PENNARBED Revue régionale de géographie, sciences naturelles, protection de la nature Publication trimestrielle

34eannée 1988 Volume18 Fascicule 1 n° 128

L'anse de l'Aber en Louis Chauris ...... 1 Les goëlands et le spemot Jean-Yves Monnat ...... 12 Rencontres naturalistes Une tortue de kemp sur les galets ...... 19 A propos d'esturgeon...... 20 La bellardie germandrée dans le Finistère ...... 22 Échos du bout du monde Nouvelles des réserves 1987 24 Livre d'école ou stage à Trunvel ...... 30

Livres ...... ···· · ·············· 31

Cotis•tions et 1bonnements : Adhbion simple ...... 70 F ~tudienb...... 35 F Adhésion 1t ebonn1ment Pen ar Bed ...... 150 F Adhbion et ebonnement ~tudienb ...... 1 15 F Abonnement seul ...... 1 00 F

Tovt ttcovn•ff conctm•nt tf'S rtQit~n t~ CM'~ COI•UttQn) tu .U)('f'\1\fm r r.n lr\ (omrTUnot\ otPtMll&fotiOI"t r ~OOCumtnl~f"~#tSW"f~ 5(PN8 üP )l 166 h,.t AMIOit funct. l9l00 BREST Ttl 1961490718

Le courrier concernant la rédaction d e Penn ar Bed (projet d'arti cles . courrier aux auteurs) est à adresser à :

Marcel Le Pennee, S.E.P.N.B., Faculté des Sciences 29287 BREST Cedex - Tél. 98.03.16.94

Photo de couverture: Paysage. Dos de couverture: Poster de François Bourgeon. L'anse de l'Aber en Roscoff Un ancien marais littoral envahi par la mer

Louis Chauris

Au cours des derniers millénaires, le littoral septen­ trional du Pays de Léon a subi d'importantes modifi­ cations liées aux variations du niveau marin. Depuis quelques siècles, les interventions humaines se sont ajoutées aux facteurs naturels. La baie de fournit un excellent exemple de telles tranformations. L'anse de l'Aber en Roscoff offre une nouvelle illus­ tration de la fragilité des zones littorales et de l'inter­ férence des modifications anthropiques avec les processus naturels.

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marque les limites de l'avancée de la mer Une évolution rapide éémienne. La plateforme littorale, émergée du trait de côte et immergée, est hérissée d'innombrables récifs fossiles ou actuels. Ces monad­ noks(1) sont encore plus ou moins empâ­ La rég ion roscovite est située à l'extrémité tés par les revêtements quaternaires: res- nord-est du Pays de Léon. Le plateau du Léon est en contact avec le bas pays côtier par une falaise morte haute d'une cinquan­ (1) Les monadnoks sont des récifs résiduels qui domi­ taine de mètres au sud de l'Aber et qui nent une plateforme d'érosion. ._.. L'A BEll . -~ ~- ·. ·· ·. ·. ... -.. :.··. .·.· •...... · :~ ...:· ...: . ·.:·:·.. .. .

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La région de Roscoff 1: Limite des plus basses mers. 2: Limite orientale des sables dunaires de Santec. 3: Limite orientale de la pellicule sableuse. 4: Autres dunes. 5: Tourbiè res littorales. 6: Zones humides. 7: Direction principale de la houle. tes de plages éémiennes, head(2) et limons de-Léon, fournit une assez bonne image wechseliens souvent très épais, petits de la morphologie côtière au nord de San­ dépôts tourbeux flandriens, larges placa­ tec avant l'isolement de l'île de Batz. A pré­ ges de sables dunaires déposés depuis sent, seules quelques pointes rocheuses l'Age du Fer jusqu'au 18e siècle. résistent encore, à l'ouest de Siee et de Batz, mais d'anciens promontoires, comme Le recul de la côte est particulièrement Roc'h Santec ou Reyer Dou n, sont réduits rapide sur les plages dunaires : dans la à l'état de récifs isolés sous l'influence partie nord-est du Pouldu, 65 mètres entre conjuguée de la transgression marine et 1846 et 1970; dans la partie centrale du des houles occidentales. Dossen, 50 mètres en trente ans. Les reculs spectaculaires sont liés à la coïncidence de fortes tempêtes avec les grandes Un ancien marais littoral marées. Au Dossen, ce sont huit à dix mètres de dunes qui ont été emportés au début de novembre 1967,1ors d'une marée de cœfficient 112 accompagnée de vents Malgré son nom, l'Aber de Roscoff n'offre de 115 km / h. De tels reculs ont modifié peu guère de traits communs avec les abers de à peu le trait de côte. La dépression enva­ la côte nord du pays de Léon ; ceux-ci hie par le sable, qui s'étend actuellement à correspondent aux rias des géographes, l'est du Dossen en direction de Saint-Pol- c'est-à-dire des rivières dont le cours infé­ rieur, souvent profondément encaissé a été envahi par la mer. L'anse de l'Aber est une large dépression (1800 m sur 1100 rn) (2) Masse boueuse de pierrailles et d'arène fluant sur les pentes en période de dègel aux époques glaciaires à fond plat, entièrement située au-dessus (coulées de solifluxion). de la ligne de mi-marée, où divague à

2 basse mer un maigre filet d'eau en prove­ nance du marais qui la prolonge au sud­ ouest sur plus d'un kilomètre en direction Les modifications anthropiques du Pouldu. Au sud-est, l'horizon est barré par la falaise morte, au nord-ouest par le cordon dunaire de· Perharidic acc roché à Toute la partie sud-ouest de l'Aber a été quelques . monadnocks granitiques. Plu­ soustraite au domaine maritime par la sieurs pointements rocheux surgissent construction, au 19e siècle, d'une digue de dans l'anse elle-même. 500 mètres de long en vue de l'établisse-

Quel contra l'te entre la levée ancienne soigneusement construite en blocs shisteux dressés verticaleme_ryt et les enrochements réc ents au mieux formés de blocs entassés sans ordre.

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3 ment d'un polder. Actuellement, les agri­ rapie. Avec ses petites falaises rocheuses culteurs continuent de déverser du sable et ses plages dunaires, la côte ouest de sur la zone marécageuse pour étendre les l'Aber a mieux conservé son caractère surfaces cultivables. La partie sud-est de naturel primitif; cependant, des murs sou­ l'anse est également limitée par une levée vent anciens 1imitent localement le domaine qui supporte la route Roscoff-Santec. On du centre hélio-marin de Perharidic, tandis remarquera le contraste entre le mur de que des enrochements tendent à présent à cette levée ancienne, soigneusement cons­ ourler la base des dunes. En fait, seule truit en gros moellons schisteux dressés Penn ar Men, la pointe de Perharidic à verticalement, et les enrochements récents l'extrémité septentrionale de l'Aber, offre du fond méridional de l'anse, formés de encore un caractère sauvage. Par ailleurs, blocs entassés sans ordre ou d'amoncel­ plusieurs pointements rocheux affleurant lements divers (poteaux en ciment brisés.. .) dans l'anse ont été transformés en car­ du plus déplorable effet. Presque toute la rières et parfois totalement défigurés (l'an­ rive est de l'anse est bordée de murs qui cien rocher 13 de la carte marine par protègent les installations de thalassothé- exemple).

Les modifications anthropiques dans l'anse de l'Aber et ses abords 1: Zone rocheuse non aménagée. 2: Dunes non enrochées. 3 : Murs, digue levée. 4: Enroche­ ments de types variés. 5: Pointements rocheux exploités. 6 : Zone humide. 7: Prélèvements de sables lourds.

Roc'h '•r 'Bleiz: 0 Enez GLQ~'i7 6J'l o Rolea.

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4 gallo-romaine (environ 1500 ans BP). Elle a entraîné l'envahissement du marais littoral Une fine pellicule sableuse par le nord.

En dehors des affleurements rocheux, le sol de l'Aber est constitué par un revête­ L'empreinte marine ment limoneux le plus souvent gris-bleu, et localement de teinte beige comme dans les zones marginales ouest et est. En amont de la digue, le sol du polder est également formé par ce limon gris-bleu. La mince pellicule de sédiments meubles Les limons et plus rarement la tourbe, intertidaux de l'Aber est soumise à la dou­ affleurent parfois directement sur l'estran. ble action des vagues et des courants de Ailleurs, la couverture sableuse reste tou­ marée. L'examen de la rose des vents à la jours peu épaisse, de l'ordre de quelques station météorologique, toute proche, de dizaines de centimètres au maximum. Le l'île de Batz, indique la nette prédominance sable fin de surface (3) passe vers le bas à des vents du secteur ouest. La résultante un gravier analogue au cailloutis arénifère des vents supérieurs à 100 km / h est orien­ de la base des limons qui en semble la tée approximativement ONO-ESE. La plus source. grande partie de l'Aber se trouve ainsi en zone d'abri : les grandes houles occiden­ tales sont arrêtées par la presqu'île de Per­ La présence d'anciennes prairies de joncs haridic, et l'île de Batz protège l'anse des dont les rhizomes sont encore visibles. houles du nord: en fait, seules les houles ainsi que de tourbes, en particulier vers la en provenance du NNE ont une influence rive sud de l'anse, démontre que l'anse de importante. L'amplitude des marées, de l'Aber correspond à un ancien marais litto­ l'ordre de neuf mètres en période de vives ral, développé au pied de la falaise morte et eaux, induit de forts courants alternatifs, et isolé de la mer par les cordons dunaires du laisse à nu un large estran atteignant Pouldu-Perharidic, selon un dispositif fré­ 2,4 km du fond de l'Aber au chenal de l'île quent le long de la côte septentrionale du de Batz. Pays de Léon. Actuellement, des sources d'eau douce surgissent encore dans la partie orientale du fond de l'Aber, comme Des plages de sable fin ourlent les rives de dans un marais terrestre. Le marais s'est l'Aber entre les zones rocheuses. Les unes formé à une époCJu e où le niveau de la mer passent aux dunes qui, tantôt sont nourries était légèrement plus bas qu'aujourd'hui. par les plages, tantôt les alimentent. Les La datation de la tourbe voisine de Jugan autres s'adossent à des obstacles anthro­ près du Pouldu a donné 2330 ans ± piques comme les cales ou les murs. Au 105 BP (4), c'est-à-dire une date légèrement sud du centre hélio-marin, un vieux mure­ antérieure à notre ère. La remontée des tin est en voie d'enfouissement sous le eaux paraît s'être amorcée après l'époque sable dunaire. Le profil longitudinal dissy­ métrique de plusieurs plages, notamment près de Roc'h Kroum et près de l'issue du (3) 250 J.lffi environ ruisseau drainant le polder, indique que, (4) BP before present. système de datation négatif à sous l'action de la dérive littorale, le sable partir d'une date de référence. 1950. tend à s'accumuler vers le sud.

