André Larquié président Brigitte Marger directeur général Deux compositeurs, deux univers radicalement opposés constituent ce pro- gramme. Mais également deux œuvres que rapproche l’inspiration littéraire : La Mort de Virgile d’Hermann Broch, pour Hanspeter Kyburz ; et Lohengrin, l’une des nouvelles des Moralités légendaires de Jules Laforgue, pour Salvatore Sciarrino. Dans l’une et l’autre de ces compositions, la dramaturgie latente a conduit à donner au cadre de la représentation une disposition toute particulière. Jean- Claude Berutti – qui avait déjà signé la mise en espace de Passaggio de Luciano Berio, dans cette même salle en septembre 1999 – invente ici un lieu de déploie- ment spécifique pour Lohengrin, cette « action invisible », selon les propres termes de Salvatore Sciarrino. mardi 22 mai - 20h salle des concerts Hanspeter Kyburz Parts, pour ensemble durée : 21 minutes

entracte

Salvatore Sciarrino Lohengrin, action invisible pour soliste, instruments et voix d’après Les Moralités légendaires (1887) de Jules Laforgue (voir traduction p. 9) durée : 40 minutes

Jonathan Nott, direction Marianne Pousseur, soprano/actrice Patrick Blauwart, récitant Jean-Claude Berutti, mise en espace Rudy Sabounghi, collaboration artistique Axe 21 Ensemble Intercontemporain

coproduction cité de la musique, Ensemble Intercontemporain

concert enregistré par France Musiques, partenaire de l’Ensemble Intercontemporain pour la saison 2000/2001 Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

Hanspeter Kyburz composition : 1994-1995 ; commande de la Fondation Parts, pour ensemble Pro Helvetia ; création : le 23 avril 1995 à Witten dans le cadre des Wittener Tage für Neue Kammermusik par l’ensemble Klangforum (dir. Peter Rundel) ; effectif : flûte/flûte piccolo/flûte basse, hautbois, clarinette en si bémol/clarinette basse/clari- nette en mi bémol, clarinette en si bémol/clarinette basse ; saxophone soprano, 2 cors, 2 trompettes, 2 trombones ténor/basse, 3 percussions, clavier/célesta, harpe, guitare, 2 vio- lons, alto, violoncelle, contrebasse ; éditeur : Breitkopf & Härtel.

De Parts, on pourrait dire qu’il s’agit d’une œuvre arborescente et hérissée. Arborescente, parce que la musique se déploie selon une syntaxe rigoureuse- ment organisée : des processus souples, non linéaires mais réglés, génèrent des matériaux multiples et dif- férenciés (des rameaux ou les nervures des feuilles si l’on poursuit la métaphore de l’arbre), susceptibles néanmoins d’établir entre eux des jeux de corres- pondances, de faux-semblants ou de composer ensemble une configuration globale (la branche, le feuillage). L’œuvre oscille ainsi continûment entre des mouvements de « zoom » où quelques lignes se sin- gularisent, s’émancipent, suivant leur propre crois- sance (on aboutit alors à un traitement de chambre quasi concertant) et des phases de prolifération des détails, où la complexité polyphonique dessine plutôt un geste global lié de manière organique à l’évolu- tion des composantes microscopiques : l’effet, tou- jours subtilement mené, est alors celui d’une immense ouverture du champ. Hérissée, parce que l’œuvre est parcourue de rup- tures (anéantissement subit des processus, émer- gence d’éléments perturbateurs, brusques changements de perspective), traversée de déchi- rures violentes (agrégats verticaux qui brisent le flux musical) et d’instants saisissants marqués du sceau de l’effroi ou d’une étrangeté radicale. La physionomie et la construction dramatique de Parts, faites de ces concrétions et effondrements successifs, renvoient au roman de l’écrivain autrichien Hermann Broch La Mort de Virgile. Aux quatre livres du roman (l’eau/l’ar-

4| cité de la musique Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

rivée, le feu/la descente, la terre/l’attente, l’éther/le retour) répond une forme musicale en quatre mou- vements clairement articulés. Plus profondément, les courants qui traversent les deux œuvres, passant de la frénésie la plus furieuse à la stupéfaction, ou à l’abandon, traduisent une même exigence créatrice, éminemment moderne, « capable de reculer les fron- tières infranchissables de l’existence la plus intérieure et la plus extérieure, et d’atteindre des réalités nou- velles, et non pas seulement des formes nouvelles, car c’est là ce qui confère au symbole la rigueur de l’exactitude et l’élève au rang d’une image de la vérité, poussant de l’avant, tâtonnant, lançant ses intuitions à travers les couches successives jusqu’aux inac- cessibles régions ténébreuses du commencement et de la fin. » (H. Broch, La Mort de Virgile, Gallimard).

