Notice communale MARCILLAC-LANVILLE

1. Situation

La commune est située à 25 km d’Agoulême, à 10 km de Rouillac et à 5 km d’. Elle fait partie du canton Val de Nouère. La commune actuelle était divisée autrefois en deux paroisses : Marcillac et Lanville.

Elles furent réunies à la fin du XVIe siècle. La commune a été créée en 1790 sous le nom de Marcillac-Lanville.

2. Toponymie

Le nom de nombreuses communes de se termine en ac. Le suffixe ac tiré du latin acum signifie « propriété de » et témoigne de l’origine gallo-romaine de ces communes implantées sur une grande exploitation agricole antique, dite villa. On ajoute au nom du propriétaire terrien, le suffixe ac pour donner le nom de la commune.

3. Population

1793 : 1244 habitants 1872 : 1405 habitants 1921 : 785 habitants 2017 : 606 habitants 1800 : 1311 habitants 1876 : 1435 habitants 1926 : 714 habitants 1806 : 1402 habitants 1881 : 1271 habitants 1936 : 745 habitants 1821 : 1445 habitants 1886 : 1137 habitants 1968 : 564 habitants 1831 : 1518 habitants 1901 : 1014 habitants 1975 : 576 habitants 1841 : 1507 habitants 1906 : 991 habitants 1999 : 565 habitants 1861 : 1527 habitants 1911 : 890 habitants 2014 : 585 habitants

La crise du phylloxéra entraîna une baisse de la population à partir de 1876. Cette crise démographique du milieu rural s’accentua au cours du XXe siècle, à cause d’un exode rural correspondant à une forte demande de main d’œuvre dans les usines situées à proximité des villes. Mais une relance s’amorça à partir des années 1980. Depuis le début du XXIe siècle, on assiste à un phénomène de rurbanisation qui reste discret malgré une hausse constante de la population.

4. Superficie

La commune s’étend sur 1841 hectares.

5. Structure communale

L’ensemble du territoire communal comprend, 12 hameaux qui figurent tous sur la carte de Cassini, ce qui prouve leur existence au moins à partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle : Germeville, Ampanaud, Chantereine (autrefois Chanterane), La Touche, L’Anglée (logis), Les Granges. Aizet, à l’extrême nord du bourg et Lanville sont les hameaux les plus importants. Certains hameaux mentionnés sur la carte de Cassini ont disparu, il ne reste que le nom : La Taillette, La Combe, Charron. Le hameau Les Peux n’est pas mentionné sur cette carte.

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Carte de Cassini XVIIIe siècle

Situation géographique Paysage La commune de Marcillac-Lanville est située au cœur d’une entité paysagère appelée le Val d’. Un long plateau domine la vallée de la Charente. Il culmine à 136 m d’altitude et offrant, au lieu-dit le Palan, un point de vue sur le bassin d’Angoulême et la plaine Haute d’Angoumois. A cet endroit fut implanté un sémaphore, au début du XIXe siècle, placé sur une tour1. Ce relais télégraphe optique permettait la communication de messages entre Paris et la frontière espagnole. Il fut remplacé dans les années 1960 par un château d’eau.

Trois vallées entaillent aussi le plateau de Marcillac-Lanville, la Charente au sud est, au sud celle de l’Auge et au nord, l’Aume. Ces cours d’eau ont favorisé l’implantation de nombreux moulins. La grézière de Pont-Roux, appelée « la Sablière » située sur la rive droite du fleuve, est haute d’une trentaine de mètres. Ces grèzes servaient au sablage des chemins et furent utilisés comme liant en maçonnerie.

L’activité agricole domine sur ce territoire. Les cultures sont variées : blé, avoine, colza, orge, maïs. Situé dans les terroirs périphériques du Cognac, le Val d’Angoumois est inclus dans la vaste ceinture des « Fins Bois ». Si la vigne n’est pas prépondérante sur le territoire communal, sa culture est encore présente notamment sur les flancs sud sur des collines calcaires.

1 Ce télégraphe optique permettait de communiquer sur une longue distance des signaux codés que chaque guetteur observe à la longue vue et répète lors de sa transmission au sémaphore suivant. Il fut inventé par Claude Chappe en 1794.

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Les cours d’eau

La Charente

La commune est limitée au sud-est par la Charente. Son cours anastomosé forme de nombreux méandres, créant des îles de toutes tailles, isolées par un dense réseau de bras secondaires.

Elle a su conserver son paysage de prairies, forêts, roselières même si de nombreuses prairies naturelles ont été remplacées par des champs de maïs ou des plantations de peupliers.

Afin de préserver la faune et la flore des territoires traversés, la presque totalité du cours du fleuve est classée dans le réseau européen Natura 2000.

La vallée en amont d’Angoulême est classée Zone Naturelle d’Intérêt Écologique Faunistique et Floristique, ce qui signifie qu’elle abrite des espèces de grande valeur écologique. Ce classement en ZNIEFF ne s’accompagne d’aucun règlement, il s’agit surtout d’une appellation, sorte de label attribué aux zones naturelles les plus remarquables. Toutefois, les communes sont tenues de veiller à leur pérennité, en inscrivant ces zones aux documents d’urbanisme

L’Auge Cet affluent de la Charente est alimenté par trois ruisseaux : Le Sauvage (source à Anville), le Crachon et le ruisseau des Jauges qui rejoint l’Auge à Germeville (commune de Marcillac-Lanville). L’Auge se jette dans la Charente au sud du bourg de Marcillac. « Cette riante vallée se ramifie en plusieurs bras au milieu de magnifiques prairies » écrivait Martin-Buchey Cette petite rivière était riche en truites recherchées .Trois moulins étaient alimentés par l’Auge sur le territoire communal.

L’Aume

L’Aume, affluent de la Charente arrosant Aigre, traverse le nord de la commune où elle est canalisée entre deux digues. Les fertiles marais de la vallée de l’Aume furent, pendant des décennies, des ressources importantes pour la commune : culture du chanvre, du lin, des oignons, des haricots et la rouche, plante herbacée qui y pousse. Depuis, ces terrains ont été assainis par drainage.

Altitude Minimum : 47 m d’altitude Maximum : 136 m d’altitude, au lieu-dit « Le Palan »

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Lanville

Un réseau viaire important

L’ancien chemin saunier

Parallèlement au commerce du vin, se pratiquait en Angoumois au Moyen Âge le commerce du sel. Le fleuve Charente permettait le transport du sel entre l’Aunis et la , principaux centres de production de sel et Cognac puis Angoulême. Outre la voie fluviale, le sel était acheminé par voie terrestre le long de « chemins sauniers », ponctués de péages. La commune de Marcillac-Lanville est située sur le tracé de l’ancien chemin saunier reliant Saint-Savinien au Limousin. L’un des péages est attesté en 1050 dans la seigneurie de Marcillac où le chemin franchissait le fleuve par un pont ou un gué.

Complément alimentaire indispensable à l’homme, conservateur des aliments et des peaux, le sel est une denrée précieuse et une monnaie d’échange depuis l’Antiquité. Une partie des richesses des comtes d’Angoumois Taillefer reposait donc sur le commerce du sel, qu’ils protégeaient en installant des châteaux, aux endroits stratégiques. Aujourd’hui, il ne reste plus de trace dans le paysage de cet ancien chemin.

L’ancienne route de poste

Elle passait à l’ouest de la commune de Marcillac-Lanville, la séparant de la commune de Mons, à l’emplacement de l’actuelle route départementale 736.

Cette grande route de poste reliait Paris à Bordeaux. Elle était appelée la « Route d’Espagne ». Elle passait entre autres par Tours, Poitiers, , , Aigre, Gourville, Saint-Cybardeaux, Échallat, Châteauneuf, Barbezieux et rejoignait ensuite Bordeaux.

Louis XI ordonna l’établissement des postes en , par l’édit en 1464. Le réseau des routes de poste constituait le premier système d’échanges géré par l’État en France. La route de poste assurait un rôle essentiel dans la diffusion de l’information et permettait l’intégration de régions isolées dans les circuits d’échanges commerciaux.

En 1760, le conseil d’administration de la ferme des postes autorisa la modification du tracé de la route : elle fut déplacée vers l’est à partir de Poitiers. Ce changement se fit sous l’impulsion de Turgot (1727- 1781), intendant de la généralité de Limoges, afin de desservir Angoulême. Elle passa alors par Ruffec, , Angoulême…

Les relais de poste les plus près de Marcillac-Lanville se situaient à Aigre et à Gourville. La poste était une unité de distance qui valait environ 9 km et qui devait se parcourir en une heure de galop. Grâce à ce réseau de relais, le cavalier, qui trouvait là des chevaux frais, pouvait parcourir environ 90 km, par jour.

Une ligne économique de chemin de fer

La ligne ferroviaire de Saint-Angeau à Segonzac disposait d’une gare dans le hameau de Lanville, située à environ 500 m de la route départementale 736, reliant Aigre à .

Depuis sa mise en circulation depuis 1911, cette ligne ferroviaire d’intérêt local était surnommée « le Petit Mairat » du nom reste de l’homme politique Adrien Paul Mairat (1865-1924), conseiller départemental de

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Champagne-Mouton et député en 1906, qui avait soutenu le projet. Son tracé sinueux lui valut le surnom de « tortillard ». La ligne fut déclassée en 1949.

I. Historique de la commune

Chronologie (à l’aide de la chronologie établie par Jean-Claude Pallas)

Moyen Âge

866 : construction du château de Marcillac par Vulgrin 1er, comte d’Angoulême et de Périgord pour protéger la région des incursions normandes.

IXe siècle : Vulgrin 1er envoie sur place Robert le légiste et Ramnulfe, son gendre qu’il fait vicomte.

Fin du IXe siècle : fondation du prieuré Saint-Michel, dépendant de l’abbaye Saint-Cybard d’Angoulême

Xe siècle : Ramnulfe a trois fils : Lambert, Arnaud et Odolric. Lambert, devenu vicomte à son tour, tente d’enlever Sancia, la sœur du comte Bernard du Périgord, petit-fils de Vulgrin. Ce dernier se venge et tue Lambert ainsi que son frère Arnaud. Guillaume II Taillefer, rend alors l’honor au plus jeune des frères, Odolric.

1024 : les comtes d’Angoulême, doivent intervenir à plusieurs reprises pour maintenir leur autorité sur le château de Marcillac. L’épisode le plus célèbre étant celui d’Audoin, l’aveuglé. « Guillaume, vicomte de Marcillac et son frère, Oldolric, s’opposaient depuis longtemps dans un violent conflit à leur frère Audoin, au sujet du château de Ruffec. C’est pourquoi Guillaume IV Taillefer intervint pour qu’ils fissent la paix entre eux et lui jurassent sur le corps de saint Cybard, cette paix. Mais ils ne respectèrent pas cet accord. En effet, Guillaume et Odolric avaient fait venir à eux, Audoin, par ruse. Après qu’Audoin ait pris son repas avec eux et se soit endormi dans leur demeure, ils lui coupèrent la langue et lui crevèrent les yeux. De retour de Rome, le comte Guillaume IV décida de les punir pour ce parjure. Avec le duc d’Aquitaine, Guillaume qu’il avait fait venir, il assiégea Marcillac et ruina le château en y mettant le feu. Il laissa la vie sauve aux traitres et concéda Ruffec à Audoin. Et quelques années plus tard, sur l’ordre dudit comte, Audoin, fils de ce dernier reconstruisit Marcillac et le garda pour son usage ».

Fin de XIe siècle : les vicomtes sont dépossédés et remplacés par la famille Rancon, seigneur de Taillebourg (vassal du comte d’Angoulême).

Vers 1120 : fondation du prieuré Notre-Dame de Lanville, qui s’inscrit dans une vague importante de construction de prieurés dépendants de chanoines réguliers en pays charentais.

1130-1160 : construction de l’église Notre-Dame de Lanville.

1147- 1148 : Geoffroy III de Rancon accompagne Saint-Louis pendant l’inutile deuxième Croisade.

1178 : l’Aquitaine est anglaise, Richard Cœur de Lion invite ses vassaux à Saintes, mais Geoffroy III de Rancon ne s’y rend pas et Richard ne lui pardonne pas.

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1179 : Richard Cœur de Lion détruit les châteaux de Geoffroy III de Rancon : Pons, Gençay, Anville, Gourville, Marcillac et ensuite Taillebourg.

1194 : Marcillac est une deuxième fois détruit par Richard 1er, devenu roi d’Angleterre en 1189 durant la révolte des barons de l’Angoumois, de la Saintonge et du . Fin XIIIe siècle : Guillaume IV de Sainte Maure épouse Jeanne de Rancon. Par ces noces la famille Sainte Maure (ou Saint-Maur) obtient la seigneurie de Marcillac.

1301-1389 : la famille Craon est maîtresse de la seigneurie de Marcillac

1320 ou 1324 : La châtellenie de Marcillac est rattachée au Poitou. Cette enclave dans l’Angoumois incluait Genac (en partie), Mons et Bonneville

La guerre de Cent Ans (1337-1453) a causé d’importants dommages sur l’église Saint-Michel de Marcillac, l’église Notre-Dame de Lanville et le château de Marcillac

1392 : Guy VIII de La Rochefoucauld épouse Marguerite de Craon. La seigneurie de Marcillac passe de la maison de Craon à celle de la Rochefoucauld, qui la conserva jusqu’en 1792.

1400 : une épidémie de peste ravagea Marcillac.

1440-1560 : l’ancienne église paroissiale de Marcillac, dédiée à saint Michel fut rétablie au culte.

1445 : Jean 1er de La Rochefoucauld (1428-1472), seigneur et baron de , Montignac, Marcillac et Blanzac obtint du roi Charles VII le droit de fortifier Marcillac et d’y bâtir un château.

