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Histoire Québec

La François De Lagrave

Volume 10, numéro 2, 2004

URI : https://id.erudit.org/iderudit/11264ac

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Éditeur(s) La Fédération des sociétés d'histoire du Québec

ISSN 1201-4710 (imprimé) 1923-2101 (numérique)

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Citer cet article De Lagrave, F. (2004). La Mauricie. Histoire Québec, 10(2), 15–19.

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Par FRANÇOIS DE LAGRAVE, Société Appartenance Mauricie qu'en 1634, vingt-six ans après Québec, mais huit ans avant Ville-Marie (Montréal). Identifiée longtemps comme la Vallée du ques dizaines de kilomètres seulement des Par deux fois, en 1651 et 1652, au pire mo­ Saint-Maurice, cette région ne reçut défi­ grands centres urbains de ces trois sous- ment de la guerre franco-iroquoise, le père nitivement l'éponyme Mauricie qu'au cours régions. Jacques Buteux, jésuite, remonta la fou­ de la décennie 1930, grâce à la pertinente Enfin, telle une véritable colonne ver­ gueuse rivière, se faisant à la fois explora­ et courageuse intervention de l'abbé Albert tébrale, voici que s'impose la plus grande teur tout autant que missionnaire et, mal­ Tessier. Si nous nous référons à l'époque des rivières du territoire, la rivière Saint- heureusement, y trouva la mort aux envi­ lointaine de la Nouvelle-France, l'actuelle Maurice. Après le Saguenay, puis l'Outa­ rons de l'actuelle ville de La Tuque. Jusque région 07 constitue la partie nord de l'an­ ouais, dont elle est la sœur jumelle par ses vers 1670, avant que la ville de Montréal lui cien gouvernement colonial de Trois-Riviè­ sources, notre importante rivière est l'af- ravisse la palme, le poste de Trois-Rivières res. Située au cœur même du Québec, à égale distance entre les pôles urbains de Québec et de Montréal, la Mauricie est limi­ tée à l'ouest par la région de Lanaudière (10), tandis qu'au nord elle pousse ses fron­ tières jusqu'à l'Abitibi (14) et le Lac-Saint- Jean (15); à l'est, elle voisine la région de Québec (04), alors qu'au sud, le fleuve Saint- Laurent la sépare de celle du Centre-du- Québec (20). Au sein des vingt régions administra­ tives du Québec, la Mauricie se distingue par un territoire aussi grand que la Belgique to­ talisant une superficie de 39 748 km2, mais Les Forges du Saint-Maurice. Lithographie tiré de The British Dominions in North habité seulement par environ 260 000 per­ America par Joseph Bouchette, 1832. (ANC) sonnes, soit 3,6 % de la population totale de Huent le plus important du fleuveSaint-Lau ­ était, le printemps venu, le lieu du principal l'État québécois. Dans ce vaste territoire, rent. Elle naît à plus de 400 m au-dessus du rendez-vous annuel des fourrures pour les 2 30 000 km , soit plus de 75% de celui-ci, sont niveau du fleuveet , en direction nord-sud, grandes tribus amérindiennes, quoiqu'il pourvus d'une riche couverture forestière plus exactement NNO-SSE, en dépit «de demeurât longtemps un poste important de sillonnée de treize rivières importantes et nombreuses déviations et de coudes à an­ troc. Par exemple, au XIX" siècle, le trifluvien parsemée de pas moins de 3 500 lacs. Ajuste gle droit», la rivière roule résolument ses Aaron Hart était encore un gros commer­ droit, a-t-on pu saluer «la diversité éton­ eaux sauvages et tumultueuses sur un par­ çant de fourrures. Comme l'a écrit Raoul nante de ses paysages». Le territoire mau­ cours de 587 km, à partir de l'actuel bar­ Blanchard, le commerce des fourrures cons­ ricien, au sud, en Basse-Mauricie, fait par­ rage Gouin jusqu'à son embouchure dans titua ««ne sorte de prologue, un lever de tie prenante de la grande plaine du Saint- le delta trifluvien. Une bien