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Document généré le 27 sept. 2021 20:30 Séquences La revue de cinéma Montréal, Festival, An VI Gilles Blain Cinéma et justice Numéro 42, octobre 1965 URI : https://id.erudit.org/iderudit/51796ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) La revue Séquences Inc. ISSN 0037-2412 (imprimé) 1923-5100 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Blain, G. (1965). Montréal, Festival, An VI. Séquences, (42), 38–46. Tous droits réservés © La revue Séquences Inc., 1965 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ MONTREAL FESTIVAL AN VI Gilles Blain conduirait à n'élire que les plus ré centes tentatives mondiales dans On se rappelle les vigoureuses l'art cinématographique" (15 août critiques émises l'an dernier contre 1964). Solution à laquelle se ralliak la sélection du 5e Festival interna aussi Henri-Paul Senécal dans son tional du film de Montréal : pau compte rendu du Festival (cf. Sé vreté affligeante de trois ou quatre quences, no 38, p. 54). films, absence regrettable de cer taines oeuvres remarquées en Eu Cette suggestion n'a été suivie rope au cours de l'année. Plusieurs qu'à demi. Sur un total de vingt et cinéphiles, dont je suis, avaient sous un films étrangers, la sélection com crit à ces remarques. Après cinq prenait cette année une bonne dizai ans d'existence, le Festival traver ne d'ouvrages de jeunes auteurs en sait une crise grave; il lui fallait du core très peu connus au Québec : sang nouveau. Jean Basile, chroni John Schlesinger, Manuel Summers, queur de cinéma au journal Le De Anthony Simmons, Ernest Pintoff, voir, avait suggéré une solution : Jerzy Skolimowski, Nelson Perei- "Nous pensons que le Festival de ci ra Dos Santos, Carlos Vilardebo, Isr- néma de Montréal pourrait s'orien van Szabo, Pavel Hobl... Donc, la ter dans les années à venir vers une moitié du Festival consacrée au jeu sélection assez particulière qui le ne cinéma; l'autre moitié allait à SÉQUENCES 42 des réalisateurs aux noms presti condition, des hantises, des problè gieux, dont les oeuvres sont pro mes et des espoirs de l'homme d'au grammées assez régulièrement dans jourd'hui. nos cinémas d'essai : Francesco Rosi, Roberto Rossellini, Valerio Zurlini, Sous le signe de McLaren Mario Monicelli, Jean-Luc Godard, Agnès Varda, Karel Zeman, Masa Norman McLaren n'est pas jeu ki Kobayashi. ne, mais ses films le sont et le res Pourquoi le Comité de sélection teront, car la fantaisie, l'imagina a-t-il hésité à infléchir carrément le tion, l'humour ne vieillissent pas. Festival vers la nouvelle formule ? Il ne pourchasse pas la réalité, n'en Est-ce le trop petit nombre d'oeu quête pas sur notre époque, mais ses vres de qualité dans le jeune ciné films répondent à un besoin essen ma? Pourtant il y a eu dernièrement tiel de l'homme d'aujourd'hui : se Pesaro, premier festival internatio détendre dans l'univers gratuit et nal du nouveau cinéma, fondé sur libre de la posésie. Il ne travaille l'initiarive de Gianni Amico et pas comme les autres cinéastes en Louis Marcorelles, et qui a remporté tourés d'acteurs, appuyés par une un vif succès (cf. Cahiers du Ciné équipe, maîtres du plateau. Il passe ma, no 169, pp. 16-17). Est-ce le ca ses journées entre les quatre murs ractère même de la masse des spec de son laboratoire, penché sur ses tateurs qui affluent au Loew's du pellicules, ses pinceaux, ses instru rant le mois d'août ? Il est vrai que ments de mesure. Son seul témoin ce public est assez bigarré : jeunes est sa fidèle collaboratrice Evelyn cinéphiles enragés, clientèle "mo Lambart. Mais il contribue à dila yenne" des salles de cinéma, touris ter les possibilités du septième art, tes en mal de divertissement. Une il projette sur les écrans du monde programmation trop sévère et trop entier les signes de ses songes, le spécialisée éloignerait peut-être chiffre de son génie. quantité de gens ... Quoi qu'il en soit, le dernier Fes Le dernier Festival n'aurait pas tival m'a réjoui pour deux raisons : eu l'envergure qu'on lui connaît d'une part, l'accent mis sur le jeu sans l'apport de ces quarante courts ne cinéma mondial, ce qui nous a métrages, la presque totalité de valu de connaître des recherches for l'oeuvre de McLaren. Tout n'est pas melles inédites, parfois fort auda égal dans cet oeuvre: les premiers es cieuses; d'aurre part, l'audience ac sais sont maladroits, naïfs (Camera cordée à un éventail d'oeuvres qui Makes