1468-1471 : Jean Ier de La Rochefoucauld devint comte d’Angoulême à la mort de Jean d’Orléans, « le bon comte Jean ».

Époque moderne

1517 : Marcillac devint une principauté. François 1er autorisa les aînés de la famille La Rochefoucauld à prendre le titre de « prince de Marcillac ». François II de La Rochefoucauld fut le premier prince de Marcillac (époux d’Anne de Polignac).

Les guerres de Religion (seconde moitié du XVIe siècle) entraînèrent d’importants dommages sur l’église Notre-Dame de Lanville

Fin XVIe siècle : l’église Saint-Michel était dans un tel délabrement que la paroisse fut réunie à celle de Lanville.

1619 : la grosse cloche de l’église Notre-Dame fut fondue sur place.

1625 : le prieuré de Lanville fut déclaré ruiné, à l’exception du logis du prieur.

1632 : Marcillac fut durement frappé par une épidémie. Elle dura 6 mois et fit 55 victimes.

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1652 : le prieuré de Lanville fut rattaché à la congrégation de Sainte-Geneviève du Mont à Paris, à laquelle était également soumise l’abbaye Notre-Dame de la Couronne. 1668 : Installation de la croix de chemin à Aizet.

1693 : restauration de l’église Notre-Dame de Lanville (voûtes de la nef) comme l’indique l’inscription gravée dans la nef.

1712 : L’abbé Jules Nanglard rapporte dans le Pouillé historique du diocèse d’Angoulême, que l’église Saint-Michel « n’est plus qu’une masure » à cette date.

1740 : la terre de Marcillac est unie au duché de La Rochefoucauld

Révolution française

1790 : le 5e canton du département de la Haute-Charente (actuelle Charente) a pour chef-lieu Marcillac- Lanville et regroupe les communes de La Chapelle, Ambérac, Gourville, Bonneville, Montigné, Anville, Saint-Médard, Auge et Mons.

1794 : achat des bâtiments conventuels (bâtiments agricoles et logis du prieur) comme biens nationaux par quatre citoyens : Plantevigne-Lastier, Briand, Marginière et Pérault.

1799 : il ne reste qu’une seule cloche dans le clocher de l’église de Lanville. Elle fut remplacée en 1869

Époque contemporaine

1801 : Marcillac-Lanville perdit son statut de canton et fusionna avec celui de Rouillac.

1843 Ordonnance royale obligeant les villages à éloigner les cimetières des lieux habités

1855 : épidémie de choléra à Marcillac-Lanville : 20 morts dans le village d’Aizet (130 habitants à cette époque) et 8 morts dans celui d’Ampanaud.

1862-1863 : agrandissement du bâtiment de la première mairie-école

 1867 La loi Duruy oblige les communes de 500 habitants à avoir une école de filles

1868 : installation d’une pompe au puits dit des Halles, sur la place de la Mairie.

1869 : les cloches de l’église Notre-Dame de Lanville furent fondues sous les halles

 Années 1870 crise du Phylloxéra

1872 : projet de créer une école dans le village d’Aizet car les 25 enfants du village ne viennent pas à l’école de Marcillac, trop éloignée. La construction de cette école semble être restée à l’état de projet.

1873 ou 1874 : incendie des halles. Elles ne furent pas reconstruites.

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1874 : installation d’une « station » pour les étalons du haras de Saintes. Un équipement semblable vit le jour à Rouillac en 1879).

1876 : construction d’un lavoir aux Écures.

1880 : création d’un bureau de poste

1884 loi communale obligeant chaque commune à se doter d’une mairie

1898 : construction de la mairie-école actuelle.

1901 : installation d’une bascule sur la place publique

1904 : effondrement de la façade occidentale et de la première travée de la nef de l’église Notre-Dame. Une nouvelle façade est reconstruite entre 1910 et 1912.

1911 : inauguration de la ligne de la compagnie des chemins de fer économiques de la Charente reliant Saint-Angeau à Segonzac. Cette ligne s’appelait « le Petit Mairat », du nom de son promoteur.

 1914-1918 première guerre mondiale

1922 : inscription à l’inventaire supplémentaire des Monuments historiques de l’église Notre-Dame de Lanville.

1924-1925 : la demande de rattachement du hameau d’Aizet à Aigre ne fut pas acceptée . 1925 : translation du cimetière de Lanville sur un terrain isolé situé non loin du hameau de La Grange

 1939-1945 seconde guerre mondiale

1941 : construction d’une chapelle route d’Angoulême à Niort, par l’abbé Roger Dubois, curé de Marcillac- Lanville.

1942 : l’église Notre-Dame de Lanville, le cloître et les restes de la salle capitulaire sont classés Monuments historiques.

1949 : fermeture de la ligne à voies métriques de Saint-Angeau à Segonzac

1952 : la voûte de la seconde travée de l’église prieurale Notre-Dame s’écroule. Quelques mois plus tard, la partie supérieure du mur est du croisillon sud tombe sur l’absidiole.

1964 : un reportage audiovisuel sur Notre-Dame de Lanville fut réalisé pour l’émission « Chef d’œuvre en péril », à l’initiative du curé de Marcillac, l’abbé Guy Chabot et du maire de la commune, Pierre Gadon

1968 : restauration de l’église prieurale de Lanville

1974 : concert de Johnny Hallyday sous un chapiteau devant 3500 personnes

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1980 : la troisième travée de la nef est consolidée

1984 : la voûte de la seconde travée de la nef de l’église prieurale est reconstruite

1991 : le logis du prieur et les bâtiments agricoles entourant la cour sont inscrits Monuments historiques.

1993 : le logis du prieur et les bâtiments agricoles sont achetés par la Communauté de Communes du Rouillacais.

2016 : le Club Marpren de Tusson réinvestit les dépendances du prieuré de Lanville, préservées au sud de l’église afin de proposer un espace d’hébergement (accueil des groupes, location de gîtes, halte jacquaire) et d’animer des chantiers pour les jeunes de restauration.

II. Évolution morphologique du bourg de Marcillac

Le bourg de Marcillac serait le résultat du développement d’un ensemble de population installé au Moyen Âge au pied de la motte castrale, au nord-est du bourg. André Debord2 constate que Marcillac était un burgus dès le XIIe siècle.

Le bourg résulterait du développement de deux pôles à l’époque médiévale, réunis depuis le XIXe siècle : d’une part le château et de l’autre part l’ancienne paroisse Saint-Michel, et son prieuré dépendant de l’abbaye Saint-Cybard d’Angoulême, détruite aux XVIIe-XVIIIe siècles. Parallèlement au Moyen Âge, se développaient l’ancien port de Pont-Roux à l’est qui était un lieu de péage ainsi qu’un petit bourg monastique autour du prieuré Notre-Dame de Lanville, situé à un kilomètre au nord du château de Marcillac.

Le faubourg de Saint-Michel fut réuni au bourg issu du château au XIXe siècle, ce qui explique l’étendue actuelle du bourg. Le faubourg de Pont-Roux devint un hameau, isolé.

Le bourg de Marcillac est marqué de nombreux vestiges de constructions des XVe et XVIe siècles. Elles ont dû être édifiées à la suite des dommages importants qu’avait connus le bourg, lors de la guerre de Cent Ans (1337-1453).

Ces vestiges sont localisés au sud-est et au nord de la motte castrale et dans le périmètre de l’ancien faubourg Saint-Michel.

Un ancien logis datant des XVe-XVIe siècles, a conservé une petite tour hors-œuvre abritant un escalier en vis, desservant les étages. Il est installé au sud de l’ancienne motte castrale.

Deux propriétés avec des pigeonniers, situées dans le bourg, furent construites au XVIIe siècle puis remaniés au fil des siècles suivants. Le premier se situe rue du Palan et le deuxième se trouve rue Taillefer.

Une belle demeure charentaise datant du XVIIIe siècle est construite place Plantevigne.

La transformation du bourg fut lancée à la fin du XIXe siècle et particulièrement autour de la place actuelle de la mairie-école, bâtiment public construit en 1898.

2 André Debord, La société laïque dans les pays de la Charente, Xe-XIIe siècles. Paris, Picard, 1984

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De la seconde moitié du XIXe siècle jusqu’à la première moitié du XXe siècle, l’activité économique se développa le long de l’axe principal de communication, la route nationale d’Angoulême à Niort, n° 737, déclassée en route départementale en 1872. Cette route qui prend le nom de rue Taillefer dans le bourg débute à l’entrée du bourg, en venant d’Aigre et se termine à Pontroux. Elle fut élargie et alignée à cette période.

Dans l’habitat traditionnel des bourgs, les maisons de bourg plus ou moins alignées côtoient d’anciennes fermes aux nombreuses dépendances.

On retrouve parfois la trace d’enseignes sur les façades des maisons de bourg, indiquant que le rez-de- chaussée était consacré à un commerce.

La vallée de la Charente offre une halte agréable de part et d’autre du grand pont de Pont-Roux. Ce grand pont enjambant la Charente est la limite avec la commune de La Chapelle.

Lanville

Le prieuré Notre-Dame de Lanville, fut fondé aux environs de 1120. Ce monastère possédait des terres cultivables qui attirèrent des paysans qui exploitèrent ces nouvelles terres. Ils vivaient autour de cet établissement religieux, constituant ainsi un bourg monastique. Un cimetière était installé à l’Ouest de l’église prieurale et paroissiale jusqu’en 1925. Ce hameau est marqué par de nombreux vestiges de constructions des XVIIe-XVIIIe siècles.

Au XIXe siècle, beaucoup de fermes sont construites le long de la voie de communication traversant le hameau du sud vers le nord.

III. Les activités économiques à partir du XIXe siècle et leurs traces

1. Agriculture et viticulture :

Les marais

Le géographe Jules Martin-Buchey écrivait entre 1914 et 1917 que « la vallée de L’Osme comprend des terrains d’alluvions, où réunissent admirablement les cultures maraîchères et qui sont très propices à la culture du chanvre. Le plateau qui sépare les deux vallées est également fertile, produit en abondance les différentes céréales et possède de nombreuses prairies artificielles.»3La situation géographique de Marcillac-Lanville a conditionné des activités liées à l’eau ; il semble que les habitants se soient davantage tournés vers les marais de l’Aume plutôt que vers la Charente.

Le chanvre

Les terres humides se prêtent bien à la culture du chanvre. Au XVIIe siècle, cette plante était cultivée partout en France pour sa fibre textile de bonne qualité, qui servait à la confection de solides tissus et cordages (une partie de la récolte était dirigée vers la Corderie Royale de Rochefort-sur-mer pour la fabrication des cordages de la marine royale). La graine de chènevis était également extraite et permettait de fabriquer de l’huile utilisée pour s’éclairer.

3 MARTIN-BUCHEY (J), Géographie historique et communale de la Charente, 1914-1917

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Après la récolte, il fallait rouir le chanvre en le faisant tremper au fond des cours d’eau, le sécher (dans des fours), le débarrasser de son écorce, le filer puis le tisser.

L’examen du plan cadastral relevé en 1832 montre le long de la vallée de l’Aume un parcellaire en lanières pouvant correspondre aux chènevières (plantations de chanvre).

Le terme « motte » apparaît aussi sur le plan cadastral de 1832, qui évoque sous ce terme, une terre marécageuse, entourée de fossés et favorable à la culture du chanvre.4

La culture du chanvre a été pratiquée à Marcillac-Lanville jusqu’à la fin du XIXe siècle.

La rouche

Les marais présentaient un certain intérêt grâce à la rouche, plante herbacée (roseau) qui y poussait. Elle était employée dans la composition de la litière des bestiaux ou le chauffage des fours à pain. Une fois coupée, elle était mise en javelles (gerbes). Depuis la fin de leur exploitation, les terrains ont été assainis par drainage.

Les cultures maraîchères

« Aizet (116 habitants), dans la vallée de l’Osme, [est] au centre de magnifiques exploitations maraîchères »5 rapporte Jules Martin-Buchey.

Différentes cultures maraîchères étaient pratiquées dans la vallée de l’Aume. Les oignons d’Aigre étaient réputés. La culture de la « moghette » (haricots blancs) et des pommes de terre se pratiquait également sur ces terres humides.

Dans les prairies, se pratiquait l’élevage des vaches laitières. Émile Ganachaud6 écrivait qu’il existait des prairies le long de la Charente, dont celle de Lastier où se pratiquait la « vaine pâture ». Ce droit d’usage permettait de faire paître gratuitement son bétail.

L’impact de la vigne

La carte de Cassini datant du XVIIIe siècle, indique la présence de vignes autour d’Aizet, « l’Anglois » (L’Anglée), Ampanaud et La Touche.

4 « La vallée de la Charente, Courcoury », dossier documentaire, illustré de l’Inventaire du patrimoine, Région Nouvelle Aquitaine. Repéré à www.inventaire.poitou-.fr 5 MARTIN-BUCHEY (1914-1917) 6 GANACHAUD (E), Marcillac et les environs, études locales de 1943 à 1945.

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Alcide Gauguié7, en 1865, écrivait que le sol de la commune était « légèrement montueux, est fertile en grains et surtout en vins de très bonne qualité. »

À partir des années 1870, la crise du phylloxéra bouleversa la région. A la suite de la destruction de la plus grande partie du vignoble, la polyculture se développa. On passa de 280 000 hectares de vigne en 1877, en Charente à moins de 40 000 hectares en 1893. Des prairies furent créées à la place des vignes arrachées et l’élevage des vaches laitières se développa en même temps que l’on replanta de nouveaux cépages de vigne plus résistants.

Martin-Buchey écrivait entre 1914 et 19178 : « la vigne n’a pas été reconstituée et les vignobles sont rares. Citons cependant le beau domaine de L’Anglée, qui appartient à un riche négociant de Cognac, M.

