Hommage Archaimbault1dab2.Pdf
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Boudhas, Nagas et lieux de mémoire en RDP Lao. Essais à la mémoire de Charles Archaimbault, suivis d’un inédit de Charles Archaimbault: Chefferie lao, cosmogonies, structures religieuses et rituels par Charles Archaimbault. Jacques Lemoine, Bernard Formoso To cite this version: Jacques Lemoine, Bernard Formoso. Boudhas, Nagas et lieux de mémoire en RDP Lao. Essais à la mémoire de Charles Archaimbault, suivis d’un inédit de Charles Archaimbault: Chefferie lao, cosmogonies, structures religieuses et rituels par Charles Archaimbault.. Jacques Lemoine et Bernard Formoso. Thaïlande. OI Publishing, 2014. hal-01415647 HAL Id: hal-01415647 https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01415647 Submitted on 13 Dec 2016 HAL is a multi-disciplinary open access L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est archive for the deposit and dissemination of sci- destinée au dépôt et à la diffusion de documents entific research documents, whether they are pub- scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, lished or not. The documents may come from émanant des établissements d’enseignement et de teaching and research institutions in France or recherche français ou étrangers, des laboratoires abroad, or from public or private research centers. publics ou privés. Jacques Lemoine & Bernard Formoso (édit.) Boudhas, Nāgas et Lieux de Mémoire en R. D. P. LAO Essais à la mémoire de Charles Archaimbault, suivis d’un inédit : Chefferie Lao Cosmogonies, Structures Religieuses et Rituel par Charles Archaimbault OI Publishing 2 Introduction Nul mieux que Charles Archaimbault n’a su décrire et analyser les rites et les mythes des Lao et rendre compte de la fabrique religieuse du politique à propos de cette société. Son souci de la précision ethnographique, allié à un travail considérable de traduction et d’interprétation des annales des principautés locales lui ont permis − l’un dans l’autre − de restituer avec une grande minutie les rituels lao en éclairant leurs ressorts cac és par l’interprétation des m t es ouang P’răbang et Vieng Čăn, auquels il ajoute l’ istoire qu’il a, lui-même, établie pour Čămpasăk et S’ieng K ouang. L’originalité de sa démarc e est surtout d’avoir utilisé ces jeux de pouvoir, ancrés dans l’ istoire, comme grille de lecture pour formuler des hypothèses fécondes concernant la structure symbolique des rituels de légitimation politique qui avaient encore cours dans les années 1950 et qu’il a seul étudiés. A l’époque charnière des vestiges du protectorat et des débuts de l’indépendance du Laos, Charles Archaimbault a constitué de 1951 à 1956 un corpus ethnographique et istoriograp ique d’autant plus précieux pour le patrimoine culturel lao qu’il aurait été remisé aux oubliettes autrement. Esprit indépendant, il a conduit sa recherche en marge du courant officiel dominant qui privilégiait les Lao et l’ istoire de ouang P’răbang. Il a non seulement étendu la recherche aux principautés de S’ieng Khouang au Nord, de Vieng Čăn (Vientiane) au Centre et de Čămpasăk (Champassak) au Sud, pour produire un panorama complet des royaumes qui ont fait ce qui est aujourd’ ui la R.D.P. Lao, mais il s’est encore appliqué méthodiquement à relier les croyances lao à un substrat tăi plus général, sur la base des données comparatives disponibles à son époque. Il fut aussi le premier 4 mettre en évidence, partir de l’exemple lao, le rôle essentiel joué par les Môn-Khmers, investis du rôle de premiers habitants du pays dans les rites périodiques de régénération de la vie et de remise en ordre symbolique du monde. Plus fondamentalement, l’œuvre de C arles Arc aimbault tire toute sa valeur d’une mét ode qui a su éclairer l’ istoire par l’et nologie et réciproquement. Dans une brève intervention au colloque « Situation actuelle et avenir de l’ant ropologie en France » datant de 1977, il explique que l’et nologie ne peut se passer pour interpréter les rites « des épisodes fragmentés, non datés ou d’une c ronologie fluctuante » qui forment l’essentiel de l’ istoriograp ie vernaculaire et qui de par leur nature même restent des documents « muets » pour l’ istorien 1 . Cette démarche supposait une érudition encyclopédique, mais aussi une grande prudence dans le traitement des sources. Charles Archaimbault réunissait ces qualités. Il était l’ethnographe méticuleux pour qui le moindre détail était porteur d’une signification qui pouvait enrichir, une fois décryptée, la compréhension du tout. Ce souci du détail, allié à un comparatisme méthodique entre diverses occurrences locales ou régionales du même rituel, lui permettait non seulement la possibilité d’une anal se approfondie des différents niveaux de signification des pratiques qu’il observait, mais aussi d’avancer de solides ypothèses concernant leur origine. Il est parvenu à décrire les rites en incluant les actions et déclarations des divinités concernées à travers leurs médiums tout en révélant que leur existence dans le monde des esprits s’adaptait et se modifiait dans le temps en fonction