HUIT SIÈCLES D'HISTOIRE Une histoire du Louvre par la peinture et la photographie : des Très Riches Heures de Jean de Berry aux grands travaux dirigés par l'architecte Ieoh Ming Peï. Forteresse sous Philippe Auguste, château royal à partir de Charles V, le Louvre est reconstruit sous François Ier, puis il devient musée en 1793. Rénové, agrandi, restauré, en 1993 le Grand Louvre est ouvert au public. LE PLUS GRAND MUSÉE DU MONDE Un florilège des chefs-d'oeuvre du Louvre : les Antiquités, la Sculpture, la Peinture française, la Peinture européenne, les Arts graphiques, les Objets d'art, les Arts premiers. Des premières collections royales, constituées à la fin du xv siècle, jusqu'aux grandes politiques d'acquisition et de mécénat initiées par Louis XIV et poursuivies par tous les souverains et gouvernements, le Grand Louvre conserve aujourd'hui les plus précieux chefs-d'œuvre de l'art. VISITER LE GRAND LOUVRE La localisation des départements, les plans des salles et un guide pratique pour bien visiter le Musée du Louvre. I" DE COUVERTURE : GEORGES DE LA TOUR Le tricheur à l'as de carreau (détail). Photographie R.M.N. - Gérard Blot. 4" DE COUVERTURE : Vue extérieure de la Pyramide et de l'aile Richelieu Photographie R.M.N. - Gérard Blot. Le Grand Louvre Alain Nave Le Grand Louvre Éditions Saint-André-des-Arts De la forteresse de Philippe Auguste à l'inauguration du « plus grand musée du monde », durant huit siècles, le Louvre aura été une affaire d'État. En trois mots, l'architecte Ieoh Ming Peï, à qui furent confiés les travaux du Grand Louvre, en 1983, résumait la complexité de la tâche : « C'est un musée, un palais, un monument. » Un monument se conserve en l'état, avec ses strates successives. Alors, définitivement figé, le monument résiste à toute autre fonction. Un palais se visite en l'état, avec ses architectures et ses décors successifs ; mais, comme la femme de Loth fut changée En frontispice en statue parce qu'elle tournait son regard vers Sodome, à trop regarder l'Histoire Cour Napoléon, les palais se pétrifient. Un musée expose, mais il lui faut le consentement statue équestre du monument et du palais. de Louis XIV Longtemps, le respect du lieu a servi à justifier l'immobilisme. Et si le Louvre redevient Copie en plomb de la statue équestre de un espace vivant, c'est sans doute que fondre dans le Grand Louvre cette trinité Louis XIV réalisée par monument-palais-musée n'est plus considéré comme une gageure, mais comme Le Bernin en 1674, puis transformée en « Marcus une exigence. Curtius se jetant dans les Le monument restauré existe donc aujourd'hui dans son unité, mais aussi dans un flammes » par François Girardon, en 1687. environnement spatial qui accompagne, entre la Cour carrée et la Concorde, la légère Cette transformation avait courbe de la Seine, et s'inscrit dans la plus majestueuse perspective du monde. Ieoh Ming été acceptée par le roi, déçu de l'œuvre du Bernin, Peï déclarait : « Toutes les grandes idées sont simples... » Et cette perspective est tout au comme nous le rapporte long ponctuée de formes géométriques simples : le carré de la première cour du Louvre, le marquis de Dangeau dans son Journal : « Mer- la pyramide et l'arc — celui du Carrousel —, enfin l'obélisque de la Concorde, l'arc credi 14 [novembre 1685], encore — celui de l'Etoile — et au-delà l'immense et léger cube de l'arche de la Défense. à Versailles. — Le Roi se promena dans l'Orangerie Le musée existe sans nuire au palais. Dans ses appartements d'été, l'ornementation qu'il trouva d'une magnifi- peinte et stuquée voulue par Anne d'Autriche, abrite des collections de statuaire cence admirable ; il vit la statue équestre du chevalier romaine : leur confrontation ne nous rend que plus attentifs au sentiment que Bernin qu'on y a placée le XVIIe siècle pouvait éprouver à l'égard des antiques. Ainsi, la liste serait longue et trouva que l'homme et le cheval étaient si mal à dresser de ces échanges bénéfiques entre les œuvres et leur décor : de la salle faits qu'il résolut non seu- des Caryatides à la Grande Galerie, des salles Charles X du « musée égyptien » lement de l'ôter de là mais même de la faire briser. » aux salons du duc de Morny, ultime clin d'œil à un Second Empire dont les trésors artistiques se trouvent désormais au musée d'Orsay, mais qui a vu s'accomplir le rêve 0 1997, 1998, 2002, d'Henri IV : relier le palais du Louvre à celui des Tuileries. Société nouvelle Adam Biro, Lhistoire du Louvre, c'est celle des collections, qui témoignent de la sensibilité 28, rue de Sévigné, des collectionneurs. À partir de la Révolution, l'histoire