Elichagaray, et qui renferme un magnifique vignoble. »

La maison de commerce, Barnett et Elichagaray fut fondée à Cognac, en 1895. La famille Elichagaray posséda le logis de L’Anglée de 1914-1917 à 1956.

Le domaine couvrait, il y a encore quelques années vingt hectares plantés en vignes. La vigne est aujourd’hui peu présente dans le paysage de la commune dont le vignoble est placé en Fin Bois.

2. La meunerie

Les moulins à eau

La présence de nombreuses rivières a très tôt favorisé l’implantation de moulins à eau sur le territoire de la commune. Trois moulins à blé étaient alimentés par la force hydraulique de l’Auge et deux par celle de l’Aume (ou Osme).

Le moulin Guillerit

Si l’actuel moulin date du XIXe siècle, la présence d’un moulin au bord de l’Auge est attestée dès le XVIIe siècle. En 1656, un procès-verbal des biens du prieuré Notre -Dame de Lanville, fut établi à la suite de la mort du prieur François de La Rochefoucauld et mentionne les moulins banaux (deux roues) Guillerit9. Ces moulins appartenaient au prieuré et les paysans étaient contraints d’y moudre leu grain.

Au XVIIIe siècle, il est également dessiné sur la carte de Cassini.

Le bâtiment qui abritait les deux roues a été conservé mais celles-ci ont été démontées. Ce moulin est une sorte d’ « oasis rafraîchissante où l’eau ne manque jamais » selon Emile Ganachaud10.

En 1859, M. Plantevigne-Lastier, juge de paix de Rouillac était le propriétaire du moulin dont l’activité aurait cessé au début du XXe siècle.

7 GAUGUIE (A), La Charente communale illustrée, 1865 8 MARTIN-BUCHEY (1914-1917) 9 Série H14 2. Archives départementales de la Charente 10 GANACHAUD (E), Marcillac et les environs, études locales de 1943 à 1945.

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Le moulin Matard

La présence d’un moulin en aval du moulin Guillerit est attestée dès le XVIIIe siècle, sur la carte de Cassini. Faute de document suffisant, son histoire est méconnue.

Cet ancien moulin à blé a été transformé en usine de fabrication de couleurs et vernis, à partir d’ocre du Roussillon et de terres brunes du Lot-et-Garonne, vers 1896. Les propriétaires de ce patrimoine industriel étaient messieurs Guillon et Ducompex. Ils ont cessé leur activité en 1901.

Le moulin de Chanterane

Le nom actuel du moulin est Chanteraine. Faute de document, son histoire est méconnue. Dans un rapport réalisé par l’ingénieur ordinaire des Ponts et Chaussées en 1883 suite à la demande du propriétaire, M. Le Marais de l’élargissement de la vanne de décharge du moulin, un plan détaillé de celui-ci fait mention de deux roues, une utilisée pour le moulin à blé et l’autre, pour le moulin à huile.

Les moulins d’Aizet11

On trouve trace du moulin d’Aizet, sur l’Aume (ou Osme), dès la fin du XIIIe siècle. La première mention de ce moulin, en 1274, se trouve dans l’hommage rendu par Guillaume V, seigneur de Sainte-Maure en Touraine et de Marcillac-Lanville, à l’évêque d’Angoulême, Guillaume IV de Blaye. Il s’agissait d’un moulin banal, c’est-à-dire qu’il appartenait aux seigneurs de Marcillac et les paysans étaient contraints d’y moudre leur grain. Jusqu’à la Révolution Française les seigneurs en percevaient les revenus. Vers 1810-1812, le moulin est vendu à Jean Péraud.

Les recherches de M. Pallas indiquent que le moulin fonctionnait en 1832 avec deux roues désignées « moulin haut » (moulin actuel) et « moulin bas » (ruiné). Les deux emplacements apparaissent très nettement sur le plan cadastral de 1832, sur une parcelle appelée « les Reboutées ».

Le moulin aurait cessé son activité dans les années 1920-1930. La roue hydraulique a été démontée mais il reste une partie de l’engrenage.

La foire et les marchés

Alcide Gauguié, en 1865 et Jules Martin-Buchey entre 1914-1917 écrivaient à propos de Marcillac-Lanville « des foires très importantes s’y tiennent le 11 de chaque mois ».

En 1858, le conseil municipal vota pour le renvoi au lendemain pour les foires, qui tombaient un dimanche ou un jour férié. Une halle fut construite sur la place actuelle de la mairie.

11 Bulletins Histoire Pays d’Aigre, octobre 2012, n° 27 et avril 2013, n°28 (articles écrits par Jean-Claude Pallas)

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Elle est mentionnée sur le plan cadastral de 1832, par un rectangle bleu. En 1860, le conseil municipal supprima deux piliers de la halle « de manière à démarquer la mairie et la maison d’école (…). Il(s) considère (aient) qu’elles (étaient) trop grandes pour les foires et marchés (…) ».

En 1867, une demande de démolition des halles fut déposée puis la vente des matériaux mais le conseil municipal refusa, considérant qu’elles étaient encore utiles. En 1868, une pompe fut installée au puits dit des halles. En 1873, les halles furent détruites par un incendie et ne furent pas reconstruites. Une bascule fut installée en 1901 sur la place de la mairie.

Les archives indiquent que la place publique appelée place Saint-Michel, servant autrefois de champ de foire aux moutons (emplacement aussi de l’ancienne église du même nom) était en partie envahie par un mur de clôture, à moitié terminé12.

La place dite du Champ de Foire (aménagée le long de la rue Taillefer) indique une activité de foire autrefois, dans cette partie du bourg aussi.

Les commerces

Marcillac était très animé dans la première moitié du XXe siècle, grâce à une activité commerciale importante

Ces commerces se situaient principalement au centre du bourg et le long des deux voies de communication principales : la route nationale 736 d’Angoulême à Niort (déclassée en départementale en 1972) et la route départementale 19, reliant Angoulême à Aigre. Pour plus d’informations sur l’histoire des commerces, on peut se conférer à l’ouvrage édité par La Palène, Sarabandes 2010, Balade en Charente « du chanvre, du lin, des vignes… »13.

12 Archives départementales de la Charente. Série O 13 Sarabandes 2010, Balade en Charente « du chanvre, du lin, des vignes… », Edition La Palène, p.28-35

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IV. Typologie des monuments, du bâti et du patrimoine vernaculaire

1. Les principaux monuments

a. Découvertes archéologiques

Préhistoire

Bien que la commune possède peu de traces archéologiques, l’homme y est présent dès l’époque Néolithique (-5000 à -2000).

En 1886, M. Maurin14 signalait l’existence d’une éminence de forme conique, de huit mètres de hauteur et terminée par une plate-forme de 25 mètres sur 15. « Ce mamelon est entouré d’un fossé de 4 mètres environ de largeur … ». Le monticule très abrupt est situé dans le bois de La Taillette. Il croit y voir une ancienne motte castrale. S’agit-il d’une motte castrale ou d’un tumulus ? Il s’agit peut-être d’un tumulus. Au Néolithique, les hommes aménagent des nécropoles regroupant d’imposants tombeaux collectifs. Construits en pierre et recouverts d’un monticule de pierre et de terre, ce sont des tumuli. Aucunes fouilles archéologiques officielles n’ont été menées.

Toutefois, des fouilles archéologiques non officielles ont révélé des objets dont ce dernier ci-contre, non identifié et étudié.

Souvent les fouilles archéologiques permettent de retrouver près des squelettes des défunts, des objets qui les accompagnaient dans la tombe : poteries décorées comme des gobelets à boire, des coupes-a-socle servants de brûle-parfum, des vases pouvant contenir des offrandes… Le site a été fortement endommagé depuis quelques années. Il est recouvert de végétation (bois), donc peu visible. Les fossés sont en partie comblés.

Des prospections aériennes menées par le service régional de l’archéologie en Poitou-Charentes, indiquent des traces d’enclos, à fonction cultuelle ou funéraire.

Antiquité

De nombreuses traces illustrent aussi la période gallo-romaine sur l’ensemble de la commune. À proximité de la Combe de Poubareau, près du Bois de Charron, la tradition situe la villa d’Olype15 mais aucune découverte archéologique à ce jour n’a été révélée, attestant ainsi de son emplacement.

Des fragments de tegulae (tuiles plates caractéristiques de l’époque gallo-romaine) furent découverts au sud du château d’eau de Marcillac-Lanville. Patrick F. Joy émet l’hypothèse d’une présence gallo-romaine dans ce secteur16.

14 MAURIN (M), « La Taillette », BMSAHC, 1886, XXXVI 15 LEFRANCQ (P), « l’Evêque Oliba et l’énigmatique « ville d’Olype » », BMSAHC, 1973 16 JOY (P), « Histoire environnementale et archéologique de Marcillac-Lanville », Bulletin Histoires du Pays d’Aigre, octobre 2004.

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Moyen Âge (Ve siècle-XVe siècle)

Haut-Moyen Âge

La présence d’anciennes voies romaines a sans doute favorisé l’installation de nouvelles populations au Haut Moyen-Âge.

La motte castrale de La Taillette

André Debord17 y voit une motte castrale : « une très belle motte féodale, dans la basse-cour, avec traces apparentes d’un four ».

Motte ou tumulus ?18 C’est un faux débat selon Marie-Pierre Baudry, de nombreux cas attestent que le tumulus néolithique a pu être réutilisé en motte. Dans les deux cas le tertre est artificiel, façonné par apports successifs de remblais de terre dont on lit encore la stratification sur une végétation naissante au printemps. Seules des fouilles archéologiques permettraient de conclure sur la nature du tertre artificiel.

La motte castrale de Marcillac

Le premier château de Marcillac devait être une motte castrale, c’est-à-dire une levée de terre artificielle surmontée de bâtiments et d’éléments défensifs en bois. Une basse-cour ceinturée d’un talus surmonté d’une palissade accompagnait cette motte dont les vestiges n’ont pas été localisés à ce jour, faute de fouilles archéologiques. Cette basse-cour se situait peut- être à l’emplacement du bourg actuel mais cette information n’a pu être vérifiée.

Il n’y a jamais eu de fouilles archéologiques pratiquées sur ce site. Jean-Hippolyte Michon en 184419, écrivait « qu’on la prendrait pour une colline naturelle, si l’inspection du terrain ne démontrait pas qu’elle a été faite de main d’homme. Sous les broussailles qui en couvrent les flancs, on découvre à peine quelques fondements de murs à fleur de terre. » En 1954, Germain Gaborit20 écrivait « qu’il reste des terrassements considérables rappelant les vastes terrassements de la colline, portant le château de ». Malheureusement André Debord constatait en 1984 que le site a été éventré par des fouilles clandestines.

La construction du château de Marcillac est attribuée par Adémar de Chabannes21 au comte d’Angoulême vers 860-880. Sa chronique raconte comment, vers l’an 864, Vulgrin 1er, comte d’Angoulême « se dépensa dans de nombreux combats contre les Normands, et pour cette raison fit construire les châteaux de Marcillac et Matha pour en faire un retranchement contre les païens ». Aussi, Marcillac, se trouve à proximité de la Charente, au bord de laquelle a été établi un port et aménagé un gué sur le cours d’eau. Faut-il y voir une volonté de mise en défense face aux invasions ? Ce château est implanté sur un site stratégique que le pouvoir comtal avait tout intérêt à contrôler.

17 DEBORD (A), La Société laïque dans les pays de la Charente, Xe-XIIe siècles, Paris, Picard, 1984 18 BAUDRY (M.P), Châteaux romans en Poitou-Charentes, Xe-XIIe siècles, Collection Cahiers du Patrimoine, n°95, Geste Éditions, 2011 19 MICHON (J-H), Statistique monumentale de la Charente, 1844 20 GABORIT (G), « Notes sur l'architecture militaire de la fin de la période romane au XVIIème siècle », BMSAHC, 1959, 21 DE CHABANNES (A), Chronique (Chronicon) éditée par J.Chavanon, Paris, A.Picard, 1897

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b. Edifices religieux

Les deux prieurés

L’ancien prieuré de Saint-Michel

Dans le faubourg Saint-Michel, situé à extrémité sud du bourg et jouxtant le faubourg Pont-Roux, se trouvait le prieuré Saint- Michel.

Le prieuré de Marcillac dépendait de l’abbaye Saint-Cybard d’Angoulême. L’église du prieuré de Marcillac était dédiée à saint Michel. Les sources textuelles attestent son existence au XIIIe siècle. Elle fut ruinée pendant la guerre de Cent Ans. La paroisse fut rétablie de 1440 à 1560 mais l’église était dans un état de délabrement tel, qu’à la fin du XVIe siècle, la paroisse Saint-Michel fut réunie à la paroisse Saint-Maur de Lanville, e Carte de Cassini XVIII siècle distante d’un kilomètre.

L’Abbé Nanglard22 écrivait dans son ouvrage « qu’elle n’est plus qu’en masure en 1712 ». La carte de Cassini datant du XVIIIe siècle l’indique comme ruinée. Alcide Gauguié23 témoigne : « vers 1850, il n’en restait plus qu’un fragment de pierre tumulaire sur laquelle étaient taillées une lance, une épée et un écu, dénotant une origine seigneuriale ou épiscopale ». Ce vestige sculpté semble avoir été perdu. Il ne reste plus aucune trace dans le paysage de ce monument.

Le Prieuré Notre-Dame de Lanville à Marcillac-Lanville (texte élaboré à partir de l’ouvrage « Laissez-vous conter le prieuré Notre-Dame de Lanville »)

Le prieuré Notre-Dame de Lanville, dépendant de l’ordre des chanoines réguliers de Saint- Augustin fut l’un des établissements monastiques les plus prestigieux de l’Angoumois au Moyen Âge.

