sommaire

sommaire X Cinecito contents X François Piron Debout les morts Rousing the dead

X Simo Bernard Marcadé

X Les Villes X Anarchitekton Marie-Ange Brayer

X Prototipos X Papamovil X Babelkammer

X Mario Flecha La table de Monsieur Malik Mr Malik’s table

X Un crime Jacinto Lageira

X Arabian stars Christine Van Assche

X Conversation entre Conversation between Jordi Colomer et / and Marta Gili

X Père Coco et quelques objets trouvés en 2001 X 2 Av X Le Dortoir Gloria Picazo

X Fuegogratis X No Future X En la pampa Marti Peran

X Pozo almonte X José Luis Barrios Jordi Colomer au pays de Gulliver Jordi Colomer in the land of Gulliver

X Escenita Tocopilla

X Notices techniques / Technical notes X Biographies / Biographies X Bibliographie / Bibliography X Expositions / Exhibitions Prototipos (2004). Sept maquettes d’étranges chars d’assaut en carton blanchi sont posées sur le plateau d’une longue table métallique qui ploie, d’évidence pas sous le poids du matériau, mais peut-être sous celui de la mélancolie. Objets de peu de réalité : répliques de répliques, ils surgissent d’une image fugace du passé. Ce sont sur des photographies de manifestations de la c n t -f a i (Confederacion nacional del trabajo- Federación anarquista ibérica) en 1936 à Barcelone qu’apparaissent ces engins guerriers artisanaux, blindés de carnaval, construits à partir de véhicules réquisitionnés et habillés de carapaces métalliques à l’aube de la guerre civile espagnole, semblables à ces insectes cuirassés en gladiateurs pour effrayer leurs prédateurs, plus défensifs qu’offensifs. Velléitaires armes de carton-pâte contre la menace, on ne peut plus réelle, d’un retour de l’ordre en train de s’instaurer, ces véhicules n’ont presque pas existé : les photographies d’époque les montrent exhibés lors de parades, fièrement présentés à une foule persuadée d’une victoire facile et rapide, mais ils n’ont finalement jamais été utilisés. Quelque soixante-dix ans plus tard, ils recouvrent leur statut de prototypes, d’objets idéels surgis d’un effroi et d’un espoir révolutionnaire qui s’est fracassé sur le mur de l’Histoire. La lumière zénithale irradiante sous laquelle Jordi Colomer les re-présente, sous la forme de fantômes de plâtre et de carton, ne projette pas d’ombre sur eux. Cette lumière est celle des ateliers de construction, d’où ils ont surgi, mais aussi de la fête populaire (les lampes sont de la forme debout les morts de celles utilisées pour les ferias espagnoles), qui évoque cet unique 15 François Piron moment où ils ont joué un rôle politique, au sein d’une performance publique, conjuration à la fois joyeuse et désespérée du destin en train de se nouer.

Autres temps, autres lieux : les promesses utopiques de la machine moderne, en tant que véhicule d’émancipation, se sont, au cours de l’histoire des avant-gardes, éclatées en idéologies paradoxales et contradictoires, progressivement morbides, aux accents mussoliniens pour les futuristes, ou se repliant dans une autarcie onaniste, « célibataire », chez Duchamp ou Picabia. C’est au tournant des années 1920 que Kasimir Malevitch commence à appliquer aux formes architectoniques les théories suprématistes qu’il a développées picturalement jusqu’à lors, projetant ses rêveries cosmiques sous la forme des maquettes immaculées des Architectones et des dessins des Planites. Les Planites sont l’équivalent animé des cités flottantes aux noms de lettres grecques que Malevitch nomme Architectones ; ce sont des sortes de vaisseaux spatiaux dont il dresse les plans les plus détaillés (sans échelle, comme les maquettes des Architectones), des véhicules de l’utopie, Anywhere out of the world. Car Malevitch, à la différence des constructivistes, n’appelle pas à leur concrétisation, assez clairement la négativité conférée à l’architecture, éternel ornement rejetant l’utilitarisme, le temporel, pour viser un absolu, délié de tout du pouvoir, signe monumental du temps, pesante aiguille de l’horloge contexte, dans un pressentiment peut-être de la fin imminente de la de l’Histoire. Derrière l’apparent paradoxe de la réunion entre Malevitch synchronie entre l’art et le politique dans l’Union soviétique naissante, et, à l’autre extrémité du siècle, Matta-Clark, ex étudiant en architecture la fin de la Révolution comme échappatoire à l’Histoire, et le retour révolté contre un cartésianisme en faillite, c’est à deux figures de la fuite de celle-ci — celle du « malheur des hommes ». hors du temps que Jordi Colomer se réfère. En d’autres termes, avec les Architectones et les Planites, Malevitch, « Anarchitecture » est en premier lieu le nom d’un collectif auquel avant de bouleverser sa propre chronologie artistique et pour finir, Matta-Clark prend part à partir de 1973, puis d’une exposition d’intégrer sa propre finitude au sein du projet suprématiste, organisant collective que le groupe initie en 1974. Dans une lettre illustrée ses funérailles en célébration du Carré noir, cherche à échapper adressée aux autres membres le 10 décembre 1973, Matta-Clark liste radicalement, dogmatiquement, au fait que, comme le dit le philosophe une série de projets « anarchitecturaux », dont le premier est russe Boris Groys (prenant justement pour exemple la transition le suivant : « A reaction to the prime-crime axiom of modern design de la révolution d’Octobre au stalinisme) : « Toute dictature politique fighters. Just a blank board with NOTHING WORKS written as shown. se fonde au bout du compte sur une dictature du temps. L’impossibilité Form fallows function. A photo of dogs sniffing each other’s ass holes3. » d’échapper à son propre temps, d’émigrer hors de son propre présent, « NOTHING WORKS » : rien ne fonctionne. En deux mots s’énonce est un esclavage ontologique sur lequel repose tout esclavage politique la charge à venir de Matta-Clark contre le fonctionnalisme cosmétique ou économique. C’est ce qui permet de reconnaître à coup sûr de l’architecture moderne, contre l’arrogance des organisateurs toute idéologie totalitaire moderne : le fait qu’elle nie la possibilité de plans urbains abstraits. À l’encontre du bâti, Matta-Clark invoquera du supratemporel. » « Le dogmatisme, poursuit Groys, est ainsi « l’accomplissement par le retrait4 », l’entropie et le chaos comme la source de n’importe quelle résistance contre le pouvoir totalitaire formes de vie qui luttent contre – et survivent à – l’architecture. du temps, car est dogmatique quelqu’un qui soutient que certaines Le « Nothing works » de Matta-Clark de 1973 est un signe avant- idées ou certaines choses sont supratemporelles – sans pouvoir coureur du « No Future » de 1977, que Greil Marcus, dans son Histoire cependant en apporter la preuve (…). Cette décision n’est pas dans secrète du x x e siècle5, considère comme la résurgence des stratégies le temps et pour le temps, elle est contre le temps1. » anti-architecturales du situationnisme. 17 Le travail de Jordi Colomer s’est développé dans les années 1990 Les Anarchitekton de Jordi Colomer sont une série de photographies autour d’œuvres construites sur des situations et des dispositifs montées en film et réunies en installation, réalisées dans quatre théâtraux, où la dramatisation scénographique des installations villes renommées pour leurs architectures prégnantes : Barcelone, et l’artificialité des décors de carton constituaient la toile de fond Brasilia, Bucarest, Osaka… Au sein de ces paysages urbains, de saynètes àhuis clos et au temps suspendu : l’éternelle répétition un personnage récurrent, solitaire, circule et fend l’espace, des premières mesures de L’Apprenti Sorcier de Dukas dans Pianito brandissant comme autant de bannières des maquettes de carton (1999), ou l’arpentage circulaire d’un appartement par un jeune des bâtiments devant lesquels il déambule en coureur infatigable, aveugle dans Eldorado (1998). Mais l’architecture y a toujours marathonien sans dossard, ou manifestant égaré. Si tel est le cas, été présente – pénétrée, traversée, survolée – et c’était bien un il serait moins égaré dans l’espace que dans le temps, dans modèle réduit d’une pâle copie de Cité radieuse2 qui était jeté à bas un contretemps, ou un anachronisme : ce pour quoi il manifeste dans la vidéo Simo (1997), dans un ultime mouvement rageur est, non pas devant, mais derrière lui. Non pas pour appeler et destructeur de son personnage principal. Ce geste iconoclaste un futur meilleur, mais pour miniaturiser, réduire ces imposantes à l’encontre d’un des symboles modernistes, dans un film qui, à bien constructions à l’état de maquettes, inverser le cours du temps des égards, rend compte de l’aliénation exercée par un fonctionnalisme en revendiquant de suprématistes prototypes. Anarchitekton opère architectural sur des sujets normés, finalement considérés comme ainsi selon un processus inverse des Prototipos, où des objets étaient consommateurs, est annonciateur de l’un des projets les plus ambitieux reconstruits à partir d’une image ; ici, les architectures deviennent que Jordi Colomer a réalisé entre 2002 et 2004, Anarchitekton. des maquettes pour un spectacle de marionnettes à l’échelle de Son titre même, qui à la terminologie de Malevitch associe une formule la ville, avant de devenir finalement des images. de l’artiste américain Gordon Matta-Clark, « Anarchitecture », indique Car les films d’Anarchitekton sont en réalité des photographies montées, enchaînements saccadés d’images fixes qui défont du contrôle politique le plus autoritaire, ne rime pas avec l’utopie la fluidité illusoire du film. Dans son texte Desert Stars6, William sociale de l’hôtel Kubitschek à Brasilia, et l’anarchie composite Jeffett note à propos d’Anarchitekton que ce recours à une méthode d’Osaka n’a que peu à voir avec l’ornementale Torre Agbar de Jean pré-cinématographique de traduction du mouvement relève d’un Nouvel à Barcelone, dont l’architecture, référence uniquement « usage archaïque de la technologie au service d’un point de vue formelle au Modernismo de Gaudi, est le signe de la plus-value comique, dystopique même, sur le fait que l’usage des bâtiments sape institutionnelle et marchande. Mais entre l’organisation rationalisée leurs grandioses systèmes architecturaux ». du territoire (Brasilia), la représentation de la terreur autoritaire Avec Anarchitekton, Jordi Colomer quitte l’espace fermé, (Bucarest) et la toute-puissance des circulations marchandes les symbolique, de la scène, pour se confronter au théâtre des opérations plus fluides (Osaka ou Barcelone), autant de tentatives construites urbain. Il est curieux de constater que, dès lors, sa relation au pour adhérer au temps présent, circule, insaisissable, ce personnage- temps se complexifie, et passe de la circularité à des séries d’allées trublion, mi-critique, mi-célébrant, qui ne leur appartient pas. et venues entre passé, présent et futur, rejouées dans le désordre : un présent (celui de l’action et des architectures évoquées) Après cette investigation parmi les capitales du x x e siècle, il était qui convoque un passé (résurgences du modernisme dans ces sans doute nécessaire de rechercher un lieu qui échappe à cette constructions post-modernes) où l’appel au futur comme promesse dialectique de la modernité et de ses reliquats. C’est sans doute l’une émancipatrice échoue. En un sens, les images séquencées des des raisons pour lesquelles Arabian Stars (2005) est tourné au Yemen, quatre Anarchitekton appellent cette définition de l’image (Bild) pays passé sans transition, selon les propos de Colomer, « du Moyen de Walter Benjamin, telle qu’elle est décrite par Giorgio Agamben : Âge à la post-modernité », et où, à bien des égards, ces différentes « Bild est pour Benjamin tout ce en quoi (objet, œuvre d’art, texte, temporalités coexistent. En témoignent, en toile de fond de ce littéral souvenir ou document) un instant du passé et un instant du présent road movie, la promiscuité des architectures traditionnelles de sable s’unissent en une constellation à l’intérieur de laquelle le présent et les bâtisses de béton armé importées de Chine. Devant elles doit se reconnaître visé par le passé, et inversement le passé doit défilent enfants et adultes, hilares porteurs de panneaux en carton trouver dans le présent son sens et son accomplissement7. » sur lesquels les noms des icônes d’une culture populaire globalisée Le roman-photo animé de Colomer, comme le signale Jeffett, sont inscrits en arabe, de Michael Jackson à Superman, Homer n’est pas sans évoquer le comique du Slapstick et sa mécanique Simpson, Che Guevara ou Zinedine Zidane, dans une confusion des 19 tendant vers l’anarchie et la destruction — à l’encontre de l’architecture genres, de la réalité et de la fiction, redoublée par le fait que ces noms, comme incarnation de la normativité, voir Big Business (Œil pour ici recontextualisés, subissent la loi de la relativité. Quels sont les œil, 1929) de Laurel et Hardy ou One Week (La Maison démontable, noms ici connus et là ignorés ? Comment ils résonnent, ou restent 1920) de Buster Keaton. Il convoque également le plus emblématique inaudibles, voire infâmes ? Arabian Stars questionne alors, dans un jeu des films réalisés à partir d’images fixes, La Jetée (1962) de Chris de regards croisés entre les acteurs et les spectateurs, non seulement Marker, autre déambulation somnambulique, où le mouvement l’extension d’une colonisation culturelle, mais aussi le processus de est désormais impossible dans les replis d’un temps présent à jamais domestication de l’Autre dans l’exotisme, et à rebours, la manière dont inatteignable. Dans le ciné-roman mélancolique de Marker, le héros une société s’auto-colonise en désirant un système de valeurs, tout en éprouve l’expérience d’un principe bergsonien : l’Espace n’existe pressentant que cette hiérarchie même la maintiendra minoritaire. plus, seul subsiste le Temps, unique mais illusoire échappatoire Mais à travers ce défilé carnavalesque, manifestation sans d’un monde en cul-de-sac. Chez Colomer, la course perpétuelle et objet, la tension est suspendue dans une joyeuse absurdité discontinue du personnage constitue l’unité de mesure du paysage, de la situation, tout comme les rituels populaires médiévaux, mais s’avère aussi curseur temporel, qui traverse le cadre en déréglant décrits par Mikhail Bakhtine, interrompaient temporairement sa fixité, ouvrant une brèche dans l’image, comme s’il n’appartenait le cours du temps dans un renversement des hiérarchies8. ni à cet espace ni à ce temps, et pressé de les faire voler en éclats. À Barcelone, Brasilia, Bucarest ou Osaka, les quatre villes Les œuvres de Jordi Colomer ne cessent d’activer ces renversements, d’Anarchitekton, Colomer a soigneusement choisi les sites, en ces temps pris à rebours, inversés, pour déjouer toute projection dans se gardant de construire une morale ou une signification univoque. une signification unilatérale, et ne donner à lire leur portée critique que La parodie ubuesque du palais de Ceaucescu à Bucarest, incarnation dans le reflet d’étranges rituels célébratifs. Dans Fuegogratis (2002), tout un mobilier jaillit d’un feu et fait le bonheur d’un jeune couple qui 1 Boris Groys, “Dans la prison 9 Guy Debord, « Théorie de la du temps”, dans Politique de dérive », Les Lèvres nues, n°9, le charge dans sa camionnette pour une nouvelle vie ; monté à rebours, l’immortalité, , Maren Sell, décembre 1956 et Internationale 2005, p. 118. Situationniste, n°2, décembre 1958. le film inverse un rituel carnavalesque dedestruction des biens, ivresse On peut consulter le texte complet 2 En fait, une maquette de l’hôtel en français sur : http://www. de la perte et de l’anéantissement, économie de l’excès retournée Hilton d’Istanbul, construit par larevuedesressources.org/article. l’agence américaine Skidmore, php3?id_article=38. en joie de la dilapidation et de la dépense. Dans Père Coco (2002), Owings & Merrill (www.som.com), ou comment le Style international 10 Guy Debord, op. cit. le personnage, entre clochard céleste et mendiant brechtien, se est devenu le Style continental. 11 L’unique économie de la pampa charge de la collecte des objets laissés pour compte, et les remet 3 Cette citation contient de chilienne provient de l’extraction nombreux jeux de mots minière du nitrate de sodium, le en circulation, leur trouve des usages, les disperse de nouveau, trouve intraduisibles, dont l’allusion à la salpêtre. Le mouvement ouvrier formule de l’architecte américain chilien connut sa plus violente et perd dans un mouvement perpétuel. Le protagoniste du film Louis Sullivan, devenue slogan répression en 1907 à l’encontre des du modernisme : “Form follows ouvriers du salpêtre, le plus souvent No ? Future ! (2006) – dont le titre même maintient en suspension, function”, “la forme suit la immigrés péruviens. fonction”. Elle devient ici, dans le par sa ponctuation, la négativité de son énoncé –, est un autre jeu de mots de Matta-Clark, “la 12 Sergio González, « Habitar la pampa forme met la fonction en jachère”. en la palabra : la creación poética de ces personnages colomériens à l’existence fantomatique, comme del salitre », Revista de Ciencias 4 “Completion through removal”. Sociales, n°13, Iquique, Université parallèle au monde. Surgissant à la fin de la nuit dans une voiture Arturo Prat, Chili, 2003. 5 Greil Marcus, Lipstick traces : une qui semble échappée d’une attraction foraine, arborant en gigantesque histoire secrète du x x e siècle (1989), enseigne lumineuse l’ambigu slogan qui donne son titre au film, Paris, Allia, 1998. 6 William Jeffett, “Desert Stars”, une jeune femme erre dans les rues aussi orthogonales que désertes dans Arabian Stars, catalogue d’exposition, St Petersburg (USA), de la ville du Havre. Jouant crânement de la caisse claire sous les volets Salvador Dalí Museum / Madrid, Museo nacional Centro de arte encore fermés, elle appuie sur toutes les sonnettes à sa portée, dans une Reina Sofia, 2005. 7 Giorgio Agamben Le temps qui dépense gratuite d’énergie jubilatoire et narquoise, une « déambulation reste, Paris, Rivages, 2000, p. 221. sans but », définition donnée par Guy Debord des « dérives 8 Mikhail Bakhtine, François Rabelais et la culture populaire au psychogéographiques », qui proposait par exemple de « parcourir sans Moyen-Âge et sous la Renaissance, arrêt Paris en auto-stop pendant une grève des transports, sous le Paris, Gallimard, coll. “Tel”, 1982. prétexte d’aggraver la confusion en se faisant conduire n’importe où9 ». Une autre phrase de la « Théorie de la dérive » apparaît dans une des quatre séquences de son dernier film en date, En la Pampa 21 (2008). Un couple de jeunes gens déambule dans le décor aride de la pampa chilienne, portant un improbable sapin en plastique progressivement démantelé et emporté par les bourrasques de vent. Apparemment indifférents à l’inhospitalité de l’endroit, ils tentent de se remémorer cette phrase que Debord, en d’autres temps et d’autres lieux, écrivit pour se moquer de l’emploi du hasard dans la poésie surréaliste : « L’errance en rase campagne est évidemment déprimante, et les interventions du hasard y sont plus pauvres que jamais10. » L’ironie est ici retournée contre eux-mêmes et à propos de la situation beckettienne dans laquelle ils se trouvent, tandis que leur détermination à marcher contre le vent vient souligner que l’image romantique du bout du monde, de sa fin, masque avant tout la réalité d’un monde laissé pour compte11. Le sociologue chilien Sergio Gonzalez souligne de fait la différence entre « pampa » et « désert »12 : le désert est l’endroit où il n’y a rien, silencieux, et la pampa est le désert habité, le désert où ça parle. À qui veut entendre. Prototipos (2004). Seven models of strange tanks in whitened cardboard stand on a long metal table that is bending, manifestly not from their weight, but perhaps from the burden of melancholy. These rather unreal objects, these replicas of replicas, come to us from a fleeting image of the past. They are taken from photographs of demonstrations by the c n t -f a i (Confederacion nacional del trabajo-Federación anarquista ibérica), held in 1936 in Barcelona, at the beginning of the Spanish Civil War. Homemade war machines in carnival armour, made by cladding requisitioned vehicles with metal shells, they are like those insects whose gladiatorial carapace serves to frighten their predators, and is more defensive than offensive. Flimsy pasteboard weapons against the very real threat of the incipient backlash, these vehicles hardly existed. Period photographs show them being displayed on parades, proudly presented to a crowd convinced that victory will be swift and easy. In the end, they were never used. Some seventy years later, they have gone back to being prototypes, ideal objects born of fear and revolutionary hopes that were dashed against the wall of History. The bright overhead light under which Jordi Colomer re-presents these vehicles, in the form of plaster and cardboard ghosts, casts no shadow on them. It is the light of the construction workshops from which they emerged, but also of popular festivities (the lights have the shape of the ones used in Spanish ferias), and evokes that unique moment when they played a political rousing the dead role in the midst of a public performance, a joyous yet desperate 23 François Piron attempt to propitiate a destiny already being played out.

Other times, other places: the utopian promises of the modern machine, as a vehicle of emancipation, have, through the history of the avant-gardes, fragmented into paradoxical, contradictory and increasingly morbid ideologies, taking on Mussolinian accents in the case of the Futurists, or withdrawing into an onanistic, “bachelor” autarky with Duchamp and Picabia. At the turn of the 1920s Kasimir Malevich started applying to architectonic forms the Suprematist theories that he had previously developed in painting, projecting his cosmic dreams in the form of the immaculate models of the Architectons and the drawings of the Planits. The Planits are the animated equivalent of the floating cities with the names of Greek letters that Malevich called Architectons; they are sorts of space ships whose plans he set out in great detail (with no scale, like the models of the Architectons), vehicles of utopia, Anywhere out of the world. For, unlike the Constructivists, Malevich did not insist that his models should be made. He rejected utilitarianism, the temporal, and aimed at the absolute, free of context. Perhaps he foresaw the imminent end of the synchrony of art and politics witnessed who rebelled against a bankrupt Cartesianism, the two figures in the nascent Soviet Union, the end of the Revolution as a way invoked by Colomer here both represent an escape from time. out of History, and the return of History and its “human misfortune”. “Anarchitecture” was originally the name of a collective that In other words, with the Architectons and the Planits, and before Matta-Clark joined in 1973, then the name of a show that they he overturned his own artistic chronology and, in the end, integrated organised in 1974. In an illustrated letter written to the other his own finitude into the Suprematist project, organising his own members on 10 December 1973, Matta-Clark lists a series of funeral as a celebration of the Black Square, Malevich sought radical, “anarchitectural” projects, the first being: “A reaction to the dogmatic escape from the fact that, as Russian philosopher Boris prime-crime axiom of modern design fighters. Just a blank Groys put it (precisely when taking the transition from the October board with NOTHING WORKS written as shown. Form fallows Revolution to Stalinism as an example), “Every political dictatorship function. A photo of dogs sniffing each other’s ass holes3.” is ultimately founded on a dictatorship over time. The impossibility “NOTHING WORKS”: these two words sum up Matta-Clark’s of escaping our own time, of emigrating from our own present, is attack on the cosmetic functionalism of modern architecture, against an ontological slavery which is the basis of all political or economic the arrogance of those who organise abstract urban grids. Rather slavery. That is the unmistakeable sign of any modern totalitarian than build, Matta-Clark argued for “completion through removal,” ideology: the fact that it denies the possibility of the supratemporal.” advocating entropy and chaos as forms of life that struggle against – And Groys continues: “Dogmatism is thus the source of any kind and survive – architecture. Matta-Clark’s 1973 “Nothing works” was of resistance against the totalitarian power of time, for someone a forerunner of 1977’s “No Future”, which Greil Marcus in his book who maintains that certain ideas or things are supratemporal – Lipstick Traces, a Secret History of the Twentieth Century4 analyses though without being able to give evidence of that – is dogmatic. as a resurgence of the anti-architectural strategies of Situationism. […] This decision is not in and for time, it is against time1.” Jordi Colomer’s Anarchitekton is based on a series of photographs In the 1990s Jordi Colomer started making works built around edited into a film and brought together in an installation. They theatrical situations and set-ups in which the dramatisation of were taken in four cities renowned for the resonance of their the installations and the artificiality of the cardboard sets served architecture: Barcelona, Brasilia, Bucharest and Osaka. We see as a backdrop to enclosed sketches that seemed to take place in the same solitary figure moving through the space of these urban 25 suspended time: the eternal repetition of the first bars of L’apprenti landscapes, brandishing, banner-like, the maquettes of the buildings sorcier by Paul Dukas in Pianito (1999), and a young blind man he is running around like some indefatigable athlete, a marathon walking round in circles in a flat in Eldorado (1998). But architecture runner without a number, or a demonstrator gone astray. But if he has has always played a role in his pieces, whether it is penetrated, strayed, then he has done so less in space than in time, by entering traversed or overflown, and it is a scale model of a pale imitation a counter-time, or an anachronism: what he is demonstrating for of the Cité radieuse2 that is destroyed in the video Simo (1997) lies behind him, not ahead. He is calling not for a better future but in one final enraged, destructive act by the main character. This for the reduction of these imposing constructions to the scale of iconoclastic action involving a great modernist symbol, in a film models; he is trying to reverse the flow of time by laying claim to which is in many ways about the alienating effect of architectural Suprematist prototypes. The process of the Anarchitekton is thus functionalism on people who are normalised and ultimately treated contrary to that of the Prototipos, in which objects were reconstructed as consumers, looks forward to one of the more ambitious projects on the basis of an image; here, architectural structures become that Colomer worked on between 2002 and 2004, Anarchitekton. models in a city-wide puppet show before finally becoming images. Even its title, which combines Malevich’s terminology with For the Anarchitekton films are in fact made by editing together an expression coined by American artist Gordon Matta-Clark, photographs, and the jerky succession of still shots counters the “Anarchitecture”, conveys fairly clearly the dim view taken of illusory fluidity of the film. In his text “Desert Stars5” William architecture as an eternal ornament of power and monumental sign Jeffett notes that, “Colomer’s archaic use of the technology was of the times, a hefty hand on the clock face of History. Behind the at the service of his comic, even dystopian view that the human apparent paradox of bringing together Malevich and, at the other use of buildings undermines grand architectural schemes”. end of the century, Matta-Clark, a former architecture student With Anarchitekton, Colomer leaves the closed, symbolic space of the stage to confront the theatre of urban operations. It is interesting efforts to adhere to the present, there moves this elusive troublemaker, to note that his relation to time grows more complex in the process, half-critic and half-celebrant, who is not part of their world. going from circularity to series of back-and-forth movements between past, present and future, replayed in random order: a present (that After this investigation in the capitals of the twentieth century, no of the action and the architecture evoked in the images) which doubt there was a need to find a place that escapes the dialectic summons up a past (resurgences of modernism in these postmodern of modernity and its relics. This was probably one of the reasons constructions) in which the invocation of the future as a promise why Colomer shot Arabian Stars (2005) in Yemen, a country that, of emancipation fails. In a sense, the sequenced images of the four according to the artist, has gone straight “from the Middle Ages to Anarchitekton pieces bring to mind Walter Benjamin’s definition post-modernity” and where, in many respects, these two temporalities of the image (Bild in German), as described by Giorgio Agamben: coexist – witness the promiscuous juxtaposition of traditional sand “For Benjamin, a Bild is anything (object, artwork, text, memory architecture and buildings in reinforced concrete imported from China or document) in which a past moment and a present moment that form the backdrop of this road movie (in the literal sense of that come together in a constellation within which the present must term). In front of them children and adults parade past the camera acknowledge the scrutiny of the past, and conversely, the past must laughing and carrying cardboard placards bearing the names of such find its meaning and its accomplishment in the present6.” icons of globalised popular culture as Michael Jackson, Superman, As Jeffett points out, Colomer’s photonovel has elements of Homer Simpson, Che Guevara and Zinedine Zidane, all written in slapstick, the mechanics of which tend towards anarchy and Arabic. Here reality mixes confusedly with fiction, and added to destruction (whereas architecture embodies normativity – see these is the sense of relativism that comes from seeing these names Big Business (1929) with Laurel and Hardy and One Week (1920) in this context: who are the famous and who are the unknowns in by Buster Keaton. It also invokes the most emblematic of all the these parts? How do these names resonate? Or perhaps they don’t, films made using still images, La Jetée (1962) by Chris Marker, or are stained with infamy? In this interplay of visions, between another film featuring somnambulistic wandering in which actors and spectators, Arabian Stars questions not only creeping movement has become impossible in the folds of a present that is cultural colonisation, but also the process whereby the Other is forever out of reach. In Marker’s melancholy cine-novel, the hero domesticated in exoticism and, conversely, the way in which a society experiences a Bergsonian principle: Space ceases to exist, only Time lets itself be colonised by desiring a system of values while sensing 27 remains, as the sole, illusory way of escaping a dead-end world. In that this hierarchy will ensure that it remains in the minority. Colomer, the perpetual and discontinuous movement of the man But by virtue of this carnivalesque procession, this constitutes the unit of measure of the landscape, but also turns demonstration without an object, the tension is suspended out to be a temporal cursor that crosses the frame and perturbs in the joyous absurdity of the situation, just as the popular its fixity, opening up a breach in the image, as if he did not belong celebrations described by Mikhail Bakhtin temporarily stopped to this space and this time, and was in a hurry to break it up. the flow of time in an overturning of hierarchies7. In Barcelona, Brasilia, Bucharest and Osaka, the four towns of Anarchitekton, Colomer carefully chose his sites, taking care not to Jordi Colomer’s works are constantly effecting such reversals, create a one-dimensional moral or meaning. The Ubuesque parody inverting and taking time backwards. Thus they undermine any that is the Ceaucescu palace in Bucharest, embodying the most attempt to project an unequivocal meaning and convey their critical authoritarian form of political control, hardly fits with Kubitschek’s burden only through the reflection of strange celebratory rituals. social utopia in Brasilia, and the composite anarchy of Osaka In Fuegogratis (2002), a whole suite of furniture leaps out of a fire has little in common with Jean Nouvel’s ornamental Torre Agbar to the delight of a couple who load it into their van in readiness for in Barcelona, the architecture of which, with its purely formal a new life: edited backwards, the film reverses the carnivalesque reference to the Modernismo of Gaudi, is the sign of institutional and ritual of the destruction of possessions, the dizzy pleasure of loss and commercial surplus value. But between the rationalised organisation destruction, an economy of excess turned into the joy of dilapidation of the territory (Brasilia), the representation of totalitarian terror and expenditure. The figure in Père Coco (2002), a cross between a (Bucharest) and the omnipotence of the circulation of commodities heavenly tramp and a Brechtian beggar, takes to collecting abandoned at its most fluid (Osaka or Barcelona), all of which are constructed objects and putting them back into circulation, finds uses for them, scatters them again, then finds and loses them again in a process of 1 Boris Groys, “Dans la prison 9 Op. cit. du temps,” in Politique de perpetual motion. The protagonist of the film No? Future! (2006) – l’immortalité, Paris, Maren Sell, 10 The only economic activity of 2005, p. 118. the Chilean pampas is the mining the punctuation of the title suspends the negative import of the words of sodium nitrate, or saltpetre. 2 In fact, it is a model of the Hilton And it was precisely saltpetre – is another of these ghostly Colomerian characters who seem to exist Hotel in Istanbul, built by the workers, most of them Peruvian American firm Skidmore, Owings & immigrants, who bore the brunt in a world parallel to our own. Appearing at the end of the night in Merrill (www.som.com). Thus the of the oppression experienced by International Style has become the the Chilean workers’ movement, in a car that seems to have escaped from some fairground attraction, Continental Style. 1907. toting a huge luminous sign whose slogan gives its title to the film, a 3 Among the many instances of 11 Sergio González, “Habitar la wordplay in this text, note the pampa en la palabra: la creación young woman wanders through the grid-patterned, deserted streets deliberate deformation of “Form poética del salitre”, in Revista de follows function,” the famous words Ciencias Sociales, no. 13, Iquique, of the town of Le Havre. Gallantly playing the snare drum below the of Louis Sullivan, which became a Arturo Prat University, Chile, 2003. modernist slogan, here denouncing still closed shutters in the street, she rings on all the bells she can the sterile effect of formalism. reach in a gratuitous expenditure of jubilant and mocking energy, in 4 Greil Marcus, Lipstick Traces, a Secret History of the Twentieth an “aimless wandering”, to quote Guy Debord’s definition of those Century, Cambridge, Mass., Harvard University Press, 1989. “psychogeographical dérives” that might take the form, say, of 5 William Jeffett, “Desert Stars”, “hitchhiking non-stop and without destination through Paris during in Arabian Stars, ex. cat., St Petersburg (USA), Salvador Dalí 8 a transportation strike in the name of adding to the confusion ”. Museum / Madrid, Museu nacional Centro de Arte Reina Sofia, 2005, Another sentence from Debord’s “Theory of the Dérive” appears 2005. in one of the four sequences of Colomer’s most recent film, En la 6 Giorgio Agamben Le temps qui reste, Paris, Rivages, 2000, p. 221. Pampa (2008). A couple of young people are wandering through the 7 Mikhail Bakhtin, Rabelais and arid Chilean pampas, carrying an incongruous plastic fir tree that is His World, Minneapolis, Indiana University Press, 1984. gradually torn apart and carried away by gusts of wind. Apparently 8 Guy Debord, “Theory of the indifferent to the inhospitality of the place, they try to recall the Dérive”, in Ken Knabb (ed.), Situationist International words that Debord, in other times and places, wrote to mock the Anthology, Bureau of Public Secrets, 2007. “Théorie de la dérive” use of chance in Surrealist poetry: “Wandering in open country is originally published in Les Lèvres nues, no. 9, December 1956 and naturally depressing, and the interventions of chance are poorer than Internationale Situationniste, no. 2, December 1958. anywhere else9.” Here, the irony is turned against them and related 29 to the Beckettian situation in which they find themselves, while their determination to keep walking against the wind underscores the fact that the romantic image of the end of the world masks the hard reality of a forsaken place10. Chilean sociologist Sergio Gonzalez in fact emphasises the difference between “pampas” and “desert11”. The desert is a silent place where there is nothing; the pampas is the inhabited desert, where people talk. To anyone who will listen. simo1997

