PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION

BENAYACHE SARAH Doctorant Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales, Souissi, Rabat [email protected]

SAGHRANE MOHAMED YASSINE Doctorant Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales, Souissi, Rabat [email protected]

ALAOUI LALLA LATIFA Enseignante-chercheur Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales, Souissi, Rabat [email protected]

Résumé

La publicité joue un rôle essentiel dans le financement des entreprises audiovisuelles. Parfois elle constitue la source principale de survie. Toutefois ces dernières se trouvent confronter à un dilemme entre création publicitaire et respect de l’ordre public audiovisuel. La publicité étant une fonction mercantile, certaines lignes rouges ne doivent pas être dépassées pour délimiter les champs de la publicité mensongère, comparative, clandestine ou dénigrante. Dans ce contexte, la Haute Autorité de la Communication audiovisuelle intervient pour réguler ces pratiques. Cette contribution a pour objectif de présenter la publicité au Maroc sur le plan réglementaire et de mettre en exergue le rôle et les efforts fournis par le régulateur en matière de publicité comparative et mensongère en reprenant les grands principes de la jurisprudence de la HACA à travers des cas ayant débouché sur des décisions.

Mot clé : Respect de l’ordre public audiovisuel, publicité mensongère, comparative, clandestine ou dénigrante.

REVUE MAROCAINE DE RECHERCHE EN MANAGEMENT ET MARKETING, N°16, JANVIER-JUIN 2017 Page 241

PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION

Advertising in Morocco: freedom of creation, diffusion and regulation

Abstract

Publicity plays a crucial role in the financing of the audio-visual companies insofar as sometimes it constitutes the primary source of survival. However, these companies find themselves confronted with a dilemma between advertising and public order. Publicity being a mercantile function, certain red lines should not be exceeded to delimit the fields of the misleading advertising, comparative, clandestine or disparaging. In this context, the superior council of the audio-visual communication (CSCA) intervenes to control these practices. The objective of this study is on the one hand to recall the historical assets before and after the liberalization of the Moroccan audio-visual sector through a document retrieval and on the other hand to put forward the role and the furnished efforts by the High ranking authority of the audio-visual communication (HACA) as regards comparative advertising and untrue by taking again the great principles of the jurisprudence of the CSCA through the most emblematic cases having led to decisions since its creation in 2005. This contribution has the aim of examining the practices of France, this practice could be inspired by Morocco as a reference.

Key words : Advertising and public order, the misleading advertising and comparative, clandestine or disparaging, jurisprudence.

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Introduction

La publicité constitue l’une des préoccupations du public et des professionnels. Les académiciens l’intègrent comme une variable du mix marketing ou encore comme objectif de communication. Cependant, elle ne fonctionne pas n’importe comment, elle obéit à une logique universelle en matière de textes. Dans ce contexte, il est pertinent de retracer les acquis historiques du cadre législatif du secteur publicitaire.

Le secteur marocain de la publicité souffrait d’un vide législatif et réglementaire quasi- total. En effet, [jusqu’en 2002, avant la libéralisation du secteur de la communication audiovisuelle, le secteur publicitaire était sous le contrôle du ministère de la communication via une commission composée des deux régies des télévisions publiques et des représentants du ministère et de la RTM (SNRT actuellement).]

Progressivement, la régulation s’est imposée comme un levier pour renforcer le secteur marocain de la communication audiovisuelle et le développement de l’économie. Pour une meilleure organisation du secteur publicitaire, la réforme de ce dernier se voit nécessaire.

Dans ce sens, les pouvoirs publics prirent conscience du fait que la nouvelle politique de l’état ne pouvait avoir de sens que par le passage d’une politique de monopole à une dynamique pluraliste. Mais aussi par la présence d’une nouvelle instance ; une autorité indépendante de régulation qui n’est autre que la HACA, instituée par DAHIR du 31 août 2002 qui a pour vocation, la régulation de la communication audiovisuelle.

Les nouvelles dispositions réglementaires en matière d’audiovisuelle ont bouleversé les pratiques publicitaires sur le plan créatif tant que la création n’est pas régulée. En fait la situation diagnostiquée apparait plus complexe car tout ce qui touche le secteur peut impacter l’ensemble des acteurs professionnels.

Cette contribution a pour objectif de :

▪ Démontrer que la publicité au Maroc obéit à des dispositions réglementaires même si elle a une fonction mercatique et ne fonctionne pas n’importe comment. ▪ Examiner les pratiques de la publicité au Maroc et de mettre en exergue le rôle du régulateur en matière de publicité en reprenant des modèles de décision prises par ce dernier.

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▪ Soulever les contraintes auxquelles sont confrontés les acteurs du marché audiovisuel. ▪ Proposer des axes d’améliorations qui peuvent faire l’objet de réflexion au futur.

