Infrastructures De Transport : Des Choix
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251 FNAUT infos janvier-fév. 2017 transport - consommation - environnement édition nationale Bulletin de la Fédé ration Nationale des Associations d’Usagers des Transports Infrastructures de transport : des choix Une ambition légitime rationnels sont indispensables Le Commissariat général à l‘environ- nement et au développement durable (CGEDD) a publié récemment des projec- tions de la demande de transport de voya- geurs et de marchandises aux horizons 2030 et 2050. Ces projections confirment la pertinence des propositions ambitieuses de la FNAUT en matière de transport public urbain et ferroviaire. S’agissant de la longue distance (plus de 100 km), le CGEDD prévoit que le trafic voyageurs va croître de 1,2% par an entre 2012 et 2030 puis de 1,1% par an entre 2030 et 2050 en raison de l’augmentation géné- rale de la population et de la progression des salaires. Quai de Seine à Paris Cette hausse du trafic devrait profiter au train qui verrait sa part modale passer de 20,6% en 2012 à 22,4% en 2030 et 25,7% en Les choix en matière de grandes infrastructures de transport sont décisifs 2050, avec une forte croissance du nombre car ils orientent durablement les comportements des usagers, voyageurs de voyageurs-kilomètres (66 milliards en ou chargeurs. Mais ils sont trop souvent faits de manière irrationnelle. Bien 2012 ; 126 en 2050, ou seulement 112 si on conçues, les nouvelles infrastructures peuvent induire des transferts mo- prend en compte le développement du daux bénéfiques à la collectivité ; mal conçues, elles peuvent au contraire covoiturage et de l’offre d’autocars Macron). déboucher sur des atteintes inutiles à l’environnement et sur des gaspil- Selon le CGEDD, le train profiterait en particu- lages financiers regrettables. Nous discutons ici quelques exemples de lier de la mise en service des nouvelles LGV. Sur la courte distance, le CGEDD prévoit projets : les rocades urbaines, la troisième ligne de métro de Toulouse, l’aé- une reprise de la demande de mobilité roport de Notre-Dame-des-Landes, le Lyon-Turin, les gares TGV, le canal après des années de crise financière et éco- Seine-Nord. La FNAUT se prononce sur ces projets au cas par cas, sans a nomique : le trafic des personnes augmen- priori technique ou idéologique. terait de 29% entre 2012 et 2050, avec une hausse de 49% pour les transports collectifs On reproche parfois à la FNAUT de sur l’environnement local. Mais souvent, et de 27% pour les voitures particulières. trop s’intéresser aux grands projets d’in- la vision des opposants est trop limitée : Si l’on prend en compte les mesures sup- frastructures de transport. Ce reproche seul le coût d’investissement est pris en plémentaires envisagées pour optimiser n’est pas justifié. compte, seul l’impact environnemental l’occupation de l’espace urbain et donc ré- D’une part, on vérifie que la mise en local est dénoncé par les riverains, les duire la demande de transport, et si on dé- service de grandes infrastructures, quel reports de trafics sont ignorés. On le veloppe la part modale du vélo, le nombre que soit le mode de transport concerné, vérifie aujourd’hui chez les opposants à de véhicules électriques et le covoiturage, la provoque des chocs psychologiques et la modernisation de la ligne Serqueux- demande de transport collectif n’augmen- influence profondément et durablement Gisors, nécessaire à un bon écoulement terait plus que de 16% d’ici 2050. les comportements des usagers : il est du fret issu du Havre. Il faut donc manifestement sortir du bri- donc bien naturel que la FNAUT se pré- D’autres contestations, telles que celle colage actuel dont la seule ambition est de occupe des grands projets. de la 3ème ligne de métro de Toulouse ne fâcher personne, ni les automobilistes, D’autre part, la FNAUT fait preuve (page 3), sont basées au contraire sur des ni les transporteurs routiers, ni les bonnets d’esprit critique, elle se pose des ques- arguments très rationnels et prennent en rouges, ni le patron d’Air France, ni les syn- tions face à chaque projet et déter- compte l’intérêt général. dicats cheminots, ni... Faute de quoi le trafic mine sa position au cas par cas, sans Ajoutons que les consultations pu- routier augmentera de 15% d’ici 2030 et dogmatisme : elle a ainsi approuvé la bliques (Notre-Dame-des-Landes, la entre 20 et 34% à l’horizon 2050 selon les LGV Bordeaux-Toulouse et condamné gare TGV de Vandières) sont souvent hypothèses faites sur le niveau de la reprise la LGV Poitiers-Limoges (que le chef lancées pour des raisons politiciennes et économique, le prix du pétrole et le plus ou de l’Etat soutient avec acharnement). mal organisées, si bien que leur résultat moins grand volontarisme de la politique Quand apparaît un grand