- -·-·· ~- ... __ - ~ ..._ ....- .....~., Jo ;:: A la bas e d e la presqu'île de Perhari­ dic, la plage passe à l'une des rares dunes ~=- · qui reste libre d'enro­ 6(/)3 .' -·--...., -- . -.-.. --- ~,;.._. ..._._ -· ~~~~ ~---~~· cc,"'Qü..:.~ chement. ...Jo . ·- . .. .. =-- · -~

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Ride sableuse dissymétrique au fond de l'Aber: la pelle donne l'échelle.

De petites dunes hydrauliques se sont éta­ blies de part et d'autre de l'entrée resserrée de l'Aber. Dues au courant de jusant, les accumulations externes forment, au moins . - -:... ~~----...::.:..=. . . -. en partie, le banc du Ledanet : plusieurs grosses rides subparalléles à versant ·• -~ --~ ,::o . . ...~~ abrupt vers le nord-ouest. Les accumula­ tions internes, nettement moins importantes, sont dues au courant de flot ; dans la partie ~~:: -~ -:~:1: -.;~~:i-;;~ nord-ouest de l'anse au droit du centre >:-- - - · . '!".. ~ ~~ ".]10~ - ~ ....." - hélio-marin, el les dessinent de longues et ç : ·=--:iJ~;~~x;':;;ii-~ ...._t • .; · , - étroites rides surbaissées, dissymétriques ~~~~- -- ~- ·~ ~

Qu elques queues de comètes (5 ) se sont "';:: <0 développées dans la zone d'abri des poin­ .r:; tements rocheux qui accidentent l'Aber. () Leur orientation montre, comme on pouvait 5"' s'y attendre, l'influence prépondérante des -' houles au secteur NE. La zone d'enraci­ Petite queue de com è te dans la zone d'abri nement de la oueu e de comète accrochée du rocher (9, 1) au rocher 13 est en partie constituée par les débris d'exploitation du granite. Divers micro- reliefs peuvent être observés à la surface de l'estran. Ce sont des ripple­ marks dans les zones sableuses encore (5) Accumulation a pointe libre de sables et de galets a assez mobiles ou les cônes constitués par l'arrière d'un ilot ou d'un rocher. les tortillons sableux des arénicoles dans

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les secteurs où le mouvement de l'eau est variations des teneurs en sphène, minéral suffisamment amorti: un processus biolo­ dont la source primaire est à rechercher gique (6) prend ici le relais d'un processus dans les diorites de l'île de Batz. Il est pos­ physique. sible de suivre la migration de cet excellent traceur vers les rives de la presqu'île de Roscoff. La faiblesse des teneurs à l'ouest de Corn al Loa en Santec montre que le Origine des sables transit se fait en direction du sud -est et de

La pellicule sableuse superficielle qui tapis· se l'anse de l'Aber provient pour une part Minéraux ... importante de l'érosion, sous l'influence des vents dominants, des dunes du Pouldu Les minéraux se définissent à partir d'une et de Perharidic situées immédiatement à formule chimique et d'une structure cristal­ l'ouest. Cette origine proche est appuyée linP. Ainsi parle-t-on de silicates ou d'oxy­ par l'étude minéralogique, et en particulier des, plus précisément de silicates d'alumine par l'examen des minéraux lourds qui et de potassium, ou bien de fer et de magné· jouent le rôle de traceurs. La comparaison sium... ou encore de minéraux cubiques ou des principales espèces concentrées loca­ quadratiques. Voici, dans cet ordre d'idées, quelques précisions simples concernant des lement (7) sur les estrans de Pouldu-Perha­ minéraux cités dans le texte. ridic d'une part et de l'anse de l'Aber d'au­ tre part, est significative. Les différences S phèn e: silicate de titane et de calcium; dans les pourcentages sont essentielle­ fréquent dans les roches magmatiques et ment dues aux différences dans les condi­ métamorphiques; se présente souvent en tions d'énergie entre les plages dunaires cristaux roses lorsqu'il est visible à l'œil nu. occidentales fortement exposées (zone de Stauro tide: silicate complexe d'aluminium, haute énergie), et les grèves plus abritées fer et magnésium; fréquent dans les roches de l'Aber (zone de plus basse énergie): des métamorphiques (micaschistes du Conquet premières aux secondes, on assiste à une par exemple); en cris/aux prismatiques de diminution du pourcentage en grenat et à section losangique et de couleur brun noir à une augmentation du taux d'amphibole. brun rouge. Epidote: silicate complexe d'aluminium, fer et calcium; assez commun dans les Une autre part du sable, moins importante, roches m étamorphiques et dans les fissures a pénétré dans l'Aber par le nord, sous des granites; forme de belles aiguilles vert l'influence des houles du NNE en particu­ pistache lorsqu'il est bien cristallisé. li er. Cette origine semble vérifiée par les A mphiboles: groupe de minéraux variés; silicates complexes hydratés d'aluminium, de fer, de magnésium et de calcium ; assez (6) On désogne sous le nom de bioturbation les rema­ communs dans les roches magmatiques et niements sédimentaires d'origine biologique: les ani­ métamorphiques; cristaux en baguettes maux fouisseurs sont d'importants agents de bioturba­ allongées de section losangique ; couleur tion. vert plus ou moins foncé (selon la catégorie (7) Ces concentrations constituent des micro -gisemepts exacte) à noir. encore nommés micro-placers.

7 l'est. Les migrations vers et dans l'Aber sous-marins présumés des anciennes montrent une décroissance d'ensemble roches volcaniques du Trégor, et l'amphi­ avec l'éloignement de l'île de Batz: de bole dont la source probable est égale­ 22,1 et 17,1% au sud-ouest de l'île, les ment trégorroise. baux de sphène dans les sables passent successivement à 3,6, 3,2, 2,4, 2,0% puis Enfin, les sables de l'Aber sont essentiel ­ à l'état de traces. lement d'origine terrigène et la proportion des sables organogènes, c'est-à-dire Une certaine proportion de sable paraît résultant d'une activité biologique, reste venir du nord-est et de l'est. Cette orig_i ne faible. Sur cinquante échantillons analy­ orientale est suggérée par la présence sés, la teneur en C03 Ca des sables de d'autres minéraux : la staurotide en prove­ surface est seulement de 3,75 %. Les pour­ nance des complexes micaschisteux en­ centages diminuent avec l'éloignement du noyés découverts à l'est de Roscoff, l'épi­ chenaJ de l'île de Batz. Les apports du large dote en provenance des prolongements sont peu importants ici.

Teneurs en minéraux ouest (%) ~ ;•\mph;bol• 60 40 ···.... x·, ;· ...\ ·. 20 ~ ·•···• ••. ... -·\1 ·-· -·--- ·-· ·-1 ...._...... :· ...... •.. ·•···•~ ...... , • 'renot. 0 5 6 7 • . •• · ·····• 9 10 13 •• • pre' levements' 8 17

10 1 staurotide épid.~~~-• .. ·• ,.., v-"' ,v ... v_'<;l / 'V" ' .e. . •L::.·•? q~(•... ·~"· .• __v _.<.:..:...... :..• • ._v_:.•:..:..:.vc..:::::.v--·' . . .• v . , prelevements 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17

Evolution d'ouest en est des teneurs en divers minéraux

« En 1500, les habitants ne trouvant plus L'Aber s'appauvrit-il en sable? assez de profondeur dans l'ance de l'Ouest, presque comblée par les sables ... » (Cam­ bry, p.1 16-11 7) ...

