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Minor Cinema Le Cinéma expérimental en Suisse Ce document réunit les textes originellement rédigés en français pour la publication en langue anglaise de l’ouvrage Minor Cinema: Experimental Film in Switzerland publié par JRP|Editions en 2020. JRP|editions & les PResses du Réel Ce document pdf est une version abrégée de l’ouvrage Minor Cinema: Experimental Film in Switzerland publié par François Bovier, Adeena Mey, JRP|Editions en 2020. Il réunit les textes originellement Thomas Schärer, Fred Truniger [éds.] rédigés en français et traduits pour l’édition anglaise. Un pdf avec les textes originaux en allemand est également Minor Cinema disponible à l’adresse sfe.zhdk.ch. Vous trouverez également Le Cinéma expérimental en Suisse sur ce blog les sources réunies dans le cadre du projet de recherche « Schweizer Filmexperimente 1950-1988 ». Vous pouvez contribuer au projet de recherche « Minor Cinema » en contactant les chercheurs. 2 – 3 Sommaire Pour une histoire mineure d’un cinéma en marge François Bovier et Adeena Mey ............................................................. 4 Expanded Kunsthalle : la place du cinéma à la Kunsthalle de Berne sous la direction d’Harald Szeemann (1961-1969) Nicolas Brulhart .................................................................................. 16 Sous- et sur-expositions de l’art vidéo : les premières manifestations en Suisse romande Geneviève Loup ................................................................................... 44 Au-delà des frontières : la singularité de l’œuvre « en mouvement » de René Bauermeister Jean-Michel Baconnier ......................................................................... 72 Expériences de l’expérimental en Suisse romande : ciné-clubs, critiques, écoles d’art Entretien avec François Albera par François Bovier ....................... 90 Cléo Uebelmann, Mano Destra, 1985 : le froid et le cruel François Bovier et Christian Giuliano Tarabini ............................. 144 4 – 5 Pour une histoire mineure d’un Cette publication est issue d’un cinéma en marge projet de recherche soutenu, entre François Bovier et Adeena Mey 2010 et 2014, par le Fonds national suisse de la recherche scientifique, dont l’enjeu consistait à établir une cartographie du « cinéma expérimental » en Suisse1. Un premier état de la recherche a donné lieu à un colloque et à une programmation de films à la Cinémathèque suisse en 20122. Sur le plan historiographique et méthodologique, cette rencontre a permis de nous positionner par rapport à une tendance, à l’œuvre sur le plan international, à réécrire le cinéma d’avant- garde et expérimental à partir de l’histoire de l’art. Ce déplacement de perspective est étroitement associé à la reconstruction de per- formances du cinéma élargi et d’installations dans le cadre de grandes expositions rétrospectives ou monographiques comme Into the Light de Chrissie Iles3 ou Film Implosion! Experiments in Swiss Cinema and Moving Images, Fri Art Kunsthalle, Fribourg, le remontage des Solid Light Films 21 novembre 2015-21 février 2016 Vues de l’exposition ; commissaires : Balthazar Lovay et François Bovier d’Anthony McCall4. Le modèle PouR une histoiRe mineuRe d’un cinéma en maRge 6 – 7 de l’histoire des expositions tend à devenir le schéma en regard de la scène suisse et de sa « spécificité » (terme dominant à partir duquel le cinéma expérimental est contre-intuitif, au vu du caractère indéfini ou, en tout cas, réévalué, alors que les expérimentations sur le support du manque de cohésion des expérimentations impliquant du film se déploient depuis les années 1960 à travers un l’image en mouvement dans ce pays) : en effet, le syntagme champ spécifique et indépendant – ce n’est qu’à partir nominal « Schweizer Filmexperimente », tout comme des années 1990 que la catégorie de « cinéma d’exposition » l’expression plus neutre de « cinéma expérimental en tend à se généraliser. L’exemple « local » du « cinéma Suisse », non seulement laisse entièrement irrésolue la expérimental suisse » permet de mettre en lumière les question de la nature ou de la définition de ces pratiques, apports et les limites de ce déplacement historiographique. mais induit encore un prisme national ou, plus précisément, C’est donc logiquement qu’il s’est aussi agi, dans un effet d’unification abusif, alors que ces pratiques se un second temps, de confronter la recherche, les (re-) déploient à travers trois régions linguistiques et culturelles découvertes de films oubliés à la pratique curatoriale distinctes. L’« histoire du ‘cinéma expérimental’ » en Suisse, elle-même. Les enjeux de ce projet de recherche ont ainsi si tant est que l’on puisse encore mobiliser cette nomencla- été réinvestis à travers l’exposition Film Implosion!, organisée