Mémoires 2009
Total Page:16
File Type:pdf, Size:1020Kb
MÉMOIRES DE L’ACADÉMIE DE NÎMES IXe SÉRIE TOME LXXXIII Année 2009 . ACADÉMIE DE Nîmes 16, rue Dorée NÎMES (Gard 2010 TABLE DES MATIÈRES I – SÉANCE PUBLIQUE DU 1er FÉVRIER 2009 BELLION Dominique, préfet du Gard Allocution. .. 7 MARÈS Catherine, président sortant Compte rendu des travaux académiques de l‟année 2008. 13 HUGUES Henri, président De Louis Guizot à Barack Obama. 19 STEPHAN Rüdiger Les frontières européennes. .. .. 29 II – COMMUNICATIONS DE L’ANNÉE 2009 LASSALLE Victor Ce que l‟art roman doit au Pont du Gard. .61 FABRE Guilhem Aqueducs antiques en petite Camargue de Terre d‟Argence et sur sa marge septentrionale. 81 MÉJEAN René Les régiments Calvisson-Montpezat-Limousin (1622-1815) . .. .. 105 PLOUVIER Paule Une discrète figure nîmoise, le peintre Georges Clairefond. .123 CHALAVET Robert Le citoyen, le fonctionnaire et le juge administratif, amorce de réflexion sur la responsabilité . .139 MARÉCHAL Jean-François L‟homme est-il responsable du réchauffement climatique ? . 149 DERONNE Hélène, TEULON-LARDIC Sabine, MEUNIER Jean-Louis, Peinture, littérature, musique, un écho baroque dans la première e moitié du XVII siècle européen. 181 CONTESTIN Maurice Licite ou interdit. Le commerce du livre en foire de Beaucaire e e ( XVI Ŕ XVIII siècles). 197 ROGER Jean-Marc e e Mentalités, croyances et représentations aux XIX et XX siècles dans la région nîmoise. Étude de cas. .219 RIGOULOT Philippe, L‟espace temps protestant : une théorie de la relativité identitaire. .229 MOREAU Bernard Après la dernière réforme constitutionnelle, peut-on encore parler de la constitution de 1958 ? . .257 III – L’ACADÉMIE DE NÎMES AU 31 DÉCEMBRE 2009 Composition du Bureau pour l‟année 2009. 281 Membres honoraires. .283 Membres résidants. 285 Membres non résidants. .289 Correspondants. 291 Académies, Sociétés Savantes et Organismes Correspondants. 297 I. SÉANCE PUBLIQUE DU 1er FÉVRIER 2009 ALLOCUTION DE M. DOMINIQUE BELLION Préfet du Gard Mesdames, Messieurs, Prendre la parole en ce jour, en ce lieu, Mesdames et Messieurs de l'Académie de Nîmes, c'est pour un représentant de l'État, et qui plus est un admirateur des travaux de l'Académie et son protecteur, se sentir écrasé par le poids d'une histoire culturelle riche et prestigieuse. Je solliciterai votre indulgence, car je ne possède ni l'art, ni la manière, d'un discours académique. Je vous propose, en cette séance solennelle, d'aborder un thème, à la fois ancestral et, en même temps, profondément contemporain: « La culture, l'État et la crise ». Thème ancestral, c'est celui des relations entre la culture et son univers, entre l'esprit et le matériel, entre le spirituel et le contingent. Thème ancestral, car il invoque les relations entre la culture et l'État, entre les Arts et la politique, entre l'engagement intellectuel et la vie publique. Thème contemporain, car notre époque est souvent décriée comme celle de la crise de la culture, celle de la fin du fait culturel. Thème contemporain, car la culture constitue à la fois le syndrome et le remède d'une pathologie de notre société, celle de l'inégalité et de l'exclusion sociales, en somme celle de la crise sociale. 8 MÉMOIRES DE L‟ACADÉMIE DE NÎMES Thème contemporain, enfin, car la culture représente un secteur économique important, qui subit de plein fouet la crise économique, à l'instar de l'ensemble de la société. Je vous propose de revenir sur chacun de ces éléments : Art et politique L‟État et la culture I. Art et politique Depuis l'époque romantique, la création artistique relèverait essentiellement du génie individuel, et s'accommoderait donc mal de la dimension collective de l'action politique, au point que certains artistes sont tentés de se détourner complètement de la société. Comme l'écrivait Flaubert « il faut, abstraction faite des choses et indépendamment de l'humanité qui nous renie, vivre pour sa vocation, monter dans sa tour d'ivoire. » Toutefois, l'artiste étant soumis à la tentation de l'engagement politique, et le pouvoir étant enclin à instrumentaliser la création artistique, art et politique entretiennent des relations à la fois conflictuelles et incestueuses. Ainsi, Diego Velasquez, dans la Reddition de Breda, montre comment l'artiste peut conférer la prospérité au prince. C'est pourquoi, loin d'appeler de ses vœux, comme le philosophe, l'expulsion des artistes de la Cité, le pouvoir politique préfère au contraire encourager la démocratisation des activités artistiques. Dès lors, la culture est devenue une politique publique. C'est l'objet du «décret Malraux» du 24 Juillet 1959 qui fixe clairement les missions du ministère de la Culture: « assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel ». Mais quels sont donc les liens entre l'État et la culture. II. L'État et la culture En France, la