L'âge D'or Du Maurrassisme
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Jacques Paugam est né en 1944 à Quimper. De son père avocat, il hérite très tôt du goût des études juridiques et historiques. A vingt ans il sort de l'Institut des Sciences Politiques et obtient ensuite, avec brio, le titre de docteur en Droit. Il tra- vaille actuellement dans le mar- keting et la publicité, 'tandis que paraît cette étude critique du Maurrassisme, il achève son premier roman. JACQUES PAUGAM L'AGE D'OR DU MAURRASSISM] essai Adressez-nous vos nom et adresse en citant ce livre et nous nous ferons un plaisir de vous faire parvenir gracieusement et régulièrement notre bulletin littéraire qui vous tiendra au courant de toutes nos publications nouvelles. Diffusion DENOËL 14, rue Amélie, Paris-7' L'AGE D'OR DU MAURRASSISME JACQUES PAUGAM L'AGE D'OR DU MAURRASSISME essai PRÉFACE DE JEAN-JACQUES CHEVALIER DENOËL @ 1971, by Editions Denoël, Paris T. à Pierre Cozanet PRÉFACE Voici plus d'un demi-siècle, le grand critique Albert Thibau- det consacrait aux Idées de Charles Maurras un ouvrage débor- dant de vues suggestives et séduisantes. Toutefois le recul manquait : en 1920 le mouvement dit d'Action française, dominé par l'impérieuse dialectique maurrassienne, n'était pas encore entré dans l'Histoire, il s'en fallait de vingt-cinq années. Quand l'historien américain Eugen Weber s'attelle à la compo- sition de l'étude fondamentale intitulée L'Action française, qui parait en 1962 dans sa traduction en notre langue, il a ce recul nécessaire. Mais après lui il y a encore place pour une analyse fouillée du maurrassisme en tant que philosophie politique. C'est cette analyse que nous donne aujourd'hui Jacques Paugam. Il nous la donne selon une certaine perspective, pour laquelle il a opté en toute connaissance de cause, et que le titre même de son ouvrage met en relief : L'âge d'or du maurrassisme. Cet âge d'or, il le situe entre 1899, date de la création de la Revue d'Action française, et 1908, date de lancement du journal quotidien appelé au retentissement que l'on sait. Voilà une posi- tion apparemment paradoxale, s'il est vrai que le grand succès du mouvement néo-monarchiste est lié à celui du journal et que, par ailleurs, le mouvement a connu sa plus vaste audience entre , 1919 et 1926, date de la condamnation pontificale. Mais J. Pau- i gam tient que ce sont là phénomènes de surface auxquels l'his- toire intellectuelle ne doit pas s'asservir et que les huit années dont il s'agit furent celles d'une création doctrinale authentique, où ton vit présenter les théories « les plus dynamiques, les plus anticonformistes et de nature souvent très moderne », où le haut niveau intellectuel de la Revue ne s'est jamais démenti. Si bien que c'est une exégèse aussi complète que possible des textes parus dans cette revue qui peut le mieux permettre une ana- lyse valable du maurrassisme, « c'est là, dans le dédale des réac- tions spontanées, que l'on découvre l'essentiel du legs de Maur- ras et de ceux qui étaient alors ses jeunes compagnons, les Moreau, les Rivain, les Dimier, ou les Valois ». Une exégèse aussi complète que possible... et assortie d'autant de citations que possible, afin de ne rien laisser échapper des nuances d'une pensée qu'à distance on se figure beaucoup plus monolithique qu'elle ne le fut réellement. Une pensée confrontée au cours de ces huit années à toutes sortes de problèmes aigus d'ordre intérieur et international, reli- gieux, économique et social. Une pensée dont le haut niveau ne peut être que maintenu et garanti par la création, en février 1905, de l'Institut d'Action française, ce véritable défi lancé à l'Université de la République, à la Sorbonne, servante de la Révolution, contre laquelle il s'agit de dresser l'intelligence nationale, la vraie raison et la science, notamment la science politique : les noms des chaires prévues sont symboliques (chaire du Syllabus, chaire Auguste Comte, chaire Maurice Barrès, chaire Sainte-Beuve, chaire Rivarol, chaire La Tour du Pin). jMais la création, dans le même temps, de la Ligue d'Action française, organe de propagande et de combat extra-parlemen- taire contre « tout régime républicain », dont chaque membre s'engage à servir « par tous les moyens » l'œuvre de la restau- ration monarchique, va dans un sens forcément assez différent : celui de la schématisation et de la simplification des thèses. Les nuances sont écartées. Les chefs, tenus par les impératifs de l'action, devront se résigner, sans en être dupes au moins pour commencer, à une expression « primaire » de la doctrine. Pour la première fois apparaît, au jugement motivé de J. Paugam, « un hiatus flagrant entre