La fondation du prieuré vers 1120, s’inscrit dans une vague importante d’implantation canoniale en pays charentais (La Couronne, , …). Christian Gensbeitel24 précise la date exacte de fondation et le nom du fondateur du prieuré ne sont pas parvenus jusqu’à nous. La seule information sûre est que cette implantation intervient sous l’épiscopat de Girard II, évêque d’Angoulême entre 1101 et 1136.

22 Abbé NANGLARD (J), Pouillé historique du diocèse d’Angoulême, tome 2, 1894 23 GAUGUIE (A), La Charente communale illustrée, 1868 24 GENSBEITEL (C), « Laissez-vous conter », Le prieuré Notre-Dame de Lanville, Via Patrimoine, 2002

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Les communautés canoniales étaient une alternative au monachisme bénédictin. Les chanoines dits « réguliers » c’est-à-dire obéissant à la règle de Saint-Augustin, sont des clercs mais pas des moines retirés du monde. Ils manifestent une austérité et une rigueur supérieure à celle des bénédictins dans l’observance de la vie communautaire.

Un prieuré est généralement un établissement de second rang dont le responsable, le prieur, est nommé par un abbé de la maison-mère. Or chez les augustiniens, la notion de prieuré est difficile à cerner, car il en existe, comme Lanville, qui ne semblent attacher à aucune abbaye. Par contre, plusieurs établissements sont liés au prieuré de Lanville: simple église ou prieuré-cure en Angoumois, Saintonge et le Poitou (Bignac, Mons, Oradour, La Chapelle, Ébréon…).

Historique

L’église romane a été construite entre 1130 et 1160. Ce prieuré porte les stigmates des mutilations des guerres de Religion et d’aménagements successifs entre le XIIe et le XVIIIe siècle. Selon un procès-verbal de visite établi en 1636, la voûte de la nef de l’église était effondrée depuis 1625, et le prieuré est signalé en ruines à cette date, à l’exception du logis du prieur.

L’établissement ne comptait plus que l’aumônier, deux frères profès et deux novices. Au cours des années 1650, le prieuré fut rattaché à la congrégation de Sainte-Geneviève du Mont, maison qui avait réformé la règle augustinienne et à laquelle était également soumise l’abbaye Notre-Dame de La Couronne. Elle comptait alors six religieux. Une plaque gravée, actuellement visible à l’extrémité orientale de la nef et datée de 1693, fait état des travaux de restauration de l’église, « ce qui montre que l’entreprise de rénovation s’est prolongée tout au long du XVIIe siècle »25. Durant la Révolution, le prieuré fut fermé en 1791.

Dès 1846, des travaux de réparation et de consolidation des murs gouttereaux, suite à l’effondrement de la voûte de la nef, furent entrepris. En 1904, la façade occidentale s’effondra, en raison de l’instabilité du sol. La façade a été reconstruite entre 1910 et 1912, plus en retrait, amputant définitivement la nef d’une demi- travée. En 1939, la nef était encore à l’abandon et menaçait ruine. En 1952, c’était au tour de la voûte de la seconde travée de s’effondrer bien que l’église avait été classée Monument historique en 1942. La remise en valeur du site engagée par l’Abbé Chabot dans les années 1960, fut poursuivie grâce à l’intervention du Club Marpen dans les années 1970, puis par l’association des Amis de l’Abbatiale de Lanville.

25 GENSBEILTEL (C), 2002

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Les travaux entrepris par le service des Monuments historiques depuis 1980, ont permis de restaurer intégralement l’église, de contribuer à mieux connaître l’édifice et à le mettre en valeur.

Les bâtiments monastiques construits au sud-ouest de l’église furent restaurés par la Communauté de Communes du Rouillacais, qui en est le propriétaire depuis 1993.

L’église prieurale

Cette église prieurale est un des grands monuments romans de l’Angoumois.

Architecture

Dédiée à Notre-Dame, l’église était partagée entre la communauté religieuse et la paroisse sous le vocable de Saint-Maur. On ne sait précisément si la paroisse utilisait une partie de la nef ou le bras méridional du transept. La porte située sur la façade sud du transept, par laquelle on entre dans l’église aujourd’hui, a peut-être été percée à la fin du Moyen Âge, pour l’usage paroissial.

L’église romane présente un plan en croix latine formé d’une nef longue et étroite (30 m à l’origine) divisée initialement en trois travées et recoupée par un transept ample couvert à sa croisée d’une coupole sur pendentifs. Le sanctuaire hémicirculaire achève l’édifice à l’est.

Le chevet et le transept de l’église ont été probablement construits en premiers, en bel appareil de pierre de taille. La vaste abside est rythmée d’arcades dans l’esprit de la cathédrale d’Angoulême. Une succession de grands arcs portés par des colonnes engagées englobent les baies largement ébrasées et dotées de colonnettes.

Le décor sculpté est présent sur la plupart des chapiteaux des arcades et les colonnettes des baies du chevet. « Un grand nombre de corbeilles sont tapissées d’un décor végétal dense et foisonnant, fait de tiges entrecroisées qui se prolongent par un grand nombre de feuilles en demi-palmette. Dans certains cas ces feuillages sont peuplés de personnages, ou de petits masques (…) ».

Les corbeilles sont peuplées d’enchevêtrements d’animaux, de personnages, de monstres et même de lions retournés (petit chapiteau à l’amorce de la première arcature de l’abside). « Ces thèmes sont courants dans les pays de la Charente et offrent un traitement caractéristique du courant issu du grand chantier angoumoisin de la cathédrale à partir des années 1120 ».

Les bras du transept de longueur inégale s’ouvrent à l’est sur des absidioles. La croisée du transept est surmontée d’une coupole sur pendentifs, qui porte le clocher carré d’un seul niveau. Elle ne paraît pas avoir été remaniée. « Le choix de ce type de coupole, associée à une grande abside et des bras de transept de même largeur que la nef, a contribué à créer une volumétrie très ample, et un effet spatial d’une grande monumentalité (…) Là aussi, l’esprit de la cathédrale d’Angoulême et des grands édifices à coupoles est nettement perceptible. »

Les chapiteaux des piliers de la croisée du transept sont reliés par des segments de frises épousant les ressauts. Les corbeilles

19 des piles orientales sont de même facture que celles de l’abside, avec un décor exclusivement végétal. En revanche, les deux piliers occidentaux se distinguent.

Les piliers nord-ouest, dont certains chapiteaux ont été remplacés par des blocs non épannelés, juxtaposent des formes végétales et des motifs figurés qui occupent le retour du pilier du côté de la nef. Ces motifs figurés regroupent un atlante, c’est-à-dire une personne plus ou moins accroupie, les bras levés qui porte sur ses épaules un élément d’architecture, ici une corniche et des quadrupèdes sculptés dans des positions acrobatiques, associés à des oiseaux.

La série de chapiteaux du pilier sud-ouest rompt avec l’esthétique de la sculpture du chevet pour introduire des chapiteaux de style corinthien. « La découpe très nette des feuilles et leur caractère répétitif suggèrent sinon une datation un peu plus tardive, du moins une rupture stylistique (…) ».

Le chantier a peut-être été simplement interrompu avant la construction de la coupole et de la nef. D’autres éléments plaident plus pour une continuité dans la construction : pas de rupture nette dans les maçonneries entre la nef et le transept.

Les voûtes de la nef sont le fruit de plusieurs reconstructions et réparations successives, jusqu’à la construction des croisées d’ogives au XVIIe siècle. Les supports qui articulent les murs gouttereaux de la nef sont de simples colonnes engagées sur dosserets, sans dispositif d’arcades. Ils sont complétés à l’extérieur par des contreforts plats. Le pendage actuel du mur méridional témoigne de la mauvaise maîtrise des poussées.

Quel était le type de voûtement de la nef au XIIe siècle ? Voûte en berceau, file de coupoles ou croisées d’ogive ? Le débat n’a pu être tranché.

Jean George26 comparait cette église avec l’église abbatiale de La Couronne, et la présence à cet endroit de voûtes d’ogives bombées, de type Angevin. Or, rien ne permet de dater aussi tardivement la nef de Lanville. Les supports n’ont pas été conçus pour s’adapter à des croisées d’ogives. Pierre Dubourg-Noves pense par contre qu’une file de coupoles a pu être installée27. Christian Gensbeitel28 nuance ces propos. Il émet l’hypothèse que l’intention du départ était peut-être d’installer une voûte en berceau. Les bâtisseurs y renoncèrent, sans trouver de solution immédiate au problème de solidité des murs pour ce mode de voûtement, sur une telle portée. Les croisées d’ogives n’auraient été construites qu’à une époque où les nervures s’étaient suffisamment affinées pour que les branches d’ogives puissent être assises directement sur les chapiteaux romans.

Le motif corinthien des chapiteaux du pilier sud-ouest de la croisée du transept a été imité sur les chapiteaux des fenêtres de la nef, mais « exprimé de façon médiocre, en très faible relief, avec des contours dépourvus de fermeté ». La corbeille placée en vis-à-vis est ornée d’un jeu de gaufrures en nids d’abeille, et les suivantes sont lisses avec de simples boutons végétaux dans les angles.

26 GEORGE (J), Les église de France : Charente, 1933 27 DUBOURG-NOVES (P), « Quelques réflexions sur les églises à coupoles su diocèse d’Angoulême et de Saintes », Bulletin de la Société des Antiquaires de l’Ouest, 4e série, t XV, 1980. 28 GENSBEITEL (C), Le prieuré Notre-Dame de Lanville, « Laissez-vous conter », Via Patrimoine, 2002

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Les murs gouttereaux de la nef, d’une extrême sobriété, étaient en accord avec la façade occidentale disparue. Les photographies anciennes nous montrent que le traitement de la baie axiale était identique avec celui des fenêtres latérales.

Les vitraux actuels de l’église ont été réalisés par Coline Favre (Atelier de Tusson) en 1986. Ils redonnent une belle luminosité colorée aux espaces intérieurs.

Les peintures murales

Des fragments ou vestiges de décors peints ont été remis en valeur dans le chevet, le transept et la nef, après leur découverte lors des travaux entrepris par le service des Monuments Historiques, à partir de 1980.

Dans le chevet, une litre funéraire est visible par endroits au-dessus d’un décor de faux lambris et de rinceaux (XVIIe siècle ?), sous les ébrasements de fenêtres. Une litre est une bande noire ponctuée de blasons, qui était peinte sur les murs de l’église, lors des funérailles soit du fondateur de l’église soit du seigneur haut justicier du lieu.

Les peintures du transept sud peuvent dater de la fin du XVe ou du début du XVIe siècle. Le traitement des plis des vêtements des personnages, les caractères des inscriptions gothiques et la présence sur les fonds de motifs répétitifs de fleurons sont caractéristiques de cette période. Dans l’absidiole, on devine à peine une scène qui représente peut-être des pèlerins sur un fond damassé (un décor de fleur). À gauche de celle-ci, se développe une scène avec deux personnages. Une femme se tient en retrait et à droite, un homme vêtu d’un manteau d’apparat et tenant une épée. Les deux personnages sont nimbés, ils portent une auréole sur la tête. Trois phylactères (moyen graphique en illustration pour attribuer des paroles aux personnages) portent des noms en caractères gothiques (S. Noemis ? Sanctonis ? S. Andreas ?), difficiles à identifier.

Sur le mur sud de la nef, une autre figure bien conservée. Il s’agit de la partie supérieure d’un personnage assis sur un fond vert et marron, dans un cadre en forme d’arc en accolade sommé d’une croix et encadrée par des pinacles et un décor de rinceaux. Le personnage en habit bleu, semble être une femme avec une chevelure brune épaisse. Au-dessus du cadre, on lit des fragments d’une inscription « PRIES » et plus loin la lettre isolée. Christian Gensbeitel pense qu’il s’agit d’un prieur, auquel cas le personnage serait masculin. Il date cette peinture du milieu ou vers la fin du XVIe siècle.

Ce décor se poursuit dans la nef par un faux lambris que l’on retrouve aussi sur le mur nord. Les instruments du martyre (le cheval de bois, les fouets…) sont représentés de façon naïve selon Christian Gensbeitel.

Extérieur

En 1903, la façade occidentale s’effondra en raison de l’instabilité du sol. Il s’agissait d’une façade romane, avec une division tripartite, assez classique par des colonnes-contreforts. Le portail à trois voussures est encadré par des arcades aveugles développées sur deux niveaux. La travée centrale su second niveau était occupée par une baie en arc en plein cintre. Un troisième niveau existait à l’origine mais qui a été

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tronqué peut-être à l’occasion d’un des accidents survenus à la voûte (façade en pignon à l’origine). Le décor y était discret, subordonné aux chapiteaux et aux bandeaux. Sa construction, selon Christian Gensbeitel, pourrait avoir eu lieu vers le milieu du XIIe siècle et même un peu au-delà. Son esthétisme relevait de la transition vers le gothique de la seconde moitié du XIIe siècle. On peut faire un parallèle avec la façade occidentale de l’abbaye de Châtres (située à côté de Cognac).

Une nouvelle façade fut reconstruite, en retrait de 8 m par rapport à la précédente.

La partie orientale de l’église était à l’origine plus basse que la nef. Elle a été rehaussée de près de deux mètres dans un but défensif. Sur la façade sud du transept, on voit nettement les traces du pignon roman. Deux bretèches sur consoles, pour flanquer verticalement les murs, ont été aménagées. Le même dispositif existait au-dessus de la fenêtre d’axe de l’abside, mais seules les consoles sont préservées. De grandes ouvertures rectangulaires s’ouvrent sur le pourtour de l’abside tandis que le mur sud du transept a conservé deux archères cruciformes et un orifice pour le tir d’armes à feu, que l’on retrouve aussi sur les bretèches. Ce type de baie ouverte dans un mur pour le tir peut dater du XVe siècle, dans le sillage de la guerre de Cents Ans, soit à l’époque des guerres de Religion (seconde moitié du XVIe siècle). Les deux grandes baies gothiques qui s’ouvrent au sud du transept ont été certainement réalisées au début du XIVe siècle, dans une volonté de mieux éclairer le chœur des religieux ou bien pour permettre à l’église paroissiale de s’installer dans le croisillon sud du transept29.