culture est associée à l'idée d'universel, héritage de la cultura animi de Cicéron. Elle se distingue ainsi de la notion de Kultur en Allemagne ou de Culture dans les pays anglo-saxons, pour lesquels la culture est tout ce qu'une société humaine ajoute à la nature. Le dialogue de Strauss et de Renan illustre bien cet antagonisme. Dominique Bellion, Allocution 9 Qu'en est-il aujourd'hui de cette culture à la française, de ce discours français de l'exception culturelle ? Peut-on parler de « défaite de la pensée », comme Alain Finkielkraut, s'inspirant de cet aphorisme de la lettre de Flaubert « Shakespeare vaut bien une paire de bottes » ? Pour cela, partons des origines de la politique culturelle en France. En effet, il s'agit d'une tradition française aux manifestations historiques multiples et aux causes originales. Tout commence avec François Ier, un des rares rois au Panthéon républicain. En 1530 il crée l'Imprimerie royale et les lecteurs royaux, embryon du Collège de France. En 1539, l'ordonnance de Villers- Cotterêts confère son statut à la langue française. Dans le même temps, dans le Royaume de Grande Bretagne, Henri VIII exécutait Thomas More en 1535. L'académisme constitua une étape décisive. Officiellement reconnue par Louis XIV, l'Académie Royale de Nîmes s'est vue conférer, par lettres patentes d'aout 1682 « les honneurs, privilèges, facultés, franchises et libertés » dont jouissait depuis 1635 l'Académie française, institution crée par le cardinal de Richelieu sous Louis XIII. Mais c'est surtout sous Louis XIV que la France se dote d'une politique artistique explicite, c'est le retour du mécénat royal. La Révolution hésita entre la thèse de l'Abbé Grégoire pour qui que les tyrans ont toujours eu la politique de s'assurer les trompettes « de la renommée », et celle de Boissy d'Anglas affirmant en 1794 « le trône du génie est le seul que la Révolution ne voulait pas renverser ». La seconde l'emporte, c'est le retour des Académies. L'invariant de l'universel culturel demeure, voire même s'amplifie. Michelet dans son Histoire universelle s'en fait le héraut, sa patrie est celle d'une « France, nouvelle Athènes, nouvelle Rome, mère des Arts ». Le XXe siècle est celui de l'institutionnalisation de la politique culturelle. L'État, «instituteur du social» pour Rosanvallon, n'en est pas moins un « État esthétique » pour André Malraux, ce concepteur de ce que Marc Fumaroli appellera « l'État culturel ». Ainsi, en matière culturelle, l'État n'est pas simple État de droit, il se veut instituteur du social, l'éducation et la culture deviennent des missions régaliennes de l'État. 10 MÉMOIRES DE L‟ACADÉMIE DE NÎMES Quel est le bilan de cet État culturel? Comment peut-il répondre à cette double crise que nous traversons, une crise sociale et une crise économique? III. L'État culturel face à la crise Les enquêtes sur les pratiques culturelles des Français nous démontrent que l'objectif de démocratisation de Malraux de 1959 n'a pas été atteint : Ŕ les inégalités culturelles entre Paris et la province se sont accentuées ; Ŕ on assisterait même à un effondrement général de la culture : 27% des français déclarent, en effet, ne lire aucun livre par an. En outre, malgré la part croissante de la culture dans le budget de l'État, les citoyens gardent à l'esprit l'image d'une absence de budget pour la culture, alors même qu'il représente près de 3 milliards d'euros en 2009 (2,82 milliards d'euros). Comment répondre à la crise sociale, marquée par le relatif échec de la démocratisation des activités culturelles, et comment répondre à la crise économique, touchant de plein fouet le monde culturel? La démocratisation de l'accès à la culture a été fortement affirmée comme un objectif primordial de notre politique culturelle par le Président de la République, qui a annoncé, ici même à Nîmes, la gratuité de tous les musées et monuments nationaux pour les jeunes de 18 à 25 ans et les enseignants à partir du 4 avril. C'est une mesure très ambitieuse. Je le sais, la gratuité des musées a toujours fait débat, et je ne veux pas refaire ce débat. L'exemple du Royaume-Uni peut être débattu longuement. Ce qui importe, c'est les résultats d'une telle mesure. Imaginons tous ces jeunes, rebutés par des tarifs parfois élevés dans les musées nationaux, être désormais en mesure au moins de s'intéresser à la chose culturelle. Sans entrer dans les détails de la politique culturelle, ce n'est pas l'objet de mon propos, rappelons que le Président de la République a également annoncé une enveloppe supplémentaire annuelle de 100 millions d'euros pour l'entretien « de nos grands monuments emblématiques, nos cathédrales et nos abbayes et le patrimoine des Dominique Bellion, Allocution 11 petites communes ». Le Préfet de région, l'actuel M. Claude Balland, mais déjà son prédécesseur, M.