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simodulor Bernard Marcadé

À première vue, cela semble se passer à la fois dans une rue At first glance, the action seems to be set both in a shopping street exception de la nature ; il renvoie davantage à l’un de nos possibles. What is in question in this video and this installation is effectively commerçante et sur une scène de théâtre. Des éléments de décor and on the stage of a theatre. Bits of the set can be seen here and Parangon du devenir minoritaire, le nain (en l’occurrence ici la naine) the normative relation to architecture. The character in Simo is sont ici et là perceptibles dans une semi obscurité, des personnages there in the half-light, characters come and go carrying paper est le représentant par excellence de notre humanité. Critique vivante getting to grips with the canons that are in force both in classical vont et viennent, portant des sacs en papier, des boîtes et autres bags, boxes and other props. The impression we get is of watching de la normalité, le nain défie nécessairement, par sa présence, la loi. treatises on proportion and in the architectural ideologies of accessoires. Nous avons l’impression d’assister à la captation a video recording of a theatrical performance, apart from the Ce qui est en question dans cette vidéo et cette installation, c’est en modernity – here, of course, one thinks of Corbusier’s Modulor. By vidéographique d’une représentation théâtrale, à ce détail près que fact that there is, from the start, a regular, oscillating movement effet la relation normative à l’architecture. Le personnage de Simo breaking eccentrically free of spatial models that are considered nous sommes pris d’entrée de jeu dans un mouvement oscillatoire which never stops, and which underscores the cinematographic s’affronte aux canons qui sont en vigueur aussi bien dans les traités universal, Simo institutes disorder and by the same token institutes au rythme régulier, qui ne cessera plus, entre l’extérieur et l’intérieur, dimension of the project. With the first of these back-and-forth de proportion antiques que dans les idéologies architecturales de another sovereignty – the libertarian one of singularity. et qui souligne la dimension cinématographique du projet. À la faveur movements we seem to break into a small, totally white room la modernité — on pense évidemment au Modulor corbuséen. En du premier élan de balancier, nous entrons comme par effraction where we see a dwarf in a dark fur coat suddenly take off her white s’affranchissant, de manière drolatique, de modèles d’espaces qui dans une petite pièce entièrement blanche et nous trouvons face à socks, and then her mary-jane shoes, which are also white. This passent pour universels, Simo introduit le désordre et instaure du une naine en manteau de fourrure sombre qui ôte brutalement ses figure, whom I propose to call the meniña1 exits and then comes même coup une autre souveraineté, celle, libertaire, de la singularité. chaussettes blanches, puis retire ses chaussures à brides, blanches back carrying a bag containing a box from which she removes 1 En référence au rôle que l’actrice espagnole 1 In reference to the “meniña” role played elles aussi. Le personnage, que nous proposons de dénommer ici some high-heeled shoes, which she immediately puts on. She goes Pilar Rebollar a joué dans la pièce La by Pilar Rebollar in Alfredo Arias’s production “ménine1”, sort et revient avec un sac contenant une boîte dont elle out again and returns once more, again with several bags while, Marquesa Rosalinda de Ramón del Valle- of La Marquesa Rosalinda by Ramón del Inclán en 1988, mise en scène par Alfredo Valle-Inclán in 1988, which was when extrait des chaussures à talon, qu’elle enfile aussitôt. Elle ressort outside, passers-by go hither and thither about their business, Arias, où elle interprète une “ménine”. C’est Colomer met her. Ten years later, he asked et revient encore avec plusieurs sacs, pendant qu’à l’extérieur, les chat, and set up a ladder… Our meniña, who has torn off some of à cette occasion que Jordi Colomer fait sa her to perform the leading role in Simo. connaissance ; dix ans plus tard, il la sollicite passants se croisent, s’affairent, discutent, installent une échelle her garments, continues to pull shoes out of the boxes, examining pour interpréter le protagoniste de Simo. Notre ménine, qui s’est débarrassée furieusement de certains de ses them carefully before scattering them messily around the room. vêtements, continue de sortir les chaussures de chacune des boîtes, We see a series of movements to and from interior to exterior, in les examinant attentivement avant de disperser l’ensemble à travers which the purpose of the bustle grows clearer and the sound of la pièce, dans un grand désordre de gestes. On assiste à une série the voices rises. Is it a party or a demonstration? The meniña then d’allers-retours entre l’intérieur et l’extérieur, où l’agitation se précise brings in some jars of jam, which she eats greedily with her fingers. et le son des voix monte — s’agit-t-il d’une fête, d’une manifestation ? La Here things get really messy. The jars fall to the ground and drip ménine amène ensuite des pots de confiture, qu’elle se met à manger and pile up. Next the meniña brings in a great big rug, unrolls it goulûment avec les doigts. C’est un grand capharnaüm qui s’installe chaotically across the room, covering up the mess, and finally falls alors : les pots tombent et dégoulinent, les boîtes s’amoncellent asleep on it. Outside it is now silent. There is not a soul to be seen. 41 Puis elle apporte un immense tapis, le déroule chaotiquement à A woman with short hair enters the room and whisks away the travers la pièce, recouvrant ainsi le désordre, et finit par s’endormir shoe that our dozing heroine is clutching in her hand. She throws dessus. À l’extérieur, tout est devenu silencieux. Pas âme qui vive. Une it outside to an associate. She wakes up, furious, and starts piling femme aux cheveux courts s’introduit alors dans la pièce, subtilise la up shoe boxes in front of the door, all the way to the top, or nearly. chaussure que notre héroïne assoupie serre dans sa main, et la jette She climbs awkwardly up to the top and then comes tumbling dehors à un comparse. La ménine se réveille, furieuse, et commence down, landing outside. She fetches an illuminated architectural à amonceler les boîtes de chaussures devant la porte, presque maquette, which was the theatrical prop glimpsed in the background, jusqu’au sommet. Elle grimpe dessus maladroitement, puis dégringole and throws it into the cluttered room. She then knocks down the à l’extérieur, va chercher une maquette d’architecture illuminée, ladder still standing in the foreground and drags it out of frame. élément du décor qui apparaissait dans le fond, et la jette dans la pièce Then, finally, the action starts up again from the beginning. encombrée. Elle fait ensuite tomber l’échelle restée dehors à l’avant- plan, la traîne et sort du champ. Enfin, l’action repart depuis le début Made in 1997, Simo is Jordi Colomer’s first video. This work is part of an installation, a wooden architectural structure, and to see Simo, réalisé en 1997, est la première vidéo de Jordi Colomer. Cette the projection the spectator must first pass through a narrow œuvre fait partie d’une installation, une structure architecturale en bois ; corridor leading to a room in which everything is red. Simo is a la projection n’est visible qu’après que le spectateur a parcouru un fable, a poetical and political fable. The central character has a étroit couloir qui débouche sur une salle entièrement rouge. Simo est conflictual relation to her immediate environment. Simo is an une fable, une fable à caractère poétique et politique ; le personnage allegorical story of revolt and liberation. In this respect, the choice central entretient un rapport conflictuel avec son environnement of main actor is anything but anecdotal. We inevitably think of immédiat. Simo est l’histoire allégorique d’une révolte et d’une the male and female dwarfs found throughout Spanish art, from libération. À cet égard, le choix de l’actrice principale est loin d’être Velazquez and Ribera to Buñuel. The dwarf’s perspective, here too, innocent. On ne peut s’empêcher de penser aux nains et naines qui, de is other, and therefore potentially polemical. The dwarf is not a Vélasquez à Buñuel en passant par Ribera, traversent l’art espagnol. picturesque figure, nor a natural freak; rather, s/he reminds us of Le point de vue du nain, ici aussi, est autre, et donc potentiellement our own potential. A paragon of minority status, the dwarf – here, polémique. Le nain n’est pas un personnage pittoresque, ni une a female – necessarily defies the law by her/his very presence.

les2002 villes les villes

Dans une pièce construite toute en In a long room resembling a space longueur, comme un lieu de passage, through which people pass, two screens deux écrans sont encastrés au mur, are mounted flush with a red-painted peint en rouge ; ils projettent en boucle wall. They are showing in an unending deux versions, que l’on croit d’abord loop the same scene in two versions we identiques, d’une même scène. En face initially believe are identical. Opposite sont disposées des chaises disparates. them are a few mismatched chairs. Dans une ville la nuit, une jeune femme en In a city at night, a young pyjama-clad pyjama progresse, au dessus du vide, en woman edges forward above an empty s’accrochant à la corniche d’un immeuble. drop, clinging to a building ledge. The Le son laisse deviner la circulation de la sound is suggestive of street traffic rue et les bruits liés au quotidien du foyer. and everyday household noises. A Une voisine passe la tête par la fenêtre, woman neighbour sticks her out l’air compatissant ou indifférent, selon of the window, her expression either les versions. Dans la première, la jeune sympathetic or uninterested according femme parvient à atteindre une fenêtre to the version. In the first, the young ouverte et à se hisser à l’intérieur ; dans woman succeeds in reaching the open la seconde, elle lâche prise et chute. window, and lowers herself inside; A l’arrière plan, une ville, figurée par in the second version, she loses her de petits modules géométriques en grip, and falls. In the background, a bois, se fait et se défait sans cesse. city, represented by small geometric Le montage saccadé et accéléré rappelle modules in wood, assembles and les architectures suprématistes, les disassembles unceasingly. animations de Hans Richter ou les The jerky, accelerated editing is collages cubistes, emblématiques reminiscent of suprematist architecture, d’une esthétique moderniste. La the animated films of Hans Richter temporalité à la fois narrative et or Cubist collage, symbolic of a répétitive, de même que l’action et le modernist aesthetic. The temporal décor, évoquent le cinéma burlesque, dimension, simultaneously narrative associant l’invraisemblance de la and repetition, and the action and situation à l’authenticité de l’effort. La decor, are equally evocative of the façade apparaît comme une espace burlesque genre, combining situational intermédiaire où le personnage se improbability with authenticity of confronte à la ville, comme l’acteur au effort. The building’s frontage appears décor – de façon d’autant plus troublante as an intermediate space in which the qu’il s’agit d’un jeu à l’issue incertaine. character is seen against , like an actor against the scenery – in a manner made more troubling still by the uncertainty of the final outcome.

anarchi-

barcelone, bucarest, brasilia, osaka barcelona,tekton bucharest, brasilia, osaka 2002-2004 Anarchie-Architectone / Anarchy-Architecton Marie-Ange Brayer

Un personnage exhibant une maquette en carton court à travers A man holding a cardboard model runs through the city. He is la ville. Il est à Barcelone, puis à Bucarest, Brasilia, Osaka. Son in Barcelona, then in Bucharest, Brasilia and Osaka. His urban périple urbain est sans fin ni finalité. Un personnage solitaire, sans journey is endless and seemingly without a goal. A solitary figure, conquête du monde autre que sa traversée « grotesque ». Une his only conquest of the world is that of his “grotesque” traversal. production de l’utopie. A production of utopia. Après des études d’architecture marquées par le modernisme, After studying architecture, with a particular interest in Jordi Colomer a poursuivi une interrogation sur la potentialité modernism, Jordi Colomer went on to explore the emancipatory émancipatrice de l’architecture et sur le décalage entre les potential of architecture and the discrepancy between modern bâtiments modernes et leur appropriation par les habitants. À buildings and the way they are appropriated by their occupants. At Barcelone, se construisent à cette époque de nouveaux quartiers the time, new quarters were being built in Barcelona, contrasting qui contrastent avec les blocs d’immeubles et grands ensembles with the blocks of flats and major projects put up in the 1960s. érigés dans les années 1960. À l’origine d’Anarchitekton, un jeu Anarchitekton started out as a game played between a few entre amis, une journée d’été à Barcelone en 2002 : Jordi, Marc et friends one summer’s day in Barcelona in 2002: Jordi, Marc and Idroj décident de « visiter les limites physiques de (leur) ville1 ». Idroj decided to “visit the physical limits of [their] city1”. When Alors qu’ils se promènent en brandissant des maquettes, les trois they were walking round brandishing their models, someone comparses sont apostrophés par quelqu’un : s’agit-il d’un projet de called out and asked the three friends if they were displaying construction dans le quartier ou protestent-ils contre les tours ? a construction project for the area or protesting against the Cet habitant se retrouvera dans le film sur Barcelone, posant des towers. This inhabitant appears in the film about Barcelona, questions à Idroj avant de lui serrer la main. Cette ambivalence putting questions to Idroj and then shaking his hand. This truly proprement « grotesque » dans le geste de brandir une maquette “grotesque” ambiguity about the gesture of brandishing a model sera aussi questionnée par les enfants participant à un atelier avec was also questioned by children taking part in a workshop with l’artiste. Après avoir regardé Anarchitekton, l’un d’eux remarquait : the artist. After seeing Anarchitekton, one of them observed: “In « Dans les films, quand j’ai vu les maquettes, j’ai pensé à une the films, when I saw the models, I thought it was a demonstration manifestation contre les immeubles2. » S’ouvrent ici les multiples against the buildings2.” This opens up multiple paths of exegesis in chemins d’exégèse de cette œuvre qui nous renvoie autant à notre relation to this work that confronts us with our own construction propre construction du monde qu’à notre finitude existentielle ; of the world as well as our mortality, this work in which the figure une œuvre dans laquelle le personnage ne cesse de courir, comme never stops running, like the messengers in the Iliad whose fatum 61 ces messagers de l’Iliade dont le fatum les conduit à traverser les condemns them to keep pacing the earth, conscious that conflict terres, conscients de l’impossible issue des conflits, mûs par leur can never end, carried only by their velocity. seule vélocité. In Barcelona, Idroj runs through three quarters on the periphery À Barcelone, Idroj parcourt trois quartiers aux limites de la ville, de of the city: Santa Coloma, an immigrant quarter in the 1960s; Santa Coloma, quartier d’immigration des années 1960, à Bellvitge, Bellvitge, near the airport; and the residential quarter of Diagonal près de l’aéroport, jusqu’au quartier résidentiel de Diagonal Mar3. Mar3. He takes us to those urban fringe areas where individuals Il nous confronte aux franges urbaines, dans lesquelles l’individu are sometimes more free to appropriate space than they are at trouve parfois plus de liberté dans son appropriation de l’espace the centre. Idroj hands the keys of an imaginary flat to a local qu’en son centre. Idroj remet les clefs d’un appartement imaginaire inhabitant. This action brings to mind medieval religious paintings à un habitant du quartier. Ce geste évoque la peinture religieuse and the fact that votive models of churches were associated with médiévale où les maquettes votives d’église s’associaient à a symbolic presentation of the keys to the city to its patron saint. une remise symbolique des clés au saint patron de la ville. Sauf Here, however, the fields of the real and representation coexist qu’ici, les champs du réel et de la représentation coexistent dans within the same horizontality. In Bucharest the sequence begins une même horizontalité. À Bucarest, le parcours commence à la like a parody of the progress of the Olympic flame with a plastic manière d’une parodie du parcours de la flamme olympique, avec bottle fixed to a wooden handle – no doubt a found object that was une bouteille en plastique fixée au bout d’un manche en bois. Objet immediately integrated into the mise-en-scène. The figure runs sans doute trouvé, aussitôt mis en scène. Le personnage court alongside a lake, in a no-man’s-land, towards the city4. Idroj then le long d’un lac, dans un no man’s land en direction de la ville4. crosses Bucharest with models of the skeleton buildings from the Idroj traverse ensuite Bucarest avec la maquette des immeubles late Ceausescu era, which were left unfinished, and fetches up in squelettes de la dernière période de Ceausescu, restés inachevés, front of the House of the People, now the Palace of the Parliament5. avant d’arriver à la Maison du Peuple, maintenant Palais du The vacant, hypertrophied signs of power have taken on the Parlement5. Les signes hypertrophiés et vacants du pouvoir y ont appearance of tawdry old rags. In Brasilia, a new town built by pris l’allure d’oripeaux déchus. À Brasilia, ville nouvelle construite Oscar Niemeyer in the 1960s, Idroj brandishes a maquette of the par Niemeyer dans les années 1960, Idroj est à proximité du National Congress near the building in question6, then carries it Congrès national6 dont il brandit la maquette ; il la porte jusqu’aux to more fragile neighbourhoods that are still under construction7, quartiers plus précaires, en cours de construction7, qu’il arpente moving through these with the model of one of their nondescript ensuite muni de la maquette d’un de ces blocs, immeuble sans apartment buildings before going back to his starting point. Rather qualité, avant de retourner à son point de départ. Aux grandes than the wide alleys that set off the hieratic quality of Niemeyer’s allées, soulignant le hiératisme des bâtiments d’Oscar Niemeyer, buildings, Idroj prefers the byways already laid out by the Idroj préfère les chemins de traverse déjà tracés par les habitants. inhabitants. He comes across a demonstration where the people Il croise une manifestation et des gens le saluent. Il traverse greet him. He also crosses a motorway interchange, whose knot anarchitecton aussi un nœud autoroutier dont les axes s’enchevêtrent à l’instar of roads evokes the many paths he has himself taken. In Osaka, de ses cheminements multiples. À Osaka, ville par excellence pre-eminently a city of urban nomads, where the movement des nomades urbains, où l’on ne s’arrête jamais, il erre dans never stops, he wanders through the “artificial forests8” of des « forêts artificielles8 » de signes. La maquette pourrait ici signs. Here, the model might even be thought more “real” than s’avérer presque plus « réelle » que l’architecture, qui s’efface the architecture, which disappears behind the images and the derrière l’omniprésence des images et la palpitation des lumières. palpitation of the lights. Unlike the other films, in which Idroj is the À la différence des autres films, dans lesquels Idroj demeure le protagonist, here the people of Osaka invade the image, imparting protagoniste, les habitants d’Osaka envahissent le champ de the rhythm of their own incessant flux. l’image qu’ils rythment par leur flux incessant. Anarchitekton is a portmanteau word conflating “anarchy” and Anarchitekton est le condensé d’anarchie et d’Architectone. En son “architecton”. At its heart is archi (arkhé), meaning the chief or milieu se trouve l’archè, instance originelle, champ vectoriel entre original instance, the vectorial field between concept and real, self le concept et le réel, le soi et le monde. Les Architectones sont and the world. The “architectons” were strictly orthogonal models- des maquettes- en plâtre, strictement orthogonales, cum-sculptures in plaster made by Kasimir Malevich in 1920– que réalise Kasimir Malevitch vers 1920-1925. Sans échelle ni 1925. With no scale or measure, these “spatial constructions” mesure, ces « constructions spatiales » matérialisent la trajectoire materialise the cosmic trajectory of . In contrast, cosmique du suprématisme. À l’opposé, les maquettes de Colomer Colomer’s maquettes are devoid of transcendence – indeed, sont dépourvues de tout transcendantalisme ; elles jouent même they even play on an excessive mimesis, parodying the reality d’un mimétisme à outrance, parodiant la réalité constructive en lui of architecture by copying its traits to the point of caricature, empruntant ses traits jusqu’à la caricature, assumant la fonction playing the same revelatory role as the mask in theatre. Colomer de révélateur du masque au théâtre. Colomer fait aussi référence, also refers, more literally, to Russian for which, de façon plus littérale, au constructivisme russe pour lequel, à la in those same years, models were the theoretical prototype for a même époque, les maquettes étaient le modèle théorique d’une “revolutionary reality that remained to be built9”. Idroj brandishes « réalité révolutionnaire à construire9 ». Idroj brandit une maquette a maquette like a marcher in those Soviet parades in which comme dans ces parades soviétiques où l’architecture se voulait architecture was to serve as the symbol of a new society10. Thus, le symbole d’une société nouvelle10. Ainsi Tatline fit-il défiler dans in 1926, Tatlin had the model of his famous Monument for the les rues de Leningrad en 1926, au milieu d’un cortège populaire, Third International carried through the streets of Leningrad in a la maquette de son célèbre Monument pour la iiie Internationale. popular parade. With Colomer, however, the sacred dimension of Chez Colomer, la dimension sacrale de la procession, politique ou the political or religious procession refers instead to a solitary religieuse, renvoie plutôt à une déambulation solitaire. ambulation.

Au cours de ses pérégrinations urbaines, Idroj exhibe ainsi une In the course of his urban peregrinations, Idroj thus exhibits a maquette qui, de temps à autre, vient fugitivement se confondre maquette which, now and again, is fleetingly identifiable with avec un immeuble à l’arrière-plan, reprenant de manière a building in the background, schematically echoing its formal schématique ses caractéristiques formelles. Cette convergence characteristics. This convergence is not systematic, however, n’est cependant pas systématique ; la maquette peut en effet for the maquette may also function in a dystopian register, aussi s’inscrire dans un registre dystopique et contraster avec contrasting with the architecture and pointing to another reality, l’architecture, signifiant une réalité autre, une précarité qui vient to a precariousness that contaminates the official, public or contaminer les bâtiments officiels, publics ou d’habitation. La residential buildings. The maquette instils anarchy into both maquette insuffle une anarchie à l’ordre du réel comme à celui de the order of the real and that of fiction. Embodying architecture la fiction. Instance du projet dans l’architecture, elle ne projette as project, it does not project a narrative onto the world it plus aucun récit sur le monde qu’elle traverse, mais le parodie de traverses, but instead offers a burlesque parody of it. Usually an manière burlesque. Habituellement instrument de préfiguration, instrument of prefiguration, the maquette here post-figures the la maquette est ici consécutive au construit, dépourvue de building, and has no finality, not even an aesthetic one, in that it toute finalité, même esthétique, puisqu’elle ne se présente pas is not a “handsome” or finished object. It can thus deconstruct comme un objet « beau » ou fini. Elle peut ainsi déconstruire the order of representation. A migratory object, it endlessly l’ordre de la représentation. Migratoire, elle ne cesse de déplacer displaces and fragments architectonic signs as it moves through les signes architectoniques et de les fragmenter au cours de urban landscapes. Because of this object, the figure carrying it sa trajectoire urbaine. Par cet artefact, le personnage ne cesse constantly inhabits a discursive zone where everything remains in d’évoluer dans une zone discursive où tout demeure dans un état a state of indeterminacy, between construction site, building and d’indétermination, entre chantier, construction et terrain vague ; waste ground. Everything is trajectories and displacements. tout n’est que trajets et déplacements. These maquettes are poor objects made of cardboard, covered Ces maquettes sont des objets pauvres, en carton, peintes here and there in paint, like the kind of things clumsily made by à certains endroits, comme celles qu’auraient maladroitement children. They seem to have come from behind stage in a theatre confectionnées des enfants. Elles semblent sorties des coulisses where they were used in the set for an urban drama. Some of d’un théâtre où elles auraient servi d’éléments de décor pour une them are cut and painted on one side only, the unfinished object toile de fond urbaine. Certaines d’entre elles ne sont d’ailleurs showing on the other. Idroj exhibits a different maquette for each découpées ou peintes que d’un seul côté, laissant entrevoir leur quarter that he moves through, like a costume or prop made for face « brute » d’objet sans apprêt. Idroj exhibe une maquette that particular script. “Grotesque standards, utopian provocations différente selon le quartier qu’il traverse, comme un costume ou or brilliant banners”, the theatricalised maquettes can be read un accessoire qui obéirait au scénario. « Étendards grotesques, as the traces of ephemeral events in their urban setting, as provocations utopiques ou brillantes bannières », les maquettes traces among a multitude of others. Colomer has a rich and varied théâtralisées dans leur décorum urbain se donnent comme experience of theatre, and he is fascinated by the hybrid status l’empreinte éphémère d’événements, traces parmi d’autres. Nourri of ephemeral structures built for festivals or demonstrations – a d’une expérience multiple dans le milieu du théâtre, Colomer mixture of set and reality. Idroj is the “hero of immanence” who reste fasciné par le statut hybride des architectures éphémères, inhabits both life and art, carrying a symbolic, almost magical load Au spectateur de décider de la fin. « Je veux proposer une tension And Colomer adds: “In a way [the spectator] inhabits a space of réalisées pour des fêtes ou des manifestations, entre décor et on his shoulders which at the same time represents a weight and entre l’immersion dans l’histoire proposée et la conscience qu’on representation.” The silence of the film summons up the memory réalité. Idroj est ce « héros de l’immanence » qui investit autant necessitates an effort. For Colomer, his physical engagement has est en train de regarder quelque chose. » « D’une certaine façon, of silent movies, heightens the impact of the action it contains l’art que la vie, portant une charge symbolique, presque magique, a collective resonance. The maquette brings into play a whole set [le spectateur] habite un espace de représentation », ajoute Jordi and underscores its slapstick quality. Idroj, the maquettes, the sur ses épaules, et qui représente en même temps un poids, of scales in which the values of large and small are perceived as Colomer. Le silence du film convoque le cinéma muet, renforce architecture, the city and the urban setting are all fragments nécessite un effort. Son engagement physique a pour Colomer relative. For him, the maquettes are “effigies, kinds of sculptures l’action qui s’y déroule et accentue son aspect burlesque. Idroj, of things and words. Endless movement through indeterminate une résonance collective. À travers la maquette se déploie un jeu endowed with a symbolic meaning, and the simple fact of carrying les maquettes, l’architecture, la ville ou le décor urbain, sont spaces also evokes the impossibility of “encyclopaedising” d’échelles où les valeurs du grand et du petit se donnent comme them through the street produces an event, a collision between autant d’éclats de choses ou de mots. Le déplacement sans fin the world, and those “meticulous lists drawn up by Perec in La relatives. Les maquettes sont pour lui des « effigies, des espèces the two orders of reality”. The reduced maquettes are on a human dans ces espaces indéterminés nous renvoie aussi à l’impossible Vie, mode d’emploi [which] seem quite close to slow camera de sculptures investies d’un sens symbolique, et les transporter scale and their potentially monumental status is immediately « encyclopédisation » du monde, à « ces listes méticuleuses movements”. In his ambulation Idroj, like Flaubert in The Tentation dans la rue produit en soi un événement, une collision entre contradicted by their fragility. Set on the end of a wooden rod, they dressées par Perec dans La Vie mode d’emploi [qui] semblent de saint Antoine, like Roussel and like Perec, attests to the deux ordres de réalité ». Les maquettes réduites sont à l’échelle become meaningful only when moved by the person holding them, assez proches de lents mouvements de caméra ». Idroj, dans sa impossibility of inventorying the world, the impossibility of humaine et leur statut potentiellement monumental est aussitôt like puppets. Fascinated by burning stage sets, by objects that déambulation, témoigne, à la manière de Flaubert dans La Tentation exhausting the real. contredit par leur fragilité. Fixées au bout d’un manche en bois, are specially conceived and built for fiction, Colomer could not fail de saint Antoine, de Roussel ou de Perec, de l’impossible inventaire elles n’ont de sens qu’activées par leur porteur, comme des to take an interest in “simulacra”, in these vectors of utopia that du monde, de l’impossible exhaustion du réel. Anarchitekton could thus be seen as a kind of oxymoron, marionnettes. Fasciné par les décors qui brûlent, par les objets are architectural maquettes, these being at once theoretical and travestying various kinds of walks in art history, from the spécialement conçus et construits pour la fiction, Colomer ne performative models, close in status to those “false cities in the Anarchitekton serait ainsi une sorte d’oxymore, travestissant practices of the Surrealists to those of the Situationists, by pouvait que se tourner vers ces « simulacres », vecteurs d’utopie, middle of the desert” found in Hollywood movies. les déambulations dans la pratique artistique, des surréalistes drawing its narrative dimension from the utopian discourse of que sont les maquettes d’architecture, objets à la fois théoriques At once figurative and abstract, the architectural maquette aux situationnistes, en puisant son ressort narratif dans le the architectural avant-gardes. The once transcendent order of et performatifs, proches par leur statut de ces « fausses villes au evokes the “complex relations between object and word, between discours utopique des avant-gardes architecturales. L’ordre jadis architecture is now no more than the wild bricolage of space and milieu du désert » caractéristiques des films hollywoodiens. narration and set”. Colomer draws on this world of the analogy transcendant de l’architecture n’est plus qu’un bricolage sauvage time. Instruments of measure are reduced to the rank of props in a À la fois figurative et abstraite, la maquette d’architecture and taxonomy of the real where “representation – whether festive d’espace et de temps. Les instruments de mesure sont rabaissés fiction. Thus, it would seem, there is no “unchanging real”, but only renvoie « aux rapports complexes entre l’objet et le mot, entre la or knowledge – is given as repetition11”. Idroj could be a kind of au rang d’accessoires de fiction. Il n’y aurait donc pas de « réel reals. Everything is multiplicity, the coexistence of intelligible and narration et le décor ». Colomer puise dans le monde de l’analogie contemporary Don Quixote wandering through a world where immuable » mais des réels ; tout est multiplicité, coexistence phantasmagoric fields. Colomer makes sculptures, “sculptures et de la taxinomie du réel où « la représentation – qu’elle fût fête “writing and things no longer resemble each other”, endlessly de champs intelligibles et fantasmagoriques. Colomer fait des dilated in time”. His works embody the logic of transfer that ou savoir – se donnait comme répétition11 ». Idroj pourrait être repeating his action. Thus the maquette can be read as both sculptures, des « sculptures dilatées dans le temps » ; ses œuvres operates in tales, the reversibility of real and imaginary; they take une sorte de Don Quichotte contemporain qui erre à l’aventure a “word” and a “thing”; it is up to the viewer to recompose the relèvent de la logique de transfert du conte, de la réversibilité us back to the absence of origin and foundation, to the aporia of dans un monde où « l’écriture et les choses ne se ressemblent interlacing tangle of things and their representation. In these entre réel et imaginaire pour retourner à l’absence d’origine instruments of representation. plus », répétant sans cesse son action. Ainsi la maquette se scripts with a multiplicity of simultaneous viewpoints, the et de fondation des choses, à l’aporie des instruments de la lit-elle à la fois comme un « mot » et comme une « chose » ; au actor can embody language, words can be seen as imprints of représentation. spectateur de recomposer l’écheveau qui entrelace les choses representation and images as concretions of the real. If the model 1 Marc Viaplana, photographe, et Idroj 10 Dans la jeune Russie soviétique, les 1 Marc Viaplana, photographer, and Idroj 10 In young Soviet Russia, maquettes of et leur représentation. Dans ces scénarios aux multiples points becomes a tool for scenarising the real, by virtue of its specularity, Sanicne (ou Jordi Encinas), artiste maquettes d’architecture, en particulier Sanicne (or Jordi Encinas), an artist who architecture, especially revolutionary de vue simultanés, l’acteur peut incarner le langage, les mots se the passers-by encountered by Idroj are themselves drawn into réalisant des performances. Les d’édifices révolutionnaires, promenées does performances. Unless otherwise edifices, were carried in processions, as citations, sauf mention contraire, sont dans les défilés, remplaçaient les statues stated, the quotations come from the if to replace religious statues. 67 donner comme les empreintes de la représentation et les images the fiction. issues d’entretiens de l’auteur avec Jordi des processions religieuses. author’s interview with Jordi Colomer. comme des concrétions du réel. Si la maquette devient un outil Colomer. 11 Michel Foucault, Les Mots et les Choses, 11 Michel Foucault, Les Mots et les Choses, 2 This workshop was held at École Maxime Paris, Gallimard, coll. “Bibliothèque des de scénarisation du réel, du fait de sa spécularité, les passants The better to avoid any form of linearity, the film is a sequence 2 Atelier à l’école Maxime Perrard (CM1- Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des Perrard (CM1-CM2) in Orléans in 2003, sciences humaines”, 1966, p. 32. croisés par Idroj sont quant à eux happés dans la fiction. of fixed images that reconstitutes the idea of movement. This CM2) à Orléans, en 2003, organisé par sciences humaines », 1966, p. 32. and organised by f r a c Centre. Here he le f r a c Centre, à l’occasion duquel a été made I-mmoble, an animation film with 12 Ramon Tio Bellido, “Les Gauloises bleues Afin de mieux contrer toute linéarité, le film est un movement is of a dilated kind, since here a message remains on réalisé I-mmoble, film d’animation et de 12 Ramon Tio Bellido, “Les Gauloises bleues maquettes. de Jordi Colomer,” in Jordi Colomer. enchaînement d’images fixes qui reconstitue l’idée de mouvement. the screen for nearly a second, as compared to the 24 images a maquettes. de Jordi Colomer”, dans Jordi Colomer. Quelques stars, Saint-Nazaire, Le Grand Quelques stars, Saint-Nazaire, Le Grand 3 The Diagonal Mar quarter was built for Café / Noisy-le-Sec, La Galerie / Nice, La Un mouvement dilaté puisqu’ici une même image reste à l’écran second in a standard film. Idroj thus runs with the jerky rhythm 3 Le quartier Diagonal Mar fut construit à Café / Noisy-le-Sec, La Galerie / Nice, La the 2004 Forum des cultures 2004. Villa Arson, 2003. presque une seconde, alors que dans un film standard il y a vingt- of a sequence of still images depicting – paradoxically – endless l’occasion du Forum des Cultures 2004, Villa Arson, 2003. This property and urban scheme was opération immobilière et urbanistique part of a development initiative by the quatre images différentes par seconde. Idroj court ainsi au rythme movement. In each film, the person’s movements seem to be inscrite dans un projet d’aménagement à municipality. saccadé de l’enchaînement des images fixes qui rend compte repeated, bringing us back or projecting us further forward. It l’initiative de la Ville. 4 Idroj walks along a lake edged with – paradoxalement – d’un mouvement sans fin. Dans chaque film, is impossible to inscribe him in a delimited space-time. We are 4 Idroj longe un lac bordé de blocs housing blocks built in the Ceausescu la marche du personnage semble se répéter, nous ramener plus constantly switching from one time to another, without a shred d’habitations construits à l’époque years. The form the Ansamblul Titan de Ceausescu, qui forment le quartier quarter. en arrière ou nous projeter plus avant. Son inscription dans un of linearity. Or again, the figure performs an elliptical, slapstick d’Ansamblul Titan. espace-temps délimité est proprement impossible. L’on ne cesse choreography which consummates the loss of all orientation, in 5 In terms of area, this is the second 5 C’est le second plus grand bâtiment du biggest building in the world, after the de basculer d’un temps à l’autre sans aucune linéarité. Ou encore, the middle of a waste ground or a crossroads. This mechanical monde, après le Pentagone, en superficie. Pentagon, In 2004, a national museum of le personnage exécute une chorégraphie elliptique, burlesque, dimension of the moving body, revealed by Marey at the end of En 2004, s’y sont ouverts le musée contemporary art was opened in its west national d’Art contemporain, dans l’aile wing, as was a museum of totalitarianism qui consomme la perte de toute orientation, au milieu d’un terrain the nineteenth century, evokes once again the loss of moorings. ouest, et le musée du Totalitarisme et du and the socialist regime. vague ou d’un carrefour. Cette dimension mécanique du corps en As Ramon Tio Bellido has pointed out12, what Colomer gives us is Régime socialiste. 6 Three Powers Square comprises x i x e mouvement, révélée depuis le corps animé de Marey à la fin du not narration but animation. In fact he prefers to disarticulate 6 La place des Trois Pouvoirs se compose several buildings, including the National siècle, renvoie de nouveau à la perte d’ancrage. Comme l’a souligné codes of representation and privileges the iteration of time de plusieurs bâtiments, notamment le Congress, a skyscraper, with two 12 Congrès national, gratte-ciel avec ses inverted domes that are the Senate and Ramon Tio Bellido , il ne s’agit pas, chez Colomer, de narration allowed by animation, in which the temporality of the moment deux coupoles inversées que sont le the Chamber of Deputies. mais d’animation. Il préfère en effet désarticuler des codes de is constantly being played and replayed. In this regard Colomer Sénat et la Chambre des députés. 7 This is Aguas Claras, one of Brasilia’s la représentation et privilégie l’itération du temps que permet speaks of “proto-cinema”, which combines economy of means with 7 Il s’agit d’Aguas Claras, une des villes satellites towns. l’animation, où se joue et se rejoue continuellement la temporalité “minimalism of action”. Procedures are laid out flat. The images satellites de Brasilia. 8 Toyo Ito compared the inhabitants of de l’instant. Colomer évoque à ce propos un « proto-cinéma » follow on from one another, their “suture” visible; the junction 8 Toyo Ito compara les habitants de Tokyo à Tokyo to “nomads wandering through qui conjugue l’économie de moyens avec le « minimalisme de between the real and the fictional is deliberately overt. The des « nomades qui errent dans des forêts artificial forests.” See ArchiLab Japon. artificielles ». Voir ArchiLab Japon. Faire Faire son nid dans la ville, Orléans, l’action ». Les procédures sont mises à plat. Les images se images, like the maquettes, have no intrinsic value; sometimes son nid dans la ville, Orléans, éditions éditions HYX, 2006. succèdent, laissant apparaître leur « couture » ; la jonction entre they become blurred, accelerate or slow down, following no HYX, 2006. 9 Selim Omarovic Han-Magomedov, El le réel et le fictionnel est délibérément ostentatoire. Les images, rational logic. The film has a beginning and an end, but repeats 9 Selim Omarovic Han-Magomedov, Lissitzky, 1890-1941, ex. cat. Musée comme les maquettes, n’ont aucune valeur en soi ; parfois elles itself. It is up to the spectator to decide when it ends. “I want , 1890-1941, catalogue d’Art moderne de la Ville de Paris, Paris, d’exposition, musée d’Art moderne de éditions Paris Musées, 1991, p. 37. se brouillent, s’accélèrent ou décélèrent, ne souscrivant à aucune to propose a tension between immersion in the story that is la Ville de Paris, Paris, éditions Paris logique rationnelle. Le film a un début et une fin, mais se répète. proposed and the awareness that we are watching something.” Musées, 1991, p. 37.

