Programme de Recherches

Fonte et Fonderies en Haute-Marne Transmission, création et production

1992-1993

Ministère de la Culture et de la Francophonie/Mission du Patrimoine Ethnologique/Direction Régionale des Affaires Culturelles de Champagne-Ardenne

Conseil Général de la Haute-Marne

Mars 1994 Programme de Recherches

Fonte et Fonderies en Haute-Marne Transmission, création et production

1992-1993

conduit par Catherine DUREPAIRE et la Mission à l'Ethnologie et à la Culture Scientifique, Technique et Industrielle Champagne-Ardenne Marc ANDRÉ Virginie KOLLMANN SOMMAIRE

VOLUME I

Introduction p. 1 à 7

I - La fonte d'art, naissance et développement p. 8 à 30

1 - Naissance de la fonte d'art p. 10 à 14 2 - Développement de la fonte d'art a/ la création d'un nouvel urbanisme p. 14 à 25 . l'architecture p. 14 à 15 . les espaces verts p. 15 à 19 . les travaux d'alimentation en eau p. 21 à 25

b/ le foisonnement d'idéologies civique et religieuse p. 25 à 30 . l'exhaltation des gloires nationales et la République . renouveau du catholicisme

II - Etude du marché de la fonte d'art : diffusion, processus de commandes p. 31 à 47

1 - Les fontes d'art de série p. 31 à 39 - les catalogues p. 31-32 - les commandes d'après les catalogues p. 32-34 - autre processus de commandes p. 34 à 36 - rapport sculpteurs-fondeurs p. 36-37 - la création de modèles p. 37 à 39

2 - Les fontes d'art unitaires p. 40 à 41 - les initiatives municipales p. 42-43 - les initiatives d'origine privée p. 43-44 - les dons de particuliers p. 45-46 Ill - Le travail de la fonte aujourd'hui : changement, évolution p. 48

1 - GHM (Générale d'Hydraulique et de Mécanique) : la dernière fonderie d'art haut-marnaise a - historique p. 50-51

b - description de l'usine actuelle p. 51 à 54 c - quels sont les produits regroupés sous la dénomination "fonte d'art" à Sommevoire aujourd'hui ? p. 56 . la clientèle p. 56 . les commandes p. 56-57 . les catalogues p. 57 . la création de fonte d'art telle qu'on l'entendait au siècle dernier p. 57-58 . les modèles p. 58 à 60

2 - Modes d'acquisition et de transmission des savoir-faire a/ organisation du travail au sein d'une fonderie p. 62 à 64 . les ateliers de modelage p. 64 . les ateliers de moulage p. 65 . les chantiers mécanisés p. 65 . les chantiers moulage-main p. 65-66 . horaires, salaires : le statut particulier du mouleur p. 66 à 69 b/ techniques de fabrication, les savoir-faire . la fusion p. 69-70 . le modelage p. 70-71 . le moulage-main p. 71-72 . le moulage en motte battue p. 72 à 74 . le ciselage et ébarbage p. 74 à 76 . la préparation et serre du sable p. 76 à 78 . la coulée p. 78 . un exemple de moulage : la fabrication d'un balcon p. 79

c/acquisition, transmission p. 80-81 . de la formation interne...... à la formation externe p. 81 à 83

Conclusion p. 85-86

Bibliographie p.87 à 97 Annexes

• Monographies des principaux sites évoqués - p. 95 à 99 - Dommartin-le-Franc p. 100 à 105 - Le Val d'Osne p. 106 à 109

Liste des catalogues répertoriés p. 110 à 112

Documents consultés dans les différents centres d'archives p. 113 à 116

Organismes et associations contactés p. 117 à 120

Articles de presse p. 121 à 123

Liste des informateurs p. 124 à 128

VOLUME II

- Iconographie : Clichés photographiques et documents p. 1 à 104 Introduction

En proposant un premier programme de recherches intitulé "Fonte et Fonderies en Haute-Marne, transmission, création et production", c'était tenter de défricher et de déchiffrer un domaine, devenu aujourd'hui emblématique, celui de la Fonte d'Art.

Si l'histoire de la sidérurgie haut-marnaise a fait l'objet de plusieurs travaux de recherches approfondies, peu d'études et de recherches d'un point de vue ethnologique ont été menées prenant en compte, sur un territoire défini -le Nord du département de la Haute-Marne, l'Ouest du département de la Meuse-, les composantes et la dynamique d'une culture technique originale s'inscrivant dans une économie régionale contemporaine et un patrimoine industriel singulier, méconnu quant aux techniques et aux savoir-faire liés à la création et à la production d'oeuvres.

Il était alors nécessaire d'examiner tout à la fois si l'existence, le maintien et la ' transmission de gestes techniques, l'évolution des outils productifs soumis à diverses contraintes technologiques et économiques, la circulation des savoirs dans les phases de création et de reproduction étaient des thèmes d'études pertinents. L'oeuvre achevée, - qu'elle soit aujourd'hui peu ou prou inscrit dans un registre de l'histoire de l'art du XIXème siècle ou du début du XXème siècle-, produite et reproduite, est souvent magnifiée sans que pour autant on en saisisse toutes les étapes de création, de ) fabrication et de diffusion, de la commande à sa monstration. Et s'il existe bien un art du fondeur, la production de fonte et fonderie d'art conduisent sans doute à de nouveaux rapports entre créateurs-sculpteurs et fondeurs.

De sites industriels majeurs dans leur production et leur notoriété tel que le Val d'Osne "l fermé définitivement en 1986, il ne reste plus, en Haut-Marne, que quelques objets isolés, éparpillés, peu d'archives et de documentation raisonnées, quelques catalogues. L'inexistence de collections raisonnées et analysées d'oeuvres significatifs ne facilite pas l'appréhension de ce patrimoine. Etat des lieux nécessitant la constitution de corpus documentaire, de croisement de sources très diverses dans une perspective de valorisation et de programmation muséographique (I).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 1 L'analyse de sources d'archives, de sources documentaires complétées par des enquêtes orales permettra ainsi de traiter, en articulation avec une perspective historique, différents thèmes dont : - la définition des produits proposés par les fondeurs sous le vocable fonte d'art, - les facteurs du développement de l'industrie de la fonte d'art, âge d'or, évolution, - la place tenue par les fonderies haut-marnaises, - le marché de la fonte d'art, - la politique commerciale menée par les fondeurs, les systèmes de diffusion des produits fabriqués, - la clientèle, qui achète et pourquoi ? - les rapports existants entre les sculpteurs-créateurs de modèles et les fondeurs.

Les sites

Lors de la mise en place du projet de recherches en septembre 1992, plusieurs sites ont été privilégiés, à savoir les sites de Dommartin-le-Franc, de Brousseval, de Sommevoire situés dans la partie nord du département de la Haute-Marne.

A ces sites industriels alors tous en activité -les fonderies du Blaisois à Dommartin-le- Franc ont fermé depuis-, deux autres sites ont fait l'objet de recherches, le site du Val d'Osne, estimé particulièrement intéressant bien que fermé depuis 1986, et le site du Rongeant où subsiste un bâtiment contenant des modèles.

Chacun de ces sites, -dont l'accès nous a le plus souvent été facilité par l'intermédiaire des associations locales qui s'intéressent au thème de la métallurgie haut-marnaise-, a fait l'objet d'une première visite en compagnie de membres de ces associations ; lors de cette première visite, un contact a été établi auprès des directeurs ou de cadres des fonderies encore en activité, ce qui nous a facilité par la suite la possibilité de nous y rendre à nouveau ; cela a été le cas par exemple à Sommevoire où nous avons pu suivre des mouleurs durant leur journée de travail.

Sources écrites

L'étude des documents conservés aux Archives Départementales, notamment les séries M et S nous a apporté des données d'ordre historique pour chacun des sites.

Dans la série M, les enquêtes industrielles effectuées de 1839 à 1848, le rapport effectué sur la situation industrielle et commerciale de 1831 à 1886 ou encore les états des usines, manufactures et fabriques de 1893 contiennent des renseignements sur les matières premières utilisées, les produits fabriqués, le nombre et le salaire des ouvriers, les moteurs, les feux et les machines. D'autres recensements ont également été établis à l'occasion de la première guerre, de la crise des années 1930 et du Front Populaire.

Dans la série S, les rapports établis par les ingénieurs du service des mines et du service hydraulique lors de la visite d'usine à la suite de demandes d'installation du bocard, patouillet, haut-fourneau donnent des descriptifs des lieux accompagnés de plans.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 2 Nous avons complété cette documentation en consultant, à la bibliothèque de l'Ecole des Mines, des journaux de voyage et des comptes-rendu de visites établis lors de leurs stages par les élèves de l'école, qui contiennent des descriptions techniques des mines, forges et hauts-fourneaux.

D'autre part, une enquête menée dans le cadre d'un repérage du patrimoine industriel de la Haute-Marne par la Conservation Régionale de l'Inventaire de Champagne-Ardenne a permis la constitution d'un fond documentaire consultable.

Pour chaque site un dossier a été réalisé. Il comprend : - des plans : extrait de la carte IGN, plan cadastral moderne, plan cadastral ancien. - un historique, une description des bâtiments - des clichés pris sur le terrain - des cartes postales anciennes.

Les établissements encore en activité détiennent peu d'archives ; elles ont en effet très souvent été détruites ou abandonnées lors d'achats successifs comme cela a été le cas par exemple pour le site du Val d'Osne : en juin 1992 le conservateur des Archives Départementales a récupéré une partie des archives qui jonchaient le sol dans un total désordre depuis la fermeture de cette usine en 1986. En cours de classement, elles couvrent une période allant des années 50 à 70 et contiennent des livres de paiement, des carnets de fournisseurs, des plans de service hydraulique...

Nous avons également adressé des demandes de recherches au Greffe du Tribunal de Saint-Dizier et au Greffe du Tribunal de Paris pour retrouver les noms des propriétaires successifs de ces usines ainsi que les diverses structures juridiques qui ont jalonné leur histoire ; ces demandes n'ont pas abouti.

En ce qui concerne la fonte d'art, nous avons consulté les séries O et T des Archives Départementales qui contiennent des commandes de monuments et de statues dans le département ainsi que les dossiers de fondeurs et de sculpteurs du XIXème siècle au centre de documentation du Musée d'Orsay. Documentation complétée par les archives de diverses municipalités telles que Angers, Poitiers, Loudun.

Nous avons également procédé à un début de dépouillement, cinq années, de la "gazette" de l'Hôtel des ventes de Drouot où apparaissent des ventes de pièces fabriquées dans les fonderies haut-marnaises. A ce sujet, deux associations locales tentent de dresser des inventaires pour localiser les oeuvres créés en Haute-Marne ; l'une s'attache plus particulièrement au Val d'Osne ; l'autre fait une recherche plus générale.

Afin de trouver d'éventuels dépôts de marques, modèles ou catalogues, des recherches ont été effecutées à l'Institut National de la Propriété Industrielle.

Enfin, à cette documentation s'ajoutent les documents que nous ont confié nos informateurs : articles de presse écrite relatifs à des remises de médailles, des fermetures d'entreprises ou faisant état d'oeuvres réalisées par les fonderies ainsi que des contrats d'apprentissage, des diplômes ou encore des manuels et des cahiers de cours suivis pendant leur apprentissage.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 3 2 - Sources iconographiques

La documentation que nous avons pu réunir auprès de nos informateurs se compose des éléments suivants :

les cartes postales anciennes : elles datent des années 1900 à 1910 et apportent des renseignements sur les bâtiments industriels (vues extérieures ou intérieures), sur l'évolution de la configuration des sites ou encore sur certains aspects de la vie sociale : conduite d'un troupeau de moutons, vue d'un café où se retrouvaient les ouvriers... Quelques informateurs possèdent ces cartes postales en simples collectionneurs ou par intérêt pour les sujets représentés.

les photographies - albums de photos prises en 1954 lors de l'inauguration d'une chapelle et d'un terrain de sport en en 1959 au cours d'une kermesse réunissant tout le village du Val d'Osne. Nous possédons également une reproduction de l'affiche qui annonce cette kermesse. - photographies prises dans les années 80 dans les ateliers du Val d'Osne. - maquette d'un haut-fourneau du Val d'Osne. - photographies représentant une maison de maître aujourd'hui détruite. - photographies prises lors d'une manifestation organisée à Paris pour la remise d'une médaille de Meilleur Ouvrier de d'un mouleur de Sommevoire. - album appartenant à un ciseleur de Sommevoire et qui contient de nombreuses photographies de pièces créées à Sommevoire entre 1950 et 1970.

Cette documentation que nous avons pour une grande part fait reproduire, est complétée par : - des photographies des oeuvres en fonte ou bronze que les associations locales ont pu localiser en France ou a l'étranger, ainsi que des pièces appartenant à des particuliers. - un album de photos des années 1920 que détient l'usine de Brousseval. - des photographies que nous avons prises d'outils, appartenant à nos informateurs, de pièces qu'ils ont fabriqué pour eux en dehors de leurs heures de travail ou d'oeuvres situées dans le département.

Par ailleurs, le Musée d'Orsay possède des photographies des modèles de Sommevoire. La Mission à l'Ethnologie et à la Culture Scientifique Technique et Industrielle Champagne-Ardenne a également effectué des relevés photographiques des modèles se trouvant au Rongeant et à Dommartin-le-Franc.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 4 Les catalogues

A partir de 1840, l'augmentation du nombre de modèles proposés à leur clientèle va obliger les fondeurs à éditer des catalogues, outils d'information et de diffusion indispensables.

Afin d'évaluer la diversité de production des fonderies haut-marnaises, nous avons procédé à un recensement de catalogues édités par ces fonderies (cf annexes).

Les modèles

Les sociétés spécialisées dans l'édition de séries en fonte de fer possédaient de véritables collections de modèles conservés dans des bâtiments réservés à cet usage : les magasins à modèles.

S'il n'est plus possible aujourd'hui de voir en l'état ces magasins, des modèles ont cependant été conservés.

On peut citer : - des modèles plâtre et fonte entreposés sur plusieurs niveaux dans le seul bâtiment qui subsiste de l'usine du Rongeant près de Joinville. On peut identifier parmi cette collection, dont certains éléments ont été déplacés et entreposés dans les locaux de la GHM Sommevoire à Dommartin-Ie-Franc, des statues religieuses et profanes, des bustes de personnages célèbres, de Marianne, des crucifix, bas-reliefs, etc.. - des modèles plâtre provenant du magasin à modèles "Le Paradis", aujourd'hui détruit, de GHM Sommevoire et qui sont entreposés dans un local appartenant à l'association des Compagnons de Saint-Pierre de Sommevoire, dénommé "le Colombier" et situé à Sommevoire.

Sources orales

Considérant que les détenteurs d'un savoir et d'une pratique sont les mieux à même de rendre leur signification aux techniques et aux objets qu'ils ont utilisés, notre principale démarche sur le terrain a été de retrouver des membres du personnel des fonderies étudiées, ainsi que des personnes ayant été en contact avec ces établissements par d'autres biais, épouses des ouvriers ou membres de famille des fondeurs, afin de recueillir leurs témoignages sur le travail, les conditions de travail et les modes de vie.

Nous avons procédé à des entretiens de type semi-directif, enregistrés pour la plupart au magnétophone. Un ensemble de questions bien déterminées a été posé au début de chaque entretien, questions privilégiées par nous, concernant par exemple l'identité de l'interlocuteur, sa date d'entrée en fonction, qui permettaient, de plus, de palier aux hésitations premières venant du fait que nos interlocuteurs ne ressentaient pas toujours, au premier abord, l'intérêt que représentait leur témoignage ; hésitations qui laissaient cependant rapidement libre cours au plaisir de donner des renseignements sur un sujet bien connu d'elles.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 S Lors de la recherche d'informateurs, nous avons essayé, afin d'obtenir une vue d'ensemble du travail dans une fonderie, de rencontrer des personnes ayant occupé des postes de travail différents.

Nous avons rencontré des ouvriers en activité bien qu'il ne leur soit pas toujours facile de nous accorder du temps après leur journée de travail, et pour la majeure partie des retraités bien souvent âgés. Ces personnes, qui ont travaillé dès l'âge de 12-13 ans, nous ont apporté de précieux témoignages sur les pratiques anciennes de moulage, sur l'évolution de l'apprentissage ou encore sur les bouleversements sociaux qui on eu lieu dans les fonderies. Des entretiens enregistrés ont été effectués au domicile de nos interlocuteurs. Nous avons rencontré certains d'entre eux plusieurs fois, à l'occasion par exemple de la remise de documents qu'ils avaient bien voulu nous confier. C'est souvent lors des premières rencontres que nous avons pu obtenir des noms d'anciens collègues pour poursuivre nos enquêtes. Nous avons également observé un groupe de mouleurs tout au long d'une journée de travail.

Au cours de ces entretiens, de nombreux thèmes ont été évoqués : l'organisation d'une fonderie, le processus de fabrication, les savoir-faire, la formation, les rapports entre les différents corps de métiers ou encore l'évolution du travail. Quelques ouvriers ayant travaillé dans plusieurs fonderies pour diverses raisons (attrait de salaires meilleurs, fermeture d'une usine), ont pu dresser des comparaisons entre ces établissements.

D'autres aspects d'ordre social ont également été abordés : les logements, les activités en dehors de l'usine, le jardinage, l'élevage, la pénibilité du travail ou d'éventuels événements d'ordre festif. En ce qui concerne ces derniers points nous avons également obtenu des témoignages de personnes qui n'ont pas nécessairement travaillé dans une fonderie comme les épouses de nos interlocuteurs ou encore des habitants des sites où nous avons enquêté.

La transcription des entretiens enregistrés nous a permis de dégager les axes principaux par site, grandes lignes historiques, organisation professionnelle, organisation sociale et de définir les autres démarches qu'il nous était nécessaire d'effectuer pour affiner ces données.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 6 (I) Ce programme élaboré en début d'année 1991 a été opérationnel, par la présence d'un chargé de mission sur le terrain (Mademoiselle Catherine DUREPAIRE) du 1er décembre 1992 au 30 novembre 1993 et de financements obtenus auprès de YEtat/Ministère de la Culture et de la Francophonie/Mission du Patrimoine Ethnologique et du Conseil Général de la Haute-Marne. Son suivi technique et scientifique a été assuré par la Mission à l'Ethnologie et à la Culture Scientifique, Technique et Industrielle Champa gne-Ardenne/Office Régional Culturel de Champagne-Ardenne.

Un convié scientifique pour ce présent programme a été constitué. Il est composé de :

• Denis WDRONOFF, Directeur de Recherches au CNRS - Gilles ALVES, Chargé de mission pour le repérage du patrimoine industriel régional Haute- Marne/Inventaire Général - louis ANDRE, Conservateur au Musée National des Techniques/Conservatoire National des Arts et Métiers - Paris - Catherine CHEMLLOT, Conservateur au Musée d'Orsay - Patrice BERTRAND, Conservateur de l'Inventaire des Richesses Artistiques de la France/Chanpagne-Ardenne - Marc ANDRE, Ethnologue Régional Champagne-Ardenne, Chef de la Mission à l'Ethnologie et à la Culture Scientifique, Technique et Industrielle Champagne-Ardenne

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 7 I - La fonte d'art, naissance et développement

Notre premier questionnement nous amène à réfléchir sur la définition même de ce concept de fonte d'art. Qu'entend-t-on par fonte d'art ? A quels produits fait-elle référence au XIXème siècle ?

Dès le deuxième quart du XIXème siècle avec l'apparition de la civilisation industrielle, les fondeurs fabriquaient aussi bien des pièces pour mécanique, fumisterie et toute industrie que du mobilier de jardin, des balcons ou des statues ; il était donc nécessaire de différencier ces diverses fabrications qui étaient pour certaines aux antipodes les unes des autres.

Dans un catalogue des établissements A. Durenne de Sommevoire de la fin du XDCème siècle, on peut lire par exemple que la distinction était faite entre : - les fontes pour bâtiments et constructions - les fontes d'art et d'ornement - les fontes de chauffage

De même, la table des matières, incluse dans un album général édité par les fonderies Capitain-Geny et Cie de Bussy (Haute-Marne) vers 1910, dans laquelle tous les produits fabriqués sont répertoriés par ordre alphabétique, permet de constater la grande diversité de production d'une fonderie (cf Volume II, p. 1 à 6).

Cette pluralité de production mentionnée sur les frontispices des catalogues édités par les fondeurs était commune à toutes les fonderies avec cependant une orientation vers une spécialisation de l'un ou l'autre de ces produits selon les établissements.

Ainsi, dans le compte-rendu de l'Exposition Industrielle, Agricole et Horticole organisée à Saint-Dizier en 1860, un journaliste note à propos de la fonderie meusienne de Montier-sur-Saulx : "La fonderie d'ornement n'est pas une spécialité pour cette usine quoiqu'on puisse le croire à la vue de son exposition ; elle fait bien l'ornement parce qu'elle fait bien de tout... en fait de fonte mécanique ; ce matériel résume tout ce qu'on peut ñire " ( 1 ).

Vers 1900, Ardouin-Dumazet souligne de son côté après une visite du Val d'Osne : "La réputation de la manufacture est due surtout à la production des fontes d'art, mais le Val d'Osne livre même à la consommation quelques objets vulgaires, il a par exemple comme spécialité les cadres de piano, les grosses fontes de bâtiment, colonnes, regards d'égout, caniveaux, candélabres et bancs pour les villes..." (2).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 8 Entre les deux termes, fonte d'art - fonte d'ornement, qui touchent au même domaine de la sculpture, le distinguo est faible et selon les textes, il est parfois difficile d'évaluer à quoi ils font référence.

Un extrait d'un catalogue de la fonderie du Val d'Osne (vers 1900), nous donne le point de vue des fondeurs : "-Mr André crée de toutes pièces l'industrie de la fonte d'ornement, il fit établir des modèles de balcons, de balustrades, de panneaux et parvint à remplacer le fer forgé... Abordant le grand art, Mr André et après lui ses successeurs, ne cessèrent de créer les modèles les plus riches en statues, vases, candélabres, fontaines monumentales... ".

Philippe Clerin, sculpteur contemporain, a distingué plusieurs types de sculptures d'après leur destination (3), en y apportant quelques modifications pour l'adapter à la fonte. Nous nous sommes fondés sur cette typologie, afin d'affiner cette distinction entre fonte d'art et fonte d'ornement :

En résumé, on peut dire que : • La fonte d'ornement regroupe des pièces ornementales qui représentent un motif conventionnel, géométrique ou des formes naturelles généralement stylisées et qui décorent un édifice, un monument, un meuble ou un objet.

• La fonte d'art regroupe : a - des pièces indépendantes, autonomes statues en pied, bustes, portraits b - des pièces monumentales, reliefs ou rondes-bosses faisant partie d'un ensemble architectural ou d'un paysage, généralement de grandes dimensions visant à décorer ou à donner une signification particulière à un site, fontaines monumentales, statues équestres, monuments commémoratifs.

Il faut également souligner que pour chacun de ces groupes (cf a et b), les sujets représentés de ces "oeuvres d'art qui sortent des moules " (4), sont aussi bien profanes que religieux.

Il convient de noter enfin que le terme fonte d'art se trouve le plus souvent associé dans les textes à celui d'industriel ; en effet, on parle de l'art industriel au XIXème siècle, époque à laquelle des perfectionnements divers au point de vue technique (amélioration des techniques de deuxième fusion) ont mené à l'application des beaux-arts à l'industrie avec la fabrication en série de produits réalisés jusque-là à l'unité et réservés à une élite : A. Darcel souligne ainsi dans un compte-rendu de l'Exposition universelle de 1867 : "... l'Industrie des fontes d'art a pris en France depuis quelques années un essor considérable, de sorte que le goût des administrateurs civils et religieux et leurs administrés pour le luxe à bon marché peut trouver amplement à se satisfaire dans le désordre du Palais du Champ de Mars..." (5)

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 9 Dans la plupart des écrits qui abordent le thème de la fonte d'art, la Haute-Marne est citée comme étant le berceau et le centre de diffusion principal de cette industrie.

Le rappel de quelques étapes de l'histoire de la fonte dans un premier temps va nous permettre de mieux situer dans quel contexte a été créée l'industrie de la fonte d'art avant d'étudier les causes de son développement puis de sa disparition progressive bien qu'elle fasse l'objet d'un regain d'intérêt depuis un peu plus d'une décennie.

1 - Naissance de la fonte d'art Le département de la Haute-Marne est un département de tradition métallurgique ; le travail du fer y est attesté dès l'époque romaine et a pris son essor au moyen-âge grâce à l'impulsion des abbayes.

C'est par l'apport des ressources naturelles dont il disposait, minerai de fer, forêts fournissant le combustible et eau procurant la force motrice que s'y est accrue une industrie, principalement orientée jusqu'au milieu du XIXème siècle, vers la fabrication de fonte et de fer bruts. Ce qui lui valu d'être classée à la tête de l'industrie sidérurgique française avec une production de 100 000 tonnes de fonte en 1860.

La fonte issue des hauts-fourneaux, tours carrées en maçonnerie de 7 à 8 m de côté remplis de couches alternées de minerai et de charbon de bois dont l'invention remonte à la fin du XVème siècle (cf p. 4, volume n), était en majorité transformée sur place en fer après traitement dans les affineries. La fonte non traitée était livrée, quant à elle, brute ou moulée directement au sortir des hauts-fourneaux.

Les hauts-fourneaux sont des installations destinées à extraire sous l'action de la chaleur et d'un réducteur, le métal contenu dans le minerai de fer. C'est ce nouveau métal, recueilli à l'état liquide dans un creuset, produit spécifique du haut-fourneau, qui a reçu le nom de fonte de fer (cf plan ci-après) (6).

L'obtention de fer à partir de la fonte se fait dans les affineries, pour cela il s'agit d'éliminer le carbone contenu dans la fonte. La fonte a des caractéristiques mécaniques inverses de celles du fer : elle est cassante, non maleable, non ductile, non soudable alors que le fer est peu cassant, maleable, ductile, soudable. (7)

Les causes de la disparition de cette industrie de base en Haute-Marne sont en partie dues à l'éloignement des mines de houille de plus en plus utilisée en sidérurgie, puis à l'invention en 1877 du procédé de Thomas permettant le traitement des minerais phosphoreux lorrains, plus riches et mieux placés par rapport aux mines de houille et aux moyens de transport (8). Le procédé Thomas sera mis en application dans l'industrie en 1883.

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Sources : Archives Départementales de la Haute-Marne 1309164 Parallèlement à cette industrie de base, il existait une industrie de transformation. Ce n'est qu'à partir de la fin du XVIIème siècle et ce jusqu'au début du XDCème siècle que l'on commença véritablement à utiliser, à l'échelle industrielle en Europe, la fonte sortant directement des hauts-fourneaux, dite fonte de première fusion, pour diverses fabrications telles que la fonte culinaire, les plaques, les tuyaux. On peut citer par exemple l'utilisation en 1664 de tuyaux en fonte moulée pour l'alimentation des grandes eaux des bassins de Versailles (9).

L'essor de l'art de fondre fut de plus facilité par l'invention au XVIIIème siècle de Reaumur : le cubilot, four qui permettait la refonte à l'état liquide des lingots sans en altérer la composition chimique et évitait la perte de fonte qui se produisait si la production de métal liquide dépassait les possibilités de confection de moules par les ateliers de moulage.

A partir du début du XIXème, la gamme de production de fontes moulées commença peu à peu à s'étendre. La fonte, perdant pied dans l'artillerie, se convertit en instruments culinaires ou en machines-outils ; entre ces deux pôles sont mentionnés au hasard des textes quelques médaillons et statuettes. (10)

En Haute-Marne, c'est à partir de 1840 et de plus en plus activement vers 1860, que les industriels haut-marnais développèrent la production de fonte moulée en seconde fusion consommant alors une partie importante de la fonte brute produite dans le département.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 11 Les deux tableaux suivants permettent de constater quelles étaient les quantités de matières premières employées et les quantités de fontes moulées par les fonderies du Val d'Osne et de Sommevoire selon des statistiques établies en 1841 (11).

SOMMEVOIRE Valeur en F Quantité Valeur Lieux Débouchés et centimes totale d'origine minerais en grains 2/3 1 400 14 19 600 territoire Matières minerais en roche 1/3 Bailly premières charbons de bois 5 200 19 98 800 bois noyaux employées plaines terre brute 40 3 120 Sommevoire territoire de castine 450 3 1 350 la grève près Cetfond 230 Frs Fontes en diverses 730 000 kg 167 000 9/10 Paris Produits les fabriqués espèces de 00 kg 1/10 Province marchandises 00

Hommes : 45 Salaires H : 3,50 2 moulins à eau Femmes : 2 F : 1 1 fourneau Enfants : 5 E : 0,45

VAL D'OSNE Valeur en F Quantité Valeur LîeuX : Débouchés et centimes totale d'origine

3 Vosges, charbons 7 004 m 22,35 156 539,40 Meuse, Haute-Marne Thonnance, Matières mines 1 980 18 35 640 Chatonrupt, Osne premières Montreuil sables 530 9 4 770 employées (près Joinville)

castines 440 3 1 320 Autigny

Produits Fonte moulée 777 807 kg 310 241 120,17 Paris et Lyon fabriqués

Hommes : 70 Salaires H : 3 Frs par jour 2 machines à vapeur : 1 de 8 CV Enfants: 25 E : 1 Frs par jour ldel4CV 1 haut-fourneau 1 four 4 chevaux

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 12 Cest à partir de cette période que la fonte, alliage de fer et de carbone (environ 2 %), a été perçue comme un exceptionnel matériau d'ornement pour l'extérieur, en raison de ses diverses propriétés.

Parmi celles-ci, on peut citer sa résistance aux intempéries car elle n'est ni gelive ni perméable à l'eau à condition d'être repeinte de manière régulière.

Cet extrait d'un compte-rendu de l'exposition qui eut lieu à Saint-Dizier en 1860 souligne d'autres atouts de ce matériau et l'intérêt dont il a fait l'objet : "... La métallurgie a fait depuis 20 ans d'immenses progrès, le fer et la fonte trouvent tous les jours de nouveaux débouchés, leur bas prix et la multiplicité des besoins auxquels ils peuvent satisfaire permettent de les approprier à tout espèce d'usage, puisque dans les arts et l'industrie, ils remplacent le bronze, le cuivre, l'étain, le bois, la pierre, etc.. La magnifique exposition de Saint-Dizier proclame hautement ces vérités, nos maîtres de forges ont fait de véritables tours de force, et nos fondeurs d'incontestables chefs-d'oeuvres...".

