517 il parvint à délivrer cent esclaves de Katele. jetteraient sur le , dégarni d'une partie Pour se prémunir contre les attaques, il con- de ses défenseurs. Mais les Arabes étaient forts JOUBERT (Léopold-Louis), Capitaine fran- struisit alors un village palissade, à trois lieues et le combat resta sans résultat. çais [Saint-Herblon (Loire-Inférieure, Bre- du pic de Mrumbi. à une journée de marche Une petite accalmie suivit ces événements, tagne), 23,2,1842-Misembe (Tanganika), 27.5. de et à 2 km des rives du Tanganika, et Joubert rentra à M'Pala. Mais par après il 1927]. Fils de Jean et de Gauthier, Marie-Rose. Il baptisa l'endroit du nom de Saint-Louis alla s'installer près de Baudouinville, dans la Cet officier est une des plus nobles figures de Mrumbi. C'est de là qu'est datée une abon- mission fondée par le Père Roelens, à une de la campagne antiesclavagiste menée en dante correspondance qu'il adressa à son frère journée de marche de Mpala vers l'intérieur. Afrique centrale contre les trafiquants arabes. en France et à son ami le général de Charette. Joubert avait épousé une jeune négresse, Engagé dans l'armée des zouaves pontifi- Mais s'il guerroyait bien souvent, il semait dont il eut plusieurs fils. Il continua à être caux, le jeune Breton Léopold Joubert prit part aussi et récoltait. Des gens venaient nombreux catéchiste, éducateur, infirmier des Noirs, qui à toute la guerre que Pie IX eut à soutenir se grouper autour de lui à Mpala. Mais voilà se groupaient autour de lui. Pour mieux mar- quer son désir définitif de consacrer sa vie à contre le gouvernement italien et s'y signala que dès janvier 1890, des Rouga-Rouga, vas- la race noire, il se fit naturaliser Congolais. par une bravoure et un dévouement remar- saux de Rumaliza, déclanchèrent les hostilités. C'est le seul Blanc qui eût cette nationalité. quables qui lui valurent le grade de capitaine. Le 24 mai 1890, ils tombaient à l'improviste Les derniers temps de sa vie, Joubert était Il fut blessé à Castelfidardo, le 18 septembre sur un village pendant l'absence du capitaine; atteint de surdité et de cécité, 11 mourut à 1860 et commanda la défense de la porte de à la nouvelle de l'attaque, celui-ci accourut; l'âge de 85 ans, le 27 mai 1927, à Misembe Salaria, le 29 septembre 1870. ses soldats reprirent aussitôt courage. L'ennemi présenta de parlementer, maïs Joubert lui (Sancta Maria de Moba). Il avait vécu 46 ans Après la chute du pouvoir temporel des au bord du Tanganika et y laissait la réputa- Papes, il fit la campagne de la Loire, sous les répondit : « Pas avant d'avoir évacué le terri- toire envahi ». tion d'une extraordinaire bravoure alliée à la ordres du général de Charette. Quand on lui piété et à la bonté les plus édifiantes. offrit d'entrer définitivement dans l'armée fran- Providentiellement, une tornade éclata et dis- çaise avec son grade de capitaine, il refusa, persa les bateaux qui arrivaient renforcer Un service solennel, au cours duquel le pour se maintenir à la disposition du Pape. l'assaillant. Rumaliza, furieux, disait : « il faut Père Tielemans, ancien curé du capitaine Jou- Licencié, il offrit ses services à Mgr Lavigerie, en finir avec Joubert, car il nous défend de bert en Afrique, prononça l'allocution de cir- séjourna à Alger, puis à Zanzibar et se fami- faire des esclaves ». La gravité de la situation constance, fut célébré à l'église Saint-Jacques- liarisa avec la vie dans les missions des Pères força donc Joubert à demander du secours sur-Coudenberg à Bruxelles, le 12 décembre Blancs d'Afrique, dont il conduisit