Concernant notre méthodologie de travail, celle-ci repose sur [des études longitudinales basées sur l’observation et l’exploration depuis 3 ans sur le développement du secteur de la communication audiovisuelle.]

La démarche retenue se base sur la recherche documentaire de source primaire et secondaire regroupant des articles publiées dans la presse généraliste et thématique, des informations publiées dans le site institutionnel de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle concernant les décisions et les cahiers de charge des chaînes publiques et privées et aussi des entretiens semi directifs avec des professionnels du secteur ( agence, annonceur, prestataires de service…)

I. Etat des lieux de la publicité au Maroc

1.1. Evolution de la publicité

Introduite dès les années 1960, la publicité audiovisuelle au Maroc ne fera pour sa part l’objet d’une disposition expresse qu’à la publication du Dahir portant création de la HACA en 2002, dont, disposera que ce dernier [« veille au respect , par les organismes de la communication audiovisuelle, de la législation et de la réglementation en vigueur en matière de publicité »] et, qu’à cet effet, il « …exerce un contrôle, par tous les moyens appropriés, sur les modalités de programmation des émissions publicitaires diffusées par les organismes relevant du secteur public de la communication ou bénéficiaire d’un titre quelconque d’exploitation dans le cadre de ce secteur ».

Mais le socle fondateur du dispositif d’encadrement de la communication publicitaire audiovisuelle ne verra le jour qu’en janvier 2005, avec la promulgation de la loi n°77-03, qui introduit pour la première fois un certain nombre de dispositions originales, allant de la définition générale de la publicité , du parrainage ou du téléachat jusqu’à l’obligation de mentionner les conditions d’insertion au sein des cahiers de charges, en passant par la création de concepts juridiques de publicité « interdite » et « clandestine ».

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1.2. Présentation juridique de la publicité

La loi 77-03 est un texte qui détermine le régime juridique de la communication audiovisuelle. la loi n° 77-03 constitue, comme le rappelle son préambule, un jalon important dans le processus visant, à mettre en place le cadre juridique de la libéralisation de ce secteur et qui a débuté par la création de la HACA et la suppression du monopole de l’Etat en matière de radiodiffusion et de télévision ouvrant ainsi la voie à la libre entreprise de communication audiovisuelle. la publicité est définit comme : [ « toute forme de message radiodiffusé ou télévisé, notamment par des images, des dessins ou formes, des discours écrits ou verbaux, diffusé contre rémunération ou autre contrepartie, destinée à informer le public ou à attirer son attention en vue, soit de promouvoir la fourniture de biens ou services, y compris ceux qui sont présentés sous leur appellation générique, dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle, artisanale ou agricole ou de profession libérale, soit d’assurer la promotion commerciale d’une entreprise publique ou privée.» ]

Donc, Il y a un but publicitaire lorsque l’intention du diffuseur est seulement d’informer les téléspectateurs et de promouvoir des biens ou des services. Il est bien sûr possible de présenter un produit dans un programme, mais cette présentation doit avoir avant tout un caractère informatif : la visualisation du produit ne doit pas être insistante, les citations du nom de marque doivent être ponctuelles, sans aucun argument ou slogan publicitaire. A défaut, le régulateur la considérera comme une publicité clandestine.

Le législateur a défini la publicité clandestine[ « comme la présentation verbale ou visuelle, de manière explicite ou implicite, de marchandises, de services, du nom, de la marque ou des activités d’un producteur de marchandises ou d’un prestataire de services dans des programmes, lorsque cette présentation est faite de façon intentionnelle par l’opérateur de communication audiovisuelle dans un but publicitaire non explicite et risque d’induire le public en erreur sur la nature d’une telle présentation. Une présentation est considérée comme intentionnelle notamment lorsqu’elle est faite contre rémunération ou toute autre forme de paiement »].

La publicité est considérée interdite [« si elle contient des éléments de discrimination, de nature politique ou de nature à porter préjudice moral ou physique aux mineurs. Aussi, une publicité est interdite si elle comporte sous quelque forme que ce soit, des indications de nature à induire les citoyens en erreur ou à violer leur droit à la REVUE MAROCAINE DE RECHERCHE EN MANAGEMENT ET MARKETING, N°16, JANVIER-JUIN 2017 Page 245

PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION confidentialité des informations relatives à l’état de leur santé, ou comportant des indications mensongères sur la santé ou incitant à la pratique illégale de médecine ou de charlatanisme ou celle comportant le dénigrement d’une entreprise, d’une organisation, d’une activité industrielle, commerciale, agricole ou de services ou d’un produit ou d’un service, que ce soit en tentant de lui attirer le mépris ou le ridicule public ou par tout autre moyen. » ]