Dans un compte-rendu de l'exposition universelle de 1878, il est souligné que "...sans les efforts d'initiateurs tels que André, Calla et Ducel, on n'aurait pu ñire accepter une matière aussi commune que ¡a fonte de fer dans l'ornementation et la décoration... " (12).

Ce rôle de chef de file attribué à Jean-Pierre Victor André, fondateur de la fonderie du Val d'Osne en 1836 est également revendiqué dans un catalogue édité par cette fonderie : "... Mr André créa de toutes pièces l'industrie de la fonte d'ornement... ".

La lecture d'un rapport remis au Préfet de la Haute-Marne au sujet de l'exposition universelle de 1844 à Paris donne quelques renseignements supplémentaires concernant cette paternité accordée à Mr André. (13). "77 doit être rappelé que Mr André est le créateur du moulage en Champagne, on avait cru pendant longtemps que nos fontes, généralement converties en fer, n'avaient pas les qualités convenables pour être coulées en moules, aussi ne faisait-on guère que des marmites et des plaques ; Mr André essaya le premier d'employer la fonte à d'autre usages... Il introduisit d'abord dans l'intérieur des ateliers le service des grues dont on ignorait complètement les avantages, et au moulage en terre qui demandait quelquefois 8 jours pour une pièce, il substitua le moulage en sable anglais qui ne demande pas plus de 24 heures. C'est ainsi que Mr André livra au commerce une grande quantité de moulages à moitié au dessus des prix auquel on les vendait couramment dans les fonderies de Paris. Mr André fut également le premier à faire de l'ornement en fonte de Champagne et marchant avec succès dans cette voie, il offrit l'assortiment le plus complet de modèles que viennent augmenter chaque jour son zèle et son bon goût... ".

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 13 Dans ce document, il est également souligné que les autres grands établissements de la région tels Sommevoire, Brousseval, Dommartin-le-Franc, ne se sont spécialisés dans cette voie qu'à l'imitation de Mr André. Le journal de l'Exposition de Saint-Dizier en 1860 le confirme (14). En effet, au sujet de l'usine de Sommevoire, il est indiqué que : "... La fabrication de l'usine de Sommevoire consiste principalement en articles d'ornementation, elle ne fait la statue que depuis peu..." ; ou encore, au sujet de l'usine de Brousseval : "...une usine nouvelle qui ne compte pas encore une année de création s'est distinguée, nous voulons parler des hauts-föurneaux de Brousseval... elle est encore au berceau que déjà elle aborde les pièces les plus difficiles, ¡es statues en pièces battues... ".

La fonderie du Rongeant près de Joinville s'orienta vers la production de fonte d'art et d'ornement encore plus tardivement, vers 1896, après le rachat des modèles et du matériel de la fonderie Denonvilliers de Sermaize-les-Bains (Marne).

2 - Développement de la fonte d'art

L'extension urbanistique et l'abondance d'idéologies civiques et religieuses qui ont cours au XIXème siècle sont les facteurs principaux du développement de l'industrie de la fonte d'art et d'ornement durant cette période.

a/ Création d'un nouvel urbanisme L'architecture A partir des années 1830, ce sont surtout les fontes d'ornement qui sont le plus en vogue en raison de la construction en milieu urbain qui s'est fortement développée : on emploie largement la fonte pour la décoration des immeubles sous la forme de balcons, appuis de fenêtres, balustrades, grilles, panneaux de portes, impostes. Ce large éventail d'articles qui déclinent tous les styles et peuvent être adaptés à presque toutes les dimensions est placé en tête des catalogues et en occupe une grande partie.

Mais, c'est sous le second Empire qu'il va y avoir une réelle extension du marché avec la création d'un nouvel urbanisme. Des colonnes et poutres de fonte sont employées par les architectes pour la construction de nouveaux bâtiments, halles, marchés, gares ; on invente toute une architecture pour le bien être et les loisirs, une architecture de villes d'eau ; galeries, pavillons, casinos, les façades des bâtiments et des grands hôtels qui sont construits se couvrent de vérandas, marquises, balustrades. Parmi ces constructions, on peut citer les Halles de Baltard, bâtiment qui ne nous est plus connu que par des dessins et des photographies et par un pavillon transféré à Nogent-sur-Marne. Ce bâtiment a été construit de 1854 à 1860 par les architectes Felix Callet et Victor Baltard à la demande de Napoléon III qui voulait une construction métallique à l'anglaise. Le plus prestigieux exemple fut le Crystal Pallace, immense et légère structure de fonte, de fer, de verre et de bois élevé à l'occasion de l'Exposition Universelle de Londres de 1891.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 14

Avec la mise au point de l'éclairage au gaz, sous l'Empire, l'éclairage public va prendre une ampleur considérable : les premiers becs à gaz brûlent à Paris le 31 décembre 1829. Sous la Monarchie de juillet et le Second Empire, c'est toute la ville qui se couvrira de becs de gaz sous la forme de candélabres en fonte dont des centaines de modèles seront diffusés par les fondeurs, (cf p. 64 à 69, volume n).

Les espaces verts Louis Napoléon veut faire de Paris une métropole prestigieuse vidée de ses quartiers malsains, aérée, agrémentée de parcs et de jardins. La création de parcs et de jardins appartenant à l'état ou à une ville et mis à la disposition du public est en effet une innovation de ce nouvel urbanisme.

Ainsi, sont créés à Paris, les bois de Boulogne et de Vincennes, les parcs Monceau, des Buttes Chaumont et Montsouris et plus de vingt quatre squares.

A l'exception des jardins des Tuileries, du Luxembourg et des Plantes, les parisiens doivent à Napoléon lu et à Haussmann, nommé Préfet de la Seine en juin 1853, la quasi-totalité de la verdure mise à leur disposition.

Corrélativement apparaît un nouveau mobilier urbain permettant de décorer ces espaces verts ainsi que les larges boulevards et avenues : bancs, kiosques, urinoirs, grilles, arceaux qui bordent les pelouses, plaques de respiration des arbres, vases et statues qui concernent plus particulièrement le domaine de la fonte d'art.

Tous ces objets "... donnent à Paris puis aux villes qui suivent son exemple, une identité stylistique qui ne se dégradera que dans la seconde moitié du XXème siècle..." (15).

Nous l'avons dit, les villes de province imiteront le modèle de Paris et utiliseront de ce fait les produits proposés dans les catalogues édités par les fondeurs comme le montrent ces deux exemples des villes d'Angers (Maine et Loire) et de Poitiers (Vienne).

Le point de départ, pour la Ville d'Angers, fut la commande par cette ville en 1855 d'une fontaine semblable à celle exposée par la fonderie du Val d'Osne à l'Exposition Universelle. En 1858, à l'occasion d'une Exposition Industrielle et Artistique, un jardin fut créé pour la circonstance autour de cette fontaine. Ce jardin fut supprimé après l'exposition mais à la demande des administrés, le jardin du Mail fut définitivement tracé et ouvert au public le 15 mai 1859. Peu à peu d'autres pièces en fonte vinrent compléter la décoration de ce jardin (cf p. 47 à 50, volume n).

On y trouve quatre lions, fontes des Etablissements Durenne qui entourent la fontaine, un kiosque à musique, des vases, deux fontaines à boire édifiées entre 1890 et 1892 pour servir de support à deux groupes sculptés en bronze et enfin deux statues installées plus tardivement.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 15 Ces deux statues, "la Venus d'Arles", reproduction antique du Musée du Louvre et la "Venus" de Mathurin Moreau furent commandées à la Société du Val d'Osne, en fonte bronzée ton vert antique, en 1909, de même qu'une autre statue, "Pomone", qui se trouve place Monprofit. Elles correspondent respectivement aux modèles n° 196 planche 592, n° 401 planche 609 et n° 423 présentés sur le catalogue diffusé par cette fonderie (16) (cf p. 51 à 53, volume II).

Toutes trois furent commandées par la Ville d'Angers conformément aux clauses contenues dans le testament d'Auguste Giffard mort en 1893 qui fit de la Ville d'Angers sa légataire. Cette personne avait déjà offert à la ville, de son vivant, d'autres statues et vases pour orner un autre jardin, le jardin des plantes, afin de former : "... un ensemble que l'on ne trouve ni à Nantes, ni dans les plus grandes villes de Province..." (17), propos qui souligne la rivalité qui pouvait exister entre les villes pour la décoration de leurs espaces verts.

Parmi les statues qui ornent le jardin des plantes, on trouve : "Diane de Gabies", fonte Durenne, copie de la statue grecque du Musée du Louvre "Nymphe surprise" de Mathurin Moreau, fonte du Val d'Osne "Faune à l'enfant", fonte du Val d'Osne, réplique du modèle antique (cf p. 54-55, volume II))

Deux ont disparues : "Flore" et "la joueuse d'osselets" et deux ont été déplacées, "Diane à la biche" et "Velleda". On peut y voir également un vase en fonte fondu par les Etablissements Durenne en 1908 et offert par les frères Robert, sculpteurs à Paris.

Parmi les autres pièces en fonte agrémentant la Ville d'Angers, on trouve : - place de la Visitation : le Monument "Marguerite d'Anjou", un bronze de trois mètres de Mathurin Moreau, réalisé par la fonderie du Val d'Osne en 1902. Ce monument envoyé à la fonte en 1942 a été remplacé par une statue en pierre de Belmondo en 1949. - place Giffard Langevin : une fontaine ornée de la "source" de Sauvageau exécutée par la même fonderie et à la même période. - square Jeanne d'Arc, une "Jeanne d'Arc", fonte de Martin Pierson, fondue dans la fonderie de Tusey (Meuse) en 1909. - et enfin, Jardin de la Roseraie : un groupe d'enfants provenant des Ets Durenne.

Le document qui suit permet de situer l'emplacement de ces divers lieux ornés de fonte.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 16 ANGERS CENTRE VILLE

Principaux emplacements des pièces en fonte

A : Jardin du Mail B : Jardin des plantes C : Place Monprofit D : Place de la Visitation E : Place Giffard Langevin F : Square Jeanne d'Arc G : Jardin de la Roseraie L'exemple suivant concerne le projet d'aménagement prévu en 1895 pour la transformation du Parc de Blossac de Poitiers ; bien qu'il n'ait pas vu le jour, il nous parait significatif des choix que pouvaient opérer les architectes pour la décoration des parcs et jardins et l'importance qu'ils accordaient à l'utilisation des statues et objets en fonte proposées par les fondeurs.

Cet aménagement devait se faire à partir d'un jardin anglais déjà pourvu de fontes provenant des Etablissements Durenne de Sommevoire, quatre statues et une fontaine Wallace qui sont toujours en place aujourd'hui (cf p. 33 et p. 57 à 59, volume H).

Le parc, outre des kiosques à musique, un casino, des candélabres, un obélisque et une fontaine monumentale, devait être décoré de nombreux objets d'art et statues ; reprenant en cela le modèle de beaucoup d'espaces verts créés au XIXème siècle. La mention des fonderies d'où provenaient ces fontes n'apparaît pas dans le projet mais l'on reconnaît certains modèles diffusés par le Val d'Osne, tels le Printemps, L'été, L'automne, L'hiver de Mathurin Moreau (cf p. 14, volume II) ou encore "Le valet de chiens" de Jacquemart pour n'en citer que quelques uns. En ce qui concerne les modèles inspirés de statues antiques, ils étaient diffusés par la plupart des fonderies et correspondaient au goût de l'époque, de même que d'autres sujets tels la statue de Jeanne d'Arc et la Liberté.

Voici la nomenclature de ces statues et objets d'art, ainsi que le plan indiquant les lieux où ils devaient être installés : 1 - Le pêcheur terres cuites 2 - La laveuse 3 - Diane à la biche (Versailles) 4 - Les trois grâces (Germain Pilon) 5 - Groupe d'enfants (Versailles) 6 - La lecture (Mathurin Moreau) 7 - L'écriture 8 - Lutteurs (Musée de Florence) 9 - Colonne et statue de Jeanne d'Arc 10 - Polymnie (Louvre) 11 - Julie en Cérès (Louvre) 12 - Diane de Gabies (Louvre) 13 - Buste de Mr de Blossac -pierre 14 - Piqueur équestre (Le Nordez) 15 - Le fusilier (Diebolt) 16 - Le Zouave 17 - Printemps 18 - L'été (Mathurin Moreau) 19 - L'automne 20 - L'hiver 21 - Vases et piédestaux 22 23 - Jeunes pages (Mathurin Moreau) 24

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 18 25 - Vase et piédestal 26 - La Liberté (Lequèsne) 27 - Vase et piédestal 28 - Fontaine monumentale 29 - Cérès assise (Musée de Berlin) 30 - Penseur 31 - Julien (Michel-Ange) 32 - Moïse 33 34 35 - Vases et piédestaux divers 36 37 38 - Le génie du travail (Germain Pilon) 39 - La pudicité (Louvre) 40 - Apollon du Belvédère (Vatican) 41 - Vesta (Mathurin Moreau) 42 - L'Industrie (Mathurin Moreau) 43 - La Science 44 - Euterpe (Louvre) 45 - Vase et piédestal 46 - Le Commerce (Mathurin Moreau) 47 - L'Agriculture 48 - Obélisque commémoratif 49 - Vases et piédestaux 50 51 - La dévideuse (Salmson) 52 - Vases et piédestaux 53 54 - Groupe de femmes 55 - Mauresque à la fontaine (Cotte) 56 - Vase et piédestal 57 - Venus (Allegrain) 58 - Venus de Milo (Louvre) 59 - Milon de crataire (Puget) 60 - Valet de chiens (Jacquemart) 61 - Aurore (Mathurin Moreau) 62 - Crépuscule

Cette liste est très représentative des sujets proposés par les fondeurs. En effet, outre les statues d'antiques célèbres ou d'animaux, l'allégorie mythologique, civique ou morale, très souvent féminine, occupait une large part des catalogues : les quatre saisons, l'industrie, le commerce, la science et l'agriculture, etc..

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Projet de transformation du Parc de Blossac Poitiers (Vienne)

Paris - Imprimeur P. Dupont, 1895

Source : Bibliothèque Municipale de Poitiers Les travaux d'alimentation en eau et d'assainissement

Durant le XIXème siècle, d'importants travaux de captation de sources, d'adduction d'eau et d'assainissement sont réalisés afin d'améliorer la vie quotidienne et l'hygiène des villes ; ce qui conduit à l'érection de nombreuses fontaines publiques. Cette multiplication des points d'eau représentait de plus un atout pour la lutte contre les incendies. Face à ce marché, les fondeurs ont proposé de nombreux modèles de fontaines dans leurs catalogues.

L'exemple de la Ville de Raon l'Etape (Vosges) est très représentatif de ces préoccupations de l'époque au sujet de l'eau. Ainsi, au XIXème siècle, dans les quartiers de cette ville qui comptait moins de 5 000 habitants, douze fontaines et dix-huit lavoirs furent implantés.

Nous savons, grâce à divers documents provenant des délibérations du Conseil Municipal de cette ville, que plusieurs fontaines furent érigées entre 1863 et 1864, qu'en 1865 la ville en a commandé de nouveau à la même maison Ducel et fils de Paris, quatre en fonte bronzée et deux ordinaires, puis une dernière le 2 mars 1884 à la Société du Val d'Osne pour la somme de 2 300 frs (18).

Onze de ces fontaines sont encore en état de marche aujourd'hui et ont été classées sur l'inventaire des Monuments Historiques le 19 décembre 1986 ; la douzième fut détruite en 1914. Ces fontaines sont les suivantes (19) : 1 - L'enfant et le cygne : devant le théâtre 2 - La Concorde : rue Anatole France 3 - La fontaine du bonheur : quai de la Victoire 4 - Diane de Gabies : avenue du Général de Gaulle. 5 - La chèvre : à l'angle des rues victor Bajón et Jules Ferry 6 - L'automne : place de la résistance 7 - La pomme de pin : à l'angle des rues Adrien Sadoul et Auguste Ferry 8 - L'enfant : rue de Wessual 9 - Les quatre lions : à l'angle des rues Abbé Claude et Jules Ferry 10 - Les trois coliches : rue Jules Ferry 11 - Minerve : rue Aristide Birand (cf plan page 24 )

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 21 A l'occasion de l'Exposition Universelle de 1900, le comité d'admission de la classe 29, consacrée aux travaux des villes, envoya des circulaires aux ingénieurs des ponts et chaussées et aux Maires de toutes les communes de France comptant au moins 50 000 habitants leur demandant de faire figurer à l'exposition de la classe, les plans et devis des travaux municipaux les plus importants qui auraient pu être constaté au siècle dernier en soulignant que les travaux d'alimentation en eau, d'assainissement et d'éclairage des villes pourraient y figurer avec avantage.

Bien que n'ayant pas 5 000 habitants, la Ville de Raon l'Etape fut accueillie favorablement par le comité car "... les travaux exécutés ont eu pour résultat de Élire de Raon une ville saine, coquette et pourvue d'eau en abondance..." (20).

Les fontaines avaient une double vocation, elles étaient non seulement utiles mais devaient être aussi des éléments de décoration et d'embellissement. Ainsi à Raon l'Étape en 1869, le conseil municipal souligne que les fontaines commandées sont des "objets d'art" de même, dans une monographie consacrée à cette ville, l'auteur déclare que : "... Raon l'Étape est une ville fort coquette, en effet les rues en sont bien pavées et éclairées au gaz et ses places sont ornées, pour la plupart, de fontaines monumentales... "(21).

Bien sûr, des fontaines en marbre ou pierre avaient déjà été construites sur les places des grandes villes avant le XIXème siècle mais au cours de ce siècle, on en éleva également dans les petites villes et dans les nouveaux quartiers des grandes agglomérations. Dans un article sur les bronzes d'art, Servant souligne en 1880 que le premier type de fonte d'art réalisé fut une fontaine. Ainsi, à Paris : "... La fontaine de la place de Louvois, exécutée par le sculpteur Klagmann, puis sont venues les fontaines de la place de la Concorde, jusque là de semblables pièces n'avaient été exécutées qu'en bronze, pierre ou marbre..." (22).

Parmi les fontaines exécutées dans les fonderies, celles que l'on rencontre le plus souvent encore aujourd'hui sont les fontaines dites monumentales et les fontaines Wallace.

Une fontaine monumentale comprend en général trois parties distinctes (23) : - le bassin inférieur en fonte, établi sur une fondation solide en béton, - le motif sculptural en fonte, avec une ou deux vasques superposées ou bien sans vasque selon les sujets représentés, - la distribution d'eau, les tuyaux d'alimentation dissimulés dans l'intérieur du sujet et terminés par les ajustages d'où s'échappent les jets d'eau sous l'action de la pression.

Les fondeurs proposaient dans leur catalogue de nombreux élément différents pour l'aménagement de ces trois parties distinctes ; ces variantes permettaient ainsi aux clients d'élaborer un modèle plus ou moins unique à leur convenance.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 22 L'exemple des fontaines Argence de la Ville de Troyes (cf p. 28-29, volume II) et du jardin du Mail de la Ville d'Angers (cf p. 26-27, volume n) toutes deux réalisées par les fonderies du Val d'Osne, permet ainsi de constater que le motif sculptural de ces deux fontaines jaillissantes est identique puisqu'on y reconnaît les sculptures de Mathurin Moreau, Acis, Galathée, Neptune et Amphitrite qui figurent à la planche 532 de l'album n° 2 du Val d'Osne (cf p. 30, volume II) ; mais, pour les sujet des jets d'eau, la Ville d'Angers a choisi le motif de la grenouille planche 530bis, du catalogue n° 2 du Val d'Osne (cf p. 32, volume II), alors que la Ville de Troyes a préféré le motif du cygne, n°78 planche 530 ainsi que deux naïades n°52 planche 531 (cf p. 31, volume II).

L'utilisation de figures allégoriques représentant les fleuves étaient un thème également très souvent utilisé pour le décor des fontaines. A Melun, la partie supérieure de la fontaine Saint Jean représente des figures symbolisant la Marne, la Seine et l'Yonne, trois fleuves qui traversent le département ; de même, dans un projet de fontaine élaboré pour la ville de Poitiers, trois statues formant la base et supportant la vasque inférieure représentaient la Vienne, le Clain et la Boivre. A Paris, les fleuves de France, la Seine, la Garonne, la Saône et la Loire sont symbolisés sur la fontaine Louvois.

Les autres sujets représentés étaient, de même que pour la statuaire utilisée à d'autres fins que le décor des fontaines, inspirés de la statuaire antique : bacchantes, nymphes, esclaves, allégories des saisons, amours et animaux.

Les figures allégoriques étaient présentées très souvent en tétrades et en grande majorité féminines (24) ; ont peut citer le Printemps, l'Été, l'Automne, l'Hiver ou encore l'Industrie, le Commerce, la Science, l'Agriculture figurant l'esprit de l'époque comme le présente cet ingénieur civil dans un rapport pour la transformation du Parc de Blossac de la Ville de Poitiers : "... ces statues répondent aux aspirations d'une ville où les sciences et les lettres sont un grand honneur et à la situation d'un département où l'agriculture est prospère, le commerce important et l'industrie en voie de rapide développement...". (25)

Les fontaines Wallace, fontaines à boire inspirées des "drinking fountains" de Londres portent le nom de leur donateur Sir Richard Wallace, un anglais résidant à Paris au XIXème siècle, qui offrit à la Ville de Paris vers 1870 une cinquantaine de ces fontaines. Il existe trois modèles de fontaines Wallace créés par le sculpteur nantais Charles Lebourg :

- le modèle le plus connu, orné de quatre cariatides et supportant un dôme d'où un filet tombe dans une vasque (cf p. 33, volume II),

- un modèle plus petit qui est composé d'un bouton-pressoir, - un modèle applique dont il ne reste à Paris plus qu'un exemplaire en service.

Ces fontaines dont on peut voir encore de nombreux exemplaires à Paris (cf p. 34 à 39, volume II) ont été largement diffusées par catalogues avec de multiples variantes selon les fondeurs. Le modèle orné de quatre cariatides existait par exemple avec des colonnettes à la place de cariatides.

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Ville de Raon l'Etape n° 1 à 11 : implantation des fontaines

Source : Service Inventaire - DRAC Nancy

-tu, Aujourd'hui, elles sont toujours utilisées ; cependant à la demande du conseil d'hygiène publique du département de la Seine, les gobelets attachées par une chaîne dont elles étaient pourvues ont été supprimés en 1952. La Société Générale d'Hydraulique et Mécanique en a repris la fabrication à Sommevoire à l'usage des villes et des particuliers.

b - Le foisonnement d'idéologies civiques et religieuses

C'est sous la Illème République que l'on assista à l'essor de la statuaire commemorative avec pour conséquence une augmentation de la production des fonderies dans le domaine des fontes et des bronzes d'art. En effet, les statues des grands hommes se multiplièrent de même que d'autres types de monuments commémoratifs civiques et funéraires de 1881 à 1914, période que Maurice Agulhon qualifia de "phase de la ville sculptée".

La République bénéficia d'une mise en scène grâce à l'urbanisation créée sous Haussmann ; et c'est ainsi que de nombreuses statues et monuments furent élevés un peu au hasard dans les parcs, sur les places et les carrefours à tel point qu'à cette époque de création à grande échelle de la sculpture publique, on parle même de "statuomanie". A Paris, sur environ 240 monuments glorifiant un personnage, 65 % furent édifiés entre 1880 et 1914. En fait, cette frénésie monumentale relève du combat des symboles : l'Eglise ayant les cathédrales, les statues de la vierge et des saints, la République contre-attaque par une panthéonisation des grands hommes par la profusion des allégories républicaines ou patriotiques. Dans les deux cas, les initiateurs furent mus par la volonté d'éduquer le peuple en lui proposant des héros à admirer.

L'exaltation des gloires nationales et la République

Les grands hommes furent honorés pour leurs actes et leurs talents. On représenta les grands philosophes tels Voltaire et Rousseau, les héros de la Révolution, Desmoulins, Danton, Condorcet, les Républicains de 1848, Ledru-Rollin, Arago ; on rendit aussi hommage aux hommes tôt disparus, Gambetta ou le Sergent Bubillot et à tous ceux qui ont contribué à l'émancipation intellectuelle et au progrès scientifique : Victor Hugo, Raspail, Pasteur ...

Les fonderies haut-marnaises ont largement été sollicitées pour la fabrication de telles pièces réalisées le plus souvent en bronze et de manière unitaire alors que des sujets plus généraux, tels Vercingétorix ou Jeanne d'Arc, symbolisant après la défaite de 1870 des exemples porteurs d'espoir, étaient proposés en fonte et en différents exemplaires dans les catalogues. On peut voir ainsi dans l'album n°2 du Val d'Osne, une Jeanne d'Arc équestre (planche 624e) ou une Jeanne d'Arc debout avec épée (planche 624b).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 25 Cette ferveur se développa en province. Un lien biographique unissait généralement le héros représenté à la cité qui l'honorait (26) : c'est ainsi que la Ville de Loudun (Vienne) décida d'élever une statue à Théophraste Renaudot car : "c'est le plus illustre et le plus méritant des enfants de Loudun... de toutes parts on applaudit l'idée d'un monument digne de ¡a mémoire de cet homme de bien et de génie, de ce grand philantrope... Chacun voudra s'associer à cette oeuvre vraiment populaire..." (27).

Cette statue fut réalisée par les Etablissements Durenne de Sommevoire en 1894 (cf p. 24, volume II). On peut citer également le "Monument aux Girondins" de Bordeaux, très significatif en ce qu'il réunit : "deux puissants ressorts de l'esprit public de l'époque : l'inspiration républicaine et la fierté locale...". (28).

En effet, ce monument à la République et aux Girondins mis au concours par la Ville de Bordeaux le 27 mars 1887 devait, comme cela est spécifié dans un registre des délibérations du Conseil Municipal, rendre hommage "à la forme de gouvernement qui nous assure l'avenir tout en consacrant le souvenir de ceux qui travaillèrent à établir la République par la force et la conviction de leurs principes et dont on sait quel éclat ils ont jeté sur notre pays et en particulier sur notre département qu'ils ont illustré..." (29).

La réalisation de ce monument fut confiée à plusieurs fonderies : - la fonderie Denonvilliers de Sermaize-sur-Sault (Marne) qui a fondu les quatre chevaux-reptiles et la Liberté. - les Etablissements Leblanc-Barbedienne de Paris qui exécutèrent le premier groupe réalisé pour le bassin de la République, "Le mensonge, le vice et l'ignorance". - les Etablissements Durenne de Sommevoire (Haute-Marne) qui se virent confier "le triomphe de la République", les coquilles, les grenouilles, les roseaux et les six enfants.

- enfin, c'est la fonderie du Val d'Osne (Haute-Marne) qui se chargea de la "République", de tout le bassin du "triomphe de la Concorde" et des quatre chevaux-. (30)

Le symbole visuel de la République apparut lors de l'établissement de la première République sous la forme de l'allégorie féminine de Marianne, incarnation de la liberté et de la République. Les bustes à l'effigie de Marianne trônèrent bientôt dans toutes les mairies. Des sculpteurs statufièrent Marianne entourée d'allégories place de la République ou place de la Nation à Paris et dans de nombreuses villes. Maurice Agulhon évoque à ce sujet "un parc de quelques cinq cents effigies de Marianne en espace public".

On trouve de nombreux modèles de bustes et de statues de Marianne dans les catalogues édités par les fondeurs dont le célèbre modèle créé par Bartholdi (cf p. 90, volume n) et diffusé par le Val d'Osne.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars ¡994 26 En résumé, on peut affirmer "qu'il n'y a pas dans toute l'histoire de notre pays et de sa capitale, des périodes où une société est davantage exprimé par la sculpture, ses motivations, ses références, ses convictions et aussi ses espoirs..." (31).

Il faut également ajouter que parmi cette production, un grand nombre des statues en bronze fut fondu sous l'occupation conformément à la loi du 11 octobre 1941 : "Nous, Maréchal de France, Chef de l'état français, décrétons : il sera procédé à l'enlèvement des statues et monument en alliages cuivreux sis dans les lieux publics et les locaux administratifs afin de remettre les métaux constituants dans le circuit de la production industrielle ou agricole...".

Renouveau du catholicisme

La lecture des catalogues contenant les produits proposés par les fondeurs permet également de constater qu'ils exploitèrent largement le renouveau du catholicisme qui eut lieu à cette époque, notamment entre I860 et 1880, avec pour conséquence, l'ouverture d'un immense marché de la statuaire religieuse et du mobilier d'église.

Parallèlement à des entreprises telles que la Sainterie de Vendeuvre-sur-Barse (Aube) ou l'Union Internationale Artistique de Vaucouleurs (Meuse) (nommée jusqu'en 1881 : l'Institut catholique) qui produisaient respectivement des statues en terre cuite et des statues en plâtre à caractère religieux et fournissaient le quartier Saint-Sulpice à Paris, lieu de diffusion et de vente de l'art religieux, les fonderies proposaient un grand nombre de modèles différents de vierges, saints, christs, fonds baptismaux, chemins de croix, chaires... en fonte.

Il y eut même une étroite collaboration entre la fonderie de Tusey (Meuse) et l'Union artistique ; cette dernière recevant une importante redevance de la fonderie de Tusey pour la location de modèles (32).

L'engouement pour le culte mariai soutenu par Pie XI qui proclama en 1854 le dogme de l'Immaculée Conception, les nouveaux saints et les pèlerinages qui en découlèrent tels ceux de la Salette et de Lourdes, l'agrandissement des séminaires et la création des écoles confessionnelles suite à la loi Falloux votée en 1850 offrirent de grands débouchés à cet art religieux (33 ).

L'extension des cimetière entraîna également la création de pièces en fonte pour la décoration de ces lieux, croix, urnes funéraires, entourages de tombes, etc..

Les fondeurs offraient des produits pour tous "les goûts et toutes les bourses" ce qui permettait, comme le nota ce journaliste dans un compte-rendu de l'Exposition Industrielle, Agricole et Horticole de Saint-Dizier en 1860 : "... que la piété fíliale, la reconnaissance, l'amitié ne fussent pas bornées par la fortune. L'ouvrier pauvre, le coeur reconnaissant, l'ami sincère, peuvent aujourd'hui, pour quelques sous, déposer un souvenir durable sous la tombe d'un père et d'un ami...".