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prototipos I&II

I Sept maquettes en carton de I Seven white cardboard mock-ups of véhicules blancs sont alignées sur vehicles are lined up on a long, narrow une table longue et étroite, éclairée table illuminated by bare light bulbs. par des ampoules nues. Dans une In a small adjoining room painted red petite pièce contigüe peinte en rouge and black, an archive photograph with et noir, une photographie d’archive, the caption “Prototipo fai (Federación légendée « Prototipo fai (Federación anarquista ibérica), 1936” recalls the real anarquista ibérica), 1936 », rappelle origin of the objects on display: battle l’origine réelle des volumes exposés : tanks, never manufactured in series, des chars d’assaut, jamais produits designed by anarchists at the beginning of en série, conçus par les anarchistes the Spanish Civil War. au début de la guerre d’Espagne. As lightweight representations of heavy Représentations légères de lourds objects, between craft and industrial objets, entre artisanat et industrie, production, these prototypes undermine ces prototypes font vaciller les partitions the usual divisions between art and habituelles entre l’art et la politique. politics. They are the remains of a future Ils sont les traces d’un futur non that never happened, and as such are advenu, comme tel très énigmatique highly enigmatic, distant, but at the same et lointain, mais aussi tout proche. Ils time quite close. They testify to a time of témoignent d’un moment d’incertitude, uncertainty, a time when immeasurable du basculement d’un espoir démesuré hope tipped over into tragic impasse. à un drame sans issue. Mémorielle, par As remembrance, through its clear sa référence claire, Prototipos (1) fait allusion, Prototipos (1) also brings out, aussi resurgir de manière surprenante surprisingly, the past in our present, in its le passé dans notre présent, à shift between the document and its three- travers le passage du document à sa dimensional representation. In this sense, représentation en volume. En ce sens, it perhaps invites us, with libertarian elle invite peut-être à imaginer, sous inspiration, to imagine a form of political l’inspiration libertaire, une radicalité radicalisation in which collective action is politique dans laquelle l’action collective not incompatible with individual freedom. ne contredise pas la liberté des individus. II Five cardboard mock-ups of cars are II Cinq maquettes de voitures en carton placed on the floor. The “Popemobile” first sont disposées au sol. La Papamobile used by Pope John-Paul ii, the Lincoln inaugurée par Jean-Paul ii, la Lincoln Continental in which Kennedy was shot Continental dans laquelle Kennedy fut in Dallas, the Soviet bloc’s Trabant, the frappé à Dallas, la Trabant des pays celebrated superhero’s Batmobile and the socialistes, la Batmobile du célèbre hippies’ Volkswagen van are clearly icons super-héros, le combi Wolkswagen des of Western culture. But here they appear hippies sont évidemment des icônes de to us in white, returned to their origins as la culture occidentale. Mais elles nous three-dimensional volumes. This series apparaissent ici blanchies et rendues may suggest oppositions and similarities: à leur nature originelle de volumes. Cet between the Popemobile and the Lincoln, ensemble peut suggérer oppositions et symbols of historical assassination, rapprochements : de la Papamobile et between the camper van and the Trabant, de la Lincoln, symboles d’assassinats signs of outmoded modernity; between historiques, au combi et à la Trabant, the unique armoured vehicle made for signes d’une modernité dépassée ; de a costumed superman, white or black, la pièce unique blindée faite pour un and a serially manufactured item for surhomme en costume, blanc ou noir, à the masses, in rainbow colours, or grey, l’objet produit en série pour des masses, and so on. These objects reveal the arc-en-ciel ou grises, etc. Ces objets fictional charge of reality just as they révèlent la charge fictionnelle de la réalité do the illusory portion of the real, in the tout comme la part illusoire du réel, à same way as Prototipos (1), although the la manière des Prototipos (1) ; même translation into spatial representation of si la mise en espace et l’arrière-plan the historical backdrop to these series historique de ces séries leur confère confers upon them a strikingly different un sens éminemment différent. meaning. papai-

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papamovil

La Papamovil, un des Prototipos (2), The Papamovil, one of the Prototipos (2) est au centre d’une série de photographies is the central focus of a series of présentées en diaporama. Dans un quartier photographs exhibited as a slide show. en mutation, à Barcelone, la maquette In a rapidly changing neighbourhood in automobile est installée sur la chaussée : Barcelona, the mock-up of the vehicle is des piétons marchent sans s’arrêter, placed in the road: pedestrians walk by certains s’attardent, intrigués, d’autres without stopping, some sloing to look, enfin prennent la pose. intrigued, others posing for a photograph. Le Pape, figure de la procession, est absent, The Pope, the procession’s figurehead, tout comme la foule fervente ; mais la is absent, as are the emotional crowds, , devenue dispositif pour réaliser but the sculpture, now a device for the des images, produit un effet presque generation of images, produces an almost interactif. On pense à une scène dans interactive effect. It evokes for us a laquelle une caméra cachée guetterait la scene in which a hidden camera watches réaction des passants, ou à ces portraits the reactions of passers-by, or portraits d’anonymes se faisant photographier à côté of anonymous members of the public d’une célébrité croisée dans la rue. Ainsi photographed standing by a celebrity in placé dans l’espace commun, à l’épreuve de the street. Thus placed within the common la réalité, le prototype suscite de nouvelles space, to stand the test of reality, the projections imaginaires. prototype stimulates new projections of the imagination.

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chambre bavarde kshelf talker roomammer 2007

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Cette “chambre bavarde” (babbelziek Originally, this “Babble Room” (babbelziek kamer) a d’abord été installée dans un kamer) was set up in a shopping centre centre commercial à Bruxelles – ville de in Brussels — the city of language langage par excellence, une des Babel de par excellence, one of the European l’Europe communautaire et la capitale d’un community’s Towers of Babel and the pays, la Belgique, divisé par des frontières capital of a country, Belgium, cut across linguistiques. Dans une cabine dotée de by linguistic divisions. In a booth with petites fenêtres et aménagée avec un tiny windows fitted out as a living room, mobilier de caravane comme un salon, furnished caravan-style and painted red, peint en rouge, deux personnes assises two people sit face to face, one a Flemish face à face, l’une néerlandophone et l’autre speaker and the other a French speaker, francophone, conversent en langue des conversing in sign language. There is a signes. Cinq couples se succèdent ainsi, series of five such pairs, each conducting chaque conversation ayant la durée de a conversation lasting as long as L’Aurore L’Aurore (1927) de F. W. Murnau, chef- (1927) a silent film masterpiece by F. d’œuvre du cinéma muet, diffusé sur W. Murnau, which is being shown on two deux moniteurs à l’intérieur de la cabine. monitors inside the booth. Outside, two A l’extérieur, deux caméras les filment en cameras film them in shot/reverse shot champ/contrechamp. Simultanément, mode. Simultaneously, their dialogue is leur dialogue est traduit, puis retranscrit translated and transcribed by a team of par une équipe d’interprètes et de interpreters and stenographers. After a dactylographes. En léger différé, les images slight delay, the images plus subtitles accompagnées de sous-titres dans les in the two languages are projected deux langues sont diffusées sur tous on screens displayed in the shop. les écrans exposés dans le magasin. Each link in this chain of meaning sends Chaque maillon de cette chaîne signifiante on to the next a message whose meaning transmet un message au sens à chaque shifts slightly at each transmission, 115 fois légèrement décalé, sur le principe as in the “Chinese whispers” game. du “téléphone arabe”. L’installation The installation interferes with the perturbe la communication uniforme uniformity of communication demanded requise par l’exploitation marchande by commerce and requires a series of et exige un jeu d’interprétations synchronised interpretations. Amidst synchrones. Dans l’image démultipliée this repetitively expanded image and the et au milieu du bruit, elle fait apparaître background noise it highlights individual des échanges individuels silencieux exchanges performed in silence and the et le travail d’une écoute attentive. work involved in attentive listening. Mais l’effet critique procède avant But the critical effect derives above tout de l’invention d’une situation : all from the invention of a situation: prenant l’expression de télé-réalité au taking the expression of reality TV pied de la lettre, Babelkamer constitue quite literally, Babelkamer in fact effectivement une création collective offers us directly a collective creative en direct ; un geste poétique live work: a live poetic choreography that laissant place à l’improvisation. leaves room for improvisation. babelkammer

Cette “chambre bavarde” (babbelziek kamer) a été présentée Cette “chambre bavarde” (babbelziek kamer) a été présentée en mars 2007 à l’occasion du festival BRXLBRAVO, à la FNAC en mars 2007 à l’occasion du festival BRXLBRAVO, à la FNAC City 2 de Bruxelles — ville de langage par excellence, une des City 2 de Bruxelles — ville de langage par excellence, une des Babel de l’Europe communautaire et la capitale d’un pays, la Babel de l’Europe communautaire et la capitale d’un pays, la Belgique, divisé par des frontières linguistiques. Dans une Belgique, divisé par des frontières linguistiques. Dans une cabine, composée d’éléments récupérés d’une caravane, cabine, composée d’éléments récupérés d’une caravane, dotée de petites fenêtres et aménagée comme un salon aux dotée de petites fenêtres et aménagée comme un salon aux murs rouges, deux personnes assises face à face conversent murs rouges, deux personnes assises face à face conversent en langue des signes. Cinq couples se succèdent ainsi, chaque en langue des signes. Cinq couples se succèdent ainsi, chaque conversation ayant la durée du film Sunrise (L’Aurore, 1927) conversation ayant la durée du film Sunrise (L’Aurore, 1927) de F. W. Murnau, poème cinématographique marquant la fin de F. W. Murnau, poème cinématographique marquant la fin du muet et annonçant l’ère du parlant, projeté à l’intérieur de du muet et annonçant l’ère du parlant, projeté à l’intérieur de la cabine. A l’extérieur, deux caméras les filment en champ/ la cabine. A l’extérieur, deux caméras les filment en champ/ contrechamp. Simultanément, leur dialogue est traduit, à contrechamp. Simultanément, leur dialogue est traduit, à l’oral, puis retranscrit, à l’écrit, par une équipe de techniciens l’oral, puis retranscrit, à l’écrit, par une équipe de techniciens et d’interprètes. En léger différé, les images accompagnées et d’interprètes. En léger différé, les images accompagnées de sous-titres dans les deux langues sont retransmises sur de sous-titres dans les deux langues sont retransmises sur tous les téléviseurs exposés du magasin. Chaque membre de tous les téléviseurs exposés du magasin. Chaque membre de cette chaîne de langage parle, entend et transmet sur le mode cette chaîne de langage parle, entend et transmet sur le mode bilingue, comme un jeu de téléphone arabe faisant alterner des bilingue, comme un jeu de téléphone arabe faisant alterner des francophones et des néerlandophones et mettant en scène francophones et des néerlandophones et mettant en scène différents niveaux de compréhension. différents niveaux de compréhension. En détournant le téléviseur, un des instruments majeurs de En détournant le téléviseur, un des instruments majeurs de l’espace commercial, Babelkammer perturbe la communication l’espace commercial, Babelkammer perturbe la communication uniforme requise par l’exploitation marchande et exige un jeu uniforme requise par l’exploitation marchande et exige un jeu d’interprétations synchrones. Dans l’image démultipliée et au d’interprétations synchrones. Dans l’image démultipliée et au milieu du bruit, elle fait apparaître des échanges individuels milieu du bruit, elle fait apparaître des échanges individuels silencieux et le travail d’une écoute attentive. silencieux et le travail d’une écoute attentive.

babelkammer babelkammer l’homme avait une place aan het inpakken ! parfois tu inventes une heb jij geen dorst ? plus importante hij twijfelt wel nog en dat conversation comment faire pour aller vroeger had de man een is moeilijk voor hem, me komt vragen wat er met aux toilettes ? zeer belangrijke rol c’est une scène très sombre me scheelt, je hebt al gedronken. vroeger, was de vrouw il concrétise ses pensées tu es soulagée ? Il moet naar toilet de mindere, ja, nu zijn die donkere beelden, tonen c’est une thérapie Ze zouden een emmertje mannen en vrouwen het gevaar, het is als een therapie moeten plaatsen, maar we dezelfde, la femme n’est consciente ik heb daar veel van, aan hebben geen gordjin, oui, je ne sais pas de rien dat beest, anders zit ik elle devrait hurler ja, ik weet het niet en die vrouw, die weet van tussen vier muren, alleen, elle le supplie de ne pas la aan het dromen, of aan het niets, oei ,wat gebeurt er nu ? tuer piekeren ? ah oui le bateau ne retourne pas Ja ze weet het hoor, die in de stal, wie ? dat is de moeder van die le chapeau descend près des vrouw, wat haar te wachten il réfléchit vrouw, met de baby, yeux staat, hoe komt dat ? quelle démarche triste Ah, ze gaan terug, en met il va l’étrangler heeft hij dat zelf ja en die hond, ja, de hond, kijk, die ogen, il regrette verplaatst ? inderdaad, hoe mooi dat gedaan is ! Ik kan het niet, nee, hij hij is aan het denken le chien aboie elle se redresse kan het niet nu gaat hij la femme nourrit les poules de hond blaft c’est comme si elle avait heel hard roeien, en dat is ik denk niet dat hij il y a un contraste au niveau ressenti un choc nu echt op het water, glimlacht des émotions ja, ze zijn terug, de hij heeft er spijt van de vrouw voedt de kippen je hebt de positieve en de lichaamshouding van de oui c’est juste ik heb dorst ! negatieve kant, ja man, zo negatief, Ja, dat is correct tu veux une bière ? er is een contrast tussen elle est courbée son mari rame de plus en wil je een bier ? het positieve en het bois, prend de la bière plus vite een sigaret ? negatieve kom, neem een bier, Ik heb echt dorst ! nee, dat is waar, wat die kijk, zie in zijn gezicht dat oh, dat glas, daar ga ik niet on sent la peur man denkt…, ja hij schrik heeft, ja. van drinken, wel van dat ja, jaja, angstig ! ils ont réussi à faire un la femme va vers son mari blikje montage de vrouw gaat naar haar l’eau n’a pas l’air très… ze hebben een montage man toe on dirait que la barque est gedaan die hond, blij rond, en de plus haute que le niveau de het is een mooi beeld, de kindjes, die l’eau cadrage, ja mooi werk van tu peux parler français ? het is niet echt op het de cameraman, spreek je Frans ? water, hé, die sloep, je voelt de gevoelens heel ja ik spreek een beetje regarde goed Frans, met mijn gebaren, kijk voir ce film me donne bien die vrouw zoekt echt z’n beaucoup d’émotions goed aandacht, z’n ogen, ze je krijgt er kippevel van, ja ja maar niet met mijn voelt dat hij aan die andere on sent le silence, stem, dat zou echt vrouw denkt, les contrastes sont marqués belachelijk zijn, ja. à mon avis, kijk ! daar, ja, er is een c’est mieux de garder le volgens mij ze ziet er verschil, ja néerlandais droevig uit la fille au sourire angélique il rame on la sent désemparée die ogen zien er zo blij uit, il n’y avait pas de moteur maar, nee dat kan toch niet en die handen die elkaar kijk, die is ongerust, hij son regard est vague vasthouden, voelt het aan, haar man heeft geen ils ont réussi à filmer le chien sent venir le danger aandacht voor de vogel ik krijg er helemaal koud de hond voelt het gevaar regarde comme il rame van. die springt in het water ! hij piekert, ja, c’est une scène de bonheur les animaux sont très fins pense-t-il à ses enfants ? ja. dieren zijn heel intelligent en kijk eens, hoe hij ils se promènent près du lac en ze kijkt om, die vrouw, piekert ! aan het water, ja ! ja, die voelt dat aan, ja, je denkt hij aan zijn je ne sais pas hebt gelijk, ja. kinderen ? ik weet dat niet le chien et le chat ressentent nu begint het, kijk ! kijk, daar, hij is al bang, en les émotions tu veux un mouchoir ? zijn moordplannen Katten en honden voelen wil je een zakdoekje ? il prépare un meurtre emoties hij roeit traag en nee, ik aan het beramen, en die Ik heb een kat en die voelt niet vrouw is nog zo happy dat als ik droevig l’actrice a le même visage la femme n’a rien remarqué ben, ze wil me precies que toi il a envie de serrer son cou opbeuren, net of die kat le regard est froid et profond

« Interdit d’interdire. » quotidiennes qui me permettaient de Graffiti, Paris, mai 1968. résoudre les problèmes. Mon père s’aperçut de mes progrès. Je « La lecture est antérieure serais certainement un bon menuisier, à la parole. » comme lui, et comme l’avait été son Ernesto de Sousa père. Il commença à m’emmener avec lui pour que je lui serve d’assistant lorsqu’il allait voir ses clients. Mon père est menuisier, comme le fut Il était toujours nerveux le jour où mon grand-père. Au fond du jardin de nous allions voir un nouveau travail. Il la maison, nous avions un atelier qui emportait un carnet noir et un crayon sentait le bois fraîchement coupé et la émoussé. Il prenait note de la descrip- colle de menuisier. tion du meuble qu’on lui commandait Le jour de mes dix-sept ans, sans com- et se chargeait de reconnaître l’espace prendre comment, je me suis retrouvé qu’il occuperait dans la pièce. En me dans l’atelier de mon père, une feuille passant un mètre en acier, il me fai- de papier de verre entre les mains. Je sait prendre les mesures de la salle me rappelle sa voix qui me disait : où se situerait le meuble qu’on nous – Teo, tu dois polir cette table jusqu’à commandait. ce que sa surface soit douce au tou- Pendant ce temps-là, il dessinait les cher. Pour t’en assurer, il faut que tu meubles selon ce qu’il avait interprété. y passes le bout de tes doigts, car l’œil J’étais surpris par sa capacité instanta- la table pour monsieur malik est trompeur et on ne peut lui faire née à répondre aux besoins du client. confiance. Tu dois commencer par Quand je lui en parlais, sa réponse Mario Flecha les gros grains et terminer par les plus était : fins. Choisis un morceau de bois dont – L’expérience. l’un des bords soit bien lisse, utilise-le Il esquissait plusieurs croquis et les pour maintenir le papier abrasif avec, montrait à l’acheteur qui suggérait de et sans appuyer trop fort, trace des très légères modifications, soit pour mouvements circulaires sur la surface ; avoir l’impression de collaborer, soit ainsi tu pourras l’égaliser petit à petit. pour démontrer que c’était lui qui Prends ton temps. décidait. Il me l’expliquait tout en me montrant Après cet échange d’idées, il réalisait les comment faire. variations et les ajustements nécessai- Ma vie changea brusquement. Encore res. Il me faisait mesurer dans l’espace étudiant la veille, je me retrouvai les dimensions du meuble que nous apprenti le lendemain. allions fabriquer, et les notait dans son Je suis convaincu que mes parents carnet noir. avaient douté de mon intelligence et – Pour bien contrôler les proportions, qu’ils avaient pensé que je perdrais mon disait-il. temps en poursuivant mes études. Quand nous rentrions à l’atelier, il se La monotonie du travail répétitif m’en- mettait à calculer le montant des coûts nuyait, mais j’appris progressivement et les bénéfices possibles. à utiliser les outils et je commençai à Notre vie se passait sans surprises. trouver du plaisir aux petites victoires J’apprenais le métier de menuisier et

125 me donnais parfois accidentellement tivement bien qu’il fût clair qu’il ne disparaître à la fin des vacances. geai vers la maison à la blanche façade des coups de marteau sur les doigts. comprenait pas. Mon père s’arrêta Pendant des années, nous avions fui de style indéfini. Bien que peu fréquentes, ces mala- quelques secondes. Il profita alors de de pays en pays. Je n’ai jamais connu Elle ouvrit la porte et, me prenant par dresses me procuraient une douleur l’interruption pour sortir de la pièce et les raisons de cette vie en perpétuel le bras, me fit entrer dans le hall où insupportable. Pour la faire passer, je revint accompagné d’une adolescente mouvement, et mes parents évitaient l’on pouvait distinguer plusieurs portes secouais violemment la main. qui nous salua respectueusement. de faire allusion à notre situation. et des escaliers qui s’évanouissaient Le matin d’une journée calme, pendant J’entendis son prénom comme un – Penser n’est pas une bonne chose, et dans l’ombre. Je vis la sensualité sur que nous suivions notre routine quo- murmure lointain. écrire de la poésie, pire encore, disait son visage tandis que je me demandais tidienne, l’un des clients de mon père – Samina. souvent mon père. où menait chacune de ces portes. l’appela pour lui recommander d’aller – Ma fille. Mes frères se sont établis dans des Je lui tendis l’enveloppe que j’avais voir un monsieur étranger nommé Après avoir regardé les dessins pendant endroits lointains où il serait difficile apportée en pensant à ces films améri- Malik, qui avait besoin d’une table de un temps interminable, ils parlèrent de les retrouver et, maintenant que ma cains sur l’histoire européenne où l’on salle à manger. Il fit vaguement allusion dans leur langue. mère est morte, mon père a décidé de accuse le messager d’être un traître à la difficulté de s’entendre avec lui, S’approchant de nous, elle posa les vivre dans cette maison, de sorte que ou un criminel parce qu’il est porteur car il ne parlait pas notre langue. dessins par terre. Elle s’assit sur le tapis le passé nous abandonne. de mauvaises nouvelles. Au mieux, Comme toujours dans ces cas-là, mon et attendit que nous fassions de même. Quand je suis entrée dans la pièce on le pendait en guise de représailles père nous emmena, son carnet noir Une fois installés, elle rejeta plusieurs et que j’ai vu les menuisiers, j’ai dû ou, si on voulait être généreux, on le et moi. À notre arrivée chez lui, un modèles jusqu’à en choisir deux. Elle me retenir de rire. Teo, le plus jeune, jetait dans une prison immonde où il homme élégant qui avait un air nord- les plaça l’un à côté de l’autre et nous maigre, grand et dégingandé, avait le restait jusqu’à ce que ses os fussent africain nous reçut et nous fit signe fit comprendre, de ses doigts étendus sourire facile. Il détonnait par rapport dévorés par l’humidité et son cerveau d’entrer. Nous nous retrouvâmes tous au-dessus du papier, qu’elle voulait à son père, sérieux, qui avait constam- par les poux. les trois plantés au beau milieu d’une combiner les pieds de l’une avec la ment l’air de s’en faire. Sans ouvrir la lettre, elle emprunta l’un pièce immense, souriant en silence. surface de l’autre. Quelques instants à peine me suffi- des couloirs et disparut dans le noir. Je commençai à prendre les mesures, rent pour comprendre que Teo était le J’osai la regarder. que mon père notait. Mon nom est Samina, je suis fatiguée premier homme que je désirais. Nous Quelques minutes plus tard, elle revint, Monsieur Malik se dirigea vers l’un des de fuir. Mes yeux souhaitent revoir les avons échangé des silences, et la tié- les dessins à la main et, d’un geste coins de la pièce et s’appuya contre le dunes qui rejoignent la mer méditerra- deur de sa main a fait frémir la mienne affirmatif, me fit comprendre que son mur en nous laissant faire notre travail, née, et là-bas, dans le lointain, l’horizon quand je lui ai tendu les esquisses que père avait accepté. mais il restait au cas où nous aurions caressant le coucher du soleil sur les son père avait dessinées. eu besoin de quelque chose. flots, tout en sentant la chaleur du sable Quand Teo est venu avec la lettre, Quand mon père eut terminé d’ébau- entre mes doigts de pieds pendant que Plusieurs jours passèrent avant que j’étais seule. J’ai prétendu que mon père cher différents modèles, il s’approcha je cours pour éviter de me brûler. mon père ait évalué les coûts de fabrica- se trouvait quelque part dans la maison de monsieur Said Malik, c’était son En errant aujourd’hui dans les piè- tion de la table de monsieur Said Malik. parce que j’ai eu peur de moi. nom, pour les lui montrer. En même ces de cette maison, j’ai ressenti que Une fois qu’ils furent calculés, il décida Il est resté au milieu de l’entrée, inno- temps, il récita le discours propre aux j’avais perdu tout vestige humain. Dans qu’il valait mieux aller lui remettre cemment… vendeurs. Il exalta les vertus de tel cette maison, personne n’avait jamais chez lui, car il serait compliqué de Quand il est parti, je l’ai vu monter ou tel bois tout en développant des éprouvé aucune des urgences de la vie. lui expliquer par téléphone et nous sur sa bicyclette. Mes yeux l’ont suivi théories sur la texture et la couleur des Nous venions ici en été, nous reposer ignorions comment il nous répondrait jusqu’au moment où il n’était plus murs et les raisons pour lesquelles cela et nous réfugier. Elle nous procurait la à une lettre. Il mit tous les papiers dans qu’un point qui disparaissait au loin. impliquait qu’il fallait nécessairement liberté et la sécurité dont nous avions une enveloppe marron et dit en me la Mon père a dû quitter le pays. Je suis un bois dur d’un ton rouge. Le style besoin, d’où nos interminables voyages donnant : restée dans la solitude de cette maison, serait définitivement anglais, Sheraton en avion. – Teo, va porter cette lettre à M. Malik. allant d’une pièce à l’autre en écoutant pour être plus précis, car il voyait une La maison était dépourvue d’objets Elle contient le projet et le devis, espé- résonner mes pas inquiets. table aux pieds très fins. superflus ou nécessaires, parce que rons qu’ils acceptent. J’évitais de sortir dans la rue. La timidité Monsieur Said Malik l’écoutait atten- ma mère s’arrangeait pour tout faire J’enfourchai ma bicyclette et me diri- et la méconnaissance de la langue du