Dans ce cadre le législateur pose clairement le principe de la séparation des programmes et de la publicité dans les cahiers de charges des chaines publiques : « Les séquences publicitaires, radiophoniques et télévisés, doivent être aisément identifiables comme telles et nettement séparées du reste du programme, avant comme après leur diffusion… ». Les cahiers de charges contiennent aussi des dispositions relatives à la publicité et la publicité interdite. A cet effet, le cahier de charge de la SNRT dispose : « la SNRT s’interdit tout type de présentation verbale ou visuelle, de manière explicite ou implicite, de marchandises, de services, du nom, de la marque ou des activités d’un producteur de marchandises ou d’un prestataire de services dans des programmes, lorsque cette présentation est faite de façon intentionnelle dans un but publicitaire non explicite et risque d’induire le public en erreur sur la nature d’une telle présentation.

Une présentation est considérée comme intentionnelle notamment lorsqu’elle est faite contre rémunération ou toute autre forme de paiement. Elle s’interdit également la diffusion de messages publicitaires produits par ou pour des partis politiques ou des organisations syndicales, qu’ils donnent lieu ou non à des paiements. Sont également interdits de diffusion les messages publicitaires non respectueux des personnes en raison de leur origine, de leur sexe, de leur appartenance ou non à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, notamment en les associant à des images, des sons ou des scènes susceptibles de leur attirer le mépris ou le ridicule public. » le nouveau cadre juridique mis en place par la loi n°77-03 représente une avancée notoire ne serait- ce que pour avoir permis l’introduction, dans les cahiers de charges des opérateurs publics et privés, de normes et d’éléments de cadrage de ce type de communication publicitaire commerciale, opérant ainsi une coupure nette et précise avec le système opaque hérité de l’époque du monopole audiovisuel public : la censure.

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1.3. Publicité mensongère et publicité comparative, parrainage, protection du jeune public

Divers dispositions de la réglementation de la publicité comparative et mensongère entrent dans le champ de la publicité interdite : celle comportant, sous quelque forme que ce soit, des indications de nature à induire les citoyens en erreur ou à violer leur droit à la confidentialité des informations relatives à l’état de leur santé, ou comportant des indications mensongères sur la santé ou incitant à la pratique illégale de médecine ou de charlatanisme ; celle comportant le dénigrement d’une entreprise, d’une organisation, d’une activité industrielle, commerciale, agricole ou de services ou d’un produit ou d’un service, que ce soit en tentant de lui attirer le mépris ou le ridicule public ou par tout autre moyen.

Le CSCA retient la qualification de publicité interdite plutôt de publicité comparative et mensongère dans les décisions de sanctions. On ne peut pas envisager la publicité audiovisuelle sans aborder la question du parrainage eu égard à l’importance prise par cette technique de communication sur nos médias audiovisuels, ainsi qu’à l’ampleur sans cesse croissante des sommes qui y sont engagées par les annonceurs. Toutefois, le parrainage publicitaire se distingue de la publicité de marque en ce sens qu’il exclut tout argumentaire promotionnel de la marque, du produit ou du service du parrain. En général, le principe du parrainage est bien celui d’une technique de communication publicitaire qui, par le soutien qu’elle apporte, vise à associer la marque ou l’image de l’entreprise à un événement ou à un programme.

Effectivement, le parrainage est défini comme étant [« …toute contribution d’une entreprise publique ou privée au financement de programmes dans le but de promouvoir son nom, sa marque, son image, ses activités, ses réalisations »]. Cependant, le Conseil supérieur de la Communication Audiovisuelle a veillé à préciser ces dispositions dans les cahiers de charges des opérateurs publics et privés, notamment par une série d’assertions concernant les conditions du parrainage et par un faisceau de spécifications relatives à l’identification du parrain.

La problématique de la protection du jeune public face au message audiovisuel mérite une réflexion, car en même temps qu’elles poussent à s’interroger sur la diversité des acteurs intervenant dans ce processus, elles posent également la question de la véritable portée de l’influence spécifique des médias de masse, notamment audiovisuels, sur la REVUE MAROCAINE DE RECHERCHE EN MANAGEMENT ET MARKETING, N°16, JANVIER-JUIN 2017 Page 247

PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION construction psychosociale des enfants et des jeunes. Et si la question de l’impact des messages violents et évidemment présente dans la problématique publicitaire , c’est surtout la transformation de l’enfant en cible commerciale qui tend à devenir source d’interrogations, puisque les jeunes en général, et les adolescents en particulier, sont devenus principalement depuis une vingtaine d’années , de véritables agents économiques avec un pouvoir d’achat important et une influence grandissante dans le mode de consommation de l’ensemble de la famille.