du Louvre deviendra aussi 75004 Paris. celle du musée au moment où une perception plus encyclopédique apparaît qui s'attache 1Ïdltlon réservée pour Maxi-Livres à illustrer l'aventure culturelle d'une période ou d'un pays, sans souci de préséance. www.maxi-livres.com Aujourd'hui, le Grand Louvre est un espace d'alchimies insoupçonnées : saveur et savoir ISBN: 2-74342-538-5 retrouvent leur étymologie commune, comme sous la Renaissance, au temps de Pierre Lescot à qui l'on doit la première façade du Louvre. Imprimé en Italie Huit siècles d'Histoire 7 Le plus grand Musée du Monde 35 Les Antiquités 41 La Sculpture 71 La Peinture française 87 La Peinture européenne 109 Les Arts graphiques 129 Les Objets d'art 137 Les Arts premiers 147 Les Départements et les collections du Musée du Louvre 155 Plans des salles du Musée du Louvre 156-157 Le Guide pratique 159 À la fin du XII' s., Paris n'est plus circonscrit à la seule île comme arsenal puis comme prison, sera jugée suffisam- de la Cité — la cÍvÍtas originelle — où était enchâssé le Palais ment sûre pour protéger le Trésor royal dès 1297. royal, où l'on bâtissait la cathédrale Notre-Dame. Du quartier des Halles aux pentes de la montagne Sainte- De la forteresse à la résidence royale Geneviève, une agglomération voit progressivement le jour, une ville nouvelle qui nécessite protection au Dès 1358, à l'instigation d'Étienne Marcel, prévôt des moment Ol1 le roi doit partir en croisade. marchands, la protection de Paris commence à être ren- forcée, principalement dans les zones de forte extension Le rempart et sa forteresse urbaine. Un nouveau rempart va se dresser sur la rive droite, qui s'étire de la porte Saint-Antoine - où Charles V Philippe Auguste va faire dresser une enceinte unissant fait construire la Bastille - à la porte Saint-Denis, puis les quartiers limitrophes des deux rivages de la Seine. redescend jusqu'à la Seine. À quelques centaines de mètres Commencés en du Louvre il longe enfin le fleuve pour rejoindre l'ancien 1190 par la rive rempart de Philippe Auguste. Située désormais à l'intérieur droite, les travaux de la ville, la forteresse ne joue plus un rôle véritablement qui s'achèvent en défensif. 1210 vont, certes, Charles V confie à Raymond du Temple, en 1360, le soin favoriser un pro- de transformer cette forteresse en résidence royale. Deux cessus d'urbanisa- ailes nouvelles sont construites, au nord et à l'est; les cour- tion intra-muros. tines sont surhaussées et couvertes de terrasses ; plusieurs Mais ces nou- escaliers à vis sont édifiés afin d'accéder plus commodé- veaux remparts, ment aux étages ; des tourelles sont élevées sur les tours et signe ostentatoire les façades percées de fenêtres à meneaux. Des apparte- d'un pouvoir tout ments sont aménagés et des corps de logis bâtis pour à la fois rayon- accueillir le souverain et sa cour. Le décor n'est pas oublié : nant, protecteur statues et reliefs muraux, girouettes et épis dorés sur les et protégé, mar- toits en poivrière... C'est ce nouveau château qui nous est Vestiges du donjon quent aussi, symboliquement, l'inexpugnabilité de la ville restitué sur une miniature des Très Riches Heures de Jean et des fossés du Louvre tout autant que celle de la royauté. De manière plus de Berry. médiéval immédiate, la construction se justifie par un contexte poli- Mais l'ampleur des travaux n'a pas raison des turpitudes tique dominé par les hostilités entre la France et la puis- guerrières, ni de l'inconstance des rois à l'égard de leur sance anglo-normande. L'objectif est de renforcer la demeure. Au Louvre ils préféreront l'hôtel Saint-Pol ou défense de Paris, notamment en aval de la Seine, là où l'en- celui des Tournelles, et plus encore la douceur du Val de nemi, à tout moment, peut arriver. C'est d'ailleurs la rai- Loire « et sa rive d'esmail, ses cousteaux de raisins, et de son pour laquelle on dote l'extérieur du rempart, à l'ouest, froment sa plaine », et pendant plus d'un siècle, le château au bord du fleuve, d'une forteresse : le Louvre. déserté redeviendra un arsenal et une prison. Implanté sur un site dont on explique mal l'étymologie — le mot « Louvre » viendrait probablement de Lupara, qui Du Louvre de François I désigne un chenil destiné à la chasse au loup —, l'édifice est aux Tuileries de Catherine de Médicis érigé de 1190 à 1202. Bénéficiant des progrès dans le domaine de l'architecture militaire, le Louvre de Philippe « Cognoissant notre chastel du Louvre estre un lieu plus Auguste est néanmoins bâti sur le principe des forteresses commode et à propos pour nous loger, a cette cause avons classiques.