La variété des types d'accumulations ... ou encore l'envahissement des rues de sableuses décrits plus haut ainsi que le Roscoff par le sable au 17• siècle : contraste minéralogique entre les rives ouest et est de l'anse soulignent la com ­ « ... et quand le vent est impétueux, il jette plexité des apports et des remaniements (le sable) par dessus un petit bras de mer subis après le remplissage. Peut-on aller (l'A ber) jusque dans Roscoff et en emplit pl us loin et tenter d'établir un bilan? L'ap­ les rues à la hauteur de deux pieds ... » port sableux qui a en grande partie mas­ (Journal des savants de 1725, cité par Ker­ qué le sol du marais de l'Aber s'est certai­ forne, 1921 ). nement poursuivi jusqu'à une époque récen­ te. En témoignent divers épisodes histori­ Qu 'en est-il actuellement? Le problème ques comme l'ensablement du port de est difficile à résoudre. Il faut en effet se Rosko Goz vers le 15• siècle ... garder de confondre apport et reman ie-

8 ;:"' ~ .c ü"' ·:;"' 0 ..J A l'a rrière plan, la presqulle de Perharidic. Les bois de résineux qui la couvrent empêchent tout apport sableux de l'ouest. ment sur place du matériau déjà existant; apports sableux occidentaux jadis fré­ le sable peut diminuer en un point et aug­ quents lors des tempêtes. L'édification de menter ailleurs sans que la masse totale murs et, dans une moindre mesure, les soit modifiée. enrochements récents ont contribué à stop­ per l'al imentation de l'estran par une dimi­ nution, voire un arrêt, de l'érosion des hauts de plages. Comme partout sur la Influence des interventions côte, la proximité de Roscoff a dû entraîner des extractions de sable: il serait assez surprenant que les rochers de l'anse aient été exploités pour la construction sans que Le boisement et la fixation des dunes de le sable qui les entoure soit utilisé pour le Perharidic ont marqué un coup d'arrêt aux même motif.

Ce qu'il reste de l'ancien roche r 13 après exploitation. Comment croire que les sables alentour n 'aient pas eux aussi fait l'objet de prélèvements?

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9 actuellement en sable. Les recherches Rôle des processus naturels récentes effectuées en baie de tendent également à suggérer un appau­ vrissement progressif des plages. S'il en est bien ainsi, l'Aber représenterait à pré­ La comparaison des dunes hydrauliques sent un milieu extrêmement fragile. L'exis­ de part et d'autre de la zone d'érosion tence d'une prairie de joncs maritimes en située à l'entrée de l'Aber suggère un voie de développement probable sur l'es­ appauvrissement de l'anse en sable : la tran entre le centre hélio-marin et le Cru­ dune externe du Ledanet, due au jusant, guel! pourrait indiquer une tendance, au est nettement plus importante que l'interne moins locale, de l'anse à retourner à l'état due au flot. Il est toutefois possible qu'une de marais. partie du banc du Ledanet soit composée de sables qui transitent dans le chenal de l'ile de Batz. Sans l'intervention de l'homme.. . En dehors même des zones de concentra­ tion, la teneur moyenne en minéraux lourds L'ouest derrière soi perdu de la pellicule sableuse est relativement présumé englouti élevée, de l'ordre de 1,7%. Les concentra­ René Char tions de minéraux lourds (micro-placers) sur les parties hautes des grèves de l'Aber sont assez fréquentes malgré les condi­ tions d'énergie plutôt faibles. Ces deux Que serait-il advenu à plus ou moins brève conditions complémentaires incitent à pen­ échéance si les processus naturels ser que l'enrichissement relatif en miné­ n'avaient pas été entravés par les interven­ raux lourds pourrait être lié à une diminu­ tions humaines? Sous l'influence des hou­ tion d'ensemble de la masse sableuse, les occidentales, le cordon dunaire de avec entraînement sélectif des minéraux Perharidic se rompait dans sa partie la plus légers. Les accumulations de minéraux étroite: l'insularisation de la presqu'ile était lourds sont nettement plus fortes sur la bientôt suivie de son émiettement en une dune hydraulique interne que sur l'externe. pléiade de récifs. La rupture du cordon du L'anse jouerait alors le rôle d'un piège pour Pouldu près de Palud entraînait à son tour les minéraux lourds, les minéraux légers, l'envahissement du polder par l'amont. Peu très dominants, étant progressivement à peu, l'ancienne anse abritée de l'Aber entraînés par le jusant. apparaissait semblable au vaste estran exposé, hérissé d'écueils, qui s'étend à En résumé, sans doute faut-il retenir le l'ouest de Perharidic ... et la ville de Roscoff témoignage des anciennes gens selon qui 3UX premières places des souffles d'occi­ l'Aber, dans l'ensemble, s'appauvrirait ::lent.

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10 Hallegouet B. (1978)- L'évolution des massifs Références dunaires du Pays de Léon, Penn ar Bed, Brest, vol. 11, n° 95, p. 417-430. Hallegouet B. et Moign A. (1976) - Historique Beauchamp P. de (1914)- Les Grèves de Ros­ d'une évolution de littoral dunaire : la baie de coff. Le Chevalier, édit., Paris. Goulven (Fin istère). Interactions entre forces Bourcart J. (1948) - Le Quaternaire des Grèves naturelles et interventions humaines. Penn ar de Roscoff. Bull. Soc. Géai. Fr., 5, 18, p. 181-197. Bed, Brest, vol. 10, n° 84, p. 263-276. Cambry (An VIl) - Voyage dans le Finistère. Kerforne F. (1 921)-Sur les dunes de Camaret Vol. 1, 284 p. (Finistère). Bull. Soc. Géol. Minéral. Bretagne, Il, fasc. spéc., p. 145-148. Chasse C. {1972) - Economie sédimentaire et biologique (production) des estrans meuqles Morzadec-Kerfourn M.T. (1974)-Variations de des côtes de Bretagne. Thèse Doctorat d'Etat la ligne de rivage armoricaine au Quaternaire. Sc. Nat., Un iv. Paris VI, 293 p. Mém. Soc. Géol. Mineral. Bretagne, n° 17, 208 p. Chauris L. (1984) - Concentrations de sables Paskoff R. (1983) - L'érosion des plages. Penn lourds sur les plages de la baie de Morlaix (Finis­ ar Bed, Brest, vol. 14. n° 11 4, P. 131-144. tère). Norois, t. 31, n° 123, p. 407-426. Rullier F. (1959) - Ëtude bionomique de l'Aber Chauris L. (sous presse)-Nature et origine des de Roscoff. Trav. Stat. biol. Roscoff. 10, p. 1-350 concentrations de minéraux lourds sur les grèves Sand réa A. (1958)- Contribution à la lithologie de Roscoff (Finistère, ). Sources proxi­ de la côte nord de la Bretagne: de l'ile de Siee à males et apports distaux sur une côte contra­ la baie de Perros. Bull. Serv. Carte Géol. Fr. , 258. posée. p. 505-616. Croguennoc M.P. (1981) - Le site du Pouldu (communes de Santec et de Roscoff). Rapport Institut Géogr., U.B.O. , Brest, inédit. Cet article se termme par un scénario tout à Deroux C. (1984)-L'anse de l'Aber, un exemple fait plausible.ll ne faut cependant pas y voir, un d'équilibre dynamique entre les conditions phy­ peu rapidement, un plaidoyer pour les enro· siques de milieu et l'installation de la vie. Congr. chements du littoral. Nous renvoyons nos lec­ Nat. A.P.B.C., Brest, fasc. E12-E13, p.61-71 . teurs à l'excellent article de Roland Paskoff Dujardin L. et Le Berre A. (1965)- Toponym ie (Penn ar Bed n° 114) qui décrit de façon nautique de l'île de Batz et de ses abords. Extrait convaincante les conséquences de tels amé­ no 1399 des Annales hydrographiques. Paris, nagements. La position de la SEPNB sur ce lmpr. Nationale, p. 343-414. problème, comme celle des spécialistes, ainsi que la politique de pays comme les Etats-Unis Francis-Bœuf C., BourcartJ. et Du plaix S. (1949) est de laisser faire la mer, de laisser évoluer -La couverture sédimentaire de l'Aber de Ros­ le trait de côte, en laissant libre une zone tarn· coff (FiRistère). Sédimentation et Quaternaire, pon le long du littoral chaque fois que des Led Sam Edit., Bordeaux, p. 21 -47. enjeux économiques majeurs ne sont pas Hallegouet B. (1971) - Le Bas-Léon, Finistère. directement concernés. Etude géomorphologique. Thèse 3• cycle, Brest, NDLR 260 p. 84 fig. 31 pl., 1 atlas. · \.

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11 Les goélands et le Spernot La fermeture d'une décharge

Jean-Yves Monnat

La célèbre décharge du Spernot, à Brest, va fe rmer et une usine d'incinération toute neuve va drainer les ordures de toute la région brestoise. Mais le cas n'est pas isolé; un peu partout en Bretagne des décisions analogues sont prises. Que vont devenir nos goélands?

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Les décharges d'ordures constituent des plus concernés: dans J'ordre d'abondance zones d'alimentation régulières pour décroissante, le goéland argenté, la mouet­ diverses espèces, surtout omnivores te rieuse puis, à un bien moindre degré, les (1) : Jaridés (goélands et mouettes), cor­ goélands marin et brun. Cette décharge, vidés (corneille noire, freux, choucas, pie ...), dont il faut rappeler qu'elle est J'une des étourneau, moineau domestique... Dans le plus importantes de J'ouest de la Fran­ cas de Brest, ce sont les laridés qui sont le ce. se trouve en fait localisée au voi­ sinage de la plus grande concentration française de goélands argentés repro­ ducteurs: 31% des 61000 coupl es ni­ (1) Voir l'article de Clergeau dans le n° 102 de Penn ar Bed. cheurs des côtes atlantiques françaises