singulière rivière rideau» qui précéda le développement éco­ Laurent. Avant même que le visiteur n'ait identifiée parfois comme un «fleuve», rece­ nomique de notre région. Toutefois, «an le­ atteint le Centre-de-la-Mauricie, il peut ob­ vant les plus beaux épithètes et encaissant ver de rideau qui [dura] deux siècles». Ce­ server les premiers vallons ou contreforts froidement les plus austères qualificatifs. Ne pendant, trois exceptions à ce constat : dans des Laurentides qui prennent graduellement l'a-t-on pas qualifée de «superbe», de cette pépinière de coureurs des bois, de de l'importance. La Haute-Mauricie, repo­ «fière», et de «déterminée», mais aussi de voyageurs et d'explorateurs, la construction sant en plein cœur des terres précambrien- «demi-barbare», de «maussade» et de des canots reliés particulièrement aux ex­ nes du Bouclier canadien, lui dévoile un «grimaçante». Son cours tumultueux, hé­ péditions de fourrures, l'aménagement du arrière-pays étonnant et mystérieux, que rissé de cascades, de rapides et de chutes, chemin du Roy et, surtout, de 1730 à 1883, décrivit avec tant de passion l'écrivain fran­ parfois plus propice aux portages qu'à la l'activité des Forges du Saint-Maurice, la çais Maurice Genevoix lors de son passage navigation, explique pourquoi, comme l'a première industrie sidérurgique du Ca­ au tout début de l'été 1939. Bref, en tout déjà souligné le géographe Raoul Blanchard, nada. temps, le citadin et le touriste peuvent goû­ «le développement rural de la Mauricie Les forêts immenses de la Mauricie, ter et jouir d'un «dépaysement total» à quel­ « '[ait] témoigné d'aucune précocité». son vaste réseau hydrographiques ordonné

HISTOIRE NOVEMBRE 2004 PAfiE 15 autour de la rivière Saint-Maurice ont dé­ grouillante et mouvante où régnera bientôt Mauricie a particulièrement connu durant terminé avant même le début de la première Jean J. Crête, le roi de la Mauricie, une per­ cette période une activité remarquable. Il ne phase de la révolution industrielle (1867- sonnalité dynamique qui constituera un faut pas oublier qu'elle a été le berceau au 1896) «l'orientation de toute l'activité hu­ atout précieux pour la région, surtout lors­ Québec de l'hydroélectricité, des industries maine et du développement économique que une branche du chemin de fer Québec- de l'aluminium ainsi que des pâtes et pa­ régional ». En effet, à la suite de la région de Montréal, partant de Trois-Rivières, cons­ piers. Un triple titre enviable, n'est-ce pas! l'Outaouais, une grande partie de la truite en 1880, atteindra la tête de pont Claire-Andrée Fortin avait donc raison Mauricie, en 1852, connut un RÉVEIL évi­ qu'était alors Grandes-Piles. d'écrire qu'au cours du XX" siècle la dent. Trois-Rivières accédait à la tête d'un À l'aurore du XX" siècle, au tout dé­ Mauricie est devenue «un des principaux diocèse; la colonisation s'étendait de plus en but de la seconde phase de la révolution in­ agents du développement industriel qui s'est plus au Centre-de-la-Mauricie, de chaque dustrielle (1896-1929), s'ajoutait un nou­ produit au Québec». De société agricole, côté de la rivière; parallèlement aux Vieilles veau pan de l'activité industrielle mauri­ notre région, au cours de ces décennies, s'est Forges s'ouvraient les nouvelles Forges cienne, l'hydroélectricité. La fougueuse ri­ muée en société urbaine et industrielle. D'à Radnor; le gouvernement de l'Union injec­ vière, «harnaché[e], freiné[e] par des bar­ peine 15% urbaine qu'était sa population en tait enfin beaucoup d'argent afin d'aména­ rages» et, finalement domptée, va livrer à 1891, note encore l'historienne, à plus de ger la rivière Saint-Maurice pour la descente la région, puis à la province, son précieux 60% elle l'est aujourd'hui. du bois, multipliant les