PAR MICHEL LAVERDIÈRE avait enregistré les musiques de film et encore été rendues disponibles sur le la musique orchestrale de George avec le marché. J’ai donc voulu les enregistrer afin I l y a déjà près de sept ans, je nourrissais Berlin Music Ensemble. Mieux encore, on de donner une idée plus vaste de l’apport le projet de produire un disque de pouvait visionner en ligne un court docu- artistique de . Il n’est certes musiques composées par George Martin mentaire sur l’enregistrement de ce disque pas devenu le “nouveau Rachmaninov” et j’ai pu, grâce à des amis communs, ob- et prendre connaissance de la qualité comme il l’avait souhaité dans sa jeunesse, tenir plusieurs partitions de ses œuvres. exceptionnelle de l’interprétation de mais il a toutefois accompli quelque chose Malheureusement, le marché du CD était l’ensemble dirigé par Craig Leon. Mais d’aussi important – et peut-être même plus déjà en chute libre et le budget nécessaire pour produire un tel enregistrement d’abord, un peu d’histoire… encore : George Martin a pris part au s’avérait trop élevé. Afin de mieux renta- C’est en 2015 que Craig Leon a été appro- processus qui a permis de repousser les biliser cette aventure, j’avais même reçu ché pour joindre l’équipe qui devait ras- frontières entre la musique pop, la musique l’engagement d’un producteur de film sembler en un volume – à paraître en 2018 de film et la musique classique – frontières québécois intéressé à produire un docu- – l’ensemble des partitions musicales de qui, heureusement, ne font désormais plus mentaire sur cet aspect de la carrière George Martin. C’est ainsi qu’il a pu réali- partie de notre culture musicale. » de George Martin, mais après quelques ser l’ampleur de sa carrière d’orchestrateur Au programme, l’incontournable Pepper- démarches auprès de son fils Giles, nous et de compositeur : « J’avais déjà pu jeter land Suite, tirée du film Yellow Submarine avons appris son retrait officiel de toute un coup d’œil sur quelques-unes des parti- et surtout disponible sur la face B du disque vie active. Nous savions déjà que l’état de tions de George Martin de son vivant, de 1969. George Martin l’avait réenregis- sa santé était précaire et le projet de film aussi, ce fut pour moi un grand honneur trée à quelques reprises, mais ces captations fut abandonné. Puis, le 8 mars 2016, d’avoir été choisi pour ce projet. J’ai été n’étaient jamais aussi convaincantes que la George Martin nous quittait pour un ébloui par l’élégance et l’unité de style qui version officielle. Il aura fallu attendre monde meilleur. imprègnent l’écriture musicale de George l’exécution exceptionnelle du Berlin Music Heureusement, d’autres personnes ont Martin, que ce soit en musique populaire, Ensemble pour entendre enfin une version eu la même idée et c’est avec une joie en jazz, pour le cinéma ou la musique de à la fois personnelle et fidèle à l’esprit de la profonde et sincère que j’appris que le concert. Nous avons convenu, Adam Sharp bande originale. Là où George Martin avait producteur Craig Leon (les , – ami et gérant de longue date de George – choisi, à l’instar de certaines chansons de Blondie, Suicide, The Fall, mais aussi et moi, que c’était l’occasion rêvée de pré- Beatles, d’inclure des bandes jouées à l’en- , , le senter un aperçu sur disque du talent ex- vers, Craig Leon adapte une transcription London Symphony Orchestra, Joshua ceptionnel de ce grand homme de l’univers pour instruments acoustiques pour une Bell, etc.), lui-même compositeur de mu- de l’enregistrement musical. Nous avons interprétation chaleureuse qui aurait sans sique dite classique et contemporaine et même trouvé de nombreuses pièces ca- aucun doute reçu l’approbation de George. grand admirateur de George Martin, chées dans des partitions qui n’avaient pas L’orchestre enchaîne avec la musique ori- ginale du film Live and Let Die présentée hasard par Craig Leon en fouillant parmi mondiale au disque. On y découvre un tout en une suite qui met en valeur le sens