12 se reproduisent dans le seul Finistère. selon toute vraisemblance de la baie de C'est à cette convergence de facteurs qu'il Morlaix. Des mouvements plus limités et faut attribuer les extraordinaires concen­ plus diffus se produisent ensuite durant trations de goélands observables au Sper­ une bonne partie de la journée. Quant aux not en toutes saisons. Le nombre de repor­ départs, ils sont progressifs, mais se pro­ tages et de photographies déjà publiés sur duisent surtout vers la fin de l'après-midi: ce sujet précis dans les journaux et maga­ les goélands regagnent alors leurs repo­ zines de toute la France témoigne du soirs nocturnes. caractère extrêmement spectaculaire du phénomène. 30000 oiseaux Du sud, de l'ouest concernés du nord ... L'effectif moyen se nourrissant sur les La décharge du Spernot est fréquentée ordures à un moment déterminé est le plus quotidiennement par plusieurs milliers de souvent compris entre 3 et 4000 individus. goélands argentés. Les oiseaux arrivent là Mais ce nombre est parfois très supérieur dès les premières heures de la matinée. et celui des goélands argentés dépendant L'observation directe des arrivées mon­ au moins partiellement de la décharge est tre qu'ils proviennent pour l'essentiel de bien plus considérable. Des expériences trois origines géographiques distinctes. de capture-recaptu re ont été effectuées de Dès le lever du jour, de forts contingents 1978 à 1980 à partir de l'échantillon des arrivent du sud, suivant grossièrement la oiseaux marqués (teints en jaune ou munis vallée de la Penfeld: ils ont pour origine la d'une combinaison individuelle de bagues rade de Brest et la presqu'île de . de couleur). Elles ont permis de calculer Une demie heure plus tard environ, un que c'était un minimum de 28 000 oiseaux autre courant arrive de l'ouest, correspon­ qui fréquentaient le Spernot au cours de dant aux oiseaux de l'archipel d'Ouessant­ l'hiver 1978, un cl:liffre voisin (33 000 oi­ Molène ; le décalage dans les heures d'ar­ seaux) étant obtenu pour une période rivée correspond probablement au temps équivalente de l'hiver 1980. Ce chiffre est nécessaire pour parcourir une distance très important et correspond à une fraction très nettement supérieure. Enfin, de la non négligeable des populations de goé­ même manière, un dernier gros contingent lands argentés fréquentant les côtes fran­ arrive du nord-est un peu plus tard, venant çaises à ces périodes.

Une experrence con­ duite en 1978 et 1979 a permis de confirmer cette origine persque exclusivement finisté­ rienne des goélands argentés fréque ntant le Spernat en hiver. Plu­ sieurs centaines d'oi­ seaux capturés sur la dé charge à l'aide de fi lets projetés o nt alors été colorés au moyen d'une teinture jaune indélébile (ac ide picri­ que). leur observation ultérieure par les mem­ bres des ré seaux de la SEPNB et de la Cen­ t raie o rnitho logique bretonne a permis de dresser la carte de dis- persion des goélands Hiver ~ ~. fréquentant la déc har- ge, à diverses périodes de l'année.

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Il est également relativement facile d'éva­ luer le tonnage d'ordures «comestibles» Plus d'une tonne par jour que représente journellement la nutrition de ces populations de goélands. En admet­ tant que tous les oiseaux pourvoient à la L'essentiel de l'activité des goélands fré­ totalité de leurs besoins énergétiques jour­ quentant la décharge est consacré à l'ali­ naliers sur la décharge (ce qui est proba­ mentation.ll est cependant faci le de consta­ blement une source de sur-estimation) et ter que, pris individuellement, chaque que l'effectif d'une journée est celui obser­ oiseau ne passe guére qu'une faible partie vable à un instant donné (source de sous­ de son temps à rechercher sa nourriture. estimation cette fois en raison du renouvel­ Etant donné l'énorme potentiel alimentaire lement au cours de la journée) on peut que représentent les ordures ménagéres obtenir l'estimation suivante : d'une agglomération comme celle de Brest et sa région pour des animaux omnivores, ration journaliére moyenne: 300 g environ bien des goélands parviennent pratique­ eHectif moyen : 4000 individus ment à satisfaire leurs besoins alimentaires 300 g X 4000 = 1.200.000 g = 1,2 tl jour. en quelques minutes seulement, essentiel­ lement au moment de la décharge des Les goélands présents sur la décharge bennes, lorsque le bulldozer en étale le consommeraient donc en moyenne 1,2 contenu. tonne de déchets organiques par jour.

14 fo rt probable que des oiseaux s'étant cor­ rectement alimentés quittent la décharge pour le littoral tout au long de la journée.

T rois étoil es au Michelin des goélands

L'effet di ree t et immédiat de la fermeture sera évidemment de supprimer une impor­ tante source d'alimentation pour une part non négligeable des goélands argentés de la façade atlantique française.

Un recensement aérien de l'ensemble des populations de goélands argentés a été effectué par une équipe de la SEP NB du 18 au 20 décembre 1978 entre la baie du Mont Saint-Michel et l'estuaire de la Loire. Il a perm is d'obtenir les décomptes suivants:

Total général : 62 000 à 64 000 oiseaux dont : décharges: 20 000 à 23 000 oiseaux Spernot: 8000 à 9000 oiseaux

La décharge du Spernot hébergeait donc à ce moment de 12 à 15 % des goélands argentés recensés sur l'ensemble de la Bretagne et de 35 à 45% de ceux fréquen­ tant les décharges de la même entité géographique. Par ailleurs, au même moment, 31 à 37% des oiseaux observés en Bretagne se nourrissaient sur des décharges. Ces chiffres n'ont évidemment de valeur qu'indicative, mais l'ordre de grandeur qu'ils fo urnissent n'en est pas moins éloquent.

Par ailleurs, en 1983, P. Migot a effectué un e brève étude du régime alimen taire des Repos et confort goélands argentés nicheurs du Nord-Finis­ tère en étudiant le contenu de régurgitais de poussins au moment du baguage, et d'estomacs prélevés sur des adultes à la En dehors des périodes d'alimentation, les su ite d'opérations d'éradication. Les résul­ goélands se rassemblent à proximité de la tats, indicatifs, une fo is de plus, sont résu­ décharge en divers end roits présentant més dans le tableau ci-dessous: des garanties de tranquillité suHisantes. Ces reposoirs, correspondant à des espa­ ces ouverts, leur permettent d'assurer leur Localité % des déchets repos et leurs activités de confort entre d'origine anthropique deux repas. Les reposoirs les plus fré­ quents sont les champs du voisinage, la adu ltes poussins' retenue d'eau de Kerléguer en et, 1 occasionnellement, un terrain de sports Trébéron (rade de Brest) 82 % 40 % 1 situé à proximité imméd iate de la décharge. Notons ici qu'un autre stade, celui du Bou­ Banneg (Moléne) - 48 % guen, sert régulièrement de zone de regroupement aux oiseaux se dirigeant Trévoc'h (Aber Benoit) 13% - vers le Spernot, le matin surtout. Enfin, il est '-- -

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Les bennes et le bulldozer qui étale les ordures sont toujours environnés d'une nuée d'oiseaux.

De manière prévisible, c'est dans la localité du tiers des goélands fréquentant les dépôts la plus proche de la décharge du Spernot d'ordu res de Bretagne à la mi-décembre (Trébéron) que la proportion des déchets 1978), il est évident que les autres déchar­ alimentaires d'origine humaine dans le ges ne pourront pas, loin s'en faut, absor­ menu des goélands est le plus importante. ber la totalité de l'effectif supplémentaire concerné. Notons enfin que le cas de la Bretagne n'est pas isolé et que ces chiffres, si partiels On peut considérer que les déchets de la soient-ils, sont cohérents à cet égard , avec pêche, que ce soit en mer ou dans les ceux obtenus dans de nombreuses régions ports, ont depuis longtemps été pleinement de l'Europe: pendant l'hiver su rtout, les exploités par les populations d'oiseaux goélands argentés européens collectent marins et qu'il n'y a guère de possibilités une fraction importante de leur nourriture nouvelles de ce côté. En revanche, les sur les dépôts d'ordures ménagères. activités aquacoles, et la conchyliculture en particulier, offrent probablement des possibilités d'extension de la prédation par les goélands. Scénarios Au cours des dernières décennies, les goé­ lands ont peu à peu supplanté les mouettes neuses derrière les tracteurs des paysans, Des éléments précédents il découle néces­ consommant vers de terre et larves d'in­ sairement que, du fait de l'importance sectes au moment des labours, et des exceptionnelle que représente la décharge larves de diptères lors des épandages de du Spernot dans l'alimentation des goé­ lisiers. Dans ce domaine, l'état de nos lands argentés hivernant et nichant en Bre­ connaissances ne nous permet pas de dire tagne, sa fermeture nécessitera une recon­ si une extension de la prédation est possi­ version d'une part importante des popula­ ble. tions de ces oiseaux vers d'autres ressour­ ces alimentaires. A partir d'ici, nous entrons donc dans le domaine des probabilités et L'alimentation traditionnelle du goéland argenté consiste essentiellement en la des hypothèses. consommation des cadavres d'organismes marins et en la prédation de mollusques, Une redistribution des oiseaux dépendant de vers, de crustacés et d'échinodermes du Spernot vers d'autres décharges de sur les estrans rocheux et sableux. Il est Bretagne est prévisi ble. Cependant, compte évident qu'il reste des possibilités dans ce tenu de l'importance de la première (plus domaine.

16 lands spécialistes des décharges, des spéciali stes des ports, des spécialistes de Reconversion la prédation sur les falaises, etc ...

