Xavier Vallat En Haute Cour De Justice De La Libération
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Université Lyon 2 Séminaire d'Histoire Politiques du XIXe et XXe siècle Un législateur antisémite au service du Maréchal Tribune de Xavier Vallat en Haute Cour de Justice de la Libération Morand Nicolas Directeur de mémoire : Bruno Benoît mémoire soutenu le 05 septembre 2013 Jury : Bruno Benoît et Gilles Vergnon Table des matières Remerciements . 5 Introduction . 6 « la double fracture de 19471 » . 7 Un essoufflement de l'épuration française ? . 8 Xavier Vallat : « du nationalisme chrétien à l'antisémitisme d’État10 » . 10 Un procès en Haute Cour de justice de la libération . 13 I. Xavier Vallat aux affaires Juives : prêcheur de l'Antisémitisme, législateur scrupuleux et pion de l'Allemagne . 16 A. Une défense acharnée : l'antisémitisme en action30 et le discours d'un fanatique . 17 Le coup d'éclat lors de l'incident Kriegel . 17 La tribune antisémite de Vallat : « Discussion théologique à la Haute Cour32 » . 19 B. Un technocrate face à son bilan . 22 Une importante œuvre législative... au service de l'occupant . 22 Le piège de la collaboration . 27 C. La condamnation de l'antisémitisme d’État . 31 Silence ou reconnaissance du génocide dans l'après-guerre ? . 31 L'antisémitisme dans les procès d'épuration . 32 II. Le collaborateur Vallat : un pétainiste jusqu'au boutiste . 39 A. la condamnation de la participation au régime de Vichy . 39 La participation au régime de Vichy : une suite logique pour les droites françaises ? . 39 Maréchalisme et pétainisme : un adepte de la révolution nationale . 41 Le secrétariat général aux anciens combattants . 42 B. les éditoriaux d'août 1944 : la loyauté au Maréchal à quel prix ? Xavier Vallat acculé . 43 Les thèmes défendus par Vallat dans les éditoriaux . 44 La position de Xavier Vallat durant l'occupation : neutralité, double-jeu ou bouclier ? . 50 C. La défense : un gentleman collaborateur ? . 51 Les témoignages à décharge . 51 Un accusé aux « hautes qualités humaines » . 52 Un véritable patriote . 53 Le durcissement des charges à son encontre . 55 Conclusion . 56 Bibliographie . 58 Ouvrages Généraux . 58 Sur le procès de Xavier Vallat . 58 Article . 58 Presse couvrant le procès . 59 Archives . 59 Annexes . 60 Déroulé du Procès . 60 Audience du 2 décembre 1947 . 60 Audience du 3 décembre 1947 . 60 Audience du 4 décembre 1947 . 60 Audience du 5 décembre 1947 . 60 Audience du 10 décembre 1947 . 61 Audience du 11 décembre 1947 . 61 Coupures de Presse . 61 Remerciements Remerciements Je remercie Bruno Benoit et Gilles Vergnon, qui ont chacun d'eux, par les enseignements qu'ils m'ont dispensés, conforté ma passion pour l'Histoire. Je leur dois le choix de ce séminaire et la réalisation de ce travail. MORAND Nicolas 5 Un législateur antisémite au service du Maréchal Introduction Xavier Vallat a été jugé par la Haute Cour de la libération au mois de décembre 1947, en raison de sa participation au gouvernement de Vichy. Son procès se déroule entre le 2 décembre 1947 et le 11 décembre 1947, période marquée par de nombreux bouleversements en France : les questions économiques ainsi que le contexte politique, marqué par le début de la guerre froide et la mise à l'écart du parti communiste, constituent les préoccupations essentielles de la population française. Le procès de Xavier Vallat arrive donc à un moment où l’Épuration, est moins passionnée et moins sévère que dans l'immédiat après guerre des années 1944 et 1945. Xavier Vallat est inculpé pour avoir occupé différentes fonctions dans le gouvernement institué par le Maréchal Pétain entre juillet 1940 et août 1944. Secrétaire général aux anciens combattants de juillet 1940 à mars 1941, il devient ensuite le premier Commissaire général aux questions juives. Il occupe ce poste jusqu'en mai 1942. Il reste au service du Maréchal Pétain durant les quatres années de collaboration, occupant des postes moins exposés au ministère des affaires étrangères et de l'agriculture. Durant l'été de la Libération, il remplace au micro de la Radio nationale son ami Philippe Henriot, assassiné le 28 juin 1944 ; poursuivant dans ses éditoriaux la propagande du régime de Vichy. Deux ans avant le procès de Xavier Vallat, les deux chefs de Vichy ont déjà été jugés et condamnés. La mort est requise contre Pierre Laval, exécuté le 9 octobre 1945, tandis que le Maréchal Pétain a vu sa condamnation à la peine capitale commuée, il poursuit ainsi sa détention à perpétuité sur l’île d'Yeux. Le régime de Vichy a donc été rendu coupable de trahison, après avoir été déclaré illégal et illégitime dès les premiers moments de la France Libre. Xavier Vallat n'est qu'un « second couteau », pourtant son procès est l'occasion de juger la politique antisémite menée par le régime de Vichy. En même temps que Vallat, est jugé son successeur au Commissaire général aux question