les trois en Europe. Aussi, c'est en libérateur qu'il 1927. En 1933, un comité se forma à Bruxelles premiers au lac Tanganika en janvier 1879. accueillit le capitaine Jacques, commandant la pour commémorer la mémoire du capitaine Jou- L'année suivante, apprenant que ces mission- deuxième expédition antiesclavagiste, qui vint bert. Les traits du héros furent reproduits naires étaient exposés à la vindicte des escla- le rejoindre à Saint-Louis de Mrumbi en octo- d'après des photographies par le sculpteur vagistes, dont ils contrecarraient les desseins, bre 1891. Jacques apprécia immédiatement à Jules Jourdain. Ce médaillon orne le monument Joubert n'hésita pas à voler à leur secours sa juste valeur le paladin qu'il avait devant lui. rustique rappelant la Bretagne natale du capi- (10 octobre 1880). Il s'installa auprès d'eux, à Il a écrit à ce propos : « Ça a été un des meil- taine, que les Pères Blancs ont érigé à Bau- Kibanga, et tint tête aux Arabes avec quelques leurs moments de ma vie de lui donner l'acco- douinville, sur les hauteurs dominant le lac. troupes qu'il avait dressées lui-même et qui lade au nom de ses amis d'Europe. Quel digne Dans le monument est scellée une plaque lui étaient toutes dévouées. En 1885, extrê- et saint homme ! ». de bronze donnant en kiswaheli une courte mement fatigué, il décida de rentrer en Europe biographie du capitaine. Une embarcation à Jacques se mit immédiatement en devoir de voiles, achetée avec les fonds disponibles de pour un bref congé. Avec son ami Visser, choisir l'emplacement d'une station et, après Joubert s'embarqua le 5 novembre 1885, à la souscription ouverte par les soins du comité, une étude approfondie de la rive du Tanga- fut lancée sur le Tanganika et baptisée du Kibanga, sur le Saint-Michel, pirogue à rames nika, il établit chez le chef Kitaki, entre Mtoa et à voiles; ils firent la traversée du lac et le nom de Joubert. Elle fut mise à la disposition et Mpala, un poste qu'il baptisa du nom des Pères Blancs pour les aider à continuer 7 novembre, débarquaient à Udjiji, où ils con- d'Albertville. Le plan de Jacques était d'éche- stituèrent une caravane, pour se diriger vers la l'œuvre de leur premier grand défenseur contre lonner des places solides, du Sud au Nord, le les Arabes. côte de l'océan Indien. Le 18 décembre, appre- long de la rive occidentale. Sa première sta- De nombreuses lettres de Joubert ont paru nant la mort de Mirambo, ils évitèrent ses terri- tion devait étendre son action protectrice sur dans le «Mouvement antiesclavagiste» (1889, toires et continuèrent leur voyage jusqu'à Baga- la région de l'Urua, tandis que Joubert, ravi- 1891-1892). raoyo et Zanzibar, d'où ils s'embarquèrent pour taillé par Jacques en armes et en munitions, l'Europe. 28 juin 1949. continuerait à défendre la contrée du Marungu. M. Coosemans. Cette même année 1885, à la suite du Con- Joubert y fut dès lors assisté par un autre grès de Berlin, l'État Indépendant ayant résolu ancien zouave pontifical, Vritthoff, un Nainu- A. Delcommune, Vingt années de vie africaine, de concentrer son action colonisatrice sur rois, que Jacques lui céda. Larcier, Bruxelles, 1922, t 11, pp. 463-487, 511. l'embouchure et les bords du fleuve Congo et — L. Lejeune, Vieux Congo, 1930, p. 96. — Le 15 mars 1892, Jacques apprit que les A. Chapaux, Le Congo, Eoaez, Bruxelles, 1894, d'abandonner provisoirement ses établissements pp. 827-830, 835. — Bull, Vétérans col., du Tanganika, que la suppression des postes Arabes d'Udjidji se disposaient à attaquer la août 1933, p. 7. — A. Wauters, L'État Indépen- de Karema et de isolait au milieu du mission de Kibanga, au Nord de Mtoa. Il s'y dant du Congo, Bruxelles, 1929, p. 86. — continent, confia aux Pères Blancs le poste de rendit aussitôt; mais ce n'était heureusement J.