Ainsi dans les sociétés avancées, et de plus en plus dans les pays émergents, l’action de la publicité sur le phénomène de la consommation infantile est dénoncée par les ONG, qui décrit le fait que l’enfant , dans l’environnement médiatique , soit bien souvent perçu comme un acteur négligé par les pouvoirs publics, mais ciblé par le marché. De la sorte, la critique couramment faite à la publicité réside dans la difficulté d’identification de la communication commerciale pour le jeune public à raison de son âge, de la présentation du message ainsi que dans son contenu, et enfin des caractéristiques propres aux différents supports.

Il apparaît donc que le message publicitaire, notamment dans les médias audiovisuels, ne se limite pas à la seule promotion du produit et de sa marque, il véhicule par la même occasion des normes, des manières d’être, de penser, d’agir dont on ne mesure pas encore toutes les conséquences. Voilà donc incarné, dans la communication publicitaire, un des dilemmes de nos sociétés modernes, auquel se trouvent confrontés les pouvoirs publics de manière exacerbée, au fur et à mesure du progrès technologique : face à la perte de repères des familles consommatrices, comment concilier cette nécessité de communiquer, intrinsèque au développement socioéconomique, avec le risque non négligeable de voir se développer des contre modèle éducatifs ?

Conscient de cela, le législateur a voulu signifier son intérêt particulier pour cette problématique en soulignant, que…[ « le droit à l’information, élément essentiel de la libre communication des pensées et des opinions, doit être assuré… dans le respect des valeurs civilisationnelles fondamentales et des lois du Royaume, notamment celle relatives à la protection de la jeunesse… » ]

D’ailleurs encore plus sur ce point, le Dahir a chargé expressément le régulateur, en la personne de son Directeur, sur autorisation du Président du CSCA et après délibération de ce dernier, d’agir en justice et saisir les autorités administratives, REVUE MAROCAINE DE RECHERCHE EN MANAGEMENT ET MARKETING, N°16, JANVIER-JUIN 2017 Page 248

PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION judiciaires et professionnelles compétentes, lorsqu’il est porté à sa connaissance « … des faits constitutifs d’une infraction aux lois et règlements en vigueur, notamment des pratiques contraires à la protection de l’enfance et l’adolescence. »

Le jeune public ayant besoin d’une protection spéciale contre les nouvelles techniques de promotion commerciale utilisées dans les médias audiovisuels, compte tenu de son inexpérience, de sa crédulité et de son discernement limité, le législateur a mis à la disposition du CSCA un outillage juridique conséquent, afin d’être en mesure de remplir correctement ses missions en la matière.

Ainsi qualifie-t-il de la publicité interdite celle [« …de nature à porter préjudice moral ou physique aux mineurs et ayant… pour objet :

▪ D’inciter directement les mineurs à l’achat d’un produit ou d’un service en exploitant leur inexpérience ou leur crédulité ou d’inciter directement les mineurs à persuader leurs parents ou des tiers d’acheter les produits ou les services concernés ; ▪ D’exploiter ou altérer la confiance particulière des mineurs à l’égard de leurs parents, enseignants et des personnes ayant une autorité légitime sur eux ; ▪ Présenter sans motif légitime des mineurs en situation dangereuse ». ]

Alors que dans la même loi interdit catégoriquement « … les messages publicitaires contenant, explicitement ou implicitement, que ce soit par les images ou les propos, des scènes de violence contraires aux bonnes mœurs et à l’ordre public, des éléments pouvant encourager les abus, imprudences ou négligences ou pouvant choquer les convictions religieuses ou politiques du public ou des éléments exploitant l’inexpérience et la crédulité des enfants et des adolescents ». Par ailleurs les cahiers de charges des opérateurs publics stipulent que les programmes destinés particulièrement aux enfants de moins de dix ans, ne peuvent être interrompus par des séquences publicitaires

II. Cadre réglementaire et institutionnel du secteur publicitaire

2.1. Rôle du régulateur en matière de publicité

La régulation est un mode d’origine anglo-saxonne adopté progressivement par de nombreux pays ayant fait le choix de la levée de monopole et de la libéralisation. Sur le

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PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION plan national, le mode de régulation suppose la création d’une autorité indépendante de régulation, d’ailleurs c’est ce qui a été reproduit avec succès dans plusieurs secteurs économiques.

La régulation est un mode qui va de pair avec la libéralisation. Il a pour but d’encadrer les initiatives privées et publiques, aussi de veiller sur le respect des règles déontologiques relatifs au secteur en terme de pluralisme, respect de la dignité humaine et honnêteté de l’information.