juives, Darquier de Pellepoix, alors en fuite en Espagne. C'est dans un climat tendu qu'a lieu ce procès : le jugement de ce législateur antisémitisme réveille les blessures de l'après-guerre, notamment pour les anciens résistants et la population juive. Pourtant ce procès ne se déroule pas comme un réquisitoire implacable à l'encontre du « collaborateur et antisémite Vallat ». Celui ci n'est pas seul, défendu par deux avocats et aidé par des témoins à décharge qui lui portent tous une grande estime. Surtout, Xavier Vallat surprend. Il adopte une attitude risquée et inédite puisqu'il assume ses actes et se lance même dans la défense du régime de Vichy. Sa stratégie semble payante puisqu'il échappe à la peine de mort : il est condamné à dix ans de détention et à l'indignité nationale. Les chroniqueurs judiciaires offrent un témoignage intéressant de l'atmosphère qui entour le procès et de l'ambiance dans la salle. Ils offrent des clefs de compréhension des réactions que suscite les débats du procès dans l'opinion et les jurés. Nous nous appuierons sur des articles publiés dans l'Aurore, l’Époque, Franc-Tireur, Le Monde et Ce Soir pour commenter ce procès. Avant d'analyser le déroulé du procès, il est nécessaire de présenter le contexte dans lequel il prend forme : l'actualité politique et économique de l'année 1947, la poursuite du 6 MORAND Nicolas Introduction processus d’Épuration, la juridiction chargée de juger l'accusé et bien sûr, de s'intéresser au parcours qui a conduit Xavier Vallat devant la Haute Cour de Justice de la Libération. « la double fracture de 19471 » Cette formule résume les changements brutaux connus par la France sur le plan intérieure et extérieure en cette année 1947. Le pays observe impuissant la mise en place des blocs et le début de la guerre froide. La seconde guerre mondiale a ébranlé l'Empire français et le processus de décolonisation prend forme. Il va perturber la vie politique de la Quatrième République, déjà fragilisée sur le plan interne. Le positionnement de la France en politiques étrangère a des répercussions sur sa vie politique intérieure. En effet le plan Marshall proposé par les États-Unis en juin 1947 vise à apporter une aide aux États en difficulté afin de maintenir les conditions nécessaires à la paix et à la stabilité. Ce plan n'est pas sans arrière pensée : il garantit aux États-Unis le maintien des échanges commerciaux avec l'Europe, et s'adresse aux « peuples libres qui cherchent à préserver leurs institutions démocratiques contre les pressions totalitaires intérieures et extérieures2 ». La France frise l’asphyxie économique et ne peut qu'accepter cette offre qui l'installe de fait dans le bloc de l'Ouest. Sur le plan de la politique intérieure, le pays connaît de nombreux bouleversements. Après la Libération, le Gouvernement Provisoire de la République Française, héritier de la Résistance, avec le Général de Gaulle comme chef, assure le redressement de la France, et la transition vers la IVe République. Un mouvement d'unité nationale prend forme en 1944, à travers l'union des trois principaux partis de France, le PC, la SFIO et le MPR. Jusqu'en 1947 plusieurs ministres communistes participaient au gouvernement, dont François Billoux au ministère de la défense. Mais au printemps 1947, c'est l'éclatement du tripartisme avec coup sur coup la fondation du Rassemblement du Peuple Français par le Général de Gaulle le 14 avril 1947, et le renvoi des ministres communistes du gouvernement Ramadier le 5 mai 1947. La Quatrième République doit alors faire face à une double opposition des deux principaux partis de la Résistance. Les communistes entrent officiellement dans l'opposition en octobre 1947 à l'issue d'une réunion des responsables des partis communistes européens préparant le Kominform. La France connaît des difficultés économiques liées à la reconstruction. Le climat de l'automne est tendu, la base ouvrière provoque des grèves spontanées, encadrées par la CGT quand elle le peut. Ramadier parle d'un « mouvement giratoire des grèves 3». La peur d'un coup de force communiste prend forme à travers la multiplication des grèves et des affrontements qui prennent un caractère quasi insurrectionnel. Ces événements nourrissent l'anticommunisme, de Gaulle dénonce le « parti séparatiste » aux ordres de l'Union soviétique. La fin de l'année 1947 voit donc une République essayer tant bien que mal de reconstruire la France, alors que l'unité nationale de la Libération est brisée. 1 Jean-Pierre Rioux, La France de la Quatrième République. L'ardeur et la nécessité (1944-1952), Paris : Edition du Seuil, 1980, pp 159-186 2 Ibid 3 Ibidem MORAND Nicolas 7 Un législateur antisémite au service du Maréchal Au 2 décembre 1947, ce sont les tensions provoquées par les communistes, les sabotages et la situation économique qui font la une des journaux. L'épuration ne passionne plus l'opinion comme en 1944.