'est document dont je viens de faire certaines citations ce que nous disons depuis le début de ce débat. a été produit par ce gouvernement et vous consta- tez, par ces quelques mots que je viens de citer, la Mme la Présidente, est-ce que je peux me différence entre le point de vue que nous avions et permettre de vérifier avec vous le temps à ma celui que nous présente par ce projet de loi le disposition suivant l'article 94, paragraphe 2? Je le gouvernement actuel. cite: Sur toute autre motion, la durée des discours prévue... Nous avons dit, par la voix du ministre des Affaires culturelles du temps, que "dans les socié- La Vice-Présidente: D'accord, M. le député de tés occidentales il ne semble pas y avoir d'institut D'arcy McGee, je vous ai fait signe; je m'excuse, d'histoire et de civilisation créé par l'Etat et rele- c'est bien 30 minutes dont vous pouvez disposer. vant directement de lui." Nous avons dit: "Ce n'est J'ai confondu, et je vous enlevais dix minutes d'ailleurs pas ce que nous recherchons." Mais malheureusement. c'est ce que l'actuel gouvernement recherche. S'il y a des gens dans le milieu qui croient que le M. Goldbloom: II me reste dix minutes? projet de loi no 2 constitue la mise en application 1059 du rapport L'Allier, du livre blanc, il serait bon que pas très souvent; on voit plutôt des organismes nous ayons une commission parlementaire pour qui reçoivent des propositions, des demandes de que ces gens puissent être débarrassés de cette bourses de recherche, qui analysent la qualité de fausse impression et qu'ils puissent réagir, une chaque protocole de recherche, rendent jugement fois leur lanterne éclairée. Mme la Présidente, et distribuent les ressources disponibles. Si c'était c'est pour cela que nous insistons sur l'impor- le mandat général que le gouvernement voulait tance de la tenue d'une commission parlementaire confier à cet institut, nous serions tout à fait sur ce projet de loi. d'accord. C'est quand le gouvernement nous pro- (16 heures) pose un institut qui effectuerait lui-même des Je continue la citation: "Ce n'est d'ailleurs pas recherches que nous ne sommes pas d'accord. ce que nous recherchons, convaincus que l'abso- Mme la Présidente, je crois avoir fait la lue liberté de la recherche et de l'exposé des faits démonstration des raisons pour lesquelles nous constitue la condition indispensable au fonction- avons voulu dire à ce gouvernement: II faut une nement et à la crédibilité d'un tel établissement." pause; non pas un "filibuster", non pas une Ecoutez bien ce qui suit, Mme la Présidente: remise aux calendes grecques de l'étude du projet "Aucun historien ou homme de science sérieux et de loi, mais une pause qui permettrait à la clien- tenant à sa réputation n'accepterait vraisemblable- tèle intéressée de s'exprimer et qui permettrait à ment de devenir un historiographe ou un cher- l'Assemblée nationale de revenir avant l'ajourne- cheur officiel." ment de l'été et procéder, espérons avec des Voilà autant de raisons qui nous motivent amendements importants, à l'adoption du projet dans notre demande de la convocation de la de loi. commission parlementaire des affaires culturelles pour permettre d'entendre les intéressés, et il y en Rejet de la motion de report a beaucoup dans la société québécoise. La société québécoise est assoiffée d'aide tangible à la La Vice-Présidente: La motion de M. le dépu- culture. C'est pour cela d'ailleurs que nous disons: té de Saint-Laurent, proposant que la motion en Nous sommes favorables à la création d'un institut discussion soit amendée en retranchant le mot de recherche dans ce domaine. Si l'existence d'un "maintenant" et en ajoutant à la fin "dans un tel institut peut nous permettre d'épanouir davan- mois" est-elle adoptée? tage nos richesses culturelles, Mme la Présidente, nous devrons tous applaudir, mais il faudra que M. Proulx: Rejetée sur division. cet institut ait ses coudées franches. Ce que nous propose le gouvernement est autre chose. Une Voix: Rejeté. Nous voyons que le mandat général de l'insti- tut serait de soutenir, encourager et affectuer les La Vice-Présidente: Cette motion est rejetée. recherches. Il est évident que depuis longtemps, gouvernement après gouvernement, nous avons M. Proulx: Rejetée sur division. cherché les moyens de soutenir convenablement la culture, la création et l'appréciation de ce qui M. Ciaccia: Mme la Présidente... est créé. Ce gouvernement que nous avons devant nous s'est vanté combien de fois d'être attaché M. Laurin: Mme la Présidente... particulièrement à la culture. Dans l'Opposition, les membres du Parti québécois critiquaient sévè- La Vice-Présidente: Vous exercerez votre droit rement le gouvernement du temps parce que de réplique, M. le ministre. C'est à un autre inter- l'appui tangible, l'appui monétaire à la culture, à venant de le faire, s'il en manifeste l'intention. leurs yeux, était insuffisant. M. le député de Mont-Royal. Savez-vous, Mme la Présidente — je le dis entre parenthèses — que le budget du ministère M. John Ciaccia des Affaires culturelles ne constitue même pas la moitié de 1% du budget global de la province, qu'il M. Ciaccia: Merci, Mme la Présidente. Quand ne connaît même pas 0,5% d'augmentation par nous parlons de culture au Québec, nous parlons rapport à l'an dernier? C'est un gouvernement qui de quelque chose de dynamique, de vibrant et uni- se vante d'être attaché à la culture et de vouloir que non seulement en Amérique du Nord, mais je poser des gestes. Ce n'est pas par la création d'un crois dans le monde entier. Nous n'avons pas l'ex- institut étatique que nous allons faire grand- périence du "melting pot" américain, nous som- chose. Les écrivains ne vivront pas mieux, les mes plutôt une société pluraliste et nous sommes artistes ne vivront pas mieux, ne vendront pas plus formés par les rapports et les contacts des diffé- facilement leurs toiles à cause de l'existence de rents groupes qui font partie de notre société. cet institut. Nous sommes en faveur de la création d'un institut Encourager, oui, Mme la Présidente, encoura- de recherche sur la culture québécoise. Il n'y a geons de toutes les façons imaginables, mais, si aucun doute sur ce point. l'encouragement n'est pas tangible, cela ne chan- Ce à quoi nous nous opposons, c'est aux dis- gera pas grand-chose. Là où nous nous opposons, positions de ce projet de loi et la façon par la- c'est quand le gouvernement propose un institut quelle le gouvernement veut utiliser le domaine qui effectuerait des recherches. Cela ne se voit culturel et les institutions culturelles pour ses pro- 1060 près fins politiques. C'est l'objection que nous induire la population en erreur et je me demande avons au projet de loi et aux différentes disposi- comment on peut se permettre de faire de telles tions de ce projet de loi. déclarations et d'essayer de les faire passer pour Il faut commencer par définir ce que nous la vérité. voulons dire par la culture. La culture, ce n'est pas Examinons quelques-unes des recommanda- limité aux arts. Les arts sont la manifestation de la tions du rapport L'Allier et comprenons-en l'im- culture d'un peuple. La première définition de la portance et ce qu'on essaie de faire adopter par culture comme un terme sociologique est celle cette Assemblée. On a référé dans le rapport d'un anthropologue anglais qui écrivait, en 1871, L'Allier aux sociétés occidentales; cela veut dire et je cite: "La culture est cette complexe entité qui les grandes démocraties. Dans les grandes démo- inclut les connaissances, les croyances, l'art, les craties, les pays démocratiques, on n'a pas d'insti- valeurs morales, les coutumes et toutes les autres tut au service de l'Etat parce que nous sommes capacités et habitudes acquises par l'homme soucieux des droits de la population, des diffé- comme membre d'une société." Par cette défini- rents groupes qui constituent une société et on ne tion, la culture est considérée comme la somme peut jamais se permettre de créer une société totale de tous les accomplissements humains. Je d'Etat pour la recherche culturelle. Et il y a des crois que c'est le concept de la culture, grosso raisons pour cela. Si on examine ce qui s'est modo, qui est envisagé par le ministre dans son passé dans d'autres pays, on voit pourquoi les livre blanc. sociétés démocratiques n'ont jamais permis la Quand nous définissons la culture au sens création de tels instituts. Parce que, dans les large du mot, toute intervention gouvernementale autres pays non démocratiques, ces instituts ont peut devenir très dangereuse parce que nous par- été utilisés et on a utilisé la culture pour des fins lons des connaissances, des croyances, des va- de propagande. Soyons clairs, examinons l'histoire, leurs morales. Je ne peux accepter que le gouver- examinons les faits et essayons d'éviter les mêmes nement vienne s'ingérer dans toutes ces activités erreurs. des individus ou d'une société. Ce serait fait pour Quant à la différence entre le rapport L'Allier des fins politiques au nom de la culture et je ne et le projet de loi no 2, je me réfère aux articles 24 peux pas accepter cette approche. et 25. A l'article 25, l'institut doit exécuter tout On s'est référé aux déclarations du ministre mandat spécifique que lui confie le ministre char- d'Etat au développement culturel dans son livre gé de l'application de la présente loi et, à l'article blanc, à la page 138, pour démontrer que le Parti 24, l'institut ne peut pas accepter de dons, de legs, québécois se situe dans une ligne de continuité de subventions sans l'autorisation du gouverne- avec les recherches, avec les travaux qui ont été ment. C'est un institut qui va être entièrement faits par l'administration précédente. On lit ce qui sous le contrôle, sous l'autorité du gouvernement suit, dans le livre blanc, et je cite le rapport de M. au gré du ministre d'Etat au développement cul- L'Allier: "A la suite d'une analyse de ce rapport, le turel. On peut nous dire — et j'espère qu'on gouvernement a décidé d'en entériner les conclu- n'apportera pas cela comme explication — que sions et de créer, dans les meilleurs délais, cet c'est avec l'approbation du gouvernement. On sait institut." bien que le gouvernement a la majorité en Cham- (16 h 10) bre; si le ministre décide de faire adopter un On a déjà porté à l'attention de cette Chambre mandat, avec la majorité il va le faire. Alors, nous ne que c'est absolument faux, qu'il y a un élément soulevons pas de points techniques. essentiel, fondamental dans le rapport L'Allier qui Il y a quelques questions qu'on peut se poser est à l'encontre du projet de loi no 2. Je crois que suite aux recommandations du rapport L'Allier, cela vaut la peine de répéter cet aspect du rapport suite au projet de loi no 2. On peut se demander, L'Allier. Je le cite: "Dans les sociétés occidentales, dans notre société qui inclut d'autres groupes il ne semble pas y avoir d'institut d'histoire et de minoritaires, si le ministre va inclure ces autres civilisation créé par l'Etat et relevant directement groupements que les francophones, les autres de lui." institutions qui existent au Québec. Est-ce qu'elles C'est important, c'est une grande différence seront incluses dans la recherche de la culture que nous voyons entre le projet de loi no 2 et les québécoise? Les institutions non francophones recommandations du rapport L'Allier sur le- ont joué un rôle; comment seront-elles évaluées quel on semble se fier pour justifier le projet par cet institut de recherche? Quelle sera l'appro- de loi qui a été déposé en cette Chambre par le che de ce gouvernement envers ces groupes? On ministre d'Etat au développement culturel. Je parle, dans la définition de culture, de croyances, continue avec le rapport L'Allier: "Ce n'est d'ail- de valeurs morales. Est-ce que le gouvernement va leurs pas ce que nous recherchons, convaincus s'ingérer dans nos valeurs morales? Est-ce qu'il va que l'absolue liberté de la recherche et de l'expo- y avoir une culture officielle du Québec qui va sé des faits constitue la condition indispensable décréter quelles valeurs morales nous devons ac- au fonctionnement et à la crédibilité d'un tel cepter ou non, quelles connaissances sont bonnes établissement. Aucun historien ou homme de ou mauvaises? Vous voyez le genre d'abus qui sciences sérieux et tenant à sa réputation n'accep- sera possible dans le mandat, dans les modalités terait vraisemblablement de devenir un historio- du projet de loi. graphe ou chercheur officiel." Va-t-on rechercher une culture officielle? Ce Quand on nous dit dans le livre blanc qu'on sont des questions qui ont été posées par d'autres donne effet au rapport L'Allier, je crois que c'est de mes collègues, auxquelles le ministre n'a pas 1061 répondu, mais qui sont des abus possibles dans est antiQuébécois. On a tous les arguments usuels ce projet de loi. Et la tolérance — parce que quand normaux contre les journalistes qui ne sont pas on parle de culture, de toutes nos moeurs, on a d'accord avec nous. Je cite aussi un journaliste de connu la tolérance dans cette société depuis le la Presse, Lysiane Gagnon, pour qui j'ai beaucoup début — qu'allons-nous en faire? Déjà, le gouver- de respect. Dans un article du 30 avril 1977 qui nement, dans la poursuite de ses objectifs poli- s'intitulait L'affirmation culturelle, un pas vers la tiques, traite comme des étrangers ceux qui ne souveraineté, en parlant de l'approche législative sont pas d'accord avec ses idées. Qu'allons-nous du ministre, elle disait: "Et il s'y prend d'une en faire dans les questions soi-disant culturelles? manière qui a un aspect thérapeutique." Plus loin, Cela touche l'économie. On ne peut pas elle dit: "Le mot stratégie est inexact. Il faudrait séparer la culture de l'économie. Allons-nous faire plutôt parler d'un exercice de psychothérapie col- des études pour démontrer que les sociétés qui lective." quittent le Québec ne sont pas vraiment des socié- Mme la Présidente, je crois que c'est un peu tés québécoises, et bon débarras? Est-ce cela, le une insulte à la population de se faire traiter de rapport culturel, l'approche, l'attitude ou la soi- malade, parce que c'est cela la conclusion qu'on disant étude qui sera faite par l'institut du gouver- peut tirer de ces propos. Ce n'est pas la popu- nement? lation qui est malade, Mme la Présidente; c'est Et le Parlement, lui? Le Parlement, l'Assem- l'approche, c'est de la traiter de cette façon. C'est blée nationale, cela fait partie de notre culture. une approche insultante et un peu dangereuse. Les députés qui siègent ici contribuent au déve- C'est pour cela que ce projet de loi, on ne peut loppement de notre société. On peut être en pas l'accepter. Qu'on ne nous fasse pas de com- régression. Les sociétés n'ont pas toujours procé- paraisons avec les loi du gouvernement libéral. dé en termes de progrès. Elles ont eu certains Une autre raison pour rejeter ce projet de loi, reculs, mais le peuple s'est repris et elles ont fait c'est la question du référendum. Il va y avoir un d'autres progrès à d'autres époques et d'autres référendum, nous dit-on, et on vient mettre à la temps. Mais va-t-on faire une étude qui va démon- disposition du gouvernement qui a des objectifs trer que les dispositions que prend l'Opposition séparatistes une somme de $1 800 000 jusqu'à la officielle, parce qu'elles sont contre les positions fin de 1980. $1 800 000 qui seront utilisés pour des du gouvernement, sont antiquébécoises? Cela fins de propagande politique envers la population peut être une étude. Si vous voulez le résultat et on ose nous dire qu'on a adopté le projet de d'une étude, dites-moi qui vous allez nommer pour loi 92 pour limiter les dépenses. Les comités faire cette étude et je vous en dirai le résultat, nationaux sont limités. Eux, ils ne peuvent pas avant même que l'étude soit faite. Je vous en dirai dépenser. Il ne faut pas avoir une orgie de dépen- les conclusions parce que le gouvernement va ses. Ces sommes, connaissant le gouvernement, connaître le point de vue, l'approche de la per- seront utilisées pour des fins de propagande. C'est sonne qui fera l'étude. Voyons! Ce n'est pas la un instrument de propagande politique que vous première fois qu'on voit que cela se produit. Ce créez ici. On a vu des pays — je n'ai pas besoin de sont des dangers. La seule façon d'éviter ces dan- vous faire des portraits — où on a eu ces pro- gers est de changer ces articles 24 et 25, de créer blèmes. un institut autonome, d'après les recommanda- tions du rapport de M. L'Allier. Le député de Joliette-Montcalm a fait allusion M. de Belleval: Donnez des exemples. tantôt au fait que le gouvernement précédent avait fait une loi; il a fait un parallèle avec la Loi sur le M. Ciaccia: Les problèmes sérieux d'une cinéma. Je voudrais apporter deux aspects qui population, le ministre les connaît. Il a lu tous les sont un peu différents. Premièrement, le sujet. livres. Il les applique maintenant. Quand on traite de la culture en général, on traite de toutes les activités humaines. Mais l'autre M. de Belleval: Donnez donc des exernles si aspect que je voudrais porter à l'attention de ceux vous avez le courage de le faire. qui font le parallèle, c'est l'approche du ministre. Dans le Globe and Mail du 24 avril, on lit les propos du journaliste William Johnson qui fait M. Ciaccia: Cela ne commence pas d'une allusion à des propos du ministre d'Etat au déve- journée à une autre. D'une journée à l'autre, on ne loppement culturel, tenus il y a quelques années. Il tombe pas tout d'un coup dans les problèmes. s'interrogeait: Pourquoi suis-je souverainiste? Il Cela a un début. Les désastres et les problèmes parlait des effets paralysants de la névrose sur une qui se produisent dans une société ont leur début personne et il appliquait cela à la collectivité dans des projets de loi comme le projet de loi québécoise. Il a fait la description de cette névro- no 2. se. Les conclusions qu'on peut en tirer, c'est que le ministre croit que la société québécoise est M. de Belleval: L'Ouganda, comme la bonne névrosée et il va appliquer une cure psychiatrique soeur de tantôt? à notre société. (16 h 20) M. Ciaccia: Mme la Présidente... Non seulement William Johnson parce qu'on peut dire: Voici, c'est un journaliste anglophone; il Une Voix: C'est un bon exemple. 1062