L’abside présente à l’extérieur une décoration relativement sobre, en contraste avec son intérieur plus chargé. Elle est seulement scandée par des contreforts, qui séparent les baies en plein cintre, entourées de colonnettes. Le décor touche les modillons de la corniche (sorte de de corbeaux ornés, qui représentent souvent des figures humaines, des animaux et monstres du bestiaire roman), les chapiteaux et les frises d’archivoltes des baies.

29 GENSBEILTEL (C), 2002

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Vingt-huit inscriptions funéraires sont gravées sur les pierres du parement extérieur de l’abside de l’église. Elles datent pour la plupart du XIIe ou XIIIe siècle. Il s’agit d’épitaphes de chanoines, dont les noms sont plus ou moins lisibles : Gérald et Aimeri « Rapace », Robert Jordan ou Arnaud d’Angers, qui devaient faire partie de la première communauté lors de l’édification du monastère.

Les bâtiments conventuels

Ces bâtiments étaient réservés à la vie quotidienne des religieux : cloître, dortoirs, réfectoire ou étaient liés à l’économie du prieuré. La période médiévale du prieuré est peu documentée, on connaît mieux les aléas de son histoire à l’époque moderne. Une gravure du début du XVIIIe siècle, exécutée à la demande de la congrégation de Sainte-Geneviève du Mont, présente une perspective cavalière du prieuré, avant sa ruine.

Les bâtiments monastiques forment un ensemble important au nord de l’église.

Le cloître gothique

Seuls les vestiges gothiques sont encore en place. Il s’agissait d’un cloître avec une galerie de circulation avec des arcades légèrement brisées, entouré de trois ou quatre bâtiments, à deux niveaux. Le premier niveau daterait de la fin du Moyen Âge et le deuxième niveau a été ajouté à l’époque classique, plus conforme au goût de l’époque. Ce sont les éléments les plus anciens qui ont été épargnés.

De la reconstruction moderne peu d’éléments ont subsisté. On observe seulement une cheminée datant du XVIIIe siècle, qui reste accrochée contre le mur nord du transept, à l’étage de l’ancienne aile orientale.

De l’ancien cloître, dont le plan était carré, les arrachements de croisées d’ogives de la galerie sud sont encore visibles le long du mur nord de la nef de l’église. Les croisées d’ogives retombées sur des nervures prismatiques et le décor sculpté très raffiné sont caractéristiques du gothique flamboyant. Ils permettent de dater la construction du cloître de la fin du XVe siècle ou du début du XVIe siècle. Sur les culs-de-lampe, consoles en encorbellement servant à supporter une base de colonne, on identifie de moins en moins bien des végétaux naturalistes peuplés d’escargots et de masques. Ils sont de la même veine que les sculptures que l’on retrouve dans la tour Marguerite du château des Valois d’Angoulême.

Un petit moine tenant un chapelet était installé sur le départ d’une nervure de croisée d’ogives du cloître. Il est tombé de son emplacement et est conservé à l’abbaye de Saint-Amant de Boixe.

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Photo Anaël Vignet Des élévations de la salle capitulaire ont été préservées. C’est un lieu important de la vie monastique. Tous les chanoines s’y réunissent chaque matin et un chapitre de la Règle de saint Augustin est lu et commenté (d’où le nom de la salle), avant que le travail quotidien ne soit réparti. La façade occidentale, communiquant avec le cloître est presque complète. Elle comprend une porte en anse de panier surmontée d’une arcade.

Cette travée est encadrée par deux arcs, qui accueillaient d’anciennes baies. Ce schéma tripartite correspond à la tradition des salles capitulaires médiévales. La salle était aussi couverte de croisées d’ogives retombant au centre sur des piliers et sur les culs-de-lampe le long des murs.

Sur la gravure (p.17), plus au nord encore des dépendances, parmi lesquelles on identifie deux pigeonniers, sont séparées de l’ensemble conventuel par une cour. Ces constructions à vocation agricole ont disparu comme le jardin à la française aménagé à l’est. Des vestiges ont été dégagés à l’ouest de la façade de l’église, lors de travaux réalisés en 1970. On y a découvert la structure d’un ancien four à pain dont le plan en abside s’ouvrant sur une pièce voûtée en sous-sol est encore visible parmi les ruines.

De nombreux éléments sculptés sont conservés en dehors du site du prieuré.

En 1866, M. Delalande30, propriétaire des ruines du cloître du prieuré de Lanville, fait don de huit clés de voûte, datant des XVe-XVIe siècles, à la Société Archéologique et Historique de la Charente. Une tête sculptée est conservée à l’abbaye de Saint-Amant de Boixe.

Photo Anäel Vignet

Des bâtiments du prieuré remis en valeur

Au sud de l’église de nouveaux bâtiments monastiques furent construits aux XVIIe- XVIIIe siècles, lors de la reprise du prieuré par l’ordre de sainte Geneviève. Les trois ailes disposées en U demeurent les seuls témoins encore conservés dans leur intégralité. Restaurés dans les années 1990 par la Communauté de Communes du Rouillacais, ils accueillent depuis 2015, le Club Marpen. Deux ailes construites en moellons, se faisant face, entourent une grande maison, de style charentais que l’on retrouve au XVIIIe ou XIXe siècle (elle n’est pas dessinée sur la gravure du XVIIIe siècle), qui servait peut- être de logis au prieur.

30 GIGON (C), BSAHC, 1866, p. XXVIII-XXX ; BIAIS (E), Catalogue du Musée Archéologique d’Angoulême, 1914, p.51-52

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L’aile sud pourrait dater du XVIIe ou XVIIIe siècle, servant à l’origine de grange liée à la culture de la vigne. Le prieur (prieur commendataire, nommé par le roi, bénéficiait d’avantages liés à sa charge, sans en assurer une présence permanente) avait des terres et des revenus grâce à la vigne et des moulins comme le moulin de Guillerie, cités dans les textes du XVIIe siècle.

Trois fenêtres, légèrement brisées, présentent à l’intérieur une pierre de vendange dont une pente est aménagée à l’intérieur du bâtiment, pour faire tomber le raisin de la vendange dans le pressoir, installé autrefois en dessous. Une date « 1588 ou 1688 » est gravée sur l’une des arrêtes taillées en biseau de l’encadrement chanfreiné d’une baie en arc brisé.

Des marques de tâcherons c’est-à-dire des traces dans la pierre pour marquer le travail des artisans, sont également visibles.

L’aile nord a une construction moins homogène que celle qui lui fait face. Sa construction pourrait dater du XVIIe ou du XVIIIe siècle. Elle est composée de deux bâtiments. Le bâtiment oriental, plus éloigné du logis, a une architecture similaire à son vis-à-vis.

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En revanche, le bâtiment occidental, qui touche le logis sur son flanc nord présente une construction plus ancienne. Ce bâtiment est plus court mais plus haut et plus large que l’autre bâtiment construit dans son prolongement. Sa façade sud, sur cour, est rythmée par trois travées et se développe sur deux niveaux, plus une cave. Une demi-croisée, avec un appui saillant et mouluré, caractéristique des XVe et XVIe siècles, est présente à gauche de la façade sud.

La façade nord est marquée par une porte en plein cintre, à claveaux étroits qui jouxte une petite baie surmontée d’un linteau monolithe échancré, caractéristique du XIIe siècle. Christian Gensbeitel31 pense qu’il pourrait s’agir de l’ancien logis du prieur évoqué à plusieurs reprises dans les textes du XVIIe siècle32, qui fut intégré lors des reconstructions de cette période. Un puits a été conservé dans la cave voûtée en berceau brisé.

La façade orientale de la maison charentaise est en moellons. Elle est divisée en cinq travées, sur deux niveaux. L’accès se fait par un escalier droit en pierre. La corniche présente des traces d’un enduit ocre. Christian Gensbeitel date cette construction du XVIIe ou du XVIIIe siècle.

La gravure du XVIIIe siècle ne dessine pas ce bâtiment ce qui laisse penser qu’il fut édifié dans le courant du XVIIIe siècle.

À l’arrière de la maison, des bassins furent aménagés, en contre-bas de la terrasse. Ils étaient liés à la source Saint-Maur, qui se trouvait au nord-ouest du prieuré. Ils ont été restaurés lors de chantiers de jeunes organisés par le Club Marpen, en 2015.

31 GENSBEITEL (C), Le prieuré Notre-Dame de Lanville, « Laissez-vous conter », Via Patrimoine, 2002 32 Archives départementales de la Charente, Série H, XIV-2, 1670

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c. Logis et châteaux

Le château de Marcillac

Cette forteresse est un des plus anciens sites fortifiés médiévaux face à la frontière saintongeaise. À ce jour, le seul vestige visible est une motte castrale, recouverte d’une végétation arbustive vivace, marquant le paysage du bourg de Marcillac-Lanville.

Sous l’ancien régime, le fief dépendait de l’évêché et de l’abbaye de Saint-Cybard d’Angoulême. Le château-fort de Marcillac fut bâti en 866 par le comte d’Angoulême, Vulgrin 1er, fondateur de la dynastie des Taillefer (dynastie qui régna sur l’Angoumois jusqu’en 1220). C’est à lui que Charles le Chauve avait confié le gouvernement de l’Angoumois, de la Saintonge et du Périgord, dans le but de stopper les invasions normandes. À la même époque, Vulgrin 1er qui disposait du château de Bouteville, décida de construire aussi celui de Matha. Les trois forteresses demeurèrent sous l’autorité des comtes d’Angoulême jusqu’au XIIIe siècle.

Carte de Cassini XVIIIe siècle

Le comté de l’Angoumois fut administré par des vicomtes, subordonnés du comte, susceptibles en son absence de le remplacer, jusqu’à la fin du XIe siècle. Dès sa fondation, Vulgrin 1er confia le château de Marcillac à son gendre Ramnulfe (ou Rannoux), avec la charge de vicomte.

Les comtes Taillefer durent intervenir à plusieurs reprises pour maintenir leur autorité sur le château. L’épisode le plus célèbre étant celui d’Hilduin (ou Audouin) l’Aveuglé en 1024. Guillaume, vicomte de Marcillac et son frère Odolric s’opposaient alors depuis longtemps dans un violent conflit à leur frère Hilduin, au sujet du château de Ruffec. Ce conflit se termina par la mutilation d’Hilduin par ses frères afin de récupérer Ruffec (cf. p.7)33. Face à ce crime, Guillaume IV, comte d’Angoulême assiégea Marcillac et brûla la place forte. Il châtia les deux coupables en les privant de leurs revenus appelés « bénéfices » et confia Ruffec à Hildiun l’Aveuglé. Marcillac resta par la suite aux mains des comtes Taillefer alors que Ruffec revenait aux descendants d’Hilduin.

Avant 1050, la fonction de vicomte est supprimée et le château confié à la famille Rancon, seigneur de Taillebourg et vassal du comte d’Angoulême. En 1178, l’Aquitaine alors anglaise, le prince d’Angleterre, le futur Richard Cœur de Lion invita ses vassaux à Saintes. Geoffroy III de Rancon ne s’y rendit pas. En 1179, Richard Cœur de Lion détruisit en représailles les châteaux de la famille Rancon dont Marcillac, Gourville et Anville... En 1194, Marcillac fut une autre fois détruit. À la fin du XIIIe siècle, le château appartenait à la famille de Sainte Maure puis à la famille Craon. Le château fut une nouvelle fois ruiné pendant la guerre de Cents Ans (1337-1453) avant d’être reconstruit par Jean de La Rochefoucauld, avec l’accord de Charles VII au XVe siècle. Marcillac était à cette même époque une enclave du Poitou en Angoumois (comme Lanville, Mons, Bonneville et Genac en partie). La seigneurie de Marcillac fut la propriété de la famille La Rochefoucauld de 1389 à 1792 et devint une principauté à partir de 1517. Les aînés de la famille de La Rochefoucauld portaient en effet le titre de prince de Marcillac, privilège accordé par le roi de France, François 1er.

33 Adémar de Chabannes, Chronique, Livre III, §60, traduction Y. CHAUVIN et G. PON, 2003.

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Au XVIIIe siècle, le château est signalé ruiné sur la carte de Cassini.

L’ancien logis du bourg de Marcillac

Ce logis situé à 50m, au sud de l’ancienne motte castrale a subi de multiples remaniements depuis sa construction à la fin du XVe ou début du XVIe siècle.

Une tour carrée hors-œuvre abritant un escalier en vis, datant de cette époque est encore visible. Une ancienne demi-croisée a été conservée sur la façade nord du logis.

À l’étage, l’une des fenêtres ouvrant sur la façade sud du logis présente des coussièges (des bancs de pierre aménagés dans l’embrasure intérieure de la fenêtre). Une cheminée à du XVIIe siècle est toujours en place à l’étage. Le logis fut remanié au cours du XVIIIe siècle, sa toiture fut abaissée, les ouvertures de la façade sud élargies, surmontées d’un arc de décharge. Un portail date de cette période. Il présente une date gravée « 1753 », sur la clef de l’arc en anse de panier de la porte cochère.

Un ensemble de bâtiments agricoles sont liés à ce logis présentant des éléments de bâti pouvant dater du XVIIIe siècle.