Cyril Béros

Salvatore Sciarrino composition : 1982-1984 ; création : le 9 septembre 1984 à Lohengrin Catanzano par Daisy Lumini (soprano) et le Gruppo stru- mentale musica d’Oggi (sous la direction du compositeur) ; effectif : soprano/actrice solo, 3 voix d’hommes, 2 flûtes/flûtes en sol, hautbois, clarinette, clarinette/clarinette en la, 2 bassons, cor, trompette, trombone ténor-basse, percussion, violon I, violon II, alto, violoncelle, contrebasse ; éditeur : Ricordi.

Lohengrin est une « cosmogonie sonore », traduisant les précieuses nuances au travers desquelles Elsa incarne ses voix, cheminant de la pensée à la langue, de la langue à la parole, de la parole aux sons de la voix. « La condition d’une telle composition est de concevoir la voix, le corps comme univers. Le mou- vement d’introspection qui en résulte réfléchit l’am- biance extérieure qui doit pratiquement créer par l’illusion ce monstrueux paysage de l’âme et devenir spectacle en soi. » Cette Voix révèle son lien intime avec la mort. Elle est une trace, un évanouissement, une mémoire nommant ce qui l’entoure et qui, aussitôt nommé, s’efface. Rien n’est dans la voix. Si Elsa se tait, tout disparaît, la scène se vide. Salvatore Sciarrino

notes de programme | 5 Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

autorise ainsi la naissance d’une dramaturgie authen- tiquement moderne, réflexive : « C’est la dramatur- gie intrinsèque à la musique, son immédiateté qui doivent nous émouvoir. » Sa vérité devient celle de l’illusion et du miroir, oscillant légèrement entre la réa- lité et l’imagination, de sorte que l’opéra donne seu- lement à voir et à écouter son propre trépas. L’œuvre dévoile le Vide, cette création paradoxale d’un art se donnant sous la forme de l’affaiblissement. Action invisible est le sous-titre de ce Lohengrin. La voix, en effet, est la seule chose en nous qui ne s’offre pas à la vue. Mais, comme pour le prophète, qui voit au loin aussi bien qu’il parle de loin, les yeux fous d’Elsa lui donnent charge de parole. La voix visible, c’est la splendeur même de sa voix. Salvatore Sciarrino élit donc cette voix humaine, discernée par la conscience, écho de l’âme, du Verbe silencieux qui demeure indiciblement en nous et ne vient ni de la gorge, ni de la dent, ni de la lèvre. Musicalement, le paradoxe d’Elsa est de donner voix au silence, invitant l’homme à accomplir, dans le néant, l’expérience de l’être, d’une autre Voix qui appelle sans rien dire.

Laurent Feneyrou une crise hallucinatoire La légende d'Elsa de Brabant raconte comment une jeune fille, sans défense face à l'usurpateur du pouvoir de son père mort, soutient publiquement rencontrer en hallucination un jeune homme qui vient à son secours. En effet, alors qu'on la juge pour sorcellerie, un che- valier tout armé – Lohengrin – arrive sur l’Escaut dans une nacelle que conduit un cygne blanc. Salvatore Sciarrino ne retient de la légende que la crise hallucinatoire. Il met en musique Elsa telle un îlot au cœur d'un espace de solitude et de silence. L'île/personnage, elle, va s'enfler de sons pour mieux faire refluer le silence intenable qui la tenaille. Au début, on sent chez elle un besoin irrépressible d'expansion sonore. Cette expansion va devenir effarante, par ondes de choc qui vont projeter la jeune fille hors