126 127 pays avaient pour effet de réduire ma de ma chambre. La nuit, j’étalais les courant jusqu’à la Tour. de revoir Samina. À la fin de la journée vie quotidienne à une prison abstraite pages sur mon lit et essayais de les La Tour était ma chambre à chaque de travail avec mon père, j’inventai une dont les limites, marquées par mon déchiffrer. Petit à petit, elles devin- fois que nous venions ici. excuse pour m’échapper sans avoir à lui imagination, m’empêchaient de jouir rent à mes yeux un objet visuel. Je ne C’est une petite pièce, avec une fenêtre donner trop d’explications. Je décidai de la liberté qui m’avait été imposée. voyais plus les mots séparés par des de chaque côté, d’où je voyais la ville. d’y aller en marchant, afin de me com- Il y a des jours où j’ai le courage de espaces, mais une unité toujours plus Nous nous sommes assis l’un en face de plaire un moment encore dans le doute prendre le métro. L’obscurité des tun- belle et incompréhensible. Elle avait l’autre, séparés par une table absurde ; et le bonheur qui m’assiégeaient. nels m’amuse, comme d’être assise cessé d’être un objet mystérieux pour je compris alors que le temps est la En arrivant face à la maison de Samina, parmi toute cette humanité silencieuse devenir un dessin révélateur. somme des silences. j’hésitai à sonner. Je me demandais aux passés et aux présents insaisissa- Je décidai de lui répondre. Je lui Je me suis écoutée parler à Teo, sa ce que je dirai si monsieur Said bles, soupçons de là-bas, en Afrique, écrirais une lettre aussi longue que la réponse était un sourire de confusion, m’ouvrait. en Asie ou en Amérique. Des limites et sienne, dans laquelle je lui raconterais nous savions que nos mots étaient Je faisais des tours dans l’espoir de des monotonies de se sentir condamné l’histoire de ma famille. J’apprendrais incompréhensibles pour l’autre, et voir Samina à une fenêtre, ou de la à l’ennui circulaire de voyager tous les à écrire « Je t’aime » dans sa langue et nous avons joué à nous écouter. Je rencontrer dans la rue par hasard. matins et tous les soirs dans un cercle je le mettrais à la fin de la lettre. disais quelque chose qu’il prétendait Après une éternité, la nuit tomba et je qui n’a ni commencement ni fin. Je voulais que ma lettre fût une réplique comprendre, et il me répondait des fus incapable de me retenir. En pressant – ­ J’ai besoin de voir Teo. à la sienne et, bien qu’apparemment choses qui n’avaient aucun sens pour de façon impulsive le bouton de la J’ai appris les mots qui me seraient dépourvue de sens, elle puisse se trans- moi au-delà du plaisir d’être avec lui. sonnette, j’espérais entendre des pas utiles pour communiquer avec lui. Je former en un dessin magnifique. Spontanément, mes mains ont caressé qui descendraient l’escalier. lui ai écrit une très longue lettre où je Je sautai sur ma bicyclette et me rendis son visage, ensuite tout est devenu une Personne ne m’ouvrit. lui raconte l’histoire de ma famille en chez elle pour y déposer ma lettre. La frénésie chaotique d’adolescents. Tout est silence et confusion. caractères arabes et, à la fin, j’ai risqué, longue façade blanche se dressait face Quand Teo est parti, j’ai ramassé la simplement : « Teo, viens… » à moi. En regardant vers les fenêtres, lettre et, en l’ouvrant, j’ai reconnu les je vis que Samina se trouvait derrière signes indéchiffrables aux significations Je ne pouvais cesser de penser à les rideaux. Quand elle m’aperçut, mystérieuses. Juste à la fin, j’ai décou- Samina, sa présence me hantait, c’était elle frappa la vitre et me fit signe de vert deux mots magiques : « Je t’aime. » absurde, je ne l’avais vue que quelques l’attendre. J’entendis ses pas qui des- Le sourire le plus beau de ma vie me minutes, mais cela avait suffi à me faire cendaient l’escalier en courant, elle poursuit depuis ce moment-là. rêver, bien que je sois conscient que ouvrit la porte et me fit entrer. Teo viendra-t-il demain ? les distances entre elle et moi étaient Intimidés, nous restions l’un en face Je ne pouvais pas dormir, ni cesser de infranchissables. de l’autre, quand je sentis sa main qui caresser les pages de la lettre du bout Un matin, avant d’aller à l’atelier pour effleurait mon visage, et sa respiration de mes doigts. Chaque geste faisait commencer mon travail, je reçus une entre mes doigts. frémir ma peau. enveloppe. Je l’ouvris avec indifférence, Nous nous aimâmes dans la fureur et Épuisée, j’ai sombré dans le som- car personne ne m’écrivait jamais. À l’innocence de la jeunesse. meil. ma grande surprise, des caractères Mon père est revenu quelques jours arabes se déroulaient sur la feuille, La lettre qu’il apportait est restée par plus tard. indéchiffrables. J’en devinai l’origine et terre dans le hall. – Nous devons partir immédiatement. me mis à tourner les pages pour savoir Quand il est entré dans la maison, je Ils approchent, ils ont découvert où où commençait la lettre. Je savais qu’il l’ai pris brusquement par le bras et, nous sommes, et c’est dangereux. fallait la lire à l’envers de notre langue dans la confusion, la lettre a dû lui Je n’ai pas pu dire au revoir à Teo, tout et m’arrêtai quand je lus : « Teo viens, tomber des mains sans que nous nous fut silence, confusion. Samina. » en apercevions. Je tremblais d’incertitude et la cachai Nous avons avancé dans l’obscurité du Je passai toute la semaine dans un état entre mes livres dans la bibliothèque couloir, et avons gravi les escaliers en d’euphorie. Je sentais qu’il était temps

128 129 “Forbidden to forbid.” down the description of the piece of Graffiti, Paris, May 1968. furniture being commissioned as well as making a note of where in the room “Understanding is previous it would go. Giving me a steel rule, he to the word.” would get me to measure the dimen- Ernesto de Sousa sions of the room. In the meantime he drew sketches of the furniture. His ability to respond to My father is a carpenter as was my the client’s needs surprised me. When I grandfather. At the end of our garden commented on this, his answer was: we had a workshop that smelt of wood “Experience.” shavings and carpenter’s glue. He drew up several designs and showed The day I reached 17, I somehow found them to the buyer who would suggest myself in my father’s workshop with a a few minor changes, either in order piece of sandpaper in my hand. to feel he was collaborating or to dem- “Theo, you’ve got to sand this table onstrate who was the boss. until it’s smooth to the touch. Use your Having exchanged ideas, he made the fingertips to gauge the smoothness of necessary alterations. He made me the wood. You can’t rely on your eyes, measure the abstract dimensions of you can be taken in by them. the piece to be made and wrote them Begin with the rough-grade sandpaper down in his black notebook. ending up with the finest. Choose a “So as so keep the proportions under Mr Malik’s table piece of wood with a good, smooth control”, he would say. side, wrap the sandpaper round it When we got back to the workshop Mario Flecha and without pressing too hard, make he would calculate costs and possible circular movements over the surface profit. and bit by bit you’ll manage to plane Life went on without upheavals. I learnt it. Take your time. the skills of a carpenter, accidentally I remember him saying as he demon- hammering my finger from time to strated. time. Although it did not happen often, My life changed abruptly. I went from the pain it produced was unbearable student to apprentice in one night. and I would shake my hand violently I feel sure my parents doubted my to get rid of the pain. intelligence and thought it a waste of One routinely peaceful morning, a my time to go on studying. client of my father’s rang to recommend The monotony of repeating a task he go and see a foreign gentleman bored me and yet as I learnt to use called Malik who needed a dining-room tools, I began to enjoy small, daily table. He mentioned vaguely the dif- victories solving problems. ficulty of communicating with him, as My father was aware of my progress. I he did not speak our language. would undoubtedly become a good car- As always, I went with my father and penter just like him and his father. He so did the black book. On arrival, an started taking me with him as his assist- elegant man of North African appear- ant to see clients. He took a black ance opened the door and gestured notebook and a blunt pencil. He wrote for us to go in. The three of us stood

131 smiling in silence in the middle of an My name is Samina and I am tired of estimate the cost of the table for Mr his bicycle and I gazed after him until enormous room. running away. I long to see the dunes Said Malik. Having finished, he decided he disappeared into the distance. I began taking measurements of the of the Mediterranean again, to feel the it would be best to deliver it by hand as My father had had to leave the country room while my father wrote them heat of the sand between my toes as I a telephone call would be complicated and I remained walking through the down. run to avoid burning my feet and there and we did not know how they would rooms, listening to the sound of my Mr Malik walked to a corner of the in the distance, the horizon caressing reply to a letter. Putting all the pages restless steps. room, leaning his shoulder against the the sunset over the waves. into a brown envelope and giving them I avoided going outside. Shyness and wall and letting us get on with our work Wandering through the rooms of this to me, he said: lack of the local language caused my while remaining in case we needed house today I felt them to be devoid of “Theo, deliver this to Mr Malik. The daily life to centre round an abstract anything. Having drawn several differ- humanity. Nobody in this house had design and price are included. Let’s prison whose limits were in my imagi- ent designs, my father went towards ever felt any of life’s urgencies. This hope they accept.” nation yet hindered the enjoyment of the man, Mr Said Malik, to show him, was where we came in summer to I got on my bicycle and went to the my imposed liberty. at the same time reciting the usual relax and hide. It gave us the freedom white-fronted house of indeterminate Some days I feel like travelling on the salesman’s talk. He praised the virtues and security we needed and justified style. underground. I like the darkness of of certain wood and went on to develop the endless hours spent travelling by She opened the door and taking my the tunnels and sitting amongst all theories on the texture and colour of plane. arm, took me to the hall from where that silent humanity of unattainable the walls and why these dictated the The house lacked unnecessary and I could see several doors and stairs pasts and presents, suspicions from use of a red hardwood. The style would necessary objects as my mother made disappearing into the gloom. While I Africa, Asia or America. The limits be English, Sheraton to be precise, and everything disappear at the end of the wondered where each of the doors led, and monotony, feeling condemned to he was already imagining the table’s holidays. I glimpsed the sensuality of her face. the circular tedium of travelling each slender legs. For several years we escaped from I gave her the envelope, imagining those morning and evening in an unending Mr Said Malik listened attentively country to country. I never knew the North American films on European his- circle with no beginning or end. although it was obvious he did not reason for this life of constant move- tory in which the messenger is accused I need to see Theo. understand. My father stopped for a ment and my parents avoided talking of being a traitor or criminal because I learnt the necessary words to com- second. Taking advantage of the inter- about it. the letter brought bad news. The municate with him and wrote a long ruption, Mr Malik left the room and My father used to say: “It’s a bad idea to reprisal was hanging, unless they were letter in Arabic about my family’s his- returned with an adolescent girl who think but worse still to write poetry.” feeling generous and then they would tory ending by taking a simple risk: greeted us with respect. My brothers had settled in remote, hard put you in a repulsive prison where “Theo, come.” Her name sounded like a distant mur- to find places and now my mother had you stayed until the damp ate your mur to me: died, my father had decided to live in bones and the lice your brain. “Samina.” this house in the hope that our past Without opening the letter she disap- I could not stop thinking of Samina, her “My daughter.” would abandon us. peared down one of the dark corridors. I presence pursued me. It was absurd. I After an interminable time looking at When I saw the carpenters, I had to dared myself watch her. had only seen her for a few minutes and the drawings, they spoke to each other stifle my laughter. Theo, the young She came back minutes later with the yet that was enough for me to dream in their language. one, was tall, slim and ungainly with drawings in her hand and with a nod of even though I understood the distances Coming towards us, she put the draw- an easy smile. This contrasted with his the head, gave me to understand her between us were insurmountable. ings on the floor. She sat on the carpet father whose seriousness made him father had accepted. One morning before going to the work- and waited for us to do the same. When look permanently worried. shop, I received an envelope. I opened we were ready she went through the A few moments were all it took to real- When Theo brought the card I was it without interest as nobody wrote designs and chose two. She put them ise Theo was the first man I desired. We alone. I pretended my father was some- letters to me. I was surprised to see next to each other and by moving her exchanged silences and the warmth of where in the house as I was frightened the indecipherable strokes of Arabic fingers over the paper, led us to under- his hand brushed mine as I passed him of myself. unfolding over the paper. Guessing stand she wanted to combine the legs the designs his father had drawn. He stayed innocently in the entrance who had written it, I started turning of one with the top of the other. hall. the pages round to try and find the It took several days for my father to When he left, I saw him getting onto beginning. I knew you were meant to

132 133 read the other way round from our The Tower was my room whenever we When I arrived at Samina’s house, I language and I stopped when I read: were here. could not decide whether to ring the “Theo come, Samina.” It is small with a window in each wall bell or not. I wondered what I would Uncertain, shaking, I hid it between from where you can see the city. We say if Mr Said answered. I hung around my books on the shelf in my room. At sat on opposite sides of an absurd table hoping that Samina would appear at a night I put the pages on my bed and and I understood that time is the sum window or we would meet by accident tried to decipher them. Gradually, they of silences. in the street. transformed into a visual object. They I heard myself talking to Theo who After a long time it got dark and I could were not words separated by space smiled in confusion. Knowing our words not wait any longer. I rang the bell any longer but unified and ever more were not understood by the other, expecting to hear footsteps run down beautiful and incomprehensible. They we played at listening. I would say the stairs. had transformed from mysterious text something which he would pretend Nobody answered. to revelatory drawing. to understand and he would answer Silence and confusion. I decided to reply and wrote an equally in words which meant nothing more long letter in which I told her my fam- to me than the pleasure of being with ily’s history. I learnt to write ‘I love him. you’, in her language and put it at the My hands stroked his face impulsively end of the letter. and then all was chaotic, adolescent I wanted my letter to be a replica of frenzy. hers so that although it would have no When Theo left, I picked up the letter apparent meaning, it would become a and saw the mysterious signs. Only at magnificent drawing in her eyes. the end did I discover the magic words: Jumping onto my bicycle, I went to “I love you.” From that moment, the leave the letter at her house. In front most beautiful smile I have ever smiled of me, the large, white-fronted house. I pursued me. looked at the windows and saw Samina Would he come tomorrow? behind the curtains. On seeing me I could neither sleep nor stop touch- she knocked on the windowpane and ing the pages of the letter with my signalled for me to wait. I heard her fingertips. I felt his skin in every move- running downstairs, she opened the ment. door and I went in. Finally I fell asleep. We stood shyly in front of each other A few days later my father came and I felt her hand stroke my face and back. her breath between my fingers. “We must go now. They are getting We loved each other with the fury and near, they will find out where we are innocence of youth. and that is dangerous.” I could not say goodbye to Theo. Silence, His letter was left on the floor of the confusion. hall. When he came in I took his arm roughly I spent the whole week in a state of and in our confusion it had fallen elation. I felt it was time to see Samina unseen from his hands. again. Having finished work, I made We walked through the darkness of some excuse and escaped. the corridor and ran up the stairs to I decided to walk to give myself longer the Tower. to enjoy imagining what awaited me.

134 135 un2004 crime

136 un crime et bientôt avoir été en a crime were arrested by his victim dont les on arrêtait état de whose who came to he cracked véritables deux légitime real claim her head open motifs personnes défense… motives the funeral with one blow ne sont pas venues pour c’est are not yet package. of an axe … encore réclamer le insulté, completely It was then nettement funebre menacé même known Aubert frightened connus, colis… par sa we think Castel and his to make croyons-nous, c’était victime has been recently partner the body a été aubert- qu’il lui discovered in Marguerite disappear récemment castel et sa aurait brisé Couville Dubois. he had découvert à compagne le crâne d’un near The identity hidden it couville, marguerite coup de Cherbourg… of the corpse was in a trunk près de dubois. hache. The station immediately in order to throw cherbourg… l’identité après quoi, Master, alerted discovered. it le chef de du mort fut effaré, by an It turns out into the sea. gare, averti vite voulant employee that Aubert par un reconnue; faire that a nauseating had employé on sut disparaître smell murdered qu’une odeur qu’aubert son corps, il was coming Emile Delahaef nauséabonde avait l’aurait from a box in order s’échappait assassiné enfermé dans placed in to steal d’une caisse émile une malle the left-luggage it seems laissée en delahaef pour le office , said to a consigne, la pour lui précipiter à open it . A corpse plasma screen fit ouvrir… voler, la mer. in valued in 1500 un cadavre paraît-il, decomposition euros. en un was Aubert claims putréfaction écran plasma inside …a to have acted y était valant 1500 search party in legitimate de- enfermé… une euros… was organized fence… surveillance aubert and very soon after being fut organisé prétend two people insulted

faits divers news in brief Jacinto Lageira

À lire ou à entendre parfois la chronique des faits divers Listening to or reading miscellaneous news in brief, usually généralement consacrée aux crimes, dont certains lecteurs devoted to crime, and news for which some members of the ou auditeurs raffolent comme d’une friandise malsaine, on est audience or readership have an unhealthy appetite, one is stupéfait par la banalité de la violence ainsi livrée publiquement. astonished by the ordinariness of the violence thus publicly Sans fioritures ni précautions, laconiques et même plates, de meted out. Recounted without rhetorical style or hedging, in telles informations s’immiscent dans notre quotidien avec a laconic, even bloodless style, the information slips into our l’évidence des repas dont elles s’accompagnent souvent. Lorsque daily lives as a simple everyday fact like the meals it frequently les crimes atteignent les « sommets de l’horreur », la presse leur accompanies. When a crime plumbs the “depths of horror” réserve un traitement spécial, puisqu’ils « sortent de l’ordinaire ». the press gives it special treatment because such events are Il y aurait ainsi une échelle négative des valeurs criminelles, “out of the ordinary”. Apparently therefore there is a negative certains faits divers étant plus terribles et insupportables que scale of criminal value, with some news items being more d’autres, parmi ceux qui surviennent par milliers dans le monde horrible, more difficult to bear than others, occurring in their et font partie de la violence courante. Mais tout crime de sang ne thousands around the world as part of its routine violence. But sort-il pas toujours de l’ordinaire ? Tuer volontairement un être surely any crime involving the spilling of blood is out of the humain peut, certes, comporter ces éléments que l’on nomme les ordinary? The deliberate killing of another human being may of « circonstances aggravantes », reste qu’assassiner froidement course include factors we call “aggravating circumstances”, une personne ne devrait pas être classé dans la rubrique des faits but still, the cold-blooded killing of any person should not be divers, aussi peu importants qu’une infinité de minuscules faits. placed in the category of “news in brief”, accorded the same Dans sa vidéo Un crime, Jordi Colomer joue de l’ambivalence small importance as a multitude of other minor occurrences. d’un fait banal rapporté de manière exceptionnelle, inattendue, In his video A crime, Jordi Colomer plays on the ambivalence voire incongrue : une performance. Douze participants – lesquels of a routine event reported in a manner that is exceptional, apparaissent aussi comme les représentants, au sens propre et unexpected, even incongruous: as a performance. Twelve figuré, de la Ville de Cherbourg, où se déroule l’action – marchent participants – who also appear as representatives, both literal en tenant de grandes lettres en carton formant des phrases nous and figurative, of the town of Cherbourg, where the action takes faisant découvrir progressivement le récit succinct d’un crime. place – walk along holding large cardboard letters of the alphabet Ils parcourent ainsi la géographie concrète urbaine, de la gare that make up sentences leading us progressively into the concise SNCF à la gare maritime, où s’achève ce récit au dénouement recounting of a crime. They thus move through a concrete urban 147 « tragique », cela va de soi. Leur avancée, plus ou moins rapide geography, from a train station to a ferry terminal, where this et chaotique, se fait aussi bien dans l’espace que dans le temps. story meets its “tragic” end, as is only to be expected. Their Selon le nombre de lettres et d’intervalles nécessaires à la bonne forward progress, more or less swift, more or less chaotic, takes lecture, le groupe se contracte, se rallonge et semble suivre, ou place both in space and in time. According to the number of contredire parfois, la temporalité des énoncés. Notre lecture letters and the time required to read them correctly, the group est parfois littéralement distancée, parfois comme ralentie par contracts or extends and seems to follow – or in some cases, la marche. Nous ne lisons pas un texte à l’écran, mais un texte contradict – the temporality of the statements. Our reading of the concrètement en mouvement ; chaque personne joue le rôle de text is sometimes literally distanced, sometimes slowed by their support d’un signe, soit en tenant une lettre ou une ponctuation, onward march. We are not reading a text on a screen, but a text soit en jouant le rôle d’un blanc, d’un espacement, ce qui facilite that is literally moving; each individual plays the role of substrate la lecture et respecte par là même les règles linguistiques et for a sign, holding a letter, a punctuation mark or a blank for the grammaticales. Le spectateur ne peut évidemment s’empêcher space between words, making the reading easier and, by the de personnifier ces signes, puisque des hommes et femmes de same token, adhering to the rules of language and grammar. The tous âges les tiennent et se tiennent derrière eux, comme les spectator can hardly avoid personifying these signs since men gardiens du langage, le chœur de cette scabreuse histoire. and women of all ages are holding them, standing behind them like Le parcours des récitants-supports est parallèle au guardians of language, like the Greek chorus to this sordid story. cheminement de l’enquête ; « cheminement » étant le mot The path travelled by the storytellers/letter-holders flows parfaitement adéquat pour cette marche silencieuse – on parallel to that of the investigation, “flow” being exactly the right n’entend que le bruit des pas, plus ou moins lents ou rapides –, word for this silent march – we hear no more than the sound of à la fois hommage à la victime et forme adaptée à la progression footsteps, varying between fast and slow – a march both homage de la narration journalistique. Le style en est convenu, propre to the victim and forward progression of the journalistic narrative. à ce genre de récits factuels où seul compte ce qui s’est passé. Its style is highly conventional, typical of this kind of factual story La langue est compassée, quelque peu vieillotte, mais difficile where only the events count. The language is stilted, somewhat à périodiser. Plus exactement, un malaise s’installe, pour ainsi old-fashioned, although difficult to date. To be more precise, an dire, entre signifiant et signifié, le premier étant tout de même uneasy atmosphere is increasingly created between, one might plus facile à dater d’après les tournures utilisées, alors que le say, signifier and signified, with the first certainly easier to date second, le contenu, est intemporel ; le meurtre remonte à la nuit on the basis of the turns of phrase used, whereas the second, the des temps de l’humanité. Le malaise est d’autant plus fort que content, is timeless. Murder has been with the human race since ce sont des êtres humains qui véhiculent littéralement le sens et time immemorial. The malaise thus created is all the stronger la forme du récit de l’assassinat ; ce sont des vivants qui portent because human beings are the literal vehicles for the form concrètement et symboliquement la mort d’un semblable. and content of this murder’s narrative – here the living carry, On apprend dans ce récit qu’une malle, découverte dans une concretely and symbolically, the death of one of their fellows. consigne de gare, contient le cadavre d’un homme en putréfaction. We learn that a trunk found in a train station’s left luggage On y apprend également que la police parvient rapidement à office contained the decomposing body of a man. We also learn confondre les suspects – un couple –, l’homme avouant qu’il that the police succeeded in swiftly charging the suspects – a a tué un ami à coup de hache pour lui voler un écran plasma couple – the man confessing that he killed a friend with an axe de la valeur de 1500 €. Le moins que l’on puisse dire est que le in order to steal from him a plasma TV worth €1,500. The least geste, irréversible, est extraordinairement disproportionné one can say is that this irreversible act is extraordinarily out si on le compare au mobile. Mais un tel fait ne sort pourtant of proportion to the motive for its commission. But it is still an pas de l’ordinaire. Des actes aussi absurdes et irréfléchis event that is not out of the ordinary. Actions just as absurd and arrivent régulièrement à propos de broutilles, de choses sans ill-considered occur regularly for the most trivial of reasons, for valeur morale ou matérielle. L’immense décalage entre l’acte things devoid of moral or material value. The enormous mismatch criminel et le motif ressurgit dans la vidéo de Colomer sous between the criminal act and its motive stands out strikingly in des formes dignes d’un roman policier (de gare, bien entendu), Colomer’s video in a form worthy of a detective novel (the kind ou d’un roman rappelant Crime et châtiment de Dostoïevski one buys to read on the train, of course), or a novel reminiscent tout en étant presque comique. Humour noir assurément, of Dostoyevsky’s Crime and Punishment, while at the same puisque le crime est sordide, proche d’un acte de démence. time being almost comical. This is most certainly black humour, À certains moments, les participants soulèvent rapidement les because the crime is sordid, not far from an act of madness. lettres, tenues auparavant à hauteur de taille, comme pour mieux At certain moments, the participants lift their letters souligner l’abomination des faits. Nous interprétons également rapidly from waist height, where they are initially held, as if to cette gestuelle comme un acte disproportionné relativement underscore more sharply the horror of the facts recounted. We au récit, lequel crée inévitablement de la drôlerie. Ainsi, lorsque can also interpret this choreography as movement out of l’on peut lire que le meurtrier avait l’intention de jeter plus tard le proportion to the story’s content, to inevitably humorous effect. cadavre à la mer, les participants lâchent ensuite les lettres qui For example, when we read that it was the murderer’s intention s’envolent derrière eux vers les vagues. De même, dans l’épilogue, to go on to throw the body into the sea, the participants let la formule bien connue, en français puis en anglais : « Tout bagage go of their letters, which fly off behind them into the waves. laissé sans surveillance sera immédiatement détruit… », ajoute un Similarly, in the epilogue, the formulaic expression so familiar décalage à cette espèce de vidéo-roman où les genres littéraires, to us in English and in French: “All luggage left unattended will journalistiques, cinématographiques et photographiques se be removed and may be destroyed” adds another mismatch mêlent de telle sorte que nous semblons avoir affaire à une scène in tone to what is a kind of video-novel in which the literary, du Grand Guignol. Faut-il rire ou s’attrister de ce retournement journalistic and filmic genres blend, giving us the impression final dans lequel l’aspect pittoresque et presque touristique of watching a kind of Punch & Judy show. Should we laugh or de la ballade en bord de mer le dispute à la brutalité du fait ? Le should we cry at the final twist in which the picturesque, almost fait-divers ne réside peut-être pas dans les contenus de ce que touristic, aspect of this stroll along the seafront is at odds with l’on nous rapporte mais dans le fait que l’on puisse en sourire. the brutal reality of the facts? Such news in brief might perhaps be defined not in terms of the content it communicates to us 149 but more by the fact that it is possible for us to treat it lightly. please don’t leave baggage unattended unattended baggage will be removed and may be destroyed tout bagage ou colis abandonné sera immédiatement détruit… nous vous demandons de nous signaler les colis ou bagages qui vous paraîtraient suspects arabian

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D’autres stars / Other stars Christine Van Assche

Par sa formation et depuis le début de sa carrière, Jordi Colomer By his training, and ever since the beginning of his career, s’intéresse aux architectures urbaines, à la modernité d’ensembles Jordi Colomer has been interested in urban architecture, in traditionnels, comme dans Arabian Stars ou, quelquefois de the modernity of traditional buildings, as in Arabian Stars, or, manière très critique, à la postmodernité de constructions sometimes in very critical fashion, in the post-modernity of contemporaines, comme dans Anarchitekton (2002-2004), et aussi contemporary constructions, as in Anarchitekton (2002-2004), aux contrastes temporels, notamment entre l’époque médiévale et but also in temporal contrasts, notably between the medieval l’époque actuelle. Mais c’est d’abord à la vision de Le Mura di Sana’a period and the current epoch. But it was when he saw Pier Paolo (1971) de Pier Paolo Pasolini, documentaire en forme d’appel à Pasolini’s Le Mura di Sana’a (1971), a documentary and plea to l’Unesco pour la sauvegarde du patrimoine architectural yéménite, UNESCO for the preservation of Yemen’s architectural heritage, que Jordi Colomer eut le désir de réaliser une œuvre dans les that Colomer felt a desire to make a work in the Yemeni desert and déserts et certaines villes du Yémen, telles Sana’a, Shibam ou Aden. in cities such as Sana’a, Shibam and Aden. Outre cette beauté plastique inouïe, comme oubliée de As well as this extraordinary beauty, which seems to have been l’histoire, ce pays propose aujourd’hui des contrastes, pleinement forgotten by history, the country also offers a series of contrasts contemporains mais tout aussi fascinants : “Le Yémen semble être which, if wholly contemporary, are just as fascinating. “Yemen une société médiévale avec des gadgets postmodernes”, écrit is like a medieval society with postmodern gadgets”, Colomer Jordi Colomer dans un entretien1. Il s’agit en effet d’une société observed in an interview1. It is indeed an extremely poor society extrêmement pauvre, conservant l’héritage des identités tribales, that has retained the heritage of its tribal identities and finds itself confrontée à une situation économique fragile, à une démographie in a fragile economic situation, with a growing population and en expansion et à une activité industrielle très peu développée. relatively underdeveloped industrial activity. And yet, while the Cependant, alors que le pays paraît dépourvu d’usines, des country seems to lack factories, its people still have objects such objets tels des téléphones portables et des articles en plastique, as mobile phones and plastic items made in China or India. fabriqués en Chine ou en Inde, circulent parmi les habitants. The setting of this false documentary is as important as the Le décor de ce faux documentaire est aussi important que actors in the false fiction. In Arabian Stars the desert, but also les acteurs de cette fausse fiction. DansArabian Stars, le désert, the urban constructions, seem unreal, whereas in fact their mais aussi les constructions urbaines, semblent irréels, alors inhabitants are the people we see walking in front of the camera qu’ils sont habités par les personnes qui marchent face à la and thus acting as performers in the video. Each of these buildings caméra et s’improvisent ainsi performeurs de la vidéo. Dans is home to an entire family, generation upon generation, and in 161 chacun de ces bâtiments vit une famille entière, sur plusieurs fact the structures grow vertically in keeping with the growth of générations, et ces architectures poussent verticalement au the family group. In one of the sequences shot in Sana’a, the long fur et à mesure de l’agrandissement de la filiation. Dans une slow movement of the truck on which the camera is placed is all des séquences tournées à Sana’a, le long et lent mouvement du the more important in that it enables us to see and observe this camion sur lequel est placée la camera est d’autant plus important very specific form of architecture, these “skyscrapers” in the qu’il nous permet de voir et d’observer cette architecture très middle of the desert. spécifique, sorte de gratte-ciels de terre au milieu du désert. The “actors” are the inhabitants of cities, mainly men – women Les “acteurs” sont les habitants des villes, plutôt masculins – les no doubt being less prominent in public space – met during the femmes étant sans doute moins visibles dans l’espace public journey. They carry brightly painted cardboard panels with – croisés au gré du voyage. Ils portent des panneaux en carton inscriptions in Arabic. These give the names of well-known peints de couleurs vives, où sont inscrits des mots en arabe. Il Yemenites and of Western celebrities, both real and fictive, s’agit de noms de personnalités yéménites connues dans la culture phonetically transcribed. While this mixture joyously records locale, et de ceux de célébrités occidentales, réelles ou issues de a European artist’s encounters with members of an Arabian fictions, traduits phonétiquement. Ce mélange, bien qu’il témoigne population, it also marks a reciprocal incomprehension: we do not de manière joyeuse d’une rencontre entre un artiste européen know the contemporary poets Muhamed Al Zubeiri and Abdullah et une population d’Arabie, marque aussi une incompréhension Al Baradoni, nor the singer Abo Bakr Saalem, nor the minister of réciproque : nous ne connaissons pas les poètes contemporains human rights Amat al-Alim al-Susua, nor can we be sure that these Muhamed Al Zubeiri et Abdullah Al Baradoni, ni le chanteur Abo Bakr panel-carriers really know James Bond, Barbie, Astérix, Santa Saalem ou la ministre des droits de l’homme Amat al-Alim al-Susua, Claus, Che Guevara, Mies van der Rohe or Picasso, although they de même qu’il n’est pas certain que les porteurs de panneaux are familiar with the Japanese cartoon character Pikachu. identifient parfaitement James Bond, Barbie, Astérix, Santa Claus, Within each set of names, the Yemenite and the Western, the Che Guevara, Mies van der Rohe ou Picasso, alors même qu’ils same levelling occurs: footballers are put on the same level as connaissent Pikachu, personnage de dessin animé japonais. poets, just as political figures are equal to movie heroes or singers. A l’intérieur de chaque ensemble de noms, yéménite et Just as mass culture can infiltrate a society with no hierarchy of occidental, une égalisation similaire s’opère : les joueurs de values, so here different times, spaces and registers all merge. football sont placés sur le même plan que les poètes, comme les That, one might say, is the postmodern vision set out by Arabian personnages politiques le sont vis-à-vis des héros de cinéma Stars, with its possibly critical connotations: the omnipresence of ou des chanteurs. De la même façon que la culture de masse a dominant Western culture in which everything is spectacle and peut s’introduire dans une société sans hiérarchie de valeurs, commerce, confronting an ancestral local culture. les temps, les espaces et les registres se confondent. C’est, si Nevertheless, Jordi Colomer places the emphasis more on the l’on veut, le constat postmoderne qu’établit Arabian Stars, et ambiguities engendered by the way Arabian Stars was made and ses connotations éventuellement critiques : l’omniprésence the way it is shown, for the very genuine collaboration does not d’une culture occidentale dominante, où tout est devenu rule out a deep difference. As the ambiguous title suggests, this spectaculaire et marchand, face à une culture locale ancestrale. is a crossing of registers more than an unequivocal discourse. As Néanmoins, Jordi Colomer insiste davantage sur les ambiguïtés often in Colomer’s work, it is the shared consciousness of these qu’Arabian Stars produit, par son mode de réalisation et ses ambiguities that accounts for the burlesque aspect of the work, conditions de monstration : une collaboration réelle qui n’exclut with the effect of unresolved paradox producing a kind of absurd pas une profonde différence, un croisement de registres avant humour. d’être un discours univoque, ainsi que le suggère l’ambivalence du titre. Comme souvent chez lui, c’est la conscience partagée Jordi Colomer belongs to the generation artists for whom the de ces ambiguïtés qui fait le côté burlesque de l’œuvre, l’effet whole world is becoming an open-air studio. This is where his de paradoxe irrésolu relevant d’un humour de l’absurde. projects take place, be it in Romania, Brazil, Japan and Spain for Anarchitekton, in Yemen for this installation, or in Chile for the Jordi Colomer fait partie de cette génération d’artistes pour recent En la pampa. By measuring himself against these local lesquels le monde devient un atelier à ciel ouvert, dans situations, he aims to achieve a certain idea of universality. lequel les projets prennent place, que ce soit en Roumanie, The three parameters combined here – location, script, au Brésil, au Japon, en Espagne pour Anarchitekton, au actors – are representative of the different modes of operation Yémen pour cette installation ou au Chili pour la récente En la that stand at the limits between art, the real and fiction. They pampa, cherchant par ses confrontations avec des situations express a contemporary post-structuralist aesthetic. Shot as locales à rejoindre un certain concept d’universalité. they are in a real-life setting, Colomer’s works could be placed Les trois paramètres combinés – décor, scénario, acteurs in the documentary category. Presenting as it does characters, - sont représentatifs des différents modes opératoires aux in fact children who are asked to play a role, this work could be limites entre l’art, le réel, la fiction, révélateurs d’une esthétique considered a fiction, a short movie. Structuring Arabian Stars in poststructuraliste contemporaine. Tournées dans un décor réel, keeping with a personal rhythm and creating a specific set-up for les œuvres de Jordi Colomer pourraient se situer dans le secteur its presentation (walls echoing the light green colour of Yemenite du documentaire. Mettant en scène des personnages, des enfants interiors, and as many unmatching chairs as there are panel en l’occurrence, et leur demandant de jouer un rôle, l’œuvre carriers), Colomer bestows a poetic role on this installation, a role pourrait relever de la fiction, tel un court métrage. Structurant that emerges from the intertwining of the three registers. A certain Arabian Stars selon un rythme personnel et créant un dispositif vision of the world (he did not choose his countries and cities spécifique à sa présentation (murs vert clair, couleur des intérieurs blindly), a personal relation to the false actors who are putting on yéménites, et autant de chaises dépareillées que de porteurs a performance more than acting, and the artist’s close attention de panneaux), Jordi Colomer attribue à cette installation un to the parameters of the installation’s reception in the museum, destin poétique, destin qui naît de l’entrelacement de ces trois interweave at the heart of Arabian Stars. registres. Une certaine vision du monde (les pays et villes choisis As Jacques Rancière writes in The Future of Images: “What ne le sont pas de façon anodine), une relation personnelle aux might properly be called the fate of the image is the fate of this faux acteurs effectuant plus une performance qu’un véritable logical, paradoxical intertwining between the operations of art, jeu, une attention particulière aux paramètres de réception de the modes of circulation of imagery and the critical discourse that l’installation dans le musée, s’entrecroisent au sein d’Arabian Stars. refers the operations of the one and the forms of the other to their Comme l’écrit Jacques Rancière dans Le Destin des hidden truth2.” images : “Ce que l’on peut alors appeler proprement destin des images, c’est le destin de cet entrelacement logique et paradoxal entre les opérations de l’art, les modes de circulation de l’imagerie et le discours critique qui renvoie à leur vérité cachée des opérations de l’un et des formes de l’autre2.”