Nous ignorons le commanditaire de la construction de ce logis. Etait-ce la famille de la Rochefoucauld ou l’un des nobles à charge ? En effet, selon André Debord, Marcillac a occupé une place importante, au Moyen Âge, sur le plan civil. Le territoire était le siège d’une viguerie, c’est-à-dire un tribunal judiciaire comme à Saint-Genis d’. Un viguier était un subordonné du comte pour la justice courante, l’ancêtre du juge de paix. Un prévôt chargé d’administrer, juger et percevoir les taxes était également présent. Cet ensemble de bâtiments est partagé actuellement entre quatre propriétaires.

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Le logis de l’Anglée

Les archives les plus anciennes remontent au XVIIe siècle. Le domaine couvrait, il y a encore quelques années, 60 hectares dont 20 hectares plantés en vignes.

Entre de 1677 à 1710, le logis appartenait à la famille Arnaud, dont les membres avaient le titre d’écuyers. Jules Martin-Buchey34 nous révèle qu’« une enquête du roi menée en 1696-1705, pour rechercher les faux nobles va montrer que Louis Arnauld a menti sur son titre. Il écope d’une amende pour usurpation de qualité de noble et deux faux contrats de mariage. Ce fut la perte de la famille qui vécut dans la misère ».

En 1714, François Raymond était le propriétaire du logis. En 1789, le domaine appartenait à Jean-Charles César de Lestang, chevalier de l’ordre royal militaire de Saint-Louis, brigadier des gardes du corps du roi et capitaine de cavalerie.

Jean André (1805-1878), notaire d’Aigre et homme politique français, fut également propriétaire du logis. Il fut député de la Charente en 1849, puis de 1852 à 1870. En 1871, il devint sénateur bonapartiste de la Seine et termina sa carrière, en tant que sénateur de la Charente (1876-1878). Entre 1914 et 1917, le domaine appartint à un riche négociant de Cognac, M. Elichagaray puis à M. Texier de 1956 à 1966 et à M. Matard, de 1967 à 1972. Depuis 1996, il est la propriété de Chris Ford.

La société de négoce en eaux-de-vie de M. Elichagaray prit le nom de Barnett et Elichagaray en 1895. Ce domaine viticole fit figure d’exception à cette époque sur la commune de Marcillac-Lanville où « la vigne n’a pas été reconstituée et les vignobles sont rares »35.

Le logis est mentionné sur la Carte de Cassini sous le nom « Langlois ». Sur le plan cadastral de 1832, le logis figure, mais on constate que le plan des bâtiments a beaucoup évolué depuis cette date. Compte- tenu de l’architecture des constructions, on peut les dater de la seconde moitié du XIXe siècle.

Le domaine est actuellement délimité de murs sur deux côtés. De nombreux bâtiments prennent place à l’intérieur de l’enceinte. Deux immenses granges sont installées de part et d’autre de l’entrée actuelle, réservée à l’usage agricole.

34 MARTIN-BUCHEY (J), Géographie historique et communale de la Charente, 1914-1917 35 MARTIN-BUCHEY (J), Géographie historique et communale de la Charente, 1914-1917

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Une de ces granges abritait autrefois des cuviers puis elle servit d’étables et de lieu de stockage lorsque l’activité principale du domaine était la culture de la pomme de terre.

Deux bâtiments installés parallèlement au sud des granges étaient utilisés pour le logement des employés. Quatre familles pouvaient être logées dans chacun des bâtiments.

Perpendiculairement à la route, à l’ouest des granges, se trouvait une distillerie qui a conservé un alambic. À l’arrière de ce bâtiment se trouve encore les réserves d’eau, nécessaire au circuit de refroidissement de l’alambic et une ancienne serre. À l’est des granges, un bâtiment dispose encore d’une cheminée évoquant son ancienne fonction. Il s’agissait de la forge utilisée par le maréchal ferrant.

Une grille le long de la route, au nord de la propriété, est surmontée de l’inscription « Langlée ».

La maison de maître située au centre de la propriété est une imposante demeure de plan rectangulaire, couverte d’ardoises. Elle présente une façade qui se déploie sur deux étages, surmontés d’un comble éclairé par trois lucarnes.

À l’origine, deux entrées réservées aux propriétaires et à leurs hôtes desservaient la propriété grâce à deux allées cavalières bordées d’arbres, des platanes pour l’une et des marronniers pour l’autre. La demeure centrale est entourée d’un parc arboré.

Après avoir franchi un petit pont, au sud-est de la demeure, on accède à un étang entouré d’arbres. Des canaux alimentés par l’Osme, formant un quadrilatère dans le parc, étaient déjà mentionnés sur le plan cadastral en 1832. Sur ce réseau hydraulique furent aménagés un lavoir et un vivier.

Un pigeonnier se situe au sud-est de la propriété. Actuellement il ne fait plus partie du domaine de Langlée. Ce pigeonnier à pied circulaire fut construit au début du XXe siècle. La porte en arc en plein cintre a conservé sur la clef, la date « 1909 ». Il est entouré d’une randière ou larmier, boudin protégeant la plage des pigeons contre les prédateurs. L’ensemble est couronné d’un crénelage.

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c. Bâtiments publics

La première mairie-école

La commune fut dotée d’une école publique, dès 1832. Ces bâtiments situés sur la place publique, au centre du bourg, parallèlement à la route n°19, accueillaient une école primaire de garçons ainsi qu’une mairie.

En 1862-1863, l’école des garçons fut agrandie. Elle accueillait au rez-de-chaussée la classe et à l’étage, la mairie. À gauche de ce bâtiment était installé le logement de l’instituteur. Un plan dessiné en 1896, extrait des Archives départementales de la Charente36, nous permet d’imaginer l’architecture de ce bâtiment aujourd’hui disparu.

En 1867, le conseil municipal installa une école de filles dans le bâtiment servant autrefois de logement à l’instituteur.

Le conseil municipal admit en 1872 que l’école des filles nécessitait un agrandissement mais fit aussi savoir que la commune n’avait pas les moyens financiers nécessaires pour le réaliser. Le préfet demanda que la commune propose un vrai projet d’école rapidement, mais la situation n’évolua pas pendant 22 ans. À partir de 1887, la commune acheta des maisons situées à l’est de l’école des garçons, pour les démolir et y installer l’école des filles et la cour des garçons. Les garçons n’avaient pas de cour, les récréations avaient lieu sur la place, ce qui exposait les enfants à « des dangers constants ». La cour des filles était trop exigüe et malsaine, les préaux manquaient pour abriter les enfants contre la pluie et le froid. La salle de la mairie était d’un accès difficile. En 1896, ce projet fut abandonné et le conseil municipal proposa un autre projet car « les écoles étaient installées de façon défectueuses ».

Le maire acquit la maison et le clos de M. Roby, ancien négociant, installés sur la place publique, perpendiculairement à la route n°19, pour accueillir une double école, les logements des instituteurs et la mairie. En 1897, ce projet généra une pétition de certains habitants qui pensaient que le terrain choisi pour la construction des écoles était « humide et insalubre où l’eau croupit même en été » et que le projet était trop onéreux pour « une commune ruinée par la crise du phylloxéra, accablée d’impôts ». Ils préféraient le précédent projet.

La mairie-école construite en 1898

Le ministère de l’instruction publique ne tint pas compte de la pétition et la construction de la mairie-école débuta en 1898, d’après les plans de l’architecte André Lavaud37, originaire de Jarnac. L’entrepreneur Caillaud, originaire de la commune se chargea de la construction. Son nom est inscrit au rez-de-chaussée du pavillon central. Il ne s’agissait pas d’une construction neuve dans son ensemble car on sait qu’un étage fut ajouté au pavillon central.

Au XIXe siècle, l’avantage de construire une mairie-école est à la fois économique et pratique. C’est pourquoi c’est le modèle le plus répandu dans le milieu rural.

La mairie fut installée dans le pavillon central, au 1er étage et au-dessus d’un logement. La façade principale, ouverte sur la place, est rythmée par trois travées. L’accès au bâtiment se fait par un escalier à deux volées. La travée centrale compte, au 1er étage, une porte fenêtre surmontée d’un arc segmentaire s’ouvrant sur un balcon, agrémenté de ferronnerie. Deux ailes latérales, plus basses entourent le pavillon

36 Série O, archives départementales de la Charente 37 André Lavaud participa à la construction de l’école de Gondeville, de 1902 à 1907 et au projet de mairie-école de en 1913.

31 central. Elles sont réservées aux 4 classes. Les garçons étaient installés à gauche et les filles à droite. Il semble que les classes ne pouvaient accueillir que 35 élèves maximum. L’école accueillait à sa construction 130 élèves. Les façades des deux ailes latérales similaires sont sobres. Elles sont rythmées par de larges fenêtres. Les encadrements des baies étaient en pierre d’Angoulême. Les marches et les paliers étaient construits en pierre de Vilhonneur. Les murs furent appareillés en moellons de calcaire liés à la chaux grasse d’Échoisy puis recouverts d’un crépi.

Les cours, situées à l’arrière des bâtiments, étaient séparées par le préau des garçons et un mur, disparus aujourd’hui.

Les cimetières

Le cimetière le plus ancien connu se trouvait au chevet de l’église prieurale de Lanville créé peut-être dès la fondation du prieuré, au XIIe siècle. C’est à la fin du XVIe siècle que l’église de Lanville devint l’église paroissiale, à la place de l’église Saint-Michel détruite dans le bourg de Marcillac.

Existait-il un cimetière autour de l’église Saint-Michel ? Seul un diagnostic archéologique pourrait le confirmer.

Le cimetière de Lanville, au sud du chevet de l’église, resta en usage jusqu’au début du XXe siècle. En 1892, les noyers et pommiers plantés dans le cimetière furent coupés et vendus.

En 2011, lors de travaux d’enfouissement de réseaux électriques, un diagnostic archéologique a été prescrit par le Service régional d’Archéologie, à l’est du chevet de l’église de Lanville à l’emplacement de l’ancien cimetière. Onze tranchées ont été réalisées, d’une profondeur d’1m 20. Sous les niveaux très récents de terre (20 à 80 cm) d’importantes couches de remblais présentant des ossements humains ont été mises en évidence. Dix sépultures furent identifiées. Aucune datation ne peut être proposée avec certitude. Il est probable que ces inhumations remontent au XVIIe et XVIIIe siècle38.

38 ROCQUE (G) et SICARD (S), « Marcillac-Lanville », Bilan scientifique des opérations autorisées SRA Poitou- Charentes, 2011

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La translation du cimetière depuis le prieuré de Lanville à son emplacement actuel est tardive. Elle eut lieu seulement en 1925. À cette date, le cimetière était devenu trop étroit, bordé à l’ouest par l’église, au nord par des maisons et au sud par la route. Il était en fort mauvais état. Le mur qui le séparait de la route s’était effondré. Il ne pouvait être agrandi.

Un nouveau terrain fut choisi, entre Marcillac et Lanville, à l’ouest de la route départementale reliant Angoulême à Niort. De nos jours, il reste encore isolé de toutes habitations. Ce cimetière n’a pas fait l’objet d’un traitement paysager, c’est un lieu très minéral.

Les tombeaux familiaux sont peu nombreux sont construits le long des allées principales. Ce type de construction apparaît généralement dans les années 1870. Elles correspondent à la montée de la puissance de la bourgeoisie, qui s’appuie sur un fort sentiment familial et sont le reflet de la hiérarchie qui codifie également le monde des vivants. Les tombeaux sont rectangulaires, ils présentent généralement en façade deux colonnes ou pilastres qui soutiennent un fronton triangulaire, orné au sommet d’une croix de pierre. Le nom des familles est inscrit sur le tympan. Les tombeaux comprennent plusieurs caveaux. La façade latérale conserve souvent le nom gravé de l’entrepreneur qui a réalisé cette construction.

Les stèles présentes en grand nombre dans le cimetière de Marcillac-Lanville, proviennent de l’ancien cimetière de Lanville. Le décor est souvent chargé de symboles funéraires : les mains unies, le pavot, la pensée…

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Quelques rares cénotaphes (cuve couverte d’un couvercle mais ne contenant pas le corps qui est enterré dessous) témoignent d’une mode fréquente dans la première moitié du XIXe siècle mais abandonnée après 1850.

Monument aux morts de la première guerre mondiale

Le monument aux morts est érigé dans les années 1920, à l’entrée du bourg, en venant d’Aigre sur la place appelée alors « des Ormeaux » à cette époque.

Un socle en pierre, sur lequel figure le nom des soldats morts au combat durant la première et la seconde guerre mondiale, supporte une statue en pierre représentant un poilu mourant en défendant le drapeau comme à Villejésus. A l’origine, ce monument aux morts était entouré d’obus, reliés par une chaîne. La chaîne fut enlevée en 2000.

Les cartes postales du début du XXe siècle présentent une place beaucoup plus ombragée qu’aujourd’hui. De nombreux ormeaux ont été coupés depuis lors et la grille, protégeant le monument, remplacée par une haie basse. Cette place prit le nom de place Louis Plantevigne qui fut un polytechnicien, maire de Marcillac- Lanville de 1859 à 1876 et de 1888 à 1891. Il fut même conseiller général du canton de Rouillac de 1870 à 1874.

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Cette place prit le nom de place Louis Plantevigne qui fut un polytechnicien, maire de Marcillac-Lanville de 1859 à 1876 et de 1888 à 1891. Il fut même conseiller général du canton de Rouillac de 1870 à 1874.

La gare

Pendant la première moitié du XXe siècle, la commune de Marcillac-Lanville était desservie par la petite ligne ferroviaire d’intérêt local à voie métrique des Chemins de fer économiques des Charentes, plus connue sous le nom de « Petit Mairat ». Allant de Saint-Angeau à Segonzac, elle passait par Mansle, Luxé, Villéjésus et Aizet (Marcillac-Lanville).