6| cité de la musique Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain d'elle-même. L'appel, la rêverie, l'attente, les caresses imaginaires, le désir exaspéré, le besoin charnel, pousseront Elsa à se dédoubler (qui est-elle ? qui est Lohengrin ?) jus- qu'à ce qu'elle devienne une extension à l'état pur. Bonne à enfermer. Un mot, pour finir, du langage de cette extension : le compositeur utilise, comme pré-texte au délire hal- lucinatoire d'Elsa, un poème dramatique de Jules Laforgue. Mais le poème est démonté, disséqué, haché : l'accent ne porte plus sur le message mais sur la perception sensorielle acoustique. Le devant de la scène du langage, ce sont la prononciation, l'accent, le timbre, la couleur et le souffle qui le tiennent. Tout cet attirail langagier repousse Elsa vers le babil du nourrisson, un babil qui ne recherche que le fusionnel. On le voit, la construction du théâtre imaginaire de Salvatore Sciarrino opère comme une crise théra- peutique (ratée ?) qui ouvrirait l'oreille de l'audi- teur/spectateur sur d'inconnus panoramas intimes et impudiques.

Jean-Claude Berutti

notes de programme | 7 Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

Salvatore Sciarrino Salvatore Sciarrino Lohengrin Lohengrin

Prologo attraverso una finestra Prologue à travers une fenêtre aperta ouverte

Elsa Elsa Il cuscino, il cuscino ! Le coussin, le coussin !

Scena prima Première scène (La Villa Nuziale. Alle dipendenze del Ministero (La villa nuptiale que le ministère des Cultes mettait dei Culti, si cedeva gratis agli sposi novelli) gratuitement à la disposition des jeunes époux)

Elsa Elsa E sulla mia bellezza che effetto fa il chiaro di luna ? Quel effet produit le clair de lune sur ma beauté ? Quanta magia in queste siepi, questi sentieri Que de magie dans ces haies, dans ces sen- scoraggianti ! tiers effrayants ! Perchè non mi date più del tu ? Pourquoi avez-vous cessé de me tutoyer ? Ci avventurammo in preda al disagio e al silenzio, Nous nous aventurons dans le silence en proie i piedi spossati da tiepide ghiaie. L’acqua delle à un malaise, les pieds épuisés au contact des cascate, tièdes galets. profonda un piede appena, si offriva alle magie L'eau des cascades, tout juste profonde d'un lunari. pied, s’offrait aux magies… de la lune. Ah ! non mi ami ! Sapete, non ho ancora Ah ! Tu ne m'aimes pas ! Sachez que je n'ai diciott'anni pas encore dix-huit ans.

Lohengrin guardò nel vuoto. Lohengrin regarde dans le vide.

E naturalmente sai tutto ! Non rispondi ? Et naturellement tu sais tout ! Tu ne réponds donc pas ?

Lohengrin Lohengrin Oh, tutta la vita vi pentirete di avermi detto Oh, vous regretterez toute la vie ce que vous questo ! venez de me dire !

Elsa Elsa Vi bagno forse ? dissi Vais-je vous baigner, peut-être ? j'ai dit.

Lohengrin Lohengrin Non fateci caso. N'y faites pas attention.

Elsa Elsa Grazioso cavaliere, vi ho sognato... Charmant chevalier, j'ai rêvé de vous... Non senti ? N'entends-tu pas ? Non senti un rumore di germinazioni dapper- N'entends-tu pas partout la nature en train tutto ? de naître ?

Lohengrin Lohengrin Non mi toccare ! Ne me touche pas !

8| cité de la musique Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

Elsa Elsa Via, prenderete freddo... Allez-vous en, vous allez prendre froid...

Lohengrin Lohengrin No, no ! Non, non !

Scene seconda Deuxième scène

Elsa Elsa Entrammo nella villa invasa d’erbe folli. Corridoi Nous sommes entrés dans la villa envahie a eco. par les herbes folles. Stanze vuote. Couloirs pleins d'échos. Pièces vides. Nomi e date incisi sugli specchi. Noms et dates sculptés dans les miroirs.

Lohengrin Lohengrin Questa villa nuziale puzza di fossa comune. Cette villa nuptiale pue la fosse commune.

Elsa Elsa Lui è cosi intirizzito… Il est tellement transi… Bambino, bambino, bambino, conosci Enfant, enfant, enfant, connais-tu i falsi voluziali ? les fastes de la volupté ? Guarda i miei capelli, gusta i miei Regarde mes cheveux, goûte à mes giovani seni… jeunes seins… Ma voi divagate !… Mais, vous divaguez !