Ce facteu r ajouté à la compétition qui inter­ Il n'est pas possible de préd ire dans quelles viendra nécessairement à la suite de la proportions les populations de goélands réduction de la quantité totale de nourriture transfuges du Spernot se to urneront vers disponible est susceptible de provoquer telle ou telle de ces ressources. Il est des mortalités supérieures à la norme cependant probable que les oiseaux pro­ actuelle chez les acteurs de cette compéti­ céderont par essais et erreurs, jusqu'à ce tion, de réduire la production en jeunes en qu'un nouvel état d'équilibre soit atteint. restreignant les possiblités de les alimen­ Dans l'attente tous ces goélands se trouve­ ter, et d'affecter la su rvie des immatures ront confrontés à deux problèmes capitaux: s'émancipant dans ce climat de crise. En bref, la fermeture risque bien de provoquer 1) la reconversion vers de nouvelles sour­ par le biais d'une diminution des survies et ces et techniques d'alimentation ; des productions, une stabilisation voire un déclin local des popu lations les plus con­ 2) la compétition avec les espèces et avec cernées. les individus de leur propre espèce exploi­ tant antérieurement les ressources vers lesquelles ils se tourneront. Retombées indirectes En effet, chez de nombreux prédateurs. on observe une spécialisation Individuelle Il faut d'abord savoir que, depuis le début dans la natu re des ressources utilisées et du siècle, les populations mondiales de dans la manière de les util iser. Dans cer­ goélands argentés ont connu une phéno­ tains cas (comme celui de l'huîtrier), il a ménale croissance de leurs effectifs même pu être démontré que cette spéciali­ accompagnée d'extensions géog raphiques sation était de nature culturelle. Le goéland spectaculaires. Sur les côtes atlantiques argenté ne fait pas exception à la règle : au françaises, on est passé de quelques sein du spectre alimentaire extrêmement dizaines de couples reproducteurs tout au vaste de l'espèce, chaque individu n'a plus à la fin des années 1910 à quelque recours qu'à un éventail bien plus étroit et a 61 000 couples en 1978. Ce surprenant donc spécialisé ses techniques de capture essor démographique ne s'est pas produit ou de collecte en conséquence. On pour­ sans dommages pour le milieu naturel ni rait à la limite affirmer qu'il existe des goé- pour les activités humaines.

L "usine d 'incinératio n terminée, la décharge fermera .

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17 Une certaine confusion règne dans l'opinion publique brestoise qui mèle uolontiers le problème de la nidification urbaine des goé­ lands et leur fréquentation du Spernot. Il n 'y a pas de liaison directe entre les deux phéno­ mènes ella fe rmeture du dépôt ne risque en tout cas pas de prouo­ quer d 'augmentation des effectifs nic he urs en uille. Il est au co nt raire possible que la s uppres- ' s ion de cette source de nourriture "'rn facile contribue à atténuer ce que (.9 certains riuerains considèrent Ql comme une nuisance. _J c 0 > >- Dans leur progression numérique et geo­ que cela suppose sur le milieu et les aètivi­ graphique, les goélands argentés ont tès humaines dans la région. Parmi l~s in contestablement nui à d'autres espèces influences plus immédiates, et bénéfiques d'oiseaux de mer moins robustes et ont quoique mineures. on peut prévoir que la localement bouleversé des milieux fragiles suppression des trajets quotidiens mer­ du fait de leur densité. Au compte de leurs Spernot réduira puis interrompra progres­ interférences avec les activités humaines, sivement la fréquentation massive des il faut citer les problèmes posés à la myti li ­ immeubles et des stades, considérée culture, à la saliculture, au trafic aérien sur comme une nuisance par leurs usagers les aérodromes, ainsi que les nuisances (fientes, transport et dépôt de déchets ... ). sonores et hygiéniques qu'ils occasion­ nent en nichant dans les villes et en utili­ Mais, à l'inverse, il faut également s'atten­ sant terrains de sport et retenues d'eau dre à ce que la compétition accrue occa­ comme reposoirs... sionne un surcroît temporaire ou durable de prédation sur d'autres espèces plus fra­ Mais il faut au::;si savoir que l'ampleur de giles avec lesquelles ils cohabitent sur leur progression est attribuée par les spé­ leurs lieux de reproduction, ainsi que sur cialistes à l'extraordinaire capacité qu'ils certaines activités aquacoles. manifestent à exploiter aussitôt toute nou­ velle ressource mise à leur disposition. Leur essor est ainsi intim ement lié à l'aug­ mentation sans précédent du volume des Perspectives ordures ménagères au cours de ce siècle. Aussi, l'étonnant succès du goéland argen­ té et la gravité des nuisances que cause sa Les scénarios proposés ci-dessus restent prolifération ne sont-ils rien d'autre que le évidemment largement hypothétiques, quoi­ reflet de nos difficultés à régler de façon que parfaitement plausibles compte tenu satisfaisante le problème des déchets de du niveau de connaissance acquises sur notre civilisation de consommation. cet oiseau dont le rôle écologique est si grand. Mais la fermeture du Spernot consti­ En ce sens. la fermeture d'un dépôt d'or­ tue une occasion unique et sans précédent dures de l'importance de cel ui du Spernot, en France (et probablement en Europe) de par la contribution la stabilisation des à mesurer en grandeur nature l'importance populations de goélands qu'elle est sus­ qu'ell e revêtait dans le fonctionnement des ceptible de provoquer localement, ne peut­ populations de goélands argentés ainsi elle qu'être considérée comme positive par que les possibilités de reconversion de ces les protecteurq de la nature qui, depuis oiseaux. Son volume, l'importance des près de deux décennies, ne cessent de effectifs de goélands concernés, le fait que désigner les décharges comme étant à la depuis plus de dix ans maintenant ils aient source des désordres occasionnés par connu une très forte pression de marquage ces oiseaux. et les études menées sur l'espèce en Au titre des retombées positives de la fer­ diverses colonies voisines sont autant meture du Spernot, on peut donc raison­ d'atouts à ne pas négliger, et qui justifie­ nablement espérer une ·réduction du taux raient, au plan de la connaissance comme de multiplication de l'espèce, voire une à celui de la gestion des espèces et des stabilisation des effectifs dans le Finistère, milieux, la mise en œuvre d'une étude avec toutes les conséquences indirectes particulière.

18 Rencontres naturalistes

Une tortue de Kemp sur les galets

Une tortue de Kemp (Lepidochelys kem­ transatlantique a été fournie par l'animal pù) s'est échouée le 31 janvier 1988 sur le capturé à Biarritz en 1981 :il avait été mar­ cordon de galets de la baie d', au qué en Floride 569 jours plus tôt, en juin droit de l'étang de Kergalan en Tréogat. Au 1980. Les quelque 25 échouages de cette moment de sa découverte, elle était déjà espèce qui se sont produits en Europe ont morte, mais dans un excellent état de fraî• tous eu lieu entre octobre et janvier, ce que cheur. Sa carapace mesure 270 X 260 mm. ne dément pas le cas présenté ici.

Il s'agit là de la première observation de Caèl Rault cette espèce en Bretagne et la cinquième 24 rue des Ajoncs en France. Les échouages précédents Qui mper avaient eu lieu à Saint-Jean de Luz en 1926, aux portes de l'île de Ré vers 1950, à Biarritz le 25 décembre 1981 et à Saint­ Références Martin en Ré le 21 novembre 1985. Par ailleurs, les collections du British Museum comportent un specimen trouvé vivant à Brongersma L.D. 1972. European atlantic turtles. Jersey en décembre 1938. Zoolg. Verhandel., Leiden, 121, 1·318. Duguy R. 1985. Observations de tortues marines Cette tortue marine se reproduit sur les sur les côtes de France. A nnales de la société des côtes de Floride et du golfe du Mexique. sciences naturelles de Charente Maritime. Après la saison de reproduction, certains Fretey J. 1987. Les tortues. p. 57-106 in Livre rouge animaux se laissent emporter par le Gulf des espèces marines et littorales menacées en Stream vers la région des Açores puis en France. Secrétariat de la faune et de la flore. Mer Celtique. La preuve de cette dérive Muséum national d'histoire naturelle, Paris.

19 A propos d'esturgeon

Poisson bien connu pour avoir une chair coup plus étendue que celle classique­ de haute qualité gastronomique et des ment reconnue dans les manuels. œufs commercialisés sous la dénomination de caviar, l'esturgeon est en voie de dispa­ Là maturité sexuelle intervient entre sept et rition dans de nombreux pays d'Europe, neuf ans pour les mâles qui mesurent alors d..ont la France. Le nombre de captures n'a de 1,10 m à 1,15 m et entre huit et quatorze cessé de diminuer dans notre pays, pas­ ans pour les femelles dont la longueur se sant de 4000 en 1947 à 10 en 1980 ... De situe entre 1,20 m et 1,80 m. Cependant, les telles constatations se répètent hélas un esturgeons n'effectuent leur migration de peu partout dans le monde et des actions reproduction que vers quinze ans pour les ponctuelles sont engagées ici et là pour mâles et vingt ans pour les femelles. tenter d'enrayer le déclin de ce magnifique poisson. Au cours de leur vie, ces poissons fréquen­ tent deux milieux différents, l'eau marine et l'eau douce. Au printemps, ils pénètrent Première reproduction: très en amont dans les cours d'eau où les quinze ans au plus tôt femelles déposent leurs œufs adhésifs sur des graviers et des plantes, à des profon­ deurs variant entre deux et dix mètres. Chacune émet ainsi de 800 000 à 4 000 000 En France, il n'existe qu'une seule es pèc.e, d'œufs. Lorsque la température de l'eau est l'esturgeon commun (Acipenser sturio), grand migrateur qui fréquentait autrefois comprise entre 14 et 19°C, l'éclosion se tous les fl euves européens. De nos jours, produit de trois à sept jours plus tard. Les son aire de répartition se limite essentiel­ alevins nouveau-nés mesurent neuf milli­ lement aux cours inférieurs de la Garonne mètres. Ils séjournent quelques mois au et de la Dordogne, la Gironde et les eaux voisinage des frayères puis, au début de marines avoisinantes sur une centaine de l'automne, lorsqu'ils atteignent une dizaine kilomètres. Le suivi scientifique de l'es­ de centimètres, ils gagnent les eaux sau­ pèce mis en œuvre depuis 1971 a cepen­ mâtres de l'estuaire où ils vivront quatre à dant révélé une aire de dispersion beau- cinq ans avant de rejoindre les eaux marines.