La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît! A vraiment induire toute la population en erreur par l'ordre! sa publicité ou ses études. J'ai confiance au bon M. le député de Mont-Royal. sens de la population. Mais ce que je crains, c'est le dommage que de telles lois peuvent faire à la M. Ciaccia: ... je m'excuse, mais je n'accep- population, à notre société. Ce n'est pas néces- terai pas les accusations du ministre de la Fonc- saire d'avoir une telle loi pour promouvoir la tion publique. Je n'accepterai pas ses accusations. culture au Québec et encourager les activités Je n'ai fait référence à aucun pays jusqu'à main- culturelles. Cette loi, de la façon dont elle est tenant. Comprenez-vous? rédigée, sera utilisée seulement pour des fins séparatistes, et pour cette raison, je m'y oppose. M. de Belleval: Hypocrite. Merci.

M. Ciaccia: Mais vous n'allez pas épeler culture M. de Belleval: Mme la Présidente. avec un K. La Vice-Présidente: M. le ministre de la Fonc- La Vice-Présidente: M. le député de Mont- tion publique. Royal. M. Denis de Belleval M. Ciaccia: Pas dans ce projet de loi là. M. de Belleval: Mme la Présidente, je vous La Vice-Présidente: A l'ordre, s'il vous plaît! A remercie de me donner l'occasion de parler en l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! C'est M. le député deuxième lecture de ce projet de loi qui nous per- de Mont-Royal qui a maintenant la parole. Il peut mettra d'adopter le principe de la création d'un différer d'opinion avec les gens qu'ils soient assis institut de recherche sur la culture. Je vous d'un côté ou de l'autre de cette Assemblée. remercie de me donner la parole à ce moment-ci M. le député de Mont-Royal, c'est vous qui puisque nous venons tout juste d'écouter... Je ne avez la parole. sais pas si on peut le qualifier de discours, si on peut le qualifier d'exposé, si on peut le qualifier de M. Ciaccia: Mme la Présidente, il va falloir plaidoyer, mais je pense, Mme la Présidente, que faire un choix: ou nous allons nous inspirer des les termes que je pourrais employer pour qualifier lois des pays démocratiques avec toutes les con- ce que nous venons d'entendre ne seraient pas séquences que cela va comporter sur notre mode parlementaires. Par conséquent, je vais me dis- de vie, sur notre économie, ou on va s'inspirer des penser de les employer. lois des pays qui n'étaient pas démocratiques. Je n'ai pas voulu interrompre tantôt le député — de quel comté est-il? Mont-Royal — qui repré- Une Voix: Lesquels? sente ce comté de Mont-Royal. Je lui ai simple- ment demandé, comme le règlement, d'ailleurs, M. Ciaccia: On ne peut pas mélanger les uns nous le permet, de donner des exemples à la suite et les autres. Dans ce cas-là, Mme la Présidente, il de ses insinuations, à la suite de ce qui constitue, va aussi falloir en subir les conséquences. Ne à toutes fins utiles, de véritables crachats sur la pensez pas que ce qui se produit aujourd'hui... réputation du gouvernement et du projet de loi. Mme la Présidente, ils sont très nerveux, les Vous avez remarqué qu'au lieu de répondre à ma députés péquistes séparatistes quand on soulève question, il a préféré continuer son exposé parce certains propos. Quand on parle de la démocratie, qu'il aurait été honteux de donner les exemples cela leur fait donc mal. Je cherche seulement à qu'il insinuait. Il n'aurait pas été capable de faire certaines recommandations au ministre donner ces exemples parce qu'on aurait vu exac- quant aux articles 24 et 25, cela ne devrait pas leur tement la même réaction que nous avons vue à la faire tant de mal que cela. S'ils croient à la période de questions aujourd'hui quand le premier démocratie, qu'ils m'écoutent donc. Le ministre de ministre a donné un exemple, lors de la campagne la Fonction publique, s'il n'est pas d'accord avec électorale dans Jean-Talon, du genre d'insinua- moi, aura tout le temps voulu pour faire son in- tions que certains membres du Parti libéral sont tervention. prêts à faire quand il s'agit de combattre des poli- tiques du présent gouvernement. Au lieu de les La Vice-Présidente: M. le député, pendant combattre sur le fond de la question, au lieu de que j'y suis, j'allais vous demander de revenir au débattre du mérite ou non d'une question, ce parti débat. Vous n'avez plus que deux minutes tout au est devenu le spécialiste de l'utilisation des insi- plus pour conclure. nuations, de la peur y comprise, quand ils ne sont pas en Chambre, quand ils ne sont pas devant des M. Ciaccia: Merci, Mme la Présidente. C'est caméras de télévision, des exemples qu'ils vont malheureux qu'il ne me reste que deux minutes chercher chez Idi Amin Dada, l'Ouganda, l'Allema- après toutes les interruptions du ministre de la gne, l'Italie fasciste. (16 h 30) Fonction publique. En conclusion, Mme la Présidente, je ne crains Le député de Mont-Royal aurait dû avoir le pas — comprenons ceci — que le gouvernement courage, tantôt, de mettre sur la table de cette réussisse, par la création de cette institution, à Assemblée les exemples qu'il insinuait. C'est cela 1063 qu'il aurait dû avoir le courage de mettre sur la du Québec, ne faisaient pas l'affaire du premier table, s'il avait bien voulu. De quoi, s'agit-il, Mme ministre, et c'est le député de Mont-Royal, qui la Présidente? Plutôt que d'invoquer ces exemples occupe le même comté que le premier ministre outranciers et injurieux, pas pour le Parti québé- actuel du Canada, qui va vous donner, à nous, des cois, pas pour le gouvernement actuel, mais pour leçons de démocratie! l'ensemble des Québécois, et les Québécois fran- La clé dans la porte, les vases chinois sur cophones en particulier, au lieu d'utiliser ces l'écran de la télévision tant que les journalistes, arguments de la peur et de l'insinuation, pourquoi tant que nos poètes, tant que nos rédacteurs ne ne s'est-il pas attaché à examiner de quoi il s'agit produiraient pas le message que le premier minis- dans ce projet de loi? Il s'agit de créer une tre du Canada aimait entendre et aime entendre à entreprise, une société avec un conseil d'adminis- Radio-Canada! C'est le député de Mont-Royal qui tration autonome, répondant par mandat officiel et va soulever le spectre de l'Italie fasciste, de explicite du gouvernement déposé dans cette l'Ouganda, etc., et qui n'a pas eu le courage tantôt Assemblée nationale, pas déposé dans une offi- quand je lui ai posé la question de les donner, ses cine quelconque du gouvernement, pas déposé exemples, c'est lui qui va nous donner ces leçons? dans une officine quelconque d'une entreprise J'ai hâte que le nouveau chef du Parti libéral privée, mais déposé dans ce symbole même de la soit en Chambre, dans le fauteuil occupé actuelle- démocratie au Québec, en cette Assemblée natio- ment par le député de Bonaventure. Lui qui aime nale, ouvert, donc, à la critique et à l'examen de faire la leçon aux journalistes, lui qui aime donner tous les députés. Et surtout, bien sûr, des députés des leçons d'humilité, comme il en a donné de l'Opposition, puisque cette Assemblée, par son encore récemment, il pourra donner certaines règlement, par son mode de fonctionnement, est à leçons au député de Mont-Royal. Il aura beaucoup la disposition — sur le plan de la critique et de de travail à faire auprès du député de Mont-Royal l'examen des actes du gouvernement — de l'Op- et certains de ses nouveaux collègues à l'Assem- position. blée nationale, en matière de dignité et de fran- Non, Mme la Présidente, ce n'est pas de cela chise, particulièrement auprès du député de Mont- qu'on a parlé. Et on n'a pas dit que cela existe. Au Royal qui n'a pas eu le courage tantôt — je le contraire de ce qu'a voulu prétendre le député de répète — de répondre à mon interrogation quand Mont-Royal, ces organismes existent dans le nom- il semait à travers tout le Québec les crachats, les breux domaines et, en particulier, au niveau du injures, les insinuations sur l'honorabilité — je le gouvernement fédéral. Dans ce propre pays qu'il répète — pas du gouvernement actuel, pas du veut maintenir soi-disant, les plus puissants ins- ministre d'Etat aux Affaires culturelles, mais sur truments de développement culturel dans ce pays l'honorabilité de la tradition de démocratie des et, donc, dans cette province sont aux mains d'un Québécois francophones et sur l'autorité de cette gouvernement, du gouvernement fédéral de ce Assemblée nationale. pays. Ces instruments s'appellent entre autres Radio-Canada, ils s'appellent entre autres l'Office M. Ciaccia: Mme la Présidente, question de national du film. Encore aujourd'hui, on voyait que privilège. l'Office national du film du gouvernement fédéral, des amis du député de Mont-Royal, refusait à des La Vice-Présidente: M. le député de Mont- cinéastes québécois le droit de distribuer un film Royal se lève sur une question de privilège. parce que cela ne plaisait pas au pouvoir politique fédéral. Une Voix: Quel privilège? Mme la Présidente, avec le projet de loi dont il M. Ciaccia: Mme la Présidente, je ne ferai pas est question, il ne s'agit pas de produire des films mettre dans ma bouche des paroles que je n'ai pas de propagande par le gouvernement, il s'agit de dites. Les accusations que j'ai faites de moeurs, de constituer un organisme de recherche, pas un coutumes qui n'étaient pas de pays démocrati- organisme qui va produire des livres, pas un ques, ces accusations étaient contre le Parti organisme qui va produire des films, pas un québécois et le gouvernement, pas contre la popu- organisme qui va produire des bulletins de nouvel- lation. J'ai fait cette claire distinction et je ne les ou tout ce que produit, par exemple, Radio- laisserai pas porter contre moi ce genre d'accusa- Canada, mais un organisme qui va produire des tions. Je vous le dis d'une façon très paisible, très recherches, des études sur la culture québécoise. calme pour que vous ne continuiez pas à induire Ceci, sous le contrôle de cette Assemblée nationa- la population en erreur. le, en particulier au niveau des mandats qui sont confiés à cet organisme et qui doivent être dépo- La Vice-Présidente: M. le député de Mont- sés publiquement ici-même à l'Assemblée nationa- Royal, me permettrez-vous de vous faire remar- le. C'est le député de Mont-Royal qui veut nous quer que vous auriez pu invoquer l'article... M. le donner des leçons de démocratie alors que, dans député, s'il vous plaît... S'il vous plaît! J'allais dire notre propre pays, le premier ministre actuel de ce que vous auriez pu invoquer l'article 96, si vous pays a déjà menacé de mettre la clé dans Radio- aviez cru être mal interprété, M. le député de Canada. Soi-disant, les messages qui étaient pro- Mont-Royal. Il n'y avait pas lieu, à ce moment, de duits et diffusés par cet organisme si important soulever de question de privilège. sur le plan du développement culturel de l'ensem- M. le ministre de la Fonction publique, c'est ble du pays, et en particulier du Canada français et vous qui avez la parole. 1064