Coro Chœur Ahi con un giglio Allons avec un lis insidiare la pourchasser la violetta di Iside !… violette d'Isis…

Lohengrin Lohengrin Detesto i vostri fianchi magri. Je déteste tes hanches étroites.

Elsa Elsa Cosa ? se non chiedo che di amarti. Quoi ? Mais je ne demande qu'à t'aimer.

Lohengrin Lohengrin Detesto i vostri fianchi magri. Non ammetto Je déteste tes hanches étroites. Moi, je n'ad- che i fianchi larghi, io ! mets que les hanches larges.

Elsa Elsa Non dirmi cosí. Ne parle pas ainsi.

Lohengrin Lohengrin Scusa, scusa. Non piangere. Excuse-moi. Ne pleure pas. Oh, invece io li adoro, i fianchi duri e dritti ! Oh, ce n'est pas vrai, j'adore les hanches dures et droites !

Elsa Elsa Davvero ? E allora ? Vraiment ? Et alors ?

notes de programme | 9 Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

Lohengrin Lohengrin E che… ecco, detesto... Eh… Eh bien, voilà. je déteste...

Elsa Elsa Mi ricordi che il solo complimento era stato Je me rappelle que tu ne m'as fait qu'un seul per il mio collo di cigno. compliment sur mon cou de cygne.

Lohengrin Lohengrin Ecco, lasciami fare un riposino tutto per me, Allons, laisse-moi me reposer un peu, tout seul nel silenzio della notte, poi ti prometto che… dans le silence de la nuit, et puis je te promets que… Ah ! il mio cuscino non avrà spazio fresco per Ah ! mon coussin n'aura-t-il donc pas un peu la mia fronte… de fraîcheur à offrir à mon front... O mio buo buo buon cuscino, tenero e bianco ! Oh mon bon bon bon coussin, tendre et blanc ! O mia piccola Elsa ! Oh ma petite Elsa ! Mio buon cuscino bianco e puro come un Mon bon coussin blanc et pur comme un cigno. cygne. Mi senti ? M'entends-tu ? Cigno, mio cigno, mi senti ? Oh, sei proprio Cygne, mon cygne, m'entends-tu ? C'est bien tu ! sei tu ! toi ? Oui c'est toi !

(Ed ecco il guanciale mutarsi in cigno, dispie- (Et voici l'oreiller qui se transforme en cygne, qui gare le imperiose ali e, cavalcato da Lohengrin, déploie ses ailes et, chevauché par Lohengrin, il spiccare il volo fuori dalla finestra.) s'envole par la fenêtre.)

Scena terza Troisième Scène (Plenilunio implacabile e divino di fronte al mare (Pleine lune implacable et divine devant la mer eterno delle belle sere) éternelle au cours des belles soirées)

Elsa Elsa Come tutto è bianco in quest'ora, sulla riva… Tout est si blanc à cette heure, sur le rivage... Et la E la folla : occhi verdi, grigi, sgomenti nell'attesa. foule : yeux verts, gris, épouvantés par l'attente. Elsa ! Elsa ! Elsa, vestale perduta, il tuo seno Elsa ! Elsa ! Elsa, vestale perdue, ton sein connaît conosce altre carezze da quelle lontane della d'autres caresses que celles, lointaines, de la luna ; mani profane hanno sciolto la cintura e lune ; des mains profanes ont défait ta ceinture et infranto il sigillo delle tue piccole solitudini ! franchi les scellés de tes petites solitudes ! Elsa ! Elsa ! Elsa ! Elsa ! Elsa ! Elsa ! Un cucchiaio soltanto. Une cuillère seulement. Ah ! ogni due ore… Ah ! toutes les deux heures Che silenzio !… Quel silence !… Elsa ! Elsa ! Elsa ! Elsa ! Elsa ! Elsa ! Credo di essere innocente. Un crudele equi- Je crois que je suis innocente. Une cruelle équi- voco - voque. mio Dio, quanti pettegolezzi ! Mon Dieu ! Que de commérages ! Elsa, ora contemplate per l’ultima volta la Dea, Elsa regardez maintenant, pour la dernière fois, secondo il rito. Se al terzo richiamo il vostro la Déesse, suivant le rite. Si au troisième rappel, fidanzato non comparirà per difendervi, i vos- votre fiancé n'apparaît pas pour vous défendre, tri occhi, i vostri begli occhi saranno… vos yeux, vos beaux yeux seront…

(Risuona il corno d'avorio ai quattro venti.) (Le cor d’ivoire résonne aux quatre vents.)