routes, les glissoires or blanc, grâce à l'ingénieuse compagnie Si, en 1921, comme le relate madame Fortin, «lepaysage mauricien [était] devenu le témoin vivant de ce progrès», combien le sera-t-il davantage après la Seconde Guerre mondiale, et jusqu'au début de la décennie 1970, alors que, malheureusement, s'était déjà amorcé un déclin progressif des indus­ tries traditionnelles, un affaissement dû à plusieurs facteurs. La région connaissait donc péniblement de Trois-Rivières à La Tuque et de Maskinongé à Sainte-Anne-de- la-Pérade «une mutation de sa structure économique». Même la vieille rivière Saint- Maurice connut «un changement de voca­ tion». Depuis plus d'un siècle et demi, elle avait été un agent de flottage du bois peu coûteux et de plus en plus efficace vers les La Shawinigan Water & Power. BNQ scieries comme vers les usines du territoire. Une date importante : 1996. À l'automne, la et les estacades; et, en outre, s'apprêtait à Shawinigan Water & Power. Une autre acti­ Compagnie de flottage du Saint-Maurice Li­ commencer des travaux de creusement du vité industrielle s'y ajoutait, l'industrie des mitée, en Haute-Mauricie, dans le canton chenal à la hauteur du lac Saint-Pierre. Ce pâtes à papiers, puis celle du papier journal Langelier, déversait dans la rivière son der­ n'est donc pas par hasard qu'un nouveau au moment où, en 1910, une loi québécoise, nier chargement de billes de bois, appelées journal trifluvien, en cette année, portait le imitant celle de l'Ontario, interdisait l'expor­ familièrement pitounes. Toute matière li­ nom de L'ÈRE NOUVELLE*. L'ère du dévelop­ tation du bois à pâte. Avec ses usines de La gneuse est maintenant absente sur sa sur­ pement économique était enfin arrivée. Au Tuque, Grand-Mère, Shawinigan, Trois-Ri­ face depuis quelques années. Nettoyée, tant service de «barons de la forêt», les grands vières et Cap-de-la-Madeleine, la Mauricie dans son fond immédiat que sur ses berges, entrepreneurs forestiers, toute une armée devenait «le principal centre de production débarrassée de ses piliers et de ses estaca­ de vaillants bûcherons, toute une légion de de pâtes et papiers au » et Trois-Ri­ des, la rivière connaît actuellement une ac­ téméraires draveurs, allaient se mettre à vières, au milieu du siècle, pouvait pompeu­ tive vocation récréo-touristique, pour le plus l'heure du grand commerce du bois d'œuvre sement se qualifier de «Capitale mondiale grand plaisir des amateurs de grand air, exporté d'abord surtout en Angleterre, puis du papier journal». La puissante compa­ pourquoi pas aussi pour le simple plaisir des aux États-Unis et ailleurs. À ce moment, gnie ne faisait pas que distribuer de l'élec­ yeux. Parfois, en certains coins privilégiés, Grandes-Piles devint incontestablement «le tricité aux maisons et aux papeteries, elle comme aux abords de ses nombreux af­ pivot de l'activité forestière», «l'entreprôt devint aussi pour ainsi dire la marraine, la fluents ou de ses falaises escarpées, l'on peut de toute la région», «le centre de rayonne­ pourvoyeuse dans la région de deux types songer avec nostalgie à une virginité retrou­ ment vers tous les points de l'arrière-pays d'industries nouvelles comme l'électromé- vée. mauricien», enfin une municipalité tallurgie et l'électrochimie. Le Centre-de-la-