1 “De Picasso a Pikachu. Una conversación 1 “De Picasso a Pikachu. Una conversación entre Jordi Colomer y William Jeffett”, entre Jordi Colomer y William Jeffett”, dans Jordi Colomer. Arabians Stars, in Jordi Colomer. Arabians Stars, St St Petersburg (USA), Salvador Dalí Petersburg, Salvador Dalí Museum / Museum / Madrid, Museu nacional Centro Madrid, Museu nacional Centro de Arte de Arte Reina Sofia, 2005, p. 144-151. Reina Sofia, 2005, p. 144-151.

2 Jacques Rancière, Le Destin des 2 Jacques Rancière, Le Destin des images, images, Paris, La Fabrique, 2003. Paris, La Fabrique, 2003. Trans. Gregory Elliott, The Future of the Image, London, Verso, 2007, p. 17-18.

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Curabitur Vivamus commodo est quis quam. Ae- sapien felis, venenatis ut, suscipit et, aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- nean tortor tellus, congue vel, luctus et, mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, eleifend et, neque. felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. consectetuer adipiscing elit. Donec tin- Sed ut massa non orci posuere porta. Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. Donec vestibulum ante et sapien rhon- lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, cus bibendum. Aenean placerat purus cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. est ante pellentesque massa, non adi- nec tellus. Aenean elementum enim sed hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget pede feugiat sodales. lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi Suspendisse pede justo, semper a, scele- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, risque a, pulvinar at, quam. risus, imperdiet sollicitudin, fermentum amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi Suspendisse pede justo, semper a, scele- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, risque a, pulvinar at, quam. Fusce ut erat. amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, Duis fringilla consequat est. Proin quis Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- cus cursus, tortor libero dictum diam, tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi Suspendisse pede justo, semper a, scele- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, risque a, pulvinar at, quam. Fusce ut erat. pendisse tempus cursus pede. Curabitur consequat. est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, Duis fringilla consequat est. Proin quis sapien felis, venenatis ut, suscipit et, Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- cus cursus, tortor libero dictum diam, felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi Suspendisse pede justo, semper a, scele- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, risque a, pulvinar at, quam. Fusce ut erat. pendisse tempus cursus pede. Curabitur eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, Duis fringilla consequat est. Proin quis sapien felis, venenatis ut, suscipit et, aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- piscing libero eros eget metus. Sed eget nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, quam. In ac risus scelerisque est facilisis nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- cus cursus, tortor libero dictum diam, felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. consectetuer adipiscing elit. Donec tin- sodales. Nulla malesuada velit sed mi Suspendisse pede justo, semper a, scele- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. tempor mattis. Suspendisse velit nunc, risque a, pulvinar at, quam. Fusce ut erat. pendisse tempus cursus pede. Curabitur eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur Vivamus commodo est quis quam. Ae- tincidunt in, semper quis, interdum nec, Duis fringilla consequat est. Proin quis sapien felis, venenatis ut, suscipit et, aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- nean tortor tellus, congue vel, luctus et, nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, eleifend et, neque. 171 nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- cus cursus, tortor libero dictum diam, felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. consectetuer adipiscing elit. Donec tin- Suspendisse pede justo, semper a, scele- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. risque a, pulvinar at, quam. Fusce ut erat. pendisse tempus cursus pede. Curabitur eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur Vivamus commodo est quis quam. Ae- Duis fringilla consequat est. Proin quis sapien felis, venenatis ut, suscipit et, aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- nean tortor tellus, congue vel, luctus et, Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, eleifend et, neque. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- cus cursus, tortor libero dictum diam, felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. consectetuer adipiscing elit. Donec tin- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. Sed ut massa non orci posuere porta. Fusce ut erat. pendisse tempus cursus pede. Curabitur eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur Vivamus commodo est quis quam. Ae- Donec vestibulum ante et sapien rhon- Duis fringilla consequat est. Proin quis sapien felis, venenatis ut, suscipit et, aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- nean tortor tellus, congue vel, luctus et, cus bibendum. Aenean placerat purus arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, eleifend et, neque. nec tellus. Aenean elementum enim sed cus cursus, tortor libero dictum diam, felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. consectetuer adipiscing elit. Donec tin- pede feugiat sodales. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. Sed ut massa non orci posuere porta. Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- pendisse tempus cursus pede. Curabitur eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur Vivamus commodo est quis quam. Ae- Donec vestibulum ante et sapien rhon- lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- sapien felis, venenatis ut, suscipit et, aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- nean tortor tellus, congue vel, luctus et, cus bibendum. Aenean placerat purus cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, eleifend et, neque. nec tellus. Aenean elementum enim sed hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. consectetuer adipiscing elit. Donec tin- pede feugiat sodales. lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. Sed ut massa non orci posuere porta. Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur Vivamus commodo est quis quam. Ae- Donec vestibulum ante et sapien rhon- lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- nean tortor tellus, congue vel, luctus et, cus bibendum. Aenean placerat purus cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, eleifend et, neque. nec tellus. Aenean elementum enim sed hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. consectetuer adipiscing elit. Donec tin- pede feugiat sodales. lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. Sed ut massa non orci posuere porta. Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis Vivamus commodo est quis quam. Ae- Donec vestibulum ante et sapien rhon- lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit nean tortor tellus, congue vel, luctus et, cus bibendum. Aenean placerat purus cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum amet nulla in eros sollicitudin commodo. eleifend et, neque. nec tellus. Aenean elementum enim sed hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. pede feugiat sodales. lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- Sed ut massa non orci posuere porta. Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse Donec vestibulum ante et sapien rhon- lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum cus bibendum. Aenean placerat purus cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. nec tellus. Aenean elementum enim sed hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- pede feugiat sodales. lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing m a r t a g i l i : Lorem ipsum dolor sit Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. amet, consectetuer adipiscing elit. Nam eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur Vivamus commodo est quis quam. Ae- vitae mauris. Nunc condimentum, ligula aliquet turpis ut pede. Fusce aliquet so- nean tortor tellus, congue vel, luctus et, ac suscipit sodales, lectus eros biben- dales tortor. Lorem ipsum dolor sit amet, eleifend et, neque. dum ipsum, vitae vestibulum mauris consectetuer adipiscing elit. Donec tin- quam et erat. cidunt est nec purus. Cras sit amet elit. 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Pellentesque viverra, est non dictum Sed ut massa non orci posuere porta. Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- Donec vestibulum ante et sapien rhon- lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat cus bibendum. Aenean placerat purus cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum nec tellus. Aenean elementum enim sed hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. pede feugiat sodales. lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. 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Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, interview amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. est ante pellentesque massa, non adi- 173 Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget Marta Gili Jordi Colomer Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, consequat. est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi Suspendisse pede justo, semper a, scele- Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, risque a, pulvinar at, quam. est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, piscing libero eros eget metus. Sed eget nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque quam. In ac risus scelerisque est facilisis nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- sodales. Nulla malesuada velit sed mi Suspendisse pede justo, semper a, scele- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. tempor mattis. Suspendisse velit nunc, risque a, pulvinar at, quam. Fusce ut erat. tincidunt in, semper quis, interdum nec, Duis fringilla consequat est. Proin quis nunc. In tincidunt tellus ac risus. Proin Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- nec orci faucibus dui imperdiet porttitor. sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- cus cursus, tortor libero dictum diam, Suspendisse pede justo, semper a, scele- trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- risque a, pulvinar at, quam. Fusce ut erat. pendisse tempus cursus pede. Curabitur Duis fringilla consequat est. Proin quis sapien felis, venenatis ut, suscipit et, Nam ultrices fringilla sem. Pellentesque arcu. Fusce posuere, massa auctor rhon- mattis a, urna. Fusce scelerisque eleifend sem lorem, egestas a, lobortis vitae, ul- cus cursus, tortor libero dictum diam, felis. Morbi hendrerit tortor sit amet risus. trices vitae, lacus. Suspendisse potenti. non lobortis lacus quam ac tellus. Sus- Donec nec lectus. Vivamus sit amet odio Fusce ut erat. pendisse tempus cursus pede. Curabitur eu lorem rhoncus vulputate. Curabitur Duis fringilla consequat est. 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Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. Donec vestibulum ante et sapien rhon- lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, cus bibendum. Aenean placerat purus cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. est ante pellentesque massa, non adi- nec tellus. Aenean elementum enim sed hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. Pellentesque urna. Vivamus dictum, odio vel porttitor accum- piscing libero eros eget metus. Sed eget pede feugiat sodales. lisi. Pellentesque viverra, est non dictum Vestibulum aliquam, urna nec tincidunt Mauris felis tellus, vehicula vel, elemen- san, est libero laoreet nisl, sed adipiscing quam. In ac risus scelerisque est facilisis Nunc sollicitudin hendrerit est. Phasel- viverra, nulla sapien luctus quam, ac pla- luctus, odio diam vehicula libero, at mollis tum ut, molestie vel, nulla. Suspendisse lacus nunc vitae massa. Etiam at ante. sodales. Nulla malesuada velit sed mi lus sed leo. Donec elit pede, lobortis tin- cerat ipsum ipsum eget elit. Nullam erat massa justo eget leo. Donec erat. Duis sit potenti. Ut vel felis eu augue bibendum Duis luctus, mi non tincidunt dignissim, tempor mattis. Suspendisse velit nunc, cidunt, accumsan eget, mollis ac, leo. In risus, imperdiet sollicitudin, fermentum amet nulla in eros sollicitudin commodo. consequat. est ante pellentesque massa, non adi- tincidunt in, semper quis, interdum nec, hac habitasse platea dictumst. Nulla faci- id, mattis vel, nibh. 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en2002 2001

180 père coco et quelques objets perdus en 2001

Un personnage habillé en noir, portant un A character in black carrying a large grand sac sur l’épaule, déambule dans bag over his shoulder walks through the les rues. En chemin, il ramasse des objets streets. Along his way, he picks up objects apparemment perdus sur les trottoirs et apparently mislaid on pavements, in car les aires de parking, les quais, la plage, les parks, on quaysides, on the beach, in jardins publics, les bars. Aussi inquiétant public parks and in bars. As troubling as he que prodigue, Père Coco est un personnage is prodigal, Père Coco is a hybrid character, hybride, entre le Père Noël et El Coco, somewhere between Father Christmas, équivalent espagnol du croque-mitaine. Il or Père Noël, and El Coco, the Spanish ne distribue pas des cadeaux sortis d’usine equivalent of the “bogyman”. He does not mais collecte des objets déjà utilisés, hand out presents new from the factory but à la fois personnels et banals, utiles et collects objects already used, personal but insignifiants. Dans sa tournée aléatoire, ordinary, useful but meaningless. Wending il est en même temps un Petit Poucet his random way, he is simultaneously a ramassant ses bouts de pain et un guide Tom Thumb following breadcrumbs and a étrange qui nous fait traverser la ville, du strange guide leading us through the city, jour à la nuit. from day into night. Le film, projeté en boucle, est constitué The film, shown in an unending loop, is de séquences d’images fixes. Chacune made up of sequences of still images. Each correspond à la (re)découverte d’un objet, image corresponds to the (re)discovery provenant du Bureau des objets trouvés de of an object taken from the Lost & Found Saint-Nazaire et à nouveau disposé dans la Office of Saint-Nazaire and put back in ville. De ce trésor dérisoire, on ne verra pas the city. We never see the sum total of la somme, de même qu’aucune intention this derisory treasure trove and similarly, ne semble régir la collecte. Le montage there appears to be no intention guiding its saccadé accentue une marche contrariée et collection. The jerky editing highlights the hésitante. Le temps linéaire se trouve ainsi hesitant, stop-go progress of the character. renversé, et la valeur d’usage des objets Linear time is thus reversed, and the mis en suspens. usefulness of the objects held in abeyance. Père Coco précède et annonce le héros Père Coco both precedes and heralds the d’Anarchitekton, deux personnages hero of Anarchitekton, two characters interprétés par le même acteur, Idroj played by the same actor, Idroj Sanicne. Sanicne. Flâneur, il s’approprie l’infime A passer-by, he picks up the infinitely pour créer du sens, perçant, dans l’espace insignificant to create meaning, making, in ordinaire de la rue, une brèche poétique. the everyday space of the street, a poetic Ses actions animées comme autant de flip breach. His animated actions resemble books, rébus fait de rebuts sans queue ni flip books, riddles made of rubbish with tête, finissent par former un récit continu, neither head nor tail, and end up creating une construction hétéroclite, peut-être a continuous narrative, a disparate sans fin. construction, without end perhaps.

22007 av

2e Avenue

Le film est constitué d’une succession This film consists of a succession of still d’images fixes extraites d’un long travelling images from a long tracking shot in Second dans la rue n°2 de la cité ouvrière Rhodia, Street in the Rhodia workers’ housing à Roussillon, près de Lyon. La caméra estate in Roussillon, near Lyon. The camera enregistre la succession de maisons- records a series of houses and gardens, all jardins, toutes identiques, en laissant juste identical, giving us a glimpse of the fixtures entrevoir les aménagements et usages and fittings and habits of the occupants. des résidents. Sur ce fond uniforme, des Against this uniform backdrop, individuals personnes apparaissent de manière fugace, appear fleetingly, performing everyday réalisant des gestes ordinaires ou jouant de acts or playing music. The only event to la musique. Seules deux fanfares traversent disturb this apparently unremarkable successivement le cadre, venant ainsi panorama is the passage in succession troubler un panorama en apparence anodin. across the screen of two brass bands. L’enregistrement sonore est remanié de The sound has been reworked to form an telle sorte qu’il forme une composition independent composition, sometimes autonome, tantôt synchrone, tantôt synchronised, sometimes not. décalée. 2e Av. transposes the model of the factory 2e Av. transpose le modèle la cité ouvrière, estate, originally the creation of an création patronale à l’origine, puis site employer, and later a locus of working class d’une sociabilité populaire, dans le contexte social solidarity, into the modern context moderne de l’urbanisme de masse : of mass urban planning: its repetitive l’horizontalité répétitive suggère la tour horizontality evokes the tower block and de banlieue, et le désir d’autonomie de la a desire for the independence of house maison avec jardin, l’idéal petit-bourgeois and garden, the lower middle-class ideal du pavillon construit en série. 2e Av. rappelle of the serially constructed semi-detached. aussi ces films – westerns classiques ou 2e Av. is also reminiscent of films – classic séries télévisées à l’américaine – s’ouvrant westerns or American TV series – where sur une rue dont l’harmonie se révélera the opening scenes depict a street whose bientôt de façade. Mais ici, le montage en harmony will soon be revealed to be pure boucle produit une impasse narrative, de façade. But here, the editing of the images petites fictions s’esquissant à peine pour in an unending loop places the narrative disparaître aussitôt. in a cul-de-sac, tiny fictional stories Cette œuvre collective paradoxale – chacun disappearing before they have time to joue sa partition sans considération form. de tempo mais dans un temps et lieu This paradoxical collective work – each communs – a été réalisée en collaboration individual plays to his or her score avec l’Institut d’art contemporain without concern for overall tempo but de Villeurbanne et Travail et Culture within a common space and time – was à Roussillon, association issue des created with the Villeurbanne institute of mouvements d’éducation populaire d’après- contemporary art and Travail & Culture guerre. Indice peut-être, de la proximité de in Roussillon, a non-profit association 2e Av. avec Prototipos et Anarchitekton, à that sprang from the people’s education travers une interrogation sur les relations movements of the post-War period. Might confuses entre art et politique ? this point to a closeness between 2nd Av. and Prototipos and Anarchitekton in examining the confused relationship between art and politics? le2002 dortoir

vanité festives festive vanitas Glòria Picazo

Cette vidéo est présentée dans une salle de projection où un tas This video is presented in a screening room with lots of de la fiction. Son intention est ainsi certainement de prémunir ses against the conventional traps implicit in exhibition, and to de matelas permet au spectateur de trouver confortablement sa mattresses for spectators to make themselves comfortable. images des pièges conventionnels qu’implique l’exposition, et de install them in habitable stagings in which visitors, too, become place. Avec cette installation, l’artiste réunit une architecture de In this installation the artist brings together a fictive piece of les installer dans des scénographies habitables où les visiteurs actors. Lying on the mattresses laid out in the screening room, fiction, qui est celle de la vidéo, une architecture scénographique, architecture (the one in the video), a display structure, and deviendront eux aussi acteurs. Allongés sur des matelas disposés they can strike up the same postures as at the “party” of which et des spectateurs ainsi transformés eux-mêmes en acteurs. spectators who are themselves transformed into actors. In dans la salle de projection, ils pourront adopter les attitudes et Colomer shows us only the uncertain end. Dans Le Dortoir, la caméra parcourt chacun des douze étages d’un Le Dortoir, the camera explores the twelve floors of a building les situations de cette “fête”, dont Colomer nous laisse seulement bâtiment en un plan-séquence unique, en apparence, qui s’étend in what seems to be a single sequence shot, going from night voir la fin incertaine. de la nuit au jour1. Elle déambule à travers des espaces où les to day1. It moves through spaces cluttered with abandoned 1 Le montage crée l’illusion d’un mouvement 1 The editing creates the illusion of objets s’accumulent, abandonnés, en rencontrant par moment des objects and, here and there, the bodies of people sleeping. At continu, alors qu’il s’agit en réalité de douze continuous movement, when in reality personnes endormies. Tout incite d’abord à penser que ce chaos est first, everything leads us to believe that this chaos is the result séquences distinctes, à partir d’un même there are twelve distinct sequences le résultat d’une grande fête dont les protagonistes ont succombé of some big party whose protagonists have now flaked out with dispositif de décor. based on the same set structure. à la fatigue. Cependant, on comprend vite qu’il s’agit en fait d’une fatigue. However, we soon realise that the whole structure is 2 Jordi Colomer y fait aussi référence dans la 2 Jordi Colomer also refers to this in the vidéo Alfabet (2000), où un profil crache des video Alfabet (2000), in which a face seen grande scénographie construite à partir de bois et de carton, de a set made of wood and cardboard, as indeed are most of the centaines d’objets et récite simultanément, in profile spits out hundreds of objects même que la plupart des objets qui s’y trouvent. La sensation de objects found within it. There is a strong sense of confusion, but à double voix, un fragment de La Vie while reciting, in a double-tracked voice, mode d’emploi de Georges Perec (1978), a fragment from Georges Perec’s La Vie confusion est évidente, mais le déplacement subjectif de la caméra the point-of-view logic of the camera movements always allows où sont décrits les objets épars dans un mode d’emploi (Life, A User’s Manual, nous laisse toujours la possibilité d’observer et, finalement, nous scope for observation and, ultimately, refers us to the idea of appartement un lendemain de fête. 1978) describing the various objects scattered around a flat the morning after renvoie à l’idée d’un ordre. L’artiste semble lui-même décrire de an order. The artist himself seems to offer detailed descriptions a party. manière détaillée certains objets disposés au milieu du désordre : of some of the objects laid out in the middle of this mess: “des assiettes de carton, empilées, froissées ou isolées, pleines de “cardboard plates piled up, creased, or isolated, full of waste […] déchets”, “une ribambelle de verres et de gobelets parfois encore a horde of glasses and cups, sometimes still half-full […] cans à demi pleins”, “des canettes de bière”, “diverses bouteilles vides”, of beer […] various empty bottles […] on the floor, everywhere, “par terre, partout, les restes du raout” ; cet inventaire en écho à remains of the rout”. This inventory echoing a fragment from un fragment de La Vie mode d’emploi évoque à dessein la passion La Vie mode d’emploi deliberately evokes its author, Georges classificatoire de Georges Perec2. Le destin final de tout cela sera Perec’s passion for classifications2. However, in the end, it cependant un grand feu : les chambres, les escaliers, les murs, all ends up on a big fire: the rooms, stairs, walls, beds, these les lits..., éléments scénographiques et fragiles, seront consumés fragile elements of the set, will be consumed by flames and thus par les flammes pour engendrer un nouveau travail,Fuegogratis engender a new work, Fuegogratis (2002). This is the ephemeral 207 (2002). L’éphémère comme reflet de la fugacité de la vie dans cette as a reflection of the general fugacity of life in a monumental and monumentale vanité festive. festive Vanitas. C’est en revoyant Le Dortoir que je me suis rendue compte du It was when I saw Le Dortoir for a second time that I became profond changement intervenu dans la méthode de travail de Jordi aware of the deep change that has taken place in Colomer’s Colomer à partir de 1997. Commencée cette année-là, la vidéo A, working method since 1997. Begun in that year, resulting from B, C, etc. – fruit de ses nuits passées dans l’atelier à monter et the nights spent in the studio editing and re-editing the cities, remonter des villes, et formant par ailleurs le banc d’essai de ce and forming the testing bench for what would become Simo qui deviendra Simo (1997) – marque certainement le passage d’un (1997), the video A, B, C, etc. certainly marks the transition from travail solitaire à un travail collectif. Si les relations avec le monde solitary work to the kind of collective work. If Colomer’s relation théâtral et le caractère scénographique de nombreuses solutions to theatre and the stage-like quality of his spatial solutions have spatiales ont été une constante chez lui, il reste en effet que c’est been a constant in his work, the fact remains that this was the à cette époque qu’il travaille essentiellement comme un metteur period when he worked mainly as a director or, more exactly, a en scène ou, plus exactement, un cinéaste. Ainsi, à partir d’A, B, C, film director. Starting with A, B, C, etc., then, his projects have etc., ses projets réuniront de nombreuses personnes, parfois des involved large numbers of participants, some of them close amis proches attirés par une collaboration ; à tel point que l’on peut friends attracted by the idea of working together. Indeed, se demander si ces réalisations ont fait l’objet d’une description we might ask whether these productions were meticulously minutieuse préalable, à la manière d’un scénario de cinéma, ou s’ils scripted, like a film, or instead grew out of a kind of choral opera sont le fruit d’une espèce d’opéra choral dans lequel la planification in which planning and improvisation strike a natural balance. et l’improvisation s’équilibrent naturellement. Likewise, whenever I see Le Dortoir, the ideas come thick De même, à chaque fois que je vois Le Dortoir, des idées and fast. It brings to mind the architect Sir John Soane, a figure s’enchaînent. Je repense à l’architecte Sir John Soane, tant admiré greatly admired by Jordi Colomer, who expanded his London par Jordi Colomer, qui agrandissait sa demeure londonienne à home to fit his growing collections. In Le Dortoir, the wooden mesure que ses collections augmentaient. Dans Le Dortoir, les and cardboard rooms seem to add up as the scenario unfolds, chambres de bois et de carton semblent s’ajouter les unes aux following the camera as it appears to move in continuous autres en même temps que se déroule le scénario, suivant la fashion, noting everything in its passage. And this movement caméra qui paraît se déplacer de façon ininterrompue, détaillant inevitably brings to mind the famous – because pioneering – tout ce qui se trouve sur son passage ; et ce mouvement m’évoque sequence shot at the beginning of Touch of Evil (1958) by Orson inévitablement le célèbre – car pionnier – plan-séquence au début Welles. de La Soif du mal (1958) d’Orson Welles. Either way, we should never forget that Colomer’s videos Quoi qu’il en soit, on ne doit jamais oublier que les vidéos de are part of stage installations made to be exhibited as such, Jordi Colomer font partie de scénographies pensées pour être and which once again place us on the frontier between reality exposées, qui nous placent de nouveau à la frontière de la réalité et and fiction. His intention here is certainly to protect his images fuego- gratis 2002

fuegogratis

Au crépuscule, une voiture étincelante At dusk, a shiny vehicle drives slowly avance lentement sur une route de down a country road. A young couple campagne. Un jeune couple en sort, get out, and discover with delight an découvrant avec ravissement un panneau illuminated sign heralding Fuegogratis. illuminé qui annonce Fuegogratis. Ce duo The pair, beside themselves, their dialogue halluciné, dont le dialogue manifeste le evidencing a desire for total consumerism, désir de tout consommer, se dirige vers walk toward a great bonfire. Like some un grand feu. Telle une corne d’abondance cornucopia set down in the middle of au milieu de nulle part, celui-ci fait nowhere, this brings forth a bed, a table, surgir lit, table, réfrigérateur, lave-linge... a refrigerator, a washing machine... Enchantés, ils saisissent les meubles Enchanted, they take the items as they sortant des flammes et les accumulent come out of the flames and place them in de façon instable sur leur carrosse doré. an unstable pile on their gilded carriage. Enfin, ils s’éloignent dans la nuit – avant de In the end, they drive off into the night réapparaître sur le chemin, le film étant – only to reappear on the road, since the présenté en boucle. film is shown in a never-ending loop. Fuegogratis a été réalisé en format Fuegogratis was shot in panoramic panoramique la nuit de la Saint-Jean, en format on Saint John’s night, echoing écho au feu de joie rédempteur qui célèbre the redemptive bonfire that celebrates le solstice d’été. Le mobilier en carton, the summer solstice. The cardboard provenant de la vidéo Le Dortoir – dont on consumer items, taken from the video Le retrouve le thème musical –, est l’emblème Dortoir – whose musical theme we hear dérisoire de notre vie matérielle ordinaire, again here – are a derisory emblem of mais aussi l’objet du sacrifice productif des our everyday material existence as well restes d’une œuvre ancienne au profit d’une as the productive sacrifice of the remains nouvelle. of an older work to make a new one. Ce “feu gratuit” évoque la fantaisie This “free fire” evokes the visual, visuelle, éphémère et magnifique, des ephemeral but magnificent fantasy of fêtes baroques. Il n’est pourtant pas sans baroque celebrations. But it is not without gravité. Comme dans ces scènes de its serious side. Like film sequences cinéma où des décors sont réellement in which the decor genuinely goes up incendiés, la destruction fictive rend ici in flames, such fictional destruction perceptible une réalité symbolique, aussi makes perceivable a symbolic reality fascinante que terrifiante. L’étrangeté that is as fascinating as it is terrifying. de l’action est renforcée par une double The strangeness of the film’s action inversion : d’une part, certains passages, is enhanced by a double inversion: autour du feu, résultent évidemment d’une first, certain passages around the diffusion inversée de la séquence originale. fire manifestly result from reverse D’autre part, de façon plus troublante, des projection of an original sequence. And mouvements effectués par les acteurs à secondly, more disturbingly, the actors l’envers durant le tournage, sont remontés perform movements in reverse during à l’endroit dans le film que nous regardons. the shooting and these are edited to Cette gestuelle antinaturelle se combine unfold normally in the film we see. This avec le décor et les bruits pour former anti-natural choreography combines un petit théâtre inquiétant, un fragment with the decor and sound to form a little onirique mêlant clichés, désirs et peurs. theatre of disquiet, a dream-like fragment blending cliché, desire and fear. no2006 future no future

Une voiture noire roule à la nuit tombante A black car drives along the road as sur une voie rapide ; accrochée sur son night falls on en expressway; mounted toit, une enseigne lumineuse clignotante, on its roof is a blinking neon sign like semblable à celle d’un cirque ou d’un those of circuses or casinos, with casino, questionne et répond, sans pour a question and an answer, albeit autant conclure : “No ? Future !”. À l’aube, inconclusive: “No? Future!” As dawn elle s’arrête dans le centre-ville du Havre, breaks, it stops in the city centre. reconstruit après-guerre par Auguste The driver, with heavily made-up eyes Perret. wearing a military-style jacket, gets La conductrice, aux yeux très maquillés out and begins to walk along a main et vêtue d’une veste militaire, en sort boulevard, to the rhythm set by the drum, et se met à marcher dans une avenue which she occasionally stops banging principale, au rythme d’un tambour to ring on doorbells. No reply. The city is qu’elle délaisse parfois pour sonner aux still asleep, despite the noise. The young interphones. Aucune réponse. La ville woman continues to march along; an dort encore, malgré le tapage. La jeune impetuous beating the drum occasionally femme continue de marcher en cadence ; accompanied by rhythmic shouts. She un battement impétueux parfois scandé ends her march by returning to the car, de cris. Elle boucle son parcours en and climbs up on the hood, continuing rejoignant la voiture, monte sur le capot to beat the drum. A few passers-by, et tambourine. Quelques badauds, confused or impassive, watch her until déconcertés ou impassibles, la regardent, she finally gets back behind the wheel, avant qu’elle ne reprenne enfin le volant, perhaps to drive to another town. peut-être vers une autre ville. No Future, which echoes Fuegogratis No Future, écho de Fuegogratis où une in which there is also a luminous sign signalétique brillante voisinait avec system and a strange vehicle, is just une étrange voiture, est tout aussi as ambiguous. The motto made famous 227 équivoque. La devise, rendue célèbre by the Sex Pistols is radically changed par les Sex Pistols, est ici transformée, here with punctuation transforming it par les signes de ponctuation, en un into a dialogue aping the language of dialogue qui contrefait jusqu’à l’absurde advertising to the point of absurdity, le langage publicitaire, ou signifie au or conversely indicating a refusal contraire une insoumission qui échappe to submit that escapes all possible à tout discours. Des registres de parole discourse. Different speech registers, différents, en partie contradictoires, se some mutually contradictory, are superposent : le boniment de foire, le overlaid: the fairground pitch, the hard matraquage commercial, la proclamation sell, the official proclamation, the officielle, le slogan de manifestation, demonstrator’s slogan, the military le commandement militaire, le prêche order, and the religious sermon. religieux. As an activist for a lost cause, an Militante d’une cause perdue, annonceur announcer without an audience or sans public ou personnage de carnaval an isolated carnival character, the esseulé, l’héroïne pourrait être une heroine could be a sort of Joan of Jeanne d’Arc ou une Mère Courage des Arc or Mother Courage for modern temps modernes. Même si son geste times. Despite the fact that her suscite peu de réactions, il vaut d’abord action arouses little reaction, it is pour lui-même, comme un acte gratuit worth doing in itself, a gratuitous but mais déterminé, qui brise le silence. resolute act that breaks the silence. No Future est présentée dans une petite Shot in Le Havre — city of which centre pièce carrée construite en carton, sur was rebuilt by Auguste Perret after the lequel le film est directement projeté, et Second World War — No Future is shown à laquelle on accède par une porte étroite in a small square room in cardboard in grossièrement découpée. which the film is projected directly and to which the spectator gains access via a narrow, roughly cut doorway. no future no futur en la pampa

ciao, ciao en maría elena cementerio santa isabel christmas vagar en campo raso es 2007

En la pampa En la pampa (ou les larmes de Dostoïevski dans le désert) (o lágrimas de Dostoïevski en el desierto). Martí Peran

