Les Quatre Fils Aymon
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f £ LES QUATRE FILS AYMO1 PAR AUGUSTE LONONON (EXTRAIT DE LA REVUE DES QUESTIONS HISTORIQUES. - JAt4VIER 1879.) PARIS VIOTOS PS.t.MÉ, r.InRstR] - 25, RUE DE GRENELLE SAINT-GERMAIN, 25 1879 t- Document II I II lI III IIIII III 0000005548699 j R u i1Ês QUATRE FILS AYMON Il nest pas un seul de nos romans de chevalerie dont la des- tinée en Fiance soit comparable à celle des Quatre fils Aymon. Aucune de nos vieilles traditions épiques, sans en excepter la mort de Roland, na conservé jusquà nos jours un caractère aussi réellement populaire que lhistoire de Renaud de Montau- ban et de ses frères. Les quatre fils Aymon et Buon de Bordeaux sont les deux seuls romans du cycle carolingien que lon retrouve dans la littérature du colportage, mais le premier seul est adopté par limagerie populaire. La pôpularité plus grande aussi des Quatre fils Aymon durant les derniers siècles du moyen âge résulte de ce fait quil nétait point alors de ville , importante, au moins dans la France du nord, où lon ne vit, à- cetteépo- que, quelque maison à lenseigne des Quatre fils Aymon , enseigne dont le souvenir sest perpétué plus ,dune fois jusquà nos jours dans tin nom de rue 2 ; tandis quaucune image de même genre ne rappelait peut-être journellement à nos ancê- tres la mémoire de Roland, dOgier le Danois, de Guillaume au Court-Nez, de Girard de Roussillon, de Huon de Bordeaux et des autres pieux chantés dans les poèmes du moyen âge. Cette popularité est si grande, si incontestable, que lhomme 1 Lfene,eigne des Quatre fils Aymon joue le principal rôle dans une facétie p arisiennb (lu xv siècle intitulée Lesfraternent du mariage des 1111 fils Hemon où les enseignes de plusieurs hosteis de la ville de Paris sont nommés, et publiée par Jubinal (»stères inédits, t. 1 1 p, 3(39-376). £ La rue (les Quatre Fils, à Paris, est nommée ainsi par abréviation pour orue des Quatre fils Aymon» (JaillOt,ReClle,Ches sur Paris,quartier du Temple, p 13-14). Orléans possède aussi sa rue des Quatre fils Aymon; Chlons-sur- Marne la encore, à moins que la municipalité nait remplacé cet ancien voca- ble par celui dun grand homme châlonnais, peu connu môme à châlons; etc. AYMON. -. •rtc&E. • OTHE -4- véritablement soucieux de nos anciennes traditions se résout seulement avec peine à ne trouver dhistorique dans toute lhis- toire des Quatre fils Aymon que le grand nom de Charlemagne encore doit-il reconnaître que le rôle joué ici par le restaurateur de lempire dOccident, qui use une partie de son existence à combattre des vassaux rebelles, na rien de conforme à la vérité histofique: Les. efforts de j.la critique pour déterminer le milieu où oui técù les quatre fils dAmon nont, au reste, pas eti jus- quici de meilleur résultat que les investigations des simples amateurs ; cest ce qui nous a déterminé à présenter au public le résultat de quelques recherches nouvelles sur la plus fameuse de nos traditions épiques. La lgendê des Quatre fils Aymon est trop connue pour que nous en rappelions ici autre chose que la trame, à laide de la plus ancienne version quon en connaisse, cest-à-dire dune chanson de geste de la première moitié du xni° siècle qui a pou 'titre limant de Montauban.. Renaud, Alard, Guichurd et Richard, les quatre fils du duc Aymon, sont armés chevaliers par le roi. Mais au milieu des fêtes de la cour impériale. Renaud est à la fois injurié et frappé par un des neveux de Charlemagne,Bertolai, avec lequel il• joue aux échecs. Il demande: justice au roi celui-ci le rudoie, et le nouveau chevalier, furieux de ce déni de justice, rappelle le meurtre de son oncle, le ddc Beuvon dAigrcmont, tué par trahison avec le consentement du roi ; il frappe en outre Berto lai si rudement avec léchiquier quil létend roide mort. Les fils dAymon séchappent ensuite du palais impérial ils vont chercher une retraite dans les solitudes de la forêt des Arden- nes, et sy construisent un château sur une hauteur qui domine la Meuse. Les 4000 premier vers de Renaut de Monauan ont été publiés en 1861 par M P. Tarbé sous ce titre Le Roman des quatre fils Ayrnon, prince des Ardennes g le volume qui les renferme forme le 18 de la Collection des poètes de Champagne antérieurs au Xvle siècle.—Le texte complet du poème, comprenant plus de. 17,000 vers, a été mis au jour lannée suivante par M. Henri Miohelaut, dont le Renan.s- de A[outrruban ode, die Haimonskinder, &tfranzœsi.whes Gedieht,forine le tome L-XVII de la Bibliolhe? des litterarischen Vc,eins in Stûttgart g une autre édition de ce même poème est sous presse depuis de longues années pour la Collection des anciens poètes de la France. -5.