M. de Belleval: Merci, Mme la Présidente. La Vice-Présidente: Est-ce que je pourrais de- Je m'excuse si j'ai l'air marqué par l'émotion mander la collaboration de cette Assemblée, s'il au moment où je m'adresse à cette Assemblée, vous plaît? Comme je l'ai dit à M. le député de mais je dois dire que j'ai peine à prendre la parole Mont-Royal lors de son intervention, comme je l'ai après ce que je viens d'entendre de la part du dit à d'autres membres de cette Assemblée, je député de Mont-Royal, lui qui vient de dire main- demanderais aux deux côtés de cette Assemblée tenant que ce n'est pas à la population du Québec — on disait tantôt qu'on peut diverger d'opinion — qu'il en a, que ce n'est pas à la dignité de cette qu'on laisse M. le ministre de la Fonction publique Assemblée nationale qui aura le contrôle — le faire son intervention dans le calme, s'il vous plaît. projet de loi le dit explicitement — sur le nouvel organisme que le gouvernement veut mettre sur M. de Belleval: Je regrette beaucoup d'être pied, un Institut de recherche sur la culture, pas obligé de souligner ces faits, mais, en ce qui me un institut de production, mais que c'est au Parti concerne, vous remarquerez que je parle de faits. québécois qu'il en a. Lui qui a fait partie d'un Quand il a parlé, le député de Mont-Royal a fait un gouvernement qui, nuitamment, sans mandat, a procès d'intention et des insinuations. Il n'a pas emprisonné, lors d'une certaine nuit d'octobre, d'exemples à donner d'atteintes aux droits de la 300 personnes québécoises, 300 Québécois fran- personne comme ceux que je suis en train de don- cophones qui n'ont jamais été poursuivis devant ner et dont s'est rendu coupable le Parti libéral les tribunaux, un acte qu'on n'a retrouvé dans quand il formait le gouvernement du Québec. Ce aucun pays démocratique dont il a la bouche que je donne, ce sont des exemples de faits con- remplie actuellement comme exemples! crets. Tout ce que le député de Mont-Royal tantôt (16 h 40) a été capable de faire, ce sont des insinuations, M. Lalonde: Mme la Présidente, j'aurais une cela a été de répandre son fiel sur les vertus dé- question de privilège à soulever à ce stade-ci. mocratiques du gouvernement ou son absence de vertu. Des Voix: Ah! Je terminerai en disant qu'il existe aussi, au niveau du gouvernement fédéral, comme dans les M. Lalonde: C'est vrai. Je pense que la vérité a statuts du Québec, des lois qui permettent au gou- ses droits. On peut... vernement d'intervenir dans le domaine de la cul- ture et qui vont autrement plus loin que le projet La Vice-Présidente: S'il vous plaît! de loi que nous avons devant nous. Le député de M. le député de Marguerite-Bourgeoys se lève Joliette-Montcalm tantôt a donné l'exemple d'une sur une question de privilège. loi de l'ancien gouvernement qui intervient dans le M. Lalonde: ... comprendre l'émotion du mi- domaine du cinéma sans aucune des garanties nistre de la Fonction publique après l'humiliante d'impartialité qu'on retrouve dans le projet de loi défaite à laquelle il a participé dans Jean-Talon, du ministre d'Etat au développement culturel mais... quand il crée cet organisme de recherche. C'est le gouvernement libéral qui a adopté cette loi dans La Vice-Présidente: Vous invoquez une ques- un domaine extrêmement vital, celui du cinéma. Je tion de privilège. M. le député de Marguerite- n'ai pas besoin de dire qu'au niveau du gouverne- Bourgeoys, si vous avez réellement une question de ment fédéral aussi il existe une société de déve- privilège à soulever, je vous prierais qu'elle soit très loppement du cinéma qui peut donner des sub- explicite et que nous reconnaissions celle-ci com- ventions à des groupes ou à d'autres et refuser me une question de privilège. ces subventions sans les contrôles démocratiques et parlementaires qu'on retrouve dans le projet de M. Lalonde: Le très ému ministre de la Fonc- loi que nous présentons actuellement. tion publique tantôt accusait le député de Mont- Royal d'avoir fait partie du gouvernement lorsque Le député de Mont-Royal, bien sûr, n'a pas les événements d'ocobre ont eu lieu. C'est faux, voulu soulever ces exemples parce que cela aurait il n'était même pas membre de l'Assemblée natio- détruit sa thèse. Effectivement, les Etats modernes interviennent dans le domaine de la culture. nale. Quand on connaît aujourd'hui la puissance de la télévision, de la radio et du cinéma comme La Vice-Présidente: A l'ordre, M. le ministre! moyens de formation des opinions et de la culture M. le ministre de la Fonction publique. des peuples et le fait que tous les Etats démocra- tiques interviennent dans ces domaines par des Une Voix: Vous l'étiez, par exemple, dans le sociétés d'Etat qui ne sont pas contrôlées sur le temps. plan parlementaire, sur le plan législatif, comme le M. Lalonde: Mme la Présidente, j'entends un sera la future société de recherche sur la culture député qui n'est pas assis à sa place m'accuser, dont nous étudions actuellement la constitution moi, d'avoir fait partie de ce gouvernement-là. par ce projet de loi, je me dis qu'au-delà du procès Cela donne quand même la mesure de son igno- d'intention, au-delà des injures, il faut examiner la rance, car moi non plus, je ne faisais pas partie de situation en face. Il faut regarder ces exemples, il ce gouvernement-là; j'ai été élu en 1973. faut faire des comparaisons et il faut se rendre compte que tant sous l'ancien gouvernement Une Voix: Vous l'avez appuyé quand même. libéral, tant dans les autres Etats démocratiques Vous l'avez cautionné. occidentaux, y compris le gouvernement fédéral, 1065 les Etats effectivement interviennent dans le do- nous sommes, d'ailleurs, physiquement, Mme la maine de la culture. Ils interviennent par des Présidente. moyens extrêmement puissants, par des moyens beaucoup moins contrôlés démocratiquement que La Vice-Présidente: Là n'est pas la question, ce que nous retrouvons dans ce projet de loi. C'est M. le député. la vérité et rien d'autre. Merci, Mme la Présidente. M. Fernand Lalonde M. Ciaccia: Mme la Présidente, en vertu de l'article 96. M. Lalonde: C'est vrai que l'émotion, qui était tout à fait apparente, au moins — je ne doute pas La Vice-Présidente: M. le député de Mont- non plus de son authenticité — du ministre de la Royal. Fonction publique est sûrement inspirée par les questions très sérieuses qui se posent à ce M. Ciaccia: Le député, ministre de la Fonction moment-ci au Québec et les réponses surtout qui publique, m'a accusé de ne pas avoir voulu don- sont données par les Québécois aux questions ner d'exemples de pays qui ne sont pas démo- qu'on leur pose. C'est une coïncidence, mais il cratiques, parce que cela détruisait ma thèse. Ce n'est pas malheureux que le débat en deuxième n'est pas exact, Mme la Présidente... lecture sur ce projet de loi qui met en question l'opportunité de créer un bras gouvernemental à la La Vice-Présidente: M. le député de Mont- recherche culturelle ait lieu après que les Québé- Royal, l'article 96 ne vous donne pas droit à une cois de différentes régions aient eu à exprimer leur intervention. Il vous permet simplement de rétablir opinion sur les grandes orientations de ce gou- les faits par exemple: une phrase que vous auriez vernement. On y reviendra un peu plus tard. dite et qui aurait été interprétée autrement que ce Mme la Présidente, le ministre a cru néces- que vous vouliez bien dire par cette phrase. Vous saire de se justifier de proposer à cette Assemblée êtes bien conscient de cela, M. le député? un projet ayant trait à la culture, alors que la province de Québec se débat aujourd'hui, et M. Ciaccia: Alors, je veux rétablir les faits. surtout depuis deux ans, avec un climat écono- mique morose; le nombre des chômeurs est la Vice-Présidente: Alors, je vous laisse soule- passé, depuis que ce gouvernement est au pouvoir, ver l'article 96. de 190 000 à 320 000 en deux ans. Dans son in- tervention, le ministre disait: On va parler culture; M. Ciaccia: Je veux rétablir les faits. Dans on sait, l'économie on s'en occupe, d'autre part, mon intervention, j'ai cité le rapport de M. Jean- mais que voulez-vous, il faut parler culture. Il avait Paul L'Allier qui disait, et je cite: "Dans les l'air d'être complexé, d'avoir un complexe de sociétés occidentales, il ne semble pas y avoir persécution, je ne sais pas. Il s'excuse presque de d'institut d'histoire et de civilisation créé par l'Etat prendre quelques heures de notre temps pour et relevant directement de lui." Alors, Mme la nous soumettre une loi à portée culturelle. Présidente, ce n'est pas ma thèse, c'est la thèse du (16 h 50) rapport L'Allier qui dit que dans les pays démo- Je pense que le ministre témoigne ainsi d'un cratiques il n'y a pas de tels instituts comme celui complexe malheureux, d'un comportement velléi- que veut créer le ministre d'Etat au développe- taire et hésitant qui est sans doute la source de ment culturel. Je ne veux pas accepter de telles bien des attitudes radicales de sa part et qui accusations; je ne veux pas faire changer mes pro- explique en partie la tendance à exagérer ses pos. actions, ses gestes et ses décisions. Je désire donc rassurer le ministre. Nous appuyons son La Vice-Présidente: D'accord. M. le ministre... initiative de saisir l'Assemblée nationale à ce Vous vous leviez pour une intervention, M. le moment-ci d'un projet de loi à portée culturelle. député de Marguerite-Bourgeoys? Que le ministre ne se sente pas persécuté par les demandes répétées de l'Opposition officielle, libé- M. Lalonde: Oui, Mme la Présidente. Naturel- rale pour que ce gouvernement trouve du travail lement... On est donc nerveux en face, je n'ai aux chômeurs. Nos réclamations sont comman- même pas commencé, sauf vous interpeller, Mme dées par la réalité dure et tragique des 320 000 la Présidente, qu'on me lance déjà des quolibets. chômeurs du Québec, par l'appauvrissement col- Je ne sais pas si c'est l'expérience de lundi soir lectif qui frappe le Québec depuis que les sépa- qui a traumatisé ces gens d'en face. C'est un peu ratistes ont pris le pouvoir au Québec par la porte comme l'humeur du ministre de la Fonction publi- d'en arrière. Mais nous ne voudrions pas que le que qui s'est vu littéralement battu dans Jean- terrible spectre du chômage et la faillite économi- Talon, lundi dernier, par... que de ce gouvernement créent un complexe de persécution chez notre bon docteur, ministre La Vice-Présidente: Voulez-vous arriver à... d'Etat au développement culturel. Si au cours de ce débat et à l'avenir le ministre se sent encore M. Lalonde: Oui, j'y arrive. Mais il est passé infériorisé par rapport à la question économique, par le fédéral, vous allez quand même me permet- qu'il se confie à nous. Nous le rassurerons. Nous tre de passer par Jean-Talon, ce beau comté où aurons à son égard tous les gestes... 1066