C’est dans ce contexte qu’est née de la décision de mettre fin au monopole de l’Etat dans le secteur de la communication audiovisuelle et créer une instance de régulation du secteur de la communication audiovisuelle qu’est La Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle. Les cahiers de charges représentent la pièce maitresse sur laquelle est basée l’essentiel de son activité. Concernant la publicité, les cahiers des charges sont le biais imposé par lequel la Haute Autorité de la communication audiovisuelle peut fixer les règles de la pratique publicitaire au sein des entreprises de communication audiovisuelles privées ou publiques.

La Haute autorité de la communication audiovisuelle exerce toujours un contrôle a posteriori, c’est-à-dire après la diffusion d’un programme : il n'est pas un organe de censure, et ne peut donc pas intervenir avant la diffusion d'un programme, conformément au principe de liberté de communication. Par conséquent, il ne visionne pas les programmes avant leur passage à l’antenne et ne pourrait pas demander à une chaîne de déprogrammer un programme, même s’il craignait un problème éventuel.

Il doit toutefois veiller à ce que les opérateurs respectent leurs obligations légales et conventionnelles, cela est indispensable à l'accomplissement de ses missions. En effet, il ne suffit pas de poser des règles, il faut avoir les moyens de les faire respecter.

Cette veille est donc exercée par le Conseil supérieur de la communication audiovisuelle une fois que les programmes sont diffusés sur les antennes. S'il constate un problème, il pourra alors décider d'une éventuelle intervention auprès de la chaîne concernée. En matière de publicité commerciale on ne peut parler de comparaison que si « la publicité contient une comparaison, celle-ci ne doit pas être de nature à induire en erreur les consommateurs et doit respecter les principes de la concurrence loyale… »,

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Avant de préciser que « …les éléments de comparaison doivent s’appuyer sur des faits objectivement vérifiables et choisis loyalement ».

Le législateur qualifie de publicité interdite « …celle comportant le dénigrement d’une entreprise, d’une organisation, d’une activité industrielle, commerciale, agricole ou de services ou d’un produit ou d’un service , que ce soit en tentant de lui attirer le mépris public ou le ridicule public ou par tout autre moyen ».

C’est donc sur la base de ce dispositif que le Conseil supérieur de la communication audiovisuelle traite toutes les affaires concernant une des catégories les plus problématiques et les plus récurrentes en matière de la publicité audiovisuelle.

2.2. Infractions relevées par le CSCA en matière de publicité

➢ La décision n°07-05 relative à la campagne publicitaire « Jawal Jeune » : entre publicité comparative et publicité mensongère

L’affaire dite de la campagne publicitaire « Jawal Jeune », diffusée sur les deux chaînes de télévision publiques en 2005, pour la promotion du service de la téléphonie mobile de la société , a fourni au Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle l’occasion de confirmer le principe jurisprudentiel selon lequel les services objet d’une publicité concernant un secteur qui n’est constitué de deux opérateurs , l’identification implicite du concurrent visé par les messages publicitaires est dès lors aisée.

Après avoir visualisé les différents spots composant cette campagne publicitaire, en ce qu’ils contenaient comme images et commentaires, mettant en exergue les particularités des services « Jawal Jeune » et mentionnant que l’ensemble de ces avantages sont offerts exclusivement par Maroc Telecom. Le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle a néanmoins innové en rentrant cette fois ci dans le détail.

Adoptant une démarche analytique, le régulateur a estimé que la réponse à la question « Et qu’est ce qu’il y a ailleurs ? », survenant en image et en son sous forme d’une explosion en arrière plan, après un silence de quelques secondes, aboutissait à dénier de manière catégorique l’existence d’offres ou de services similaires ailleurs, c'est-à-dire chez l’autre opérateur de téléphonie mobile.

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Par ce biais, un nouvel aspect fut distingué, qui peut être considéré comme faisant jurisprudence en la matière, à savoir le fait que les commentaires et la scène d’explosion, eu égard aux multiples interprétations qu’elles peuvent susciter dans l’esprit du téléspectateur, étaient de nature à induire les consommateurs en erreur.

Se fondant sur ce raisonnement, le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle a ordonné aux deux chaînes de télévision de faire cesser immédiatement la diffusion de ce spot publicitaire , le déclarant interdit, mais uniquement tant que ne sont pas supprimés les commentaires « Et nulle par ailleurs » et « Et , qu’est ce qu’il y a ailleurs. »

➢ La décision n°04-06, relative au spot publicitaire des produits et services « SHELL » : la publicité comparative.