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 27 A la fin du XIXème siècle, on assista peu à peu au ralentissement de la création de nouveaux modèles, dans l'industrie des fontes ornementales notamment, en raison du coût élevé que cela représentait, de l'hésitation de plus en plus grande de la part des architectes à utiliser des pièces mises à leur disposition dans le commerce et diminuant de ce fait leur apport créatif personnel, et également à cause de l'utilisation trop importante jusqu'alors du matériau fonte avili par l'abus, dira un critique anglais en 1892 (34).

En 1907, Guimard lança les "fontes artistiques, style Guimard" qu'il confia à une entreprise de Saint-Dizier (Haute-Marne) et dont les modèles font l'objet d'un catalogue détaillé (35). Il désirait ainsi relancer l'achat sur catalogue d'éléments décoratifs mais cette entreprise s'avéra être un échec et il resta le principal client de ses productions (36). Alors que la sculpture religieuse continua à se développer, rendre hommage à un grand homme après la guerre 14-18 par la statue ou le monument devint de plus en plus rare tandis que toutes les communes élevèrent alors des produits en série adaptés à ce nouveau marché, palmes, coqs, médaillons, poilus, etc.

La fabrication des candélabres se poursuivit à partir des années 30. Ainsi relève-t-on dans un registre des délibérations du Conseil Municipal de Poitiers, lors de la séance du 16 février 1929 relative à l'électrification du Parc de Blossac, deux propositions faites par les Maisons Durenne et du Val d'Osne.

Puis, après la seconde guerre mondiale, le mobilier urbain se transforma, la fabrication en série cessa progressivement. Certes, on continua à honorer les célébrités par des sculptures publiques mais en moins grand nombre. On avait en effet cessé d'admirer les statues de personnalités ; de plus leur esthétisme semble avoir été souvent mis en cause notamment par la presse écrite de l'époque. On peut donner pour exemple cet extrait du journal "Le voleur" du 17 octobre 1879 intitulé "La statuomanie" cité par Yvon Bizardel où l'on parle d'un "ramas de bonshommes qui sort du pavé obstruant les voies de toute bicoque... (37). Yvon Bizardel cite également un extrait de la "Quinzaine" où il est dit : "Paris est rempli de statues affreuses". En Haute-Marne, une seule fonderie poursuit sporadiquement cette production jusque dans les années 70 avant que l'apport de nouvelles techniques et l'ouverture d'un nouveau marché, qui correspond au désir des municipalités de renouveler leur mobilier urbain, permettent la relance de cette fabrication.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 28 Notes

1 L'exposition de Saint-Dizier. journal consacré au compte-rendu de l'exposition industrielle, agricole et horticole de Saint-Dizier, 10 octobre 1860, page 66. 2 ARDOUIN-DUMAZET, Voyages en France : Haute Champagne. Basse Lorraine, page 244. 3 Philippe CLERIN, La sculpture, toutes les techniques, page 17. 4 ARDOUIN-DUMAZET, page 243 5 DARCEL, Bronze et fonte modernes, exposition universelle, Gazette des Beaux-Arts, juillet-septembre 1867, page 438. 6 Pierre BEGUINOT, Une grande industrie haut-mamaise disparue, page 66. 7 Pierre BEGUINOT, Une grande industrie haut-marnaise disparue, page 74. 8 Pierre BEGUINOT, Une grande industrie haut-marnaise disparue, page 60. 9 J.P. LE THOMAS, La métallurgie, page 82. 10 Annette LAUMONT, L'Usine Nouvelle, juin 1982, p. 159 11 Archives Départementales de la Haute-Marne, 209 M 10. 12 SERVANT, Exposition universelle de 1878, page 11. 13 Archives Départementales de la Haute-Marne, 212 M 3. 14 Dixième numéro, l'exposition de Saint-Dizier, 26 septembre 1860. 15 Françoise CHOAY, page 207. 16 Archives Municipales d'Angers, lettre du Val d'Osne, 20 mars 1909. 17 Archives Municipales d'Angers, lettre du 19 mars 1884, lettre adressée au maire par Auguste Giffard. 18 Archives Départementales des Vosges, Epinal, 372.0.10. 19 Conservation Régionale de l'Inventaire Général de Lorraine, rue du Haut-bourgeois, Nancy. 20 Archives Départementales des Vosges, extrait du rapport de Mr DELOERE, Inspecteur général des Ponts et Chaussées, 1905 - 372.0.16. 21 Archives Départementales des Vosges -HT 278. 22 SERVANT, Exposition universelle de 1878. 23 E.D. LAMI, Dictionnaire encyclopédique et biographique de l'industrie des arts industriels.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 29 24 Maurice AGULHON, Imagerie civique et décor urbain, page 39. 25 Archives Municipales de la Ville de Poitiers, Liasse 2127. 26 Maurice CRUBELLIER, Histoire de la France urbaine, tome 4, page 425. 27 Registre des délibérations du Conseil Municipal de Loudun, 11 janvier 1892. 28 Maurice AGULHON, Histoire de la France urbaine, page 595. 29 Délie MÜLLER, Revue de l'Art, n° 50, page 65. 30 Ville de Bordeaux, Musée d'Aquitaine, le monument aux Girondins de Bordeaux, 1982, pp. 9-10. 31 Georges POISSON, L'âge d'or de la statuomanie parisienne, page 70. 32 Abbé DURAND, Les statues dites de Saint-Sulpice, page 27. 33 Annette LAUMON, Usine Nouvelle, juin 1982. 34 François CHASLIN, Les fontes ornées. 35 Ce catalogue se trouve au Musée de Saint-Dizier. 36 Leonardo BENEVOLO, Histoire de l'architecture moderne. 37 Yvon BIZARDEL, Les statues parisiennes de grands hommes, p. 149.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 30 II - Etude du marché de la fonte d'art : diffusion, processus de commandes

La politique commerciale que menaient les fondeurs se présente sous divers aspects, constitution de modèles, édition de catalogues, participation aux expositions universelles, appel à des représentants et à des intermédiaires, réponse à des appels d'offre. Nous allons étudier ces diverses pratiques mises en oeuvre par les fondeurs au travers de deux types de commandes, d'une part celles qui correspondent aux pièces de série, d'autre part, celles qui correspondent aux pièces unitaires ; deux cas de figures, qui engendraient des rapports différents entre clientèle et fondeurs de même qu'entre sculpteurs et fondeurs.

1 - Les fontes d'art de série Ces fontes de série, désignées ainsi car elles étaient fondues en de multiples exemplaires, étaient le plus souvent choisies par la clientèle d'après les catalogues édités par les fondeurs.

Les catalogues Les premiers catalogues sont apparus vers 1840. Auparavant étaient édités des "recueils" qui proposaient surtout de la fonte d'ornement : "... à la fois des exemples de qualité exécutés d'après ¡es dessins d'architectes ou d'ornementistes souvent réputés et des ornements que l'on trouvait tout fondus dans les ateliers..." (\)

Tout d'abord, d'un aspect relativement sommaire, ces catalogues ou albums gravés deviennent très vite consistants et luxueux et proposent une collection très importante de modèles disponibles dans différentes tailles et avec une possibilité de combinaisons multiples : "véritableprêt à poser en mesures industrielles..." (2)

Ces modèles dont les dimensions, dénominations et prix d'achat étaient imprimés sur les catalogues étaient la propriété exclusive des fondeurs : 'Tous les modèles dessinés ci-contre sont la propriété exclusive de Mr A. Durenne qui en poursuivra , conformément à la loi, l'imitation, la contrefaçon et le contre-moulage". (Catalogue A. Durenne de Sommevoire).

Certains mêmes étaient déposés, comme l'atteste ce document provenant de l'Institut National de la Propriété Industrielle qui indique le dépôt en date du 27 mai 1910 d'un modèle de candélabre par la Société Anonyme des Hauts-Fourneaux et Fonderies du Val d'Osne (cf p. 12, volume II).

Les catalogues coûtaient chers aux fondeurs en raison de la multiplication des modèles qu'ils entraînaient et de leur propre coût de fabrication ; ils étaient donc vendus : "... l'Album Général se vend 45 francs remboursables après commande de 2000 francs et est divisé en fascicules ..." (Album du Val d'Osne vers 1900).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 31 En ce qui concerne la fonderie du Val d'Osne, ces fascicules numérotés de 1 à 40, étaient eux-mêmes vendus de 0,75 F à 3,50 F probablement selon le nombre de planches qu'ils contenaient (Album du Val d'Osne vers 1900).

De peur que la clientèle, en recherche constante de nouveauté, n'hésite à commander un modèle édité à une date plus ancienne que la date d'achat, ces catalogues étaient de ce fait rarement datés.

Le schéma de base des albums ou catalogues varie rarement. Ils débutent par les barres d'appui, balcons, balustrades, panneaux de porte et impostes ; les pièces détachées pour les grilles suivent cet ensemble, puis, se succèdent les candélabres privés et publics, les fontaines et le mobilier de jardin auquel les statues profanes sont souvent associées, séparées des statues et du mobilier religieux par les cheminées et chenets.

L'âge d'or des catalogues se situe entre 1840 et 1880 ; à partir de ce moment, les catalogues, bien que consistants, contiennent de moins en moins de créations nouvelles. A ce propos, Guettier note en 1882 : "... dans ces dernières années, l'état des affaires n'a pas poussé les fabricants à créer de nouveaux modèles..." (3).

Les commandes d'après les catalogues

Nous devons préciser que les archives des entreprises, notamment les carnets de commandes, ayant été le plus souvent détruites, il nous a été plus aisé d'étudier la partie de la clientèle des fondeurs que constituaient les municipalités ; ces dernières ont en effet conservé dans leurs archives des traces de commandes passées aux fonderies.

Pour les commandes de fontes de série, les municipalités s'adressaient aux fonderies soit directement, soit par l'entremise d'intermédiaires :

1 - Dans le premier cas, les municipalités expliquaient quel type de pièce elles désiraient se procurer et les fondeurs leur soumettaient plusieurs projets en leur envoyant des extraits des catalogues. En 1884, le Maire de Raon l'Etape, désireux d'acquérir une nouvelle fontaine pour la ville : "s'est mis en rapport avec la Société des forges du Val d'Osne pour avoir des modèles qu'il a l'honneur de soumettre au Conseil Municipal en le priant de faire un choix ; le Conseil, vu l'exposé du Maire, adopte le modèle n° 10768 planche 242 du catalogue de la Société du Val d'Osne dont le prix est de 2 300 francs... ".

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 32 Il était possible d'obtenir des variantes à partir d'un même thème en utilisant divers modèles contenus dans les catalogues comme le montre l'exemple suivant : En février 1901, suite à un contact avec le Val d'Osne pour la commande d'une fontaine avec pour thème central la statue "Source" de Sauvageau, la municipalité d'Angers reçut les propositions suivantes : Projet n°l - Ensemble n° 12691, planche 404 composé de la Source de Sauvageau et d'un grand piédestal à sirènes Projet n°2 - Ensemble n° 11264, planche 310 composé de la Source de Sauvageau avec piédestal à enfants et dauphins. Nous pourrions, sur les écussons, faire venir en fonte les armes de la Ville d'Angers. Projet n° 3 - Ensemble n° 11648, planche 315 composé de la Source de Sauvageau, d'une grande vasque à quatre jets et d'un piédestal à enfants et dauphins Projet n°4 - Ensemble n° 10966 composé de la Source de Sauvageau avec piédestal Projet n°5 - Ensemble n° 11904 composé de la statue de la Source à l'enfant d'Iselin avec vasque à coquille et piédestal à dauphin Projet n°6 - composé de la Source de Sauvageau avec piédestal CA Projet n°7 - composé de la Source de Mathurin Moreau sur piédestal L Projet n°8 - composé de la Source de Carrier-Belleuse sur piédestal L Projet n°9 - composé de la Source de Carrier-Belleuse (pendant du modèle précédant) sur piédestal L Projet n°10 - composé de la naissance de Venus - n° 491- par Mathurin Moreau ; pour ce projet ce qui conviendrait le mieux comme piédestal serait un piédestal en rocher et rocaille. Projet n° 11 - composé de la Source de Carlier sur piédestal L (4)

Cest le projet n°6 d'un prix de 2 100 F en fonte bronzée qui fut finalement adopté comme on peut le lire dans un courrier adressé par le Val d'Osne à l'architecte de la Ville d'Angers en juin 1901 (5).

Le fait de commander directement aux fonderies permettait d'obtenir des réductions: "... nous accordons sur les prix du tarif mentionnés dans notre lettre une remise de 10 % et le franco de port et d'emballage. Ces conditions sont les meilleures que nous fassions aux municipalités qui prennent le parti très sage de nous commander directement... " (6)

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 33 2 - Cependant, certaines villes s'adressaient à des intermédiaires : en janvier 1888, le Conseil Municipal de Poitiers approuve le traité passé entre le Maire et Mr Mérié, quincaillier à Poitiers, pour l'acquisition d'une fontaine Wallace.

Puis, en novembre 1888, la Ville de Poitiers commande au même sieur Mené : "... divers objets d'art en fonte, destinés à l'ornementation du nouveau jardin créé dans la promenade de Blossac, à savoir : 2 groupes d'enfants montés sur un dauphin à 250 Frs l'un, 2 statues enfants flûteurs à 200 Frs l'une "(7).

Ces statues, provenant des Etablissements Durenne de Sommevoire avaient été exposées par la Maison Durenne en 1887 dans le Parc de Blossac de la Ville de Poitiers à l'occasion d'un concours proposé à l'administration municipale par l'intermédiaire de Mr Mérié, négociant à Poitiers ; démarche qui devait faire partie de la politique commerciale des fonderies qui avaient également des représentants qui se déplaçaient dans les villes ; ainsi, dans un extrait d'un registre du Conseil Municipal de Poitiers, il est question au sujet de fournitures de tuyaux d'un "voyageur de la Maison Durenne, maison chargée de la première fourniture..." (8).

Autres processus de commandes

Les fonderies haut-marnaises telles que le Val d'Osne et Sommevoire avaient leur siège social ainsi que des bureaux et magasins à Paris. De ce fait, la clientèle pouvait donc également faire son choix, sans l'aide des catalogues, en regardant les produits exposés dans ces magasins d'expositions : "... la Société possède dans la capitale, au siège social, 58 boulevard Voltaire, de superbes magasins remplis de modèles les plus riches et les plus variés, en même temps que les plus artistiques, soit en bronze, soit en fonte d'art. Nous y avons admiré une église entière, nous voulons dire tout son mobilier : autel, retable, statues, Christ, chaise à prêcher, appuis de communion, fonds baptismaux, stations de chemins de croix, bénitiers, chandeliers, candélabres, lustre, etc.." (9)

Un autre moyen permettait aux fondeurs de mettre leur production en valeur : leur participation aux expositions universelles. En Haute-Marne, l'usine du Val d'Osne est la première des fonderies qui prend part à ces expositions.

La liste suivante contient les pièces envoyées par Mr André, maître des forges au Val d'Osne, à l'exposition universelle qui eut lieu à Paris en 1844 : Statues : 1 Faune 1 Psyché 1 Venus 1 Jeanne d'Arc 1 Baccante 1 Enfant à l'oie 1 Coquille

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 34 - Ornements religieux divers, 4 - Ornements divers, 10 - Candélabres, 6 - Pilastres, 3 - Consoles, 8 - Croix, 14 - Balcons, 10 - Grands balcons, 3 - Barres d'appuis, 2 - Balustrades, 2 - Palmettes, 4 - Frises, 16 - Panneaux, 20 - Balustres, 4 - Têtes rondes bosse, 13 - Coupes, 2 - Pompe, 1 - Dessus de porte, 1 (10)

A l'occasion de ces expositions, les Préfets demandaient que des ouvriers et contremaîtres de spécialités différentes s'y rendent afin d'examiner les produits des diverses industries de leur département ; ces personnes devaient ensuite rédiger un rapport sur leur visite.

En 1855, c'est Monsieur Victor Bouillet, mouleur au Val d'Osne qui fut chargé d'observer les pièces exposées par les fonderies à l'exposition universelle de Paris ; pour cela, une somme de 100 Frs lui fut allouée.

Dans son rapport, on peut lire que : "... les exposants français sont Mrs Barbezat et Cie du Val d'Osne, Ducel de Pocé, Colas frères de Montiers-sur-Saulx, Muel ]\àlz de Tussy, Colla Brochón et Bechu de Paris, Martin et Viriez frères de Sommevoire, Pinard frères de Marquise Roussel, Sarthe... " (11)

En 1862, à l'exposition universelle de Londres, on note la participation de Messieurs Ducel (Pocé), Barbezat (Val d'Osne) et Durenne (Sommevoire) dont "les fontes brutes sont aussi remarquables pour la finesse des coutures que par le grain serré de leurs surfaces polies" (12).

Les mêmes fondeurs exposent à l'exposition de 1867 à Paris : "à Mr Ducel qui fût longtemps seul, sont venus se joindre Mr Barbezat, puis Mr Durenne et MrZegut..." (13)

En 1889 : "les fontes d'art sont fort belles ; Sommevoire et le Val d'Osne ont un grand nombre de statues ou groupes d'animaux qui ornent les jardins et représentant dignement la Haute-Marne" (14).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 35 Pour la même exposition, la société des Hauts-Fourneaux et Fonderies de Brousseval est également présente avec divers produits : "à droite et à gauche dans des niches dont les cintres sont supportés par d'élégantes colonettes en fonte, émergent deux statues lampadaires grandeur nature d'un très beau style ; elles sont entourées de différents motifs d'ornements en fönte moulée ...au milieu de l'entrée, un magnifique vase frappe les yeux, il est remarquable par la fínesse de son moulage... " (15).

Ces participations aux expositions universelles avaient des retombées commerciales importantes pour les fonderies ; ainsi, la Ville d'Angers va commander en 1855 une fontaine au Val d'Osne "semblable à celle qui est au centre de la nef du Palais de l'exposition moyennant la somme de 14 000 Frs..." (16)

Des médailles étaient décernées aux meilleurs produits et les fondeurs n'omettaient pas de signaler ces gages de qualité sur leurs catalogues.

Parmi les récompenses obtenues par la Société A. Durenne, on peut citer 2 médailles : Londres 1862 Médaille d'honneur : Porto 1865 Médaille d'or : Paris 1867 Grand diplôme d'honneur : Amsterdam 1869 Diplôme d'honneur : Altona 1863 Grand prix : Rome 1870 Diplôme d'honneur : Vienne 1873 Grand prix : Paris 1878 Grand diplôme d'honneur : Amsterdam 1883 Hors concours (membre du jury) : Paris 1889 Grand prix, 2 médailles d'or : Paris 1900 (17)

Ces médailles sont toujours exposées dans un bureaux de l'usine de Sommevoire au côté d'un buste de Antoine Durenne (cf p. 13, volume n).

Rapports sculpteurs-fondeurs

Les expositions offraient également aux sculpteurs la possibilité de trouver des commanditaires tout comme le salon annuel qui se déroulait à Paris. On peut supposer que les fondeurs trouvaient là certains des modèles qu'ils se procuraient pour la fabrication de fonte d'art de série : ainsi, le modèle "le Printemps" qui figure dans le catalogue n°2 du Val d'Osne à la planche 571 fut présenté au salon de 1863: "... nous ne saurions omettre parmi les oeuvres intéressantes, une figure de bronze, "le Printemps" par Mr Ma thurin Moreau... ( 18) (cf p. 14, volume II).

Il nous a été difficile d'établir quels types de contrats unissaient les fondeurs et les sculpteurs. En effet, les fonderies que nous avons plus particulièrement étudiées ne possèdent plus de documents de ce genre ; de même il existe peu ou pas d'archives personnelles de sculpteurs.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 36 Dans un ouvrage consacré aux sculpteurs animaliers, Cécile Ritzanthaler évoque à propos du sculpteur Rouillard la concrétisation de plusieurs projets sinon de vulgarisation de son oeuvre tout au moins de commercialisation : "... une première rencontre avec la Société des Hauts-Fourneaux et fonderies du Val d'Osne, anciennes maisons J.P. V. André et J.J. Ducel et fils, spécialisés dans les ornements en fönte de fer et créateurs de l'industrie de la fonte d'art, lui permet d'adapter et de vendre en pleine propriété à Ducel-Val d'Osne quatre modèles d'animaux que la fonderie se charge de fondre en fonte de fer et de patiner façon bronze..." (19) (cf p. 15-16, volume H)

Le fait que le sculpteur Mathurin Moreau fut administrateur de la fonderie du Val d'Osne, comme il le souligne lui-même dans une lettre manuscrite au Maire de la Ville d'Angers, (cf p. 18, volume II) peut s'expliquer par le grand nombre de modèles qu'il exécute pour cette fonderie.

Dans le catalogue n°2 du Val d'Osne nous avons en effet répertorié plus de quatre vingt modèles de statues profanes et plus de trente modèles de statues religieuses exécutés par ce sculpteur qui fut également Maire du 19ème arrondissement à partir de 1878.

La création de modèles La constitution d'une collection de modèles était obligatoire pour les fondeurs ; en effet, les pièces en fonte étaient obtenues à partir d'un modèle en matériau dur dont on prenait l'empreinte à l'aide de sable lors de l'opération de moulage. Les fondeurs ont donc fait appel à des sculpteurs de renom afin qu'ils réalisent ces modèles. Nous voyons dans cette démarche qui consistait à travailler en collaboration avec des artistes une autre raison de l'utilisation de la terminologie Fonte d'art.

Parmi ces sculpteurs, on peut citer : - Pour le Val d'Osne : Henri Emile Allouard (1844-1929) Frédéric Auguste Bartholdi (1834-1904) Jean-Baptiste De Gay (1802-1862) Isidore Bonheur (1827-1901) Auguste Cain (1821-1894) Albert Carrier-Belleuse (1824-1887) Emile Chatrousse (1829-1896) Georges Diebolt (1816-1861) Henri Jacquemart (1824-1896) Charles Lebourg (1829-1906) Eugène Lequesne (1815-1887) Mathurin Moreau (1821-1912) Pierre Rouillard (1820-1881) Charles Marie Vicomte du Passage (1848-1926)

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 37 Pour les établissements A. Durenne de Sommevoire Jules Becquet (1829-1907) Charles Capellaro (1826-1899) Paul Delabrière (1829-1912) Eugène De La Planche (1836-1891) Corneille Theunyssen (1863-1918)

Pour les établissements Capitain-Geny de Bussy Felix Charpentier (1858-1924) Edouard Houssin (1847-1917) Marie-Joseph Lefevre (? - 1906) Louis-Auguste Roubaud (1828-1906)

Nous avons pu déterminer que ces sculpteurs ont créé des modèles pour les fonderies indiquées grâce à la lecture des catalogues éditées par ces établissements. En effet, les noms des sculpteurs sont inscrits le plus souvent à côté des modèles qu'ils ont fourni aux fondeurs.

Certains de ces sculpteurs, dont la liste établie ci-dessus n'est pas exhaustive, qui créaient ces modèles en plâtre destinés à être fabriqués en série sous la forme de pièces en fonte de fer, travaillaient pour des fonderies concurrentes. On peut voir ainsi les noms de Carrier-Belleuse, Becquet, Moreau apparaître à la fois sur les catalogues du Val d'Osne et de Sommevoire. Cependant, il est parfois difficile de déterminer l'origine exacte de certains modèles car il est arrivé qu'à l'occasion de faillites d'entreprises concurrentes, certaines fonderies ont augmenté leur propre collection en rachetant les modèles de ces entreprises. Ce fut le cas pour les établissements Capitain-Geny. Ces derniers achetèrent la collection de la fonderie Denonvilliers de Sermaize-les-Bains dans la Marne, pour le Val d'Osne qui enrichit sa collection avec les modèles des établissements Ducel de Pocé avant d'être racheté par les établissements Durenne de Sommevoire en 1931. Cest ainsi que les modèles de sculpteur Du Passage qui sont répertoriés dans l'inventaire des modèles de Sommevoire, réalisé à l'initiative de la Conservation Régionale des Monuments Historiques de Champagne-Ardenne, proviennent du Val d'Osne.

Les fondeurs n'ignoraient pas l'importance que pouvait revêtir pour leur clientèle la renommée des sculpteurs auxquels ils faisaient appel ; c'est pourquoi les noms de ces artistes sont notés sur les catalogues aux côtés des modèles qu'ils ont créés (ex. p. 14, volume U, planche 571, catalogue du Val d'Osne, nom de Mathurin Moreau).

Le rôle primordial des sculpteurs est également souligné dans ce rapport fait par Alfred Darcel lors de l'exposition des arts industriels à Londres en 1862 . Alfred Darcel écrit au sujet d'une fonderie anglaise : "-... La coalbrookdale company coulent des fontes d'art il est vrai, mais modelées par des mains françaises ; nous avons vu le nom de Mr. Carrier sur le socle d'un groupe de deux enfants et celui de Mr Cain sur la terrasse de quelques animaux..." (20).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 38 Les fondeurs ne travaillaient pas uniquement à partir de modèles créés par des sculpteurs de leur époque, ils éditaient également des copies d'antiques célèbres, et des copies d'oeuvres de sculpteurs des XVIème, XVII et XVIHème siècle.

Sur le catalogue du Val d'Osne on trouve ainsi : Apollon du belvédère antique du Musée du Vatican la Vénus de Milo antique du Musée du Louvre Diane à la biche antique du Musée de Versailles le Tombeau des Médicis à Florence de Michel Ange (1475-1564)

Les copies se retrouvaient même sur les catalogues de fonderies concurrentes telles que le Val d'Osne ou Sommevoire. On peut citer par exemple : Diane de Gabies antique du Musée du Louvre ou encore Vénus au bain par Allegrain (1710-1795)

Le dépouillement de catalogues du Val d'Osne et de Sommevoire de la fin du XIXème siècle permet de constater que parmi ces copies, la majorité sont des copies d'originaux conservés au Musée du Louvre. Florence Rionnet note à ce sujet dans son mémoire qu'il existe à Paris de nombreux ateliers de moulage au XIXème siècle : "- A côté des ateliers de "création" au service des sculpteurs s'établissent quelques ateliers d'édition parmi lesquels l'atelier du Louvre ... dont la fonction est de multiplier la reproduction d'une oeuvre originale afin de répondre à la demande de ses clients : institutions (musées, écoles) ou particuliers... " (21).

L'inventaire réalisé en 1990 à l'initiative de la Conservation Régionale des Monuments Historiques de Champagne-Ardenne sur des modèles provenant des établissements Durenne de Sommevoire laisse apparaître que cette fonderie faisait partie de cette clientèle puisqu'on y trouve quelques surmoulages qui portent le cachet de l'atelier du Louvre.

Ardouin-Dumazet signale en 1900 que le Val d'Osne : "... s'est adressé aux artistes, a fait mouler les belles oeuvres du Louvre et de Versailles. Quand l'usine fut fondée, on avait déjà amené des mouleurs du Musée du Louvre pour organiser le travail dans ce vallon ignoré..." (22)

La concurrence obligeait les fondeurs à posséder toujours de nouveaux modèles, mais ces modèles qui étaient entreposés dans des bâtiments réservés à cet usage, les magasins, coûtaient cher : Guettier, auteur au XIXème d'ouvrages sur la fonte le souligne : "... depuis quelques années, le besoin de modèles est devenu si grand que plusieurs maîtres de fonderies ont cru convenable de consacrer à cette partie du matériel des dépenses considérables : les usines iront à leur ruine si elles cèdent au besoin de changement aujourd'hui si présent et qu'il n'est possible de contenter qu'en vendant assez cher pour que les frais de modèles soient couverts..." (23).

En 1882, il note avec satisfaction qu'à l'Exposition de 1878, les fonderies ont paru marquer le pas et présentent les mêmes collections qu'elles avaient offertes aux concours précédents. Le grand épanouissement des fontes ornementales prend donc fin vers 1880 et bien que les catalogues demeurent épais, on y voit peu de créations nouvelles.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 39 2 - Les fontes d'art unitaires Nous avons choisi de nommer ainsi les pièces qui étaient conçues à l'unité par les fonderies parallèlement à la fabrication de fontes d'art de série.

Ces pièces qui correspondaient à des commandes particulières étaient de ce fait réalisées à l'unité puisqu'elles représentaient des sujets émanant du choix des commanditaires. Le plus souvent monumentales, certaines pouvaient être cependant de dimensions moins importantes telles que les bustes par exemple. La liste de ces créations uniques fondues dans les fonderies apparaît parfois dans les catalogues comme c'est le cas pour l'album Général des Fontes d'art édité par les établissements Capitain-Geny et Cie de Bussy (1908-1909) (cf p.19 à 20, volume II). Mais le plus souvent c'est grâce à la lecture d'autres documents que nous avons pu retrouver la trace de ces oeuvres.

Ainsi, les principaux travaux exécutés en bronze ou en fonte d'art dans les usines de la Société des établissements Durenne de Sommevoire furent inventoriés dans une plaquette à l'occasion de la visite du Ministre de l'Intérieur le 18 septembre 1905 ; nous n'en citons ici que quelques uns : Statue d'Alexandre Dumas Père 3m45, par Carrier-Belleuse, érigée dans la forêt de Villers-Côtterets Statue de Miron-Costin 3m20, par Hegel, érigée à Jassy (Moldavie) Statue de François Arago 3m45, par Oliva, érigée à l'Observatoire de Paris Statue "Santa Anna" 3 m, par Croisy, pour le Costa-Rica Groupe "le vin" 3m65, par Holweck, érigé dans le square de Chaillot à Pris Statue "La France armée" 3m25, par Turcan, érigée à Marseille Statue de Théophraste Renaudot 2 m60, par Charron, érigée à Loudun Monument de Limoges 2m75 et 3 m, par Thabard - Cinq figures avec accessoires, cartouches, chapiteaux, guirlandes Monument de Champlain figure principale, 4m50, par Chèvre pour Québec Fontaine de Bellevue (Seine et Oise) par Théunisson, figure, mascaron et ornementations Monument des Girondins exécution partielle par Durilâtre et Charpentier pour Bordeaux Monument de Pallade un buste et une figure de 2 m, par Dubois pour Bucarest Monument de la République un groupe femme et lion de 3 m, quatre statues assises de 2m50 par Coulon pour Vichy Monument des aéronautes par Bartholdi pour Paris - groupe surmonté d'un ballon

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 40 Les oeuvres réalisées par le Val d'Osne sont, quant à elles, répertoriées dans un ouvrage que consacra en 1912, l'abbé Maréchal à sa paroisse d'Osne-le-Val ; parmi ces pièces ont peut citer : "Groupes Pégase" 5m50, bronze doré par Granet et Steiner - Pont Alexandre II à Paris Monument des Girondins exécution partielle pour la Ville de Bordeaux par Debrie "Jeanne d'Arc" équestre, grandeur nature par M. Moreau et Le Nordez - Monument de Montebourg "Le dénicheur d'aigles" bronze, grandeur nature par Gossin pour la Ville de Paris - Salon de 1899 Monument du Capitaine Gereaulx par Granet pour Liboume Monument Rochambeau 3m20, par Hamard pour l'Amérique Monument Jacques Cartier 2m60, par Barreau pour Saint-Malo Marguerite d'Anjou 3m20, par M. Moreau pour la Ville d'Angers Monument de JJ. Rousseau par Carrier-Belleuse pour Montmorency "La Vierge de Rome" 12 m, pour la République du Chili "Monument Terrier" par Marx pour la Ville de Dreux

La lecture de ces listes d'oeuvres permet de constater que les commandes provenaient aussi bien de pays étrangers que de la France. L'Association pour la Sauvegarde et la Promotion du Patrimoine Métallurgique Haut-Marnais avec le concours d'EDF mène une recherche depuis octobre 1992 auprès de nombreuses villes du monde, Alger, Riyad, Buenos Aires, Rio, Québec, etc. afin de recueillir de la documentation concernant des monuments fondus par les fonderies haut- marnaises pour l'étranger.