La Vice-Présidente: M. le député de Margue- livre blanc, est globale. Elle comprend tout, non rite-Bourgeoys, je n'aurai pas besoin de vous relire seulement la langue et les arts, mais aussi l'écono- la motion en discussion, n'est-ce pas? mie, l'aménagement du territoire, le loisir, la santé, le travail, les relations internationales, etc." Il est M. Lalonde: Non, non, Mme la Présidente, loisible au gouvernement de choisir cette voie, mais le ministre s'excusait au début de parler de la mais raison de plus pour donner à tout organisme culture, alors qu'on a un chômage épouvantable. à qui il confiera le soin de la recherche, de faire Je ne veux quand même pas que cette espèce de des démarches à cet effet, raison de plus — dis- situation l'insécurise. Je veux lui dire que nous je — de donner à tout organisme semblable un sommes prêts à en parler pendant quelques caractère d'indépendance absolue, sinon nous heures. Je pense qu'on peut trouver dans ce allons arriver à ce que conclut M. François Ricard: comportement du ministre une certaine explica- "Le PQ politise d'emblée la culture..." II pour- tion de ses réactions excessives dans les remèdes suit — M. Ricard n'est pas, je pense, un membre qu'il nous propose. Il assoit d'abord son projet sur de l'Opposition officielle — dans le même sens le livre vert de M. Jean-Paul L'Allier et sur le que disait le député de Mont-Royal tantôt, ce qui rapport Frégault. Il invoque ensuite la continuité provoquait des réactions ulcérées de la part de pour justifier en quelque sorte ses choix, ceux que nos amis d'en face: "... et fait de ce livre blanc une l'on trouve au projet de loi. Je ne répéterai pas arme politique (référendaire) incomparable." Oui, l'intervention d'un ancien ministre, le député de le député de Mont-Royal a parlé du référendum, il D'Arcy McGee, sur la motion de report et aussi sa n'est pas le seul. Pensez-vous qu'on agite des première intervention ici, il y a à peu près un mois, épouvantails? Tout le monde en parle, tout le qui a bien démontré toute la différence entre les monde juge le gouvernement actuellement. La recommandations du rapport L'Allier et le projet campagne électorale que j'ai faite dans le comté de loi qui nous est présenté. Nous sommes de Jean-Talon et que d'autres députés qui sont un d'accord avec la création d'un institut de recher- peu moins joyeux, par exemple, en face de moi, che sur la culture. Toute démarche du gouver- ont faite, de toute évidence nous l'a prouvé. Ne nement pour rendre un peu cohérentes les activi- vous imaginez pas que les Québécois attendent, tés de nature culturelle, toute tentative, tout geste devant leur appareil de télévision, que ce bon concret sont bienvenus étant donné que nous gouvernement veuille bien ouvrir le livre du réfé- croyons qu'il s'agit de la fibre même de la vie rendum et qu'avant cela on ne s'en préoccupera d'une population et que le gouvernement est, au pas du tout. Non. Tout le monde juge le gouver- premier titre, responsable sinon de la culture — on nement en fonction de sa franchise tout d'abord. s'en garde — du moins de certains gestes, de Il y en a donc qui m'ont dit: Pourquoi ne certaines contributions. Mais nous exigeons que répondent-ils pas à vos questions? Premièrement, cette démarche du gouvernement soit faite au il faut écouter. Pourquoi ce gouvernement n'est-il coin de l'indépendance de cet organisme. C'est pas franc? Ensuite, pourquoi voulez-vous nous essentiel. Des mots et des discours ne suffiront reprocher à nous, députés de l'Opposition, d'avoir pas. Le ministre a dit dans son discours en des remarques comme celles du député de Mont- deuxième lecture: Cet institut agira en toute Royal tantôt: "C'est une arme référendaire?" C'est liberté. C'est ce qu'il dit, mais ce n'est pas ce qu'il une arme référendaire que le ministre vous donne, fait. M. L'Allier disait: Un institut créé par l'Etat et raison de plus d'être prudent et vigilant. Nous relevant directement de lui n'est pas ce que nous n'accepterons pas les explications émues, si l'on recherchons. C'est ce que M. L'Allier a dit et ce veut, du ministre de la Fonction publique. Non, il n'est pas ce que fait le ministre actuel. Donc, il n'y n'y a pas de contrôle de l'Assemblée nationale sur a pas de continuité même si le ministre actuel cet organisme. Il y a un lien direct entre le ministre l'invoque. responsable, la nomination des membres et les mandats qui sont donnés, mandats que l'institut C'est d'autant plus important, Mme la Prési- doit remplir; non pas "peut", mais "doit" remplir. dente, que l'institut soit totalement indépendant Il peut faire autre chose? Imaginez qu'un institut du gouvernement que la conception de culture qui qui reçoit du ministre deux ou trois mandats par est véhiculée par le livre blanc sur la politique semaine ou par mois, selon leur importance, ne québécoise de développement culturel du gouver- peut qu'être le serviteur du ministre. C'est le bras nement actuel est une conception envahissante, gouvernemental de la culture. Cela va devenir la une conception qui fait que tout est culture dans culture gouvernementale, Mme la Présidente. ce gouvernement. Ce n'est pas une conception qui Lorsque le député de Mont-Royal évoque d'autres est seulement celle du ministre actuel; d'autres endroits où l'Etat a commencé à s'occuper de la l'ont déjà exprimée. Il ne s'agit pas d'ailleurs de culture de façon directe, on entend les sanglots, discuter ici du mérite de cette conception, mais les larmes de crocodiles de l'autre côté. c'est un fait — il faut être concret — que ce (17 heures) gouvernement, le ministre en particulier, favorise la conception globalisante de la culture, comme le Oui, c'est arrivé ailleurs et j'ai moi-même eu à dit François Ricard dans la revue Liberté de juillet discuter publiquement dans le journal La Presse et octobre 1978. du mot fascisme que j'ai dû définir et dont j'ai C'est tout un projet de société, je cite M. donné la définition faite par d'autres en faisant Ricard: "Le PQ donne à la notion de culture une même des citations de Camus: "C'est toute forme extension absolue. Or, la culture du Québec, dit le de mépris". Ne méprisez pas la population, ne po- 1067

litisez pas la culture; sinon, elle vous jugera très de M. L'Allier. Mais ce que je lui reproche, c'est de sévèrement. C'est déjà commencé. ne pas avoir lu tout le rapport L'Allier, d'avoir, au J'avais mis en garde le même ministre lors de contraire, invoqué la continuité pour justifier son la loi 101 contre son entêtement à ne pas mesurer geste tout en trahissant le rapport L'Allier qui, lui, les objections bien fondées de ceux qui ne exigeait l'indépendance totale entre le gouverne- pensent pas comme lui. Je lui avais reproché de ment et l'Institut de recherche sur la culture. nous avoir traités d'inféodés, entre autres. Je lui ai Mme la Présidente, on a tenté, dans une reproché cet entêtement. Je me souviens de lui motion de report, d'inviter le ministre à la ré- avoir dit: Vous allez vous isoler comme gouverne- flexion, avec ceux et celles qui sont impliqués, qui ment en vous entêtant; vous allez voir, la popula- sont intéressés à la recherche culturelle. Cela tion ne vous suivra pas. C'est déjà commencé, nous a été refusé. On n'en a pas fait un "fili- Mme la Présidente. C'est déjà commencé dans buster". Il fallait tout d'abord tenter de sensibiliser Argenteuil, dans Jean-Talon et cela continue par- le gouvernement et la population. Nous avons tout ailleurs. tenté, dans nos interventions, d'amener le ministre Naturellement, vous allez dire, Mme la Prési- — cela fait un mois qu'on discute de ce projet de dente: Le ministre va sûrement être scandalisé loi, depuis le début d'avril — à nous rassurer par quand je lui dis, par exemple, qu'il veut faire de les amendements qu'il pourrait apporter à l'étude cet institut sa propre chose. Je vous parie que non article par article. C'est le mutisme le plus parce que c'est conforme à la conception de la complet. C'est l'entêtement le plus complet. Mme société qu'il a. C'est conforme à l'intervention la Présidente, on a vu ce que cela a donné avec la étatique qu'il veut constamment introduire dans la loi 101 et tous les abus inutiles en matière éco- vie des gens. D'ailleurs, la lecture du livre blanc en nomique, par exemple, qu'elle comporte. On a est la preuve la plus évidente. Tout est culture et déjà mis en garde le gouvernement et le ministre tout dépend de l'Etat. Nécessairement, on appelle en particulier contre cet entêtement. Il n'a pas cela la culture démocratique, la démocratie cultu- compris. Il n'a pas compris la leçon de Jean-Talon relle, mais ce sont des mots; c'est l'Etat qui est et d'Argenteuil. partout, ce sera le bras du ministre. Mme la Présidente, on aura tout fait pour Le ministre n'est pas éternel et nous non plus; l'empêcher de faire une autre erreur par laquelle il c'est la société, au fond, qu'on veut servir. Pour- creuse encore davantage sa tombe. Alors, qu'on quoi faire ce détour inutile et coûteux? Pourquoi ne soit pas surpris, comme on l'a été du côté du ne pas nous écouter actuellement? Pouvez-vous Parti québécois lundi soir, qu'on ne soit pas sur- me dire combien de temps il me reste? Je ne veux pris désormais lorsque la population jugera de façon pas prendre trop de temps, mais je veux quand aussi sévère le caractère doctrinaire, étatique, même dire un certain nombre de choses. interventionniste des propositions qui nous sont fai- On a comparé l'Institut de recherche sur la tes par le ministre et ce gouvernement. Merci, Mme la culture avec l'Institut du cinéma pour tenter de Présidente. minimiser l'importance de cette démarche. Cela m'apparaît contradictoire avec l'importance que le M. Laurin: Mme la Présidente... ministre lui-même lui donne. Il nous dit que c'est un geste extraordinaire, solennel que la création La Vice-Présidente: M. le ministre d'Etat au de l'Institut de recherche et je le crois. Je suis de développement culturel. l'avis de ministre et non pas du ministre de la Fonction publique, ni du député de Joliette-Mont- M. Camille Laurin calm qui faisaient tantôt une comparaison avec l'Institut du cinéma. Bravo, l'Institut du cinéma fait M. Laurin: ... je me réjouis d'abord de l'intérêt son boulot, mais il n'a pas la même mission. Il faut qu'a suscité l'étude de ce projet de loi dans toutes les quand même le reconnaître. A cet Institut de re- formations politiques et je profite de cette occa- cherche, on va confier des mandats dont les résul- sion pour remercier tous ceux qui sont intervenus, tats vont affecter la vie des gens partout. Si on comme, par exemple, les députés de Mercier, de prend la conception globalisante de la culture que Sherbrooke, qui ont fait ressortir l'importance le ministre a bien voulu nous donner dans son que la recherche sur la culture s'intéresse aux livre blanc, cet Institut de recherche va faire des minorités, au développement régional, à la culture recommandations en réponse aux mandats du mi- populaire. nistre. Ces recommandations vont devenir la bible Je remercie également le député de Gaspé qui du ministre et elles vont être sa justification à est d'accord avec le principe du projet de loi, mais toute démarche, à toute intervention dans la vie surtout dans la mesure où l'étude sur les mino- des gens. Qu'on ne compare quand même pas rités, le rayonnement régional sera poussée da- cela avec l'Institut du cinéma qui est très bien, vantage, et dans la mesure aussi où une autono- mais qui ne fait que ce qu'il est appelé à faire. mie compatible avec les poursuites des objectifs C'est un geste extrêmement important que le de l'institut sera maintenue. gouvernement pose actuellement en proposant à Je remercie également les députés libéraux l'Assemblée nationale la création de cet institut. qui sont intervenus, mais j'avoue que je ne me suis Le ministre l'a dit: II ne l'a pas inventé comme pas tellement retrouvé dans ce qu'ils ont dit. idée; il a accepté le principe qui avait été émis en D'abord, j'ai cru discerner une certaine ambiva- d'autres termes, sous un autre titre, par le rapport lence, un certain flottement. Ils ne semblent pas 1068 s'être concertés pour avoir une opinion unanime uniquement la reconquête de ce pouvoir qu'ils ont sur le projet de loi puisque certains ont dit qu'ils perdu en raison de leurs abus, en raison de leurs étaient d'accord avec le principe, qu'ils étaient excès, en raison de leur antidémocratisme, en même tentés de voter pour le projet de loi, alors raison de leur répression, de leur coercition et ils qu'un autre, le député de Mont-Royal, en parti- ne visent que la reprise de ce pouvoir. culier, et le député d'Outremont ont dit qu'ils On sent très bien que ce qu'ils reprochent étaient fondamentalement opposés au projet de davantage à ce gouvernement, c'est non pas sim- loi et qu'ils voteraient, pour des raisons viscérales plement d'avoir redonné la dignité, la fierté au contre ce projet de loi. Ce qui ne m'étonne pas, peuple québécois, mais également d'avoir adopté d'ailleurs, puisque déjà, à l'occasion du projet de des politiques qui, enfin, donnent la parole aux loi no 22, le même député s'était désolidarisé de parties de la population qui avaient été négligées son gouvernement. dans le passé, aux défavorisés, aux moins nantis, Bien sûr, les députés libéraux ont profité de en redistribuant les revenus, en s'attaquant aux l'occasion pour répéter les commentaires qu'ils problèmes qui empêchaient certains secteurs de avaient dits à l'occasion de la parution de la poli- la population de se développer, comme les per- tique de développement culturel. Ils ont répété, sonnes âgées, comme les femmes, comme les par exemple, que cette politique de développe- milieux défavorisés, que ce soit par le moyen de la ment culturel était globaliste, qu'elle était autori- taxation qui a été redistribuée de façon qu'elle taire, qu'elle était coercitive, qu'elle était élitiste frappe davantage les riches que les pauvres et que s'appuyant sur les déclarations des rares journa- les gens à faible ou moyen revenu, en s'attaquant listes ou revuïstes qui s'étaient opposés à la poli- à des politiques comme celle du revenu minimum tique de développement culturel alors que, d'une garanti, en s'attaquant à des politiques économi- façon générale, elle a reçu l'assentiment des ques, dont on commence à sentir les effets. couches les plus importantes de la population. Je ne refuse pas de parler d'économie, con- Encore une fois, Mme la Présidente, je ne me trairement à ce que vient de dire le député de suis pas retrouvé dans ce que l'on m'a fait dire. On Marguerite-Bourgeoys, d'abord parce que l'écono- a utilisé la tactique habituelle. On dit d'abord de mie va beaucoup mieux qu'il ne l'a dit et on l'a son chien qu'il a la gale. On le dépeint sous les montré, le ministre de l'Industrie et du Commerce, traits les plus noirs et quand on l'a suffisamment celui du développement économique l'ont montré noirci, on le noie pour être bien sûr que tout le par le taux des investissements, par la montée du monde va approuver l'opération à laquelle on s'est revenu personnel, par toutes les initiatives pour la livré. En écoutant les députés libéraux, je pensais petite et moyenne entreprise qui commencent à à ce vieux proverbe de Voltaire: "Mentez, mentez, donner des résultats. Nous ne refusons pas d'en il en restera toujours quelque chose." parler, mais il y a un temps pour parler de l'économie, il y a un temps pour parler de culture. Ce que j'ai entendu de la part de plusieurs Et même le chômage qui touche 320 000 per- députés libéraux ce sont justement des déforma- sonnes n'est pas attribuable au gouvernement du tions, des insinuations, des mensonges qui ne font Québec, qui, comme on le sait, ne contrôle pas les absolument pas justice au texte même de la principaux leviers de l'économie, ni les tarifs, ni politique québécoise du développement culturel. Il les douanes, ni les grandes politiques générales. est bien facile, bien sûr, après de dire que nous D'ailleurs, ce poids du chômage est attaché, condamnons cette politique parce qu'elle est actuellement, aux traces, aux pas du premier autoritaire, coercitive, paternaliste et que sais-je ministre du Canada, qui n'est pas capable de le encore. secouer et qui, probablement, devra sa défaite D'ailleurs, je pense que la victoire récente prochaine à ce spectre du chômage qu'il n'a pas d'Argenteuil et de Jean-Talon a monté à la tête des réussi à juguler. députés libéraux qui se sont exprimés et de Nous ne refusons pas de parler d'économie, quelques autres éditorialistes de nos grands jour- d'autant plus que, pour nous, développement naux, car, depuis cette victoire, ils se sont déchaî- économique, développement culturel, développe- nés. Ces adeptes habituels de l'alarmisme, du ment social sont reliés par la même base, parce catastrophisme se sont déchaînés littéralement que c'est le progrès d'une société qui nous tient à depuis quelques jours, ils se croient déjà au coeur, mais ce progrès de la société ne pouvait pouvoir. Ils croient qu'ils ont déjà gagné le réfé- pas être fait par le gouvernement antérieur, il fallait rendum mais, pour mieux pousser leur victoire, ils qu'il soit abordé franchement par ce gouverne- prédisent les catastrophes si ce gouvernement ment et dirigé par des élites nouvelles. Les élites doit continuer à régir les intérêts collectifs. nouvelles qui viennent justement de notre révolu- Je pense, Mme la Présidente, que cet alar- tion scolaire, qui viennent de nos cadres syndi- misme et ce catastrophisme ne correspondent caux, qui viennent de nos cadres dans la fonction absolument pas, ni aux paroles, ni aux textes que publique, qui viennent de tous ces nouveaux ce gouvernement a publiés, ni aux gestes qu'il a éléments qui ont enfin retrouvé la parole, depuis posés, ni à sa pratique quotidienne. J'espère bien quelques années, et qui ont contesté avec succès que nous aurons amplement l'occasion de le l'emprise, l'hégémonie de ces vieilles élites tradi- démontrer. Leur véritable motivation est une moti- tionnelles, de ces gérontocraties qui ont toujours vation de pouvoir. Ce n'est pas la vérité qu'ils géré la société à leur profit, avec un système recherchent, ce n'est pas de faire avancer la cause fiscal, avec des politiques qui ne favorisaient que de l'homme et de l'homme québécois, mais c'est leurs propres intérêts. 1069