Après avoir pris connaissances des conclusions de l’instruction effectuée par les services de la Direction Générale de la Communication Audiovisuelle, au sujet du spot publicitaire diffusé sur Radio MEDI 1 pour la promotion des produits et services « SHELL », lors du premier trimestre de l’année 2006, le régulateur a pu constater que dans ces versions Française et Arabe, ce dernier vantait les particularités de la marque en question, sous forme de dialogue employant des affirmations telles que « SHELL est la seule à avoir dans chaque station un expert de qualité », qui ne pouvaient être confirmés effectivement ou formellement à partir du seul contenu de message.

Considérant que le spot publicitaire sous entendait que toute personnes désirant utiliser des combustibles obéissant aux normes de qualité, devait se diriger absolument et exclusivement vers les stations « Shell », parce qu’elles sont les seules à disposer, contrairement à leurs concurrents, de ce que le spot a qualifié « d’experts qualité et de laboratoires mobiles », le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle a considéré qu’il était de nature à induire le spectateur /consommateur en erreur et à « porter préjudice aux intérêts des entreprises concurrentes ».

Déclarant dans son prononcé le spot incriminé comme étant une publicité interdite, tant qu’il ne sera expurgé des expressions « la seule » et « les seuls », le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle n’a rien apporté de nouveau, par rapport à la décision précédemment étudiée, on ordonnant à la société RADIO

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MEDITERRANNEE INTERNATIONAL-RMI de faire cesser immédiatement la diffusion en l’état des versions mises en cause.

Cependant, l’innovation jurisprudentielle viendra d’un attendu de la Décision n° 04-06, du mars 2006, au sein duquel le régulateur établira un principe selon lequel l’utilisation d’expressions comme « les seuls » et « la seule », ou de toutes expressions analogues, de portée générale et absolu, peuvent être source de confusion et de contestation, d’où la nécessité d’éviter leur utilisation chaque fois que l’annonceur n’est pas en mesure de prouver, « par le seul contenu du spot publicitaire », qu’elles correspondent à une réalité précise et identifiable comme telle.

D’ailleurs, un argumentaire identique sera repris par le Conseil Supérieur de la Conseil Audiovisuelle au sein de sa Décision n° 12-07, du 25 Avril 2007, ordonnant pour les mêmes raisons l’arrêt de la diffusion d’un spot publicitaire au profit du « GROUPE ADDOHA », ainsi que dans sa Décision n° 48-10, du 12 aout 2010, ordonnant à la SOREAD-2M de cesser la diffusion d’une publicité au profil du détergeant « OMO MATIC ».

Attendant, de manière désormais habituelle, que le spot comportait la comparaison du produit « OMO MATIC» avec le produit concurrent « ARIEL », clairement mis en présence par le biais de la « représentation imagée de son conditionnement » mais en « l’absence d’éléments objectifs correspondant à une réalité précise et identifiable », cette Décision n°48-10 établira cependant un intéressant précédant en créant une corrélation entre le principe de « non-respect de la concurrence loyale » et le fait qu’une publicité comporte des allégations qui sont de nature à induire en erreur les téléspectateurs en présentant le produit comme étant « le meilleur », sans que cette « allégation ne s’appuie sur des faits objectivement vérifiables ». Ceci étant, les prémisses de cette corrélation existaient déjà ailleurs.

➢ Décision n°25-07, du 03 octobre 2007, ordonnant l’arrêt de la diffusion du spot publicitaire faisant la promotion de la gaufrette « TAGGER » : la protection du jeune public

En s’appuyant sur l’ensemble de cet arsenal légal et contractuel que le régulateur à pu édicter sa première décision en la matière, à l’occasion de l’affaire engendré par la

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PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION diffusion du spot publicitaire faisant la promotion de la gaufrette TAGGER sur les deux chaînes publiques « EL OULA » et « 2M ».

Après avoir pris connaissance des documents relatifs à l’instruction effectuée par les services de la Direction Générale de la Communication audiovisuelle au sujet dudit spot et suite à son visionnage, le Conseil Supérieur de la communication Audiovisuelle a ordonné aux deux opérateurs concernés de faire cesser immédiatement sa diffusion, déclarant qu’il constituait une publicité interdite, « tant qu’il continuerait à contenir des éléments successibles d’encourager les abus, imprudences et négligences ou d’altérer la confiance particulière des mineurs à l’égard de leurs enseignants. »

De cette manière le régulateur a consacré un principe jurisprudentiel clair et précis, selon lequel les spots publicitaire ne doivent jamais contenir des scènes donnant aux mineurs un mauvais exemple sur la manière de se comporter vis-à-vis de leurs professeurs au sein des établissements d’enseignement.

Mieux encore, après cette décision, les spots ne devront plus « les inciter à manquer au respect dû envers le corps enseignant, notamment en utilisant des éléments successibles d’exploiter l’inexpérience et la crédulité des enfants et adolescents et ce, en associant la consommation d’un produit à l’insouciance de l’étudiant ».]