HISTOIRE QUEBEC NOVEMBRE 2004 PAfiE 16 Son patrimoine, qu'il soit matériel ou immatériel, archéologique ou agricole, re­ ligieux ou industriel en fait par surcroît une autre destination privilégiée. Du nord au sud comme de l'est à l'ouest subsistent partout des vestiges d'un noble passé. Ne citons que le vieux Trois-Rivières classé quartier his­ torique par le gouvernement Johnson, père, et son monastère des Ursulines ainsi que le monastère et l'ancienne église des Récol­ lets, tous construits sous le régime français; le Site national des Forges-du-Saint-Mau­ rice; le vieux Sanctuaire madelinois dont la construction remonte à 1720 et la basilique Notre-Dame-du-Cap, l'un des trois grands sanctuaires nationaux du Canada qui attire Moulin de la Turner Lumber and Pulpwood Compang, Lac Edouard. Carte postale de un demi-million de personnes annuellement; Pinsonneault, collection Normand Caron le Village du bûcheron et du draveur de Le riche potentiel récréo-touristique gers comme celles dénommées du Lac- Grandes-Piles comprenant près d'une tren­ de la Mauricie se fonde principalement sur Saint-Pierre (Pointe-du-Lac), Le Baluchon taine de bâtiments rappelant le passé cen­ ses vastes forêts ainsi que sur ses plans (Saint-Paulin), Sacacomie (Saint-Alexis-des tenaire (1850-1950) de ces véritables per­ d'eau nombreux et variés, en n'oubliant pas Monts), des Clubs Odanak et Hosanna (près sonnages de légende qui ont fortement im­ bien sûr les vestiges laissés par la fascinante de La Tuque), ainsi que celles du Triton et prégné la culture et l'imaginaire de notre histoire de la deuxième plus ancienne ville de l'Eau-claire (Haute-Mauricie). La ville région; le Musée québécois de culture po­ du Canada qui comptera bientôt 375 ans, si pulaire de Trois-Rivières où se retrouve l'on ne considère que sa colonisation. Une principalement la grande collection Robert- importante portion de son patrimoine na­ Lionel-Seguin, l'une des plus importantes turel a été tout spécialement protégé en d'artefacts et d'objets divers sur le passé 1970 par la création du Parc national de la québécois; les musées Pierre-Boucher et des Mauricie, dont l'artisan principal, en dépit Ursulines; le Circuit Félix-Leclerc de La d'oppositions autant québécoises que mau­ Tuque, rappelant le passé de ce grand Qué­ riciennes, ne fut nul autre que monsieur bécois, natif de La Tuque et ayant habité Jean Chrétien, futur premier ministre du aussi l'ancienne municipalité de Sainte- Canada. Ce parc, qui s'est ajouté à bien Marthe, voisine de Cap-de-la-Madeleine; d'autres, veut «protéger un échantillon re­ enfin, de nombreuses églises comme celles présentatif du Bouclier canadien et parti­ de Champlain, de Saint-Léon-le-Grand, de culièrement des Laurentides québécoises». La Tuque ou de Notre-Dame-de-la-Présen- La Haute-Mauricie, notamment prisée par tation du quartier Shawinigan-Sud, dont la célèbre famille Kennedy et madame Anne tout l'intérieur a été décoré par le talentueux Stillman, notre «reine de la Mauricie», de­ Ozias Leduc à la fin de sa vie. venue Me Cormick à la suite d'un retentis­ Toutefois, il faut accorder une place sant procès et d'un second mariage, oui la spéciale à la Cité de l'énergie de Shawini­ Haute-Mauricie demeurera longtemps un gan, non seulement pour la magnifique il­ haut-lieu de la chasse et de la pêche, grâce Le couvent des Ursulines dans le Vieux lustration de son passé industriel mais aussi Trois-Rivières. Photo : Normand Caron à ses neuf zees (zones d'exploitation con­ pour l'effet dynamiseur que cette institution trôlée) et à plus d'une trentaine de pour­ de La Tuque, ancien poste de traite, est de­ culturelle a produit sur la ville elle-même voiries. Pour recevoir les adeptes de plein venue en toute saison le point de départ comme sur la région toute entière. Au cours air, les trois sous-régions peuvent compter par excellence dans une nature féconde et des années de la décennie 1980 beaucoup sur des infrastructures d'accueil d'une généreuse des grandes expéditions de de grandes industries de la première moi­ grande qualité. Hormis les hôtels, les mo­ chasse et de pêche ou de loisirs variés, pro­ tié du XX" siècle avaient déserté la Ville Lu­ tels, les sites de camping et les nombreux pices aux plus agréables aventures. Oui, mière, ainsi que l'on dénommait autrefois gîtes touristiques, ne citons que les grandes une véritable région d'aventure que la Shawinigan. Elle avait perdu sa prospérité auberges si prisées par nos visiteurs étran­ Mauricie! d'antan. À l'évidence, l'avenir semblait très