Ce que l'Opposition, actuellement, aussi bien faire au Québec — je cite le rapport Frégault — en Chambre que dans les journaux qui l'appuient, c'est d'établir enfin une politique linguistique qui ne peut pas supporter, c'est justement le change- réponde à nos besoins, à nos préoccupations, une ment de pouvoir, la redistribution des forces politique de la recherche scientifique, une politi- productives et des forces créatrices dans notre que de développement culturel." Nous l'avons lu, société. Je pense que le peuple, lui, ne s'y trompe le rapport Frégault, et dans les deux premières pas, puisque les sondages révèlent que le peuple années de notre mandat, nous avons réalisé ces est content de l'administration de ce gouverne- trois grands objectifs du rapport Frégault: une ment, qu'il est satisait des mesures que ce gouver- politique linguistique, de développement culturel, nement a prises. de recherche scientifique. Il se pose peut-être encore des questions sur Nous en sommes maintenant à mettre en son avenir politique, sur son avenir national, mais place les éléments qui nous permettront de conti- soyez sûre, Mme la Présidente, que lorsque nous nuer cette recherche sur ce que nous sommes, sur nous mettrons vraiment à l'oeuvre et que nous ce qu'est l'individu qui vit ici, dans notre société. tenterons d'expliquer à la population les raisons La création de cet Institut de recherche n'a pas pour lesquelles elle doit choisir des voies nouvel- d'autre fin que d'en arriver à ce résultat. Non pas les pour son avenir politique, pour son avenir que nous voulions faire du Québec un ghetto, national, nous aurons le même succès que nous mais la meilleure façon d'accéder à l'universel, avons eu en 1976. c'est d'être proche de ses racines, c'est de savoir On a fait beaucoup de reproches à notre qui nous sommes. C'est dans la famille que nous politique de développement culturel; on l'a traitée apprenons d'abord la langue, que nous apprenons de globalisante. Ce n'est pas nous qui disons que notre culture, nos traditions, les institutions, et toute culture doit être globale, ce sont les sociolo- c'est par approximations successives qu'à partir gues, ce sont les anthropologues, c'est le mouve- de ces racines, à partir du bagage, du patrimoine ment même de la science. La culture n'est pas la que nous avons reçu, nous pouvons nous emparer somme des connaissances, comme le disait le du patrimoine des autres cultures, des autres député de Mont-Royal, des valeurs ou des croyan- nations et que nous pouvons accéder à l'universel. ces morales. La culture est un élément dynamique, D'ailleurs, les prix Nobel en littérature sont c'est quelque chose qui est en marche, qui se fait toujours accordés à des écrivains dont l'oeuvre a constamment. Si l'homme est le roi de la création, ses racines dans les fondations mêmes de leur il ne peut que se projeter lui-même dans toutes famille et de leur petite patrie, qu'il s'agisse de ses activités, il ne peut qu'imprimer sa marque sur Pablo Neruda, de Lundkvist et de tous les autres. toutes les facettes de son activité, que ce soit de la Donc, nous n'avons aucune honte à nous dire Qué- façon dont il mange, boit, établit ses relations bécois, à questionner nos racines, à établir une humaines avec les autres, dont il crée ses institu- société qui nous appartienne et qui nous ressem- tions, dont il crée son droit. La culture est un ble, puisque nous savons que c'est là la première élément dynamique, un élément de projection. condition pour ne pas nous enfermer dans notre C'est la raison pour laquelle l'homme non seule- ghetto et ensuite accéder à l'universel. ment imprime sa marque sur son entourage, mais On nous reproche également que notre con- il doit également se reposer sans cesse des ques- ception de la littérature est élitiste, que nous tions sur ce qu'il fait afin de corriger les erreurs de sommes condescendants à l'endroit de ces pau- trajectoire grâce à l'esprit critique qu'il possède, vres masses qui ne savent que penser. Bien au grâce à ce pouvoir qu'il a sur la pensée. contraire, toute notre action en matière culturelle Donc, ce n'est pas nous qui disons que la depuis deux ans montre que nous sommes très culture est globale. C'est la culture de soi qui est proches de tous les milieux culturels qui agissent globale, parce qu'elle tient à la nature même de au Québec dans quelque domaine que ce soit: l'homme. On nous a dit également que cette cul- arts, littérature, arts plastiques, radio, communi- ture, dans la conception que nous nous en cations. faisions, était trop québécoise. M. L'Allier lui- (17 h 20) même, dans son livre vert, le disait: II faut penser Nous avons des communications constantes au collectif. Il parlait de notre collectivité québé- avec tous ces groupes populaires, mais, en même coise comme d'une collectivité fragile, d'une col- temps, puisque nous sommes des hommes et que lectivité menacée. Il disait que cette société avait les hommes sont doués de sens critique, il faut besoin de se trouver des symboles de la conscien- que nous sachions faire la propre critique de ce ce collective, autour de penseurs, justement, exac- que nous faisions. Et si, dans le livre blanc sur le tement comme nous tentons de le faire avec développement culturel, nous avons parlé d'habi- l'Institut de recherche sur la culture. Si le comité tat, d'environnement, de soins de santé, ce n'est Frégault n'a pas retenu l'institut d'histoire et de pas pour empêcher les gens de se complaire dans civilisation auquel pensait M. L'Allier, sans vouloir les habitudes qu'ils ont, mais simplement pour le créer d'une façon absolue, c'est que justement leur rappeler le résultat de certaines études qui le rapport Frégault pensait qu'il y avait plus impor- apparaissent un peu partout et qui avertissent tant à faire qu'un institut d'histoire et de civili- l'homme de ne peut-être pas s'engager trop avant sation du Québec, soit un Institut de recherche sur dans telle ou telle voie. Ce n'est pas que l'Etat la culture. veuille imposer sa conception, mais il veut rendre "D'autant plus, disait-il, que ce qui presse à service en rappelant, en résumant ces constata- 1070 tions scientifiques pour qu'elles servent de point lités, de 1000 volontés qui, au gré de leurs affi- de réflexion pour la population. nités, selon leurs talents et leurs aptitudes, s'unis- On nous a même reproché ce "logo" qui sent pour atteindre, pour essayer d'atteindre en apparaissait sur le livre blanc sur le développe- tout cas à ce qui fait la grandeur de l'homme, ment culturel. Il n'y a rien de paternaliste, il n'y a c'est-à-dire la beauté, la vérité, l'entraide, la soli- rien de condescendant dans ce "logo", Mme la darité. C'est là notre conception de la culture, Présidente. Cette fleur de lys qui symbolise notre Mme la Présidente, au-delà de tous les mensonges pays en même temps que notre culture, nous qu'on a essayé de faire avaler à la population dans voulons simplement signifier par là que c'est un cette Assemblée nationale. instrument de notre patrimoine, c'est un instru- En ce qui concerne l'Institut québécois de ment que nous voulons partager entre les géné- recherche sur la culture, d'une façon proprement rations, entre les divers secteurs sociaux de notre dite, qui ne fait qu'expliciter ces concepts que je société, entre les divers groupes culturels qui viens de résumer trop brièvement à mon gré, nous composent la réalité québécoise. C'est un symbole retrouvons les mêmes principes. On nous accuse d'échange, un symbole de partage, un symbole de de vouloir concurrencer indûment les universités. participation, un symbole de démocratie, en som- Rien de plus faux, Mme la Présidente. Nous me. Nous en sommes fiers malgré tous les men- savons qu'il se fait des recherches sur la culture songes qu'on a utilisés pour en changer le sens. dans les universités; il s'en est fait, d'ailleurs, On dit enfin que notre conception de la davantage dans les universités du Québec que culture est autoritariste, que nous voulons nous dans bien d'autres pays en raison de notre situa- ériger en définisseurs de la culture, alors, Mme la tion douloureuse et névralgique qui nous forçait à Présidente, que nous avons répété au moins une faire ces études. Mais ces études sont trop peu centaine de fois dans cette politique de dévelop- nombreuses. Elles sont insuffisantes. Elles sont pement culturel que ce n'est pas l'Etat qui fait la surtout mal coordonnées. Bien souvent, les cher- culture; c'est l'homme qui fait la culture en vivant, cheurs eux-mêmes se plaignent de l'insuffisance en projetant ce qu'il est dans tous les groupes des crédits et de la coordination. dont il fait partie. Il fait de la culture comme M. C'est en réponse à leurs besoins, à leurs Jourdain faisait de la prose, sans le savoir, et il demandes que nous créons cet institut de recher- s'agit simplement ensuite de voir quelles sont les che sur la culture où, enfin, il y aura un endroit où formes qu'il donne à sa culture. ils pourront se retrouver, se concerter, établir un Au contraire, ce que nous disons et ce que programme général de recherche sur la culture nous répétons, c'est qu'il faut dans une démocra- auquel, d'ailleurs, participeront tous ces cher- tie voir que ces biens culturels, comme les biens cheurs individuels dans chacune des universités, économiques, doivent être accessibles à tous de la tous ces départements ou ces écoles dans chacu- même façon, quelle que soit la classe sociale à ne de nos universités. Les gens de l'Institut de laquelle ils appartiennent, quelle que soit la région recherche seront peut-être dans les lieux où ils qu'ils habitent, quelles que soient les contraintes opèrent, que ce soit dans les universités ou que ce physiques, géographiques, financières, économi- soit dans les gouvernements. Incidemment, cet ques qui les empêchent d'accéder à ces biens. institut aura le droit de publier le résultat de ses Nous l'avons fait dans le domaine de la santé, recherches, contrairement à ce qu'un député nous dans le domaine de l'hospitalisation, dans le disait. domaine juridique; il faut également le faire dans Mais le grand reproche qu'on veut nous faire, le domaine culturel parce que l'homme ne vit pas c'est celui de dirigisme culturel. Rien n'est plus seulement de pain; l'homme a besoin de culture faux, Mme la Présidente. Bien sûr, l'Institut de sous forme de radio, de journaux, d'art, d'école, recherche s'est réservé certains des pouvoirs qui de métier, ainsi de suite. Il faut que cette acces- sont essentiels en tant que mandataire du gouver- sibilité libre et égale soit le fait d'une société qui nement. Puisque cet institut émarge aux fonds se dit vraiment démocratique. publics, il fallait lui assurer cette sécurité si on Notre conception est tellement humaniste que veut atteindre à l'efficacité. Puisque c'est un man- nous disons que l'homme, où qu'il soit dans notre dataire du gouvernement, il fallait quand même société, a le droit à tous ces biens culturels et qu'il que le gouvernement n'abdique pas sa responsa- doit les faire servir, qu'il ait les moyens de se les bilité de nommer les directeurs ou les membres de donner personnellement ou que ce soit l'Etat qui ce conseil d'administration. Il fallait qu'il n'abdi- en favorise la transmission, à son épanouissement que pas sa responsabilité également de coordon- individuel. Il doit les faire servir au développement ner les activités de cet institut selon les lois de tous les talents, aptitudes et particularités que usuelles, celles de la Fonction publique, par la nature lui a donnés, afin qu'il porte tout son exemple, qui fixe les rémunérations. Il n'a fait que fruit, afin aussi qu'il soit heureux dans l'accom- l'essentiel dans ce domaine. plissement, l'exercice de toutes ses activités. Nous Mais pour tout le reste, cet institut sera avons même été plus loin; notre conception de la entièrement autonome en ce sens que les mem- démocratie culturelle dit également qu'il appar- bres en seront nommés après consultation avec tient à l'homme et à tous les groupes dont il fait les chercheurs du milieu, comme cela se fait d'une partie, qu'il choisit au gré de ses affinités, de par- façon générale. Cinq des membres seront nom- ticiper à l'élaboration de la culture. Donc, la culture més, après consultation, sur neuf, et les trois est une résultante de l'effort de 1000 personna- autres seront des chercheurs appartenant eux- 1071 mêmes à l'institut. Pour le reste, la loi est très avaient pour leur propre discipline, ils vont accep- claire à ce sujet. Une fois nommés, les membres ter le diktat ou les ukases d'un gouvernement quel de ce conseil d'administration seront totalement qu'il soit. C'est là une insulte à toutes nos autonomes. Ils auront le droit d'établir le program- traditions universitaires, à toutes nos traditions me de leurs recherches. Ils auront le droit de se démocratiques. Nos chercheurs, une fois nommés nommer des membres affiliés qui élargiront l'as- à l'Institut de recherche sur la culture, vont faire siette de la pensée en même temps que l'exécu- leur travail, vont faire leur métier dans le respect tion des travaux. Ils auront le droit de faire leurs de leur discipline, dans le respect des orientations propres règlements. Nous ne les soumettons qu'à qu'ils ont données à leur vie. Il n'y a aucun danger l'obligation de publier ces règlements dans la en l'occurrence, d'autant plus encore une fois que Gazette officielle. Ils seront libres d'accepter des les structures non seulement permettent, mais dotations, des dons qui viennent de fondations ou favorisent également cette liberté qu'ils pourront autres en fixant les conditions. La seule limite que exercer de la meilleure façon possible. nous mettons, c'est que si ces conditions risquent de contrevenir à l'objet même pour lequel l'institut Des Voix: Bravo! est créé, il est convenable qu'il y ait un tiers parti, l'Etat en l'occurrence, qui voie à ce que ces condi- La Vice-Présidente: Vous allez devoir conclu- tions respectent les fins pour lesquelles l'institut re, M. le ministre. est créé. Cet institut aura également le droit de convo- M. Laurin: II faut que cet institut ne se quer des colloques, de faire des recherches docu- contente pas de soutenir et d'encourager les mentaires, bibliographiques. En somme, il aura recherches, mais de faire, encore une fois, des une entière liberté. Ce à quoi on s'oppose telle- recherches parce que ces recherches sont néces- ment, c'est ce mandat que pourrait lui donner le saires pour une société qui aspire à se connaître gouvernement. Cela est marginal dans toutes les davantage, qui aspire à connaître les perspectives, activités de l'institut puisque l'institut, comme je les prospectives dans lesquelles elle veut et doit viens de le dire, aura le droit d'établir son propre s'engager. Ce n'est pas là un instrument référen- programme, ses colloques, ses publications. Bien daire, c'est simplement un instrument que toute sûr, le gouvernement pourra lui donner un mandat société adulte en mûrissement, en adaptation, en dans la poursuite des objets; par exemple, il y a progression doit se donner pour augmenter la beaucoup de problèmes que nous n'avons pas eu perception de soi, la conscience de soi, pour le temps d'étudier et qui demanderaient une étude augmenter son savoir, ses connaissances et sur- plus approfondie, comme le mode d'accès des tout pour les utiliser dans le sens de l'humanisme diverses classes sociales à la culture, la crise de la que je décrivais tout à l'heure, c'est-à-dire la famille, le conflit des générations, les habitudes libération des forces créatrices incluses dans de lecture des Québécois, ce qu'on lit, pourquoi chacun des individus, dans chaque groupe qui on ne va pas au théâtre et ainsi de suite. Il importe compose une collectivité afin qu'à notre façon que ces études soient faites. Elles sont faites dans nous rendions témoignage non seulement à la d'autres pays. culture québécoise, non seulement à l'homme Mais si le gouvernement donne un mandat à québécois, mais également à l'homme universel. l'institut en ce sens, il devra déposer ce mandat à l'Assemblée nationale qui est le lieu public par Une Voix: Bravo Camille! excellence. Tous les députés pourront poser des questions, contester la légitimité du mandat qui a La Vice-Présidente: Cette motion de M. le été donné au gouvernement. Il me semble qu'il y a ministre d'Etat au développement culturel propo- là quelque chose d'extrêmement démocratique et sant que soit maintenant lu la deuxième fois le de tout à fait conforme aux traditions de liberté projet de loi no 2, Loi constituant l'Institut qué- que nous avons. bécois de recherche sur la culture, sera-t-elle (17 h 30) adoptée? On a dit, Mme la Présidente, qu'on voulait transformer l'institut en instrument de propagan- Des Voix: Adopté. de, en instrument politique, à cause de la mainmi- se prétendue que nous pourrions avoir sur les chercheurs que nous nommerions. Personnelle- M. Gratton: Adopté sur division, Mme la ment, ayant été professeur d'université avant Présidente. d'être député, ayant moi-même fait des recher- ches, je me suis senti insulté dans ma fibre même La Vice-Présidente: Adopté. d'entendre des députés de l'Opposition lancer cette accusation aux chercheurs éventuels qui M. Vaillancourt (Orford): Mme la Présidente, feront partie du conseil d'administration, aux adopté sur division. membres affiliés. C'est là bien mal connaître la liberté de pensée de nos chercheurs de croire que, La Vice-Présidente: Sur division. parce qu'ils sont nommés à un conseil d'admi- nistration par le gouvernement, ils vont perdre Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce toute objectivité, ils vont perdre le respect qu'ils projet de loi. 1072