projet, il est est peu significatif, et que, les projets des transports. généralement contesté à la fois pour son une fois concrétisés, ils font rarement Bruno Gazeau coût « pharaonique » et pour son impact l’objet d’une évaluation critique... FNAUT infos n°251 - janvier-février 2017 x 1 Dossier Rocades urbaines : l’exemple de Grenoble Notre-Dame-des-Landes La FNAUT critique souvent la ministre Dans les années 1970, tous les élus gre- ment de comportements (c’est le paradoxe de l’Ecologie Ségolène Royal, son obses- noblois, de droite et de gauche, ont ré- de Downs-Thomson). sion du véhicule électrique, son désinté- clamé une rocade sud faisant la jonction Ainsi l’absence de la rocade nord n’a rêt pour le transport collectif, son aban- entre les autoroutes menant à Chambéry provoqué aucun drame local et n’a pas don catastrophique de l’écotaxe et son au nord-est (A43) et à Lyon au nord-ouest empêché l’implantation de la ligne C de refus des contraintes supposées punitives (A48), car le transit (interne à l’aggloméra- tramway sur les grands boulevards sous la en matière de protection de la planète. tion et à longue distance) s’effectuait alors municipalité Destot (PS), la capacité rou- Mais son opposition au projet d’aéroport par les grands boulevards qui frôlaient le tière passant de 2 x 3 voies à 2 x 2 voies : NDDL, pourtant soutenu par Manuel Valls centre de Grenoble. Ces boulevards est- le chaos annoncé par les élus de droite n’a qui voulait expulser les zadistes, est ap- ouest formaient un canyon urbain pollué et pas eu lieu. précié (la position de François Hollande, à invivable, une vraie L’expérience la fois contre le projet et pour son main- autoroute urbaine. Paris / Lyon / Valence Chambéry / Annecy montre donc qu’on tien, est incompréhensible). La rocade a été ou- A 48 peut se passer de En mars dernier, un rapport d’experts verte intégralement rocades telles que commandé par la ministre jugeait le pro- Projet Rocade Nord A 41 en 1985, mais : le GCO de Stras- jet NDDL actuel à deux pistes « surdimen- - à l’époque, on bourg. Ce choix sionné » ; et il reconnaissait « la faisabilité n’a pas réduit la A 480 1 difficile mais ra- de l’optimisation de l’aéroport existant de capacité des grands 2 tionnel permet de Nantes-Atlantique », donnant raison aux boulevards, et le Grenoble concentrer l’effort opposants. Rocade projet trafic, après y avoir Ouest financier sur les Plus récemment, Jean-Paul Dubreuil diminué d’un bon 4 transports collec- président d’Air Caraïbes, a critiqué à son Rocade Sud tiers par report sur 8 5 tifs, et de rendre tour le projet, confirmant lui aussi les la rocade sud, a vite 7 6 inutiles les nou- arguments techniques déjà mis en avant retrouvé son niveau A 51 veaux investisse- par les opposants. initial, de l’ordre de ments routiers, sur- « Je suis le dossier NDDL depuis vingt 50 000 véhicules/ Marseille / Sisteron / Gap tout si on poursuit ans. Le projet est sorti alors que le TGV jour ; une densification n’existait pas. Il y avait alors une volonté - la rocade sud intelligente de la politique de la Région et de la Chambre (gratuite) a favorisé l’étalement urbain et zone centrale (le quartier Europole, qui de commerce : NDDL était le projet struc- induit un fort trafic pendulaire, au point de jouxte la gare centrale de Grenoble, a été turant qui, par son positionnement, devait se saturer en quelques années ; densifié, de même que le polygone scien- desservir les Pays de la Loire et la Bre- - les abords de la rocade se sont vite tifique, et une densification modérée du tagne. Mais les habitants de Brest ou de urbanisés, et les habitants ont commencé quartier de l’esplanade est en discussion). Lorient ne viendront pas à NDDL, Rennes à protester contre les nuisances routières, Jean Sivardière voudra garder son aéroport, et NDDL sera déplacées et amplifiées ; éloigné des 20 % des passagers actuels du - les élus, PS et droite confondus, ont L’aménagement de l’A480 Sud-Loire. alors réclamé une rocade nord (en tunnel Les données ont changé depuis la sous le rocher de la Bastille), ruineuse et Le plan adopté par les élus est le meil- conception du projet. Techniquement, finalement abandonnée en 2005 suite à leur compromis compatible avec le plan de l’aéroport existant de Nantes n’est pas sa- une enquête d’utilité publique (un péage relance autoroutier imposé par l’Etat : gra- turé. Et des vols intercontinentaux au dé- était nécessaire pour la financer). L’agence tuité maintenue, ni élargissement de l’em- part de Nantes ne sont pas envisagés par d’urbanisme avait démontré que sa mise en prise ni augmentation de capacité pour le les compagnies aériennes : pour ce genre service renforcerait les embouteillages au trafic de transit, passage à 2 x 3 voies mais de vols, il faut s’appuyer sur des hubs (Pa- lieu de les réduire (FNAUT Infos 227).