Passaterni prima uno specchio ! D’abord, passez-moi un miroir !

10 | cité de la musique Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

(Bianche figure la trascinano sul fondo.) (Des silhouettes la traînent sur le fond.)

Scena Quarta Quatrième scène

Elsa Elsa Buon cavaliere che una notte m'appariste Bon chevalier qui m'êtes apparu à cheval sur cavalcando un gran cigno luminoso ! un grand cygne lumineux ! Abandonnez-vous Voi abbandonare cosí la vostra ancella ? Fatale ainsi votre servante ? cavaliere, i miei occhi sono alla vostra mercè, Fatal chevalier, mes yeux sont à votre merci, avec con sguardi folli io vi sarò vicina… mes regards égarés, je me tiendrai à vos côtés… Ma se vi dico che verrà ! Me l'ha promesso… Mais je vous dis qu'il viendra ! Il me l'a promis… Grazioso cavaliere, non ho ancora diciott'anni. Gracieux chevalier, je n’ai pas encore dix-huit ans. Io sono bella, bella, bella ! come uno sguardo Je suis belle, belle, belle ! comme l'incarnation incarnato ! d'un regard ! Vi seguirò. E resterò sospesa al chiarore della Je vous suivrai. Je resterai suspendue à la vostra fronte, mi scorderò d'invecchiare. lumière de votre front, je m'arrêterai de vieillir. Incastonata nella vostra scia di luce, oh brillarvi Enchâssée dans le sillage de votre lumière et y quasi un piccolo... briller tel un petit... Ah eccolo ! Eccolo ! Ah ! le voici ! le voici !

(Dall’orizzonte, sul dilo delle onde rassegnate, (De l’horizon, sur la crête des vagues résignées, nell’incantesimo della luna piena, viene meravi- dans la clarté enchanteresse de la pleine lune, gliosamente e con il collo a prua un grandissimo dans toute sa splendeur, un grand cygne étince- cigno luminoso. Lo cavalca un efebo che pro- lant de lumière arrive le cou en proue. Il est tende le braccia, sublime per ignota superbia.) monté par un éphèbe qui tend les bras, sublime d'orgueil sans le savoir.)

Coro Chœur Vuoi tu vestirti del mio Essere smarrito ? Veux-tu te vêtir de mon Être égaré ?

Epilogo Epilogue (Mutazione : il giardino, la villa, la riva del mare, (Mutation : le jardin, la villa, le bord de la mer, qui che in stillicidio d’immagini parziali hanno celato la dans un défilé d’images ont caché leur nature, loro natura, svelano ora crudamente l’ospedale.) maintenant laissent apparaître crûment l’hôpital.)

Elsa Elsa Campane delle belle domeniche Cloches des beaux dimanches sulle province tranquille ! sur les provinces tranquilles ! Gioia della biancheria pulita Joyaux du linge propre come se durante la settimana comme si pendant la semaine non ci si fosse sporcati ! vous ne vous étiez pas salis ! Ah, le campane che proprio cosi suonano... Ah, les cloches qui sonnent ainsi... Campane... Les cloches...