ce qui se pense et ce qui se dit, ce qui n'était pas jusque-là une caractéristique de la Revue et qui ne manquera pas d'avoir de graves conséquences dans la vie ulté- rieure du mouvement ». Cependant que le lancement, en 1908, d'un quotidien qui vise à toucher l'ensemble des classes moyen- nés se conciliera assez peu avec les appels à de profondes ( réformes sociales. i Ce pourquoi précisément, selon l'auteur du présent ouvrageP rage d'or du maurrassisme sera terminé. Jusque-là la nature de la clientèle venue spontanément vers l'Action française ne ren- dait pas encore illusoire « tout effort auprès des milieux popu- laires ainsi que toute recherche théorique dynamique » ; et les ambitions du mouvement ne manquaient pas d'une certaine crédibilité politique. Que J. Paugam entend-il exactement par cette heureuse expression? Est-ce donc que la restauration monarchique eût été alors de l'ordre du possible ? Ce n'est pas ce qu'il veut dire. Il a en vue une autre possibilité, bien différente : ce qui est alors crédible, écrit-il, c'est que l'Action française devienne rapidement la principale force d'opposition, vigoureuse et réformatrice. Et d'admettre d'ailleurs què cette crédibilité s'est bientôt évanouie, la clientèle se figeant en des « bataillons de conservateurs mécontents », la doctrine devenant de cons- tructive « une sorte de nationalisme protestataire et craintif, ; dominé par le thème étriqué de /a défense de l'ordre ». —* Je suis moins convaincu que l'auteur de cette crédibilité. Mais je conviens qu'il a su tirer grand parti de ce que j'appellerai l'hypothèse de travail par lui adoptée, qu'elle lui a permis de concentrer son attention d'analyste du maurrassisme sur l'es- sentiel, comme il dit, du legs de Maurras, au-delà de l'acci- dentel et du contingent — sur l'enrichissement durable apporté à la pensée politique, à travers le mouvement qu'il a animé et incarné, par un homme en lequel J. Paugam voit à la fois un mal-aimé et un mal-compris; dont le portrait, intellectuel et 1 moral aurait besoin d'être « démythifié », selon le jargon bar- J bare de nos jours. Maurras, dit-il, en conclusion, « n'était pas fait pour être un chef de parti et quand certains des plus bril- lants esprits de son temps ont cherché des leçons auprès de lui, Ils ont su ne retenir, dans la dualité du niveau de la réflexion de l'Action française que Von a souvent mise en relief dans cette étude, que ce qui en constituait r essence, bien au-delà des préoc- cupations partisanes, souvent terre à terre et mesquines ; ils ont su discerner la valeur du philosophe, même s'ils ont refusé le faiseur de systèmes ». Ce qui est dire que (là valeur et 1 l'ampleur de tinfluence exercée par Maurras ne se peuvent mesurer qu'à partir de ce que J. Paugam nomme une sorte de décantation de l'apport doctrinal du maurrassisme. Décantation à laquelle, avec patience, avec conscience, avec talent et non sans une sourde passion, il a donc voulu procéder, pour le plus grand profit du lecteur, dans le présent ouvrage, sur la base des textes que lui a fournis la Revue au cours des huit années que l'on sait. Parmi ces textes, on retiendra particulièrement Dictateur et Roi d'août 1903, Kiel et Tanger de 1905, la Réponse au Cor- respondant de février 1908 : soit un texte capital sur la monar- chie de demain, un essai de définition de la politique étrangère valable pour la France, une auto-justification des positions maurrassiennes vis-à-vis de la morale, de la foi catholique et de l'Eglise. Dictateur et Roi, qui, tout en n'étant qu'une ébauche, ne fait pas double emploi avec la fameuse Enquête sur la Monar- chie, fixe les contours des mesures de police à prendre en cas de restauration, mais constitue de plus, selon J. Paugam, l'expres- sion la plus dense et la plus concise de la conception maurras- sienne du pouvoir politique : l'autorité reconstituée au sommet de l'Etat, lequel a son libre jeu, délivré qu'il est des compétitions des partis, des assemblées et des caprices électoraux ; le Roi, chef de l'Etat, qui règne et qui gouverne, et dont « l'arbitraire conscient, légal et responsable, assurera l'unité, la constance, la permanence des desseins, moyennant l'assistance des hommes compétents, siégeant dans les conseils techniques comme dans les assemblées locales » — Kiel et Tanger, où l'on n'a vu le plus souvent que le bilan critique de la politique menée par deux ministres des affaires étrangères successifs, Hanotaux et Delcassé, mais où J. Paugam voit, et a raison de voir, encore autre chose : une ébauche de ce que pourrait être une diploma- tie française dans le monde du xxe siècle, en fonction du rôle qui devrait être dans un tel monde celui de la France.