HISTOIRE QUÉBEC NOVEMBRE 2004 PAfiE 17 sombre. Voilà qu'en 1987, dans un tel con­ avec l'espoir et l'audace de leurs jeunes an­ d'organiser une fête dans un bar. Là «on texte de morosité désespérante, deux hom­ nées. trinque, on bavarde, on joue de la musique, mes s'apprêtaient à rallumer la flamme fu­ Il faut souligner dans notre région on chante, on crie sa joie et sa douleur. Mais meuse. Il s'agit de Robert Trudel, à qui l'on l'œuvre féconde de ses trois grands centres avant tout, poursuivait-il, on s'amuse». accola rapidement au départ l'épithète de d'art, ceux de La Tuque, de Shawinigan, par­ Pourquoi, pourrions-nous demander? «Pour «Don Quichotte», et de Roland Desaulniers, ticulièrement celui de Trois-Rivières qui être plus sûr défaire plaisir à celui qui est ex-maire de Shawinigan. Dans un climat vient de connaître une rénovation d'une parti». «Voilà, concluait-il, c'est trifluvien». de cynisme, de scepticisme alimenté par durée d'un an complet. N'oublions pas ce­ À ces activités haut de gamme, il aurait fallu tant de gens et non des moindres, une cor­ pendant les activités ludiques et culturelles en ajouter tellement d'autres qui se dérou­ poration fut instituée dans le but explicite annuelles. La Mauricie n'est certes pas la lent durant les quatre saisons dans les moin­ de doter leur ville d'un centre d'interpré­ dernière région du Québec en ces deux do­ dres municipalités mauriciennes, ne serait- tation de l'électricité. Après «neuf ans d'ef­ maines. Que l'on songe, pour n'en nommer ce que le Festival de la truite mouchetée de forts opiniâtres», ayant pu compter sur que quelques-unes, au Festival de chasse Saint-Alexis-des-Monts, le Festival des l'appui concret de bien des intervenants, du Haut-Saint-Maurice de La Tuque; au Deux-Rivières de Saint-Stanislas ou la Fête comme l'Hydro-Québec et la papeterie Jamboree Quad de La Tuque; au Festival de la solidarité de Saint-Narcisse, de même Belgo, naissait le 21 juin 1997 la Cité de western de Saint-Tite, le plus important à que le Festival des amuseurs publics de Cap- l'énergie, qualifiée tour à tour de «fleuron l'est de la ville albertaine de Calgary; au Fes­ de-la-Madeleine et celui du Festival du théâ­ du tourisme mauricien», de «point de mire tival de la galette de sarrasin de ; tre de rue de Shawinigan, et combien national» et d'exemple «de bonne gestion la Classique internationale de canots sur la d'autres qui soulignent à tout moment le et d'audacieuse réalisation». Les scepti­ rivière Saint-Maurice, de La Tuque à Trois- goût de la fête et l'hospitalité chaleureuse ques ont été rapidement confondus. Elle est Rivières (1934); la saison de la pêche aux des gens de la Mauricie. Si, tout le long de à la fois un centre de sciences, alliant spec­ petits poissons des chenaux de Sainte-Anne- la rivière Saint-Maurice, les Mauriciens ont tacles multimédias, ballades sur l'eau, vi­ de-la-Pérade; à Trois-Rivières, le Grand Prix retrouvé leur beau et fier cours d'eau et se site d'une vieille centrale hydroélectrique, de Trois-Rivières, l'International de l'art l'ont entièrement approprié, il en est ainsi démonstrations concrètes pour retracer vocal de Trois-Rivières, la Biennale inter­ des gens de Trois-Rivières qui ont quasiment l'œuvre des pionniers de l'électricité. S'y nationale d'estampe contemporaine; sans redécouvert leur majestueux fleuve Saint- ajoutèrent Kosmogonia, un spectacle de oublier le Festival international de la poé- Laurent grâce au superbe aménagement