Les Dossiers Noirs Du VATICAN
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Paul Williams Les Dossiers Noirs du VATICAN Traduit de l’américain Par Véronique Dassa et Colette St-Hilaire 2 H&O éditions 2011 ISBN 2845472137 3 Table des matières INTRODUCTION Un véritable conte de fées CHAPITRE 1 La donation de Mussolini CHAPITRE 2 Le miracle de l’argent CHAPITRE 3 Le triomphe de Mammon CHAPITRE 4 La création de la Banque du Vatican CHAPITRE 5 La Croatie catholique et l’or des nazis CHAPITRE 6 Richesses et réseaux d’exfiltration CHAPITRE 7 Une prospérité au-delà de toute mesure 4 CHAPITRE 8 Un Pape de gauche CHAPITRE 9 Le maelström de Montini CHAPITRE 10 Le requin entre en scène CHAPITRE 11 La société secrète CHAPITRE 12 Autres temps, autres crimes CHAPITRE 13 Une Église de faussaires CHAPITRE 14 La chute de Vatican Inc. CHAPITRE 15 Le pape doit mourir CHAPITRE 16 L’affaire Ambrosiano 5 CHAPITRE 17 Les suites de la tempête CHAPITRE 18 Les affaires continuent CHAPITRE 19 Une forteresse inexpugnable ÉPILOGUE Ainsi vont les choses ANNEXE I Accords du Latran ANNEXE II Concordat entre le Saint-Siège et le Reich allemand 6 INTRODUCTION Un véritable conte de fées À la vue des foules, Jésus monta dans la montagne. Il s’assit et ses disciples s'approchèrent de lui. En prenant la parole, il les enseignait: « Heureux les pauvres de cœur: le royaume des deux est à eux. Heureux les doux, ils auront la terre en partage. Heureux ceux qui pleurent: ils seront consolés. Heureux ceux qui ont faim et soif de Injustice: ils seront rassasiés. Heureux ceux qui sont miséricordieux: il leur sera fait miséricorde. Heureux les cœurs purs: ils verront Dieu. Heureux ceux qui font œuvre de paix: ils seront appelés fils de Dieu. Heureux ceux qui sont persécutés pour Injustice: le royaume des deux est à eux. Heureux êtes-vous quand l’on vous insulte, que l’on vous persécute et que l’on dit faussement contre vous toute sorte de mal à cause de moi. Soyez dans la joie et l’allégresse, car votre récompense est grande dans les deux: c’est ainsi en effet qu’on a persécuté les prophètes qui vous ont précédés. » Matthieu, V, 1-12 Le miracle présumé arrive le 28 octobre 312. Deux centurions viennent chercher Miltiade, un petit homme sans prétention de 62 ans, là où il se cache, une petite maison dans une ruelle du Trastevere à Rome. Le vieil homme en conclut qu’on va le jeter en prison parce qu’il est le chef du mouvement des chrétiens — un mouvement que l’Empire a 7 déclaré religio illicita. Il s’attend à cette arrestation. Il s’attend à être traîné devant les tribunaux et condamné avec ses disciples à une exécution publique pour que la ville entière puisse voir le sort que subissent ceux qui refusent d’honorer les dieux de Rome. Miltiade, qui porte une tunique élimée et travaille au marché, est évêque de Rome et, à ce titre, ses coreligionnaires chrétiens l’appellent « papa » ou « père ». Selon la tradition, le premier évêque de Rome fut l’apôtre Pierre, que Jésus désigna pour fonder l’Église — le royaume visible de Dieu sur la terre. « Et moi je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et la Puissance de la Mort n’aura pas de force contre elle. » (Matthieu, XVI, 18). Pierre avait fondé une communauté de chrétiens à Rome, le centre de l’Empire. Le célèbre apôtre fut crucifié en 68 de notre ère, pendant le règne de Néron. Le successeur de Pierre fut Linus qui selon la tradition mourut lui aussi en martyr. Linus fut remplacé par Anaclet, un esclave grec dont le nom signifie « irréprochable ». Miltiade, originaire d’Afrique du Nord, est le trente-deuxième évêque de Rome. Ses prédécesseurs ne sont que rarement morts dans leurs lits. Certains d’entre eux furent livrés aux bêtes sauvages dans l’arène; d’autres périrent par le feu, embrasés comme des torches pour éclairer les jeux. Le vieil homme fait le signe de la croix et prie pour avoir le courage de mériter la couronne de martyr. Il suit les soldats dans la lumière du soleil et aperçoit l’empereur Constantin, flanqué de centaines d’hommes. 