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pas complètement les frayères. Les alevins sont régulièrement aspirés dans les cir­ Une espèce vulnérable cuits de refroidissement des centrales th er­ miques ou nucléaires installées près des fleuves alors que les rejets d'eau réchauf­ C'est précisément en raison de ce passage fée et les effluents radioactifs des mêmes obligatoire en eau douce pour la reproduc·­ installations peuvent causer des préjudices tion que l'esturgeon, comme le saumon, aux jeunes et aux adultes. Les pollutions est une espèce vulnérable. Les barrages diverses s'ajoutent à la dégradation géné­ établis sur les cours d'eau empêchent les rale de nos cours d'eau et l'esturgeon, géniteurs d'aller frayer en amont et les comme le saumon, est particulièrement échelles à poissons, quand elles existent, sensible aux hydrocarbures. Il faut enfin sont souvent impraticables pour les femel­ ajouter à tout cela la pêche traditionnelle, les alourdies de leurs œufs. Les dragages mais illicite, des immatures (de taille infé­ pour l'extraction de granulats limitent les rieure à 1,45 m) dans certaines zones de possibilités de ponte ainsi que la survie des concentration des poissons en bas d'es­ œufs et des larves, quand ils ne détruisent tuaire et sur le .olateau continental.

20 Répartition des captures . ' . • · • .:... :.. ; . • ·--~~~ - . J recensées entre 1981 et .- ·· '0 ·- '·· ..-"':· .. 1986 (hors Gironde). ' e • \ ... Le suivi scientifique de l'es­ ~~~ c - • pèce effectué depuis 1981 a ;:... . ---- permis de mettre en évi­ "' dence une aire de disper­ sion beaucou p plus 1 c ...... ,. étendue que celle recon­ • 2 C.-IIIUftS nue par LETACONNOUX • J - ·- en 1961 (1 OQ km de plateau continental d e part et d'au­ 0(\ · ·-·- tre de l'embouchure de la «­ Gironde). "'1- ··-- "~ c.. z.. 0 c / "' If """' { ~ ~~~/~._._-.._.

leurs fruits puisque les stocks naturels, Vers l'élevage regonflés par l'ensemencement de dizaines de millions d'alevins issus d'écloseries. permettent la capture annuelle de 25 000 ton­ nes d'esturgeons. Mais il faut dire que dans En 1981 , leCEMAGREFet I'A.G.E.D.R.A. (1) ce pays les mesures ·de protection et ont lancé un plan de sauvegarde et de d''aménagement des cours d'eau sont effi­ restauration de l'esturgeon en France. Les caces et la régJementation suivie grâce à principales actions entreprises dans ce l'application d'amendes réellement dissua­ cadre concernent l'estimation des effectifs, sives. la connaissance des migrations et de la biologie de l'espèce, la reproduction artifi­ cielle en vue d'opérations d'alevinage. Ces Après les U.S.A. et le Japon, des pays d'Eu­ projets ne peuvent bien entendu réussir rope suivent à leur tour le chemin de l'aci­ qu'avec la collaboration des pêcheurs et pensericulture. En France, ce n'est qu'en de toutes les personnes et organismes 1985 que la reproduction artificielle de l'es­ concernés par la pêche et le poisson. A turgeon commun a été obtenue en éclose­ cette fin, deux plaquettes ont été éditées rie. Sept kilogrammes d'œufs traités ont qui indiquent la marche à suivre en cas de donné naissance à 250 000 larves, VJais les capture accidentelle d'esturgeon, vivant alevins n'ont pas survécu faute d'une ali­ ou mort. bagué ou non. mentation adaptée. Pourtant tout laisse à penser qu'une acipensericulture française est possible. En collaboration étroite avec l'INRA, l'uni­ versité de Bordeaux 1 et différents services vétérinaires, le CEMAGREF tente de met­ Reste à savoir. comme le soulignait O. tre au point les techniques de reproduc­ Rooryck dans l'Univers du Vivant (n° 5) « ... tion artificielle, de croissance et de nutri­ si désormais l'intérêt "économico-écolo­ tion de l'esturgeon commun. Ce sont là les gique" caractérisant la restauration d'une prémices au développement de l'aquacul­ espèce sera suffisant pour modifier une ture de cet animal (déjà nommée acipenseri­ certaine politique d'aménagement fluvial... culture !). En URSS, pays pilote dans ce Il semble en tout cas évident que les opéra­ domaine, les expériences entreprises tions d'alevinage n'auront que très peu de depuis un e cinquantaine d'années portent résultats si, par ailleurs, les appels qui sont lancés par les chercheurs pour la préser­ vation des biotopes ne sont pas entendus». (1) CEMAGREF : centre national du machinisme agri­ cole, du génie rural. des eaux et forêts. A.G.E.D.R.A. · association girondine pour l'expérimentation et le déve­ loppement des ressources aquatiques. Matee/le Pennee

21 La bellardie germandrée dans le Finistère

Elle fleurit dans la seconde qutnzaine de juin, mais la période au cours de laquelle elle peut être observée n'est guère plus étendue: peu après la floraison, les hampes se dessèchent et la plante disparaît jus­ qu'au mois de mai de l'année suivante. Est­ ce à cette brièveté que la bellardie ger­ mandrée (Bellardia trixago) doit de n'avoir pas été notée par les nombreux natura­ listes et botanistes qui ont parcouru la baie d'Audierne, ou s'agit-il vraiment d'une nou­ velle station, dernier avatar en date dans la progression vers le nord-ouest de cette plante méridionale?

Dix-sept pieds

Cent cinquante mètres environ en retrait ,.. du front de mer, les pelouses rares de la 52 dune fixée sont peuplées par la fétuque ~., rouge, le serpolet. le carex des sables. le 0 plantain lancéolé. l'anthyllide, la piloselle ... S! C'est là, à l'intérieur de la toute nouvelle ~ réserve biologique de Trenvel, que vient 0 d'être découverte la première station finis­ térienne de la bel lardie. Dix-sept pieds seu­ La floraison de la bellardie est éphémère. lement, mais les plus nordiques au monde. le littoral morbihan nais: à Houat (1), à Loc­ mariaquer. entre la rivière d'Etel et le Bla­ vet(2) et sur les dunes surfréquentées de Méditerranéenne-atlantique Plœmeur (3). Dans le cas de l'île d'Houat, le fait qu'elle ne figure pas dans la liste ancienne mais détaillée de l'abbé Dela­ lande (4) milite en faveur d'une extension Habitant toute la région méditerranéenne dans ce secteur depuis la fin du siècle jusqu'à l'Iran à l'est, la bellardie occupe dernier. diverses stations sur le littoral du golfe de Gascogne où elle atteint sa limite nord absolue. Elle est rare dans le massif armo­ ricain. Dunes et falaises

Jusqu'à une date très récente, elle n'y était connue que dans tro:s 10G8Iités : les îles En Bretagne, l'espèce semble rechercher d'Yeu, de Belle-ile et de Groix. Elle n'a en ies pelouses maritimes rases et très sèches effet pas été revue récemm ent sur les ver­ en été. A partir de là, deux types de milieux sants rocheux de l'Argenton, dans les peuvent cependant être distingués. Deux-Sèvres, seule localité vraiment inté­ rieure jamais découverte au nord-ouest de son aire de répartition. En revanche, elle est toujours présente et localement floris­ (1 ) Corillion R. 1983. sante dans ses trois stations balnéaires. (2) Rivière G. 1985. Le monde des plantes. 407, 4-6. (3) Yves Brien. communication verbale. Depuis une dizaine d'années, ci nq locali- (4) Delalande J.M. 1850. Annales de la société acadé- tés nouvelles ont été si gnalées. toutes sur mique de Nantes. 120 p.

22 profond, au sein de pelouses rases plus o~ moins discontinues. Actuellement, dans ces trois îles, elle prospère surtout sur les falaises orientées au sud et au sud-est. Elle est nettement moins fréquente et tend même à se raréfier sur les côtes nord et nord-ouest. Cette situation peut s'expli ­ ~ quer par les conditions climatiques liées à une exposition plus défavorable de la falaise. Mais elle peut aussi être mise en relation avec l'extension locale de la lande ou de la broussaille dans les secteurs abandonnés les plus abrités. En effet, dans cette situa­ tion, la dynamique de la végétation est pl us active et les enclaves de pelouses rases régressent rapidement. • Localité ancienne

• Localité récente Au regard de sa distribution bretonne, la bellardie nous semble mériter d'être proté­ gée sur le plan régional. Elle est en effet plus rare que d'autres plantes figurant sur En milieu dunaire, elle vient sur les pelouses la récente liste des espèces spécialement sèches de la dune fixée, c'est-à-dire sur un protégées en Bretagne (5). Cependant, son substrat surtout sablonneux. Ce sont là les statut surtout insulaire rèduit peut-être sa conditions qui règnent à Trenvel, sur le vulnérabilité par rapport à d'autres espèces littoral continental morbihannais ainsi qu'en comme le chardon bl eu ou la renouée quelques stations insulaires : à Groix, c'est maritime. lè cas de la Pointe des Chats ; il en va de même à Belle lie, sur la dune de Donnant et en arrière de la plage des Grands Sables; c'est enfin ce que l'on observe à Houat et Btuno Batpain sur les dunes au sud-est de l'île d'Yeu. Ftédétic Btotef Robetf Coti/lion Mais dans les îles sud-armoricaines d'Yeu, de Groix et de Belle lie, elle se rencontre le plus souvent en haut de falaise, sur sol peu (5) Journal officiel du 16. 9.1987.