Plusieurs cas de figures se présentent en ce qui concerne les commanditaires de ces pièces uniques. En effet, ces commandes pouvaient provenir d'initiatives municipales, d'initiatives d'origine privée avec formation d'un comité ou enfin d'initiatives répondant aux dons de particuliers.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 41 Les initiatives municipales

Les municipalités avaient le choix entre la commande d'une oeuvre présentée au Salon ou la commande d'une oeuvre pour l'exécution de laquelle un concours avait été préalablement organisé.

Cinq à six mille oeuvres étaient présentées chaque année au Salon, parmi les plus gros acheteurs figurait la Ville de Paris ; ainsi, celle-ci a consacré en 1887, 30 000 Fis pour des sculptures destinées à être fondues en bronze (24).

D'autres oeuvres présentées au Salon correspondaient à des commandes précises ; en effet, une création personnelle de grande envergure ne pouvait être entreprise par un sculpteur sans qu'il soit sûr de la vendre, cette discipline engageant des frais importants d'équipement, de matière première et un travail de longue haleine : "... Le salon se complète par quelques morceaux de statuaire décorative qu'on ne saurait apprécier justement qu'en les voyant érigées sur les places publiques qui les attendent. Mr Mathurin Moreau, avec le concours de l'habile Lienard a fait le modèle d'une fontaine ornementale, Mr Bartholdi expose aussi une fontaine destinée à la Ville de Colmar..." (25)

De même, la statue "Marguerite d'Anjou" commandée par la Ville d'Angers à Mathurin Moreau et fondue par le Val d'Osne est présentée au Salon de 1902 sous le numéro 2727 ; le 1er juillet de la même année le Val d'Osne doit envoyer un courrier au Maire d'Angers afin de lui demander si le socle destiné à recevoir la statue est prêt car : "nous sommes dans l'obligation de retirer dans ¡es trois jours du Salon le groupe en bronze Marguerite d'Anjou de Mr Mathurin Moreau... " (26).

Lors de l'organisation d'un concours, les sculpteurs devaient se soumettre à des règles précises ; le 27 mars 1887 la Ville de Bordeaux met au concours un monument à la République et aux Girondins pour lequel le règlement exige : "outre les plans, une maquette au l/20e et un devis au montant de deux cent mille francs..." (27).

Le sculpteur dont le dessin avait été choisi, exécutait le modèle grandeur nature en plâtre d'après une réduction en terre cuite. Il est difficile d'affirmer comment le fondeur était choisi. Parfois le sculpteur procédait lui-même à ce choix ; lorsque René de Saint-Marceaux, sculpteur rémois (1845-1913) reçut la commande après un concours en 1904 du Monument de l'Union Postale à Berne (cf p.21, volume II), l'artiste visita plusieurs fonderies et son choix se porta sur Capitain-Geny..." (28).

Dans d'autres cas, la municipalité s'étant adressée directement à une fonderie, celle- ci se chargeait du choix du sculpteur ; ainsi, lors de la commande d'une fontaine aux établissements Durenne en 1863, le Conseil Municipal de Melun reçut un courrier d'Antoine Durenne demandant un délai pour son sculpteur Klagmann qui "souhaitait faire une oeuvre remarquable... " (29)

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 42 Parfois même pour une oeuvre de grande envergure, on faisait appel à plusieurs sculpteurs et fondeurs : "Les commandes modèles et fontes sont réparties entre le plus grand nombre par souci de rapidité, de justice distributive. Tous les contrats sont semblables, les modèles sont payés 6 000 Frs, la fönte 5 000 Frs... ". Cet exemple de procédé concernant les sculptures destinées à orner le Trocadéro en 1878 se retrouve à Bordeaux où le monument aux Girondins fut confié à quatre fonderies : Denonvilliers, Leblanc-Barbedienne, Durenne et le Val d'Osne.

Il arrivait également que les fonderies, ayant appris qu'une ville désirait ériger un monument, proposaient d'elles-mêmes leur service ou demandaient le nom du sculpteur chargé du projet afin de se mettre en contact avec lui comme on peut le voir dans ce courrier adressé par le Val d'Osne au Maire de la Ville de Saint- Etienne en 1901 : "... Nous vous serions très reconnaissants de nous dire où en est la question du monument à ¡a mémoire de votre illustre compatriote Francis Garnier, car ce monument comportera certainement des bronzes : statue, buste ou motifs d'ornementation, nous serions désireux d'être chargé de leur exécution, et vous nous obligeriez en nous faisant connaître le nom de l'artiste chargé de la statuaire..." (31)

Les fondeurs pouvaient également trouver dans la presse spécialisée des annonces d'adjudications déposées par les municipalités ; pour la Haute-Marne, c'est le journal local "L'ancre de Saint-Dizier" qui contenait ces annonces ; nous y avons trouvé des adjudications concernant des fournitures en fonte pour les arbres des promenades de la Ville de Bordeaux ou encore pour des candélabres en fonte (32) : "3 avril 1889, adjudications prochaines Bordeaux 25 avril, fournitures en fonte pour les arbres des promenades, 10-120 Frs - Renseignements à l'Hôtel de Ville".

Initiatives d'origine privée

Dans le cas de ces initiatives non municipales, la démarche était similaire (33). Un comité constitué pour la circonstance, d'un président, d'un secrétaire, d'un trésorier, lançait une souscription communale ou nationale. Une fois l'argent collecté, il passait commande à un sculpteur. Parfois, les sculpteurs ayant appris le projet pouvaient également proposer leurs services. Le renom du sculpteur dépendait de la commande et de l'argent recueilli mais bien souvent le choix se portait sur un artiste originaire de la ville ou de la région où devait être érigé le monument ; sculpteur le plus souvent formé à l'école des Beaux-Arts et demeurant à Paris.

Dans une étude consacrée aux monuments commémoratifs élevés en Languedoc- Roussillon, Olivier Poisson souligne ce ".. recours à des artistes enfants du pays ; artistes artisans demeurés au pays mais également les artiste parvenus au faite de la notoriété et résidant à Paris..." (34).

Ainsi, dans le " journal de Loudun" du 20 mai 1894, qui relate l'inauguration à Loudun (Vienne) d'une statue de Théophraste Renaudot, l'origine régionale du sculpteur, Alfred Charron, résidant à Paris, -originaire de la Vienne- est mis en exergue : "... l'auteur de cette statue est un vrai Poitevin né à Poitiers en 1863 ; Mr Charron qui vient de recevoir à juste titre les palmes académiques, a fait ses études artistiques sous la direction de Cavalier de Barrias et de Coutan-Sor, il a été logis te au concours pour le prix de Rome et médaillé à l'école des Beaux- Arts...".

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne • Rapport Final - Mars 1994 43 Une fois la statue ou le monument achevés, le comité en faisait don à la municipalité, qui devait de ce fait l'entretenir, lors d'une cérémonie d'inauguration. Ces cérémonies étaient souvent célébrées avec faste : le 5 juin 1893, le Conseil Municipal de Loudun vote ainsi l'affectation d'une somme de 5 000 Frs pour les fêtes qui devront avoir lieu en août pour l'inauguration du monument (35).

De même, le baron de Lespraut, Président du comité chargé du monument "au sire de Joinville" à Joinville (Haute-Marne), statue en bronze dont l'exécution fut confiée à la fonderie du Val d'Osne (cf p.22, volume II), fit appel à une société de Paris, spécialisée dans l'ornementation et la décoration pour fêtes et cérémonies, pour l'inauguration qui eut lieu en 1861 (cf p.23, volume II).

L'exemple de la statue de Loudun nous permet d'ouvrir une parenthèse sur la manière dont procédait les sculpteurs pour créer leur modèle ; en effet, le journal de Loudun que nous avons déjà cité ci-dessus, donne quelques renseignements sur la genèse de la statue de Théophraste Renaudot (cf p.24, volume II)) : "... quand l'artiste a arrêté dans son esprit les grandes lignes de son oeuvre, il essaie de traduire sa conception en modelant la terre glaise... cela donne une réduction de la statue, c'est le moulage de ce premier essai que nous avons vu exposé à Loudun en janvier 1893. Cette première épreuve terminée, l'artiste s'attache à une seconde un peu plus grande (0m95) et d'après un modèle vivant... Enfin, l'artiste entreprend la dernière esquisse qui est de la grandeur de la statue puisque c'est sur elle que se fera le moulage... Quand cette statue est terminée, la tâche de l'artiste est presque finie ; celle du mouleur commence, il débute par enfermer la statue dans un bloc de plâtre qu'il soutient avec des fers, la statue se trouve ainsi moulée en creux dans le plâtre, puis il enlève morceau par morceau la terre de la statue ce qui donne une grande cage de plâtre qui a intérieurement la forme de la statue ; ce moule creux convenablement nettoyé avec des pinceaux est ensuite enduit de savon liquide qui empêche le plâtre, qui se coule ensuite dans ce moule, de faire corps avec lui ; une fois ce dernier plâtre sec, il ne reste plus qu'à briser le moule pour mettre à jour le deuxième plâtre qui reproduit la statue exécutée en terre glaise... ".

Dans cet article, quelques détails concernant les opérations du moulage et de la fonte effectuées par les Etablissements Durenne de Sommevoire (cf liste des oeuvres réalisées par les fonderies p. 19-20) sont également décrits : "... c'est sur cette statue en plâtre transportée aux Hauts-Fourneaux de Sommevoire (Haute- Marne), ateliers de Mr Durenne, qu'a été faite la fonte en septembre 1893, de la manière suivante : la pièce à couler est d'abord entourée de sable réfractaire, sable tellement fin que, pilé dans une cavité avec un marteau, il devient fort dur ; le fondeur opère donc ainsi sur le modèle en plâtre mais il ne prend ses moulages que par fragment en laissant chacun d'eux en place ; puis, quand ce moulage est terminé, chaque partie est enlevée laissant le plâtre intact, ensuite toutes sont réunies formant un nouveau moule et la coulée se fait... ".

Nous supposons que les choix des fondeurs s'opéraient conformément à ceux exposés dans le cas des initiatives municipales. Ainsi le sculpteur choisissait lui- même le fondeur ou bien le comité s'adressait directement à une fonderie.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 44 Dons de particuliers

Ces dons permettaient aux municipalité d'ériger des monuments, statues ou fontaines à moindre frais. En retour, les donateurs avaient des exigences plus ou moins importantes :

Ainsi, pour l'érection d'une fontaine qui fut exécutée par les Etablissements Durenne de Sommevoire, la Ville de Melun reçut d'un sieur Lainville, natif de cette ville, une somme de 12 500 Frs. Cette somme ne représentant que la moitié de l'argent nécessaire, cette personne offrit même d'avancer à titre de prêt sans intérêts, la seconde moitié de la somme. En échange, il demanda que la fontaine soit nommée "Fontaine Saint-Jean", Jean étant le prénom de son père (36).

La municipalité d'Angers dut faire face à des exigence plus considérables : à la suite du décès en 1893 de Mr Auguste Giffard, la Ville d'Angers devint le légataire universelle à charge d'exécuter certaines clauses au nombre desquelles se trouvait l'érection de plusieurs statues. Dans son testament, ce Mr Giffard avait spécifié de manière précise quelles devaient être ces statues avec leur prix exact si elles correspondaient à des oeuvres de série, ou une évaluation si un modèle devait être créé. Sans rien y changer, la Ville d'Angers se conforma à ce projet. C'est ainsi que l'on peut voir dans cette ville de nombreuses fonte d'art de séries ou uniques provenant des fonderies du Val d'Osne et de Durenne Sommevoire (cf page 16).

Les fonderies exécutaient aussi bien des pièces en fonte qu'en bronze. Pour les pièces de série, le matériau fonte a été le plus souvent utilisé en raison de son prix de revient plus économique. Dans une lettre de proposition adressée par le Val d'Osne à la Ville d'Angers, les prix proposés pour un même projet réalisé en fonte ou en bronze peuvent tripler voir quadrupler si le choix du client se porte sur le bronze :

Projet 1 Fonte Bronze 4 500 Frs 16 500 Frs Projet 2 Fonte Bronze 5 400 Frs 17 500 Frs Projet 3 Fonte Bronze 8 250 Frs 28 000 Frs (37)

Pour les pièces unitaires, le bronze apparaît être le matériau le plus demandé par les commanditaires.

Il faut souligner que le bronze était considéré comme un matériau plus noble que la fonte : "Certes la fonte n'a pas la patine et la pureté de lignes, privilège du bronze et des métaux précieux, mais le Val d'Osne a su tirer un admirable parti de cette matière terne et sans vie... "(38)

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 45 D'ailleurs, les fondeurs avaient bien relevé cette réticence première vis à vis de la fonte et Jean-Pierre Victor André, fondateur du Val d'Osne, inventa un procédé pour bronzer la fonte au lieu de la peindre : "Par des procédés nouveaux d'electrolyse, brevetés lui appartenant, elle recouvre directement la fonte d'un cuivre adhérent, sans interposition de couches intermédiaires, qui altèrent toujours la pureté des formes ; ces produits sont connus sous le nom de bronze mixte du Val d'Osne... " (39)

En ce qui concerne la reproduction industrielle de modèles en bronze, les fonderies haut-marnaises ne semblent pas avoir tenté de rivaliser avec les entreprises parisiennes telles que celles de Susse et Barbedienne qui, vers 1840, instituent le contrat d'édition ; ce qui va permettre... "la reproduction à grande échelle des sculptures" et le développement énorme de cette activité en quelques décennies (40).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 46 Notes

1 François Chaslin ; Les fontes ornées ou l'architecture des catalogues 2 Gilbert Gardés ; Art et technique dans le département de la Loire, p. 418 3 François Chaslin ; les fontes ornées ou l'architecture des catalogues 4 Archives Municipales d'Angers - B 3 M21 5 Archives Municipales d'Angers - B 3 M21 6 Archives Municipales d'Angers - B 3 M21 : courrier du Vaî d'Osne au Maire 22/12/1908 7 Archives Municipales de la Ville de Poitiers : cahier de délibération du conseil municipal 1887 ->1890 8 Archives Municipales de la Ville de Poitiers : registre de délibération du conseil municipal 16/02/1888 9 Abbé Hubert Maréchal, notices sur Osne-le-Val, p. 266 10 Archives Départementales de la Haute-Marne 212 M 3 11 Archives Départementales de la Haute-Marne 212 M 5 12 Alfred Darcel ; Les arts industriels à Londres, 1862 13 Alfred Darcel ; Bronzes et fontes modernes, exposition universelle, 1867, p. 438 14 Archives Départementales de la Haute-Marne 212 M 10 15 Francis Laur ; Les mines et les usines en 1889, p. 479 16 Archives Municipales de la Ville d'Angers : dossier Service des Eaux, 10 117 17 Fascicule écrit à l'occasion du Ministre de l'Intérieur, 18 septembre 1905, collection particulière 18 Paul Mantz, Salon de 1863, p. 54 19 Céline Ritzenthaler, Rouillard, un grand animalier sous le second Empire, l'Estampille, déc. 91, p. 72 20 A. Darcel ; Les arts industriels à Londres, p. 553 - Gazette des Beaux-Arts année 1862 21 Florence Rionnet ; Historique de l'atelier de moulage du Louvre, 1848-1927 22 Ardouin-Dumazet, p. 244 23 François Chaslin ; Les fontes ornées ou l'architecture des catalogues 24 John Millier : ateliers d'artistes, p. 55 25 Paul Mantz, Salon de 1863, p. 56 26 Archives Municipales de la Ville d'Angers 83 M 6 27 Délie Müller : un chef d'oeuvre républicain, p. 65 28 Fontes, n° 9 - Niai 1993, p. 17 29 Bulletin municipal de Melun, décembre 1979, p. 21 30 Anne Pingeot ; La sculpture du XIXème siècle, une image retrouvée, p. 303 31 Gilbert Gardes, p. 419 32 Archives Départementales de la Haute-Marne folio 1248 33 Georges Poisson ; L'âge d'or de la statuomanie parisienne, p. 60 34 Olivier Poisson ; Sculpteurs enfants du pays, p. 76 35 Registre des délibérations du conseil municipal de Loudun, 26 mars 1886 -> 31 juillet 1893 36 Bulletin municipal de Melun, Décembre 1979, p. 20 37 Archives Municipales de la Ville d'Angers 83 M 21 38 Ardouin-Dumazet ; Voyage en France, p. 243 39 Extrait d'un catalogue du Val d'Osne - année 1903 40 Catherine CHEVILLOT : Les stands industriels d'édition de sculptures à l'Exposition Universelle de 1889 : l'exemple de Barbedienne, p. 61

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 47 Ill - Le Travail de la fonte aujourd'hui : changements, évolution

Selon les dernières statistiques établies au 31 décembre 1991, les fonderies haut- marnaises, au nombre de douze, employaient 2 377 salariés. L'effectif total des salariés de l'industrie des métaux dans le département était de 11 228. (1)

En 1993, on en répertorie onze qui sont les suivantes :

- Société Générale d'Hydraulique et de Mécanique (GHM) (pièces mécaniques) et Sommevoire (fonte d'Art) - Case Poclain (avec un secteur fonte) - Fonderies de Saint-Dizier (fonte) - Fonderie de Brousseval (fonte) - Fonderie Pont-à-Mousson S.A. Bayard-sur-Marne (fonte) - Ferry-Capitain - Bussy (fonte, acier) - Fonderie de Joinville (fonte) - Fonderie Vigalu - Wassy (aluminium) - Société Métallurgique haut-marnaise - Joinville (cuivreux, bronze) - Aciéries Hachette et Driout - Saint-Dizier (acier)

Parmi ces établissements qui sont regroupés dans le nord du département selon deux axes nord-sud ; le premier, la Vallée de la Biaise, de Saint-Dizier à Dommartin-Ie-Franc, le deuxième, la Vallée de la Marne, de Saint-Dizier à Joinville (cf carte).

Seule la fonderie de Sommevoire compte parmi ses diverses fabrications une section fonte d'art.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 48 Mm.court ¿Xr' -jf.'X: (-» T /<^ " 5$ë*^-^"- ^/ WUtogneville BAR-LE-PU

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a - Historique C'est en 1836 que Monsieur Denizet fait construire sur l'emplacement d'un moulin au confluent de la Voire et de la Vivoire, l'usine de Sommevoire comprenant un haut-fourneau.

En 1840, lui succède Monsieur Viry ; l'usine productrice de fontes moulées emploie 52 salariés, 45 hommes, 2 femmes, 5 enfants (2).

En 1855, Antoine Durenne reprend la direction de cette usine avec l'aide de deux associés, Messieurs Zegut et Petit ; il y a deux cubilots et un deuxième haut- fourneau est installé.

Cette société dont le siège social est situé à Paris, 30 rue de la Verrerie produit, en 1859, quotidiennement, 7 à 8 tonnes de fonte.

Dans un journal consacré à l'exposition de Saint-Dizier de 1860, on peut lire que "l'usine de Sommevoire, axée sur les articles d'ornementations intérieures de bâtiments, ne lait de la statue que depuis peu". Parmi les produits exposés au cours de cette manifestation, on trouve des balcons, des grilles, des lits, des coupes, des lustres, des appuis de première communion et des statues de Christ et de Vierge.

Le courrier datant du 23 mars 1862 du juge de Paix du canton de Montier-en-Der, dont dépend Sommevoire, décrit au sous-préfet l'usine de la manière suivante : "... l'usine qui a deux hauts-fourneaux avec bocard est destinée à la fabrication de fontes moulées. Elle est située au milieu d'une plaine fertile, riche en minerais et en belles forêts, pourvue de machines à vapeur bien organisées, administrée avec une intelligence rare ; cette usine, qui ne date que de 1855, a pris les plus grands développements. Elle emploie 300 ouvriers qui sont payés à la tâche à la fin de chaque mois : mouleurs: 4,50 F, ajusteurs et modeleurs : 3 F, manoeuvres : 2 F. Ce sont presque tous des enfants du pays ou mariés à Sommevoire et les environs, qui se montrent attachés à leur état..." (3).

A la suite d'une mésentente, Antoine Durenne se sépare de ses associés et devient le seul maître de forges de Sommevoire. Peu à peu, il collabore avec les sculpteurs reconnus de l'époque, tout en éditant des copies d'antiques célèbres, des copies d'oeuvres de sculpteurs du XVI, XVII et XVIIIème siècles. Ces nombreuses réalisations de fontes d'art lui permettent d'obtenir de multiples médailles lors d'expositions universelles de 1862 à 1889 ; à l'Exposition de 1878 il eut également la croix d'officier de la légion d'honneur.

Après sa mort en 1895, -il était né à Paris le 7 juillet 1822 et était diplômé de l'Ecole des Arts et Métiers d'Angers et de l'Ecole Centrale-, c'est son gendre, Mr Jacquin, lieutenant-colonel, qui reprend l'affaire et fonde une société anonyme : la société anonyme des Etablissements Métallurgiques A. Durenne.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 50 En 1905, cette société exploite trois usines : - celle de Bar-Ie-Duc (Meuse) occupant cinq cents ouvriers et où sont fabriqués des tuyaux de conduite d'eau, de gaz, de vapeur et de grosses fontes de construction brutes et usinées. - celle de Wassy (Haute-Marne), d'un effectif de cent cinquante ouvriers et qui produit des pièces mécaniques. - celle de Sommevoire qui ajoute à sa fabrication de fontes d'art l'exécution de grands bronzes pour monuments (4).

Cest en 1931 qu'est créée la société des Etablissements Métallurgiques A. Durenne et du Val d'Osne lors du rachat de la fonderie du Val d'Osne.

Dans les années 1950, la S.A. Durenne, dirigée jusqu'alors par les descendants de Antoine Durenne, est vendue à une société française, elle-même rachetée à la fin des années 60 par la Société Générale de Fonderie qui créa la GHM (Général Hydraulique Mécanique), SA intégrée au groupe Ferry-Lang en 1986.

b - description de l'usine actuelle Inventaire du 25 janvier 1993 • Surface des terrains et des bâtiments :

Surface totale des terrains : 104 634 m2 Surface couverte usine : 22 643 m2

• Effectif : ouvriers : 164 ETAM* : 64 •(personnel administratif bureau d'études) cadres : 17 Total 245

• Fabrication : Fonderie : éclairage public fonte d'art pièces mécaniques hydraulique

Chaudronnerie : éclairage public

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 SI FAMILLES LANG-FERRY

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LES SITES DE PRODUCTION G.H.M. • Chantiers et ateliers : - Moulage main (bâtis de machine, carcasses de moteur et pièces d'art) - Chantier Piper pour améliorer les cadences de moulage-main et dont le principe repose sur la projection de sable sur le modèle. - Chantier BMM.FA5 Mécanisé et équipé de deux convoyeurs indépendants avec châssis de 800 x 600 x 250 pour BMM avec une cadence maxi de cinquante moules par heure et des châssis de 600 x 1100 x 250 pour FA5 avec une cadence maxi de soixante moules par heure.

• Un atelier d'usinage pour effectuer le parachèvement des produits.

• Un atelier de peinture comprenant une chaîne par pulvérisation de peinture liquide de toutes natures, doté d'un tunnel de grenaillage.

• Bureau d'études "Produits" qui comprend onze dessinateurs - 3 postes de "dessin assisté par ordinateur" D.A.O. - 1 réseau D.A.O., capacité 8 postes - 1 traceur Drap Master RX - 2 micro-ordinateurs (5)

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Sommevoire Extrait du cadastre - 1986

Source : Service de l'inventaire de Champagne-Ardenne Quels sont les produits regroupés sous la dénomination fonte d'art à Sommevoire aujourd'hui ?

• Il y a tout d'abord un département "serrurerie" qui comprend la fabrication de produits destinés à l'ornement des bâtiments : balustrades, barres d'appui, balcons de croisée, garnitures de rampes d'escaliers, lances et fleurons pour grilles de propriété ou grilles pour décors de façades.

• Un département "Eclairage de style" qui comprend les candélabres à lanterne ou à globes et les consoles (bras de lumière accolés aux façades supportant des lanternes).

• Enfin, un département "Mobilier urbain", qui comprend divers types de fontaines, fontaines à jeux d'eau, fontaines murales, bornes fontaines, les kiosques à musique, les bancs, les grilles d'arbres, les porte-enseignes, porte-affiches et poteaux signalétiques.

La clientèle Ces produits qui perpétuent l'orientation ancienne de la société sont destinés aux villes et collectivités qui depuis une dizaine d'années, après de grosses dépenses d'infrastructure, se sont tournées vers l'aménagement, le cadre de vie. On trouve ainsi dans les nouveaux catalogues le terme de "mobilier d'ambiance", ce qui explique le redémarrage de cette fabrication.

Cependant, depuis qu'elle a racheté la société commerciale des fontes de Dommartin-le-Franc, l'usine de Sommevoire s'est également orientée vers un nouveau type de produit : l'activité éclairage et fontainerie pour les particuliers, c'est- à-dire les fontaines de petits formats pour les jardins ou l'intérieur des habitations, les petits candélabres et les petites appliques. Ces produits sont exposés dans un magasin de vente sis à Dommartin-le-Franc, de même que des plaques de cheminée, des ustensiles de cuisine ainsi que des petits bronzes, lampes, animaux fabriqués dans un atelier qui appartient également à GHM Sommevoire : l'atelier bronze d'art et création.

Les commandes Les commandes correspondent en général à des marchés publics ; il y a appel de concours auxquels répondent des architectes, des designers ou des sculpteurs. Ils réalisent des plans que les fonderies doivent adapter à la production, les retranscrire au niveau de la ville ; pour donner un exemple très récent, GHM Sommevoire vient de remporter le marché de mobilier urbain de la communauté urbaine de Lyon qui a été dessiné par Wilmotte et se trouve en phase de réalisation de prototype d'après ces dessins.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 56 Dans le cadre de ce type de commandes, une équipe de travail, comprenant architectes, designers ou sculpteurs et le personnel de la fonderie, bureau d'études, contremaîtres, va se constituer. Plusieurs rendez-vous seront alors nécessaires pour faire accepter les plans, les prototypes et réaliser un produit qui soit conforme à la demande du client.

Ce n'est pas le cas lorsque les municipalités commandent des produits dits de catalogue, c'est-à-dire des produits types présentés dans les catalogues édités par les fonderies, ces produits étant prêts à l'emploi.

Les catalogues GHM Sommevoire fait appel à une maison de publicité nancéenne pour la conception de ses catalogues, maison rémunérée pour le tirage, l'impression mais aussi la conception des messages qui accompagnent les photographies.

Ces catalogues sont distribués auprès d'architectes, de communes, de designers, de serruriers.

A la lecture de ces catalogues, on peut noter que de nombreux modèles anciens sont repris car, comme le précise le responsable administration des ventes : "... il y a un fond de roulement qui est composé essentiellement par les modèles qui tournent depuis des années, depuis le siècle dernier. C'est ce qui fait la chance de GHM, qui permet de faire vivre encore la société parce que Durenne nous a légué un gros patrimoine, mais il est vrai que de plus en plus, chaque ville, chaque collectivité veut son propre mobilier. Donc là, on a une création par le bureau d'études ou alors on s'associe avec des designers pour développer d'autres gammes. On a travaillé avec Philippe Starckpar exemple..." (entretien Mr Bouvret, Sommevoire).

La reprise d'anciens modèles implique également que très souvent, les appellations des produits proposés dans les catalogues correspondent aux lieux où ils ont été implantés à l'origine : Louvre, Ile-de-France, Montmartre, etc.. On peut y voir le souci de perdurer une tradition qui a fait la renommée de Sommevoire au siècle dernier.

La création de fonte d'art telle qu'on l'entendait au siècle dernier (statues, représentations animalières...) La réalisation de pièces de fonte d'art est peu fréquente et se fait sur demande : "... c'est très onéreux et beaucoup plus complexe au niveau de l'élaboration ; ¡à, on est obligé de partir de sculpture ; la sculpture existe ou la pièce existe ou alors il faut que l'on fasse appel à un sculpteur et après on va tirer les empreintes..." (cf entretien Mr Bouvret, Sommevoire).

Ce marché qui a contribué à la renommée de l'usine au XIXème siècle est donc peu exploité : "... on ne relance pas le marché, on attend que des gens aient vu des choses, de photos et puis peut-être qu'à partir de pièces dont on dispose, qui sont plus ou moins en bon état, on pourra refaire ces choses, mais on ne se lance pas dans le marché, il faut une demande et puis industriellement ce n'est pas ce qui arriverait à faire vivre l'usine, donc cela est assez marginal..." (cf entretien Mr Bouvret, Sommevoire).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 57 L'exemple suivant illustre bien le propos précédent : "...pour vous donner une idée de ce que peut être le coût du moulage d'art, je me souviens, il y a une trentaine d'années, on a fait faire une vierge qu'on a moulée à l'usine ; la statue fait environ 1,50 m de haut, c'est une vierge qui tient l'enfant Jésus. Pour fabriquer le moule de la statue, ça a représenté environ 200 heures, alors si vous multipliez le prix de l'heure par 200 vous arrivez à quelque chose d'impressionnant..." (entretien Mr Somborn, Brousseval).