Whoopee, Colour Cocktail, témoignent dans la variété, de la Hell Unlimited), d'autres souffrent OCTOBRE 1965 39 %x%% m Mosaïque). Mosaïque, son dernier- né (1965), qui a justement ouverr le Festival, est une des plus belles fantaisies visuelles qu'il m'a été don né de voir. Cette gravure sur pelli cule cadrée joue avec le croisement des Lignes horizontales et des Li gnes verticales : il en résulte des variations futuristes éblouissantes et des contrastes de couleurs qui obli gent la rétine à des gymnastiques inaccoutumées. Les organisateurs du Festival mé ritent des félicitations pour avoir inscrit au programme cette rétros pective McLaren et avoir organisé, en collaboration avec la Cinémathè que canadienne, une magnifique ex position de l'oeuvre (peintures, de vis et maquettes de travail) du mê McLaren vu par Séquences en 1956 me auteur dans un salon de l'Hôtel Reine Elizabeth. de l'illustration publicitaire (The Regards sur l'histoire Obedient Flame, V for Victory, Fi ve for Four), d'autres servent de Il ne faut pas croire que les ci trop près le texte de chansons po néastes les plus attachés à la condi pulaires (Alouette, C'est l'aviron, tion présente de l'homme délais Là-haut sur ces montagnes), d'au sent l'histoire. Le présent s'enra tres encore ont les limites de l'ex cine dans l'histoire; certains faits et périmentation (Rumba, Stars and certaines figures du passé exercent Stripes, Dots et Loops), mais il y a une fascination et présentent une les chefs-d'oeuvre qui comptent par valeur exemplaire. mi les sommets de cet art qu'est le Deux films du Festival sur l'his cinéma image par image (Boogie toire: Viva I'Italia, de Roberto Ros Doodle, Fiddle de Dee, Les Voisins, sellini, Les Soldatesses, de Valerio Blinkity Blank, Rythmetic. Il était Zurlini. Le premier concerne le "ri- une chaise, Le Merle, Lignes verti sorgimento" qui a déjà retenu cales, Lignes horizontales, Canon, l'attention de Rossellini (Vani- 40 SEQUENCES 42 na Vanini). Il est basé sur les pathie. Hors les croquis garibal principaux faits de l'expédition des diens, le film manque de consistan Mille : le départ de Quarro, la ba ce : faiblesse de la mise en scène, taille de Calatafimi, la prise de Pa maladresse dans le traitement des lerme, le débarquement en Sicile, scènes de bataille, négligence dans l'entrée à Naples, la bataille de Vol- la conduite de l'action. Sur ce plan, turno. Le ton est très différent de Viva l'Italia ne fait pas le poids avec I860, de Blasetti : absence d'empha Senso ou Le Guépard de Visconti. se, langage dépouillé, représenta La fresque historique convient tion plus simple, plus directe de la moins bien à Rossellini que les chro réalité, peinture d'atmosphère plu niques de la Résistance (Rome, ville tôt que fresque épique. L'oeuvre est ouverte, Païsa) ou les films intimis centrée sur le personnage de Gari tes (Voyage en Italie, Stromboli). baldi; les autres personnages sont Les Soldatesses, de Valerio Zurli traités à l'avenant (par exemple, ni, nous réfère à un passé plus ré Victor-Emmanuel II, Nino Bixio, cent : la guerre gréco-italienne. Les le bras droir de Garibaldi, l'officier soldats vainqueurs de Mussolini Menotti, dont les paroles, les com transportent un contingent de portements frisent le ridicule tant "filles" pour le plaisir de l'ar ils sont artificiels et schématiques*». mée. Le camion égrène les L'image que l'auteur nous donne de prostituées le long des camps Garibaldi n'est pas celle des ma militaires. L'une d'elles est tuée a- nuels d'histoire; elle est plus simple, vec une bande de soldats dans une plus familière, plus humaine : un embûche dressée par les Partisans. citoyen comme les autres, qui est Le transport des "filles" est brus loin de se croire un héros, un pay quement interrompu par l'incendie san de Gaprera que les circonsran- de leur camion; les voyageurs trou ces placent à la tête d'un peuple vent refuge dans un réduit. C'est le mais qui revient à sa terre natale désarroi, la révolte. Un officier, qui une fois sa mission accomplie. Ros ne fait pas partie officiellement du sellini excelle à le dépeindre dans sa convoi, tente de se débarrasser vie journalière, avec ses humeurs, d'une des blessées. Les sauve- ses manies, et, quand il nous le pré reurs ramènent le contingent dé sente sur les champs de bataille, il cimé. L'idylle ébauchée entre le en souligne la force contenue et la jeune officier et la plus fière des popularité auprès des soldats.