La Vice-Présidente: Messieurs, à l'ordre, s'il des raisons qui ont motivé la proposition de cer- vous plaît! tains amendements à la Loi des associations M. le leader parlementaire adjoint du gouver- coopératives. Je suis certaine, madame, que le nement. débat dans cette Chambre sera très court puisqu'il s'agit, d'une part, de propositions qui portent bien Renvoi à la commission des affaires culturelles davantage sur la forme que sur le fond et que, d'autre part, ces propositions constituent une M. Bertrand: Mme la Présidente, je fais main- réponse positive aux demandes mêmes du mouve- tenant motion pour que ce projet de loi no 2 soit ment coopératif. déféré à la commission parlementaire permanente Tous ici savent que l'histoire du Québec et sa des affaires culturelles. tradition coopérative, si courtes soient-elles, nous ont largement démontré que la formule coopérati- La Vice-Présidente: Cette motion est-elle ve peut jouer et joue un rôle de premier plan dans adoptée? une foule de secteurs de la vie économique qué- bécoise. La coopération est devenue en quelque Des Voix: Adopté. sorte, madame, une réponse collective que don- nent quelque 3 millions de citoyens québécois à La Vice-Présidente: Adopté. leurs besoins individuels. Envisagée dans un tel cadre, la coopérative a un caractère social et Projet de loi no 19 éducationnel qui lui est propre et qui ne peut que bénéficier à la collectivité. Deuxième lecture Cependant, les besoins du citoyen sont multi- ples et divers; ils ne sont pas statiques. L'évolution M. Bertrand: Mme la Présidente, avant d'ap- de la société dans laquelle nous vivons en fait peler l'article 11), je voudrais simplement souli- naître de nouveaux ou, encore, a rendu désuètes gner qu'après entente avec l'Opposition officiel- les réponses adéquates qu'on y avait apportées le — je n'ai pas communiqué avec un représentant dans le passé. Au cours des dernières années, les de l'Union Nationale, mais je pense qu'il n'y aurait besoins des coopérateurs québécois ont évolué au sans doute pas objection — au sujet de l'étude du point que les moyens qu'ils s'étaient donnés pour projet de loi no 19 que nous entreprenons, présen- les satisfaire doivent être adaptés aux réalités de té par le ministre des Consommateurs, Coopéra- 1979. tives et Institutions financières, si cela devait C'est dans cette perspective que certaines dépasser l'heure fixée par le règlement, à savoir 18 coopératives ou fédérations de coopératives ont heures, il pourrait y avoir consentement pour que fait parvenir au ministre des Consommateurs des nous poursuivions et que nous terminions. Je demandes précises de modifications à la Loi des crois qu'il n'y aurait pas plus d'un discours par associations coopératives. Des consultations ont parti représenté à l'Assemblée nationale, de telle été menées auprès de la Coopérative fédérée de sorte que vers 18 h 5 ou 18 h 10 on pourrait avoir Québec, de la Fédération des magasins Coop et terminé l'étude de ce projet de loi en deuxième du Conseil de la coopération du Québec sur les lecture. propositions de modifications du ministère. Tous Alors, j'appelle l'article 11), en espérant que se sont déclarés satisfaits de ces propositions qui, ce consentement puisse exister. somme toute, n'apportent aucune modification im- portante de fond mais plutôt des amendements M. Goulet: J'ai une petite mise au point... d'ordre technique. Ainsi, dans le secteur de la consommation La Vice-Présidente: M. le député de Belle- plus particulièrement, nous avons vu les coopéra- chasse. teurs occuper de plus en plus de place en milieu urbain. En milieu rural, nous avons été témoins de M. Goulet: ... sur la consultation. Quant à l'évolution des services offerts par les coopérati- notre parti, il y aura deux intervenants, mais à ves à leurs membres, mutation qui s'est traduite l'intérieur des 20 minutes; chacun prendra de huit par une régionalisation rendue nécessaire au nom à dix minutes. Cela va? de l'efficacité et de la réduction des coûts, le tout au bénéfice des sociétaires. La Vice-Présidente: A l'article 11) du feuille- Parallèlement, Mme la Présidente, ces coopé- ton d'aujourd'hui, il s'agit du projet de loi proposé ratives, au départ exclusivement vouées au service par Mme le ministre des Consommateurs, Coopé- de la classe agricole, ont été appelées à répondre ratives et Institutions financières. Elle propose la à d'autres besoins de leurs membres, particulière- deuxième lecture de ce projet de loi, Loi modifiant ment dans le domaine de la consommation. La la Loi des associations coopératives. Il s'agit en présence de ces deux courants qui, sans être con- l'occurrence du projet de loi no 19. tradictoires, sont à tout le moins divergents, a eu Mme le ministre. comme résultat de muter, à toutes fins utiles, cer- taines coopératives agricoles en coopératives de Mme Lise Payette consommation. Plusieurs parmi celles-ci, dési- reuses de permettre à leurs concitoyens qui ne Mme Payette: Mme la Présidente, j'entame sont pas des producteurs agricoles de bénéficier cette deuxième lecture avec un très bref exposé de leurs services, nous ont demandé d'assouplir 1073