Un modeste bâtiment fut construit en bordure de la voie ferrée, à l’ouest de Lanville, le long de l’actuelle route départementale 357, direction Villeneuve (Mons), au lieu-dit La Chèvre, à environ 1,5 kilomètres du bourg. Cette gare inaugurée en 1911 ressemblait beaucoup à celle de Gourville, qui elle a conservé sa salle d’attente intacte (transformée en musée de la Gare). Le trajet du train se faisait parallèlement à la route départementale 736, reliant Jarnac à Aigre, à travers la campagne. Le train faisait un arrêt à Germeville avant d’atteindre Gourville.

La départementale 357 passe au-devant de l’ancienne gare transformée en maison. Un appentis a été construit sur la façade latérale ouest de l’ancienne gare. L’ancienne voie verrée passait à gauche de la maison.

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V. L’habitat et les dépendances agricoles

a. Les habitations

La commune de Marcillac-Lanville présente une certaine unité architecturale caractérisée par une simplicité des volumes et par une sobriété du traitement des façades. Elle présente surtout un bâti du XIXe siècle correspondant à une période de grande prospérité : fermes à cour fermée, porches et portails. La commune possède également des traces d’architecture plus ancienne, encore visibles sur certaines maisons ou dépendances telles quelques exemples d’architecture des XVe-XVIe siècles visibles dans le bourg.

Des traces d’architecture ancienne (XVe-XVIIIe siècles)

Quelques éléments épars sont encore visibles dans certaines maisons, comme des demi-croisées, avec appui saillant et mouluré, surmontées d’un linteau à accolade qui sont des ouvertures caractéristiques des XVe-XVIe siècles.

La façade de ce bâtiment inhabité au cœur du bourg, Rue de la bohème, présente encore des ouvertures caractéristiques des XVe-XVIe siècles même si la façade a subi de nombreux remaniements au cours des siècles suivants. À l’étage, une demi-croisée surmontée d’un linteau à accolade occupe le centre de la façade. Au rez-de-chaussée, la porte a conservé son linteau à accolade. Ce bâtiment a accueilli une maréchalerie pendant de nombreuses années, sans plus de précision. La façade de ce bâtiment inhabité au cœur du bourg, Rue de la bohème, présente encore des ouvertures caractéristiques des XVe-XVIe siècles même si la façade a subi de nombreux remaniements au cours des siècles suivants. À l’étage, une demi-croisée surmontée d’un linteau à accolade occupe le centre de la façade. Au rez-de-chaussée, la porte a conservé son linteau à accolade. Ce bâtiment a accueilli une maréchalerie pendant de nombreuses années, sans plus de précision.

Des petites ouvertures à encadrement chanfreiné, dont les arrêtes de l’encadrement sont rabattues sont caractéristiques des XVe-XVIIe siècles.

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Dans le bourg :

De nombreuses habitations du bourg conservent des ouvertures en arc segmentaire et linteau délardé, de la fin du XVIIe et du XVIIIe siècle.

Cinq dates inscrites sur le linteau d’une baie ou sur la clef d’une porte appartiennent aux XVIIe- XVIIIe siècles (« 1608 » pour la plus ancienne, se trouve dans le bourg, rue Taillefer.

Bourg, Rue Taillefer

De nombreuses portes en plein cintre, caractéristiques des XVIIe-XVIIIe siècles Bourg, Rue Taillefer sont conservées dans le bâti. Cette porte se trouve à l’intérieur d’une Cette baie surmontée d’un fronton triangulaire propriété du bourg. est caractéristique du XVIIe siècle. Le blason, entouré d’une couronne sur du tympan du fronton est daté : MANDRÉ 1608. L’ensemble est probablement un remploi dans le bâti.

La date « 1648 » est gravée sur ce pigeonnier à niche installé dans l’épaisseur du mur d’un ancien toit à cochons, du bourg, Rue Taillefer

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Quelques types d’habitat sont à distinguer

La ferme à cour fermée

Ce type de ferme est caractéristique de l’architecture des exploitations viticoles charentaises bâties avant la crise du phylloxéra. Ces fermes forment des îlots clos, ouverts seulement sur l’espace public par des porches ou portails. Autour de la cour, prennent place le bâtiment d’habitation et les dépendances agricoles : grange, chai, hangar, écurie…

Suivant l’importance de l’exploitation, l’architecture de la maison s’apparente à une maison charentaise ou à une maison de maître39 mais l’on peut trouver aussi d’autres types plus modestes. Des bâtiments ont souvent été détruits au fil des siècles, ouvrant au final un peu la cour vers l’extérieur.

La maison charentaise

Ce type de maison dite « charentaise » est implanté généralement perpendiculairement à la rue avec une façade principale orientée au sud. Elle ouvre sur une cour fonctionnelle donnant accès aux dépendances. Son volume simple mais cossu est composé au moins de deux niveaux d’élévation, surmontés d’un surcroît. La façade est ordonnancée, composée d’au moins trois travées. Les habitations les plus cossues présentent un décor soigné : corniches, bandeaux soulignant les étages, pilastres ou chaînes d’angle. Un soin particulier est apporté au traitement de la porte d’entrée, au centre de la façade. Celle-ci est très souvent cantonnée de pilastres, cannelés ou non, ornée de motifs décoratifs et coiffée d’un entablement. La toiture à longs pans et à croupe est couverte en tuile canal. La maison charentaise est souvent associée à une ferme à cour fermée.

La porte de cette maison présente un décor soigné. Des pilastres l’entourent et elle est couronnée d’un entablement décoré d’un losange souligné d’un motif de triglyphe.

39 Une imposante demeure qui se distingue du reste du bâti par ses dimensions importantes et par la qualité de son traitement architectural et de son décor. Sa couverture à quatre pans est souvent en ardoise.

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La maison de maître

Ce type d’imposante demeure se distingue du reste du bâti par ses dimensions importantes et par la qualité de son traitement architectural et de son décor. Ces maisons de notable peuvent être aussi bien isolées que faire partie d’un ensemble à cour fermée. L’habitation est implantée en recul de la rue dont elle est séparée par une cour ou un jardin.

La façade principale est généralement en pierre de taille mais peut aussi être en Cette demeure ci-dessous fut construite par la famille Blanchard, moellons enduits. Elle est composée de en 1842, à La Grange. Elle présente une façade qui se déploie sur trois ou cinq travées symétriques. La deux étages. Elle est rythmée par cinq travées. double orientation de la maison implique La travée centrale est mise en valeur par l’utilisation un volume élargi et une symétrie d’entablements qui surmontent les ouvertures. La toiture à longs traversant de part et d’autre du bâti. La pans, à croupe est couverte d’ardoises. Le corps de bâti principal façade comporte aussi de nombreux est souvent accompagné d’ailes latérales. détails architectoniques classiques (escalier, pilastres, bandeau, corniches…) qui signent l’élégance de ces maisons. La couverture à quatre pans est en ardoise ou en tuiles canal.

À partir du milieu du XIXe siècle, l’ardoise considérée comme noble, recouvre les toitures des demeures bourgeoises avant de se diffuser à tous les types d’habitat. Le corps de bâti principal est souvent accompagné d’ailes latérales.

Deux grandes maisons construites par des notables de la commune au XVIIIe ou au début du XIXe siècle se rencontrent dans le centre bourg de Marcillac et le Cette maison est située à Pont-Roux. La cour se développe au-devant hameau de Lanville et présentent une de la façade et donne accès aux dépendances. La façade deux niveaux surmontés d’un comble. Un bandeau mouluré souligne le 1er étage. architecture de qualité. Elles sont L’accès se fait par un escalier à double volée. dessinées toutes les deux sur le plan cadastral de 1832.

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Cette grande demeure, construite au nord du bourg de Marcillac, est associée à une ferme à cour fermée, avec des bâtiments aveugles sur l’extérieur, exceptée la façade principale du logis percée de sept travées ouvre sur la place Plantevigne. Côté cour, deux pavillons sont accolés à ce corps de logis. Ils sont surmontés de toits en pavillons en ardoise (on distingue leur flèche sur cette photo). Cette propriété a été construite par la famille Plantevigne.

Une autre maison de grande taille et de belle qualité se distingue au cœur du hameau de Lanville. Elle présente une façade qui se déploie sur un étage et un surcroît. Elle est rythmée par six travées. Les ouvertures en arc segmentaire, au linteau délardé sont e caractéristiques du XVIII siècle. La maison est associée à une ferme à cour fermée par un portail. Beaucoup de bâtiments agricoles ont été détruits mais une grande grange subsiste dans le prolongement de la maison. Une fuie carrée s’élève à proximité de la demeure.

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Porches et portails

Les porches et portails font partie intégrante du patrimoine architectural de Marcillac-Lanville. Les portails symbolisent le plus souvent la réussite sociale de leurs propriétaires. Ils bénéficient fréquemment d’un décor sculpté soigné et constituent la pièce maîtresse des propriétés viticoles. Ils s’ouvrent sur une large porte charretière surmontée d’un arc en anse de panier permettant le passage des voitures à Ce portail est le plus ancien recensé dans la chevaux et des charrettes, et sur une ou deux commune de Marcillac-Lanville. Il est situé dans le portes piétonnières souvent scandées de bourg, rue du Château. Sa clef porte encore la date gravée « 1753 ». pilastres. La date de construction peut être gravée au haut du portail. Parfois, les fermes sont accessibles par des porches caractérisés par un passage couvert débouchant sur la cour. Ce passage dispose d’accès latéraux permettant de communiquer avec les dépendances agricoles.

La commune possède une vingtaine de portails de qualité comprenant une décoration simple, surmontés d’un arc ou composés seulement de deux piliers encadrant le passage.

Dans le bourg, Rue du palan, ce portail fut construit en 1809, comme l’indique la date gravée sur la clef de l’arc en anse de panier.

Les portails à piliers, le plus souvent construits en pierre de taille, recensés dans la commune datent en majorité de la seconde moitié du XIXe siècle ou du début du XXe siècle

Au-devant, à gauche, de ce portail un chasse-roue a été conservé. Un chasse-roue est un obstacle formé par un arc métallique, placé au pied d’une porte charretière dans le but de protéger des chocs les roues des charrettes à cheval.

La grille en fer forgé a été réalisée en 1883 par M. Mathias, serrurier de Marcillac-Lanville.

Hameau de Germeville

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La maison de métayer

Ces habitations très modestes présentent une façade sur un ou deux niveaux d’élévation, rythmée de deux travées. De nombreuses maisons de ce type ont été recensées sur l’ensemble de la commune au centre des hameaux et parfois groupées à proximité ou dans la cour d’une propriété.

Ces maisons comportaient une pièce unique complétée parfois d’un grenier. Certaines ont conservé les éléments de confort de Ces deux maisons de métayer sont rassemblées sous un même toit. l’habitation : un évier en pierre, une cheminée et un potager, petit fourneau maçonné. Les Elles se situent à l’intérieur d’une ferme à cour fermée du hameau plus anciennes maisons de ce type furent Pont-Roux. Des cheminées, des potagers et des éviers sont e e conservés à l’intérieur. construites entre le XV et le XVIII siècle.

La longère

Ce type de maison habitée par une famille d’exploitants agricoles se caractérise par un plan en longueur d’où le nom de longère : la pièce d’habitation et les pièces d’exploitation sont contigües et bâties selon un plan linéaire.

Faite de matériaux simples, cette ferme ne présente que rarement des éléments de décoration. Elle s’ouvre souvent sur une cour, au-devant de l’habitation. Ce type d’habitat est rare à Marcillac- Lanville.

La maison inachevée

À Marcillac-Lanville, comme dans toutes les communes sinistrées par la crise du phylloxéra, l’économie viticole fut sérieusement freinée. Beaucoup de familles furent dans l’impossibilité d’achever la construction de leur maison.

L’asymétrie dans le bâti, le dépassement des pierres d’attente et l’arrêt brutal de la toiture sont les signes significatifs de cette situation. Ce type d’habitat est rare à Marcillac-Lanville.

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La maison à balet

Le terme balet sert à désigner l’auvent prolongeant la couverture principale, qui surmonte l’escalier extérieur en pierre de la maison. Les maisons à balet sont de modestes constructions rurales qui appartenaient à des artisans (sabotiers, vanniers…) ou à des métayers. Le logement se situait à l’étage, isolé de l’humidité du sol. Au rez-de-chaussée était entreposé le matériel utile à l’activité professionnelle.

On pouvait aussi y abriter les bêtes d’élevage. Le grenier qui servait à stocker la paille et le foin, isolait la maison du froid. Cinq maisons de ce type ont été identifiées dans la commune : à Aizet, Chanteraine, Pont-Roux et rue Lastier dans le bourg

À Aizet, une maison à balet se trouve rue de la Rochefoucauld. L’évier fréquent en haut de l’escalier sur ce type de maison, a été conservé ainsi que sa pierre d’évier, cachée par de la végétation. La façade présente encore des traces d’un enduit ocre.

Les maisons de bourg

Les maisons de bourg ont un accès direct sur la chaussée. Le jardin, s’il existe, est situé à l’arrière. La façade présente une architecture soignée en pierre de taille ou en moellons enduits, parfois ornée de bandeaux et de corniches.

Dans le bourg de Marcillac-Lanville, ces maisons sont construites le long des voies importantes de communication (les routes départementales 737 et 19).

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Le bourg regroupe un ensemble formé d’habitations de différentes périodes, parfois aussi de bâtisses à usage agricole.

Les façades des habitations sont plus ou moins homogènes et avec des différences de hauteur.