© éd. Ricordi

notes de programme | 11 Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

Hanspeter Kyburz lors de la Troisième Semaine interna- Né en 1960 à Lagos (Nigeria), tionale de musique contemporaine Hanspeter Kyburz entreprend ses de Palerme, il est joué pour la pre- études de composition à Graz puis, à mière fois. Après ses études partir de 1982, à Berlin où il étudie, classiques, il vit à Rome, puis à outre la composition musicale, la Milan. Lauréat de nombreux prix – musicologie, l’histoire de l’art et la IGNM et Taormina (1971), Guido philosophie. Quelques années plus Monaco (1972), Cassadó, IGNM et tard, il sera boursier de la Cité des Dallapiccola (1974), Anno discogra- Arts à Paris. Prix Boris-Blacher en fico (1979), Psacaropoulos (1983), 1990, Prix Schneider-Schott en Abbiati (1983), Premio Italia (1984) –, 1994, lauréat de l’Académie des il dirige le Teatro Communale de Beaux-Arts de Berlin en 1996, il est, Bologne (1978-1980) et enseigne depuis 1997, professeur de compo- dans les conservatoires de Milan, sition à la Hochschule für Musik Pérouse et Florence. Il vit à Città di "Hanns Eisler " de Berlin et, depuis Castello (Ombrie). Le catalogue com- 1998, chargé de cours dans le cadre plet de ses œuvres, édité par Ricordi des stages d’été de musique de en 1999, recense 164 œuvres instru- Darmstadt. Citons parmi ses œuvres mentales, vocales, solistes, les plus récentes : Marginalien nos 1 & réalisations et transcriptions, aux- 2 pour quatuor à cordes (1990 et quelles il convient d'ajouter les livrets 1992), Studien pour trio à cordes d'opéras et de nombreux écrits, (1993), Cells pour saxophone et parmi lesquels le livre Le Figure delta ensemble instrumental (1993-1994), musica, da Beethoven a oggi (1998). Parts pour ensemble instrumental (1994-1995), The Voynich Cipher Manuscript pour 24 voix et ensemble instrumental (1995), Danse aveugle pour flûte, violon, violoncelle et piano (1997).

Salvatore Sciarrino Né à Palerme en 1947, Salvalore Sciarrino s'intéresse dans son enfance aux beaux-arts. Doué d'un talent précoce, il choisit cependant la musique qu'il étudie en autodidacte, avant de suivre, dès l'âge de douze ans, l'enseignement d'Antonio Titone, puis de Turi Belfiore. En 1962,

12 | cité de la musique Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain biographies citer Wolfgang Rihm, Elle participe ensuite à plu- Emmanuel Nuñes, Brian sieurs spectacles du Ferneyhough et Michael Théâtre du Ciel Noir dirigé Jonathan Nott Jarrell. Il est aussi chef par Isabelle Pousseur, à Né en 1962 à Solihull en invité de l’Orchestre phil- laquelle elle propose de Grande Bretagne, harmonique de Moscou, travailler sur une forme- Jonathan Nott suit ses de l’Orchestre philharmo- spectacle de Pierrot études au collège Saint nique de Bergen, de Lunaire d'Arnold John à Cambridge. De l’Orchestre de la Radio de Schoenberg, qui devient 1984 à 1986, il étudie le Stockholm et de l'objet d'un film réalisé chant au Royal Northern l’Orchestre symphonique pour la RTBF, sous la College of Music de du WDR de Cologne. direction musicale de Manchester. Il est ensuite Depuis 1997, il est direc- Philippe Herreweghe et assistant au National teur musical de l’Orchestre avec l'ensemble Musique Opera Studio de Londres. symphonique de Lucerne Oblique de Paris. À la suite En 1988, il est assistant dont il a inauguré en juin de cela, elle se produit puis, l’année suivante, 1998 le nouveau lieu de avec de nombreux Kapellmeister à l’Opéra de résidence, le Centre de ensembles : Le Francfort. En 1992-1993, il Culture et de Congrès, Schoenberg Ensemble de est Kapellmeister à l’Opéra construit par Jean Nouvel. La Haye, Musique Oblique d’État de Wiesbaden et, Nommé directeur musical de Paris, Die Reihe de en 1995-1996, directeur de l’Orchestre sympho- Vienne, Peter Rundel, général de la musique de nique de Bamberg en Jurgen Wyttenbach et cette ville. Au Festival de janvier 2000, il est égale- l'Ensemble Wiesbaden, il dirige le Ring ment directeur musical de Intercontemporain (notam- de Wagner avec Siegfried l’Ensemble ment sous la direction de Jerusalem, Janis Martin, Intercontemporain depuis ), dans un Robert Hale et Ekkehard août 2000. répertoire essentiellement Wlaschiha. Il dirige de tourné vers le XXe siècle et nombreux orchestres sym- Marianne Pousseur la création. En décembre phoniques allemands avec Parallèlement à des 2000, elle est invitée par le des solistes comme Gidon études de chant classique Festival d’Automne de Kremer, Aldo Ciccolini, et de musique de chambre Paris pour interpréter Boris Pergamenschikow et au Conservatoire de Liège, Infinito Nero de Salvatore Sabine Meyer. Il est régu- Marianne Pousseur a Sciarrino. Elle a fondé un lièrement invité par des chanté dans les deux ensemble vocal axé princi- ensembles européens et ensembles Collegium palement sur la musique participe à la création Vocale et Chapelle Royale, contemporaine (Helix d’œuvres de compositeurs tous deux sous la direction Ensemble) et a participé à parmi lesquels on peut de Philippe Herreweghe. la création de La Grande