Il n’est pas évident de comprendre pourquoi Dostoïevski fondit en Guessing why Dostoyevsky burst into tears when he read Hegel une fiction à partir des moyens les plus élémentaires). L’action ne tension is not between life and death but between reality and fiction. 1 1 larmes en lisant Hegel en Sibérie ; c’est un endroit, comme l’Afrique, in Siberia was no easy matter , for Siberia, like Africa, is a place s’appuie que sur un puissant décor : le Cementerio Santa Isabel. Cela It is no longer a matter of denouncing the banality of invention in situé hors de l’Histoire – cet instrument que la Raison a construit outside History, that tool devised by reason to cope with the vast pourrait suggérer qu’il faut interpréter la narration comme une sorte de the face of destiny, but of celebrating the autonomy of fiction, which pour affronter tout ce qui est démesuré, illimité. La Sibérie n’est and unlimited. Siberia may not be a historical place, but it proved vanitas selon laquelle aucun effort visant à améliorer les apparences can happen and never conclude. Within the cemetery no morality peut-être pas un endroit historique, mais il s’avéra fondamental pour to be a fundamental place, where the writer could taste hell without (à les laver) ne pourra restituer le fictionnel au monde réel. La tension lies hidden; it is merely a fragile city, an architecturally flimsy set, Dostoïevski car il lui a permis de goûter à l’enfer hors du châtiment et punishment or guilt. Siberia or the Desert: stupid spaces – obeying ne s’établit donc pas entre la vie et la mort, mais entre le réel et le designed, as on so many other occasions8, to clothe fiction. Thus the de la faute. La Sibérie ou le Désert : des espaces idiots – n’obéissant à no reason or purpose – with the something of the look of fiction about fictionnel. Il ne s’agit plus de dénoncer la banalité de l’invention face narrative − the journey − is authorized to continue. aucune sorte de raison ou de finalité –, qui apparaissent ainsi comme them. A Theatre. au destin, mais de célébrer l’autonomie du fictionnel, capable de des lieux de fiction. Un Théâtre. Outside the Theatre a group of women give a younger woman an s’accomplir sans conclure. Le cimetière ne renferme aucune morale ; Act III. Since the aim is to inhabit a fiction constructed in the most Face au Théâtre, un groupe de femmes fait ses adieux avec effusion enthusiastic send-off. Their bodies, clustered and compact (another ce n’est qu’une ville précaire, un décor à l’architecture fragile, comme adverse conditions, the scarcity of material resources requires à une jeune fille. Les corps, fusionnés et compacts (une nouvelle accumulation, like the piles of boxes and heaps of cans and en tant d’autres occasions9, destiné à héberger la fiction. La narration the intensification of time-specific strategies: Christmas exists in 2 accumulation, comme celles de travaux antérieurs qui présentaient mattresses in previous works ), refer once more, in the same vein, – le voyage – a donc la liberté de se poursuivre. the desert (the recording was made in December). He is amusing des caisses empilées ou des tas de boîtes de conserve et de to fiction: a tale built up by stacking things together, a collection of Troisième acte. Puisqu’il s’agit d’habiter la fiction construite dans les himself with the remnants of the car, while She is playing around 2 matelas ), appuient, dans le même registre, sur le fictionnel : un récit disparate elements which at any moment may help to single out one conditions les plus sévères, la pénurie de ressources matérielles with colourful Christmas decorations. An improvised choreography of construit à travers l’entassement d’éléments, une réunion de choses of its components, a send-off. “Ciao, ciao!” in María Elena. The young force à parfaire les stratégies time specific : c’est Noël dans le désert games on a fixed plane turns a stretch of wild country into a location disparates dont l’une des composantes peut s’individualiser à tout woman (the actress, the crumb of fiction that detached itself from the (le film a été tourné en décembre). Lui, s’amuse avec les restes de for the performance. Even after it is empty, the scene endures thanks 3 moment : l’adieu. Ciao, ciao en María Elena. La jeune femme (l’actrice, first body in the tale ) walks off into the desert. And at that precise l’automobile et elle, avec des décorations de Noël colorées. Dans un to the theatrical potential of the spot: a burst tyre slithers along the 3 la parcelle de fiction dégagée du premiercorps du récit ) s’avance moment, as she enters and invades the desert stage, it turns into the plan fixe, une chorégraphie ludique improvisée transforme un morceau ground as though it (too) were a sculpture. The tale, by this time, 4 dans le désert. À ce moment précis, quand elle s’y incorpore et envahit pampas: a desert now occupied by whoever may rise to speak . So de terre non cultivée en espace scénique pour la représentation. could go on for ever − without History −, though this would involve la scène du désert, celui-ci devient pampa : un désert désormais the desert becomes the pampas, as though the Theatre spotlights Même quand la scène se vide, le potentiel théâtral de l’endroit using those few "interventions of chance" which could occur in the 4 occupé par qui y prend la parole . Le désert se transforme donc en have been switched on, and a body and that body’s language appear demeure : un pneu crevé roule sur le sol comme s’il s’agissait d’une "obviously depressing" severity of the desert9. pampa, comme si les projecteurs du Théâtre s’allumaient : quand and inhabit the scene. Consequently Jordi Colomer, in En la pampa, (autre) sculpture. À ce point-là, le récit pourrait continuer indéfiniment un corps et son langage y apparaissent et habitent la scène. Ainsi, is again experimenting with possible − and precarious − ways of – sans Histoire ; pour cela, toutefois, il faudra utiliser ces quelques dans En la pampa, Jordi Colomer interroge-t-il à nouveau les façons inhabiting fiction. But whereas in previous works the exploration rares « interventions du hasard » qui pourraient se produire dans la possibles d’habiter, dans la précarité, la fiction. Cependant, si dans des was done by actually building the set – for the protagonists and sévérité « évidemment déprimante » du désert10. travaux antérieurs cette exploration se concrétisait dans le processus the audience in equal degrees5 –, now this twofold game aimed même de construction scénique – aussi bien pour les protagonistes at inhabiting the fictitious is neatly expressed in the decision to 1 László Földényi, Dostoïevski lit Hegel en 8 Andrei Tarkovski, Le Temps scellé : de 1 László Földényi Dostoïevski lee a Hegel en 8 The fictionalization of architecture as a way 243 5 Sibérie et fond en larmes, Arles, Actes Sud, « L’Enfance d’Ivan » au « Sacrifice », Paris, Siberia y rompe a llorar, Barcelona, Galaxia of responding to the traditional peremptory que pour les spectateurs –, ici le double jeu pour habiter le fictionnel place the actress in a desert setting. In a place outside History this 2008. Cahiers du cinéma, 2004. Jordi Colomer Gutemberg, 2006 (Spanish translation); stoniness of conventional architecture is a se traduit purement et simplement par la décision de situer l’actrice vulnerable presence, devoid of baggage, must build (improvise) little lui-même a suggéré en de nombreuses Dostoïevski lit Hegel en Sibérie et fond en constant in the work of Jordi Colomer. The 2 L’accumulation d’objets est une constante, occasions la nécessité d’interpréter ses larmes, Arles, Actes Sud, 2008 (French series Anarchitekton (2002-2004) is the dans le milieu désertique. Dans un endroit situé hors de l’Histoire, stories using gestures, words and itineraries. The narrative, once une sorte d’antiméthode constructive, dans travaux vidéo comme une “sculpture dilatée translation). most obvious example. une présence vulnérable, dépourvue de bagages, devra construire more, begins. de nombreuses œuvres de Jordi Colomer. dans le temps”. Le désordre en tant que modalité d’ordre – 2 The accumulation of objects is a recurring 9 The last part of the video shows the (improviser) de petites histoires à travers ses gestes, ses mots et ses Of all Jordi Colomer’s works, En la pampa has most in common with dans l’esprit de Georges Perec –, éloigné de 9 La fictionnalisation de l’architecture comme feature of many of Jordi Colomer’s works, a characters roaming about the desert parcours. La narration débute, à nouveau. the logic of a road movie: everything that happens is arranged within la nature des choses, est, en ce sens, une mécanisme de réplique face au caractère sort of constructive anti-method. Disorder and repeating, in a playful, mocking allégorie de cette même fiction traversant traditionnellement contraignant et monolithi- as a modality of order − à la Georges Perec way, a sentence taken literally from the En la pampa est l’œuvre de Jordi Colomer qui se rapproche le plus de a journey. But we know nothing whatever of the possible destination; tout langage. que de l’architecture conventionnelle est une −, alien to the nature of things and, for that Situationist theory of dérive: “wandering in la logique d’un road movie ; tout ce qui arrive s’organise à l’intérieur this lack of an objective – the horizon of things historical − releases constante dans l’œuvre de Jordi Colomer. very reason, like an allegory of same fiction open country is obviously depressing and 3 Le groupe de femmes compose le premier La série Anarchitekton (2002-2004) en est that pervades any idiom. the interventions of chance are poorer there d’un déplacement. Toutefois, nous ignorons complètement la the fiction from any function outside itself. The tale that is told no récit, tout comme chaque corps soutient l’exemple le plus évident. than anywhere else” (Guy Debord, “Théorie destination possible du voyage ; cette carence d’objectif – l’horizon longer even wavers between success and failure6: it grows out of une lettre différente dans la narration de Un 3 The group of women gives shape to the first de la dérive”, Internationale Situationniste, Crime (2004). 10 La dernière partie de la vidéo présente les tale, just as each body holds up a different No. 2, 1958, and Guy Debord, “Théorie de la de ce qui est historique – libère la fiction de toute fonction au-delà simply “wandering in open country”. The story moves onwards, personnages en train de déambuler dans le letter in the narrative of Un Crime (2004). dérive”, Les Lèvres nues, No. 9, December d’elle-même. Ce qui est raconté n’oscille même plus entre le succès in other words, only as time flows within the plane, fulfilling the 4 Jordi Colomer lui-même reconnaît que En la désert tout en répétant de façon ludique et 1956; English translation in Knabb, Ken 6 pampa oublie le nom du désert d’Atacama, moqueuse une phrase tirée de la Théorie de 4 Jordi Colomer himself admits that the name (Ed.), Situationist International Anthology, ou l’échec , mais se déploie à partir d’une simple « errance en rase expectation, so akin to Tarkovsky, of making motion pictures into a car « le désert se passe d’être habité », la dérive situationniste : « L’errance en rase of the Atacama desert is missing from En Berkeley, Bureau of Public Secrets, 1981). In campagne7 ». Autrement dit, le récit n’avance qu’à la manière d’un flux work of sculpture by moulding minor events into time7. tandis que « la pampa est le désert habité » campagne est évidemment déprimante, et la pampa. This is because “the desert does its original context, the sentence comments (Sergio González, « Habitar la pampa en les interventions du hasard y sont plus pau- not need to be inhabited” whereas “the ironically on the Surrealists’ appeal to de temps à l’intérieur du plan, et réalise ainsi l’expectative, si proche In this tale the minor event, or sculptural endeavour, that occupies la palabra: creación poética del salitre », vres que jamais. » (Guy Debord, « Théorie de pampas is the inhabiting of the desert” randomness; in contrast, open country is de Tarkovski, de transformer ce qui est cinématographique en une centre stage is washing the car. Washing a car in the desert may Revista de Ciencias Sociales, n°13, Iquique, la dérive », Les Lèvres nues, n°9, décembre (Sergio González, “Habitar la pampa en the only place available to the characters in Université Arturo Prat, 2003, p. 53-65.). 1956 et Internationale situationniste, n°2, la palabra: creación poética del salitre”, the video. élaboration sculpturale dans laquelle le temps est modelé par de petits seem absurd (Pianito fought a battle with the dust on the piano as décembre 1958, et sur Internet : http://www. Revista de Ciencias Sociales, No. 13, Iquique, événements8. well) but it makes it possible to delve into three crucial issues: it 5 Il y en a plusieurs exemples, mais Simo larevuedesressources.org/article.php3?id_ Universidad Arturo Prat, 2003, p. 53-65.) (1997) est certainement le plus représenta- article=38). Dans son contexte original, la Le petit événement, ou l’effort plastique qui occupe l’espace central stresses the travel register of the fiction and the constant mobility tif : le personnage construit compulsivement phrase se présente comme une référence 5 Various examples could be cited but Simo du récit, consiste à laver une voiture. Laver une voiture dans le désert of the playful clashes between the characters; it sets itself up as son espace et le spectateur doit trouver sa ironique aux invocations surréalistes du (1997) is perhaps the most emblematic: place au beau milieu des chaises de la salle hasard ; cependant, pour les personnages, the character compulsively constructs her peut sembler une absurdité (Pianito combattait aussi la poussière a paraphrase of the sculptor’s task, after which the object must de projection. il n’y a pas d’autre espace que « la rase place and the spectator has to sit among sur un piano), mais permet de mettre l’accent sur trois éléments appear, once the excess material has been shaken off (extracting a campagne ». the chairs in the projection room. 6 Comme cela se produisait de façon explicite cruciaux : cette action souligne le caractère voyageur de la fiction sculpture per via di levare); and finally it forces us to become aware dans Les Villes (2002), mais aussi dans 6 As happened explicitly in Les Villes (2002); ainsi que la mobilité permanente des affrontements taquins entre of how the scarce resources (water and the rugged landscape) must d’autres travaux comme Pianito (1999). but also in other works such as Pianito (1999). les personnages ; elle s’érige comme une paraphrase du travail de be managed in order to attain the goal (that of washing the car or 7 Sur cette expression employée dans le sculpture à travers lequel l’objet doit apparaître, une fois que la building a fiction using the most elementary means). The action dernier chapitre de la vidéo, voir la note 10. 7 Andrei Tarkovski, Sculpting in Time, London, Faber, 1989. Jordi Colomer himself has matière en trop a été éliminée (la sculpture per via di levare) ; et, rests solely on the powerful decor: the Cementerio Santa Isabel. This often suggested that his video works must finalement, elle force la prise de conscience de la difficulté de la might suggest that the events narrated are to be interpreted as a be interpreted as sculptures drawn out in time. On the expression “wandering in open gestion des maigres ressources disponibles (l’eau, ou la dureté du sort of vanitas according to which no effort to improve appearances country”, used in the last episode in the paysage) pour la réalisation de l’objectif (laver la voiture, ou construire (by washing) can make fiction part of the real world again. Thus the video, see note 9. Parce que l’errance en rase campagne est - Un désert de mots, de grands mots que je Because wandering in open country is - What can be more hazardous than ne dirai jamais ! walking here? ... l’errance en rase campagne est... wandering in open country is... Comment c’était ? Est évidemment, est - Parce qu’alors l’errance en rase campagne - Having a desert of ideas évidemment déprimante est évidemment déprimante et... how did it go?... is naturally, is naturally depressing -I think that rather than.... it’s as if... Évidemment déprimante et les... et les... - ... les interventions du hasard l’errance en rase campagne est.... Naturally depressing and the... and the... - A desert full of words, big words that I - ... sont plus pauvres wandering in open country is... shall never utter! évidemment déprimante, et les... Comment c’était la phrase ? - « que jamais ! » Naturally depressing and the... what was - Because wandering in open country is the sentence? naturally depressing and... - Les interventions du hasard - Alors, c’est quoi une intervention du hasard ? Explique ! - ... and the interventions of chance - ... the interventions of chance - Les interventions du hasard Non, ben, si nous... C’est ça une divagation... - the interventions of chance -... and the interventions of chance... are - Sont plus pauvres. C’est ça une intervention du hasard. poorer C’est comme passer par là. - are poorer Sont de plus en plus pauvres - both: “than anywhere else!” Évidemment les interventions du hasard ... - Tout ça est une intervention. Tout, tout, - are poorer and poorer parce que c’est errance, pas divagation tout. - So, what is an intervention of chance? L’errance en rase campagne est Naturally the interventions of chance... Describe it! évidemment déprimante - Toi tu es une intervention sur mon et les interventions du hasard comme chemin. because wandering... No! Because drifting No way... if we... this is drifting... this is a celle-ci chance interruption. - Et toi dans ma vie. Wandering in open country is naturally - Sont plus pauvres. depressing It’s like walking past this place. - Gnan, gnan, gnan, dans ma vie ! - Sont de plus en plus pauvres. Regarde, cet Moi je crois que divaguer est plus important And the interventions of chance like this - All of this is an interruption, all of it, all arbre est de plus en plus pauvre. qu’errer. of it. Alors divaguer en rase campagne... Non ! C’est ça ! Vas errer par là ! - get poorer L’errance en rase campagne EST - You are an interruption in my way. Alors, c’était comment ? Dis-le ! - get poorer and poorer. Look! This gets - ÉVIDEMMENT DÉPRIMANTE ! L’errance en rase campagne... poorer and poorer. - ...and you in my life.

- Et les interventions du hasard sont « est évidemment déprimante ! » So drifting in open country... no! Wandering - Bah, bah, in my life! comme cet arbre. in open country IS - et les interventions du hasard y sont plus But I think that drifting is more important - Elles sont plus pauvres. pauvres que jamais. - NATURALLY DEPRESSING! than wandering.

- C’est toi, qui es pauvre ! L’ERRANCE EN RASE CAMPAGNE EST... ! -...and the interventions of chance are like And you! Get lost wandering around! this tree - Pauvre ! So, how was it? You say it! - they are poorer - ... de plus en plus Wandering in open country is... - You are poor! - ... plus que jamais “is naturally depressing!” - poor! - Ah ! … que jamais. - and poorer her: and the interventions of chance are Alors l’errance en rase campagne est poorer than anywhere else. évidemment déprimante... -... than anywhere else et les interventions du hasard y sont plus WANDERING IN OPEN COUNTRY IS...! pauvres que jamais. -Yep! than anywhere else Donc ce n’est pas une divagation ordinaire, ce n’est pas une divagation, c’est comme... So wandering in open country is naturally depressing - Qu’est-ce qui est plus pauvre que ça ? and the interventions of chance get poorer - C’est comme marcher pauvrement et and poorer. trouver tout ça. So it’s not like some simple drifting. It’s not - Alors… Tiens ! drifting, it’s more like... Alors, l’errance en rase campagne est évidemment déprimante, Her: What can be poorer than this? et les interventions du hasard y sont plus pauvres que jamais. Him: It’s like walking poorly and finding Voilà ma philosophie désertique. Poésie... all this.

- Qu’est-ce qu’il y a de plus pauvre que de Then... Have this! marcher ici ? So, wandering in open country is naturally - Qu’est-ce qu’il y a de plus hasardeux que depressing de marcher ici ? and the interventions of chance are poorer than anywhere else. - Avoir un désert d’idées. That is my desert philosophy... poetry - Moi je crois que plus que... c’est comme - What can be poorer than walking here? pozo

almonte2008

Pozzo almente

Cette série de photographies, réalisée au Chili dans le désert de l’Atacama, relève d’un récit. L’industrie s’y développa autour des gisements de salpêtre ; des ouvriers venus en masse formèrent des communautés et engagèrent des luttes sociales durement réprimées. La fermeture des mines laissa derrière elle des villes fantômes, traces de nécropoles abandonnées, à l’exception de Pozo Almonte, voisine d’un grand cimetière, entretenu et vivant. Le cadrage systématique accentue la typologie mais souligne la singularité de chaque édifice, fait de matériaux divers et variés, brut ou apprêtés, agencés avec soin ; une architecture sans architectes rappelant des bungalows ou de petites constructions modernistes, dont les morceaux tiennent à la fois de l’église, de la maison, de la cabine et du lit-cage. Ces mausolées de fortune témoignent aussi d’une culture ; la visite prolongée aux défunts fait partie de la vie ordinaire et évoque les victimes, souvent sans sépulture, de la dictature militaire. Ainsi, l’appropriation individuelle de normes formelles, à travers ces tombes étonnantes, traduit la participation d’existences anonymes à l’Histoire.

Cette série de photographies, réalisée au Chili dans le désert de l’Atacama, relève d’un récit. L’industrie s’y développa autour des gisements de salpêtre ; des ouvriers venus en masse formèrent des communautés et engagèrent des luttes sociales durement réprimées. La fermeture des mines laissa derrière elle des villes fantômes, traces de nécropoles abandonnées, à l’exception de Pozo Almonte, voisine d’un grand cimetière, entretenu et vivant. Le cadrage systématique accentue la typologie mais souligne la singularité de chaque édifice, fait de matériaux divers et variés, brut ou apprêtés, agencés avec soin ; une architecture sans architectes rappelant des bungalows ou de petites constructions modernistes, dont les morceaux tiennent à la fois de l’église, de la maison, de la cabine et du lit-cage. Ces mausolées de fortune témoignent aussi d’une culture ; la visite prolongée aux défunts fait partie de la vie ordinaire et évoque les victimes, souvent sans sépulture, de la dictature militaire. Ainsi, l’appropriation individuelle de normes formelles, à travers ces tombes étonnantes, traduit la participation d’existences anonymes à l’Histoire. « Dans la ville en démolition ou en reconstruction, le néo-réalisme fait proliférer les espaces quelconques, cancer urbain, tissu dédifférencié, terrains vagues, qui s’opposent aux espaces déterminés de l’ancien réalisme. » Gilles Deleuze1

Le travail de Jordi Colomer a quelque chose d’une bouffonnerie ; il nous apparaît à la fois comme une plaisanterie et une énigme. Ses vidéos et vidéos-installations sont des caricatures qui activent un réseau complexe de structures visuelles, de stratégies narratives, de jeux de langage et d’échanges entre échelles, figurations et symboles, dont la meilleure définition serait peut-être l’hyperbole. Cependant, cette hyperbole est plus qu’un simple procédé ; c’est un dispositif qui, tout en s’appropriant une des figures les plus récurrentes de l’histoire de l’art – le corps du nain – pour l’utiliser ou le métamorphoser en géant et vice-versa, fait de ce corps « difforme » un principe poétique et analogique de toute mesure – sûrement vaudrait-il mieux parler de dis/proportion – de l’espace, des objets et des signifiants. Dans cette relation entre le petit et le grand, la production de Jordi Colomer inscrit l’ambigüité en tant que sommet et concept. Sommet au-dessus duquel Jordi Colomer se déploie l’espace et agissent ses représentations. Concept à partir duquel il mène une réflexion critique sur le paysage, l’échelle et leurs implications discursives. C’est dans cette dialectique entre le nanisme au pays de Gulliver. et le gigantisme que l’artiste construit une esthétique à travers laquelle 257 il explore les limites entre la subjectivité et l’espace urbain moderne et Échelle, rêve et nature contemporain. Colomer travaille sur l’ « obscénité » d’échelle comme José Luis Barrios potentiel formel et symbolique mais aussi narratif et cinématographique. Son œuvre est une exploration – et de même un incessant voyage aller-retour – entre les styles cinématographiques et les stratégies dramatiques qui misent sur la dislocation entre l’affection, la narration et le sens. Du point de vue cinématographique, ses vidéos peuvent se comprendre comme une errance, du moment vital et quotidien de l’événement vers le lieu onirique symbolique de sa signification. Dans sa dramaturgie, néanmoins, à rebours de la tradition aristotélicienne, ses œuvres sont la mise en « scène » d’actions dépourvues de finalité, où l’acteur/personnage apparaît comme un désamorceur du contexte et un dispositif d’autoreprésentation de la situation ; à la façon brechtienne, l’acteur est plus important que le personnage. S’il y a quelque chose d’inquiétant dans les vidéos de Colomer, ce sont les stratégies par lesquelles il démonte les formes du paysage urbain contemporain. Dans un premier temps, le démontage qu’il réalise est sans doute en rapport avec les relations entre échelle et corps ; ou plus exactement, avec la réinscription de l’échelle dans le corps grotesque en guise de stratégie esthético-symbolique permettant de montrer l’autre côté de l’imaginaire urbain : son côté monstrueux. Au-delà du grotesque comme caractère propre à la nature, Colomer joue, à la manière des bouffons de cour – en introduisant le dé-formé comme rire et critique du pouvoir – avec les imaginaires de la modernité afin d’en révéler le côté obscène : le débordement de leurs limites. Il joue avec du pulsionnel ; transitant entre le monstre ou le difforme, celle-ci le nain et le monstre, le géant et le monstre. Voilà peut-être pourquoi définit le naturalisme, et le monde onirique propre au surréalisme. il faudrait parler d’un naturalisme esthétique qui restitue à l’espace J’ai insisté sur le concept de déplacement entre réalisme et public l’ordre charnel et vital du corps, et ainsi, libère la pulsion en néoréalisme, naturalisme et surréalisme, qui est à l’œuvre dans le travail tant que charge subversive et critique. Les vidéos-installations de de Colomer. Par déplacement, j’entends le passage d’une condition Colomer sont des interruptions dans l’espace public, de sa fonction « objective du plan », généralement en rapport avec le social au cinéma, significative et signifiante. C’est à partir d’une construction tissée sur au changement du « plan de la réalité » de l’image, c’est-à-dire aux une esthétique du plan, une stylistique de l’échelle, une symbolique formes de cristallisation par lesquelles s’accomplit la transmutation du corps et une dramaturgie brechtienne que, dans sa production, du sens du signifiant. Les changements de plan entre figuration réelle le cinéma, la sculpture et l’iconographie se combinent pour façonner une et onirique représentent précisément le passage entre le réel et le stratégie d’interprétation du paysage au-delà de l’utopie et de la ruine surréel. Cependant, lorsque ce transfert passe par la matérialité de la de la modernité. Il nous propose de nous rapprocher de l’espace pulsion, il ne s’agit plus seulement d’une figuration onirique, mais d’une des élans vitaux qui sont sous-jacents dans la vie des villes modernes. déformation vitale, d’un bouleversement corporel. De là, justement, Et il le fait au moyen d’un certain registre esthétique du grotesque, où le les idées du nain et du monstre : ce sont des corps à mi-chemin corps et les objets interrompent les utopies urbaines et architecturales entre données objectives de la situation et figurations symboliques modernes ou, du moins, interfèrent un instant avec elles. En un mot, les du rêve ; ils constituent une limite où la pulsion s’attache au corps travaux de Colomer fonctionnent selon un double dispositif artistique : jusqu’à produire un changement de plan et, à la fois, de « matière ». le moment visuel de l’échange de plans cinématographiques et le Si la coïncidence entre plan général et paysage urbain dans moment performatif de la représentation qui désaliène la situation. le néoréalisme apparaît sous la forme de la ruine, et le plan moyen Rien ne définit mieux le travail de Jordi Colomer que sa claire comme un espace où s’opère la demande éthique de la subjectivité, relation avec le cinéma comme stratégie esthétique. Construite sur il semblerait que Colomer pousse cette ressource à l’extrême, non la dialectique entre plan et montage, et sur la relation entre champ seulement par le jeu des prises de vue, mais aussi en joignant à sa et contrechamp, son œuvre pourrait être envisagée comme un tour stratégie cinématographique des éléments d’ordre sculptural et de vis supplémentaire au néoréalisme. Si le réalisme désirait une iconographique. Dans Barcelona (2002) et Brasilia (2003), de la série épopée du paysage à partir de la correspondance entre l’idée de progrès, Anarchitekton, l’artiste s’approprie ironiquement des bâtiments 259 l’espace urbain et le plan ouvert, le néoréalisme dépasse ces éléments emblématiques ; ceci à travers le déplacement de l’échelle comme pour attirer l’attention sur l’ « espace quelconque » où le plan ouvert condition de mesure de l’architecture. Il s’agit d’un déplacement montre la ruine ou la faillite de la modernité. Mais plus encore, sur esthético-politique du signifiant de l’échelle et de la dislocation ce fond, il inscrit l’accident, l’échec et le trouble d’une société, celle topographique de l’architecture du paysage urbain. Ces déplacements/ de l’Italie de l’après-guerre, plongée dans la crise ; un bouleversement dislocations supposent une déterritorialisation esthético-politique du contrechamp sur le champ qui démonte la condition utopique de l’imaginaire urbain et, par conséquent, une critique des relations à partir de laquelle le cinéma s’était, à l’origine, pensé lui-même. entre forme, fonction et contexte de ces emblèmes architecturaux. Les vidéos de Jordi Colomer sont un approfondissement et une Les jeux iconographiques, symboliques, cinématographiques et complexification des qualités que Gilles Deleuze attribue au néoréalisme performatifs fonctionnent comme des parodies ou des caricatures, italien. Des cinq caractéristiques énoncées par le philosophe2, toutes, comme des tropes ironiques de l’imaginaire architectural et urbain. sauf la « dénonciation du complot », s’appliquent dans les vidéos- Dans ce contexte, il est intéressant de remarquer le différentiel installations de la série Anarchitekton (2002-2004) : « … la situation esthétique et conceptuel qui apparaît dans la vidéo Osaka (2004), dispersive, les liaisons délibérément faibles, la forme-ballade, la appartenant aussi à Anarchitekton. Contrairement au déplacement vers prise de conscience des clichés. » Mais Colomer met en œuvre ces les marges urbaines qui s’effectuait dans les autres œuvres de la série, éléments à partir d’un déplacement du plan de la réalité où, suppose- le parcours réalisé par l’acteur/maquette dans une rue d’Osaka est t-on, fonctionne ce type de prises de vue. Dans Anarchitekton, les elliptique. La répétition de l’action et de la prise de vue comme relations entre champ, action et intervention(s) performative(s) stratégie narrative est ici une ironie vis-à-vis des formes de display et de l’/des acteur(s), en lien avec la dislocation et le bouleversement du simulacre propre aux esthétiques scénographiques de la modernité visuel et sémantique de l’échelle – à travers les reproductions sous tardive, mais aussi une ironie vis-à-vis du sens du déplacement forme de maquettes de certains édifices emblématiques des villes fantasmatique des habitants des villes hautement technologiques. Il d’Osaka ou Brasilia, par exemple – produisent une confusion sur le est sans doute important de souligner ici les différentiels sociaux et plan de la réalité. Ainsi, il est permis non seulement de démonter, politiques que Colomer porte à leur moment de visibilité. Dans cette à la manière du néoréalisme, la supercherie de la modernité œuvre, le recours elliptique à la prise de vue constitue la stratégie par architecturale, mais encore de la déplacer vers une certaine esthétique laquelle il pose le différentiel narratif et visuel. Tandis que dans Brasilia et Barcelona, les parcours de la caméra tendent vers l’effacement des 1997) – y fonctionne grâce à la disproportion entre la conception limites urbaines, dans Osaka, le mouvement de la prise de vue sur elle- artistique et la scénographie d’une part, et l’échelle et l’espace d’autre même définit une tout autre tessiture émotionnelle et symbolique. part. Contrairement aux cas précédents, ce sont ici les objets ou les La série Anarchitekton est un moment de synthèse qui permet personnages qui introduisent la dislocation formelle et symbolique. d’identifier les structures « narratives » des vidéos et vidéos-installations Dans Simo, la naine marque la limite entre ce qui fonctionne comme de Colomer. Comme j’ai essayé de le démontrer plus haut, dans l’espace qu’elle habite, et la ruine urbaine comme métaphore du paysage ses œuvres, la relation entre plan général et plan moyen, associée contemporain ; le transfert de ce qui apparaît énorme pour elle – les à la performance de l’acteur et à l’utilisation symbolico-plastique chaussures – s’atténue vers la fin de la vidéo, juste au moment où des maquettes, produisent un système de déplacements imaginaires sur l’entassement des boîtes, une maquette apparaît : de nouveau, la et sémantiques, dans lequel les rêves de la modernité sont démontés par dissolution de l’échelle comme dispersion et échange entre la réalité la subjectivation de l’affect, à travers l’action perçue comme situation et le rêve. Enfin, dans la vidéo En la pampa (2008), à la manière dispersive. C’est sûrement pour cette raison que le jeu d’échelles ne d’un road movie, le chemin et le paysage sont perturbés par le se limite pas à un aspect formel du travail de Colomer ; il est aussi dialogue inattendu et la présence d’éléments oniriques – un sapin de iconographique et symbolique, mais surtout pulsionnel. Et sûrement Noël artificiel qui tombe en morceaux à mesure que les personnages pour cette raison encore, le corps apparaît comme la limite, à la fois marchent dans ce désert –, jusqu’à transformer le site en un espace qui figurative et formelle, où s’accomplit le différé du signifiant de ses s’estompe, où les limites entre l’aspect purement matériel des objets et œuvres. Les relations d’échelles entre paysage, maquette et corps leur dimension fantasmatique sont indiscernables. En la pampa est fonctionnent comme un jeu de dédoublements et de répliques dans probablement le travail qui s’éloigne le plus, du point de vue stylistique lequel se produit le déplacement entre le plan du réel et celui du et conceptuel, d’une certaine constante que l’on peut retrouver dans surréel, sans toutefois abandonner le moment pulsionnel de l’action, toute l’œuvre de Colomer. Cette distanciation permet d’approfondir c’est-à-dire, sans omettre l’aspect physique ou corporel imbriqué dans la forme et le sens du déplacement et du transfert de ses vidéos. ses élans naturels et vitaux originels. En une première approche, Peut-être la différence se trouve-t-elle dans le fait que dans il est donc possible d’affirmer que le travail de Colomer s’explique, En la pampa, Colomer explore le plan-séquence en tant que champ au niveau structurel, par les relations entre échelle, figure, temps et de force et tension de l’image. Une exploration qui suppose aussi narration, comme une poétique de la superposition et du déplacement. un déplacement du pulsionnel vers l’affectionnel/affectif de l’image. 261 Partant de cette stratégie, nous pouvons entreprendre la lecture À la différence de la série Anarchitekton ou de pièces comme Simo d’autres œuvres dans lesquelles Jordi Colomer explore différents ou Pianito, le plan-séquence général, associé à l’errance des deux registres de pulsion de l’image comme distension esthétique. On peut personnages sur la route et dans le désert, produit une pure distension distinguer quatre configurations esthético-cinématographiques. D’abord, de la durée de l’action, où les dialogues et les rares actions réalisées celles qui sont liées au travail de travelling continu : l’artiste y établit par les acteurs fonctionnent plus comme une tension de l’affect que une zone liminaire entre l’aspect constatatif de l’image et son transfert comme un changement du plan de la réalité ; c’est-à-dire, comme onirique. Dans Le Dortoir (2002), en contrepoint des personnages un événement sans causalité qui, par cette absence, libère le pur endormis, le chaos qu’ils habitent, la façade d’un immeuble moderne flux de conscience des relations entre contexte, dialogue et action. en arrière-plan et le mouvement incessant de la caméra d’un côté à Ainsi, par exemple, le fait de laver une voiture couverte de sable l’autre et de haut en bas, produisent davantage une pure distension du tout en sachant qu’elle en sera aussitôt recouverte à nouveau, ou temps de l’image qu’une histoire. Ensuite, les configurations qui, en la réitération de la phrase « parce que l’errance en rase campagne se fondant sur un travail d’édition et de montage, interviennent dans est évidemment déprimante, et les interventions du hasard y l’espace de présence du cadrage avec des textes et des effets de picture sont plus pauvres que jamais3 », fonctionnent dans un contexte in motion, afin de retarder la perception et de convertir le texte en où le sens est évacué au profit d’une distension de l’action : entre une chorégraphie sémantique de répétition. L’aspect réel de l’image le paysage, le dialogue et l’action, on ne raconte aucune histoire, – un paysage, par exemple – devient presque un énoncé sur la feuille mais un affect est en tension, comme pure temporalité de l’image. blanche où il s’inscrit (Un Crime, 2004) ; ou bien l’action est narrée En somme, s’il y a une constante dans les œuvres de Jordi à rebours de la séquentialité du temps linéaire afin de réinscrire une Colomer, c’est la relation établie avec un système dialectique histoire dans un espace onirique. Ainsi, dans Fuegogratis (2002), de proportions et d’énoncés qui, tout en partant d’une certaine le montage en sens inverse du tournage disloque les référents de prétention de réalité de l’image, déplace progressivement le sens à l’image en créant une contraction/distension des objets et de l’histoire. travers un jeu d’échanges cinématographiques, formels, figuratifs Il est possible d’identifier un troisième type de configurations : le et sémantiques, où sont disjoints le petit et le grand, le dehors et le continuum de la prise de vue – exprimé aussi bien par un plan dedans, la proportion et l’échelle. Un déplacement qui, par ailleurs, fixe Pianito( , 1999) que par un travelling latéral pendulaire (Simo, ne peut s’expliquer sans l’idée du corps grotesque comme espace irréductible dans lequel se réalise la dislocation des référents. d’échelles représentent une stratégie esthétique qui active la forme C’est à Luis Buñuel que l’on doit la découverte de la clef de la relation monstrueuse et grotesque du corps et des objets. Enfin, dans la entre l’instinct et la modernité. Son naturalisme a réinscrit dans perspective des « histoires » et des personnages/acteurs, la distension l’image cinématographique la vie en tant que facteur de violence de l’action peut être envisagée comme un temps purement affectif ontologique de l’espace urbain. Ou du moins, la vie qui avait été et un moment d’autoreprésentation ou de reconnaissance. expulsée de la modernité, ce corps instinctif de Los Olvidados Simo en est peut-être le meilleur exemple. Les relations entre (1950) qui apparaît en premier lieu en opposition radicale à l’utopie le dedans et le dehors produites par la caméra équivalent à ce qui du progrès de l’architecture, en est la meilleure réalisation. C’est arrive, au niveau figuratif, entre le gigantisme et le nanisme des là, dans cet espace liminaire, que Buñuel situe le corps grotesque. corps et des objets. Comme je l’ai signalé plus haut, l’effacement Un corps converti, dans le travail de Jordi Colomer, par un jeu de la limite du sens et de la proportion des objets s’accompagne d’échelles où le monstrueux advient comme absurde. Un absurde d’une déformation esthétique et conceptuelle ; d’où le grotesque. qui opère dans la simultanéité et l’échange entre la taille du corps À quel moment les chaussures deviennent-elles trop grandes pour et les « sculptures » et objets. Il s’agit de l’échelle comme dispositif la naine ? Quand les boîtes cessent-elles de l’être pour devenir un d’instabilité figurative et sémantique à partir duquel subvertir les rêves paysage urbain en ruines ? C’est dans la « déformation » que s’active de l’urbanisme contemporain ; il s’agit en même temps de restituer la stratégie symbolique et narrative de cette vidéo, là où l’échange la pulsion vitale comme forme politique capable d’interrompre d’échelles et de référents fonctionne comme une caricature. Le le discours hégémonique du paysage urbain monumental. Ce n’est pas grotesque ne se trouve précisément là plus seulement dans le corps, seulement en raison du retournement de l’échelle et de la proportion mais se réalise aussi dans la démesure et la déformation des objets que le point extrême de ce paradoxe se révèle dans Anarchitekton, et des signifiants. Ainsi, parler de « Colomer au pays de Gulliver » Bucarest. Dans cette vidéo, Colomer ne se sert pas de l’échelle inversée signifie d’abord comprendre son œuvre comme un dispositif esthétique de la maquette et des relations entre le corps et le paysage, mais qui met en action un rêve inversé : dedans, la vie re-habite l’onirique utilise plutôt une bouteille de Coca-Cola que l’acteur promène dans et, avec lui, le corps. De là, le corps et ses disproportions. De là que la ville, comme symbole de la simulation. La déambulation a lieu ici l’échelle et les corps échangent leurs signifiants et les déplacent, dans le centre de Bucarest, où les immeubles sont des simulacres pour laisser advenir l’espace vital et onirique du monstre urbain. La postmodernes, de pures façades « décoratives » caractéristiques meilleure façon d’exprimer ce passage a peut-être à voir avec le corps, 263 de l’architecture des années quatre-vingt que s’était appropriée celui du géant et du nain à la fois, avec la mise en espace des limites Ceauşescu. Colomer mène ici à son terme une critique des relations entre le grand et le petit comme dispositif à partir duquel libérer entre ornementation et pouvoir, une critique des formes pastiche l’autre côté de la ville : celui en rapport avec la pulsion qui rattache qui sont l’apanage de la rhétorique monumentaliste de la dictature. l’origine à l’histoire et au devenir du présent. C’est sans doute pourquoi Ce paradoxe, en principe, comme le souligne Colomer lui-même, est le voyage au pays de Gulliver auquel nous invitent les vidéos de en relation avec le fait que ces édifices devaient affirmer la grandeur Colomer s’explique par les lignes invisibles tendues entre, d’une part, du pouvoir, mais cependant ne sont parvenus qu’à dévoiler l’ « ossature les paysages qui simultanément « représentent » l’urbain contemporain squelettique du béton » ; ce paradoxe, malgré un registre esthétique et, d’autre part, le paysage qui surgit comme une impulsion qui pourrait sembler postmoderne, se limite à montrer le côté aberrant antérieure à l’inconscient et qui, en surgissant, déborde la limite de la de la modernité du point de vue politique : celui où la postmodernité « représentation ». Là où le grand et le petit constituent un symptôme architecturale apparaît comme l’hyperbole des formes du pouvoir d’une force telle qu’il se déborde lui-même et, se faisant, se dé-forme. en tant que simulation et fantaisie ; un produit, au final, sans doute issu de la modernité dont les formes originelles sont la marchandise, 1 Gilles Deleuze, Cinéma 1. L’Image à la fonction sociale et politique mouvement, Paris, Éditions de des corps, des objets et des actions, pour le capitalisme, et la propagande, pour le communisme. autant de caractéristiques propres Minuit, 1983, p. 286. au type de plan moyen. La contradiction entre gigantisme et nanisme dans les œuvres 2 Gilles Deleuze, Cinéma 1. L’Image- de Colomer – qui fonctionne, dans un premier temps, comme un mouvement, Paris, Les Éditions de 3 C’est une référence à la « Théorie de Minuit, coll. “Critique”, 1983, p. la dérive », de Guy Debord, dans Les trope ironique, dans la mesure où elle se déploie sous forme d’image- 283. En d’autres termes, il définit la Lèvres nues, n°9, décembre 1956 et mouvement – s’achève par la libération des aberrations de la modernité. dislocation du corps dans l’horizon Internationale Situationniste, n°2, spatial et symbolique pour, en décembre 1958, et sur Internet : En ce sens, du point de vue de la théorie cinématographique (depuis retour, libérer l’espace émotionnel http://www.larevuedesressources. comme une sorte de dénonciation org/article.php3?id_article=38). la narration), on pourrait concevoir la relation entre nanisme et éthique et politique. L’opposition gigantisme des objets et des corps comme le dispositif esthétique et entre plan ouvert et plan moyen du néoréalisme, à la différence de l’op- conceptuel à partir duquel l’artiste démonte la fonction idéologique position classique du réalisme entre du paysage urbain. Du côté de la représentation et de la figuration, plan général et plan rapproché, permet au premier d’interrompre la il est possible de considérer que la disproportion et l’échange fonction utopique du paysage grâce “In the city which is being demolished or rebuilt, neo- realism makes any-space-whatevers proliferate -urban cancer, undifferentiated fabrics, pieces of waste ground- which are opposed to the determined spaces of the old realism.” Gilles Deleuze1