Le responsable administration des ventes de Sommevoire nous cite cependant la création d'un cerf qui a été réalisé pour la Ville de Senlis, pièce conforme à celle qui se trouve au Vézinet et qui fut exécutée du temps d'Antoine Durenne. En échange du prêt de cette pièce pour la réalisation du moule, GHM Sommevoire s'est engagé à la restaurer gracieusement.

La restauration de pièces de fontes d'art est assez fréquente à Sommevoire ; "on rénove le parc existant" ; les fontaines des Villes d'Orléans et de Belfort ont été remises à neuf récemment dans les ateliers de Sommevoire. De même un devis de restauration est actuellement en cours de préparation pour les fontaines des Champs-Elysées.

Au cours de ces restaurations, il arrive que des pièces manquantes doivent être fabriquées ; pour ce faire : "... on essaie de retrouver dans les archives, les catalogues, des dessins, ou on imagine, ou on a des photos, des carte postales qui ont été prises. Pour le h'osque de Tours, on a remporté le marché parce qu'il ressemblait à celui qu'il y avait par le passé..." (cf entretien Mr Bouvret, Sommevoire).

Une des dernières réalisations importantes de ce type a été la création d'une fontaine en bronze en 1993 pour l'institution régionale du réservoir des barrages Aube et Seine suite à un concours lancé par la Ville de Paris.

Les modèles en plâtre ont été exécutés par deux artistes et représentent diverses sortes de poissons ainsi que des vagues. Six mois ont été nécessaires pour l'exécution de cette fontaine qui a été fabriquée dans les ateliers de Sommevoire selon de nouveaux procédés, tels que l'utilisation de l'élastomère.

les modèles Les sociétés spécialisées dans l'édition de séries en fonte de fer possédaient -de véritables collections de modèles conservés dans des bâtiments réservés à cet usage : les magasins à modèles. Les modèles créés pour des réalisations uniques étaient, quant à eux, détruits par leurs propriétaires, les sculpteurs.

S'il n'est plus possible aujourd'hui de voir en l'état ces magasins, une description du magasin de l'usine du Val d'Osne en 1900 permet d'imaginer ce qu'était un magasin à modèles et de constater l'étendue et la diversité des modèles dont chaque fonderie disposait : .... "Nous voici dans le magasin, fantastique et merveilleux à la fois. Une grande allée le parcourt, desservie par deux lignes de rails. De chaque côté se dresse une rangée de statues, quelques unes colossales : vierges destinées à couronner des collines, effigies de ¡a république... tous les décors de la mythologie sont là,

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 58 oeuvres modernes ou copies de l'antique... Des fontaines monumentales pour les villes, des animaux, des écussons complètent ce musée d'un effet extraordinaire par l'entassement ordonné des sujets... Aujourd'hui, le Val d'Osne possède 40 000 modèles dont 800 de statues humaines et 250 de statues d'animaux.." (6) (cf p. 100, volume II.

Ces modèles de statues humaines ou d'animaux n'étant plus utilisés par les fonderies, on a assisté il y a une dizaine d'années, au démantèlement de ces collections.

Ainsi, en 1986, lors de la fermeture définitive du Val d'Osne, les derniers modèles en place furent détruits ou vendus ; il est d'ailleurs assez fréquent de trouver des statues de vierges ou de saints dans des jardins privés situés aux alentours du Val d'Osne.

En ce qui concerne les modèles de Sommevoire, un travail d'inventaire a été réalisé en 1990 à l'initiative de la Conservation Régionale des Monuments Historiques de Champagne-Arderme par deux enquêtrices ayant préalablement travaillé au Musée d'Orsay. Un rapport de cette étude est actuellement à l'Hôtel de Croisille à Paris. Une limite de huit cents numéros avait été fixée et un travail d'inventaire classique a été réalisé sur place : prises de photographies, prises de mesures, pose d'étiquettes. Le travail d'identification des oeuvres a été fait au centre de documentation du Musée d'Orsay à partir des photographies prises à Sommevoire en utilisant les catalogues des fonderies et la documentation sur la sculpture que possède Orsay. Lorsque les enquêtrices ont effectué ce travail, les modèles avaient déjà été transférés dans des locaux appartenant à l'association des Compagnons de Saint-Pierre. Aucun inventaire photographique n'avait été réalisé jusqu'alors en partie en raison du nombre important de statues religieuses se trouvant dans leur magasin d'origine dénommé "le Paradis". Certains modèles avaient été abîmés ou cassés lors de l'effondrement d'une partie du toit de ce bâtiment dans les années 80.

Seuls les modèles d'ornement, balcons, grilles, les taques de cheminée, les modèles de candélabres etc, c'est-à-dire les modèles qui correspondent à une demande de la part de la clientèle, ont été conservés ; c'est le cas à Sommevoire ou à Dommartin- le-Franc.

La dispersion des modèles confirme le désintérêt des fonderies à l'égard de ces collections de modèles il y a quelques années.

Cet inventaire réalisé en 1990 ne correspond qu'à une partie de la collection des modèles de Sommevoire puisqu'en effet : - Deux cent cinquante modèles environ, principalement à caractère religieux, ont été rachetés par un particulier et regroupés par ses soins dans un local qui lui appartient mais qu'il est possible de visiter à Ville-sur-Terre (Aube) (cf p.98-99, volume II).

- un document provenant des archives privées de la GHM, actuelle propriétaire de l'usine de Sommevoire, atteste que depuis 1973, cette société a confié en dépôt au Musée de l'Automobile de Mulhouse, une cinquantaine de modèles plâtre, statues, vases, fontaines, colonnes...

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 59 - de même, l'ancien conservateur du Musée de Saint-Dizier a noté lors d'une visite effectuée à GHM en septembre 1980 que trois cents modèles se trouvaient en Haute-Savoie.

Le problème inhérent à ces collections privées (déplacement des modèles hors de leur lieu d'origine sans véritable contrôle ce qui tend à disséminer le peu qu'il reste des collections), peut être évoqué pour les modèles du Rongeant près de Joinville qui appartiennent à l'usine de Bussy. Ces modèles appartenaient à la fonderie Denonvilliers de Sermaize (Marne) rachetée en 1896 par les hauts-fourneaux, fonderies et atelier de construction E. Capitain-Geny & Cie qui décidèrent de diversifier leur fabrication en établissant une fonderie d'art sur le site du Rongeant (cf p. 13, volume II).

On peut soulever aussi le problème de la conservation de ces modèles et notamment des conditions de stockage généralement médiocres. Certaines pièces auraient besoin d'être restaurées.

Ces modèles étaient réalisés en plâtre, mais aujourd'hui certains sculpteurs ont recours à d'autre matériaux. Ainsi, pour la réalisation d'une sculpture commandée par la Ville d'Aytré (Charente Maritime), le sculpteur Christian Renonciat a élaboré un modèle en polystyrène. Pour le modèle de cette sculpture représentant un cheval, le sculpteur a abordé progressivement les grandes échelles : il a tout d'abord fait des croquis, puis un plan au dizième, puis une autre maquette en volume, ensuite une première maquette en plâtre pour définir les formes extérieures, puis une deuxième maquette au cinquième en polystyrène et enfin il a construit à partir de ces travaux préliminaires le modèle de fonderie grandeur nature en polystyrène.

Selon C. Renonciat, le polystyrène est un matériau qui a la propriété de se gazéifier à la chaleur ; donc on peut faire couler directement la fonte sur le modèle emprisonné dans du sable de fonderie. Le polystyrène fond alors et la fonte épouse parfaitement la forme. Ce procédé direct, sans intermédiaire, permet d'obtenir une pièce parfaitement fidèle au modèle (7).

Cette pièce a été réalisée par la fonderie Salin (Meuse) qui ne fonctionne plus aujourd'hui.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 60 Notes

1 Statistiques ASSEDIC - Sources : Comité Métallurgique de Champagne, Saint- Dizier 2 Archives Départementales de la Haute-Marne - 209 M 10 3 Archives Départementales de la Haute-Marne - 269 M 2 4 Visite de Monsieur le Ministre de l'Intérieur, 18 septembre 1905, document collections privées. 5 Documents GHM Sommevoire - 10 février 1989 et 25 janvier 1993 6 Ardouin-Dumazet, Voyages en France, Haute-Champagne, Basse Lorraine, Paris, 1900, pp. 243-244 7 Film : le Cheval d'Aytré. Production Yves-Antoine Judde, 1988

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 61 2 - Modes d'acquisition, transmission des savoir-faire

La transmission suppose l'acquisition d'un savoir spécifique ; nous nous interrogerons donc, après avoir défini l'organisation du travail au sein d'une fonderie, sur l'existence, le maintien de gestes techniques et la manière dont ce savoir-faire se transmet et ce particulièrement en ce qui concerne l'opération de moulage qui occupe la place la plus importante dans le processus de fabrication d'une pièce ainsi que le plus grand nombre d'ouvriers.

a/ organisation du travail au sein d'une fonderie Quelque soit le type de fabrication, on peut distinguer plusieurs ateliers au sein d'une fonderie métallurgique dont les principales fonctions sont les suivantes.

1 - Le modelage qui fournit tout ou partie des modèles en bois, polystyrène, plastique et l'outillage nécessaire au moulage (boîte à noyaux).

2 - Le moulage qui consiste à préparer les moules où l'on va couler le métal; ces moules sont en sable de fonderie (moulage au sable) ou en métal (moulage en coquille).

3 - La fusion qui permet de faire passer les métaux à l'état liquide et de réaliser des alliages en opérant les mélanges nécessaires.

4 - La coulée par laquelle on fait passer le métal ou l'alliage liquide dans les moules.

5 - Le dccochage : par lequel on brise les moules pour en sortir les pièces coulées.

6 - L'ébarbage qui enlève les bavures et aspérités diverses que le moulage ou la coulée provoquent à la surface des pièces.

7 - L'usinage qui soumet une pièce brute à l'action d'une machine-outil, opération nécessaire lors d'assemblages par exemple.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 62 SCHEMA DES DIFFERENTS ATELIERS ET POSTES DE TRAVAIL D'UNE FONDERIE

Modeleur MODELAGE FUSION —*• Fondeur

Moulage chantier Moulage main MOULAGE mécanisé

-•/ Mouleur machine

Mouleur COULEE

DECOCHAGE Manoeuvre

Ebarbeur EBARBAGE

Ajusteur USINAGE Tourneur

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 63 Cette organisation a subit peu de changements puisque malgré de nombreuses innovations, telles l'apparition des chantiers mécanisés, l'utilisation de nouveaux matériaux, du sable auto-durcisseur, de l'élastomère, etc., les principes généraux de fabrication restent inchangés.

Parmi les transformations importantes, on peut noter cependant la disparition progressive des ateliers de modelage au profit d'unités privées non intégrées et la place de plus en plus grande accordée aux chantiers de moulage mécanisés. Au cours des entretiens, nos informateurs, que ce soit pour évoquer leurs statuts ou les techniques de fabrication, opposent souvent le présent au passé. La limite se situe au début des années 60, période où ont eu lieu le plus grand nombre de transformations, alors que les ateliers de modelage réalisaient les modèles servant au moulage.

Les ateliers de modelage Aujourd'hui, les ateliers de modelage voient leur rôle se réduire à un travail d'entretien, de réparation ou de modification de modèles déjà existant, les fonderies faisant appel à des ateliers de modelage privés pour la création de nouveaux modèles.

Selon Mrs Sorbont et Thieriot, propriétaires d'un atelier de ce type, le coût de revient est trop élevé pour l'entreprise. Par ailleurs, il n'y a pas de problème de respect des délais si l'on s'adresse à une entreprise privée comme la leur. Ainsi l'usine de Bussy près de Joinville, qui, bien que possédant un atelier de modelage encore important, fait parfois réaliser des modèles à l'extérieur après consultation de devis.

Aux alentours des fonderies haut-marnaises, il existe quatre ateliers de modelage, un à Osne-le-Val, un à Saint-Dizier, un près de Sommevoire et un dans la Meuse.

A l'atelier d'Osne-le-Val sont réalisés des modèles pour pièces mécaniques et pour la fonderie d'art ; des modèles de grilles, de balustrades, de candélabres sont notamment fabriqués pour la fonderie de Sommevoire (cf p. 94-95, volume n).

Pour la fabrication de fontes d'art, on ne faisait pas appel aux modeleurs dans la mesure où les modèles étaient créés par des sculpteurs indépendants. Les fonderies employaient juste un "sculpteur-modeleur" pour la réparation des modèles lorsque cela été nécessaire après de nombreuses manipulations : "... il refaisait au plâtre, il réparait, c'était pas n'importe qui qui pouvait..." (entretien Mr Millet, Val d'Osne).

Cependant, il y a encore quelques année, les modeleurs occupaient une place importante au sein des fonderies pour d'autres types de fabrication tels les fontes mécaniques puisque en effet : "pour que le mouleur puisse travailler, il lui Eut un modèle..." (entretien Mr Piault, Val d'Osne), ou encore : "au départ d'un moule quand ils fönt une pièce en fönte, il faut un modèle..." (entretien Mr Moite, Brousseval).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 64 Les ateliers de moulage On trouve d'une part des chantiers mécanisés où le travail du moulage est réalisé par des machines très performantes qui fabriquent des pièces en grandes séries, d'autre part des chantiers de moulage-main où les ouvriers sont directement impliqués dans le processus de fabrication (cf schéma p. 61).

Les chantiers mécanisés Dans ces chantiers, le travail du mouleur se trouve considérablement réduit à un rôle de surveillance : "il regarde, il s'assure que le moule ou ¡a motte est bien constitué, il pose le noyau de façon à créer les évidements intérieurs de la pièce, il tire des events de façon à favoriser le dégagement des gaz et c'est tout..." (Mr Sombom - Brousseval).

Travail à la chaîne : "-Maintenant c'est des cadences, on n'en fait jamais assez" (Mr Pépin - Val d'Osne) qui n'implique donc pas de connaissance particulière du moulage hormis pour les contremaîtres qui dirigent ces chantiers : "-on travaille qu'avec des intérimaires et on vous envoie aussi bien des charpentiers, des boulangers et quand ils commencent à être un peu dans le bain, on les met dehors, on les embauche pas... " (Mr Pépin - Val d'Osne).

La description du travail effectué à Brousseval dan l'atelier de moulage en mottes sur "Disamatic", machine qui peut exécuter jusqu'à trois cents moules à l'heure met bien en évidence la disparition dans ces ateliers des savoir-faire inhérents au travail du mouleur : "...la Disamatic fabrique des mottes à la verticale ; on a deux modèles, il y a une plaque-modèle qui est sur un basculeur qui se trouve en dehors de la machine qui a un mouvement à quatre vingt dix degrés et puis l'autre plaque-modèle est sur un piston qui a un mouvement de va et vient horizontal. Au moment où on veut serrer une motte, on rapproche ¡es deux plaques-modèles et on injecte du sable à très haute pression ; il y a ensuite une compression supplémentaire qui se lait, une fois que la motte est constituée ; le basculeur recule, se met à l'horizontal et le piston avance la motte pour l'extraire de la machine et l'envoyer sur la ligne de coulée ... Une fois que les pièces sont coulées, elles passent sur un couloir de refroidissement puis dans un énorme tambour qui désagrège les mottes de sable et produit la séparation du sable et des pièces... qui sont récupérées à la sortie par le décocheur..." (Mr Sombom - Brousseval).

Les chantiers moulage-main Le coût de cet outillage très performant est élevé ; il n'est donc utilisé que dans le cas de fabrication en grande série. Cela implique que ces usines doivent également avoir un département moulage-main pour "... décrocher certaines commandes" de pièces mécaniques à réaliser à l'unité, en petite série ou de dimensions trop importantes pour passer sur des machines à mouler.

C'est également au sein des chantiers de moulage-main qu'a lieu la fabrication de fonte d'art.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 65 Cest dans ces ateliers de moulage-main que les mouleurs sont les mieux à même de mettre en pratique leurs savoirs malgré de nombreuses évolutions.

Le terme "chantier" désigne non seulement l'ensemble du bâtiment où se pratique l'opération de moulage, mais également le périmètre où évolue chaque mouleur : "... il y a des chantiers où ils étaient plusieurs, ça dépendait si c'étaient des petites pièces ou des grosses pièces ; dans ce temps là, il y avait beaucoup de chantiers. Le chantier c'est l'endroit où l'on travaillait, on avait notre armoire pour les outils, notre sable, chacun notre coin pour travailler..." (entretien Mr Bienaimé, Brousseval).

Horaires, salaires : le statut particulier des mouleurs Alors que toutes les autres catégories du personnel, modeleurs, fondeurs préposés au cubilot, manoeuvres, etc.. accomplissaient le nombre d'heures réglementaire et étaient rémunérés à l'heure, les mouleurs avaient un statut particulier puisqu'ils étaient payés à la pièce.

La première conséquence de ce système de paiement impliquait que bien souvent les mouleurs effectuaient un nombre d'heures beaucoup plus important durant leur journée de travail : "... plus on & isa it de moules, plus on était payés, ça marchait comme ça..." (entretien Mr Cotton, Brousseval). "... on était habitué à travailler des 10-12 heures par jour pour gagner notre vie..." (entretien Mr Vivilly, Brousseval).

De plus, il ne fallait pas perdre de temps : "... c'était plus dur quand même comme travail, quand vous êtes aux pièces, il faut faire du rendement ; c'était souvent qu'on travaillait torse-nu ou le maillot trempé sur le dos ; c'était la pointe de la production..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Le paiement à la pièce permettait cependant aux mouleurs d'avoir des salaires plus conséquents, s'ils le désiraient puisque tout dépendait du nombre de pièces effectuées : "... en 55, un manoeuvre gagnait 300 Frs par mois, un modeleur 500 Frs, un mouleur faisait déjà 700 à 800 Frs. Je me rappelle la première paye, j'ai eu 700 Frs, le mois d'après 750 Frs ; je suis arrivé dans la même année à 110-115 mille et les autres étaient toujours à 420-500 francs. J'avais même réussi à m'acheter une 2 CV!..." (entretien Mr Pépin, Val d'Osne).

Bien souvent, cette possibilité de gagner plus conduisait des ouvriers à changer de travail pour devenir mouleur : "... on gagnait facilement 1/3 de plus que les personnes qui avaient un métier et qui travaillaient à l'heure ; on gagnait peut-être le double d'un manoeuvre, c'est pour ça que j'ai quitté le modelage quand je suis revenu de l'armée. Le directeur m'avait appelé au bureau, il m'avait dit : est-ce que tu veux retourner au chantier avec ton frère ou aller au modelage ? J'avais tout de suite fait le choix.. " (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 66 Ceci n'était pas sans créer certaines rivalités : "... nous les mouleurs, H y avait un peu de jalousie parce qu'on gagnait quand même bien notre vie ; par exemple, j'allais au modelage, j'avais besoin d'une règle, d'un bout de bois ou des coins ; ils me disaient : tiens t'as qu'à le faire, vous êtes les seigneurs, ils nous appelaient les seigneurs !..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Aujourd'hui, les mouleurs font le même nombre d'heures que leurs collègues et sont rémunérés à l'activité : "...la différence entre à la pièce et à l'activité est la suivante : dans une partie de châssis, dans un moule, vous mettez une pièce, vous avez une pièce, admettons, dixFrs, si vous êtes payé aux pièces, vous avez fait dix moules ça fait 10 x 10 ; tandis qu'à l'activité, dans le même moule, on vous met dix pièces et on est payé au moule maintenant, alors pour le même moule, avec les plaques-modèles, qu'il y ait une pièce ou dix vous êtes payé le même prix, l'entreprise est gagnante !" (entretien Mr Pépin, Sommevoire).

Seuls les mouleurs d'ornement continuent à être payés à la pièce, mais le système, même s'il porte le même nom est un peu différent comme nous avons pu le constater à Sommevoire ; en effet, ce salaire est composé d'un fixe auquel s'ajoute une somme d'argent qui est calculée en fonction du temps de fabrication chronométré par les contremaîtres : "... maintenant c'est un temps, avant on avait une somme d'argent ; si la personne prend son travail comme elle doit le faire, elle doit le faire dans le temps, on a un chrono et on prend le temps qu'il faut, il doit être respecté ; si il y a des changements, ça se discute avec la direction..." (entretien Mr Georges, Sommevoire).

Jusque dans les années 60, le prix de la pièce entraînait également des discussions : "... c'était un peu du marchandage, combien que tu en veux ? il y avait un devis de fait mais ils essayaient toujours de baisser alors on s'engueulait un peu ! Le prix était ûxé en fonction du temps qu'on passait dessus ; on voyait si c'était réalisable en une journée, le volume, le sable à serrer, le noyau à faire... " (entretien Mr Galichet, Val d'Osne). "... c'étaient les contremaîtres qui nous disaient : voilà la pièce, t'as tant pour la ñire, débrouille toi. On allait chercher les châssis, on choisissait le châssis en fonction de la pièce parce que moins on avait de sable à serrer, plus vite on allait et c'était moins lourd, on faisait tout à la main ! Quand il y avait des pièces qui ne payaient pas, on disait : chronométrez-nous et puis vous verrez, des fois on arrivait quand même à a voir un peu plus, enfín c'était dur !... " (entretien Mr Juilly, Brousseval).

Aujourd'hui, le fait de toucher un fixe assure un minimum de sécurité aux mouleurs ; en effet, autrefois, lorsque les mouleurs rataient une pièce, cette pièce ou bocage était refusée et de ce fait non payée : "... Dans ce temps là, on était ßers de nos pièces, on allait les voir, on n'aimait pas avoir une pièce qui était rebutée, on appelait ça du "cafù", du bocage ; on n'aimait pas ça parce que, premièrement ça payait pas et puis ça se disait : ils ont loupé une pièce, c'était désagréable !...". (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 67 Le fait d'être rémunéré à la pièce avait également pour conséquence de permettre aux mouleurs d'avoir plus de liberté : "... je vous assure, c'était dur, mais on était libre, le patron passait au bout du chantier, on était entrain de boire un verre, on ne bougeait pas, on était payé aux pièces ; ce qui était fait on nous le payait, ce qui n'était pas lait, on nous le payait pas..." (entretien Mr , Dommartin). "... Nous, à Donvnartin, ce qui était bien c'est qu'il n'y avait aucun chef comme il y en a dans les usines aujourd'hui, à mon époque, on était soixante dix mouleurs, c'était soixante dix mouleurs qui produisaient, il n'y avait aucun chef, on ne connaissait que le directeur, les responsables, c'étaient nous..." (entretien Mr Grignon, Dommartin-le-Franc).

Liberté qui donnait la sensation aux mouleurs "... d'être considéré, de ne pas être des numéros..." d'avoir beaucoup plus de responsabilités : "... nous, on était trois ; mon frère était un peu chef de chantier et on était avec un petit jeune, alors on s'arrangeait, notre plaisir c'était ça, on travaillait pour un patron, on était commandé mais on était un peu responsables, on avait notre chantier, on était heureux ; on était respecté, on discutait avec nos chefs quand on mettait une pièce en route, on discutait comment on allait faire, comment il fallait la couler, si c'était un nouveau modèle, on avait des crayons, on traçait des joints ; maintenant, ça arrive tout fait..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Les mouleurs pouvaient également organiser leur journée de travail comme bon leur semblait du moment que le travail était fait : "...nous, on venait à l'heure qu'on voulait, il yen a un qui venait à deux, trois heures du matin, à sept, huit heures il repartait à la maison, son chantier était fait mais il revenait le soir pour couler, parce qu'on coulait chacun son tour ; il fallait que ce soit toujours les mêmes qui soient premiers ou derniers..." (entretien Mr Grignon, Dommartin). "... on avait des prix de pièces, alors on organisait un peu notre journée ; si on voulait quitter plus tôt, on s'arrangeait pour ne pas avoir de coulée ce jour là, on coulait avec une fonte qui sortait en début, le lendemain on disait : aujourd'hui, on sortira plus tard ; on allait à l'usine à cinq h on savait que si on allait à l'usine plus tôt, on pouvait quitter plus tôt... ". (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Le plus souvent, lorsque les mouleurs s'organisaient pour sortir plus tôt de leur travail, c'était pour pouvoir s'occuper d'activités extérieures telles que la coupe de bois, l'entretien d'un jardin, le nourissage de bêtes, les moissons suivant le rythme des saisons ; ces activités constituaient bien souvent un complément de revenus : "... des fois, je commençais à quatre heures du matin jusqu'à quatre heures du soir et j'allais encore chercher du bois, on allait dans la forêt chercher du bois mort. Une année, un gars a exploité le crassier ; avec une pelle, une pioche on récupérait la fonte qui était perdue, le gars nous rachetait la fonte au kilo et en même temps, on retirait du vieux coke pour nous chauffer, c'est-à-dire qu'on travaillait tout le temps ; on avait des poules, des lapins..." (entretien Mr Louchenique, Brousseval).

Ces activités, qui ont de moins en moins cours aujourd'hui : "... Tout le monde avait son jardin, les jeunes veulent plus ñire de jardin, ils vont tous chercher la soupe à l'Intermarché..." (entretien Mr Pépin, Val d'Osne), permettaient également, selon certains mouleurs, de se changer de l'atmosphère vicié de la fonderie : "... ça délassait parce que la fonderie, il y avait beaucoup de poussière, le gaz moins, parce que le sable était naturel mais il y avait quand même beaucoup de poussière de sable ; par exemple presque tout le monde faisait son bois, l'usine prêtait des camions pour aller rentrer du bois ; il y avait un cheval, une voiture, alors on demandait au conducteur du cheval, tu pourrais venir ce soir ? alors après l'heure, il venait rentrer du foin et des bricoles mais c'était avec l'autorisation du directeur ; arrangez-vous avec le charretier, le chauffeur ; maintenant il n'y a plus beaucoup de terrains cultivés..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 68 A Osne-le-Val, il y avait même un troupeau de moutons constitué de bêtes appartenant aux habitants du village dont beaucoup travaillaient à la fonderie du Val d'Osne : "... il y avait un berger municipal, il ramassait les moutons tout le long du pays, et puis le soir il repassait et c'était incroyable, chaque bête se détachait du groupe pour rentrer ; les mouleurs étaient payés aux pièces donc ils n'avaient pas d'horaires, ils commençaient de bonne heure le matin et puis, quand leur coulée était faite, ils repartaient et changeaient de travail, ils faisaient les travaux des champs..." (entretien Mr Piault, Val d'Osne).

b/techniques de fabrication, les savoir-faire Pour que le moulage se déroule dans de bonnes conditions, deux opérations sont nécessaires au préalable : la fusion de la fonte pour la coulée et le modelage pour la création d'un modèle.

La fusion La fusion de la fonte s'effectue dans un cubilot, four à cuve comportant une carcasse métallique et un garnissage réfractaire : "... le cubilot, c'est un cylindre, le fond est fermé ; par contre, il y a un trou sur le côté et des tuyères pour ventiler la combustion. Le métal qui a fondu passe au travers du coke et tombe dans le creuset, le fond du cubilot, c'est le creuset..." (entretien Mr Piault, Val d'Osne).

Le chargeur de fonderie doit s'occuper de l'allumage, du remplissage et du garnissage du cubilot : "... le matin j'arrivais, il fallait que j'allume le cubilot pour que quand le fondeur arrivait se soit prêt à couler ; je faisais l'allumage avec un chalumeau (avant-guerre l'allumage se faisait avec du bois avant que l'on utilise le gaz propane) ; quand c'était allumé, je rebouchais avec du sable et je remettais le vent dedans jusqu'à ce que ce soit bien rouge en haut, j'arrêtais et je chargeais le cubilot avec de la fonte, du coke..." (entretien Mr Leclerc, Val d'Osne). Chargement qui s'effectue : "par lits, on mettait du coke, de la fonte..." (entretien Mr Cotton, Brousseval).

Le garnissage du cubilot doit être fait chaque jour : "... la fusion ça érode l'intérieur, le garnissage c'est des matières réfractaires ; avec la fonte en fusion, ça se désagrège, alors tous les jours, il faut le refaire, c'est pour ça qu'on travaille avec deux cubilots..." (entretien Mr Piault, Val d'Osne) et se déroule de la manière suivante : "... je rentrais dedans pour le nettoyer, le décrasser, avec un marteau, j'enlevais les bouts de coke qui restaient ; quand il était bien propre, je le re torcha is avec du sable, du sable exprès, pour que ce soit bien propre et lisse dedans..." (entretien Mr Leclerc, Val d'Osne).

Le fondeur s'occupait quant à lui de prélever la fonte : "... il y a une goulotte ; à l'extrémité de la goulotte, il y a donc un petit trou que le fondeur bouche avec un bouchon d'argile, alors quand le métal tombe au fond du cubilot, que le niveau est assez haut, il y a des regards en mica pour voir le niveau, alors on peut prélever. Le fondeur prélève avec une barre pointue, gratte pour faire sortir son bouchon d'argile et la fonte jaillit et est récupérée dans une poche qui est dessous...". (entretien Mr Piault, Val d'Osne).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 69 Il était un des rares à bénéficier d'un équipement vestimentaire spécial en raison du danger que cette manipulation pouvait représenter : "... // n'y a guère que le fondeur qui tirait la fonte qui avait un tablier en cuir et des guêtres..." (entretien Mr Reneaux, Val d'Osne).

L'apparition du four électrique à partir des années 60 et son utilisation de plus en plus systématique, tend à supprimer ces opérations. On utilise également des fontes différentes dont la composition présente certains avantages : "... Autrefois, on achetait de la fonte phosphoreuse en Lorraine mais au fur et à mesure, elle a été abandonnée parce qu'elle a des caractéristiques qui sont très faibles et en particulier elle a le défaut d'être cassante ; on s'est donc orienté petit à petit vers des fontes hématites qui ont une résistance, qui sont moins cassantes et puis depuis une trentaine d'années, ces fontes hématites sont des fontes à graphite lamellaire ; on a trouvé un nouveau procédé de fabrication de la fonte que l'on appelle fönte modulaire ; l'intérêt c'est que la fonte n'est pas hachée par ces lamelles et ça donne des caractéristiques très supérieures... " (entretien Mr Sombran, Brousseval).

Les fonderies faisaient appel à des laboratoires afin d'effectuer des analyses chimiques et des contrôles mécaniques. Aujourd'hui, certaines d'entre elles disposent de matériels performants : "... A Brousseval, on a acheté un spectomètre qui permet, à partir de médailles, d'obtenir en une minute l'analyse chimique de la fonte qui est ensuite répercutée sur les postes de fusion où ils font la correction... " (entretien Mr Sombom, Brousseval).