les exigences de la loi de manière à leur permettre d'une association coopérative membre de la Fédé- de faire passer leur coopérative de l'autorité de la ration des magasins Coop, le paiement de ristour- Loi des sociétés coopératives agricoles à celle de ne ne puisse se faire que sous forme de parts la Loi des associations coopératives. sociales ou privilégiées. Les coûts impliqués par la Toujours désireuses de répondre aussi pleine- tenue de registre de détenteurs de plus en plus ment que possible aux besoins de leurs membres, nombreux de parts privilégiées et par l'adminis- les coopératives ont été appelées à leur offrir un tration de ce capital relativement peu élevé ont éventail de plus en plus large de produits ou de rendu cette exigence démodée, c'est le moins services. Cette diversification a entraîné, Mme la qu'on puisse dire, et ne constituent plus un avan- Présidente, un certain risque de déséquilibre dans tage pour la coopérative, mais deviennent plutôt la règle d'équité qui préside la distribution des un fardeau onéreux pour elles. Sur ce point, Mme trop-perçus de la coopérative à ses membres. En la Présidente, comme sur tous les autres mention- effet, il est bien connu que les modalités de l'appli- nés précédemment, nous avons cru bon d'acquies- cation des principes de mise en marché, de même cer aux demandes des coopératives visées après que les impératifs de gestion des achats et des avoir obtenu un avis favorable de la part des ventes dans le secteur de la consommation ali- diverses instances du mouvement coopératif, tant mentaire ne sont pas identiques à ceux que l'on au niveau des fédérations concernées que du retrouve dans le secteur de la quincaillerie, par Conseil de la coopération du Québec. exemple. Enfin, nous comptons actuellement au minis- Dans le but de rétablir l'équité dans la distri- tère plusieurs dossiers de coopératives dont les bution des trop-perçus, des coopératives nous ont fondateurs n'ont pas, pour toutes sortes de rai- demandé qu'il leur soit permis de fixer le taux de sons dont sans doute la principale est la perte ristourne selon la nature des produits ou des d'intérêt dans le projet, tenu d'assemblée d'orga- services qui ont fait l'objet des transactions et non nisation dans le délai imparti par la loi. Cette pas seulement selon la quantité, la qualité ou la situation entraîne une lourdeur administrative inu- valeur des marchandises. Ainsi, une association tile et a aussi pour effet de bloquer l'utilisation du coopérative vendant à la fois de la quincaillerie et même nom corporatif par un nouveau groupement des produits de consommation alimentaires pour- de personnes désirant se constituer en association rait fixer des taux de ristourne différents pour coopérative. La loi permettra donc dorénavant au l'une ou l'autre de ces catégories de produits. Le ministre de décréter, suivant la procédure établie, développement des coopératives de consomma- la dissolution d'une association coopérative lors- tion, particulièrement dans le milieu urbain, exige que celle-ci n'aura pas tenu son assemblée d'orga- aussi des moyens de financement considérables, nisation dans l'année qui suit la publication de la plupart du temps hors de portée de ses membres, l'avis de sa formation dans la Gazette officielle du et une compétence administrative de plus en plus Québec. En somme, Mme la Présidente, vous grande. reconnaîtrez qu'il s'agit de rajeunir une loi que (17 h 40) nous jugeons encore adéquate. Il s'agit de la Désormais, les caisses d'épargne et de crédit mettre à l'heure de 1979 en réduisant au maximum ou des fédérations de coopératives pourront ap- une lourdeur de paperasserie et de bureaucratie porter une contribution positive à ce développe- inutile. ment non seulement au plan financier, mais aussi L'Opposition, Mme la Présidente, ne pourra par la pratique de l'intercoopération d'ordre admi- refuser aux coopérateurs et aux coopératrices du nistratif, car la loi permettra leur admission au sein Québec des allégements qui reconnaîtront une du conseil d'administration de cette coopérative flexibilité plus grande aux opérations des associa- de consommation. Nous sommes assurés, Mme la tions coopératives. Ces amendements fixeront de Présidente, qu'il s'agit d'une mesure qui non nouveaux critères pour établir le taux de ristourne seulement permettra à un nombre encore plus et permettront également à de nouveaux groupes considérable de coopérateurs de bénéficier des de coopérateurs d'utiliser des noms de coopéra- avantages d'une coopérative de consommation, tives inopérantes. Ils augmenteront l'attrait des particulièrement du genre Cooprix, mais aussi per- coopératives de consommation en modifiant leur mettra à ces dernières de s'assurer du support forme de ristourne et leur mode de représentation administratif nécessaire à leur développement. Les au sein de leur conseil d'administration et trans- associations coopératives de consommation, plus formeront certaines sociétés coopératives agricoles spécialement celles qui sont implantées dans les en associations coopératives. milieux urbains comme les Cooprix, doivent faire Je termine là-dessus, Mme la Présidente, en face à une concurrence qui est de plus en plus réitérant le fait que le Conseil de la coopération du vive dans le domaine de la distribution des pro- Québec, la Fédération des magasins Coop et la duits de consommation alimentaire. Cette con- Fédérée que touchent particulièrement ces amen- currence les a amenées à réduire leur marge de dements ont été consultés et appuient le ministre trop-perçus nets au strict minimum entraînant des Consommateurs dans la présentation de ces ainsi une réduction semblable des taux de ris- amendements. tourne. De plus, le nombre de membres regroupés M. Saint-Germain: Mme la Présidente. dans un même magasin Coop, et je m'en réjouis, a connu un accroissement considérable. Or, la loi La Vice-Présidente: M. le député de Jacques- dans sa teneur actuelle exige que, dans le cas Cartier. 1074

M. Noël Saint-Germain intervention même ou sur ce que vous disiez, c'est-à-dire que ce n'était pas une intervention M. Saint-Germain: II est normal qu'avec l'évo- pour vous empêcher de parler. Je ne l'ai pas lution de notre société, qu'avec l'expérience du comprise comme cela, M. le député. J'ai bien temps et qu'avec le développement du mouvement plutôt compris que c'était un appel à la pertinence coopératif nous ayons, de temps à autre, l'obliga- du débat, ce que nous permet le règlement, M. le tion de modifier l'une ou l'autre de l'ensemble des député de Jacques-Cartier. lois qui régissent le mouvement coopératif au Québec. Là, comme bien souvent, il semble que le M. Saint-Germain: Je suis exactement dans le gouvernement évolue plus lentement que, du contexte du débat, car je voulais faire simplement moins, certains secteurs du mouvement coopéra- un rapprochement entre la loi 46 que nous avons tif, et que le gouvernement accuse déjà à ce point votée l'année dernière et cette loi que nous de vue des retards marqués. étudions actuellement. L'année dernière, par la loi Ceux qui ont pris connaissance du reportage 46, nous avons modifié la Loi des caisses d'épar- des journaux en ce qui concerne l'assemblée gne et de crédit. Nous l'avons modifié partielle- annuelle des caisses d'épargne et de crédit, par ment par certains articles. exemple, ont pu constater, par la déclaration de Comme vous le savez, la Loi des caisses M. Rouleau, président de la Fédération des caisses d'épargne et de crédit est complexe. Le mouve- d'épargne et de crédit, que le gouvernement ment coopératif veut une révision complète, mais marquait, à ce point de vue, un retard considé- on a été obligé, l'année dernière, d'aller au plus rable. Si je lis le rapport des journaux sur la pressé; par la loi 46, on a simplement modifié déclaration de M. Rouleau, on lui fait dire que quelques articles concernant les réserves. Cette depuis 1973, plus précisément, cette question est année, de nouveau, nous modifions la Loi des revenue souvent à l'ordre du jour du comité associations coopératives simplement dans cer- exécutif et à celui du conseil d'administration. J'ai tains articles. Je veux vous faire comprendre qu'il fait part, disait M. Rouleau, l'an dernier, à cette y a entre ces deux lois une similitude de même assemblée générale, des multiples démarches ef- qu'une similitude dans la procédure qu'a prise fectuées auprès du ministère des Consommateurs, Mme le ministre pour les faire étudier au niveau de Coopératives et Institutions financières sur cette cette Assemblée. Je crois être tout à fait dans mon question. Les caisses populaires et les unions droit. régionales elles-mêmes ont eu également l'occa- Comme je vous le disais, ce fut la déclaration sion d'exprimer leur point de vue à ce propos. de M. Rouleau lors de cette assemblée générale Nous espérons que la refonte globale de cette loi des caisses d'épargne et de crédit. A cette même est l'objectif véritable que nous avons toujours assemblée, d'après du mercredi 21 mars, poursuivi. l'assemblée générale a voté à l'unanimité une ré- solution demandant des amendements à l'article Mme Payette: Mme la Présidente, question de 86 de la loi 46, et même à l'article 85, pour remé- règlement. dier d'urgence à certains problèmes vécus.

La Vice-Présidente: J'ai une question de M. Bertrand: Mme la Présidente... règlement, un moment. M. Saint-Germain: Vous allez voir comme Mme Payette: Je ne voudrais pas incommoder c'est similaire à la façon de procéder de Mme le le député de Jacques-Cartier, mais s'il parle pour ministre, Mme la Présidente. parler, cela ne sert à rien. Il parle actuellement des déclarations de M. Rouleau au sujet de la réforme M. Bertrand: ... question de règlement. de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Nous sommes actuellement en train d'étudier des amen- La Vice-Présidente: M. le député, j'ai quand dements à la Loi des associations et coopératives. même une question de règlement. Vous me per- On ne parle absolument pas de la même chose. Si mettrez d'entendre cette question de règlement. c'est juste pour faire un discours, ce n'est vrai- M. le leader adjoint du gouvernement. ment pas nécessaire. (17 h 50) M. Bertrand: C'est la première et la dernière La Vice-Présidente: Après cet appel à la perti- intervention que je ferai là-dessus, Mme la Prési- nence du débat, M. le député de Jacques-Cartier, dente, et je l'adresse à la présidente elle-même. Je je vous retourne la parole. vous demande de rendre une directive à cet effet. Le député peut-il dans les circonstances actuelles, M. Saint-Germain: Sur cette question de rè- étant donné que l'objet même de ce débat est glement, je dois vous faire remarquer que je n'ai d'étudier le projet de loi no 19 modifiant la Loi des pas interrompu madame pendant sa déclaration. associations coopératives, parler avec autant d'in- Je suis très libre d'aborder la discussion de cette sistance sur le fond d'un autre projet de loi qui a loi en deuxième lecture... déjà été voté par l'Assemblée nationale et dont la nature et le contenu diffèrent totalement du pré- La Vice-Présidente: D'accord, M. le député, il sent projet de loi à l'étude? C'est à vous, Mme la ne s'agissait pas d'une intervention quant à votre Présidente, que je demande cette directive. 1075

M. Saint-Germain: Question de règlement, intéressant et cela pourrait, vu qu'on parle souvent Mme la Présidente. d'éducation avec ce gouvernement, être un excel- lent moyen d'éduquer les citoyens de la province La Vice-Présidente: Sur la question de règle- de Québec vis-à-vis du mouvement coopératif. Ce ment, M. le député de Jacques-Cartier. serait un excellent moyen de faire comprendre aux différents coopérateurs des lois qui sont à la base M. Saint-Germain: Je ne veux pas discuter de leur coopérative, les bienfaits du mouvement nécessairement du fond, mais je veux surtout coopératif et leurs obligations. Ce serait un bon discuter de la forme et vous faire comprendre que moyen de leur faire comprendre les détails des ces deux lois ont été présentées à l'Assemblée lois qui les régissent et peut-être, très souvent, de pour étude avec la même procédure. Les difficul- leur faire apprécier aussi la qualité de leurs repré- tés que nous avons rencontrées lors de l'applica- sentants. tion de la loi 46 pourront se retrouver dans le cas de cette loi à cause de la même procédure qu'on a Je demanderais au gouvernement de bien adoptée. vouloir déférer ce projet de loi, après la deuxième lecture, à la commission élue des consommateurs, La Vice-Présidente: Je vous rappellerai sim- coopératives et institutions financières. Là, nous plement ceci, M. le député de Jacques-Cartier. pourrons réellement aller au fond des choses. Ce Vous parlez vous-même de la forme. Quand nous gouvernement qui a aimé si longtemps se dire discutons d'une motion de deuxième lecture, ce transparent aurait là une occasion merveilleuse de débat doit être restreint à l'à-propos, à la portée, à légiférer en toute transparence et de ne pas cana- la valeur intrinsèque d'un projet de loi, aux princi- liser les renseignements transmis par ces différen- pes fondamentaux de ce projet de loi et à toute tes coopératives simplement au niveau du ministè- autre méthode d'atteindre les fins du projet de loi. re, mais de les communiquer à tous les membres Vous avez à parler sur le principe du projet de de l'Assemblée nationale et, par la suite, à toute la loi, M. le député de Jacques-Cartier. population du Québec. C'est ce que je reproche au gouvernement dans sa façon de légiférer. M. Saint-Germain: Comme l'année dernière, Comme vous le savez, il y a dans les modifi- Mme le ministre nous laisse entrevoir qu'il y a cations apportées par ce projet de loi différents consensus parmi les coopérateurs relativement chapitres de la Loi des associations coopératives aux modifications que l'on veut apporter aujour- qui sont modifiés. Bien souvent, il n'y a pas néces- d'hui à la Loi des associations coopératives. On sairement relation entre une modification et une avait eu, l'année dernière, d'après les déclarations autre. Il est difficile dans ces conditions en de madame, le même consensus. Malgré ces affir- deuxième lecture de parler de principe. Le mo- mations, la loi 46 a été dénoncée par le président ment important sera surtout celui de l'étude du de la Fédération des caisses populaires Desjardins projet de loi article par article et c'est à cette occa- et, par un vote unanime, on a demandé à la fédé- sion qu'on devrait entendre les représentants du ration de voir à ce que la loi 46 soit modifiée de mouvement coopératif. J'espère bien que Mme le nouveau. Je me demande — c'est là la similitude ministre des Consommateurs, Coopératives et Ins- dans la procédure qui a été choisie dans l'étude titutions financières acquiescera à ma demande de ces deux lois — si nécessairement, dans les dans l'intérêt de tous. Merci, Mme la Présidente. mois qui viennent ou l'année qui suivra, on ne sera pas encore obligé, malgré les affirmations du La Vice-Présidente: M. le député de Belle- ministre, de modifier de nouveau cette Loi des as- chasse. sociations coopératives. J'espère, dans l'intérêt des coopérateurs, qu'il n'en sera pas ainsi. M. Bertrand Goulet Je crois que la grande difficulté... si ces lois, dans le contexte général de nos lois annuelles, M. Goulet: Merci, Mme la Présidente. Nous peuvent sembler secondaires — je veux dire que avons étudié en deuxième lecture le principe du ce ne sont pas des lois qui vont faire demain la projet de loi 19, soit la Loi modifiant la Loi des manchette des journaux — il reste que pour le associations coopératives. Ce projet de loi, Mme la mouvement coopératif, les directeurs, les mem- Présidente, nous apporte des amendements de bres de l'administration de ces diverses coopérati- nature plutôt technique et ces amendements vi- ves et pour les coopérateurs, elles demeurent très sent surtout les coopératives de consommateurs. importantes. Alors, pourquoi ne demande-t-on pas Bien sûr, à l'intérieur de ce projet de loi, on à la commission élue de l'Assemblée nationale s'aperçoit que, comparativement à la loi qui nous d'écouter les représentants de ces coopératives? régit actuellement, le mot "nature " a été ajouté, au Eux-mêmes pourraient venir nous dire les raisons lieu de retrouver le qualificatif sur la quantité des qui les motivent à demander une modification de produits et la qualité des produits. Il y a une la loi. certaine explication à donner à ce changement. Je crois qu'on aurait là un excellent moyen C'est un critère nouveau dû à une diversification d'éduquer les députés au point de vue du mouve- des magasins coopératifs et surtout en milieux ment coopératif, parce qu'il ne faut pas se le ca- ruraux. Avec les années, on sait que ceux-ci, par cher, il y a parmi nos collègues des gens qui sont extension, sont devenus dépositaires de quincail- très peu familiers avec le mouvement coopératif. lerie en plus du secteur alimentaire ou agro- Ce serait pour nous tous très éducatif et très alimentaire en général. Or, le taux de ristourne 1076