les partitions en vue de cet enregistrement. autre aspect de la composition chez George inné de la mélodie et le talent d’orches- Le livret ne nous dit rien à propos de la Martin, une profondeur et une spiritualité trateur de George Martin. pièce suivante, Waltz in D Minor for Flute intérieure qui, au crépuscule de sa vie, sem- Je possédais un enregistrement des and Chamber Orchestra qui, encore une ble illuminer le parcours riche et unique de Three American Sketches interprétés à la fois, nous révèle le grand amour que l’homme qui, en compagnie de John, Paul, guitare par le célèbre John Williams et le George Martin nourrissait pour la musique George et Ringo, a marqué à jamais l’uni- quatuor à cordes Medici, mais il faut classique. D’ailleurs, il en profite à l’occa- vers de la musique populaire. avouer que l’interprétation de ces trois sion pour arranger certaines œuvres de Ce disque est LA référence quant à la mu- pièces arrangées pour violon solo et or- grands compositeurs tel ce Prelude For sique de film et orchestrale composée par chestre est une pure merveille. À l’ori- Strings (Prélude en mi bémol mineur, George Martin. Inévitablement, certaines gine, cette œuvre avait été composée BWV 853) de Jean-Sébastien Bach qui sert œuvres ont cependant été mises de côté ou pour l’harmoniciste Tommy Reilly – c’est de transition pour nous préparer à la peut-être même oubliées : je pense, entre d’ailleurs cette partition que je possède. grande découverte de ce disque : The autres, à Friends and Lovers, composée en On peut entendre ensuite, Judy’s Mission Chorales. En 1985, George Martin l’honneur de John Lennon ou encore, Ada- Theme, une courte pièce composée pour avait ébauché une suite de chorales pour le gietto for Harmonica and String Octet, son épouse dans une transcription tout à réalisateur du film The Mission. Malheu- interprétée par Tommy Reilly et The Aca- fait charmante pour orchestre. reusement, un conflit d’horaires et d’enga- demy of St. Martin-in-the-Fields Chamber Under Milk Wood Overture, est une gements fit que la trame sonore dut être Ensemble. George Martin a aussi composé suite instrumentale composée en 1988 confiée à un autre compositeur et c’est au la musique de quelques films de moindre d’après un texte dramatique du poète célèbre Ennio Morricone que la tâche fut importance que nous aurions aimé décou- Dylan Thomas, écrit en 1954 pour la confiée. Ce n’est que vingt ans plus tard vrir, mais ne boudons pas notre plaisir et radio. que George Martin compléta ces œuvres apprécions à sa juste mesure ce trésor enfin Belle Étoile est une œuvre inédite com- chorales qui ont été interprétées pour la disponible. Bonne écoute ! posée en 1969 par George Martin pour première fois en public en 2008. Le présent orchestre à cordes et découverte par enregistrement fait donc office de première I

Film Scores and Original Orchestral Music of George Martin • The Berlin Music Ensemble conducted by Craig Leon ARCD008 • Atlas Realisations [PIAS], 2017 The Pepperland Suite (Original Music Written Three American Sketches for Violin 18- Waltz in D Minor for Flute & Chamber for the Film ‘Yellow Submarine’) & Chamber Orchestra Orchestra 1- Pepperland 10- Westward Look! 2- March of the Blue Meanies 11- Old Boston 19- Prelude for Strings 3- Sea of Holes 12- New York, New York 4- Sea of Monsters The Mission Chorales (* First Recording of the 5- Pepperland Reprise 13- Judy’s Theme Original Sketches written for the film ‘The Mission’) 20- Prelude 27- Chorale 5 Live and Let Die Suite (Original Music Written Under Milk Wood Overture (Incidental Music to 21- Chorale 1 28- Chorale 6 for the Film ‘Live And Let Die’) ‘Under Milk Wood’ by Dylan Thomas) 22- Chorale 2 29- Chorale 7 6- Whisper Who Dares 14- Under Milk Wood (Main Theme) 23- Orchestral Interlude 7- Bond Meets Solitaire 15- Love Duet 24- Chorale 3 8- Snakes Alive 16- Waldo’s Song 25- Chorale 4 9- Baron Samedi’s Dance of Death 17- Belle Étoile (* First Recording) 26- Orchestral Interlude

Craig Leon