Mais selon certains ouvriers, les fondeurs pouvaient juger à l'oeil nu de la composition de la fonte : "... le chef d'équipe faisait le dosage, d'après la couleur il regardait dans une lunette, il réglait pour avoir le degré et la qualité..." (entretien Mr Moite, Brousseval).

Le modelage Le modelage permet de réaliser un modèle à partir d'un plan pour le moulage de pièces coulées : "...pour établir un modèle, il faut travailler sur un plan, il faut élaborer son modèle en ayant des connaissances de tous ¡es impératifs de moulage ; alors cela demande beaucoup de réflexion, il faut en plus travailler manuellement très bien, avec précision...". (entretien Mr Piault, Val d'Osne).

Les modeleurs qui expliquent leur travail insistent bien sur la nécessité d'anticiper sur le travail du mouleur : "... pour être modeleur, il faut connaître le moulage, il faut savoir comment le moulage ne sera pas embêté, alors on faisait un an de moulage et trois ans de modelage en apprentissage..." (entretien Mr Pépin, Val d'Osne). ".. Le modelage, c'est spécial, il faut d'abord savoir compter, lire, savoir le dessin, connaître la géométrie et aussi le moulage, parce que les pièces, elles ont toutes un retrait. Par exemple, si vous voulez faire un bout de fonte d'un mètre, le modèle, il faut qu'il ait un mètre et un centimètre... " (entretien Mr Moite, Brousseval).

Le matériau de base utilisé par le modeleur est le bois, car c'est le matériau le plus facile à travailler, à assembler. Il travaille donc avec un outillage proche de celui des menuisiers ou ébénistes : "... des gouges extérieures, intérieures, des trussequins, des pieds à coulisse, des ciseaux, des limes, des rifloirs, outils pour dégrossir, des varlopes, gros rabots pour ñnir... " (entretien Mr Pépin, Val d'Osne). gouges : ciseau à tranchant courbe ou en V servant à sculpter, rifloir : limes de formes variées servant pour des travaux délicats de sculpture, etc varlope : grand rabot muni d'une poignée pour aplanir le bois

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 70 Aujourd'hui, les machines étant de plus en plus performantes dans les chantiers de moulage mécanisés, il faut que les modèles soient extrêmement précis ; il ne doit pas y avoir de retouches à faire non plus : "... Le modelage, ça c'est dur, ça c'est compliqué ; les modèles, il a fallu les amener à un point tel que ça devienne facile à mouler pour que ce soit ou sur plaque-modèle ou créé en noyau" . (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Pour résister aux machines à haute-pression, on emploie également de nouveaux matériaux tels que le contreplaqué plus solide que le bois. L'apparition de nouvelles machines ont également supprimé le travail de taillage pour les modeleurs.

Depuis une dizaine d'années, un nouveau matériau est également utilisé par les modeleurs, c'est la résine : "... on fait un modèle type en bois à partir duquel on tire des modèles en résine, l'avantage de ces modèles, c'est qu'ils sont beaucoup moins chers, précis, et qu'ils ont un très bon état de surface... ". (entretien Mr Somborn, Brousseval).

Il y a toujours eu une petite rivalité entre les modeleurs et les mouleurs : "... le modeleur avait une petite dent contre le mouleur du fait qu'il n'a jamais pu obtenir de salaire décent en contrepartie de ses capacités, et le mouleur se considérait comme productif et considérait le modeleur comme improductif..." . (entretien Mr Piault, Val d'Osne).

Cette rivalité existe encore aujourd'hui toujours pour les mêmes raisons : "... les modeleurs ne sont pas très bien payés par rapport à leur travail ; les mouleurs pensent que les modeleurs sont des fainéants car ils ne participent pas directement à la production et les modeleurs pensent de leur côté que les mouleurs ne sont que des "bourreurs de sable", ils doivent penser pour eux...". (entretien atelier modelage, Osne-le-Val).

Le moulage-main

Principe général du moulage : Le moulage désigne l'ensemble des opérations d'élaboration d'un moule en se servant de modèles et de sable préalablement préparés ; à l'aide du modèle, une empreinte est faite dans le sable par l'action de la serre du sable, empreinte destinée à recevoir la fonte lors de la coulée. Il existe une multitude de moulages en fonction de la pièce à fabriquer.

On assiste, depuis quelques années, à une évolution du principe du moulage en raison de l'utilisation de nouveaux matériaux, évolution qui a entraîné parfois la disparition d'un certain nombre de savoir-faire inhérents à diverses opérations telles que le moulage en mottes pour la fabrication de fontes d'art ainsi que la préparation et la serre du sable.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 71 Avant de décrire ces savoir-faire et leurs évolutions, on peut remarquer tout d'abord que le mouleur doit avoir la capacité d'anticiper le déroulement du processus de fabrication. En effet, lorsqu'il reçoit le modèle de la pièce à exécuter, il doit l'examiner à fond pour déterminer la meilleure façon de mouler, c'est à dire la plus sûre et la plus rapide : "... Dans votre tête, le travail doit être fait avant de commencer, puis il faut tracer avec un crayon, c'est des combines...". (entretien Mr Georges, Sommevoire).

"Savoir-faire qui serait une forme de "savoir prévoir" tel que le souligne Denis Chevallier. (1)

Le moulage en mottes battues La conception des moules de fontes d'art faisait appel à une technique particulière que les mouleurs employés dans les fonderies devaient maîtriser parfaitement. : le moulage en mottes battues.

Ce savoir-faire a conduit à considérer les mouleurs comme de véritables artistes au même titre que les sculpteurs créateurs de modèles.

Servant, dans un rapport sur l'Exposition Universelle de 1878, déclare ainsi : "... on se rendra compte des difficultés de moulage de la fonte de fer quand on considérera que Von ría pas, comme pour le bronze, la ressource de découper un modèle et de le mouler en plusieurs parties, puis de ¡es ajuster et de les souder. La fonte ne pouvant se souder, on est obligé pour obtenir une pièce belle, sans joints, sans ajustage, de la mouler d'un seul jet : une soufflure, un manque de fonte à un endroit quelconque du moule et la pièce est manquee. L'habileté de l'ouvrier est donc l'élément principal de réussite et lorsqu'il s'agit de statues à draperies, cette habileté est vraiment de l'art et Von peut dire que les ouvriers mouleurs arrivés à ce degré de perfections sont de véritables artistes..." (2).

Servant veut parler ici de la technique du moulage en mottes réservée à la fabrication de pièces qui possèdent des concavités dans leurs contours, soit une importante contre-dépouille et dont le démoulage ne peut se faire que si l'on utilise ce type de moulage.

On préserve l'intégrité du modèle et on réalise des pièces battues en sable de moulage, c'est à dire que le moule est confectionné au moyen de nombreuses mottes en sable assemblées entre elles et dont la quantité varie en fonction de la complexité que présente le modèle.

Cette technique de moulage demandait au mouleur un nombre d'heures de travail important pour une même pièce et beaucoup d'adresse : "... /'/ est impossible de se figurer ce qu'il faut de soins, de précautions et d'habileté pour établir ce moule formé d'une foule de petites pièces en sable détachées d'autour du modèle et rapportées ¡es unes à côté des autres... " (3).

Après la floraison des monuments aux morts érigés dans toute la France, la fabrication de fonte d'art a cessé peu à peu à partir de 1920.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final • Mars 1994 72 Nos informateurs, de ce fait, n'ont que de vagues souvenirs de cette technique de moulage en pièces battues qu'ils n'ont guère eu l'occasion de mettre en pratique pour la réalisation de pièces de grand format : "... j'ai vu encore tout à fait au début, en 1946, le dernier cheval qui était parti pour la Suisse et puis j'ai vu encore quelques statues qui ont été faites... il faut dire qu'ils n'étaient plus nombreux, il n'y avait plus beaucoup de personnel qui était qualifié pour pouvoir faire ça... c'était un travail vraiment exceptionnel, c'est un véritable jeu de construction pour faire une statue... " (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

"... Le Val d'Osne, c'était vraiment de l'art ; j'ai vu deux pièces qui ont été fabriquées quand je suis rentré en 48, je me rappelle, c'était un Christ et un piqueur, un cheval avec un piqueur dessus, pour la Suisse, je crois, il y avait des volontaires pour ça, des mouleurs qui étaient ßers, il y avait encore deux ou trois vieux qui les guidaient, alors ils avaient réussi à faire ces pièces là, en Élisant du sable eux-mêmes parce qu'il ¡allait l'enrichir le sable, il fallait qu'il soit vraiment à la perfection... " (entretien Mr Pépin, Val d'Osne).

Cependant, bien qu'ils n'aient fabriqué que des pièces mécaniques, quelques uns de nos informateurs possèdent des pièces de fonte ou de bronze d'art de petit format représentant le plus souvent des sujets animaliers, (sanglier, chien...) qu'ils ont réalisé lors de leur temps de pause (cf p.7, volume II) ou à la demande de leur patron comme c'est le cas à Brousseval. En effet, l'usine de Brousseval bien qu'ayant cessé la fabrication de fonte d'art dès le début du siècle pour s'orienter vers la fabrication de tuyaux, continuait à offrir en cadeau à ses meilleurs clients des petites pièces de fonte ou de bronze d'art conçus par des mouleurs de l'usine (cf p.8, volume n).

La technique utilisée dans le cas de moules de petites dimensions est bien entendu la même que pour de grandes pièces mais la réalisation plus rapide en raison des dimensions moindres.

Un ancien mouleur de Sommevoire (entretien Mr Grignon), nous a expliqué comment il a procédé pour réaliser, à l'occasion du concours du Meilleur Ouvrier de France en 1972, une statue qui lui a valu d'obtenir la médaille d'or.

Le sujet était un modèle de Levasseur, le semeur, d'une hauteur de quarante six centimètres : "... on met du sable pour arriver à faire le joint, à moitié pour avoir des deux côtés, on met du sable d'un côté pour avoir le joint ; un coup que le joint est fait, on bât nos mottes des deux côtés, après on recouvre et on met du sable pour avoir l'empreinte de toutes les mottes, on retourne le moule dans l'autre sens et on recommence ; on démoule, on enlève les mottes ; une par une, on les rattache avec des pointes. Pour dégager le modèle il faut enlever toutes les mottes, après il faut refaire le noyau dans le moule, retirer encore les mottes ; je me rappelle plus combien il y avait de mottes là dedans, peut être cinquante ; ensuite on reclavait les mottes dans le moule, on mettait le noyau, avec une armature pour pas qu'il aille dans le fond et après on coulait... ".

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 73 Cette statue a demandé quarante heures de travail à notre informateur. Pour les grandes séries, un modèle était réalisé en fonte d'après le chef-modèle en plâtre, ce qui facilitait le travail car le modèle étant en deux parties, il n'était pas nécessaire de faire un moule à part pour le noyau ; le noyau est constitué de sable serré et matérialise les évidements d'une pièce : "...il y avait des modèles en fonte aussi ; s'il ne fallait qu'une pièce, on faisait pas de modèle en fonte. Les vierges, il fallait battre les mottes tout autour mais on faisait le noyau à l'intérieur du modèle..." (entretien Mr Grignon, Sommevoire).

Le fait que l'on ne réalise des modèles en fonte uniquement que pour les grandes séries s'expliquait par le coût onéreux que représentait la fabrication d'un modèle.

Pour conclure au sujet de cette technique particulière de fabrication, voici un extrait d'un rapport qu'un élève ingénieur de l'école des Mines fit en 1840 sur le travail des mouleurs du Val d'Osne : "... quant aux pièces les plus compliquées, comme statues, candélabres, il est plus difficile de construire leur moule et on ne peut y parvenir qu'au moyen de pièces dites pièces de rapport. Supposons par exemple que l'on ait à mouler une statue de fonte dont l'intérieur soit vide. On commence par choisir sur la surface du modèle une courbe de moulage et on prendra l'empreinte de la portion de surface située d'un côté de cette courbe dans un premier châssis. Cela fait, on recouvrira tout le reste du modèle de pièces de rapport. Le nombre de ces pièces est ordinairement assez considérable car il faut que chacune d'elles puisse se retirer sans se briser. La surface extérieure de l'ensemble de ces pièces de rapport doit être telle qu'on puisse prendre leur empreinte dans un second châssis qu'on place sur le premier et dans lequel on tasse du sable. Cela fait, on enlève ce châssis, on détache toutes les pièces de rapport et on les replacent sur le second châssis dans les cavités qui leur correspondent respectivement... afin que ¡es mouleurs puissent plus facilement retrouver la place exacte des pièces battues, celles-ci étaient le plus souvent numérotée ". (4)

Cest aux établissements A. Durenne de Sommevoire qu'ont été créées les dernières pièces de fonte d'art, dans les années 60 selon cette technique de moulage en mottes. En 1958, une reproduction de la statue de "la liberté éclairant le monde" de New- York fut réalisée pour le compte d'une compagnie d'assurance "La Liberté" dont le siège est situé à Birmingham (Alabama - USA). Le modèle avait été créé par le sculpteur américain Lawrie. D'un poids de neuf tonnes cinq cents et d'une hauteur de 10 m50 à la torche, la pièce fut coulée en bronze.

Ciselage-ébarbage Les ciseleurs intervenaient dans une fonderie lors de la confection de pièces en bronze : "... une fois que la pièce était coulée, elle passait au dessablage ; c'est un ouvrier qui enlevait le sable le plus délicatement possible pour ne pas rayer ou détériorer la pièce. Après elle venait auprès de nous, on enlevait toutes ¡es bavures, toutes les coulées, toutes ¡es coutures, on redonnait de la "fraîcheur" à la pièce en supprimant tout ce qu'il y avait d'anormal..; toute la statue, on la reciselait. Pour les gros monuments, on commençait à ajuster morceau par morceau. Une fois que la statue était reconstituée, il fallait reprendre tous les joints, redonner le cachet et la finesse à la statue... on remaniait avec des éperons, c'étaient des outils en acier et puis on burinait, on commençait au burin et après aux petits ciseaux, aux petits matoirs de toutes sortes ; vous aviez des pieds de biche, des traçoirs... (entretien Mr Linard, Sommevoire).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 74 "... on ne ciselait pas la fonte, c'étaient des ébarbeurs, des spécialistes aussi, ils prenaient des marteaux, burins, limes mais pas beaucoup la meule pour ne pas déformer l'aspect du modèle ... " (entretien Mr Linard, Sommevoire).

L'exemple de la statue de la Liberté va nous permettre de mettre en évidence les diverses opérations mise en oeuvre préalablement à l'opération du moulage dans le cas des pièces monumentales : "... le sculpteur faisait son modèle en terre cuite ou en pâte à modeler, il le coulait en plâtre et après, il le rectifiait, il retravaillait dessus parce que c'est pareil, couler un plâtre c'était flou..." (entretien Mr Linard, Sommevoire).

La photo 1 (cf p.9, volume n) permet de voir le premier modèle de petites dimensions réalisé par le sculpteur avant le modèle définitif et sur la photo 2 (cf p.10, volume n) le sculpteur rectifiant un pli du vêtement sur le modèle plâtre qui va servir pour le moulage.

Généralement, le sculpteur ne travaillait pas dans les fonderies mais dans son atelier ; les plâtres arrivaient donc d'une seule pièce dans les usines. Ce ne fut cependant pas le cas pour l'exemple de cette statue : "... le sculpteur nous a dit "j'avais pas la possibilité de la remonter complètement" parce qu'il y avait quand même dix mètres de haut, donc il est venu sur place..." (entretien Mr Linard, Sommevoire).

Le modèle est arrivé des Etats-Unis découpé en six morceaux installés dans des caisses capitonnées ; il a donc fallu le remonter, l'ajuster pour la fabrication. Ces morceaux ont été remontés les uns sur les autres à l'aide de joints en plâtre.

On peut voir, sur la photo 2, le pli cassé par le sculpteur pour le refaire. Le modèle est ici constitué d'une armature intérieure en lamelles de bois permettant de consolider l'ensemble.

La photo 3 (cf p. 11, volume II) représente le sculpteur devant son modèle plâtre terminé, prêt pour la découpe ; en effet, afin de faciliter le moulage, le modèle était découpé par un plâtrier selon les ordre du chef mouleur : "... c'est le plâtrier qui découpait, qui faisait les joints intérieurs ou les emboîtements mâles et femelles...". Pour cette statue, le modèle a été découpé en vingt six morceaux, une fois les morceaux moulés et coulés "... ils était réajustés avec des chevilles qui étaient coulées en même temps que le métal de la statue pour que l'on ne voit pas la différence... " (entretien Mr Millet, Val d'Osne).

Aujourd'hui, le moulage en mottes battues -qui demandait beaucoup d'habileté-, a été abandonné en raison de l'utilisation combinée de l'élastomère et de sables synthétiques.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 75 L'élastomère, nouveau matériau, polymère naturel ou synthétique qui possède des propriétés élastiques analogues à celles du caoutchouc, a considérablement simplifié l'opération de moulage et permet de réaliser des pièces de fontes d'art beaucoup plus rapidement. On applique des parties souples en élastomère sur les modèles formant l'empreinte. Lorsqu'on soulève les châssis, ces parties se retirent d'elles mêmes après en avoir sorti toutes les formes. D'où l'appellation imagée de ce procédé : "travailler en chaussettes" ; "... on peut plus appeler ça de la pièce battue, maintenant, on amène des parties souples sur ¡es modèles et comme les sables sont durs, ces parties en genre de caoutchouc s'effacent..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

"... c'est moins compliqué parce qu'on a des modèles en caoutchouc, alors on moule dessus par moitié ; quand on démoule avec le sable à prise rapide qui est dur comme du ciment, le caoutchouc se rétracte, ça épouse la forme et on esquinte pas le moule, tandis qu'avant, il fallait le faire par mottes, les dégager et puis les assembler... " (entretien Mr Pépin, Sommevoiie).

Alors qu'un mouleur confectionnait sa pièce du début à la fin, de nombreux chantiers adoptent le système des 3/8. Une pièce commencée est donc reprise par une personne de l'équipe suivante.

Préparation et serre du sable Que ce soit pour les fontes d'art ou les fontes mécaniques, les mouleurs préparaient eux-mêmes leur sable.

Le sable qui sert à confectionner les moules doit présenter diverses qualités notamment la plasticité et la cohésion pour donner une empreinte fine et durable, la réfractairité pour supporter sans décomposition ni déformation le contact du métal fondu, la porosité et la perméabilité pour permettre aux gaz formés lors de la coulée du métal, une évacuation facile à travers la masse du moule ; il était confectionné par mélange de différents sables naturels : "...le sable à l'époque, c'était du sable noir, du noir minéral en poudre comme de la farine, et il y avait du sable vert qui était un peu genre argileux ; tout ça c'était malaxé, ça faisait du bon sable de moulage..." (entretien Mr Pépin, Val d'Osne).

D'autres matériaux étaient également ajoutés selon les mouleurs : "... /7s préparaient le sable eux-mêmes, ils mettaient des copeaux jusqu'à du crottin de cheval pour dégager le gaz quand la fonte arrivait pour qu'il n'y ait pas de souillure ; les souillures, c'est l'air qui ne peut pas s'en aller, ça fait une bulle d'air. Ils faisaient leur sable au pied suivant la rapidité du mouleur, ils faisaient du sable qui prenaient plus ou moins vite, ils le foulaient au pied..." (entretien Mr Pépin, Val d'Osne).

De même, un sable plus fin était préparé pour être disposé autour du modèle : "... on habillait notre modèle avec du sable de contact, on l'enveloppait dans un sable plus ßn qu'on tamisait..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne). "... il fallait du sable spécial, on appelait ça du sable à houille ; pour prendre l'empreinte du modèle, ils allaient chercher de la poussière sur les poutres, ils prenaient de la houille qu'on broyait tout fin et on mélangeait tout ça avec de Veau..." (entretien Mr Moite, Brousseval).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 76 Le sable était constamment réutilisé ; il y avait peu de perte : "... le sable, on travaillait tout le temps avec, il y avait une perte, tout ce qui était autour de la pièce, qui était brûlé, ça partait sur les crassiers ; il fallait donc régénérer ce sable, on mettait du sable vert mais il y avait des quantités à respecter, c'était toujours à l'oeil, on avait des gros tas de sable, on mettait deux, trois brouettes de nouveaux sables et on le passait dans des diviseurs, des moulins pour qu'il soit plus Cm..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Du matin jusqu'au soir, la préparation du sable régulait la journée de travail : "... Le soir, on préparait pour le lendemain, on tapait sur le sable avec une pelle carrée et puis on arrosait un peu, on attendait, on voyait que la buée sortait et après on regardait si c'était pas trop mouillé parce que si le sable était trop frais le lendemain ça ne prenait pas, la fonte refusait... Le matin, quand on arrivait au chantier, on posait la musette et la veste, on prenait une motte, on faisait ça (tape sur son genou), je coupais et je voyais s'il était bon ; en le prenant s'il s'en allait c'était pas bon..." (entretien Mr Reneaux, Val d'Osne). Et elle variait selon les saisons : "autant on avait chaud l'été qu'on avait froid l'hiver ; l'été, on arrosait le sable un peu plus, l'hiver avec la buée, on ne le faisait presque pas..." (entretien Mr Cotton, Brousseval).

Aujourd'hui, on utilise des sables synthétiques préparés dans des machines : "... on moulait encore avec l'ancienne technique jusqu'en 65 ; à partir de ce moment là est anivele sable furanique, c'est de la silice..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

L'utilisation de ce sable auto-durcisseur, appelé sable furanique, a donc supprimé la préparation du sable ainsi que la serre de sable : "... maintenant c'est de la silice pure ; la silice c'est de la petite poudre, on met un produit dedans pour durcir et quand c'est sec, c'est comme du béton. Dès l'instant que vous avez une motte comme ça, dure, vous pouvez la scier ; la travailler comme vous voulez et la finir à la lime, tandis qu'avec le sable à l'époque, il fallait vraiment bien taper le sable, bien serrer les grains l'un contre Vautre, c'était plus délicat parce que le moindre jeton, la motte elle pouvait casser..." (entretien Mr Pépin, Sommevoire).

La serre du sable demandait au mouleur beaucoup de doigté : "...// fallait serrer le sable mais pas trop parce que la pièce était souillée, ça faisait un trou, c'était foutu... " (entretien Mr Cotton, Brousseval). "... on serrait à la main, en allant pas trop près du modèle pour éviter les coups, on serrait plus dur vers le châssis, c'était un coup à prendre..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne). Alors qu'aujourd'hui : "... vous mettez votre sable sans le serrer maintenant, juste un peu à la main comme ça, vous en avez pour 5 minutes..." (entretien Mr , Sommevoire).

Le sable qui n'est pas réutilisable : "... maintenant, c'est du sable qui ne sort plus, il est foutu, il est brûlé..." (entretien Mr Bienaimé, Brousseval), est déversé dans les moules par des machines : "maintenant, ¡es sables synthétiques se promènent en l'air et vont directement dans le moule, le mouleur n'y touche plus..." (entretien Mr Moite, Brousseval).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mûrs 1994 77 Seuls les mouleurs d'ornement comme à Sommevoire continuent à serrer le sable à l'aide de fouloirs et de pilettes ; lors de cette opération, ils doivent avoir la capacité de prévoir les réactions de la matière : la température de la fonte dépasse 1200°, elle provoque une formation de gaz dans le sable du moule et une serre trop dure s'oppose au passage des gaz : "il ne faut pas serrer trop fort pour que le gaz garde sa perméabilité, parce que la fonte, quand vous coulez, il y a des gaz et il faut qu'ils passent librement au travers du sable ; autrement, les pièces ont ce qu'on appelle des reñís..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

L'utilisation de ces nouveaux procédés, tels que le sable auto-durcisseur ou l'élastomère, répond à une logique économique, la rapidité d'exécution permettant un meilleur prix de revient. Les mouleurs qui ont travaillé en utilisant les techniques anciennes constatent cependant des différences au niveau du fini de la pièce : "... on peut ñire le même travail en utilisant de nouveaux matériaux mais c'était plus fin dans le temps, c'était plus fignolé..." (suivi d'une journée de travail de mouleurs à Sommevoire).

De plus, la perception du travail par le mouleur n'est plus la même : "c'était beaucoup plus intéressant de notre temps que maintenant ; maintenant il faut plus être mouleur pareil... et on avait beaucoup d'outils de mouleurs, maintenant, il n'y en a plus besoin, comme c'est du sable dur, on fait la coulée avec une lime. Avant, il fallait ñire ça à la spatule, vous aviez des crochets pour ramasser le sable, des soufflets à main pour retirer le sable au fond, on avait des lissoirs, des congés..." (entretien Mr Mertrud, Sommevoire). "... je trouve que le moulage a disparu par lui-même..." (entretien Mr Pépin, Val d'Osne).

La coulée Une fois que son moule est constitué, le mouleur doit procéder à la coulée. Cette opération demande également une certaine maîtrise : "... en principe, c'était toujours le même qui coulait parce qu'il avait l'habitude ; il ne faut pas hésiter, ce n'est pas parce que la fonte va sauter par exemple, il faut rester à son poste et continuer à couler ; il y a du vide entre les parties de sable, c'est là que la fonte se loge et ça va former la pièce. Une fois qu'on a commencé, il faut plus s'arrêter, parce que la crasse, les impuretés qui nagent au dessus vont en profiter pour passer dans la coulée..." (entretien Mr Galichet, Val d'Osne).

Le simple coup d'oeil, le savoir-voir en quelque sorte est une faculté importante du mouleur qui est mise en oeuvre notamment lors de l'opération de la coulée. Celui- ci, en effet, peut estimer la température de la fonte à fusion uniquement par sa couleur : "la couleur vraie doit être presque blanche, orange claire ; si elle devient rouge-orangée ce n'est pas bon". (suivi d'une journée de travail des mouleurs à Sommevoire).

Les mouleurs portent des chaussures de sécurité mais autrefois, ils devaient se munir d'espadrilles : "... c'était interdit de couler avec des souliers, il fallait avoir des espadrilles parce que s'il y avait de la fonte qui coulait, c'était vite parti une espadrille, tandis qu'un soulier !..." (entretien Mr Reneaux, Val d'Osne).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 78 Un exemple de moulage : la fabrication d'un balcon (chantier de moulage main du 11 et 13 mai 1993, Sommevoire) préparation d'un moule, serre du sable, coulée, décochage

Le mouleur arrose le sable étalé sur le sol afin de le rendre compact pour que son moule soit bien stable.

A côté, il pose sur le sol une partie du châssis dans laquelle il verse du sable noir qu'il tasse avec ses pieds. Il aplanit ensuite le sable avec une planche de bois, pose son modèle et tape le sable avec un fouloir à main. Travaillant sur modèle libre, il doit construire son moule, contrairement aux mouleurs qui travaillent sur plaque- modèle.

Après avoir soulevé son modèle à l'aide d'un crochet, le mouleur pose sur le sable qu'il a préparé à même le sol son châssis puis son modèle qu'il saupoudre d'isoline "pour empêcher que les deux parties se remarient, pour empêcher que ça colle". Il verse ensuite du sable à huile à l'aide d'un tamis puis du sable noir, pose une autre partie de châssis, marche dessus, met du sable noir et tasse avec ses pieds puis avec un fouloir ; gestes qu'il renouvelle jusqu'à ce que le châssis soit bien rempli.

Une fois le châssis fermé, le mouleur le soulève de nouveau à l'aide d'un pont- moulant puis le pose en changeant de face.

Après avoir rebattu le sable qui est sur le sol, il repose son châssis. C'est donc la partie de dessous qui est maintenant dessus, qui est enlevée.

Avec un "piquet d'ébranlage", il tape sur le modèle et le soulève doucement plusieurs fois avec un crochet pour "séparer les petits bouts de sable qui restent, pour voir si tout va bien, si ce n'est pas en contre-dépouille" après avoir saupoudré d'isoline. Il pose ses coulées.

La même opération, pose de sable à huile, sable noir, fouloir, pilette est recommencée et les coulées sont enlevées.

Puis c'est l'opération du pré-démoulage : des coins sont posés à chaque extrémité ; "on lève avec des coins pour éviter que ça casse". Il sépare les deux parties. Le modèle se trouve dans une partie, l'empreinte dans l'autre. Il la nettoie avec une spatule et un lissoir. Ensuite les coulées sont tracées. "C'est un peu visuel, c'est suivant les trajectoires". Il accroche alors un crochet au modèle, soulève doucement en tapotant avec un marteau, fait la même chose de l'autre côté puis enlève le modèle. La partie de châssis est posée sur l'autre partie, le mouleur ferme le châssis avec les clavettes ou crampes. Lors de l'opération de la coulée, la fonte est vidée dans une petite poche à main placée à l'intérieur d'un brancard porté par deux mouleurs. Afin de faire remonter la crasse qui est dans la fonte, de la silice est saupoudrée au dessus de la poche avant que la fonte ne soit versée dans les trous de coulée. Puis, le mouleur, après la coulée, procède à la dernière opération, le décochage, qui consiste à faire sortir la pièce exécutée en cassant le sable.

La fabrication d'un balcon demande entre trois heures et trois heures cinquante de temps d'exécution.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final • Mars 1994 79 (/Acquisition - Transmission De la formation interne...

La plupart de nos interlocuteurs ont suivi un apprentissage au sein même des fonderies dans lesquelles ils ont travaillé. Par un contrat d'apprentissage, le directeur de l'usine s'engageait à faire enseigner au jeune apprenti sa profession et à lui laisser le temps pour suivre les cours professionnels organisés par l'établissement en vue de l'obtention du certificat d'aptitude professionnelle et du diplôme de fin d'apprentissage.

Durant cet apprentissage d'une durée de trois ans qui commençait pour la plupart dès l'âge de 14 ans, des cours théoriques étaient enseignés conjointement à l'enseignement de la pratique.

Ces cours théoriques étaient donnés au sein des fonderies par des professeurs ou des membres du personnel selon les entreprises : "on avait deux jours de cours par semaine ; un professeur nous donnait des cours de fonderie, un autre des cours de français parce qu'il en /allait pour le CAP..." (entretien Mr Pépin, Sommevoire).

"•C'étaient des ingénieurs de l'usine ou des dessinateurs ; moi, quand j'ai commencé, j'étais dessinateur et on m'a demandé de donner des cours de dessin de géométrie de làçon à donner des connaissances théoriques aux jeunes..." (entretien Mr Somborn, Brousseval).

Les apprentis travaillaient également directement dans les ateliers au contact des ouvriers dans le cadre de leur apprentissage.