étant différent d'une qualité de produits à l'autre De plus, dans l'ancienne loi, les membres et le terme "qualité" devenant très ambigu, nous devaient être automatiquement ou obligatoirement savons pourquoi et je pense que c'est l'explication des producteurs agricoles. Avec ces amende- même du mot "nature" que l'on retrouve dans ce ments, toute personne de toute profession — ou projet de loi. vous-même, Mme la Présidente — pourra devenir On y retrouve également, Mme la Présidente, membre d'une coopérative agricole avec comme une modification qui permet au ministre des possibilité de déterminer le ou les nouveaux Consommateurs, Coopératives et Institutions fi- champs d'activité, s'il y a lieu, et de bénéficier nancières de décréter la dissolution d'une associa- d'ententes administratives, financières ou autres, à tion coopérative n'ayant pas tenu son assemblée condition que ces appuis soient de nature coopé- d'organisation dans l'année qui suit la publication rative telles les caisses de crédit, les Coop de de l'avis de sa formation dans la Gazette officielle. services et pas nécessairement une coopérative Ceci est très bien, et cela permettra de dépous- agricole. siérer les tablettes du ministère. Il y a, avec cette loi, environ une vingtaine de Il y a eu, on le sait, un foisonnement d'asso- sociétés coopératives qui se retrouveraient réo- ciations coopératives depuis environ dix ans, rientées; je pense que c'est pour le bien du suscité par l'apparition de programmes comme mouvement coopératif en général. Initiatives locales, ou encore Participation jeunes- Mme la Présidente, je vous avais dit que je se et ainsi de suite. Or, les jeunes étant très serais très bref, compte tenu de la limite de temps enthousiastes au départ, ils se souciaient peu de que nous avons. Personnellement et, encore une continuer à respecter les réglementations du mi- fois, au nom de mon parti, je vous informe que nistère, de telle sorte que le ministère restait avec nous sommes d'accord avec le principe de deuxiè- toute cette paperasse. De 25 à 30 cas annuelle- me lecture de ce projet de loi qui permet de ment, depuis huit ans, si on accumule cela, je légaliser des actions ou des gestes qui se prati- pense que ce sont des cas qui s'accumulaient sur quent depuis longtemps et, également, permet de les tablettes du ministère. Même si, en deuxième moderniser une loi plutôt vieillotte. Merci, Mme la lecture, on ne peut pas faire référence à un article Présidente. comme tel, au moins le principe visé par cet article est très bien. La Vice-Présidente: M. le député de Hunting- (18 heures) don. Ce projet répond également à un souhait maintes fois répété par la Fédération des maga- M. Claude Dubois sins Coop ou Cooprix de pouvoir effectuer des ris- tournes à leurs membres sous toute autre forme M. Dubois: Merci, Mme la Présidente. De que celle prescrite par la loi. même, je désire intervenir très brièvement sur le Lorsque je parle d'autres formes, j'aimerais projet de loi no 19 de Mme le ministre des donner des exemples, soit en liquide, en argent, Consommateurs, Coopératives et Institutions fi- en valeurs marchandes ou en services. Ceci est dû nancières. Cette mesure de nature très technique à la concurrence féroce que font les grandes vise surtout les coopératives de consommateurs. Il chaînes d'alimentation telles que Steinberg, Domi- va de soi que la diversification des magasins nion, Provigo et qui oblige la ou les fédérations à coopératifs en secteurs ruraux nécessitait une puiser dans leur marge de projet pour soutenir le plus grande clarification de certains termes et défi qu'entraînent ces grandes chaînes de maga- définitions. Le ministre peut également, à la suite sins. d'une modification apportée dans cette loi, décré- La comptabilisation administrative s'avère ter la dissolution d'associations coopératives non également plus onéreuse sous la loi qui nous régit actives ou qui ne respecteraient pas certaines actuellement, et c'est un changement qui apporte- réglementations précédemment en vigueur. Egale- ra des améliorations de ce côté. Le but de cette loi ment, ce projet de loi modifie ou permet de est de permettre également la division par groupes modifier la façon et les modalités d'effectuer des soit administratifs, financiers ou logistiques pour ristournes aux membres sociétaires des coopéra- une meilleure efficacité de gestion; encore là, tives. Il est à remarquer, Mme la Présidente, que le personnellement et au nom de mon parti, l'Union présent projet de loi à l'étude soustrait de l'obli- Nationale, j'appuie ce principe. gation, dans le cas d'une coopérative agricole, Cette loi permettra à certaines sociétés de que les membres soient des producteurs agrico- devenir des associations coopératives en remplis- les, mais ceci dans certains cas seulement. sant les conditions naturellement prévues dans ce Mme la Présidente, étant donné que cette loi, projet de loi. Il y a des explications à cela; c'est dû une fois sanctionnée, aura pour effet de modifier à la régionalisation des services. On sait que les la Loi des associations coopératives, et qu'elle petites coopératives ou petites meuneries et beur- touche par le fait même la Loi des sociétés reries possédaient, il y a 20 ans, un magasin de coopératives agricoles, je me permets ici d'attirer produits de consommation et, aujourd'hui, étant l'attention du ministre sur le déchirement persis- donné que les beurreries ont dû déménager dans tant et toujours croissant entre le monde coopéra- une municipalité voisine et qu'on a régionalisé ces tif, principalement dans le domaine laitier, d'une services, on se retrouve avec les seuls magasins part, et, d'autre part, celui du syndicalisme agrico- soit de quincaillerie ou de produits alimentaires. le. Je demande donc, Mme la Présidente, que 1077

Mme le ministre des Consommateurs, Coopérati- nous devons parler actuellement du projet de loi ves et Institutions financières s'intéresse au dos- no 19. sier extrêmement important qu'est celui des M. le député de Huntingdon. coopératives laitières au Québec. Par l'adoption du projet de loi no 116, le M. Dubois: Si on avait beaucoup de temps, ministre de l'Agriculture a légiféré d'une façon très Mme la Présidente, je pourrais vous prouver que je cavalière sur un problème de fond sans même suis très pertinent dans le débat. De toute façon, entendre le monde coopératif ou tout autre inté- j'étais sur le point de terminer et j'invitais Mme le ressé en commission parlementaire. Mme le minis- ministre, qui est restée trop longtemps absente du tre doit sans doute être au courant que le ministre dossier à exercer une influence positive auprès du de l'Agriculture a rompu un équilibre extrêmement ministre de l'Agriculture afin que le monde agrico- fragile entre les deux grands géants du monde le vive dans une atmosphère plus propice à son agricole, soit le coopératisme et le syndicalisme. développement. Cette situation explosive, Mme la Présidente, joue Donc, Mme la Présidente, en principe, nous vraiment à l'encontre des intérêts véritables des appuierons le projet de loi no 19 du ministre des producteurs agricoles. Consommateurs, Coopératives et Institutions fi- Mme le ministre doit aussi être au courant que nancières. Merci. j'ai présenté, il y a quelques semaines, le projet de loi no 193, lequel doit être perçu essentiellement Mme Payette: Mme la Présidente... comme une mesure de rapprochement afin de rétablir cet équilibre nerveux rompu, à toutes fins La Vice-Présidente: Mme le ministre, votre utiles, par le texte de l'actuelle toi no 116 du réplique. ministre de l'Agriculture. En terminant, j'invite donc Mme le ministre à Mme Lise Payette s'intéresser à ce dossier. A titre de titulaire de la coopération au Québec, je crois qu'elle est restée Mme Payette: ... juste quelques minutes et je absente trop longtemps de ce dossier et sûre- ne peux même pas appeler cela une réplique. Je ment... ne répondrai pas, Mme la Présidente, au député de Jacques-Cartier; je le vois sourire, il sait parfai- La Vice-Présidente: M. le député de Hunt- tement pourquoi. Quand il ne sait pas quoi dire, il ingdon, j'ai un appel à la pertinence actuellement. en trouve toujours; j'en sais quelque chose depuis deux ans et demi. Je répondrai, cependant, aux membres de l'Union Nationale qui se sont expri- M. Dubois: Je crois que c'est très pertinent, més sur le principe de ce projet de loi, en leur parce qu'on touche le coopératisme agricole au disant que quand on veut on comprend, parce Québec. qu'ils ont bien compris pourquoi nous agissons par ces amendements. La Vice-Présidente: ... que nous discutons (18 h 10) actuellement du projet de loi no 19? C'est vrai que des lois, dans le domaine coopératif, commencent à accuser un peu d'âge. Il est probable qu'au cours des semaine qui vien- M. Goulet: Mme la Présidente, la question de nent ou des mois qui viennent, dépendant des cir- règlement que vous soulevez comme... constances, il y en aura quelques-unes à rafraîchir en cours de route et on me verra probablement La Vice-Présidente: Que je n'ai pas soulevée, revenir à plusieurs reprises avec des amende- que j'ai entendue. ments concernant les différents secteurs. Je voudrais particulièrement répondre au dé- M. Goulet: D'accord. puté de Huntingdon, cependant, quant à son al- lusion que quand des décisions sont prises au La Vice-Présidente: Sur la question de règle- Conseil des ministres, le ministre des Coopéra- ment, M. le député de Bellechasse. Un moment, tives est d'accord avec le ministre de l'Agriculture. s'il vous plaît. Je voudrais aussi lui dire que je ne suis pas absente de ce débat. J'ai eu l'occasion de ren- M. Goulet: Sur la question de règlement qui a contrer, la semaine dernière, le conseil d'adminis- été soulevée par vous ou qui a été soulevée par tration de la Coopérative de Granby qui me faisait quelqu'un non officiellement dans cette Chambre, part de ses inquiétudes, que je prends en consi- je ne vois pas en quoi le député de Huntingdon ne dération. J'aurai l'occasion de rediscuter avec eux respecte pas les articles 94.1 et 120 comparati- d'ici quelques semaines. vement au député de Jacques-Cartier tout à l'heu- re qui a été pendant 20 minutes complètement en La Vice-Présidente: Cette motion de Mme le dehors du sujet. ministre des Consommateurs, Coopératives et Ins- titutions financières proposant que soit mainte- La Vice-Présidente: M. le député, ce n'est pas nant lu la deuxième fois le projet de loi no 19, Loi parce qu'on n'est pas pertinent, mais simplement modifiant la Loi des associations coopératives, pour faire penser au député de Huntingdon que sera-t-elle adoptée? 1078

M. Saint-Germain: Adopté. jusqu'à la semaine prochaine, soit mardi prochain, 14 heures, je voudrais simplement rappeler à nos La Vice-Présidente: Adopté. collègues que bien sûr, à cause de cette motion, nous ne siégerons pas ce soir, mais deux com- Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce missions parlementaires vont poursuivre leurs tra- projet de loi. vaux de 20 heures à 22 heures, soit celle des affaires culturelles, pour étudier les crédits de ce La Vice-Présidente: M. le leader parlementai- ministère au salon rouge, et celle des engage- re adjoint du gouvernement. ments financiers à la salle 91-A. On me dit que la commission des engagements financiers, après un Renvoi à la commission des consommateurs beau travail, bien présidée par notre collègue de Drummond, a terminé ses travaux. C'est une M. Bertrand: Mme la Présidente, je fais main- bonne nouvelle. tenant motion pour que ce projet de loi no 19 soit Demain matin, je rappelle qu'il n'y a pas de déféré à la commission parlementaire permanente question avec débat au salon bleu, c'est remis à la des consommateurs, coopératives et institutions semaine prochaine. Si, par hasard, la commission financières. des affaires culturelles n'avait pas terminé l'étude de ses crédits ce soir, elle poursuivra ses travaux La Vice-Présidente: Cette motion est-elle demain, entre 10 heures et 12 h 30 au salon rouge. adoptée? Sur ce, Mme la Présidente, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux jusqu'à la semai- Des Voix: Adopté. ne prochaine, mardi, 14 heures.

La Vice-Présidente: Adopté. La Vice-Présidente: Cette Assemblée ajourne ses travaux à mardi, 14 heures. M. Bertrand: Mme la Présidente, avant de faire motion pour que nous ajournions nos travaux Fin de la séance à 18 h 13