notes de programme | 13 Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

Formation, un ensemble Patrick Blauwart Nord un concert autour du de jazz de douze musi- Ancien élève de l’Institut madrigal italien, de ciens. Son expérience national supérieur des Arts Monteverdi à Bussotti, théâtrale lui permet d’être du Spectacle (INSAS) à ainsi qu’un programme également interprète-réci- Bruxelles, Patrick Blauwart consacré à A-Ronne de tante dans de grandes participe à la création de la Luciano Berio et à Ward œuvres symphoniques Compagnie 9 à Bruxelles Swingle. Axe 21 collabore comme Psyché de César et joue dans : La Double régulièrement avec Franck avec le London Insconstance de l’Ensemble Philharmonic Orchestra Marivaux ; Hamlet Intercontemporain. Il a sous la direction de Kurt Machine de Heiner Müller, participé, durant la saison Masur. En collaboration États seconds, fragments dernière, à la création du avec Enrico Bagnoli, elle a d’après William Jardin d’hiver de Philippe monté plusieurs créations Shakespeare. En France, il Fénelon, ainsi qu’à la pre- de théâtre musical, notam- joue entre autres sous la mière française du Voynich ment les Songbooks de direction de Dominique Cipher Manuscript de John Cage et Le Chant Feret, Les Yeux Rouges Hanspeter Kyburz. Le des ténèbres, spectacle Lip 1973-1998 ; Eric Didry, Chœur de Chambre construit à partir de chan- Récits/Reconstitutions ; est associé à sons de Hanns Eisler et Olivier Beson, Pratique du Léonard de Vinci / Opéra Bertolt Brecht. En janvier meurtre en série et de Rouen. Il est soutenu 2000, l'Opéra de Rouen Gradiva ; Edith Scob, par la Fondation leur a commandé une ver- Mémoires d’acteurs/por- d'Entreprise France sion scénique du Babar de traits d’acteurs pour Télécom, et est subven- Poulenc, avec l'Orchestre France Culture. tionné par le ministère de Léonard-de-Vinci sous la la Culture et de la direction de Oswald Axe 21 Communication, la Ville de Sallaberger. Avec les Dirigé par Laurence Paris, la Région Île-de- mêmes collaborateurs, ils Equilbey, Axe 21 est un France, Musique Nouvelle préparent pour janvier ensemble de solistes issus en Liberté et l’AFAA pour 2001 une mise en scène du Chœur de Chambre ses tournées à l’étranger. de L’Enfant et les sorti- Accentus. Créé pour lèges de Maurice Ravel. défendre le répertoire à un ténor Après avoir enseigné au par voix, il se consacre Eric Raffard Conservatoire de principalement à la Bruxelles, elle enseigne musique contemporaine. baryton actuellement le chant au Ces deux dernières sai- Christophe Olive Conservatoire royal de sons, l’ensemble a Mons, en Belgique. notamment présenté au basse Théâtre des Bouffes du Fabrice Chomienne