Au départ, ils ne participaient pas directement à la production et se formaient sous la coupe d'un moniteur ou contremaître puis selon leur aptitude, ils rejoignaient les ouvriers sur les chantiers : "au bout d'un an d'apprentissage, comme je travaillais pas mal, ils m'ont mis avec des gros chantiers ; là on travaillait avec des vieux messieurs qui nous apprenaient à travailler ; au contact des vieux vous apprenez à être sérieux et puis VOUS travaillez proprement..." (entretien Mr Georges, Sommevoire).

Bien que parfois difficile : "-j'ai fait une année avec un moniteur, ça marchait à la baguette, on n'avait pas peur de nous botter le derrière..." (entretien Mr Pépin, Sommevoire), les personnes qui ont suivi ce type d'apprentissage le considèrent comme étant le plus formateur : "quand on est apprenti, on est formé disons sur le tas et par rapport à un centre technique, ils ont peut-être plus de théorie que nous, mais nous on est avantagé par la pratique, parce qu'il faut avoir certaines connaissances pour produire un travail apte à être vendu ; on nous mettait avec un ancien ouvrier, il nous montrait ; on en faisait de la production ...". (entretien Mr Pépin, Val d'Osne).

Le plus souvent, pour apprendre, l'apprenti devait faire appel à ses capacités visuelles car l'ouvrier ne donnait pas beaucoup d'explications : "je suis rentré, j'avais 15 ans, j'ai été huit jours sans toucher une pièce, simplement regarder tout ce qu'il faisait etj'avait pas intérêt à regarder à côté. Il parlait pas beaucoup mais il disait il faut faire ceci, cela, regarde ; j'avais pas le droit ni de fumer, ni de causer, ni de siffler. Au bout de huit jours il m'a dit, voilà tu vas faire ça ; si c'était pas bien il me faisait recommencer mais pas deux fois !" (entretien Mr Georges, Sommevoire).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Fina] - Mars 1994 80 Il faut également souligner que le fait d'être payé aux pièces devait avoir une incidence sur le peu de communication verbale : "... on s'attardait pas longtemps ; mettons un joint : tu fais ton joint là, fais attention à ça et puis débrouille-toi..." (entretien Mr Mertrud, Sommevoire).

Bien que certains ouvriers ne communiquaient pas tout leur savoir : "il y en a toujours qui ne voulaient pas qu'on soit plus malins qu'eux..." (Mr Mertrud - Sommevoire), une relation quasi-paternelle s'établissait parfois entre l'ouvrier et l'apprenti : "on donnait beaucoup de notions à ceux qui ne savaient pas : c'est comme ça qu'il laut ñire ; des fois le contremaître me disait : surveille le gamin, presque tout est foutu, alors j'allais le voir, je l'aidais, on coulait le moule, il mettait une croix dessus et quand il décochait, elle était bonne la pièce alors il était content et il essayait de faire pareil" (MT Pépin. Sommevoire) ; "toi c'est le père M qui t'a montré et qui t'a donné toute sa trousse à outils... !" (Mr Mertrud, Sommevoire).

La transmission s'opérait d'autant plus facilement que l'on était voisin, habitant de la même cité ouvrière, du même village et plus encore de la même famille. Ce qui n'était pas le cas pour les personnes extérieures à ce microcosme : "même à l'époque où il y avait du travail, un nouveau arrivait, il savait bien travailler mais on est un peu émotionné au départ... s'il démarrait mal, il faisait mal, on le regardait et on n'avait ou pas le courage de lui dire ou on attendait qu'il lasse ¡a boulette ; il y avait un mélange de ça et c'était pas sympa..." (Mr Galichet, Val d'Osne).

La variété des moulages, certains très complexes, demandent de nombreuses années de pratique, ce qui tend à signifier que l'acquisition n'est jamais complète et définitive : "J'ai 57 ans et j'en apprends encore et on en apprend toujours ; il y a des ficelles dans le métier comme dans n'importe quel métier..." (Mr Georges, Sommevoire).

... à la formation externe

Aujourd'hui, il n'y a plus d'apprentissage dans les fonderies. Il existe une formation spécifique dans le domaine de la fonderie qui est enseignée au Lycée Professionnel de Saint-Dizier. La partie fonderie comprend une section moulage et une section modelage.

Ce lycée forme les élèves pour un BEP et non plus un CAP. Le CAP formait des praticiens mouleurs-mains, alors que le BEP permet d'avoir des connaissances plus larges qui, selon le chef des travaux, peuvent amener les élèves vers un BAC et une formation supérieure.

On s'aperçoit à la lecture du référentiel des matières à enseigner, qu'on apprend surtout aux élèves à conduire, contrôler, maintenir en état les systèmes automatisés et que l'enseignement du moulage-main a pratiquement disparu ; cependant, en dehors de cette formation générale où les élèves doivent apprendre à décoder des documents, des fiches de travail, organiser, préparer les matières premières et l'outillage, le professeur de cette section fonderie "détourne" un peu cet enseignement et continue à apprendre le moulage-main aux élèves à l'occasion de commandes particulières comme des trophées pour des associations par exemple.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 81 Le Comité Métallurgique de Champagne en collaboration avec l'Union Patronale de Haute-Marne, tentent par le biais de diverses actions de redorer cette image des fonderies. Ainsi, la campagne "Bravo l'industrie" permet à des élèves de collège de 4ème sous forme de contrat de partenariat de se rendre dans les entreprises et de travailler sur un thème donné dans le but de favoriser le rapprochement école- entreprises. Cette année, sur quatre contrats signés, trois concernaient des fonderies.

De plus, une campagne est menée pour permettre à des jeunes de 3ème de faire un stage de trois jours en fonderie, les cinquante premiers recevant une bourse de 600 Frs. Cette action de promotion est typiquement réservée aux fonderies.

Dans le but de relancer l'apprentissage, les deux sections fonderie du CFA vont également rouvrir leurs portes dès la rentrée scolaire de septembre. Les apprentis munis d'un contrat de travail travailleront en alternance quinze jours en entreprise, quinze jours au lycée de Saint-Dizier où l'enseignement se fera, le CFA n'ayant pas de local.

Les ouvriers qui pensent avoir beaucoup appris lors de leur apprentissage semblent prêts à transmettre leur savoir à leur tour : "ça fait plaisir d'entendre ça, moi maintenant, au bout de tant et tant de travail, je m'aperçois qu'ils m'ont tout donné, vous vous apercevez que la personne qui vous a montré ne s'est pas foutu de vous... Je leur donnerai tout ce queje sais, je leur dirai tout, ce sera un beau cadeau queje ferai avant de m'en aller... " (Mr Georges, Sommevoire).

Mais, la mauvaise image de marque de la fonderie, -pénibilité du travail, saleté, salaires insuffisants-, a, semble-t-il, favorisé un manque d'intérêt des jeunes pour ce travail. En effet, il y a peu de jeunes dans les fonderies et le nombre des élèves scolarisés n'est que de douze élèves par année dans la section fonderie ; ce qui provoque une rupture provisoire de la transmission : "il ne forme plus personne, il n'y a plus déjeunes ; dans le temps il y avait des jeunes en apprentissage, il y avait des cours à Saint-Dizier, de nos jours ils ne veulent plus travailler à l'usine". (informateur 3 - Sommevoire).

Jusque dans les années 60, le jeune ouvrier qui rentrait à l'usine perpétuait une tradition familiale : le grand-père, le père, les oncles et les frères d'une même famille travaillaient très souvent au sein de la même entreprise.

Avant même d'être en âge de travailler, la fonderie lui était déjà familière : "... mon père travaillait, mon frère aussi ; quand j'étais gamin, on était élevé dans la fonderie, je descendais le jeudi avec mon père, je tassais le sable, je lui préparais des petites bricoles comme ça..." (entretien Mr Piault, Val d'Osne). "... Quand j'étais gamin, j'allais à l'usine tout le temps ; le jeudi, j'allais les voir..." (entretien Mr Moite, Brousseval).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 82 Mais ce respect de la tradition : "à l'époque, les parent allaient à l'usine, on allait à l'usine" (entretien Mr Moite, Brousseval) n'entrait pas seul en ligne de compte ; en effet, les moyens de transport étant moins développés qu'aujourd'hui, il était plus facile de travailler dans l'établissement proche de son lieu de travail : "... à cette époque là, il n'y avait pas les moyens de locomotion comme aujourd'hui ; les centres d'apprentissage, ça commençait seulement à se créer, alors il fallait se déplacer. Nous, il aurait fallu qu'on aille à Saint-Dizier, alors que là, les entreprises avaient le droit de former des apprentis ; c'est pour cette raison queje suis rentré à l'usine..." (entretien Mr Claudin, Val d'Osne).

"... Il n'y avait que ça dans le coin..." (entretien Mr Pépin, Val d'Osne).

D'ailleurs, bien souvent, bien que nous informateurs parlent de leur travail avec plaisir, certains auraient aimé exercer une autre activité : "... j'étais dans une famille nombreuse, on était sept enfants, alors on ne s'amusait pas à faire des études, aussitôt qu'un était en âge : allez, à l'usine !" (entretien Mr Thenot, Brousseval).

"... Moi, j'aurai bien voulu faire coiffeur ou menuisier mais qu'est ce que vous voulez, il n'y avait que ça" (entretien Mr Lonchenique, Brousseval).

"... C'est mes parents qui m'ont introduit là ; mais mon désir c'aurait été d'être boucher..." (entretien Mr Linard, Sommevoire).

Et l'on note que cette tradition d'exercer le même métier que ses parents n'a plus cours aujourd'hui et que la plupart de nos interlocuteurs ont poussé leurs enfants dans ce sens : "mes enfants, le but de notre existence ça a été de leur donner de l'instruction pour qu'ils se défendent mieux que nous..." (entretien Mr Moite, Brousseval).

"Moi, j'ai eu un fils, j'ai jamais voulu qu'il travaille là-dedans. Je vous assure, c'était dur comme travail..." (entretien Mr Consigny, Dommartin-le-Franc).

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 83 Notes

1 Denis Chevallier, Terrain, n° 16. 2 Servant, Exposition Universelle de 1878, p. 10. 3 A. Darcel, les Arts industriels à Londres, p. 554. 4 Min Gy Alphonse, Mémoire sur le moulage de la fonte à l'usine du Val d'Osne.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 84 Conclusion

Alors que la fabrication de fontes d'art a de moins en moins cours en raison de son coût élevé, on assiste depuis une dizaine d'années à un renouveau des fontes artistiques du 19ème siècle produites en série alors qu'elles furent longtemps négligées au profit du bronze. Cette renaissance de la statuaire est due en partie aux décorateurs et paysagistes qui ont relancé la mode des ornements de jardins. Les fontes haut-marnaises sont particulièrement côtés, en particulier celles en provenance du Val d'Osne et de Durenne Sommevoire. En novembre 1989, les buffles d'Isidore BONHEUR fondus par le Val d'Osne adjugés 1 870 000 Frs, pulvérisaient tous les records ; la même année, une paire de sculptures porte- torchères, l'une représentant une maure, l'autre, une égyptienne, en fonte de fer marquées de la fonderie du Val d'Osne, ont doublé leur évaluation pour revenir à un acheteur français au prix de 145 000 Frs (1).

Cet engouement a permis à GHM Sommevoire de relancer le marché des fontes d'ornement ; elles sont aujourd'hui proposées dans les revues de décoration comme le prouve cet article du magazine "Votre Maison" : "... Si vous voulez mettre une fontaine Wallace ou un kiosque à musique dans votre jardin, un lampadaire des Champs-Elysées et une balustrade Haussmanienne à votre balcon, un banc de la Ville de Paris ou un grand vase médicis sur votre terrasse, c'est GHM qui les réalise..." (2).

Bien qu'ils évoquent les conditions difficiles dans lesquelles ils ont travaillé parfois, les fondeurs éprouvent un certain attachement au métier qu'ils ont exercé et aux établissements dans lesquels ils ont travaillé. Cet attachement s'est traduit notamment par l'achat d'objets symbolisant la production des fonderies. Ainsi, il est très fréquent de trouver des pièces en fonte, des modèles plâtre dans les jardins ou encore des pièces en bronze exposées sur les cheminées de leur salle à manger ; objets achetés au prix du kilo de fonte lors de la fermeture des fonderies ou réalisés par les fondeurs eux-mêmes (nous utilisons ici le terme de fondeur au sens général désignant tous les membres du personnel d'une fonderie). L'exemple de l'achat du cheval qui trône à l'entrée du village de Curel près de la fonderie du Val d'Osne est très significatif de cet état d'esprit. Ce cheval en fonte, "Royal", étalon du haras de Lamballe, réalisé d'après un modèle de Rouillard se trouvait depuis le début du siècle près de la gare de Curel ; apprenant qu'il devait être vendu, une collecte eut lieu en 1971 dans tous les villages situés à proximité du Val d'Osne afin qu'il puisse rester à Curel car il symbolise "non seulement la valeur professionnelle de nos mouleurs mais a aussi une grande valeur sentimentale..." (3).

Les exemples que nous avons choisi pour illustrer nos propos ne comptent pas parmi les plus célèbres. (On fait en effet souvent seulement référence à des pièces en fonte ou bronze qui se trouvent à Paris tel le Pont Alexandre II) ; ce sont des fontes que l'on peut découvrir dans les jardins et sur les places de villes ou villages de Haute-Marne ou de départements limitrophes, Aube, Meuse, etc.. Pour les autres, telles les fontes de la Ville d'Angers, nous nous y sommes particulièrement intéressé car des débuts de piste nous laissait entrevoir l'existence de fonds d'archives qui font cruellement défaut en raison notamment de leur destruction lors de rachats successifs des fonderies.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1993 85 Dans la plupart des cas, rares sont les données permettant une monographie précise, un suivi analytique, dans l'espace et dans le temps de l'objet, de son invention à sa mise en place dans un lieu choisi à cet effet. Et souvent le système des catalogues apparaît lorsque la production est devenue trop importante pour que le marché régional, qui suppose une petite série et la vente directe avec une adaptation aux clients connus, suffise à l'écouler.

L'histoire de l'usine Durenne, spécialisée dans la fonte d'art, constitue un excellent exemple d'une évolution jusqu'à nos jours ; ayant connu de sombres moments après la riche période de la fin du XIXème, elle s'est lentement orientée vers son stade actuel. A. Durenne met à la disposition des créateurs de son temps les capacités techniques de ses usines. Des modèles créés sous le Second Empire sont diffusés jusqu'à la première guerre mondiale ; les productions destinées aux monuments aux morts (cimetières) et celles de la sculpture religieuse dite courante continueront après 1918. La production en série s'arrête progressivement après la seconde guerre et tandis que l'on arrête la fonte de bronze à l'usine du Val d'Osne, l'usine de Sommevoire produit encore du mobilier urbain même si le plâtre n'est plus le matériau de confection du modèle.

Interaction entre goût du public, demande sociale et création artistique, -mais peut-on précisément parler de création nouvelle au niveau des formes exécutées en fonte de fer ?-, innovation stylistique rendue possible par les qualités et les techniques de fabrication exigeant de résoudre les difficultés de l'exécution technique, -la fonte ne s'inspire-t-elle pas fréquemment de registres et de thèmes anciens, mélangeant les styles ?-, diffusion massive de modèles-types adaptée à une mode apparaissent aujourd'hui, à la lumière de ces premières recherches comme autant de questions à approfondir face à cette Fonte d'Art, au-delà des oeuvres.

Notes

1 La Gazette de l'Hôtel de Vente de Drouot, n° 20, mai 1989 2 "Votre Maison", n° 274, Août-Septembre 1993 3 Archives privées GHM Sommevoire, lettre du Maire de Curel, 21 juillet 1971 au PDG de GHM

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Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final /Bibliographie- Mars 1994 94 Brousseval

C'est en 1796 que le sieur Adrien, maître de forges à Montreuil, fait construire un haut-fourneau à Brousseval sur le site du Champ-Bonnin près de la source du Haut- Sang qui a pour caractéristiques de ne jamais ni tarir, ni geler. Vers 1827, l'usine, dirigée alors par Elie Daguin, gendre de J.B. Adrien, comportait outre le haut-fourneau d'une production annuelle de 600 tonnes de fontes, un cubilot fournissant 200 tonnes de fonte. Après son rachat par Pierre Gilles Marie de Chanlaire, l'usine est dotée vers 1835 d'un second haut-fourneau et d'un second cubilot ; en 1841, elle occupe 40 hommes et 4 enfants de moins de 16 ans.

A l'exposition de Saint-Dizier, en septembre 1860, l'usine de Brousseval est citée comme étant une société nouvelle qui ne compte pas encore une année de création : les hauts-fourneaux et fonderies de Brousseval. Cette nouvelle fonderie est née de l'association de Brousseval, l'une en fonte brute, l'autre en gros moulage, de Mr Brochón, fabricant de fontes à Paris, c'est-à-dire propriétaire de modèles et faisant fabriquer dans diverses usines et enfin de deux maîtres de forges de la Dordogne, les frères Festugière.

Parmi les modèles qu'elle expose à cette exposition, sont cités, un Christ du statuaire Bourchardon, un guerrier Sarrazin, quatre modèles de chemin de croix, une vierge de deux mètres de haut, des balcons et des bancs (1). Un rapport sur la situation industrielle et commerciale de mars 1862 stipule que l'usine compte alors deux haut-fourneaux, quatre cubilots et un bocard ; les propriétaires sont Mr Desforges et Georges et Emile Festugière, Mr Brochón s'étant retiré. Le nombre d'ouvriers est de 500 ; ce chiffre compte les modeleurs, les fondeurs et les mouleurs ainsi que les ouvriers qui desservent le bocard, ceux employés à l'extraction du minerai ainsi que les bûcherons et encore les voituriers par qui s'effectuent les transports (2). Le 1er janvier 1872 est créée la société anonyme des Hauts-fourneaux et fonderies de Brousseval ; un bureau se trouve à Paris rue du Terrage et divers dépôts sont installés à Toulouse, Barcelone, Alger et Tunis... Mr Desforges a déjà quitté l'entreprise qui reste la seule propriété de Georges et Emile Festugière. La production de l'usine atteint 15 000 tonnes en 1889 et consiste principalement en:

installation de conduites d'eau et de gaz matériel de distribution d'eau matériel d'usine à gaz chauffage appareils d'hygiène fontes ornées pour bâtiments et construction fontes d'art

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 95 Une école et une cité ouvrière ont été construites par l'usine et les ouvriers bénéficient d'une caisse de secours pour les malades et d'une assurance contre les accidents.

A l'Exposition Universelle de 1889, l'usine de Brousseval obtient une médaille d'or et est particulièrement remarquée grâce à sa fabrication de tuyaux en fonte, système Petit et Lavril ; mais l'usine expose également des statues lampadaire, des candélabres, des vases et des statues (3). En 1893, l'effectif total est de 381 ouvriers dont 329 hommes, 1 femme, 41 garçons de 16 à 18 ans et 10 de 13 à 16 ans (4). En 1908, Georges Festugière (son frère Emile est décédé en mars 1886), fait construire un nouveau bâtiment pour s'orienter vers une nouvelle production, celle des appareils en fonte pour le chauffage central ; la production de fontes d'ornement et de fontes d'art a déjà été abandonnée.

De 1909 à 1925, plusieurs cités ouvrières sont construites (ces logements qui laissent une forte empreinte dans le paysage urbain de Brousseval ont été vendus aux ouvriers dans les années 80). En 1909 : La cité Boulevard des Italiens 4 groupes de 10 logements et un de 8 La cité Pitié 1 groupe de 10 logements et un de 9

En 1913: La cité Maroc 3 groupes de 10 logements La cité Rue Neuve 1 groupe de 10 logements La cité Laurain 1 groupe de 6 logements

En 1925 : La cité Maisons-Neuves 10 ensembles de 2 habitations mitoyennes (5)

En 1926, l'usine de Brousseval fait appel à des décorateurs pour l'ornement de ses appareils de chauffage central et un article lui est consacré dans la revue "La renaissance de l'Art français et des industries de luxe". Aucun membre de la famille Festugière ne pouvant assurer la suite de la direction de l'usine, la famille Ferry obtient en 1929 la majorité du capital de l'usine et André Lang, gendre de Mr Ferry, prend alors la direction de la société pour plus d'un demi- siècle.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 96 L'usine de Brousseval se compose aujourd'hui de trois sociétés ayant des actionnaires et des dirigeants communs :

- la société Soval, créé par André Lang en 1933 qui a pour mission de commercialiser les produits des fonderies de Brousseval et Montreuil. Le capital de cette société qui en 1989 occupait 90 salariés qui a pour Président Directeur Général Jean Lang, est détenu à 95 % par les familles Lang et Ferry. - les fonderies de Brousseval et Montreuil créées en 1961 par le regroupement de la société des hauts-fourneaux et fonderies de Brousseval sise à Brousseval et la société des fonderies de Montreuil sur Biaise établie à proximité. Cette société fabrique des tuyaux, des éléments liés à l'énergie, tuyaux à ailettes, radiateurs, des produits pour les secteurs transport, chimie et sidérurgie ; elle travaille aussi pour le domaine ferroviaire.

- la société des anciens établissements Somborn, Lang-Ferry, qui fabrique et commercialise des bancs de scie circulaires, de l'outillage agricole et réalise également des travaux divers en sous-traitance, mécano-soudure, usinages divers... Elle possède un atelier de construction mécanique à Haut-du-Them (Haute-Saône).

L'usine de Brousseval est particulièrement représentative de l'évolution qui s'est opérée au sein des fonderies depuis une vingtaine d'années ; en effet, elle a su à partir des années 70 se moderniser grâce à l'achat de fours électriques et l'installation de chantiers automatiques de moulage ; les machines "BMD" et "DISAMATIC".

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 97 Il HOUSSE TAL

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A : Atelier de fabrication. Usine prinitive B : Atelier de fabrication C : Atelier de fabrication. La nouvelle fonderie 0 : Cité ouvrière í : logoripnt patronal f : Ecole U : logpi'jont patronal et parc H : Magasin de commerce : coopérative 1 : Bureau J : Atelier de fabrication. Centrait» électriqu« K : Clwiinée d'usine L : Bains-douches M : Lavoir N : Citfi ouvriire 0 : ConcW;j»ri» P : Magasin industriels Q, Q' : Hangars R. R R" : Loyeir.ents de contremaître

Brousscval Extrait du cadastre - 198S

Source : Service de l'Inventaire de Chnnjxigne-Ardenne Notes

1 Journal consacré à l'exposition industrielle, agricole et horticole de Saint-Dizier, 1860 2 Archives Départementales de la Haute-Marne, 269 M 2 3 Francis LAUR, exposition universelle de 1889, pp. 479 à 485 4 Archives Départementales de la Haute-Marne, 226 M 6 5 Documentation archives Brousseval

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 99 Dommartin-le-Franc

L'antériorité du site industriel de Dommartin-le-Franc est attestée dès le XlIIème siècle par la présence de forges. En 1459, ces forges sont officiellement reconnues par lettres patentes du roi Charles VII. Le 12 janvier 1773, le roi autorise la construction d'un haut-fourneau à l'emplacement de la fonderie actuelle dite "usine du bas". La construction d'un deuxième haut-fourneau est autorisée en 1837. Selon des statistiques industrielles datant de 1841, l'usine de Dommartin qui produit des fontes moulées, appartient à un sieur Geny ; elle emploie 70 hommes, 5 femmes et 5 enfants dont les salaires respectifs sont : 2,50 Frs, 1 Fr, 1 Fr ; il es cependant spécifié que le salaire de ouvriers n'est porté qu'approximativement, les ouvriers étant chacun payés à la pièce et non à la journée (1). Il est stipulé lors de l'exposition industrielle, agricole et horticole qui a lieu à Saint- Dizier en 1860, que les produits exposés par la fonderie de Dommartin sont répartis en deux groupes : - d'une part les produits exposés par Messieurs Lebachelle et Chanlaire, propriétaire de l'usine : engrenages de moulin à battre assortiment mécanique de batterie engrenages à dents intérieures et extérieures chaudrons avec oreilles chaudières à lessive marmites anglaises poulies - d'autre part les produits exposés par Mr Ovide Martin de Paris qui tire de Dommartin des fontes d'ornement sur des modèles qui lui appartiennent ; on cite notamment un monument funéraire qui représente une église gothique. Dans une lettre adressée au Sous-Préfet le 21 mars 1862, le juge de paix note que "... l'industrie de la fabrication du fer emploie dans les difíerentes branches de son exploitation de nombreux ouvriers pour la plupart du pays. Sa position s'est sensiblement améliorée depuis quelques mois, les commandes sont aujourd'hui nombreuses, ¡es fontes et ¡es fers étant très demandés, leurs prix après avoir été longtemps affectés par crainte de l'effet que devait produire sur notre groupe le traité de commerce avec l'Angleterre se sont enfin considérablement relevés..." (2).

L'usine de Dommartin emploie alors 150 ouvriers. En octobre 1893, l'effectif total est de 105 ouvriers, dont 93 hommes, 3 femmes, 6 garçons de 16 à 18 ans, 3 de 13 à 16 ans ; l'établissement comporte une fonderie et une émaillerie et appartient à Ferdinand de Chanlaire, maître de forges (3). C'est en 1917 qu'est créée une société en nom collectif entre Charles de Chanlaire (fils de Ferdinand) et Charles de Magnienville dont la raison sociale est : "les Héritiers de Ferdinand de Chanlaire". Vers 1960, la fabrication de cuisinières émaillées, poêles, réchauds à gaz et de fontes d'ornement, croix, vases, balcons, croisées, va, peu à peu, cesser au profit de la fabrication de pièces mécaniques pour laquelle un chantier mécanisé est installé.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 100 En 1987, le site de "l'usine du bas" a été divisé en deux parties (cf plan). La première, comprenant les magasins de stockage, les bureaux et le magasin de vente a été rachetée par l'usine GHM de Sommevoire qui expose ses fontes ornementales dans le magasin de vente.

Dans la deuxième partie, comprenant les bâtiments industriels des fonderies du Blaisois, l'activité industrielle a continué ; on y a fabriqué notamment des cadres de piano, jusqu'à une mise en liquidation en décembre 1992. Ces bâtiments ont la particularité d'être en état de fonctionnement ; en effet, tout le matériel étant resté en place, on peut lire sur un même site les différentes phases de fabrication de pièces moulées.

Aux côtés de cet ensemble se trouve un ancien établissement industriel désaffecté : "l'usine du haut" qui comprend un haut-fourneau édifié en 1834 et qui depuis sa restauration et sa mise en valeur par notamment une association locale, l'association pour la Sauvegarde et la Promotion du Patrimoine Métallurgique Haut-Marnais, est accessible aux visiteurs.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 101 Domm arti n-l e-Franc A-B ateliers de fabrication A halle avec haut-foumeau an de situation C logements ouvriers levé à la main d'après le cadastre de 1984 D bains-douches Section C, 1/1000e

E magasin de vente GHM ^-.K ~ot« n.e.c.S.T.'i ISIo-^33 t F magasins de stockage V.r* L£ F^W-C G réserves H bureaux

Bâtiments des Fonderies du Blaisois

Bâtiments GHM £¿r,o¿ 1 Logement du concierge Magasin de vente 2 Bureaux 3 Logements 4 Vestiaire au dessus : réfectoire 5 "Le fourneau" 6 "La tonne" 7 "La bergerie" 8 "Le paradis" 9 "La cambuse" 10 "La singerie" 11 "La nouvelle" 12 Douches 13 Émaillerie 14 Modelage 15 Atelier forge 16 Endroit où étaient meulées les cuisinières 17 Expéditions rivière 18 Entrée du moulage 19 WC Roue 20 Raperie dessableuse

(Sources entretiens Mr Consigny et Mr Grignon, Dommartin-le-Franc). Certains ateliers ou bâtiments ont été dotés de noms particuliers ; nos informateurs n'ont pas pu nous renseigner totalement sur la signification de ces appellations qui existaient pour certaines bien avant leur arrivée à l'usine.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 103 Les mouleurs eux-mêmes se donnaient des surnoms : "... on avait tous des sobriquets là dedans, ça s'est perdu par la suite...". Parmi ces surnoms on peut citer, "la sardine", "la fouine", "potiron" pour un jeune qui avait une certaine corpulence ou encore "bambou" pour un amateur de pêche, surnom attribué ensuite à son fils.

Les personnes qui s'occupaient de charger le cubilot étaient appelés : "les croque- morts" ; les mouleurs : "les gueules noires".

1 "...h concierge a vait un logement accolé au magasin... ". 3 "...il y avait deux logements dont celui du contremaître...". 2 "...bureaux et logement du directeur... ". 4 "...au-dessus des vestiaires, il y avait le réfectoire, mais personne ne s'en servait, on mangeait sur le tas de sable ! Les vestiaires, c'est pareil, moi, j'avais la mienne d'armoire sur mon chantier, en bois ; avec les vestiaires, il y avait des lavabos...". 5 "... le fourneau, c'est compréhensible comme nom, il y avait le cubilot... ". 6 "... la tonne, c'était tout petit et un peu voûtée... ". 7 "... ils ont démonté la tonne pour faire la bergerie de 1954 à 1958... La bergerie, c'était des agneaux là dedans, soit-disant...". 8 "... le Paradis a été fait vers 60-65, le Paradis c'était l'arrivée des machines, mais je ne sais pas s'il existait le Paradis !...". 10 "... la singerie, c'est qu'il y avait des bizarres ¡à dedans!..." 11 "... la nouvelle, ils l'appelaient comme ça en 1933 quand je suis arrivé, c'était certainement le dernier bâtiment monté...". 13 l'émaillerie. "... les pièces qui étaient émaillées, c'était l'extérieur, la façade, les portes, alors c'était nettoyé, passé dans un bain, brossé, ensuite ça passait au four ; il y avait un grand four, le gars mettait la façade sur des fourches ; quand la pièce était bien rouge, il la mettait sur une table et l'émailleur, avec une passoire, passait l'émail dessus, il y avait plusieurs couleurs ; comme la pièce était bien rouge, ça fondait tout de suite : l'émail c'était des petits grains tout Gn comme du sel... ".

15 "... la forge, ils réparaient par exemple les châssis qui étaient cassés... ". 19 "... cette roue faisait marcher un soufflet énorme et il y avait un gros tuyau qui alimentait la fonderie ; le soufflet faisait du vent et faisait marcher la fonderie, ça marchait encore de mon temps ; après, par sécurité, ils ont mis des soufflets électriques".

