L'expérience De La Différence Religieuse Dans L'europe
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L’EXPÉRIENCE DE LA DIFFÉRENCE RELIGIEUSE DANS L’EUROPE MODERNE (XVIe-XVIIIe SIÈCLES) BERTRAND FORCLAZ (DIR.) L’EXPÉRIENCE DE LA DIFFÉRENCE RELIGIEUSE e e DANS L’EUROPE MODERNE (XVI -XVIII SIÈCLES) ÉDITIONS ALPHIL-PRESSES UNIVERSITAIRES SUISSES © Éditions Alphil-Presses universitaires suisses, 2012 Case postale 5 2002 Neuchâtel 2 Suisse Ce livre est sous license : www.alphil.ch Alphil Distribution [email protected] ISBN 978-2-940489-09-1 Ce livre a été publié avec le soutien : - du Fonds national suisse de la recherche scientifique dans le cadre du projet pilote OAPEN-CH - de la Commission des publications de la Faculté des lettres et sciences humaines de l’Université de Neuchâtel Illustration de couverture : Rijksmuseum – Amsterdam Fishing for Souls. Adriaen Pietersz van de Venne (1614). Responsable d’édition : Jacques Barnaud REMERCIEMENTS Arrivé au terme de cette entreprise collective, c’est avec plaisir que j’aimerais remercier vivement celles et ceux qui m’ont aidé dans la préparation et l’organisation du colloque dont cet ouvrage constitue les actes : mes collègues de l’Institut d’histoire de l’Université de Neuchâtel, et en particulier Olivier Christin et Jean-Daniel Morerod pour leurs conseils avisés, Arlette Bagnoud et Jérôme Salmeron pour la gestion efficace des aspects organisationnels. Mes remerciements s’adressent aussi à celles et ceux dont l’aide a été précieuse pour l’édition de l’ouvrage : mon assistante Franziska Kissling, qui m’a secondé dans la mise en forme du manuscrit et l’établissement de l’index ; mes éditeurs, Alain Cortat et Jacques Barnaud, qui m’ont accompagné de façon efficace et amicale ; les deux collègues anonymes qui ont bien voulu expertiser l’ouvrage. Mes remerciements vont enfin au Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique et à la Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’Université de Neuchâtel pour leur appui financier, qui a permis la publication de cet ouvrage. Cet ouvrage est dédié à Willem Frijhoff, à l’occasion de son 70e anniversaire. 7 AVANT-PROPOS BERTRAND FORCLAZ Au cours des dernières années, la thématique de la coexistence religieuse et des contacts supraconfessionnels dans l’Europe moderne s’est imposée comme un objet de recherche central. Les causes de cette émergence sont diverses : s’il s’avère impossible d’en établir ici une liste exhaustive, elles renvoient de toute évidence à deux mouvements de fond, l’un sociétal, l’autre historiographique, qui sont bien sûr liés. La sécularisation des sociétés européennes au cours des dernières décennies a permis de poser un regard plus détaché sur les conflits religieux de l’époque moderne, tandis que les défis posés par la coexistence avec l’Islam incitent à chercher des pistes de réponse dans le passé, et dans le difficile apprentissage de la pluralité confessionnelle qu’a connu l’Europe1. Sur le plan historiographique, la laïcisation et la « déconfessionnalisation » de l’histoire religieuse, tout d’abord, ont permis aux chercheurs de mettre en œuvre de nouvelles 1 Sur la problématique de la sécularisation, il existe une littérature abondante. Voir notamment LEHMANN Hartmut, Säkularisierung. Der europäische Sonderweg in Sachen Religion, Göttingen : Wallstein, 2004 (recueil d’articles de l’un des promoteurs du concept) ; MCLEOD Hugh, USTORF Werner (eds.), The Decline of Christendom in Western Europe, 1750-2000, Cambridge : Cambridge University Press, 2003 (pour une perspective critique). Sur les défis posés par l’Islam, voir par exemple GÖLE Nilüfer, Interpénétrations : l’Islam et l’Europe, Paris : Galaade, 2005 ; MARIAN Michel, ROY Olivier, « La difficile acclimatation de l’Islam », Esprit, 333, mars-avril 2007, p. 82-94. 9 BERTRAND FORCLAZ approches, moins tributaires du point de vue des autorités politiques et ecclésiales. Ce changement de regard ainsi que l’affaiblissement des grands modèles interprétatifs, comme le paradigme de la confessionnalisation, ont ensuite entraîné la redécouverte de l’étonnante diversité confessionnelle que connaissaient de nombreux territoires de l’Europe à l’époque moderne. L’adéquation proposée par les tenants de la confessionnalisation entre imposition de l’uniformité confessionnelle d’une part, affirmation de l’« État moderne » de l’autre – le fameux cujus regio, ejus religio – se voit donc nuancée par les travaux les plus récents2. Cet ouvrage, qui réunit les actes d’un colloque tenu en octobre 2010 à l’Université de Neuchâtel, entend ouvrir de nouvelles pistes de discussion à l’échelle européenne, par le biais d’un dialogue entre des chercheurs s’inscrivant dans des traditions nationales bien différentes. Avant d’entrer dans le vif du sujet, il peut s’avérer utile d’offrir quelques pistes de réflexion