Jordi Colomer’s work enters the realm of the burlesque, appearing to the viewer as a jest and an enigma at once. His videos and video- installations are caricatures that set in motion a complex network of visual structures, narrative strategies, word plays and changes of scale, figuration and symbols, with hyperbole being perhaps what best defines them. This hyperbole, however, is somewhat more than a mere resource; it is a device that appropriates itself of one of the most exploited figures in the history of art – the body of the dwarf –, to use it or turn it into a giant and vice-versa, making the “deformed” body a poetic principle and an analogy of all dimensions – or perhaps more appropriately, of (dis)proportion – of space, objects and signifiers. In this relation between the small and the large, Jordi Colomer’s production uses ambiguity as both vertex and concept. The vertex upon which space unfolds and his representations hinge. The concept he uses to criticise or reflect on the landscape and scale and their discursive implications. In this dialectic between dwarfism and Jordi Colomer en el país gigantism, the artist construes an aesthetic in which the boundaries 265 between subjectivity and modern or contemporary urban space are de Gulliver. Escala, sueño y naturaleza. explored. Colomer works on “obscenity” of scale for its formal and symbolic as well as narrative and cinematic potential. His work is an exploration – but also a constant return trip – between cinematic styles and dramatic strategies that implement dislocation between affection, narration and meaning. In the cinematic sense, his videos can be explained as a drift from the vital, everyday moment of the event towards the symbolic oneirism of its significance. But in his dramaturgy, going against Aristotelian tradition, his works are the mise en “scene” of aimless actions where the actor/character serves as a deactivator of context and a mechanism for self-representation of the situation; as in Brecht, the actor is more important than the character he plays. If there is anything unsettling about Colomer’s videos, it is the strategies with which the artist deconstructs the forms of the contemporary urban landscape. In principle, this deconstruction most certainly has to do with the relations between scale and body; more specifically, with the recasting of scale in relation to the grotesque body as a symbolic-aesthetic strategy with which to show the other side of the urban imaginary: its monstrosity. Going beyond the grotesque as an element of nature, Colomer plays, like a court jester –introducing the deformed in order to ridicule and criticise power­ – with the imaginaries of modernity to show their obscene facet: that of exceeding bounds. He plays with the dwarf and the monster, and with the giant and the monster. Hence perhaps it would neorealism, naturalism and surrealism that is present in Colomer’s be appropriate to speak of an aesthetic naturalism that reinstates work. I understand shift as the step from an “objective” condition the carnal and vital order of the body in the public space and thus, of the take, generally related to the social in cinema, to the image’s releases impulse as a factor of subversion and criticism. Colomer’s change of “plane of reality”, that is, to the forms of crystallization by video-installations are interruptions of the public space and its which the signifier’s significance is transmuted. The shot transitions function of lending significance and meaning. On the basis of an from the real to oneiric plane of figuration entail this shift from the aesthetic construction built upon an aesthetic of the take, stylistics real to the surreal. Nonetheless, when this transition uses the material of scale, a of the body and a Brechtian dramaturgy, his nature of impulse, not only is an oneiric figuration produced, but also a production combines cinema, sculpture and iconography to configure vital deformation, a corporeal disruption. Hence, precisely, the ideas of a strategy of interpreting the landscape that goes beyond utopia and the dwarf and the monster: they are bodies half-way between objective the ruin of modernity. He invites the viewer to approach the site of data on situation and the symbolic figuration of the oneiric; they are the vital impulses underlying life in modern cities. He does this using a boundary where impulse is associated with the body to produce a a certain aesthetic register of the grotesque, where the body and change in both plane of reality and in “matter”. objects interrupt, or at least interfere for a moment in modern urban If the coincidence between long shot and urban landscape in and architectural utopias. In sum, in Colomer’s work, they operate via neorealism appears as ruin, and the medium shot as a space where a dual artistic mechanism: the visual moment of transition from one the ethical demand of subjectivity is enacted, Colomer seems to take cinematic shot to another and the actor’s performance moment, which this resource further, not only through the interplay of takes, but disalienates the situation. also by adding elements of a sculptural and iconographic order to his If anything defines Jordi Colomer’s work, it is his clear relationship cinematic strategy. In Barcelona (2002) and Brasilia (2003), from with cinema as an aesthetic strategy. Built upon the dialectic between the Anarchitekton series, the artist ironically appropriates himself of takes and montage, and upon the relationship between shot and emblematic buildings. He does this via shift in scale as a condition of reverse shot, his work could be considered a twist on neorealism. architectural dimension. This is an aesthetic-political shift in scale Whereas realism sought a landscape epic based on the correspondence signifier and a topographical dislocation of the architecture of an between the idea of progress, urban space and open form, neorealism urban landscape. These shifts/dislocations entail an aesthetic-political heightens these elements to call one’s attention to the “any space deterritorialisation of the urban imaginary, and therefore a criticism of 267 whatever”, where the open form shows the ruin or failure of modernity. the relations between form, function and context of that emblematic In addition, upon this background, it inscribes the accident, failure architecture. Plays on iconography, symbols, cinematography and and malaise of a society in deep crisis, namely, the Italian post-war performance function as a parody or caricature, as an ironic trope of society; a disruption of reverse shot over shot that deconstructs the the architectural and urban social imaginary. utopian nature that early cinema conceived itself as having. In this context, it is interesting to note the aesthetic and conceptual Jordi Colomer’s videos make more profound and complex the differential that can be observed in the video Osaka (2004), belonging qualities that Gilles Deleuze attributes to Italian neorealism. Of the to Anarchitekton. In contrast to the movement towards the urban five characteristics that the philosopher lists2, all of them, except outskirts of the other videos of the series, the path of the actor/model the “condemnation of the plot”, are fully present in the video- through a street of Osaka is elliptical. The repetition of the action and installations of the Anarchitekton series (2002-2004): “the dispersive the take as a narrative strategy is, here, a mechanism of irony on the situation, deliberately weak links, a voyage form, consciousness forms of the display and the simulacrum typical of the scenic aesthetic of clichés”. But Colomer achieves these elements through a shift of late modernity, as well as on the sense of phantasmagorical in the plane of reality in which this kind of takes is supposedly displacement of the inhabitants of high-tech cities. The important functioning. In Anarchitekton, the relationship between shot, action factor here is to emphasise the social and political differentials and the performance intervention(s) of the actor(s), combined with that Colomer contributes to the moment of visibility. In this piece, a dislocation and visual and semantic disruption of the scale done the elliptical resource of the take is his strategy for presenting the through the models of emblematic buildings of Osaka and Brasilia, for narrative and visual differential. While in Brasilia and Barcelona, the instance, produce a disruption of the plane of reality. Something that camera’s movement is directed towards the blurred bounds of urban not only allows the deconstruction, in the neorealist manner, of the space, in Osaka, the take moves back on itself, defining a distinct fallacy of architectural modernity, but also shifts it towards a certain emotional and symbolic mindset. aesthetic of the impulsive that lies somewhere between the monster The Anarchitekton series is a point of synthesis that allows the or the deformed that defines naturalism and the oneiric world of “narrative” structures of Colomer’s videos and video-installations to be surrealism. recognized. As I have attempted to demonstrate above, in his work, the I’ve insisted on the concept of a shift between realism and relationship between long and medium shot, together with the actor’s performance and the plastic, symbolic resource of the architectural pampa (2008), where, in the manner of a road movie, the unexpected models, produces a system of imaginary and semantic shifts, in which dialogue and the presence of oneiric elements – an artificial Christmas the dreams of modernity are deconstructed by the subjectivation of tree that gradually falls apart as the figures walk through the desert – the affect trough action seen as dispersive situation. Perhaps for this act upon the path and landscape until the place becomes a vague area reason, the interplay of scales is not only a formal register of his work, where the limits between the purely material aspects of the objects but also an iconographic and symbolic one, as well as and above all an and their purely fantastic nature become blurred. En la pampa is impulsive register. Perhaps for this reason as well, the body appears as probably the work that most deviates stylistically and conceptually a boundary, at once figurative and formal, in which the differentiation from a certain constant that can be followed in his art. This distancing of the signifier is effected. The scale relationships between landscape, allows us to delve into the form and meaning of shift and transfer in model and body function as an interplay of bilocations and replicas, his videos. where a shift is produced between the real and the surreal, but without Perhaps the difference lies in the fact that in En la pampa, Colomer abandoning the impulsive moment of action, that is, without relegating explores the sequence shot as a field creating tension and force of the physicality or corporeality that is trapped within its originary, image. An exploration which also involves a displacement of the natural and vital impulses. In an initial approach, Colomer’s work image as impulse by the affectional/affective aspects of image. As can be explained on a structural level through the relations among opposed to the Anarchitekton series and Simo or Pianito, the major scale, figure, time and narration, like a poetry of superposition and sequence shot, together with the two characters’ wandering along displacement. the road and the desert, produces a pure distension of the duration On the basis of this strategy, we can undertake a reading of of the action, where the dialogues or few actions carried out by the other pieces in which Jordi Colomer explores different registers of the actors function more as affective tension than as a change in the image’s impulse as an aesthetic distension. There are four recognizable plane of reality; that is, as an event that has no causal explanation filmic-aesthetic configurations. First, those relating to the continuous and therefore liberates the pure stream of consciousness of relations travelling technique in which the artist establishes an interstitial zone between context, dialogue and action. The act of washing a car covered between the descriptive aspect of the image and its transferral into with sand knowing that it will just get covered again, for instance, the oneiric realm. In Le Dortoir (2002), in contrast to the sleeping or the reiteration of the phrase “because wandering in open country figures, the chaos where they live, the façade of a modern building in is naturally depressing, and the interventions of chance are poorer 269 the background and the continuous movement of the camera from one there3”, function in a context of emptying of meaning in exchange for side to the other and upwards, instead of producing a story, cause a distended action: landscape, dialogue and action together do not tell a pure distension of the time-image. Then, those that, through editing story, but create affective tension as pure temporality of the image. and montage, intervene in the space of the presence of the frame using In sum, if the works of Jordi Colomer have a constant, it certainly texts and picture in motion effects, in order to delay perception and has to do with a dialectical system of proportions and statements convert the text into a semantic choreography of repetition. The real that, based on a certain pretension to reality of the image, gradually aspect of the image – a landscape, for instance – nearly becomes the shift the meaning through an interplay of filmic transitions, formal, blank paper within which a statement is framed (Un Crime, 2004); figurative and semantic, where large and small, inside and outside, or where the action is narrated against the flow of linear time to proportion and scale are dislocated. A shift, moreover, that cannot be transport the narration to an oneiric space. So, in Fuegogratis (2002), understood without the idea of the grotesque body as an impregnable the backward editing of the recording dislocates the image referents, place where the dislocation of referents is effected. creating contraction/distension of objects and narrative. A third Luis Buñuel can be attributed the discovery of the relationship aesthetic register can also be recognized, in which the continuum between instinct and modernity. His naturalism reinserted life in the of the take, whether static (Pianito, 1999) or in lateral travelling filmic image as a factor of the ontological violence of urban space. shots using pendular movement (Simo, 1997), functions due to the In any case, the type of life that was expelled from modernity, the disproportion of art design and set with scale and space. In contrast instinctive body of Los Olvidados (1950) that appears in close-up as to the art design and set, in the latter, it is the objects or characters being in radical contrast to the utopia of architectural progress, is his that introduce formal and symbolic dislocation. In Simo, the dwarf best work. There, in that liminal space, Buñuel placed the grotesque marks the boundary between what functions as a space she inhabits body. A body converted by Jordi Colomer into an interplay of scales and the urban ruin as a metaphor of the contemporary landscape; the where the monstrous arises as the absurd. An absurd as simultaneity transferral of what seems enormous on her – the shoes – diminishes and exchange of the body’s size with that of the “sculptures” towards the end of the video, at the point when a model appears in and other objects. The scale is used as a mechanism of figurative the pile of boxes: once more, the dissolution of scale as the scattering and semantic instability through which to subvert the dreams of and transition between reality and dream. Finally, the video En la contemporary urban planning; and, at the same time, restore vital impulse as a political form of interruption of the hegemonic discourse above all means understanding his work as an aesthetic device that of monumental urban landscape. This paradox is taken to an extreme triggers an inverse dream: a dream where life reinhabits the oneiric in Anarchitekton, Bucarest, not only due to the reversion of scale and and the body along with it. Hence the body and its disproportions. proportion done by Colomer. In this video, the artist does not rely on And hence the fact that scale and bodies interchange and shift their the inverted scale of the model and its relationship with the body and signifiers to give rise to the vital and oneiric space of the urban landscape, but rather uses a bottle of Coca-Cola that the actor takes monster. Perhaps the best way to express this transition has to do with through the city as a symbol of simulation. The aimless wandering the body, simultaneously gigantic and dwarfish, with the framing of here is through the centre of Bucharest, where the buildings are the boundaries between large and small as a device through which simulacra of the post-modern, purely decorative façades so typical to liberate the other side of the city: the one that has to do with of the eighties and their appropriation by Ceauşescu. Here, Colomer the impulse that connects the origin with the history and evolution criticises the relationship between the ornamental and power, a of the present. Perhaps this is why the trip to Gulliver’s world on critique of the pastiche forms inherent to the monumentalist rhetoric which Colomer’s videos invite us to embark can be understood as of the dictatorship. A paradox that, in principle, as Colomer himself a network of invisible lines extending between the landscapes that indicates, refers to the fact that these buildings were supposed to simultaneously “represent” the contemporary urban landscape and the demonstrate the grandeur of those in power, whereas they only landscape that emerges as an impulse previous to the subconscious, managed to reveal a “skeletal framework of concrete”; a paradox and which breaks the bounds of “representation” when it emerges, that, though it can be ascribed to the aesthetic register of the post- making the large and small a symptom so strong that it goes beyond modern, simply shows the aberrant side of modernity with respect to bounds and, in doing so, becomes distorted. the political sphere, where postmodern architecture appears as the hyperbole of the forms of power insofar as simulation and fantasy; the latter certainly being a product of modernity whose original forms are merchandise in capitalism and propaganda in communism. Though in principle it functions as an ironic trope, the contradiction between gigantism and dwarfism in Colomer’s art, insofar as it is deployed in the movement-image, results in liberation from the 271 aberrations of modernity. In this respect, from the perspective of cinematic theory (narration), the relationship between dwarfism and gigantism of the objects and bodies could be considered as the conceptual aesthetic device through which the artist deconstructs the ideological function of the urban landscape. From the perspective of representation and figuration, the disproportion and scale interchange can be considered an aesthetic strategy that activates the monstrous, grotesque form of the body and objects. And finally, from the 1 Gilles Deleuze, Cinema 1: The 3 This phrase is a reference to Guy perspective of the “stories” and the characters/actors, the distension of Movement-Image (1983), trans. Debord’s “Theory of the Dérive”, in Hugh Tomlinson and Barbara Internationale Situationniste #2, the action can be considered pure affective time and moment of self- Habberjam, 1983, London, The 1958. Translation by Ken Knabb, representation or recognition. Athlone Press, 1986, p. 212. 1977.

Simo is perhaps the best example of this. The relationships 2 Gilles Deleuze, Cinema 1: The produced by the camera between inner and outer is equivalent to what Movement-Image (1983), Trans. Hugh Tomlinson and Barbara happens at the figurative level between gigantism and dwarfism of the Habberjam, London: The Athlone Press, 1986, p. 210. In my terms, body and objects. As I stated above, the blurring of the boundaries of it expresses the dislocation objects’ significance and proportions is accompanied by an aesthetic of the body in the spatial and symbolic horizon, while freeing up and conceptual deformation; whence the grotesque. At what point the emotional space as a form of do the pair of shoes become too large for the dwarf? When the boxes ethical and political condemnation. The juxtaposition of the long and stop being boxes to become urban landscape in ruins? “Deformation” medium shots in neorealism, as op- posed to realism’s classical contrast activates the symbolic and narrative strategy of this video at the of long and close-up shots, allows point where the interchange of scales and referents functions as a the former to interrupt the utopian function of landscape by means of caricature. At that point, the grotesque can be found not only in the the social and political functions of body, but also in the disproportion and deformation of objects and bodies, objects and actions, char- acteristics of the medium distance signifiers. Therefore, speaking of “Colomer in the land of Gulliver” shot. generique

Anarchitekton (Barcelona, Bucarest, Brasilia, Osaka) Fuogogratis No Future 2002-2004 2002 2006, vidéo et …XX Vidéo et salle de multi-projection, master en Vidéo et salle de projection, dimensions DV-CAM, 4 DVD, éditée en boucle, édition de 5 ex. variables, master en Betacam digital, copie en Structure métallique / Metallic structure : 440 x et 1 copie HC. DVD, 5 min., éditée en boucle, édition de 3 ex. et 150 x 15 cm ; enseigne / sign : 375 x 160 x 20 cm / Video and multi-projection room, master in DV- 1 copie HC. (NO ?) et 150 X 270 x 20 cm (FUTURE !), et / and CAM, 4 DVD, edited in buckle, edition of 5 copies / Video and projection room, variable size, master Renault 25 : 462 x 140 x 177 cm. and 1 copy RS. in Betacam digital, copy on DVD, 5 min., edited in buckle, edition of 3 copies and 1 copy RS. Rémy Julienne, Universtunt (Chalette-sur-Loing, Idroj Sanicne : Interprétation / Performer France) : Préparation de la voiture / Preparation Marc Viaplana (Ramone) : Photographie / Marieta Orozco : Le couple, elle / The couple, she of the car Photography Juan Marquez : Le couple, lui / The couple, him Didier Rouy, Publidéco (Caen, France) : Barry Paulson, Alberto Peral, Jordi Colomer, Jordi Antonio Cortés : Directeur de la photographie / Réalisation de l’enseigne / Realization of the light Encinas : Maquettes / Models Director of photography Radu : Production Bucarest / Bucarest production Bernardo Porraz : Assistant à la direction et Production: Le Spot (Le Havre, France) - Arts Luis Fernando Campiello : Production Brasilia / production/ Assistant director and production Le Havre Biennale d’art contemporain 2006 Brasilia production Jordi Encinas : Design de goldenshower / (France) - Maravills (Barcelona, España) Adolf Alcañiz/Metronom-Lab : Post-production Goldenshower design image / Image post-production Efectes Linuesa : Feu / Fire Daniel Perrier : Graphiste décor / Set graphic Prototipos Production: Maravills (Barcelona, España) design 2004, Carton, plâtre, aluminium, métal, Avec le soutien de / In collaboration with: Barry Paulson, Jordi Encinas, Cesar Merino : ampoules, table (120 x 400 x 70 cm) ; Embajada de España en Brasilia, Generalitat de Construction des décors / Set construction dimensions variables. Catalunya-Departament de Cultura (Barcelona, Alexandra Filiatreau : Costumes / Costume design Collection de l’artiste España), Fundación Marcelino Botín (Santander, Marc Viaplana (Ramone) : Photographie de …XX España). plateau / Still photography Collection: f r a c Bourgogne (Dijon, France), m a c b a 273 Cesar Merino : Régisseur / Stage Manager Papamovil (Barcelona, España). Silvya Bayarri : Opérateur 2e caméra / 2nd 2004, Carton, plâtre, aluminium, métal, camera operator ampoules, table (120 x 400 x 70 cm) ; Sculptures/installations : Axel Marin : Opérateur de steadycam / dimensions variables. Anarchitekton Barcelone (Torre Agbar), 2004, Steadycam operator Collection de l’artiste carton, bois, 305 x 60 x 60 cm. Collection de Mercè Boussy : Assistante de steadycam / …XX l’artiste. Steadycam assistant Anarchitekton Bucarest, 2003, carton, bois, 190 Joaquim Dalmau, Pau Font : Électriciens / Père coco et quelques objets trouvés en 2001 x 62 x 60 cm. Collection de l’artiste. Electricians 2002 Anarchitekton Barcelone 1 (Sta. Coloma), 2002, Tatiana Thaurin : Maquillage / Make-up Vidéo et salle de projection, dimensions carton, bois, 207 x 61 x 41 cm. Collection f r a c Walter Friedrich : Restauration / Catering variables, master en DV-CAM, copie en DVD, 5 Centre, Orléans. In-Audiovisuals : Post-production vidéo / Video min., éditée en boucle, édition de 3 ex. et 1 copie Anarchitekton Barcelone 2 (Diagonal mar), 2002, post-production HC. carton, bois, 295 x 82 x 54 cm. Collection f r a c Arte y ruido : Production audio / Audio production / Video and projection room, variable size, master Centre, Orléans. Nono Ruiz : Design audio / Audio design in DV-CAM, copy on DVD, 5 min., edited in buckle, Anarchitekton Barcelone 3 (Bellvitge), 2002, July Ortiz : Effets sonores / Sound effects edition of 3 copies and 1 copy RS. carton, bois, 155 x 134 x 27 cm. Collection f r a c Dreamall Orquesta : Musique / Music Centre, Orléans. Alts Forns : Studios d’enregistrement / Recording Idroj Sanicne : Père Coco studios Marc Viaplana (Ramone) : Photographie / Eduardo Olivé : Arrangements / Arrangements Photography In-Audiovisuals : Post-production vidéo / Video Arabian Stars Production: La Galerie (Noisy-le-Sec, France) - post-production Maravills (Barcelona, España) 2005 Remerciements / Acknowledgements: Quico Production: Le Grand Café (Saint-Nazaire, France) Vidéo et salle de projection. Master : HD-CAM. Rivas, Lola, I els 3 Bombers de Guissona - Maravills (Barcelona, España) Édition de 5 ex. et 1 EA. 38 min. Couleur. Stéréo Avec le soutien de / In collaboration with: Bureau (LR) des objets trouvés de la Ville de Saint-Nazaire / Video and projection room. Master : HD-CAM. (France). Edition of 5 copies and 1 AP. 38 min. Colour, stéréo (LR).