---- Durant cinq années, Renaud et ses frères ont pu se dérober aux recherches de Charles, mais un persbnnage de la cour, Guy dAubefort, a découvert leur refuge au retour dun pèleri- nage au tombeau de saint Remacle.Il en avertit le roi, et les fils dAymon sont bientôt assiégés dans leur château de Montes- sûr quils sont obligés dabandonner après quun traître Veut livré aux flammes. Les fils dÀymon, suivis de quelques compagnons fidèles, sont voués alors à une vie de brigandage, harcelés par les gens de Charles et surtout par leur père qui veut les livrer à lempereur. Selon le poète du xiii0 siècle, ils mènent alors une vie misérable dans la forêt des Ardennes, réduits quils sont à boire leau des fontaines ou des ruisseaux et à vivre dherbes ou de racines, car la chasse ne leur fournit pas uné alimentation suffisante mais le tableau de leur misère, qui occupe seulement quelques vers de Renaut de fifontauban, parait avoir pour but dapitoyer lau- ditoire du xin° siècle sur le sort des quatre fugitifs. Les vers qui suivent immédiatement montrent, tout au contraire, les fils dAymon dévastant, jusquà la Seine et même jusquà la Loire, le.pays que la terreur quils inspirent rend bientôt désert Or empires Ii regnes, durement est gastés; De Senlis à Orliens péust-on catie alés Et dilluec à Paris arriere retornés Et (le Laon à Raina, pAr toutes les cités, Ni trovissiés nul home qui de morte fust nés, Teint par estoit Renaus cremus et redoutés. Savent a, oses freres, les François revisdés. Et cette donnée sur le genre tic vie que menaient les quatre frères est corroborée par les reproches que le trouvère met dan la bouche du duc Aymon, lorsque celui-ci rencontre ses fils dans son propre palais où ils sont venus implorer la piété ma- ternelle Or surfi Ii. nu. freres cl palais de Dordon. Entraus et loi bon pore commence In tençon: Li viellars les a mis fierement à raison. \allés, cil vos confonde qui sofri passion, Que quesistes -vers moi, quant bien ne vos foi-on? Renaus de Jl-îontanbau, édition Mielielant, p. 85. -. On ne trouvera pas dans lanalyse qui suit le résumé de la première branche (lu Renaut (p. I à 45), parce que les fils dAymon ne figurent pas dans cette partie du poème qui, originairement, devait faire une changea complètement indépendante sous le titre de fleuron dAigremont. -6- - Je ne vos pris lot. ini.-waillant . i. esperon. Noirs et -velus vos voi, bien resamblés gaignon. Quel guerre faites vos lempereor Karlon? Ne trovés en sa terre, dont praigniés roençon, Chevalier ne sergent, dont niés garison? Nestes pas chevalier, ençois estes garçon. Ja trovés -vos assés gent de religion, Clers et prestres et moines de grant anison, Ki sont blanc soc les costes et ont blanc e guiton; En cler saïm lor gissent li foie et li poumon. Et si ont les chars tendres, si ont gras le roignon Mioldres sont à tuangier que eisne ne poon. Brisiés les aboies etfroisiés à bandon. Ki dei sien vos donra, si li faites pardon; Et qui net vodra faire, mai- aura raençon. Cuisiés les et mengiés en feu et û.eharben; Ja ne vos feront mal niant pins que venison. Daine Deu me confonde, qui vint à passion, Se ençois nes niengoie que de faim inoruson. Miodres est moins en rost pie nest car de mouton. Issiés fors de ma sale, ividies moi mon donjon; Car ja nnurés ciel mien vaillant . t. esperon. i Car à ces reproches et à ces étranges conseils, Renaud nop- pose pas de sérieuses dénégations Sire, ce dist Renaus, vos dites que mous hom. Tant en avens oeis, le conte nen savom. Ja Dame Dec ne pince que nos noaus façon. 2 Quoi quil en soit, les fils dAymen sont las de lexistence quils mènent depuis leur sortie du château de Montessor; leur mère les reçoit à bras ouverts ; elle leur donne des vêtements, des ar- mes, des chevaux, de lor et de largent en quantité, et ils partent du palais paternel, en compagnie de 700 hommes armés pour chercher fortune hors des états de leur mortel ennemi, leme- reur Charlemage. Cest de lautre côté de la Loire, chez le roi de Gascogne Yon, que les quatre frères dirigent leurs pas ; Maugis, leur cousin, aussi fameux larron que savant nécromancien, unit dès lors sa .Renaas de Montauban, édit. Miehelant, p. 93. 2 lMd.,p.93. Ce personnage est nommé À,naflgsî aussi souvent que la mesure du vers le permet et cest mas doute 1k la forme originelle du nom de Maugis, de môme quAnzaary est celle du nom Ma.ury. Ainsi, Maugis dériverait du nom germanique que les auteurs latins notaient Arna1gsus et non de celui quils écrivaient 3fadalpi3us.