8 L’Empereur est un personnage imposant, il mesure plus d’un mètre quatre-vingt, il a le visage carré et pâle, les yeux bleus et un cou de taureau. Soldats et chevaux sont couverts de sang, de boue et de poussière. Ce matin même d’octobre, sur le Pont Milvio qui traverse le Tibre, Constantin a vaincu son impérial rival, Maxence, et devient ainsi le seul chef de l’Empire romain. Constantin est convaincu qu’il doit sa victoire à une vision qu’il a eue avant la bataille : il a vu une croix. Au-dessus de la croix apparue par-delà les nuages dans le ciel du matin, ces mots se sont inscrits : « In hoc signo vinces », « Par ce signe, tu vaincras ». Quand il leur a demandé ce que pouvait signifier ce signe dans les cieux, ses soldats lui ont appris que la croix était le symbole du « Christ », le Dieu des chrétiens. Après avoir taillé en pièces l’armée de son rival, Constantin décide d’adopter le Dieu des chrétiens, pour lui et pour son empire. Au lieu de jeter Miltiade en prison, Constantin l’embrasse et couvre les vieilles épaules de l’évêque de la tunique pourpre d’un grand prêtre païen. Miltiade n’y comprend plus rien. Ce qui se déroule devant ses yeux est trop étrange pour être vrai. Deux mondes viennent de se rencontrer. Le monde de César, avec ses richesses et sa puissance — sa pompe et sa magnificence —, il faut absolument le fuir. Celui du Christ est un monde de pauvreté et de servitude — de persécutions et d’abnégation. Complètement abasourdi, Miltiade se contente de hocher la tête tandis que l’Empereur baragouine quelques phrases sur le grand signe apparu dans les cieux et qui sera 9 désormais gravé sur le bouclier de ses soldats. Le vieil homme ne dit mot, même si l’Empereur semble confondre Jésus Christ, le serviteur martyr des Écritures, avec Sol, le dieu romain du soleil. Constantin demande qu’on lui indique l’endroit où les restes de Pierre, le premier chef des chrétiens, ont été enterrés. Miltiade conduit l’Empereur et toute la grande légion romaine devant une petite pierre, un tropaeum, dans un cimetière des environs de Rome. L’Empereur tombe à genoux et promet de construire en ce lieu même une grande basilique. Encore une fois, Miltiade en a le souffle coupé. Une basilique, à l’époque, n’est pas un lieu de culte. C’est un bâtiment profane où l’on vénère les statues des différents empereurs qui sont considérés comme des dieux. L’idée même d’une basilique chrétienne, c’est aussi absurde que la quadrature du cercle. La création entière semble avoir perdu la tête. Constantin conduit ensuite le vieil évêque dans un magnifique palais sur la colline du Latran. « Dorénavant », dit-il, « ceci est la demeure de Miltiade et de tous les successeurs du saint apôtre Pierre. » Il fait cadeau au papa d’un autre palais à Gandolfo, en guise de résidence d’été, puisqu’il serait indigne pour le successeur de Pierre de ne posséder qu’une seule demeure. Dans les semaines qui suivent, les changements se multiplient à la vitesse de l’éclair. Miltiade, en plus de ses palais, reçoit le titre de grand Pontife, pontifex maximus, ce qui jusque-là était l’apanage exclusif de César. Ceux qui 10 l’aident à officier dans les services liturgiques — qui sont désormais des événements publics — deviendront des « cardinaux », du latin cardo qui signifie « pivot », « charnière ». Et quand la foi chrétienne devient la religion officielle de l’Empire, les cardinaux vont former un collegium, un collège, une association d’administrateurs de l’Église. Du jour au lendemain, l’Église chrétienne commence à se servir de l’étole et de certains autres ornements sacerdotaux des prêtres païens, à utiliser l’eau consacrée et l’encens pour la purification. Un processus de syncrétisme commence à atteindre ce que les premiers chrétiens appelaient la foi sainte et apostolique. Les convertis païens avec leur penchant pour le polythéisme commencent à considérer les héros chrétiens et les martyrs comme des demi-dieux et à leur adresser directement des prières. Ce mélange va s’intensifier quand le calendrier des saints va remplacer le fasti romain (le calendrier des jours consacrés aux devoirs envers les dieux). Tout à coup, certaines divinités chères aux païens vont être honorées et adorées comme des saints chrétiens. La déesse Victoria des Basses-Alpes va devenir sainte Victoire, et Castor et Pollux vont renaître sous les traits légendaires de saint Côme et de saint Damien. Bien des chrétiens pieux se rendent compte qu’on est en train de déformer leur foi et ils s’en plaignent auprès du souverain pontife et de son collège de cardinaux. Les convertis païens, insiste saint Claude de Turin, n’ont pas abandonné leurs idoles, ils ont seulement changé leurs noms. Mais ces plaintes restent lettre morte. Les changements sont institutionnalisés par décret impérial. 11 Miltiade meurt dans un lit de roi, entouré des membres de sa suite. Le vieil évêque est remplacé par Sylvestre, qui règne pendant presque vingt-deux ans. C’est à cette époque que le Pape est amené à exercer un pouvoir séculier. La condamnation de l’hérésie ou faux enseignement — c’est-à-dire tout enseignement qui contredit ceux de l’Église romaine — s’accompagne d’une punition civile ce qui, avec le temps, pourra signifier l’emprisonnement, l’exil ou la mise à mort.