historiographique, afin de baliser le parcours que nous proposerons au lecteur3. De façon schématique, on peut distinguer trois étapes dans l’historiographie des quarante dernières années. Si les premiers travaux étudiant en profondeur la coexistence religieuse et les contacts interconfessionnels remontent aux années 1970, il convient de rendre justice à un précurseur, le jésuite français Joseph Lecler, qui, dès 1955, dans son Histoire de la tolérance au siècle de la Réforme, s’intéressa non seulement aux penseurs de la tolérance mais également aux conditions, notamment politiques, qui permirent 2 Sur la « laïcisation » de l’historiographie religieuse, voir l’introduction de Willem Frijhoff dans cet ouvrage. Sur le paradigme de la confessionnalisation, voir SCHILLING Heinz, Ausgewählte Abhandlungen zur europäischen Reformations- und Konfessionsgeschichte, Berlin : Duncker & Humblot, 2002 ; REINHARD Wolfgang, Ausgewählte Abhandlungen, Berlin : Duncker & Humblot, 1997 (il s’agit de rééditions des articles fondateurs, publiés à partir de la fin des années 1970) ; en français, voir REINHARD Wolfgang, Papauté confessions modernité, Paris : Éditions de l’EHESS, 1998, et Études germaniques, « La confessionnalisation dans le Saint-Empire XVIe-XVIIe siècles », 57, 2002, 3 (avec un article de Schilling). Parmi les critiques, voir notamment SCHINDLING Anton, « Konfessionalisierung und Grenzen von Konfessionalisierbarkeit », in SCHINDLING Anton, ZIEGLER Walter (Hg.), Die Territorien des Reiches im Zeitalter der Reformation und Konfessionalisierung. Land und Konfession 1500-1650, vol. 7, Bilanz – Forschungsperspektiven – Register, Münster : Aschendorff, 1997, p. 9-44 ; VON GREYERZ Kaspar, JAKUBOWSKI-TIESSEN Manfred, KAUFMANN Thomas (Hg.), Interkonfessionalität – Transkonfessionalität – binnenkonfessionelle Pluralität. Neue Forschungen zur Konfessionalisierungsthese, Gütersloh : Gütersloher Verlagshaus, 2003. 3 Pour un panorama historiographique plus ample, on se référera à l’introduction de Willem Frijhoff. 10 AVANT-PROPOS la cohabitation – pérenne ou temporaire – des confessions rivales dans plusieurs pays d’Europe4. À sa suite, ce furent des historiens français et néerlandais – Elisabeth Labrousse, Robert Sauzet et Willem Frijhoff – qui, les premiers, étudièrent la coexistence, les conversions et les mariages mixtes : ce n’est sans doute pas un hasard si ces deux pays avaient connu une homogénéisation confessionnelle tardive, dans le cas de la France, ou une situation de coexistence durable, dans celui des Pays-Bas5. Dans les pays où prédomina le principe de territorialité des confessions, comme le Corps helvétique ou le Saint-Empire, l’étude de la coexistence confessionnelle fut plus tardive : le cas des villes paritaires, comme Augsbourg, étudié notamment par Étienne François, était plutôt envisagé comme une exception6. Si ces travaux restaient relativement isolés, à partir des années 1990, en revanche, on constate une multiplication des recherches sur la coexistence confessionnelle, en particulier pour les villes des Provinces-Unies, la France ou l’Angleterre ; pour les territoires bi- confessionnels du Corps helvétique et du Saint-Empire, le paradigme de la confessionnalisation a longtemps freiné cet essor7. Les mutations 4 LECLER Joseph, Histoire de la tolérance au siècle de la Réforme, Paris : Albin Michel, 1994 (éd. originale : Paris : Aubier-Montaigne, 1955). 5 Voir LABROUSSE Elisabeth, « La conversion d’un huguenot au catholicisme en 1665 », Revue de l’histoire de France, 64, 1978, 172, p. 55-68 ; LABROUSSE Elisabeth, « Les mariages bigarrés : unions mixtes en France au XVIIIe siècle », in POLIAKOV Léon (éd.), Le couple interdit : entretiens sur le racisme (la dialectique de l’altérité socio-culturelle et la sexualité), Paris et La Haye : Mouton, 1980, p. 159-176 ; SAUZET Robert, Contre-Réforme et Réforme catholique en Bas-Languedoc : le diocèse de Nîmes au XVIIe siècle, Bruxelles et Paris : Nauwelaerts, 1979 ; FRIJHOFF Willem, « La coexistence confessionnelle. Complicités, méfiances et ruptures aux Provinces-Unies », in DELUMEAU Jean (éd.), Histoire vécue du peuple chrétien, 2 vol., Toulouse : Privat, 1979, vol. 2, p. 229-257. 6 Voir notamment FRANÇOIS Étienne, Protestants et catholiques en Allemagne : identité et pluralisme, Augsburg, 1648-1806, Paris : Albin Michel, 1993 (il s’agit de sa thèse d’habilitation, soutenue en 1986). 7 Au sein de la vaste production historiographique, on se limitera à citer quelques travaux particulièrement importants : HANLON Gregory, Confession and Community in Seventeenth- Century France : Catholic and Protestant Coexistence in Aquitaine, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, 1993 ; KAPLAN Benjamin J., Calvinists and Libertines. Confession and Community in Utrecht, 1578-1620, Oxford : Clarendon Press, 1995 ; VOLKLAND Frauke, Konfession