De nombreux rez-de-chaussée avaient été conçus pour abriter des espaces commerciaux.

a. Les dépendances agricoles

La commune possède aussi un ensemble de bâtiments agricoles significatifs. Ils permettent de mieux comprendre les modalités de l’exploitation de la vigne au XIXe siècle, activité qui a dominé l’économie locale jusqu’à la crise du phylloxéra. Les fermes s’étant reconverties ensuite dans la polyculture, le bâti a évolué et souvent les bâtiments ont été remaniés ou reconstruits au fur et à mesure des destructions ou ajoutés en fonction des besoins. De nombreux chais ont été conservés même après l’arrêt de l’activité viticole des propriétés.

On peut distinguer certains types de bâtiments agricoles :

La grange

Dans ce type de bâtiment rectangulaire, l’un des murs gouttereaux est percé d’au moins une grande porte cochère. La grange est parfois isolée ou située dans le prolongement de la maison ou des autres dépendances.

La façade peut comporter une porte cochère centrale encadrée de deux portes d’étable, ou une porte cochère et une porte d’étable latérale.

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Les granges dont la façade est placée sur le mur pignon sont souvent plus grandes que celles ouvrant sur un mur gouttereau. Ce type de construction permet de créer un espace central dédié au stockage des récoltes et au matériel agricole. Les étables sont quant à elles placées le long des murs gouttereaux, souvent peu élevés. À l’intérieur, murs, poteaux ou murets séparent l’espace en deux ou trois vaisseaux.

Ce type de grange-étable dont l’accès se fait par les murs gouttereaux est plus courant sur la commune de Marcillac- Lanville. Elle héberge le troupeau, le fourrage, le matériel de transport et sert aussi d’aire de battage comme à Lanville.

Les toits à cochons

Ces petits bâtiments bas et de plan allongé étaient destinés aux porcs et sont localement appelés « toits à cochons ». La façade est percée de portes permettant l’accès aux animaux et de petites baies d’aération. Certains toits à cochon étaient surmontés d’un séchoir ouvert sur plusieurs côtés, servant à stocker le bois ou le foin.

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Le hangar

Ce type de bâtiment est ouvert sur un ou plusieurs côtés pour abriter le matériel agricole, le bois ou certaines récoltes. Le toit à longs pans est soutenu par des poteaux en pierre de taille ou en moellons. Ceux-ci peuvent être de section cylindrique ou carrée.

Les distilleries et chais

Dans cette région viticole, les vins sont traditionnellement transformés en alcool par distillation et depuis le XVIIe siècle, par deux passages de chauffe dans l’alambic pour obtenir l’appellation Cognac. Avant leur distillation, les vins sont stockés dans des fûts en bois de chêne, à l’intérieur de chais. La plupart des domaines viticoles possédaient également une distillerie. Les chais de vieillissement des eaux-de-vie se caractérisent par des murs noircis sous l’effet d’un champignon appelé « Tourula Compniacensis », qui se nourrit des vapeurs d’alcool qui s’échappent des fûts.

Le passé viticole de la commune est encore visible dans les bâtiments du domaine de l’Anglée. Cette carte postale datant du début du XXe siècle montre l’activité intense de ce domaine viticole avec en toile de fond, un chai.

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VI. Patrimoine vernaculaire

Les puits, les buanderies, les fours à pain, les fontaines, les pierres d’évier, les pigeonniers, les pierres à chevaux sont les vestiges d’une utilisation passée encore apparents dans le patrimoine bâti des communes rurales.

Les fontaines et lavoirs

Créés à l’initiative des communes, les lavoirs collectifs se sont généralisés au XIXe siècle et leur construction a perduré jusque dans la première moitié du XXe siècle. Bâtis près d’un point d’eau (source ou rivière), à proximité du bourg pour limiter le trajet des lavandières, ils n’étaient cependant pas implantés dans le cœur des bourgs afin d’éviter la pollution de l’eau potable par la lessive. L’adduction d’eau puis l’installation de la machine à laver dans les foyers, à partir des années 1960, a entraîné l’abandon des lavoirs.

De nombreuses sources jaillissent sur le territoire de la commune, souvent non loin du fleuve ou du ruisseau l’Auge. Certaines furent aménagées en fontaine ou en lavoir. Rendus désormais obsolètes, certains lavoirs ont disparu ou en passe de le faire.

De 1876 aux années 1890, la commune débloqua des fonds pour la construction ou la réparation des lavoirs.

Fontaine et lavoir du Port Lastier

La fontaine alimentait un lavoir dans la vallée de la Charente. On y accède par l’impasse du port Lastier. Le lavoir est constitué d’un bassin rectangulaire. Ses rebords en pierre sont inclinés. Il est entouré de murets. Il était utilisé par les habitants du quartier Saint-Michel et du bourg. En 1876, la commune fit des réparations sur la fontaine mais les archives ne précisent pas la date de construction de ce lavoir.

Les lavoirs publics étaient de véritables lieux de vie où s’échangeaient essentiellement les nouvelles du pays. Ils étaient avant tout le territoire des femmes qui y travaillaient mais aussi y discutaient. Ce lavoir offre actuellement une halte agréable au bord de la Charente.

Ni carte postale ni traces dans le paysage n’indiquent l’installation d’un lavoir à proximité du cœur du bourg de Marcillac-Lanville. Émile Ganachaud, instituteur de Marcillac-Lanville, écrit en 194340 qu’il existait un lavoir très fréquenté, à proximité du moulin Matard, alimenté par l’Auge.

40 GANACHAUD (E), Marcillac Lanville et ses environs, Études locales, n°24, novembre 1943

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La fontaine Saint-Maur et le lavoir de Lanville

À proximité des ruines du prieuré, se trouve une fontaine dite fontaine Saint-Maur (également nom de la paroisse aussi) qui a été canalisée.

La présence de cette fontaine dans ce vallon était idéale pour l’installation d’une communauté religieuse. Ces eaux, qui dit-on, avaient eu des actions bienfaisantes sur les articulations déficientes permettaient d’alimenter les bassins qui se trouvent encore à l’arrière du logis du prieur.

L’instabilité des sols de l’église Notre-Dame de Lanville pourrait venir de sa présence en sous-sol. L’église et le cimetière étaient couramment inondés et les fondations de l’église subirent les conséquences de leur instabilité.

De l’autre côté du chemin du Pontillon (hameau de Lanville), la commune eut le projet de construire un lavoir dès 1868. Cependant ce premier projet fut repoussé en 1872 et un nouveau lieu d’installation fut proposé. Un lavoir couvert fut bien construit par la municipalité dont les archives ne précisent malheureusement pas la date de construction.

De nos jours, ce bâtiment est actuellement en très mauvais état et difficile d’accès. Il est alimenté par une source qui donne naissance à un petit ruisseau.

La font Falda et le lavoir des Écures

Cette fontaine se trouve aux Écures, à proximité du pont entre-bas de la route départementale 736. En 1862, une pétition des habitants demanda à la commune de participer à l’agrandissement de la fontaine et à la construction d’un lavoir. Le lavoir fut construit en 1876.

Il est constitué d’un bassin rectangulaire. Ses rebords en pierre sont inclinés. Sa proximité avec la route le fragilise même s’il reste protégé car aujourd’hui très peu visible.

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Le pont de Pont-Roux

Les cours d’eau ont toujours constitué des obstacles naturels importants. Ainsi, en complément des gués existant dès le Moyen-Âge, des ponts et des ponceaux furent construits au cours de la seconde moitié du XIXe siècle. Ce pont, au lieu-dit le port Boucher n’est pas représenté sur Le plan cadastral de 1832. Les archives évoquent la construction d’un pont en pierre en 1874. Il n’y avait avant qu’un gué et un bac au même emplacement.

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Les puits

Il existe à Marcillac-Lanville quelques puits visibles depuis le domaine public mais la plupart se situent à l’intérieur des propriétés privées et n’ont donc pas été inventoriés. Avant l’arrivée de l’eau courante dans les foyers, les puits étaient les seuls points d’approvisionnement en eau, tant pour l’usage domestique que pour les abreuvoirs liés à l’élevage. Il existait des puits privés, certains communs à plusieurs familles et d’autres communaux.

Les puits, dans leur forme la plus simple, sont de plan circulaire et disposent d’une margelle en pierre monolithe ou appareillée. Au-dessus se trouve le mécanisme permettant de remonter l’eau à la surface : poulie ou treuil à manivelle. Ils sont généralement couverts pour conserver la fraîcheur et la propreté de l’eau, mais aussi pour éviter les chutes accidentelles.

Ce puits est installé sur la place de la Mairie. Il prit le nom de puits des Halles car il était associé aux activités commerciales de la place. Il est couvert d’un dôme en pierre de taille et fermé par un volet. En 1870, une pompe fut installée sur ce puits.

Aux XIXe et XXe siècles, les pompes manuelles en cuivre puis en fonte remplacèrent de nombreux puits pour en faciliter l’usage.

Les croix de chemin

Sous l’Ancien régime, les croix de chemins pouvaient délimiter les seigneuries ou les paroisses.

C’est en 1668, selon l’Abbé Nanglard que fut installée la croix de chemin d’Aizet - au carrefour de la route d’Aigre à Ambérac et de la route longeant le cimetière d’Aigre pour rejoindre la route départementale 736 - pour délimiter la paroisse de Marcillac-Lanville de celle d’Aigre. Le plan cadastral de 1832 indique également cette croix. Actuellement, une croix récente fut construite au même emplacement que celle du XVIIe siècle.

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Une croix est visible sur une carte postale ancienne du bourg datant du début du XXe siècle sur la place des Ormeaux (actuelle place Plantevigne). Son histoire reste méconnue faute de sources. Aujourd’hui, cette croix a disparu. S’agissait-il d’une croix de chemin ou de cimetière ?

Les fours à pain

Les quelques fours présents sur la commune de Marcillac-Lanville rappellent que le pain a longtemps été la base de l’alimentation dans les campagnes. Certains fours à pains étaient communs aux habitants d’un hameau, d’autres privés, dépendaient d’une ferme. Ils pouvaient être ouverts sur l’extérieur ou situés dans un petit bâtiment appelé « fournil », dans lequel était aussi stocké le bois.

Souvent les logis construits avant le XIXe siècle possédaient un four à pain, rappelant qu’avant le Révolution française, seul le seigneur possédait un four. Il en résultait un droit seigneurial qui imposait à la population, contre redevance, de cuire son pain dans un four banal. Les fours recensés sur la commune sont du XIXe et XXe siècle.

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Les pigeonniers

Ces bâtiments servaient à abriter les pigeons. À l’intérieur, les nids ou boulins sont aménagés et étaient accessibles par une échelle. Le plus souvent ils étaient installés dans un bâtiment de plan quadrangulaire. Sous l’Ancien régime, le nombre de trous de boulins correspondait à la surface de terre possédée. Il en reste cinq sur la commune de Marcillac-Lanville.

Symboles du pouvoir seigneurial dont la possession était un privilège, les pigeonniers étaient souvent associés aux logis mais il semble que dès le XVIIIe siècle, nombre d’entre eux appartenaient à des non nobles. L’élevage des pigeons permettait un apport complémentaire en viande et leur fiente, parfois appelée colombine, était recueillie pour amender les terres agricoles. La construction d’un pigeonnier présentait aussi l’avantage de conférer à la demeure un prestige indéniable, signe de la distinction sociale de son propriétaire.

Les pigeonniers logés dans des tours sont forme arrondie ou polygonale. Ils possèdent un ou deux étages. Le rez-de-chaussée, lorsqu’il est fermé sert de remise ou de grenier. Un cordon mouluré ou une corniche, appelée randière, entourait le pigeonnier afin de protéger les pigeons des incursions de rongeurs. Il servait aussi de plage d’envol.

À l’intérieur du pigeonnier de la Rue du Palan, des trous de boulins constitués par des pots en terre cuite sont noyés dans la maçonnerie.

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Des pigeonniers datant du XIXe et XXe siècle, ont également été recensés sur la commune de Marcillac- Lanville. Le pigeonnier du logis de l’Anglée date de 1901 et a conservé à l’intérieur ses rangées de trous de boulins et l’échelle en bois tournante permettant de nettoyer les niches.

Germeville

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Conclusion

La commune de Marcillac-Lanville est située au cœur de trois vallées où l’activité agricole domine. Elle fut très largement dominée par la viticulture jusqu’à la crise du phylloxéra puis par la polyculture. Ces activités viticoles ont marqué les paysages et le bâti.

Une architecture d’une grande diversité ainsi qu’un habitat rural aux typologies variées en résulte. Ce patrimoine bâti rural, bien commun et socle d’une identité partagée, doit être préservé. Il est souvent restauré mais sa conservation demeure fragile.

Beaucoup de constructions du XVIIIe et XIXe siècle, dans le bourg et les hameaux, sont identifiables grâce aux dates inscrites sur les portails ou les linteaux en pierre des ouvertures. Le patrimoine vernaculaire reflet de l’activité des hommes est riche. Un grand nombre de pigeonniers recensés sur la commune, donne à Marcillac-Lanville, une originalité.

L’histoire de Marcillac-Lanville à l’époque médiévale est très riche. La motte castrale dont l’histoire reste méconnue marque profondément le paysage du bourg. Seul un ambitieux programme de fouilles archéologiques pourrait permettre de mieux comprendre son organisation et l’ampleur de son emprise sur le bourg.

Quelques éléments épars sont encore visibles dans certaines maisons de la commune, comme des demi- croisées et des ouvertures surmontées d’un linteau à accolade, caractéristiques des XVe- XVIe siècles. Le prieuré Notre-Dame de Lanville est un site majeur du Rouillacais. Si son histoire de l’époque médiévale reste méconnue, son histoire à l’époque moderne est bien documentée. L’église prieurale reste un des plus grands monuments romans de l’Angoumois qu’il faut préserver et faire vivre.

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