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 104 Notes

1 Archives Départementales de la Haute-Marne, 209 M 10 2 Archives Départementales de la Haute-Marne, 269 M 2 3 Archives Départementales de la Haute-Marne, 226 M 6

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 105 Le Val d'Osne

Une des particularités de ce site est son isolement ; il est situé au coeur d'un vallon au bord de l'Osne à une distance de deux km de la petite commune d'Osne-le-Val et de 4 km du village de Curel. L'installation d'une usine dans un endroit aussi éloigné des voies d'accès principales s'explique par la présence d'eau, de bois et de minerai nécessaires alors au fonctionnement de ce type d'établissement dans la première moitié du XIXème siècle. Le 28 octobre 1834, Mr Jean-Pierre Victor André, fermier de la fonderie de Thonnance-les-Joinville, représenté dans la Haute-Marne par Mr Perron, directeur de cette usine, demande la permission d'établir sur le ruisseau de Curel au lieu-dit le Val d'Osne, commune d'Osne, canton de Joinville, un haut-fourneau, un bocard à mine et un patouillet destiné à la fabrication de fonte moulée. Il en obtient l'autorisation par ordonnance du roi le 25 août 1836 et l'usine est construite sur l'emplacement d'un ancien couvent (1). En 1840, l'usine du Val d'Osne produit 777 807 kg de fontes moulée et emploie 70 hommes et 25 enfants recevant respectivement un salaire de 3 F et 1 F par jour ; elle est dotée de deux machines à vapeur, d'un haut-fourneau et d'un four (2).

La production est de 1 400 000 kg en 1844 ; les 220 ouvriers bénéficient d'une caisse d'épargne et d'une caisse de secours. Pendant plusieurs mois de l'année et sous obligation expresse de la fréquenter, une école gratuite, confiée aux soins de l'instituteur de la commune, permet aux jeunes ouvriers d'acquérir les notions de base. L'usine comprend un bocard à mine, un haut-fourneau propre à la fusion du minerai de fer ayant dix mètres de haut et de deux fourneaux à la Wilkinson servant à la deuxième fusion de la fonte. Le prix de la main d'oeuvre a doublé (3).

Dès 1839, J.P.V. André qui réside rue Neuve-Menilmontant à Paris, obtient une médaille d'argent grâce à l'exposition de ses fontes d'ornement dont il est l'initiateur en Champagne.

A sa mort en 1851, sa femme et ses directeurs continuent à exploiter l'usine pendant quatre années avant de la céder en 1855 à la société en commandite sous le titre de Haut-fourneau et fonderie du Val d'Osne sous la raison sociale "Barbezat & Cie" ; le nouveau propriétaire en est Gustave Barbezat qui réside à Paris.

Le 29 octobre 1856, Gustave Barbezat obtient un avis favorable pour la construction d'un second haut-fourneau ; il a sollicité l'autorisation d'augmenter la consistance de son usine en raison du développement que l'industrie métallurgique a pris depuis plusieurs années dans la département et principalement dans l'arrondissement de Wassy qui renferme des minières très sûres (4). En 1857, une fonderie destinée à la fabrication de fontes moulées pour ornement est installée à l'emplacement d'une ancienne forge probablement pour la même raison(5). 350 ouvriers sont employés au Val d'Osne en 1862. Des logements sont construits en 1866.

Une caisse de retraite est créée pour les ouvriers par le nouvel administrateur délégué Charles Hanoteau, industriel, juge au Tribunal de Commerce de Paris en 1892.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 106 Son fils Henri lui succéda en 1895 ; l'usine se compose alors d'ateliers d'ajustage et de modelage, d'un moulin à noir pour fonderies, d'un moulin à sable, d'une fonderie d'art avec atelier de moulage et de divers magasins et logements (6).

En 1912, 200 ouvriers travaillent au Val d'Osne ; ils bénéficient d'une coopérative qui fournit à bas prix des denrées alimentaires à chacun de ses membres qui se partagent même les bénéfices (7). C'est en 1931 que le Val d'Osne est racheté par les Etablissements Durenne de Sommevoire. Face à l'ensemble de bâtiments du XIXème siècle qui comprend les bâtiments industriels, les logements ouvriers de la rue Barbezat, le logement du directeur (une maison de maître se trouvait également près des bâtiments industriels au milieu d'un parc mais elle fut détruite vers 1940) ; une chapelle et un terrain de basket ont été construits en 1954 suite à un don de l'abbé de la commune, de même qu'une école qui appartient à la commune.

Une fête fut donnée en juillet 1954 pour l'inauguration de la chapelle en présence de l'évêque de Langres et de Mr de Gallard, directeur de l'usine à cette époque. Une vierge fabriquée à l'usine fut offerte par Mr de Gallard à cette occasion et fut bénie le même jour. Il y eut une messe à Osne-le-Val puis une procession conduisit la population jusqu'au Val d'Osne où un repas fut organisé rue Barbezat. Les années suivantes, plusieurs fêtes et kermesses eurent lieu au Val d'Osne.

Près de ces constructions nouvelles, des logements, propriété de la commune aujourd'hui, furent construits par l'usine en 1962 afin d'y loger les cadres et les contremaîtres.

En 1972, l'usine employait 170 personnes et produisait 4 650 tonnes de fonte et 660 tonnes de fonte hydraulique : pièces de machines, de moteur, canalisations, etc.. La fonte en lingots provenait du Nord, de la Lorraine et la RFA, le coke, du Nord de la France.

Elle a été fermée définitivement en juillet 1986, et la majorité du personnel a été reclassée dans les autres usines du groupe à Wassy et Sommevoire. Les bâtiments et logements ouvriers ont fait l'objet d'une inscription à l'inventaire supplémentaire des Monuments Historiques au début de l'année 1993. La municipalité d'Osne-le-Val a pu acquérir un des bâtiments utilisé autrefois pour le stockage de modèles où ont lieu les expositions organisées par l'association des Compagnons de Saint-Pierre d'Osne-le-Val. Un projet d'aménagement d'un parc de loisirs et d'un camping dans l'ancien parc de la maison de maître est en cours de réalisation.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 107 16 3 V o

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S ne- / a: 00 Q a. < Ö ro o 00 •o ^ 2 bocardée s ouvrier s no n marié pla n > enta i 1 : bocag e magasi n 1 4 : domestiqu e 1 5 : chambr e pou r le s 6 : sabl e ver t 7 : sabl e blan c 8 : sabl e jaun 2 : entré e de s mine 3 : remise s 4 : logement s ouvrier 5 : écurie s 9 à 1 3 : magasin s

tr e c 3 tmm _ a W H** *• y~. 'fi -o c/3 o co m CD 1- 00 O) O d'a p V) *~ b servic e •<* CM CM gen d < pla n *- CO > 2 + Notes

1 Archives Départementales de la Haute-Marne, 130 S 163 2 Archives Départementales de la Haute-Marne, 209 M 10 3 Archives Départementales de la Haute-Marne, 212 M 3 4 Archives Départementales de la Haute-Marne, 130 S 163 5 Extrait du registre des délibérations du Conseil Municipal d'Osne-le-Val, novembre 1873

6 Archives Départementales de la Haute-Marne, 130 s 165 7 Abbé Maréchal, notice sur Osne-le-Val

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 109 Liste des catalogues répertoriés

Maison de l'Outil et de la Pensée Ouvrière/Troves :

• SA Ets Métallurgiques A. Durenne Hauts-fourneaux et fonderies Sommevoire, Wassy, Bar-le-Duc Album M.2 Fontes de bâtiment et de construction (pilastres, balustrades...) dépôt : 77 rue de Meaux à Paris capital 2 600 000 Frs (15x21) (appartenait à une entreprise de serrurerie, cachet : H. Morbois - Reims

• DUCEL Maître de forge - Paris 22 rue des 4 fils + tarifs des poids et prix des articles en fonte de fer (27,5x21)

• Société des fonderies de Bayard et Saint-Dizier Fontes d'ornement pour bâtiment et jardins Album 1935 Fascicule 2 : appuis, balcons et balustrades Fascicule 3 : panneaux et impostes pilastres et garnitures de rampes ornements de portes et de grilles Fascicule 4 : fontes de fumisterie articles de quincaillerie fontes d'ornements pour jardins Fascicule 5 : fontes funéraires (21x27,5)

Collection Particulière • Catalogue Fonderies et émaillerie de Dommartin-le-Franc (Haute-Marne) Cuisinières, barres d'appui, croix, entourages de tombes... (19x24)

Association Compagnons de l'histoire d'Osne-le-Val • Société anonyme des Hauts-fourneaux et fonderies du Val d'Osne Siège social : 97 boulevard Voltaire Maison de vente : 97 boulevard Richard Lenoir/Paris Fontes d'art et de bâtiment, année 1903, extrait général (16x25)

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 H0 Bibliothèque historique de la Ville de Paris • SA des fonderies d'art et de bâtiment (anciens établissements Denonvilliers) siège social et bureaux et magasin : 174 rue La Fayette, Paris

Haut-fourneau, fonderies de fer, de bronze et de cuivre et ateliers de constructions à Sermaize-sur-Saulx (Marne). Administrateur, directeur : Mr Maurice Denonvilliers, fin XIXème siècle. Modèles de colonnes, balcons, balustrades, marquises, grilles, mobilier de jardin...

Musée du Fer - Jarville • E. Capitain-Geny & Cie - Bussy (Haute-Marne) Album n° 1 des fontes d'art et de bâtiment Edition 1890, (13,5 x 20,5) • A. Durenne - Maître de forges Album n° 2bis - Bar-le-Duc, Sommevoire, Wassy Fonte d'ornement et de bâtiment (21 x 15,5) • Société des usines de Dammarie et Ecurey - A. Salin & Cie Maîtres de forges à Dammarie-sur-Saulx et à Ecurey (Meuse) Supplément à l'album des fontes d'art et de bâtiment, vers 1900 (26,5 x 34)

• A. Salin & Cie - Maîtres de forges à Dammarie et Ecurey (Meuse) Album spécial des modèles de barres d'appui, balcons de croisées, balustrades droites.. en art moderne (13,5x20,5) • Tusey (Meuse) Hauts-fourneaux, fonderies et ateliers de constructions Album des fontes d'ornement, fontes d'art, fontes religieuses (18,5x23,5) • SA des Fonderies de Saint-Dizier Album 1905 Balcons de croisées, pieds tables, entourages de tombes (24x16)

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 m « Musée d'Orsay album Durenne album Val d'Osne

» Centre de documentation de la Conservation Régionale de l'Inventaire du Limousin

album Capitain-Geny - extraits de l'album général 1901 n° 4 - articles religieux, funéraires et de jardin n° 5 - poteries, chauffage et fumisterie.

« Usine de Brousseval catalogue de production DESFORGES - BROCHÓN - FESTUGIERE Frères

» Usine de Sommevoire album n° 2 Val d'Osne Fontaines, statues album spécial n° 6 - articles funéraires A. Durenne Sujets commémoratifs

» Bibliothèque Forney Durenne 1889 - maître de forges Durenne 1890 - établissements métallurgiques Durenne 1900 - lanternes et candélabres Durenne 1931 - éclairage public Durenne 1934 - signalisation S.A. Haut-fourneaux, fonderie du Val d'Osne - 1880-1904-1921-1930

» Bibliothèque des Arts décoratifs S.A. des établissements A. Durenne vers 1890-1900

» Musée de Saint-Dizier A. Durenne - maître de forges supplément à l'album général - 1er semestre 1893 statues religieuses - 1er semestre 1894 + albums d'autres fonderies, Saint-Dizier, , Ferry-Capitain, album style Guimard

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 112 DOCUMENTS CONSULTÉS AUX ARCHIVES DEPARTEMENTALES DE LA HAUTE-MARNE

• A.D. Haute-Marne - 209 M 10 - Statistique industrielle correspondance 1839-1848 •A. D. Haute-Marne - 226 M 6 - Etat des usines, manufactures, fabriques ainsi que du personnel employé - 1893 • A. D. Haute-Marne - 269 M 2 - Rapports sur la situation industrielle et commerciale de l'arrondissement de Wassy - 1831 - 1886 • A. D. Haute-Marne - 211 M 6 - Statistiques sur la situation des ouvriers de l'industrie, du commerce et de l'agriculture - enquête parlementaire - 1884 • A. D. Haute-Marne - 211 M 7 - Enquête sur la situation du commerce de l'industrie et de l'agriculture - 1913-1918 • A. D. Haute-Marne - 211 M 8 - Situation économique du département au point de vue industriel et agricole - 1931 • A. D. Haute-Marne - M 1214 - Front Populaire • A. D. Haute-Marne - - M 1215 - Usines faisant partie des syndicats groupés dans le Comité Métallurgique de Champagne • A. D. Haute-Marne - 222 M 2 - Transformation en S.A. • A. D. Haute-Marne - 145 M 25 - Enquête hygiène publique des fonderies de métaux • A. D. Haute-Marne - M 1219 - Evénements économiques - 1909-1940 • A. D. Haute-Marne - 172 T 2 - Erection de monuments et de statues dans le département • A. D. Haute-Marne - 172 T 1 - Erection de monuments et de statues hors du département • A. D. Haute-Marne - 130 S 163 - Osne-Ie-Val - Moulins et Usines • A. D. Haute-Marne - 130 S 164 - Osne-le-Val - Moulins et Usines • A. D. Haute-Marne - 130 S 165 - Osne-le-Val - Moulins et Usines • A. D. Haute-Marne - 130 S 73 - Dommartin-le-Franc - Moulins et Usines • A. D. Haute-Marne - 130 S 209 - Sommevoire - Moulins et Usines • A. D. Haute-Marne - 130 S 57 - Brousseval - Moulins et Usines • A. D. Haute-Marne - L XII 92 - Pont à péage - Chatonrupt/Curel - 1856-1882 • Archives Val d'Osne non classées

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 113 • A.D. Haute-Marne - 130 S 108 - Joinville - Moulins et Usines • A.D. Haute-Marne - 130 S 226 - - Moulins et Usines • A.D. Haute-Marne - 130 S 226bis - Vecqueville - Moulins et Usines • A.D. Haute-Marne - 213 M 3 - Exposition des produits de l'industrie française à Paris, 1844-1849 • A.D. Haute-Marne - 212 M 5 - Exposition universelle de Paris 1855 correspondance 1854-1857 • A.D. Haute-Marne - 212 M 10 - Exposition universelle de Paris 1889 liste des délégués, rapports des délégués • A.D. Haute-Marne - 212 M 16 - Exposition universelle de Paris 1900 liste des délégués, rapports • A.D. Haute-Marne - 212 M 19 - Exposition universelle de 1862 à Londres circulaires - instructions • Folio 1239 à 1250 de 1886 à 1905 - L'ancre de Saint-Dizier

DOCUMENTS CONSULTÉS AUX ARCHIVES DEPARTEMENTALES DES VOSGES

• A.D. Vosges - 372.0 Raon l'Etape de 9 à 16 9 : eau 10 : fontaines, lavoirs, puits 12 : voirie 16 : travaux communaux

• A.D. Vosges - 11 T 27. 278 - Notice sur Raon l'Etape - Monographie

• A.D. Vosges - 4 F - Cartes postales Raon l'Etape

• A.D. Vosges - 9 T 9 11 - Monuments historiques arrêtés de classement 11. Rainville à Vruille 1875-1949

• A.D. Vosges - 9 T 16 20 19. Neufchâteau à Relanges 1894-1950

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 114 DOCUMENTS CONSULTÉS AUX ARCHIVES DE LA VILLE DE PARIS

• D G 10 - 297 dossier 1864 - Fondeurs de Paris • V.O.M.C. 236 - Trocadéro 1877-1878

• 25-6-22 - Pont Alexandre II 1893-1900

• 25-6-24 - Pont Aima

. 25-6-26 - Pont Bir Nakhim (Pont Passy) 1892-1893

• 25-6-27 - Pont de Grenelle 1825-1908

• D5 5-4-2 - Expositions universelles 1878-1889-1900

DOCUMEIsrrS CONSULTÉS AUX ARCHIVES MUNICIPALES DE LA VILLE D'ANGERS (Maine et Loire)

• 83 M 4 - Statue de Jeanne d'Arc - 1902-1909 • 83 M 6 - Statue de Marguerite d'Anjou - 1901-1905 • 83 M 19 - Statues offertes par Mr Giraud - 1909 • 83 M 21 - Statue de Pomone - 1900-1911 • 2 L 141 - Statue Diane de Gabies • 1 D 22 - Délibérations du Conseil Municipal pour l'érection de la fontaine du jardin du Mail- 1854-1855

Articles de Sylvain Bertoldi, Conservateur des Archives de la Ville d'Angers : - Extrait de Vivre à Angers - 15 janvier 1991 - "de l'eau et une fontaine pour Angers"

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Mame - Rapport Final - Mars 1994 115 DOCUMENTS CONSULTES AUX ARCHIVES MUNICIPALES DE LA VILLE DE LOUDUN (Vienne)

• Registre de délibérations du Conseil Municipal du 26 mars 1886 au 31 juillet 1893

• Registre de délibérations du Conseil Municipal du 8 août 1893 au 8 août 1898

• Le Journal de Loudun 20 mai 1894 - n°20 inauguration de la statue de Théophraste Renaudot

DOCUMENTS CONSULTÉS AUX ARCHIVES MUNICIPALES DE LA VILLE DE POITIERS (Vienne)

• Liasse 2104 - Statue de la Liberté

• Liasse 2127 - Projet Galland - 1895-1898 reconstruction d'un kiosque de musique

• Liasse 2156 - Projet jardin anglais de Blossac

• Liasse 5429 - Place de la Liberté - documents divers

• Cahiers de délibérations du Conseil Municipal - du 20 janvier 1879 au 9 juillet 1883 - du 28 juillet 1883 au 7 juillet 1887 - du 27 juillet 1887 au 19 mai 1890

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 116 REPERTOIRE DES ORGANISMES ET ASSOCIATIONS CONTACTES

• Archives Départementales de la Haute-Marne Route de Chaumont 52000 CHAMARANDES-CHOIGNES

• Archives Départementales des Vosges Allée des Hêtres 88000 EPINAL

• Archives Municipales de la Ville d'Angers Hôtel de Ville Boulevard de la Résistance et de la déportation 49000 ANGERS

• Archives Municipales de la Ville de Loudun Hôtel de Ville 1 rue Gambetta 86200 LOUDUN

• Archives Municipales de la Ville de Poitiers 14 rue du Mouton 86000 POITIERS

• Archives Nationales CARAN 11 rue des Quatre Fils 75003 PARIS

• Archives de la Ville de Paris 18 boulevard Servrier 75019 PARIS

• Bibliothèque de l'Ecole des Mines 60, boulevard Saint-Michel 75006 PARIS

• Bibliothèque Forney 1, rue Figuier 75004 PARIS

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 117 • Bibliothèque Historique de la Ville de Paris 24 rue Pavée 75004 PARIS

• Bibliothèque de la Maison de l'Outil et de la Pensée Ouvrière 7 rue de la Trinité 10000 TROYES

• Bibliothèque du Musée des Arts Décoratifs 109 rue de Rivoli 75001 PARIS

• Bibliothèque du Musée des Arts et Traditions Populaires 6 avenue du Mahatma Gandhi 75116 PARIS

• Centre de Documentation du Musée d'Orsay 62, rue de Lille 75007 PARIS

• Chambre de Commerce et d'Industrie de la Haute-Marne 55, rue du Président Camot 52100 SAINT-DIZIER

• Comité Métallurgique de Champagne Résidence Gigny 52100 SAINT-DIZIER

• Direction Régionale des Affaires Culturelles de Champagne-Ardenne Service de l'Inventaire Service des Monuments Historiques 3, faubourg Saint-Antoine 51000 CHALONS-SUR-MARNE

• Direction Régionale des Affaires Culturelles de Lorraine Service de l'Inventaire 29 rue du Haut-Bourgeois 54000 NANCY

• Espace Pelletier - Musée de la Coutellerie 17, rue du Maréchal de Lattre de Tassigny 52800 NOGENT

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 118 • Greffe du Tribunal de Commerce 1, quai Corse 75004 PARIS

• Greffe du Tribunal de Commerce 12, rue Commune de Paris 52100 SAINT-DIZIER

• GRETA Nord Haute-Marne Formation continue 13, rue Mauclère 52300 JOINVILLE

• Hôtel de Croisille Service Inspection des Monuments Historiques 12, rue du Parc Royal 75003 PARIS

• Institut National de la Propriété Industrielle Salle des marques 26bis, rue de St Petersbourg 75008 PARIS

• Lycée Biaise Pascal (Lycée Technique et Lycée Professionnel) 1, avenue Marcel Paul 52100 SAINT-DIZIER

• Musée de Saint-Dizier (documentation Musée) Place Aristide Briand 52100 SAINT-DIZIER

• Musée de l'Histoire du Fer Centre de Recherches de l'histoire de la sidérurgie Avenue du Général de Gaulle 54140 JARVILLE-LA-MALGRANGE

• Syndicat Général des Fondeurs de France et industries annexes 2, rue Bassano 75016 PARIS

• Syndicat des Fondeurs 15, boulevard Joffre 54000 NANCY

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 119 • Association "Les Compagnons de l'Histoire du Val d'Osne" 2, Grande Rue 52300 OSNE-LE-VAL contact : Mr Roger PIAULT

• Association "Les Compagnons de Saint-Pierre" 52220 SOMMEVOIRE contact : Mr Bruno DRIAT, Président

• Association pour la Sauvegarde et la Promotion du Patrimoine Métallurgique Haut- Marnais Mairie de Wassy 52130 WASSY contact : Mme Elisabeth ROBERT-DEHAULT, Présidente

• Terroir Wasseyen Hôtel de Ville 52130 WASSY

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 120 Articles de Presse

Période récente de 1985 à 1993

Répertoriés en 1993

Champagne-Dimanche - Une même famille aux fonderies de Brousseval pendant 150 ans 23.02.93

La Croix de la Haute-Marne - Les fonderies de Saint-Dizier rejoignent les échappés 17.07.93

L'Est Républicain - La Haute-Marne libérée

• L'effigie du Général de Gaulle coulée à la GHM 19.06.85

- La plaque de Notre-Dame de Châtel remplacée - Osne-le-Val 22.05.86 - 160 suppressions d'emploi dans les 3 usines de GHM 09.07.86 - Union et mobilisation syndicales avec des risques d'explosion -GHM 10.07.86 - Dommartin, 32 licenciements aux Fonderies du Blaisois 20.11.87 - Les lions, Dommartin 03.10.88 - Coulée officielle aux Fonderies du Blaisois 24.11.88 - Allichamps : la devise du patron : Pianissimo 05.02.89 - La fonderie Viry à Allichamps ferme ses portes 11.08.90 - Brousseval, le pays a toujours vécu autour de son usine 21.02.91 - Osne-le-Val prépare son renouveau 13.06.91 - Vent de jeunesse sur les fonderies de Dommartin 06.06.91 - Fermeture des fonderies du vallage 20.06.92 - 21 personnes employées à la nouvelle fonderie de Chevillon 14.10.92 - Fonderie du vallage, la reconversion est un succès 19.10.92 - Les fonderies de Saint-Dizier misent sur l'électricité 09.01.93 - Latrecey (Minerai de fer) 16.01.93 - Dépôt de bilan des fonderies du Blaisois 20.01.93 - Le Val d'Osne, protection du site 26.01.93

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 121 Le Val d'Osne, marque désormais déposée 08.02.93 Dommartin : pèlerinage métallurgique d'une mémoire ouvrière 02.03.93 Sommevoire : contrat de partenariat signé entre la GHM et le Collège de Colombey 02.03.93 Wassy, solidarité et dignité chez les mutilés du travail 14.03.93 Chevillon : collège René-Rollin (Val d'Osne) 16.05.93 Foire du triangle "la route du fer" 08.05.93 Métallurgie Haute-Marne prend le relais (Nogent) 08.05.93 Projet d'IUT industriel menacé (Saint-Dizier) 28.05.93 La vie d'un village du barrois dans les années 20 08.06.93 Meilleurs apprentis de Haute-Marne 08.06.93 Les forges Grolaire, 1/2 siècle de savoir-faire 09.06.93 Hachette et Driout : Franc succès des portes ouvertes 10.06.93 Hélène ou 30 ans à l'ombre d'un maître de forges 22.06.93 Dommartin : la commune rachète l'ancienne fonderie 23.06.93 Dommartin : exposition : "du taque au taque" 18.07.93 Estivale du Val d'Osne 17.07.93 Inquiétude chez les cadres de la métallurgie 17.07.93 Mémoire de fonte ou la renaissance des ateliers du Val d'Osne 27.07.93 Restauration des anges bénitiers, église Voillecombe, Sommevoire 30.07.93 Fontaines à Chaumont 03.08.93 Rentrée sans fanfare 08.09.93 Les enfants ouvrent la porte des journées du patrimoine 18.09.93 Pluie de médailles chez Hachette et Driout 19.09.93 La fonte, vedette du patrimoine 19.09.93 Des statues, une renommée des souvenirs 19.09.93 Fontaines, témoins du passé 05.10.93 Brousseval 21.11.93

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 122 Le Monde - Mobilier urbain, les artistes du candélabre 28.02.93

La Nouvelle République du Centre-Ouest • Chartreux et Chartreuse, maîtres de forges 24.08.93

Le Parisien • La France a mauvaise mine 01.08.93

Sud-Ouest Dimanche • Bicentenaire des Girondins, un long oubli tranquille 30.05.93

L'Union - Les fonderies de Brousseval sorte du rouge 1991

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 ¡23 INFORMATEURS

Site de Brousscval

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Fonderies de Dommartin - Informateur 1 mouleur Brousseval et retraité Marcel OTTO de Saint-Dizier

Informateur 2 ajusteur Brousseval retraité Marcel ROBERT

Informateur 3 modeleur Brousseval retraité Georges MOITE

Informateur 4 mouleur Brousseval retraité Marcel COTTON préparateur sable

mouleur Informateur 5 chef d'équipe Brousseval retraité Gilles BIENAIMÉ moulage

mouleur Informateur 6 contremaître Brousseval retraité Maurice JUILLY moulage

Informateur 7 mouleur Brousseval Fonderies de Jolnville retraité Jean THENOT noyauteur

Fonderies de Informateur 8 Allichamps mouleur Brousseval retraité Bernard Bayard LOUCHENIQUE GHM Wassy

Informateur 9 ajusteur Brousseval retraitée Marc HERITIER contremaître

Informateur 10 directeur fonderie Brousseval retraité Jean-Yves SOMBORN descendants de : Informateur 11 Mr Georges Mr et Mme FESTUGIERE, , Brousseval BALLIF propriétaire de la , retraités fonderie de Brousseval de 1859¡ à 1910 ;

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars ¡994 124 INFORMATEURS

Site de Dommartin-le-Franc

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Informateur 1 mouleur Dommartin-le- retraité Maurice Franc GRIGNON

Informateur 2 mouleur Dommartin-le- SIMA Saint-Dizler retraité Robert Franc CONSIGNY

Informateur 3 mouleur Dommartin-le- retraité James MICHEL Franc

Informateur 4 Dommartin-le- retraité Armand modeleur Franc MOUCHOTTE

Informateur 5 directeur Dommartin-le- retraité Jean COEFFIER Franc

Présidente de l'ASPM Informateur 6 Elisabeth ROBERT- DEHAULT

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 125 INFORMATEURS

Site de Sommevoire

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- Informateur 1 ciseleur Sommevoire retraité Paul LINARD

mouleur Informateur 2 chef d'équipe Sommevoire GHM Wassy retraité Albert contremaître MERTRUD moulage

Informateur 3 mouleur Sommevoire Dommartin retraité Fernand GRIGNON modeleur Informateur 4 contremaître Sommevoire retraité Léon KORONO modelage

mouleur contremaître Informateur 5 contremaître Sommevoire moulage GHM Robert moulage Sommevoire GEORGE I mouleur Informateur 6 plaquiste Sommevoire atelier de moulage-main "Coco" i de Sommevoire i

Informateur 7 mouleur Sommevoire atelier de moulage-main Jeune de 27 ans ornement de Sommevoire

Informateur 8 mouleur Sommevoire atelier de moulage-main Mr AUBERTIN de Sommevoire

responsable ! Informateur 8 administrationdes ! _ GHM Sommevoire Sommevoire Mr BOUVRET ventes ¡

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Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne • Rapport Final - Mars 1994 126 INFORMATEURS

Site du Val d'Osne

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Informateur 1 préparateur du Val d'Osne retraité René LECLERC cubilot

Informateur 2 décocheur cubilot noyauteur Val d'Osne Eric LECLERC GHM Wassy GHM Wassy

Informateur 3 ajusteur Val d'Osne retraité Pierre MILLET

Informateur 4 modeleur diverses entreprises mouleur Val d'Osne André GALICHET mouleur région parisienne GHM Wassy

ajusteur Informateur 5 tourneur Val d'Osne retraité Jean CLAVOIN responsable outillage modeleur Informateur 6 création d'un atelier de contremaître Val d'Osne retraité Roger PI AU LT chef de fabrication modelage

modeleur agent de maîtrise Informateur 7 mouleur Val d'Osne GHM Henri PEPIN agent de maîtrise Sommevoire

Informateur 8 mouleur Val d'Osne retraité Auguste magasinier RENEAUX

Informateur 9 ébarbage Val d'Osne noyauteuse Isabelle Wassy LECLERC Abbé qui dans les années 50 a fait construire une chapelle et un terrain de Informateur 10 basket sur le site du Val d'Osne. Il fut à l'origine de nombreuses manifestations, Abbé Raymond kermesse, fêtes religieuses... de STERKE

Informateur 11 Mr et Mme collectionneur de cartes postales anciennes sur Osne-le-Val et le Val d'Osne REGNAULT

Informateur 12 Rose PEPIN Fille, femme, mère de mouleurs - Val d'Osne

Président Informateur 13 association mouleur Osne-le-Val Mr et Mme Compagnon de Wassy MICHEL l'Histoire

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 127 INFORMATEURS

Informateurs divers

Mr Jean-Claude DURAND Directeur des Fonderies de Joinville

Mr SERBONT - Mr THIEIRIOT Directeurs atelier de modelage

Mr et Mme GODART Habitants du Rongeant depuis 1948

Mme LODS Habitante du Rongeant possède quelques documents de son oncle, ancien mouleur au Rongeant.

Mission "Fonte et Fonderies" en Haute-Marne - Rapport Final - Mars 1994 128