de la vie humaine de leur « monture » respective. Divinités cosmogoniques ancestrales, génies du lieu ou personnages 1 Ch. Archaimbault 1979 : “Interventions“, in Anthropologie en France. Situation actuelle et avenir, Paris, Eds. du CNRS, p. 139. historiques, comme les rois F’a Ngoùm ou Set at irat, s’animent au fil des rites et manifestent leur existence de génies lorsque les mêmes rites et la trajectoire des médiums sont observés plusieurs années de suite. Mais le plus important reste son analyse globale. Partant de la structure religieuse de ouang P’răbang dégagée par son et nograp ie comme le modèle le plus complet, il aborde successivement ce qu’il reste du modèle initial S’ieng K ouang, Vieng Čăn et Čămpasăk, et, en expliquant les variantes et nograp iques qu’il a recueillies, il établit ce qu’il appelle des « sous- cultures » dont la raison d’être est c erc er dans l’ istoire de ces différents royaumes. Alors que les historiens et leurs émules orientalistes réduisaient leur approc e de l’ istoire l’exégèse des textes produits par leurs homologues lettrés des époques antérieures, Charles Archaimbault renversait la perspective en utilisant l’ istoire comme un moyen de replacer dans son contexte de production et d’énonciation la textualité des rituels. En recoupant systématiquement le fait et le dit, mais aussi les sources orales et écrites, il s’est emplo é à combler le fossé que d’autres creusaient par excès de spécialisation pointilleuse entre « grande tradition » textuelle et « petite tradition » contextuelle. Cette tentative isolée, à contre- courant des replis disciplinaires dominants, explique en partie le peu de reconnaissance académique dont il fut l’objet de son vivant et l’indifférence presque générale qui marqua sa disparition, en 20012. Pourtant, malgré l’entreprise de marginalisation à laquelle Charles Archaimbault dut faire face, son ethnographie rayonne toujours du même éclat et est d’une lecture 2 Indice de cette indifférence, la bibliot èque qu’il avait patiemment constituée au fil de sa carrière et qui comptait nombre d’ouvrages précieux fut alors dispersée aux quatre vents, vendue au poids à des bouquinistes de Bangkok qui écoulèrent les livres par le biais du secteur informel sans connaître leur réelle valeur. 6 incontournable pour tous les chercheurs qui poursuivent des études sur les conceptions religieuses et les systèmes politiques des Tăi bouddhisés. Mais, au-delà de la reconnaissance discrète que portent en elles les références récurrentes à ses ouvrages et articles dans les travaux scientifiques spécialisés, il manquait un réel hommage pour souligner l’originalité et la co érence de la démarc e, ainsi que la fécondité de la méthode de ce grand chercheur. Le prétexte à cet hommage nous a été fourni à titre posthume par Charles Archaimbault lui-même. En 1984 il avait en effet achevé, à la demande de Jacques Lemoine pour les Editions Pandora de Bangkok, un ouvrage dont diverses vicissitudes éditoriales n’ont pu permettre à ce jour la publication. A la fin du présent recueil nous reproduisons in extenso cet inédit intitulé Chefferie Lao, Cosmogonies, Structures Religieuses et Rituel. Charles Archaimbault, fidèle à sa méthode, dont il offre ici un florilège brillant, démêle dans cet essai l’éc eveau complexe de la s mbolique des cultes aux génies tutélaires des différentes principautés lao en contrastant les trames cosmogoniques écrites et orales parfois divergentes. Ce texte, survol de sa thèse encore inédite, intéressera tous les spécialistes des Tăi, tant il offre des éclairages complémentaires par rapport d’autres études antérieurement publiées par l’auteur. Chefferie lao est précédée dans le présent recueil de plusieurs textes d’auteurs qui entendaient lui rendre hommage, tant ils ont puisé dans l’ éritage scientifique qu’il a laissé la motivation et la matière essentielle de leurs propres études.3 Parmi ces auteurs une majorité sont des ethnologues laotiens qui, n’en déplaisent ceux qui prétendaient jadis que les travaux d’Arc aimbault menaçaient l’unité du royaume lao nouvellement indépendant, sont aujourd’ ui les premiers 3 N.D.E.:pour sauvegarder l’unité de ce livre, nous n’avons retenu que ceux qui se réclamaient ou dérivaient directement de son oeuvre. reconnaître son irremplaçable apport à la connaissance de la culture et de l’ istoire de leur pa s. Au premier chapitre, le regretté Khambone Thirapouth enrichit considérablement un dossier que Charles Archaimbault avait commencé à documenter dans son Histoire de Čămpasăk et son livre sur La course des pirogues à Čămpasăk : la saga du Boudha de cristal de Čămpassăk. Grâce à une mission et nograp ique auprès des Kătang, dont il relate avec minutie le déroulement, Khambone Thirapouth a recueilli divers récits auprès de cette population môn- k mère qui lui permettent d’éclairer la relation privilégiée qu’ils entretiennent avec le Bouddha de cristal, découvert en 1724 sur leur territoire et qui fut le palladium du royaume de Čămpassăk jusqu’ ce qu’après la perte de son indépendance, il ne soit réquisitionné par son suzerain siamois en 1811.