-M. Verhoeven, Jacques de Diwmude, Bruxelles, qu'une fausse alerte. Après une entrevue avec 1929, p — P. Coppens, Veillées congolaises, Mpala, fondé en 1883 par Storms pour le R. Louis, Bruxelles, 1936, pp. 37-39. — Mouve- compte de l'Association Internationale Afri- le sultan Rumaliza, Jacques rentrait à Albert- ment antiesclavagiste, 1889, p. 36; 1891, pp. 16, caine, À ce moment, le pays autour de Mpala ville le 30 mars. Une mauvaise nouvelle l'at- 98, 311; 1892, p. 68; 1898, p. 49. — Delery, tendait : pendant son absence, les Wangwana Expédition de secours à Joubert, Mouvement n'était pas tranquille. Lorsque les esclavagistes antiesclavagiste, 1891, p. 98. — Masoin, Histoire avaient appris qu'il ne resterait à Mpala que (nègres arabisés) avaient envahi les environs de l'Ê.I.C., Namur, 1913. — Tribune congolaise, des religieux, ils se crurent assurés de l'impu- du poste, dont les indigènes menacés étaient 15 juin 1927, p. 4; 31 juillet 1927, p. 3; 15 décem- nité de leurs procédés barbares. A la suite du venus en conséquence demander aide et pro- bre 1927, p. 3; 31 décembre 1927, p. 3; 21 oc- tection au lieutenant Renier, gardien d'Albert- tobre 1909, p. 2; 31 décembre 1910, p. 1; 30 no- sac d'un hameau proche, par les sujets de vembre 1935, p. 2. — Comte H, Carton de Wiart, Rutuku, la petite troupe de la mission parvint ville pendant l'absence de Jacques. Renier avait Mes vacances au Congo, Bruges, p. 120. — à refouler les envahisseurs et à les forcer de marché contre les Wangwana et les avait bat- Becker, La vie en Afrique, t. 2, pp. 86, 100. repasser le lac. C'est alors que Joubert revint tus, mais il avait aussi envoyé d'urgence un d'Europe, investi du commandement de la courrier à Joubert pour l'appeler à l'aide. Jou- station par le cardinal Lavigerie. Le danger bert avait envoyé Vrithoff et quelques soldats. était réel. Une razzia ayant été dirigée contre Jacques, qui rentrait malade, épuisé, dut renon- Mpala par Kipili, les troupes de Joubert se cer à accompagner le contingent militaire, qu'il envoya, sous les ordres de Renier, Docquier et défendirent héroïquement et, au cours de Vrithoff, contre les Arabes établis sur la l'action, Kipili fut tué. En août 1887, les gens Lukuga. A l'attaque, le 5 avril, Vrithoff fut de Katambwa s'en prirent à Joubert. « Ce sont tué et Renier et Docquier durent regagner de vrais vautours, écrivait le capitaine; mal- Albertville. On décida de fortifier Albertville, heur au pays sur lequel ils, s'abattent », et il à quoi les Arabes répondirent en construisant ajoutait : « C'est presque toujours le Marungu en face du poste un vaste boma d'où ils se qui est le théâtre et la victime des envahisseurs livrèrent à de continuelles escarmouches. De esclavagistes ». nouveau, il fallut faire appel à Joubert. Le 24, En décembre 1887, Joubert dut se porter au Jacques vit arriver Joubert en compagnie de secours d'un chef ami, Wondo, et mit en fuite Delcommune, Diderrich et Cassart. Un plan fut les bandes du chef Rutuku, qui un peu plus élaboré : Delcommune devait assurer la défense tard vinrent chercher une troisième correction du fort; Joubert, avec Diderrich et 150 hommes, à Mpala même. En août 1888, Joubert arracha devait entamer l'action et attirer l'ennemi de au chef Mohamedi ses captifs; en janvier 1890, son côté, tandis que Jacques et Cassart se