14 | cité de la musique Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

Jean-Claude Berutti de Bruxelles, 2000) et Le teurs en scène et choré- Après une maîtrise de Mariage de Figaro de graphes pour lesquels il lettres modernes, il mène Beaumarchais (Théâtre crée espaces et cos- des études théâtrales à de la Place à Liège, tumes : Jean-Claude l'École supérieure d'Art 2000). Il a mis en scène Berutti, Klaus-Michael dramatique du Théâtre Faust de Gounod à Grüber, Jacques Lassalle, national de Strasbourg l'Opéra de Lyon en juin Anne-Teresa de (section régie). Il 2000. Chargé de forma- Keersmaeker, Luca approche la mise en tion théâtrale auprès des Ronconi et Luc Bondy. scène auprès de Jean- chanteurs du CNIPAL de Pierre Vincent, Pierre Marseille et au Ensemble Barrat, Karl Ernst Conservatoire de Paris, il Intercontemporain Hermann et Patrice enseigne également dans Fondé en 1976 par Pierre Chéreau. En tant que plusieurs écoles d'art dra- Boulez, l’Ensemble metteur en scène, il par- matique, en Belgique et Intercontemporain est tage ses activités entre le en Allemagne. conçu pour être un instru- théâtre et l'opéra, les ment original au service de œuvres du répertoire et Rudy Sabounghi la musique du XXe siècle. les créations contempo- D’origine égyptienne, il Formé de trente et un raines, tant en France obtient en 1981 le solistes, il a pour directeur qu'à l'étranger. Parmi ses Diplôme national musical Jonathan Nott réalisations, citons : d'Expression plastique à depuis août 2000. Chargé Danube jaune Nice. Trois assistanats d’assurer la diffusion de la d'Altenberg, Manfred de importants ont marqué musique de notre temps, Schumann, La Traviata de ses débuts : en 1982, l’Ensemble donne environ Verdi, La Mort de Danton avec Karl Ernst Herrmann soixante-dix concerts par de Büchner et Von Einem, (Théâtre Royal de la saison en France et à Confidences africaines de Monnaie, Bruxelles), en l’étranger. En dehors des Roger Martin du Gard, Le 1984-1985 avec Giorgio concerts dirigés, les musi- Cocu magnifique de Strehler (Odéon-Théâtre ciens ont eux-mêmes pris Crommelinck, Caprices de l’Europe) et, en 1986, l’initiative de créer plu- d'images de Paul avec Pierre Strosser sieurs formations de Edmond. Jean-Claude (Festival d'Aix-en- musique de chambre dont Berutti a réalisé une Provence). Depuis, il ils assurent la programma- Trilogie de Lumières com- partage son temps entre tion. Riche de plus de prenant L'Adulateur de théâtre, opéra et danse. 1700 titres, son répertoire Goldoni (Théâtre du Ses collaborations sont reflète une politique active Peuple, Bussang, 1999), multiples, mais son travail de création et comprend L'Île des esclaves de se développe surtout également des classiques Marivaux (Théâtre national autour de quelques met- de la première moitié du

notes de programme | 15 Jonathan Nott - Ensemble Intercontemporain

XXe siècle ainsi que les clarinettes musiciens supplémentaires œuvres marquantes Alain Damiens écrites depuis 1950. Il est André Trouttet flûte également actif dans le Patrice Bocquillon domaine de la création fai- bassons sant appel aux sons de Pascal Gallois clarinette basse synthèse grâce à ses rela- Paul Riveaux Bruno Martinez tions privilégiées avec l’Institut de Recherche et cors saxophone Coordination Acoustique Jens McManama Vincent David Musique (Ircam). Depuis Jean-Christophe Vervoitte son installation à la cité de guitare la musique, en 1995, trompettes Patricio Wang l’Ensemble a développé Antoine Curé son action de sensibilisa- Jean-Jacques Gaudon violon tion de tous les publics à Pierre-Olivier Queyras la création musicale en trombones proposant des ateliers, Jérôme Naulais violoncelle des conférences et des Benny Sluchin Vincent Vaccaro répétitions ouvertes au public. En liaison avec le percussions Conservatoire de Paris, la Vincent Bauer cité de la musique ou Michel Cerutti dans le cadre d’acadé- Samuel Favre technique mies d’été, l’Ensemble cité de la musique met en place des sessions piano régie générale de formation de jeunes Dimitri Vassilakis Christophe Gualde professionnels, instrumen- régie plateau tistes ou compositeurs, harpe Eric Briault désireux d’approfondir leur Frédérique Cambreling régie lumières connaissance des lan- Marc Gomez gages musicaux violon contemporains. Hae-Sun Kang Ensemble Intercontemporain flûte alto régie générale Emmanuelle Ophèle Odile Auboin Jean Radel régie plateau hautbois contrebasse Damien Rochette Didier Pateau Frédéric Stochl Philippe Jacquin Nicolas Berteloot

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