du haute qualité, une aire de jeux pour jeu­ nes et moins jeunes et, depuis deux ans, deux expositions de haut calibre intitulées Le Corps transformé (2003) et L'Arche de Noé (2004). N'oublions pas surtout la Tour d'observation, la deuxième plus haute au Québec, d'où une vue imprenable s'offre aux visiteurs. Il est possible que d'ici peu un Musée Jean-Chrétien se retrouve dans la première aluminerie canadienne cédée par la Compagnie Alcan à cette nouvelle institution culturelle. Depuis les efforts méritoires de messieurs Trudel et Desaulniers, personne n'ose plus mainte­ nant parler de la nouvelle ville de Shawi­ La pêche aux petits poissons des chenaux à La Pérade. Carte postale J.M. Tessier. nigan avec les mêmes termes défaitistes Collection Normand Caron qu'il y a une quinzaine d'années. La Cité sie de cette même ville. Trois-Rivières, Ville Parc portuaire, d'où l'on peut apercevoir de l'énergie et sa tour d'observation éle­ d'histoire et de culture, est aussi devenue dans toute sa beauté le pont Laviolette vée au-dessus de la célèbre chute de Shawi­ au fil des ans la Capitale mondiale de la poé­ (1967), devenu avec le temps le symbole nigan ont revêtu dès lors une valeur sym­ sie lorsque survient l'automne. Elle est la même de la capitale régionale. bolique. Leur installation tout autant que seule ville, semble-t-il, qui possède un mo­ Dans cette région, dans cette société leur succès ont sonné dans le ciel mauri­ nument au Poète inconnu. Autre fait typi­ qui connaissent en ce moment un RÉVEIL à cien comme un coup de clairon, ont claqué que de cette capitale régionale. Lorsque bien des égards, surtout qui découvrent avec comme un coup de fouet et ont offert au survient le décès d'un poète ou d'un artiste, une passion renouvelée son patrimoine et Québec le vibrant témoignage du RÉVEIL il est de tradition dans cette ville, a déjà ra­ toutes ses riches facettes ont été fondées ou d'une ville, d'une région qui ont renoué conté Jean-Marc Beaudoin du Nouvelliste, se sont renouvelées les sociétés d'histoire,

HISTOIRE QUEBEC NOVEMBRE 2004 PAfiE 18 les plus documentées». Dans les prochai­ nes années, selon encore madame Corbo, la Mauricie «fera aussi l'objet d'une autre parution dans la collection "Les régions du Québec : histoire en bref"», c'est-à-dire «un condensé en format réduit, de 192 pages, à la portée d'un public plus large, fait valoir l'éditeur, qui pense ici aux étudiants et aux touristes, entre autres». Il n'est pas inutile de souligner ici le travail remarquable ac­ compli par le département des études qué­ bécoises de l'UQTR pour étudier en profon­ deur toutes les étapes séculaires du passé de la Mauricie, allant de l'époque des Attikamekw, encore présents dans les com­ munautés de Wemotaci (Weymontachie, Le pont Laviolette. Photo Normand Caron entre La Tuque et Parent) et d'Obedjiwan les sociétés de généalogie ou les nouvelles région. Appartenance Mauricie a organisé (au nord du réservoir Gouin), jusqu'à l'épo­ sociétés d'histoire et de généalogie locales. avec brio le 36" congrès de la Fédération que post-industrielle de la fin du XX" siècle L'on peut en compter environ une des sociétés d'histoire du Québec (FSHQ) qui et les nombreux défis de la mondialisation. trentaine dans les trois sous-régions. Durant s'est tenu à Shawinigan en 2001, où son Suivant l'expression de monseigneur l'Entre-Deux-Guerres, l'abbé Albert Tessier, comité organisateur s'est signalé notam­ Félix-Antoine Savard, la Mauricie est une régionaliste et chef de file régional engagé ment par la transparence et la rigueur de terre où s'est grandement manifestée «un avec le concours d'amis, avait fondé la So­ son administration financière. Certains des obscur passé de travaux pénibles, deforces ciété d'histoire de Trois-Rivières (1926-circa membres de son conseil d'administration se ingénieuses, de courage et même de servi­ 1980), une société autant locale que régio­ sont illustrés aussi en d'autres circonstan­ tudes». Dans cette région où l'or blanc et nale, lin 1995, une deuxième société d'his­ ces, comme par l'organisation et la tenue à l'or vert ont répandu si généreusement leurs toire régionale, dénommée APPARTE­ Trois-Rivières et à Grandes-Piles, du 3 au 6 richesses, un mot devrait à la fois résumer NANCE MAURICIE, voyait le jour grâce à octobre 1996, de la IX" Rencontre interna­ sa société et son potentiel régional, un seul l'action dynamique de Mario Lachance et tionale des flotteurs et des radeliers, une mot : ÉNERGIE. Il n'est donc pas surprenant d'une dizaine d'ami(e)s conscients du riche première en Amérique, et qui regroupait que l'on ait autrefois appelé cette région « le potentiel patrimonial de la région. Son siège environ cinq cents participants venant de Pays de l'énergie», que sa principale insti­ social est établi à Shawinigan, au Centre- dix pays européens. Notons que depuis quel­ tution culturelle porte le nom de Cité de de-la-Mauricie, à la Cité de l'énergie qui a ques années se tient au printemps à Trois- l'énergie, que son CSSS se soit vu accoler constamment appuyé ses initiatives. Depuis Rivières le Salon national d'histoire et de l'épithète de l'énergie et que sa Commission bientôt dix ans, la jeune société d'histoire patrimoine, un rendez-vous couru des ama­ scolaire ait reçu le nom de l'énergie, car tant régionale, comptant environ cinq cents teurs d'histoire. Enfin, il faut annoncer pour d'énergie fut déployée par toute sa popula­ membres, en a étonné plus d'un en démon­ le 8 octobre 2004, la sortie importante d'une tion au cours des siècles passés et appelée trant une activité remarquable. Elle s'est fait histoire globale de la Mauricie au Musée à en déployer autant, présentement, et dans principalement connaître en menant des québécois de culture populaire de Trois-Ri­ les décennies à venir. L'énergie sous toutes recherches historiques variées, en publiant vières. Un livre de plus d'un millier de pa­ ses formes est donc l'un des éléments les annuellement un calendrier historique re­ ges et groupant environ deux cents photo­ plus déterminants pour décrire autant l'es­ cherché, en éditant deux fois l'an une revue graphies et gravures, «pour couvrir les mé­ pace mauricien que la société qui l'a appri­ appelée Le Nouveau Mauricien, en organi­ moires de la région», selon Linda Corbo du voisé. Espérons que cet article, si modeste sant diverses activités saisonnières, et en Nouvelliste. Un livre qui s'est fait attendre soit-il, vous fera mieux percevoir les raci­ tenant depuis 1997 à chaque automne un parce que l'on voulait profiter surtout des nes profondes et puissantes qui lient les colloque régional des sociétés d'histoire lo­ mémoires de maîtrise et des thèses de doc­ Mauriciens à leur TERRE bien-aimée, à leur cales. A cette occasion, depuis 1989, le pré­ torat des étudiants de l'Université du Qué­ fougueuse RIVIÈRE, où tant d'énergie fut sident d'Appartenance Mauricie remet le bec à Trois-Rivières (UQTR). Mais, affirment consentie, où tant de vaillance fut démon­ Prix Raymond-Douville, un Mauricien de les directeurs de cette œuvre collective, les trée, et qui expliquent finalement notre dé­ souche, à une personne ayant joué un rôle historiens chevronnés que sont René Hardy sir si profond d'APPARTENANCE à une ré­ majeur dans l'une ou l'autre des sociétés et Normand Séguin: «À cause des efforts gion arrosée de sueur d'une multitude de d'histoire et\ou de généalogie locales de la collectifs, la Mauricie sera Tune des régions femmes et d'hommes valeureux.

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