ture, s’inscrit dans une série d’intersections (dont les initialement à Fri Art Kunsthalle, Fribourg, en 2015-2016 principales sont probablement le cinéma d’artistes, le film (par François Bovier et Balthazar Lovay), et reprise au de commande, le nouveau cinéma, le film amateur, le Museum für Gestaltung, Zurich, en 2017 (Balthazar Lovay cinéma militant), tout en se situant le plus souvent dans et Andres Janser), puis à Medrar for Contemporary Art, les marges (de l’industrie du cinéma, du film d’auteur, des Le Caire, en 2018 (François Bovier et Adeena Mey)5. films de commande, de l’art contemporain). L’effet-exposition se manifeste à plein ici : redéployer, dans Il pourrait donc paraître logique d’envisager ces l’espace et à proximité les uns des autres, des films qui pratiques filmiques en distinguant différents milieux de participent à des logiques et des démarches fort diverses réalisation et de diffusion des œuvres (quand ces productions fait apparaître un « cinéma expérimental suisse » en tant répondent à une intention auctoriale, ce qui n’est pas qu’identité culturelle nationale à part entière, les « micro- toujours le cas). Le présent ouvrage répond partiellement à histoires » étant ainsi reconstruites « curatorialement » ce modèle dans le découpage de ses parties, mais en aucune si ce n’est en un « grand récit », tout au moins en une façon dans les chapitres qui le composent, qui sont pour histoire plurielle et riche. Le « tour de force » consiste alors la plupart des études de cas singuliers. En effet, il est tout à à supposer que le « cinéma expérimental », à travers ses fait possible et légitime de distinguer les pratiques ; chacune recherches formelles et ses enjeux conceptuels, trouve un d’entre elles pourrait par ailleurs faire l’objet d’un ouvrage espace de monstration privilégié à travers l’art contemporain à part entière. Mais leur addition ne dessine pas un champ et ses interstices, postulant ainsi une inscription de ces qui serait celui du « cinéma expérimental suisse » : nous pratiques filmiques par rapport à l’horizon plus large de perdons dans cette simple juxtaposition tout effet d’ensemble l’image en mouvement, du « haut-modernisme » à l’époque ou d’unité, contrecarrant la velléité avant-gardiste de faire contemporaine. « mouvement » ou de se constituer en groupes concurrents. Cependant, la catégorie de « cinéma expérimental » doit d’emblée être relativisée : ce concept, qui renvoie Énumérons la plupart de ces paradigmes artistiques, sociaux, initialement aux expérimentations scientifiques en labo- expérimentaux. Une « histoire majeure » du « cinéma ratoire, voire au modèle du « roman expérimental » expérimental » s’attacherait aux expériences non-narratives (c’est le titre d’un roman d’Émile Zola paru en 1880), n’est (ou para-narratives, dysnarratives, etc.) qui portent sur guère consistant – ce qui conduisait Dominique Noguez des phénomènes de perception médiés par la caméra. à l’inscrire en le barrant, à la manière de Jacques Derrida6. Ces pratiques se déploient dans le champ du cinéma indé- En outre, cette notion paraît d’autant plus problématique pen dant, en interaction avec les lieux de la contre-culture, PouR une histoiRe mineuRe d’un cinéma en maRge 8 – 9 la culture cinéphilique et les écoles d’art. Proposer une mouvement cohérent ni ne se laissent ressaisir en un cartographie de ces pratiques constituait le point de départ ensemble de vecteurs entrant en relation et interagissant : de ce projet, qui prenait la suite d’un programme de elles se caractérisent – disons-le en première approximation restauration de films mené par Fred Truniger. Et c’est ici – par leur caractère ponctuel, marginal, fragmentaire et l’occasion de rappeler qu’une coopérative de cinéastes dispersé. indépendants voit le jour très tôt en Suisse, à l’initiative de Le « cinéma expérimental » en Suisse n’est pas fédéré Hans-Jakob Siber, dès 1967. Celle-ci est néanmoins d’emblée autour d’un lieu unique, ni ne repose sur l’engagement contestée par certains protagonistes de ce cinéma, tel d’acteurs culturels ou de cinéastes qui auraient le rôle de HHK Schoenherr. rassembleurs. Cette absence de « centre » – et par consé- Une « contre-histoire » du cinéma expérimental quent un déploiement que nous pourrions décrire comme en appellerait aux pratiques militantes : féminisme, lutte essentiellement périphérique – repose probablement en anti nucléaire, revendications ouvrières, mouvement de grande partie sur le relatif manque de soutien institutionnel soulèvement de la jeunesse, etc. Cette interaction est indé- accordé à ces pratiques en Suisse. En effet, le Département niable, mais elle se négocie différemment selon les contextes de l’intérieur alloue bien des aides ponctuelles à des projets et les situations d’urgence politique. Un autre