2.3. Les limites et perspectives d’action

Le regard, porté sur les décisions jurisprudentielles du régulateur, dans une démarche analytique permet de comprendre la dynamique du régulateur. Mais la question de la création publicitaire et la manière dont le régulateur applique les dispositions et son intervention à posteriori pose problème au métier des publicitaires. Dans ce contexte, nous avons relevé des limites autour de trois axes à savoir :

➢ Le contrôle a posteriori

Dans la pratique, certains aspects de la loi manquent de clarté, notamment les critères à partir desquels on pourrait évaluer une publicité ? A l’époque, l’annonceur avait devant soi un interlocuteur avec qui parler et arrivait à trouver une solution en dialoguant. Actuellement, les diffuseurs sont les seuls à juger de la conformité de la publicité. D’autant plus les règles précisant l’évaluation ne sont pas stipulées dans la loi. Le

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PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION contrôle a posteriori parait comme un obstacle sur le plan créatif dans la mesure où il obligera l’annonceur et l’agence à y réfléchir deux fois pour décider du contenu publicitaire. Un spot qui a nécessité des efforts dans sa conception et généré des couts peut être arrêté à tout moment à l’initiative du régulateur.

➢ Une absence de communication

Les professionnels du secteur publicitaire sont en effet confrontés au problème majeur qu’est la garantie de leur présence dans les médias audiovisuels. D’une part, il n’existe pas des critères d’évaluation d’une publicité avant sa diffusion. D’autre part, il est difficile de vérifier des publicités faites ou en projet relative à la conformité aux réglementations et règles professionnelles en vigueur. Aussi, la difficulté réside dans l’absence de règle de base qui montrent clairement ce qui est permis et ce qui est interdit. Tout se passe comme si les publicitaires sont condamnés à découvrir à chaque création, les possibilités et les limites de leur métier. Malgré quelques tentatives de création d’un organe d’autorégulation visant à améliorer les pratiques du métier et les relations avec les différents intervenants du secteur en instituant des règles de conduite. D’après nos investigations sur le terrain, nous avons observé qu’il y a un manque d’instance et d’organismes professionnels en matière de contrôle de la publicité et d’instrument d’autodiscipline. De même, jusqu’à aujourd’hui il y a absence de code déontologique approuvé pour les publicitaires.

➢ Méconnaissance de la réglementation

Le corpus juridique est mal connu car les dispositions relatives à la publicité mensongère, escroquerie ou concurrence déloyale sont éparpillées dans le code de commerce et le code pénal. En effet, il faut piocher dans plusieurs textes juridiques dans des domaines différents pour pouvoir se faire une idée sur la législation. Cette discontinuité dessert mal le secteur. Pour faire face à tous ces contraintes auxquelles sont confrontés les professionnels du secteur, nous proposons des axes d’améliorations qui peuvent servir de pistes de réflexion et qui peuvent être exploré au futur. Elles ont été organisées autour de trois axes à savoir :

➢ Une loi destinée à la publicité

Une loi qui englobe les principes généraux et communs qui traite de tous les procédés inhérents à la publicité et dans tous les supports (télévision, radio…) aura le mérite REVUE MAROCAINE DE RECHERCHE EN MANAGEMENT ET MARKETING, N°16, JANVIER-JUIN 2017 Page 255

PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION d’éclaircir la situation et par conséquent de mettre toutes les parties concernées devant leur responsabilité. Elle permettra à tout un chacun de travailler en connaissance de causes et d’agir en conséquence. Aussi, mettre un article qui doit signaler ce qui doit être applicable à la publicité mensongère et comparative.

➢ Concilier respect et créativité

La mise en place d’un code de bonne pratique approuvé et accepté par les professionnels est fortement recommandé. Pour avoir une publicité responsable en essayant de concilier entre la liberté de création publicitaire et le respect que l’on doit au consommateur. Aussi, nous conseillons, la création d’une instance de contrôle de la publicité doté d’une commission de visionnage à posteori et qui aura pour mission :

• L’établissement et la diffusion des recommandations qui constituent des règles interprofessionnelles ; • L’émission de réponse à toute demande d’avis relative à des publicités faites ou en projet ; • La prise de toutes les mesures à éviter ou à faire cesser les manquements aux réglementations en vigueur et/ou règles professionnelles ainsi qu’en portant éventuellement plainte et/ou en se portant partie ; • La participation à toute instance nationale ou internationale ayant pour objet la promotion de l’autodiscipline publicitaire ; • Le contrôle systématique avant diffusion sur l’intégralité des messages publicitaires télévisés finalisés.