David Amell : Caméraman / Cameraman Sergi Olivares : Photographie / Photography graphicdesign Adeline Dini. Llobell, Francesc Malpesa, Mireya Masó, Virginia Alexandra Filiatreau, Luiz Fernando Campiello : Marc Viaplana (Ramone) : Photographie de Give me sound : Son / Sound Marx, Montse Matutano, Connie Mendoza, Quim Production exécutive / Production during the plateau / Still photography Tracking : Post-production image / Image post- Nolla, Rosa Novell, Adrià Olivares, Sergi Olivares, shot Tatiana Thaurin : Maquillage / Make-up production Marie Patou, Margarita Patou, Nina Pawlowski, Adolf Alcañiz (Metronom-Lab) : Édition vidéo / Luis Bisbe, Serafín Rodriguez, Walter Friedrich, Jaume Parera, Carlos Pazos, Javier Peñafiel, Video edition Alexandra Filiatreau : Construction des décors / Production: École nationale des Beaux-Arts de Alberto Peral, Julián Perrier, Carla Punset, Serafín Viuda Xing Pirata : Post-production audio / Post- Set construction Lyon (France) - Le Grand Café (Saint-Nazaire, Rodríguez, Nono Ruiz Daroca & July, Jaume production audio Oscar Isaach, Franco Jacometti : Électriciens / France) - Maravills (Barcelona, España) Sandoval, Paloma Unzeta, the dog Terry. Infinia : Post-production vidéo / Post-production Electricians Remerciements / Acknowledgements: Frédéric video Julio Barbod, Daniel Correa, Jesús Pages : Namiand Production: m a c b a (Barcelona, España). Ibercin : Equipements / Equipment Hight Machinistes / Key grip Remerciements / Acknowledgements: Audio- Definition Arte y ruido, Nono Ruiz : Production audio / Audio Lines, Croquis, Meñique, Metrònom, Wall-Video. Claire Mortimer (Años Luz, Barcelona), Gold production Orden nuevo Collection: m a c b a (Barcelona, España), n m k s l w Moore Tours, Sana’a : Yémen production / Yemen July Ortiz : Effets sonores / Sound effects [L’ordre nouveau] (Wien, Österreich), m n c a r s (Madrid, España). production Dreamall Orchestra : Musique / Music Mohamed Nagui Atef : Traducteur / Translator Alts Forns : Studio / Studio 2000 Acier, bois, suspension luminaire, toile Abdul Gawy Hidriy, Fuad Hamod : Chauffeurs / Eduardo Olivé : Arrangements / Arrangements de coton écrue. Table : 120 x 140 x140 cm ; 2 (un crime) Drivers Sophie Goupil : Productrice déléguée / Production éléments : 86 x 70 x 70 cm chacun. Rasam Al Kata, Fuad Hamod, Mohamed Nagui : Supervisor Collection privée, Porto. 2004 Peintres / Painters Marta Figueras : Productrice exécutive / …XX Vidéo et salle de projection, master en HD- Ahmed Alhabi : Inspecteur, Ministère de Executive Producer CAM vidéo, copie en DVD, 4’40’’, 5 exemplaires l’Information du Yémen / Inspector, Ministery of Cesar Merino, Sergio Olivares, Alexandra numérotés de 1/5 à 5/5 et i HC. Information of Yemen Filiatreau, Barry Paulson : Assistant / Assistant Simo Commande publique du Centre national des La Truka / In-Audiovisuals : Post-production vidéo arts plastiques (c n a p , Paris, France). Tourné à Production: William Jeffett for the Salvador Dalí / Video post-production 1997 Cherbourg (France), juillet 2004. Museum (St. Petersburg, Florida, USA) - Hank Mas Madera : Studio / Studio Vidéo et salle de projection, dimensions / Video and projection room, master in HD-CAM Hine, director, Espacio 1, Museo nacional Centro Servicevision : Machinerie / Equipment variables, master en Betacam SP, copie en DVD, vidéo, copy on DVD, 4’40’’, 5 numbered copies de Arte Reina Sofia (Madrid, España) - Maravills Amalgama : Lumière / Lighting 12 min., éditée en boucle, édition de 3 ex. et 1 from 1/5 to 5/5 and i HC. (Barcelona, España) Solidança : Accessoires / Set and props copie HC. Public order of the c n a p (Paris, France). Shooted in Remerciements / Acknowledgements: Frank Orus : Bières / Beers Video and projection room, variable sizes, master Cherbourg (France), July 2004. Wolinski, w e d (Tampa, Florida) in Betacam SP, copy on DVD, 12 min., edited in Production: Les Poissons volants (Paris) buckle, edition of 3 copies and 1 copy RS. Antonio Cortés : Camera Avec le soutien de / In collaboration with: Atelier Alexandra Filiatreau, Le Point du Jour Centre Babelkammer Jean Nouvel (Paris), Expo 02 (Suisse), Agence Pilar Rebollar : Simo d’art/Éditeur: Equipe de production / Production …XX d’artistes du Centre culturel contemporain (c c c , Toni Andreu : Assistant à la direction / Assistant team Tours, France), Maravills (Barcelona, España), director Sergi Olivares : Photographie / Photography Generalitat de Catalunya-Departament de Cultura Rosa Novell : Direction des acteurs / Direction Claire Le Breton : Production des lettres / Letters (Barcelona, España). of actors production Le Dortoir Remerciements / Acknowledgements : Frederic Marcos Pasquín : Directeur de la photographie / David K’Dual : Vtr ?????? Page, Hangar, Quico Rivas, Galeria Carles Taché Director of photography François Potier, Viviane Liaudet : Making Of 2002 (Barcelona, España), Galerie Michel Rein (Paris, Pep Duran, Nina Pawlowski : Costumes / Costume Christine Cenent, Daniel Couppey, Marie Christine Vidéo et salle de projection, master en Betacam France). design Lebourgeois, Liliane Vannier, Allice Dourlen, digital, copie en DVD, 10 min., éditée en boucle, Collection: f n a c (Fonds national d’art Joan Alonso : Maquillage et coiffure / Make-up Bartolomé Sanson, Aurélien Le Peutrec, Martin édition de 3 ex. et 1 copie HC. contemporain, Paris), c a a m (Las Palmas de Gran and hair styling Smith, Daniel André, Jacques Mielnicki, Julie / Video and projection room, master in Betacam Canaria, España), Museo de arte contemporáneo Connie Mendoza, Jaume Parera : Accessoires / Queré, Gérard Philippe Bihina : Interprétation / digital, copy on DVD, 10 min., edited in buckle, de Castilla y León (León, España). Set and props Performer edition of 3 copies and 1 copy RS. Yamandú Canosa : Assistant aux accessoires / François Paillaute : Gardien s n c f / s n c f guard Set and props assistant Adolf Alcañiz (Metronom-Lab) : Édition vidéo / Sophie Goupil, Alain Julien-Laferrière présentent Les Villes Paloma Unzeta : Assistant à la production / Video edition / present : Production Assistant Infinia : Post-production vidéo / Video Post- Les dormeurs / The sleepers: 2002 Manolo Cortina : Chef machiniste / Key grip production Ana María Bretón, Laura , Sulin Prado, Silvia Vidéo et salle de projection, master en DV-CAM, Ana Mendoza : Restauration / Catering Viuda Xing pirata : Post-production audio / Post- Martín, Merida Mc Carthy, Alba Leat, Jimena double projection, 2 DVD, deux fois 2 min. en Enric Berenguer : Photographie de plateau / Still production audio Posada, Andres Loewe, José Gutierrez, Ahamed boucle., édition de 3 ex. et 1 copie HC. photography Agha, Cisco Aznar, Carlos Fernandez, Pau Taché, Video and projection room, master in DV-CAM, Sayago : Post-production vidéo / Video post- Production: c n a p (Centre national des arts Andrés Puig, Montserrat Nogareda, Alexandra double projection, 2 DVD, two times 2 min. in production plastiques, Paris) - Maravills (Barcelona, Filiatreau, Serafín Rodriguez, Franco Jacometti. buckle, edition of 3 copies and 1 copy RS. Give me sound : Production audio / Audio España). production Idroj Sanicne : Le grimpeur / The climber Adeline Dini : Interprétation / Performer Figuration / Extras: Remerciements / Acknowledgements: Brittanie Antonio Cortes : Directeur de la photographie / Avec la collaboration des étudiants de Ahmed Ahrad, Carmen Balcells, Enric Berenguer, Ferries, Commandant Kernoncuff, Commandant Director of photography l’École nationale des Beaux-Arts de Lyon / Mercedes Borges, Agustina Calsina, Yamandú Quéré, Johann Schulz, David Prunier, École des Bernardo Porraz : Assistant à la direction / In collaboration with the students of the e n b a Canosa, Alex Júlia, Josep i Jordi Colomer Jr, Beaux-Arts de Cherbourg, Galerie Michel Rein Assistant director (Lyon): Ana Maria Gomes, Anne Kawala, Samuel Montse Cuchillo, Pep Duran, Jordi Encinas, (Paris). Jordi Encinas : Chef décorateur / Set director Kurzawski, Agathe Notteghem, Joëlle Perin, César Giravent & Cella, Anna Guarro, Nacho Yamandú Canosa : Graphiste décorateur / Set Mitsuo Sasaki, Sandra Tavernier, Isaure Vidalin, Hernando, William Jeffett, Josep Llobell, Roc BIOGRAPHIE / biography Expositions personnelles / Personal exhibitions Expositions collectives / Group exhibitions Nos rendez-vous (3), Galerie Michel Rein, Paris Exposiciones colectivas / 2005 (France) Statement, Galerie Traversée, Munich (Deutschland) 2000 2008 Insensé Espagne, Chez Colette, Paris (France) El canto del gallo, Galería Juana de Aizpuru, Madrid Jordi Colomer est né en 1962 à Barcelone, où il Jordi Colomer, Jeu de Paume, Paris (France) 1996 2008 Terra infirma, Espai art contemporani, Castello (España) a étudié l’art à la Escuela de Arte y Diseño (e i n a ), (Perfecte), Galería Carles Taché, Barcelona (España) Ne pas jouer avec des choses mortes, Villa Arson, Nice (España) Une mise en scène du réel : artiste/acteur, Villa Arson, l’histoire de l’art à l’Universitat Autònoma et 2007 (France) Richard Hamilton, Carlos Pazos, Hannah Collins, Jordi Nice (France) l’architecture à la Escola tècnica Superior (e t s a b). Il vit Prototipos, Château de Roussillon, Roussillon (France) 1995 Wandering in contemporary video art, Magazzini del Colomer, Galeria Cadaques 2, Cadaques (España) Desperate Optimists, Festival a/d Werf, Utrecht et travaille entre Barcelone et Paris. Para chicos y chicas, Galería y ediciones Gingko, Sale, Musei Civici, Siena (Italia) Fantasmapolis. La ville contemporaine et ses (Nederland) Architecte de formation, il se consacre à ses débuts 2006 Madrid (España) imaginaires, Université de Rennes, Rennes (France) à la sculpture, puis il se tourne essentiellement vers The Prodigious Builders, Galerie Traversée, München Nueva geografia dorada, Studio Meyetta, Barcelona 2007 Avenir des villes, Site Alstom, Nancy (France) Txomin Badiola-Jordi Colomer, Spanish Pavilion, Expo la vidéo et la photographie à partir de 1997. Depuis sa (Deutschland) (España) Continuous temporality, Israeli Center of Digital Art, Discursos interrumpidos, Sala Puertanueva, Cordoba 2000, Hannover (Deutschland) première exposition personnelle en 1986, il expose Mas estrellas, Centro cultural de España, Montevideo Perfecto und andere arbeiten, Galerie Mosel und Holon (Israël) (España) Finisternis/Finisterre. Colomer, Huygue, Gordon, régulièrement à travers le monde ses installations (Uruguay) Tschechow, München (Deutschland) Ida e volta: ficção e realidade, Fundação Gulbenkian, Fondazione Teseco, Pisa (Italia) vidéographiques constituées de structures Anatopies, Cimaise et Portique, Hôtel de Viviès, Lisboa (Portugal) 2004 Trasvases. Artistas españoles en vídeo, Centro de architectoniques et de projections qu’il définit Castres (France) 1993 Façades, Krannert Art Museum, University of Illinois, Brooklyn Euphoria, Volume, Parker’s Box Gallery, Cultura Español de Lima (Perú) / Museo de Arte lui-même comme des “sculptures dilatées” dans No Future, Le Spot, Le Havre (France) Gandy Gallery, Stredoceske Museum, Praha (Czech Champaign-Urbana (u s a ) Brooklyn, New York (u s a ) Moderno de Buenos Aires (Argentina) / Museo de Arte l’espace et dans le temps. Il a également collaboré, Republic) Instant City, Abbaye de Fontevraud, Fontevraud Poesie, Galerie Mosel und Tschechow, Munich Carrillo, México D.F. (México) en qualité de scénographe, aux pièces théâtrales 2005 Alta Comedia, Tinglado 2, Tarragona (España) (France) (Deutschland) Mostra d’arts électròniques i vídeo, Centre d’art Santa de Joan Brossa, Samuel Beckett, Valère Novarina et (un crime), f r a c Basse Normandie, Caen (France) Entre Cajas, Galería Juana de Aizpuru, Madrid (España) No Future, Bloomberg Space, London (England) 4a Biennal Leandre Cristòfol, La Panera, Lleida Mònica, Barcelona (España) Robert Ashley, et a participé à de nombreux ateliers Arabian Stars y otras estrellas, Galería Juana de Existencias, m u s a c , León (España) (España) et séminaires. Aizpuru, Madrid (España) 1992 Utopies quotidiennes, La Centrale électrique, Ficcions documentals, Caixa Forum, Barcelona 1999 Il est représenté par les galeries Michel Rein (Paris), Arabian Stars, Galerie Michel Rein, Paris (France) Detalles, Galería Juana de Aizpuru, Sevilla (España) European Center for Contemporary Art, Bruxelles (España) Côté Sud. Entschuldigung, Centre d’art contemporain Carlos Taché (Barcelone), Juana de Aizpuru (Madrid), Arabian Stars, Traces, Salvador Dalí Museum, St. De particular a particular, Galería Carles Taché, (Belgique) Your private sky, Xing, Bologna (Italia) La Ferme du buisson, Noisiel (France) Traversée (Munich) et Olivier Meessen (Bruxelles) ; Petersburg, Florida (u s a ) Barcelona (España) Barcelona 1947-2007, Fondation Maeght, Saint-Paul Dispersions, Bass museum of art, Miami (u s a ) I Remember, Gandy Gallery, Praha (Czech Republic) son œuvre est également présente dans plusieurs Arabian Stars, Espacio uno, Museo nacional Centro de Gold-Fishes, Shedhalle Rotefabrik, Zürich (Schweiz) de Vence (France) N(e)oretratos, Galeria Juana de Aizpuru, Madrid LMX, Caisse de Dépots et Consignations, Paris collections publiques. Arte Reina Sofia, Madrid (España) De particulier à particulier, Galería Carles Taché, f i a c Luxe, calme et V…, La Panacée, Montpellier (France) (España) (France) Jordi Colomer, Museo Patio Herreriano, Valladolid 92, Paris (France) Brasilia-Chandigarh-Le Havre, Musée Malraux, Le Climats, cyclothymie des paysages, Centre national Futoro Presente, Centro Cultural Plaza de España, (España) Havre (France) de l’art et du paysage, Vassivière (France) Comunidad de Madrid, Madrid (España) 1990 Video Spain Phe’07, Cuenca (España) Romanian artists (and not only) like the palace, En/entre límites, Galería Luis Adelantado, Valencia 2004 Schlafende (Opereta), Galerie Mosel und Tschechow, b r x l b r a v o , f n a c City 2, Bruxelles (Belgique) Muzeul national de arta contemporana, Bucuresti (España) Jordi Colomer, Institut d’art contemporain, f r a c Rhône- München (Deutschland) La Ricarda/Appropriation temporaire, Cultuurcentrum (Romania) Senyals públics, Apunts sobre intervencions Alpes, Villeurbanne (France) Como en casa, Museo Pablo Gargallo, Zaragoza Mechelen/ La Raffinerie, Kunstenfestival, Bruxelles Arquitecturas del sueño, Centro atlántico de arte artístiques a l’espai urbà, Can Palauet, Mataró (España) (Belgique) moderno, Las Palmas de Gran Canaria (España) (España) 2003 Repeat all, Centro cultural Matucana 100, Santiago Jordi Colomer-Kristina Solomoukha, Chapelle Saint Anarchitekton, Ecco, Brasilia DF (Brasil) 1989 (Chile) Jacques, Vendôme (France) 1998 Anarchitekton & Les Villes, Atheneum, Interface, f r a c Pensées y self-pensées, Galería Juana de Aizpuru, Escenaris transitables, Museu d’Art de Girona, Girona Situations construites, Attitudes, Centre d’art Ciudades sin nombre, Centro Cultural Plaza de España, Bourgogne, Dijon (France) Madrid (España) (España) contemporain, Genève (Suisse) Comunidad de Madrid, Madrid (España) Le Dortoir, Project Room, Centre de création Diamants tatoués, Musée Rimbaud, Charleville- Reflections, Galerie Traversée, Munich (Deutschland) Colecció m a c b a , Museu d’art contemporani, Barcelona Artificial, Figuracions Contemporànies, m a c b a , contemporaine, Tours (France) Mézières (France) (España) Barcelona (España) Liraelastica, Galería Rafael Samper, Valencia (España) 2006 Simo, Project Rooms, Galería Carles Taché, a r c o 98, 2002 What happens?, Dispari & dispari Project, Reggio 2003 Madrid (España) Le Dortoir, Murten, Expo 02, Fribourg (Suisse) 1988 Emilia (Italia) Anarchitekton, Art unknown, a r c o , Madrid (España) Côté Sud. 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José Luis Barrios Marta Gili Glòria Picazo José Luis Barrios Marta Gili Glòria Picazo Né à Mexico DF, licencié en philosophie et Née en 1957 à Barcelone, Marta Gili est Née en 1950, licenciée en histoire de l’art à Born in Mexico City, with a degree in Born in 1957 in Barcelona, Marta Gili is Born in 1950, Glòria Picazo holds a degree docteur en histoire de l’art de l’Université directrice du Jeu de Paume à Paris. Elle a l’Université de Barcelone, Glòria Picazo est philosophy and art history from the director of the Jeu de Paume in Paris. She in art history from Barcelona University nationale autonome de Mexico (u n a m ), José auparavant dirigé, entre 1991 et 2006, le directrice, depuis sa création en 2003, du Autonomous National University of Mexico previously directed the Photography and and has directed the La Panera art centre in Luis Barrios est critique d’art et commissaire département Photographie et Arts visuels de centre d’art La Panera à Lleida, en Catalogne. (unam), José Luis Barrios is an art critic Visual Arts Department of the La Caixa Lleida, Catalonia, since its opening in 2003. d’expositions. Il est également professeur la Fondation La Caixa à Barcelone. Diplômée Elle a fait partie du service des expositions and curator. He teaches at the Ibero- Foundation in Barcelona, between 1991 She was a member of the exhibitions service à l’Université ibéro-américaine de Mexico de l’Université centrale de Barcelone en au c a p c à Bordeaux, de 1993 à 1995, puis a été American University of Mexico City and at and 2006. After graduating in philosophy at the capc in Bordeaux from 1993 to 1995, et au département Philosophie et Lettres philosophie et psychologie, elle a participé, responsable du département de recherches the Philosophy and Literature Department of and psychology from Barcelona’s Central then ran the research department at macba, de l’u n a m . Depuis 2000, il dirige la revue entre 1983 et 1988, à l’organisation de la au m a c b a à Barcelone jusqu’en 1998. Elle a unam. Since 2000 he has been editor of the University, from 1983 to 1988 she helped Barcelona, up to 1998. She then worked on Curare et publie régulièrement dans le Primavera fotografica à Barcelone, et a ensuite travaillé à la réalisation d’expositions journal Curare, and he publishes regularly to organise the Primavera fotografica in organising exhibitions and books for the town Confabulario, supplément culturel d’El assuré la direction artistique du Printemps et de livres pour la Ville de Lleida où elle avait in Confabulario, the arts supplement of El Barcelona. She was artistic director of the of Lleida, where she helped set up the Leandre Universal, et dans des revues comme Exis et de Septembre à Toulouse en 2002 et 2003. Elle déjà, en 1997, participé à la création de la Universal, and in journals such as Exis Printemps de Septembre in Toulouse (France) Cristòfol art biennial in 1997. She publishes Fractal. Il a organisé, en 2005 à Mexico, “Mi écrit régulièrement dans la presse espagnole Biennale d’art Leandre Cristòfol. Elle publie and Fractal. In 2005 he organised in Mexico in 2002 and 2003. She writes regularly in regularly in journals such as Transversal, versión de los hechos” sur l’œuvre de Magali et a publié plusieurs ouvrages dont, en régulièrement dans des revues telles que City Mi versión de los hechos, about the the Spanish press and has published several L’Avenç and Exit Express. Lara au m u c a et le xe Salon d’art Bancomer 2006, Joan Colom. Raval (Steidl) et Graciela Transversal, L’Avenç et Exit Express. work of Magali Lara, at muca, and also books, including Joan Colom. Raval (Steidl) “Armas y herramientas”. En 2008, il assure Iturbide (Phaidon). the tenth Salon of Bancomer art, Armas y and Graciela Iturbide (Phaidon), both in le commissariat de “Asedio. Lo colosal- herramientas. In 2008 he curated Asedio. Lo 2006. François Piron tecnológico” pour le nouveau Musée d’art François Piron colosal-tecnológico for the new Museum of Born in 1972, François Piron is an art critic contemporain de l’u n a m . Jacinto Lageira Né en 1972, François Piron est critique Contemporary Art at unam. and curator. Between 2001 and 2006 he Jacinto Lageira est maître de conférences h d r d’art et commissaire d’expositions. Entre Jacinto Lageira codirected the Laboratoires d’Aubervilliers en esthétique à l’université Paris i Panthéon- 2001 et 2006, il a codirigé les Laboratoires Jacinto Lageira is a lecturer in aesthetics at (France). He is currently involved in Marie-Ange Brayer Sorbonne et critique d’art. Il a en particulier d’Aubervilliers. Il participe actuellement à la Marie-Ange Brayer Université Paris i Panthéon-Sorbonne and art programming for the castillo/corrales gallery Née en Belgique en 1964, historienne de l’art, travaillé sur les œuvres de Gary Hill, Jan programmation de la galerie castillo/corrales Born in Belgium in 1964, a graduate of critic. He has worked on the art of Gary Hill, and the independent curating agency Work diplômée de l’Université libre de Bruxelles, Kopp ou Jean-Marc Bustamante, et édité les et à l’agence curatoriale indépendante Work Brussels Free University, art historian Marie- Jan Kopp and Jean-Marc Bustamante, and Method in Paris. He recently organised Marie-Ange Brayer est directrice du Fonds écrits de Michael Snow. Il a collaboré à des Method à Paris. Il a organisé récemment Ange Brayer directs the Fonds Régional d’Art edited the writings of Michael Snow. He has the exhibitions Intocable, el ideal de la régional d’art contemporain de la région catalogues, encyclopédies et anthologies, dont les expositions Intocable, el ideal de la Contemporain of the Centre region (Orléans, contributed to catalogues, encyclopaedias transparencia, with Guillaume Désanges, Centre (Orléans), où elle développe une Du mot à l’image et du son au mot et Le Livre transparencia, avec Guillaume Désanges, France), where she is building up a collection and anthologies, including Du mot à l’image at the Museo Patio Herreriano in Valladolid collection centrée sur les rapports entre l’art et l’artiste (Le Mot et le reste, 2006 et 2007). au Museo Patio Herreriano à Valladolid specialising in the relations between art et du son au mot et Le Livre et l’artiste (Spain) and at the Villa Arson (Nice, France) et l’architecture de recherche. Elle a cofondé Il a aussi récemment publié L’Esthétique (Espagne) et à la Villa Arson (Nice) en 2007, and avant-garde architecture. In 1999, with (Le Mot et le reste, 2006 and 2007). He in 2007, and Where the Lions Are in Hong avec Frédéric Migayrou en 1999 Archilab, traversée. Psychanalyse, sémiotique et et Where the lions are à Hong Kong en 2008. Frédéric Migayrou, she co-founded Archilab, recently published L’Esthétique traversée. Kong in 2008. He teaches art history and Rencontres internationales d’architecture phénoménologie à l’œuvre (La Lettre volée, Il enseigne l’histoire et la théorie de l’art à the international architecture festival in Psychanalyse, sémiotique et phénoménologie theory at the École Nationale des Beaux-Arts d’Orléans, dont elle est directrice artistique 2007). l’École nationale des Beaux-Arts de Lyon. Orléans, which she has directed since 2004. à l’œuvre (La Lettre volée, 2007). in Lyon (France). depuis 2004. Critique d’art et d’architecture, As an art and architecture critic she has elle est l’auteur de nombreux articles dans des published numerous articles in journals and revues et catalogues, et mène actuellement Bernard Marcadé Christine Van Assche catalogues. She is currently researching the Bernard Marcadé Christine Van Assche une recherche sur le statut juridique Bernard Marcadé est critique d’art, Christine Van Assche est conservatrice legal status of the architecture model since the Bernard Marcadé is an art critic, curator Christine Van Assche is head curator at de la maquette d’architecture depuis la commissaire d’expositions et professeur en chef au musée national d’Art moderne/ Renaissance. and professor of aesthetics and art history the Musée National d’Art Moderne/Centre Renaissance. d’esthétique et d’histoire de l’art à l’École Centre Pompidou, responsable des Nouveaux at the École Nationale Supérieure d’Arts in Pompidou (Paris), in charge of New Media. nationale supérieure d’Arts de Paris- Médias. Diplômée en histoire de l’art et Paris-Cergy. His publications include an With a degree in art history and archaeology, Cergy. Il a notamment publié un essai sur archéologie, elle a enseigné l’esthétique de Mario Flecha essay on Isidore Ducasse (Seghers, 2002) she taught the aesthetics of video at the Mario Flecha Isidore Ducasse (Seghers, 2002) et une la vidéo, entre 1994 et 1998, à l’université Born in 1949 in Buenos Aires, Mario Flecha and a biography of , La Uuniversité Paris viii–Saint-Denis between Né en 1949 à Buenos Aires, Mario Flecha est biographie de Marcel Duchamp, La Vie à Paris v i i i –Saint-Denis. Aux éditions du Centre has been a publisher, writer, exhibition Vie à crédit (Flammarion, 2007). In 2006 1994 and 1998. For the Centre Pompidou éditeur, écrivain, commissaire d’expositions crédit (Flammarion, 2007). En 2006, il a été Pompidou, elle a dirigé des catalogues tels curator and gilder since 1977. He directed he initiated the project “Je ne crois pas aux publishing department she edited catalogues et artisan doreur depuis 1977. Il a animé la à l’initiative du projet “Je ne crois pas aux que Nouveaux médias. Installations (2006) the Mario Flecha Gallery in London between fantômes, mais j’en ai peur” at the exhibition such as Nouveaux médias. Installations Mario Flecha Gallery à Londres entre 1987 fantômes, mais j’en ai peur” à l’occasion et des monographies parmi lesquelles Isaac 1987 and 1992, then the Mario Flecha La Force de l’art at the in Paris, (2006) and a number of monographs et 1992, et ensuite le Mario Flecha Space de “La Force de l’art” au Grand Palais à Paris, Julien (2005) ou David Claerbout (2007). Space, to 2003, in Jaffre (Spain), where he and gave talks as part of Chauffe Marcel, including Isaac Julien (2005) and David jusqu’en 2003 à Jafre (Espagne), où il co- et a donné des conférences dans le cadre Elle a assuré le commissariat d’expositions organises from that time a contemporary an event in homage to Marcel Duchamp at Claerbout (2007). She has curated thematic organise depuis lors une Biennale d’art de “Chauffe Marcel”, en hommage à Marcel thématiques comme “Passages de l’image” art biennial. Among the exhibitions he has the crac, Sète (France), for which he also exhibitions such as “Passages de l’image contemporain. Parmi les expositions qu’il Duchamp au c r a c de Sète, pour lequel il a (1990) et “Sonic Process” (2002) au Centre conceived, Miradas breves brought together organised the exhibition On dirait le Sud in (1990) and Sonic Process (2002) at the Centre a conçues, “Miradas breves” réunissait des également réalisé l’exposition “On dirait le Pompidou, “La Vidéo, un art, une histoire” contemporary Spanish video works at the 2007. Pompidou, La Vidéo, un art, une histoire œuvres de vidéos contemporaines espagnoles Sud” en 2007. (2008) au musée Fabre à Montpellier, ou Centro Cultural de España in Buenos Aires (2008) at the Musée Fabre in Montpellier au Centro cultural de España de Buenos Aires “Ficção e realidade” (2008) à la fondation in 2006. As an art critic he writes regularly (France), and Ficção e realidade (2008) at the en 2006. Critique d’art, il écrit régulièrement Gulbenkian à Lisbonne. for the specialist press and has published Martí Peran Gulbenkian Foundation in Lisbon. pour la presse spécialisée et édite les revues Martí Peran the journals Bastón Blanco since 2004 and Martí Peran is an art critic, curator and Bastón Blanco depuis 2004 et Untitled Martí Peran est critique d’art, commissaire Untitled contemporary art since 1993. teacher at the University of Barcelona art contemporary art depuis 1993. d’expositions et enseignant à l’École d’art school. He has contributed to numerous de l’Université de Barcelone. Il a contribué publications and written regularly for à de nombreuses publications et écrit the newspaper El País and specialist régulièrement pour le quotidien El País et journals such as Exit Express and Artforum pour des revues spécialisées, comme Exit International. He directs the “Roundabout” Express et Artforum International. Il dirige le international cultural exchange programme programme international d’échanges culturels set up by the city of Barcelona. In 2006 he “Roundabout”, mis en place par la ville de conceived the exhibition Glaskultur at the Barcelone. En 2006, il a conçu l’exposition Koldo Mitxelena in San Sebastián, and in “Glaskultur” au Koldo Mitxelena à San 2008 he presents the project Post-it city. Sebastián, et il présente en 2008 le projet Ciudades ocasionales at the Centre de “Post-it city. Ciudades ocasionales” au Centre Cultura Contemporània in Barcelona. de Cultura Contemporània de Barcelone. L’exposition « Jordi Colomer » est coproduite Ce livre est publié par Le Point du Jour en coédition par le Jeu de Paume, Paris, et le Centre d’art La avec le Jeu de Paume (Paris) et avec le soutien Panera, Lleida. de l’Institut d’art contemporain (Villeurbanne), Elle est présentée par le Jeu de Paume dans le des centres d’art La Panera (Lleida) et Le Spot cadre du Mois de la Photo à Paris 2008. (Le Havre), ainsi que du Centre national des Arts Plastiques, ministère de la Culture et de la Communication (aide à l’édition).

Jeu de Paume, Paris Remerciements Le Jeu de Paume 21octobre 2008-4 janvier 2009 Direction : Marta Gili Pour Le Jeu de Paume 1, place de la Concorde 75008 Paris – France Centre d’art La Panera, Lleida Nous remercions chaleureusement Jordi Colomer www.jeudepaume.org 29 janvier-12 avril 2009 pour son engagement dans la réalisation de cette exposition et de ce catalogue. Centre d’art La Panera Laboratorio Arte Alameda, México Nous tenons également à témoigner toute notre Direction : Glòria Picazo 12 mai-19 juillet 2009 gratitude à Michel Rein pour l’aide apportée tout au Pl. de la Panera, 2 , 25002 Lleida – España long de l’élaboration de ce projet, ainsi qu’à toutes www.lapanera.cat Le Jeu de Paume les institutions et les personnes qui y ont apporté Direction : Marta Gili leur concours : Institut d’art contemporain Coordination de l’exposition : Véronique Dabin et Fonds régional d’art contemporain de Bourgogne Direction : Nathalie Ergino Manuel Cirauqui Fonds régional d’art contemporain du Centre 11, rue docteur Dolard Régie des œuvres : Maddy Cougouluegnes 69100 Villeurbanne - France Régie technique : Lionel Desneux Galerie Michel Rein, Paris www.i-art-c.org Responsable des éditions : Françoise Bonnefoy Galería Carles Taché, Barcelone Institut d’art contemporain de Villeurbanne Le Spot Centre d’art contemporain Centre d’Art la Panera Loïc Chambon, Galerie Michel Rein, Paris Direction : David Perreau Direction : Glòria Picazo Charles Gohy, WIELS, Bruxelles 32, rue Jules Lecesne Coordination : Antoni Jové 76600 Le Havre – France Service éducatif : Helena Ayuso, Roser Sanjuan Aude Merquiol, IAC, Villeurbanne www.le-spot.org Presse et communication : Maria López Léna Monnier, Galerie Michel Rein, Paris Centre de documentation : Anna Roigé Vincent Schmitt, IAC, Villeurbanne Le Point du Jour, Centre d’art / Editeur Joseph Spinelli, IAC, Villeurbanne Direction : David Barriet, David Benassayag L’exposition et le catalogue ont bénéficié du Mélanie Tebb, Hollywood Classics, Londres et Béatrice Didier concours de SEACEX / Sociedad Estatal para la 109, avenue de Paris 50100 Cherbourg-Octeville – France Acción Exterior, Espagne. Nous souhaitons aussi remercier : www.lepointdujour.eu Hugues Aubry, directeur général de Neuflize Vie Neuflize Vie est mécène principal du Jeu de Paume et Françoise de Ville d’Avray, directeur Conception du livre : Jordi Colomer et Yann Rondeau pour l’ensemble de ses activités et apporte communication de Neuflize Vie. Conception graphique : Yann Rondeau notamment son soutien à l’exposition « Jordi Suivi éditorial : Aurianne Cox Colomer ». Éditeurs : David Barriet, David Benassayag et Béatrice Didier, Le Point du Jour Pour Jordi Colomer Traductions : Nathalie Bittoun-Debruyne, Charles XXX Penwarden, Camilla Balmer-Flecha, Jacqueline Hall, Catalina Girona, Annie Bats Relecture : XXX, Nathalie Bittoun-Debruyne, XXX Photogravure : Les Ateliers du Regard (Paris) Impression : EBS (Vérone, Italie)

© Le Point du Jour / Éditions du Jeu de Paume © Jordi Colomer © José Luis Barrios, Marie-Ange Brayer, Mario Flecha, Marta Gili, Jacinto Lageira, Bernard Marcadé, Martí Peran, Glòria Picazo, François Piron, Christine Van Assche, pour les textes. © ADAGP, Paris 2008

Tous droits réservés.

Dépôt légal : octobre 2008 ISBN : 978-2912132-58-1