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Flo raison d e bellardies en milie u d unaire.

23 Echos du bout du monde

Nouvelles des réserves 1987

Les réserves de la SEPNB constituent des lieux privilégiés d'observation. Chaque année s'accu­ mulent des centaines, des milliers d'observations les concernant. Si elles portent toujours majoritai­ rement sur les oiseaux, elles se diversifient de plus en plus, ce qui traduit une incontestable évolution dans la sensibilité naturaliste de ceux qui s'en soucient. Si le conservateur, le garde ou l'anima­ teur de telle ou telle réserve conserve un " terrain de chasse » préféré, il a à cœurd'élargirson champ d 'investigations, par lui-même ou en faisant appel à des compétences extérieures. De là une multipli­ cation des découvertes et des connaissances utiles à tous les compartiments de la vie des réserves, de la gestion à l'animation.

l'eider auquel un récent numéro de Penn ar Recensement décennal Bed (1J vient de consacrer quelques pages: Pour les goélands, beaucoup de travail reste encore à faire et l'on verra plus clair à l'été 1988 dans l'évolution de leurs popu­ Voila diX ans que les oiseaux marins lations. nicheurs n'avaient pas été recensés sur l'ensemble des côtes de Bretagne. La néces­ sité s'en faisant à nouveau sentir, le GISOM Chez leurs cousines pélagiques, les (groupe d'intérêt scientifique oiseaux de mouettes tridactyles, la situation reste mou­ mer) en a profité pour élargir l'opération à vante. A -Cap (29),1a colonie la totalité du littoral français en program­ rassemblait 863 couples, soit l'équivalent mant cette opération sur les printemps de l'année précédente. Le retour en fin de 1987 et 1988. De nombreuses réserves période de reproduction d'oiseaux can­ SEPNB sont bien sûr concernées et, à mi­ tonnés auparavant à la pointe du Raz et route, quelques tendances se dessinent délogés de là par le grand corbeau permet nettement. d'envisager une consolidation de l'effectif pour 1988. Quelques milles au nord, les Les cormorans jouent les premiers rôles roches de Camaret (29) comptaient 135 avec des effectifs qui resplendissent de couples, parmi lesquels de probables trans­ santé. Sur la côte nord, 137 et 69 couples fuges des deux sites précédents. A Koh de grands cormorans ont été dénombrés Kastell en Belle lie (56), légère éclaircie respectivement su r l'île des Landes (35) et également avec 123 à 140 couples. Mais à le Grand Chevret (35). En baie de Morlaix Groix (56) et au Cap Fréhel (22), une éro­ (29), la colonie née en 1985 a atteint les 17 sion se fait jour. On retiendra en tout cas couples. Du côté des cormorans huppés, que les Normands nous ont ravi un ede nos les records tombent plutôt en Bretagne sud longues exclusivités ornithologiques : la avec, par exemple, 57 couples dans la plus forte colonie française de mouettes réserve naturelle de Groix (56), 37 sur tridactyles se trouvait en 1987 dans le Cal­ Méaban (56) et 244 sur les îlots en réserve vados, dans la réserve de Saint-Pierre du de l'archipel d'Houat (56). Bref, « ça bai­ Mont gne » pour les cormorans, même si la vedette incontestable de cette première année de recensement est l'eider à duvet ; (1) Penn ar Bed n• 125. p. 73.

24 f ~ ;::: = <"' Recl•erche des sites à pé trel tem pête s ur Banneg

Parmi les espèces à risques, il convient de De notre réseau d'îlots gérés tout spécia­ s'arrêter sur les alcidés. D'une façon géné­ lement pour ces oiseaux, c'est l'île aux rale, les évolutions locales restent les Dames qui se taille la part du lion avec un mêmes. A Fréhel,le nombre de guillemots total de 1000 couples tout rond. Soit 760 progresse toujours (220 à 240 couples) pour les caugeks, 190 pour les pierrega­ alors qu'il végète à Gou li en (65 couples). rins qui ont rapidement colonisé la levée Sur ce même site, seuls deux ou trois petits de galets préparée à leur intention, et 50 pingouins ont été observés. sans repro­ couples pour les Dougall. Un beau specta­ duction. En baie de Morlaix. 12 à 15 cou­ cle apprécié par Mark Avery, biologiste ples de macareux moines s'accrochent dépêché sur place par la R.S.·P.B. dans le aux pentes de Beg lem et Rikard alors que cadre d'une étude sur la situation en Europe le dernier couple'de l'espèce s'est évanoui de la sterne de Dougall. su r Banneg dans l'archipel de Molène (29). De l'autre côté du Fromveur, sur Ar Youc'h (29), cinq terriers étaient heureusement Ailleurs, il faut retenir l'absence de sternes toujours occupés. caugecks sur la Colombière(22) et en rivière d'Ëtel (56). Seules de petites colonies de pier­ regarins s'y sont installées, attirant chaque fois un couple de Dougall. Trevorc'h(29) et L'île aux Dames fait le plein Balaneg(29) ont accueilli tardivement, mais avec succès, 10 et 40 couples de ces mêmes pierregarins ; une conséquence possible de l'intensification des opérations Et les sternes dans tout cela? d'éradicati on de goélands argentés sur L ilot de la Colombiè re.

2:- 0 "'ë u :::c Li.

25 Des hauts et des bas chez les busards

Deu x des réserves récemment créées par la SEPNB ont en commun de servir de lieu de nidification pour les busards. L'étanq de Trenvel (29) est par excellence le domaine du busard des roseaux. Sept couples s'y sont reproduits, soit une densité sans égale en Basse-Bretagne. Observables toute l'an­ née, ils se regroupent les soirs d'hiver en un petit dortoir et tirent profit dès l'aube de celui , gigantesque, des étourneaux.

Au Cragou (29), busards cendrés et saint martin cohabitent. Mais la réserve qui avait abrité trois couples de ces oiseaux en 1986 n'a vu cette année qu'un seul couple de busards cendrés se cantonner. Et encore, x sans réussite. Les pluies diluviennes du 24 2 mai au 7 juin ont semble-t-il provoqué la (.) destruction de nombreuses pontes. Ainsi, r sur les 27 à 32 couples des deux espèces 0 E repérés sur l'ensemble des monts d'Arrée, 1- 11 seulement paraissent avoir réussi à éle­ Visite de Marc Avery (à gauche), spécialiste ver des jeunes. britannique de la sterne de Dougal/, à la colonie de la baie de Morlaix . Dans les marais de Plouray, la réserve de Clesseven (22) offre de vastes terrains de chasse pour ces rapaces. Le busard des ces deux sites. Les nichoirs des salines de roseaux y est désormais un hôte perma­ Falguérec (56) ont quant à eux attiré 6 nent et la reproduction ne devrait pas couples. tarder.

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26 cette cascade d'observations le premier Hérons, hérons cas de nidification de l'espèce en Basse­ Bretagne.

La héronnière du Haut Villeneuve (44) a A Falguérec(56), les travaux coûtent... mais perdu une bonne partie de ses nicheurs. payent sur le plan ornithologique. Qu'est­ 146 nids de hérons cendrés et au moins 26 ce à dire? Tout simplement que les nou­ d'aigrettes garzettes y ont été dénombrés. veaux aménagements hyrauliques finan­ Une fraction des effectifs a dû se déplacer cés en grande partie par le conseil général vers deux autres sites colonisés depuis du Morbihan ont permis d'attirer un nom­ peu dans le pays guérandais. Et ce n'est bre croissant d'oiseaux d'eau. Le bassin pas la mise en chantier d'un lotissement à situé au nord du mirador par exemple a la périphérie de la réserve qui devrait enfin pu être utilisé par les hérons et limi­ arranger les choses. coles comme le lieu de gagnage perma­ nent. A côté de chiffres satisfaisants pour les échasses, avocettes et chevaliers gam­ A l'étang de Trenvel, les grands butors bettes nicheurs, le fait marquant réside n'ont pas justifié leur réputation d'oiseaux dans la tentative de reproduction d'un discrets. Pour le plus grand plaisir des couple de barges à queue noire. L'exten­ naturalistes locaux d'ailleurs. Ainsi, durant sion attendue de la réserve dans le courant la vague de froid de janvier, quatre ou cinq de l'année 1988 pourrait contribuer à l'éta­ «bœufs des marais » étaient quotidienne­ blissement définitif de ces superbes petits ment observés, parfois même simultané­ échassiers. ment en fin de soirée. Toujours est-il que deux mâles au moins ont rythmé de leurs chants les journées de printemps, l'un dans la réserve, l'autre dans la grande roselière du conservatoire du littoral. On bague à toute heure

Ce butor de poche qu'est le blongios nain n'a quant à lui guère fréquenté l'étang. En réalité, il se fait plus rare d'année en année. Plusieurs études suivent leurs cours. Outre La surprise est plutôt venu de deux -hérons les travaux conduits à Goulien sur les pourprés qui ont séjourné de la fin-avril à la mouettes tridactyles, deux autres réserves mi-aoûtdans le marais. Mais un indice irré­ sont le siège d'une intense activité de futable fait toujours défaut pour voir dans baguage.

Déjà nicheuse en baie d 'Audierne el en Brière, la barge à queue noire ua-t-elle s'installer au Falguérec ?