Aussi, Les annonceurs ou agences qui le désirent peuvent ainsi bénéficier en amont des conseils juridiques et déontologiques de l’instance en question. Et Ce n’est qu’après avoir eu connaissance de ces avis que les régies peuvent diffuser ou non les messages publicitaires. Dans ce sens, le Maroc pourrait s’inspirer des pratiques françaises en matière de publicité en l’occurrence le Bureau de vérification de la publicité (BVP).

➢ Réguler c’est aussi accompagner

Au niveau du régulateur, nous conseillons dans un premier temps un échange avec les professionnels du secteur publicitaire afin de les sensibiliser et les accompagner. Aussi, nous recommandons l’élaboration d’un guide des règles REVUE MAROCAINE DE RECHERCHE EN MANAGEMENT ET MARKETING, N°16, JANVIER-JUIN 2017 Page 256

PUBLICITÉ AU MAROC : ENTRE LIBERTÉ DE CRÉATION, DIFFUSION ET RÉGULATION d’autodiscipline démontrant les lignes rouges à ne pas franchir en matière de création publicitaire car il ne faut pas oublier que le régulateur est compétent pour veiller et contrôler la conformité des messages publicitaires et non pas pour donner des avis sur tout message publicitaire mais au moins il va cadrer les limites à ne pas franchir. La mise en place d’une stratégie de communication avec pour objectif d’informer les intervenants sur les lois en vigueur donnera lieu à un guide ou un code déontologique qui capitalisera sur la loi. Il est nécessaire pour le régulateur de déterminer avec précision les problèmes éventuels et les actions à entreprendre et cela ne peut se faire qu’à travers l’écoute en étroite collaboration avec les praticiens. En un peu de 17 ans, la HACA est devenue un instrument essentiel dans la régulation de la publicité, une institution respectée mais considérée par les professionnels de la publicité comme un gendarme de la télévision.

Conclusion

La HACA, est un organe étatique de régulation qui doit veiller à ce que les chaines audiovisuelles respectent leurs cahiers de charges, notamment la déontologie en matière de publicité. Les professionnels du secteur publicitaire doivent prendre en considération l’évolution de l’environnement à savoir le paysage médiatique, contexte politique associatif et socioculturel et doivent apprendre à travailler avec le régulateur. Avant, il y avait une commission de contrôle composée de représentants du ministère de la communication et des professionnels du secteur. Aujourd’hui la HACA n’entretient pas de relation avec les professionnels et ne peut juger qu’à posteriori. Les publicitaires peuvent juger eux même de la conformité de la publicité. Ce changement a pour objectif la responsabilisation des intervenants dans l’acte publicitaire.

Le principe même du contrôle a posteriori peut, par ailleurs générer des utilisations inattendues par les praticiens eux même qui peuvent en faire un avantage concurrentiel. Comme la loi stipule que le régulateur peut intervenir, saisir l’affaire ou pas, pour arrêter la publicité ‘fautive’, l’occasion est bonne, pour tout annonceur, de déclencher une campagne défensive dénigrant son concurrent avant que l’instance de régulation n’arrête la campagne.

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Le contrôle a posteriori sur le plan créatif est un obstacle pour le métier des publicitaires. Le souci de ces derniers est d’enfreindre les règles qui ne sont pas assez claires ou qui peuvent aller à l’encontre des valeurs sociales et culturelles ce qui donne lieu à une médiocrité de la publicité sur le plan esthétique et technique.

Cela suppose la mise en place d’un cadre, le plus large possible qui fixe les pratiques et spécifies ce qui est permis et ce qui ne l’est pas tout en laissant un espace de liberté pour la créativité et la création : un spot peut être interdit de passage sur un coup de filet sans fournir la raison de son interdiction.

Il est vrai que les fondements et les objectifs de la réforme de la communication audiovisuelle s’articulent autour d’une communication audiovisuelle libre. La liberté certes, mais qu’est ce qu’on entend réellement par une communication audiovisuelle libre ?faut-il élargir la définition de la communication audiovisuelle ? Faut –il établir un code de créativité pour délimiter les règles morales à respecter ? La HACA doit- elle intervenir sur le contenu publicitaire ou bien se contenter de veiller au respect des quotas publicitaires ? Doit-on penser à l’autorégulation ?

Au final, l’existence d’une instance est une démarche positive pour un secteur gangrené par des années de garde-fou et de dysfonctionnement, au moins la HACA a réussi à tracer un cadre organisé par la traduction de la loi en cahier de charge pour le secteur privé et la veille au respect des cahiers de charge du secteur public. En sus, les interventions du régulateur peuvent servir de référent. Pour cela, le CSCA devra s’armer de rigueur et devra tâcher de jouer pleinement son rôle de sage et de guide en vue d’assumer et d’assurer une communication audiovisuelle libre tout en tenant compte des défis qui s’imposent avec force.

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