27 Dans l'archipel de Molène, l'équipe« pétrel tempête» a capturé en seize nuits 994 Le coin des cocheurs oiseaux sur Banneg et Balaoeg . Douze puffins des Anglais ont été bagués par la même occasion. Le quotidien Le Télégram­ me a consacré un superbe reportage cou­ Un tour d'horizon annuel de la vie des réserves ne peut se passer du paragraphe leur sur cette recherche... « Coupe de filet à Banneg!». consacré aux observations inattendues et parfois folles, celles qui apportent un peu de piment à la pratique ornithologique. A En baie d'Audierne, les bagueurs s'agitent condition toutefois d'aimer la cuisine de préférence en mati née et en soirée, épicée. lorsque les fauvettes paludicoles circulent dans les roselières à la recherche d'in­ Au hit-parade, que retenir? Les milans sectes. Au vu de l'importance des cap­ ·noirs printaniers des Cragou, de Goulien et: tures, l'étang de Trenvel fait désormais par­ de Clesseven, ainsi que les guêpiers ni­ tie du réseau très réduit des sites retenus cheurs de Trenvel et de la baie d'Audierne par le C.R.B.P.O. (2) pour étudier la stratégie sont désormais presque des classiques. migratoire de ces passereaux. Cet été, L'aigle botté de Falguerec en août l'est déjà 1600 phragmites des joncs, 30 phragmites bien moins. Cependant, la palme revient aquatiques (un oiseau considéré comme incontestablement aux visiteurs occasion­ rare il y a dix ans) et 1100 rousserolles nels repérés à Trepvel. L'intérêt de ce site effarvates en route pour l'Afrique ont fait la dans ce domaine particulier était certes connaissance des filets japonais. Tout don­ connu, mais la pression d'observation en a nerait à penser que, sitôt restaurées sur apporté une nouvelle démonstration. Qu'on place (elles passent en quelques jours de en juge par cette petite sélection d'espèces 12 à 20 grammes!), les phragmites gagnent opérée à partir des Annales ornithologi­ directement l'Afrique du nord, sans escale. ques 1987 de l'étang de Trenvel(3): cigogne

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Pluvie r fauve à Trenvelle 27 septembre 1987 noire, oie des neiges, bernache nonnette, érismature roux, balbuzard pêcheur, grue Sur les traces cendrée, pluvier fauve, bécasseau rousset, des mammifères glaréole à collier, guifette leucoptère, pipit à gorge rousse, pipit de Richard, etc ... Le lapin de garenne est à première vue un animal banal. Il est pourtant la cause de (2) Centre de recherches sur la biologie des popula­ bien des soucis. A Goulien, là où les res­ tions d'oiseaux (muséum national d'histoire naturelle, ponsables de la réserve ne voient rien à lui Paris). reprocher, il se trouve des personnes pour (3) Travaux des réserves. tome 5, 1988. l'accuser de ronger trop goulûment les

28 choux du voisinage. C'est incontestable, à ceci près que les lapins de la réserve ne Inventaires en tous genres ·. - sont certainement pas les plus impliqués dans ces horribles forfaits. Toujours est-il que pour la première_-fois, la SEPNB a dû indemniser des dégâts de gibier. Sur Ban­ L'exploration du même souterrain, vestige neg et l'île d'Yack (29), les interrogations de la dernière guerre, a permis de décou­ sont tout autres. Quel est le rôle joué par vrir à quel point y était abondante une cet animal dans l'évolution de la végétation superbe araignée cavernicole peu répan­ insulaire? Pour tenter de mieux cerner la due en Bretagne : Meta (nenardi. La curio­ question, un programme de travail va être sité à l'égard de ce groupe zoologique se mis en route avec les conseils de J.L. développe dans un nombre croissant de Chappuis, le spécialiste français du sujet. réserves, à Goulien, Tren v~. Clesseven, etc ... Des surprises sont donc à attendre Nos réserves intérieures reçoivent la visite dans ce domaine. de plus gros animaux. Ainsi, en plus du chevreuil maintenant abondant, des indices /:.;t'if& ~ -'· ~( ,; ..,

'u / \ E \ ~ u. . ' 1 <. \ ...J ... \ r· -"; :: ëi ' J ci: <.:!.,'" Des inventaires entomologiques sont éga­ ...J lement entrepris. Le plus avancé est pro­ '0 bablement celui des odonates (les libel­ c: i lules) de Falguérec. Vingt-sept espèces '"Q; ,.fi ont ainsi été identifiées. Vingt-deux s'y co reproduisent dont l'agrion nain, une libel­ de présence du sanglier onfété relevés au lule figurant en bonne place dans le livre Cragou, et de cerf à Clesseven. La loutre, rouge des espèces menacées en France. elle, s'est manifestée sur ce dernier site, Une telle découverte illustre si besoin est ainsi qu'à Trenvel, à Falguérec et au Cra­ l'intérêt qu'il y a à conduire de telles gou. Rien de nouveau par contre à son enquêtes en continu. sujet dans l'arçhipel de Molène. A moins de vous rencontrer prochaine­ Le tour du propriétaire ne saurait être com­ ment sur l'une des réserves de la SEPNB, plet sans rappeler les rhinolophes du Grand le rédacteur vous donne rendez-vous pour Rocher (22) (4). Afin de mieux comprendre des nouvelles des réserves 1988 sûrement leurs variations d'effectifs, une sonde ther­ toujours aussi fournies. mique et hygrométrique a été placée dans le souterrain. Alain Thomas SE PNB BP 32 (4) Penn ar Bed n• 125, p. 71. 29276 Brest Cedex

Si vous observez à l'étang de Trenvel Respectez la signalisation. Adressez vos notes à Albert Drezen (Kerandraon, 29167 Plonéour-Lanvern) ou demandez les fiches d'observation au sièqe de la SEPNB BP 32 Brest.

29 Livre d'école ou stage à Trunvel

A l'initiative de Bruno Bargain, un stage naturaliste était proposé à des jeunes de la SEPNB en février dernier. Hébergement chez l'habitant et cuisine familiale. Une formule économique.

Ils étaient onze au rendez-vous. âgés de 8 que soignés. Plongeons imbrins. à 15 ans. venus de Bretagne et d'ai lleurs. mouettes mélanocéphales et bergeron­ C inq jours clém ents de févri er 1988 en nettes de Yarrell fréquentaient au ssi les baie d'Audierne. Jumelles autour du cou. parages. Barges. canards. avocettes et ils ont pass& la sem aine à obs erver. écou­ hérons affluaient à l'lie des Cheva li ers. ter. sentir. jouer .. . La nuit tombée. le des­ Grèbes castagneux. canards et martin­ sin animalier (canards et busards des pêcheur se partageaient un étang voisin. roseaux) occupait les soirées. Jeudi. marée à Penmarc'h. Jeu d'i dentifi­ Dès le premier jour. un aquarium d 'eau cation qui suivait une observation de tous douce rem plaçait ava ntageusement télé­ les niveaux de l'estran. Agilité de l'esp rit dérision et idiot-visuel. Tout de suite et de l'œil pour retrouver dans les mares aussi, nettoyage et remise à l'eau de deu x et les rochers les !rentes espèces végé­ guillemots mazoutés. Au bord de l'étang. tales et animales .. ils ont vu l'envol du butor étoilé. les Ce stage représente un effort important parades des busards des roseaux. les d 'ad ultes envers des plus jeunes ne dis­ évolutions des canards et des cygnes. pesants ni des occasions ni des moyens Les comptages des busards en dortoir. financiers suffisants pour vivre un tel des vanneaux. des bruants p royers et des séjour. Cette expérience unique. qui a étourneaux figuraient au programme. coûté le moins cher possible aux partici­ Mercredi 3 février. 21 h. 30 : une clameur pants. devra se renouveler... Pour que. la épouvantable s'est élevée du fond de la dernière soirée. après les crèpes et les roselière. Le hibou des marais les a pétri ormeaux. tous puissent voyager grâce fiés. A l'aube, une chouette hulotte s'en­ aux croquis d 'un dessi nateur animalier volait. Et une surprise.. ils ont vu une revenu d'Afriq ue. Pour que la nature ne loutre! A la brèche et sur le bord de mer. soit pas. pour les jeunes d'aujourd 'hui. la après l'observation de la végétation belle photo d'une revue à la mode ... ou dunaire. le goéland bourgmestre a attiré d'un livre de sciences naturelles. les dessinateurs. Serge Nicolle. venu spé­ cialement. prodiguait des conseils tout en réalisant dP.~ croquis aussi rapides Fanny Chauffin

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Les forêts meurent aussi enquête menée dans toute l'Europe, sur le terrain, dans les laboratoires et auprès des instances officielles. Pluies acides et dépérissement forestier Marcel Le Pennee

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PA f Rit'K ARDUE!'

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Sous une signature commune, C. Kempf, naturaliste, et T. Piantanida, journaliste, Un étonnant recueil d'une trentaine de nous livrent leurs réflexions sur le dépéris­ poèmes sur les animaux de l'Armor et de sement forestier. En 171 pages, ils nous l'Argoat. Si passionnant qu'il faut espérer font découvrir la mort lente de la forêt par que l'auteur ne s'arrête pas en si bon che­ les pluies acides, cocktail em poisonné de min. Pour tous les amoureux de la nature et polluants émis surtout par les centrales de la poéSie. thermiques, l'industrie chimique et les auto­ mobiles. L'ouvrage fait le point sur cet important problème au terme d'une longue Marcel Le Pennee

31 La nouvelle série de cartes postales est en vente au siège de la SEPNB 186, rueA.-France 29200 Brest.

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Le présent numéro a été tiré à 2.800 exemplaires Dépôt légal: septembre 1988. Directeur de la publication Marcel Le Pennee Imprimerie Régionale · Bannalec - N" C.P.P.A.P.: 33503 - I.S.S.N. 0553·4992